République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 22 février 2008 à 17h
56e législature - 3e année - 5e session - 26e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de Mme Loly Bolay, présidente.
Assistent à la séance: MM. Pierre-François Unger, Charles Beer, François Longchamp et Mark Muller, conseillers d'Etat.
Exhortation
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat, David Hiler et Robert Cramer, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. David Amsler, Pablo Garcia, Philippe Guénat, Eric Ischi, Georges Letellier, Yves Nidegger et Véronique Pürro, députés.
Communications de la présidence
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai le plaisir de vous annoncer la naissance, le 14 février dernier, du bien nommé Richard Valentin, fils de Stéphane Florey. Félicitations à l'heureuse maman et à l'heureux papa ! (Applaudissements.)
Annonces et dépôts
Néant.
Interpellations urgentes écrites
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez trouvé sur vos places les interpellations urgentes écrites suivantes:
Interpellation urgente écrite de M. Michel Ducret : Inauguration de "carrés confessionnels": maladresse du Conseil administratif de la Ville de Genève ? (IUE 540)
Interpellation urgente écrite de M. Pierre Weiss : A quoi bon faire une loi sur l'affichage sauvage ? (IUE 541)
Interpellation urgente écrite de Mme Sylvia Leuenberger : Pics de pollution : quelles mesures urgentes possibles ? (IUE 542)
Interpellation urgente écrite de M. Olivier Jornot : Quelle sécurité pour les Genevois après la fin de la mission « AMBA CENTRO » ? (IUE 543)
Interpellation urgente écrite de M. Olivier Jornot : Accord de Schengen : quelle sécurité pour les Genevois ? (IUE 544)
Interpellation urgente écrite de Mme Laurence Fehlmann Rielle : Mesure de l'Office cantonal de l'emploi à l'encontre d'un certain nombre de chômeurs en fin de droit : déclaration d'inemployabilité (IUE 545)
Interpellation urgente écrite de M. Alain Charbonnier : Liste des logements vides : un tabou ? (IUE 546)
IUE 540 IUE 541 IUE 542 IUE 543 IUE 544 IUE 545 IUE 546
La présidente. Conformément à l'article 162D de notre règlement, le Conseil d'Etat, respectivement le conseiller d'Etat interpellé, répondra par écrit lors de la session suivante, à savoir celle de mars.
Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le cours de notre ordre du jour. (Mme Sandra Borgeaud interpelle la présidente.) Nous avons déjà passé le point 4, Madame ! Aucune demande de parole ne s'est affichée. (Mme Sandra Borgeaud insiste.) Non, je suis désolée, vous n'étiez pas inscrite ! J'ai regardé. Je suis désolée, c'est trop tard !
Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au point 31 de notre ordre du jour.
Débat
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que nous sommes en catégorie II et que vous avez droit à trois minutes de parole par groupe, plus trois minutes pour l'auteur de la motion, le premier signataire. Monsieur Eric Stauffer, je vous donne la parole.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, cette motion a été déposée le 30 octobre 2006, et nous sommes aujourd'hui le 22 février 2008... Il faut du temps pour qu'un projet soit traité en plénière !
Cette motion a été déposée avant que le Conseil d'Etat dépose un projet de loi pour la réforme de la loi sur le chômage. Malgré ce projet de loi, nous avons décidé - au Mouvement Citoyens Genevois - qu'elle était complémentaire à ce projet de loi et qu'elle pourrait encourager et renforcer l'action du Conseil d'Etat pour essayer d'endiguer le chômage à Genève.
De quoi s'agit-il, Mesdames et Messieurs les députés ? Eh bien, il s'agit de trouver des solutions pour réduire le nombre de chômeurs. Nous avons abordé longuement ce sujet hier, puisque le groupe PDC avait déposé un texte pour les chômeurs de plus 50 ans. Nous l'avons refusé parce que, précisément, on ne considérait qu'une catégorie des chômeurs. Or, comme nous l'avons relevé hier soir - d'autres groupes l'ont aussi dit - il faut considérer le problème du chômage dans son ensemble et essayer de trouver des solutions pour venir en aide à tous les chômeurs, qui ont perdu leur emploi soit pour des raisons économiques soit suite à une restructuration de l'entreprise.
Alors, pour cela, nous avons pensé donner une marche à suivre pour les entreprises qui chercheraient un employé. Je m'explique. Nous savons que depuis le 1er janvier 2002, suite aux accords de libre circulation, le marché de l'emploi s'est étendu à toute l'Europe, ce qui peut être une bonne chose. Nous - au Mouvement Citoyens Genevois - nous suggérons simplement que tout recrutement se fasse d'une manière contrôlée et de façon plus échelonnée dans le temps, comme les Accords bilatéraux I et II, qui fixaient un certain nombre de quotas augmentant chaque année. Cela permet d'exercer un certain contrôle et de ne pas ouvrir, d'un coup d'un seul, les vannes, ce qui risquerait d'engendrer un afflux massif de travailleurs, ce qui pourrait déstabiliser le marché de l'emploi.
Cette motion qui propose un Contrat Citoyen n'est pas restrictive pour le Conseil d'Etat. Elle invite simplement le Conseil d'Etat à essayer de trouver des solutions allant dans le sens des considérants. Et que proposent ces considérants ? Qu'une entreprise qui cherche un employé ou une employée, qualifiée ou non, devra respecter une marche à suivre. Elle devra d'abord demander à l'Office cantonal de l'emploi si un chômeur correspond au profil demandé. Si tel n'est pas le cas, l'entreprise pourra se tourner vers le marché local de l'emploi à Genève, c'est-à-dire passer par une agence de placement, temporaire ou fixe, pour rechercher le candidat souhaité - ou la candidate. Enfin, si elle ne le trouve toujours pas, elle pourra rechercher dans l'Europe entière un employé qui corresponde au profil demandé.
Cette motion n'est donc pas restrictive ni discriminatoire. Elle fixe juste une marche à suivre pour les employeurs à la recherche d'employés. Et les entreprises qui signeraient ce Contrat Citoyen avec l'Etat se verraient allégées de certaines charges fiscales comme la taxe professionnelle ou pourraient recevoir un bonus à l'engagement de chômeurs de longue durée comme c'est prévu, par exemple, pour les allocations de retour en emploi. En fait, Mesdames et Messieurs les députés, cette motion demande au Conseil d'Etat d'examiner ce qu'il y aurait lieu de faire et de nous rendre rapport dans les six mois pour savoir si c'est constitutionnellement acceptable, si ce n'est pas contraire au droit supérieur, et, surtout, si ce n'est pas discriminatoire. C'est à cela que sert une motion !
Nous vous demandons donc, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir soutenir cette motion ou, si vous n'êtes pas d'accord, à tout le moins de la renvoyer en commission, afin de l'améliorer, sachant que nous, les députés du MCG, comme ceux des autres partis, nous ne sommes pas parfaits... (Exclamations.) En tout cas, nous essayons d'oeuvrer pour endiguer le chômage. Quoi qu'il en soit, je trouverais désolant - certains groupes s'en sont déjà ouverts à moi - que l'on nous dise que la manière dont nous l'avons rédigée n'est pas acceptable, que la virgule devait être située avant le verbe ou après le paragraphe...
J'insiste: il ne faut pas sous-estimer le problème que représente le chômage à Genève. Si nous voulons être constructifs, nous devons montrer que nous sommes capables d'agir ensemble, en faisant abstraction des clivages politiques, c'est-à-dire qu'il serait regrettable de refuser une motion qui peut se révéler constructive, uniquement parce qu'elle est proposée par le MCG. Ce serait - je le relève surtout pour ceux qui s'y opposeraient - destructeur par rapport aux citoyens, qui, je vous le rappelle, sont aussi des électeurs. Je vous demande donc d'évoluer et de dépasser les clivages politiques en acceptant, au moins, d'étudier cette motion en commission. Et le mieux serait de la renvoyer au Conseil d'Etat pour qu'il nous rende un rapport - je le répète, cette motion n'est pas restrictive - dans les six mois.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je vous signale que vous avez parlé presque six minutes. Il ne reste donc presque rien pour le cas où un autre député de votre groupe voudrait prendre la parole. Par ailleurs, Monsieur le député, vous avez fait deux propositions. J'ai compris que vous vouliez d'abord renvoyer la motion à une commission...
M. Eric Stauffer. Non !
La présidente. Non ? Alors, au Conseil d'Etat ! (M. Eric Stauffer demande la parole.) Je vous la donne à nouveau, mais il ne vous reste que quelques secondes, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. A l'avenir, lorsque le temps de parole imparti - six minutes - doit être divisé en deux, je suggère que vous avertissiez l'orateur quand il s'est exprimé trois minutes ! (Rires. Exclamations.) Ou alors, nous devrons tous nous balader avec des chronomètres ! Il me semble que ce serait une bonne chose ! (Commentaires.) Je n'ai pas demandé...
La présidente. Monsieur le député, c'est terminé: vous êtes arrivé au terme de vos six minutes !
M. Eric Stauffer. J'aimerais simplement vous dire...
La présidente. J'ai bien compris, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. ...que je n'ai pas demandé...
La présidente. J'ai bien compris !
M. Eric Stauffer. Mais laissez-moi finir, Madame la présidente ! Je n'argumente pas sur la motion: je réponds seulement à votre question ! Je ne demande pas de renvoi en commission...
La présidente. J'ai bien compris: au Conseil d'Etat !
M. Eric Stauffer. Je préciserai à la fin des débats ce qu'il faut faire ! (Exclamations.)
La présidente. S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs les députés, un peu de silence ! Je salue à la tribune les membres de la Maison transfrontalière européenne qui viennent nous rendre visite afin de mieux se familiariser avec le fonctionnement de nos institutions. Je vous souhaite la bienvenue, Mesdames et Messieurs ! (Applaudissements.) Je passe maintenant la parole à M. Jornot, pour le groupe libéral.
M. Olivier Jornot (L). Il est difficile de calculer le temps qu'il nous reste pour nous exprimer, mais il est parfois également difficile de faire la différence entre les fausses bonnes idées et les vraies mauvaises... (Rires.)
Si on vous proposait aujourd'hui, par voie de motion, de taxer et de surtaxer les entreprises qui engagent des non-résidents, tout le monde s'accorderait pour dire que c'est une vraie mauvaise idée, contraire au droit, et que ce serait absolument inadmissible que d'introduire de telles discriminations. Entre autres, parce que nous avons voté les Accords bilatéraux, qui interdisent ce genre de choses, précisément pour créer un marché de l'emploi dans lequel il n'y aurait pas de discriminations.
Le Contrat Citoyen proposé par le MCG est une fausse bonne idée. C'est exactement la même chose: au lieu de taxer les entreprises qui engageraient des non-résidents, il propose d'exonérer d'impôt celles qui engageraient des chômeurs locaux. Il introduirait exactement la même discrimination ! Et, à ce titre, cette motion est contraire à tous les principes de droit possibles et imaginables ! En outre, il serait franchement nocif de chercher, par le biais d'un système de taxes, à ne pas bénéficier des bienfaits que nous avons voulus en acceptant les bilatérales, je pense notamment aux entreprises qui ont besoin de recruter des spécialistes à l'extérieur de notre canton dans tout un tas de domaines, aussi bien techniques que d'ingénierie financière, par exemple.
M. Stauffer nous a indiqué que cette motion avait été déposée avant le projet de loi du Conseil d'Etat et qu'il était vraiment désolé... Je suis navré, Monsieur Stauffer, mais vous êtes trompé dans les dates ! En effet, l'un des considérants de la motion dit, je cite: «que le projet de loi 9922 ne va pas dans le sens d'une telle politique», cela prouve bien que vous avez rédigé votre motion après ! Vous avez proposé ce Contrat Citoyen alors que le projet de loi du Conseil d'Etat - majeur - sur le chômage avait déjà été déposé ! Du reste, ce projet a été accepté entre-temps par une très large majorité des Genevois et aussi par votre parti, d'ailleurs. Ce projet propose une bonne politique de réinsertion des chômeurs: ce n'est pas le cas de ce Contrat Citoyen qui n'est qu'un gadget !
J'aimerais terminer, Mesdames et Messieurs les députés, en vous citant une phrase que je ne vais pas chercher bien loin... Elle figure dans l'exposé des motifs de l'objet suivant de l'ordre du jour, qui a été rédigé par quelqu'un qui connaît bien le MCG, puisqu'il l'a fondé: «Cessons de faire du populisme lamentable et au ras des pâquerettes !», fin de citation. (Rires.) Je vous invite à refuser cette motion. (Applaudissements.)
M. Gabriel Barrillier (R). Il n'est pas utile de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat pour faire une étude, notamment de conformité avec le droit supérieur ! C'est tout à fait clair: les Accords bilatéraux et les mesures d'accompagnement nous interdisent d'accepter cette motion ! C'est la première chose, nous pouvons économiser l'avis d'un juriste consulte très onéreux.
Ensuite, cette motion - je suis désolé de le dire - procède de votre méfiance viscérale, de ce refus, de ce déni de démocratie, que vous témoignez à l'égard des accords et, surtout, des décisions acceptées démocratiquement par le peuple suisse ! Les Accords bilatéraux ont fait l'objet de plusieurs votes, mais, une fois de plus, vous pensez pouvoir vous opposer à ces accords et aux décisions du peuple en présentant des motions tout à fait superfétatoires.
Enfin, dans vos invites, vous proposez un Contrat Citoyen réservé au secteur privé... Et vous avez annexé un modèle où je peux lire que: «L'entreprise s'engage à fournir, en tout temps et à première requête, tous documents en matière de recrutement de personnel, aux inspecteurs chargés de contrôler la bonne application du présent contrat...».
J'aimerais vous dire deux choses à ce propos, Monsieur Stauffer. La première, c'est que les entreprises et les employeurs ne sont pas des flibustiers et que, dans toute la mesure du possible, elles engagent des personnes du marché local. La deuxième, c'est que, quel que soit le système, ce n'est pas en mettant un gendarme dans chacune des entreprises que vous allez les inciter à se montrer plus dynamiques à ce niveau en engageant en priorité des personnes du marché local ! (Remarque de M. Eric Stauffer.) Les conventions collectives, elles, sont appliquées ! Votre proposition n'est donc pas pertinente, car elle implique une intervention massive de l'Etat dans la gestion des entreprises, et l'expérience montre que cela aboutit à l'effet inverse.
Nous refusons donc cette motion tout à fait superfétatoire.
M. François Thion (S). L'affaire des frontaliers est une chose sérieuse. Et cette motion n'est pas sérieuse !
Vous avez dû attendre: pas de chance ! Vous pensiez démontrer que le taux de chômage augmentait à Genève et que l'on engageait des frontaliers: désolé, le taux de chômage a baissé de 1% en une année ! (L'orateur est interpellé.) Derrière cela, le MCG nous sert toujours le même refrain, c'est-à-dire qu'il prône systématiquement une politique contre les frontaliers. Toutes les motions que vous avez présentées, que ce soit sur les transports, sur la circulation, sur l'emploi, vont dans ce sens ! Votre politique est essentiellement basée sur la peur que vous essayez de transmettre aux Genevois en leur disant que nous allons être envahis par les frontaliers !
C'est vrai, les choses changent avec les bilatérales... C'est vrai, le nombre des frontaliers augmente, mais les conventions collectives sont appliquées à Genève. Cela signifie qu'un entrepreneur, si les conventions collectives existent réellement, va engager un frontalier au même salaire; il va donc pouvoir engager les personnes les mieux formées.
Mais, sur la formation, sur l'école, le MCG ne dit rien depuis deux ans ! Pour lutter contre le chômage à Genève, il faut peut-être mettre l'accent sur l'école, sur la formation. Je le répète, vous n'avez jamais rien dit à ce sujet; vous n'avez jamais rien proposé, ni en commission ni en plénière !
Dans ce parlement, il y a deux partis populistes: l'UDC, qui fait son beurre en tapant sur les étrangers et en faisant peur aux gens en leur disant qu'ils vont être envahis par les étrangers, dans un canton où il y a 38 ou 40% d'étrangers; et puis, le MCG, qui base toutes ses campagnes contre les frontaliers. Ces deux partis populistes n'apportent rien à notre parlement !
Heureusement, les autres partis ont un sens de l'intérêt général, le sens du canton, et il faut rappeler qu'il faut considérer les problèmes au niveau de l'agglomération genevoise. La problématique des transports doit être envisagée globalement, au-delà de la frontière. C'est la même chose, pour ce qui est de la problématique des logements ou en matière de protection de l'environnement. Mais vous, au MCG, ce que vous voulez, c'est reconstruire des murailles autour de Genève pour empêcher les Savoyards d'entrer dans la ville ! Eh bien, nous les socialistes, nous refusons votre motion: elle ne nous intéresse pas ! (Applaudissements.)
M. Mario Cavaleri (PDC). Il est assez intéressant de noter, entre le discours d'hier soir et celui de ce soir, le virage à 180 degrés opéré par le groupe MCG... Vous me permettrez tout de même de vous faire remarquer, Monsieur Stauffer, que les propos que vous avez tenus hier soir, sur une motion présentée par le parti démocrate-chrétien, étaient totalement à l'opposé des principes que vous prônez ce soir par rapport à votre proposition de motion.
Eh bien, voyez-vous, j'abonde tout à fait dans le sens des propos tenus à l'instant par notre collègue M. Thion... Non, vous ne faites pas de la politique, vous polémiquez en permanence ! Et c'est regrettable, parce que nous constatons aujourd'hui - c'est d'ailleurs le constat qui a été posé hier soir - que tous dans ce parlement se sont accordés pour dire que, suite à la nouvelle loi sur le chômage, il fallait maintenant observer les effets des mesures qui ont précisément été introduites par cette nouvelle loi. Et vous auriez dû, comme nous aurions pu le faire nous-mêmes hier soir, retirer votre motion ! Parce que, en réalité qu'implique-t-elle ? Une ségrégation des travailleuses et des travailleurs ! Les bilatérales - M. Barrillier l'a du reste relevé très justement - sont une réalité politique acceptée par le peuple, mais, vous, vous ne l'acceptez pas ! C'est tout à fait antidémocratique !
Alors, vous qui vous vantez tellement et qui nous ressassez à longueur de session que vous êtes les seuls à défendre le bon peuple, la démocratie, eh bien, vous êtes vraiment très mal placés ! Vous êtes même complètement pris à défaut ce soir, parce que ce que vous nous proposez, c'est d'instaurer un système tout à fait ségrégationniste, non seulement au niveau des travailleuses et des travailleurs, mais aussi au niveau du peuple tout entier ! Vous faites deux catégories de citoyennes et de citoyens ! Un tel système aboutirait à des extrémités, que je ne voudrais pas, par respect, rappeler ce soir, mais qui nous ramèneraient à la moitié du siècle dernier !
Par conséquent, le groupe démocrate-chrétien refusera avec détermination cette proposition de motion ! (Applaudissements.)
Mme Brigitte Schneider-Bidaux (Ve). Je ne ferai pas très long, puisque tout a pratiquement été dit par rapport à cette motion, si ce n'est que nous faisons partie d'une région à cheval sur deux pays séparés par une frontière, et de nombreuses personnes viennent aussi du canton de Vaud. Nous ne pouvons pas faire de discrimination entre les uns et les autres. Les Verts refuseront donc cette motion.
M. Eric Bertinat (UDC). A la simple lecture des considérants, on se rend compte qu'ils sont totalement faux et que cette motion est complètement dépassée, ce qui s'explique puisque la motion a été déposée le 30 octobre 2006...
Le MCG déclare que le chômage ne cesse d'augmenter à Genève... Les chiffres indiquent exactement le contraire: il baisse ! Le MCG indique que le chômage ne peut être enrayé que par une réelle politique de l'embauche... Des allocations de retour à l'emploi ont été mises en place: c'est donc strictement l'inverse qui se passe ! Le MCG nous explique que le budget de l'Hospice général atteint des sommets inquiétants... C'est exactement le contraire, puisque le budget de l'Hospice général se stabilise ! On espère même le voir diminuer...
L'UDC ne va pas accepter cette motion, parce que la proposition du MGC est fondamentalement discriminatoire pour les Suisses, dans la mesure où il suffirait d'habiter à Genève pour bénéficier d'un Contrat Citoyen. Et les Suisses qui, eux, résident dans le canton de Vaud, dans le canton de Neuchâtel - bien des personnes viennent de ce canton - dans le canton du Valais, en France voisine, seraient totalement discriminés par le projet du MCG. C'est pourquoi l'UDC refusera cette motion.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Monsieur Rappaz, vous avez la parole. Il reste vingt secondes à votre groupe.
M. Henry Rappaz (MCG). Je serai très bref. En entendant le député Jornot dire que les Accords bilatéraux et les mesures d'accompagnement ont permis de recruter de la main-d'oeuvre nécessaire au canton, je m'insurge: c'est de la désinformation ! Ce qu'il ne dit pas, c'est que le dumping salarial empêche de nombreux travailleurs d'accéder à ces postes de travail, et dans des conditions salariales décentes ! C'est tout ce que j'avais à dire.
La présidente. Madame Borgeaud, vous avez la parole pendant une minute et demie.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Merci, Madame la présidente. Je serai très brève: «Le savant n'est pas l'homme qui fournit les réponses, c'est celui qui pose les vraies questions»... (Exclamations.)
Je citerai encore une phrase de M. Tristan Bernard, romancier: «L'homme n'est pas fait pour travailler et la preuve, c'est que cela le fatigue !». Tout est dit ! (Rires.)
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets le renvoi de cette proposition de motion au Conseil d'Etat.
M. Eric Stauffer. Renvoi en commission ! (Brouhaha.)
La présidente. Ceux qui sont d'accord avec cette proposition votent oui, les autres non ou s'abstiennent. Le vote est lancé. (Remarque de M. Eric Stauffer.)
Une voix. On t'a demandé, tu as dit non !
M. Eric Stauffer. J'ai dit que je demanderai à la fin !
Mise aux voix, la proposition de motion 1724 est rejetée par 67 non contre 7 oui et 1 abstention.
La présidente. Mesdames et Messieurs, nous allons... (M. Eric Stauffer interpelle la présidente.) Monsieur le député, vous avez fait deux propositions et, je suis navrée, vous n'avez pas la parole. (M. Eric Stauffer demande le renvoi en commission. Exclamations.) Vous n'avez plus la parole. C'est terminé ! Je vous ai posé la question: vous avez demandé le renvoi au Conseil d'Etat ! J'ai soumis cette proposition au vote de ce parlement, qui l'a refusée. Cette motion est rejetée ! (Applaudissements.)
Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que le point 32 de notre ordre du jour, proposition de motion 1742 de M. Georges Letellier, est reporté. Je saisis cette occasion pour souhaiter un prompt rétablissement à notre collègue Georges Letellier. Nous passons au point 33 de l'ordre du jour.
Débat
La présidente. Je vous rappelle que nous sommes toujours en catégorie II: trois minutes par groupe sont imparties. Monsieur Gillet, vous disposez de trois minutes, ensuite un député de votre groupe pourra encore s'exprimer trois minutes.
M. François Gillet (PDC). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, hier soir, nous avons abordé cette question du chômage et nous avons entendu à plusieurs reprises certains députés insister sur le problème particulier du chômage des jeunes. C'est vrai, il est particulièrement dommageable de se trouver sans emploi, lorsqu'on est en passe de démarrer une vie active.
Quel est le contexte de cette motion ? La question du chômage des jeunes touche trois lois de notre République. D'abord, la nouvelle loi en matière de chômage - cela a été dit hier soir. Ensuite, la loi récemment votée par notre parlement concernant la formation professionnelle et l'information scolaire et professionnelle. Enfin, la LIP, la loi sur l'instruction publique, qui, comme vous le savez, va devoir être modifiée dans un proche avenir, concernant le cycle d'orientation. Mesdames et Messieurs, les réponses à la problématique du chômage des jeunes se trouvent à l'intersection de ces trois lois.
Il faut rappeler aussi que deux départements sont concernés par cette question: le département de la solidarité et de l'emploi et le département de l'instruction publique. On pourrait même dire que le département de l'économie, d'une certaine façon, est également concerné par cette question. Il est donc difficile de trouver des réponses à cette problématique sans une réelle concertation et une cohérence d'ensemble de l'action de notre canton sur ce point.
Petit rappel également. Le parti démocrate-chrétien souhaitait que cette motion soit une motion rassembleuse. Nous avons donc accepté de reporter la date de dépôt de cette motion pour pouvoir discuter avec les différents groupes afin de modifier le texte que nous avions envisagé. Cela a été fait: des députés du groupe libéral, des députés du groupe radical, des députés des Verts et des députés du groupe socialiste nous ont fait part de leurs remarques, et des modifications ont été apportées à ce texte. Nous regrettons malgré tout que les signataires de cette motion soient exclusivement démocrates-chrétiens. Nous aurions réellement souhaité élargir l'adhésion à cette motion.
Nous savons que cette motion suscite quelques réserves dans cette enceinte. Certains nous ont déjà dit qu'elle enfonçait des portes ouvertes, que les choses avaient déjà bougé dans ce domaine... Ce que l'on peut dire, c'est que, effectivement, un certain nombre de portes sont - je dirai - entrouvertes depuis le dépôt de notre motion - et nous nous en réjouissons - notamment s'agissant de la concertation entre les départements, surtout sur l'implication des milieux professionnels au niveau du cycle d'orientation. Mais d'autres portes, il faut le dire, sont aujourd'hui encore complètement fermées, et nous pensons qu'il est urgent de les ouvrir.
La présidente. Pardonnez-moi, Monsieur le député, je vous indique simplement que vous avez déjà parlé trois minutes - vous pouvez continuer, puisque votre groupe a droit à six minutes, mais je voulais le vous signaler.
M. François Gillet. Merci, Madame la présidente. En fait, sans entrer dans les détails, Mesdames et Messieurs les députés, la loi en matière de chômage n'a pas de spécificité concernant le chômage des jeunes, et c'était une bonne chose, nous l'avons soutenue. Il est maintenant nécessaire que nous trouvions le moyen d'assurer une cohérence de l'action de l'Etat, par rapport à la problématique du chômage des jeunes, en interaction avec ces lois et les départements concernés. Notre motion va essentiellement dans ce sens: trouver le moyen d'assurer une cohérence de cette politique, trouver le moyen de faire en sorte que les nombreux partenaires qui agissent dans ce domaine, qu'ils soient cantonaux, communaux ou associatifs, puissent faire part de leurs expériences, que nous puissions mieux informer le public de ce qui existe et que les milieux professionnels puissent davantage être impliqués dans les actions... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ...menées pour lutter contre le chômage des jeunes.
Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs, notre groupe vous demande, dans la mesure où cette question a déjà été abordée sous différents angles en commission de l'économie et en commission de l'enseignement, et pour que le Conseil d'Etat puisse nous faire rapport dans les meilleurs délais sur ce qui se fait déjà, sur ce qui est prévu d'être développé encore dans ce domaine, de bien vouloir accepter de renvoyer directement cette motion au Conseil d'Etat. Cela nous permettra d'avoir une vision globale de cette problématique importante qu'est le chômage des jeunes à Genève. (Applaudissements.)
M. Eric Stauffer (MCG). Je ne peux que regretter ce qui se passe dans cet hémicycle ! Il me semble que chaque groupe parlementaire peut, en tout temps, demander le renvoi en commission. Maintenant - c'est nouveau, ça vient de sortir - quand le temps de parole d'un groupe est utilisé, il ne peut même plus demander le renvoi en commission ! Pfut ! Moi, je ne trouve pas le procédé très démocratique, mais nous en reparlerons: le MCG enverra un courrier au Bureau du Grand Conseil.
Cela étant dit, Mesdames et Messieurs, vous venez de parler du chômage des jeunes... Vous voulez que je vous dise quelle est la réalité du chômage des jeunes, notamment pour les apprentissages ? Alors, je vous dirai que les entreprises genevoises ne veulent plus engager d'apprentis parce que cela coûte trop cher et parce que les maîtres d'apprentissage doivent suivre des cours de formation. Et puis, suite aux accords de libre circulation, on peut désormais se passer de formation, puisque nos voisins français, apparemment, forment mieux les apprentis que nous, à Genève.
Vous voulez parler du chômage des jeunes ?! A Vernier, il y a deux semaines, nous avons auditionné six jeunes entre 18 et 25 ans. Les six, sans exception, ont dû arrêter leur apprentissage parce qu'ils n'avaient pas de quoi subvenir à leurs besoins ! Et où ont-ils terminé ?! A l'Hospice général, parce qu'ils arrivent à y toucher 2100 F par mois, ce qui leur permet de survivre ! Avec les 600 F qu'ils gagnaient pendant leur apprentissage, ils n'arrivaient ni à payer leur studio ni leur assurance, ni le reste !
Vous voulez qu'on parle de l'aide aux chômeurs ?! Alors, quand nous vous proposons de mettre en place un Contrat Citoyen, Mesdames et Messieurs les députés - qui n'était pas discriminatoire, puisqu'il autorisait même les entreprises à engager des travailleurs européens, et les entreprises qui l'auraient respecté auraient bénéficié d'abattements fiscaux, taxes professionnelles, etc. - eh bien, vous vous êtes tous gaussés en disant qu'il s'agissait encore d'une attaque contre les frontaliers ! Mais c'est vous qui en faites des boucs émissaires ! Parce que vous n'êtes pas capables de travailler main dans la main, en dehors des clivages politiques ! La preuve: les déclarations qui ont été faites il y a dix minutes dans ce parlement contre le Mouvement Citoyens Genevois ! (Protestations.)
Mesdames et Messieurs, je prends la population à témoin pour savoir qui dit que nous faisons partie de la région genevoise et qui, finalement, «se fout» des résidents genevois ! C'est bien le message que vous avez donné avant !
Eh bien, nous, nous continuerons à défendre les résidents genevois, les chômeurs et les petites gens, parce que, apparemment, le parti socialiste - la «gauche caviar» - est complètement déconnecté des personnes qui sont dans le besoin et qui n'ont pas de travail ! (Commentaires.)
Une voix. Qu'il est pénible !
La présidente. Monsieur le député, je vous l'ai déjà demandé à plusieurs reprises, vous devez vous adresser à la présidence. Par ailleurs, j'aimerais que vous fassiez preuve d'un peu de retenue dans ce parlement, ne serait-ce que par égard pour les personnes qui assistent aujourd'hui à la séance. (Applaudissements.) Monsieur Gabriel Barrillier, vous avez la parole.
M. Gabriel Barrillier (R). Un peu d'humour ! Je constate que notre collègue Stauffer a déjà retrouvé son naturel, lui qui, hier, avait adopté le ton d'un candidat au Conseil d'Etat: très modéré... très «soft». Le chômage des jeunes est inadmissible, certes, mais la polémique n'est pas de mise pour un tel sujet !
Je tiens à féliciter le groupe PDC d'avoir déposé cette motion qui relève un vrai problème, contrairement à plusieurs de ses motions, que nous avons traitées hier et qui étaient discutables. Cette motion-ci fait un inventaire tout à fait complet des difficultés et des problèmes que rencontre une frange de notre jeunesse pour trouver un emploi après la formation.
M. Jeanneret - il est absent, pour le moment - a signalé hier, au cours d'un débat - qu'une dizaine d'apprentis qui avaient suivi une formation au CEPTA et qui avaient obtenu un CFC n'avaient pas trouvé de travail. C'est vrai, et je pense que ce sont - il ne faut pas se voiler la face - des situations inacceptables. L'ensemble des acteurs qui s'occupent de la formation professionnelle et, ensuite, de l'accompagnement des jeunes doivent améliorer leur collaboration, leur coordination - c'est leur objectif - pour éviter des situations de ce genre et pour leur permettre de trouver un emploi. Parce que ces situations, je le répète - et je peux l'attester, car je suis, avec d'autres dans cet hémicycle, très engagé dans la problématique de l'apprentissage et de la formation professionnelle - sont inacceptable.
Le groupe PDC a énuméré toutes les portes qui ont été entrouvertes et celles qui devraient s'ouvrir davantage - dont une meilleure coordination - mais j'aimerais tout de même vous rappeler que les bases ont été décidées par ce parlement avec l'acceptation de la révision de la loi cantonale sur la formation professionnelle et avec la promulgation d'une loi sur l'information et l'orientation professionnelle.
Pour le reste, je puis attester qu'enfin se développe une véritable collaboration transversale entre les départements. C'est nécessaire pour apporter, une fois pour toutes, des solutions crédibles à ce problème difficile qu'est le chômage des jeunes.
Je voudrais tout de même terminer en signalant que 95% des jeunes filles et des jeunes gens qui obtiennent un CFC trouvent un emploi. Il ne faut donc pas non plus avoir un discours misérabiliste. Je vous remercie.
Le groupe radical, bien évidemment, soutient cette motion et son renvoi au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)
La présidente. Monsieur Weiss, je vous donne la parole. Je vous signale que Mme Fabienne Gautier, de votre parti, est inscrite et que vous avez droit à trois minutes par groupe.
M. Pierre Weiss (L). Je voudrais exprimer l'accord du groupe libéral tant sur les considérants que sur les invites de cette motion. Nous l'approuvons sans réserve.
Permettez-moi toutefois d'ajouter en introduction, Madame la présidente, que, si l'on peut ne pas être d'accord sur la forme des interventions de tel ou tel dans cette enceinte, on peut aussi ne pas être d'accord sur le fond. En effet, dépeindre la situation genevoise comme étant catastrophique - comme le font certains - c'est, d'une part, montrer une méconnaissance de la réalité et, d'autre part, tenter d'éveiller des peurs dans la population qui ne correspondent précisément pas à la réalité. Voilà, d'ailleurs, comment l'on peut définir une politique populiste. J'en ai terminé sur ce point.
Concernant la motion, je note que tous les considérants et toutes les invites s'imposent d'évidence, et je ne reprocherai pas à nos collègues PDC d'affirmer des choses qui sont non seulement nécessaires, mais d'autres qui existent déjà. Je relève simplement qu'il faut apporter un complément à l'exposé des motifs, et le Conseil d'Etat n'y manquera certainement.
Il est par exemple affirmé que les jeunes «...rencontrent d'énormes difficultés pour s'insérer rapidement dans le monde du travail...». Certes, mais si l'on compare la situation des différentes classes d'âge de chômeurs, l'on constate que ceux qui rencontrent les plus grandes difficultés sont les travailleurs de 50 ans et plus. Le chômage des jeunes - et même pour les 16/20 ans - est, premièrement, à peine différent de la moyenne de la population suisse et, deuxièmement, se marque par une durée d'attente nettement inférieure qu'elle ne l'est pour le reste de la population des chômeurs. En d'autres termes, la situation dans notre pays est certes problématique, mais, en réalité, pour la catégorie des jeunes, elle est nettement meilleure que dans d'autres pays. L'apprentissage dual est en particulier une des raisons de cette bonne situation. Et je peux simplement témoigner, après mon collègue Barrillier, que la collaboration est maintenant extrêmement forte: les commissions extraparlementaires s'occupent des liens entre le monde des organisations du travail - patronat, syndicats et l'Etat, notamment l'office de formation et de perfectionnement professionnels - ce qui ne peut qu'améliorer le système.
La présidente. Je vous remercie, Monsieur le député. Il reste trente-cinq secondes à Mme Fabienne Gautier.
Mme Fabienne Gautier (L). Merci, Madame la présidente. Je serai rapide, car tout a déjà été dit. Mais j'aimerais simplement souligner la collaboration que nous avons actuellement avec la direction de l'Action sociale et l'Hospice général, qui a mis sur pied un projet de stage «Incite+», piloté par ces deux services dont je viens de parler, qui a pris langue avec toutes les associations professionnelles et leur a envoyé des documents. Le but est d'offrir des stages d'une durée de six mois à des jeunes qui ne trouvent pas d'emploi, pour essayer de les réinsérer dans le monde du travail et leur redonner goût à la vie professionnelle.
Je dois relever que cette collaboration est très active et qu'elle génère des effets très positifs. De plus, cela répond à la nouvelle collaboration que nous avons avec les services de l'Etat.
M. François Thion (S). Nous ne pouvons qu'être d'accord avec cette motion. D'ailleurs, le parti socialiste a toujours insisté, tout au long des travaux sur la loi sur le chômage, pour que l'on prenne des mesures en faveur des jeunes de moins de 25 ans. Nous sommes tout à fait d'accord s'agissant du rapprochement entre l'office cantonal de l'emploi et l'office pour l'orientation de la formation professionnelle et continue. J'ai travaillé personnellement dans les deux commissions concernées et je sais l'importance de tels rapprochements.
Dans les considérants de la motion, vous exprimez votre crainte que les jeunes ne se dirigent vers des études longues et qu'ils doivent arrêter la filière entreprise en cours de route, après quelques années au collège, parce qu'ils ont des notes insuffisantes et qu'ils doivent se diriger dans une autre direction. Nous avons maintes fois abordé ce problème, mais nous ne trouvons pas vraiment de solution. Bien sûr, il faut promouvoir la formation professionnelle ! Bien sûr, il faut promouvoir l'apprentissage ! Mais il ne faut pas oublier que les jeunes - on l'a constaté - veulent aller aussi loin que possible dans leurs études, et ils doivent changer d'orientation lorsqu'ils n'ont pas les notes suffisante. Et puis, par ailleurs, certaines professions manuelles ne sont pas très bien cotées dans la population, notamment parce que les salaires sont peu élevés. Il faudrait peut-être agir à ce niveau-là.
Nous soutenons la motion déposée par les députés PDC, tout en leur signalant qu'ils auraient aussi pu appuyer le groupe socialiste quand celui-ci a présenté des amendements sur la loi sur le chômage demandant, précisément, des stages pour les jeunes. Nous l'avons fait en commission, et vous l'avez refusé ! Nous l'avons fait en plénière, et vous l'avez refusé ! C'est tout à fait incohérent de votre part !
Il y aurait encore beaucoup de choses à dire, mais je ne veux pas monopoliser la parole. Je demande simplement le renvoi de cette motion à la commission de l'économie, car certaines invites ne sont pas très claires.
M. Gilbert Catelain (UDC). L'ensemble des éléments abordés dans cette motion ont été traités soit en commission de l'économie soit en commission de l'enseignement. C'est vrai, le PDC a l'habitude de faire des copier-coller des débats de commission pour les transformer en motions, ce qui n'enlève toutefois rien à leur pertinence, puisque ces problèmes ont été discutés, évoqués, reconnus et que des solutions ont été apportées.
Il a été dit que le chômage des jeunes était faible en Suisse, proche de la moyenne nationale... Nous pouvons même nous en féliciter: à titre de comparaison, le taux en Suisse est quatre fois moins élevé qu'en France ! Par contre, il est vrai également que le chômage des jeunes est nettement supérieur à Genève qu'à Zurich. L'étude PISA 2006 a clairement démontré que c'était dû à l'inadéquation entre l'offre de formation, la structure de formation et le marché du travail.
D'un autre côté, nous sommes confrontés à un problème démographique, à savoir le vieillissement de la population. Dans les services publics, nous savons que des générations d'instituteurs vont partir à la retraite ces prochaines années. Il en est de même pour les personnes travaillant dans les services sociaux. Nous allons donc devoir faire face à une véritable pénurie de main-d'oeuvre dans les années qui viennent. C'est une aubaine pour la nouvelle génération qui va arriver sur le marché de l'emploi, pour autant que celle-ci soit armée pour affronter ce dernier.
Ce parlement a empoigné le problème, puisqu'il a aidé le Conseil d'Etat dans ce sens en adoptant deux projets de lois qui sont cités dans cette motion. A savoir la nouvelle loi sur le chômage, qui facilite et anticipe aussi le traitement du chômage, qui accélère la prise en charge des chômeurs, et le projet de loi sur l'orientation professionnelle, puisque nous avions constaté en commission de l'enseignement qu'il y avait un réel problème en matière d'orientation: aujourd'hui, beaucoup trop de jeunes en formation soit ne réussissent pas leur formation professionnelle soit l'interrompent. Je pourrai donner l'exemple de l'Espagne, qui, à l'entrée de l'université, oriente très précisément les étudiants en fonction de leurs capacités et de leurs besoins. Et le taux d'échec en première année d'université est beaucoup plus faible en Espagne qu'il ne l'est en France.
Le problème de pénurie de main-d'oeuvre n'est pas forcément lié aux Accords bilatéraux. Pour l'illustrer, je dirai ceci: dans mon secteur où nous n'engageons que des ressortissants suisses, où la formation est rémunérée au minimum à 3200 F pour un jeune de 20 ans - qui n'aura donc pas besoin de faire appel à l'Hospice général - nous avons un mal fou à recruter des jeunes qui disposent d'une formation.
La présidente. Monsieur le député, il vous faut conclure, vous êtes arrivé au terme de votre temps de parole !
M. Gilbert Catelain. Je vais conclure, Madame la présidente. Je pense qu'il n'est pas nécessaire de renvoyer cette motion en commission. Il vaudrait mieux avoir un rapport sur l'efficacité réelle des deux projets de lois que nous avons votés. Par contre, nous devons faire un effort manifeste dans le domaine de l'instruction publique, notamment en adoptant...
La présidente. Veuillez terminer, Monsieur le député !
M. Gilbert Catelain. ...la nouvelle loi sur le cycle d'orientation, pour permettre à nos jeunes d'affronter le marché de l'emploi avec les meilleures armes possibles.
La présidente. Je passe la parole à M. François Gillet, à qui il reste une minute et cinq secondes.
M. François Gillet (PDC). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais ajouter une chose aux propos de M. Weiss. Il s'agit d'un élément qui a été évoqué lors de nos débats concernant la loi en matière de chômage: le chômage des jeunes est très particulier - le professeur Flückiger l'avait rappelé - parce qu'il est le plus sensible à la conjoncture. Aujourd'hui, la conjoncture est bonne, et ce chômage a tendance à se stabiliser, ce qui est une bonne chose, mais nous savons que la conjoncture varie, et il serait particulièrement opportun de profiter de la bonne conjoncture d'aujourd'hui pour mettre en place des stratégies qui permettront, le moment venu, d'être prêts à affronter de nouvelles difficultés.
Alors, faut-il ou non renvoyer cette motion à la commission de l'économie ? La difficulté, comme je l'ai dit tout à l'heure, est que nous sommes à l'intersection de plusieurs lois et de plusieurs départements. Nous pensons que les discussions ont déjà été partiellement menées dans les deux commissions concernées et qu'il serait plus urgent que le Conseil d'Etat nous donne des résultats tangibles sur ce qui se fait déjà dans ce domaine...
La présidente. Monsieur le député, s'il vous plaît, vous devez conclure ?
M. François Gillet. ...et des pistes sur ce qu'il compte faire encore dans ce sens.
Je souhaiterais tout de même que le groupe socialiste - cela a été rappelé - qui a été très actif dans les débats sur la loi sur le chômage concernant les jeunes, s'associe au renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.
La présidente. Deux personnes du parti socialiste se sont inscrites: il ne leur reste que cinquante-cinq secondes. Qui prend la parole: M. Deneys ou Mme Emery-Torracinta ?
Mme Anne Emery-Torracinta (S). En fait, je souhaitais répondre à certaines remarques de M. Stauffer. La première concerne les places d'apprentissage. Il y a des places d'apprentissage dans le canton de Genève, Monsieur Stauffer, le problème, c'est qu'il y a une inadéquation entre la demande des jeunes et l'offre des entreprises. Dans la pratique, on se rend compte que certains apprentissages sont plus attrayants que d'autres. Par exemple, beaucoup de jeunes veulent entreprendre un apprentissage de commerce - secteur où il manque des places - par contre, ils ne souhaitent pas faire un apprentissage de ferblantier. Il y a donc un vrai travail à effectuer en termes d'information professionnelle.
Vous avez attaqué la «gauche caviar», Monsieur Stauffer... Eh bien, peut-être que cette gauche-là aurait aimé que le MCG défende hier le projet de loi qu'elle a déposé sur les indemnités journalières ou sur le recouvrement des pensions alimentaires. Et puis, j'aimerais vous dire que la «gauche caviar», comme vous l'appelez, ce sont simplement des personnes qui votent contre leurs intérêts particuliers, parce qu'ils font passer les intérêts de la collectivité avant les leurs. Et nous sommes fiers, au parti socialiste, de défendre ces valeurs-là ! (Applaudissements.)
M. Christian Bavarel (Ve). Pour le groupe des Verts, la motion ne semblait pas le meilleur outil législatif pour travailler sur ce sujet... Nous aurions préféré utiliser la voie du projet de loi. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Néanmoins, nous pouvons tout à fait souscrire à l'objectif de la motion proposée par le parti démocrate-chrétien.
Nous constatons très clairement que la formation reste un rempart contre le chômage; effectivement, même si les jeunes bien formés doivent attendre un peu, ils trouvent en général relativement rapidement du travail. Mais les jeunes qui n'ont pas de formation, eux, ne sont pas du tout protégés par rapport au chômage de longue durée.
Le projet de loi concerne plus particulièrement les apprentis ou ceux qui n'ont pas entrepris d'études. Les universitaires, en effet, sont moins touchés par ce problème. Certes, après l'université, ils vont connaître un temps d'attente avant de pouvoir travailler, et c'est toujours difficile de terminer une formation et de commencer sa vie professionnelle par du chômage - nous en convenons - mais ils finissent par trouver du travail. Nous sommes davantage préoccupés par les jeunes qui se trouvent fragilisés en raison de leur manque de formation.
La problématique de l'apprentissage... Nous sommes dans un monde en perpétuel mouvement, avec des idées nouvelles et, malheureusement, nous entrons dans un processus un peu à la française, c'est-à-dire que l'on pousse les jeunes à entreprendre des études universitaires et à considérer l'apprentissage comme une formation de deuxième classe.
Pourtant, l'apprentissage est un mode de formation, qui pourrait être résumé par cette phrase: «On a vu ce que vous êtes; vous serez ce que je suis.» Le maître a été apprenti et l'apprenti pourra devenir maître. C'est la grande force de l'apprentissage, contrairement à l'enseignement classique où l'enseignant détient le savoir et l'élève, lui, ne sera peut-être jamais enseignant, ne serait-ce que parce que, souvent, il ne suit pas le même cursus. En médecine et en droit, le système de l'apprentissage a été adopté: si l'on regarde les fins de cursus dans ces domaines, on voit bien qu'il s'agit de situations d'apprentissage, preuve de la qualité de ce mode de formation.
Le problème pour nous aujourd'hui, c'est qu'il faut rester extrêmement attentifs au fait que les formations aboutissant au CFC ne deviennent pas des formations butoir. Auparavant, les jeunes obtenaient d'abord leur CFC, ensuite, ils pouvaient passer un brevet et, enfin, une maîtrise. Le parcours professionnel pouvait se dérouler de cette manière. Maintenant, les jeunes passent un brevet, ils passent un CFC - un certificat fédéral de capacité - mais les cadres sont des gens qui sortent des HES, par le biais d'une filière gymnasiale. Dans beaucoup de professions, il était possible de gravir les échelons à partir du CFC, ce n'est plus le cas maintenant. Les détenteurs d'un CFC plafonnent et il leur est de plus en plus difficile d'accéder à des postes à responsabilités. Ayant passé un CFC, je vous rends attentifs à cette problématique: il faut que la filière CFC permette aux personnes d'accéder à d'autres formations si elles désirent faire évoluer leur carrière; il faut que des passerelles soient mises en place. Nous courons aujourd'hui le risque de créer des sortes de voies de garage professionnelles, car, malheureusement, la dictature du diplôme se fait de plus en plus sentir. Il faut avoir fait HEC en était jeune. Un CFC d'employé de commerce ne vous permet plus de grimper au sein d'une banque, et c'est regrettable !
La présidente. Vous devez conclure, Monsieur le député !
M. Christian Bavarel. Oui, Madame la présidente. Nous allons suivre la proposition des socialistes de renvoyer cette proposition de motion en commission. Si jamais cette proposition est refusée, nous la renverrons au Conseil d'Etat.
La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Eric Stauffer, à qui il reste trente secondes.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Madame la présidente. Monsieur Weiss, je pense que vous ne vous promenez pas dans certaines communes suburbaines comme Vernier ou Onex... Si c'était le cas, vous verriez que vos propos sont complètement erronés.
Ensuite, je répondrai à ma collègue socialiste que la dignité commence par un emploi et non pas par l'assistanat. Parce que vous, ce que vous prônez, c'est l'assistanat dès la fin des études secondaires ! Et c'est ce qui ne va pas chez les socialistes ! Et puis, si parfois je m'emporte, c'est vrai...
La présidente. Monsieur le député, s'il vous plaît, vous devez conclure !
M. Eric Stauffer. ...c'est simplement parce que j'ai la passion de défendre les Genevois pour des sujets qui me tiennent à coeur.
La présidente. Vous devez conclure ! (Exclamations.)
M. Eric Stauffer. Et nous voulons défendre ces citoyens envers et contre tout, certaines fois contre ce parlement, et je le regrette !
La présidente. La parole est à Mme Sandra Borgeaud, qui dispose d'une minute et demie pour intervenir.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Merci, Madame la présidente. Je rappelle que je suis cosignataire de cette motion, ce qui veut dire que le chômage des jeunes me tient aussi à coeur, autant que le chômage des personnes âgées. Comme je l'ai dit hier, j'aimerais qu'il n'y ait pas de ségrégation et que l'on aide toutes les catégories de personnes.
J'ai entendu dire beaucoup de choses au niveau de la formation. C'est vrai, aujourd'hui, un jeune qui a des diplômes commence par timbrer au chômage - c'est sa première activité - parce que les patrons voudraient engager des universitaires de 22 ans qui ont dix ans d'expérience professionnelle... Il serait peut-être temps de se réveiller et de constater que cela est totalement impossible !
Et pour les jeunes qui ont suivi des études secondaires, universitaires, eh bien, c'est toujours le même problème qui se pose: le manque d'expérience !
Par ailleurs, les jeunes montrent peu d'intérêt pour certaines professions. Il faut donc revaloriser certains emplois, que ce soit dans le domaine de l'hôtellerie, de la restauration, du paysagisme, les métiers manuels en général, qui sont boudés au profit des professions du tertiaire - le secrétariat, l'informatique. En matière de recherche d'emploi, ça explose: tout le monde a la même formation et tout le monde veut le même emploi. Ce n'est pas possible ! Les métiers manuels sont malheureusement beaucoup moins bien payés que les métiers du tertiaire, et cela fait des années et des années...
La présidente. Madame la députée, s'il vous plaît, vous devez conclure !
Mme Sandra Borgeaud. Oui, Madame la présidente, je vais conclure ! - ...donc, cela fait des années et des années qu'on le dit. Je voudrais aussi signaler que les conseillers au chômage ne sont pas toujours compétents. Un exemple...
La présidente. Il vous faut conclure, Madame !
Mme Sandra Borgeaud. S'il vous plaît, je voudrais terminer, Madame la présidente !
La présidente. Je suis désolée, Madame la députée, c'est pareil pour tout le monde !
Mme Sandra Borgeaud. Pendant que vous me demandez de conclure, on perd du temps ! (Brouhaha.) Un exemple: le chômage refuse une formation de secrétaire médicale à une secrétaire administrative, parce que c'est considéré comme une reconversion... C'est une aberration ! Alors, puisque vous prônez la formation, donnez-là et arrêtez de trouver toutes les excuses pour refuser de payer les cours !
M. François Longchamp, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat, si vous veniez à lui renvoyer cette motion, l'acceptera avec plaisir. Cela lui permettra, outre d'examiner les invites, de rappeler aussi certains principes qui guident sa politique en matière de chômage des jeunes, d'instruction publique ou d'insertion. Cela lui permettra également de rappeler un certain nombre de faits.
Madame Borgeaud, vous avez affirmé tout à l'heure quelle était l'importance des diplômes universitaires pour trouver d'un emploi. Je vous ferai remarquer que le meilleur diplôme contre le chômage est aujourd'hui l'apprentissage, le CFC. Toutes les statistiques en matière de chômage le montrent, à Genève comme dans les autres cantons suisses. Il faut donc mener une politique volontariste en matière d'apprentissages, parce que ce sont des formations professionnelles qui sont conformes aux besoins du marché. Elles permettent aux jeunes d'obtenir une première expérience professionnelle qui est très valorisée sur le marché du travail. C'est la raison pour laquelle le département de l'instruction publique et le département que je préside coorganisent des événements comme la Cité des métiers pour, précisément, encourager l'apprentissage. Il reste, je le répète, le meilleur remède contre le chômage des jeunes et contre le chômage tout court.
Si vous nous renvoyez cette motion, nous pourrons aussi vous expliquer les remèdes qui sont proposés. La création de SEMO ? Ce sont assurément de très bonnes initiatives. Je tiens toutefois à rappeler qu'il y a des places libres disponibles dans les SEMO de Genève et qu'elles sont aujourd'hui trop importantes par rapport à la demande. Cela doit aussi susciter quelques interrogations. Nous reviendrons également sur les autres mesures qui sont listées dans votre motion, que le Conseil d'Etat acceptera avec plaisir.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets tout d'abord le renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'économie, comme cela a été demandé.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1756 à la commission de l'économie est rejeté par 60 non contre 17 oui et 1 abstention.
Mise aux voix, la motion 1756 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 66 oui contre 4 non et 7 abstentions.
Débat
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que nous sommes encore en catégorie II: trois minutes par groupe sont imparties, plus trois minutes supplémentaires pour le groupe auteur de la motion. Madame Fehlmann Rielle, je vous passe la parole.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ...cette motion date de bientôt un an... Dans l'intervalle, une grande incertitude a régné, ce qui a pesé sur un certain nombre d'institutions liées à l'Hospice général, notamment d'Infor Jeunes.
En fait, le sort d'Infor Jeunes a été résolu - en tout cas temporairement - puisque le conseil d'administration de l'Hospice général a récemment pris la décision de conserver ce centre qui faisait surtout de la prévention, de l'information, et qui dispensait un certain appui éducatif aux jeunes. Dans son communiqué, l'Hospice général indique qu'il veut profiter de l'expertise d'Infor Jeunes pour renforcer le dispositif destiné aux jeunes adultes... Il est donc question de mettre en place un seul lieu d'accueil et de suivi pour les jeunes entre 18 et 25 ans. Par conséquent, en plus du travail de prévention et d'information, les collaborateurs d'Infor Jeunes seront également chargés de distribuer l'aide financière aux jeunes, aide qui est prévue dans la loi sur l'aide sociale individuelle. Cela induira donc des compétences supplémentaires pour les collaborateurs d'Infor Jeunes, et l'on peut dire que cette décision permettra de répondre en partie aux demandes de la motion. Mais, à mon sens, comme cette décision est toute récente et que le dispositif n'est pas encore en place, il faut tout de même l'expérimenter, d'autant plus qu'il s'agit d'une nouvelle mission qui est confiée à Infor Jeunes, ce qui implique aussi des formations supplémentaires. Il faut également voir comment ce dispositif va être établi et quelle synergie va être engagée avec les autres partenaires, notamment les communes.
Ces questions sont donc toutes éminemment importantes, à l'heure où nous constatons qu'un certain nombre de jeunes sont en rupture sociale, qu'ils se retrouvent dans la précarité par manque de formation ou, lorsqu'ils suivent une formation, par manque de moyens pour subvenir à leurs besoins. Nous estimons qu'il serait tout à fait intéressant d'approfondir cette question et d'entendre notamment les responsables d'Infor Jeunes qui vont être investis de cette nouvelle mission.
Je vous propose donc de renvoyer cette motion à la commission des affaires sociales.
Mme Janine Hagmann (L). Mesdames et Messieurs les députés, savez-vous que, mardi, le Grand Conseil vaudois a annulé sa session faute d'objets à traiter ? Nos collègues avaient épuisé leur ordre du jour ! Et nous ? Nous, nous avons cent cinquante-cinq objets à l'ordre du jour, et nous venons de traiter sept motions à la file, dont une seule a été adoptée ! Alors, sommes-nous meilleurs que les Vaudois ou plus mauvais ? Je me pose souvent la question !
La motion que nous sommes en train de traiter en est un exemple... Madame Fehlmann Rielle, c'est invraisemblable ! Vous demandez un moratoire pour une décision qui a été discutée et devra être acceptée par le conseil d'administration de l'Hospice général ! En effet, ce dernier a donné son accord à un projet qui propose de mettre en place une structure unique pour rendre plus efficace l'aide sociale apportée aux jeunes. Les assistants sociaux des vingt centres d'action sociale et les éducateurs d'Infor Jeunes travailleront sous le même toit. L'aide sociale pour les jeunes se trouvera donc ainsi centralisée. Et vous déposez une motion pour demander une étude approfondie ! Mais allons-nous encore longtemps nous mêler de ce qui ne nous regarde pas ? L'Hospice général a un conseil d'administration qui répond exactement à ce que vous vouliez, et vous demandez un moratoire ! C'est tout à fait invraisemblable ! Cette motion est ridicule: elle ne doit pas être acceptée ! (Applaudissements.)
Mme Michèle Künzler (Ve). Jusqu'au dernier moment, j'ai cru être d'accord avec Mme Hagmann. C'est vrai, cette motion est un peu dépassée. D'ailleurs, la motion concernant soi-disant Infor Jeunes... (L'oratrice est interpellée.) Il ne s'agit pas du tout de cela ! L'une des invites demande de mandater une institution comme la HES pour mener une réflexion sur le thème suivant: «Quelle politique sociale de la jeunesse pour le canton de Genève ?». C'est un sujet intéressant; ces invites sont intéressantes, mais n'ont rien à voir avec le moratoire demandé dans le titre de la motion. La mission d'Infor Jeunes se poursuit à l'Hospice général. Une structure nouvelle sera mise en place. Nous refuserons donc cette motion, parce qu'elle n'a plus de sens.
Si vous voulez obtenir des informations sur les jeunes, faire un travail social, il faut une autre motion. Cette motion-ci n'est pas «ridicule», comme l'a qualifiée Mme Hagmann, mais elle date. Il faut simplement la refuser pour ne pas encombrer l'ordre du jour.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). En tant que signataire de cette motion pour le parti démocrate-chrétien, je craignais effectivement que cette structure ne puisse pas poursuivre ses activités, qui sont hautement importantes en termes de prévention. Et lorsque l'on parle de «prévention», de «réinsertion pour les jeunes», il faut penser à «retour sur investissement»... Pardonnez-moi d'être un peu cynique, mais c'est effectivement très utile !
J'estime que nous avons eu des réponses tout à fait concrètes: Infor Jeunes va non seulement rester dans un dispositif reconnu, qui a fait ses preuves depuis vingt ans, mais il va pouvoir continuer son travail. Nous faisons confiance au Conseil d'Etat, néanmoins nous resterons embusqués. C'est à cette condition que nous pouvons nous abstenir aujourd'hui, en tout cas sur un renvoi éventuel en commission. Pour nous, il était extrêmement important d'être rassurés. Nous allons donc être raisonnables et laisser travailler le Conseil d'Etat.
M. Eric Stauffer (MCG). Cette motion prouve que le MCG est capable de déplacer les clivages politiques, puisque je suis, au nom de mon groupe, l'un des signataires de cette motion. Bien sûr, il a fallu tellement de temps au Grand Conseil pour traiter cette motion en plénière qu'aujourd'hui elle n'a plus lieu d'être - comme l'a expliqué justement ma collègue Mme Hagmann. Quoi qu'il en soit, le chômage des jeunes - et c'est le deuxième texte sur ce sujet à être traité ce soir - est un véritable problème.
Je le répète, le Mouvement Citoyens Genevois est capable de voter avec la gauche ou avec la droite, du moment que les projets sont bons. Or cette proposition de motion va être refusée par la quasi-totalité du parlement, sauf par le parti socialiste qui aurait dû la retirer. Je ne pouvais pas la retirer tout seul, puisqu'il faut l'unanimité des signataires pour ce faire. Néanmoins, je propose, Madame la présidente, le retrait de cette motion, dans la mesure où le parti socialiste est d'accord ainsi que les autres signataires. Si elle est retirée, cela désencombrera effectivement l'ordre du jour de notre Grand Conseil.
Je conclurai en disant une fois de plus qu'il faut dépasser les clivages politiques. Certes, il y a des problèmes à Genève, mais ne fustigeons pas tel ou tel parti: travaillons ensemble pour le bien de nos concitoyens, pour régler ces problèmes !
La présidente. Madame Fehlmann Rielle, vous avez la parole, il vous reste une minute.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Merci, Madame la présidente. Je constate une fois de plus que Mme Hagmann joue à la maîtresse d'école... Le problème, c'est qu'elle n'a pas écouté ce que j'ai dit ! (Remarque. Rires.) J'ai dit que je reconnaissais qu'il avait été partiellement répondu à l'une des invites et que c'était pour cette raison que je ne demandais pas le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat. Il serait en effet absurde de demander un moratoire, puisqu'une partie de ces invites ont été acceptées.
Je vous rappelle tout de même qu'au moment où le problème était brûlant, vous avez plusieurs fois refusé que l'on traite cette question en urgence, ce qui montre le peu de cas que vous faites de la politique pour la jeunesse et de la précarité que connaissent certains jeunes ! (Remarque. La présidente agite la cloche.) Cela dit, quand on renvoie une motion en commission, on peut l'amender. Cela permet justement de se poser quelques questions, parce que, même si une décision plutôt positive a été prise, le dispositif n'en est qu'à son début ! Et je pense, précisément, qu'il serait extrêmement important de se demander ce qu'entend faire le Conseil d'Etat en termes de politique de la jeunesse. La deuxième invite n'est donc pas aussi absurde que cela !
En conséquence, je maintiens la demande de renvoi en commission de cette motion. (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Madame la députée. Je voudrais juste vous poser une question: à quelle commission souhaitez-vous la renvoyer ? (Mme Laurence Fehlmann Rielle répond hors micro.) Affaires sociales, très bien, je vous remercie ! La parole est à M. Gilbert Catelain.
M. Gilbert Catelain (UDC). Les problèmes évoqués dans l'exposé des motifs sont tout à fait fondés. La plupart d'entre eux ont été discutés à la commission des affaires sociales, notamment celui du surendettement des jeunes. Et ce parlement a apporté un certain nombre de réponses par le biais de travaux et de projets de lois présentés par le Conseil d'Etat.
La première chose qu'il faut rappeler, c'est que l'Hospice général est un établissement autonome, c'est-à-dire qu'il bénéficie d'une certaine autonomie de gestion et, aussi, d'une certaine autonomie pour remplir un certain nombre d'objectifs. D'ailleurs, ce parlement a adopté massivement une nouvelle loi sur l'aide sociale, pas plus tard que l'an dernier, qui fixe très clairement les objectifs de l'aide sociale et détermine qui sont les bénéficiaires de cette aide sociale. Le débat sur Infor Jeunes a d'ailleurs été conduit dans le cadre des travaux du projet de loi sur l'aide sociale. Nous attendons maintenant les résultats... Laissons au Conseil d'Etat le soin de mesurer l'efficacité de cette loi, avant de lui demander, par le biais d'une motion, d'intervenir dans la gestion de l'Hospice général ! Ensuite, nous avons décidé, au sein de ce parlement, une nouvelle gouvernance de l'Hospice général, avec de nouvelles prérogatives pour le conseil d'administration, auquel il appartient finalement de conduire la politique de l'Hospice général.
Dernier point: la commission des affaires sociales traite actuellement le mandat de prestations que le Conseil d'Etat entend donner à l'Hospice général; il s'agit d'un mandat de prestations très détaillé, avec des critères d'évaluation qui, finalement, reprennent toutes les facettes de l'activité de l'Hospice général. (Brouhaha.)
Donc, en résumé, nous avons la possibilité au sein de la commission des affaires sociales de nous prononcer sur le bien-fondé de ce mandat de prestations. Utilisons notre compétence dans le cadre du traitement de ce mandat de prestations ! Donnons notre préavis si nous le souhaitons, et laissons à l'Hospice général le soin de mettre en oeuvre ce mandat de prestations qui va le lier au Conseil d'Etat, plutôt que de lui mettre des bâtons dans les roues, alors qu'il est en train de se réformer, qu'il a amélioré ses chiffres puisqu'il ne fait plus de déficit et qu'il obtient un certain nombre de résultats satisfaisants dans le domaine qui est le sien, à savoir l'aide sociale, y compris pour les jeunes !
Pour ces motifs, je vous invite à refuser le renvoi de cette motion en commission ou au Conseil d'Etat.
M. François Longchamp, conseiller d'Etat. Madame la présidente, je vous sais soucieuse de l'avancement de l'ordre du jour... Je vais juste vous confirmer ce qui a déjà été dit, à savoir que cette motion n'est plus guère d'actualité. Suite aux décisions prises par le Conseil d'Etat sur recommandation d'un groupe de travail qu'il avait mandaté, l'Hospice général a pris certaines mesures cette semaine qui la rendent sans objet. Il me paraît donc difficile de vous recommander autre chose que de bien vouloir la refuser. Je puis garantir à Mme von Arx, que je sens en embuscade, que le Conseil d'Etat veillera à la bonne application des principes et des décisions qui ont été prises mardi.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1758 à la commission des affaires sociales est rejeté par 53 non contre 13 oui et 5 abstentions.
Mise aux voix, la proposition de motion 1758 est rejetée par 55 non contre 13 oui.
Débat
M. Alain Charbonnier (S). Le chômage nous intéresse, Mesdames et Messieurs les députés. La première invite de la motion qui nous occupe demande de suspendre immédiatement le mandat conféré à l'entreprise Hestia. Cette entreprise a été mandatée par le département de M. Longchamp, afin de placer des chômeurs le plus rapidement possible sur le marché de l'emploi. Cette entreprise - privée, je le précise - a tiré au sort cent chômeurs. Les six conseillers mis à sa disposition ont pu replacer 10% de chômeurs plus rapidement que ne le fait l'office cantonal de l'emploi, mais leur coût est de 66% plus élevé que ceux de l'office cantonal de l'emploi, puisqu'un placeur de l'office cantonal de l'emploi traite environ cent vingt dossiers alors que, dans cette entreprise, il a fallu six collaborateurs pour traiter cent dossiers. Vous imaginez bien qu'ils sont quand même arrivés à faire un peu mieux que les placeurs de l'office cantonal de l'emploi, mais pas beaucoup mieux, puisqu'il s'agit seulement de 10% en plus...
Une étude du professeur Fluckiger a montré tout cela. Ce dernier a même fait des projections plus pointues que ce qui lui était demandé, puisqu'il a calculé ce qu'aurait coûté le non-placement de ces chômeurs, s'ils avaient pu bénéficier de mesures cantonales, etc. Mais il n'a pas fait l'inverse pour l'office cantonal de l'emploi, c'est-à-dire de calculer quel aurait été le coût si ledit office n'avait pas placé lui-même ses propres chômeurs. On pourrait aussi se demander quels résultats aurait obtenus l'office cantonal de l'emploi si la somme dépensée par Hestia lui avait été attribuée: à savoir combien de chômeurs supplémentaires chaque placeur aurait pu placer.
Tout cela nous fait dire qu'effectivement il serait bon de renvoyer cette motion en commission de l'économie pour obtenir toutes les explications utiles par rapport à cette société privée qui va, d'après ce que nous savons, continuer à travailler pour le département de M. Longchamp.
Je voudrais tout de même dire aux députés du MCG que, avant de voter la loi sur le chômage, ils auraient dû se méfier, car cette loi contient précisément des projets pilotes qui sont alloués au département... Et ce que nous avons refusé, vous, vous l'avez accepté. Il ne faudrait pas être trop contradictoires sur ce sujet !
La deuxième invite propose la création d'une «Cellule de promotion» destinée principalement à dynamiser les allocations de retour en emploi. C'est également une tâche de la compétence du service public. Nous sommes tout à fait d'accord avec vous sur cet objectif, mais nous pensons qu'il faut donner les moyens là où c'est nécessaire.
Par conséquent, nous espérons que le MCG sera toujours d'accord de voter les budgets pour les allocations de retour en emploi, notamment en matière d'aide. Dans notre projet de loi sur le chômage, l'aide incitative était beaucoup plus importante que ce qui est proposé dans la loi que vous avez votée et pour laquelle vous avez refusé nos amendements sur les allocations de retour en emploi.
Nous espérons également que le reste du parlement donnera davantage de moyens à l'office cantonal de l'emploi pour qu'il puisse remplir sa mission de service public, c'est absolument nécessaire !
Je vous remercie de bien vouloir renvoyer cette motion à la commission de l'économie.
La présidente. Nous en avons bien pris note. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Eric Stauffer pour la présentation de sa motion.
M. Eric Stauffer (MCG). Ce sera un peu plus qu'une présentation et je ne prendrai qu'une fois la parole...
Mesdames et Messieurs les députés, vous savez - ou je vous l'apprends si vous ne le savez pas - que je suis président de la commission sociale de la commune d'Onex et conseiller municipal - à Onex, évidemment. Le groupe MCG a proposé ce qu'on appelle le BOPE, c'est-à-dire le Bureau onésien pour la promotion de l'emploi. Eh bien, figurez-vous que le conseil municipal a voté cette motion à l'unanimité, soit à peu près tous les partis qui sont représentés ici. Et le BOPE - je le répète, le Bureau onésien pour la promotion de l'emploi - a été inscrit au budget et voté. Et aujourd'hui, le BOPE prend naissance dans la commune d'Onex qui, en importance dans le canton, est tout de même la troisième commune après la Ville de Genève.
Se pourrait-il, Mesdames et Messieurs les députés, que vos propres partis politiques dans les communes soient en contradiction avec les instances cantonales ? Tel serait le cas si vous refusez l'idée du Mouvement Citoyens Genevois de créer cette «Cellule de promotion» pour l'emploi dans une structure étatique, pour en faire une entreprise aussi dynamique que peuvent l'être les agences de placement fixes ou temporaires. Eh bien, nous allons savoir dans quelques minutes - et les citoyens avec nous - si les partis ont une politique cohérente, selon qu'ils sont représentés au niveau communal ou au niveau cantonal.
Monsieur Charbonnier, vous avez proposé, si je ne m'abuse, de renvoyer cette motion à la commission de l'économie. Nous pourrions accepter - nous, dépositaires de cette motion - de soutenir votre demande de renvoi en commission: cela permettrait à tous les groupes parlementaires de faire le point de la situation sur l'action du Conseil d'Etat avec l'entreprise Hestia. Et puis nous verrons bien !
Nous allons donc, dans un premier temps, soutenir cette proposition de renvoi en commission, et je reprendrai la parole si besoin est.
M. Gilbert Catelain (UDC). L'auteur de cette motion n'a pas eu l'occasion d'assister aux travaux de la commission de l'économie, au cours desquels les commissaires ont bénéficié d'une présentation très exhaustive des activités de la société Hestia et des explications du professeur Fluckiger. Et les commissaires n'ont pas jugé que l'expérimentation initiée par le Conseil d'Etat portait préjudice à l'office cantonal de l'emploi, bien au contraire. La société Hestia exerce une activité complémentaire à celle de l'OCE, puisqu'elle fait notamment une recherche active de places de travail dans des entreprises, qui, finalement, ne collaborent pas forcément avec l'office cantonal de l'emploi. Le travail effectué par la société Hestia est donc tout à fait complémentaire à celui de l'OCE, ce qui, en fin de compte, bénéficie aux chômeurs. De plus, ce travail va tout à fait dans le sens du Contrat Citoyen prôné par le MCG, puisque cette société se contente de placer les chômeurs genevois ! Voilà un élément qui devrait faire plaisir à M. Stauffer ! Cette société est composée de six collaborateurs, qui prennent en charge les chômeurs très tôt, les forcent à faire une recherche active d'emplois, les soutiennent dans leurs recherches. C'est une nouvelle méthode d'aide aux chômeurs qui mérite d'être observée, pour voir quels sont les effets sur le long terme.
Par conséquent, sur le fond, l'UDC s'oppose à la première invite, qui demande que le mandat confié à cette société depuis plus d'une année soit suspendu. Par contre, l'UDC n'est pas opposée aujourd'hui à ce qu'un bilan plus exhaustif soit effectué sur les résultats obtenus par la société Hestia, pour voir si l'initiative prise par le conseiller d'Etat Longchamp est fondée et mérite d'être poursuivie.
C'est la raison pour laquelle nous ne nous opposons pas au renvoi de cette motion en commission de l'économie.
M. Mario Cavaleri (PDC). Je voudrais tout d'abord dire que si une potion magique fonctionne dans un conseil municipal, cela ne signifie pas forcément que ce sera le cas dans un parlement... Pourquoi dis-je cela ? Parce que, même si M. le conseiller municipal Stauffer a réussi à faire adopter une telle mesure au niveau de sa commune, cette démarche est tout à fait inappropriée au niveau cantonal.
Et puis, le groupe démocrate-chrétien fait confiance au gouvernement quant aux mesures mises en oeuvre pour lutter contre le chômage. Il est par conséquent inutile d'adopter cette motion, dans la mesure où nous savons très bien que tout ce qu'il fallait mettre en oeuvre pour avoir des résultats dans ce domaine l'a déjà été, notamment depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur le chômage, le 1er février dernier.
Je le répète, il est absolument superfétatoire de donner un sens à cette motion, raison pour laquelle le groupe démocrate-chrétien la refusera avec détermination.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Eric Stauffer, à qui il reste trois minutes et trente-quatre secondes...
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Madame la présidente. On peut tergiverser sur les potions magiques communales et cantonales, mais, quoi qu'il en soit Onex est une commune habituée à travailler avec peu, parce qu'elle est l'une commune les plus pauvres du canton et celle où le centime additionnel est le plus cher ! Evidemment, les habitants de Cologny voient cela de très loin, considérant qu'il s'agit de communes suburbaines, où il y a plein de logements HML et des ghettos... Eh bien, moi, Monsieur, j'y vis, et je vois beaucoup de chômeurs désemparés, ne serait-ce que lorsqu'ils doivent rédiger un curriculum vitae - ne serait-ce que pour cela ! Et la création d'une «Cellule de promotion» de l'emploi, ça sert aussi à ceci: à accueillir ces personnes, à leur donner un coup de main pour préparer leur CV de manière professionnelle, rapidement, pour qu'elles puissent, justement, se mesurer à la concurrence des entreprises privées, qui ont fleuri comme des champignons à Genève, depuis un certain 1er janvier 2002. C'est vrai: il y a plus de trois cent cinquante agences de placement temporaires et fixes qui établissent des dossiers superprofessionnels !
Et que font les employeurs ? Ils regardent la manière dont sont montés les dossiers. Ils laissent de côté ceux qui sont faits manuellement à la maison avec une imprimante d'amateur, qui sont un peu de travers, et ils retiennent les dossiers superpros préparés par les agences. C'est normal, l'oeil est attiré par les dossiers les plus professionnels, qui paraissent meilleurs pour l'entreprise. Voilà à quoi sert le Bureau onésien pour la promotion de l'emploi ! Voilà ce que suggère le Mouvement Citoyens Genevois: créer une «Cellule de promotion» de l'emploi !
Et le pire - et M. le conseiller d'Etat le dira certainement après - c'est qu'une telle cellule a existé au sein de l'office cantonal de l'emploi ! Mais je ne lui jette pas la pierre d'avoir voulu chercher ailleurs, car il y a un tel problème au sein même de l'office cantonal de l'emploi que c'était peut-être une solution de facilité - c'est la nature humaine qui le veut, mais, nous, au MCG, vous l'aurez remarqué, nous aimons bien relever les défis - de mandater une entreprise extérieure, qui plus est une entreprise française, qui a installé une succursale à Genève ! Je dis cela pour la boutade, vous l'aurez bien compris !
Finalement, ce projet pourrait avoir un avenir au niveau du canton, comme il a un avenir à Onex, car quoi que vous fassiez ce soir - même si vous refusez la motion du MCG - ce projet verra le jour à Onex ! Ce sera un laboratoire, et nous verrons bien, dans une année, si ce Bureau onésien pour la promotion de l'emploi a fonctionné, comme l'imaginait le Mouvement Citoyens Genevois, pour aider ceux qui, malheureusement, ont perdu leur emploi ou si cela a été un échec. Dans ce cas, vous aurez eu raison de refuser cette motion ce soir.
Toutefois - et cette expérience ne coûte rien de plus à l'Etat - je vous demande de renvoyer cette motion en commission pour faire le point sur ce que fait notre conseiller d'Etat ou, mieux encore, de la renvoyer directement au Conseil d'Etat pour qu'il puisse créer en parallèle...
La présidente. Monsieur le député, s'il vous plaît, vous devez conclure !
M. Eric Stauffer. Oui, Madame la présidente, je conclus ! Vous savez, Hestia a pris 100 chômeurs au hasard ! L'idéal serait de prendre 10 000 ou 16 000 chômeurs d'un coup - c'est environ le nombre des chômeurs - pour les aider: ce serait une bonne chose, pas un mal ! Le fait d'avoir deux structures: une privée et une étatique...
La présidente. Monsieur le député, vous devez conclure !
M. Eric Stauffer. ...n'est pas antinomique ! Je conclurai, Madame la présidente, en disant que ce que l'Etat peut faire, il ne doit pas le déléguer au privé ! La notion de service public, la notion de mission ne peut être déléguée au privé, et le Mouvement Citoyens Genevois répondra toujours présent pour les citoyens !
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je vous donne la parole, Madame Sandra Borgeaud. Il vous reste une minute et demie.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Merci, Madame la présidente. J'ai eu l'occasion d'avoir en main plusieurs curriculum vitae rédigés sous la houlette de conseillers du chômage. Je les ai montrés à des chefs d'entreprise ou des responsables de ressources humaines: tous ont conclu qu'ils n'étaient pas bons. Et les lettres de motivation n'étaient pas adéquates non plus. Certains conseillers ne sont pas à leur place ou, alors, ils font mal leur travail en raison d'une trop grande pression. Les chômeurs se sentent seuls et totalement délaissés. On leur dit de ne pas s'en faire, que, de toute façon, l'Hospice général les aidera...
Pour conclure, aucun homme n'a reçu de la nature le droit de commander les autres. La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent. Alors, mieux vaut 100 non, ils font moins de mal qu'un oui qui n'est jamais tenu !
M. Renaud Gautier (L). Madame la présidente, comme le disait tout à l'heure une honorable députée libérale - qui, comme l'ont fait remarquer les socialistes à bout d'arguments, parle avec un ton de maîtresse d'école... c'est toujours amusant d'entendre les socialistes dire cela - nous avons traité sept motions, et ce parlement a effectivement perdu des heures et de l'argent. Et il faut dire que la dernière motion est vraiment le bouquet !
Point numéro un - mon cher collègue, qui n'écoutez pas - la commune de Lancy a tenté cette expérience il y a dix ans, mais elle a dû fermer son bureau, parce que cela ne correspondait à aucune réalité... (L'orateur est interpellé.) A l'époque, mon cher collègue, vous étiez à l'étranger, et peut-être dussiez-vous y rester !
Point numéro deux. L'office cantonal du chômage a un nouveau directeur, qui est l'un de nos anciens collègues. Il n'est pas possible de porter les jugements que l'on a entendus sur cet office dans la mesure où, très objectivement, les choses vont mieux. J'en veux pour preuve que le Conseil d'Etat en charge a fait évaluer l'efficience de ce service non pas par l'Etat, mais par une entité extérieure, y compris par un professeur d'université.
A force de vouloir aider les gens contre leur volonté et de s'imaginer que c'est l'Etat qui pourra trouver des emplois, on en oublie que le problème de l'emploi, à Genève et en Suisse, est compliqué pour les employeurs en raison de la foule de démarches qu'ils doivent entreprendre et de questionnaires qu'ils doivent remplir. Si l'on veut faciliter l'emploi des jeunes, des moins jeunes, voire des plus âgés, soit des personnes qui doivent se réinsérer, il faut aussi simplifier les démarches pour les employeurs ! Et ce n'est certainement pas en transposant à l'Etat ce qui se fait à Onex, ce d'autant moins, cela a été dit tout à l'heure, que les résultats d'Hestia sont, dans le fond, tout à fait encourageants ! La preuve, c'est que la commission de l'économie a décidé de proroger le mandat qui lui avait été donné, à la demande du Conseil d'Etat. Ne dupliquons pas les choses dont on peut dire aujourd'hui qu'elles ne seront pas utiles, alors que le travail de l'office cantonal de l'emploi est bien meilleur aujourd'hui que par le passé !
Mesdames et Messieurs les députés, il faut par conséquent refuser cette motion qui est tout à fait inutile.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Roger Deneys, à qui il reste trente secondes.
M. Roger Deneys (S). Merci, Madame la présidente. Je voulais simplement dire à M. Gautier que la commune de Lancy a rouvert son bureau il y a six mois. Il a peut-être été fermé pendant longtemps, mais, en l'occurrence, manifestement, la problématique est à nouveau reprise par les communes.
Pour le reste, le but de cette proposition de motion est surtout de renforcer le rôle de l'office cantonal de l'emploi, puisqu'elle vise à supprimer le mandat à la société Hestia. Rien que pour cela et par souci de cohérence, Monsieur Gautier, vous devriez soutenir cette motion ! Je vous invite donc à la renvoyer à la commission de l'économie, pour connaître les chiffres avant de porter des jugements de valeur.
La présidente. Madame Borgeaud, vous avez demandé la parole - il vous reste trente-quatre secondes.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Merci, Madame la présidente. Le bureau de Lancy n'a pas été fermé pour les raisons évoquées par M. Gautier. Il s'agissait d'un bureau multifonctionnel: sa priorité n'était pas spécifiquement de placer les chômeurs ! Si vous aviez été au chômage, vous sauriez ce que c'est: il faut le vivre pour comprendre !
M. François Longchamp, conseiller d'Etat. Après le discours de Saint-Pierre, prononcé en la cathédrale par mon honorable collègue Pierre-François Unger, au nom du Conseil d'Etat, nous avons décidé de faire de l'emploi l'une des trois priorités de la législature. J'ai, dans un premier temps, examiné un certain nombre de solutions expérimentées par d'autres pays européens, notamment certains pays nordiques, qui avaient pris l'habitude de confier à des entreprises privées le mandat de placer, de replacer - ou d'essayer de placer - des chômeurs de longue durée sur le marché du travail.
Nous avons appréhendé ce problème sans aucun apriori idéologique. Nous avons voulu, précisément, que ce soit une expérience pilote. Nous avons demandé à l'Université de Genève - à l'équipe du professeur Yves Flückiger - d'évaluer, dès le début de l'expérience, la qualité, le taux de retour et l'efficacité économique de cette mesure.
Après une expérience pilote d'une année, nous avons, sur la base du rapport du professeur Flückiger fait deux constatations: un, l'efficacité de cette mesure était meilleure que le reclassement classique; deux, elle coûtait plus cher, puisqu'elle était plus volontariste, plus ambitieuse, plus forte. Le professeur Flückiger a conclu que l'efficacité économique de cette opération était grande pour l'Etat de Genève: les économies réalisées à moyen terme étaient très importantes dans la mesure où cette opération évitait que les chômeurs ne terminent à l'Hospice général, au service du RMCAS, avec une désinsertion de plus en plus grande.
Tous ces faits vous sont connus, puisque la commission de l'économie a eu l'occasion d'auditionner l'équipe de Hestia et celle du professeur Flückiger. Tous les rapports ont été donnés et tous les chiffres nécessaires ont été fournis. Et je tiens à vous dire que je ne vois guère quels autres éléments supplémentaires je pourrais vous donner qui ne se trouvent pas dans les rapports.
Sur cette base, cette expérience pilote a donné lieu à un appel d'offres ouvert. Dans le cadre des mesures du marché du travail financées par la Confédération, nous avons fait appel à deux entreprises qui proposaient des mesures du même type, dont Hestia. L'expérience pilote devait laisser place à une mesure permanente, qui permette de reclasser plus facilement, plus durablement, plus efficacement, les chômeurs de longue durée. Ce sont les chômeurs qui sont les plus fragiles, si l'on se réfère aux raisons du taux de chômage plus important à Genève que dans les autres cantons.
Mesdames et Messieurs, je vous invite donc à prendre la mesure de l'ambition qui était la nôtre, le cadre dans lequel nous avons travaillé. Je ne vois guère comment l'on peut s'opposer aujourd'hui à une mesure qui permet de reclasser plus efficacement les chômeurs.
Je vous annonce ici qu'il y a deux mois nous avons commencé une deuxième expérience pilote. Celle-ci porte sur cinquante bénéficiaires du RMCAS, tirés également au sort. Certains sont éloignés du marché du travail depuis plus de dix ans. Les premiers résultats semblent également prometteurs. Nous aurons, sur ce point aussi, l'occasion de vous fournir tous les chiffres, une fois cette expérience pilote terminée. Je prends l'engagement de les fournir à la commission de l'économie. Je ne vois guère l'utilité d'accepter cette motion, alors qu'il y a à peine trois mois la commission de l'économie a obtenu toutes les informations nécessaires.
Je vous demande donc, pour soutenir la politique menée en faveur des chômeurs de longue durée afin qu'ils retrouvent un emploi, de refuser cette motion.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets tout d'abord le renvoi de cette motion à la commission de l'économie, comme cela a été demandé tout à l'heure.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1773 à la commission de l'économie est rejeté par 55 non contre 20 oui et 3 abstentions.
La présidente. Je vous soumets maintenant le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.
Mise aux voix, la proposition de motion 1773 est rejetée par 58 non contre 21 oui.
Débat
M. Christian Brunier (S). Je voudrais tout d'abord saluer notre collègue et amie Véronique Pürro - qui est actuellement en congé maternité - qui a été l'auteure principale de cette motion. Vous le savez sur ces bancs, aussi bien à gauche qu'à droite, nous avons au moins un principe commun: nous saluons les accords paritaires; nous reconnaissons que les conventions collectives sont un ingrédient de la paix du travail. Je le répète, c'est certainement une des valeurs que nous partageons.
Je vous rappelle qu'une convention collective existe en Suisse depuis 1940 dans le domaine de la construction. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Et ce secteur très important de la construction concerne 90 000 travailleurs en Suisse et, tout de même, 4700 travailleurs à Genève. Nous parlons aujourd'hui de l'une des principales conventions collectives qui unit le monde du travail en Suisse.
Malheureusement, en mai 2007, la Société suisse des entrepreneurs, sous l'impulsion - il faut quand même le reconnaître - de sa section zurichoise, qui est très proche des milieux blochériens... (Exclamations.) ...a «cassé», a «shooté» cette convention collective, au grand mépris des travailleurs et des travailleuses de la branche ! C'est grave, bien sûr, pour les travailleurs, puisque cela signifie une dégradation de leurs conditions de travail ! Mais c'est grave aussi pour le monde des entreprises, car lorsqu'une entreprise connaît des tensions sociales, elle est, on le sait bien, moins performante. C'est grave aussi pour l'Europe ! Et si la section zurichoise du monde patronal est très active et très proche de M. Blocher, ce n'est peut-être pas un hasard !
Je vous rappelle que, lorsque nous avons voté les bilatérales, les syndicats patronaux, mais aussi les syndicats d'employés, se sont mobilisés les uns et les autres pour soutenir les bilatérales. Mais en y mettant des conditions ! Et l'une de ces conditions était qu'il n'y ait pas de dumping social. Eh bien, l'abolition de cette convention collective va amplifier le dumping social ! Par ailleurs, il y aura en 2009 un vote de confirmation des bilatérales, et le fait d'avoir dénoncé cette convention collective met aussi en danger la suite de l'histoire commune de l'Europe et de la Suisse. (Brouhaha.)
Le fait d'avoir mis un terme à cette convention collective représente un catalogue relativement long et négatif pour les employés de la branche. Cela signifie la déréglementation du temps de travail, l'arrêt du salaire minimal de la branche, la suppression, pour certains, du treizième salaire, la restriction des vacances, la diminution des prestations pour les maladies de longue durée, la restriction de la protection contre le licenciement abusif, la fin des compensations pour le travail durant le week-end, et c'est aussi un arrêt pour la retraite anticipée. Alors vous le savez, à Genève, les patrons et les syndicats vont - heureusement - arriver probablement à un accord. Nous vous invitons, bien sûr, à accepter cet accord, mais nous voudrions qu'il soit contagieux pour le reste de la Suisse.
Je vous lirai une déclaration qui me semble importante. Il s'agit d'une courte citation: «Plus d'un mois sans convention nationale, ce n'est pas possible ! Si les partis n'arrivent pas à un accord national, je ferai mon possible pour qu'une solution cantonale pallie ce vide. Il est regrettable que cette convention lourde de symbole ait été dénoncée. Il est plus vite fait de rompre la confiance que de la construire.» Cette déclaration, Mesdames et Messieurs de la droite, est de M. François Longchamp. Elle figure dans «Le Temps»... Eh bien, cette motion ne demande rien d'autre que d'appliquer les propos de M. Longchamp, repris dans le journal «Le Temps» ! Et nous espérons, d'ailleurs, que M. Longchamp soutiendra notre motion.
Je terminerai par un slogan patronal. Il est un temps pas si lointain où les patrons genevois disaient : «Quand le bâtiment va, tout va», eh bien, cette motion va tout simplement dans ce sens. Alors, si vous tenez à confirmer la teneur de ce slogan, je vous invite à voter cette motion et à la renvoyer au Conseil d'Etat ! (Applaudissements.)
M. Daniel Zaugg (L). Les conventions collectives sont les garantes de la paix du travail. C'est un objectif vital, aussi bien pour les entrepreneurs que pour les travailleurs. Le conflit qui agite aujourd'hui les milieux de la construction est un problème important qu'il convient de régler dans les meilleurs délais. Sur ces points-là, les libéraux sont entièrement d'accord avec les motionnaires.
Cependant, j'aimerais tordre le cou à quelques idées fausses, propagées par les syndicats et reprises dans la motion. Selon M. Brunier notamment, la dénonciation de la convention nationale aurait pour effet d'annuler toutes les réglementations telles que les salaires minimum, le treizième mois de salaire, la cinquième et la sixième semaine de vacances, le paiement du salaire en cas de maladie et, même, la retraite anticipée... Je peux vous affirmer, en tant que patron d'une entreprise du second oeuvre et au travers de mon expérience en tant que membre des Associations patronales, qu'il n'y a pas, à Genève, de volonté de revenir sur ces acquis sociaux. Bien au contraire, dans notre canton, qui a une tradition de partenariat social fort, les acteurs sociaux mettent en ce moment même tout en oeuvre pour parvenir à un accord local.
Pour ce qui est des inquiétudes concernant le dumping salarial, les partenaires sociaux ont trouvé un accord, sous la houlette du conseiller d'Etat Longchamp, pour que soient respectés les usages découlant des anciennes conventions collectives. Cet accord garantit des conditions de travail, de salaire et de sécurité conformes à celles qui avaient cours avant la résiliation de la convention collective. Il assure également une saine et loyale concurrence entre les entreprises genevoises, suisses et étrangères opérant à Genève. On voit donc que le spectre de la dégradation des conditions de travail agité par les motionnaires est vide de sens.
Mesdames et Messieurs, les conventions collectives ne sont pas des monuments gravés dans le marbre. Elles doivent être régulièrement adaptées à l'évolution du marché. C'est d'ailleurs pour cela qu'elles sont renégociées à intervalles réguliers.
La motion demande au Conseil d'Etat d'intervenir auprès des syndicats patronaux, pour qu'ils signent la convention, et de sanctionner les entreprises en cas de refus. Cela revient à demander à l'Etat de prendre parti dans le processus de négociation: ce n'est pas son rôle ! Le rôle de l'Etat doit, dans cette affaire, se limiter à soutenir les décisions prises par les partenaires sociaux et à assurer qu'elles soient équitablement appliquées, comme cela a été le cas dans l'accord Longchamp.
Une convention collective, c'est le fruit d'un processus de négociations et de concessions mutuelles, dans un but commun: la paix sociale. Pour les libéraux, ce but ne peut pas être atteint en forçant l'une des parties à accepter le point de vue de l'autre. Cette manière de faire serait en effet en contradiction totale avec la liberté nécessaire pour parvenir à un accord mutuellement satisfaisant, ce qui est l'esprit même de toute convention collective. Laissons donc les partenaires sociaux faire leur travail...
La présidente. Monsieur le député, s'il vous plaît, vous devez conclure.
M. Daniel Zaugg. J'y arrive, Madame la présidente ! - ...sans interférence intempestive de l'Etat, car c'est ainsi et seulement ainsi qu'un consensus pourra être trouvé.
Les libéraux invitent les auteurs à retirer leur motion, afin de ne pas politiser davantage un débat qui n'en a pas besoin. Si tel n'est pas le cas, il va de soi que nous refuserons la motion. (Applaudissements.)
M. Gabriel Barrillier (R). J'aimerais ce soir vous faire part de mes préoccupations sur la situation conventionnelle dans la branche sur le plan national, mais aussi de ma profonde conviction sur le rôle des partenaires sociaux. Et je terminerai en vous donnant une information très positive.
C'est vrai que le conflit né il y a bientôt une année n'est pas une simple fâcherie entre partenaires sociaux au sujet du niveau des salaires. Les raisons profondes de cette situation sont multiples. Je ne vais pas entrer dans les détails maintenant, mais je tiens tout de même à dire que l'un des motifs est politique. Et c'est pour cela que je suis préoccupé, parce que cela montre que nous sommes à un «moment psychologique», comme on le dit en Suisse allemande, s'agissant des relations entre le patronat et les syndicats. Bien sûr, le secteur de la construction a connu un passé social troublé: nous avons l'habitude des bras de fer ! Mais ce qui se passe actuellement, tant du côté des syndicats - je le précise - que du patronat, est inquiétant, parce que, en filigrane, il apparaît que certaines forces politiques ne semblent plus favorables au maintien de la paix sociale et au consensus. C'est pour cette raison précise que ce conflit me préoccupe.
Ma conviction, c'est qu'il n'y a pas de stabilité possible et durable, en Suisse et à Genève, sans le partenariat social. Ce partenariat social est la base du contrat social ! Et si ce partenariat peut s'exprimer et si on lui facilite le dialogue, alors, il nous incombe à nous, politiques, d'en être le porte-parole, de confirmer et de ratifier l'accord entre les partenaires sociaux ! J'insiste sur ce point, car il semble que cela ne va plus de soi, ni en Suisse ni à Genève !
J'en viens maintenant à la situation dans notre canton. Il est clair que le conflit risque de perdurer sur le plan national pour les raisons, notamment politiques, que j'ai mentionnées tout à l'heure. Mais nous avons la responsabilité, ici, à Genève - deuxième pôle économique de la Suisse - de pacifier la situation et de faire en sorte que le partenariat social perdure, avec la ratification et l'appui de l'Etat. Je suis en mesure ce soir, en cet instant, de vous indiquer que les partenaires sociaux du canton, syndicats et patronat du secteur de la construction - gros-oeuvre et maçonnerie - se sont mis d'accord sur des bases solides d'une négociation, qui devra déboucher sur la stabilisation, la pacification de la situation à Genève, en attendant que soit trouvée une solution sur le plan national !
La présidente. Vous devez conclure, Monsieur le député, je suis désolée.
M. Gabriel Barrillier. Je conclus ! En précisant que c'est sur cette base paritaire que le gouvernement - le conseiller d'Etat Longchamp, avec l'appui de ses six collègues - pourra ratifier et soutenir - ainsi que la classe politique - cet accord qui doit être accepté pour permettre d'envisager l'avenir avec confiance.
Mme Brigitte Schneider-Bidaux (Ve). Je voulais tout d'abord remercier M. Barrillier de ses propos. En effet, les négociations qui sont en cours à Genève sont un exemple pour toute la Suisse. C'est vrai, il y a eu une rupture des négociations il y a quelques semaines, ce qui aurait pu poser des problèmes, mais une solution est en train d'être trouvée. Heureusement pour Genève et heureusement pour l'exemple que nous pouvons donner, car il faut transmettre un message à la Suisse par rapport à ce problème. Et cette motion va totalement dans ce sens.
Je pense que la proposition du parti socialiste, de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat - surtout parce que l'un de ses représentants siège au Conseil des Etats, à Berne - peut inciter le reste de la Suisse à trouver une solution, comme Genève est en train de le faire - du moins, je l'espère - et comme cela a été promis, puisque cet accord devrait en principe être signé ce lundi, ce que je salue.
M. Eric Stauffer (MCG). Comme vous l'avez constaté, le MCG est signataire de cette motion. Donc, bien évidemment, nous allons la soutenir.
Mais j'aimerais revenir sur quelques propos qui ont été tenus auparavant, par un député du groupe radical, sauf erreur. J'ai en effet entendu les termes: «saine concurrence», «sans convention collective», «économie de marché», etc. On peut interpréter cela comme on veut, on sait qu'il y a sur ce sujet un clivage gauche-droite absolument insurmontable, puisque la gauche veut assurer des salaires minimaux et que la droite est favorable à une économie de marché, pour faire des profits plus importants.
Eh bien nous, au Mouvement Citoyens Genevois, nous sommes contraints d'accepter que les conventions collectives sont nécessaires. Parce que nous avons constaté des dérives incroyables de dumping salarial. Du reste, le MCG déposera bientôt des textes à ce sujet, dont une interpellation urgente écrite. En effet, nous voulons vérifier, à moins que notre ministre puisse nous répondre, le nombre de cas de dumping salarial qu'il y a eu à Genève ces derniers mois, ces dernières années, dans différents secteurs.
Parce que le dumping salarial comporte plusieurs facettes. Je vais vous donner un exemple, pour essayer de synthétiser la réflexion que nous nous avons menée en profondeur au Mouvement Citoyens Genevois. (Commentaires.) En France, nous le savons, il y a quelques millions de chômeurs. Certains jeunes bardés de diplômes cherchent un travail; comme ils ne trouvent pas d'emploi, ils finissent par accepter de livrer des pizzas ou je ne sais quoi. D'autres vont trouver un emploi en Suisse, par exemple un poste de chef de projet, mais ils ont un diplôme d'ingénieur en poche. Ils sont donc surqualifiés pour le poste qu'ils ont trouvé ! Néanmoins, étant donné la différence de salaire qu'il y a entre la France et la Suisse, eh bien, évidemment, c'est tout à fait intéressant pour eux. Ils vont donc accepter le job malgré leurs compétences qui sont supérieures à celles qui sont demandées pour le poste qu'ils acceptent et ils vont être employés pour faire autre chose que le métier qu'ils ont appris. C'est l'une des facettes du dumping salarial, et c'est un réel problème ! (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)
Je reviens au sujet qui nous occupe aujourd'hui. Selon nous, les conventions collectives devraient être étendues à de nombreuses professions, car certaines d'entre elles à Genève sont complètement sinistrées, où le taux de chômage est absolument effarant, et cela n'est pas normal ! Les choses ne sont pas équitables, et, sur ce point, nous rejoignons tout à fait la gauche, ce qui prouve, une fois de plus, que nous sommes en dehors des clivages politiques et que, lorsqu'une idée est bonne, nous la prenons, qu'elle vienne de gauche ou de droite.
Pour toutes ces raisons, nous allons soutenir le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.
M. Mario Cavaleri (PDC). Il est un fait que le souci des motionnaires est partagé par le groupe démocrate-chrétien en ce sens que - et je crois qu'il n'y a pas de clivage politique à ce niveau - nous sommes toutes et tous attachés à la paix sociale, à la paix du travail.
Néanmoins, le groupe démocrate-chrétien ne soutiendra pas cette motion. Pour quelles raisons ? Pour des raisons tout à fait simples, qui ont d'ailleurs été rappelées par plusieurs intervenants avant moi: il s'agit d'abord de relations entre employeurs et employés. Et vous savez que tout le système repose sur cette donnée fondamentale. Cela ne veut pas dire que nous ne sommes pas sensibles aux problèmes lorsqu'ils se présentent: nous pouvons tout à fait soutenir le fait de pouvoir s'exprimer lorsqu'il y a des problèmes aussi importants. Toutefois, au nom de quoi devrions-nous intervenir alors que nous ne sommes pas les payeurs ? Ce sont les entreprises qui le sont !
Pour aller jusqu'au bout du raisonnement, si vous étiez employeurs, seriez-vous prêts à accorder les avantages - comme vous le dites - que les employeurs n'accordent pas ? Je ne le crois pas ! Alors, ne polémiquons pas davantage !
Les propos tenus par M. le député Barrillier sont, je crois, de nature à nous rassurer quant à la situation dans notre canton. Les problèmes ne sont néanmoins pas réglés sur l'ensemble de la Suisse. Mais nous sommes un parlement cantonal: nous ne sommes pas au Conseil national ou au Conseil des Etats, à Berne !
Par conséquent, nous devons bien considérer que les accords qui sont intervenus et ceux qui sont encore à parapher sont de nature à rendre cette proposition de motion - puisqu'elle date du 28 juin 2007 et que nous sommes à la fin février 2008 - relativement dépassée, par les événements, par l'actualité, ce qui est normal. En effet, si nous n'avions pas des ordres du jour aussi longs...
La présidente. Excusez-moi, Monsieur le député, vous devez conclure !
M. Mario Cavaleri. Madame la présidente, je vais conclure ! Eh bien, cette motion aurait été traitée en temps voulu et aurait peut-être connu une autre destinée.
Cela étant et comme l'ont rappelé plusieurs intervenants avant moi, nous faisons confiance au Conseil d'Etat dans son rôle d'arbitre ou de facilitateur, et c'est pourquoi nous ne voyons pas pour quel motif il faudrait renvoyer cette motion dans une commission ou au Conseil d'Etat. Elle n'a tout simplement plus de raison d'être.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Roger Deneys, à qui il reste deux minutes.
M. Roger Deneys (S). Il est évident qu'une convention collective au niveau national ne peut qu'être souhaitée par tout le monde ! Et je ne comprends pas du tout le raisonnement de M. Zaugg, qui se félicite qu'à Genève nous ayons trouvé des solutions et que nous puissions toujours fonctionner sous le régime des conventions collectives dans le domaine de la construction, même si c'est provisoire, même si c'est à reconduire ! Car, fondamentalement, le fait qu'un accord n'existe pas au niveau suisse pénalise les entreprises genevoises ! C'est le risque majeur de ne pas avoir une convention collective au niveau suisse: c'est un risque supplémentaire de dumping, parce que les mandats peuvent attribués - et c'est souvent le cas - en dehors du canton. (Brouhaha.) Donc, rien que pour cette raison et par souci d'équité entre les entreprises, vous devez soutenir le principe d'une convention collective au niveau national !
Monsieur Cavaleri, vous évoquez le fait que nous ne sommes pas au Conseil national... C'est vrai ! Mais il n'empêche que si les politiques, par souci de paix sociale, par souci de progrès économique en Suisse, invitent à la concrétisation d'une convention collective au niveau national, on peut souscrire à cette idée et souhaiter qu'elle aboutisse. C'est simplement un moyen d'indiquer que le politique se préoccupe du fait que cette convention n'est pas conclue.
Et puis, je vous rappelle que vous avez refusé de traiter cette motion en urgence ! Alors, ne venez pas nous dire aujourd'hui qu'elle n'est plus d'actualité ! Tant qu'il n'y a pas une nouvelle convention collective au niveau fédéral, elle a toujours son sens. Parce qu'il faut aboutir le plus vite possible à une nouvelle convention ! Ce n'est donc pas du tout par souci de polémique: c'est par souci d'équité entre les entreprises ! C'est aussi pour éviter les problèmes que cela pose au niveau de l'extension des Bilatérales, et nous savons très bien que c'est l'une des préoccupations des syndicats. Je pense qu'il ne faut pas jouer avec le feu avec ce genre de sujet.
Je vous invite à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)
M. François Longchamp, conseiller d'Etat. J'aimerais saluer dans cette salle toutes celles et ceux - je crois qu'ils sont unanimes - qui ont rappelé que les conventions collectives sont un principe cardinal et que la paix du travail est la condition de la prospérité de notre pays. Elle a permis l'équilibre social et a évité à notre pays de tomber dans une bureaucratie du droit du travail, qui est préjudiciable à la fois aux intérêts des entreprises et à ceux des salariés ou des ouvriers.
S'agissant du dossier de la construction, je suis peu susceptible de tenir des doubles discours. Au nom du Conseil d'Etat, nous avons fait tout ce qu'il était possible pour que cette situation préjudiciable aux intérêts de notre canton, à une branche économique importante et aux intérêts des ouvriers du secteur, ne perdure pas, pour pouvoir continuer à fonctionner dans un cadre connu, clair et prévisible pour tous.
Monsieur Brunier, vous souhaitez que je soutienne votre motion: je ne puis malheureusement pas le faire pour une raison toute simple. Elle a été donnée par M. Barrillier, qui fait partie, d'une certaine manière, de la négociation de ce dossier. Nous sommes dans une négociation délicate. Jusqu'au 29 février, la sécurité juridique de ce secteur est assurée dans notre canton. Je n'ai pas encore la certitude qu'elle puisse l'être au-delà de cette date. Et la priorité absolue du Conseil d'Etat, dans les jours qui ont précédé et dans ceux qui viennent est de permettre aux partenaires sociaux de trouver une solution locale à défaut d'une solution nationale, que nous souhaitons tous.
Dans ce cadre, cette motion tombe mal dans le calendrier... Elle ne facilite en rien ma tâche. Elle ne va pas changer la situation des différents intéressés. Elle aurait plutôt tendance à complexifier cette discussion qui est déjà, je puis vous l'assurer, assez compliquée comme cela !
Tout en ayant parfaitement conscience du poids politique de ce Grand Conseil, qui affirme le principe des conventions collectives et leur utilité, je vous indique que le Conseil d'Etat ne souhaite pas que cette motion lui soit renvoyée. Par contre, il fera tout pour permettre aux partenaires sociaux, aux partenaires syndicaux, aux partenaires patronaux, de trouver une solution, je l'espère, en début de semaine prochaine à Genève.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.
Mise aux voix, la proposition de motion 1775 est rejetée par 46 non contre 33 oui.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous donne rendez-vous à 20h45 précises. Bon appétit !
La séance est levée à 19h10.