République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 4 octobre 2001 à 17h
54e législature - 4e année - 12e session - 46e séance
P 878-A
La Commission des travaux a examiné la pétition 878 concernant l'extension du parking sous-lacustre le 12 septembre 2000 sous la présidence de Mme la députée Anita Cuénod. M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat et M. Jean-Daniel Favre (DAEL) assistaient aux travaux de la commission.
M. Jean-Daniel Favre rappelle que la requête préalable N° 16985 déposée en son temps pour l'extension du parking sous-lacustre n'avait pas abouti, en raison notamment du préavis défavorable de la Ville de Genève. Le dossier a donc dû être mis en suspens.
M. .
Un député relève que, depuis le dépôt de la pétition, les parkings de la Place-Neuve et des Nations ayant été rejetés en votation populaire, les commerçants des Rues Basses sont probablement confrontés à un problème de parking. Il demande si une concession de la Ville est nécessaire concernant l'aménagement de sorties voitures ou piétons. Le conseiller d'Etat explique que la Ville est souveraine quant à la mise à disposition du domaine public municipal. La partie du parking située directement en-dessous du lac relève du canton, le reste de la Ville, qu'il s'agisse de domaine public ou privé, puisqu'elle en est propriétaire. Seule une procédure d'expropriation pour utilité publique permettrait, le cas échéant, d'outrepasser son préavis négatif.
Sans vouloir faire de reproches à qui que ce soit, cette audition est si tardive qu'ils ont hésité lors de la convocation. En effet, la commission avait déjà traité cette pétition en 1994, mais même 10 ans plus tard, les problèmes restent inchangés. C'est une question de philosophie. Les citoyens pensaient que, comme dans toute ville disposant d'une zone piétonne, l'animation exigeait des parkings à proximité immédiate. On peut se demander si le parking du Mont-Blanc pourrait aujourd'hui être réalisé. Eu égard au projet d'agrandissement de la zone piétonne, il conviendrait d'étudier très sérieusement la possibilité d'extension du parking sous-lacustre. Ils préconisent la Petite-Fusterie ou le quai de la Machine pour les sorties. Toutefois, les récentes votations sur le parking de la Place Neuve incitent à se demander si négociations et compromis ont encore leur raison d'être. Les pétitionnaires concluent qu'il ne faudrait prendre actuellement aucune décision interdisant l'extension du parking, aujourd'hui ou dans 20 ans.
M. Jean de Toledo ajoute que l'extension du parking exige l'aménagement d'une sortie voitures supplémentaire. Lors des congés français par exemple, l'affluence est telle qu'il faut plus d'une demi-heure pour entrer ou sortir son véhicule. Cette sortie supplémentaire serait également nécessaire du simple point de vue de la sécurité. Quant à la sortie piétons, il en recommande la réalisation vers la place de la Petite-Fusterie. Il conclut son intervention en rappelant qu'il est coutumier des longs délais afférents aux autorisations, et rappelle qu'il avait fallu 14 ans avant de pouvoir commencer la construction du parking, sollicitée dans les années cinquante.
A la question d'un député concernant la collaboration entre le parking et les TPG, les pétitionnaires expliquent que, depuis 1996, le ticket d'entrée donne droit à 90 minutes de transport (subventionnées pour moitié par chaque partie, TPG et parking).
M. René Dénat confirme que la direction du parking du Mont-Blanc gère également ceux de Plainpalais et des Arcades.
Un député demande si les pétitionnaires sont informés que l'objet de leur pétition n'est pas réalisable aux termes du nouveau concept d'aménagement cantonal voté par le Grand Conseil. Il aimerait également savoir s'ils disposent du financement nécessaire, en cas d'approbation du projet. Enfin, il s'enquiert de leur avis quant à l'éventuelle évacuation de la clientèle sur la France en cas de non-construction de l'extension demandée, et l'incidence sur les commerces genevois et l'emploi (entrée dans les bilatérales, libre circulation des marchandises). Enfin, le démarrage du parking de Genève-Plage n'allège-t-il pas la pression sur celui du Mont-Blanc ?
M. Jean de Toledo rappelle que les Genevois achètent pour plus d'un milliard en France voisine et que ce sont pour la plupart des automobilistes dont la Ville souhaiterait précisément se débarrasser. Il souligne la gravité de cette hémorragie et la colonisation du centre-ville. L'erreur n'est pas attribuable à une orientation politique, l'initiateur de la politique des zones piétonnes ayant été un conseiller d'Etat du parti radical. M. de Toledo relève que les partisans de cette politique sont tous des avocats.
M. Dominique Ducret estime qu'il est incontestablement possible de créer une véritable zone piétonne à Genève, alors que cette ville ne s'est jamais donnée les moyens de convaincre la population des mérites d'une telle zone. Quant à la contradiction entre le projet d'extension et le nouveau concept d'aménagement, il souligne que les lois peuvent changer.
M. Jean de Toledo explique que l'abonnement est très cher. Il s'agit donc plutôt d'un forfait. Le parking compte environ 500 'abonnés' triés sur le volet - soit un tiers du nombre de places disponibles et que le parking du Mont-Blanc doit essentiellement servir à des stationnements de courte durée, permettant aux conducteurs d'aller dans les commerces.
Face à l'absence d'une véritable zone piétonne à Genève, contrairement à d'autres villes européennes (Berlin, Paris et en Italie) où la faveur accordée aux zones piétonnes se traduit par une augmentation du chiffre d'affaires des commerces soulignée par un député, M. Jean de Toledo réplique qu'il convient de faire la démonstration d'une zone piétonne attractive, or les places du Molard et de la Fusterie sont fort laides. Il préconise un éclairage, de jour comme de nuit, avec animation sur le quai promenade au-dessus du parking lacustre.
Plusieurs députés soulignent l'incompatibilité de l'objet de la pétition avec le concept d'aménagement voté en juin 2000.
Un tiers des utilisateurs du parking sont des abonnés, non des pendulaires, ce qui est considéré comme une proportion importante pour un parking qui aurait la vocation de vouloir accueillir principalement des clients de courte durée.
Un député libéral souligne la médiocrité de la zone piétonne du centre-ville. Il considère qu'une entrée en matière sur l'objet de la pétition devrait au moins être assortie d'un certain nombre de conditions, entre autres une régression des abonnements pour favoriser le parking de courte durée et assurer un élargissement et une amélioration de la qualité de la zone piétonne. Contrairement à la conclusion d'un des pétitionnaires, il estime que des enseignements peuvent être tirés de la votation sur la Place Neuve et qu'il y a place pour plusieurs opinions, les opposants au parking en question n'ayant pas obtenu une majorité écrasante.
Pour un autre député libéral, Genève est en retard par rapport à de nombreuses autres villes de même importance, qui ont réussi à créer une zone piétonne attractive, importante et aux commerces florissants. Il n'a jamais vu d'étude sérieuse sur la solution de l'accessibilité des personnes de tout bord (clientèle des commerces, habitants et pendulaires). Il conviendrait d'obtenir des chiffres (sur les TPG, les parkings d'échange, la répartition des différentes catégories précitées), à l'appui desquels prendre une décision politique orientant toute la stratégie concernant la zone piétonne souhaitée au centre-ville.
Pour les députés socialistes et ceux de l'alliance de gauche, l'amélioration de la qualité de l'aménagement au centre-ville doit se faire rapidement, une extension de la zone piétonne est nécessaire, la suppression de la circulation à la rue du Rhône doit être rapidement concrétisée. Que le plan directeur de l'aménagement du territoire soit clair et limpide en ce qui concerne les parkings. L'extension du parking sous-lacustre ne fera que rendre le centre-ville plus désagréable ; la réalisation des parcs d'échanges et le renforcement des transports publics sont les seules mesures permettant d'améliorer la qualité de vie au centre-ville.
Le renvoi au Conseil d'Etat est appuyé par 6 OUI (3 L, 2 DC, 1 R) contre 6 NON (3 AdG, 3 S).
Cette pétition sera donc déposée sur le bureau du Grand Conseil.
Le rapporteur vous invite, au nom de la Commission des travaux, à suivre ses conclusions.
Les soussignés,
constatant que la circulation au centre-ville est toujours plus difficile, notamment en raison du manque de places de parking ;
constatant que les transports publics qu'il convient d'encourager ne suffisent pas à répondre à tous les besoins de ceux (habitants, commerçants, clients, visiteurs, etc.) qui sont contraints d'utiliser un véhicule privé pour s'y rendre ou exercer leur profession ;
invitent le Grand Conseil de la République et canton de Genève
à octroyer sans délai la concession permettant l'extension du parking sous-lacustre.
Débat
M. Dominique Hausser (S), rapporteur. La commission des travaux a examiné cette pétition à la fin de l'année dernière et après avoir auditionné les pétitionnaires vous propose de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
M. Jean-Pierre Gardiol (L). Bien entendu, notre parti vous propose d'envoyer cette pétition au Conseil d'Etat. Nous relevons qu'en commission il y avait eu égalité des voix. Ceci dit, ce qui m'a le plus frappé lors des travaux de la commission, c'est la réponse du conseiller d'Etat Laurent Moutinot qui s'est retranché derrière le concept d'aménagement du territoire adopté par le Grand Conseil le 8 juin 2000, concept que notre parti avait refusé. Comment est-il possible qu'un magistrat du rang de celui de M. Moutinot puisse simplement se retrancher derrière quelques lignes d'un concept pour prendre position par rapport à cette pétition, faisant fi de l'avis des commerçants du centre-ville, créateurs d'un nombre important de places de travail dans notre canton ? Je pense qu'une telle position n'aurait jamais été tenue par un magistrat socialiste français ou anglais, démontrant l'esprit étroit de la gauche genevoise sur les problèmes de circulation et de parking.
Notre parti a toujours défendu la politique du libre choix des transports et bien entendu nous sommes favorables à l'extension du parking sous-lacustre, car nous sommes convaincus que si nous n'offrons pas des places de parking au centre-ville, juste à côté des commerces, nous enverrons les clients à la périphérie. Or, la périphérie de Genève, si vous l'ignorez, Monsieur le rapporteur, c'est la France. Comme l'a indiqué M. Jean de Tolédo en commission c'est déjà plus d'un milliard de francs de chiffre d'affaire qui est réalisé dans les commerces en France voisine. C'est là le résultat de votre politique.
Sans entrer dans les détails, un récent sondage d'opinion, réalisé auprès de plus de 16'000 personnes et paru dans la « Neue Zürcher Zeitung » du 4 juillet dernier, indiquait sans équivoque que les clients aiment faire leurs achats en ville à condition que des places de stationnement soient disponibles à côté des magasins. En outre, même les usagers des transports publics déclaraient que les opportunités de parcage sont insuffisantes. De la même manière, mais pour le seul canton de Genève, le Trade Club en 1999 avait effectué une enquête sur la clientèle du centre-ville dont une des conclusions mettait en avant que la population faisant son shopping au centre-ville était favorable à l'aménagement de parkings supplémentaires. Si ce voeu n'est pas respecté, cette clientèle se rendra dans les commerces de France voisine.
Bien entendu, vous me répondrez qu'en votation populaire tous les parkings ont été balayés : place Neuve, Alhambra, etc. Cependant, dans ces cas, ce n'était que la Ville de Genève qui votait, à notre grand regret. En outre vous aviez tout fait alors pour torpiller ces projets et c'est pourquoi je peux dire que c'est grâce à votre politique que nous avons le plus haut taux de chômage de Suisse. Mesdames et Messieurs les députés, les opposants à l'extension du parking fondent leur refus sur le fait que, selon eux, un parking est un aspirateur de voitures. En réalité, c'est un aspirateur de clients, et des meilleurs clients qui génèrent un nombre important de places de travail. Il faut donc aujourd'hui constater, Monsieur Moutinot, mais cela vous vous en fichez certainement, que tous les commerces qui en avaient les moyens ont rejoint les centres commerciaux de la périphérie. Il est grand temps de se préoccuper des commerces moyens et plus encore des petits commerces de proximité qui subsistent au centre-ville. Comment ? En faisant bénéficier le centre-ville de la même politique qui a fait le succès des centres Migros, Coop, et des centres d'achat de France voisine. L'extension du parking du Mont-Blanc est une mesure qui me semble aller dans le bon sens.
Pour conclure, nous notons également que l'idée de transformer le centre-ville en un lieu de flânerie et de promenade ne résiste pas à la réalité. En effet, le dimanche, il n'y a presque pas de voitures et donc pas de problèmes de circulation, ni de problèmes de stationnement, mais la ville, ce jour-là, est déserte. Les promeneurs ne sont pas fous : ils choisissent d'autres lieux pour se promener, la campagne, le Salève ou nos très beaux parcs. Le centre-ville ne s'anime que lorsque les commerces sont ouverts et la règle No parking, No businness, No animation est valable dans tous les pays. Votons donc le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)
M. Michel Ducret (R). Après le refus des parkings de l'Alhambra, de la place Neuve, de Grenus qui, à l'exception du premier cité, ont tous été prévus dans Circulation 2000, document qui jusqu'à nouvel ordre est toujours valable, il faut bien trouver des solutions pour remplir les conditions imposées par ce plan. Jusqu'à aujourd'hui on a pris essentiellement des mesures de restriction. Les mesures positives, qui visent à changer le système de circulation, à développer les transports publics, à équiper la ville en parking en fonction des emplacements des zones piétonnes : toutes ces mesures n'ont pas été appliquées, ou très peu. Il faut donc trouver une solution, et la proposition d'étendre le parking sous-lacustre existant en est une que nous ne devons pas négliger. C'est pourquoi il convient de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat et non pas de l'oublier sur la table de ce Grand Conseil.
Ce renvoi a un but : éviter que le centre-ville de Genève ne devienne un downtown à l'américaine, où plus personne ne va en dehors des heures auxquelles les grands commerces sont ouverts. C'est d'autant plus dommage qu'on a fait beaucoup d'efforts à Genève pour maintenir des habitants en ville et que ces efforts sont payés de réussite. (L'orateur est interpellé.) C'est effectivement grâce à la LDTR, Monsieur Etienne, je l'ai toujours admis et reconnu. Cela ne suffit pas néanmoins pour faire le bonheur des gens et pour que ce centre-ville reste un endroit attractif et touristique. Je pense simplement que si l'on veut augmenter la surface dévolue aux piétons, ce qui est actuellement dans les projets de la Ville de Genève, l'équipement en parkings pour les clients et les visiteurs du centre-ville est indispensable. Ces équipements manquent et je répète qu'ils étaient prévus par Circulation 2000. Cette pétition nous donne une possibilité de remplacer ceux qui, jusqu'à maintenant, ont été refusés par les habitants et citoyens de la Ville de Genève.
M. Dominique Hausser (S), rapporteur. Quand M. Gardiol parle d'étroitesse d'esprit, je crois qu'il ferait mieux de dire qu'il y a deux visions de l'aménagement de l'espace urbain. En France, quelle que soit d'ailleurs la couleur politique des municipalités, les centres-villes, y compris les parties commerciales, sont des zones piétonnes et les parkings sont situés en périphérie. Je peux vous citer des exemples partout en France : Toulouse, Caen, Annecy, etc.
Par ailleurs, lorsque vous parlez du centre-ville, vous désignez en réalité l'hyper centre. Vous pensez à une rue, une rue et demie, et je peux vous dire qu'aujourd'hui les propositions qui sont faites en terme de parking d'échange sont bel et bien à l'entrée de la ville, que ce soit Genève-Plage, que ce soit le parking de l'Etoile, que ce soit demain le parking de Sécheron. Ces parkings ne sont pas à l'extérieur de la ville, mais bien déjà au centre de celle-ci. Enfin, nous avons pu constater que, lors du dernier samedi sans voiture, le 22 septembre, les rues Basses étaient particulièrement achalandées. Il était impossible de circuler tant il y avait de monde. (Brouhaha.) C'est dire que l'on peut imaginer un centre-ville commercial dépourvu de ces aspirateurs à voitures que sont les parkings. Ce n'est pas votre politique que nous voulons, nous voulons une politique qui améliore la qualité de vie et donc qui diminue le nombre de véhicules en ville.
M. Michel Parrat (PDC). Sans vouloir ajouter un long discours à ce qui a été dit, j'aimerais relever qu'il manque un élément essentiel à la politique genevoise des parkings, ce sont des parkings pour l'hyper centre. Ces parkings doivent être exclusivement réservés à l'usage des gens qui viennent acheter et qui viennent donc nourrir le centre. La politique des parkings dits de relais est une très bonne politique, mais la première fonction des parkings de relais est d'empêcher les gens qui travaillent au centre de venir avec leur voiture. On voit que les grandes villes françaises, et je ne suis pas d'accord avec votre analyse, Monsieur Hausser, disposent de parkings proches du centre. C'est le cas à Lyon par exemple.
Pour Genève, nous avons des possibilités, parmi lesquelles le parking sous-lacustre qui est excessivement bien situé et qui devrait être réservé exclusivement aux usagers des commerces. Je crois qu'à Genève, dans les concepts, il manque cette échelle-là. Nous ne pouvons pas résoudre tous les problèmes en construisant seulement des parkings en périphérie, particulièrement destinés aux gens qui viennent travailler sur Genève et qui restent 8 heures à leur poste de travail. Il manque, je le répète, des parkings de proximité, des parkings dans l'hyper centre. On prétend favoriser les résidents avec les macarons et les visiteurs avec les zones bleues. Si vous allez dans l'hyper centre, il vous faudra bien du courage pour trouver des zones bleues !
Je crois que Genève ne pourra pas s'épargner d'ouvrir cette discussion. On la repousse, on mène une guerre des tranchées entre transports publics et transports privés. Il est nécessaire de trouver un juste équilibre entre les deux, mais pour cela, il ne faut pas être hypocrite, il faut affirmer que les parkings de l'hyper centre doivent être réservés aux gens qui viennent consommer et que les gens qui viennent travailler au centre doivent en être exclus. Cela signifie, concrètement, que les abonnements doivent être limités à l'extrême dans ce type de parking. Si nous sommes clairs sur cet aspect, je pense que nous trouverons un terrain d'entente.
M. Christian Brunier (S). Nous sommes bien sûr opposés à l'extension de ce parking, parce que, Monsieur Gardiol, nous voulons respecter la conception cantonale de l'aménagement. Vous banalisez totalement cette conception. Vous prétendez que M. Moutinot se cache derrière ce concept dont vous dites qu'il se résume à quelques lignes. Eh bien ce n'est pas le cas ! Ce concept est une ligne directrice au niveau de la politique et cette ligne directrice a été votée par la majorité de ce parlement. Je crois qu'il est normal que le Conseil d'Etat dise qu'il respecte la conception cantonale en matière d'aménagement.
Nous avons eu souvent un débat idéologique sur les parking. Je vous propose d'en sortir aujourd'hui et de parler simplement d'évidences : il est évident, et personne ne peut honnêtement prétendre le contraire, qu'à terme il est impossible que chaque Genevoise et Genevois puisse venir en voiture au centre-ville. Si nous permettons cela, nous allons asphyxier complètement cette ville, nous allons la bloquer au niveau de la circulation. Cela vous le savez parfaitement et votre argumentation est donc uniquement dogmatique. Vous devriez plutôt tenir compte des évidences et des statistiques. Je vous rappelle que le département de M. Ramseyer, que l'on ne peut pas vraiment qualifier d'homme de gauche, a démontré à plusieurs reprises que le nombre de voitures deviendrait incontrôlable si nous ne prenions pas immédiatement des mesures draconiennes en matière de circulation. Une de ces mesures consiste en l'arrêt du développement de l'infrastructure routière, afin d'épargner à Genève une asphyxie totale.
Mesdames et Messieurs les députés de droite, l'argument de la défense des petits commerces ne tient pas un instant dans votre bouche. C'est vous qui favorisez continuellement l'extension des centres commerciaux en périphérie. C'est vous qui favorisez le grand commerce au détriment des petits et moyens commerçants. Il faut assumer votre politique d'aménagement du territoire qui favorise la concentration dans les grandes surfaces et la domination des petits commerces par les grands centres. Notre politique est très claire : nous voulons des P+R couplés à un réseau de transports publics efficace et nous voulons un centre-ville convivial qui attire les gens, mais qui les attire avant tout pour leur plaisir. Nous savons fort bien que les zones piétonnes dans les centres-villes induisent de la consommation et instaurent une bonne ambiance. Voilà quel est notre projet de société et je crois que c'est un projet qui est favorable aux commerces, qui est favorable à la population et c'est dans ce sens que nous voulons agir.
Je rappellerai encore à M. Gardiol qu'une étude vient d'être publiée sur le mode de consommation des genevoises et des genevois. Cette étude montre que celles et ceux qui consomment le plus sont les personnes qui se rendent dans les commerces à pied ou en transports publics, et non pas en voiture.
M. Gilles Desplanches (L). Je m'aperçois que M. Brunier a particulièrement peu de mémoire. En effet, il y a peu de temps, Mme Erbeia, qui représente les consommateurs est venue nous dire toute l'importance qu'ont les parkings pour le centre-ville et les commerces de détail. Alors M. Brunier a une mémoire très sélective ainsi que M. Hausser, qui sont tout deux des fossoyeurs de l'économie et plus particulièrement du commerce de détail.
Maintenant, vous nous parlez de parkings de proximité et, dans le même temps, vous proposez aux clients genevois de se parquer au parking de l'Etoile pour faire leurs courses au centre-ville. Lorsque j'entends cela, je me dis que c'est vous qui êtes dogmatiques. Vous cherchez seulement à pénaliser le commerce de détail et le petit commerce. Monsieur Brunier, si réellement vous n'avez pas le temps de vous rendre au centre-ville, je me ferais un plaisir de vous faire visiter les petits commerces qui sont au centre-ville. Il y en a de nombreux et pas seulement sur la rue de la Confédération, il y en a aussi sur le quai des Bergues. Ce que je vous propose, Monsieur Brunier, c'est que samedi prochain nous fassions un tour ensemble et je vous ferai découvrir ces innombrables petits commerces.
Je rappellerai également qu'une enquête a été publiée récemment qui montre qu'une place de parking génère 235'000 F de chiffre d'affaire. Cela représente un emploi et demi. On a très bien compris que les socialistes du Grand Conseil ne sont pas attachés à l'emploi. Nous les libéraux nous entendons préserver l'emploi, et nous vous le prouverons.
M. Jean-Pierre Gardiol (L). Effectivement M. Hausser se trompe dans l'analyse qu'il fait des parkings d'échange. Il ne faut pas confondre les parkings d'échange à Genève avec les parkings qui sont construits en France juste à côté des centres commerciaux. Lorsque vous allez en France, à Lyon, à Annecy ou ailleurs, vous allez à pied dans le commerce où vous souhaitez vous rendre, directement depuis le parking. Ici à Genève, vous devez prendre un transport en commun entre le parking et le commerce.
M. Brunier nous cite le concept cantonal d'aménagement. Je vous rappelle que nous ne le partageons pas : nous ne l'avons pas voté. Avec ce concept, vous poussez les entreprises à partir s'établir ailleurs car, le plan cantonal ne prévoit aucune facilité pour elles. Cela décourage les entrepreneurs. Je rejoins pour conclure mon ami Desplanches qui dit que durant ces quatre ans vous avez été les fossoyeurs de l'économie genevoise et des petits commerces et vous persistez dans cette voie. (Brouhaha.)
M. Pierre Ducrest (L). Lorsque l'on est englué dans la doctrine, on en perd le sens des réalités. C'est un peu le spectacle que nous offrent MM. Hausser et Brunier. Ils ont le cerveau plein d'idées reçues qui ne correspondent pas à la réalité. Voyez-vous, lorsque vous voulez faire des comparaisons avec d'autres villes, vous vous trompez. La place Bellecour à Lyon donnant sur la rue Victor Hugo est le centre de la ville et pourtant il y a des parkings. Les parkings de la Tour sont dans la ceinture. A Paris on peut penser à Beaubourg, au boulevard Henri IV qui sont situés dans le Marais et destinés aux clients des petits commerces. Voilà de nombreux exemples qui fonctionnent pour le plus grand bonheur des commerçants et des clients de ces différents commerces.
Genève, Mesdames et Messieurs, est un cas particulier. Nous avons une rive droite et une rive gauche avec un lac entre les deux. Ce lac est suivi par un fleuve. Ainsi, lorsque ce parking sous-lacustre a été construit il n'a pas empiété sur la rive, il s'est installé sous l'eau sans gêner personne. Aujourd'hui, il est victime de son succès, car sa dimension est limitée. Cette limite restreint à son tour le chiffre d'affaire des commerçants alentour. En refusant le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat, vous acceptez implicitement de faire mourir le petit commerce. On ne vous demande pas en effet de construire un aspirateur à voitures, mais seulement de faire en sorte que les places de stationnement nécessaires soient disponibles. Je vous rappelle pour terminer que les voitures sont une source de revenu non seulement pour les commerces, mais aussi sur le plan fiscal. Je vous recommande donc de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.
M. Michel Ducret (R). Tout d'abord, j'aimerais indiquer que le commerce va là où il y a des clients et non l'inverse. Alors, lorsque les commerces se seront déplacés vers la périphérie, on entendra pleurer les mêmes qui aujourd'hui refusent le renvoi de cette pétition. Ils diront qu'il y a des pertes d'emploi dans le centre-ville et des problèmes sociaux.
Par ailleurs, je remarque que tout le monde parle des problèmes qui se posent durant la journée. Il faudra bien un jour que l'on commence à réfléchir à ce qui se passe en dehors des heures d'ouverture des magasins dans les zones où l'on veut limiter la circulation. Ces problèmes-là ne peuvent pas être négligés. En effet, les restrictions de circulation entraînent des modifications des types de commerces qui sont offerts dans les quartiers.
Je note une nouvelle fois que les doctrinaires ne voyagent pas, ne se renseignent pas. Ils assènent ici des contrevérités en croyant sincèrement avoir raison, mais nous savons qu'ils se trompent. Ainsi, quand M. Hausser nous cite les exemples français, il y a de quoi rire. En effet, dans les villes françaises, le taux d'utilisation des transports collectifs pour accéder au centre-ville ne dépasse jamais 20%, à l'exception de Paris qui est un cas très particulier. Pourtant, d'énormes efforts ont été faits pour implanter de nouvelles lignes de tramway, voire de métro. A Lille, ce taux n'atteint pas 15%, Mesdames et Messieurs, en dépit des investissements énormes consentis pour les transports collectifs. Il n'y a donc pas de corrélation directe entre le développement des transports publics et le comportement des usagers. A Genève, je vous le rappelle, pour l'accès à l'hypercentre, nous avons un taux d'utilisation des transports publics qui dépasse 50%. Cela signifie que nous sommes à un seuil où la hausse de report modal que l'on peut espérer, quelques mesures que l'on prenne, sera limitée. Nous arrivons dans la frange d'usagers qui ne se reporteront jamais sur les transports publics. C'est cela qui entraînera le départ des commerces et des activités vers la périphérie. Je vous invite tous, d'un côté comme de l'autre, à réfléchir à ces données-là, car elles sont importantes.
Enfin, pour faire un sort aux fausses affirmations entendues dans cette salle, je vous dirai, Monsieur Hausser, que le centre-ville ne commence pas à la Nautique. Si c'était le cas, les limites de la ville se situeraient à la douane d'Anières. Personnellement, je le souhaiterais, mais je crois que ce Grand Conseil, presque à l'unanimité, n'a pas voulu la fusion des communes et de l'Etat. Je suis un des seuls à avoir soutenu ce projet émanant du Conseil d'Etat et je continue à penser que ce serait une bonne solution. Je trouve un peu piquant que ce soit vous, Monsieur Hausser, qui vous en réclamiez, alors que le parti socialiste a été un des premiers à s'opposer à cette proposition !
Mme Dolorès Loly Bolay (HP). J'aimerais réagir aux propos de M. Desplanches et de M. Gardiol. Je crois, Monsieur Desplanches, que vous avez raté une occasion de vous taire. Lorsque vous affirmez qu'il n'y a que les libéraux pour venir en aide aux petits commerçants, vous allez un peu trop loin et vous le savez. Monsieur Gardiol, à chaque débat vous nous répétez qu'il y a un milliard de francs qui est dépensé en France voisine. Vous avez raison, mais vous savez aussi que les causes de cette situation n'ont rien à voir avec le manque de parkings à Genève. J'aimerais vous demander, Messieurs les libéraux, ce que vous faites le week-end. Je crois que vous jouez tous au golf et que vous ne venez pas en Ville de Genève pour voir ce qui se passe. (Brouhaha.)
Je voudrais relever aussi que Genève est la ville de Suisse dans laquelle il y a le plus de parkings. Le parking sous-lacustre est peut-être plein, mais le parking de Saint-Antoine est vide, le parking de Rive est vide, le parking de l'hôtel des finances est vides, le parking de l'université est encore vide ! Le parking de Plainpalais lui n'est qu'à moitié vide grâce au marché aux puces. Ainsi, Mesdames et Messieurs les députés d'en face, je crois que cet après-midi vous ne voulez qu'une chose : allonger le débat pour empêcher ce conseil de traiter d'autres objets. Je vous demande donc de couper court et de suivre notre proposition.
M. Gilles Desplanches (L). Je vous répondrai seulement, Madame Bolay, que je n'ai pas le temps de faire du golf parce que, moi, je travaille le samedi, ce qui n'est pas votre cas. J'aimerais aussi rappeler que M. Gardiol est quincaillier, c'est donc lui aussi un petit commerçant. Alors, Madame Bolay, je vais vous donner l'occasion d'épauler le commerce de détail en soutenant cette pétition et en la renvoyant au Conseil d'Etat.
Un mot encore. Tout à l'heure, il a été fait mention de la journée sans voiture. Ce qu'il faut savoir, c'est que c'était aussi la journée au cours de laquelle il y a eu le plus de clients à Balexert, au point que les gens ne pouvaient plus entrer. Cela montre très clairement que les gens ne sont pas allés au centre-ville, mais se sont rendus en périphérie.
M. Pierre Ducrest (L). Puisque nous ne sommes pas au golf, mais loin de nos entreprises, pour nous retrouver ici à une séance supplémentaire, je demande le vote par appel nominal sur ce point, pour prouver que nous ne sommes pas en train de nous amuser.
M. Laurent Moutinot. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai été quelque peu surpris que M. Gardiol me reproche de m'en tenir au plan directeur cantonal. Que ce plan vous plaise ou non - et certains chapitres ne me plaisent pas non plus - il sera appliqué et je le dis sans faiblesse et sans haine. Il ne faut pas s'attendre, sur aucun chapitre, à ce que je m'écarte de ce plan. Par conséquent, s'agissant de ce parking, il était légitime de se demander ce que disait le plan. Ce qu'il dit, c'est que l'on ne doit pas avoir de parking au centre-ville qui favorise l'apport de nouveaux véhicules. Or il s'est avéré, et M. de Tolédo notamment nous l'a confirmé, que ce parking est occupé, pour une partie non négligeable, par des abonnés. Parallèlement à cela, il est dit dans le plan que le parking dans le centre-ville est réservé aux résidents - ce qui est parfaitement normal si l'on veut conserver des habitants en ville - et aux visiteurs - ce qui est parfaitement normal pour les commerces. Ainsi, tant qu'il y a des abonnés pendulaires dans ce parking, il est absolument exclu de l'agrandir.
En d'autres termes, si un parking doit être construit ou agrandi au centre-ville, il faudra qu'il respecte très clairement les conditions posées par le plan directeur, à savoir dans le cadre d'un transfert modal, avec le plus possible de parkings d'échange. Dès lors, s'il doit y avoir des parkings à l'intérieur, ce qui n'est pas exclu par le plan, ils doivent répondre aux conditions que je viens de rappeler. C'est la raison pour laquelle je ne peux que vous inviter à déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Je rappellerai pour conclure qu'en ce qui concerne très concrètement un tel ouvrage, une partie passe forcément par la Ville de Genève, non seulement pour préavis, mais aussi parce que le domaine public municipal ne peut être touché sans l'accord du légitime détenteur de l'autorité publique sur ledit territoire. (Applaudissements.)
La présidente. L'appel nominal a été demandé. La demande est appuyée, nous allons donc y procéder. La procédure est un peu complexe, car il y a deux propositions que je vais opposer. Ainsi, celles et ceux qui soutiennent le renvoi au Conseil d'Etat votent oui ; celles et ceux qui soutiennent le dépôt de la pétition sur le bureau votent non. En effet, en cas d'égalité ou de doute, la question est posée de manière que les partisans aient à ce prononcer affirmativement. Je pars du principe que les pétitionnaires et ceux qui soutiennent la pétition sont favorables au renvoi.
Je vous demande de vous asseoir Mesdames et Messieurs, et je passe rapidement la parole à M. Gardiol qui l'a demandée.
M. Jean-Pierre Gardiol (L). J'ai apprécié la réponse du président Moutinot. J'espère que si par hasard, qui sait, ce plan cantonal était prochainement modifié, vous l'appliquerez avec autant de zèle.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des travaux (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont rejetées par 41 non contre 33 oui.
Ont voté non (41) :
Charles Beer (S)
Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)
Jacques Boesch (AG)
Dolorès Loly Bolay (HP)
Anne Briol (Ve)
Roberto Broggini (Ve)
Christian Brunier (S)
Fabienne Bugnon (Ve)
Nicole Castioni-Jaquet (S)
Alain Charbonnier (S)
Bernard Clerc (AG)
Jacqueline Cogne (S)
Jean-François Courvoisier (S)
Pierre-Alain Cristin (S)
Anita Cuénod (AG)
Jeannine de Haller (AG)
René Ecuyer (AG)
Alain Etienne (S)
Laurence Fehlmann Rielle (S)
Magdalena Filipowski (AG)
Anita Frei (Ve)
Morgane Gauthier (Ve)
Alexandra Gobet (S)
Gilles Godinat (AG)
Mireille Gossauer-Zurcher (S)
Mariane Grobet-Wellner (S)
Christian Grobet (AG)
Cécile Guendouz (AG)
Dominique Hausser (S)
David Hiler (Ve)
Antonio Hodgers (Ve)
Georges Krebs (Ve)
Myriam Lonfat (HP)
Pierre Meyll (AG)
Danielle Oppliger (HP)
Albert Rodrik (S)
Christine Sayegh (S)
Françoise Schenk-Gottret (S)
Pierre Vanek (AG)
Alberto Velasco (S)
Salika Wenger (AG)
Ont voté oui (33) :
Luc Barthassat (DC)
Roger Beer (R)
Jacques Béné (L)
Janine Berberat (L)
Claude Blanc (DC)
Thomas Büchi (R)
Marie-Françoise de Tassigny (R)
Gilles Desplanches (L)
Daniel Ducommun (R)
Pierre Ducrest (L)
Michel Ducret (R)
Henri Duvillard (DC)
Jacques Fritz (L)
Pierre Froidevaux (R)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Nelly Guichard (DC)
Janine Hagmann (L)
Yvonne Humbert (L)
René Koechlin (L)
Bernard Lescaze (R)
Pierre Marti (DC)
Alain-Dominique Mauris (L)
Etienne Membrez (DC)
Jean-Louis Mory (R)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Vérène Nicollier (L)
Jean-Marc Odier (R)
Michel Parrat (DC)
Catherine Passaplan (DC)
Pierre-Louis Portier (DC)
Jean Rémy Roulet (L)
Louis Serex (R)
Olivier Vaucher (L)
Personne ne s'est abstenu
Etaient excusés à la séance (19) :
Esther Alder (Ve)
Bernard Annen (L)
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Nicolas Brunschwig (L)
Juliette Buffat (L)
Régis de Battista (S)
Hervé Dessimoz (R)
Hubert Dethurens (DC)
Erica Deuber Ziegler (AG)
John Dupraz (R)
Philippe Glatz (DC)
Armand Lombard (L)
Louiza Mottaz (Ve)
Rémy Pagani (AG)
Jacques-Eric Richard (S)
Stéphanie Ruegsegger (DC)
Jean Spielmann (AG)
Micheline Spoerri (L)
Etaient absents au moment du vote (6) :
Jean-Claude Dessuet (L)
Christian Ferrazino (AG)
Michel Halpérin (L)
Véronique Pürro (S)
Walter Spinucci (R)
Pierre-Pascal Visseur (R)
Présidence :
Mme Elisabeth Reusse-Decrey, présidente.
Cette pétition est déposée sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.