République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 8h, sous la présidence de Mme Anne Mahrer, présidente.

Assistent à la séance: MM. Charles Beer, président du Conseil d'Etat, Laurent Moutinot, Pierre-François Unger, David Hiler, François Longchamp et Mark Muller, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: M. Robert Cramer, conseiller d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Luc Barthassat, Jacques Baudit, Roger Deneys, Michel Forni, Jean-Michel Gros, Michel Halpérin, Georges Letellier, Christian Luscher, Claude Marcet, Pascal Pétroz, André Reymond, Pierre Schifferli, Véronique Schmied et Marie-Françoise de Tassigny, députés.

Annonces et dépôts

Néant.

La présidente. Nous sommes au point 88 de notre ordre du jour. Je prie les rapporteurs de s'installer à leur table.

PL 9925-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'exercice 2007 (D 3 70)

Premier débat

La présidente. Monsieur le rapporteur de majorité, avez-vous quelque chose à ajouter à votre rapport ?

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de majorité. En préambule, et peut-être pour lancer la discussion, je voulais faire un petit rappel historique. Il se trouve qu'il y a tout juste deux ans je me trouvais à cette même table pour défendre le budget 2004. A l'époque, vous vous en souvenez peut-être, ce budget avait commencé au mois de décembre par un boni de plus 36 millions. Six mois plus tard, il s'était soldé par un déficit qui culminait d'abord à 431 millions, ensuite à 390, et enfin à 329 millions.

A l'époque, le rapporteur de majorité que j'étais fut confronté à un brillant rapporteur de minorité, qui n'était autre que notre actuel ministre des finances. M. David Hiler représentait l'ensemble des partis de l'Alternative: les Verts, l'Alliance de gauche et le parti socialiste. Dans son rapport de minorité - cela vaut la peine de citer, pour se mettre en forme, des phrases de mon illustre coopinant de 2004 - M. Hiler n'avait pas de mots assez durs pour stigmatiser la politique du Conseil d'Etat, qui voulait aller trop vite, qui perdait la tête face au repli conjoncturel... Je vous lis quelques phrases: «... la minorité estime que le Conseil d'Etat veut aller trop vite en besogne. En termes de calendrier, il se fixe des objectifs nettement plus ambitieux en matière financière que l'amélioration de l'organisation des services, ce qui n'est pas bon signe. ... limiter la croissance des dépenses à 1,3% pendant quatre ans, c'est excessif.» Et M. Hiler, au fil de son rapport, de dénoncer le putsch raté de l'Entente et de stigmatiser les libéraux et les démocrates-chrétiens qui avaient failli saboter la République en n'acceptant pas de voter le budget tel que l'Alternative l'attendait, c'est-à-dire avec, grosso modo, 200 millions de pertes en plus.

Cela, c'était juste pour nous mettre en forme. Je crois que M. Hiler est maintenant tout à fait content que nous ayons accepté ce budget en 2004, sinon le ministre des finances qu'il est aujourd'hui aurait eu affaire à une dette encore plus grande. Mais ce n'est pas là que je voulais en venir.

Quelles conclusions peut-on tirer de ce petit rappel historique ? D'abord, vous me permettrez de noter que la première conclusion que l'on peut tirer est que le parti démocrate-chrétien est bien le seul à ne pas changer d'avis. Il reste d'une stabilité exemplaire, puisqu'il a soutenu le budget en 2004 et qu'il le soutient aujourd'hui. Alors qu'autour de la table beaucoup de choses ont pourtant évolué ! Puisque nos amis libéraux et l'UDC, qui étaient fustigés à l'époque par l'Alternative, se retrouvent de l'autre côté de la table et que notre rapporteur de minorité est maintenant ministre des finances.

Je crois que l'on peut dire que le parti démocrate-chrétien est à la politique genevoise ce que les pierres du Niton sont à la Rade... (Rires.) C'est-à-dire un roc inébranlable sur lequel viennent s'échouer les coups de Joran de l'Alternative et la bise froide de l'UDC ! C'est une base stable qui sait résister aux sirènes de la gauche, qui réclament des sous, encore des sous,... (Exclamations.) ... toujours des sous ! Et qui savent aussi résister aux croassements des corbeaux noirs du parti libéral et de l'UDC qui veulent nous dire: «Plus de sous, pas de sous, pas de sous !» (Exclamations.) Plus sérieusement... (Brouhaha.) Je cherchais un moyen de vous réveiller, je vois que cela vient gentiment.

Pourquoi faut-il aujourd'hui accepter ce budget ? Précisément parce que les choses ont radicalement changé en deux ans. Il y a deux ans, nous nous trouvions confrontés à une situation qui était soutenue par de nombreuses personnes. A l'époque, l'Alternative, mais aussi tous les fonctionnaires. Je rappelle que, quand nous avions dû pendant un jour et demi nous prononcer sur le budget, des centaines de fonctionnaires étaient à nos portes à crier des slogans. Eh bien, la situation a radicalement changé ! Parce que, maintenant, une majorité dans cette république - et elle le prouvera - a compris qu'il fallait être rigoureux en matière de finances, qu'il fallait gérer au mieux l'Etat. De cette majorité, quelqu'un se retrouve justement au poste prestigieux de ministre des finances, et c'est un changement copernicien à Genève. En effet, une majorité s'est maintenant dessinée et a montré sa volonté de redresser la spirale infernale du déficit.

Et l'action menée depuis une année par l'actuel Conseil d'Etat à travers ses plans de mesures P1 et P2, à travers les différentes options qui ont été prises, montre que nous sommes désormais sur le bon chemin et qu'une majorité de nos partis ici a compris ce qu'il se passait et est décidée à soutenir cette action. L'actuel Conseil d'Etat, je vous le rappelle, a quand même fourni un travail remarquable, puisqu'en moins d'une année il a dû nous présenter deux budgets, puisqu'on a voté le budget 2006 au moins de juin et qu'il a fallu préparer en même temps le budget 2007...

La présidente. Il va vous falloir conclure, Monsieur le rapporteur.

M. Guy Mettan. Oui, j'ai fini. On peut toujours se dire que ce n'est pas assez. Mais j'estime, Mesdames et Messieurs les députés, que ce n'est pas le moment de couper cet effort et de fermer la porte qui a été ouverte. C'est ce que je voulais vous dire en préambule de cette journée qui s'annonce longue.

M. Edouard Cuendet (L), rapporteur de première minorité. Tout d'abord, je tiens à remercier les pierres du Niton de leur stabilité, mais, compte tenu du réchauffement de la planète et de la fonte des glaciers valaisans, le PDC sera bientôt submergé par le flot des dettes de l'Etat et disparaîtra corps et âme dans les tréfonds du lac... (Exclamations.) ... pour reprendre une image chère à M. Mettan.

Je suis quand même d'accord avec lui sur certains points, et notamment sur le fait que les choses ont changé depuis 2004. Depuis 2004, le canton de Genève vit une période conjoncturelle absolument extraordinaire: la création d'emplois est importante, même si le chômage reste malheureusement trop élevé; les rentrées fiscales n'ont jamais été aussi élevées dans l'histoire du canton - en dix ans, les recettes de l'Etat sont passées de 5 milliards à 6,7 milliards. Et en parallèle, M. Mettan exprime l'idée que les charges sont sur le point d'être maîtrisées et que le Conseil d'Etat fait un travail gigantesque pour réduire ou contenir le déficit.

Comme vous le savez, le parti libéral et d'autres partis dans cette salle ne partagent pas forcément ce point de vue, parce qu'ils constatent que les améliorations que nous avons pu remarquer ne sont pas dues à des efforts approfondis sur le fonctionnement de l'Etat et sur le contrôle des dépenses, mais bien à des recettes extraordinaires imputables uniquement à la conjoncture. Nous aurons l'occasion de démontrer aujourd'hui que ce budget n'est, d'abord, pas conforme à la LGAF sur certains points, et que les promesses du Conseil d'Etat n'ont pas été tenues, notamment en ce qui concerne la maîtrise des charges. Donc, je ne partage de loin pas l'enthousiasme exprimé par les pierres du Niton sur ce sujet. Nous aurons l'occasion d'y revenir tout au long de la journée.

M. Eric Bertinat (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Le rapport de minorité que l'UDC vous présente se veut aussi répétitif que les budgets déficitaires présentés depuis des années. Depuis 2001, date depuis laquelle notre parti est représenté dans ce parlement, il dénonce le manque de volonté politique pour arrêter l'hémorragie de nos dépenses et diminuer la dette. En écoutant Guy Mettan, je constate qu'effectivement en 2004 il y a eu un break dans l'opposition de l'UDC au budget, qui a eu la faiblesse de croire en un plan quadriennal dont chacun sait ce qu'il est advenu.

Vous le savez - cela a été assez dit et mon collègue Cuendet vient de le rappeler - 2006 est une année économiquement faste. Les résultats du troisième trimestre sont comparables à ceux de 2000, qui représentent une référence conjoncturelle haute pour Genève. Les indicateurs conjoncturels pour ces prochains mois sont bons pour l'économie genevoise. Sur le marché du travail, le nombre d'emplois progresse pour le sixième trimestre consécutif et le chômage recule, mais dans des proportions encore bien trop modestes.

Seule fausse note dans cette embellie, le nombre de places de travail occupées par des frontaliers continue sa progression, du fait de l'ouverture rapide du marché du travail suite aux accords bilatéraux. L'arrivée de très nombreux Européens dans les départements de l'Ain et de la Haute-Savoie pénalise lourdement les travailleurs genevois.

Ainsi qu'on peut le constater aisément, la plupart de ces difficultés ne trouveront de solution que dans le moyen et le long terme et elles auront évidemment un prix. Or, avec la politique suivie par les autorités de ce canton et exprimée dans le budget 2007, nous allons continuer à peiner à joindre les deux bouts, sans améliorer quoi que ce soit dans nos finances. Nous allons continuer à payer des centaines de millions de francs d'intérêts aux bailleurs de fonds - ce qui doit plaire aux socialiste, qui continuent d'accepter ces budgets - à hypothéquer notre avenir, liés que nous sommes à notre dette.

Si l'UDC s'inquiète particulièrement pour les années à venir, c'est parce qu'elle garde les yeux ouverts sur ce qui se fait dans les autres cantons, dans l'administration fédérale et dans les pays environnants. Dans les autres cantons, la chasse aux chiffres rouges est ouverte depuis longtemps. Au sein de la Confédération, bien que de nombreuses mesures parfois douloureuses aient été entreprises, il ne sera pas possible de réduire la dette. Une des causes principales de cette impossibilité est l'explosion des dépenses relatives aux assurances sociales. Les autres groupes de tâches devront, dans les faits, céder du terrain.

Une comparaison peut être faite avec notre canton, puisque les principales subventions en hausse représentent à elles seules la quasi-totalité de l'écart 2006-2007. Elles touchent essentiellement le secteur social: assurances-maladie, Hospice général, parts du canton à l'AVS-AI-OCPA et aide à domicile, soit 80 millions, et une hausse budgétaire de près de 3%.

Enfin, les pays voisins sont écrasés comme nous par les dettes et remettent difficilement en cause, comme nous, la politique de l'emprunt systématique pour faire tourner les comptes. La plupart des spécialistes demandent de réduire le niveau de l'endettement des collectivités publiques et de retrouver l'équilibre dans les prochaines cinq années. Et que fait-on à Genève ? La réponse est dans le projet de budget présenté en septembre 2006. En termes d'économies réelles, tout tourne autour des plans de mesures P1 et P2. Pour 2007, on espère dégager ainsi 80 millions de francs.

L'UDC reste favorable à cette démarche, qui permettra, selon les promesses du Conseil d'Etat, un retour à l'équilibre en 2009. Cependant, l'UDC ne peut pas comprendre que l'on accepte dans le même temps un protocole d'accord qui relance les mécanismes salariaux et qui annulera une bonne part des économies dégagées par le fameux plan de mesures et qui coûtera 50 millions pour 2007 et 80 millions pour 2008, année qui promet d'être particulièrement difficile, avec 200 millions de francs de dépenses d'ores et déjà annoncées.

Rien que l'augmentation des dépenses sociales, la reprise des mécanismes salariaux et l'indexation cumulée donnent un chiffre égal au dépassement du budget 2007. Ajoutez à cela une augmentation des produits fiscaux de 138 millions de francs par rapport au budget 2006, 70 millions de «pêche miraculeuse», ainsi que l'a écrit judicieusement le rapporteur de majorité, et l'on arrive à une augmentation de dépenses entre les budgets 2006 et 2007 de 350 millions, sans parler de la réduction artificielle du poste «Amortissements, provisions, réserves et irrécouvrables».

L'UDC n'arrive pas à croire qu'il faut encore patienter. Le rétablissement de nos finances passera inévitablement par des coupes douloureuses, principalement dans les charges. L'UDC refuse donc ce budget, persuadée qu'une majorité de partis prendront tôt ou tard cette douloureuse décision et laisseront au Conseil d'Etat la responsabilité de revoir sa copie. Le ton du rapport de majorité laisse tout au moins penser que ce temps s'approche.

M. Pierre Weiss (L). J'ai passé une très mauvaise nuit... (Exclamations.) ... parce que tout à coup une phrase de l'excellent rapport de mon collègue Cuendet, que j'ai lue encore hier soir, a suscité le doute en moi. Si une réponse positive ne peut y être apportée par M. Hiler dans les trois minutes de mon intervention - parce qu'il s'agit d'une demande de renvoi en commission, je le précise d'emblée - alors nous devrons effectivement renvoyer ce budget en commission, à moins de le renvoyer au Conseil d'Etat, cela pour la raison suivante: l'article 7, alinéa 3, de la LGAF n'a pas été respecté. Il prévoyait le dépôt obligatoire d'un plan financier quadriennal par le Conseil d'Etat.

Au surplus, M. Hiler s'était engagé à le faire au cours d'une séance de juin. C'est ce qui a occasionné une très mauvaise nuit: j'ai dû aller rechercher les procès-verbaux de commission. Je vais vous lire sa déclaration du mois de juin. Que dit cet article 7 de la LGAF à l'alinéa 3 ? Vous le trouvez aux pages 302 et 303 du rapport de notre collègue Cuendet: «Lorsque le budget de fonctionnement relatif aux opérations courantes de l'Etat de Genève prévoit un excédent de charges dans les limites prévues à l'alinéa 2, le Conseil d'Etat doit soumettre simultanément au Grand Conseil un plan financier démontrant le retour à l'équilibre dans un délai de quatre ans au maximum. Le plan financier doit prévoir un excédent de charges en diminution régulière chaque année.» Mercredi encore, le dépôt d'un tel plan financier quadriennal n'a pas été fait en commission des finances. En page 15 du procès-verbal de la commission des finances du 7 juin 2006 - il s'agissait alors du vote du budget 2006 - M. Hiler déclarait, c'est en gras souligné: «Il est donc tout à fait normal que le PFQ soit présenté avec le projet de budget 2007 et sur ce point, je - David Hiler - demande une tolérance de deux mois en commission. En effet, compte tenu du travail considérable qu'a dû fournir l'administration pour procéder à la réorganisation départementale, au projet de budget 2006 amendé et au bouclement des comptes 2005, le PFQ ne pourra être présenté que deux mois après le dépôt du budget, mais tout de même avant le vote du projet de budget 2007.» M. Hiler ajoutait, ce n'était pas souligné parce qu'évidemment la dette était moins importante,...

La présidente. Il va falloir conclure, Monsieur le député...

M. Pierre Weiss. ... avoir «pris l'engagement de remettre ce document durant l'automne.» Donc, au titre du respect de la légalité auquel les libéraux sont particulièrement attachés, et nous l'avons montré à propos du dépassement budgétaire,...

La présidente. Votre temps de parole est terminé.

M. Pierre Weiss. ... nous demandons que le Conseil d'Etat nous remette dans les meilleurs délais, c'est-à-dire maintenant, ce plan financier quadriennal, faute de quoi nous renverrons ce budget en commission.

La présidente. Je vous rappelle l'alinéa 2 de l'article 78A: «Dès qu'une proposition est formulée, la discussion porte alors uniquement sur celle-là. Un seul député par groupe peut s'exprimer - excepté le groupe du député ayant formulé la proposition - ainsi que les rapporteurs et le représentant du Conseil d'Etat. La durée de chacune des interventions ne doit pas dépasser trois minutes.» Ensuite, bien sûr, nous voterons sur le renvoi en commission.

M. Eric Stauffer (MCG). J'aimerais dire d'emblée que nous sommes en train de parler ici d'un budget de 7 milliards de francs... Alors, quand ce parlement perd des heures pour des subventions de 10 000 F, trois minutes pour 7 milliards, cela me paraît peu ! Mais enfin, c'est le règlement... Nous le respectons. Je vais faire très vite, je vais simplement corriger certains propos de M. le député Bertinat, qui parlait de l'arrivée... (Protestations.)

La présidente. Sur le renvoi en commission...

M. Eric Stauffer. Mais oui, Madame la présidente, c'est sûr que je vais parler du renvoi en commission, mais juste pour dire à M. Bertinat que les frontaliers n'ont rien à voir avec les accords bilatéraux: il s'agit des accords de libre circulation. Enfin, pour un député frontalier, c'est une méconnaissance... (Protestations.)

Une voix. Ce n'est pas ce qu'il a dit !

M. Eric Stauffer. Sur le renvoi en commission, Madame la présidente, nous avons deux choses: encore une fois, les libéraux et l'UDC vont porter préjudice à la fonction publique, parce que si l'on repart en douzièmes, il n'y aura aucun ajustement des salaires, des indices sur le renchérissement du coût de la vie. C'est déjà la première constatation.

Deuxième chose: je crois que le Conseil d'Etat, même si ce n'est pas parfait, a quand même réalisé un travail remarquable dans son budget. C'est vrai qu'aujourd'hui il n'a pas présenté un plan quadriennal, néanmoins cela ne nous empêcherait pas de voter le budget, avec l'engagement ferme du Conseil d'Etat que cette situation sera récupérée au plus vite, c'est-à-dire dans les semaines qui viennent. Partant de ce principe-là, Madame la présidente, nous nous opposerons au renvoi en commission.

M. Gabriel Barrillier (R). Le groupe radical a l'impression que nos collègues libéraux, tels les carabiniers d'Offenbach, arrivent sur le champ de bataille avec un peu de retard...

Une voix. Mieux vaut tard que jamais !

M. Gabriel Barrillier. ... et nous estimons qu'on avait toute latitude d'examiner dans les détails le fond et la forme de cette problématique. Dès lors, nous nous opposerons au renvoi en commission.

M. Christian Bavarel (Ve). C'est vrai que nous sommes quelque peu surpris de la proposition des libéraux. Nous nous demandons: de quoi ont-ils peur ? Il y a quelque chose qui est en train de se passer. Il semble qu'ils perdent la majorité... En même temps, ils perdent pied ! On va donc laisser les libéraux se noyer et on va simplement proposer de refuser ce renvoi en commission.

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Une fois de plus, les libéraux tentent une manoeuvre dilatoire, qui viserait à priver les Genevois d'un budget. Vous savez que nous ne pouvons pas nous permettre d'avoir le régime des douzièmes provisoires à répétition. C'est une source d'instabilité, d'insécurité ! Ce que vous proposez est parfaitement irresponsable.

Effectivement, comme l'a dit M. Barrillier, vous faites mine de découvrir tout à coup qu'il manque un plan quadriennal. Nuit blanche ou pas, ces constatations sont non avenues et mal fondées. En ce qui nous concerne, c'est une question politique: nous devons discuter de ce budget aujourd'hui. Le Grand Conseil doit pouvoir le voter et nous refuserons le renvoi en commission. J'ajouterai aussi que, finalement, nous savons parfaitement que le budget rentre dans les limites de la LGAF s'agissant des déficits acceptables. Nous refusons donc le renvoi en commission et nous proposons de poursuivre la discussion.

La présidente. La parole est à M. le député Guillaume Barazzone.

M. Guillaume Barazzone (PDC). C'est M. Gillet qui parlera pour nous sur le renvoi en commission.

La présidente. Bien. Dans l'intervalle, je passe la parole à M. Claude Jeanneret.

M. Claude Jeanneret (MCG). Ce n'était pas pour le renvoi en commission, Madame la présidente.

M. Gilbert Catelain (UDC). Je crois que, dans quelques années, le député Aubert pourra faire une étude psychiatrique sur la capacité de ce parlement à voter systématiquement des budgets déficitaires, à faire fi des lois qu'il a lui-même votées et à marcher sur la volonté populaire exprimée... (L'orateur est interpellé.) ... dans le cadre d'une votation sur cet objet. Je crois que nous prenons ici une responsabilité.

Que la gauche ne veuille pas respecter la volonté populaire parce qu'elle était contre cette loi, je peux le comprendre ! Mais c'est autre chose de la part de certains groupes qui ont soutenu cette loi - notamment les radicaux, qui donnent souvent des leçons de gestion budgétaire, mais font exactement le contraire - de la part de ces partis, qui se sont engagés sur un compromis minimal au niveau de cette modification de la LGAF... Il me semble qu'il y a un non-sens proche de la schizophrénie.

La question n'est pas de savoir si on aime ou on n'aime pas, si on veut ou on ne veut pas: il s'agit d'une obligation. Une obligation légale. Le gouvernement doit - ce n'est pas «peut» - nous présenter simultanément un plan qui démontre le retour à l'équilibre en quatre ans. Vu l'évolution connue des dépenses et des reports de charges dans le cadre de la répartition entre Confédération et cantons, on peut douter de notre capacité financière à retourner à l'équilibre dans les quatre prochaines années. Pour ma part, j'attends la réponse du Conseil d'Etat sur ce point, mais si le Conseil d'Etat n'est pas en mesure de nous donner une garantie concernant ce plan financier quadriennal, nous serons dans l'obligation de renvoyer...

Une voix. Non, non, non !

M. Gilbert Catelain. ... ce budget en commission, sachant que c'est de toute manière une mauvaise décision, mais qui est obligatoire, parce qu'on sait que les douzièmes ont des effets pervers sur les charges de l'Etat.

M. François Gillet (PDC). Le parti démocrate-chrétien est un parti gouvernemental, et qui a le sens des responsabilités... (Protestations.) Nous ne pouvons nous permettre, Mesdames et Messieurs, de renvoyer ce budget en commission. La commission des finances a eu tout loisir d'étudier tous les aspects de ce budget et nous pensons que les conséquences d'un renvoi en commission, notamment en termes de douzièmes provisoires, ne sont pas acceptables. Nous refuserons donc le renvoi en commission.

Mme Sandra Borgeaud (Ind.). On attend tous ce budget depuis déjà pas mal de temps. Nous essayons, en tout cas depuis une année, de travailler de manière cohérente et d'éviter de prendre des mois de retard, ce que nous avons plus ou moins réussi à faire. Cependant, il est clair que, dans ce projet de loi, il manque effectivement le plan quadriennal. J'attends évidemment la réponse du Conseil d'Etat à ce sujet, mais il semblerait logique que le plan quadriennal, en ce qui concerne l'Etat, doive normalement figurer dans les projets de lois. Je ne souhaite évidemment pas retarder les travaux, mais si le règlement le prévoit, je serai dans l'obligation de soutenir le renvoi en commission.

La présidente. Je passe la parole à M. le rapporteur de première minorité qui, lui aussi, ne peut parler que trois minutes.

M. Edouard Cuendet (L), rapporteur de première minorité. Je parlerai même moins. Juste pour dire que quand, parmi les bancs de derrière, on dit qu'on découvre cela aujourd'hui, ce n'est pas vrai, puisque cela apparaît noir sur blanc dans mon rapport de minorité en page 303. Je dis clairement que l'absence d'un PFQ est illégale.

Ce qui est absolument irresponsable, c'est d'accepter un budget déficitaire à hauteur de 280 millions dans une période conjoncturelle absolument exceptionnelle, avec des recettes fiscales historiques... (L'orateur est interpellé.) J'expliquerai plus tard, Monsieur Unger, que les dissolutions de provisions de la Fondation de valorisation sont des recettes extraordinaires, qui ne doivent pas être prises en compte dans le calcul du déficit selon la LGAF.

Ensuite, ce qui est irresponsable, c'est de ne prendre aucune mesure pour diminuer la dette colossale qui grève les finances genevoises et que les générations futures devront assumer d'une manière ou d'une autre. Ce qui est irresponsable, c'est de ne pas respecter la LGAF sur le plan financier quadriennal alors que les gens qui nous observent - notamment l'agence Standard & Poor's, qui note le canton de Genève - attendent ce genre de plans financiers quadriennaux pour noter le canton, alors même que les taux d'intérêts sont en train de monter. Cela aura des conséquences absolument dramatiques, beaucoup plus dramatiques que les douzièmes provisoires ! Je soutiens donc évidemment le renvoi en commission.

La présidente. La parole est à M. le conseiller d'Etat David Hiler, pour trois minutes également.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. La réponse tient en deux points. Le premier est que les grandes lignes ont été données au mois de mars, c'est une croissance des charges de 1% au maximum chaque année et une croissance des recettes de 2,5%. Pour le moment, nous respectons cette avance. Nous sommes donc avec un plan qui dit peu de choses, mais au moins ce qu'il dit, nous le tenons, contrairement à ce qui a pu se passer pour d'autres plans financiers.

Nous sommes matériellement, aujourd'hui, dans l'incapacité de fournir un plan financier qui soit réaliste, pour trois raisons. La première, c'est la difficulté d'intégrer la RPT, pas en termes des 90 millions supplémentaires, mais tout simplement par les flux financiers nouveaux qu'elle présuppose. Il y a un certain nombre de réponses qui sont pour moi moins que claires, concernant par exemple les routes nationales. Est-ce qu'il faut ou non passer les amortissements en une seule année pour l'ensemble de la part que nous allons céder à la Confédération, ou est-ce que, comme d'autres cantons, il faut continuer à amortir ce que nous ne posséderons plus ? C'est une question intéressante.

Les autres questions portent - disons-le clairement - sur le fait qu'à l'heure actuelle nous n'avons pas encore passé un accord avec les communes et que celui-ci est totalement déterminant quant à l'allure qu'auront les budgets 2008 et 2009. Si cet accord ne se passe pas, certains ici pourront être contents: il y aura en effet des coupes assez dramatiques, il faut le dire. Si cet accord se déroule normalement, comme cela semble devoir être le cas, nous pourrons répondre. Aujourd'hui, aller plus dans le détail, c'est, je vous le répète, se condamner à l'avance à prétendre des choses qu'on ne sait pas encore.

La dernière raison est que, je dois vous le dire tout à fait franchement, les services ont terminé le premier travail et les résultats ont été livrés à votre serviteur il y a très exactement une semaine. Ils n'intègrent pas les nouveaux flux, il faut le dire aussi, ils intègrent simplement les totaux et des volontés. Il y a un certain nombre d'arbitrages qui doivent maintenant être faits par le Conseil d'Etat - puisque c'est du brut de décoffrage - en fonction des projets précis annoncés par les services. Ce n'est pas du macroéconomique, qui dit: «Ce sera comme cela et pas autrement.» Vous pouvez, bien sûr, en tirer une conclusion et dire que - puisque nous ne respectons pas la loi sur ce point parce que, matériellement, nous sommes incapables de le faire - il faut...

La présidente. Il va falloir conclure.

M. David Hiler. ... il faut refuser effectivement d'entrer en matière sur votre budget. Cela ne vous fera pas avancer d'une semaine le dépôt de ce plan quadriennal, qui devra être étudié assez longuement - quelques semaines - par le Conseil d'Etat. Les différents départements devront répondre. Si l'on veut instaurer encore un peu de paralysie - il y a des spécialistes dans le domaine, dans ce parlement et ailleurs - on peut, mais, pour l'heure, je ne vois pas en quoi vous ne pourriez pas vous contenter des engagements pris dans le cadre du plan de mesures. Ceux-là, au moins, sont des chiffres sur lesquels nous nous sommes engagés et que nous avons respectés pour deux ans, ce qui ne m'avait pas frappé avec les précédents plans financiers quadriennaux.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 9925 à la commission des finances est rejeté par 46 non contre 27 oui.

La présidente. Je vous rappelle que le débat se poursuit selon l'ordre des orateurs inscrits auparavant. Je passe donc la parole à M. Pierre Weiss.

Une voix. Il a déjà parlé !

M. Pierre Weiss (L). Madame la présidente, je vous remercie, mais je ne prendrai la parole que lorsque ce sera nécessaire. Je remarque simplement que le gouvernement a dit qu'il était dans l'incapacité de respecter la loi.

M. Eric Stauffer (MCG). J'ai entendu des propos, Madame la présidente, comme quoi il fallait respecter la loi. Je renverrai les messieurs qui ont tenu ces propos quant à la B 5 05, alors qu'elle est violée systématiquement depuis des années ! Bref, cela étant, c'est une bonne chose que le budget n'ait pas été renvoyé en commission. Encore une fois, je répète ce que j'ai dit au préalable: ce n'est peut-être pas la panacée, mais il faut, à un moment donné, faire des actes responsables. Je pense qu'il faut accorder en tout cas le bénéfice du doute au Conseil d'Etat et faire confiance à son travail.

Même si le MCG n'est pas un parti gouvernemental - pas encore... (Remarques. Brouhaha.) ... il faut faire confiance au Conseil d'Etat et le laisser travailler, car les finances genevoises sont évidemment dans une situation catastrophique - sans vouloir refaire l'histoire de ce qui nous a amenés à cette situation. Encore une fois, c'est par un acte responsable et par solidarité pour le canton de Genève et pour nos institutions que, pour l'instant, nous allons dans ce sens.

La présidente. Je vous rappelle que, ayant repris le débat, nous sommes à sept minutes par groupe.

M. Gabriel Barrillier (R). Nous entrons dans le vif du sujet. A l'exception d'une ou deux abstentions - j'avais noté «sauf un coup de trafalgar», qui n'a pas eu lieu - le groupe radical votera le budget 2007, parce que,... (L'orateur est interpellé.) ... Monsieur Catelain de l'UDC, nous avons le sens de la continuité de l'Etat ! Et parce que notre groupe n'entend pas juger le Conseil d'Etat sur la base d'un seul budget annuel, mais bien sur sa capacité à se conformer à ses objectifs de législature, à savoir de rééquilibrer les finances publiques et d'amorcer une réduction de la dette d'ici à 2009.

Bien sûr, et M. Cuendet a raison, Genève vit actuellement une embellie sur le plan économique et les citoyennnes et citoyens qui nous regardent peuvent à juste titre se demander pourquoi ces objectifs ne peuvent pas être atteints immédiatement. C'est que, chers collègues, le mal et les dysfonctionnements dont souffre notre canton sont profonds, ils ne peuvent pas être effacés d'un simple coup d'éponge. Compte tenu de ce mal endémique, notre groupe avait admis que les objectifs de redressement progressif présentés par le Conseil d'Etat avaient été exprimés de façon suffisamment claire et avec un engagement suffisamment ferme et solennel pour entraîner notre confiance et notre approbation.

S'agissant du degré de crédibilité du budget 2007, certains estiment que le verre est vide et d'autres qu'il est presque plein: pour les uns, la hausse globale des dépenses se situe dans la limite de 1% fixée il y a une année; pour les autres, la progression va bien au-delà, si l'on considère l'évolution réelle des charges de personnel, les dépenses générales et les subventions. Les plus critiques - nous allons encore les entendre, sans doute - estiment que la cible ne pourra être atteinte qu'en fonction d'un concours de circonstances positives, voire d'une aubaine qui se traduirait par une comptabilisation discutable et adroite des réserves et des provisions constituées à différentes époques et pour différents objectifs. Nous ne saurions, en l'état, épouser la thèse selon laquelle ces concours de circonstances ne seraient utilisés que pour masquer l'absence de volonté de maîtriser les dépenses réelles, en particulier de la masse salariale. Nous ne devons pas nous voiler la face: les mesures prises jusqu'ici en matière de ressources humaines sont totalement insuffisantes, et nous le soulignerons lors du débat sur le projet de loi 9949-A.

Notre groupe pose dès lors la question existentielle que vous devez toutes et tous vous poser sur ces bancs: le Conseil d'Etat parviendra-t-il à rattraper au cours de la présente législature les retards enregistrés jusqu'ici ?

La réponse à cette question n'est pas seulement liée aux mesures prises et aux résultats obtenus dans le domaine des finances; elle doit être replacée dans une appréciation plus large de l'action gouvernementale, sur des dossiers qui ont autant d'importance pour l'avenir de Genève que le rééquilibrage indispensable des finances cantonales. Nous songeons en particulier à l'action volontariste courageuse et intelligente de plusieurs magistrats - notamment de l'Entente, chers amis libéraux ! - qui ont obtenu ces derniers mois des avancées significatives dans des dossiers aussi importants que la lutte contre le chômage et la crise du logement. Car, soit dit en passant, construire plus de logements à Genève rapatriera de la substance fiscale.

La lecture du budget doit se faire à la lumière de l'action gouvernementale prise dans son ensemble, action qui dépend de la résolution des problèmes clés, tels que ceux que je viens d'énumérer. Cela rappelé, le groupe radical avertit tout de même le gouvernement qu'il doit sans délai s'engager dans une voie beaucoup plus exigeante et plus austère - dans tous les cas beaucoup plus rigoureuse - que celle suivie jusqu'à aujourd'hui, et ce sur plusieurs fronts porteurs d'économies structurelles: le fonctionnement de l'Etat, la gestion des ressources humaines et le partage des tâches ainsi que la péréquation entre le canton et les communes.

C'est bien en fonction de l'action globale, je le souligne, du Conseil d'Etat sur les dossiers chauds et déterminants pour notre avenir que le groupe radical, dans sa très large majorité, votera ce budget. Notre position n'est pas guidée par un manque d'esprit critique ou par une faiblesse politique, car nous avons, je l'ai déjà dit, le sens de l'Etat et de l'intérêt général.

Je terminerai en soulignant ce qui suit: aujourd'hui, nous sommes convaincus qu'il faut éviter de tomber dans l'orthodoxie à tous les niveaux, au risque, chers collègues, de faire le lit des manoeuvres de sabotage politique que préparent déjà dans l'ombre et hors de ce Conseil des forces qui ont intérêt à ce que la machine se grippe et à ce que l'Etat tombe dans l'anarchie et la contestation.

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Le budget qui nous est soumis aujourd'hui est un budget pragmatique, qui doit tenir compte de paramètres contradictoires. Il y a la nécessité de contenir les charges et de stabiliser la dette sans pour autant toucher aux prestations indispensables à un Etat qui se veut encore social. De plus, il y a le carcan des freins aux dépenses, qui impose des contraintes supplémentaires. C'est donc à un exercice très délicat que le Conseil d'Etat s'est livré pour élaborer ce budget. Les socialistes saluent cet effort.

Nous rappelons aussi que le Conseil d'Etat a su renouer le dialogue avec la fonction publique et aboutir à un accord qui permet d'appliquer à nouveau les mécanismes salariaux, même partiels, n'en déplaise à l'UDC et aux libéraux, qui auraient peut-être voulu, au contraire, voir les conflits sociaux reprendre. A ce propos, je me plais à mentionner une enquête qui a paru dans la presse pas plus tard qu'hier, qui montrait que, selon l'Office fédéral de la statistique, les fonctionnaires genevois ne sont pas les nantis que certains se plaisent tout le temps à décrire. En fait, leur rémunération est honnête, mais sans plus. Je crois donc qu'il faut une fois pour toutes arrêter de dire que les fonctionnaires genevois sont les plus nantis de la République. Voilà donc pour les bons points concernant ce projet de budget.

Malgré le discours rassurant du ninisme: ni hausse d'impôts ni baisse de prestations, nous sommes inquiets au sujet des futures décisions qui seront prises concernant les domaines du social et de la santé, car nous savons que, pour les EMS et les institutions pour personnes handicapées, les budgets vont être bloqués pour quatre ans. Si l'on met cela en parallèle avec l'augmentation des besoins, eh bien, on risque immanquablement d'arriver à une baisse de prestations.

Nous rappelons aussi que les bénéficiaires de l'assistance ont déjà vu, eux, le montant de l'aide qui leur est apportée diminuer. C'est quelque chose qui est difficile à accepter. Cela aussi, nous l'avions dénoncé. Nous constatons que malheureusement, pour l'instant, il y a encore un manque de symétrie entre les sacrifices demandés et que ce sont les plus fragiles qui ont commencé à trinquer.

Concernant les recettes, on sait que, malgré l'année 2006 qui s'avère plutôt prospère - nous verrons quels seront les comptes - les rentrées fiscales ne seront pas suffisamment importantes pour que l'on puisse raisonnablement espérer assainir les finances publiques sans trouver de nouvelles recettes. Par exemple, revenir sur la diminution d'impôts... (Protestations.) ... qui avait été proposée de façon démagogique par les libéraux et qui continue malheureusement à plomber le budget de l'Etat.

Finalement, malgré ces réticences, nous pensons, comme je l'ai dit tout à l'heure, qu'il est important que l'Etat de Genève puisse disposer d'un budget, car le régime des douzièmes provisoires à répétition n'est pas acceptable. Vous le savez, cela engendre de l'instabilité et un surcroît de travail pour l'administration alors qu'on veut qu'elle soit plus efficiente. Cela contrevient donc au principe de bonne gestion. Il est important que nous puissions disposer d'un budget. Vous l'avez compris, ce budget n'est pas idéal pour les socialistes, mais, dans le contexte actuel, il est acceptable, et nous voterons l'entrée en matière.

M. Christian Bavarel (Ve). Aujourd'hui, nous faisons un des actes les plus importants pour ce parlement, c'est l'adoption du budget. Bien évidemment, les Verts pourraient aussi commencer à dire: «Nous n'avons pas vu sur les lignes d'investissements que tous les immeubles avaient passé aux normes Minergie Plus, nous avons encore une qualité de l'air déplorable à Genève et nous avons des conditions sanitaires qui ne sont pas bonnes... ». Aujourd'hui, ce budget nous pose une autre question: est-ce que nous osons réussir ? Est-ce que ce parlement est prêt à réussir ?

Le Conseil d'Etat nous a donné une méthode. Il nous a donné des indicateurs, il nous a dit, nous le voyons jour après jour, que ces indicateurs sont suivis. Nous voyons aussi qu'il y a une maîtrise des charges, ce qui nous semble être la chose la plus importante. Nous voyons que tout cela fonctionne. Reste à nous demander si nous avons peur si nos partis politiques sont trop faibles pour faire des accords, pour faire de la politique, pour soutenir ce gouvernement.

Nous, nous voulons oser réussir, nous voulons réussir tous ensemble, avec vous, avec l'ensemble de ce parlement, et faire un projet pour Genève, sortir Genève de l'ornière où elle est.

Nous avons une urgence avec la dette que Genève supporte aujourd'hui, qui équivaut environ à 300 millions d'intérêts par année, c'est-à-dire 3000 postes de travail, ce qui est phénoménal. Donc aujourd'hui, suivons notre gouvernement, appuyons cette démarche, qui est saine, et, tous ensemble, osons réussir !

M. Guillaume Barazzone (PDC). Comme l'a dit mon collègue Guy Mettan, le groupe démocrate-chrétien votera ce budget. Parce qu'il y a une volonté de changement palpable de la part du Conseil d'Etat; il y a des avancées, dans la mesure où le gouvernement a économisé sur la machine étatique environ 69 millions. Mais c'est un petit «oui» - permettez-moi de tempérer les propos de mon collègue Guy Mettan - l'endettement de notre canton étant alarmant.

La dette est astronomique. M. Bavarel l'a dit: les intérêts liés à cette dette croissent chaque année, et je crois que si l'on prend en considération ce budget, il faut tenir compte de la dissolution de provisions de la Fondation de valorisation - environ 70 millions - des plus-values, qui équivalent à environ 15 millions, ainsi que des transferts d'actifs et, bien évidemment, de la conjoncture favorable de cette année. Donc, je crois qu'il n'y a pas de quoi tirer des conclusions extrêmement favorables de ce budget. On l'a dit, c'est un oui. Un petit oui pour le budget de cette année, mais, comme le Conseil d'Etat, nous voulons de ce dernier une vision plus générale, qui s'inscrive dans la durée.

Que nous a dit le Conseil d'Etat ? Il nous a affirmé qu'en 2009 il voulait arriver à l'équilibre budgétaire. Soit, nous en prenons acte. Mais, il y a quelques semaines, David Hilair nous disait: «Dans le fond, les propositions de mesures P1 et P2 ne permettront pas - nous le savons aujourd'hui - d'endiguer le déficit structurel de l'Etat.» C'est bien de cela qu'il s'agit, puisque la conjoncture fluctue. Ce qui nous intéresse, au PDC, c'est d'endiguer le déficit structurel de la machine étatique. Aujourd'hui, à la manière dont le gouvernement compte, le Conseil d'Etat nous dit: «Nous n'y arriverons pas en 2009.»

Compte tenu de sa politique du ninisme annoncée lors du discours de Saint-Pierre, il y a deux possibilités: soit une augmentation d'impôts, soit une diminution des prestations avant 2009. On sait aujourd'hui que le Conseil d'Etat devra se livrer à ce choix. Or, à moins de penser que le Conseil d'Etat a déjà prévu d'augmenter les impôts - ce que le PDC refusera jusqu'à la fin de la législature - pour pouvoir dire si l'on veut ou non diminuer les prestations, et lesquelles, il faut absolument que le Conseil d'Etat se livre à un examen stratégique, à un screening complet des prestations de l'Etat. Aujourd'hui, force est de constater qu'il ne l'a pas fait. Il ne l'a pas fait, contrairement à ses engagements annoncés lors de la mise en place du projet GE-Pilote. Pourquoi est-il si important de faire l'évaluation stratégique des prestations ? Parce qu'au moment de choisir, les conseillers d'Etat ou les députés au Grand Conseil auront besoin de ces instruments pour pouvoir décider quelles sont les prestations de confort, quelles sont les prestations nécessaires et quelles sont les prestations indispensables.

Je rassure le parlement et Mme Fehlmann-Rielle: il n'est pas question pour nous de couper dans les prestations indispensables. En revanche, nous ne pouvons pas nous permettre de ne pas nous livrer à une évaluation des prestations de confort au sein de l'Etat. Mises à part les prestations examinées dans le cadre des propositions de mesures P1 et P2, le Conseil d'Etat ne s'est pas livré à cet exercice.

Nous resterons donc attentifs. Nous exigeons du Conseil d'Etat qu'il se livre à cet examen des prestations étatiques. Nous lui demandons de savoir si chaque prestation se fonde sur une base légale et de dégager des priorités en matière de prestations étatiques.

Madame la présidente, le groupe PDC vote cette année le budget. C'est un petit oui, un petit oui d'encouragement. Nous ne voulons pas être déçus. Messieurs les conseillers d'Etat, vous êtes désormais sous surveillance !

M. Claude Jeanneret (MCG). Un budget est un plan d'action. Je ne pense pas qu'on puisse laisser un gouvernement sans plan d'action. Le MCG votera donc le budget.

Mais j'aimerais bien préciser que ce n'est pas parce que nous allons accepter ce budget que nous sommes d'accord avec lui. Ce budget donne une ligne de conduite... (Brouhaha.) ... mais il ne donne pas véritablement l'impression que toutes les mesures ont été prises, ou que toutes les réflexions ont été faites pour combattre le déficit du canton.

Ce n'est pas seulement le déficit d'aujourd'hui qui est grave, c'est que nous avons quand même plus de 13 milliards qui vont aller en s'aggravant, indiscutablement, si l'on ne prend pas des mesures sérieuses. C'est très inquiétant de laisser à nos enfants une charge aussi lourde ! C'est bien de leur donner de l'éducation, c'est bien de leur donner des soins, mais, si on les met dans l'incapacité de faire de ce canton un endroit vivable, parce qu'il est criblé de dettes et ingérable, ce n'est pas non plus digne d'un gouvernement.

Il faut dire que le budget de cette année ne prend véritablement de valeur que s'il est intégré dans un plan quadriennal. Sinon, nous allons revivre les expériences que Genève a déjà vécues auparavant: après quatre ans, on dira qu'on ne l'a pas réalisé, et le nouveau gouvernement nous prévoira un nouveau plan d'assainissement pour les quatre années futures... On nous a promis ici d'arriver à un résultat équilibré à la fin de cette magistrature, donc je crois que ce n'est que dans le cadre d'un plan quadriennal que l'on pourra véritablement inscrire ce budget de cette année, même si ce plan arrive après le budget.

Je ne crois pas, parce que certaines incertitudes existent au niveau RPT, au niveau de l'accord avec les communes, qu'il n'est pas possible d'élaborer un plan quadriennal. Lorsque l'on fait un plan d'action, on le réalise sur les éléments certains et connus. Si certains éléments changent par la suite, c'est là que la bonne gouvernance intervient et que l'on modifie certains objectifs, mais en expliquant pour quelles raisons. A ce moment-là, on peut prendre les mesures adéquates pour neutraliser les effets d'éléments qui n'étaient pas nécessairement prévisibles.

Pour finir, je dirai encore une chose. Les mesures qui sont prises sont un peu décevantes: il me semble qu'on attend que les mesures de diminution de dépenses suffisent à la réhabilitation des comptes de la République... On parle d'augmentation d'impôts. Je ne crois pas que cela soit l'intérêt de changer ce qui est. C'est surtout d'augmenter la masse des contribuables qui est important. Dans un plan de redressement de situation, il semblerait logique qu'on nous explique comment on va attirer à Genève plusieurs milliers de nouveaux contribuables qui pourront dégager de nouvelles recettes.

Du point de vue des recettes actuelles, je ne pense pas que nous puissions aller dans une conjoncture bien meilleure à l'avenir: nous sommes déjà dans une conjoncture excellente à Genève, nous avons créé quelques dizaines de milliers d'emplois ces dernières années. Malheureusement, par le fait que nous n'ayons pas prévu de loger ces gens ici, nous nous sommes tournés vers l'importation de travailleurs, que ce soit de France ou du canton de Vaud... Ces gens-là ne dépensent pas leur argent à Genève ! On exporte plusieurs milliards par année; c'est un manque d'accélération économique au niveau de Genève, c'est une perte gigantesque !

J'attends de voir de la part de notre gouvernement non seulement un budget ayant remis en question les dépenses fondamentales, mais également un budget qui prévoie des augmentations de recettes, non pas en attendant que les entreprises travaillent mieux, mais en attendant qu'on trouve les moyens de faire venir vivre à Genève ceux qui y travaillent.

M. Jean-Claude Ducrot (PDC). M. Barazzone a dit un oui - un «oui, mais» - à ce budget. Permettez-moi, Mesdames et Messieurs, de vous faire part, un peu, de l'amertume des communes eu égard à ce dialogue, insuffisant, que le Conseil d'Etat n'a pas concédé à l'ACG. Je crois que le problème des finances de l'Etat ne pourra pas être résolu par la voie de lois, en imposant les communes, sans entrer véritablement dans une négociation. Cette négociation, et on l'a vu au cours de ces deux dernières années, a été clairement et manifestement insuffisante.

J'espère qu'au travers des propos tenus tout à l'heure par le Conseil d'Etat, notamment au travers de la conclusion dans la réponse qu'il donnait récemment à une motion au mois d'octobre... Le Conseil d'Etat parlait, au sujet de la nouvelle répartition, de l'importance que revêtaient les discussions en cours entre les collectivités publiques genevoises, cantonales et communales. J'ose espérer que ce sera un véritable dialogue et qu'on ne va pas ponctionner d'une manière unilatérale, comme ce fut le cas cette année pour les communes. Cela a été une espèce de pêche miraculeuse ! Mais je crois qu'il n'y a pas eu de véritable dialogue avec les communes genevoises à l'occasion de ce budget.

Aussi, comme Guillaume Barazzone l'a dit tout à l'heure, le Conseil d'Etat sera en quelque sorte sous surveillance si, manifestement, il n'y a pas un dialogue avec les communes genevoises. L'ACG est prête à entrer en négociation, à faire des propositions, à effectuer un report de compétences, de manière à aider à restructurer l'Etat, mais, je le répète aux membres du Conseil d'Etat, s'il n'y a pas un véritable dialogue avec les communes, avec l'ACG, on assistera à un refus.

M. Pierre Losio (Ve). Je renonce momentanément à m'exprimer, bien que notre groupe n'ait pas épuisé son temps de parole.

M. Yves Nidegger (UDC). Le débat d'aujourd'hui a un goût de déjà vu ou déjà entendu. Cela fait plusieurs lustres aujourd'hui que le Grand Conseil genevois présente au parlement des budgets déficitaires...

Une voix. Le Grand Conseil ?

M. Yves Nidegger. Au parlement cantonal, mais quand même ! Et cela fait autant de temps que le Grand Conseil les accepte. Il y a peut-être un changement dans la culture du moment, c'est celui du consensus. Apparemment, tous les groupes s'expriment de manière très critique, très retenue, voire hostile par rapport au budget qu'on leur présente. Néanmoins, il semblerait qu'une majorité de ce parlement s'apprête à voter un budget qui fait l'unanimité contre lui. Mon collègue Catelain parlait de schizophrénie tout à l'heure, je crois que c'est ce problème-là que nous avons.

Cela fait des lustres que nous faisons semblant à Genève de croire que le déficit devenu structurel va se résoudre tout seul, parce que nous appartiendrions à un groupe particulier d'êtres humains pour lesquels les règles de l'économie, de la comptabilité et des finances ne s'appliquent pas et qu'au fond l'équilibre reviendrait comme le printemps revient après l'hiver, sans que fondamentalement il y ait quoi que ce soit à changer dans notre manière de vivre. Evidemment, cela ne tient pas.

C'est à force de budgets déficitaires, critiqués mais votés, qu'on est arrivés à 13 milliards de dette et dans une situation ou l'Etat polymorphe tentaculaire, ne sachant plus trop ce qu'il fait ou ce qu'il ne fait pas, est devenu difficile à gérer.

Alors, il y a un changement. Il est culturel. Depuis une année, on admet, on parle, on proclame qu'il faut revenir à l'équilibre et on propose des plans de mesures. Bien sûr, pas le plan de mesures de retour à l'équilibre qu'exigerait la loi - c'est-à-dire un plan chiffré qui indiquerait qu'à partir de maintenant on va réduire ceci ou augmenter cela pour que l'équilibre soit mathématiquement possible - mais un plan de mesures qui est un peu un abus de langage, puisqu'il s'agit au fond de faire partager au parlement, et peut-être à la population, une double confiance: d'une part, la confiance que les recettes continueront d'augmenter de 2,5% par année, ce qui est un plan sur la comète, statistiquement possible, mais qui ne ressemble pas à un plan de mesures; d'autre part, la confiance que, moyennant quelques remaniements et expédients, les charges n'augmenteront pas de plus que 1% par année.

Et voilà tout le plan de mesures de retour à l'équilibre qu'on nous soumet. En nous demandant d'avoir confiance, parce que Genève, encore une fois, est un canton différent des autres, dans lequel la confiance en soi et quelques bons discours bien posés suffisent à conjurer les problèmes. Partout ailleurs, les cantons - nous ne sommes pas les seuls - qui veulent sortir des chiffres rouges, font des choix, font des coupes, revoient les prestations qu'ils servent, font parfois des coupes douloureuses - Berne, qui est en avance sur nous, a procédé, par exemple, à des regroupements... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ... d'hôpitaux régionaux - des choses que la population ressent douloureusement, qui font mal et qui sont jugées nécessaires. A Genève: non. Le retour à l'équilibre sera totalement indolore, fondé sur une absence de politique. Parce que dire qu'il n'y aura pas besoin d'augmenter les impôts tant que ceux-ci augmenteront tout seuls - en tout cas les recettes - en d'autres termes, qu'il n'y a pas besoin de revoir les barèmes fiscaux tant que la masse imposable augmente toute seule, ce n'est pas vraiment un choix politique, c'est simplement une inaction. La promesse de ne pas augmenter quelque chose qui augmente de toute façon, ce n'est pas une promesse. Dire que les prestations ne baisseront pas, précisément parce que les recettes augmenteront toutes seules, ce n'est pas non plus de la politique, puisque ce n'est pas faire des choix.

Nous avons finalement, au milieu de tout cela, un plan d'optimisation de la fonction publique, qui est une excellente idée. Une idée tellement bonne que le peuple l'a d'ailleurs eue dans les années 1990, en exigeant un audit de l'appareil de l'Etat, dont il n'a rien été fait d'autre que de régler la facture au consultant à qui on l'avait commandé. Bien évidemment que l'optimisation du fonctionnement de l'Etat est une condition du retour à l'équilibre ! Bien évidemment, cela doit être soutenu. Bien évidemment, nous sommes à l'UDC totalement en faveur de mesures qui permettent d'optimiser le fonctionnement. Mais, bien évidemment aussi, ces mesures nécessaires ne sont pas suffisantes.

Reste maintenant la question politique. Le groupe UDC refusera d'entrer en matière sur un budget déficitaire dans une période de vaches grasses. Il n'est simplement pas question de rejoindre l'enthousiasme de ceux qui pensent que parce qu'en quelques semaines d'amendements on est passés de 220 ou 230 millions de déficit à 190, il y aurait là matière à se réjouir suffisamment. Si le Conseil d'Etat, parce que c'est de son chef, a trouvé les amendements qui permettent... (Brouhaha.) ... de réduire le déficit d'une vingtaine de pour-cent, alors il est aussi possible de présenter un budget non déficitaire et c'est ce qui aurait dû être fait.

Que va-t-il se passer demain ? (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) En 2008, les recettes fiscales vont refuser d'augmenter toutes seules et le Conseil d'Etat viendra avec une palette de coupes et de baisses de prestations qui, si on les refuse, sera couplée avec une hausse des impôts. Il suffira donc de présenter des diminutions de prestations à des endroits qui font mal à la population, autant à droite qu'à gauche, en disséminant un peu les mesures pour avoir l'unanimité contre ces réductions et, donc, l'acceptation du peuple que les impôts augmenteront. Ce n'est pas faire de la politique, c'est simplement utiliser les lois qui existent pour qu'elles fassent de la politique à sa place.

Sept milliards de recettes pour un canton de 450 000 habitants, c'est... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ... largement suffisant et personne ne viendra faire croire à quiconque que l'on ne peut pas équilibrer un budget avec autant d'argent pour une population finalement aussi modeste. Nous refuserons donc l'entrée en matière. Bien entendu, si l'entrée en matière est votée, ce qui semble devoir être le cas, nous lutterons avec d'autres pour des amendements afin de sauver ce qui peut l'être, mais, fondamentalement, il ne s'agit pas de dire que ce budget est mauvais...

La présidente. Il va falloir conclure, Monsieur le député...

M. Yves Nidegger. ... et de le voter: il faut dire que ce budget est mauvais et le refuser.

La présidente. La parole est à M. Eric Stauffer. Monsieur le député, je vous signale qu'il vous reste une minute trente et une.

M. Eric Stauffer (MCG). Quel décompte précis, Madame la présidente ! Je voulais juste revenir très brièvement sur le RPT, réforme de la péréquation intercantonale. C'est un problème, Mesdames et Messieurs les députés, Madame la présidente, et il ne faut pas le sous-estimer. Car la politique en matière d'emploi que Genève a menée, avec une ouverture trop rapide de nos frontières, a eu pour conséquence que Berne, aujourd'hui, à cause de ou grâce à nos amis frontaliers qui travaillent à Genève, vient réclamer 90 millions de francs de plus à l'Etat de Genève ! Quand on sait les difficultés qu'a M. le conseiller d'Etat à boucler le budget, il faut vraiment que ce problème soit mis en évidence, car, je le sais de source bien informée, la France va renégocier les accords...

Des voix. Ah ?

M. Eric Stauffer. ... sur les impôts à la source... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ... des frontaliers, et ce sera dès lors, Mesdames et Messieurs les députés, 450 millions de moins dans les caisses genevoises ! Et moi je serais curieux de savoir comment l'Etat de Genève va pouvoir boucler ses budgets pour les années 2008 et 2009.

M. Renaud Gautier (L). Madame la présidente, Mesdames et Messieurs, Messieurs,... «Public chéri», aurait répondu Pierre Desproges lorsqu'il s'avisait de faire une plaidoirie légèrement surréaliste, ce que je m'en vais faire maintenant. Première remarque: nous avons entendu hier soir l'un des thuriféraires de ce parlement nous expliquer que la volonté populaire devait être appliquée le plus rapidement possible, que vingt-quatre, voire quarante-huit heures devaient être nécessaires pour prendre en compte avant tout le monde la décision populaire. Ce matin, nous entendons quelqu'un du même parti nous expliquer que, somme toute, ce que le peuple a voulu, c'est, d'une part, une décision hautement - quel était le terme exact ? - «démagogique» et que, d'autre part, les lois étant faites pour ce qu'elles sont, elles peuvent être réadaptées en fonction des besoins. Ce qui était valable hier soir, Mesdames et Messieurs, n'est plus valable ce matin ! Même si la population genevoise a souhaité modifier la LGAF et demande un plan quadriennal, somme toute, on pourra s'en passer.

Comme nous tombons donc dans l'«illégalisme» le plus absolu, laissez-moi faire quelques remarques complémentaires. D'abord, nous devons le dire ici, et je me plais à être le premier à le faire, il faut saluer le Conseil d'Etat qui, pour une fois dans sa législature, a d'une part déterminé un but et d'autre part des moyens. Donc, foin de ces centaines de pages du budget, intéressons-nous quelques instants au but et aux moyens !

Le but, c'est d'arriver à équilibrer les comptes à l'intérieur de la législature et, en particulier, la croissance de la dette. Le moyen, c'est une croissance limitée à moins de 1%. Soit ! Le problème, évidemment, c'est que, dès la deuxième année, ou plutôt, dès le deuxième budget de l'année 2007, nous sommes aujourd'hui obligés de reconnaître sans faire de crise d'idéalisme que les moyens ne sont pas bons et que nous n'arriverons pas au but. Il faut donc maintenant dire qu'il est urgent de changer la course du navire énorme qu'est l'Etat si nous voulons effectivement arriver à ce but. Il faut donc relever ici que seuls les libéraux sont sensibles au but fixé par le Conseil d'Etat et entendent faire tous les efforts nécessaires pour que le Conseil d'Etat arrive à son but.

Par exemple, pour reprendre ce que disait mon vis-à-vis tout à l'heure, il est vrai que le million d'intérêts que nous payons par jour, Mesdames et Messieurs, en termes d'intérêts de la dette, serait probablement mieux utilisé dans du soutien social ou écologique à quelque projet que pourrait avoir l'Etat plutôt que d'aller enrichir ces épouvantables banquiers qui prêtent encore de l'argent à l'Etat. Nous avons fait le choix d'engraisser les banquiers, eh bien soit ! Mettons donc, hélas, en doute les moyens pour arriver au but.

C'est comme le plan de mesures ! C'est une très belle liste. On nous explique ce que l'on veut faire et les économies auxquelles on est arrivés. Le problème, c'est que le raisonnement est totalement faillible parce qu'on n'explique pas comment on arrive au résultat prévu dans la liste P1 ou P2. Donc, on additionne des millions tout en ayant aucune idée de comment on arrive à tel million pour telle mesure ! Evidemment, ce genre de liste rend les fous heureux, mais, très franchement, ce n'est pas des plus sérieux.

Il nous faut donc effectivement engager le Conseil d'Etat à faire des efforts supplémentaires - si possible à l'intérieur de la loi, bien que cela ne semble pas être le cas - de façon que, grâce au soutien des libéraux, le Conseil d'Etat arrive au but qu'il s'est fixé. Et non pas qu'il aille après quelques errances se trouver, d'ici à quelques années, dans une situation catastrophique. Car, Mesdames et Messieurs, tout le monde le sait depuis une centaine d'années, mais on ne le répétera jamais assez: l'«oninisme» rend sourd !

Une voix. Merci ! (Remarques.)

M. Renaud Gautier. Et voici donc l'inquiétude que nous avons: c'est qu'à force de ne pas entendre les conseils avisés que l'on veut donner au Conseil d'Etat, celui-ci s'égare ! «Tout à une fin», comme le disait mon ami Pierre Weiss, qui tient beaucoup à ce que je le cite...

Une voix. Oui, merci !

M. Renaud Gautier. Tout à une fin, Mesdames et Messieurs, sauf le saucisson et la saucisse au chou, qui en ont deux. (Rires.) Il est donc temps que le Conseil d'Etat se réveille de ses rêveries, que je n'ose qualifier de «probablement coupables», et qu'il arrive avec un projet de budget qui remplisse les buts qu'il s'est lui-même fixés.

La présidente. La parole est à M. le député Pierre Weiss. Il vous reste, si je ne me trompe pas, deux minutes.

M. Pierre Weiss (L). J'irai donc vite, pour un «petit discours sur la méthode» qui se veut tout d'abord un discours du respect des lois tant dans leur esprit que dans leur lettre... On a vu tout à l'heure ce que le parlement en a fait, les Genevois apprécieront. Un respect, donc du peuple, que les libéraux veulent aussi; un respect de l'équilibre budgétaire, pour lequel une partie de ce Grand Conseil n'a apparemment pas un souci exagéré.

Je rappellerai que le vrai déficit n'est pas de 189 millions, mais de 278 millions. C'est le déficit structurel hors opération BCGe ! C'est à peine mieux que pour le dernier exercice. Et il aurait été - je voudrais ici rendre un hommage mérité à Martine Brunschwig Graf... (Un rire.)

Une voix. C'est drôle, ça ! (Remarques.)

M. Pierre Weiss. Et il aurait été beaucoup plus élevé s'il n'y avait pas eu une inflexion de la courbe de dépenses lors de la précédente législature grâce aux opérations qu'elle a menées !

J'aimerais encore rappeler que, pour l'exercice 2008, nous aurons à peu près 200 millions de dépenses supplémentaires: 90 millions au titre de la RPT - parce que vous allez voir que, malgré votre soutien unanime, rien ne nous sera accordé par Berne; 30 millions pour les allocations familiales que le PDC a voulu faire voter en accélération du processus pour 2008; et 80 millions au titre de l'accord avec la fonction publique. Je ne parle pas des prédictions frontalières de M. Stauffer. Inutile de vous dire que les milieux économiques sont sceptiques pour le budget 2009 et pour le retour à l'équilibre en 2009. J'ai cru en tout cas l'entendre. Et comment croire ce Conseil d'Etat lorsqu'il nous présente, ce matin, ce qu'il appelle un «PFQ squelettique » ? Dans les limbes, au fond !

Je conclurai en disant, Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, en moderne Caton de cuisine: deficita delenda sunt ! Les déficits doivent être détruits ! Nous les détruirons ! Les libéraux s'y attelleront, en particulier avec l'initiative anti-dette - que le peuple acceptera - pour qu'il faille dorénavant les deux tiers, une majorité qualifiée de ce parlement pour accepter les déficits ! Le Conseil d'Etat n'est pas encore conscient de cette évidence. J'espère que le Grand Conseil le sera et qu'il y aura une majorité gouvernementale raisonnable qui, dans le futur, se rendra compte que nous ne pouvons plus aller dans le mur... (Brouhaha.) ...comme nous le faisons aujourd'hui. Les générations qui nous suivent nous en demanderont des comptes...

La présidente. Il va falloir conclure...

M. Pierre Weiss. ... et ces comptes actuellement sont mauvais ! Deficita delenda sunt !

M. Pierre Losio (Ve). Je viens d'entendre les deux préopinants du parti libéral - notamment M. Weiss - qui additionnent les millions, les pommes, les poires, les scoubidous - et les saucisses aux chou, bien entendu.

Mais je voudrais dire deux mots sur l'opposition à ce Conseil d'Etat. Je passerai rapidement sur l'opposition de l'UDC, qui, elle, est capable de résorber un déficit en une année. On a bien compris qu'il ne s'agit pas de couper les cheveux en quatre, mais de couper les gens en deux ! Derrière les millions qu'ils sont prêts à massacrer à coups de hache dans les subventions en une année, il y a des gens qui travaillent, il y a un tissu social qui oeuvre.

En ce qui concerne l'opposition libérale, je suis très frappé de l'évolution de ce grand parti. Grand parti comme il y a un grand parti ici dans la gauche, comme il y a un grand vieux parti ici dans le centre. Il me semble percevoir... (Brouhaha.) Tout à l'heure, mon collègue disait que le parti libéral a perdu pied; moi je crois simplement qu'il a perdu la main ! Et l'influence qu'il avait sur ce qu'il reste de l'Entente. C'est comme une espèce de nostalgie d'un pouvoir perdu qui ne perçoit même plus sa propre relativité. Il me semble que ce parti, qui est allé à Saint-Pierre - qui a cru croire au discours de Saint-Pierre, mais qui, en fait, n'y a jamais cru - se fige maintenant dans une opposition dont on a du mal à comprendre le positionnement, étant donné que cela reste un parti gouvernemental... En fait, fondamentalement, ce parti n'a jamais cru à cette proposition du Conseil d'Etat, à ce cheminement, à ce calendrier, à cette méthode. Il a un de ses membres partie prenante du chantier que le Conseil d'Etat a mis en route, mais en fait il ne souhaite pas véritablement s'y associer. On comprend le discours qui salue les objectifs, mais les objectifs ne sont pas si terribles que cela, les moyens sont à peu près catastrophiques, les engagements seraient à peine tenus. Je regrette qu'un grand parti comme celui-là ne prenne pas davantage de responsabilités pour s'associer à un chantier.

Si je pouvais juste paraphraser mon grand maître de pédagogie Célestin Freinet, je dirais que rien n'est plus beau qu'un chantier. Et dans ce chantier, ce Conseil d'Etat est en train de recrédibiliser et de reconstruire Genève.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

La présidente. Monsieur le député Eric Stauffer, vous avez souhaité reprendre la parole... (Brouhaha. Commentaires.) Je vous signale que vous avez vingt-quatre secondes.

M. Eric Stauffer (MCG). Je vais être très bref. Simplement pour dire qu'effectivement les libéraux n'ont plus le monopole sur ce parlement. Quand nos concitoyens se seront aperçus que voter libéral, c'est voter une augmentation des impôts et une augmentation de la dette... (L'orateur est interpellé.) ... eh bien, je crois qu'ils auront compris bien des choses, Monsieur Weiss ! Et heureusement que ce parlement est responsable et respectueux de nos institutions. Merci, Madame la présidente, je n'ai pas dépassé mes vingt-quatre secondes !

La présidente. C'est parfait, Monsieur le député. J'avais dit que je serais très attentive aux temps de parole; je le suis et le resterai jusqu'à la fin du vote de ce budget.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Premier constat, Mesdames et Messieurs les députés: si vous entendez avoir un budget à Genève, la discussion d'aujourd'hui vous montre que vous devrez toujours accepter un budget que vous voudriez un peu plus comme ceci ou un peu plus comme cela, tout simplement parce que, si je me réfère aux propositions faites par l'UDC, j'ai quelques raisons de croire qu'il n'y a pas de majorité dans ce parlement pour voter ce qui est proposé.

De la même façon, le parti socialiste aimerait que dans un certain nombre de domaines nous fassions plus, et qu'en économies certainement nous fassions moins, mais je crains aussi qu'il n'y ait pas une majorité sur ce point précis. De sorte que par la volonté du peuple, qui a composé ce parlement et notre gouvernement, nous sommes bien entre deux choix: le choix du dialogue, du consensus vanté hier par Mme Calmy-Rey, ou le choix de l'immobilisme, qui est toujours un choix si l'on veut, mais que le Conseil d'Etat fera tout pour éviter.

Je remercie M. Barrillier d'avoir rappelé le discours de Saint-Pierre. Effectivement, nous avons pris des engagements sur trois grands chantiers et, ma foi, les choses avancent au rythme où elles le peuvent. Certes, l'accord sur le logement, il a fallu un an pour le trouver. Est-ce peu ou est-ce beaucoup ? C'est manifestement peu au regard de quinze ans pendant lesquels on est restés bloqués. Quand les effets positifs se feront-ils sentir pour nos recettes fiscales ? Pas pendant cette législature, néanmoins nous ne devons pas penser qu'à nos succès et à nos défaites politiques, mais à l'avenir, et c'est important que ce soit fait.

De la même façon, toute une série de mesures, à la fois organisationnelles, opérationnelles et politiques, ont été prises dans le domaine de la réinsertion sociale pour qu'enfin nos dispositifs soient efficaces, avant même de penser qu'ils soient efficients. Là encore, c'est vous qui avez maintenant la balle entre vos mains. Et le peuple, peut-être. Il y a une nouvelle loi sur le chômage qui est, quelque part, la pierre angulaire de ce projet. Il a fallu quelques mois au Conseil d'Etat, puis à votre parlement, pour étudier, discuter... Est-ce peu, est-ce beaucoup ? Après un certain nombre d'années où l'on savait que cette loi devait être remplacée par une meilleure, après des propositions qui n'ont pas paru meilleures au peuple, je trouve que le délai est très raisonnable.

Troisième objectif: assainir les finances publiques d'ici à 2009 en faisant - il faut le dire quand même - une réforme dans le service public. N'avons-nous rien fait ? Est-ce que d'avoir pu discuter posément d'un nouveau statut de la fonction publique et obtenu une déclaration de non-agression à l'égard de nos propositions - tout en reprenant la main quant à la direction de la politique des ressources humaines - est-ce que le fait de définir une nouvelle politique des ressources humaines, avec toutes les difficultés que sa mise en application va signifier; est-ce que le fait encore de mener des opérations comme Victoria, ce n'est rien ? Est-ce que le fait que cinq départements arrivent à réduire par pure mesure de réorganisation, effectivement, leurs effectifs de 5%, ce n'est rien ? Non, ce n'est pas rien ! Est-ce que le fait que vous repreniez, comme le Conseil d'Etat, la main sur les investissements par un nouveau règlement qui vous rend totalement maîtres de la situation dès 2008, ce n'est rien ? Non, ce n'est pas rien ! Est-ce que le règlement d'application de la LIAF, qui permet la mise en oeuvre d'une loi extrêmement difficile à appliquer, mais extrêmement importante, redonnant tout pouvoir au parlement en termes de planification aussi - parce que, malgré tout, ces subventions et les contrats de prestations définissent les budgets de demain - ce n'est rien ? Non ! C'est ce que, au Conseil d'Etat, nous avons pu faire en une année. Et le budget porte trace de cela.

J'aimerais vous dire à ce stade que deux choses me dérangent dans les interventions. Une concerne les recettes fiscales. Oui, 2005 a été une très bonne année sur le plan conjoncturel. Oui, de par la méthode qui est la nôtre concernant l'évaluation des impôts, il y a une part qui est dans les comptes 2005 et il y a une part, dont le montant est supérieur à 100 millions, qui sera dans le compte 2006. Nous ne pouvons pas la budgétiser. Le bonheur, c'est qu'elle existe ! Il en sera vraisemblablement de même pour l'année suivante, 2007: nous aurons un bout de 2006 en 2007 et, par ailleurs, le système même, sauf à prendre des risques exagérés, ne permet pas de budgétiser des croissances exceptionnelles comme celle de 2006, même en cours d'année. C'est la raison pour laquelle les recettes seront supérieures à ce qu'il y a dans le budget, nous le savons aujourd'hui.

Sur les provisions, je pense qu'il faut faire bien attention. On ne peut pas considérer que, lorsque nous n'avons pas utilisé les provisions et que nous faisons une dissolution, ce ne soit pas une économie. C'est une économie, cela doit figurer dans le budget et dans les comptes. Pourquoi ? Parce qu'une bonne partie de la croissance de la subvention pour l'Hospice général n'a d'autre but, Mesdames et Messieurs, que de renforcer la provision sur les avances AI. Pourquoi ? Parce que le taux de refus de l'AI est aujourd'hui tellement important que le taux de provisionnement ancien n'y suffit plus. A peine avons-nous atteint un nouveau taux, le 30%, qu'une analyse montre qu'il faut atteindre le 40%, puis le 50%. Il s'agit de provisions ! Il serait malhonnête de ne pas les faire, mais, pour l'Etat, cela entre dans la ligne «Subventions et provisions», puisque nous avions pris une double précaution en début d'année.

Au fond, il y a un point sur lequel nous pouvons être d'accord. En un an, le Conseil d'Etat n'a effectivement pas trouvé dans les budgets, de façon matérielle, 430 millions de déficit structurel à annuler. Il ne l'a pas fait. Mais finalement, admettons que ce soient 250 millions. Admettons, il y a quelques raisons... (L'orateur est interpellé.) Mais enfin, on va faire un prix, parce que tout le monde imagine que je peux aussi défendre les 230 avec le même talent que vous défendez ce chiffre... Deux cent cinquante, ce n'est pas si mal ! Que l'ensemble du Conseil d'Etat, en une année, ait réussi à en trouver 180, ce n'est pas si mal, je m'excuse de le dire, et cela doit nous encourager à continuer.

Maintenant, petite amitié au rapporteur de majorité, je dois quand même vous dire que vous auriez dû raconter la fin de l'histoire, à savoir qu'effectivement je m'étais alors permis de vous dire que ce serait difficilement possible. Je vous renvoie aux comptes 2004 et 2005 pour la fin de l'histoire. Cela n'avait pas l'air si facile que vous le dites aujourd'hui.

Concernant les objectifs, je crois, Monsieur Mettan, qu'il y a un point sur lequel nous avons été d'accord lorsque nous étions l'un et l'autre députés. C'est que jamais la croissance des charges ne devrait excéder l'indexation plus l'augmentation de la population. Et cela me paraît relativement important. On pense à 1,6 % pour l'année prochaine. Aujourd'hui, il faut faire des efforts supplémentaires, mais j'aimerais attirer l'attention de toutes et tous sur le fait qu'il est peu probable qu'on puisse jamais, même à l'équilibre, augmenter les charges de 2 ou 2,2% à l'avenir. Nous ne sommes plus dans le monde d'avant les années 1990. Il n'y aura plus d'effet années 1980. L'effort que nous commençons aujourd'hui va perdurer non seulement jusqu'en 2009, mais très vraisemblablement jusqu'en 2012, tout simplement pour arriver à l'équilibre, puis à l'autofinancement, puis pour prendre les mesures de désendettement.

En effet, vous le savez, les transferts d'actifs ne permettront pas le désendettement s'ils sont acceptés par le peuple, mais simplement la non-croissance de la dette. Puisqu'on en est à la dette, Monsieur Cuendet, Monsieur Weiss, je demande une faveur: pourriez-vous demander à l'un de vos proches cousins de nous rendre nos 112 millions plutôt que de les garder jusqu'au 31 décembre. pour améliorer sa propre dette ? Je pense là évidemment à la Ville de Genève !

Le Conseil d'Etat vous remercie, en ce qui concerne les partis de la coalition gouvernementale, de soutenir ce budget. Le Conseil d'Etat entend les remarques des uns et des autres et fera ce qui est en son pouvoir pour leur donner consistance, après un tri malgré tout. Nous avons besoin d'un gouvernement qui puisse gouverner, d'une administration qui puisse faire son travail. Par ailleurs, et c'est un dernier rappel: il y a P1, il y a P2, nous avons déjà annoncé le P+ - ce sont des mesures isolées - puisque notre collègue Mark Müller avait quelques P+. J'ouvre volontiers un P++ pour tous les membres de ce parlement qui auraient des mesures concrètes et praticables pour faire des économies. C'est bien volontiers que nous les accueillerons. Vous savez qu'assez souvent cela passe par des projets de lois, mais nous ne doutons pas que vous aurez l'énergie pour les mener à bien. En cette attente, nous vous remercions d'entrer en matière sur ce projet de loi. (Applaudissements.)

PL 9949-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur les augmentations annuelles dues aux membres du personnel de l'Etat ainsi que sur la progression de la prime de fidélité (B 5 17)

Premier débat

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de majorité. Je serai très bref. Pourquoi soutenir au fond cette augmentation partielle des annuités et de la prime de fidélité, puisqu'elle entrera en vigueur seulement au mois de juillet de l'année prochaine ? (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Pour deux raisons.

La première, c'est que le Conseil d'Etat, dans le courant de l'année écoulée, a négocié une convention avec la fonction publique. Cette convention a permis de réaliser un progrès qui nous paraît important, notamment en permettant désormais à l'employeur qu'est l'Etat de se séparer de collaborateurs ne donnant pas satisfaction, en allégeant cette procédure. Dès lors, il convient de ne pas saboter cet effort, mais au contraire de l'encourager, donc de ne pas ruiner cette progression en s'attaquant maintenant aux annuités.

La deuxième chose, c'est que, comme je l'ai dit, ces annuités sont partielles et que, dans ce cas, nous estimons qu'il est logique que l'employeur, comme n'importe quel employeur, même les employeurs privés... Je lisais encore tout à l'heure dans le journal que les employeurs privés accordent des augmentations de 2 à 2,5% en moyenne en Suisse. Il ne me paraît dès lors pas scandaleux que l'Etat de Genève accorde une augmentation qui est inférieure à ces 2%, puisque je crois qu'elle est de l'ordre de 1,5%. C'est logique que l'Etat patron, pour parler comme cela, puisse récompenser le personnel, les collaborateurs qui travaillent pour lui, comme le fait n'importe quel patron du secteur privé.

Voilà juste ces deux précisions en préambule, et je cède maintenant la parole, j'imagine, au rapporteur de minorité, qui va nous fournir des éclaircissements plus substantiels que ce que l'on a pu lire sur les raisons de son opposition à ce projet de loi qui paraît tout à fait fondé.

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de minorité. Comme d'habitude, M. Mettan, donnant l'impression de faire des compliments, se veut fielleux. En réalité, ce que je comprends dans son attitude, c'est que, fidèle à sa tradition, il défend à la fois une position et une autre. Il défend le projet de loi de l'Entente sur la fonction publique et en même temps il défend l'ancien système. Comme quoi, en étant des deux côtés, on est toujours sûr de gagner. C'est ce que j'appelle le courage et la lucidité. (Protestations.)

J'aimerais brièvement revenir sur un ou deux points de ce rapport de minorité concernant ce projet de loi dont nous sommes doublement insatisfaits, et à la forme, et au fond. A la forme, parce que - M. Mettan a évidemment oublié de le rappeler - l'exposé des motifs ne fournit aucune indication quant au coût de l'accord... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Il a fallu que les libéraux, fidèles à leur tradition de rigueur, insistent en commission pour obtenir des informations et que l'on arrive à un chiffrage qui soit, en ce qui concerne les annuités, de 38 millions et, en ce qui concerne la prime de fidélité, de 3,5 millions. C'est effectivement inférieur à ce qui aurait été s'il y avait eu une pleine application des anciens automatismes, mais c'est évidemment supérieur à ce qui aurait dû être compte tenu de la situation de l'Etat, compte tenu de ce qu'aurait fait, par exemple, un gouvernement de gauche neuchâtelois - où, il est vrai, il n'y a pas de PDC - c'est évidemment supérieur à ce que la situation catastrophique genevoise impose. Cela, c'est à la forme.

Quant au fond, nous avons effectivement affaire ici aujourd'hui à un octroi prématuré d'un certain nombre de millions supplémentaires qui sont déboursés par les contribuables. Il est vrai que les fonctionnaires et notamment les cadres, les spécialistes, les hauts fonctionnaires, font un travail remarquable, mais la façon de récompenser ce travail, d'en prendre acte, n'est pas une façon qui est adéquate. Le Conseil d'Etat - je rends ici hommage à M. Hiler - tente de moderniser le système, à petits pas, mais, de notre point de vue, cette modernisation à petits pas ne va pas suffisamment loin, n'est pas suffisamment globale.

Au fond, ce projet de loi, c'est la démonstration d'un acharnement thérapeutique... (Exclamation.) ... pour un système obsolète, c'est un projet de loi qui, contrairement à ce que la sagesse voudrait, continue d'ouvrir les vannes de notre canton. C'est une ouverture sur d'autres expédients. Je pense par exemple aux projets de lois concernant les transferts d'actifs qui risquent de charger, s'ils sont rejetés par le peuple, à 20 millions de déficit supplémentaire. Le moment n'est pas venu !

J'aimerais conclure en vous disant, Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, que si, par lucidité retrouvée, une majorité de ce parlement venait à refuser ce projet de loi, les libéraux, fidèles à leur rigueur, considéreraient que ces 40 millions, au bas mot - pour reprendre les termes de M. Hiler, je solde la différence - ces 40 millions ainsi retrouvés nous permettraient d'aborder plus sereinement, je dirais même «plus positivement», le vote sur le budget et, pourquoi pas, d'y apporter notre concours. Mais, faute d'un tel refus, nous ne pouvons pas imaginer que nous soyons les complices - je dis bien «les complices» - d'une aggravation de la dette.

Il y a des moments où il s'agit de respecter - un mot que M. Mettan met à sa boutonnière, «le respect» - le peuple qui nous a élus, de respecter la mission qui nous est confiée. Et c'est ce sens des responsabilités, ce sérieux dans l'accomplissement de notre mission, que je vous demande. J'allais presque dire: «J'en appelle à votre conscience», Monsieur Mettan !

Une voix. Elle est plus grande que la vôtre !

La présidente. Je rappelle qu'il a été convenu que nous consacrions cinq minutes par groupe pour la prise en considération de ce projet de loi.

M. Pierre Kunz (R). Vous vous en souvenez certainement: les radicaux avaient dit oui au rétablissement partiel des mécanismes salariaux pour 2006. Ce ne fut pas un «oui, mais», ce fut un «oui, parce que». Parce que, préalablement, le gouvernement avait annoncé clairement qu'il ferait retrouver à Genève en 2009 l'équilibre structurel de son compte de fonctionnement sur la base des chiffres 2005. L'objectif global étant défini avec précision et accepté par nous, l'engagement de l'atteindre simultanément pris, et solennellement, par le Conseil d'Etat, les radicaux avaient logiquement, notamment en matière de gestion des ressources humaines, laissé ce que l'on pourrait appeler «le choix des armes» au Conseil d'Etat.

Pour nous, le contrat était clair: le Conseil d'Etat entendait réduire de 1,25% ses charges salariales annuelles. A cette fin, il avait besoin d'accroître la productivité des employés d'autant. Dans ce contexte, nous radicaux comprenions que la réintroduction au moins partielle des mécanismes salariaux constituait un prérequis à la nécessaire remobilisation ou à la nécessaire remotivation du personnel. Force est malheureusement de constater qu'il y a eu, pour le moins, un malentendu: le contrat dont je parlais n'a, selon nous, pas été respecté par le Conseil d'Etat.

Nous le savons, si nous observons les chiffres, le Conseil d'Etat, sur les postes «Dépenses générales», «Masse salariale» et «Subventions», reste en 2007 sur la base du budget à 271 millions de la cible qu'il s'était lui-même fixée dans son plan de marche. Même si l'on déduit de ces 271 millions les 150 millions d'incontournables qu'on peut estimer, il reste 100 millions d'écart par rapport à la cible de compression des dépenses ! S'agissant des salaires, au lieu de réduire la masse salariale de 2,5%, le Conseil d'Etat la laisse croître en 2008 par rapport à 2005 de 0,8%. Une dérive, Mesdames et Messieurs, de 63 millions de francs !

Même si, comme l'a rappelé mon collègue Barrillier tout à l'heure, le Conseil d'Etat a par ailleurs obtenu des succès stratégiques importants, en matière de compression des dépenses c'est l'échec. Regrettable, décevant, inquiétant... Il marque une insuffisance de rigueur et de volontarisme qui discrédite les ambitions de redressement financier du Conseil d'Etat. C'est un échec qui souligne que les efforts destinés à améliorer la productivité du personnel de l'Etat et à réduire parallèlement les effectifs ne se sont pas matérialisés sur le terrain. Or, il faut le rappeler, les gains de productivité au sein de l'administration publique, on nous l'a toujours dit, font partie du programme de redressement du Conseil d'Etat, en sont le pilier.

Mesdames et Messieurs, il faut bien voir les conséquences de ce constat: si le Conseil d'Etat entend respecter son objectif en matière salariale, cela signifie - écoutez bien - dans deux ans, en 2008, 2009, qu'il devra réduire son enveloppe de 110 millions, soit 5,75% du montant budgeté pour 2007. Pour les radicaux, c'est possible, et compensable par des gains de productivité correspondants, mais le Conseil d'Etat lui-même y croit-il ? Osera-t-il en 2008, 2009, pour réaliser cette économie, par exemple, geler les salaires et procéder simultanément à 6% de réduction des effectifs ? Ou osera-t-il, autre possibilité, maintenir les mécanismes salariaux et baisser les effectifs de 10% ? Et osera-t-il imposer le même système aux subventionnés pour que, simultanément, la dérive sur les subventions cesse ? Parce que, Mesdames et Messieurs, c'est bien, je le répète, de tout cela qu'il s'agit.

Nous, radicaux, sommes inquiets. Nous sommes un peu déçus. C'est pourquoi nous nous abstiendrons de nous prononcer sur ce projet de loi.

La présidente. Sont encore inscrits: MM. Jean-Claude Ducrot, Alberto Velasco, Christian Bavarel, Eric Bertinat, Roger Golay et Mme Sandra Borgeaud. Je vais passer la parole à M. Jean-Claude Ducrot. Ensuite, je vous propose une pause d'un quart d'heure, puis nous reprendrons nos débats.

M. Jean-Claude Ducrot (PDC). Pour des raisons d'éthique, nos députés fonctionnaires ne participeront pas au vote de ce projet de loi, notamment en application de l'article 24, cependant le groupe DC appuiera ce projet de loi.

Il appuiera ce projet de loi pour différents motifs. Le premier: je pense que le Conseil d'Etat a trouvé un terrain de dialogue avec les organisations syndicales des fonctionnaires. Je pense que cela mérite, Mesdames et Messieurs, d'être soutenu, de même qu'il faut soutenir le gouvernement dans sa démarche.

Mesdames et Messieurs les députés, le 3 novembre dernier, un article - très intéressant - d'un journal romand traitait sans tomber dans le paternalisme d'un certain nombre d'éléments importants. Importants dans la stratégie d'entreprise. Il est vrai que l'administration cantonale est une véritable entreprise. Il faut, comme les entreprises privées, non pas répandre le fiel - qu'on a pu entendre évoquer tout à l'heure au travers du rapport de minorité - mais découvrir que l'adhésion du personnel - c'est mentionné dans l'article - regroupé autour de grands thèmes comme la satisfaction professionnelle, l'identification à l'entreprise, la relation de travail, les salaires, les avantages sociaux, contribue à la fierté d'appartenance.

C'est dire, Mesdames et Messieurs, que le travail que le Conseil d'Etat a entrepris avec les associations professionnelles a permis de construire cette passerelle. Nous avons dès lors la responsabilité d'encourager le Conseil d'Etat à poursuivre dans ce dialogue et de ne pas couper les ponts par un vote négatif au travers d'un éventuel refus de ce projet de loi sur le rétablissement des annuités.

Aussi, nous confirmons que le groupe DC votera ce projet de loi.

La présidente. A la demande de M. le député Alberto Velasco, qui doit se rendre à l'Hôpital, je lui passe la parole.

M. Alberto Velasco (S). M. Weiss nous a dit tout à l'heure qu'il ne veut pas se faire le complice de l'aggravation de la dette. Ce n'est pas que M. Weiss est complice, il est plutôt auteur de l'aggravation de la dette ! Vous êtes les auteurs de l'aggravation de la dette, car... (L'orateur est interpellé.) Non, vous avez quand même induit le projet de loi. Je tiens à vous dire, Monsieur Weiss, que chaque année je fais le calcul... (L'orateur est interpellé.) Non, chaque année, je fais le calcul de combien nous coûte votre projet de loi, et le compteur est aujourd'hui à 2,6 milliards de francs suisses, dus à la baisse de 12,5% !

Mais il y a plus, Monsieur Weiss ! La fonction publique a payé - et cela, ce n'est pas moi qui l'ai calculé, je me suis informé auprès du département des finances - depuis le début des années 1990, 3 milliards de francs suisses. C'est la contribution de la fonction publique, Mesdames et Messieurs les députés, aux différents plans de restructuration ou d'assainissement des finances publiques. Et aujourd'hui, Monsieur Weiss, vous trouvez que 40 millions, c'est beaucoup trop pour ces mêmes services publics... Mais quel patron d'industrie pourrait, année après année, ne pas payer ses employés comme il le faut et leur demander en plus du rendement et de l'efficacité ? Quel patron ?! (L'orateur est interpellé.) Cela n'existe pas, Monsieur Weiss ! Parce que vous ne pouvez pas travailler avec des gens dont vous baissez le salaire année après année, ce n'est pas possible !

Monsieur Kunz, qui avez été directeur - aujourd'hui, vous êtes à la retraite, peut-être que c'est la retraite qui vous fait perdre ces notions-là - mais à l'époque, vous étiez directeur et je ne pense pas que, pendant des années...

La présidente. Monsieur le député, adressez-vous à la présidente !

M. Alberto Velasco. C'est vrai, Madame la présidente, mon collègue Kunz, qui a été directeur chez Migros pendant des années, n'a quand même pas sous-payé ses employés ! Il savait que si l'on demande plus à ses employés, il faut les payer. Eh bien, je dis que c'est une justice que ce Conseil d'Etat... C'est tout à son honneur, d'ailleurs. Non seulement il va dans le sens de rétablir l'équilibre des dépenses et des recettes, mais, en plus, il donne une certaine justice salariale à la fonction publique. Cela, il faut le relever. Mais en plus, Monsieur Weiss...

Une voix. Oui !

M. Alberto Velasco. Vous qui êtes un adepte de la paix du travail, vos milieux ont presque insulté la Boillat parce qu'elle avait rompu cette clause de la paix du travail, au point de leur faire un procès. Ici, que fait ce gouvernement ? Il instaure une pratique qui a cours depuis longtemps dans notre république: la paix du travail. Il le fait avec un accord directement entre l'Etat et la fonction publique. Et non pas par un projet de loi que l'Entente dépose, comme cela, dans ce Grand Conseil, pour imposer au Conseil d'Etat des conditions que lui-même doit imposer à la fonction publique !

Le Conseil d'Etat a négocié avec la fonction publique et nous avons une certaine paix du travail. Cependant, je suis effectivement d'accord avec vous, Monsieur Weiss, quand vous rappelez à vos collègues de l'Entente leur fidélité au projet de loi que vous avez déposé. Mais vous savez comme moi, Monsieur Weiss, que ce projet est mort ! Parce que son contenu est inapplicable ! Et grâce à sa politique, le Conseil d'Etat vous a offert une sortie honorable, très honorable, et vous devez le remercier. Nous allons tous pouvoir voter prochainement le projet de loi du Conseil d'Etat, que la fonction publique a accepté, que ce Grand Conseil acceptera, et vous pourrez donc retirer votre projet de loi de manière honorable, et tout le monde sera content.

Mesdames et Messieurs les députés, je crois que la démonstration était claire: il est fondamental et nécessaire que notre parlement vote ces 40 millions. Pour la paix du travail et pour reconnaître les mérites de la fonction publique. Et même, il faudra beaucoup de votes comme celui-ci pour rattraper un jour les 3 milliards.

Une voix. Bravo Alberto ! (Applaudissements.)

Fin du premier débat, deuxième débat et troisième débat: Session 03 (décembre 2006) - Séance 13 du 15.12.2006

La présidente. Nous reprenons nos travaux à 10h05.

La séance est levée à 9h50.