République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 14 décembre 2001 à 8h
55e législature - 1re année - 3e session - 11e séance
PL 8572-A
Premier débat
Le président. Monsieur Hausser, avez-vous quelque chose à ajouter à votre rapport?
M. Dominique Hausser (S), rapporteur de majorité. Oui, puisqu'il est oral, Monsieur le président ! (Rires.)
Mercredi dernier, peu après 20h et après huit heures de séances de commission, une majorité a finalement voté le budget 2002, comme vous avez pu le lire dans la presse d'hier matin. C'est une surprise à laquelle personne ne croyait plus, et j'espère que cette bonne surprise sera toujours réalité en fin de débat.
Lorsqu'en septembre 2001 le Conseil d'Etat a transmis au Grand Conseil sa proposition, l'accueil des partis de l'Alternative a plutôt été favorable, sous réserve d'une claire diminution du montant des investissements, d'un effort accru pour s'approcher de la cible des 500 millions de réduction annuelle de la dette, et du respect de la volonté parlementaire sur le compte de fonctionnement, en particulier en ce qui concerne le renforcement du personnel dans les divers secteurs sensibles comme l'école, la police, la justice, les soins aux personnes âgées en EMS, les soins à domicile, les soins infirmiers en milieu hospitalier.
Les partis de l'Entente étaient, par contre, nettement plus réservés, pour ne pas dire franchement opposés pour certains, à cette proposition de budget 2002, la trouvant inflationniste du côté des dépenses de fonctionnement - trop de fonctionnaires trop payés... - et optimiste du côté des recettes.
Après les élections: changement de majorité... Les discours de la droite et de l'extrême-droite se durcissent encore en commission des finances, annonçant clairement un refus du budget qui ne correspondrait, selon ces députés, pas du tout à l'idée du rôle que doit jouer l'Etat. La droite, disent-ils, pourrait revoir sa position si le budget 2002 était sérieusement revu à la baisse par le Conseil d'Etat...
Il apparaît clairement qu'un certain nombre de députés sont novices. Et le budget d'une collectivité publique ne ressemblant pas à celui d'une entreprise privée, ils s'en trouvent désarçonnés. Ils sont convaincus que leur marge de manoeuvre, et celle du Conseil d'Etat, est grande. La réalité est, hélas, quelque peu différente, le Conseil d'Etat disposant, sur le fonctionnement, d'une centaine de millions de marge de manoeuvre et le Grand Conseil d'une dizaine de millions seulement. Le reste étant lié à la législation en vigueur votée par le Grand Conseil ou dépendant de la législation fédérale. Entre le 1er novembre et le 12 décembre 2001, les séances de commission se succèdent... On tourne autour du pot... Les propositions concrètes brillent par leur absence, ou sont floues et irréalistes quand, au hasard de la discussion, il en apparaît quelques-unes.
L'entrée en matière est tout de même votée le 28 novembre à l'unanimité ou presque - puisque les libéraux s'abstiennent en commission - sous réserve, est-il répété, que le Conseil d'Etat tente de réduire le budget de 100 à 150 millions, investissement et fonctionnement confondus, ceci sur une masse totale de l'ordre de 6,5 milliards environ.
Suite à une interpellation du député Claude Blanc en plénière, le 29 novembre 2001, le Conseil d'Etat précise qu'il défend son budget et qu'il attend des suggestions précises de la part des membres de la commission des finances avant de mettre l'administration au travail.
Le 5 décembre 2001, la nouvelle majorité suggère une réduction des investissements d'un montant d'environ 120 millions de francs sur le total de 490, après une réduction d'ailleurs linéaire de 100 millions déjà inscrite dans le budget présenté par le Conseil d'Etat. La proposition ne comporte pas de projet spécifique, mais elle donne des enveloppes par département, dont le montant global correspond d'ailleurs à la volonté exprimée par l'Alternative.
La droite suggère également quelques pistes concernant le fonctionnement: réduction du nombre de nouveaux postes permanents, un montant équivalent à celui inscrit en 2001 concernant la rubrique du personnel auxiliaire et quelques autres bricoles.
Le Conseil d'Etat transmet le mercredi 12 décembre - il y a deux jours - ses propositions: 25 millions de diminution sur le fonctionnement découlant d'une réévaluation de la masse salariale sur la base des estimations récentes de l'augmentation du coût de la vie - c'est une réduction linéaire technique - et une réduction de la ligne budgétaire concernant les postes auxiliaires, ainsi qu'une réévaluation de quelques recettes au DASS ascendant à environ 5 millions.
Concernant les investissements, le Conseil d'Etat propose une diminution de 88 millions: 78 millions de diminution et 10 millions de recettes supplémentaires.
Les conseillers d'Etat sont auditionnés au cours de l'après-midi du mercredi pour justifier leur proposition et, surtout, expliquer pourquoi ils ne peuvent suivre l'ensemble des suggestions de la majorité de la commission des finances.
En début d'après-midi, il semblait presque certain que le budget ne serait toujours pas voté. La commission des finances discutant même d'un projet de loi autorisant le Conseil d'Etat à pourvoir aux charges et revenus du budget de fonctionnement ainsi qu'aux dépenses et recettes du budget d'investissement, jusqu'à promulgation du budget administratif de l'Etat de Genève 2002, soit, en résumé, une loi sur les douzièmes pendant deux mois.
Vers 19h, retournement de situation: certains opposants au projet de budget réalisent qu'une prolongation de la saga n'apportera rien de plus que quelques millions et, très probablement, beaucoup d'ennuis pour eux... Ils préfèrent opter pour une tactique de dialogue plutôt que pour une tactique de rupture qui aurait à terme des effets désastreux. Ils ne semblent pas majoritaires, mais, face à un bon budget équilibré, réaliste, une absence de politique commune et claire ne pourra pas se traduire par une modification substantielle ou même symbolique de ce budget. Ils se rendent à l'évidence et proposent de voter le budget 2002 incluant les nouveaux amendements du Conseil d'Etat.
Seul le groupe radical - vous l'entendrez tout à l'heure - s'oppose à l'idée de voter ce budget. Il souhaite le laisser en suspens et ne voter que la loi sur les douzièmes.
Selon la procédure, il est nécessaire cependant de voter le budget, la proposition étant formellement faite et soutenue par la majorité de la commission. Et si celui-ci s'avérait être refusé, alors, un vote interviendrait sur les douzièmes. Les radicaux et quelques autres députés soumettent encore quelques amendements qui aboutissent à une diminution supplémentaire d'environ 5 millions sur le fonctionnement et de 1,2 million sur les investissements.
Vous avez tous reçu sur vos tables les amendements qui ont été proposés par le Conseil d'Etat au cours de l'automne et mercredi dernier, ainsi que les amendements proposés et acceptés en commission des finances. Le résultat final aboutit à un excédent de revenu, après provision sur la réserve conjoncturelle, de 32 121 784 F, soit environ le double du projet de loi original proposé par le Conseil d'Etat.
La diminution du montant attribué aux postes d'auxiliaires est d'ailleurs accompagnée d'une décision du Conseil d'Etat d'appliquer strictement les règles de la loi B 5 05 sous deux formes: un arrêté du Conseil d'Etat, dont vous avez eu commentaire hier lors des interpellations urgentes - je n'y reviens donc pas - ainsi qu'une directive rédigée par l'office du personnel rappelant que, lorsqu'on engage un auxiliaire, c'est par définition un poste non permanent, avec quelques réserves, qui ont également été rappelées, dans les manières de traiter ces postes, en particulier pour les médecins-assistants à l'hôpital qui occupent effectivement une fonction non permanente mais dont la durée peut dépasser trois années.
Cette décision prise par le Conseil d'Etat devrait ainsi empêcher certains de créer des postes permanents sans le dire, ou de faire avaliser ces postes trois ans plus tard pour engager du personnel dans une fonction permanente, ainsi que d'engager du personnel dans une fonction permanente avec un contrat d'auxiliaire.
Mesdames et Messieurs les députés, avant de conclure ce rapport oral, je vous livre quelques remarques pratiques.
L'ensemble des projets de lois du train annuel d'investissements lié au budget sera traité par la commission des finances au cours des prochaines semaines, plus exactement durant le premier trimestre 2002.
Dès mercredi prochain, la commission traitera cependant le train de projets de lois de fonctionnement et, de manière prioritaire, les projets octroyant de nouvelles subventions à des institutions à caractère social remplissant une tâche publique, en particulier les institutions offrant de l'hébergement et de l'encadrement aux personnes handicapées, ceci de manière à ce que le fonctionnement de ces institutions ne soit pas perturbé trop durement en raison d'une absence de décision.
Les rapports des députés chargés de l'examen détaillé de chaque département seront inclus dans le Mémorial. Toutes les réponses et tous les documents remis par le Conseil d'Etat seront archivés et disponibles, sous réserve de protection des données, au service du Grand Conseil.
Je tiens à remercier très chaleureusement, en mon nom et au nom de toute la commission des finances, Mme Eliane Monnin qui assure la prise de notes, la réalisation des procès-verbaux de la commission - plusieurs centaines de pages pour le budget 2002 - et la récolte et le classement provisoire de toute la documentation, quelques sacs de classeurs fédéraux.
Merci également à toutes les collaboratrices et à tous les collaborateurs de l'administration pour leur assistance, avec un remerciement tout spécial adressé à M. Jean-Paul Pangallo, responsable du budget et de la planification financière de l'Etat.
Mesdames et Messieurs les députés, face à un bon budget, la majorité de la commission des finances, à l'exception des radicaux, vous recommande d'accepter le budget 2002 tel qu'il ressort de la commission des travaux... Pardon, des travaux de la commission des finances! Et voilà!
Le président. Nous avions corrigé, Monsieur Hausser...
Je passe maintenant la parole à M. Bernard Lescaze, rapporteur de minorité.
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de minorité. On vient de vous faire un récit des travaux et des délibérations de la commission des finances qui s'apparente à un roman. Malheureusement, le budget n'est pas un roman.
Lors du débat de préconsultation et du renvoi en commission, en septembre dernier, j'avais dit de ce budget qu'il s'agissait d'un budget habile. Aujourd'hui, je peux même préciser qu'il s'agit peut-être d'un bon budget, mais assurément d'un bon budget de l'Alternative, qui était, alors, majoritaire au Grand Conseil.
Dans ces conditions, nous avons demandé à juste titre... (Exclamations.)
Le président. Ne commencez pas si tôt, s'il vous plaît, Mesdames et Messieurs les députés!
M. Bernard Lescaze. Dans ces conditions - si M. le rapporteur de majorité veut bien me laisser continuer - nous avons effectivement demandé un certain nombre de modifications, car nous tenions à ce que le budget issu de nos travaux soit un budget reflétant la nouvelle majorité parlementaire.
Nous avons demandé un budget plus serré, davantage d'économies, d'abord des économies conjoncturelles - parce que ce sont les plus faciles à trouver - et, ensuite, des économies structurelles, qui sont certes plus difficiles à trouver, mais que le nouveau Conseil d'Etat, et notamment la majorité de celui-ci, avait promises lors de sa campagne électorale.
Les radicaux - et nous espérons qu'ils seront rejoints aujourd'hui par d'autres groupes politiques - feront comme ils l'ont dit: nous sommes décidés à ce que les promesses faites soient tenues, lorsqu'il s'agit de promesses aisément chiffrables et qui peuvent être tenues.
Nous regrettons - nous tenons à le dire - que le Conseil d'Etat actuel, semble se mouler parfaitement dans l'empreinte des pas laissés par le précédent Conseil d'Etat. A ce propos, je tiens à souligner que le tailleur de M. Guy-Olivier Segond devait être excellent, car l'habit qu'il lui avait fait sur mesure va comme un gant, et même mieux encore, à son successeur.
Dans ces conditions, Mesdames et Messieurs les députés, que vaut notre travail en commission des finances? Ni cet excès d'honneur ni cette indignité! Nous ne pouvons faire que peu de choses sans une véritable coopération du Conseil d'Etat. Et mon premier point aujourd'hui, c'est de souligner que le travail de la commission des finances, quelles que soient les compétences des fonctionnaires qui sont mis à contribution - et rudement parfois - par les commissaires, ne peut pas aboutir véritablement sans une volonté du Conseil d'Etat de suivre la politique de la majorité de ce parlement.
Notre rôle, à nous commission des finances, est certes de contrôler le bon fonctionnement de l'administration de l'Etat, de veiller à ce que le budget - qui n'est, je vous le rappelle, qu'une autorisation de dépenses, et il n'est pas obligatoire de dépenser tout ce que nous autorisons, mais c'est là une autre histoire - ne n'écarte pas trop de la réalité des comptes, car ce que nous voulons, nous, principalement - et je pense que le Conseil d'Etat sera d'accord là-dessus - c'est assurer de bons comptes.
Notre budget doit aussi assurer le maintien des tâches essentielles de l'Etat, la cohésion sociale, mais, dans ces tâches essentielles, à côté de l'éducation, de la santé, il y a aussi la sécurité prise au sens large, et nous ne pensons pas que, sur ce point, les véritables priorités soient toujours respectées. En effet, on constate que, sur les cent onze nouveaux postes du département de l'instruction publique, un seul est attribué à la sécurité - psychologique, pas à la sécurité avec gourdin - dans les bâtiments scolaires. Or, nous savons que c'est là que se multiplient les incivilités, et c'est peut-être là que le département devrait faire un certain nombre de projets.
L'Entente voulait - les radicaux le veulent toujours - abaisser la dette, si possible de plusieurs centaines de millions par an, y compris l'assainissement régulier de la Banque cantonale de Genève, c'est-à-dire 250 millions provisionnés au budget.
Nous sommes conscients que la magistrate chargée du département des finances a constitué un grand nombre de provisions - nous dépasserons bientôt le milliard - y compris des provisions tout à fait sensées comme la provision conjoncturelle. Il nous restait donc à trouver environ 150 millions, si possible, en respectant une certaine symétrie, ce qui ne veut pas dire une équivalence mathématique, entre les investissements et le fonctionnement.
Or, il n'a été finalement trouvé qu'environ 90 millions sur l'investissement et 25 millions sur le fonctionnement.
Lors du vote d'entrée en matière du 28 novembre dernier, les radicaux ont assuré et maintenu que le vote sur l'entrée en matière qu'ils ont fait ne signifiait nullement la garantie d'un vote positif sur le budget.
Lors de la séance du 12 décembre, les amendements radicaux, pourtant modestes - quelques millions de francs - ont presque tous été refusés. Certes, nous avons réussi encore à économiser près de 5,5 millions sur le fonctionnement, mais nous sommes persuadés qu'une prolongation des travaux de commission aurait permis de réaliser d'autres économies - sans doute seulement quelques millions de plus: il ne faut pas rêver - mais cela demandait un travail plus approfondi.
Et c'est pourquoi aujourd'hui nous vous proposerons de renvoyer ce budget à l'examen de la commission des finances, pour qu'il soit débattu réellement en profondeur les 23 et 24 janvier et pas aujourd'hui dans la hâte et la précipitation.
Nous demandons une nouvelle liste des priorités pour les investissements dont le montant régulièrement dépensé est toujours inférieur de plusieurs dizaines de millions, voire de centaines de millions, au montant budgété.
Nous avons obtenu une diminution sensible du montant attribué aux auxiliaires, montant qui en quatre ans était passé de 23 à 50 millions. Pourquoi? Parce que c'est une façon indolore, insensible - mais malgré tout douloureuse pour le contribuable - pour le Conseil d'Etat d'augmenter les effectifs.
En effet, au bout de trois ans, ces auxiliaires sont titularisés. Ce sont les conséquences de la loi B 5 05, et nous sommes reconnaissants au Conseil d'Etat d'avoir donné de nouvelles directives par rapport à ces conséquences. Nous espérons qu'elles sont compatibles avec le texte même de la loi, car, sinon, il faudra changer la loi sur ce point. Une loi qui, je le reconnais - mais en des temps différents - avait été votée à la quasi-unanimité de la commission des finances, à l'exception précisément de celui qui vous parle.
Nous demandons également une réévaluation des recettes fiscales, la prise en compte des récents arrêts du Tribunal fédéral dont l'un rapporterait 20 millions et l'autre coûterait environ 50 millions... Nous n'avons aucun véritable chiffrage.
Enfin, nous voulons également des amendements ciblés sur les subventions.
Et puis, la commission des finances - et le groupe radical le regrette - n'a pas véritablement pris en considération l'avenir. Nous souhaitons que l'on réfléchisse davantage au poids de la dette à un moment où les taux sont historiquement bas, parce que si les taux remontaient, ce qui n'est certes pas prévisible dans un proche avenir, elle pourrait nous paraître très lourde.
Nous regrettons que des inquiétudes futures...
Le président. Il vous reste une minute, Monsieur le député!
M. Bernard Lescaze. Monsieur le président, je suis le rapporteur de minorité, et je pense que j'ai le droit de m'exprimer, au moins lors de ma première intervention, aussi longtemps que je le souhaite... (Commentaires.)
Le président. Dix minutes comme tout le monde, Monsieur le député!
M. Bernard Lescaze. Rassurez-vous, j'arrive à ma conclusion! Mais j'aimerais bien que le règlement soit appliqué...
Je souhaite que les inquiétudes pour le futur, qui n'ont pas été prises en compte en commission des finances, puissent être partagées par l'ensemble de ce Grand Conseil.
Qu'en est-il réellement du taux de couverture de la CIA, la caisse de retraite des fonctionnaires, avec la chute des revenus boursiers?
Qu'en est-il réellement des effets sur le budget de l'Etat de Genève de la redistribution des tâches entre la Confédération et les cantons? Qu'en est-il véritablement de l'effet sur le budget de Genève des accords bilatéraux, puisque l'on s'achemine lentement mais sûrement vers leur ratification?
De tout cela, Mesdames et Messieurs les députés, la commission des finances n'a absolument pas parlé. Elle semble, dans sa majorité, être semblable à un coureur cycliste qui disposerait d'un excellent vélo et qui pédalerait le nez dans le guidon sans se soucier aucunement ni de la route, ni de l'état de la route, ni de la direction qui est prise...
Dans ces conditions, nous déposerons, Mesdames et Messieurs les députés, si par hasard vous n'acceptiez pas le renvoi du budget en commission, à nouveau nos amendements, en vous donnant rendez-vous ces prochaines années pour atteindre un véritable assainissement des finances publiques. Nous étions sur la bonne voie, malheureusement, le rythme proposé par le nouveau Conseil d'Etat est trop semblable à l'ancien et ne nous satisfait pas. C'est pour cela que les radicaux, qui, je l'espère, seront suivis par d'autres groupes aujourd'hui refusent, pour l'instant, ce budget.
Le président. Monsieur le vice-président, nous reparlerons de l'application du règlement, et je suis sûr que vous serez d'accord avec moi tout à l'heure.
Monsieur Hiler, vous avez la parole.
M. David Hiler (Ve). Tout d'abord, il me paraît curieux, Monsieur le rapporteur de minorité, que vous vous référiez constamment à la diminution de la dette après que vos groupes ont, d'entrée de cause, déposé cinq projets de lois dont le but est d'abaisser les recettes fiscales...
Vous pouvez dire franchement que vous voulez faire maigrir l'Etat, diminuer les prestations - bien sûr, vous pouvez le faire - mais vous ne pouvez pas continuer à prétendre que votre objectif est de diminuer la dette, alors même qu'après une diminution de 12% de l'impôt vous revenez avec un certain nombre de propositions qui auront des impacts lourds sur les budgets futurs, si jamais elles devaient être acceptées et par ce parlement et par le peuple!
Votre but n'est donc manifestement pas de réduire la dette, et les faits précédents le prouvent par ailleurs.
Je reviens maintenant au budget. Ce budget est celui du Conseil d'Etat. Vous semblez regretter - je rappelle ce qui a changé dans la composition du Conseil d'Etat: un démocrate-chrétien de plus et un libéral de plus à la place de deux radicaux - que ce nouveau Conseil d'Etat soit trop proche du précédent, soit de celui qui comptait deux radicaux... Nous apprécions votre cohérence, et le sens de la solidarité avec les magistrats qui, de tout temps, a caractérisé votre parti... (Applaudissements.)...avec par ailleurs les résultats que l'on sait!
Monsieur le rapporteur de minorité, vous avez mis en cause assez largement le travail de la commission des finances, et à bon droit ! Il suffit de voir la démonstration époustouflante de l'Entente au sein de cette commission, prétendant qu'il était très simple d'économiser 300 à 500 millions... Pourtant, concrètement, les amendements proposés portaient tantôt sur 10000 F, tantôt sur 100000 F... Dans un bon jour, 1 million! Et par ailleurs - vous le savez, Monsieur le rapporteur de minorité - vous vous êtes largement inspiré de ce que faisait l'ancienne majorité lorsqu'elle était saisie d'un budget du Conseil d'Etat. A chaque fois, le Conseil d'Etat a de la peine à faire les arbitrages sur les investissements, à chaque fois il laisse une poire pour la soif, de sorte à avoir des comptes un peu meilleurs que le budget; donc, une bonne commission, quelle que soit sa composition, commence par ramasser 80 millions dans les investissements pour que le budget se rapproche quelque peu de la réalité. Cela n'a rien de nouveau et découle, si je puis dire, du bon sens.
Pour le reste, le Conseil d'Etat a déposé un certain nombre d'amendements tout en précisant qu'il ne ferait pas mieux le mois suivant... A-t-il tort ou a-t-il raison? S'agit-il de l'impuissance du parlement ou s'agit-il d'autre chose?
Eh bien, Monsieur Lescaze et tous vos amis - vous le savez fort bien - il s'agit d'autre chose ! Si vous souhaitez que le budget diminue par exemple de 500 millions, vous devez, Monsieur le rapporteur de minorité, faire des propositions sur les lois... Vous devez, par exemple, proposer que les allocations servies aux personnes âgées soient diminuées... Vous devez proposer, de façon concrète, qu'il soit interdit dans notre canton d'avoir des classes de moins de vingt-cinq élèves... Ça, ce sont des propositions qui vous rapporteront ! Mais alors, bien sûr, il faudra les gagner devant le peuple, car si, comme vous nous le rappelez constamment, le peuple n'aime guère les impôts, je n'ai pas constaté depuis que je suis au parlement que le peuple aime particulièrement qu'on diminue les prestations... Je me suis personnellement risqué une fois à l'exercice dans une situation difficile, alors que nous avions 600 millions de déficit... Je ne le recommencerai pas, alors que le budget est globalement satisfaisant - il faut le dire - et qu'il est à tout le moins équilibré. Il permet, même avant les interventions de la commission des finances, de procéder à un certain amortissement de la dette. Le taux d'autofinancement, après nos travaux, est excellent par rapport à tous les autres cantons suisses.
Il est vrai - et nous l'avons dit - que le budget ayant été préparé, comme de coutume, essentiellement pendant le premier semestre de l'année, il intégrait peu l'incertitude surgie après les évènements du 11 septembre. Il est vrai aussi sur ce point qu'il n'est pas si facile de prendre des décisions.
On peut toujours, bien sûr, faire la morale: faut-il ou non diminuer les investissements? Cela dépend un peu du pronostic que l'on fait sur l'année 2002. Nous pensons, en ce qui nous concerne, qu'il y a un retour sur l'immobilier suite aux difficultés boursières - nous avons de la documentation sur ce point - et nous ne pensons pas qu'il convient de lancer une politique anticyclique actuellement. Par contre, nous aimerions tout de même rappeler que, sur le plan du fonctionnement, il y a une économie dont nous avons disposé année après année: je veux parler des réductions du pouvoir d'achat de la fonction publique, 12,8%. C'est fini: on ne peut pas demander indéfiniment aux personnes qui travaillent pour l'Etat de Genève et dont la plupart ont un très haut degré de qualification de laisser gentiment leur pouvoir d'achat baisser davantage que dans la moyenne des salaires du privé - contrairement à ce qu'on entend dire - et cela de manière très manifeste.
Le budget qui nous est proposé par le Conseil d'Etat à majorité de l'Entente, comme le précédent, est un budget parfaitement correct, un budget qui permettra d'apporter à cette République la stabilité et de répondre aux attentes d'une société riche qui souhaite effectivement que chacun soit bien soigné à l'hôpital, que le système de formation fonctionne bien, que l'on ne fasse pas d'économies sur le dos des personnes extrêmement dépendantes qui se trouvent dans les EMS - cela serait trop facile - et qui ont, pour la plupart, de la peine à payer leur assurance-maladie. Nous trouvons que ce budget permet de faire face et que l'effort qui a été consenti, notamment ces quatre dernières années, en termes de réorganisation de l'Etat est satisfaisant par rapport à tout ce qu'on avait connu au préalable. Et nous ne pouvons pas imaginer que les personnes qui, lors de la dernière législature au Conseil d'Etat, ont souhaité améliorer les choses vont subitement s'arrêter de travailler, parce qu'une nouvelle majorité est arrivée... Non, ils vont continuer à réorganiser l'Etat !
Pour le reste, ce que j'ai entendu en commission des finances et ce que j'entends aujourd'hui du rapporteur de minorité, quelle que soit son éloquence, ce sont des propos de vieux grognon et rien de plus ! (Rires et applaudissements.)
Le président. Monsieur Hiler, cas échéant votre groupe a encore droit à deux minutes de parole.
J'en profite pour saluer la présence à la tribune de notre ancien collègue et ami Bernard Clerc. (Applaudissements.)
M. Claude Blanc (PDC). Nous allons assister aujourd'hui, je l'espère, à l'enfantement difficile d'un budget qui a été conçu il y a quelques mois en période de reprise économique et, comme le disait M. Lescaze, en période de majorité de l'Alternative.
Il est vrai que la reprise économique a malheureusement été brutalement stoppée, et il est vrai aussi que la majorité a changé. Mais tout cela ne nous empêchera pas d'examiner ce budget avec lucidité.
Alors, qu'en est-il de ce budget et qu'en est-il des demandes des uns et des autres?
Je rappellerai tout d'abord que, dès la présentation de ce budget, nous avons demandé qu'il dégage davantage d'argent pour l'amortissement de la dette. Nous avons en effet estimé dès le départ que les sommes dégagées pour cet amortissement étaient insuffisantes et nous avons demandé au Conseil d'Etat de faire un effort dans ce sens.
Ensuite, nous avons eu des travaux en commission des finances avant les élections, au cours desquels nous avons examiné tous les départements les uns après les autres, comme nous le faisons habituellement, mais sans prendre aucune option, sachant que les élections allaient de toute manière, soit dans un sens soit dans l'autre, donner une direction plus précise.
Les élections ont non seulement conduit à un changement de majorité, mais en plus à un renouvellement important de ce Grand Conseil puisque quarante-huit députés sont nouveaux, ce qui, je crois, ne s'était jamais vu ou, en tout cas, ce qui ne s'était pas vu depuis bien longtemps. Il faut donc que les nouveaux députés absorbent non seulement le budget, mais aussi la manière de le traiter. Beaucoup d'heures de travail ont ainsi été perdues en commission des finances pour essayer de faire assimiler ce budget aux nouveaux députés, notamment aux nouveaux députés de la majorité qui étaient presque tous des novices.
Alors, je rappellerai quand même ici que, dès le départ, les représentants de la nouvelle majorité ont exigé des diminutions budgétaires conséquentes dans le but d'amortir la dette. Ils ont même été jusqu'à dire que, s'il n'y arrivaient pas, ils refuseraient le budget.
La commission des finances a donc poursuivi ses travaux et puis elle a commencé à voir ce qui était possible ou non. Et il est apparu, lors de la dernière séance du budget, que l'on n'y arriverait pas, ce dont nous nous doutions depuis le début. Les nouveaux députés libéraux, membres de la commission des finances, sont venus eux-mêmes me dire qu'il serait difficile d'y arriver, qu'il serait peut-être possible d'arriver à gagner quelques dizaines de millions d'ici le mois de janvier, mais qu'ils ne seraient de toute façon pas satisfaits. Qu'il ne servait donc à rien de perdre du temps pour gagner des peanuts,si vous me passez l'expression... (Exclamations.)
M. Pierre Kunz. Ce sont les libéraux qui ont dit ça, ou c'est le PDC?
M. Claude Blanc. Ce sont les libéraux qui l'ont dit ! Monsieur Kunz, vous parlerez à votre tour... Laissez-moi dire ce que je sais, et ensuite je vous laisserai dire ce que vous ne savez pas ! (Rires et applaudissements.)
Je rappelle aussi, Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, qu'à titre personnel j'ai vraiment fait l'effort maximum pour arriver à trouver une solution au problème posé: vous pouvez au moins le reconnaître ! Je vous avais demandé formellement de faire un effort substantiel pour arriver à dégager un peu plus d'argent pour l'amortissement de la dette, soit dans le budget de fonctionnement, soit dans le budget d'investissement. Je vous l'ai demandé avec insistance à plusieurs reprises, mais je dois bien constater que vous avez été - si j'ose dire - durs à la détente... Vous avez certes fait quelques propositions, mais tout à fait minimalistes. Je vous avais demandé de trouver 120 à 150 millions d'économies... Nous arrivons à 120, soit, mais c'est vraiment le minimum et, encore, si nous sommes arrivés à trouver 120 millions, c'est grâce à M. Lescaze qui a fait rajouter 5 millions à la dernière minute...
Des voix. Bravo, Bernard !
M. Claude Blanc. Vous me permettrez de penser et de vous dire, Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, que j'attendais quand même plus de collaboration de votre part...
Cela étant dit, dans l'état actuel des choses et puisque 120 millions ont tout de même été obtenus - 90 sur les investissements et 30 sur le fonctionnement; j'aurais préféré quant à moi un effort supplémentaire sur le fonctionnement, mais cela n'a pas été possible, tant pis ! - le groupe démocrate-chrétien fera ce qu'il a dit. Entre parenthèses, M. Lescaze a dit la même chose à propos des radicaux, et je me réjouis de voir si les radicaux feront ce qu'ils ont dit au Grand Conseil lorsque la campagne référendaire sur le RMR aura lieu ! Mais cela est un petit détail !
Nous, les démocrates-chrétiens, ferons ce que nous avons dit: nous soutiendrons ce budget. Nous sommes en effet très conscients du privilège qui est le nôtre, compte tenu de l'importance relativement minime de notre parti, d'avoir une grande influence au sein du gouvernement, puisque nous avons, avec les libéraux, la majorité au Conseil d'Etat. Nous nous sentons donc responsables, plus que d'autres peut-être, et par conséquent nous voulons nous montrer solidaires d'un gouvernement dont nous sommes partie prenante, même si nous ne sommes pas aussi nombreux sur ces bancs que le parti libéral, qui n'a pas plus de conseillers d'Etat que nous pour le représenter...
Nous reconnaissons vraiment que notre présence au gouvernement - qui est due à la volonté populaire, entre parenthèses...
M. Olivier Vaucher. Elle est surfaite!
M. Claude Blanc. Elle n'est pas surfaite, elle est méritée par rapport à la qualité des candidats, et elle a été attribuée par la volonté populaire !
Nous voulons nous montrer dignes de la confiance que le peuple nous a faite en nous associant plus que d'autres aux responsabilités gouvernementales, responsabilités que nous voulons partager.
C'est la raison pour laquelle je m'adresse particulièrement à vous, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, pour vous dire que nous allons soutenir votre budget, tout en vous demandant d'être attentifs à ce qui se passe aujourd'hui, à ce qui s'est passé ces dernières semaines, en espérant que vous comprendrez non pas la leçon - car vous n'avez pas de leçon à recevoir, nous le savons bien... vous, vous les donnez, Madame la présidente du département de l'instruction publique ! - mais notre message d'aujourd'hui. Nous allons donc voter votre budget, mais nous voudrions quand même que vous soyez conscients qu'il faudra maintenant faire des efforts entre vous, par exemple en faisant les arbitrages au lieu de demander à la commission des finances de les faire, afin que nous puissions travailler sur d'autres bases à l'avenir et que nous ne soyons pas obligés de nous chamailler pour des peanutspendant les séances de la commission des finances. Voilà ce que je vous demande, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat !
Dans cette optique, le groupe démocrate-chrétien votera le budget. (Applaudissements.)
Le président. Cas échéant, Monsieur Blanc, votre groupe a encore une minute...
Monsieur Spielmann, je vous passe la parole.
M. Jean Spielmann (AdG). Monsieur le président, je ne sais pas où vous prenez la liberté de dire que les groupes ont encore du temps... Nous en sommes à l'entrée en matière, trois fois dix minutes par groupe...
Le président. C'est une décision des chefs de groupe, Monsieur Spielmann !
M. Jean Spielmann. Il n'y a pas de règlement qui vous autorise à limiter le temps de parole des groupes !
Le président. Cette décision a été prise à la majorité des chefs de groupe, mais si vous ne voulez pas la respecter, libre à vous ! Comme ancien président du Grand Conseil, vous êtes libre !
M. Jean Spielmann. Merci ! Durant tous les travaux de commission, un certain nombre de constats ont pu être faits, et l'honnêteté devrait vous permettre de reconnaître, Mesdames et Messieurs, que, pour la première fois depuis un très grand nombre d'années et malgré des circonstances pour le moins difficiles, le Grand Conseil est en présence d'un budget équilibré et qui réduit la dette de l'Etat. Cela n'a jamais été réalisé, ni par le gouvernement monocolore, ni par les gouvernements précédents, ni par votre majorité.
Vous dites aujourd'hui que ce budget est trop influencé par l'Alternative... Vous savez comme moi que ce budget a été présenté par un Conseil d'Etat - Monsieur Lescaze, vous dites qu'il est trop proche du précédent - plus proche de vos milieux que des nôtres.
Si l'Alternative a influencé le budget, c'est en bien puisqu'elle a permis, pour la première fois dans l'histoire récente de ce Grand Conseil - les quarante dernières années - de présenter un budget équilibré et une réduction de la dette. L'Alternative a ainsi pu démontrer qu'elle savait mieux gérer les deniers publics que vous ne l'avez jamais fait au cours des dernières législatures.
Nous verrons bien ce que fera la nouvelle majorité et le nouveau Conseil d'Etat pour présenter un budget équilibré. Je fais le pari que vos décisions - je m'exprimerai tout à l'heure sur vos propositions - vous conduiront à revenir très rapidement dans les chiffres rouges.
J'en viens au fond. Etant donné la conjoncture économique actuelle et la politique qui est menée, il est clair que ce budget équilibré, avec un autofinancement complet des investissements, qui permet une réduction et un amortissement de la dette, est un bon budget. D'autant plus, Messieurs qui me font face, que, durant la législature précédente, les impôts ont baissé de 12%, suite à votre proposition votée par le peuple... 12% de réduction des impôts, et malgré cela, le budget est équilibré !
De plus, nous avons dû prendre en compte la mauvaise gestion de la Banque cantonale de Genève, qui est pourtant de votre responsabilité ! Je ne vais pas revenir ici sur tous les débats qui ont eu lieu à ce sujet. Nous n'avions pas d'autre choix, puisque nous sommes des gens responsables, que de procéder au sauvetage de la Banque cantonale de Genève. Vous le savez comme moi et malgré tout ce que dit la presse, tout autre scénario aurait coûté beaucoup plus cher et nous n'aurions pu avoir ni budget équilibré ni réduction de la dette si nous n'avions pas choisi cette option.
Voilà des paramètres incontournables qui résultent directement de votre gestion politique. Alors, ne venez pas nous dire que ce budget n'est pas le vôtre et qu'il n'est pas aussi le résultat des conséquences de la politique que vous avez menée !
Maintenant, en ce qui concerne le débat sur la manière dont on peut modifier un budget, chacun dans ce parlement a la possibilité de présenter des amendements - je reviendrai tout à l'heure sur les positions de M. Lescaze en commission, pour mettre en adéquation ce qu'il a dit tout à l'heure et ce qui a été proposé réellement.
Dans le cadre des débats de la commission, il y a un certain nombre d'éléments sur lesquels nous ne pouvons pas agir directement. Vous le savez comme moi, beaucoup de dépenses résultent des lois votées. Vous avez la possibilité de modifier les lois et ces modifications, vous auriez déjà pu les intégrer au budget, comme celle, par exemple, qui prévoit une diminution des recettes de 300 millions de francs ! En l'occurrence, il est un peu facile de proposer des réductions de recettes et de dire du budget qu'il n'est pas équilibré, qu'il ne permet pas d'amortir la dette ni de faire des économies, sans nous présenter des modifications de lois cohérentes, comme l'a dit M. Hiler tout à l'heure, qui permettent réellement de compenser les réductions d'impôts !
Monsieur Lescaze, après les heures et les heures de discussions que nous avons eues en commission, après les débats nourris sur l'ensemble des sujets, malgré la présence des conseillers d'Etat que vous avez exigée - et ils sont venus - nous avons attendu séance après séance que vous nous fassiez enfin des propositions concrètes pour réduire les dépenses...
Or, qu'avez-vous proposé? Quelques amendements... Sur quoi? Vous avez, par exemple, proposé de ne pas mettre de radars à bord des voitures de police... (L'orateur est interpellé par M. Lescaze.)
Le président. Monsieur le rapporteur, s'il vous plaît !
M. Jean Spielmann. La manière dont vous vous excitez maintenant, au lieu de demander la parole et d'attendre votre tour pour parler, démontre bien que vous avez relativement peu le sens des responsabilités ! Je me demande d'ailleurs comment vous avez pu être élu à la vice-présidence du parlement... Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne chose que vous soyez notre prochain président du Grand Conseil, vu votre attitude et la manière avec laquelle vous traitez les dossiers !
Vous avez présenté des amendements comme celui que je viens de citer: il constitue certainement une économie fondamentale qui va permettre de résoudre les problèmes...
Votre deuxième idée géniale concernait les diodes qui contrôlent la vitesse des voitures, et je ne parle pas des autres amendements, tous ridicules...
Vous dites que vous voulez être en adéquation avec la campagne électorale que vous avez menée... Alors, ayez l'honnêteté de proposer, dans les investissements, la traversée de la rade qui était votre cheval de bataille pendant la campagne électorale ! Vous aviez bien dit à vos électeurs que vous vouliez réaliser cette traversée de la rade... Alors comment pouvez-vous reprocher au Conseil d'Etat de ne pas avoir suffisamment réduit les investissements? Comment pouvez-vous dire que ce budget ne vous satisfait pas, parce qu'il n'amortit pas suffisamment la dette? Ce budget ne vous satisfait pas parce que les investissements n'ont pas été suffisamment réduits, et pourtant votre programme comportait une augmentation des investissements. Vous n'êtes donc pas logique avec vous-même !
Plus sérieusement, si vous voulez vraiment changer l'orientation du budget de l'Etat et de ses finances, il faut faire des modifications de fond. Nous avons, pendant des années, réussi à réduire les dépenses de l'Etat point par point, à les serrer au maximum. Plus rien ne peut être gagné par le biais des modifications techniques. Tout ce que nous faisons ne peut être qu'artificiel. Il faudrait s'attaquer au fond pour arriver à changer les choses et, sur ce point, votre attitude politique manque singulièrement de sérieux et vous ne proposez rien de concret.
Je veux bien admettre que le fait de ne plus avoir de représentant au Conseil d'Etat justifie votre courroux, mais ce n'est pas un argument politique suffisamment pertinent pour refuser le budget ! J'attends vos propositions de fond. J'attends de savoir quelles lois déterminant les dépenses de l'Etat vous proposez de modifier. J'attends des amendements sérieux et concrets.
Vous proposez le renvoi en commission de ce projet... Qu'allez-vous proposer de plus que ce que vous avez proposé jusqu'à présent? Les ridicules propositions que vous avez faites jusqu'à présent à la commission des finances ne permettent même pas de modifier le ratio dépenses/recettes du budget !
Vous avez demandé la présence de tous les conseillers d'Etat en commission pour répondre à des questions par rapport à certains points... Mais je ne vous ai pas entendu exprimer le début d'une proposition permettant d'aller dans le sens d'une amélioration du budget !
Mis à part les radars et les autres propositions ridicules que vous avez faites, certains députés ont fait preuve de responsabilité en commission: il faut savoir le reconnaître et leur rendre hommage. Ces nouveaux députés ont demandé des modifications et des changements de fond qui correspondent aux motifs pour lesquels ils ont été élus, à leurs arguments de campagne électorale. Ils ont fait pression sur le Conseil d'Etat en lui demandant de tenir compte de leurs propositions. Ils sont allés jusqu'au bout de leur démarche en disant qu'ils refuseraient le budget si tel n'était pas le cas. Mais, lorsqu'ils se sont aperçus que les problèmes étaient en réalité plus sérieux et que le budget de l'Etat ne pouvait pas être modifié à coup d'amendements, qu'il s'agit d'un immense bateau, que, lorsqu'on tourne le gouvernail, c'est seulement au bout d'un certain temps que le bateau change de direction...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur Spielmann!
M. Jean Spielmann. ...ils ont pris la décision de voter le budget en raison du manque de temps, vu les délais nécessaires pour procéder aux modifications des lois qui permettraient d'aboutir à un résultat concret. Il faut donc rendre hommage aux trois députés libéraux qui ont pris cette décision en commission, car ils se sont rendu compte des réalités budgétaires. J'ai suffisamment de divergences politiques avec eux pour pouvoir le reconnaître. On peut essayer de changer les choses, mais, face aux réalités, il faut avoir le sens des responsabilités.
Le président. Vous devez conclure, Monsieur Spielmann!
M. Jean Spielmann. Je conclurai ainsi: ce sens des responsabilités, Monsieur Lescaze, vous, vous ne l'avez pas. Ce qui vous caractérise, c'est votre irresponsabilité, et j'espère bien que vous serez sanctionné pour cela!
M. Jean-Marc Odier (R). A première vue, ce budget 2002 qui dégage un excédent de recettes de 16 millions pourrait paraître acceptable. Toutefois, ce budget prévoit une augmentation des dépenses d'environ 6%, alors que l'inflation n'est que de 0,9%. La différence entre ces taux montre une augmentation excessive des dépenses de l'Etat. De plus, la dette avoisine toujours 9,5 milliards, mais la volonté de remboursement, pourtant partagée par l'ensemble des partis politiques avant les élections, semble déjà avoir disparu...
Si ce remboursement ne doit pas être l'unique priorité, le million de francs que l'Etat de Genève décaisse chaque jour en intérêts bancaires doit nous forcer à penser que ce remboursement doit rester impérativement notre première priorité. Cette volonté de réduction de la dette doit d'autant plus se concrétiser que, même restreinte, il existe aujourd'hui encore une marge de manoeuvre que nous n'aurons probablement plus dans les prochains budgets, surtout si on se réfère aux perspectives conjoncturelles plus mauvaises qui ont été annoncées. Et les 360 millions d'intérêts annuels obéreront d'autant plus le budget et les capacités financières de l'Etat. Faut-il également rappeler qu'une augmentation de 1% du taux d'intérêt augmenterait de 95 millions supplémentaires les charges du budget?
Le groupe radical ne souhaite pas couper aveuglément dans les finances nécessaires au fonctionnement de l'Etat. Nous ne faisons pas non plus abstraction des réalités démographiques engendrant des augmentations de dépenses.
Notre volonté est de prévenir les effets du retour d'une conjoncture défavorable. Cette volonté passe par une réduction des augmentations excessives des dépenses de fonctionnement et par une diminution des investissements.
Sur les deux cent quarante nouveaux postes, le groupe radical approuve la demande pour environ deux cents postes, justifiés par une décision de notre Conseil, dont notamment cent onze postes pour l'enseignement et quarante-trois postes pour les OPF, soit trente-trois régularisations et dix postes nouveaux pour la restructuration, ainsi que les trois postes demandés par le Grand Conseil.
En revanche, nous refusons trente-huit autres postes demandés par les chefs des différents départements. Et là, je dis simplement au passage à M. Spielmann que c'est une proposition concrète qu'il a oublié de mentionner...
Certes, la marge de manoeuvre est faible en raison de la proportion importante des dépenses liées à des lois, mais, avant de vouloir modifier l'Etat, comme certains voudraient le faire de suite, soyons modérés et fermes. Il n'y a pas de petites économies... Nous devons déjà effectuer ce travail pour le budget 2002.
Par principe, nous souhaitons qu'il y ait parité dans les sacrifices entre les investissements et le fonctionnement. La commission des finances a souhaité une diminution des investissements de 120 millions. Le Conseil d'Etat a estimé qu'il n'était pas possible d'aller plus loin que 80 millions.
En matière de réduction des charges de fonctionnement, les propositions du Conseil d'Etat ne s'élèvent qu'à 25 millions, ce qui est nettement insuffisant à nos yeux. Les amendements radicaux ont d'ailleurs déjà permis de trouver 6 millions d'économies supplémentaires. Nous pensons que la commission des finances aurait pu trouver encore 20 à 25 millions d'économies supplémentaires, si elle avait pu poursuivre ses travaux jusqu'au 19 décembre, comme cela avait été initialement convenu lors de son débat d'entrée en matière.
Le vote de la commission sur le budget est par conséquent intervenu trop tôt. Il a été précipité sous prétexte qu'il n'était pas possible de trouver des économies supplémentaires, alors que les documents mis à jour ne nous ont été remis qu'en début de séance. Le temps consacré à étudier correctement le budget 2002 était donc insuffisant et ne permettait pas de travailler sereinement.
Nous aurions aussi souhaité que le Conseil d'Etat effectue lui-même une recherche plus approfondie pour trouver les économies possibles en matière de fonctionnement. Il aurait également été souhaitable que le Conseil d'Etat résolve d'une manière satisfaisante la problématique des postes vacants. Le nombre de postes vacants variait d'ailleurs, au sein d'un même département, entre les explications du chef du département et celles du département des finances. Ce n'est certainement pas le rôle des députés de clarifier le nombre de postes effectivement disponibles dans chaque département et encore moins d'arbitrer les décisions de postes entre départements. Cette dernière décision doit être prise par le Conseil d'Etat. Le processus permettant au Conseil d'Etat de présenter au budget des postes de régularisation met le Grand Conseil devant le fait accompli, ce qui n'est plus acceptable.
Lors du vote d'entrée en matière en commission, après les déclarations d'entrée en matière, les différents groupes autour de la table avaient convenu de collaborer pour trouver des solutions permettant de voter le budget en janvier, en rappelant que nous étions hors délai pour déposer le rapport pour décembre.
Il avait également été convenu que l'entrée en matière était conditionnée à la nécessité pour le Conseil d'Etat de proposer des réductions sur l'augmentation des charges. Force est de constater que ce travail n'a pas abouti, que l'on se précipite pour voter le budget, contrairement à ce qui avait été convenu.
Le groupe radical dit non à la précipitation. Il vous suggère de refuser ce budget, de voter deux douzièmes et de remettre le vote du budget à janvier comme prévu.
Le président. Cas échéant, il vous reste cinq minutes... Monsieur Kunz, vous avez la parole.
M. Pierre Kunz (R). Il y a au moins une chose, Monsieur Blanc, que je sais depuis que vous avez pris la parole, c'est que vous n'êtes pas content du budget mais que vous l'acceptez... Vous acceptez un budget mauvais et, pour se convaincre qu'il est mauvais, il suffit de visualiser les mines réjouies de nos collègues de l'Alternative... Une sorte de mascarade consistant à faire croire aux Genevois que ce gouvernement et ce Grand Conseil engagent sérieusement et structurellement la lutte contre l'endettement, alors qu'il n'en est rien en réalité.
Il apparaît donc que le groupe PDC va voter ce budget... Eh bien, voilà les représentants d'un parti qui, voici quelques semaines, solennellement et à pleines pages dans la presse... (L'orateur est interpellé.)Oui, oui, des pages pleines... (M. Kunz montre un journal.)...s'engageaient d'abord à réduire annuellement la dette publique de 500 millions par année, au moyen d'excédents budgétaires, qui s'engageaient à valoriser et à moderniser le statut de la fonction publique, voilà des députés qui seraient prêts à renier leurs ambitions affichées, déclarées, de retour à l'équilibre financier durable du canton ! J'ai vraiment de la peine à vous comprendre, Monsieur Blanc ! Vous ne respectez vraiment pas vos promesses !
Et voilà M. Patrick Schmied, signataire en sa qualité de président du PDC des encarts en question, qui serait prêt à renier sa signature ! Que M. Blanc joue son rôle habituel de girouette, je ne suis pas étonné ! Mais que M. Patrick Schmied, président du PDC, fasse de même, cela, franchement, je ne peux pas le croire ! Alors, j'espère que c'était une mauvaise introduction de la part de M. Blanc...
M. Gilbert Catelain (UDC). Le budget, comme vous le savez, est un outil de conduite de l'action de l'Etat. Un bon budget n'est pas seulement un budget équilibré, il faut qu'il soit suffisamment resserré, afin de préserver les intérêts des bénéficiaires de l'aide sociale et ceux des contribuables. Bref, un bon budget, c'est un peu comme une mini-jupe: suffisamment courte et serrée pour couvrir l'essentiel tout en suscitant l'intérêt ! (Rires, exclamations et huées.)On verra bien à la fin de l'année si les recettes auront couvert l'essentiel des charges. Comme beaucoup de Genevois, je ne crois plus au Père Noël ! Le système en partie verrouillé par des lois de subventions votées par la gauche le prouvera.
Je regrette l'absence de priorités, notamment dans le domaine de la police et de la justice qui restent les parents pauvres de ce budget.
Contrairement aux apparences, le projet de budget 2002 n'est pas aussi équilibré que veulent bien le dire certains, notamment M. Hausser.
Le taux d'autofinancement est beaucoup plus bas que celui annoncé par le département des finances et certaines estimations de recettes sont manifestement surévaluées. Or, la meilleure façon de maintenir un niveau de salaire attractif dans la fonction publique passe par un budget rigoureux. En deux ans, les dépenses de l'Etat auront progressé d'environ 13,5%. L'évolution du budget et du coût de la vie, sur la base des pages 71 et 72 du projet de loi et sur la base des statistiques de l'OCS, fait apparaître les constatations suivantes: le train de vie de l'Etat aura progressé de 30,7% au cours des quatre dernières années, soit six fois plus vite que le coût de la vie, puisque, je le rappelle, le budget 98 était de 5 milliards. Il s'agit d'un véritable racket fiscal que rien ne justifie !
Le plus frappant dans ce budget est l'absence de justification au sujet des augmentations massives de certains postes budgétaires ou de subventions à certaines associations.
Est-il indispensable, notamment, que le poste budgétaire «Solidarité femmes» augmente de 100% en un an? Que des subventions pour des associations professionnelles augmentent de 50% en un an? Que le poste budgétaire «Fournitures de bureau, imprimés, matériel», qui a augmenté de 50 à 400%, selon les offices en 99, soit reconduit? Que le budget du Groupe Sida-Genève passe à 5 millions l'an prochain, soit plus du double en deux ans? Que l'Orchestre de chambre de Genève voie sa subvention augmentée de 100%?
Et on pourrait allonger la liste...
Au demeurant, l'augmentation des charges de personnel, telle qu'elle apparaît dans le projet de loi, se monte à 11% environ entre 2000 et 2002. Dans certains offices du DASS, la hausse atteint le plus souvent 25 à 77% en deux ans. En 2002, le traitement moyen annuel du poste le plus élevé du DASS dépassera 300000F...
Contrairement à certaines affirmations, globalement aucune réduction de postes n'est envisagée... Au contraire, de nombreuses créations de postes sont prévues, y compris à l'hôpital où la politique de réduction de lits entraîne paradoxalement une hausse des effectifs ! Neuf cent septante-six nouveaux postes auraient été créés au DASS en deux ans, soit une augmentation de 7,27% ! Trois cent six nouveaux postes seront créés au sein de l'administration centrale en 2002, soit une augmentation de 2,4%. Ainsi, en 2002, le financement étatique des hôpitaux augmentera de 9,6%... A ce rythme-là, il dépassera le milliard de francs en 2006, ce qui représenterait une augmentation de 67% en six ans !
Alors que l'indice de confiance des consommateurs est au plus bas, que les indicateurs de l'activité économique donnent d'inquiétants signes de faiblesse, et au vu du message parfaitement clair que la grande majorité des électeurs genevois a exprimé le 2 décembre à l'occasion de la votation sur le frein à l'endettement, il est du devoir des représentants du peuple de remettre en question une hausse de 7% du budget de l'Etat et de respecter la volonté populaire.
Au demeurant et dans l'intérêt des catégories professionnelles qu'elle défend, la minorité ne doit pas perdre de vue que la fiscalité genevoise reste parmi les plus élevées de Suisse, que chaque jour plusieurs candidats à l'évasion fiscale s'adressent à l'Hôtel des finances et que l'entrée en vigueur des accords bilatéraux ne devrait qu'amplifier ce phénomène. En effet, nos voisins français tablent sur une progression démographique comprise entre 2 et 4% par an dès l'entrée en vigueur de ces accords, dont une bonne partie en provenance de Genève.
Quant aux effets pervers sur les finances publiques engendrés par la LAMal, cautionnés par M. Hausser et ses amis, ils ne facilitent pas la mise au point d'un budget resserré. Plutôt que donner un blanc-seing au Conseil d'Etat, rôle dans lequel M. Hausser excelle, je préfère quant à moi, dans l'intérêt des citoyens y compris des fonctionnaires, m'assurer que les ressources financières de l'Etat soient affectées au bon endroit et à bon escient.
En résumé, exprimé en euros - vous savez que l'euro vient de sortir en France, monnaie qui ne vaut déjà plus grand-chose, bien légère... (Exclamations.)
Une voix. C'est un peu facile !
M. Gilbert Catelain. ...pour les europhiles, notre budget aura progressé d'environ 25% en deux ans. Comme représentant du peuple, je ne peux pas souscrire à un budget qui alourdit la pression fiscale ! En clair, il serait sage d'exiger une réduction linéaire d'environ 9%. Il reste donc, grosso modo, 300 millions à trouver.
En tout état de cause, ce projet de budget n'est pas un cadeau de Noël pour la population laborieuse de ce canton, mais, au mieux, un cadeau empoisonné... Les députés UDC ne voteront donc probablement pas ce budget. (Applaudissements.)
Le président. Monsieur Iselin, il vous reste cinq minutes.
M. Robert Iselin (UDC). Il y a plus d'un demi-siècle, notre université avait une étoile en matière de bilan et, partant, de budget: le professeur Edouard Folliet.
Mine de renard, regard acéré, froide contemplation de la vie des sociétés, acuité de l'intelligence. Nous séchions deux ans, avec ce maître, sur des problèmes comptables autour d'un ouvrage qui se révélait à la lecture passionnant: «Le bilan dans les sociétés anonymes».
Puis venait, après ces deux célèbres années, la conclusion, tout à fait dans la ligne ironique du personnage: «Maintenant, je puis vous donner un conseil, oubliez si vous le voulez tout ce que je vous ai appris, mais n'oubliez jamais une chose: surveillez la vie privée du caissier !» (Exclamations.)
M. Olivier Vaucher. La caissière !
M. Robert Iselin. La caissière, c'est encore mieux ! ( Rires.)
Voilà! L'ennui avec le budget de l'Etat de Genève, c'est qu'il n'y a pas de caissier dont on puisse surveiller la vie, et on est obligé d'approcher celui-ci en observant les bons vieux principes: clarté des comptes proposés, comparaisons aisées avec les années précédentes, vérité des données, prudence des évaluations, sagesse des principes de gestion. Le naïf - et j'en suis un - qui débarque frais émoulu dans ces matières - je parle de finances étatiques - a rapidement les yeux écarquillés... On découvre l'existence d'un petit Etat et d'un grand Etat, ce qui a le don de mettre une âme de financier dans tous ses états... On découvre une économie des subventions d'une taille gargantuesque... On découvre, quand on parvient à lire à travers les chiffres, l'existence de royaumes dans lesquels bien malins sont ceux qui parviendront à pénétrer...
Et on prend brusquement conscience d'une paranoïa incroyable ! Le budget initial prévoyait une augmentation de postes - tenez-vous bien ! - de cinq cent soixante et une unités. Les dépenses sont allègrement budgétées à la hausse - moi, je dis 6,5%, mon collègue disait 7%, mais nous n'en sommes plus à un demi-pourcent près - alors que, depuis le début de l'année, la récession se développe.
Le train de vie de l'Etat a progressé de 30% en quatre ans. Les intérêts de la dette absorbent un million par jour. La dette elle-même ascende à des hauteurs vertigineuses, encore dépassées grâce à l'opération de sauvetage - elle était, il faut le dire, inévitable - de la Banque cantonale de Genève. Et, au milieu de cette sarabande assez infernale, une courageuse ministre des finances - non, Madame, je ne vous dis pas cela pour mieux vous tirer les oreilles par la suite, parce que jusqu'à preuve du contraire je suis convaincu de votre sincérité - qui se débat avec encore plus de vigueur qu'un diable dans un bénitier et qui réalise, sans vouloir trop l'avouer, à quel point la situation financière de l'Etat est grave.
La commission des finances, devant cette situation, s'est en quelque sorte rebellée et s'est livrée à un exercice fort difficile pour elle, car elle ne connaît pas les problèmes de l'intérieur. Elle s'est attelée à la recherche d'économies et, ce faisant, elle ne pouvait faire appel qu'à un seul support, à savoir la comparaison avec les chiffres des exercices précédents, en cherchant à subodorer les coins et les recoins où des économies étaient possibles.
Ont été trouvés, comme vous l'avez entendu, quelque 115 ou 120 millions supplémentaires, de sorte qu'en dépit de la tuile que cachait la Banque cantonale de Genève dans les replis de sa soutane, le budget boucle avec un léger excédent.
Le spectacle de cette recherche a montré quelques côtés pathétiques... Pathétiques, ces quinze membres, les représentants de la gauche contribuant parfois à l'action, recherchant désespérément, par-ci par-là, quelques millions à glaner... Pathétique, cette rencontre de la dernière heure avec tous les membres du gouvernement, comme pris au saut du lit, qui nous ont dit ne pas pouvoir faire mieux, et je les comprends... Car, en fait, les seuls qui peuvent collaborer efficacement à la mise au point d'un budget amélioré sont les hauts fonctionnaires des départements concernés, et il était bien trop tard pour les mobiliser. En effet, la santé financière de la République et canton de Genève ne pourra être rétablie et, partant, les impôts que la population de ce canton trouve beaucoup trop élevés - voir les votations de début décembre: il ne faut pas me faire croire, comme le dit M. Vaissade, que le Musée d'ethnographie a été repoussé parce que les Genevois n'aiment pas l'ethnographie; ils ont simplement refusé de dépenser plus de 100 millions pour un nouveau bâtiment - être sensiblement diminués qu'au prix d'une réorganisation totale et en profondeur de l'appareil étatique genevois, ce qui prendra bien quelques années.
Sur cet arrière-fond, comment traiter le budget qui nous est proposé? Il est, à mon avis, tout à fait certain qu'il est vain, en deux ou trois mois, d'espérer faire beaucoup mieux que ce que la commission des finances a fait, laquelle, pour la première fois en dix ans - je n'y étais pas, et je ne suis par conséquent pas tout à fait certain de l'information donnée par un collègue - a trouvé et imposé les économies que l'on sait, et ce avec la coopération positive de Mme la ministre des finances.
L'UDC n'a pas participé en profondeur à l'élaboration de ce budget et ne se sent donc pas responsable de celui-ci. Ses membres, en conséquence, soit s'abstiendront soit le refuseront, pour bien marquer le sérieux de la situation.
Mme Mariane Grobet-Wellner (S). Mesdames et Messieurs les députés... (Brouhaha.)Vous avez terminé, Monsieur Froidevaux? Je vous remercie de bien vouloir m'écouter !
Durant mes quatre années passées en commission des finances, jamais l'élaboration d'un budget n'a été aussi laborieuse...
Ce n'est que mercredi à 20h que la commission des finances a finalement voté le budget 2002 pour le présenter ce matin.
Les socialistes sont satisfaits que la commission des finances ait finalement su trouver un terrain d'entente, même si cela ne satisfait pas pleinement l'Entente et la nouvelle majorité de notre Grand Conseil, et ait ainsi évité d'infliger le régime des douzièmes provisionnels à notre canton.
Le vote de ce budget a été précédé et conditionné par de nombreux amendements dans le sens de charges revues à la baisse, proposés aussi bien par le Conseil d'Etat lui-même que par la nouvelle majorité de ce Grand Conseil.
Tout en n'étant pas favorable à la majorité de ces amendements, le groupe socialiste estime néanmoins que le projet de budget amendé sur lequel nous devons nous prononcer aujourd'hui est acceptable pour les raisons que je vais donner.
D'une manière générale, les mécanismes salariaux et la compensation du coût de la vie des fonctionnaires sont respectés. Reste toutefois ouverte la question de la compensation de la perte de pouvoir d'achat de 12,8% pendant les années de crise depuis 1990. La revalorisation justifiée du personnel soignant est concrétisée. L'engagement de personnel supplémentaire à l'office des poursuites est assuré. Ce renforcement est absolument indispensable pour assurer la remise en état de son fonctionnement dans l'intérêt de toute la population. Je n'entends polémiquer ici ni sur les causes des dysfonctionnements ni sur les responsabilités politiques du laisser-aller, mais seulement rappeler notre détermination à lui donner les moyens de fonctionner correctement.
L'augmentation du nombre de postes dans l'enseignement est concrétisée dans ce budget. Ces postes supplémentaires sont totalement indispensables afin de maintenir un enseignement de qualité, vu l'accroissement du nombre d'élèves aussi bien en primaire qu'au cycle d'orientation et au post-obligatoire. Les services de l'office de la jeunesse sont renforcés, bien qu'insuffisamment à notre avis, notamment au service du tuteur général et à la protection de la jeunesse. Les problèmes que rencontrent ces services sont connus de nous tous et il est urgent d'y remédier.
Nous saluons également l'effort supplémentaire figurant dans le budget pour assurer les soins dans les EMS et l'aide à domicile. Le vieillissement de la population est le facteur principal de cette augmentation de charges et nous devons y faire face de façon adéquate.
Enfin, le renforcement du personnel prévu au service du Grand Conseil devrait permettre d'assurer une meilleure efficacité de notre travail de députés de milice, notamment dans les commissions parlementaires.
Nous soulignons que ce budget prévoit une attribution à la réserve conjoncturelle de 32 millions. Ces dotations sont indispensables pour pouvoir faire face, en des temps de conjoncture difficile, aux besoins accrus et urgents de la population sur le plan social et aux diminutions, également conjoncturelles, de recettes sous forme de diminutions de rentrées fiscales.
En conclusion, même si ce budget ne nous satisfait pas sur plusieurs points, nous estimons néanmoins qu'il s'agit d'un bon budget, d'un budget réaliste - et non cosmétique - qui tient compte des besoins de la population. C'est la raison pour laquelle nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à le voter tout à l'heure tel qu'amendé.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, les chefs de groupe s'étaient mis d'accord de façon informelle sur le temps de parole imparti à chaque groupe. L'Alliance de gauche ne désirant plus respecter cet accord, je le lève. Tous les groupes peuvent donc continuer à prendre la parole autant de fois qu'ils le veulent, soit, selon notre règlement, trois fois par personne et dix minutes par personne.
Monsieur Luscher, vous avez la parole.
M. Christian Luscher (L). La nouvelle majorité a établi un programme, elle a fait des promesses, et nous estimons qu'elle doit s'y tenir; du moins, il faut lui laisser le temps nécessaire pour voir si c'est possible.
L'une des promesses qui a été faite par l'Entente en général est de réduire la dette et le déficit de l'Etat de Genève, dont aucun mot ne semble pouvoir qualifier l'ampleur... On entend des adjectifs comme «astronomique», «abyssal», «vertigineux»...
Toujours est-il que nous avons promis de faire des économies, et nous estimons aujourd'hui qu'il faut en faire davantage. Nous voulons donc respecter nos engagements et, quoi que puissent en penser certains, les commissaires du parti libéral, en commission des finances, ont parfaitement respecté l'engagement qu'ils ont pris auprès de leurs électeurs, et j'y reviendrai... (Commentaires et rires.)
Tout le monde connaît la parabole des vaches grasses et des vaches maigres, qui symbolise la bonne gestion des finances publiques consistant à accumuler des réserves en période d'abondance, même relative. En l'occurrence, notre canton, qui assume une dette à peu près du double de son chiffre d'affaires, doit saisir l'occasion de l'embellie qu'il connaît passagèrement pour réduire sensiblement cette dette.
Au lieu de cela, le budget qui nous est proposé aujourd'hui comporte un accroissement de 5% des dépenses, alors que la hausse conjoncturelle n'est guère supérieure à 1%. Face aux mesures drastiques et énergiques qu'impose la situation de nos finances publiques, les quelques économies consenties et enregistrées par la commission des finances font figure de concessions un peu molles.
Mesdames et Messieurs, chers collègues, le bateau prend l'eau, et aujourd'hui on nous tend une louche pour le vider... Or, ce n'est pas ce genre d'ustensiles dont nous avons besoin: nous avons besoin d'une puissante pompe avec des pompiers sachant la faire fonctionner à plein régime !
Les commissaires de l'Entente ont fait de nombreuses propositions en commission des finances dans le but de diminuer les dépenses...
Une voix. Vous avez des exemples?
M. Christian Luscher. J'aimerais juste faire remarquer qu'il y a quatre ans, lorsque l'Alternative a pris le pouvoir, son premier souci a été d'augmenter les dépenses et tous ses amendements sont allés dans ce sens. Aujourd'hui, la nouvelle majorité a fait ce qu'elle pouvait, en l'état, en commission des finances, pour réduire les dépenses, et j'aimerais féliciter les commissaires de cette nouvelle majorité d'avoir pu, en un mois, alors qu'ils devaient traiter un budget issu de l'ancienne majorité, trouver 120 millions d'économies, indiquant ainsi clairement aux électeurs qui nous ont élus que nous voulons aller dans le sens de nos promesses.
Nos commissaires n'ont pas trahi, loin de là ! Ils ont même tout à fait respecté leurs promesses, mais ils n'ont tout simplement pas eu le temps d'aller au bout de leur démarche. 120 millions, c'est déjà fantastique, mais, s'il faut faire des miracles, alors faisons-les: allons jusqu'au bout et donnons le temps à...
M. Claude Blanc. Donnons du temps au temps !
M. Christian Luscher. Donnons du temps au temps, exactement, Monsieur Blanc! Donnons plus de temps à la commission des finances pour qu'elle puisse encore réduire ce budget !
Pour ce faire, il conviendra d'examiner la possibilité de diminuer certaines subventions qu'il faudra passer au crible. Il faudra notamment analyser la possibilité de réduire certaines lignes budgétaires pour les dépenses régulièrement inférieures aux montants budgétés. Et pour cela, nous en appelons à l'aide de nos conseillers d'Etat.
Alors, certains diront que c'est une démarche irresponsable... Moi, je constate une chose depuis quelques semaines, depuis que je siège dans ce parlement, c'est que chaque fois que nous ne sommes pas d'accord avec l'Alternative, nous nous faisons traiter, principalement par M. Spielmann, d'irresponsables, de ridicules, de pas sérieux, voire de maffieux...
M. Jean Spielmann. Eh oui !
M. Christian Luscher. Il s'agit de toute évidence d'une insulte à notre égard. Et en nous insultant, vous insultez l'électorat, ce même électorat qui a réduit de façon très substantielle votre représentation, et pas encore à sa juste mesure ! (Rires.)
Cela étant, nous n'avons pas du tout le sentiment d'être irresponsables, loin de là. Notre démarche va dans le sens d'un assainissement de nos finances publiques. Remarquez, les libéraux ont l'habitude d'être traités d'irresponsables et d'escrocs... Vous vous souviendrez qu'il y a quelques années ils avaient proposé une baisse des impôts, dont tout le monde se félicite aujourd'hui et dont, en tout cas, une grande partie de ce parlement semble s'accommoder. Eh bien, loin d'être irresponsable, cette baisse d'impôts a été salutaire et j'aimerais juste rappeler, pour ceux qui disent qu'elle a été imposée par le parti libéral, qu'en réalité c'est le peuple dans sa grande sagesse qui en a décidé ainsi !
Ne pas accepter le budget aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas faire preuve d'irresponsabilité... Bien au contraire, c'est éviter de se reposer sur un oreiller de paresse ! Pourquoi? Parce qu'il nous faut être conséquents et responsables: si nous refusons ce budget, nous devrons de toute évidence proposer des solutions pour accompagner ce refus. En effet, refuser ne sert à rien en soi et personne dans ce parlement n'a été élu pour tout refuser systématiquement: nous avons été élus pour mettre en oeuvre un programme... (Commentaires.)Certains le font, mais il n'ont pas été élus pour cela !
En refusant ce budget, nous nous mettons la pression: nous nous obligeons à prendre des mesures rapides, efficaces... Nous nous obligeons à nous mettre tout de suite au travail, à faire preuve d'opiniâtreté pour modifier, si cela est nécessaire, les lois qui permettront de réduire la dette publique.
Nos commissaires doivent donc retourner au travail et continuer la mission qu'ils ont déjà commencé à accomplir. Le parti libéral pense en fin de compte qu'une enveloppe budgétaire doit être donnée au Conseil d'Etat et que c'est ensuite à ce dernier de faire au mieux avec ce montant, pour autant évidemment qu'il soit raisonnable, et le parti libéral n'a pas envie déraisonnable.
Pour conclure, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais dire une chose: le budget que nos commissaires ont dû traiter en un mois, dans l'urgence, est un héritage de l'ancienne majorité. En droit de succession, en cas d'héritage, l'héritier peut décider de répudier ou de garder cette succession. Eh bien, aujourd'hui, le parti libéral décide de la répudier ! (Applaudissements.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants. Il reste sept intervenants. Personne ne s'y oppose, il en sera donc fait ainsi.
Je vous passe la parole, Monsieur Bernard Lescaze.
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de minorité. Il convient tout de même de répondre à quelques propos qu'il n'est pas possible de laisser passer ainsi.
Il y a des gens qui développent des argumentations que l'on peut prendre au sérieux et d'autres moins. M. le député Hiler appartient à la première catégorie, M. le député Spielmann, à la seconde ! (Rires.)Mais M. le député Hiler se trompe parfois aussi... A juste titre, il a rappelé qu'il existait un peuple souverain, mais il oublie simplement que les changements de majorité qui ont eu lieu - d'abord de majorité parlementaire, puis les changements de personnes qui ont eu lieu sans modifier la majorité au Conseil d'Etat, et on sait que ceux-ci sont importants - ont été voulus par le peuple et qu'il appartient à des politiques responsables de tenir compte de ces changements. Il a rappelé qu'il s'était profondément investi, comme moi-même, dans le processus de la table ronde, dans les modifications de lois que celui-ci entraînait et, effectivement, nous avons dû enregistrer un vote populaire qui ne nous était pas favorable. La différence entre lui et moi, c'est qu'il semble toujours regretter le vote populaire de la table ronde, alors que, pour ma part, je l'ai accepté.
J'avais exprimé quelques hésitations quant à la possibilité de baisser les impôts... Le peuple et la réalité économique et financière de ce canton m'ont donné tort: j'en prends acte. La baisse a été raisonnable et, finalement, il faut bien constater que ce n'est probablement que par le contrôle du robinet financier que l'on peut arriver à limiter les dépenses publiques, ce qui est remarquable.
De même, M. le député Hiler, qui était très assidu à la commission des finances, sait très bien que les économies que j'ai proposées se montaient à plusieurs millions et non pas à quelques milliers de francs. Je n'insiste pas sur ce point, parce qu'il sait encore mieux que moi que 95% des dépenses de l'Etat sont liées et que, donc, la marge de manoeuvre de simples députés de milice, commissaires à la commission des finances, est extrêmement limitée.
Ce que je constate, c'est que sa brillante intelligence fait qu'en très peu de temps il est devenu - je me plais à le souligner - ultragouvernemental... Tant mieux pour lui ! J'espère quand même qu'il pourra voter quelques-uns des amendements qu'il ne connaît pas encore et que nous réservons, notamment dans le département d'un magistrat qu'il aime beaucoup...
Il est rapide: tel n'est pas le cas de M. le député Spielmann ! Ce dernier a mis trente ans avant de voter un budget... (Rires.)Je comprends qu'avec le zèle des néophytes il tente aujourd'hui de nous faire la leçon. Il nous accuse d'irresponsabilité... Après trente ans, c'est évidemment un orfèvre en la matière qui parle ! (Rires.)Il nous reproche des propositions qui lui paraissent modestes... Que ce Grand Conseil sache que le député Spielmann a lui aussi ses pauvres, ses pauvres certes très sympathiques, mais pour lesquels il propose toujours des dépenses et jamais des économies: ce sont les Mouettes genevoises, c'est la vaporisation des grands bateaux de la CGN... Ce sont certainement des projets extrêmement intéressants, mais il est tout de même bien obligé de constater que la CGN ne répond pas du tout aux attentes des Genevois, qu'elle veut même supprimer ses bureaux, etc. Alors, il y a là évidemment un double langage qui ne nous surprend pas, mais qu'il convient de dénoncer à un moment donné, surtout lorsqu'on se permet de lancer des attaques personnelles parfaitement déplacées dans cette enceinte !
Dans ces conditions, Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il faut saisir la balle au bond, c'est-à-dire la proposition faite par plusieurs groupes comme par moi-même de renvoyer ce budget à l'examen de la commission des finances et de rester modestes quant aux économies qu'il sera possible de faire, mais qui seront quand même des économies bien réelles. Et même si l'on peut grappiller quelques millions, cela sera toujours utile pour le bien public. Je me réjouis d'ailleurs de voir qu'une partie des amendements, y compris sans doute ceux du Conseil d'Etat, iront dans le sens d'une augmentation des dépenses, confirmant ainsi que nous ne voulons pas, nous, de cette politique.
M. Claude Blanc (PDC). J'ai été intéressé par l'exposé de M. Luscher, qui a commencé par dire que les membres libéraux de la commission des finances n'étaient pas des traîtres... Mais qui a pu penser dans ce parlement qu'il y avait des traîtres parmi nous? (Rires et exclamations.)Il fallait vraiment que M. Luscher en parle pour que ce mot nous vienne à l'esprit ! M. Luscher devait probablement avoir quelque chose à justifier...
J'ai ensuite entendu avec intérêt aussi les deux représentants de l'UDC. Je m'attendais à ce qu'allait dire le premier, mais le deuxième m'a davantage surpris, parce qu'après quelques va-et-vient en commission des finances, je crois bien me souvenir - peut-être ne s'en souvient-il pas, car il était 20h - qu'il a voté le budget dont nous discutons aujourd'hui. M. Kunz parlait de girouette: il y a de la bise et avec la bise les girouettes tournent plus vite que d'habitude ! (Rires et exclamations.)
Puisque j'en suis à faire le tour des popotes, je vais me tourner du côté de Mesdames et Messieurs les radicaux pour leur dire... (Commentaires.)Oh, pardon, chère Madame, je vous avais multipliée ! (Rires et exclamations.)Excusez-moi, Madame et Messieurs les radicaux, mais en matière de réforme de la fonction publique dont vous vous gargarisiez tout à l'heure, je voudrais tout de même vous rappeler que le parti démocrate-chrétien avait déposé quatre projets visant à réformer en profondeur la fonction publique. Je vous accorde que ces projets de lois auraient mérité d'être triturés, remaniés, qu'ils n'étaient pas parfaits... Mais qu'est-il arrivé en commission des finances, Messieurs les députés radicaux? Au bout d'une heure de discussion, d'un revers de main, la commission des finances a refusé d'entrer en matière sur nos projets. Et maintenant, on nous reproche de ne pas faire de propositions pour la réforme de la fonction publique ! La réforme de la fonction publique, soit dit en passant - puisqu'on en parle beaucoup - le jour où on voudra vraiment la faire et la rendre conforme aux nécessités du XXIe siècle alors qu'elle est encore axée - Mesdames et Messieurs de la gauche ne m'en voudront pas - sur le XIXe siècle, on aura fait un progrès important, mais je pense que la facture sera finalement plus lourde qu'elle ne l'est aujourd'hui. En effet, si on veut se mettre à rétribuer les gens selon leurs mérites, puisque c'est de cela qu'il s'agit, on s'apercevra peut-être qu'il faudra payer davantage un certain nombre de personnes.
Maintenant, j'en viens à vos propos, Monsieur Lescaze. Vous nous dites que l'on pourrait renvoyer ce projet en commission pour continuer à grappiller quelques millions... Franchement, je ne pense pas que ce soit du travail sérieux, Monsieur Lescaze: 500000 F pour ces pauvres gamins... (Le micro grésille.)Pourquoi est-ce que cela siffle ici? 500000 F pour ces pauvres gamins qui veulent aller à l'Expo, 360000 F pour les radars... Je vous l'ai dit en commission, Monsieur Lescaze, en tant que citoyen, je n'aime pas beaucoup les radars, mais, en tant que député responsable, je ne peux tout de même pas être d'accord d'empêcher la police de faire convenablement son travail, d'autant plus que la circulation est un grave problème.
500000 F pour la Fourchette verte... Le département de l'instruction publique veut faire une campagne auprès des élèves des écoles secondaires pour leur apprendre à manger sainement. Je crois que ce projet mérite tout de même d'être envisagé. Pourtant, vous dites non !
900000 F de crédit d'étude pour l'office cantonal de la population... Je vous rappelle quand même que nous étions de ceux qui ont refusé le projet de l'usine Kugler parce qu'il était disproportionné, mais il est évident que l'office cantonal de la population ne peut pas rester dans les locaux actuels et qu'il faudra bien trouver une solution. Alors, grappiller, comme vous le dites, quelques millions par-ci par-là et retourner en commission pour ce faire, je crois que cela ne vaut pas la peine, Monsieur Lescaze.
Quant à M. Kunz, alors, lui ! M. Kunz m'a traité de girouette... Je veux bien, mais je suis une girouette qui reste au Grand Conseil quand il est élu et qui ne part pas au bout d'une semaine parce que ça ne lui convient pas... (Exclamations.)Et, s'il me considère comme une girouette, la bise aujourd'hui me donne des ailes ! Moi, je le considère comme une feuille morte: il tombe des arbres en automne et il n'y remonte pas ! (Rires.)