République et canton de Genève

Grand Conseil

No 11/II

Jeudi 22 mars 2001,

nuit

La séance est ouverte à 20 h 30.

Assistent à la séance : Mmes et MM. Carlo Lamprecht, président du Conseil d'Etat, Micheline Calmy-Rey, Gérard Ramseyer, Martine Brunschwig Graf, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

La présidente donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

La La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Michel Balestra, Juliette Buffat, Hervé Dessimoz, John Dupraz, Morgane Gauthier, Luc Gilly, Armand Lombard, Pierre Meyll, Jean Spielmann et Walter Spinucci, députés.

3. Annonces et dépôts:

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

Néant.

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

Néant.

e) de questions écrites.

Néant.

E 1061-1
4. Prestation de serment de M. David Robert, élu juge au Tribunal de première instance. ( ) E1061-1
Mémorial 2001: Election, 1489.

M. David Robert est assermenté. (Applaudissements.) 

RD 272-B
a) La réforme de l'Etat de Genève. « Un nouveau dialogue entre l'Etat et le citoyen ». ( -) RD272
 Mémorial 1997: Rapport, 2004. Renvoi en commission, 2130.
 Mémorial 1998: Rapport, 7881. Renvoi au Conseil d'Etat, 7951.
RD 288-B
b) La réforme de l'Etat de Genève. « La réforme en marche ». ( -) RD288
 Mémorial 1998: Rapport, 44. Renvoi en commission, 177. Rapport, 7881. Renvoi au Conseil d'Etat, 7951.

5. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur les objets suivants :

En date du 26 juin 1995, l'acceptation par le peuple genevois de l'initiative IN 100 « pour réduire les dépenses abusives de l'Etat de Genève » a généré un vaste débat sur le rôle et le fonctionnement de l'Etat.

Débat

Mme Christine Sayegh (S). Avant de vous livrer quelques réflexions résultant du rapport que le Conseil d'Etat nous a soumis, je rappellerai que le mot réforme est à géométrie variable, puisqu'il signifie à la fois rétablir dans sa forme primitive, changer, améliorer, voire supprimer.

En l'espèce, la réforme avait pour point de départ l'initiative intitulée «Pour réduire les dépenses abusives de l'Etat». Elle reposait d'ores et déjà sur un jugement de valeur - en effet, pourquoi ces dépenses étaient-elles abusives? - et avait pour but de réduire les dépenses, sans égard aux besoins de la population. Les propositions d'Arthur Andersen, chargé de l'audit global de l'Etat, sont éloquentes à ce sujet, puisqu'elles tendaient manifestement à privatiser progressivement les services publics, sans analyse de ce qu'est une prestation publique, ignorant le fait que les prestations publiques ne se conçoivent pas en termes de profit, mais en termes de besoin.

Cette réforme aurait pu s'engager sur un chemin rétrograde, alors que la majorité de la population estime à juste titre que le service public est le seul garant de l'égalité de traitement. Et c'est ainsi avec une certaine inquiétude que le groupe socialiste a suivi la mise en place des différents instruments d'analyse des pistes de cette réforme. L'évolution de la réflexion, ne se limitant plus à l'argent mais s'ouvrant à une analyse plus citoyenne, est de bon augure. En effet, avant de penser à réduire les coûts, la population doit savoir quelles sont les prestations publiques et comment les services fonctionnent.

L'information du public est en route et le projet de loi y relatif est à l'étude devant la commission judiciaire. La réforme structurelle et de gestion l'est également, avec «Service public 2005», projet de loi qui va être traité prochainement. Nous constatons avec satisfaction qu'enfin la réforme met la priorité sur l'acteur et le bénéficiaire du service public. Le présent rapport compilant l'historique et les différentes étapes de la réforme en cours, il y a lieu de le renvoyer en commission des finances, afin d'en étudier les effets dans le cadre, notamment, de l'étude du budget.

M. Nicolas Brunschwig (L). Nous avons eu le privilège de recevoir ce rapport soit sous forme électronique, soit sous forme écrite, ce qui a permis à chacun d'entre nous d'en prendre connaissance. Ce rapport est bien évidemment intéressant, mais je crois qu'il montre plus de progrès sur la forme de la réforme que sur le fond. En effet, on nous présente essentiellement un outil informatique qui permet de suivre les différents projets, projets d'ailleurs extrêmement différenciés quant à leur contenu : cela va d'Internet à la gestion du parc des véhicules en passant par quelque chose dont le nom ne me dit pas grand-chose : Adéquacadre... Mais je suis sûr qu'on nous expliquera de quoi il s'agit.

Evidemment, ce nouveau programme informatique donne une certaine visibilité aux projets de l'Etat et c'est important, pour nous, pour les médias, pour l'ensemble de la population. Mais est-ce bien suffisant de la part d'une institution qui regroupe, je vous le rappelle, quelque 24 000 collaborateurs ? Nous avons quelques doutes à ce sujet. Nous trouvons que la réforme est bien trop silencieuse ou bien trop lente sur des questions aussi essentielles que la rénovation du statut de la fonction publique - nous intégrons bien entendu dans ce chapitre les aspects rémunération, ancienneté, hiérarchie... Ce rapport est également bien trop silencieux et les efforts de l'Etat bien trop faibles sur la problématique de la flexibilité, de l'organisation. Dans toutes les séances de la commission des finances ayant trait aux budgets et aux comptes, nous avons abordé ces sujets avec chacun des conseillers d'Etat. Sauf erreur, sur les 24 000 collaborateurs grand Etat - soit y compris les établissements publics subventionnés - les transferts entre départements se chiffrent à quelques centaines, c'est-à-dire à 2% ou 3% du total. C'est évidemment trop peu, et je crois d'ailleurs que les chiffres sont même plus faibles que ceux que j'évoque avec un certain optimisme. C'est en tout cas la démonstration que la flexibilité n'existe pas.

En outre, depuis que je siège à la commission des finances, je n'ai jamais entendu un chef de département nous dire qu'un de ses services avait des effectifs trop importants et qu'il pensait les réduire. Ceci est anormal.

Concernant le nombre de fonctions et le système d'évaluation de celles-ci, savez-vous combien de fonctions différentes existent à l'Etat de Genève ? Vous imaginez sans doute qu'il y en a quelques dizaines, voire quelques centaines. Eh bien, non, Mesdames et Messieurs, il y a quelques milliers de fonctions différentes à l'Etat de Genève! Et, grâce à la réforme en cours, on nous annonce que d'ici quelques années on arrivera sans doute à quelques centaines, suite à ce travail laborieux et compliqué!

Ensuite, nous regrettons que les gains de productivité, qui existent bien entendu, soient encore extrêmement marginaux. Je tiens à dire à Mme Sayegh, pour reprendre ses propos, qu'une vision où l'argent est présent n'est pas forcément contradictoire avec une approche citoyenne. Encore que le terme d'approche citoyenne, qui nous vient du pays voisin, est à mon avis une espèce de tarte à la crème absolue, où chacun met ce qu'il veut!

Nous voulons aussi émettre quelques regrets sur l'expérience du New Public Management qui était menée dans un certain nombre de services pilotes. Certains de nos collègues ont pu évaluer et expérimenter de visu les résultats de cette expérience, qui étaient, en tout cas pour certains services, m'a-t-on dit, tout à fait positifs et efficaces. Il semblerait que cette expérience soit quelque peu gelée actuellement et nous le regrettons, car il nous semblait qu'elle allait tout à fait dans le bon sens.

Pour résumer, nous sommes ravis qu'on ait maintenant un outil informatique qui permette à l'ensemble de la population de suivre assez précisément les différentes réformes, ou réformettes, entreprises au sein de l'Etat. Nous sommes par contre déçus du contenu de ces réformes, qui sont, à notre avis, insuffisantes et trop lentes. Certes, comme le dit M. Segond, tout ce qui ne se fait pas dans la concertation est synonyme d'échec; nous partageons ce point de vue, mais la concertation ne doit pas empêcher que l'on avance plus rapidement que ce qui se fait actuellement. L'ensemble des collectivités publiques en Suisse ont réussi cet exercice plus rapidement que nous à Genève et cela pose des questions essentielles!

La bonne santé économique genevoise nous a permis aujourd'hui de surmonter nos difficultés financières, mais s'il y a eu renversement de tendance économique, aucune réforme structurelle n'a réellement été accomplie, ou si peu. Nous le regrettons, car c'est surtout en période de prospérité que l'on doit travailler, étudier, améliorer les choses, pour pouvoir affronter les années difficiles.

M. Jean-Marc Odier (R). Le groupe radical remercie le Conseil d'Etat de ce point de situation sur la réforme de notre chère République. Cela dit, le poids de ce document n'a pas de rapport avec son contenu, que nous estimons léger et qui tient plus d'une information présentant le site Internet de l'Etat comme vecteur et moyen de communication privilégié relatif à la gestion permanente des réformes mises en oeuvre. Quant aux réformes à proprement parler, nous restons sur notre faim.

Quelques réformettes sont annoncées : une tentative de moderniser la fonction publique en favorisant notamment la mobilité, ou encore les projets du département de l'aménagement d'aliéner enfin des terrains sans utilisation prévisible. Nous sommes en revanche étonnés que diverses expériences de meilleure gestion des ressources humaines, comme le New Public Management ou encore le partage du travail, aient été simplement abandonnées sans explication ou analyse à notre intention. Les réformes structurelles voulues par le peuple en 1995, suite à l'initiative 100, restent globalement en position d'attente pour le groupe radical. Nous avons même la crainte que les structures s'alourdissent avec l'accroissement des dépenses de l'Etat au budget 2001, accompagné de l'ouverture de nombreux postes de fonctionnaires nouveaux.

Bref, tout cela n'est pas très conforme à la volonté populaire manifestée suite à l'audit de l'Etat. Il ne faut pas que les bienfaits conjoncturels actuels noient toute volonté de réformer les structures de l'Etat et l'organisation institutionnelle de l'exécutif.

Le groupe radical n'est pas convaincu par la position du Conseil d'Etat, lequel déclare dans son rapport que la grande majorité des pistes proposées par Arthur Andersen se sont traduites par une application sur le terrain ou par l'élaboration de projets de lois. En effet, qu'en est-il des différentes pistes de modification du statut de la fonction publique ? des éternels doublons Ville, communes, Etat ? de la volonté de regrouper notamment les achats publics, d'installer un guichet unique en matière de besoins sociaux, ou encore de regrouper des services cantonaux et municipaux d'aménagement ? Ceci pour ne prendre que quelques exemples parmi les pistes de l'audit les plus importantes.

En conséquence, je demande formellement que ces deux rapports soient renvoyés au Conseil d'Etat et qu'ils reviennent devant notre parlement en octobre prochain, avec l'inventaire exhaustif des réformes réalisées durant cette législature, les conséquences sur les dépenses de fonctionnement, ainsi que la liste des réformes à entreprendre lors de la prochaine législature. Si le discours de Saint-Pierre est une déclaration d'intention, les rapports 272 et 288 pourraient constituer des bilans de réalisation, pouvant par ailleurs créer une base de réflexion crédible pour l'électorat genevois chargé de renouveler les autorités cantonales en octobre prochain.

M. Philippe Glatz (PDC). Je ne reviendrai pas sur les remarques extrêmement pertinentes qui ont déjà été émises par les préopinants. En fait, nous considérons que ce rapport est d'une pauvreté absolue et que son contenu, comme le disait M. Odier, est d'une légèreté qui fait souci.

En effet, il y a impossibilité, à la lecture de ce rapport, de pouvoir se prononcer sur le fond de la situation, quant à la mise en oeuvre de la réforme de l'Etat. On nous renvoie, comme le disait également M. Odier, à un site Internet qui fait le point de la situation, mais je rappellerai quand même que la réforme de l'Etat a pour origine l'acceptation par le peuple genevois de l'initiative 100! Plus de 44 000 personnes se sont donné la peine de se déplacer pour se prononcer en sa faveur, alors que 39 000 étaient contre. En fait, la majorité des citoyens de ce canton demandaient que l'on agisse, en 1995 déjà.

Aujourd'hui, il aurait été souhaitable d'obtenir un bilan de cette activité de réforme. Or, la lecture de ce rapport ne nous permet pas de faire un bilan. Nous n'y trouvons aucune appréciation critique de la mise en marche de la réforme, aucune vision d'ensemble et pas de bilan synthétique. Mesdames et Messieurs les députés, lorsqu'on nous adresse un rapport, c'est bien pour nous permettre d'avoir une vision synthétique des choses. Autrement, à quoi sert-il de faire un document.

En l'occurrence, je me suis donné la peine d'aller sur Internet et je vais me permettre de citer quelques exemples. S'agissant des procédures d'autorisation de construire, voici une page Internet que j'ai pris la peine d'imprimer. Sous Domaine de l'aménagement du territoire, que nous dit-on ? «Objectifs : concevoir un guichet unique, recentrer la police des constructions sur son rôle technique...», je passe sur toutes les démarches mises en oeuvre. Puis, «Gains qualitatifs : les améliorations sont essentiellement qualitatives - on s'en doute, puisque l'on est dans le chapitre des gains qualitatifs! - à savoir un meilleur suivi des dossiers, une plus grande efficacité de fonctionnement.» Mesdames et Messieurs, à la lecture de ce bilan, comment voulez-vous que nous puissions juger de la véracité et de l'exactitude de ce qui nous est affirmé ici ? Plus loin, je lis  : «Coût de la démarche de développement organisationnel et prise en charge par le centre de formation de l'office du personnel : 300 000 F. » On a dépensé 300 000 F et on nous dit que tout va bien dans le meilleur des mondes! C'est un vrai satisfecit!

Je prends un autre exemple : «Service du tuteur général - Objectifs : renforcer la coordination, la cohérence et l'efficacité des actions conduites en faveur des mineurs en difficulté.» Très bien! Nous avons entendu tout à l'heure une interpellation qui montrait que le sujet des mineurs en difficulté était d'actualité. «Réorganisation du service : deux entités; clarification des procédures; aménagement des conditions de travail, des collaborations.» Voilà pour le point de la situation. Au chapitre Gains qualitatifs, on nous dit : «Amélioration des prestations du service du tuteur général et de son fonctionnement.» Merci beaucoup! Nous étions certains qu'on n'allait pas annoncer une diminution de la qualité! Quant au coût : «10 postes supplémentaires inscrits au budget 1999.»

Alors, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, je ne dis pas que tout ceci n'a pas été fait, qu'il n'y a pas un gain qualitatif, mais comment voulez-vous que nous puissions l'apprécier à la lumière de ces simples affirmations ? Nous aurions souhaité, et c'est ce que je me borne à dire, avoir des éléments beaucoup plus concrets et, ainsi, une vision objective et synthétique de l'ensemble de ces réformes. Il ne suffit pas de poser des beaux mots dans de beaux cadres pour dire que tout va bien dans le meilleur des mondes.

C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, je vous demanderai, comme M. Odier, de bien vouloir renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat, afin qu'il puisse nous soumettre un certain nombre d'opinions - j'aurais souhaité qu'il nous donne une appréciation critique, critique dans le sens constructif - et qu'il puisse faire un bilan synthétique de l'ensemble de cette réforme, au lieu de nous dire d'aller voir les différents sous-chapitres figurant sur le site Internet!

Mesdames et Messieurs les membres du Conseil d'Etat, si vous voulez que nous, députés, puissions apprécier le travail important que vous faites dans certains domaines, il convient que vous en fassiez la synthèse, nous facilitant ainsi son approche.

M. David Hiler (Ve). Depuis le début de cette discussion sur la réforme de l'Etat, on se heurte à la pertinence même du concept. Les reproches de M. Glatz en sont très nettement l'illustration. Pour ma part, j'ai la faiblesse de croire que réformer l'école primaire ne se fait pas exactement de la même manière que réformer la politique de la santé, ou réorganiser les CASS ou la police. Il me semble qu'on est à chaque fois dans une problématique particulière; dans certains cas, on essaie de voir quels sont les dysfonctionnements les plus criants et de les résoudre, alors que, dans d'autres, on essaie d'adapter des prestations fournies par l'Etat aux besoins des gens qui en sont les bénéficiaires, les utilisateurs. Pour cette raison, j'ai quelque peine à imaginer que M. Glatz puisse jamais recevoir la synthèse qu'il attend. Nous connaissons le tableau - en tout cas ceux qui siègent à la commission des finances ou à la commission de contrôle de gestion - nous voyons bien ce qui se passe : un certain nombre d'améliorations, de réformes réussies; un certain nombre de services qui se débattent dans des difficultés assez considérables malgré des tentatives de réorganisation; enfin des services où cela n'a pas l'air de fonctionner du tout même aujourd'hui.

Face à ce bilan contrasté, il convient de revenir à un certain nombre de principes et, à ce stade du débat et avant le renvoi en commission, il nous paraît utile de dire, à l'intention du Conseil d'Etat et des autres groupes, quels sont ceux auxquels nous tenons.

Deux principes nous paraissent fondamentaux, sur lesquels nous constatons des avancées. Le premier, c'est bel et bien la transparence, pour nous députés, mais surtout pour l'administré et pour le bénéficiaire des prestations. C'est en l'occurrence un énorme champ, mais les technologies à disposition, alliées à une forte volonté politique, peuvent permettre un effort de transparence qui est culturellement, à Genève, totalement nouveau. Contrairement à la Suède par exemple, Genève a plutôt une tradition, je dirais française où cacher une partie des informations fait partie de la vie quotidienne de l'Etat. Aujourd'hui, il me semble qu'une majorité du Conseil d'Etat et du parlement est prête à entreprendre cette réforme.

Un deuxième principe, qui est beaucoup plus compliqué à mettre en oeuvre, consiste à briser les structures pyramidales, pour avoir, à l'intérieur des services, des responsables clairement identifiés et des fonctionnements dits en réseau, où les gens collaborent en ayant, chacun, une responsabilité clairement identifiée, sans multiplier, pour des questions salariales, les postes intermédiaires. C'est un deuxième principe qui sera à vrai dire long à mettre en oeuvre et je le regrette, car c'est fondamentalement ce qui doit changer dans la culture d'entreprise.

Puis il y a un troisième principe, qui est inscrit dans la loi et qui est fondamental, c'est que pour chaque prestation, qu'elle soit d'autorité ou qu'elle soit une prestation à la population au sens classique, on doit être capable de mesurer qualitativement et quantitativement ce qu'on offre et pour quel coût. En effet, le problème est de pouvoir faire des choix politiques - le coût étant finalement un choix politique - mais en partant de l'hypothèse que chaque prestation est réalisée au plus près du meilleur rapport qualité/prix. Cela n'enlève rien au débat, qui reste de savoir si on donne un peu plus ou un peu moins, mais le fait est qu'il n'y a aucune raison de gâcher des ressources pour assurer une prestation qu'on pourrait assurer à un coût moins élevé.

Pour nous, ce sont les trois grands principes. Il est certain que leur application va être différente. Nous pourrons éclaircir en commission et dans les débats ultérieurs, de façon plus détaillée, la nature des principes qui guident le Conseil d'Etat et en quoi les uns ou les autres peuvent les combattre sur certains points.

Voilà, à ce stade, ce qu'il nous paraît utile de dire, en soulignant qu'il s'agit de mesurer le chemin qui a été fait depuis le moment où on pensait qu'un audit à 5 millions était une sorte de baguette magique qui permettait de changer l'Etat. Plus personne ne croit à cela et quelle que soit l'utilité de l'un ou l'autre de ces fascicules, dont j'ai encore un certain nombre dans ma bibliothèque, le fait est que ce n'est pas tout à fait ainsi qu'on peut arriver à améliorer les différents services de l'Etat. Il convient enfin de remercier - ils se reconnaîtront - ceux qui ont entrepris, au sein du Conseil d'Etat, d'améliorer le fonctionnement de leurs services, et de suggérer à l'un ou l'autre qui ne l'ont pas fait d'imiter le bon exemple de leurs petits camarades du Conseil d'Etat.

M. Bernard Clerc (AdG). Parler de réforme, c'est un peu la tarte à la crème, car derrière le mot réforme chacun met ce qu'il veut... Il faut bien admettre que la réforme de l'Etat est intervenue dans un contexte particulier, celui de la crise des finances publiques, et que dans ce contexte la réforme, qu'on voulait générale, avait un certain nombre d'objectifs politiques. Ces objectifs politiques se sont exprimés à travers des projets dont la plupart ont été contestés. Il s'agissait en l'occurrence d'arriver à une plus grande flexibilité, non pas pour répondre aux besoins des habitants de ce canton, mais pour s'attaquer au statut du personnel de la fonction publique, pour s'attaquer aux salaires et diminuer les postes. Alors, évidemment, lorsqu'on engage une réforme sur la base de ces prémisses-là, on a de fortes chances d'aller droit dans le mur! Nous en avons eu des exemples, notamment les tentatives de privatisation du service des autos ou de la clinique de Montana.

C'est la mode de parler de réformes, de NPM, de flexibilité, comme si, d'ailleurs, l'Etat était un organisme statique qui par définition ne bougerait pas, fonctionnerait toujours de la même manière. Or, vous savez que ce n'est pas le cas, que l'Etat de Genève ne fonctionne pas aujourd'hui comme il fonctionnait il y a trente ans, ceci parce qu'il existe évidemment une relation systémique entre l'Etat et la société, et que les besoins qui se manifestent dans la société ont forcément une interaction sur le fonctionnement de l'Etat.

Certains ici regrettent l'arrêt des expériences NPM. Mais enfin, soyons sérieux! De manière générale, alors qu'on parlait beaucoup de NPM il y a quatre ou cinq ans, vous aurez remarqué qu'aujourd'hui on en parle beaucoup moins et que les milieux qui mettaient fortement en avant ce type d'expérience en font aujourd'hui une critique assez radicale. Il y a à cela un certain nombre de raisons. Pour prendre les expériences faites au sein de l'Etat de Genève, il faut reconnaître qu'elles n'avaient pas une base très sérieuse, sachant que toutes ces expériences étaient dites positives du moment qu'elles dégageaient un boni dans les services. Il s'agissait donc de dégager un boni et de tenter plus ou moins d'évaluer certaines prestations. Le problème est qu'en examinant ces expériences d'un peu plus près on s'est aperçu que le boni était pré-programmé : en effet, dans la plupart des services NPM, qui avaient un certain nombre de rentrées financières dans leur budget, il était relativement facile de sous-estimer les futures rentrées lors de l'établissement du budget, ce qui leur permettait de se retrouver avec un boni à la fin de l'exercice, signe manifeste que tout le monde avait bien travaillé! Ce n'est pas moi qui le dis, c'est l'inspection cantonale des finances, qui a constaté ce phénomène! Alors, croyez-moi, je ne vais pas pleurer ce soir sur la fin des expériences NPM!

En ce qui nous concerne, nous l'avons dit à plusieurs reprises : il n'y a pas une réforme de l'Etat de Genève, mais des réformes à mener, suivant les départements, suivant les services, et ces réformes doivent être guidées par un critère central, à savoir un meilleur service aux habitants de ce canton. C'est ce qui doit guider notre volonté de réforme, et non pas en priorité des soucis budgétaires, des velléités de flexibilisation, de changements structurels allant dans le sens de la flexibilisation. Dès lors, il est évident que les réformes ne peuvent pas se faire contre l'avis du personnel et contre le personnel, comme elles ont été faites le plus souvent. Le peuple a cru qu'en approuvant l'établissement d'un audit par Arthur Andersen on allait résoudre tous les problèmes, mais on s'est aperçu que, finalement, certaines des propositions d'Arthur Andersen étaient déjà largement connues par le personnel, et que d'autres étaient tout simplement irréalistes ou irréalisables.

Le deuxième facteur qui nous semble important dans les réformes, outre la participation active du personnel, c'est l'aplanissement des hiérarchies. Nous l'avons dit à plusieurs reprises, nous avons souvent fait cette critique lors des discussions sur les comptes et les budgets : les hiérarchies au sein de l'Etat de Genève sont trop fortes. Il s'agit d'éliminer le maximum de strates hiérarchiques, parce que c'est une condition souvent essentielle pour que le personnel participe activement et prenne ses responsabilités, sans devoir toujours se référer à plusieurs échelons supérieurs.

Voilà quelques-uns de nos réflexions sur ce rapport. Nous sommes prêts à en discuter en commission, mais, plutôt que de vouloir une grande réforme générale de l'Etat de Genève, je crois qu'on ferait mieux de s'attaquer spécifiquement à certaines réformes qui sont très nécessaires, qui traînent depuis fort longtemps et sur lesquelles, malheureusement, on n'a pas beaucoup entendu les bancs d'en face qui parlent tant de réforme! Je pense par exemple aux offices des poursuites, ou à d'autres services protégés ou sur lesquels on gardait un certain nombre de silences. Je terminerai sur cet exemple, mais je pourrais en donner d'autres...

Mme Martine Brunschwig Graf. Si j'ai demandé d'intervenir au nom du Conseil d'Etat, c'est parce que le travail de restitution des travaux de la réforme a débuté en 1999, par décision du Conseil d'Etat et dans une volonté que je vais résumer. Il est naturel que vous ayez, les uns et les autres, des attentes et la conscience qu'il reste des choses à accomplir - comme le Conseil d'Etat l'a d'ailleurs reconnu par la voix de mes différents collègues - pour ne pas parler de Service public 2005 ou d'autres projets liés aux outils de gestion, sur lesquels vous vous êtes prononcés successivement, que ce soit en commission ou en séance du Grand Conseil.

Mais quelle était la prétention de ce rapport à l'origine ? Je rappelle que sur tous les bancs, vous avez, avec des intentions politiques différentes, demandé à savoir finalement ce qu'il était advenu des recommandations faites par l'organe chargé, à la suite de l'initiative 100, d'élaborer une réforme pour l'Etat de Genève. Nous et vous avions été saisis des documents de la société Arthur Andersen qui, dans une liste d'environ 49 pistes, indiquait - de façon plus ou moins approfondie et pertinente il faut bien le dire - un certain nombre d'éléments. Durant les années qui ont suivi, dans ce parlement toujours, ont été évoquées les possibilités d'économie prévues, avec le regret que ces économies ne soient jamais réalisées, ou qu'en tout cas on ne vous en rende jamais compte. Le rapport avait ainsi pour objectif, lorsqu'on l'a évoqué en 1999 dans ce Grand Conseil, de commencer par rendre compte de ces effets-là. Que s'est-il passé ? qu'avons-nous fait ou pas fait, et pourquoi ? quels sont les résultats économiques qu'on peut attendre de ce qui a été entrepris ? sont-ils comparables avec ce qui était préconisé ?

Or, si vous avez l'honnêteté d'examiner ce qui figure sur Internet - non pas comme un gadget, mais selon des principes que la commission des finances connaît bien - notamment en ce qui concerne le projet An 2000 pour ne prendre que celui-là, vous reconnaîtrez qu'il s'agit bien de vous donner les informations attendues et de faire à un moment donné un point comparatif entre ce qui a été entrepris et ce qui avait été préconisé par la société Arthur Andersen suite à l'initiative 100. Ce premier élément, vous le trouvez dans le rapport de façon fidèle, avec les éléments pris en compte, les éléments laissés pour compte, les éléments moyennement pris en compte, et toutes les explications qui en découlent. De la même façon, nous nous sommes efforcés d'évaluer, sur le plan financier, quels étaient les gains qui pouvaient être annoncés en comparaison, toutes choses étant par ailleurs égales, puisque la société en question évaluait aussi bien les non-dépensés que les gains réels résultant d'économies.

Ce travail fait, il importe de voir une deuxième chose. Entre ce qui a été proposé par la société Arthur Andersen et ce qu'a entrepris l'Etat, il y a des différences, mais il y a aussi un certain nombre d'actions que les services ont entreprises, qui ont été menées à bien ou qui sont en train d'être menées à bien, qui démontrent aussi une volonté de l'Etat d'agir de sa propre initiative, indépendamment des grands projets touchant les ressources humaines, les outils de comptabilité intégrée, ou les outils de gestion plus globalement.

Alors, dire qu'il reste des choses à faire est une banalité. En l'occurrence, il s'agissait de faire le bilan de ce qui a été fait. Je rappellerai qu'il y a eu deux rapports précédents, qui n'étaient pas convenables à votre goût, parce que jamais assez synthétiques, parce que jamais assez précis, parce que ne chiffrant pas les choses, etc. Aujourd'hui, le Conseil d'Etat n'estime pas avoir terminé ce qu'il a à faire et cela a été rappelé ici à plusieurs reprises, mais cela ne signifie pas pour autant qu'on doive jeter le bébé avec l'eau du bain, renoncer à regarder ce qui se passe à l'Etat de Genève et le regarder avec un peu plus de sérieux que le résumé que vous en avez fait les uns et les autres. Je pense qu'il ne sert à rien de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat, puisque nous nous sommes engagés sur des pistes qui ont déjà été explorées et que nous allons vous tenir informés du suivi. Cela dit, que la commission des finances ait envie de creuser le sujet, c'est son droit.

J'aimerais dire encore une chose à propos du service du tuteur général, qui a été attaqué à travers la caricature que M. Glatz a présentée. Cela vous intéresse peu, semble-t-il, d'apprendre que nous avons fait ce que nous avions annoncé. Mais peut-être ne vous souvenez-vous pas que, dans cette enceinte, les problématiques du service du tuteur général ont été évoquées à plusieurs reprises, qu'il y a eu un rapport de l'inspection cantonale des finances et que nous nous sommes engagés à un certain nombre de réorganisations. Celles-ci ont été menées à bien; cela ne veut pas dire que tout est réalisé qualitativement et dans la durée de façon optimale, mais cela veut dire que nous en prenons le chemin et que nous tenons nos engagements.

Reste qu'à un moment donné, lorsque nous vous informons de ce que nous avons fait, c'est une question de crédibilité. Si vous estimez qu'il n'est pas suffisant qu'on vous le dise, ni même qu'on l'ait fait, c'est que, comme le rappelait M. Clerc tout à l'heure - et Dieu sait si dans la plupart des cas j'ai de la peine à être d'accord avec lui - chacun entend sous le mot réforme ce qu'il veut entendre.

L'avenir est devant nous, Mesdames et Messieurs les députés, et le programme du Conseil d'Etat a été annoncé. Vous y mettrez votre patte, sachant que vous avez déjà déposé des projets de lois concernant la fonction publique, que vous donnez votre avis en matière de gestion des ressources humaines en général et que vous aurez à vous prononcer sur le résultat de ce que nous mettons en place en matière de comptabilité intégrée et sur les outils de gestion. En attendant, faites-nous la grâce de reconnaître au moins que la transparence a des vertus, que les informations qui vous sont données, toutes imparfaites qu'elles soient, comme toute entreprise humaine, ont au moins le mérite de la transparence et que la synthèse que vous réclamez est disponible, sous une forme certes un peu plus moderne, mais néanmoins intéressante pour vous tous!

La présidente. Il avait été décidé que ce rapport serait renvoyé à la commission des finances. Entre-temps, une proposition de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat a été faite, proposition que je mets aux voix.

Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat est rejetée.

Ce rapport est renvoyé à la commission des finances. 

IN 118
6. a) Initiative populaire «Pour un projet de stade raisonnable». ( )IN118
IN 118-A
b) Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la validité et la prise en considération de l'initiative populaire «Pour un projet de stade raisonnable». ( -)IN118

Lancement d'une initiative

Le Comité de citoyen-ne-s pour un choix démocratique et raisonnable de stade a lancé l'initiative populaire intitulée « Pour un projet de stade raisonnable », qui a abouti.

Le tableau ci-dessous indique les dates ultimes auxquelles cette initiative doit être traitée aux différents stades du processus d'examen des initiatives prévus par la loi.

1.

Arrêté du Conseil d'Etat constatant l'aboutissement de l'initiative, publié dans la Feuille d'avis officielle le

22 décembre 2000

2.

Débat de préconsultation sur la base du rapport du Conseil d'Etat au sujet de la validité et de la prise en considération de l'initiative, au plus tard le

22 mars 2001

3.

Décision du Grand Conseil au sujet de la validité de l'initiative sur la base du rapport de la commission législative, au plus tard le

22 septembre 2001

4.

Sur la base du rapport de la commission désignée à cette fin, décision du Grand Conseil sur la prise en considération de l'initiative et sur l'opposition éventuelle d'un contreprojet, au plus tard le

22 juin 2002

5

En cas d'opposition d'un contreprojet, adoption par le Grand Conseil du contreprojet, au plus tard le

22 juin 2003

Les soussignés, électrices et électeurs dans le canton de Genève, en application des articles 64 et 65B de la Constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, et des articles 86 à 93 de la loi sur l'exercice des droits politiques, du 15 octobre 1982, appuient la présente initiative législative qui demande au Grand Conseil d'adopter le projet de loi suivant modifiant la loi ouvrant un crédit au titre de subvention cantonale pour la reconstruction et la rénovation du stade des Charmilles et du centre sportif de Balexert, du 26 avril 1996 (7263), dans sa teneur résultant de sa modification du 19 juin 1997 (7568).

Art. 2 Conditions (nouvelle teneur)

Art. 3 Plan financier (nouvelle teneur)

Art. 4 Délai (nouvelle teneur)

Art. 8 Adaptation de la subvention initiale (nouveau)

Art. 9 Disposition finale (nouveau)

Un stade de 30 000 places financé par des collectivités publiques à raison de 61 millions de francs (31 millions versés à fonds perdus et 30 millions sous forme de mise à disposition de terrains) alors qu'un match à Genève n'attire en moyenne que 4000 spectateurs ?

Une multinationale (Canal+, 160 millions de francs de bénéfice en 1998) qui profitera de ce stade sans participer à son financement ?

Du terrain ferroviaire, déclassé au mépris des besoins futurs des CFF, pour y construire un centre commercial mal raccordé aux transports publics, qui encouragera l'usage de la voiture et contribuera ainsi à augmenter le bruit, la pollution et les embouteillages en ville et en périphérie ?

Genevoises, Genevois, si vous considérez que cela n'est pas raisonnable et qu'un débat public doit avoir lieu, signez l'initiative qui demande :

- que les citoyennes et citoyens genevois se prononcent sur un projet d'une telle importance ;

- que le projet de centre commercial soit abandonné et que le terrain déclassé soit restitué aux CFF ;

- que la capacité du stade soit réduite à 15 000 places, largement suffisante pour Genève ;

- qu'un plan financier transparent prévoie que l'exploitant du stade (Canal+) prenne ses responsabilités en investissant un montant correspondant au minimum à 10 % du coût du stade et qu'il supporte les frais d'exploitation et d'entretien de celui-ci ;

- que la gare de La Praille soit mise en conformité aux exigences fédérales de protection contre les accidents majeurs.

Rapport du Conseil d'Etatau Grand Conseil sur la validité et la prise en considération de l'initiative populaire 118 « Pour un projet de stade raisonnable »(IN 118-A)

Le Conseil d'Etat a constaté l'aboutissement de cette initiative par un arrêté du 20 décembre 2000, publié dans la Feuille d'avis officielle du 22 décembre 2000. De cette date court une série de délais successifs qui définissent les étapes de la procédure en vue d'assurer le bon exercice des droits populaires.

Le Conseil d'Etat est d'avis que l'initiative « Pour un projet de stade raisonnable » (IN 118) doit être rejetée, ainsi que cela résulte de l'analyse qui suit.

Préconsultation

La présidente. La lecture de correspondances avait été demandée. Cette demande est-elle maintenue ou ces correspondances peuvent-elles simplement être mises au Mémorial ? Madame Bugnon, voulez-vous qu'on lise les deux lettres du Comité de citoyens ? Ou vous suffirait-il qu'elles figurent Mémorial ?

Mme Fabienne Bugnon (Ve). J'ai en effet demandé la lecture de la lettre du Comité de citoyens «pour un choix démocratique et raisonnable de stade», datée du 19 mars 2001. J'estime que la mettre simplement au Mémorial ne suffit pas. Ces citoyennes et ces citoyens réagissent au point de vue du Conseil d'Etat sur la recevabilité de l'initiative et je pense qu'il faut effectivement lire cette lettre avant d'entamer notre débat.

La présidente. Bien, mais j'ai ici une lettre du 21 mars et une du 13 mars : lisons la plus récente, si vous êtes d'accord... Monsieur Vanek, confirmez-vous votre demande de lire la «supplique» de M. Holenweg ?

M. Pierre Vanek. Oui, je confirme absolument ma demande... (Brouhaha.)

La présidente. Bien, nous passons à la lecture de ces lettres.

Annexe 7 pages comité de citoyens

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+ supplique

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M. Claude Blanc (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, certains d'entre vous se sont bien amusés durant les dix bonnes minutes qu'a duré la lecture de cette supplique, plus celle du placet précédent... Pour ma part, je constate qu'il est 21 h 30, premier jour de notre session, que nous n'avons abordé que treize points de notre ordre du jour et que le Grand Conseil s'amuse avec des choses qui ne prêtent vraiment pas à rire! Ce faisant, il méconnaît totalement les intérêts de la République liés à tous ces projets que nous n'arriverons pas à traiter parce que certains font de l'obstruction systématique. Je suis navré qu'on en arrive là. Je crois que le Grand Conseil, je l'ai déjà dit, est atteint aujourd'hui de paralysie totale par la volonté de quelques-uns qui malheureusement ont la majorité!

Maintenant, sur le fond, le Grand Conseil s'est prononcé à plusieurs reprises sur le projet de la Praille et la dernière fois le 29 mai 1999, comme un de ces placets l'a relevé. Il s'est prononcé selon les compétences que lui donne la constitution. Les lois qu'il a votées n'ont pas été contestées par référendum, comme la constitution le permettait aux citoyens qui se sont réveillés trop tard. Puis, ces lois étant entrées en vigueur, ayant été suivies d'effets, les déclassements ayant été exécutés, les travaux ayant commencé, on vient avec une initiative populaire dire qu'il faut tout arrêter! Parce qu'on n'a pas cru devoir lancer un référendum en temps utile, on lance une initiative, on recueille 12 000 signatures et on bloque tout! Comment voulez-vous, Mesdames et Messieurs les députés, que ce canton puisse continuer à travailler normalement, si, n'ayant pas utilisé le droit de référendum, qui est déjà tout de même un droit très important, on vient après coup avec une initiative pour bloquer des lois qui ont été votées légitimement et qui n'ont pas été combattues par référendum ?

En l'occurrence, c'est un abus de droit manifeste, c'est utiliser les droits démocratiques en les méprisant, en les vilipendant. Mesdames et Messieurs, vous êtes en train de tourner en ridicule ce qu'il y a de plus sacré dans notre système démocratique, c'est-à-dire le juste usage des droits populaires. Vous aviez le droit de lancer un référendum, vous ne l'avez pas fait, et maintenant vous faites ce que vous n'avez plus le droit de faire! Indépendamment du fond du sujet, l'affaire est jugée : vous ne pouvez pas y revenir, faute de quoi vous mettez en péril la sécurité du droit et le fonctionnement même de notre démocratie. Mais c'est probablement ce que vous désirez, je vous connais trop pour penser que vous avez d'autres idées! Pour ma part, j'en suis triste à pleurer et je me demande vraiment où nous allons! (Applaudissements.)

M. Dominique Hausser (S). J'ai une très grande sympathie pour le calendrier révolutionnaire et peu de sympathie pour le projet du stade de la Praille, vous le savez. Déjà en 1996, j'avais été amené à faire, en trois jours, un rapport de minorité sur le projet de loi concernant le stade des Charmilles. Dans un premier temps, nous avions tenté de trouver un accord - à l'époque, on ne parlait que du stade des Charmilles - entre l'ensemble des partis représentés dans cette enceinte pour essayer de limiter la casse et les magouilles que nombre d'entre nous avions constatées. Puis, tout à coup, il a fallu que l'Entente renie, à quelques minutes du vote en commission des travaux, l'accord que nous avions essayé de mettre sur pied. Ensuite, l'assemblée plénière, après quatre, cinq ou six heures de débat, décidait d'entériner les amendements que j'avais proposés au projet, ouvrant un crédit de l'Etat de Genève de 20 millions.

Une année plus tard, retour de manivelle du Conseil d'Etat, transfert du projet des Charmilles à la Praille, nouvelles discussions interminables en commission, puis en plénière, où nous, majorité parlementaire actuelle, avons perdu face à l'Entente. Ensuite, multiples discussions dans les couloirs, en particulier en ce qui concerne le centre commercial. Je rappelle qu'une entreprise proposait d'établir celui-ci à Plan-les-Ouates, dans la zone industrielle. Négociations, renégociations, puis accord, à savoir pas de centre commercial dans la zone industrielle de Plan-les-Ouates et rattachement de celui-ci à la zone de la Praille. C'est un accord qui vaut ce qu'il vaut. S'agissant du stade et de ses 30 000 places, personne ici ne pense qu'il sera rempli régulièrement, mais cela fait partie des négociations et des compromis, déplaisants mais nécessaires. Nous avions perdu et nous nous sommes pliés à ce compromis.

Mesdames et Messieurs, plusieurs socialistes ont certaines sympathies avec les initiants, parce qu'ils pensent qu'effectivement un stade de 30 000 places est peut-être un peu grand, que les centres commerciaux, ce n'est probablement pas la meilleure des solutions et que les commerces de quartier, c'est mieux. Mais, aujourd'hui, nous sommes dans une situation un peu délicate : le chantier a démarré, les initiants ont lancé leur initiative au lendemain de l'octroi des autorisations, au lendemain, quasiment, du démarrage des chantiers, et leur combat est d'arrière-garde. Nous avons beau avoir des sympathies avec les initiants, nous pensons qu'ils feraient mieux de concentrer leurs réflexions, leur opposition ou leurs propositions sur des projets à venir, plutôt que sur ce qui est déjà une réalisation.

Aujourd'hui, nous ne pouvons donc pas suivre les initiants. Même si admettons que cette initiative est formellement recevable, d'un point de vue pratique elle semble difficilement réalisable. En l'état, je propose que la commission législative examine sa recevabilité dans les plus brefs délais, pour que nous puissions formellement nous prononcer d'un point de vue politique sur le fond et dire si, oui ou non, nous sommes d'accord avec cette initiative.

M. Rémy Pagani (AdG). J'interviens parce que j'ai été rapporteur sur cette affaire du stade lorsque la commission d'aménagement a traité ce sujet. J'avais à ce moment-là soulevé deux questions qui me paraissaient fondamentales et que je rappellerai aujourd'hui, puisque des éléments importants sont venus confirmer nos inquiétudes. Je crois qu'il est bienvenu de vous les rappeler afin que chacun prenne ses responsabilités.

Nous avions soulevé, ma collègue Fabienne Bugnon et moi-même, le problème des risques majeurs, sachant que la sécurité à la gare de la Praille est considérée pour le moins négligemment, alors qu'un certain nombre de produits dangereux, voire très dangereux passent dans ce secteur. Nous avions auditionné, dans le cadre de la commission de l'aménagement, la direction générale des CFF et nous nous sommes rendu compte que l'axe Bâle-Chiasso représentait dix fois les dangers que la Praille fait subir aux alentours. Il y a donc danger à la Praille, c'est certain! Or, nous allons attirer une population nombreuse dans le centre commercial et une population encore plus nombreuse dans le stade - même si je doute qu'avec ses 30 000 places on puisse le remplir... Toujours est-il qu'on va mettre en danger cette population.

Le Conseil d'Etat, après avoir fait, comme nous, le bilan de cette situation difficile au niveau des risques majeurs, nous assure qu'il ne donnera pas l'autorisation si le mur d'enceinte n'est pas construit, si les mesures exigées ne sont pas mises en oeuvre par les CFF. Or, les CFF, dans une missive que j'ai lue dernièrement, disent très clairement que, pour eux, il n'est pas question d'améliorer cette gare - si tant est qu'on puisse le faire - autrement qu'en mettant à disposition une locomotive, ou un train-pompier. Dans le rapport que j'avais rédigé, je posais la question de savoir s'il ne fallait pas désaffecter la gare de triage de la Praille. Cette solution est sérieusement envisagée par les CFF, qui parlent de déplacer la gare de triage à Denges. En l'occurrence, je vous laisse imaginer les effets induits de cette mesure. Tout le monde se plaint aujourd'hui de l'influence, sur le tissu économique de notre région, de la disparition de la douane-poste. Demain, nous n'aurons plus de gare de triage, je vous en laisse la responsabilité!

Voilà pour les éléments dont nous avons eu connaissance en ce qui concerne les risques majeurs.

En ce qui concerne l'aspect financier, nous avions aussi soulevé un certain nombre de problèmes. Le fait que Canal+, vu la structure financière et administrative du projet, pouvait simplement, sans aucun problème juridique, se retirer avait attiré notre attention. Or, que s'est-il passé entre-temps ? Canal+ s'est retiré de cette affaire, n'y a laissé qu'un pied, ce qui fait que cette société ne sera plus directement responsable quand il s'agira de couvrir les déficits financiers.

Plus encore : aujourd'hui, l'affaire Swissair vient apporter de l'eau au moulin de nos préoccupations. Avec les investissements pharaoniques qui vont être faits dans ce projet, sans parler des 30 000 places du stade, avec les millions qui vont être dépensés, le jour où il faudra rentabiliser cette infrastructure il appartiendra à la collectivité de boucher le trou. Or, qui est à la tête de ce montage financier ? Bénédict Hentsch! Encore une fois, Mesdames et Messieurs, je vous laisse la responsabilité de ce montage financier. Dans dix ans, certains d'entre vous, ou certains d'entre nous, demanderont, comme pour Swissair, comme pour la Banque cantonale, que les autorités interviennent pour renflouer le bateau, pour remplir cette coquille vide. Nous nous trouverons dans la situation paradoxale où nous nous trouvons aujourd'hui avec la Banque cantonale ou avec SAirGroup. Il s'agira de savoir si on lâche le stade, si on le laisse péricliter - ce qui sera bien évidemment impossible - ou si la collectivité y met ses deniers pour tenter de sauver une structure complètement disproportionnée.

De ce point de vue là, même si les initiants sont intervenus un peu tard - non pas après le début des travaux, Monsieur Blanc, mais au moment de l'autorisation de construire - même s'ils sont intervenus un peu tard, je ne trouve pas inutile de se reposer la question, sachant ce que nous savons tant en ce qui concerne les risques majeurs qu'en ce qui concerne le montage financier. Il n'est pas trop tard pour bien faire, pour éviter le pataquès qui est survenu à la Banque cantonale ou à SAirGroup!

M. Nicolas Brunschwig (L). Un mot pour répondre aux propos plus qu'excessifs de M. Pagani. L'amalgame que vous faites, Monsieur Pagani, sur la personne de M. Bénédict Hentsch, comparant la déroute de Swissair avec les intérêts qu'il pourrait avoir dans cette opération, est tout simplement faux et ignoble. M. Hentsch assume ses responsabilités en tant qu'administrateur de SAirGroup et la justice dira quelles sont les responsabilités des administrateurs le cas échéant. En ce qui concerne le stade, vous savez que M. Bénédict Hentsch et la famille Hentsch font preuve d'une grande générosité, en offrant à la collectivité publique un parc aux Charmilles, dans une zone dont vous dites, sans doute avec raison, que la densité est trop importante. En l'occurrence, les propos que vous avez tenus concernant M. Hentsch sont abusifs, faux et diffamatoires, je le regrette!

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Qui retarde, Monsieur Blanc, les travaux du Grand Conseil, en lançant des référendums contre les lois... (Exclamations.) ...longuement travaillées en commission, longuement débattues dans ce Grand Conseil ? A ma connaissance, ces derniers temps, ce sont plutôt des pratiques des partis de droite!

Aujourd'hui, nous ne voulons pas retarder les travaux, contrairement à ce que vous faites systématiquement avec vos référendums. Nous voulons au contraire gagner du temps. Globalement, les initiatives populaires traînent toujours beaucoup trop avant d'être soumises au peuple. Si nous prenons le temps que vous proposez pour cette initiative, elle sera soumise au peuple quand le stade sera achevé et vous nous ferez alors vos grands sermons sur les droits populaires auxquels vous tenez tant!

Aujourd'hui, Monsieur Blanc, lorsque vous nous interpellez en nous montrant d'un doigt accusateur, ce sont 12 000 citoyens auxquels vous vous adressez. Ces 12 000 citoyens relaient des préoccupations que certains députés avaient évoquées dans ce Grand Conseil, sans beaucoup de succès, je vous l'accorde : vous ne pouvez pas balayer tous ces citoyens d'un revers de main.

Plusieurs d'entre nous, M. Pagani l'a rappelé, se sont inquiétés du montage financier. En ce qui me concerne et en ce qui concerne les Verts, nous nous sommes inquiétés des dégâts sur l'environnement de ce projet mastodonte et des risques majeurs que ce futur stade fera courir aux habitants, tant que des mesures drastiques n'auront pas été prises par les CFF.

A toutes nos questions nous n'avons pas encore, aujourd'hui, de réponses satisfaisantes. Ce sont ces inquiétudes-là que les initiants veulent faire trancher par le peuple. Nous estimons qu'ils ont raison et que cette initiative doit être soumise au plus vite aux citoyens de Genève.

M. Claude Blanc (PDC). Plus ça va et plus j'en entends de belles! Ce que je viens d'entendre en particulier me fait vraiment tomber les chaussettes! (Exclamations et rires.) Oui, elles ont même une fâcheuse tendance à tomber, la prochaine fois je les achèterai au Bon Génie! (Rires.)

Mme Bugnon nous accuse ce soir de faire traîner les travaux parlementaires en lançant des référendums... Mais où vivons-nous ? Les référendums se lancent précisément à la fin des travaux parlementaires pour donner au peuple, si nécessaire, le droit de se prononcer sur le résultat de ces travaux. Je ne sais pas combien de référendums ont été lancés depuis le début de la législature, sans doute trois ou quatre par année : vous les avez tous perdus, sauf un, et encore de justesse. Il faut donc croire que les lois que vous aviez votées, Mesdames et Messieurs, n'étaient pas tout à faire conformes à la volonté populaire, puisque le peuple vous a à chaque fois retoqués, à l'exception d'une fois!

Dire que nous retardons les travaux en lançant des référendums est aberrant, monstrueux... Le référendum est un élément essentiel du fonctionnement de notre démocratie... (Commentaires.) Oui, l'initiative aussi, alors venons-en à l'initiative! Le Grand Conseil, je l'ai déjà dit tout à l'heure, a déjà voté plusieurs lois dans cette affaire de la Praille et il n'y pas eu de référendum. Vous n'avez pas utilisé les droits populaires pour demander que ces lois soient soumises au peuple. En revanche, une fois que ces lois sont entrées en force, une fois qu'on a commencé à mettre en oeuvre les lois que nous avons votées et qui n'ont pas été contestées par référendum, vous lancez une initiative visant à tout arrêter. C'est cela qui me paraît monstrueux.

Personnellement, je crois que je passe pour un démocrate. J'ai toujours été respectueux du fonctionnement de nos institutions. Nous n'avons pas toujours été d'accord, mais je crois pouvoir dire aujourd'hui, à l'âge que j'ai atteint, que j'ai toujours considéré les droits populaires comme étant la base fondamentale du fonctionnement de notre Etat. J'y suis encore attaché et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle je suis sceptique en ce qui concerne l'intégration européenne. En effet, j'y vois surtout le risque d'un déficit démocratique - que certains d'entre vous voient aussi, du reste - et c'est ce qui me préoccupe le plus. Cela pour dire que je me place uniquement de ce point de vue, et là, franchement, je crois qu'à trop vouloir abuser des droits populaires, vous êtes en train de les tuer.

Maintenant, venons-en aux CFF. Il faudrait savoir ce que vous attendez des CFF. Le train, aux yeux de beaucoup d'entre vous, est la solution au développement durable : c'est le train à la place de la voiture, Madame Bugnon, vous êtes bien d'accord avec moi ? Or, les CFF ne transportent pas que des passagers de première classe, des passagers de la gauche caviar : ils transportent aussi toutes sortes de marchandises. On pourrait évidemment décider que les CFF sont réservés à la gauche caviar et que les marchandises - car il faut bien qu'elles circulent - voyagent par la route. Mais, vous savez bien que, partout où certaines marchandises transitent, il y a des risques. Et, s'il y a des risques majeurs à la gare de la Praille, il y a des risques majeurs dans tout le pays, autour de toutes les voies de chemin de fer, à commencer par la gare de Lausanne, qui est en pleine ville et qui a déjà connu le problème que l'on sait, et d'autres.

Par conséquent, ou bien les trains ne traversent plus les villes et vous irez en ville en voiture, ou bien les trains traversent les villes et vous êtes bien obligés d'admettre que tous les wagons y passent. Pour ma part, je ne comprends pas votre position : au nom du développement durable, vous voulez favoriser le transfert modal de la route au rail, mais quand le rail vous gêne, vous dites qu'il ne faut pas construire à proximité. C'est totalement incohérent, parce qu'avec ce raisonnement, si on transporte les marchandises dangereuses par la route, il faudra alors interdire de construire au bord des routes! Franchement, je ne sais pas où on va, mais plus j'en entends, plus je suis désespéré!

M. Pierre Vanek (AdG). Dans ce qu'a dit M. Blanc, il y a quelques points à relever et à critiquer! D'abord, Monsieur Blanc, votre dernière intervention sur les CFF n'est pas très sérieuse. Vous évacuez complètement la réalité des risques, s'agissant d'une gare de triage où des marchandises extrêmement dangereuses transitent à grande échelle et sont triées. Vous ne pouvez pas, d'un tour de passe-passe, dire que ce n'est pas plus dangereux là qu'à la gare de Lausanne. La problématique rappelée par mon collègue Pagani est, vous le savez, bien plus sérieuse que cela, elle ne se réduit pas à un problème de « gauche caviar »... En l'occurrence, nous ne remettons évidemment pas en cause le transfert des marchandises par le rail : nous remettons en cause les problèmes aigus et reconnus de sécurité de la gare de la Praille et l'opportunité de construire le stade et le centre commercial dans le voisinage, avec les concertations de personnes que cela suppose.

Vous avez parlé de la nécessité de promouvoir le rail pour qu'il y ait un transfert modal comme d'une priorité, que nous devrions effectivement tous soutenir. Pourtant, vous soutenez la construction d'un centre commercial qui va être une pompe à voitures et qui, en termes de transfert modal vers les transports publics et en termes de diminution de la charge sur l'environnement, est en tout cas, à défaut d'être une catastrophe, de nature à détériorer considérablement la situation. Vos remarques, Monsieur Blanc, ne sont donc, à mes yeux, pas très crédibles.

Maintenant, vous avez aussi dit des choses très justes. Pour ma part, je ne partage pas le point de vue de Mme Bugnon sur la question des référendums : le référendum est un droit populaire élémentaire et ces mesdames et messieurs d'en face ont raison d'en user. Nous l'avons fait à notre tour avec quelques succès également, vous me l'accorderez, Monsieur Blanc! Cela dit, on ne peut pas soutenir le principe du référendum et déclarer que l'initiative est inacceptable. Le référendum et l'initiative sont tous deux des instruments essentiels de notre démocratie semi-directe.

Monsieur Blanc, au-delà de simplement « passer » pour un démocrate, si vous aviez, sur le fond de cette affaire, des réflexes non pas politiciens, mais fondamentalement démocratiques, vous seriez heureux que nos concitoyens puissent se prononcer le plus vite possible, y compris d'ailleurs, le cas échéant, en partageant le point de vue des partisans du stade. En effet, je vous l'accorde aussi très volontiers, il est tout à fait possible que les partisans du projet gagnent. Ils auraient alors une autre légitimité que celle qu'ils ont aujourd'hui, compte tenu de l'historique du montage financier, des transferts de crédits, des divers débats qui ont été marqués par un manque certain de transparence... En l'état, je comprends que le comité en question, que ces citoyens se soient réveillés un tant soit peu tardivement; ils l'ont expliqué dans leur lettre et je partage d'ailleurs leurs critiques.

J'aimerais dire encore une chose. Monsieur Blanc, vous avez, dans votre première intervention, évoqué le lancement des référendums, en expliquant qu'ensuite, à partir d'un certain moment, on n'avait plus le droit de lancer une initiative et que, par conséquent, vous considériez celle-ci comme irrecevable, illégale. Là, vous vous montrez plus royaliste que ces «magnifiques seigneurs» du Conseil d'Etat, pour reprendre les termes de Pascal Holenweg dans la lettre qui nous a été lue. Le Conseil d'Etat considère en effet qu'il n'y a pas lieu, sur le plan de la recevabilité, de rejeter cette initiative et réaffirme «son attachement au respect des principes qui régissent un Etat de droit». En l'occurrence, lorsque 12 000 citoyens signent, dans les conditions prévues par la loi, un projet d'initiative, la moindre des choses est de saluer le fait, en permettant au peuple de trancher.

La barre des 10 000 signatures doit être atteinte pour qu'une initiative soit soumise au peuple. Messieurs les libéraux, vous savez que ce n'est pas un exercice évident. Vous avez récemment lancé un bouquet d'initiatives et j'entends encore tel ou tel de vos hérauts fanfaronner dans cette salle, ou du moins se montrer fier du programme politique constitué par ces initiatives sur la fonction publique, etc. : vous n'avez pourtant pas réussi à atteindre cette barre. C'est donc bien là un tri qui disqualifie effectivement certaines questions qui ne sont pas à poser au peuple. Ce tri, ce test concernant l'initiative pour un projet de stade raisonnable à la Praille a été positif. Les initiants ont atteint l'objectif et nous leur devons d'accepter que cette initiative passe, et ceci rapidement en votation populaire.

C'étaient là les conclusions de Dominique Hausser pour le parti socialiste. Je l'ai entendu avec intérêt dire toute la compréhension, la sympathie que le parti socialiste avait pour les initiants et pour certaines de leurs idées, mais je crois qu'on ne peut pas à la fois dire qu'on comprend, qu'on accepte, qu'on sympathise... et qu'on est contre! Il nous faut maintenant - il aurait mieux valu que ce soit plus rapide - nous prononcer sur le fond. Nous prononcer sur le fond des projets, c'est ce qui fait que nos débats politiques dans ce parlement ont un sens. Personnellement, je souscris, non pas à l'idée qu'il ne devrait pas y avoir de stade à la Praille, mais aux propositions qui sont faites dans cette initiative populaire. La question qui vous est posée, Mesdames et Messieurs les députés, puisque le rapport du Conseil d'Etat porte sur la prise en considération de cette initiative, ne consiste pas à dire si l'initiative vient un peu tard, mais ce qu'il est opportun de faire à la Praille. Des citoyens nous ont présenté une proposition alternative à ce qui est prévu : la majorité de notre groupe soutient clairement cette position.

Enfin, un mot sur le petit échange que nous avons eu au moment de la discussion de l'ordre du jour, au terme duquel M. le conseiller d'Etat Moutinot a pris la parole. En réponse à l'observation que j'avais faite concernant l'article 119 de la loi portant règlement du Grand Conseil, qui dit : «Dès que le Conseil d'Etat a constaté l'aboutissement d'une initiative, celle-ci est transmise à la commission législative pour l'examen de sa validité» - ce qui n'a pas été fait et qui aurait dû être fait depuis trois mois - M. le conseiller d'Etat Moutinot a affirmé que la commission législative n'avait qu'à s'en saisir, que c'était son affaire. Monsieur le conseiller d'Etat, je comprends d'autant moins votre position que vous êtes meilleur juriste que moi et que le texte de la loi est tout à fait clair. Vous avez constaté l'aboutissement de l'initiative : nous avons reçu un document qui, indépendamment de la question de la recevabilité, constate l'aboutissement de cette initiative et nous apprend que ce constat a été fait par arrêté du Conseil d'Etat pris le 22 décembre 2000.

En l'état, ce n'est pas à la commission législative de courir derrière le Conseil d'Etat pour obtenir que cette initiative populaire lui soit transmise, mais c'est évidemment au Conseil d'Etat de la transmettre automatiquement à la commission législative. Ou, si on voulait passer par les formes - non prévues par le règlement dans ce cas - qui sont celles, par exemple, du renvoi des pétitions, le renvoi automatique en commission par le Grand Conseil pouvait évidemment se faire à la première séance utile, soit celle de janvier 2001. Cela n'a pas été fait et sur ce point, Monsieur Blanc, je réitère donc ce que j'ai dit dans notre échange initial : les pertes de temps que vous déploriez ne sont en tout cas pas le fait des partisans de l'initiative. Elles sont le fait de ceux qui, du côté du Conseil d'Etat ou peut-être du Bureau du Grand Conseil, n'ont pas veillé à la très simple application de l'article 119 de la loi portant règlement de notre parlement.

La présidente. Mesdames et Messieurs, il reste trois députés inscrits : je vous propose de clore la liste des orateurs et de passer ensuite la parole à M. Moutinot.

M. René Koechlin (L). Mesdames, Messieurs, cette initiative est inacceptable, parce qu'elle bafoue la sécurité du droit et probablement aussi le fonctionnement de notre démocratie. A moins que, tout simplement, elle ne soit révélatrice d'une faiblesse, d'une faille du système.

Je m'adresse à ceux qui soutiennent cette initiative et qui, pour certains, se sont opposés, par exemple, au crédit que nous avons voté dans ce Grand Conseil pour la construction de la halle 6. Que ces personnes lancent une initiative contre cette réalisation quand cela leur semblera bon, alors que les travaux sont engagés et qu'on a déjà dépensé des millions pour la construction ! Mesdames et Messieurs, vous pourriez lancer une telle initiative : qu'adviendrait-il, si, par malheur, elle aboutissait ? On aurait dépensé des millions pour rien ? Qu'est-ce à dire ? C'est complètement incohérent; c'est d'une absurdité totale! Si notre démocratie nous autorise à entreprendre ce genre de démarche, c'est qu'elle comporte un défaut majeur. On ne peut pas commencer à construire, à dépenser des millions, et puis tout à coup dire non, stop, on arrête tout. Ce serait jeter tous ces millions au Rhône et se retrouver avec un chantier interrompu en pleine construction.

Qu'est-ce que cela signifie ? Et vous prétendez être sérieux ? Vous êtes en fait de véritables polichinelles de la démocratie, de cette démocratie que vous prenez pour une scène de théâtre comique! Pour ma part, j'ai toujours pensé que, dans ce Grand Conseil, on tentait de travailler sérieusement. Eh bien, ce soir ça n'est pas sérieux, c'est même scandaleux. Cette initiative, Mesdames et Messieurs, est scandaleuse. En outre, elle est révélatrice d'un dysfonctionnement de notre constitution, parce que, si elle est possible, si elle aboutit et qu'elle finit par être votée par le peuple, c'est vraiment que le système comporte une faille inadmissible. Dans ce cas, il faut corriger la constitution. Car sinon, si cette démarche est possible, je vous assure que, quand un projet nous déplaira, nous userons aussi de ce droit, naturellement! Nous vous laisserons aller très avant avec votre projet et quand vous ne pourrez vraiment plus faire machine arrière, vlan, nous déposerons une initiative, et vous verrez! Mais qu'est-ce que tout cela ? C'est n'importe quoi! Je suis scandalisé!

Enfin, je voudrais ajouter ceci. Quand vous dites que le stade en cause de 30 000 places est un projet mammouth, laissez-moi rire! J'ai connu le stade des Charmilles avant qu'il soit l'objet de maintes précautions, de ces directives sur la sécurité édictées par l'UEFA et autres instances. J'ai assisté à je ne sais combien de matches de football avec 40 000 spectateurs, à commencer par tous les matches qui ont eu lieu aux Charmilles en 1954, à l'occasion de la Coupe du monde... (L'orateur est interpellé.) Oui, 40 000 spectateurs, je peux vous sortir des articles de presse qui le confirment. Je peux même vous citer les matches. Il y a eu, peu de temps après la guerre, les matches Suisse-Belgique, Suisse-Suède : 40 000 spectateurs. Le match Servette-Dukla Prague, pour un des premiers championnats d'Europe : 40 000 spectateurs. Et tous les matches de la Coupe du monde : France-Mexique, Yougoslavie-Allemagne, et j'en passe. Tous ces matches comptaient 40 000 spectateurs; on installait des gradins en tubulaires pour pouvoir accueillir tout ce monde. Alors, ne me parlez pas d'un projet mammouth à propos d'un modeste stade de 30 000 places. Il est tout juste digne de Genève !

Soyez un peu raisonnables ! Nous allons renvoyer cette initiative en commission, parce qu'il faudra bien la traiter; mais nous devrions sérieusement penser à légiférer, en proposant une loi constitutionnelle qui corrige ce défaut; car je crois qu'il s'agit là vraiment d'un défaut de notre démocratie. (Applaudissements.)

M. Olivier Vaucher (L). Je me prononcerai uniquement sur le fond de cette initiative. Comme rapporteur de la commission d'aménagement, il y a à peu près deux ans, j'avais déjà donné des arguments qui me semblaient aussi complets qu'étayés. Ce soir, je rappellerai d'abord que ce stade répond, non seulement à une préoccupation cantonale, mais aussi à un programme national des sports, dont fait partie le nouveau stade de Bâle que nous venons d'inaugurer. Ce programme répond à une demande du public, de la population.

Ensuite, quand vous dites, Monsieur Pagani, que nous ferions mieux de construire de petites épiceries, je pose la question : qui demande des supermarchés, des grandes surfaces ? Je ne crois pas que ce soient les gens de nos rangs : ce sont tous ceux qui cherchent des produits compétitifs, lesquels ne peuvent se trouver que dans les grandes enseignes. Il est donc normal qu'on construise ces grandes surfaces, qui répondent à une demande largement populaire, de manière à satisfaire chacun.

En outre, il est normal, car ceci répond à une étude de marketing, de construire ces centres près des activités. Le marketing évolue, comme les besoins et les désirs de la population.

Par ailleurs, je trouve assez surprenant, voire amusant que, tout d'un coup, à l'occasion de ce projet de construction, on découvre qu'il y a des produits dangereux à la Praille. Mais, Mesdames et Messieurs des bancs d'en face, faites donc supprimer ces convois de produits dangereux et nous serons tout à fait d'accord avec vous. Mais ne venez pas nous dire que c'est le stade de la Praille qui a déclenché le transit de ces produits dangereux! En commission, le président du département concerné et les personnes auditionnées ont largement répondu à toutes nos préoccupations. Mme la députée Bugnon s'obstine à dire que nous n'avons pas eu de réponse : nous avons eu les réponses, Madame la députée, mais ce n'étaient pas celles que vous souhaitiez entendre et c'est pourquoi vous ne voulez pas vous en contenter.

Enfin, au sujet du montage financier, je rappellerai que toute opération de cette ampleur présente un certain risque. Mais les personnes qui sont impliquées dans ce montage financier - et on en a vu d'autres que, sur vos bancs, vous avez soutenues et largement! - sont conscientes de ces risques et les assument. Quant à vous, Monsieur Pagani, la manière dont vous blasphémez à propos d'un mécène de notre République, qui soutient notre économie, qui soutient l'emploi, qui soutient l'environnement puisqu'il a fait don d'un parc à la Ville, est particulièrement lamentable. Mais, venant de vous, on en a l'habitude et le peuple saura, un jour, trancher par rapport à des positions aussi lamentables!

M. Claude Blanc (PDC). Deux mots pour répondre à M. Vanek. Je n'ai jamais prétendu que l'initiative était irrecevable : j'ai seulement dit qu'elle était immorale, parce que constituant un abus de droit capable de tuer le droit!

M. Laurent Moutinot. Mesdames et Messieurs les députés, le droit constitutionnel en matière d'initiative vous oblige, dans un premier temps, à examiner la recevabilité d'une initiative et, si elle est recevable, dans un deuxième temps, à vous déterminer sur le fond. Nous en sommes aujourd'hui au débat de préconsultation en ce qui concerne la recevabilité. La commission législative va donc, dans un délai de six mois à partir d'aujourd'hui, devoir examiner si l'initiative répond aux conditions d'unité de genre, d'unité de forme, d'unité de la matière; si elle répond également au critère de la conformité au droit supérieur et au critère d'exécutabilité. C'est selon ces cinq critères que la commission législative va prendre sa décision.

Je ne vous cache pas que le Conseil d'Etat a eu, en préparant le message qu'il vous a adressé, les plus grands doutes quant à la recevabilité de l'initiative. Mais, dans le doute il faut, comme le dit le Tribunal fédéral, trancher en faveur de la recevabilité, et c'est ce que nous avons fait.

En ce qui concerne la construction du stade et du centre commercial, elle se fait en conformité avec toutes les lois que vous avez votées, avec toutes les décisions qui ont été prises, dont un certain nombre contrôlées par les tribunaux, puisque le plan localisé de quartier, notamment, avait fait l'objet de décisions judiciaires.

C'est par conséquent en toute légalité et même en toute légitimité que le processus de construction se poursuit. Imaginez, l'ombre d'une seconde, qu'une initiative soit déposée, réclamant une diminution du nombre des étrangers, et que l'on décide, afin de pouvoir l'appliquer si elle était acceptée, de ne plus accorder aucun permis de séjour tant qu'elle n'est pas votée! Ceci est impensable. Il faut donc être clair : le référendum a un effet suspensif sur les décisions que vous prenez, une initiative n'en a pas. Par conséquent, il est normal et légitime que les lois votées par le parlement soient mises en oeuvre.

J'ajoute que, dans le processus actuel, de très nombreux recours ont été interjetés. A ce jour, toutes les décisions relatives à ces recours, que ce soit celles de la commission de recours LCI, du Tribunal administratif du canton de Genève ou du Tribunal fédéral, ont confirmé la légalité de notre manière d'agir.

Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat vous suggère, dans un souci démocratique, d'accepter, à la limite, la recevabilité de cette initiative et vous invite, lorsque vous aurez à en traiter dans un deuxième temps, à la rejeter sur le fond.

IN 118-A

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.

IN 118

Cette initiative est renvoyée à la commission législative.  

PL 8426
7. Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur l'énergie (L 2 30). ( )PL8426

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article 1 Modifications

La loi sur l'énergie, du 18 septembre 1986, est modifiée comme suit :

Art. 4, al. 2 (nouvelle teneur)

2 Restent également réservées les dispositions sur l'énergie figurant dans d'autres textes légaux et réglementaires cantonaux.

Art. 6, al. 3 Producteurs indépendants (nouvelle teneur)

3 On appelle producteurs indépendants les exploitants d'installations productrices d'énergie auxquelles des entreprises chargées de l'approvisionnement de la collectivité participent à raison de 50 % au plus et qui produisent de l'énergie de réseau :

Art. 6A Procédure d'autorisation énergétique

1 L'article 3, alinéas 1 à 6 de la loi sur les constructions et les installations diverses, du 14 avril 1988, s'applique par analogie à la procédure en vue d'une autorisation prévue par la présente loi.

2 En particulier, les autorisations prévues par la présente loi qui sont liées à un projet de construction sont publiées simultanément aux autorisations définitives de construire. Elles ne sont exécutoires qu'après l'entrée en force des autorisations de construire, soit après l'expiration des délais de recours, soit après l'épuisement des voies de recours, y compris devant une juridiction fédérale.

Art. 15C Installations productrices d'électricité alimentées aux combustibles fossiles (nouveau)

1 La construction ou la transformation d'une installation productrice d'électricité alimentée aux combustibles fossiles est soumise à autorisation de l'autorité compétente. Cette disposition s'applique également aux installations de secours et aux installations non raccordées au réseau.

2 L'autorisation n'est accordée que si la preuve est apportée par le requérant que :

Art. 21A Obligation de reprise (nouvelle teneur)

1 Lorsque les conditions techniques ou de gestion du réseau le permettent, les Services industriels de Genève ont l'obligation de reprendre l'énergie de réseau produite par les producteurs indépendants.

2 Les conditions de reprise de cette énergie sont fixées par contrat passé entre les parties.

3 Les Services industriels rachètent l'énergie selon un tarif correspondant aux conditions suivantes :

4 Dans des cas isolés, le tarif de reprise peut être réduit jusqu'au minimum prévu par le droit fédéral s'il y a disproportion manifeste entre son taux et les coûts de production.

5 Les litiges sont tranchés par l'autorité compétente.

Art. 22A Chauffage d'endroits ouverts (nouveau)

1 Les installations de chauffage d'endroits ouverts tels que terrasses, rampes, passages et autres emplacements analogues, ainsi que les piscines et rideaux d'air chaud à l'entrée des immeubles, ne sont autorisées que si ce chauffage se fait exclusivement à l'aide d'énergies renouvelables ou de rejets de chaleur.

2 L'autorité compétente peut accorder des dérogations si le requérant justifie d'un besoin impératif, d'un intérêt public ou de mesures visant à la conservation de l'énergie.

Art. 22B  Climatisation (nouveau)

1 Les installations de climatisation dans les bâtiments sont soumises à autorisation.

2 Est réputée installation de climatisation une installation de ventilation comportant une production de froid.

3 L'autorité compétente n'autorise une installation de climatisation que si elle répond à un besoin réel. Le projet doit, en outre, être conçu de manière à limiter au maximum la consommation d'énergie et à s'intégrer dans un concept énergétique global du bâtiment.

4 Les installations de climatisation ne correspondant pas à certains critères (indices énergétiques, puissance spécifique, notamment) fixés dans le règlement sont interdites.

5 L'autorisation visée à l'alinéa 1 peut être assortie notamment des conditions suivantes :

Art. 22C Rejets de chaleur (nouveau)

1 Les installations ou équipements faisant partie intégrante d'une construction qui produisent des rejets de chaleur doivent être équipés d'un système de récupération de chaleur, agréé par l'autorité compétente.

2 L'autorité compétente peut renoncer à imposer cet équipement pour toutes installations produisant des rejets de chaleur de peu d'importance ou non récupérables.

Art. 22D Décompte individuel des frais de chauffage (nouveau)

Dans les bâtiments où il existe au moins 5 utilisateurs d'une installation de chauffage central, des dispositifs permettant de déterminer la consommation effective d'énergie pour le chauffage et sa répartition entre les utilisateurs doivent être mis en place, afin de permettre l'établissement du décompte individuel des frais de chauffage.

Art. 22E Bâtiments neufs (nouveau)

1 La conception de l'installation de distribution de chaleur dans les bâtiments neufs doit permettre la mesure effective de la chaleur fournie aux utilisateurs.

2 Les bâtiments conformes au standard Minergie sont dispensés de l'installation du décompte individuel des frais de chauffage.

Art. 22F Bâtiments antérieurs à 1993 (nouveau)

1 Les bâtiments ayant fait l'objet d'une autorisation de construire antérieure au 1er janvier 1993 et qui comportent une installation de chauffage central doivent être équipés de dispositifs de saisie de la consommation individuelle d'énergie de chauffage et chaque local chauffé doit être équipé d'un dispositif permettant à l'utilisateur d'en fixer la température ambiante et de la régler, sous réserve des exceptions prévues aux alinéas 2 à 4 du présent article.

2 Sont dispensés les bâtiments existants pour lesquels la technologie prévue à l'alinéa 1 n'est pas applicable, notamment lorsqu'ils sont équipés :

En outre, certains locaux ne doivent pas être équipés d'un dispositif de réglage, notamment lorsque des sondes de température pour le régulateur de l'installation y sont installées.

3 Des dérogations à l'alinéa 1 peuvent être consenties par l'autorité compétente lorsqu'il s'agit de bâtiments voués à une démolition prochaine ou lorsque l'installation des dispositifs prévus à l'alinéa 1 heurterait des objectifs de protection du patrimoine.

4 L'alinéa 1 n'est pas applicable lorsqu'il en résulterait des coûts disproportionnés par rapport au résultat obtenu, notamment lorsque l'indice de dépense de chaleur des bâtiments concernés est inférieur à celui fixé par le règlement d'application. A cette fin, l'autorité compétente calcule, conformément à l'article 15B de la présente loi et à son règlement d'application, l'indice de dépense de chaleur pour tous les bâtiments visés à l'alinéa 1 et avise le propriétaire de chaque bâtiment du résultat de ce calcul. Le propriétaire peut, dans le délai de 30 jours dès sa réception, déposer contre l'avis précité une réclamation auprès de l'autorité compétente, laquelle procède à un réexamen du calcul de l'indice de dépense de chaleur.

5 L'autorité compétente notifie une décision d'assujettissement au propriétaire de tout bâtiment dont la valeur moyenne des indices de dépense de chaleur des deux dernières années est supérieure à celle fixée dans le règlement d'application. Le propriétaire du bâtiment assujetti dispose d'un délai de 2 ans pour installer les dispositifs prévus à l'alinéa 1 et pour introduire le décompte individuel des frais de chauffage ou ramener l'indice de dépense de chaleur à une valeur inférieure à celle fixée par le règlement d'application.

6 L'autorité compétente peut prolonger les délais prévus à l'alinéa 5 lorsque les circonstances le justifient.

7 Le propriétaire fournit à l'autorité compétente les données nécessaires à la détermination de l'indice de dépense de chaleur dans les délais fixés par le règlement d'application.

Art. 22G Transformation lourde (nouveau)

Les bâtiments subissant une transformation lourde sont assimilés à des bâtiments neufs.

Art. 22H Décompte individuel des frais d'eau chaude (nouveau)

Dans les bâtiments où il existe au moins 5 utilisateurs, des installations permettant de déterminer la consommation effective d'eau chaude sanitaire et sa répartition entre chaque utilisateur doivent être mises en place, afin de permettre l'établissement de décomptes individuels des frais d'eau chaude sanitaire.

Art. 22I Bâtiments neufs (nouveau)

1 Les bâtiments neufs doivent être équipés de compteurs individuels d'eau chaude permettant de déterminer la consommation effective de chaque utilisateur.

2 Les bâtiments conformes au standard Minergie sont dispensés de l'installation du décompte individuel des frais d'eau chaude.

Art. 22J Bâtiments antérieurs à 1993 (nouveau)

Les bâtiments ayant fait l'objet d'une autorisation de construire antérieure au 1er janvier 1993 et dans lesquels un tel procédé peut techniquement être mis en place doivent également en être équipés.

Art. 22K Transformation lourde (nouveau)

Les bâtiments subissant une transformation lourde sont assimilés à des bâtiments neufs.

Art. 22L Dérogations (nouveau)

Des dérogations à l'article 22H peuvent être consenties par l'autorité compétente lorsqu'il s'agit de bâtiments voués à une démolition prochaine ou lorsque l'installation des dispositifs prévus à l'article 22H heurterait des objectifs de protection du patrimoine.

Art. 22M Information des locataires

Le propriétaire a l'obligation d'informer au préalable et par écrit les locataires lorsqu'il va procéder à la mise en place d'installations permettant de déterminer la consommation individuelle d'énergie de chauffage et d'eau chaude sanitaire.

Art. 24 Recours (nouvelle teneur)

Le recours contre les décisions prises en vertu de la présente loi ou de ses dispositions d'application est régi par les articles 145 à 150 de la loi sur les constructions et les installations diverses, du 14 avril 1988.

Article 2 Modifications à une autre loi

La loi sur les constructions et les installations diverses, du 14 avril 1988, est modifiée comme suit :

Art. 4, al. 6, phr. 2 (nouvelle teneur)

Le présent alinéa s'applique par analogie aux autorisations énergétiques et aux autorisations d'abattage d'arbres délivrées par le Département de l'intérieur, de l'agriculture, de l'environnement et de l'énergie en relation avec une autorisation de construire.

Art. 116 Dispositions spéciales (nouvelle teneur)

Au surplus, les dispositions de la loi sur l'énergie, du 18 septembre 1986, sont réservées.

Art. 117 abrogé

Art. 118 abrogé

Art. 119 abrogé

Art. 119A abrogé

Art. 119B abrogé

Art. 119C abrogé

Art. 119D abrogé

Art. 119E abrogé

Art. 119F abrogé

Art. 119G abrogé

Art. 119H abrogé

Art. 119I abrogé

Notre loi cantonale sur l'énergie date du 18 septembre 1986. Elle a connu sa dernière modification matérielle le 9 avril 1992. Depuis lors, le contexte du droit de l'énergie s'est modifié : une loi fédérale sur l'énergie est entrée en vigueur le 1er janvier 1999. L'expérience faite dans la pratique permet d'autre part, dans une perspective pragmatique, d'adapter certaines dispositions.

Le présent projet de loi se limite à cela : proposer un certain nombre d'adaptations du droit cantonal de l'énergie qui découlent du nouveau droit fédéral ou du souci de simplifier, clarifier les dispositions existantes. Une éventuelle revision plus ambitieuse prendrait, elle, davantage de temps ; il importera d'en examiner l'opportunité et les modalités dans un second temps, à la lumière également de la réorganisation administrative qui est en cours au sein du Département de l'intérieur, de l'agriculture, de l'environnement et de l'énergie pour mieux refléter l'évolution du rôle de l'Etat dans le domaine de l'énergie.

Le présent projet de loi comporte ainsi 4 volets :

La loi fédérale sur l'énergie entrée en vigueur le 1er janvier 1999 (qui a succédé à l'arrêté fédéral du 14 décembre 1990 pour une utilisation économe et rationnelle de l'énergie) prescrit à son article 6 :

Art. 6 Installations productrices d'électricité alimentées aux combustibles fossiles

Avant d'autoriser la construction ou la transformation d'une installation productrice d'électricité alimentée aux combustibles fossiles, l'autorité compétente en vertu du droit cantonal étudie :

a) si la demande d'énergie peut être raisonnablement couverte au moyen d'énergies renouvelables ;

b) les possibilités d'utiliser judicieusement les rejets de chaleur.

Le nouvel article 15C de la loi sur l'énergie proposé par le présent projet de loi répond à cette obligation en s'inspirant de la législation neuchâteloise.

C'est une des originalités de la loi genevoise d'avoir institué un encouragement financier très substantiel pour les installations autonomes productrices d'électricité, dans l'idée d'encourager en particulier les énergies renouvelables, en prévoyant que les Services industriels de Genève ont l'obligation de reprendre le courant à un montant particulièrement élevé : trois fois son prix de vente aux consommateurs.

Le nouveau droit fédéral a systématisé cette pratique par un régime qui constitue un minimum auquel tous les cantons sont tenus. La réglementation fédérale distingue utilement les différents cas de figures et s'appuie pour le surplus sur une commission consultative spécialisée.

Il apparaît dès lors judicieux et opportun d'adapter le droit cantonal de manière à ce que, par économie de moyens, il puisse ainsi bénéficier des directives fédérales sans avoir à édicter les siennes propres. Cela n'exclut d'ailleurs nullement le souci d'un effort plus marqué qu'avait voulu le législateur, et cela est reflété par la proposition de quadrupler le prix prévu sur le plan fédéral lorsqu'il s'agit d'installations productrices utilisant une énergie renouvelable et de le doubler pour les installations hydrauliques. Mais il y a aussi lieu de ne pas faire bénéficier d'un régime aussi favorable des installations pour lesquelles cela ne se justifie pas ou correspond à un effet d'aubaine.

La modification de ces dispositions s'inscrit également dans la suite de la mise en place d'une bourse solaire par laquelle les Services industriels encouragent la réalisation d'installations photovoltaïques, et en prélude à la future libéralisation du marché de l'électricité qui verra en particulier la demande se segmenter notamment en fonction de critères tels que l'origine de l'électricité produite. Il y aura lieu de garantir que le surcoût de cette volonté politique ne lèse pas la situation concurrentielle des SIG si la future loi fédérale sur le marché de l'électricité entre en vigueur (en l'état actuel des travaux, elle prévoirait une disposition dans ce sens).

La nouvelle teneur de l'article 6, alinéa 3 et de l'article 21A de la loi sur l'énergie répond à ces préoccupations.

Pour des raisons systématiques et historiques, le droit cantonal de l'énergie se trouve divisé entre une loi sur l'énergie et des dispositions figurant dans la loi sur les constructions et les installations diverses. La pratique a montré qu'il était souhaitable de clarifier les rapports entre autorisations de construire et autorisations énergétiques sous deux aspects :

Le Conseil d'Etat vous propose dès lors de transférer de la loi sur les constructions vers la loi sur l'énergie les dispositions relatives à des décisions spécifiques dont la maîtrise technique dépend de l'Office cantonal de l'énergie. Il s'agit des actuels articles 116 à 119I de la loi sur les constructions qui deviennent les nouveaux articles 22A à 22M de la loi sur l'énergie.

Le présent projet de loi prévoit en corollaire, pour garantir une étroite coordination et comme cela s'est fait dans d'autres domaines, d'aligner sur le plan formel la publication et le traitement des diverses décisions concernant un même projet de construction, et d'adopter pour les autorisations découlant de la politique énergétique la même procédure et la même voie de recours que pour les autorisations de construire (art. 4, 6A et 24 de la loi sur l'énergie, art. 4 de la loi sur les constructions et les installations diverses).

Minergie est un standard reconnu dans le domaine de la construction qui minimise de manière remarquable la consommation d'énergie d'un bâtiment, tout en améliorant le confort des utilisateurs et l'hygiène du bâtiment. Pour encourager les maîtres de l'ouvrage à opter pour des constructions Minergie (et sans préjudice d'autres dispositions qu'il y aurait lieu de prendre dans ce sens), il paraît opportun de les dispenser de l'obligation d'installer un dispositif de décompte individuel des frais de chauffage et d'eau chaude.

Tel est l'objet de l'alinéa 2 ajouté aux nouveaux articles 22E et 22J de la loi sur l'énergie (actuels articles 119A et 119E de la loi sur les constructions et les installations diverses).

Le Conseil d'Etat saisit l'occasion de ce projet de loi pour vous proposer de rectifier deux anomalies de la législation :

* * *

Au bénéfice de ces explications, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à faire bon accueil à ce projet de loi.

Préconsultation

M. Pierre Vanek (AdG). Dans ce débat de préconsultation, je serai bref, d'autant que la commission de l'énergie et des Services industriels a déjà empoigné le sujet de manière anticipée et pris connaissance avec intérêt de ce projet de loi.

Au nom de mon groupe, je dirai que ce projet de loi participe d'une démarche que nous accueillons avec grand plaisir. Nous l'avons vu à l'occasion d'un certain nombre d'affaires, et cela a même fait l'objet d'une motion renvoyée à la commission de l'énergie, il était nécessaire de «resserrer les boulons» en matière de procédure législative et administrative concernant l'ensemble de la politique de l'énergie. De ce point de vue, sans me prononcer plus avant sur le contenu de celle-ci, il y a probablement matière à enrichir ce projet de loi d'un certain nombre de dispositions, notamment celles qui pourraient être tirées du «Modèle des prescriptions énergétiques des cantons», édition 2000, qui a été approuvé par la Conférence des directeurs cantonaux de l'énergie et qui contient toute une série de propositions dont certaines sont, à mes yeux, bienvenues, en les adaptant le cas échéant à nos spécificités genevoises.

Il est donc probable que nous pourrons enrichir encore ce projet de loi du Conseil d'Etat. Je pense, par exemple, au fait de soumettre - non pas de manière ad hoc, comme cela a été le cas dans l'affaire de l'opérateur télécom Digiplex - mais de soumettre systématiquement certains gros consommateurs d'électricité à une procédure d'examen et d'optimisation de leur consommation électrique préalable. Ce type de démarche, qui a été décriée par certains comme surprenante ou inacceptable, on en retrouve des éléments dans les propositions qui nous sont faites par cette instance intercantonale.

C'est donc dans un esprit constructif, conforme à l'application de l'article 160C de notre constitution relatif à la politique énergétique, dans un esprit antinucléaire, qui fait quasiment l'unanimité dans ce canton, que nous allons travailler en commission de l'énergie. Enfin, je tiens à saluer la rapidité avec laquelle le Conseil d'Etat a travaillé, suite aux affaires que j'évoquais plus haut, en déposant le 19 décembre déjà ce projet de loi modifiant, et tendant effectivement à l'améliorer, la loi sur l'énergie.

M. Jean Rémy Roulet (L). Notre groupe appuiera bien sûr le renvoi de ce projet de loi en commission de l'énergie. Il est prêt à en soutenir le contenu, qui consiste en un toilettage en quatre volets de la loi cantonale sur l'énergie. C'est sur le troisième de ces volets que notre groupe se montrera le plus attentif, à savoir celui qui vise à assurer une meilleure collaboration interdépartementale en matière d'autorisation de construire. Nous sommes persuadés, sans avoir étudié en profondeur le contenu de ce volet, que le souci de nos autorités est de simplifier et non de rendre plus long, plus fastidieux le processus d'autorisation de construire, autorisation de construire un site de production industrielle énergivore, par exemple. Nous ne voudrions pas, en effet, que les entreprises, petites ou grandes, dépendantes d'inputs énergétiques importants et souhaitant se développer dans notre canton, rencontrent des problèmes administratifs supplémentaires. L'acte de construire à Genève équivalant déjà à un véritable parcours du combattant.

Sur le plan purement formel, nous nous félicitons du fait que le Conseil d'Etat, dans son exposé des motifs, n'ait pas tenu compte des difficultés rencontrées, ces dernières semaines, par une jeune société multinationale qui a souhaité s'installer dans notre canton. Cela présuppose que le dépôt de ce projet de loi est totalement indépendant du recours sur autorisation de construire dont a fait l'objet cette société. Cela présuppose que le Conseil d'Etat est resté sourd aux pressions médiatiques disproportionnées, d'une certaine presse d'ailleurs, à l'égard de cette société. Tout au plus oserons-nous espérer que cette société pourra rapidement commencer ses activités, génératrices d'emplois pour notre canton. Cela présuppose, pour conclure, que le Conseil d'Etat n'a pas légiféré à partir d'un simple cas particulier, mais bien à partir de considérations de politique cantonale de l'énergie.

Dans ces conditions, le groupe libéral tâchera d'apporter sa contribution constructive, vide de recours abusif, lors de l'étude de ce projet de loi, utile à une bonne gestion de l'énergie cantonale.

M. Roger Beer (R). Ce projet de loi arrive au bon moment, compte tenu de la reprise économique qui pose de sérieux problèmes de consommation d'énergie à Genève. Une motion, déjà annoncée avant Noël, a d'ailleurs soulevé le problème de ces nouveaux emplois qui pourraient être créés à Genève suite à la reprise, mais qui nécessitent énormément d'énergie.

Par rapport à notre législation, mais également par rapport au souci du développement durable et aux préceptes de l'Agenda 21 que veut respecter notre canton, il était normal que la loi sur l'énergie, qui date de 1992, soit réactualisée, revisitée, plus que simplement toilettée. Les quatre volets abordés dans ce projet répondent à un certain nombre de préoccupations et c'est effectivement réjouissant. En 1991-1992, il y avait eu une guerre des tranchées sur le fait que les SIG puissent reprendre l'énergie produite de façon écologique, l'énergie renouvelable en quelque sorte, produite par d'autres. Ceci pose le problème de savoir à quel prix cette énergie est produite et à quel prix cette énergie peut effectivement être reprise et recyclée par les Services industriels. Dans ce projet, les règles sont très précises. En commission, nous avons déjà abordé cette discussion, elle est extrêmement ardue et je pense qu'on essaiera de simplifier un peu la procédure.

Aborder, dans cette loi, la simplification des procédures dans les autorisations de construire est également une bonne chose. Les premières discussions en commission ont toutefois montré qu'on n'était pas encore tout à fait prêt à comprendre la notion de simplification. Nous avons déjà eu l'occasion d'expliquer à M. le conseiller d'Etat Cramer que nous nous réjouissions d'avoir des exemples montrant qu'on n'allait pas doubler la procédure, mais bien la simplifier et la coordonner. Je crois que cette loi permettra une amélioration sur ce point.

Enfin, le dernier point concerne toute l'affaire du standard Minergie, qui supprime l'obligation d'installer le dispositif de décompte individuel de chauffage, en contrepartie de meilleurs standards et de meilleurs critères de construction, plus écologiques et à meilleur rendement, bien sûr, s'agissant du chauffage.

Le groupe radical est donc enchanté par le dépôt de ce projet de loi. Nous allons le discuter en commission. Vous savez que se pose, comme l'a relevé le député Roulet, la question du coût des différentes mesures, pour qu'elles soient économiquement supportables et digérables sur le plan environnemental.

Nous accepterons évidemment le renvoi en commission, puisque le projet y est déjà. A ce propos, je dois dire que, tout à l'heure, j'ai eu un peu peur que personne ne s'exprime, Madame la présidente! En effet, cela fait trois mois que je demande, en tant que président de la commission de l'énergie, que ce projet nous soit renvoyé sans préconsultation, mais on me répondait qu'il y aurait un débat. Or, au début, je n'ai vu personne lever la main... Mais enfin, les choses sont rentrées dans l'ordre, les groupes se sont exprimés et ce projet sera donc, je l'espère, formellement renvoyé en commission.

M. Robert Cramer. Il est vrai, Monsieur Beer, que ce débat n'a peut-être pas la passion et la fougue qu'il aurait eues, s'il avait eu lieu il y a un ou deux mois, au moment où le Conseil d'Etat a déposé le projet de loi. Cette absence de passion est vraisemblablement due au fait que l'objet a été un peu défloré par les premières discussions en commission et au fait que les uns et les autres ont compris dans quelle perspective le Conseil d'Etat avait déposé ce projet de loi.

Il est vrai également, Monsieur Roulet, que ce projet de loi a peut-être été déposé un peu plus rapidement que prévu, parce que l'actualité le demandait. Mais, dans le même temps, je dirai qu'il était envisagé presque depuis le début de la législature et qu'en tout cas, avec M. Moutinot, nous en avions décidé le principe il y a déjà quelques mois. Ensuite, il a fallu mettre tout cela sur pied et, ma foi, l'actualité a amené l'administration à travailler à un rythme un peu plus rapide, un peu plus soutenu que son rythme habituel.

Quelle est notre perspective ? Assurément pas celle de vouloir rendre les procédures plus complexes. Dans le domaine de l'énergie et dans les rapports entre les domaines de l'énergie et de la construction, les procédures ne sont déjà pas très simples. Notre volonté est d'arriver à les simplifier le plus possible, aussi bien au niveau de la coordination interdépartementale - c'est-à-dire entre le département en charge de l'énergie et le département en charge de la construction - qu'au niveau des rapports avec les personnes ou les mandataires qui déposent des demandes en autorisation de construire pour des objets impliquant des dépenses énergétiques. Dans une certaine mesure, ce qui nous a inspirés, ce sont les bonnes expériences que nous avons faites, entre le DAEL, chargé des autorisations de construire, et le DIAE, chargé de l'environnement, dans le domaine de la gestion des déchets. Monsieur Roulet, vous qui êtes non seulement un observateur attentif et un acteur de la vie politique, mais également un acteur au sein des associations professionnelles, vous savez que, dans le domaine de la gestion des déchets, nous avons recherché la simplification et que notre objectif était d'arriver au principe du guichet unique.

Dans le domaine des installations qui consomment beaucoup d'énergie, notre ambition est la même. Nous souhaitons simplifier les choses et arriver à un système de guichet unique, qui présente le grand avantage pour l'administré de ne pas devoir faire face à une multiplicité d'interlocuteurs, et qui offre la garantie, pour l'administration, que tous les problèmes auront été effectivement traités et avec sérieux.

A ce stade du débat d'entrée en matière, je vous remercie pour l'accueil favorable que vous réservez à ce projet de loi. Je vous remercie également pour la façon constructive dont les discussions sont d'ores et déjà menées en commission. Je suis persuadé que nous arriverons à trouver tous ensemble des solutions permettant que - dans l'optique du développement durable - les préoccupations environnementales se retrouvent, mais, dans le même temps, que cela ne se fasse pas au détriment de certaines préoccupations légitimes portées par les milieux qui veulent une économie dynamique et performante dans notre canton.

Ce projet est renvoyé à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève. 

PL 7860-A
8. Rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Rémy Pagani, Anita Cuénod, Pierre Vanek, Dolorès Loly Bolay, Jeannine de Haller, Christian Grobet, Christian Ferrazino et René Ecuyer modifiant la loi sur l'administration des communes du 13 avril 1984 (B 6 05). ( -) PL7860
Mémorial 1998 : Projet, 3326. Renvoi en commission, 3332.
Rapport de M. Alain Charbonnier (S), commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil

Sous la présidence de Mme Micheline Spoerri, puis de Mme Mireille Gossauer-Zurcher, la Commission des droits politiques et règlement du Grand Conseil s'est réunie les 31 mai, 7, 14, 28 juin, 13 septembre, 1er et 8 novembre 2000, pour travailler sur ce projet de loi 7860 donnant les compétences aux conseillers municipaux pour adopter des règlements.

Tout au long de ses travaux, la commission a pu compter sur la participation de M. le conseiller d'Etat Robert Cramer, chargé du Département de l'intérieur, de l'agriculture, de l'énergie et de l'environnement, de M. René Kronstein, directeur de l'Administration des communes et de M. Patrick Ascheri, chef du Service des votations et élections.

Les excellents procès-verbaux furent exécutés par Mme Pauline Schaeffer, M. Christophe Vuilleumier et M. Carlos Orjales. Que toutes ces personnes, soient remerciées ici pour leur aide précieuse.

Le Conseil municipal de la Ville de Genève fut l'instigateur de ce projet de loi, en votant le 16 mars 1999, à la quasi-unanimité, une résolution (annexe 1) proposée par le groupe socialiste. Cette résolution demandait une révision partielle de la loi sur l'administration des communes (B 6 05) visant à revoir les compétences respectives du Conseil municipal et du Conseil administratif, du maire et des adjoints. Elle demandait les modifications de l'art. 30, alinéa 1, qui ajoute aux attributions du Conseil municipal, la faculté de délibérer sur les règlements municipaux de portée générale, et de l'art. 48, en lui donnant la nouvelle teneur suivante : d'édicter les règlements d'exécution.

Les auteurs du projet de loi 7860 relèvent dans leur exposé des motifs, le peu de pouvoir offert aux conseillers municipaux par rapport aux conseils administratifs et aux maires, par notre système institutionnel. En effet, l'article 30 de la loi sur l'administration des communes (LAC) donne une liste limitée et très exhaustive de la compétence des conseils municipaux. Cet article 30 de la LAC ne donne que deux possibilités aux conseil municipaux de délibérer sur des règlements : le statut du personnel et l'échelle des traitements et des salaires, ainsi que les plans d'utilisation du sol et leurs règlements d'application.

La possibilité pour les conseillers municipaux d'intervenir au niveau des règlements devrait apporter une rectification et un changement important dans la répartition du pouvoir communal.

Par la voix de son président, l'ACG se déclare tout à fait opposée à ce projet de loi. Les maires et les conseillers administratifs des communes estiment que la loi sur l'administration des communes (LAC) définit clairement les compétences respectives de l'exécutif et du délibérant. Ils estiment que l'on se retrouvera avec un conflit de compétences entre le Conseil municipal et l'exécutif. De là pourrait découler de la part de l'exécutif, une crainte pour l'adoption de normes pour se contenter de prendre des décisions au coup par coup. Ils craignent aussi que les conseils municipaux ne se mettent à délibérer sur des règlements dans tous les domaines, allongeant de plus les procédures, car ceux-ci seraient soumis au référendum facultatif.

M. le maire déclare que le Conseil administratif de la Ville de Genève, partage la position de l'ACG et redoute l'émergence de conflits entre Conseil municipal et Conseil administratif, car l'art. 30 de la LAC est modifié, tout en conservant l'art. 48 qui donne des compétences au Conseil administratif.

M. .

organisation d'une Commission d'organisation et d'informatique ;

utilisation et accès de la petite salle des archives au Palais Eynard ;

économat municipal ;

protection de la santé, l'hygiène et l'ergonomie pour le personnel municipal ;

utilisation des salles de réunions ;

matériel de fêtes ;

divers règlements fixant les conditions d'octroi des bourses ;

livres et disques ;

commission d'achat dans les différents musées de la Ville de Genève, etc.

M. Erhardt voit que, si l'on suit la proposition visée à l'article 30, al. 2 (nouveau), ce type de règlement deviendrait l'affaire du Conseil municipal. Sur ce chapitre de tels règlements feraient alors l'objet d'une adoption sous la forme d'une délibération soumise au référendum, un constat qu'il juge problématique.

M. Vaissade relève que dans la résolution votée par le Conseil municipal de la Ville de Genève, il avait été fait une distinction entre les règlements de la compétence de l'article 30.

M. Vaissade constate effectivement que, tel que le projet de loi en question est libellé, on en déduit que tous les règlements pourraient être édictés par le Conseil municipal. Dans ces conditions il conviendrait d'en cibler le spectre avec une attention toute particulière, si le projet de loi 7860 était adopté en commission.

Suite aux auditions et par les auteurs eux-mêmes il est relevé trois problématiques que semble poser ce projet de loi. Premièrement, le texte n'est pas très claire, si le Conseil municipal peut ou doit adopter sous forme de délibération les règlements. Deuxièmement, la délibération entraîne de facto le référendum facultatif. Troisièmement, la crainte des conseils administratifs et des maires de voir émerger des conflits entre les deux instances, le Conseil municipal et l'exécutif.

Les auteurs du projet de loi sont tout de suite très claires et proposent d'amender le projet de loi, en y inscrivant : « Le Conseil municipal peut adopter... ». La volonté des auteurs est que le Conseil municipal puisse adopter des règlements sur des questions qu'il juge importantes ou lors d'un éventuel différend avec l'exécutif. Ils soulignent d'ailleurs, que dans le projet de loi l'on retrouve : « des règlements » et non pas « les règlements ».

La possibilité que ces délibérations sur des règlements soient soumises au référendum, n'a pas échappé aux auteurs. Pour eux, cela permettra au Conseil municipal d'apprécier l'éventualité d'un référendum par rapport à une décision qu'il serait amené à prendre dans le cadre de ce « peut ».

Dans le souci d'éviter des conflits entre le Conseil municipal et l'exécutif, les auteurs font aussi la proposition d'un amendement, qui modifie l'art. 48 de la LAC, qui donne des compétences à l'exécutif, comme suit :

v) (nouvelle teneur) d'édicter les règlements municipaux dans les domaines où le Conseil municipal n'a pas fait usage de la prérogative que lui accorde l'article 30, al. 2, à l'exclusion des domaines où les lois donnent cette compétence au Conseil municipal ;

w) (nouvelle teneur) d'édicter les dispositions d'application des règlements municipaux adoptés par le Conseil municipal ;

w) actuelle devient x).

Le projet de loi 7860 tout au long des travaux fut traité parallèlement à trois autres projets de lois (8096, 8097 et 8102) qui demandent eux aussi des modifications de la loi sur l'administration des communes (LAC). La question s'est donc posée, fin juin 2000, de savoir si après l'audition de l'Association des communes genevoises (regroupant conseils administratifs, maires et adjoints) et du Conseil administratif de la Ville de Genève, il n'était pas opportun de faire un sondage auprès des conseils municipaux. Le débat s'est engagé au sein de la commission et finalement, une majorité a décidé de ne pas effectuer le sondage, devant la lourdeur de la tâche et le temps trop important que cela pourrait prendre. Malgré cette décision, M. Cramer, conseiller d'Etat, a tout de même décidé d'effectuer le sondage sur les 4 projets de loi auprès des conseillers municipaux de tout le canton, argumentant de l'utilité de connaître l'avis des premiers intéressés.

Les résultats de ce sondage ont été distribués fin octobre 2000 (annexe 2). Concernant le projet de loi 7860, on s'aperçoit qu'une majorité de conseillers municipaux y sont favorables.

M. Cramer signale que le projet de loi 7917. Il explique que cela permettrait aux Conseils municipaux de faire le même travail que le Grand Conseil et qu'ils pourraient dès lors discuter des horaires de la déchetterie ou du règlement du cimetière. M. Cramer estime que ce genre de débat est du type de ceux qui devraient se tenir entre le Conseil municipal et l'exécutif, mais qu'il faudrait éviter que le Conseil municipal prenne des décisions ponctuelles, tel que le choix des employés de la commune ou leur salaire.

Un nouvel amendement est alors proposé, toujours par les auteurs du projet de loi, à l'art. 30, al. 2, d'ajouter à règlements : de portée générale.

Sur le projet de loi 7860 sans les amendements proposés, les groupes politiques sont partagés. L'Alternative est unanime à soutenir ce projet, elle souhaite donner aux conseils municipaux un rôle plus important et plus actif. Qu'ils deviennent plus que de simples lieux d'enregistrement de décisions des exécutifs et qu'ils obtiennent davantage de compétences « législatives », imitant en quelque sorte les rapports entre le Grand Conseil et le Conseil d'Etat.

Les partis de l'Entente ne trouvent, eux, aucun intérêt à ce projet de loi et y sont opposés, par crainte surtout d'un mélange des compétences entre le Conseil municipal et l'exécutif.

Le vote d'entrée en matière confirme ces positions et est accepté par la majorité de la commission.

Les amendements proposés furent votés sans ouvrir de débat, alors qu'ils apportent une nette clarification au projet de loi. Ceux-ci modifient des articles, ce qui permettra d'empêcher tout conflit de compétences entre le Conseil municipal et le Conseil administratif ou le maire et les adjoints.

Par ce projet de loi, les conseillers municipaux obtiendront de nouvelles compétences. Celles-ci vont certainement changer beaucoup d'habitudes dans les rapports entre les conseils municipaux et les exécutifs. Il est certain que, si les conseillers municipaux utilisent ces nouvelles possibilités que nous pourrions leur offrir, l'activité politique au niveau des communes n'en sera que plus dynamisée.

Pour toutes ces raisons, nous vous demandons de suivre la majorité de la commission et d'accepter le projet de loi 7860 ainsi amendé.

L'entrée en matière est acceptée par : 8 OUI (3 AdG, 3 S et 2 Ve), 3 NON (3 L) et 1 abstention (1 R).

2 Le Conseil municipal peut également adopter, sous forme de délibération, des règlements ou des arrêtés de portée générale régissant les domaines relevant de la compétence des communes.

Lettre v (nouvelle teneur) d'édicter les règlements municipaux dans les domaines où le Conseil municipal n'a pas fait usage de la prérogative que lui accorde l'article 30, al. 2, à l'exclusion des domaines où les lois donnent cette compétence au Conseil municipal.

Lettre w (nouvelle, l'actuelle lettre w devenant x) d'édicter les dispositions d'application des règlements municipaux adoptés par le Conseil municipal.

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article unique

La loi sur l'administration de communes, du 13 avril 1984, est modifiée comme suit :

Art. 30, al. 2 (nouveau)

2 Le Conseil municipal est également compétent pour adopter, sous forme de délibération, des règlements ou des arrêtés régissant les domaines relevant de la compétence des communes.

ANNEXE 1

ANNEXE 21112ANNEXE 3

Premier débat

M. Alain Charbonnier (S), rapporteur. Aujourd'hui, les conseils municipaux n'ont aucune compétence législative, à part dans deux domaines : le statut des fonctionnaires et les plans d'utilisation des sols. Ils ne sont en fait que les lieux d'enregistrement des décisions de l'exécutif.

Ce projet de loi, déposé par l'Alliance de gauche, faisait suite à une résolution déposée par le groupe socialiste au Conseil municipal de la Ville de Genève et votée en 1999, qui demandait une révision de la loi sur l'administration des communes, de sorte que le Conseil municipal de la Ville puisse adopter les règlements de portée générale.

Suite aux auditions effectuées par notre commission des droits politiques, spécialement du Conseil administratif de la Ville de Genève, ce projet de loi a été amendé par trois fois. Le premier amendement a consisté à modifier l'article 30, de façon à inscrire la possibilité - et non l'obligation - pour les Conseils municipaux d'adopter les règlements et les arrêtés. Ensuite, la commission a souhaité préciser que ce sont les règlements et les arrêtés de portée générale qui sont de la compétence du Conseil municipal, et non tous les règlements et arrêtés. Cet amendement faisait suite à l'audition du Conseil administratif de la Ville de Genève, qui avait relevé les problèmes que pouvaient rencontrer les Conseils municipaux à devoir adopter tous les règlements. Les personnes auditionnées nous ont cité une liste assez importante de règlements existants, j'en donne quelques exemples dans le rapport : utilisation et accès de la petite salle des archives au Palais Eynard, utilisation des salles de réunion, matériel des fêtes... En fait, des règlements qui étaient tous de portée évidemment mineure. Etait-ce délibéré de la part du Conseil administratif de la Ville de Genève ou non, je ne sais pas. Toujours est-il que les règlements vraiment importants, tels ceux de la Gérance immobilière municipale, des fonds culturels, des prestations et actions sociales, n'ont pas été cités. Or, ce sont justement ces sujets qui étaient visés par le projet de loi. L'amendement a donc consisté à préciser qu'il s'agissait des règlements et arrêtés de portée générale.

Ensuite, au cours des travaux de la commission, le Conseil d'Etat a effectué un sondage auprès de tous les Conseils municipaux du canton, de façon à savoir s'ils étaient d'accord avec ce projet de loi. Une majorité d'entre eux ont répondu qu'ils y étaient favorables.

Un troisième et dernier amendement a été fait par la commission, visant à éviter tout problème de compétences entre le Conseil municipal et le Conseil administratif ou les maires et adjoints. L'article 48, concernant les compétences de l'exécutif, a été modifié de façon qu'il n'y ait pas de conflit de compétences. Voilà, j'en ai terminé pour l'instant.

M. Jacques Béné (L). Je constate qu'avec ce projet de loi on tente essentiellement de régler des problèmes particuliers de la Ville de Genève. Or, je tiens à rappeler que, dans le cadre du sondage effectué par le département, sur les quatre-vingts conseillers municipaux de la Ville de Genève, seuls cinquante-neuf ont répondu au sondage et que, sur ces cinquante-neuf, trente-deux étaient favorables et vingt-sept opposés. Ce n'est donc pas vraiment une grande majorité du Conseil municipal qui souhaite avoir ces prérogatives, inévitablement au détriment de l'exécutif.

L'exposé des motifs du projet de loi initial est très clair. Il rappelle que les communes genevoises ont peu de compétences par rapport aux communes des autres cantons suisses et c'est vrai. Mais, Mesdames et Messieurs, que dire alors des exécutifs de nos communes, auxquels vous voulez encore enlever des compétences, sachant qu'ils n'en ont déjà pas beaucoup par rapport aux exécutifs communaux des autres cantons suisses ?

Le meilleur moyen d'améliorer les compétences des conseils municipaux, c'est d'appliquer le simple principe de subsidiarité, c'est-à-dire de transférer le maximum de compétences à ceux qui sont les mieux à même de traiter les objets concernés, et donc de décentraliser une partie des tâches actuellement effectuées par le canton vers les communes. Pour des raisons notamment de proximité, ce serait largement préférable.

Je reprends un exemple qui a été cité par l'Association des communes. Si ce projet de loi est adopté, le conseil municipal d'une commune X serait compétent pour adopter toutes sortes de règlements, dont certains ont été cités tout à l'heure, y compris en matière de personnel communal. On pourrait ainsi arriver à une situation assez délicate qui verrait un conseil municipal fixer par règlement l'horaire de travail des employés communaux...

Mesdames et Messieurs les députés, si ce projet de loi est accepté, il en résultera inévitablement un conflit de compétences, un désengagement des exécutifs, de nouvelles possibilités de référendums inutiles et donc des allongements de délai. Ceci entraînera inévitablement un manque de compréhension accru de la part de nos concitoyens à l'égard du fonctionnement déjà bien lourd de notre système.

Je terminerai en relevant que, dans le sondage effectué, 56% des 841 conseillers municipaux ont répondu. Sur ces 56%, 55% sont favorables au projet de loi, ce qui représente, si on fait le calcul, 30% de l'ensemble des conseillers municipaux. Je ne pense pas qu'en acceptant ce projet de loi on fasse vraiment avancer la démocratie et je vous invite donc, Mesdames et Messieurs, à le refuser!

M. Thomas Büchi (R). Sur ce projet, notre parti, dans un premier temps, s'est abstenu en commission, ceci pour les raisons suivantes.

De prime abord, le principe de donner plus de pouvoir aux conseillers municipaux paraissait intéressante et même de nature à revaloriser cette fonction. L'idée initiée par la Ville de Genève de donner la possibilité au Conseil municipal d'édicter lui-même des règlements pouvait en principe aller dans ce sens. Pourtant, en y regardant de plus près, le groupe radical pense que ce n'est peut-être pas la bonne méthode pour donner davantage de pouvoir de décision aux conseils municipaux. En effet, inévitablement, on va s'acheminer vers un conflit de compétences entre le délibérant et l'exécutif. Ce dernier aura forcément des craintes et en viendra à prendre des décisions au coup par coup. De plus, on va forcément allonger les procédures d'adoption des décisions prises. D'ailleurs, à ce sujet, sur le plan cantonal, la répartition des compétences est on ne peut plus claire : le Grand Conseil vote des lois, le Conseil d'Etat édicte des règlements d'application. Alors, pourquoi vouloir adopter des dispositions communales parfaitement contradictoires avec le fonctionnement de la démocratie au niveau cantonal ?

Après mûre réflexion, le groupe radical, dans sa majorité, pense que ce projet de loi est plutôt néfaste, vu ses conséquences, et vous enjoint, Mesdames et Messieurs les députés, à le rejeter.

M. Alain-Dominique Mauris (L). En fait, ce projet de loi risque fort d'entraîner plus de problèmes que ceux auxquels la mesure proposée est censée apporter une solution. S'il est vrai, on l'a dit, que les communes genevoises ont effectivement peu de compétences, il ne faut pas vouloir leur en attribuer en diminuant celles des exécutifs. Ce projet de loi appelle donc un certain nombre d'observations, observations qui ont certes déjà été discutées dans le cadre des commissions, mais qui, à mon avis, n'ont pas été assez prises au sérieux, en ce qui concerne les réalités mêmes auxquelles les communes vont devoir faire face.

Actuellement, c'est la loi sur l'administration des communes qui définit clairement les rapports entre l'exécutif et le délibératif, et ceci à satisfaction. Dès l'instant où ce projet de loi sera adopté, le conseil municipal deviendra compétent pour adopter toutes sortes de règlements de portée générale. Il en résultera immanquablement le conflit de compétences qui a été dénoncé par mes deux précédents collègues.

Là où la loi rend obligatoire l'adoption d'un certain nombre de règlements - relativement restreints, c'est vrai - l'irruption du conseil municipal dans des domaines de la compétence de l'exécutif rendra celui-ci particulièrement prudent. L'on risque dès lors de voir, dans certains domaines, l'exécutif renoncer à proposer des règlements au conseil municipal, agir plutôt par le biais de la norme et prendre des décisions au coup par coup, avec toutes les conséquences négatives que ce type de fonctionnement entraîne.

On a cité la possibilité pour les conseillers municipaux de fixer dorénavant l'horaire des déchetteries : est-ce vraiment l'augmentation de pouvoir que ce parlement entend donner aux municipaux ? Confier aux conseillers municipaux la compétence de délibérer sur tous les règlements aboutirait par ailleurs à soumettre tous les règlements municipaux au référendum facultatif, avec les allongements de délai qu'une telle mesure ne manquerait pas d'entraîner.

Enfin, concernant le fameux sondage effectué par M. Cramer, il est clair qu'à la question : voulez-vous plus de pouvoir et plus de compétences ? tout le monde répondra oui. Mais quelles compétences voulons-nous vraiment leur donner ? Si nous souhaitons effectivement faire un geste en faveur de nos communes, en faveur du fameux pouvoir de proximité, il s'agit non pas de prendre sur une partie des compétences des exécutifs locaux, mais de nous dessaisir, Mesdames et Messieurs les députés, d'une partie de nos pouvoirs et, par cohérence avec le principe de subsidiarité, de les transmettre aux parlements municipaux.

C'est pourquoi le parti libéral votera contre ce projet de loi, qui n'est que de la poudre aux yeux!

M. Antonio Hodgers (Ve). Dans cette enceinte et ailleurs, tout le monde parle de démocratie locale, de renforcement de la politique communale... Mais il faut bien admettre que les élus municipaux de notre canton ont bien peu de pouvoir, d'une part, et cela a été dit, du fait de l'autonomie restreinte des communes genevoises, d'autre part et surtout, du fait que les exécutifs des 45 communes genevoises détiennent pratiquement tout le pouvoir, sauf en ce qui concerne le budget. Je crois qu'ils pourraient se contenter d'un vote annuel sur le budget et sur les comptes de la part des conseillers municipaux...

En la matière, il y a donc quelque chose à faire, c'est en tout cas l'intention des partis de l'Alternative. En lisant les communiqués de presse que nous envoie chaque semaine le Conseil d'Etat, on constate qu'à deux ans de la fin de la législature communale le Conseil d'Etat est appelé toutes les semaines à nommer de nouveaux conseillers municipaux, parce qu'il n'y a plus assez de viennent-ensuite. On constate que, de manière générale, les gens se désintéressent : les taux de participation aux dernières élections municipales ont à peine dépassé 30%, voire 35% dans les meilleures communes, alors que pour d'autres votations importantes, on l'a vu récemment, le taux monte facilement à 50% ou 60%. Ce phénomène de désertion de la démocratie locale nous inquiète.

A partir de là, il est important de valoriser le rôle des élus municipaux et pas seulement celui des exécutifs. Il est également important de le faire en vertu d'un principe - là, je m'adresse particulièrement à M. Büchi - d'un principe de notre République qu'il a mentionné et qui est celui de la séparation des pouvoirs. Monsieur Büchi, vous avez indiqué qu'au niveau cantonal le parlement vote des lois et que le gouvernement les applique : c'est exactement ce que nous entendons faire avec ce projet de loi au niveau municipal. Simplement, comme les conseils municipaux ne votent pas de loi, ne sont pas des organes législatifs, la seule manière pour eux de «légiférer» est d'édicter des règlements, en l'occurrence des règlements de portée générale, comme on l'a bien spécifié. Ce sont les équivalents de nos lois - vu qu'au niveau municipal il n'y a pas de loi - et les seuls textes juridiques et légaux dont les élus municipaux pourraient ainsi se doter et qu'ils pourraient maîtriser.

Nous pensons qu'avec ce projet de loi la démocratie communale - que nous défendons tous, mais à des moments différents parfois - s'en trouvera renforcée. A cet égard, je regrette les propos qui ont été tenus notamment par les membres du parti libéral, qui craignent un alourdissement du fonctionnement et des risques accrus de référendum, selon les termes du député Béné. De notre côté, nous estimons que l'usage du référendum, comme de l'initiative, au niveau communal est plutôt une richesse pour la démocratie locale que le contraire. A ce titre, nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de voter ce projet de loi.

M. Pierre Marti (PDC). Je me demande comment les conseils municipaux pourront définir, de façon indépendante et impartiale, quels sont les questions et les règlements qu'ils jugent importants et sur lesquels ils pourront délibérer. Comment feront-ils lors d'un éventuel différend avec l'exécutif ? Ce projet de loi est bien la porte ouverte à un semblant de démocratie qui fait fi des responsabilités que le peuple donne à chaque ordre politique, qu'il soit législatif ou exécutif, créant ainsi une confusion totale sur les compétences de chacun.

Mesdames et Messieurs, comment définir juridiquement ce qui est de portée générale dans les domaines relevant de la compétence des communes ? Je vous laisse imaginer les discussions que cela entraînera, lorsqu'il faudra déterminer tout d'abord si le conseil municipal peut entrer en matière sur tel règlement, avant que ce même conseil en délibère valablement. Très franchement, je crois que ce projet de loi est issu du dépit de l'AdG de ne pas trouver grâce devant le peuple et de ne pas avoir d'élus dans les exécutifs municipaux, sauf à une ou deux exceptions près!

M. Albert Rodrik (S). Nous avons entendu beaucoup de Cassandre nous prédire les confusions et les catastrophes qui attendent notre système municipal, sans preuve bien entendu! Mesdames et Messieurs les députés, on trouve dans le rapport - derrière le machiavélique projet de l'Alliance de gauche ! la référence à la résolution unanimement acceptée par le Conseil municipal de la Ville de Genève, à l'instigation du groupe socialiste. Ce vote a eu lieu en 1999, au terme d'un certain nombre de péripéties dont vous pourriez tirer bénéfice...

Au temps de la législature 95-99 en Ville de Genève, au terme de très grands efforts, la commission du logement - longtemps présidée par Alexandra Gobet, que j'ai relayée - s'était mise d'accord pour adopter une motion à l'unanimité, qui était la charte de la politique sociale du logement de la Ville de Genève, et le Conseil municipal l'avait suivie. Dans les trois mois suivants, le Conseil administratif s'est livré à la petite péripétie de la modification du règlement de la GIM et, pendant des mois, a bafoué le Conseil municipal et s'est moqué des locataires de la Ville. A partir de là, le problème était bien de savoir qui respecte qui, et comment fonctionnent nos communes.

Mesdames et Messieurs les députés, si nous voulons, comme dit M. Mauris et je suis d'accord avec lui, qu'un jour il y ait une répartition des tâches entre le canton et les communes qui donne de plus amples compétences à nos communes, il faudra encore qu'il y ait le régime démocratique du pouvoir qui arrête le pouvoir, et du partage de ce pouvoir ! Même si cela n'intéresse pas le groupe libéral, je m'adresse surtout à lui : nos communes sont suffisamment «squattées» par un certain nombre de partis politiques pour que ceux-ci sachent qu'à vouloir plus de compétences il faut aussi plus de démocratie.

En l'occurrence, je salue le travail de la commission sur ce sujet, parce que, si le projet de loi d'origine était un peu abrupt, rien dans le projet tel qu'il sort de nos travaux n'est de nature à perturber le fonctionnement de nos institutions. Croyez-moi, entre l'autorité de contrôle et nos conseillers municipaux, on saura fort bien ce qu'est un règlement de portée générale : c'est un règlement qui, face à la carence, ou à la mauvaise volonté dans certaines circonstances, fixe un cadre à l'intérieur duquel doit se mouvoir un exécutif communal. Si nous ne voulons pas cela, ce minimum, cela signifie que nous ne voulons pas ce petit supplément de démocratie locale qui seul nous permettrait de consentir à de véritables dévolutions de compétences aux communes.

Mesdames et Messieurs les députés, il y a bien eu des péripéties, en particulier en Ville de Genève - ailleurs, je ne sais pas - qui rendent nécessaire ce zeste de pouvoir supplémentaire pour les municipaux, dont je vous je mets au défi de me dire ce qu'il enlève aux exécutifs. Je n'ai jamais plaidé dans cette enceinte pour des gouvernements faibles et ce n'est pas aujourd'hui que je commencerai : ici, on n'enlève pas un iota de pouvoir à un conseil administratif, ou à un maire qui veut travailler en bonne intelligence avec son conseil municipal et qui le respecte! Mesdames et Messieurs, il n'y a pas le moindre danger de perturbation de la vie municipale. Je vous enjoins, moi, d'accepter cette réformette!

Mme Micheline Spoerri (L). Nous réitérons notre avis sur ce sujet et souhaitons demander l'appel nominal pour le vote. (Appuyé.) Il ne s'agit pas pour nous de savoir si tel ou tel pouvoir aura plus ou moins d'importance dans le déroulement des débats : en l'occurrence, nous craignons essentiellement qu'il y ait des conflits de compétences entre le législatif et l'exécutif. Ce risque nous paraît suffisamment important pour que nous demandions ce soir l'appel nominal, ce qui nous permettra de vérifier plus tard si notre sentiment sur ce projet était fondé ou non.

M. Claude Blanc (PDC). J'ai trouvé piquant d'entendre tout à l'heure M. Hodgers dire que le référendum communal était un moyen d'animer sainement la vie démocratique des communes, alors qu'un quart d'heure plus tôt Mme Bugnon disait que le référendum cantonal était un moyen d'entraver les travaux du parlement... Bon, je n'insisterai pas!

Concernant le projet de loi lui-même, je me bornerai à quelques considérations générales. Actuellement, on constate une sorte de dérive du pouvoir législatif, qui empiète de plus en plus sur le pouvoir exécutif : en dehors de ce projet de loi sur les communes, on le constate sur le plan national comme sur le plan cantonal.

Mesdames et Messieurs les députés, la plupart d'entre vous étaient à peine nés à l'époque, mais quelques-uns doivent quand même se souvenir de ce qu'était la IVe République française. La IVe République avait ce qu'on appelait péjorativement «un gouvernement d'assemblée», l'Assemblée nationale se mêlant de tout et pouvant notamment mettre le gouvernement en minorité sur tout et n'importe quoi. C'est ainsi que la France, entre 1946 et 1958, durant les douze ans qu'a duré la IVe République, s'est payé trois ou quatre gouvernements par année, jusqu'à ce funeste 13 mai 1958 où, tant va la cruche à l'eau qu'elle se casse, la IVe République s'est cassée... Elle est morte de son impuissance, du fait que l'Assemblée, élue à l'époque à la proportionnelle et donc très hétéroclite, changeait souvent d'avis et changeait de gouvernement à chaque fois qu'elle changeait d'avis. La France était vraiment devenue ingouvernable et comme elle traversait en plus, dans ces années-là, des problèmes très difficiles avec ses colonies, le régime de la IVe République en est mort.

On assiste à une tendance semblable dans notre pays, tant au point de vue fédéral qu'au point de vue cantonal, et notre Grand Conseil n'y est pas étranger : il essaie, conformément à la théorie de la majorité actuelle, de se donner de plus en plus de pouvoir, ce qui en soi n'est pas mauvais, encore faut-il savoir ce qu'il fait de ses pouvoirs. Mesdames et Messieurs, je ressors la pile des projets : non seulement le Grand Conseil veut se substituer de plus en plus au gouvernement et se mêler de tout, mais en plus il est incapable de le faire! Il est incapable de venir à bout de ses velléités et, en cette fin de législature, cela tourne à la caricature : le Grand Conseil est complètement paralysé par lui-même, par ses velléités diverses. Vous verrez qu'à la fin de la législature on comptera un nombre de projets non traités jamais atteint, ce qui sera préjudiciable aux intérêts de la République et aux intérêts de beaucoup de gens qui attendent qu'on leur fabrique des lois.

Or, je crains que votre projet de loi procède de la même philosophie et que nous exportions ainsi dans les communes nos propres impérities : nous sommes complètement phagocytés, nous ne pouvons plus avancer, parce que nous ne savons plus dans quelle direction nous allons, nous passons notre temps à discuter de choses et autres et nous oublions les vrais problèmes.

Voilà ce que je crains. Pour le reste, cette loi est une loi de plus, elle ne mangera ni foin ni avoine. Votez-la, et on verra bien l'usage qui en sera fait!

M. Pierre Vanek (AdG). La comparaison que vient de faire notre collègue Blanc avec la IVe République française, comme étant un modèle dont serait issu ce projet de loi, n'est pas recevable. Je rappelle que les exécutifs communaux, les conseillers administratifs - il y en a un certain nombre dans cette salle - sont élus directement par les citoyens et ce que vous avez dit, Monsieur Blanc, n'a donc absolument rien à voir!

Monsieur Mauris, vous avez dit tout à l'heure qu'il fallait donner plus de pouvoirs aux communes. Certes, et nous entreprenons de le faire dans un certain nombre de domaines, notamment récemment en ce qui concerne les zones piétonnes, mais vous vous y opposez! Chaque fois que, concrètement, nous proposons de donner plus de pouvoirs aux communes, vous vous dressez, sur les bancs d'en face, pour dire non, surtout pas, sous prétexte que telle horrible personne qui serait conseiller administratif dans telle grande commune du canton et qui aurait une moustache, abuserait de ces dispositions... (Exclamations.) Là, vous vous opposez. Ici, par contre, vous plaidez pour les pouvoirs des exécutifs, qui seraient soi-disant mis en péril par l'idée même que les conseils municipaux - et pas seulement celui de la Ville - puissent, à l'échelle des compétences communales, se comporter comme des législatifs véritables et avoir un rapport avec leur exécutif qui soit celui que nous avons, nous Grand Conseil.

M. Blanc peut bien maugréer dans son coin, au fond à droite, et dire que le Grand Conseil ne fonctionne pas, accumule des retards, ceci, cela... S'il a des suggestions de réformes institutionnelles pour ce parlement ou pour le régime de cette République, s'il propose le modèle qui a remplacé celui de la IVe République, à savoir celui de la Ve, avec l'élection de Dieu sait quel gouverneur pour faire avancer les choses au bâton ou au tambour, qu'il le fasse! Quant à moi, je me contente du type de rapports que nous avons dans ce canton entre le parlement et l'exécutif.

A l'échelle des domaines de compétence communale - c'est cela dont il est question - nous proposons un article 30, alinéa 2 nouveau de la loi sur l'administration des communes qui dit simplement ceci, mais à vous entendre on croirait que c'est une atteinte intolérable à la démocratie : «Le Conseil municipal peut également adopter, sous forme de délibération, des règlements ou des arrêtés de portée générale régissant les domaines relevant de la compétence des communes.» Mesdames et Messieurs, quoi de plus raisonnable ? Le fait de refuser cette compétence aux conseillers municipaux, le fait de leur fixer une liste exhaustive de compétences limitées, le fait de confier au seul exécutif le soin de prendre des règlements - ce qui équivaut à ce que nous faisons en votant des lois dans ce Conseil - est quelque chose d'absolument étranger à l'esprit de nos institutions.

On a entendu dire que les conseillers municipaux allaient se mêler de tout, on a entendu pratiquement traiter les conseillers municipaux de mineurs, d'incapables à conserver sous tutelle, parce qu'ils risquent d'agir de manière irresponsable, de commencer à édicter des règlements à tort et à travers, sur des objets sur lesquels il faudrait les priver d'intervenir, de susciter des référendums... Mais, Mesdames et Messieurs, non! On ne joue pas à la dînette dans les conseils municipaux! La démocratie communale, dans les domaines de compétence communale, est une vraie démocratie; les conseillers municipaux ont été élus par le peuple, comme nous, et ont le droit de se prononcer sur les affaires communales et sur toutes les affaires communales! C'est le propos de ce projet de loi.

Maintenant, j'accorde volontiers à M. Rodrik que le projet de loi initial, dont je suis signataire et que mon groupe a déposé, était un peu brut. Nous avons donc, effectivement, réglé les dispositions prévues en nous modelant sur la manière de faire à l'échelle du canton. Nous avons prévu que l'exécutif de la commune, dans les domaines où une majorité du conseil municipal n'aura pas jugé nécessaire d'intervenir, peut continuer, comme aujourd'hui, à édicter des règlements. De même, dans les domaines où le conseil municipal a prévu de voter un règlement - qui sera effectivement soumis à une procédure référendaire, avec ce que cela représente de droits accrus pour les citoyens et les citoyennes des communes - si ce règlement est accepté, cas échéant aussi par le peuple et les communiers, l'exécutif conserve la prérogative d'édicter des dispositions d'exécution. Ceci permet au conseil municipal de donner, sur le plan général, des indications politiques à son exécutif, indications que par ailleurs il donne déjà aujourd'hui, sous forme de motions, de résolutions, etc., mais qui ne sont pas forcément suivies d'effet. En effet, il y a aujourd'hui un déséquilibre institutionnel, que nous entendons corriger, entre les exécutifs et ceux qui doivent devenir, à nos yeux, de véritables législatifs communaux.

Nous vous proposons donc d'octroyer ces droits politiques nouveaux aux conseillers municipaux et aux citoyens. Le cas échéant, Mesdames et Messieurs du parti libéral, nous vous suivrons volontiers - bien que nous vous précédions aujourd'hui dans bon nombre de cas... - sur le fait d'octroyer plus de droits aux communes elles-mêmes.

M. Alain-Dominique Mauris (L). Je voudrais relever, Monsieur Vanek, que les projets de lois que vous présentez concernant les communes tirent en fait leur inspiration d'un seul endroit, c'est la Ville de Genève! Vous souhaitez, par des modifications législatives, doter la Ville de Genève de certains pouvoirs, sans tenir compte des spécificités des autres communes. En l'occurrence, je suis effaré de la méconnaissance totale que vous avez de l'ensemble des autres communes qui constituent notre canton. La meilleure preuve que je puis vous en donner - même si vous partez en courant... - c'est que vous n'êtes jamais d'accord avec les prises de position de l'ACG. L'ACG est pourtant l'organe représentatif de l'ensemble des communes genevoises, y compris la Ville de Genève, où les discussions ont lieu d'une façon très démocratique, où chaque magistrat peut s'exprimer, qu'il soit de gauche ou de droite. Or, chaque fois que l'ACG prend position, vous êtes contre.

Ce projet de loi ne va pas du tout renforcer les pouvoirs locaux, mais bien les diviser, selon le principe de cette fameuse dînette dont vous parliez : on prend un peu à l'exécutif, on donne un peu au délibératif, et puis on a l'impression d'avoir fait quelque chose de magnifique pour la République!

M. Robert Cramer. Mesdames et Messieurs les députés, le projet de loi dont vous êtes saisis actuellement, s'il ne comporte que peu de dispositions, est un projet d'importance. En effet, il vise à régir de façon différente les règles du jeu au sein des communes du canton.

A cet égard, je suis frappé que les détracteurs de ce texte qui se sont exprimés soient essentiellement des magistrats communaux. On pourrait dire que c'est logique, parce que ce sont les plus compétents. Malheureusement, et je le dis, Monsieur Mauris, avec tout le respect que je porte à votre fonction et à votre personne, ce que nous avons entendu, c'est, dans une très large mesure, des discours de cantine! (Exclamations.)

Des discours de cantine d'abord, parce que, Monsieur Marti, lorsque vous évoquez les difficultés qu'il y aurait à appliquer cette législation, vous relevez en fait les difficultés qu'il y a à veiller à l'application du droit en matière communale. Chaque fois qu'un conseil municipal délibère, sa délibération est soumise à ratification, soit du département de l'intérieur, soit du Conseil d'Etat, selon les objets. Ceci est régi par la loi sur l'administration des communes, qui prévoit que, dans tous les cas, une évaluation, une interprétation est faite par une autorité de contrôle.

Des discours de cantine ensuite, parce que j'ai l'impression, à travers les échanges que nous avons entendus, qu'on n'a pas été au fond de la proposition. Je rappelle que le projet de loi 7860, dans un premier temps, prévoyait, je cite, que «le conseil municipal est également compétent pour adopter, sous forme de délibération, des règlements ou des arrêtés régissant les domaines relevant de la compétence des communes». Cela signifiait concrètement que les auteurs du projet de loi voulaient octroyer aux conseils municipaux non seulement la compétence de délibérer sur des objets d'importance générale, mais également la compétence de délibérer sur des objets d'importance particulière, par exemple sur des questions relatives à l'engagement du personnel, aux salaires des employés municipaux, ou d'autres questions de ce type.

A l'occasion des travaux de commission, les auteurs ont bien voulu modifier cette disposition, pour se borner à la délibération sur «les règlements ou les arrêtés de portée générale, régissant les domaines relevant de la compétence des communes». Cette modification n'est pas de petite importance : elle signifie concrètement que l'on crée une distinction entre ce qui relève du conseil municipal, c'est-à-dire les questions d'intérêt général, et ce qui relève de l'exécutif des communes, conseils administratifs, maires et adjoints, à savoir les différentes décisions qui régissent les communes. En d'autres termes, il s'agit d'appliquer aux communes le système que nous connaissons bien et qui régit le Grand Conseil.

Sous cette forme-là, cette proposition, Mesdames et Messieurs les magistrats des communes, est acceptable; elle a en tout cas été reconnue comme telle par l'Association des communes genevoises qui a indiqué que, si cette disposition n'était pas souhaitable, elle ne provoquait pas d'opposition majeure. En revanche, Mesdames et Messieurs les magistrats des communes, vous devez savoir que cette proposition est bel et bien souhaitée non seulement par vos administrés, mais également par celles et ceux qui siègent dans vos conseils municipaux.

Je dois ajouter qu'à travers cette proposition on vise, MM. Hodgers et Rodrik l'ont relevé très justement, une revitalisation de la vie communale. Vous devez comprendre que les conseillers municipaux en ont marre d'être consultés sur des objets sur lesquels ils n'auront, finalement, pas un très grand pouvoir de décision. Ceci peut d'ailleurs expliquer dans une large mesure la difficulté qu'il y a - car il faut parler vrai dans cette enceinte - à trouver, dans tous les partis, des candidats aux élections municipales.

Pour ma part, et je vous parle ici en tant qu'ancien conseiller municipal de la Ville de Genève, je crois qu'il est plus gratifiant, plus digne pour un conseiller municipal d'être saisi de questions sur lesquelles il a un véritable pouvoir de décision, plutôt que d'être inlassablement saisi de questions sur lesquelles il parle dans le vide, sur lesquelles il n'a absolument aucune compétence, ou encore de fonctionner comme simple caisse d'enregistrement.

La proposition telle qu'elle est rédigée aujourd'hui donne une véritable attractivité supplémentaire au rôle de conseiller municipal. Dans le même temps, il n'y a absolument aucune perte de prérogatives pour les exécutifs communaux. C'est en ce sens que le compromis, l'accord auquel est arrivée la commission des droits politiques est acceptable et convient à la vie communale. Le Conseil d'Etat vous demande donc, Mesdames et Messieurs les députés, de vous rallier de préférence à cette proposition plutôt qu'au projet de loi à l'origine des travaux de la commission. (Applaudissements.)

Mme Micheline Spoerri (L). Je me permets d'intervenir, non pas en tant que députée libérale, mais en tant que présidente de la commission des droits politiques. Je suis navrée d'entendre M. le président Cramer s'exprimer - ce n'est pas la première fois - dans des termes qui, à mon avis, ne sont pas dignes d'un président de département, qui a assisté à l'ensemble des travaux de commission, lesquels ont été d'une tenue très correcte. Je ne sais pas, Monsieur le président, si, quand vous parlez de discours de cantine, vous faites référence aux magistrats communaux. C'est ce que j'ai cru comprendre, mais je n'en suis pas sûre... Quoi qu'il en soit, que vous fassiez référence aux magistrats des communes ou à quiconque d'autre, le terme est malheureux.

Je constate une fois de plus que, lorsqu'on n'est pas d'accord avec vous, la tournure des débats, leur ton devient fort désagréable. Je le regrette très vivement; je ne pouvais pas, en tant que présidente, faire autrement que de le relever!

M. Alain-Dominique Mauris (L). Monsieur Cramer, je sais que je viens d'une commune viticole, mais de là à dire que je tiens des propos de cantine, c'est pousser un peu loin le bouchon! Et, en matière de bouchon, je crois que nous savons de quoi nous parlons!

L'absence de candidats aux élections municipales vient peut-être d'un manque de pouvoir, vous l'avez dit, mais alors, Mesdames et Messieurs, proposons de véritables délégations de compétences du parlement vers les conseils municipaux. Ne nous limitons pas à dire aux conseillers municipaux que, dorénavant, ce ne seront plus les exécutifs qui décideront de l'horaire d'ouverture du cimetière ou de la déchetterie, mais eux, conseillers municipaux. Allons plus loin, engageons un véritable débat et arrêtons avec ce projet de loi qui, je le rappelle, n'est que de la poudre aux yeux!

Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Ce projet est adopté en deuxième débat.

Troisième débat

La présidente. Nous passons à l'appel nominal tel que demandé par Mme Spoerri.

Celles et ceux qui acceptent ce projet répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.

Ce projet est adopté par 45 oui contre 37 non et 1 abstention.

Ont voté oui (45) :

Esther Alder (Ve)

Charles Beer (S)

Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)

Dolorès Loly Bolay (HP)

Anne Briol (Ve)

Christian Brunier (S)

Fabienne Bugnon (Ve)

Nicole Castioni-Jaquet (S)

Alain Charbonnier (S)

Bernard Clerc (AG)

Jacqueline Cogne (S)

Jean-François Courvoisier (S)

Pierre-Alain Cristin (S)

Anita Cuénod (AG)

Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)

Régis de Battista (S)

Jeannine de Haller (AG)

René Ecuyer (AG)

Alain Etienne (S)

Laurence Fehlmann Rielle (S)

Christian Ferrazino (AG)

Magdalena Filipowski (AG)

Anita Frei (Ve)

Alexandra Gobet (S)

Gilles Godinat (AG)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

Mariane Grobet-Wellner (S)

Christian Grobet (AG)

Cécile Guendouz (AG)

Dominique Hausser (S)

David Hiler (Ve)

Antonio Hodgers (Ve)

Georges Krebs (Ve)

Louiza Mottaz (Ve)

Danielle Oppliger (AG)

Rémy Pagani (AG)

Véronique Pürro (S)

Jacques-Eric Richard (S)

Albert Rodrik (S)

Christine Sayegh (S)

Françoise Schenk-Gottret (S)

Myriam Sormanni-Lonfat (HP)

Pierre Vanek (AG)

Alberto Velasco (S)

Salika Wenger (AG)

Ont voté non (37) :

Bernard Annen (L)

Florian Barro (L)

Luc Barthassat (DC)

Jacques Béné (L)

Janine Berberat (L)

Claude Blanc (DC)

Nicolas Brunschwig (L)

Thomas Büchi (R)

Gilles Desplanches (L)

Jean-Claude Dessuet (L)

Hubert Dethurens (DC)

Daniel Ducommun (R)

Pierre Ducrest (L)

Michel Ducret (R)

Henri Duvillard (DC)

Jacques Fritz (L)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Philippe Glatz (DC)

Nelly Guichard (DC)

Janine Hagmann (L)

Michel Halpérin (L)

Yvonne Humbert (L)

René Koechlin (L)

Pierre Marti (DC)

Alain-Dominique Mauris (L)

Etienne Membrez (DC)

Jean-Louis Mory (R)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Vérène Nicollier (L)

Jean-Marc Odier (R)

Michel Parrat (DC)

Catherine Passaplan (DC)

Jean Rémy Roulet (L)

Stéphanie Ruegsegger (DC)

Louis Serex (R)

Micheline Spoerri (L)

Olivier Vaucher (L)

S'est abstenu (1) :

Bernard Lescaze (R)

Etaient excusés à la séance (10) :

Michel Balestra (L)

Juliette Buffat (L)

Hervé Dessimoz (R)

John Dupraz (R)

Morgane Gauthier (Ve)

Luc Gilly (AG)

Armand Lombard (L)

Pierre Meyll (AG)

Jean Spielmann (AG)

Walter Spinucci (R)

Etaient absents au moment du vote (6) :

Roger Beer (R)

Marie-Françoise de Tassigny (R)

Erica Deuber Ziegler (AG)

Pierre Froidevaux (R)

Pierre-Louis Portier (DC)

Pierre-Pascal Visseur (R)

Présidence :

Mme Elisabeth Reusse-Decrey, présidente

La loi est ainsi conçue :

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article unique

La loi sur l'administration des communes, du 13 avril 1984, est modifiée comme suit :

Art. 30, al. 2 (nouveau)

2 Le Conseil municipal peut également adopter, sous forme de délibération, des règlements ou des arrêtés de portée générale régissant les domaines relevant de la compétence des communes.

Art. 48, lettre v (nouvelle teneur)

 lettre w (nouvelle, la lettre w actuelle devenant la lettre x)

 

La séance est levée à 23 h 15.