République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 25 avril 2002 à 20h30
55e législature - 1re année - 7e session - 31e séance -autres séances de la session
Le président. La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Bernard Annen, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat, Carlo Lamprecht, Micheline Spoerri et Pierre-François Unger, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Laurent Moutinot, Martine Brunschwig Graf et Robert Cramer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Erica Deuber Ziegler, Philippe Glatz, Mireille Gossauer-Zurcher, Sami Kanaan et Claude Marcet, députés.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Le président. Quelques compléments d'information concernant l'ordre du jour. Vous avez trouvé sur vos places :
- La pétition 1145-A. Ce rapport sera traité au point 103bis, avec le PL 7886-A;
- La réponse complémentaire du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente 1100 de M. Spinucci du 28 juin 2001;
- Une interpellation urgente écrite de M. Kunz concernant le revenu des habitants du canton, qui sera traitée demain à 17 h au point 13, soit lors des réponses du Conseil d'Etat aux interpellations urgentes.
- Les comptes 2001 et le budget 2002.
Changement de département rapporteur:
- Le point 114, PL 8700 sur les contributions publiques, doit figurer sous le département de justice, police et de la sécurité, puisqu'il concerne le service des automobiles et de la navigation. Il sera donc traité au point 87bis.
Les points suivants seront traités ensemble :
- point 25 - motion 1432 pour la suspension de toute expulsion des sans-papiers et leur régularisation collective - avec le point 26 - motion 1434 concernant le traitement des personnes en situation irrégulière à Genève (sans-papiers);
- point 43 - PL 8662 ouvrant un crédit d'investissement de 35 370 652 F pour les travaux de construction d'une traversée en tranchée couverte du village de Vésenaz sous la T 105 - RC 1 route de Thonon (reprise du PL 7784) - avec le point 67 - P 1360-A rapport de la commission des transports chargée d'étudier la pétition pour un tunnel à Vésenaz;
- point 60 - M 1376-A rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier la proposition de motion demandant une salle de musique de danse pour les jeunes - avec le point 64 - P 1337 rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition concernant la création d'une salle polyvalente en faveur de la musique;
- point 51 - PL 8389-A rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (demande de modification des plans d'affectation du sol et harmonisation des délais relatifs aux mesures conservatoires) - sera traité avant le point 49 - PL 7597-A rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire.
Communication de la présidence
Le président. Nous présentons nos vives condoléances à notre collègue M. Sami Kanaan, qui vient de perdre sa mère.
Annonces et dépôts
Néant.
Préconsultation
M. Jean Rémy Roulet (L). Pour les comptes 2001, quatre faits sont à observer. Premièrement, l'équilibre budgétaire est atteint. Deuxièmement, la dette se réduit. Troisièmement, les dépenses sociales augmentent. Quatrièmement, les capacités d'investissement de l'Etat de Genève sont préservées. De plus, tout cela s'est réalisé dans un contexte économique fragilisé notamment par la disparition de la compagnie Swissair et par les opérations liées aux créances transférées à la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale. De ce résultat, le groupe libéral se félicite et ne peut que recommander au Conseil d'Etat de poursuivre dans cette voie.
Nous souhaitons ce soir nous limiter à quelques considérations d'ordre politique concernant les quatre faits précités. Venons en donc premièrement à l'équilibre budgétaire. Il existe une règle d'or en matière de gestion des deniers publics, qu'il nous paraît, à nous libéraux, indispensable de traduire au mieux en pratique, à savoir que les recettes de l'Etat doivent couvrir ses dépenses et que l'emprunt ne doit être utilisé que pour financer des investissements. Notre exécutif a respecté clairement cette règle en ce qui concerne les comptes 2001. Compte tenu de la situation, il a peut-être même fait mieux. Les résultats des comptes font apparaître, avant constitution des réserves, un bonus de quelque 300 millions de francs, explicable notamment par un accroissement des revenus de 4,6% par rapport au budget, soit près de 6 milliards de francs. Et une augmentation de charges de 1,4%, toujours par rapport au budget, soit un montant de 5,6 milliards.
La seule remarque que nous formulons au Conseil d'Etat, et plus particulièrement à sa présidente, concerne l'explication sur l'origine de ce bonus, qu'elle nous donne dans l'exposé des motifs du projet de loi que nous traitons ce soir. En page 4 de ce rapport, il est expliqué que cet excédent de 300 millions tient au fait que "les gains de productivité de l'administration fiscale deviennent très visibles". Tout au plus aurions-nous souhaité, Madame la présidente, que vous mentionniez également la bonne tenue, voire l'excellente tenue de l'économie genevoise, compte tenu des circonstances que j'ai évoquées préalablement.
Puisque nous parlons de l'excellente tenue des recettes fiscales cantonales, nous ne résistons pas à la tentation de vous rappeler, à vous, mais aussi à l'ensemble de cette assemblée, que cette excellente tenue a été enregistrée malgré la diminution d'impôt de 12% votée en 1999, à près de 60%, par le souverain genevois.
Deuxième point de notre analyse, la réduction de la dette. La bonne nouvelle réside dans le fait que celle-ci a diminué de plus de 3% par rapport aux comptes 2000. De plus, cette diminution est, sauf erreur, la cinquième diminution annuelle consécutivement observée, si l'on mesure celle-ci au prorata des revenus de l'Etat. Reste que cette dette coûte très cher: près de 370 millions de francs par année, soit à peu près un million de francs par jour, soit le montant équivalent versé annuellement, en tout cas d'après les comptes 2001, à l'office cantonal des personnes âgées, soit un peu moins du quart des charges totales du personnel de l'Etat. Tout le monde s'accordera à dire que cet argent serait mieux dépensé ailleurs et que l'objectif de la réduction de la dette doit être maintenu. J'ajouterai que dans une vision dynamique de l'économie, diminution de la dette peut très bien rimer avec diminution de l'impôt.
Abordons, si vous le voulez bien, le chapitre des dépenses sociales. Celles-ci se sont accrues de 9% en 2001 pour atteindre 1 milliards 243 millions de francs, ce en faisant abstraction, si je ne m'abuse, de la subvention de près de 700 millions accordée aux Hôpitaux. Rappelons qu'il s'agit du poste de dépense le plus élevé du canton. Rappelons donc que notre canton est probablement l'un des plus sociaux du pays et, comme M. Unger l'a ajouté en aparté, le plus social du monde. Ce rappel n'est pas inutile à la veille d'une votation cantonale portant sur une aide sociale supplémentaire, j'ai parlé du RMR. Ajoutons encore que notre groupe accueille avec satisfaction les intentions du nouveau chef du département de l'action sociale et de la santé, visant à mieux cibler ces subventions par le biais notamment, a-t-on entendu dire, de contrats de prestations.
Enfin, dernier tour d'horizon rapide sur ces comptes, qui concerne le budget d'investissement...
Le président. Vous êtes au bout, M. Roulet. J'aimerais que vous concluiez, s'il vous plaît !
M. Jean Rémy Roulet. Compte tenu de la situation financière, force est de constater que ce niveau est tout à fait acceptable. Le seul point d'interrogation que nous avons, pour faire court, porte sur la politique anticyclique que l'Etat va mener. Nous espérons que cette politique perdurera, parce que certaines analyses montrent que l'Etat n'a pas joué, par le passé, son rôle anticyclique ou en tout cas pas au bon moment conjoncturel.
Pour conclure, je dirais une chose qui tient à coeur aux libéraux. Dans une économie dynamique, diminution des impôts ne rime pas avec diminution des prestations. C'est un peu une réponse à la conclusion du rapport du Conseil d'Etat, page 27 de l'exposé des motifs, que nous vous dévoilons ce soir. Je vous remercie pour votre attention et m'excuse pour les quelques minutes que j'ai prises en trop.
Le président. Ce ne sont pas quelques minutes, mais une minute ! Vous êtes le premier orateur. Par conséquent, les autres groupes disposeront de 6 minutes aussi !
M. Jean-Marc Odier (R). En décembre 2000, le groupe radical refusait le budget 2001, principalement en raison de la création de 300 nouveaux postes, de l'insuffisante réduction de la dette et du doute sur la stabilité du niveau des recettes fiscales. Force est de constater aujourd'hui que ces recettes fiscales se sont non seulement maintenues, mais ont progressé de 5,5% en moyenne, allant jusqu'à plus de 15% s'agissant de l'impôt sur les bénéfices.
Si l'on peut se réjouir de ce taux élevé, on doit à l'évidence craindre sa variabilité d'une année à l'autre et ne pas fixer d'augmentation des charges à ce niveau. Or, le pourcentage d'augmentation des charges s'avère justement supérieur de 0,3% à celui des revenus. L'exposé des motifs essaie de nous rassurer en précisant que la croissance des charges de l'Etat n'est que de 1,3% si l'on extrait les provisions, soit 297 millions. En fait, ce chiffre est totalement trompeur, car il ne tient pas compte du montant non dépensé pour les postes votés au budget 2001, mais non repourvus, soit les postes vacants, au nombre de 304 fin 2001.
Quant à la politique des provisions, elle devra se limiter strictement aux risques avérés de manière à optimiser le résultat de l'exercice. Il est primordial de rembourser plus rapidement la dette pour laquelle une variation des taux d'intérêt représente un risque permanent. La généralisation de ces provisions, qui se montent, hors BCGe, à près d'un milliard, provoque une distorsion dans la vue des comptes et ne représente pas aisément la réalité. Un exemple tiré de l'exposé des motifs : le payement de cette prime n'influe pas sur le résultat des comptes, car elle trouve sa contrepartie dans la dissolution d'une provision constituée à cet effet dans les comptes 2000.
Outre ces chiffres et ces montages comptables que nous examinerons en détail en commission, je terminerai par là, nous relevons avec satisfaction les importants efforts de rigueur de gestion, notamment dans la gestion des postes vacants, de la trésorerie, sur le principe des flux tendus, et par la mise en place d'une caisse unique, rigueur dont nous ne pouvons que nous féliciter ! (Brouhaha.)
Le président. Merci ! Monsieur Barrillier, si vous avez quelque chose à négocier, vous pouvez aller à la buvette !
M. Robert Iselin (UDC). Les commentaires qui ont été faits jusqu'à maintenant sont à mon sens suffisamment explicites et je ne me prononcerai que sur le court terme. Je n'ajouterai donc pas grand chose aux propos de mes collègues qui ont éclairé de nombreux aspects ou en tout cas les aspects importants de ces comptes. En vieux routier de la banque, je tiens à dire à ce Grand Conseil que les comptes proposés doivent être acceptés et qu'ils sont, à court terme, mais à court terme seulement, d'une remarquable clarté.
Je voudrais vous remercier - ce qui ne m'empêchera pas, Madame la présidente, de vous attaquer parfois violemment - pour les efforts que vous déployez afin d'améliorer les finances de cette République. Certes, on pourrait faire plus du côté de la dette. Certes, il faudrait continuer à diminuer les impôts. Mais le résultat est assez remarquable pour le moment et, si je suis bien informé, les agences internationales d'estimation ont amélioré le... il me manque le mot... la qualification de l'Etat de Genève.
Vous avez droit à nos remerciements. Je pense qu'il faut continuer sur cette voie et je pense surtout, c'est un peu ce qu'il y a derrière ces comptes, que le personnel de l'Etat doit peu à peu être imbu de l'idée qu'un des premiers objectifs de la bonne gestion helvétique, c'est de faire des économies.
M. David Hiler (Ve). Depuis plusieurs années maintenant, nous pouvons exprimer à pareille époque notre satisfaction par rapport aux comptes, comptes qui montrent en tout cas une chose, c'est que le budget de fonctionnement de l'Etat de Genève est sain sur le plan structurel. Bien sûr, nous constatons aussi chaque année que la diminution de la dette n'est pas aussi rapide que nous le souhaiterions, mais, en même temps, ce n'est pas un reproche, puisque nous en connaissons tous les motifs, à savoir la baisse des impôts votée par le peuple et la Banque cantonale. Ces deux facteurs expliquent à l'évidence qu'il ne s'avère pour le moment pas possible de réduire très rapidement la dette. Maintenant, le fait est qu'il y a un certain nombre de pièges dans ce genre de situation, situation qui, sans avoir résolu les problèmes du passé, s'avère être saine.
Premier piège, c'est le voeu de certains - peut-être d'une majorité, nous souhaitons que ce ne soit pas le cas - la diminution des impôts. A ce propos, il peut être objectivement vrai que des baisses d'impôts, en engendrant une augmentation du pouvoir d'achat de certaines catégories de la population qui ont une forte propension à consommer ce surplus, peuvent dans certains cas avoir des effets sur l'économie, ce qui permettrait à la baisse de s'autofinancer. En revanche, le paquet de mesures actuellement proposées devant la commission fiscale ne contient aucun élément de ce type. A l'évidence, il s'agit essentiellement de diminuer les impôts, en des montants d'ailleurs assez conséquents, en faveur de groupes qui ne consommeront par ailleurs pas plus si on leur baisse les impôts, tout simplement parce que leur aisance est telle que, à un moment donné, l'on accumule et l'on ne consomme plus. Donc, premier écueil à éviter, une série de baisses d'impôts. J'espère que le parlement ou le peuple auront la sagesse de continuer dans une gestion qui nous assure une stabilité à moyen terme.
Deuxième écueil, la compression des investissements. J'insiste sur ce point, parce que notre parti a demandé à de très nombreuses reprises la plus grande prudence. Toutefois, il nous semble aujourd'hui, après cinq ans d'embellie, qu'il va nous falloir lâcher un peu la bride sur plusieurs plans. La situation des locaux de l'Etat - qu'ils soient administratifs, qu'il s'agisse de bâtiments scolaires ou qu'il s'agisse d'EMS - est actuellement plus que préoccupante. Je doute que procéder à des calculs d'épicier au cours de ces prochaines années s'avère positif pour notre République. Nous devons maintenant répondre à des besoins immédiats, dont chacun comprend l'utilité, besoins immédiats qu'il faut satisfaire. Nous avons aussi des grands projets de transport, dont l'un recueille un très large assentiment dans ce parlement. Ils coûtent, mais ils modèlent la Genève de demain sur bien des plans.
Nous souhaitons donc aujourd'hui que le Conseil d'Etat, sur la base de ces nouveaux bons comptes, continue à améliorer l'efficacité de l'Etat - merci aussi sur ce point, Madame Calmy-Rey - mais qu'il prépare par ailleurs des opérations d'une certaine envergure pour répondre aux besoins les plus urgents en matière d'investissement pour ces cinq prochaines années. S'il pouvait planifier jusque dans les décaissements, nous en serions plus heureux encore, de façon à ne jamais déraper au niveau des investissements, comme cela a pu être le cas par le passé.
Si ce parlement, y compris avec sa nouvelle majorité, sait rester raisonnable et poursuit sur les traces de la précédente, nous continuerons sur la bonne voie, malgré les difficultés conjoncturelles qui peuvent survenir en tout temps dans le monde actuel.
Félicitations donc au Conseil d'Etat pour sa gestion au cours de cette année ! Nous souhaitons que celle de l'année prochaine soit meilleure encore !
M. Souhail Mouhanna (AdG). Les comptes 2001 m'inspirent un certain nombre de réflexions dont je vais essayer de vous faire part dans les délais qui me sont impartis.
Tout d'abord, je relève que les comptes de l'Etat sont, pour la troisième année consécutive, excédentaires. Ils le sont de plusieurs centaines de millions si je tiens compte des provisions et notamment de celle concernant la Banque cantonale, dont on mesure année après année - en tout cas pour la deuxième fois et nous verrons par la suite - l'ampleur des dégâts causés aux finances publiques de notre canton et par conséquent la gravité de la gestion désastreuse des responsables de la Banque cantonale, ceux qui nous ont conduit à cette situation, soit 2,7 milliards de provision, plusieurs dizaines de millions par années de pertes, des centaines de millions qui doivent être dégagés pour couvrir ces pertes et les différentes opérations liées à la Banque cantonale.
Je mets ceci en parallèle avec les mesures prises à l'encontre des services publics et des prestations à la population. Je me souviens des nombreuses discussions qui ont porté sur la création de postes par-ci, par-là, des déclarations des uns et des autres, des longues minutes, voire des heures de débats concernant les subventions de quelques milliers de francs à accorder à telle organisation ou à tel organisme, apportant ainsi une contribution à la vie associative, culturelle ou sociale de notre canton.
Lorsque je constate l'ampleur des dégâts causés par la politique de gestion de la Banque cantonale, je me pose beaucoup de questions par rapport aux déclarations de certains et de leur volonté réelle, effective, de voir l'Etat fonctionner avec un maximum d'efficacité au service de la population. Ce qui m'incite notamment à faire cette déclaration, c'est ce que je viens d'entendre de la part d'un représentant des bancs d'en-face, qui parlait de Genève comme étant le canton le plus social de Suisse... (L'orateur est interpellé.)Le canton le plus social... Oui, Monsieur le président ! Je vois que vous êtes très impatient d'entendre la suite. Je vais donc vous la donner ! Tout d'abord, Monsieur le président, on peut donner une autre interprétation aux dépenses sociales. C'est justement l'ampleur de la précarité et de la pauvreté à Genève. Vous voulez peut-être quelques preuves ? De par ma formation, j'ai toujours le souci de démontrer mes affirmations ! Puisque l'on parle de Genève comme étant le canton le plus social, je rappelle en passant qu'une partie extrêmement importante des capitaux mondiaux se trouve à Genève, plus de 2000 milliards gérés par les établissements bancaires de la place. Puisque l'on veut connaître la situation sociale genevoise, je rappelle simplement que, selon le rapport de gestion 2000 du Conseil d'Etat - on ne dispose pas des chiffres dans le rapport de 2001 à cause de la mise en place du nouveau système fiscal - 22,63% des contribuables, soit 53 000 personnes, n'ont pas de revenus imposés. Pratiquement 80% des contribuables genevois disposent d'un revenu imposable inférieur à 50 000 F, dont plus de 22% qui n'ont pas de revenu imposé. Lorsque je regarde la fortune des Genevois - 76,24% des contribuables, soit 179 000 personnes, n'ont pas de fortune imposée - lorsque je vois que 3,10% des contribuables genevois disposent de 35 milliards de fortune imposée et que l'on vient nous parler de politique sociale... Oui, Genève pratique une politique sociale ! Mais cette politique sociale est aussi la conséquence des disparités, des inégalités de plus en plus graves au niveau de notre canton.
Je voudrais enfin relever quelque chose qui me tient bien sûr à coeur. Nous avons discuté de postes au niveau du budget. Lorsque je regarde les charges du personnel, rien qu'en ce qui concerne l'Etat de Genève, il y a plus de 50 millions d'économie sur les charges du personnel. 50 millions, cela représente quelques centaines de postes...
Le président. Vous avez dépassé les cinq minutes, mais je vous accorde encore une minute, Monsieur le député !
M. Souhail Mouhanna. Si j'ajoute le grand Etat au petit Etat, on devrait atteindre les 70 à 80 millions. Je trouve qu'il y a là quelque chose qui ne va pas, parce que les conditions de travail du personnel sont de plus en plus difficiles et que les prestations, on l'a d'ailleurs entendu tout à l'heure dans la réponse de M. le conseiller d'Etat Pierre-François Unger, les prestations sont de plus en plus difficilement assurées pour la population genevoise. Il faut que le Conseil d'Etat fasse un effort significatif pour que les postes nécessaires soient dégagés le plus vite possible afin que les prestations de l'Etat soient les meilleures possible. Notre population le mérite !
M. Claude Blanc (PDC). Tout a bientôt été dit sur ces comptes, si bien que je ne vais pas parler du grand bouquin que l'on a reçu. Mais je vais essayer de me focaliser sur le projet de loi qui nous est soumis et sur son exposé des motifs, notamment, puisqu'on a peu de temps, sur les commentaires figurant à la page 5. Il y a d'abord une phrase épouvantable : "L'année 2001 a été marquée par différents événements, dont certains ont fortement impacté le fonctionnement de l'Etat." C'est plus qu'une faute, c'est un crime ! C'est un péché contre la langue française ! Cela, Madame la présidente, je ne vous le pardonnerai pas !
Le président. Un peu de charité, Monsieur Blanc !
M. Claude Blanc. Franchement, vous devriez quand même surveiller ce qui est écrit en votre nom.
Mme Micheline Calmy-Rey. C'est moi qui l'ai écrit !
M. Claude Blanc. C'est vous qui l'avez écrit ?
Mme Micheline Calmy-Rey. Je suis désolée, Monsieur Blanc !
M. Claude Blanc. Je suis encore plus désolé que vous !
Le président. Pas de dialogue, s'il vous plaît ! Impactons !
M. Claude Blanc. Bref, je ne veux pas perdre mon temps de parole pour parler de cela... Je lis plus loin que la population résidente du canton a augmenté de 6 000 habitants en un an et de 16 000 depuis 1999. Le nombre de frontaliers a lui aussi fortement augmenté, puisqu'il a augmenté de 10% en 2001 pour se porter à 33 000. Et l'on ajoute que "l'accroissement des résidents et des travailleurs frontaliers pèse bien sûr sur les charges de l'Etat." Peut-être bien, Mesdames et Messieurs les députés, mais je voudrais quand même en revenir à l'adage suivant : "Faites-moi de la bonne politique et je vous ferai de bonnes finances." Pour faire de bonnes finances, il faut d'abord savoir ce que l'on va gagner. Or, s'agissant des personnes dont vous parlez et dont vous dites qu'elles pèsent sur les charges de l'Etat, j'aimerais quand même vous faire respectueusement remarquer, du moins j'espère que c'est le cas, que la plupart d'entre elles n'ont pas pesé sur les charges de l'Etat, mais ont contribué pour une bonne part à assurer la prospérité de l'Etat. J'espère que vous n'avez quand même pas oublié de "piquer" l'impôt à la source aux frontaliers, qui ont augmenté de 10% ! J'espère que vous êtes bien consciente que le travail de ces gens-là a profité à l'économie genevoise ! J'espère que vous êtes bien consciente que les nouveaux habitants sont justement venus parce que l'on a pratiqué une politique économique attrayante. Des entreprises se sont installées et ces gens-là ne sont pas arrivés pour nous coûter. Ils sont venus pour travailler à notre prospérité. Le résultat est là, Mesdames et Messieurs. Si des gens viennent à Genève pour y travailler et gagner de l'argent, nous en tirerons toujours quelque chose.
M. Mouhanna nous explique que la plupart des gens ne paient pas d'impôts parce qu'ils ne gagnent pas assez et qu'un petit nombre gagne beaucoup et paie tous les impôts. Peut-être bien ! Mais encore heureux qu'ils soient là, parce qu'ils pourraient être ailleurs, ces gens-là ! Il faut donc être raisonnable et savoir que l'on ne peut pas dépenser si l'on ne commence pas par gagner.
A ce sujet, la question que je repose, parce que ce n'est pas la première fois que je la pose au sujet des comptes ou du budget, concerne les personnes qui participent à la prospérité économique de notre canton. Il faut s'efforcer d'obtenir la totalité de l'impôt qu'elles doivent. Comment peut-on le faire ? En faisant en sorte qu'elles habitent le canton ou la France voisine. Pour les personnes qui habitent en France voisine, c'est très facile, parce qu'on leur pique tout et qu'elles ne nous coûtent rien. On dit que les frontaliers augmentent les charges de l'Etat. Ceux-là ne nous coûtent rien. Leurs enfants ne vont pas à l'école chez nous, on ne les enterre pas dans nos cimetières. Ils ne nous coûtent donc rien, ces gens-là. Nous devons donc faire en sorte que les personnes qui gagnent de l'argent restent chez nous. Il nous faut prévoir des possibilités pour que ces gens-là puissent habiter chez nous et payer des impôts. Il ne faut pas dégoûter ceux qui gagnent de l'argent d'habiter chez nous et les envoyer dans le canton de Vaud, où on les reçoit à bras ouverts. Il nous faut travailler de manière à ce que notre population soit beaucoup plus équilibrée qu'elle ne l'est. M. Mouhanna a raison de dire que l'on a trop de pauvres et pas assez de riches. Effectivement, nous avons trop de pauvres et pas assez de riches. Il nous faut garder les riches chez nous afin qu'ils n'aillent pas payer des impôts ailleurs. Voilà ce que je voulais dire, Mesdames et Messieurs, et j'espère que le Conseil d'Etat m'aura entendu !
Le président. Vous avez été très court, Monsieur Blanc. Vous avez donc compacté vos propos !
M. Dominique Hausser (S). L'antieuropéanisme de M. Blanc est connu et son discours sur les frontaliers ne nous étonne pas, sachant qu'ils paient depuis longtemps des impôts à Genève et que Genève, canton, officiellement 415 000 habitants, est effectivement un centre pour près d'un million d'habitants, que ce soit de France voisine ou du canton de Vaud. Nous nous sommes attribués, dans ce parlement, la possibilité de gérer des affaires qui dépassent peut-être l'espace des citoyens qui sont amenés à voter à Genève.
Vous avez entendu tout à l'heure M. Roulet dire que ces comptes étaient finalement bons. Entendre un libéral dire que les comptes sont bons, alors que le Conseil d'Etat est majoritairement de droite, c'est finalement assez satisfaisant !
Vous avez entendu tout à l'heure M. Hiler expliquer qu'il était extrêmement satisfait de ces comptes, qui reflétaient la politique menée ces quatre dernières années par une majorité parlementaire qui n'était pas bourgeoise, ni de l'Entente, ni de l'extrême droite, et qui a finalement soutenu un gouvernement de droite et lui a permis de redresser les finances de l'Etat.
On peut parler des chiffres, mais cela me semble très difficile à faire, ce d'autant plus que les parlementaires ont reçu aujourd'hui les chiffres détaillés, les membres de la commission des finances ayant reçu les grandes enveloppes et les éléments principaux il y a deux ou trois semaines. Il nous est donc difficile de commenter ces comptes dans le détail.
Ceci dit, ils sont bons. Ils démontrent qu'une gestion efficace, rigoureuse et sociale permet de gérer l'Etat. La seule chose que nous devons dire aujourd'hui au gouvernement, c'est qu'il a présenté des comptes reflétant la volonté parlementaire de ces quatre dernières années et qu'il doit continuer, même si la nouvelle majorité veut détruire l'Etat dans les prochaines quatre années. Vous devez continuer à défendre le peuple, les citoyens, les gens dans la difficulté et vous ne devez pas vous contenter de répondre à des intérêts particuliers !
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. Je voudrais tout d'abord m'excuser pour mes fautes de français. Je viendrai prendre des leçons chez vous, Monsieur Blanc ! La prochaine fois, ce sera mieux. Je suis perfectible dans ce domaine !
Les comptes de l'Etat pour l'année 2001 sont bons. Nous avons un excédent, après attribution en réserves, provisions et opérations de correction, de près de 300 millions de francs. La dette diminue. Nos investissements sont autofinancés. Et nous répondons, je crois pouvoir le dire, aux besoins de la population genevoise. Ces résultats sont dus bien sûr aux gains de productivité de l'administration fiscale, qui, je l'ai écrit, deviennent maintenant évidents. Je regrette que l'on n'ait jamais pu les calculer de façon claire. Mais tout de même, des augmentations de près de 60% depuis 1998 de l'impôt des sociétés et de 20% de l'impôt des personnes physiques, malgré une baisse linéaire de 12%, cela démontre bien qu'il y a eu gain de productivité.
Mais vous avez aussi raison de dire, et l'un d'entre vous l'a remarqué, que cette augmentation des recettes fiscales est à rapporter aussi à l'économie du canton de Genève, qui se porte bien, et aux efforts du Conseil d'Etat, y compris financiers, pour attirer des entreprises sur le sol genevois. Il faut le reconnaître.
La politique financière du Conseil d'Etat se base sur trois principes. Le premier principe est celui de la transparence. Transparence, cela veut dire que l'on essaie de présenter des états financiers aussi clairs que possible, avec des tableaux de lecture aisée, mais cela signifie aussi et encore des règles connues de tous et appliquées. Par exemple, nous ne finançons pas, je le dis en réponse à une interpellation urgente faite tout à l'heure, nous ne finançons pas les charges courantes de l'Etat avec des recettes extraordinaires. Les recettes extraordinaires partent en provisions et ne servent pas au financement des charges de l'Etat. Pour ce qui concerne les charges sociales, il est vrai que ces charges croissent d'une année à l'autre. L'administration fiscale a mis certains faits en évidence. Ainsi, depuis 1998, les revenus des Genevois augmentent de façon différenciée. Cela veut dire que les revenus inférieurs à 100 000 F croissent à hauteur de l'indice genevois des prix à la consommation, alors que la croissance des revenus supérieurs à 500 000 F ou à 1 million de francs s'élève à près de 20% par année. Les inégalités se creusent. Il appartient au Conseil d'Etat de répondre aux besoins sociaux du canton. C'est notre fierté que d'avoir pu le faire grâce à une gestion rigoureuse.
Je voudrais encore relever le fait que les charges d'exploitation diminuent. Par charges d'exploitation, il faut entendre charges de personnel et dépenses générales. Ces charges diminuent d'une année à l'autre. M. Mouhanna nous explique que nous ne répondons pas aux besoins des différents services. Les économies sur les charges de personnel sont essentiellement dues, Monsieur Mouhanna, à l'impossibilité de repourvoir les postes et non pas à la volonté du Conseil d'Etat de ne pas octroyer de nouveaux postes. Il y avait, en fin d'année 2001 à peu près 500 postes vacants à l'Etat de Genève. Il y en a toujours. C'est la raison pour laquelle nous avons mis en place ce que nous appelons une gestion départementale des effectifs, qui permet un petit peu de souplesse dans la gestion des effectifs pour essayer de diminuer ce différentiel. Je reconnais que les services de l'Etat travaillent à la limite des effectifs dont ils ont besoin. Ce n'est pas souhaitable, ni en terme de charge de travail, ni en terme de fonctionnement, ni en terme de prestations offertes aux citoyens et aux citoyennes. Croyez-moi, nous faisons tout ce qu'il est possible de faire pour diminuer ce nombre de postes vacants !
Deuxième principe, la durabilité. Il s'agit de donner à notre Etat la capacité de se financer, non pas simplement une année après l'autre, mais sur le moyen terme. Les provisions constituent l'un des instruments de cette politique de durabilité. Les provisions ne représentent pas un facteur d'opacité, mais sont au contraire explicitées et listées. Elles obéissent à des règles connues. Nous les constituons, non pas d'après notre propre caprice, mais en fonction de règles connues et nous les dissolvons de la même façon. Une information précise sera d'ailleurs donnée à la commission des finances sur la manière dont nous procédons.
Je voudrais vous signaler, Monsieur Odier, que la constitution de provisions n'empêche pas la dette de diminuer. Cela n'a pas d'impact sur la diminution de la dette dans la mesure où les provisions, tout comme les amortissements d'ailleurs, ne sont pas des charges décaissées. Ce sont bien des charges qui figurent dans les comptes d'Etat, mais qui ne donnent pas lieu à décaissement et dont les montants sont par conséquent utilisés pour rembourser d'anciens emprunts. J'espère que cela vous rassurera.
Enfin, pour ce qui concerne les investissements, vous avez émis le souhait, Monsieur Hiler, que nous puissions être plus généreux en matière d'investissement dans les années à venir. Il est vrai que l'Etat de Genève a de gros projets d'investissements. Il est aussi vrai que les investissements ne sont pas faibles en 2001, puisque les investissements bruts s'élèvent à plus de 500 millions de francs. Les investissements nets sont plus faibles, mais les investissements bruts dépassent les 500 millions de francs. Il faut quand même bien se dire que le montant des investissements doit être le fruit d'un équilibre entre la volonté de diminuer la dette, les capacités financières de l'Etat de Genève et les besoins donnés en matière d'investissements. Pourquoi ? Parce que le taux d'autofinancement des investissements est un critère important dans la gestion des liquidités et dans la capacité de l'Etat de Genève à diminuer la dette.
Encore un mot sur la Banque cantonale de Genève. Il est vrai que les avances et les montants décaissés en faveur de la Fondation de valorisation représentent un poids important sur les liquidités de l'Etat de Genève. Mais il est aussi vrai qu'ils n'ont pas empêché l'Etat de continuer à diminuer la dette, comme il est aussi vrai que nous avons aujourd'hui une Banque cantonale qui va mieux, certes encore en convalescence, mais qui va mieux. C'est un acquis pour toute la collectivité genevoise, un acquis qui nous coûte d'ailleurs moins cher, excusez-moi l'expression, que si nous avions dû payer et actionner la garantie de l'Etat sur les dépôts d'épargne et de prévoyance, plus de 4 milliards de francs, si la Banque avait fait faillite. Nous avons sauvé la Banque. Nous disposons d'un instrument de politique économique où les décisions se prennent sur le plan local, un instrument de politique financière pour l'Etat de Genève. Je ne crois pas que l'on puisse considérer cela comme un passif, mais bien comme un actif.
Voilà, Mesdames et Messieurs, je vous remercie de bien vouloir renvoyer ces comptes en commission et merci de votre accueil ! (Applaudissements.)
Ce projet est renvoyé à la commission des finances.
Le président. Nous aurions dû passer au point 84, la résolution 456, mais nous venons d'être saisis d'un certain nombre d'amendements, que je fais photocopier et distribuer. En attendant, je vous propose de passer au point 18 bis, le projet de loi 8685-A.
Premier débat
La loi 8685 est adoptée en trois débats, par article et dans son ensemble.
Débat
Mme Sylvia Leuenberger (Ve). L'objectif de cette résolution est d'offrir un espace neutre et symbolique, où une délégation de paix entre Israël et la Palestine puisse se réunir et examiner des solutions de paix. Si l'on veut être crédible, on doit rester modeste devant une situation aussi complexe, qui fait appel à autant de paramètres différents. Il ne s'agit pas pour nous de débattre sur les solutions à adopter ou sur des coupables à désigner, mais il est simplement apparu très important à une large majorité de ce Grand Conseil que Genève, ville internationale qui bénéficie d'une longue tradition de dialogue au niveau mondial et qui abrite le siège de l'ONU, le CERN et de nombreuses organisations internationales, donne un signe de recherche de paix à un conflit dont l'horreur humaine nous interpelle tous. Tout à l'heure, 1200 jeunes ont signé une pétition, qu'ils ont déposée au Grand Conseil et qui va exactement dans le même sens que cette résolution. Cette pétition précise aussi que la violence extrémiste ne résout pas un conflit. Ces jeunes veulent avant tout que deux peuples puissent vivre dignement et en paix et que Genève s'engage pour cela en tant que République.
Aussi, je vous invite à accepter cette résolution et à la renvoyer au Conseil fédéral.
Le président. Monsieur Weiss, au-delà de vos interpellations un peu longues, arrêtez d'appuyer sur le bouton du Conseil d'Etat ! Je ne pense pas que M. Lamprecht souhaite prendre la parole pour le moment...
M. Antoine Droin (S). Je rejoins les propos de Mme Leuenberger. J'aimerais simplement rappeler que Genève a un passé riche dans les conflits internationaux et dans la médiation internationale. Nous ne pouvons qu'encourager cette résolution.
Je rappellerai que Genève a souvent été un pont entre le bloc de l'Est et celui de l'Ouest, entre le bloc du Sud et celui du Nord, si l'on peut appeler cela des blocs. Genève est aussi le canton qui abrite le siège du CICR. La Suisse est dépositaire des Conventions de Genève. Genève a aussi accueilli pendant la guerre du Golf une rencontre entre M. James Baker, secrétaire d'Etat des Etats-Unis, et M. Tarek Aziz, vice-président du Conseil irakien, en 1991. Est et Ouest, les armes nucléaires ont aussi été les sujets du débat entre M. Gorbatchev et M. Reagan.
Nous ne pouvons donc qu'encourager Genève à continuer à accueillir les personnes responsables des différents lieux de ce monde où les conflits perdurent.
M. Pierre Vanek (AdG). Notre groupe n'a pas signé cette résolution. Nous pensons effectivement, comme l'a dit Mme Leuenberger avant moi, être très modestes. Cette résolution indique dans son exposé des motifs que Genève proposera directement ses bons offices pour organiser une conférence de paix entre les autorités israéliennes et palestiniennes et que ceci va contribuer à régler le conflit. Excusez-moi, Mesdames et Messieurs les auteurs de cette résolution, mais elle n'est pas très modeste ! Je pense plus modestement qu'il faut adopter une position simple, qui va par exemple dans le sens d'appuyer celle du Conseil fédéral, qui remet par exemple en cause la collaboration militaire avec l'Etat d'Israël, une position qui vise - M. Droin a évoqué cette question, qui n'est pas reprise dans la résolution - à demander l'application intégrale des Conventions de Genève.
Les Conventions de Genève, Mesdames et Messieurs, particulièrement la quatrième qui concerne le traitement des civils, sont violées de manière systématique et structurelle par les forces d'occupation israéliennes dans les territoires occupés. Je pense qu'il faut prendre position sur cette question, c'est le sens des amendements que j'ai transmis au nom de mon groupe, qui demande très modestement deux choses : de demander l'application du droit humanitaire international et en particulier des Conventions de Genève, et d'appuyer le Conseil fédéral dans sa position consistant à réexaminer les relations militaires que notre Etat entretient avec l'Etat d'Israël. Ces relations, au vu des exactions, des violences, des crimes perpétrés ces derniers temps par l'armée d'Israël, sont une honte pour notre pays et elles doivent être interrompues.
Le gouvernement suisse a indiqué qu'il allait réexaminer cette question. Nous pensons qu'il faut aller plus loin et mettre en oeuvre un moratoire immédiat dans la coopération avec les industries d'armement, l'armée israélienne, les services secrets israéliens, jusqu'à, et là aussi nous restons très modestes, l'application d'un certain nombre de résolutions de l'ONU.
J'ai souvenir que tous, dans cette enceinte, ont chanté les louanges de l'Organisation des Nations Unies. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)Nous avons voté, si je ne m'abuse, une résolution... (Brouhaha.)
Le président. Excusez-moi, Monsieur Vanek, mais le sujet est suffisamment important pour que je réclame le silence ! S'il vous plaît !
M. Pierre Vanek. Merci, Monsieur le président ! ...une résolution appelant nos concitoyens à adhérer à l'ONU. Nous proposons simplement de le rappeler dans cette résolution et de conditionner ce moratoire sur les relations militaires avec l'Etat d'Israël à l'application d'un certain nombre de résolutions votées par l'assemblée générale ou le conseil de sécurité de l'ONU. C'est effectivement un rôle bien plus modeste que de penser que l'Esprit de Genève, quelles que soient ses qualités, puisse, à travers l'invitation et la prise en charge par Genève d'une conférence internationale, résoudre ce conflit.
On appelle donc le Conseil fédéral à s'adresser "aux autorités israéliennes et palestiniennes afin - je cite l'exposé des motifs - de les inviter à venir ici pour tenter des négociations". Mais quelles autorités, Mesdames et Messieurs, quelles négociations ? L'Etat d'Israël séquestre aujourd'hui, enferme le président élu de l'Autorité palestinienne dans son quartier général à Ramallah. Il y est notamment protégé par quelques personnes qui se sont rendues spontanément en Palestine, un Suisse est avec lui. Il est complètement séquestré, traité de terroriste et d'interlocuteur illégitime. Toutes les infrastructures de l'Autorité nationale palestinienne, y compris celles qui ont été payées par l'argent provenant de nos impôts, par le biais de la coopération suisse, ont été systématiquement pilonnées, détruites et bombardées. Dans cette situation, on voudrait ne pas se prononcer, renvoyer en quelque sorte tout le monde dos à dos en disant qu'il faut mettre fin à la violence et négocier.
Je vous cite, Mesdames et Messieurs, un ancien adage du prophète Isaïe, remontant à quelque 3000 ans : "Il n'y a pas de paix sans justice." Nous devons nous prononcer pour la justice en Palestine, comme condition de la paix. Cette justice, je ne vous propose pas d'en énumérer un catalogue exhaustif. On m'a reproché à l'occasion des revendications exagérées lorsque j'évoquais des sujets relevant de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Le minimum que nous devons revendiquer dans ce bâtiment, ici, à Genève, Mesdames et Messieurs, c'est l'application des Conventions de Genève.
Je suis revenu de Palestine il y a quelques jours. Vous avez tous vu les opérations militaires à chaud, les assauts contre un certain nombre de camps de réfugiés. Je peux vous parler ici de choses que vous n'avez pas vues. Je me suis rendu dans la Bande de Gaza, qui n'était pas un lieu chaud en matière d'opérations militaires et j'ai vu le quotidien d'un régime d'apartheid mis en place illégalement par l'Etat d'Israël dans la Bande de Gaza même, une Bande de Gaza où 40% du territoire est consacré à l'existence de 6000 colons et leur prétendu besoin de sécurité. Des colonies qui ont été infligées à ce territoire en violation des Conventions de Genève et de leur article 49, que nous sommes tenus de défendre et que toutes les parties contractantes sont tenues de défendre en vertu de leur article 1er. Je fais ici référence à la quatrième Convention de Genève. J'ai réellement vu, Mesdames et Messieurs, un régime d'apartheid, le tiers-monde, une situation dramatique, où les services sanitaires, l'alimentation manquent, où 60% de la population palestinienne de Gaza est au chômage, où le seuil de pauvreté concerne 80% de la population, où les gens ne peuvent pas aller travailler. Entrer à Gaza, c'est comme entrer à Berlin-Est à l'époque. Il y a un mur, un contrôle absolu sur ce territoire, qui est une prison. J'ai rencontré des organisations de défense des droits de l'homme qui décrivent cette situation. J'ai vu des femmes et des mères de prisonniers palestiniens qui décrivent les traitements que l'on inflige à leurs enfants et leurs relations avec ceux-ci. J'ai vu des pêcheurs empêchés de pêcher. J'ai vu des exploitations...
Le président. Vous avez dépassé les 7 minutes. J'aimerais que vous concluiez, s'il vous plaît !
M. Pierre Vanek. Je finis, Monsieur le président ! ...des exploitations agricoles ravagées par l'armée israélienne et par des incursions de blindés israéliens. J'ai vu l'injustice profonde d'un régime colonial qui est la cause de la violence dans cette région. Alors, je ne vous propose pas grand chose ce soir. Il y avait une volonté de ne pas faire de grands débats politiques. J'y souscris, mais je propose une chose, l'exigence de respect des Conventions de Genève et d'un certain nombre de résolutions de l'ONU et d'appuyer ceci par un moratoire sur les relations honteuses que notre pays entretient encore avec l'armée de l'Etat d'Israël. (Applaudissements.)
Le président. Pour la clarté de nos débats, vous avez fait, Monsieur le député, un certain nombre de propositions d'amendements. Je considère que nous devons appliquer l'article 80 de la loi portant règlement du Grand Conseil... (Brouhaha.)Cela permettra à M. Vanek de réfléchir avant de revenir sur les amendements. La définition de l'article 80 me paraît très claire : "L'amendement est une proposition de modification d'un texte en délibération." A mon sens, le texte de n'importe quelle délibération, que ce soit une motion ou une résolution, touche les invites. Par conséquent, vous allez pouvoir, c'est ce qui me paraît fondamental par rapport au développement de vos arguments, amender les invites, puisque ce seraient celles-ci et uniquement celles-ci qui seraient le cas échéant adressées au Conseil fédéral. Je vous laisse réfléchir, puisqu'il y a quelques demandes. Les considérants n'ont par contre pas une importance considérable. Cela équivaut à dire, puisque l'on est dans les règles de délibération, que ce sont les invites, et non l'exposé des motifs, qui peuvent être amendées s'agissant d'une motion. Je crois, Monsieur Vanek, que l'on peut trouver un accord. C'est ce qui est finalement important par rapport à votre exposé. Je vous laisse le temps de réfléchir et je passe la parole à M. Christian Brunier.
M. Christian Brunier (S). La résolution 456 était faite pour recueillir une unanimité dans ce parlement et avait comme unique objectif, mais ô combien louable, d'offrir des bons offices pour pouvoir mener des négociations et pour que Genève soit le centre de discussion du peuple israélien et du peuple palestinien.
Je partage totalement l'analyse que Pierre Vanek vient de faire. Je crois que le parti socialiste partage largement cette analyse. Mais si l'on part sur ce terrain-là, on risque premièrement de perdre l'unanimité de ce parlement, deuxièmement de s'affronter, ou en tout cas de perdre un certain nombre de députés qui ne voudront pas voter le texte de l'Alliance de gauche. Je propose de voter ce soir la résolution 456, qui constitue un bon pas dans le bon sens et je propose à l'Alliance de gauche de déposer un nouveau projet, auquel nous nous rallierons. Mais vouloir opposer deux textes, un texte offensif, politique, présenté par l'Alliance de gauche, et un texte «mou», sans grand relief, présenté par tout le monde, ce n'est pas possible, les deux textes pouvant être complémentaires. J'invite ce parlement à voter la résolution 456 avec un minimum de débat. L'Alliance de gauche pourra ensuite présenter un projet susceptible d'être déposé en urgence demain et qui pourrait visiblement recueillir une majorité dans ce parlement. Mais il ne faut pas opposer ces deux projets et dire qu'il y a un bon et un mauvais projet. Les deux projets sont complémentaires. Nous sommes prêts à voter les deux projets, mais votons ce soir la résolution 456 !
M. Pierre Vanek (AdG). Vous avez parfaitement raison d'invoquer l'article 80, Monsieur le président, qui dispose qu'un amendement est une proposition de modification d'un texte en délibération. Nous avons un texte en délibération, qui est la résolution 456. Cette résolution, en vertu de l'article 150 de notre règlement, est une déclaration qui n'entraîne aucun effet législatif. Il n'y a aucune obligation quant à la forme d'une résolution, puisqu'il s'agit d'une déclaration. La structure traditionnelle entre considérants et invites est quelque chose dont les auteurs sont libres d'user ou de ne pas user. Ainsi, Monsieur le président, je propose trois amendements au texte en délibération. Le texte en délibération est la résolution 456 que j'ai devant moi. Ce texte comporte un titre, que je ne touche pas, des considérants et des invites. Quant à l'exposé des motifs, je suis d'accord avec vous, ce n'est pas le texte mis en délibération, mais des considérations à l'appui de celui-ci. Est-ce opportun ou non, on peut avoir des avis différents là-dessus, mais les propositions d'amendements sont en tout cas conformes au règlement, auquel je suis extrêmement attaché, comme vous le savez.
Maintenant, sur le fond, j'aimerais dire deux choses à M. Brunier ou plutôt à cette assemblée, puisque c'est à l'assemblée ou à son président que l'on s'adresse. A travers la proposition que je vous soumets ce soir, je n'ai en aucune manière voulu faire, ni mon groupe, une résolution "offensive" politiquement, selon le terme que vous avez utilisé, Monsieur Brunier, soit une résolution qui contienne des positions pointues et avancées sur cette question. J'ai des opinions assez radicales à ce sujet, et je pourrais en parler longtemps, mais ces opinions ne sont pas contenues dans cette résolution. J'ai tenu à prendre en compte un certain nombre d'idées qui sont très largement reprises par toutes sortes d'organisations de défense des droits de l'homme et sur lesquelles je pensais qu'il était possible d'arriver à un large consensus. Un consensus, ce n'est pas forcément l'unanimité, Monsieur le député. Si l'on se fixe comme règle d'obtenir des textes unanimes, on stérilise un tant soit peu la possibilité de débat dans ce Grand Conseil.
Il est patent que les forces d'occupation israéliennes violent la quatrième Convention des Genève. C'est le premier considérant. Ce constat est confirmé par le CICR lui-même. A Gaza, j'ai discuté, ainsi que mes collègues, avec le représentant de la Croix-Rouge, et Dieu sait si les intervenants sont prudents sur le terrain et à cet endroit-là. Et il l'a confirmé. Ne serait-ce qu'en raison des colonies, qui sont illégales en vertu de l'article 49, qui ne permet pas à une puissance occupante de transférer de la population dans ce territoire. Ce n'est pas une question d'opinion politique, mais une question de faits juridiques. Jusque-là, il n'y a rien d'offensif politiquement.
Ensuite, concernant le deuxième considérant, sur le fait que l'armée israélienne a commis des atteintes graves envers les dispositions de cette même convention à laquelle je me réfère toujours, relative à la protection des populations civiles, en matière d'accès aux soins médicaux, de protection des ambulances et de personnel médical. C'est quelque chose qui est reconnu par toutes les organisations de défense des droits de l'homme et par toutes les autorités qui se sont penchées sur cette question.
On aurait pu ajouter d'autres considérants. Jenine est évoquée. Je ne parle pas de massacres ou de quoi que ce soit. Sur ce point là, l'Etat d'Israël refuse l'envoi sur place d'un certain nombre de nos concitoyens ou de résidents genevois, comme Mme Mary Robinson ou M. Sommaruga, pour constater les faits. Je n'entre pas dans cette polémique. Je dis simplement qu'il y a un problème, ne serait-ce qu'en matière d'accès aux soins médicaux, de protection des ambulances, etc.
Ce que je cite dans le troisième considérant, et cela devrait vous donner la mesure, ce sont les prises de position du Conseil fédéral. Ce n'est pas une habitude chez moi. Le Conseil fédéral adopte une position bien plus avancée que celle de la résolution que vous nous proposez, que celle du CICR, du Conseil de sécurité de l'ONU, de la commission des droits de l'homme de l'ONU et de nombreuses organisations de défense des droits humains, tant palestiniennes qu'israéliennes ou internationales. Je ne suis pas en train de faire de la politique politicienne ou d'engager un débat polémique. Ce sont des considérants qui sont dans le domaine public et je me fonde sur ceux-ci pour émettre deux exigences, très modestes, du moins l'une d'entre elles, mais essentielle celle-là. On pourrait demander beaucoup plus. J'aurais pu parler de rupture des relations économiques, de boycott ou d'autres choses. Je n'en suis pas là. J'explique simplement que notre Etat, notre armée, a des relations militaires avec l'Etat d'Israël. Nous importerons cette année pour 177 millions de commandes militaires. Pensez-vous vraiment que la défense de la Suisse exige que nous importions pour 177 millions d'armement israélien en 2002 ? Il n'y a pas de débat politique à ce sujet. N'importe qui répondra non ! Bien sûr que non ! Pensez-vous que notre pays peut se compromettre à utiliser des programmes militaires, des programmes de recherche, tester des bombes à fragmentation dans le Néguev avec les militaires israéliens ? Pensez-vous qu'il n'est pas honteux, au nom même, non pas au nom de la neutralité historique de la Suisse, dont on peut penser un certain nombre de choses, mais au nom même d'un minimum de décence, y compris au nom de la respectabilité de cette armée que je ne défends pas ici ? Pensez-vous qu'il soit admissible que ces relations-là se poursuivent ? La réponse est non !
Le président. Il vous reste quelques secondes ! J'aimerais que vous puissiez conclure, s'il vous plaît !
M. Pierre Vanek. Je m'arrête là et je reprendrai la parole plus tard, le cas échéant. Mais c'était simplement pour démentir l'idée que j'étais venu ici pour polémiquer. Je suis venu avec une proposition de résolution, très modeste, qui répond à l'urgence de l'heure et qui va beaucoup moins loin que le projet d'organiser une grande conférence internationale à Genève. Je vous invite résolument à voter ce soir ces amendements qui constituent une alternative à ce qui nous a été proposé par la résolution 456.
M. Renaud Gautier (L). Nous voilà devant une intéressante question et j'imagine qu'il y a deux manières d'aborder le problème. Cette assemblée pourrait, pour une fois, faire preuve de modestie et accepter somme toute que nous ne pouvons ni ne voulons régler l'état du monde, mais que nous pouvons probablement, parce que c'est une tradition genevoise, proposer quelque part nos bons offices. Les bons offices tels que définis dans l'invite au Conseil fédéral ne supposent a priori pas de jugement de quelque ordre que ce soit. Je laisse chacun dans ce parlement se faire sa propre opinion quant au fait de savoir si celui-ci est plus coupable que l'autre. Cela relève somme toute d'un jugement personnel, qui est, par définition, respectable. Mais il m'apparaît que nous allons probablement sombrer dans la tentation de transformer une invite, qui n'est jamais autre chose qu'une proposition d'essayer de faire s'asseoir à une même table deux groupes de personnes qui n'arrivent actuellement pas à se parler, tout en ne présupposant ni de ce qu'il va en découler, ni si c'est bien ou si c'est mal, de transformer une proposition de bons offices en une proposition qui, telle qu'elle apparaît dans les amendements, vous m'excuserez, Monsieur Vanek, est quand même pleine de jugements de valeur. Or, je ne vois pas comment nous pouvons proposer aujourd'hui d'ouvrir ce dialogue, ou du moins de favoriser celui-ci, si nous déterminons a priori que celui-ci a tort plutôt que celui-là.
Je vous invite donc très fermement, Mesdames et Messieurs, parce que c'est effectivement notre rôle et qu'il est historiquement marqué dans l'histoire de Genève, à accepter la proposition de résolution 456 telle qu'elle vous est proposée dans sa version originale, sans entrer pour autant dans les amendements présentés. Je rejoins en cela la proposition qui a été faite tout à l'heure par notre collègue Brunier. Ces amendements pourraient être, si M. Vanek ou l'Alliance de gauche le désire, l'objet d'une nouvelle résolution. Mais je vous en conjure, sachons séparer ces deux problèmes et sachons garder l'humilité de proposer aux uns et aux autres de s'asseoir à une même table !
M. Antonio Hodgers (Ve). Très brièvement pour dire que notre parlement a deux options face à cette problématique. La première est celle de la résolution signée presque unanimement par ce parlement et qui consiste, comme vient de le rappeler M. Gautier, à proposer des bons offices. La première conséquence de cette démarche est que l'on ne peut plus dire ce que l'on pense de la situation. Dans ce sens-là, nous sommes cohérents. La deuxième option est celle proposée par l'Alliance de gauche. Elle consiste à renoncer à ces bons offices, à cette démarche politique visant à inviter les parties à s'asseoir autour d'une même table, et à dénoncer la situation. Nous avons choisi la première option. Je tiens à le dire, parce que M. Vanek est passé maître dans ce genre de calomnie post parlementaire. Nous avons donc choisi la première option. Ce n'est pas parce que nous ressentons moins que vous, Monsieur Vanek, le drame du peuple palestinien, ce n'est pas parce que nous manifestons moins que vous dans la rue - vous avez l'occasion de croiser aujourd'hui le citoyen Brunier ou le citoyen Hodgers à l'occasion des nombreuses manifestations qui ont lieu dans la République - que nous avons choisi cette option. Nous le faisons parce que nous estimons qu'il est peut-être plus opportun d'offrir aujourd'hui, vu la situation dramatique, une place de dialogue, que nous espérons constructif, même si l'on n'est pas utopiste, que de faire part de ce que l'on a dans nos tripes, même si tout ce que vous avez dit est parfaitement vrai. C'est pour cela que je demande à ce parlement d'en rester à la première option, étant entendu que les deux options sont contradictoires et non complémentaires comme l'a dit M. Brunier. Soit on propose des bons offices et on s'abstient malheureusement de dire ce que l'on ressent, soit on dénonce et on renonce aux bons offices.
M. Albert Rodrik (S). Je vais aussi essayer de m'exprimer, tout en pesant mes mots, parce que j'ai pu constater dans cette affaire-là, quelle que soit l'énormité des ravages et des pertes de vies humaines, que les mots commencent à faire beaucoup plus de ravages, depuis quelques semaines, parmi ceux qui ne sont pas en train de subir cette violence.
Je plaide et je me suis levé exprès pour parler à mon ami Vanek. Ailleurs, nous militons ensemble pour les droits du peuple palestinien - je n'ai pas commencé hier - et je me sens, pour plusieurs raisons et comme d'autres dans cette salle, mis en cause dans ma propre dignité d'origine face à ce qui peut se passer à certains moments. J'hésite continuellement entre le besoin de hurler et le besoin de mesurer mes mots, parce que les mots, comme je l'ai dit, sont en train de causer, ici, encore plus de ravages que les armes, ailleurs.
Alors, qu'est-ce que nous pouvons faire dans ce parlement qui ne soit pas dérisoire, même si je peux souscrire à l'essentiel de ce que M. Vanek a dit ? Il nous faut être tous les cent ensemble, pour dire et hurler que l'on a privé un peuple d'assumer son destin national depuis 50 ans. Si la moitié du parlement genevois n'entend pas s'exprimer d'une seule voix pour dire que cela doit cesser et que l'on doit trouver entre êtres humains civilisés, un avenir commun, je vais alors taire mon cri et faire en sorte que les cent députés du parlement genevois disent tout de même quelque chose, que j'ai trouvé à l'origine un peu «ni chair, ni poisson», un peu comme certaines résolutions de l'ONU, mais j'ai pu finalement surmonter ce sentiment. La seule chose qui ne soit pas dérisoire et que l'on puisse faire, ici, à Genève, où l'on est tranquille, pépère et au chaud, c'est d'être tous les cent ensemble pour dire que cela suffit et que l'on ne peut pas régler le sort d'un certain nombre de gens sur une terre qui est la leur, autrement qu'en leur demandant d'arrêter maintenant. De ce fait, je souhaite en premier lieu que tous les cent, ensemble, nous votions cette résolution «wishy-washy», comme on dit en anglais. J'en suis bien conscient, mais c'est la seule chose sur laquelle nous serons tous d'accord. Si l'on doit faire entendre ce cri du coeur, peut-être avec quelques nuances, quelques bémols et quelques bécarres, mon cri à moi, avec celui de nombreux citoyens israéliens qui sont aujourd'hui dans les check-points, dans les prisons, en train de militer bien plus que nous pour la paix là-bas, je demande que l'on puisse faire la seule chose qui ne serait pas dérisoire, c'est-à-dire que l'on s'exprime tous les cent ensemble pour que cela ait une portée.
Après, si l'on veut exhaler plus, et j'ai bien envie d'en exhaler plus moi aussi, qui me sens touché au plus profond de mon être, nous le ferons, mais nous le ferons ailleurs et, si cela se trouve, avec une majorité plus réduite pour essayer de faire passer ce cri. Mais pitié ! Je le dis encore une fois ce soir, pour la quatrième fois, faisons la seule chose qui peut ne pas être un ricanement supplémentaire, c'est que l'on soit tous les cent ensemble ! (Applaudissements.)
M. Pierre Schifferli (UDC). Deux de nos députés ont signé cette proposition de résolution, une démarche pour la paix, vers la paix, parce que le texte se réfère aussi à notre tradition de bons offices et une invite prévoit de tenir des négociations sur un territoire neutre. Nous sommes aussi frappés par cette lutte entre deux nations qui semble ne pas devoir trouver de fin satisfaisante. Nous aurions souhaité pouvoir nous contenter de voter cette résolution-là. Nous la voterons bien entendu, mais je vous invite quand même à en observer la date : 22 février 2002. Nous pouvons souscrire sans autre à tout ce que M. Hodgers et M. Rodrik nous ont dit. Cependant, depuis le 22 février, une armée pour laquelle nous pouvions éprouver une certaine admiration, l'armée d'Israël, s'est lancée dans une guerre contre une population civile, une guerre dans laquelle elle perd son honneur et sa dignité. Je le dis en tant qu'officier de l'armée suisse. J'ai eu des contacts et je connais des officiers israéliens.
Je propose donc que nous votions d'abord cette résolution pour une démarche vers la paix, avec une invite concernant la tenue de négociations à Genève. Mais rien ne nous empêche effectivement d'examiner par la suite le problème soulevé par M. Vanek, qui est celui de la violation par un Etat de certaines conventions internationales. Nous souhaiterions donc que soit d'abord votée de façon unanime cette proposition de résolution afin que nous puissions par la suite nous entendre sur un texte qui fera référence à un certain nombre de violations de conventions internationales, dont la Suisse a la garde puisqu'il s'agit des Conventions de Genève. Mais il faut distinguer cette première démarche, la plus urgente, celle pour la paix, de la deuxième démarche, qui doit si possible aussi faire l'objet d'une discussion et d'un consensus, précisément pour gagner en force.
M. Pierre Vanek (AdG). J'ai entendu des choses qui ne sont pas exactes. Tout d'abord, M. Hodgers a parlé de manifestations, de s'exprimer avec ses tripes... Pour ma part, je parlerai plutôt du coeur que des tripes... Je vous assure, Monsieur Hodgers, que si j'avais voulu écrire une résolution où je laissais pleinement parler mon coeur et ma raison sur cette question, j'en aurais alors mis beaucoup plus et j'aurais rédigé une résolution bien plus politique et bien plus dure envers l'Etat d'Israël.
Ensuite, vous avez parlé, Monsieur Rodrik, en évoquant le texte que je vous propose sous forme d'amendements à la résolution 456, d'exhaler un certain nombre de sentiments. Je vous assure qu'il ne s'est pas agi d'exhaler quoi que ce soit, bien au contraire, mais de garder la tête froide et de me dire qu'il y a une chose que l'on peut demander dans ce parlement, lieu symbolique des Conventions de Genève - je reprends les éléments que vous mettez dans cette résolution. Une chose que l'on devrait pouvoir demander sur tous les bancs, à savoir le respect des Conventions de Genève, qui sont effectivement, ce fait-là n'a pas été contesté jusqu'ici ce soir et personne ne peut le contester, violées par l'armée et l'Etat d'Israël. Je me suis retenu et j'ai abordé ce point-là seulement. Il ne s'agit donc pas d'exhaler, de tripes, d'offensive politique comme disait Christian Brunier tout à l'heure ou de quoi que ce soit, mais bien d'un texte raisonné et réfléchi.
Je ne crois pas qu'il y ait de miracle, Monsieur Rodrik. Vous parlez de l'importance magique du nombre 100 et de la nécessité que nous votions tous. Mais nous ne sommes même pas 100 dans cette salle ce soir pour participer à ce débat. Je ne crois pas aux vertus magiques de ce chiffre. Il faut cependant que nous votions à une large majorité un texte qui se borne à ces exigences élémentaires.
J'étais en Palestine voici quelques jours, comme je vous l'ai dis. J'ai systématiquement répété à mes interlocuteurs - et ils ne semblaient pas prendre cela comme un engagement particulièrement révolutionnaire ou magnifique - que j'interviendrai et me battrai une fois de retour dans notre pays pour faire respecter les Conventions de Genève, pour faire entendre la nécessité de leur respect par les Etats et par le mien en premier. Cette question, Mesdames et Messieurs, n'est pas une question théorique. Ce sont des ambulances bloquées à des check-points - je ne parle pas de politique, ni de solution à long terme ou définitive à ce problème - ce sont des conditions de vie et d'existence concrètes pour des hommes et des femmes vivant en Palestine. C'est de cela que je parle dans ma résolution. C'est sur ce point-là que sont intervenues plusieurs organisations de défense des droits de l'homme et organisations internationales. C'est ce point-là qui est en jeu dans l'urgence actuelle.
Maintenant, soyons sérieux, Mesdames et Messieurs ! Vous voulez remplacer ceci, qui constitue une exigence très modeste. Je suis d'accord avec vous, Monsieur Rodrik - cela ne pèsera certainement pas très lourd dans la situation actuelle, mais cela pèsera ce que cela pèsera, à savoir le poids d'une résolution du parlement genevois. Mais pensez-vous sérieusement que soit suffisante une invite demandant simplement au Conseil fédéral de proposer ses services dans l'esprit de Genève pour l'accueil dans ce canton d'une négociation de paix entre Israël et la Palestine ? Un texte limité à cela ? Vous avez dit "wishi, washi" ? Je ne peux pas me borner à voter un texte comme celui-là. Je n'ai rien contre le fait que des conférences internationales se réunissent ici. Mais s'il n'y a pas de négociations de paix aujourd'hui sur la question de la Palestine, ce n'est pas lié à l'absence d'un lieu magique comme Genève pour accueillir ces négociations. C'est lié à des choses bien plus élémentaires. Il ne faut pas, aujourd'hui, renvoyer simplement les uns et les autres dos-à-dos. C'est ce que l'on fait un peu dans cette résolution et vous l'avez reconnu en précisant que l'on ne condamnait personne et que les uns et les autres devaient discuter. Ce n'est tout simplement pas satisfaisant. Il y a dans un des considérants de la résolution 456 l'idée que les peuples de la région ne semblent pas pouvoir s'en sortir seuls, sans l'aide, non pas du parlement genevois ou de l'esprit de Genève, mais de la communauté des nations. Or, la communauté des nations, Mesdames et Messieurs, s'est exprimée et a incarné sa volonté dans un certain nombre de textes, textes que j'évoque dans mes propositions, de résolutions de l'ONU, que nous sommes si fiers d'accueillir dans notre ville et à laquelle nous nous référons régulièrement par rapport à la Genève internationale - je vous renvoie à nos débats sur cette question - des Conventions de Genève, qui ont une portée encore plus large que les résolutions de l'ONU. Nous étions une partie contractante des Conventions de Genève bien avant de devenir membre de l'ONU.
Ces choses-là, Mesdames et Messieurs, ce n'est pas un cri du coeur, ce n'est pas une réflexion politicienne, ce n'est pas avec mes tripes que je parle ou que j'exhale quoi que ce soit. Ce sont des choses élémentaires du point de vue de l'opinion publique internationale, de l'opinion publique genevoise, que nous devons être capables d'exprimer et, effectivement, de l'exprimer ensemble.
Je n'ai rien contre cette résolution, Mesdames et Messieurs, mais je ne peux pas la voter, parce que c'est une honte d'en rester à des considérations aussi générales et d'ailleurs aussi prétentieuses, qui consistent à inviter le Conseil fédéral à faire cela. Et ensuite... Quel conseiller d'Etat va s'en occuper ?
Le président. Monsieur Vanek, le sujet est certes important, mais vous avez déjà dépassé de deux minutes votre temps de parole. Je reconnais que c'est important, mais j'aimerais que vous concluiez, s'il vous plaît !
M. Pierre Vanek. Excusez-moi ! Je finis en trente secondes ! L'exposé des motifs précise donc que c'est le canton de Genève qui assumera la paternité de cette initiative glorieuse et qui proposera directement ses bons offices. Mesdames et Messieurs du Conseil d'Etat, lequel d'entre-vous partira en Palestine rencontrer Yasser Arafat et le gouvernement israélien et proposer ses bons offices pour cette négociation... (Protestations.)Mais c'est cela qu'on nous propose ! (Brouhaha.)Je conclus, Mesdames et Messieurs ! Cette résolution n'est pas à la hauteur de la situation, elle ne dit rien ou presque rien. Elle n'a même pas une exigence de cessez-le-feu ou de paix immédiate, un cri concernant la paix qu'évoquait Albert Rodrik et auquel j'aurais pu m'associer...
Le président. Monsieur Vanek, s'il vous plaît !
M. Pierre Vanek. Cette résolution parle de négociations que nous ne sommes pas en mesure d'organiser et sert de prétexte pour refuser des exigences élémentaires au regard du respect du droit humanitaire international. Je vous invite donc, Mesdames et Messieurs, à voter mes amendements.
M. Jean Spielmann (AdG). La proposition qui nous est faite part effectivement d'un bon sentiment. C'est un postulat légitime, que je trouve juste, en faveur de peuples ou d'Etats, de pays, de civilisations ou d'associations en conflit et susceptibles de se déplacer afin de participer à une telle conférence. Le problème que me pose cependant cette résolution qui invite les parties à venir discuter, on le sait, et vous le savez tous, c'est qu'une partie a le droit et la possibilité de se déplacer, alors que l'autre, l'Autorité palestinienne, ses responsables et ses élus, sont confinés, arrêtés, torturés, déportés et ne peuvent pas s'exprimer. Comment voulez-vous hypocritement inviter aujourd'hui les gens à venir discuter ici, alors que le droit élémentaire de se déplacer et de parler n'est même pas réservé à tous ?
Je veux simplement illustrer cela par deux arguments supplémentaires. Le premier, l'Autorité palestinienne a condamné fermement et à plusieurs reprises les attentats, parce qu'il est clair que l'on ne peut pas supporter d'un côté les débordements et la création, par exemple, de 14 colonies depuis le début de l'année et ne rien dire de l'autre. Mais alors, Mesdames et Messieurs les députés, comment expliquez-vous que le personnage qui revendique chacun des attentats et chacune des bombes humaines posées en Israël et qui provoquent la mort de civils puisse, lui, se déplacer librement dans la Bande de Gaza sans être inquiété, en disposant de tous les outils possibles et imaginables, en pouvant parler à la presse, alors que les responsables de l'Autorité palestinienne, qui sont les interlocuteurs choisis par le peuple palestinien, n'ont pas le droit de se déplacer, ne peuvent pas s'exprimer, sont déportés et assassinés à tour de rôle. Partant de là, peut-on réellement demander aux deux parties de se déplacer et de venir discuter ici, sans que nous exigions préalablement le respect des Conventions de Genève, qui constituent l'une des responsabilité de Genève ? Je rappelle simplement que les Conventions de Genève ont plusieurs titres et que Genève et la Suisse sont responsables de leur application. Cela veut dire la liberté de circulation des personnes, la liberté d'aller voir les gens dans les prisons et de leur donner l'occasion de s'exprimer. S'ils ne peuvent pas le faire, comment voulez-vous hypocritement les inviter à une conférence sur la paix ? Cela ne suffit pas. Ce droit doit être respecté et les gens doivent pouvoir se déplacer. Sans quoi, votre résolution, c'est de l'hypocrisie !
M. Renaud Gautier (L). Je vais tâcher d'être bref. Comme je l'ai dit tout à l'heure, chacun d'entre nous dans ce parlement, y compris M. Vanek, a le droit de penser ce qu'il veut de cette situation-là et aucun jugement n'est moins bon ou moins valide que celui d'un autre.
Je voudrais simplement vous ramener au texte de cette résolution. Il n'y a pas lieu à mon sens, et je le répète, de transformer ce débat en un procès, mais plutôt de proposer avec humilité - J'ai envie de répondre en citant Pascal : Nous n'avons somme toute rien à perdre à essayer de proposer cela. - de simplement ouvrir un lieu de dialogue. Voilà le sens de cette motion et il m'apparaîtrait que tout changement ou toute modification de cette résolution d'une part ne correspondrait pas à la volonté de la majorité de ce Conseil et d'autre part perdrait évidemment la plus grande partie de ce que nous souhaitons.
M. Christian Grobet (AdG). J'aimerais proposer le renvoi de cette résolution en commission. M. Schifferli a dit une chose tout à fait juste tout à l'heure, à savoir que cette résolution avait été déposée le 22 février 2002, c'est-à-dire il y a maintenant plus de deux mois, et que beaucoup de choses se sont passées depuis lors. Aujourd'hui, la situation n'est pas celle qui prédominait au moment où cette résolution a été déposée. Deuxièmement, j'ai beaucoup apprécié les propos de M. Gautier, à savoir que nous devrions faire preuve d'humilité dans le cadre de ce débat consacré à cette proposition de résolution. Vous me permettrez, cher collègue, de considérer que l'invite, qui constitue finalement le seul élément essentiel de la résolution, ne fait pas preuve de beaucoup d'humilité, mais plutôt d'une grande prétention. Personnellement, je n'aime pas beaucoup invoquer l'Esprit de Genève. Je ne sais à vrai dire pas ce que signifie «l'Esprit de Genève». Certes, un certain nombre de personnalités de notre République ont été ou sont éprises de paix. On peut peut-être invoquer «l'Esprit de Genève» dans les considérants d'une résolution, mais cela me parait extraordinairement prétentieux de le faire dans une invite.
Troisièmement, je trouve aussi extrêmement prétentieux de vouloir inviter le Conseil fédéral à organiser ici une négociation de paix entre Israël et la Palestine. Je ne veux pas faire l'injure de dire que l'on se donne bonne conscience ou que les auteurs de cette résolution se donnent bonne conscience. Mais est-ce que l'un ou l'une des députés de cette salle pense que le Conseil fédéral n'a pas déjà envisagé cette hypothèse ? Est-ce à nous d'aller signaler au Conseil fédéral qu'il n'a pas pensé à convoquer une conférence de la paix à Genève ? Bien entendu qu'il y a pensé, ce n'est même pas la peine de poser la question. Mais il ne l'a pas proposé. Pourquoi le Conseil fédéral ne l'a-t-il pas proposé ? Je pense que l'on connaît tous la réponse ! Dès lors, voter des résolutions comme celles-ci, qui enfoncent des portes ouvertes, qui sont en fait fermées, pour se donner bonne conscience... M. Vanek a raison de dire que ce n'est pas la meilleure démarche à envisager. Maintenant, il est aussi vrai que l'on ne peut pas adapter des résolutions en pleine séance.
Je remercie celles et ceux qui ont déposé cette résolution, parce que je pense qu'il y a effectivement quelque chose à faire. Il avait été initialement envisagé que ce débat se déroule sans interventions. Nous avions déjà eu l'occasion de rappeler que nous n'étions pas intervenus, peut-être à tort du reste, pour dire le bien que l'on pouvait penser de M. Koffi Annan. Nous ne sommes pas favorables à adopter des textes dans de fausses unanimités, sans que l'on en discute. Mais il ne faut pas non plus en discuter toute la soirée. C'est la raison pour laquelle, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je propose de renvoyer cette résolution devant la commission érigée pour traiter ce genre de texte. Je suis du reste étonné de ne pas avoir entendu l'un ou l'autre des députés qui considéraient lors de la dernière législature, ils n'avaient d'ailleurs pas forcément tort, qu'il était souhaitable, avant de voter des résolutions de ce type, qu'elles passent obligatoirement devant la commission des droits de l'homme. Je propose que cette résolution soit renvoyée devant cette commission.
Le président. Monsieur Koechlin, je crois qu'on a longuement débattu, j'aimerais que vous vous prononciez sur le renvoi en commission, en tout cas à la fin de votre intervention.
M. René Koechlin (L). Je vais à l'encontre de votre souhait, Monsieur le président, même au-delà ! Je propose une motion d'ordre, afin que nous procédions d'abord au vote sur le renvoi en commission. S'il est accepté, nous n'en parlons plus. S'il est refusé, que l'on procède immédiatement au vote de cette résolution. J'invite l'Alliance de gauche, qui a émis des propositions tout à l'heure, à déposer pour demain une résolution allant dans ce sens. Nous la soumettrons au Grand Conseil demain.
Je vous propose donc que nous procédions maintenant au vote sur le renvoi en commission et, s'il est refusé, sur la résolution. Je vous demande de mettre aux voix cette proposition. Selon l'article 79, lettre a de notre règlement, nous devons nous prononcer sur ce type de proposition.
Le président. A condition, Monsieur le député, que les deux tiers du parlement l'acceptent ! Il y a en tout cas une réalité par rapport aux deux textes qui vous sont soumis, Mesdames et Messieurs - j'ai eu, pendant une heure, le temps de les lire de fond en comble - c'est qu'une résolution s'oppose à l'autre. (Le président est interpellé.)Non, Monsieur Vanek, je suis navré. Vous avez déjà pris trois fois la parole ! Non, non, je suis navré. J'applique le règlement, Monsieur Vanek ! Vous avez pris trois fois la parole...
Il y a donc deux propositions. Soit l'on accepte le renvoi en commission, soit on continue le débat. En fonction... (Le président est interpellé.)Mais je ferai voter votre motion d'ordre, Monsieur Koechlin, pour autant que les deux tiers du parlement acceptent que l'on procède immédiatement au vote ! Le premier vote concerne donc le renvoi en commission. Vous allez voter par électronique... (Protestations.)Si le renvoi en commission est accepté, on ne se prononcera pas sur la résolution, je vous en prie. C'est le renvoi en commission qui prime.
Mise aux voix, la proposition de renvoi en commission est rejetée.
(Résultat du vote électronique: 71 non, 15 oui et 0 abstention.)
Le président. Je fais voter la deuxième proposition, c'est-à-dire le vote avec effet immédiat sur, je présume, la résolution proposée. Je vous rappelle qu'il faut réunir les deux tiers des voix pour obtenir la possibilité de voter la résolution.
Mise aux voix, la motion d'ordre est adoptée.
(Résultat du vote électronique: 68 oui, 12 non et 7 abstentions.)
Le président. Les deux tiers étant obtenus, je vous fais voter sur la résolution telle qu'elle est, sans amendement. La motion d'ordre était très claire, c'est tel que la motion était présentée... (Protestations.)Faites un recours au Tribunal fédéral, j'ai l'habitude !
Mise aux voix, la résolution 456 est adoptée. Elle est renvoyée au Conseil fédéral.
Le président. Si vous voulez, Monsieur Vanek, présenter votre propre résolution, c'est très volontiers !
M. Christian Grobet (AdG). M. Vanek avait l'intention de retirer ses amendements pour présenter une autre résolution, mais c'est un autre problème.
J'ai beaucoup de respect pour vous, Monsieur Annen. Vous présidez bien les débats, mais vous ne pouvez pas, comme vous l'avez fait tout à l'heure, éluder le vote d'amendements qui ont été déposés. Vous avez le droit de procéder au vote immédiatement. Vous avez commis tout à l'heure, je me dois de vous le dire, comme doyen dans cette enceinte, une violation grossière, particulièrement grave, de notre règlement. Rassurez-vous, nous ne recourrons pas au Tribunal fédéral, mais je tiens à ce que ce soit noté au Mémorial du Grand Conseil ! Vous avez interprété et violé le règlement du Grand Conseil et je vous prie, ce week-end, pendant votre temps libre, de bien vouloir relire votre règlement !
Le président. Vous avez encore la parole, Monsieur Vanek ! (Protestations.)
M. Pierre Vanek (AdG). Monsieur Halpérin, le débat sur la résolution 456 est clos. J'ai pris la parole trois fois dans ce débat-là. Nous sommes à présent ailleurs... (Protestations.)Je reprends la parole sur une question ayant trait au déroulement des débats... Je serai très bref, Monsieur le président !
Le président. S'il vous plaît !
M. Pierre Vanek. ...et sur l'information que je dois à cette assemblée. J'avais l'intention - ce que je n'ai pas pu faire - d'intervenir tout à l'heure, pensant que je pourrais effectivement intervenir sur le renvoi en commission ou, ensuite, sur les amendements qui n'ont pas été soumis au vote. J'avais donc l'intention d'intervenir pour dire que je retirais les amendements en question, c'est-à-dire les amendements à la résolution 456. Cette résolution.. . (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs, un peu de silence ! Ceux qui pensent que le sujet n'est pas suffisamment important peuvent aller boire un verre... (Brouhaha. Protestations.)Monsieur Vanek, vous avez la parole !
M. Pierre Vanek. Je vous remercie, Monsieur le président ! Je vais être bref, puisqu'il y a des gens qui ont de la peine à écouter lorsqu'ils entendent quelqu'un qui n'est pas de leur avis.
J'allais donc dire ceci. Pour ne pas froisser ceux qui pensent que la résolution 456 est utile et merveilleuse, j'allais proposer de retirer mes amendements et annoncer que je m'abstenais sur cette résolution, pour les raisons énoncées. J'allais aussi annoncer que je dépose, comme résolution à part entière, le texte que vous avez sous forme de proposition d'amendements à la résolution 456, conformément à ce qu'un certain nombre de mes collègues m'ont demandé de faire, texte que le service du Grand Conseil numérotera comme il l'entend. Je le dépose comme résolution à part entière pour qu'elle ne soit pas mise en opposition avec ce que nous allons voter ce soir. Je demanderai à la prochaine occasion l'urgence sur ce texte-là pour demain, parce que nous nous trouvons dans une situation où les jours et les heures comptent. On ne peut pas se permettre de reporter de semaine en semaine et de mois en mois une prise de position sur ces questions. Voilà l'annonce que je voulais faire, Monsieur le président. Je vous remercie de m'avoir donné la parole.
Le président. Ce sera pour le 2 mai, Monsieur Vanek. Je pense que vous pourrez attendre une semaine. Ce ne sera pas possible demain, vous le savez bien !
Premier débat
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Tout d'abord, pour définir le cadre de nos débats, nous allons prendre, si une majorité se rallie aux propositions d'amendements que j'ai formulées il y a de cela au moins six mois, nous allons donc adopter une disposition qui ne prendra effet que dans 50 ans, puisque la concession de l'aéroport se renouvelle toutes les cinquante années. Il nous paraissait important de le faire dans la mesure où, le statut de l'aéroport ayant changé, notre parlement n'a quasiment plus rien à dire sur le devenir de cet aéroport et qu'un certain nombre de choses importantes, notamment au niveau des conditions climatiques de la planète, vont arriver. Nous trouvons pour le moins déplorable que l'opinion d'un parlement démocratiquement élu soit passée sous silence, alors que le conseil d'administration de l'aéroport, aussi bien pensant soit-il, a le pouvoir de dire et de faire ce qu'il entend sans être le porte-parole de qui que ce soit, si ce n'est d'être les dignes représentants de fractions de notre population. C'est la situation dans laquelle nous nous sommes trouvés il y a de cela une année, puisque le renouvellement de la concession de l'aéroport n'a pas donné lieu à une prise de position de notre parlement. Le Conseil d'Etat a tout juste été consulté sur cet objet, mais il appartenait au conseil d'administration de l'aéroport de demander le renouvellement de la concession et de procéder lui-même à l'ensemble des études, notamment de l'impact écologique de cet aéroport, ce qui nous paraît relativement partial.
Sur le fond de cette affaire, nous estimons qu'un certain nombre de voisins, on ne se trouve certes pas, avec l'aéroport de Genève-Cointrin, dans la situation de Kloten, mais toujours est-il qu'un certain nombre de nos voisins français ont émis des critiques quant à l'impact de l'aéroport. Nous estimons qu'il s'avère nécessaire, pour la collectivité genevoise, de développer cet instrument économique tout en essayant d'en contrôler son développement. Or, ce qui nous interpelle, Mesdames et Messieurs, c'est par exemple la volonté de l'Aéroport international de Genève de prévoir une augmentation de trafic de 100% en terme de passagers et de 40% en terme de mouvements d'avions d'ici 2020. Si l'on tient compte de l'évolution technique des appareils, on enregistre évidemment une baisse du bruit des moteurs ou de la consommation de kérosène. Mais l'impact du bruit en continu se fait déjà sentir aujourd'hui et l'on ne peut pas imaginer pour l'instant doubler le nombre de passagers et augmenter de 40% les vols d'avions dans notre région sans en limiter les conséquences. Voilà, Monsieur le président, pour une première intervention.
M. Alain Charbonnier (S). Au moment du vote de ce projet de loi en commission de l'économie, la concession était déjà octroyée. C'est la raison principale pour laquelle les commissaires socialistes se sont abstenus. Toutefois, il est vrai que nous nous devons de penser à l'avenir, même si 50 ans peuvent paraître lointains. Comme l'a relevé, lors de son audition, la nouvelle association constituée d'une quarantaine de communes suisses et françaises riveraines de l'aéroport, l'étude d'impact accompagnant la demande de nouvelle concession ne porte que sur 20 ans, alors que la concession porte, elle, sur 50 ans, et s'arrête de plus à la frontière suisse. Cette étude d'impact arrive à la conclusion que les nuisances n'augmenteront pas et qu'aucune mesure particulière ne sera à prendre afin de protéger la population, malgré l'augmentation considérable du trafic - 100 à 150% prévus à l'aéroport international de Genève pour les 20 ans à venir. Cela a de quoi laisser songeur n'importe quel être humain pourvu de ses deux oreilles et normalement constitué. S'il faut effectivement reconnaître les progrès de l'aéronautique et l'importante diminution des émissions de décibels des avions modernes, l'augmentation dramatique des fréquences de décollages et d'atterrissages se doublera d'une montée en puissance des nuisances pour les riverains de l'aéroport, mais aussi pour ceux qui se trouvent sous la trajectoire des appareils.
Si nous ne remettons pas en cause et reconnaissons pleinement l'importance de l'AIG pour l'économie genevoise et pour les relations internationales de notre Cité, la qualité de vie et la santé des citoyens ne peuvent être négligées de la sorte. C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste se ralliera au rapport de minorité.
M. Christian Bavarel (Ve). Les Verts soutiennent pleinement le rapport de minorité, ainsi que l'amendement présenté par M. Pagani. D'autant plus que si l'aéroport devait changer de forme juridique, la question de la concession pourrait se reposer plus rapidement que prévu.
Pour les Verts, il est fondamental que le renouvellement de la concession passe par la concertation et par l'approbation du Grand Conseil. En effet, le développement des activités liées à l'aéroport ne doit pas échapper au contrôle démocratique. 28 000 personnes environ sont directement lésées par les nuisances liées au trafic aérien. Nous craignons une augmentation phénoménale de ce trafic. L'impact routier lié à l'aéroport est catastrophique. Par ailleurs, nous nous opposons à toute dérogation en faveur du trafic aérien entre 22 h et 06 h 30, sauf pour les transports sanitaires. Les surtaxes liées au bruit doivent être fixées par l'office fédéral de l'environnement et non pas par l'aéroport lui-même.
Pour toutes ces raisons, nous pensons qu'il est indispensable que le parlement puisse se prononcer et que l'on ne confie pas l'avenir de l'aéroport aux seuls gestionnaires, dont l'unique ambition est de rentabiliser une infrastructure en la développant à outrance.
M. Jacques Jeannerat (R). Inutile, c'est le seul qualificatif que mérite ce projet de loi, parce que, dans l'ordre juridique de notre pays, le renouvellement ou la modification de la concession d'un aéroport relève clairement et exclusivement de la compétence de la Confédération. Le droit cantonal ne peut pas se superposer au droit fédéral. Il est important de rappeler que ce type de concession est un acte très court, qui donne simplement le droit d'exploiter un aéroport pour une durée de 50 ans. Par contre, toutes règles de fonctionnement, telles que procédures de vol, heures d'ouverture, mesures environnementales, figurent dans un règlement d'exploitation. Le projet de loi sur lequel nous devons nous prononcer ce soir ne concerne que la concession et pas du tout le règlement d'exploitation. La question des formes et de l'étendue du contrôle politique de notre aéroport n'a donc rien à voir avec ce projet de loi. Il devra se discuter dans le cadre de l'examen des projets de lois 8201 et 8298 relatifs à la loi sur l'aéroport international de Genève.
S'agissant de votre amendement, Monsieur Pagani, le simple fait de le déposer illustre parfaitement l'incohérence qu'apporte ce projet de loi.
Le groupe radical rejettera ce projet de loi et invite le Grand Conseil à en faire de même. L'Alliance de gauche pourra toujours le redéposer dans le courant de l'année 2050, puisque l'actuelle concession court jusqu'au 31 mai 2051 !
Enfin, je constate que ce projet de loi de l'Alliance de gauche s'inscrit une fois de plus dans l'objectif de perturber la bonne marche de notre aéroport, alors que sa direction se bat dans le même temps depuis plusieurs mois pour fournir un service de haute qualité aux citoyens genevois, à l'économie de ce canton et à la Genève internationale.
M. Claude Blanc (PDC), rapporteur de majorité. Je n'ai pas voulu utiliser tout de suite mon temps de parole pour écouter un petit peu ce que les gens allaient dire. J'ai bien entendu M. Pagani et je voudrais lui répéter - cela a d'ailleurs déjà été excellemment précisé par M. Jeannerat - que nous sommes ici exclusivement dans le droit fédéral et que nous n'avons pas à légiférer sur la question du renouvellement de la concession. L'office fédéral de l'aviation civile a lancé une consultation en temps utile en vue du renouvellement de la concession de l'aéroport de Genève. Il y avait un délai pour répondre, qui était, sauf erreur, de six mois. Un certain nombre de personnes ont fait valoir des observations, qui ont été traitées directement par l'organe fédéral, conformément à la législation fédérale. Vous n'avez pas le droit de vous interposer aujourd'hui dans un processus dépendant uniquement de l'organisation fédérale, puisque l'aviation civile dépend uniquement, dans notre pays, de la législation fédérale. Par conséquent, vous pouvez gesticuler tant que vous voulez, vous pouvez même voter une loi, mais celle-ci restera sans effet, parce que l'administration fédérale la considérera comme telle, car contraire au droit supérieur. Voilà ce qu'il faut dire. Tout le reste n'est que gesticulation.
M. Jean Rémy Roulet (L). Mes deux préopinants m'ont ôté le pain de la bouche, parce que vous trouvez l'argument massue contre cette loi très explicitement mentionné en page 21 de l'excellent rapport de M. Blanc. A cette page 21 s'exprime le directeur de l'office fédéral de l'aviation civile, M. André Auer, au cours d'une audition devant la commission de l'économie : «Il rappelle que le droit cantonal ne peut se superposer au droit fédéral, et que celui-ci prévoit que tout le domaine de l'aviation civile relève de la compétence exclusive de la Confédération. Il n'est donc pas possible légalement de dire que tout renouvellement de la concession doit être soumis à l'approbation du Grand Conseil.» Point à la ligne, serais-je tenté de dire ! Nous observons par ailleurs, de la part de l'Alliance de gauche, le même type de violation du droit supérieur lorsqu'il s'agit par exemple de demander une exemption de la TVA pour les TPG.
Ce projet de loi a nécessité plusieurs auditions, la rédaction d'un rapport conséquent et encore une fois fort bien fait par mon collègue Blanc. Quelle est la conclusion de ce rapport ? Ce projet est nul et non avenu. Que propose alors l'Alliance de gauche, sachant que ce projet est nul et non avenu ? Un amendement ! Le groupe libéral profitera de son temps de parole pour proposer le rejet pur et simple de cet amendement, qui précise : «Avant d'être soumis à l'approbation de l'autorité compétente, tout projet de renouvellement ou de modification de la concession de l'aéroport et de son règlement d'exploitation est soumis préalablement à une enquête publique et, au terme de celle-ci, à l'approbation du Grand Conseil qui se détermine sous forme de résolution.» Ainsi, on veut en fait se soustraire à cette obligation pour soumettre l'aéroport aux mêmes cautèles politiques que précédemment.
Je propose donc le rejet pur et simple de ce projet de loi et de son amendement, dans lequel il y a une vicissitude de plus, car le Grand Conseil devrait se prononcer sur le règlement d'application de l'aéroport. Je vous laisse imaginer si tel devait être le cas pour le règlement d'application ou de fonctionnement de la STEP d'Aïre, des HUG, des TPG, etc. Nous passerions notre temps à régler des problèmes de gestion interne. Nous faisons ici de la politique. C'est pour cette raison que je vous invite à rejeter en bloc et fermement le projet de loi en question.
Le président. Petite précision, Monsieur le député. Nous ne nous prononcerons pas sur les amendements si l'entrée en matière est refusée.
M. Christian Grobet (AdG). Sans vouloir faire une boutade, j'aimerais dire à M. Blanc qu'il méconnaît la portée du droit fédéral aussi bien que notre président méconnaît la portée du règlement du Grand Conseil !
La question de la délivrance de la concession relève bel et bien, cela va sans dire, de la compétence de l'autorité fédérale. Mais, comme beaucoup de lois fédérales, la loi fédérale sur la navigation aérienne donne néanmoins des compétences aux autorités cantonales et aux exploitants. On en vient un peu au débat que nous avons eu voici 30 ans et qui portait sur le fait de savoir si c'était le Conseil d'Etat ou le Grand Conseil qui était compétent pour approuver les plans de l'autoroute envoyés à la Confédération. A cette époque, j'avais été le dépositaire d'un projet de loi visant à donner un certain nombre de compétences au Grand Conseil.
Il existe un principe consacré du droit fédéral, à savoir que ce sont les cantons qui décident souverainement quelle est l'autorité compétente dans le cadre de l'application du droit fédéral pour prendre une décision. Dans le cas d'espèce, j'aimerais rappeler que l'exploitant est une corporation de droit public. Précédemment, avant que cette corporation n'existe, il est clair que c'était le Conseil d'Etat, en l'absence d'une règle cantonale, qui était compétent pour tout ce qui concernait la concession. Compte tenu du fait que l'aéroport est une corporation de droit public dépendant du droit cantonal, il est tout à fait possible de prévoir une autorité cantonale supérieure à son conseil d'administration pour déterminer si une concession doit être demandée à l'autorité fédérale et sous quelle forme. C'est indiscutable. Maintenant, contrairement à ce que vous avez dit, ainsi que M. Roulet, il ne s'agit nullement de se substituer à l'autorité fédérale, puisque la décision du Grand Conseil serait prise non pas sous forme de loi, mais sous forme de résolution. Une résolution, vous le savez comme moi, Monsieur Blanc, n'a pas force légale. Si nous avons proposé que la décision soit prise sous forme de résolution, c'est bien parce que nous sommes conscients du fait que la décision finale appartient à l'autorité fédérale. C'est le premier point.
Deuxièmement, il ne s'agit pas du tout, comme M. Jeannerat l'a dit, de vouloir perturber l'aéroport et des questions de ce type. L'aéroport constitue, Monsieur Jeannerat, un équipement majeur de notre canton, avec toutes sortes d'implications qui en résultent, y compris des implications d'ordre international, j'y reviendrai tout à l'heure. Il est parfaitement normal que ce Grand Conseil en débatte. Il est d'ailleurs assez paradoxal que l'on doive voter des crédits de 300 000 F, c'est-à-dire sur des questions tout à fait mineures, mais qu'une question essentielle pour notre canton échappe à la compétence de ce dernier.
Je relève que le canton de Zurich connaît exactement le même débat au sujet de la convention que le Conseil fédéral a voulu signer avec la République fédérale allemande. Je n'entends pas critiquer le fond de cette convention... (L'orateur est interpellé.)On peut en discuter, mais je ne suis pas zurichois et je suis mal placé pour en parler. Il y a aussi d'autres problèmes relatifs à l'exploitation de l'aéroport de Zurich. Toujours est-il que je fais partie de ceux qui considèrent que cette convention doit être soumise à l'autorité cantonale zurichoise et à l'autorité fédérale et qu'elle ne peut pas être signée simplement par le Conseil fédéral. Je ne suis pas d'accord que des questions de concessions ou de sécurité, comme la piste principale de l'aéroport de Zurich, qui n'est même pas dotée de l'ILS, échappent totalement au parlement. C'est inacceptable.
Nous intervenons d'une manière extrêmement modérée. Le premier argument que l'on nous a opposé a été de dire que l'on est intervenu beaucoup trop tard. Il est vrai que nous aurions été mieux inspirés de déposer ce projet de loi quelques mois plus tôt, mais c'est précisément parce que nous nous rendions compte que le Grand Conseil avait été court-circuité... (Brouhaha.)Mais, Mesdames et Messieurs les députés, vous n'avez même pas été saisis d'un rapport sur cette question, ce qui montre le degré de mépris du Conseil d'Etat à l'égard de ce parlement en ce qui concerne l'aéroport. On ne lui a non seulement pas demandé son avis, mais on ne l'a même pas informé de quoi que ce soit. C'est effectivement à travers la presse que nous avons appris le renouvellement de la concession, étant rappelé que nous avions déposé ce projet de loi avant ce renouvellement. Certains se sont malheureusement empressés de tout transmettre à Berne pour empêcher ce parlement de se prononcer à ce sujet, en expliquant par la suite que ce projet de loi venait trop tard ou qu'il faudrait le voter dans 50 ans. Ce n'est pas sérieux, Mesdames et Messieurs !
La concession peut être modifiée en tout temps. Même si cette concession a été accordée pour 50 ans, elle peut quand même être modifiée. Si une modification doit intervenir, il convient non seulement qu'il y ait une enquête publique, mais aussi que le Grand Conseil - c'est la moindre des choses - en soit informé et puisse donner son avis. J'ose quand même espérer, Monsieur Lamprecht, vous qui êtes très attaché au fait que les communes puissent donner leur avis sur toutes les questions qui les concernent, que vous admettez que le Grand Conseil puisse donner son avis sur une question pareille.
Troisièmement, la concession est accordée, mais de cette concession découlent des éléments essentiels dont...
Le président. Vous avez épuisé votre temps de parole, Monsieur Grobet !
M. Christian Grobet. J'en finirai par là ! ...l'obligation pour l'exploitant d'adopter un règlement d'exploitation. Tout ce que nous demandons ici, c'est que ce Grand Conseil soit informé du projet de règlement d'exploitation et que nous puissions donner notre avis, non pas par une loi, mais simplement par un projet de résolution. Si vous refusez ce minimum de transparence, il y a alors véritablement lieu de se poser des questions sur la manière dont l'aéroport est géré, même s'il y a une très bonne direction. Le gérer de cette façon-là, sans y associer le Grand Conseil, n'est pas acceptable !
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Juste deux ou trois éléments. Tout d'abord, je trouve un peu facile de la part des bancs de la majorité de droite de venir nous dire que ce projet n'a aucune consistance et qu'il est complètement désuet, alors que nous avons sous les yeux, Mesdames et Messieurs, sous les yeux, la pire débâcle que notre pays ait connu, celle de Swissair. Cette débâcle a conduit à la fermeture d'un investissement considérable, 300 millions à Zurich pour la construction du terminal C, au refus de mise en service de ce terminal, à la quasi cessation de notre compagnie nationale, au pataquès auquel on assiste à Zurich avec les questions de voisinage et le risque d'interdiction du gouvernement allemand de passer, en l'absence d'accord, sur son territoire.
Je trouve un peu facile d'éluder ce débat qui doit avoir lieu. Il s'agit de faire la part des choses entre cet instrument économique, qui est important pour notre canton, et les méfaits qu'il produit au niveau de l'environnement, notamment avec le voisinage et nos voisins français. La situation est ici aussi étonnante. Tout le monde se gargarise dans les commissions de la coopération régionale, mais lorsqu'on se trouve au pied du mur et que l'on veut faire valoir la coopération régionale, on doit faire face à un refus net, même d'auditionner. Je vous rappelle que 47 communes sont concernées, dont une majorité de communes françaises, qui se sont notamment élevées contre la disparité des tracés d'avions à laquelle on a assisté ces dernières années. Il n'y a plus un tracé obligatoire et cela devient un peu tout et n'importe quoi.
Il y a donc un véritable débat à engager, un véritable contrôle démocratique à exercer sur cet aéroport et l'on ne peut pas renvoyer la discussion d'une chiquenaude en constatant qu'il s'agit d'un instrument de toute façon polluant et que l'on peut par conséquent tout laisser faire. Au contraire ! Nous sommes d'avis et nous sommes certains que le contrôle de cet instrument ne pourra qu'éviter à notre collectivité, à notre région, les difficultés voire les drames que vit aujourd'hui l'aéroport de Zurich, même si vous croyez pouvoir cacher la réalité ! L'aéroport de Zurich est passé à côté de la faillite. Je crois qu'il était important de le dire dans ce débat.
Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Si j'interviens maintenant, c'est pour corriger les propos de M. Roulet. Si je sors du sujet qui est celui de l'aéroport, c'est parce que M. Roulet lui-même est sorti du sujet. Il s'agit de la TVA et des TPG. Il ne s'agissait pas, Monsieur Roulet, d'un projet de loi. Comme M. Grobet l'a rappelé tout à l'heure, lorsqu'on intervient à Berne, c'est par le biais d'une résolution. Si la résolution qui avait été déposée en son temps parlait d'une TVA diminuée par rapport au taux actuel, elle a été revue et il s'agissait d'une TVA gelée à son taux actuel.
Même si l'on sortait du sujet, je crois que c'est une correction importante.
M. Claude Blanc (PDC), rapporteur de majorité. J'ai été très sensible au cours de droit que M. Grobet a voulu me donner. Je sais bien que M. Grobet est plus qualifié que moi pour donner des cours de droit...
Une voix.Tout à fait !
M. Claude Blanc. ...mais je sais aussi qu'il est beaucoup plus qualifié que moi pour adapter le droit à sa volonté et pour l'interpréter selon ses idées politiques. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois. Le Tribunal fédéral le lui a dit à plusieurs reprises. On sait bien que lorsque M. Grobet a envie de faire passer quelque chose, il vous démontre par A + B que c'est conforme au droit supérieur. La plupart du temps, on s'aperçoit que ce n'est pas vrai. Alors il ne faut pas venir me dire que je ne connais pas le droit. Je ne le connais peut-être pas autant que vous parce que je n'ai pas fais 5 ans de droit et le reste de travers, Monsieur Grobet !
Maintenant, pour dire les choses comme elles sont, j'ai été quand même assez surpris d'entendre M. Charbonnier. Je vous rappelle que la commission de l'économie a terminé ses travaux le 21 mai 2001, c'est-à-dire en pleine majorité de gauche. A ce moment-là, les Socialistes se sont prudemment abstenus le dernier jour des travaux, parce qu'ils se rendaient bien compte qu'ils allaient se couvrir de ridicule en votant ce projet de loi et en le faisant passer. Les élections sont à présent passées et ils savent qu'ils ne risquent plus rien parce que la majorité a changé. Les Socialistes se rangent donc courageusement derrière M. Pagani pour lui montrer que l'on s'aime en définitive bien, même si l'on fait des conneries ensemble ! Et bien, Mesdames et Messieurs... Messieurs je crois, parce qu'il n'y a que des Messieurs, Messieurs les Socialistes...
Une voix.Il y a aussi des dames !
M. Claude Blanc. Ceux qui étaient à la commission de l'économie, c'étaient des messieurs... Les dames n'auraient pas été aussi peu courageuses. Elles auraient peut-être été jusqu'à voter comme elles pensaient. Mais les messieurs qui ont voté à la commission de l'économie ont voté comme des pleutres, parce qu'ils ne voulaient pas se couvrir de ridicule. Aujourd'hui, ils s'aperçoivent qu'ils sont ridicules, mais que cela ne porte pas à conséquence parce qu'ils savent que ce projet de loi ne sera de toute manière pas accepté.
Vous pouvez donc raconter tout ce que vous voulez, le droit fédéral a été respecté, l'enquête publique, Monsieur Grobet, a été menée conformément au droit. Nous n'avons pas été informés par la presse, mais par un communiqué de l'office fédéral de l'aviation civile dans la Feuille d'avis officielle. Il y avait des délais fixés à tout le monde pour faire part de ses observations. Un certain nombre d'observations ont été faites et ces observations sont examinées exclusivement par l'office fédéral de l'aviation civile et le canton ne peut que les transmettre. Il n'a pas à en faire lui-même. Par conséquent, la loi a été entièrement respectée. Et ce n'est pas en votant une loi cantonale de cet acabit que vous allez influer sur le droit fédéral supérieur.
M. René Ecuyer (AdG). Je suis quand même un peu sidéré ! On fait de la polémique à propos de la question posée, mais il y a un profond mépris du peuple, c'est-à-dire des élus qui se sont plaints des nuisances de cette aéroport. Nous avons eu la chance et le privilège de recevoir en commission les maires et les représentants de communes tant françaises, que genevoises et vaudoises, qui nous ont expliqué à quel point ils avaient des soucis. Ils en ont fait part, mais on ne les a pas entendu et on ne s'en est pas préoccupé. Un grand nombre de communes a donné un avis, en expliquant qu'elles étaient opposées au renouvellement de la concession pour toutes sortes de raisons. Elles ont par exemple mis en doute la pertinence de cette étude d'impact sur l'environnement, en constatant que l'étude d'impact se fait sur 20 ans, alors que la concession dure 50 ans. A part cela, cette étude d'impact est commanditée par l'aéroport lui-même.
Les représentants des communes ont donc fait part de leurs inquiétudes. Ils avaient l'impression que l'on se moquait totalement du peuple et de ses représentants. On nous a expliqué que la commune de Prévessin-Moens avait commandité une étude sur les problèmes de nuisances sonores dans la région. Tout est expliqué. Le rapport énumère les questions qui se posent du point de vue accoustique. Tout est expliqué, mais on a l'impression que leur avis ne nous intéresse que peu. Ceci dit, ce n'est pas seulement vous qui vous moquez du peuple dans cette affaire, mais aussi le Conseil d'Etat et même les autorités fédérales ! Nous avons entendu le maire de Vernier. Ne pensez-vous pas que son avis soit aussi intéressant ? Cette histoire d'aéroport relève de la responsabilité du peuple. Pourquoi le Grand Conseil n'aurait-il rien à dire à ce sujet ? Pourquoi ne pourrait-il pas l'exprimer ? Il n'y a pas que les questions d'argent qui comptent. Il est vrai que cela rapporte de l'argent à l'aéroport, mais il est aussi intéressant de savoir comment les gens le vivent.
Je pense donc que le projet qui vous est soumis est tout à fait raisonnable. On pourra se prononcer. Le peuple pourra aussi se prononcer, donner son avis et dire ce qu'il pense de cette immense infrastructure qui lui bouffe sa qualité de vie.
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. J'aimerais juste répondre à mon collègue Blanc, que j'apprécie par ailleurs beaucoup...
Une voix.Ahhh !
M. Claude Blanc. Je ne sais pas comment je dois le prendre !
M. Rémy Pagani. ...c'est le genre d'humour que vous appréciez... Se fonder sur un avis juridique de M. André Auer..., il faut quand même savoir qui est M. André Auer. Je vous rappelle que ce monsieur, qui est directeur de l'office fédéral de l'aviation civile, a fermé les yeux, et combien de fois, sur le bilan financier de Swissair. Il aurait dû contrôler, mais il ne l'a jamais fait. L'office fédéral de l'aviation civile est d'ailleurs composé d'anciens pilotes de Swissair. Leur interprétation du droit fédéral est pour le moins tout aussi criticable que l'interprétation du droit fédéral de M. Blanc.
Ceci étant dit, je constate qu'il nous est fait un procès d'intention. Je vois tout à fait de quoi il en retourne. Certains veulent privatiser l'aéroport - il existe un projet de loi - et veulent avoir les mains libres pour mener cette privatisation au nez et à la barbe de la population. C'est pourquoi ils rejettent ce projet de loi et l'amendement que nous proposons, que je profite de présenter. Cet amendement vise simplement à ce que le Grand Conseil ait un droit de regard sur les études d'impact notamment, comme l'a dit mon collègue Ecuyer, et à ce que ces études d'impact, qui figurent dans le règlement d'exploitation, ne soient pas conduites par les mêmes pollueurs, mais par un institut privé indépendant. Ce qui nous a été dit en commission l'a révélé clairement. Contrairement aux résultats de l'étude d'impact réalisée, il s'avère que le trafic en continu a de fait engendré une augmentation de la pollution sonore et atmosphérique dans notre région. C'est un fait. Pourtant l'étude d'impact ne le relève que très peu.
J'ai donc déposé un amendement voici six mois. Je vous en rappelle le contenu, qui modifierait l'ensemble de la loi : "Avant d'être soumis à l'approbation de l'autorité compétente, tout projet de renouvellement ou de modification de la concession de l'aéroport et de son règlement d'exploitation est soumis préalablement à une enquête publique et, au terme de celle-ci, à l'approbation du Grand Conseil qui se détermine sous forme de résolution."
M. Jacques Jeannerat (R). Je suis parfaitement d'accord avec M. Grobet et M. Pagani. Les questions de forme et d'étendue du contrôle politique sur notre aéroport doivent être traitées dans ce parlement. Mais, Messieurs, vous vous trompez de débat ! Ce débat, nous devrons l'avoir dans le cadre de l'examen des deux projets de lois qui sont actuellement à l'étude devant la commission de l'économie. Nous devrons alors parler des questions de sécurité et nous devrons tenir compte de la débâcle de Swissair. Mais il ne s'agit ce soir que de la concession qui est accordée par la Confédération. Alors, de grâce, Messieurs, mettons un terme à ce débat ! Je propose que l'on passe au vote immédiatement.
M. Claude Blanc (PDC), rapporteur de majorité. Je crois que l'on a bientôt tout dit, mais j'aimerais quand même relever, parce que c'est assez piquant, que M. Pagani vient de mettre en doute l'office fédéral de l'aviation et l'impartialité de ce service public, dont M. Auer, le directeur, est le principal collaborateur dans ce domaine de M. le conseiller fédéral Leuenberger. M. Pagani met donc en doute l'honnêteté du service public en expliquant qu'il faudrait confier l'étude d'impact à un institut privé. Privé et indépendant ! Vous avez dit "privé et indépendant"! Je ne sais pas si vous avez bien senti ce que tout cela voulait dire... M. Pagani met en doute l'intégrité du service public et demande à ce que l'on s'adresse à un organisme privé pour établir l'étude d'impact. Cela vaut son pesant d'or, cela vaut d'être inscrit au Mémorial ! C'est pour cela que j'ai repris la parole. Pour le reste, Mesdames et Messieurs, je crois que tout a été dit et que l'on pourra bientôt passer au vote.
Mis aux voix, ce projet est rejeté en premier débat par 48 non contre 34 oui et 2 abstentions.
M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. Le rapporteur de minorité lui-même a eu la lucidité de dire que nous étions en train de prendre des décisions et que nous avions encore 50 ans devant nous pour en prendre. C'est également vous qui avez rappelé qu'il y avait deux projets de lois devant la commission de l'économie traitant du statut de l'aéroport. Là également, il y aura encore du travail à faire. Néanmoins, il faut rappeler que cette concession a été accordée pour 50 ans. Mais, vous le savez, il existe un règlement et ce règlement peut être modifié en tout temps. Il faut le préciser. Ce règlement doit être présenté à l'Office fédéral de l'aviation civile pour obtenir la concession. Il a été présenté, il a été jugé bon et de qualité, et la concession a été obtenue.
J'aimerais rappeler, comme cela a été dit à travers le rapport, que les autorités cantonales ont peu de compétences en la matière, puisque, il faut bien l'avouer, les aéroports internationaux, comme ceux que nous avons à Genève, à Zurich et à Bâle, sont des aéroports strictement liés aux intérêts du pays tout entier. On verrait d'un bien mauvais oeil s'il venait tout d'un coup à l'idée d'un canton de dire, par le biais par exemple de son Grand Conseil, qu'il ne veut plus d'aéroport ou qu'il veut en limiter le trafic. Ce seraient en définitive les intérêts économiques du pays qui en pâtiraient C'est la raison pour laquelle ces décisions relèvent de la compétence fédérale.
Je n'aimerais pas laisser dire n'importe quoi dans cette enceinte. Tout d'abord, c'est le canton qui a ouvert et entamé une procédure de consultation. Le dossier a été déposé le 5 mai 2001. Il a fait l'objet d'une très large consultation, puisque les avis sont parus non seulement dans la Feuille d'avis officielle de Genève, mais aussi dans celles du canton de Vaud et de la Confédération. Tout le monde a pu s'exprimer, les associations favorables, les associations défavorables, les communes riveraines. A la limite, un parti politique, quel qu'il soit, aurait également pu s'exprimer.
Lorsqu'on parle d'environnement, j'aimerais vous dire qu'il existe une commission de consultation contre les nuisances de l'aéroport et pour la protection de l'environnement, qui comprend des représentants des communes, notamment françaises, des représentants du mouvement de protection de l'environnement. Elle se réunit quatre fois par année. Nous ne sommes pas là pour brader l'environnement. L'aéroport non plus n'est pas là pour brader l'environnement, mais tout simplement pour être efficace par rapport au trafic aérien engendré à la fois par la Genève internationale, dont nous sommes tellement fiers, mais aussi par l'économie de toute une région, qui ne couvre pas seulement le canton de Genève, mais aussi les cantons romands et la France voisine.
Vous avez dit tout à l'heure, Monsieur Pagani, que l'ambition du conseil d'administration de l'aéroport était de doubler le trafic et les mouvements. Ce n'est pas du tout le cas. L'ambition de l'aéroport international de Genève est de répondre aux intérêts de la région, de ses habitants, qu'ils soient économiques ou internationaux. Ce n'est pas du tout de doubler le trafic d'ici vingt ans. Nous avons mené dans tous les aéroports de Suisse une étude pour savoir quelle était la capacité ultime de ces aéroports. On se rend aujourd'hui très bien compte que le trafic, s'il a augmenté d'une façon très forte ces dernières années, est déjà en train de se tasser un peu. Pour ma part, je doute que ce trafic augmente encore - ce n'est pas le souhait de l'aéroport - dans des proportions qui correspondent à son ultime capacité. Le but de l'aéroport, c'est d'offrir à Genève un service de qualité, je le répète, pour la Genève internationale et pour toute la région.
Vous savez également qu'il existe une contradiction juridique. C'est le Conseil d'Etat qui est compétent pour émettre des préavis en vertu de l'article 128 de notre constitution cantonale. En inscrivant le Grand Conseil comme organe de décision, il y aurait effectivement quelque chose qui ne serait pas normal. Cela a été dit.
Je rappelle toutes les consultations auxquelles nous avons procédé. Il faut être de bonne foi, tout le monde a été entendu, tout le monde, tout ceux qui avaient quelque chose à dire, ont pu s'exprimer et tout cela est parti à Berne. Il existe un document de plusieurs centaines de pages que vous avez pu consulter. Si vous ne l'avez pas fait à temps, les décisions sont à présent prises. A partir de cela, Mesdames et Messieurs, je demande donc à ce parlement de confirmer le résultat de ces consultations en votant le projet de loi tel que la majorité de la commission l'a voulu.
M. Thomas Büchi (R). Simplement pour annoncer, suite à la réponse du Conseil d'Etat à notre interpellation urgente concernant l'Expo.02, réponse qui satisfait notre groupe, que nous retirons la motion 1426. (Applaudissements.)
Le président. Je clos nos débats pour ce soir, Mesdames et Messieurs. Je vous donne rendez-vous demain à 14 h. Bonne nuit !
La séance est levée à 23h.