République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 19 mai 2000 à 17h
54e législature - 3e année - 8e session - 23e séance
PL 8244 et objet(s) lié(s)
Projet de loi(8244)modifiant la loi sur la Banque cantonale de Genève (D 2 05)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La loi sur la Banque cantonale de Genève, du 24 juin 1994, est modifiée comme suit :
Art. 5, al. 4 (nouveau)
4 Le Conseil d'administration informe régulièrement le Conseil d'Etat de la marche des affaires de la banque. Le Conseil d'Etat peut demander toute information et tout rapport sur les affaires de celle-ci, y compris les rapports de l'Organe de révision externe et de l'Organe de contrôle interne, à l'exclusion de tout élément qui relève du secret bancaire.
Art. 11, al. 2, lettre a (nouvelle teneur)
Art. 12, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Le Conseil d'administration détermine la politique générale de la banque, ses objectifs et la nature de ses activités, tout en veillant à la réalisation de son but tel qu'il est défini à l'art. 2. Il surveille la Direction générale et l'activité du Comité de banque. Il approuve les différents règlements internes et directives relatives à l'activité de la banque, plus particulièrement en matière d'octroi de crédits. Il désigne des comités chargés d'examiner les diverses activités de la banque et de lui faire rapport à ce sujet.
Art. 12, al. 2, lettre b (nouvelle teneur)
Art. 14, al. 2 (nouvelle teneur)
al. 5 et 6 (nouveaux)
2 Le Comité de banque est composé de 7 membres, dont au moins un représentant de la Ville de Genève et un représentant des actionnaires au porteur. Il est formé du président, nommé par le Conseil d'Etat, du vice-président, du secrétaire et de 4 autres administrateurs désignés par le Conseil d'administration.
5 Le Comité de banque, respectivement le Conseil d'administration, doivent donner leur approbation à l'octroi de tout crédit, participation ou acquisition foncière dont le montant est supérieur aux limites fixées dans les statuts de la banque.
6 Un représentant de l'Etat désigné par le Conseil d'Etat, mais sans voix délibérative, siège au Comité de banque et au Conseil d'administration. Il est soumis au secret bancaire et au secret professionnel au même titre que les autres administrateurs.
Art. 14A Comité de contrôle (nouveau)
1 Le Comité de contrôle de la banque se compose de deux administrateurs désignés par le Conseil d'administration et d'un troisième membre désigné par le Conseil d'Etat.
2 Le Comité de contrôle supervise le respect des dispositions légales, statutaires et réglementaires applicables à la banque, ainsi que des usages bancaires. Il assure la liaison entre le Conseil d'administration et les organes de contrôle interne et externe. Il donne au Conseil d'administration son préavis sur la nomination du chef de l'Organe de contrôle interne et de ses collaborateurs, sur le cahier des charges et sur le programme de travail de celui-ci, en coordination avec celui de l'Organe de révision externe. Il peut charger l'Organe de contrôle interne de toute opération de contrôle.
3 Il prend connaissance des rapports de révision de l'Organe de contrôle interne et de l'Organe de révision externe.
4 Il préavise et propose toutes les décisions de la compétence du Conseil d'administration et du Comité de banque en matière de contrôle et de révision.
Art. 16, note et 2e phrase Organe de révision externe (nouvelles)
…l'assemblée générale. Les rapports de l'Organe de révision externe sont communiqués au Comité de banque, au Conseil d'administration et au Conseil d'Etat.
Art. 16A Organe de contrôle interne (nouveau)
1 L'Organe de contrôle interne est chargé du contrôle financier et du contrôle de gestion de la banque.
2 L'Organe de contrôle interne est subordonné au Conseil d'administration, qui adopte son cahier des charges sur préavis du Comité de contrôle.
3 Le Conseil d'administration nomme le chef de l'Organe de contrôle interne et ses collaborateurs sur préavis du Comité de contrôle.
4 L'Organe de contrôle interne soumet ses rapports au Comité de contrôle, au Conseil d'administration et à la Direction générale.
5 L'Organe de contrôle interne informe le Conseil d'administration de toute irrégularité et des mesures qu'il propose pour y remédier avec le préavis du Comité de contrôle.
6 Le Conseil d'administration, le Comité de banque, le représentant de l'Etat, le Comité de contrôle, ainsi que la Direction générale peuvent à tout moment charger l'Organe de contrôle interne de toute opération de contrôle qu'ils estiment utile.
Art. 16B Incompatibilités (nouveau)
Les administrateurs, les membres de la Direction générale et les personnes avec lesquelles ils entretiennent des liens d'intérêt ne peuvent pas, après leur entrée en fonction, bénéficier de nouveaux crédits de la banque si ce n'est pour des crédits lombards ou hypothécaires affectés à leur logement personnel, approuvés par le Comité de banque.
Article 2 Disposition transitoire
Vu l'augmentation du capital social de la banque, les statuts de celle-ci sont adaptés en fonction des dispositions légales faisant l'objet du présent projet de loi.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Au moment de la fusion de la Caisse d'épargne et de la Banque hypothécaire pour créer la BCG, les députés du Grand Conseil s'étaient inquiétés de l'importance des pertes potentielles sur les crédits à risques accordés par ces deux banques. La direction de celles-ci s'était montrée rassurante en indiquant que les risques avaient été répertoriés et provisionnés à concurrence de 600 millions de francs selon un récapitulatif figurant dans le rapport de la commission chargée de traiter le projet de loi sur la BCG (cf. Mémorial du Grand Conseil 1993, p. 1665).
En 1994, au moment où la BCG commençait ses activités, soit moins d'un an plus tard, les provisions furent portées à 800 millions de francs. Par la suite, les provisions furent portées à plus d'un milliard, avant d'être ramenées à 900 millions. Aujourd'hui, on apprend que les réviseurs considèrent que les provisions doivent être augmentées de 500 millions de francs. Ces mêmes réviseurs admettent que les risques potentiels ont été sous-estimés en 1993 et que certaines affaires importantes n'ont pas été provisionnées.
Il ressort à l'évidence que le contrôle financier, comme le contrôle de la gestion des opérations bancaires de la BCG, ont été défaillants et qu'ils doivent être renforcés. De même, le Conseil d'administration, qui est l'organe suprême de la banque, a été mal informé et n'a pas joué le rôle qui est le sien. Au moment où les pouvoirs publics sont amenés à apporter des capitaux importants pour refinancer la BCG, il est indispensable de renforcer le contrôle de la banque et le pouvoir d'intervention du Conseil d'administration pour éviter les erreurs du passé et donner les meilleures garanties quant à une gestion efficiente de la banque. L'apport de capitaux supplémentaires n'est pas suffisant, il faut l'accompagner de réformes structurelles.
Le présent projet de loi propose diverses mesures dans ce sens, notamment le renforcement de l'Organe de contrôle interne et des attributions du Conseil d'administration. Les auteurs pensent que de telles mesures visant à instituer un meilleur contrôle des activités de la banque et à éviter que les décisions importantes soient prises par certaines personnes seulement, seront de nature à lutter contre la politisation et le clientélisme dont la BCG a souffert.
Au bénéfice de ces explications, nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que vous réserverez un bon accueil au présent projet de loi.
Projet de loi(8246)instituant une garantie d'un montant maximum de 5 milliards de francs relative à des prêts pour la fondation de droit privé de valorisation des actifs de la BCGe et ouvrant un crédit extraordinaire d'investissement pour la création d'un capital de dotation de 500 000 F en faveur de ladite fondation
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Titre I Garantie de l'Etat
Art. 1 Garantie
1 Le Conseil d'Etat est autorisé par caution simple à garantir le remboursement de prêts d'un montant maximum de 5 milliards de francs en faveur de la fondation de droit privé de valorisation des actifs de la BCGe (ci-après fondation) qui a pour but d'assainir la Banque cantonale de Genève ainsi que de valoriser et réaliser les actifs qui lui sont transférés.
2 Cette caution simple sera mentionnée au pied de bilan de l'Etat de Genève.
Art. 2 Rémunération de la garantie
Cette garantie fait l'objet d'une rémunération par la fondation selon des modalités à fixer par voie réglementaire.
Art. 3 Couverture financière de la garantie
Un éventuel appel de la garantie sera financé par une demande de crédit extraordinaire.
Art. 4 Evaluation des actifs transférés
Dès sa constitution, la fondation fera évaluer les risques et pertes potentielles sur chaque actif transféré par un organe de révision indépendant.
Art. 5 Prise en charge par la Banque Cantonale de Genève
1 La Banque Cantonale de Genève rembourse à la fondation sur une base annuelle:
2 La Banque Cantonale de Genève effectuera les remboursements des montants mentionnés aux lettres a), b) c) en fonction de son résultat annuel, après constitution des provisions nécessaires et distribution des dividendes.
Art. 6 Prise en charge par l'Etat de Genève
1 Les pertes sur la réalisation des actifs transférés sont prises en charge par l'Etat.
2 Elles seront financées par la dissolution de la provision relative à la BCGe et, au besoin, par un crédit supplémentaire visant à réalimenter la provision.
Art. 7 Avances à la fondation
1 Le Conseil d'Etat est autorisé à faire des avances nécessaires au fonctionnement de la fondation.
2 Ces avances sont remboursables après encaissement des montants versés par la Banque Cantonale de Genève selon l'article 4 ci-dessus.
Art. 8 Crédit extraordinaire d'investissement
Un crédit extraordinaire d'investissement de 500 000 F est ouvert au Conseil d'Etat pour la création du capital de dotation.
Art. 9 Inscription au patrimoine administratif
Ce capital de dotation sera inscrit dans le bilan de l'Etat de Genève au patrimoine administratif sous « Capital de dotation de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe ».
Art. 10 Budget d'investissement
Ce crédit extraordinaire ne figure pas au budget d'investissement 2000. Il sera comptabilisé dès 2000 sous la rubrique 22.00.00.524.01.
Art. 11 Financement
Le financement du crédit mentionné à l'article 7 est assuré, au besoin, par le recours à l'emprunt hors cadre du volume d'investissement « nets-nets » fixé par le Conseil d'Etat.
Art. 12 Provision
1 En raison de la nature de cet investissement, celui-ci donnera lieu à la constitution d'une provision dans l'année de versement du capital de dotation.
2 La constitution mentionnée à l'alinéa 1 aura pour conséquence la dissolution à due concurrence d'une partie de la provision relative à la Banque Cantonale de Genève.
Art. 13 Fondation
Les statuts de la fondation définissent les organes et leurs compétences et sont approuvés par le Conseil d'Etat.
Art. 14 Secret de fonction
Les membres du Conseil de fondation et son personnel sont soumis au secret de fonction et respectent les obligations de confidentialité pour les faits soumis au secret bancaire.
Art. 15 Exonération d'impôts
La fondation est exonérée de tout impôt cantonal et communal sur le bénéfice, le capital, et la liquidation, ainsi que sur l'impôt immobilier complémentaire, de l'impôt sur les gains immobiliers, des droits d'enregistrement et de la taxe professionnelle communale.
Art. 16 Commission de contrôle
1 Le Grand Conseil nomme en son sein une Commission de contrôle.
2 Y siège un membre par parti représenté au Grand Conseil.
3 Le président a voix prépondérante en cas d'égalité des voix.
Art. 17 But
1 La Commission de contrôle supervise :
2 Elle donne son avis au Conseil de fondation sur la nomination de la direction de la fondation ainsi que sur le choix de l'organe de contrôle externe, son cahier des charges et son programme de travail.
3 La fondation est tenue de soumettre à la Commission de contrôle dans les six mois qui suivent la clôture de chaque exercice, leur bilan, leur compte de profits et pertes, le rapport de gestion ainsi que le rapport de l'Organe de vérification des comptes, à l'exclusion de tout élément qui relève du secret bancaire.
4 La Commission de contrôle rédige un rapport annuel à l'attention du Grand Conseil.
Art. 18 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, du 7 octobre 1993.
Art. 19 Fondation
1 La garantie de l'Etat déploie ses effets rétroactivement à partir du 1er janvier 2000.
2 La loi entre en vigueur au 1er août 2000.
EXPOSÉ DES MOTIFS
La Banque Cantonale de Genève, dont la création a été approuvée par le peuple de Genève il y a sept ans, est issue de la fusion de la Caisse d'Epargne de la République et Canton de Genève, fondée en 1816, et de la Banque Hypothécaire du Canton de Genève, fondée en 1847. La Banque Cantonale de Genève a donc repris les actifs et les passifs de ces deux établissements.
La crise immobilière des années 90 avait affecté la situation financière des deux institutions et particulièrement la valeur des immeubles garantissant les crédits qu'elles avaient octroyés.
La reprise des actifs et passifs ainsi que des risques des deux anciennes institutions bancaires a pesé sur les activités de la Banque Cantonale de Genève.
Afin de respecter son but principal qui est de contribuer au développement économique du canton et de la région, la Banque Cantonale de Genève a décidé d'une politique progressive d'assainissement de ces risques en les inscrivant dans la durée.
A la différence des autres institutions bancaires et compte tenu de sa capacité financière, la Banque a ainsi constitué progressivement des correctifs de valeurs et provisions au moyen de ses résultats.
Ce choix stratégique, qui n'a pas été contesté par les organes de révision et de surveillance, s'est progressivement révélé problématique. En effet, vu la persistance de la crise immobilière, les résultats annuels de la Banque ne lui permettaient plus de constituer ces nécessaires correctifs de valeurs et provisions tout en maintenant des résultats positifs et un dividende. La Banque n'a plus pu disposer des montants nécessaires à augmenter les fonds propres afin de respecter les exigences de la loi sur les banques et d'assurer le développement de ses affaires.
Aussi, à la fin de l'année dernière, la Banque Cantonale de Genève et le Conseil d'Etat ont été amenés à réexaminer cette politique progressive d'assainissement des risques pratiquée ces dernières années. En accord avec la Commission fédérale des banques (l'autorité de surveillance de la Banque), plusieurs mesures d'assainissement ont été décidées.
1. Par prélèvement sur la réserve générale, la Banque Cantonale de Genève a constitué une provision de CHF 500 millions.
2. Le Conseil d'Etat a proposé au Grand Conseil une augmentation de capital de CHF 112,5 millions, le faisant passer de CHF 225 millions à CHF 337,5 millions.
3. Le Conseil d'Etat et la Banque Cantonale de Genève ont estimé qu'il était nécessaire d'assainir en une seule fois le portefeuille des crédits présentant des risques en les faisant reprendre par une nouvelle structure juridique. La constitution de cette structure fait l'objet du présent projet de loi.
4. Les organes de la Banque ont été restructurés. Le Conseil d'Etat a nommé un nouveau président du Conseil d'administration et un nouveau directeur général sera nommé dès le 1er janvier 2001.
5. Par ailleurs, un projet de loi est en voie d'être déposé par un groupe de députés afin de modifier la loi sur la Banque Cantonale de Genève et renforcer le contrôle de ses activités par ses organes et par l'Etat.
I. Situation de la banque et des crédits à risques
Les actifs de la Banque s'élèvent à près de CHF 20 milliards, les crédits à la clientèle à CHF 16,2 milliards, dont CHF 11,1 milliards sont des crédits hypothécaires. Les crédits présentant des risques s'élèvent à CHF 6,6 milliards selon l'Organe de révision. La Banque dispose de correctifs de valeur et de provisions de CHF 1,270 milliard compte tenu de la provision de CHF 500 millions effectuée au bouclement de l'exercice 1999.
Le besoin complémentaire de correctifs de valeur ou de provisions dépend largement de la valeur des biens immobiliers qui garantissent les crédits et plus particulièrement de leur rendement locatif ainsi que du taux retenu pour l'évaluation.
II. Création d'une structure juridique en vue de la reprise des actifs à risques
Le but consiste à assainir la Banque Cantonale de Genève, grevée par les crédits nécessitant la constitution de correctifs d'actifs ou de provisions. Il est donc envisagé de constituer une structure juridique nouvelle à laquelle seraient transférés les crédits présentant des risques, mais qui sont garantis par des biens immobiliers.
La constitution d'une filiale de la banque, selon le modèle suivi par la Banque Cantonale Bernoise lors de son assainissement en 1993, n'est pas la solution retenue. Dans le contexte actuel, il apparaît préférable de créer une structure juridique indépendante de la Banque, qui jouisse d'une totale autonomie lui permettant de réaliser ses actifs. Libérée du passé, la Banque serait ainsi en mesure de développer ses propres affaires.
Compte tenu du but de cette nouvelle structure, il n'a pas été envisagé de créer une société commerciale. En effet, la nouvelle entité devra valoriser les actifs repris de la Banque.
La Fondation de droit privé est la mieux adaptée compte tenu de la souplesse juridique qu'elle présente. Il est néanmoins prévu que l'Etat exerce un contrôle sur les mesures de valorisation et de réalisation des actifs repris. Ainsi, le projet de loi prévoit la création d'une commission du Grand Conseil chargée du contrôle de la gestion de la Fondation.
La solution d'une fondation de droit public n'a pas été retenue car elle nécessiterait une éventuelle décision du Grand Conseil pour toute aliénation immobilière selon l'article 80 A de la Constitution.
Le but de la fondation est rappelé dans la loi: il s'agit d'assainir la Banque cantonale de Genève, de valoriser les actifs transférés par la Banque à la fondation et de les réaliser. Ce but fera aussi l'objet d'une disposition dans les statuts de la fondation approuvés par le Conseil d'Etat.
III. Transfert des actifs
Dès sa création, la fondation reprendra, sur la base d'une convention de droit privé, les crédits immobiliers insuffisamment couverts par les immeubles en garantie. La Fondation ne reprendra aucun crédit en blanc, ces derniers étant déjà partiellement couverts par des provisions constituées auprès de la banque. Sur la totalité des crédits de CHF 6,6 milliards présentant des risques, elle ne reprendra que ceux bénéficiant de garanties. Le montant total des crédits ainsi transférés à la fondation s'élèvent à CHF 4'949'990'000.-.
Le choix des crédits a été dicté par le souci constant d'assainir définitivement la Banque, en la déchargeant des crédits immobiliers qui nécessitaient des provisions compte tenu d'une valeur insuffisante de gage les garantissant.
Après les mesures d'assainissement, la Banque disposera de fonds propres suffisants pour répondre aux exigences de la Loi sur les Banques. Au total, la Banque devrait même ainsi bénéficier d'un surplus de fonds propres d'environ CHF 150 millions.
IV. Portage
Divers crédits pour un montant total de CHF 1,7 milliard ont fait l'objet d'opérations de portage. Ces opérations consistent en la reprise d'un crédit et de la propriété qui le garantit par une société; le crédit porte un intérêt correspondant aux revenus locatifs du bien mis en garantie. Toutes les opérations de portage seront transférées à la fondation.
V. Financement de la Fondation et garantie de l'Etat
Le transfert des crédits immobiliers à la fondation sera effectué à la valeur dans les livres de la Banque, permettant ainsi à celle-ci de libérer les correctifs d'actifs et les provisions nécessaires à la couverture des crédits commerciaux.
La fondation sera financée par un prêt de la Banque Cantonale ou de l'Etat de Genève ou de toute autre manière dont le remboursement bénéficiera de la garantie de l'Etat.
La fondation aura pour ressources les revenus locatifs nets des immeubles gagés. Ceux-ci sont estimés actuellement à CHF 96 millions. Ils devraient progressivement augmenter à CHF 150 millions.
La fondation supportera principalement deux types de charges. Tout d'abord, elle devra s'acquitter d'intérêts et autres frais dus au prêteur. Ensuite, elle devra assumer ses frais de fonctionnement (personnel, locaux, matériel).
Dès lors que les ressources de la fondation ne suffiront pas, du moins à ses débuts, pour couvrir ses charges, la fondation devra bénéficier d'avances de l'Etat.
Cependant, il a été décidé que le financement de la fondation serait une opération neutre pour l'Etat.
Par conséquent, la Banque devra rembourser à la fondation différents montants incluant notamment ses frais de fonctionnement et ses frais bancaires et supporter les frais liés à la garantie de l'Etat.
Toutefois, parce qu'il n'est pas certain que la Banque dispose immédiatement après son assainissement de fonds disponibles, il a été prévu que le paiement par la Banque à la fondation, à l'exception des frais de garantie, dépendait de certaines conditions, tenant à la situation financière de la Banque. Ainsi, la Banque devra consacrer son bénéfice prioritairement au paiement du dividende aux actionnaires. Elle devra également procéder aux attributions obligatoires, et notamment constituer les provisions qui sont nécessaires au vu des risques encourus. En revanche, la fondation a droit au solde du bénéfice net de la Banque après allocation des provisions et distribution du dividende.
Les pertes sur les crédits transférés à la fondation, notamment celles issues de la réalisation des gages garantissant ces crédits, sont supportés en premier lieu par la fondation. Toutefois, dans la mesure où sur le long terme les gains réalisés par la fondation ne compensent pas ces pertes, la perte nette sera supportée en second lieu par l'Etat.
VI. Réalisation des actifs transférés
La fondation aura pour but de récupérer les créances reprises, au besoin en valorisant les biens immobiliers qui les garantissent et en les réalisant.
Il n'a pas été prévu une durée maximale pour cette réalisation En effet, celle-ci va dépendre de la situation immobilière générale et de la conjoncture.
La fondation s'emploiera à valoriser les actifs de manière à ce que le risque de pertes se réduise au cours des années. De même, le Conseil de fondation veillera à réaliser les actifs de façon à limiter la perte de la fondation.
Cependant si les actifs se valorisent au cours des quelques trente prochaines années, la fondation devrait pouvoir être liquidée sans perte.
VII. Le projet de loi
Titre I Garantie de l'Etat (articles 1 à 3)
La fondation est obligée de recourir à l'emprunt pour financer la cession des actifs par la Banque Cantonale de Genève. Ce montant s'élevant à environ CHF 5 milliards, elle devra emprunter cette même somme.
Sans la garantie de l'Etat, aucun établissement bancaire n'accepterait d'octroyer un tel prêt à la fondation. Cette garantie permettra donc à la fondation d'obtenir un prêt à des conditions favorables. Elle consiste en un engagement de l'Etat de rembourser au prêteur, quel qu'il soit, le montant emprunté par la fondation si celle-ci se révélait défaillante dans ses obligations contractuelles.
La fondation aura la possibilité de choisir auprès de qui elle entend solliciter son emprunt. La garantie de l'Etat déploiera ses effets quel que soit l'identité du prêteur. Il est envisagé que la Banque Cantonale de Genève accorde un prêt à la fondation, mais la décision finale sera fonction des meilleures conditions offertes. Il n'est d'ailleurs pas exclu que l'Etat octroie tout ou partie des prêts nécessaires à la fondation.
Il est usuel que le bénéficiaire de la garantie, en l'occurrence la fondation, paie en contrepartie à l'Etat un montant qualifié de rémunération de la garantie. Cette rémunération est calculée à un taux forfaitaire en fonction du montant garanti. Un règlement du Conseil d'Etat définira précisément le montant annuel à payer par la fondation.
Cependant, ce montant qui fait partie des frais à charge de la fondation lui est ensuite remboursé par la Banque Cantonale de Genève (art.4 al.1 let.d du projet de loi et les commentaires ci-dessous).
Les normes de comptabilité applicables à l'Etat impose la mention de la garantie au pied du bilan de l'Etat. De même, elles exigent qu'il soit fait état des sources financières d'un appel à la garantie. Vu qu'il n'est pas possible aujourd'hui de prévoir si ou quand la fondation sera défaillante vis-à-vis du prêteur, l'appel à la garantie devra cas échéant faire l'objet d'une demande de crédit extraordinaire.
Titre II Financement de la Fondation (articles 4 à 7)
Article 4
Atag Ernst & Young, mandaté par la Banque Cantonale de Genève, a pu effectuer un contrôle complet des crédits dits sensibles. Cette fiduciaire a réparti ces crédits en diverses catégories, soit notamment ceux en blanc, et ceux bénéficiant d'une garantie. Ce travail a nécessité l'examen complet des dossiers de la Banque. Un tel accès était conditionné au respect du secret bancaire, la fiduciaire oeuvrant comme mandataire de la Banque.
Le travail d'Atag Ernst & Young avait pour but d'évaluer les risques et les besoins de provisions auxquels devait et doit faire face la Banque. En revanche, elle n'a pas examiné en détail les risques que supportera la fondation. Ces risques dépendent étroitement de l'évaluation des immeubles qui garantissent les crédits transférés. Un tel examen implique l'analyse de chaque position, un état des lieux, voire une appréciation par des spécialistes de l'immobilier. Atag Ernst & Young travaillant comme mandataire de la Banque Cantonale de Genève, sa tâche ne s'étendait pas à cette analyse, qu'elle n'aurait du reste de toute façon pas pu accomplir faute de temps.
Cependant, il est important que la fondation, et à travers elle l'Etat, puisse évaluer les risques auxquels elle va être confrontée ces prochaines années. C'est pourquoi la fondation mandatera, dès sa création, un organe de révision indépendant pour effectuer ce travail d'évaluation (art. 4 du projet de loi). Vu que la fondation est tenue de respecter les obligations de confidentialité résultant du secret bancaire (art.13 du projet de loi), elle peut et doit imposer la même obligation à cette organe de révision en sa qualité de mandataire.
Il va de soi que le rapport d'évaluation de ce réviseur ne devra pas divulguer à des tiers de faits couverts par le secret bancaire. Au besoin, les indications identifiant des anciens clients de la Banque seront caviardées. Ainsi, ce rapport d'évaluation pourra être mis à la disposition de la Commission de contrôle du Grand Conseil. Il devrait être achevé lors de la remise du rapport sur les comptes du premier exercice de la fondation
Article 5
Chaque année, la Banque Cantonale de Genève devra, dans la mesure de ses disponibilités financières au sens de l'art.5 al.2 du projet de loi, effectuer un certain nombre de paiements à la fondation.
En premier lieu, la Banque devra payer à la fondation le montant égal à la différence entre ce que la fondation encaisse comme états locatifs (nets) et ce qu'elle paie au prêteur pour son prêt. Autrement dit, la fondation recevra de la Banque une somme lui permettant de couvrir son déficit de financement. Cette somme est destinée à évoluer en fonction des mesures de valorisation prises permettant d'augmenter l'état locatif encaissé.
En second lieu, la Banque devra rembourser à la fondation les frais de fonctionnement que celle-ci a encouru dans l'année. Ces frais de fonctionnement incluent notamment les frais de personnel, de locaux, de matériel de bureau. En font aussi partie les frais liés à l'engagement de mandataires pour des tâches ponctuelles ou de longue durée. L'ensemble des coûts liés à la réalisation des crédits de la fondation, en particulier les coûts liés aux procédures de réalisation des immeubles constitués en gage sont considérés comme frais de fonctionnement. En revanche, les pertes ou moins-values sur la réalisation des immeubles ne sont pas à la charge de la Banque Cantonale de Genève.
En troisième lieu, la Banque Cantonale de Genève devra rembourser à la fondation ce qu'elle aura dû débourser pour acquérir le contrôle des opérations de portage. Parmi les crédits transférés de la Banque à la fondation figure pour environ CHF 1.7 milliards de créances contre des sociétés de portage. Si la fondation décide de racheter le capital-actions de ces sociétés afin d'obtenir la maîtrise exclusive de l'immeuble, les montants payés à cette fin par la fondation lui seront remboursés par la Banque. En toute hypothèse, la fondation choisira librement la politique qu'il y a lieu de mener vis-à-vis des sociétés de portage.
Enfin, le montant payé par la fondation à l'Etat en contrepartie de la garantie du remboursement octroyée par l'Etat est supporté en fin de compte par la Banque Cantonale de Genève. Chaque année, celle-ci doit rembourser à la fondation la somme payée à l'Etat selon l'art.2 du projet de loi.
L'assainissement de la Banque ne doit toutefois pas être mis en péril en imposant à celle-ci de trop lourdes obligations. C'est pourquoi les trois premiers paiements précités dépendent d'une évaluation annuelle prenant en compte la situation financière de la Banque Cantonale de Genève.
Cependant, le remboursement au bénéfice de la fondation respectera évidemment les prescriptions légales commandant la constitution de provisions pour risques. De telles prescriptions figurent notamment dans la Loi fédérale sur les banques. Le paiement à la Fondation visé par l'art.5 al.1 du projet de loi ne doit pas contraindre la Banque à violer ces prescriptions et normes comptables obligatoires. Cependant, il est clair que seules les provisions nécessaires seront admissibles.
Il en va différemment s'agissant de la rémunération selon l'art.2 du projet de loi pour la garantie visée à 'art.1 du projet de loi. En effet, quel que soit la situation financière de la Banque Cantonale de Genève, le paiement de l'art.4 al.1 let.d du projet de loi est exigible annuellement. Autrement dit, la créance de Fondation contre la Banque Cantonale de Genève permettra à la première de s'acquitter chaque année de sa dette du même montant vis-à-vis de l'Etat (en application de l'art.2 du projet de loi).
Pour le surplus, il est évident que les sommes que la Banque n'aura pas été en mesure de payer compte tenu de son bénéfice annuel pourront être réclamées par la suite lorsque sa situation financière se sera améliorée. Ainsi, le droit au remboursement de la fondation ne s'éteint pas d'année en année, mais au contraire se trouve reporté.
Article 6
La solution choisie en matière de frais de fonctionnement, y compris frais financiers, ne vaut pas en matière de pertes et bénéfices nets. Au moment de la dissolution de la fondation une fois son but accompli, la perte nette ou le gain net sera dévolu à l'Etat. A l'heure actuelle, l'évolution sur une longue période de la conjoncture économique étant imprévisible, il est impossible de prévoir si la fondation sera en fin de compte bénéficiaire ou déficitaire. Une telle anticipation est d'autant plus difficile que la fondation a pour objectif de réaliser ses actifs sur la durée, cherchant ainsi à bénéficier des embellies du marché immobilier.
Vu que l'opération a pour but d'assainir la Banque en lui évitant de devoir provisionner les risques liés aux crédits transférés à la fondation, il n'est pas souhaitable de faire supporter la perte finale de la fondation à la Banque. Aussi, toutes les pertes comme tous les gains de la fondation incomberont finalement à l'Etat.
Article 7
Parce que la fondation va fonctionner avec un budget très serré et qu'elle ne reçoit de la Banque Cantonale de Genève qu'un remboursement en fin d'année pour les dépenses de l'exercice écoulé, il est indispensable qu'elle puisse solliciter de l'Etat des avances. Celles-ci permettront de couvrir au fur et à mesure les frais de fonctionnement (y compris financiers) auxquels devra faire face la fondation.
Pour tenir compte de l'exigence tenant au financement neutre de la fondation, les avances de l'Etat doivent être remboursés par leur bénéficiaire, la fondation. Cependant, il est évident que la fondation ne peut effectuer un tel remboursement qu'une fois que la Banque a exécuté ses obligations selon l'art.5 du projet de loi. Autrement dit, la fondation utilise les montants payés par la Banque Cantonale de Genève pour rembourser l'Etat. Si la Banque est dispensée du paiement compte tenu de sa situation financière, la fondation est, elle aussi et dans la même mesure, dispensée du remboursement à l'Etat.
Titre III: Capital de dotation (articles 8 à 12)
Le droit des fondations exige que les fondations dispose d'une fortune et/ou d'un financement rendant possible la réalisation de leur but statutaire. En l'occurrence, le capital de dotation initial de la fondation a été fixé à un montant relativement bas de CHF 500'000.- (art.8 du projet de loi). Il est apporté par l'Etat.
Compte tenu de l'ampleur du but et des tâches que devra réaliser la fondation, ce montant constitue une ressource minimale complétée nécessairement par les avances de l'Etat et les remboursements de la Banque Cantonale. Ce capital doit permettre à la fondation de jouir d'un minimum d'indépendance. En particulier, il servira à couvrir certains frais de fonctionnement de la fondation, le remboursement par la Banque Cantonale de Genève n'intervenant en toute hypothèse qu'en fin d'année.
Les articles 9 à 12 du projet de loi détaillent le traitement comptable de cette allocation de l'Etat à la fondation. L'article 12 alinéa 2 du projet confirme que l'apport de ce capital entraînera à due concurrence la dissolution de la provision générale dans les comptes de l'Etat relative à la Banque Cantonale de Genève.
Titre IV: Fondation et Commission de contrôle (articles 13 à 17)
Article 13
Les fondations de droit privé sont créés soit par testament, soit par acte authentique. Dans les deux cas, leur but, leur fortune et leur organisation sont définies dans des statuts.
En l'occurrence, les statuts de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe sont approuvés par le Conseil d'Etat. Cependant, il a été jugée utile d'établir, dans la loi, certaines règles relatives au fonctionnement et à la surveillance de la fondation.
Article 14
Le respect du secret bancaire s'impose à la Banque Cantonale de Genève en vertu de la loi fédérale sur les banques. Ce secret implique l'interdiction de communiquer à des tiers non soumis aux secrets des faits couverts par le secret. De tels faits sont avant tout ceux qui révèlent l'identité du client. Le secret perdure même lorsque la Banque et le client ne sont plus en rapport d'affaires.
La fondation va devoir gérer des dossiers relatifs aux anciens clients de la Banque Cantonale de Genève. Ces dossiers contiendront des faits couverts par le secret, soit notamment l'identité des clients dont les crédits ont été transférés à la fondation. C'est pourquoi il est impératif que la fondation traite de manière confidentielle l'information ainsi acquise de la Banque. Autrement dit, elle respectera les mêmes obligations de confidentialité qui lient la Banque Cantonale de Genève. Dans la même mesure que celle-ci, la fondation devra taire à tous tiers, y compris l'Etat, des faits couverts par le secret. La fondation pourra invoquer les mêmes exceptions à la règle du secret dont bénéficiaient la Banque Cantonale de Genève, au même titre d'ailleurs que tous les établissement bancaires.
Le respect du secret constituent une obligation tant du Conseil de fondation, organe suprême de la fondation, que des employés ou autres mandataires de celle-ci. La Commission de contrôle du Grand Conseil établie selon l'art.13 du projet n'a en revanche pas accès à l'information protégée par le secret. Autrement dit, la fondation devra occulter le nom des clients débiteurs de la fondation chaque fois qu'elle transmet un document ou une information à la Commission de contrôle.
En outre, tant le Conseil de fondation que le personnel de la fondation devront respecter le secret de fonction. Celui-ci peut avoir une portée plus large que le secret bancaire, dès lors qu'il s'étend à toute circonstance non connue public.
Article 15
La fondation mène une tâche d'assainissement dont l'Etat reçoit le bénéfice par le biais, d'une part, d'une position privilégiée en matière de réalisation d'immeubles, et d'autre part, en recevant le solde éventuel positif des opérations au moment de la dissolution de la fondation. Par conséquent, la fondation sera dispensée du paiement d'impôts.
Articles 16 et 17
Le Conseil de fondation est l'autorité chargée de gérer la fondation. La gestion ordinaire sera cependant déléguée en grande partie à une direction, de sorte que le Conseil de fondation aura essentiellement des tâches de haute direction. Une surveillance sera exercée par la Commission de contrôle du Grand Conseil. Celle-ci est désignée par le Grand Conseil. Elle a des compétences étendues, puisqu'elle supervise toute l'activité de la fondation. Cette commission doit notamment veiller à ce que la fondation respecte en tout temps les dispositions impératives, qu'elles aient pour source la loi, les statuts ou les règlements. Par ailleurs, elle supervise la gestion de la fondation accomplie par le Conseil de fondation comme par la direction.
Enfin, la Commission de contrôle fait la liaison entre la fondation et le Grand Conseil, puisqu'elle soumet à celui-ci chaque année un rapport. Celui-ci relate notamment les tâches de supervision et de conseil que la Commission de contrôle a mené durant l'année.
Pour que la Commission de contrôle puisse effectuer correctement sa mission, la fondation est tenue de collaborer en fournissant l'information utile. Celle-ci comprend d'abord un aspect purement comptable avec les bilans et comptes de pertes et profits. La Commission recevra aussi, pour le premier exercice de la fondation, le rapport d'évaluation des risques liés aux crédits transférés par la Banque Cantonale de Genève (art.4 du projet de loi). Le Conseil de fondation, respectivement l'Organe de révision, sont aussi tenu de remettre le rapport de gestion, respectivement le rapport sur les comptes. Si certains de ces documents devaient contenir des informations identifiant un client, par exemple au titre des gros risques, ils seraient caviardés pour respecter l'obligation de confidentialité due au client.
Titre V: Disposition légale et transitoire (articles 18 et 19)
La loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat du 7 octobre 1993 (D 1.05) a vocation à s'appliquer automatiquement dès lors que la fondation est considéré comme majoritaire dans l'institution de droit privé. L'art.2 de cette loi sur la gestion administrative indique que cette majorité peut être réalisé par la détention d'une participation majoritaire au capital, par une participation majoritaire dans le financement de l'exploitation ou par une représentation majoritaire au sein des organes supérieurs. L'article 17 du projet de loi ne fait que rappeler l'applicabilité de cette loi sur la gestion administrative.
La Banque Cantonale de Genève et son réviseur, Atag Ernst & Young ont arrêté à la date critère du 31 décembre 1999 la liste des crédits sensibles. Pour éviter de devoir actualiser leur travail à la date d'entrée en vigueur de la loi (prévue au 1er août 2000 selon l'art.18 al.2 du projet de loi), voire à la date de constitution de la fondation, il a été décidé d'arrêter à la même date le transfert des crédits à la fondation. Par conséquent, la cession déploiera des effets rétroactifs au 1er janvier 2000. Les plus-values ou moins-values intervenues depuis le 1er janvier 2000 reviendront donc à la fondation. Corollaire obligatoire de cet effet rétroactif de transfert des actifs, la garantie de l'Etat octroyée à la fondation doit déployer ses effets elle aussi dès le 1er janvier 2000.
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Rapportde la Commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit extraordinaire d'investissement de 107 500 000 F pour l'acquisition d'actions nominatives de la Banque cantonale de Genève et autorisant le Conseil d'Etat à acquérir des actions au porteur de la Banque cantonale de Genève pour un montant de 138 700 000 F
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
Rapporteur : Mme Mariane Grobet-Wellner
La Commission des finances a étudié le projet de loi 8194 lors de ses séances des 22 mars, 27 mars, 3 mai et 5 mai 2000 sous la présidence de M. Dominique Hausser.
Ont assisté à ces séances :
De la BCGe :
De l'organe de révision ATAG :
Les procès-verbaux ont été établis par Mme Eliane Monnin avec sa précision habituelle.
Présentation du projet
Afin de poursuivre son activité comme banque appelée à soutenir l'économie genevoise, la Banque cantonale de Genève (BCGe) est obligée d'augmenter ses fonds propres. Elle souhaite y procéder en augmentant son capital de 50 %.
Ce capital, actuellement de 225 millions F, sera porté à 337,5 millions F par émission de 1'325'516 nouveaux titres nominatifs B à la valeur nominale de 50 F chacun et de 462'242 nouveaux titres au porteur à la valeur nominale de 100 F.
Le droit préférentiel de souscription (obligation en vertu de l'art. 652b du Code des obligations) requiert que les actionnaires actuels puissent conserver leur participation proportionnelle au capital.
Dans le cas présent, les actionnaires pourront souscrire les nouveaux titres de manière à garder aussi bien les mêmes proportions de voix que d'actions.
Ainsi, ces titres sont proposés aux actionnaires actuels dans les proportions suivantes :
La détention de 2 anciennes actions nominatives donne le droit de souscrire à 1 nouvelle action nominative B.
La détention de 2 anciennes actions au porteur donne le droit de souscrire à 1 nouvelle action au porteur.
Le prix de souscription envisagé maximum est de 150 F pour les actions nominatives et de 300 F pour les actions au porteur.
Si ce prix peut être maintenu et que les actionnaires exercent pleinement leur droit préférentiel de souscription, le résultat sera le suivant :
Nominatives B
(total 1'325'516 nouvelles actions à 150 F, soit 198'827'400 F) :
Porteurs
(total 462'242 nouvelles actions à 300 F, soit 138'672'600 F) :
La part revenant à l'Etat en cas de sa participation proportionnelle à l'augmentation du capital se monte ainsi à 112'538'700 F.
En terme de nombre de voix, les proportions restent les suivantes :
Etat de Genève 39,52 %
Ville de Genève 25,99 %
Autres communes 11,08 %
soit un total de 76,59 % des voix en mains des collectivités publiques.
Les proportions de participation des collectivités publiques au capital actions de la BCGe sont et resteront les suivantes :
Etat de Genève 33,35 %
Ville de Genève 20,65 %
Autres communes 08,80 %
soit un total de 62,80 % du capital actions en mains des collectivités publiques.
Au terme de l'augmentation de capital, l'assemblée générale des actionnaires de la BCGe devra modifier les statuts de la banque, de manière à ce qu'ils indiquent le nouveau capital.
Le projet de loi tient également compte de l'éventualité d'une souscription d'actions nominatives B inférieure aux 100 % proposés de la part des autres communes. Dans ce cas, l'Etat de Genève pourrait être amené à se porter acquéreur de la différence, afin que l'augmentation du capital puisse être menée à terme. Ce complément éventuel a été estimé à 8'086'300 F, soit environ 25 %.
Pour les mêmes motifs, la demande de crédit extraordinaire porte non seulement sur la part des actions au porteur proposée à l'Etat de Genève mais sur l'intégralité des nouvelles actions au porteur.
Si le prix d'émission devait être adapté à la baisse en fonction de la valeur boursière des actions au moment de l'augmentation de capital, l'Etat pourrait demander d'utiliser partie du crédit extraordinaire sollicité afin de convenir d'un prêt subordonné avec la BCGe.
Une rémunération de 4,5 % de la nouvelle catégorie d'actions nominative B par un dividende proportionnellement identique à celle des actions au porteur devra permettre de couvrir le coût d'un emprunt nécessaire pour l'acquisition de ces nouvelles actions.
Bref rappel historique
Il y a sept ans, les électeurs genevois se sont prononcés en faveur de la création d'une banque cantonale de Genève.
La BCGe est issue de la reprise des actifs et passifs de deux banques, la Caisse d'Epargne de Genève, fondée en 1816 (Etat de Genève) et la Caisse Hypothécaire de Genève, fondée en 1847 (Ville de Genève et communes genevoises). Le total de son actif a passé de 15 milliards en 1994 à 19,6 milliards F en 1999.
Son but principal à teneur de l'art. 2, al. 1 de la loi genevoise sur la Banque cantonale de Genève, est de contribuer au développement économique du canton de Genève et de la région.
Lors de la création de la BCGe, une estimation de l'importance des créances à risques et des pertes potentielles a été faite, afin de déterminer le montant des provisions nécessaires pour couvrir ces risques identifiés. Les deux banques ont indiqué que les provisions nécessaires étaient de 600 millions F et qu'elles figuraient déjà au passif des bilans. C'est finalement un montant 800 millions F qui a été retenu au début de l'activité en 1994.
En fonction de l'évolution des créances à risque, la nouvelle BCGe entendait compléter les provisions nécessaires par prélèvement sur le bénéfice disponible. Elle souhaitait inscrire cette démarche dans la durée, afin de ne pas porter préjudice à ces activités de crédits, favorables à l'économie locale.
L'insuffisance de ces provisions est rapidement apparue. La rubrique « correctifs de valeurs et provision » était supérieure à 1 milliard F de 1995 à 1997, puis réduite à 875 millions F en 1998. Puis bondit à 1,27 milliard dans les comptes 1999, réduisant de façon importante les fonds propres de la BCGe.
L'insuffisance de fonds propres appelle un assainissement par une augmentation de capital. Ces fonds propres seront encore complétés par la réalisation d'une partie des réserves latentes existantes.
Travaux de la commission
La commission a auditionné plusieurs membres du Conseil d'administration et de la Direction de la BCGe ainsi que les réviseurs externes de la BCGe, la société ATAG.
Audition de la Direction de la BCGe
MM. Fuess, directeur général, M. Dominique Ducret, président et par M. Pilly, vice-président de la BCGe, assistés par MM. David Lachat et Jacques Perrot, membres du Conseil d'administration de la BCGe ont exposé la situation actuelle et les problèmes de la banque.
Il est admis que l'estimation des provisions nécessaires pour risques fut beaucoup trop optimiste à l'époque de la création de la banque. Une des raisons a certainement été la volonté de faire aboutir la création de la banque cantonale.
La survenance d'une crise et ses effets néfastes n'ont pas été suffisamment anticipés. Ainsi, les années de récession ont entravé la constitution progressive de provisions initialement escomptée. C'est pourquoi la Commission fédérale des banques, qui s'est d'abord déclarée en accord avec cette stratégie à long terme, a finalement insisté sur la nécessité d'un assainissement plus rapide, par un transfert de 500 millions F pris sur les réserves de la banque faisant partie de ses fonds propres.
L'augmentation des fonds propres par une augmentation du capital social avec souscription publique est aujourd'hui nécessaire afin de pouvoir permettre à la banque de continuer à accorder des crédits. En effet, faute de fonds propres suffisants, la BCGe n'est plus en mesure de respecter les normes en la matière de la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne.
S'agissant d'une augmentation de capital avec souscription publique, le prospectus de la BCGe devrait être parfaitement transparent sur sa situation économique.
De plus, la Commission fédérale des banques propose la création d'une société de mise en valeur, garantie par l'Etat, pour le transfert dans cette société de tout ou partie des créances à problèmes.
Le Conseil d'administration de la BCGe a accepté cette suggestion.
Le transfert de certaines créances à une société de valorisation aura pour conséquence une « économie » pour la banque d'ordre de 60 millions F de fonds propres par milliard transféré. La nécessité de la banque de faire appel aux marchés des capitaux pour compléter ses fonds propres ne devrait pas se faire sentir avant deux ans, suivant les montants transférés.
Quant à la nature de l'augmentation du capital, la proportion actuelle entre les actions nominatives et les actions au porteur sera maintenue en proposant aux actionnaires de souscrire à une action nominative B pour deux actions nominatives et à une action au porteur pour deux actions aux porteurs. Le capital nominatif sera ainsi porté de 225 millions F à 337,5 millions F.
Les besoins d'augmentation de fonds propres étant de 300 millions F et le coût de l'opération (droits de timbre et frais inhérents) devant également être couvert, le prix d'émission devrait être de l'ordre de 290 F à 300 F pour les actions aux porteurs et de 145 F à 150 F pour les actions nominatives.
Audition de l'Organe de révision ATAG
MM. P. Gisiger et Cl. Savioz, partenaires de la société ATAG, précisent que ATAG a été l'Organe de contrôle de la Caisse d'Epargne de Genève (CEG) depuis 1986 et de la BCGe depuis sa création. ATAG vérifie les états financiers en confirmation de la législation bancaire. Elle considère l'environnement général et apprécie les risques et les besoins en provision que ces risques pourraient nécessiter. Cette confirmation est donnée à l'Organe de surveillance, la Commission fédérale des banques.
Lors de la création de la BCGe, trois fiduciaires ont procédé à une évaluation des crédits à risques. La fiduciaire de la Banque Hypothécaire était la SRB - Société de révision bancaire - dont le siège était à Bâle. (Cette fiduciaire a été acquise par ATAG une année après la fusion, dans le cadre d'une stratégie d'expansion). La méthode utilisée a été fixée dans le cadre de la fusion des banques. Elle consiste en l'établissement d'une moyenne entre la valeur de rendement et la valeur substantielle des gages, étant précisé que la valeur du gage ainsi obtenue est également appréciée, à la hausse ou à la baisse, en fonction de la qualité du débiteur, la nature des gages et de l'environnement économique. Les deux banques ont chacune évalué leurs propres risques de crédit et les résultats ont été revus par une troisième fiduciaire, Arthur Andersen.
M. Gisiger affirme que le montant des provisions pour risques évalué à 1,4 milliard F au 31.12.1999 apparaît suffisant pour couvrir les risques déterminés à ce jour. Il précise qu'il s'agit d'une partie des risques et qu'il est extrêmement difficile de déterminer si, dans le temps, l'entier des risques peut ou non se matérialiser. L'évolution des risques dépend également de l'évolution de la conjoncture économique, des taux d'intérêts ainsi que des conditions de réalisation des gages.
M. Savioz précise que les réviseurs prennent également en compte les réserves latentes, son « business plan » ainsi que son surplus de fonds propres pour fixer le niveau des provisions pour risques.
La décision finale est prise par la banque mais l'Organe de révision peut s'y opposer. En ce qui concerne la BCGe, la banque n'a pas pris un chiffre différent de ce que l'organe de révision considérait comme le strict minimum nécessaire. A une question de la Commission des finances, il fût répondu qu'il n'y a pas eu de « négociation » entre le réviseur et la banque à ce sujet mais une « discussion entre les vues du réviseur et les vues de la banque pour arriver à trouver ce qui est considéré comme étant le juste équilibre ».
Discussion
Que va-t-il se passer si le Grand Conseil dit non à la demande d'augmentation du capital de la BCGe ?
Les fonds propres de la banque n'étant plus en conformité, elle aura trois alternatives :
soit elle ferme ;
soit elle demande le remboursement anticipé de crédits actuels de quelques milliards de F pour diminuer les exigences de fonds propres ;
soit elle cherche un acquéreur pour essayer de lui vendre la banque.
Les trois solutions ne vont pas sans mal.
Dans le premier cas, les employés de la banque et les clients de celle-ci devront trouver un autre employeur, respectivement un autre prêt/crédit. Même dans la conjoncture actuelle, cela ne sera pas tâche facile.
Dans le second cas, la banque devra dénoncer des crédits en cours et mettre fin, en tout cas momentanément, à ses activités de bailleur de fonds. En d'autres termes, elle suspendra ses activités jusqu'à la date (indéterminée) où elle aura réussi à compléter ses fonds propres.
Enfin, la vente de la banque risque de s'avérer ardue, le choix d'un repreneur approprié n'étant pas aisé.
A ceci s'ajoute le versement éventuel de tout ou partie de la garantie de l'Etat à concurrence de 4,6 milliards F.
Quelle est l'importance pour Genève d'avoir une banque cantonale ?
La BCGe a légalement une mission bien précise : contribuer au développement économique du canton et de sa région. Aucune autre banque n'a pour mission de fournir un soutien aux PME de la région.
Pour réaliser cet objectif, la banque doit privilégier la clientèle des PME, clientèle que les grandes banques suisses jugent souvent insuffisamment intéressante. Ce faisant, elle doit à la fois viser un profit convenable - reversé à ses actionnaires par le biais du dividende - et un soutien à l'économie.
Ce soutien des PME a des effets positifs sur les finances du canton sous forme de places de travail créées ou maintenues, rentrées fiscales, etc. De la même manière, les PME doivent pouvoir compter, en période de crise, sur le rôle anticyclique de la BCGe.
Cet équilibre entre rentabilité et crédits aux PME n'est pas toujours facile à maintenir. Une réflexion approfondie sur les améliorations possibles à cet égard mérite d'être menée. Il faudra mieux définir la politique économique de la BCGe, qui ne doit pas être celle d'un établissement bancaire traditionnel, à savoir en toute priorité un taux de profit le plus élevé possible.
Comment a-t-il été possible de se tromper à ce point sur les montants de crédits à risques et les besoins de provisions pour ces mêmes risques ?
Quel remède possible pouvons-nous envisager pour éviter que cela se reproduise ?
L'évaluation des risques d'un crédit se fait en tenant compte de plusieurs facteurs, notamment l'évolution de la conjoncture en général et la situation globale du débiteur. Il n'y a pas de « check-list » général pour déterminer l'importance de ces risques.
La BCGe affirme avoir eu connaissance de la situation et avoir pris la décision de constituer des provisions nécessaires « dans la durée » et en fonction de ses possibilités (bénéfices), ceci en accord avec les réviseurs et la Commission fédérale des banques.
Cette explication ne dispense pas de s'interroger sur la transparence et le professionnalisme des organes de la banque. Ceux-ci n'auraient jamais dû tolérer que la situation aille en s'empirant, sans alerter l'Etat sur les graves conséquences potentielles que cela pouvait avoir. L'urgence dans laquelle le Grand Conseil doit travailler aujourd'hui aurait pu être évitée si les organes de la banque avaient fait preuve d'une bien plus grande transparence.
Les raisons de certains manquements sont sans doute aussi à chercher dans un manque de perspicacité de certains des organes de la banque qui ont mal apprécié les risques de certains crédits et le coût potentiel pour la collectivité d'une évolution défavorable de la conjoncture.
Il est en conséquence urgent de remédier à cette situation par une plus grande transparence et par un professionnalisme adéquat des représentants de l'Etat dans le Conseil d'administration de la banque. C'est pourquoi une réforme de la structure est actuellement envisagée.
La fondation de valorisation des actifs de la BCGe - quelle importancea-t-elle dans l'assainissement de la banque ?
La création d'une Fondation de valorisation des actifs de la BCGe s'intègre dans un ensemble de mesures d'assainissement de la banque.
Bien que le présent rapport ne concerne pas ce projet de loi du Conseil d'Etat, il est nécessaire d'en dire quelques mots ici, car il est directement lié à l'assainissement de la banque pour les raisons suivantes :
L'ordonnance fédérale sur les banques indique comment établir le niveau minimum des fonds propres. Ce niveau est fixé en fonction du total et de la nature des postes au bilan de la banque. Il indique également le niveau des provisions pour risques à créer.
La BCGe n'est plus en mesure de respecter la législation bancaire et ses normes relatives aux fonds propres et aux provisions qu'exigent certains crédits.
C'est pourquoi la banque va augmenter ses fonds propres par l'augmentation de capital.
Au lieu d'augmenter ses provisions pour risques, la BCGe va diminuer les crédits à son bilan liés à ces provisions. Une partie des crédits anciennement couverts par ces provisions sera donc transférée à la Fondation, sans que celle-ci ne reprenne les provisions.
Par conséquent, la banque gardera un montant de provisions pratiquement inchangé qu'elle pourra affecter à des crédits sensibles. Elle sera ainsi en conformité avec le droit bancaire suisse.
La Fondation de valorisation, n'étant pas une banque, n'a pas les mêmes objectifs que la BCGe, ni les mêmes limitations. Elle n'a notamment pas d'obligation à respecter des ratios donnés de fonds propres et de provisions. Comme elle n'a aucun épargnant ou investisseur à rembourser, elle n'encourt pas les mêmes risques que la BCGe de devoir réaliser ses actifs à un moment jugé inopportun.
De surcroît, elle peut véritablement adopter une politique de valorisation et de réalisation dans la durée, puisque aucun délai ne lui est imposé pour liquider ses actifs et gages.
La Fondation pourra ainsi profiter de la reprise de la conjoncture pour diminuer les risques de perte sur ses actifs, qui se chiffrent, selon l'estimation toute récente de l'ATAG, jointe à ce rapport, entre environs 1 milliard F et 1,5 milliard F
La commission a procédé à des votes indicatifs sur le principe de la création d'une telle Fondation.
1er vote indicatif :
Création d'un capital de dotation de 500 000 F en faveur de la Fondation de valorisation
2e vote indicatif :
Octroi à la Fondation d'une garantie de 5 milliards F :
A la question de savoir, si cette Fondation devait être de droit public ou de droit privé, les avis des commissaires ont divergé.
Les commissaires L, R et DC se sont prononcés en faveur d'une Fondation de droit privé avec un amendement dont la teneur est la suivante :
« L'aliénation des actifs immobiliers dont la valeur dépasse 5 millions F doit être soumise à l'approbation du Grand Conseil ».
Les commissaires S et AdG se sont prononcés en faveur d'une Fondation de droit public avec un amendement dont la teneur est la suivante :
« Le Grand Conseil peut autoriser la Fondation d'aliéner une liste des biens (appartements et villas) acquis lors de la réalisation des actifs transférés par la BCGe dont la valeur estimée est inférieure à 2 millions F ».
Les commissaires Ve étaient d'accord avec les deux propositions.
Votes sur le projet de loi 8194
L'entrée en matière a été acceptée par :
Le vote d'ensemble du projet de loi à été accepté par :
Conclusions
Quoi que l'on puisse penser de la façon avec laquelle la BCGe a été gérée dans le passé, la majorité des commissaires de la Commission des finances est arrivée à la conclusion qu'il est dans l'intérêt de la collectivité publique de tout mettre en oeuvre pour maintenir notre Banque cantonale.
Il est primordial d'agir rapidement, afin que la Banque cantonale puisse continuer à remplir son rôle en faveur de l'économie régionale.
Le climat de confiance doit impérativement être rétabli, par des garanties de professionnalisme de ses dirigeants et de la transparence en ce qui concerne la politique de la banque.
Compte tenu de ce qui précède, la majorité de la commission vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter ce projet de loi tel qu'il vous est proposé.
Projet de loi(8194)
ouvrant un crédit extraordinaire d'investissement de 107 500 000 F pour l'acquisition d'actions nominatives de la Banque cantonale de Genève et autorisant le Conseil d'Etat à acquérir des actions au porteur de la Banque cantonale de Genève pour un montant de 138 700 000 F
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Art. 1 Crédit extraordinaire d'investissement
Un crédit extraordinaire d'investissement de 107 500 000 F est ouvert au Conseil d'Etat pour l'acquisition d'actions nominatives de la Banque cantonale de Genève.
Art. 2 Inscription au patrimoine administratif
Les actions nominatives seront inscrites dans le bilan de l'Etat de Genève au patrimoine administratif.
Art. 3 Financement et couverture des charges financières
Le financement de ce crédit extraordinaire est, au besoin, assuré par le recours à l'emprunt hors cadre du volume d'investissement "; nets-nets " fixé par le Conseil d'Etat, dont les charges financières en intérêts sont à couvrir par l'impôt et/ou le produit des dividendes distribués.
Art. 4 Amortissement
En raison de la nature de cet investissement, celui-ci ne donne pas lieu à amortissement.
Art. 5 Autorisation d'acquisition
Le Conseil d'Etat est autorisé à acquérir, au nom de l'Etat de Genève, des actions au porteur de la Banque cantonale de Genève pour un montant de 138 700 000 F.
Art. 6 Financement et couverture des charges financières
Le financement de cette acquisition est, au besoin, assuré par le recours à l'emprunt, dont les charges financières en intérêts sont à couvrir par l'impôt et/ou le produit des dividendes distribués.
Art. 7 Inscription au patrimoine financier
Les actions au porteur seront inscrites dans le bilan de l'Etat de Genève au patrimoine financier.
Art. 8 Transfert des actions au porteur au patrimoine administratif
Le Conseil d'Etat est habilité à transférer les actions au porteur au patrimoine administratif si les circonstances le justifient.
Art. 9 Clause conditionnelle
L'entrée en vigueur de la présente loi est conditionnée par l'adoption de la modification des statuts régissant la composition du capital social.
Art. 10 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.
RAPPORT DE LA MINORITÉ
Rapporteur : M. Jean Spielmann
La Commission des finances a examiné le projet de loi du Conseil d'Etat concernant l'acquisition d'actions nominatives de la Banque cantonale de Genève, ainsi que la proposition du Conseil d'Etat de créer une Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève.
Au cours de sa séance du 3 mai 2000, les réviseurs de la BCG, la société Atag Ernst & Young a remis aux membres de la Commission des finances un rapport spécial intitulé « Risques de crédit sur les crédits sensibles arrêtés à la date critère du 31 décembre 1999 de la Banque cantonale de Genève ». Le même jour les dirigeants de la Banque cantonale sont venus exposer la situation de la banque et notamment la liste des objets à risques faisant l'objet des crédits dits « sensibles » qu'il est prévu de transférer à une Fondation de valorisation.
La situation, telle que présentée, aussi bien par Atag que par les dirigeants de la banque, oblige à agir extrêmement rapidement pour que la Banque cantonale puisse continuer à jouer son rôle.
Propositions des partis de l'Alternative
Les partis de l'Alternative se sont réunis suite à la séance du 3 mai pour examiner les projets de lois. Ils sont arrivés à la conclusion qu'une Fondation de droit public serait préférable parce qu'elle permet le contrôle par le Grand Conseil. Cette solution offre davantage de transparence et permet aussi d'intégrer les statuts de la Fondation dans la loi. Un projet a été rédigé dans ce sens et reprend sur le fond les termes du projet de loi déposé par le Conseil d'Etat. Ces propositions ont été remises au Conseil d'Etat et aux membres de la Commission des finances.
But de la Fondation de valorisation
Le but principal de la Fondation de valorisation est d'éviter que la BCG soit contrainte de réaliser rapidement des actifs comme cela a été le cas dans le cadre de la CBG où la banque a été obligée de réaliser une partie de ses réserves latentes en se défaisant d'une affaire qui était productive. La création de la Fondation de valorisation permettra de récupérer une partie des dossiers pour réduire au maximum les pertes, d'autant plus qu'un financement important est pris en charge par les contribuables.
Le transfert de créances n'implique pas l'accord du débiteur. Lors de la cession, il faudra distinguer si le crédit a ou n'a pas été dénoncé. S'il a été dénoncé, lorsqu'il y a litige, la difficulté de la cession est plus grande. Dans ces cas, il est évident que la banque pourrait conserver le statut de créancier et agir pour le compte de la Fondation lorsque, pour des raisons de procédure, il n'est pas possible de notifier la cession. En second lieu, l'idée d'une Fondation de valorisation présente évidemment un grand avantage, la banque ne pouvant plus maintenir certains crédits, compte tenu de sa situation financière. Le portage aura lieu sur de nombreuses années en espérant que le marché immobilier reprendra et que les actifs immobiliers couvriront la dette. S'agissant de la réaction des débiteurs, s'ils s'opposent à la cession, même s'ils ne peuvent pas le faire juridiquement, il y aura des procédures d'encaissement de crédits et partant de réalisation de gages. Si le gage est réalisé, la Fondation en deviendra propriétaire et c'est à ce moment là que se posera le problème du portage de l'immeuble proprement dit, éventuellement de son aliénation, une fois qu'il a été repris par la Fondation de valorisation.
Les rapports entre la Fondation et la banque devront faire l'objet d'une convention relativement précise, avec une distinction en fonction du type de crédit et, notamment, de l'Etat actuel des procédures de recouvrement. Il est donc évident qu'il faudra collaborer avec la banque pour le suivi des dossiers. En ce qui concerne le statut de droit public il donne la possibilité pour la Fondation, de faire appel à des mandataires, à des régies. L'objectif est de maintenir un certain nombre de mandats, lorsque cela est possible, pour éviter de compromettre les chances de récupération des crédits.
La position de l'AdG
Nous tenons en préambule lors de ce débat à préciser les faits suivants :
Le Parti du Travail, puis l'AdG se sont toujours battus, d'abord pour la création d'une banque cantonale puis pour son développement. Nous rappelons une fois de plus que les partis de l'Entente ont toujours refusé d'entrer en matière sur la création d'une banque cantonale, puis, alors que nous avons approuvé sa création, l'ont conduit à la situation actuelle.
Nous rappelons aussi que nous nous sommes préoccupés depuis plusieurs années de la situation de la banque cantonale, et que de nombreux membres de notre fraction son intervenus pour poser des questions, suite notamment à une série d'affaires qui ont été rendues publique par les médias.
Nos craintes quant à un découvert important du bilan de la banque et à des pertes plus importantes que celles admises par le directeur de la banque se sont malheureusement avérées exactes et cela bien au-delà de ce que nous pouvions penser.
Nous avons clairement déclaré au mois de février que nous étions favorables à ce que l'Etat finance une recapitalisation de la BCG pour autant que la situation financière de celle-ci soit clairement établie et que l'on puisse déterminer quel est le véritable effort financier qui doit être accompli par les pouvoirs publics.
Bien que cet effort s'avère aujourd'hui, à la suite de l'inventaire des crédits à risques, nettement plus important que ce que l'on pouvait prévoir, l'AdG reste favorable au sauvetage de la banque pour autant que certaines conditions élémentaires de transparence et de contrôle soient mises en place tant à l'égard de la BCG que de la Fondation de valorisation.
Les conséquences d'une fermeture
Certains s'étonnent que les pouvoirs publics envisagent ce sauvetage, mais nous persistons à penser que malgré sa mauvaise gestion et sa politique de faveurs au profit de certains, la BCG joue un rôle essentiel pour la vie économique et politique du canton. La BCG a sa raison d'être. Le canton a besoin d'une banque qui reste un instrument à disposition de l'ensemble de la population, des PME, des artisans et des petits épargnants. Bien sûr des doutes ont été émis sur la capacité de la nouvelle BCG d'atteindre durablement ces objectifs, entre autres, sur la capacité d'anciens administrateurs qui ont une responsabilité manifeste dans ce qui se passe actuellement, à continuer de siéger au sein du Conseil d'administration. Ces éléments devront être examinés avec soin et des solutions crédibles présentées, préalable indispensable à toutes décisions.
Par ailleurs, la fermeture de la BCG aurait des conséquences suivantes particulièrement graves :
le versement éventuel de la garantie de l'Etat à concurrence de 4,6 milliards pour les carnets d'épargne ;
la perte de crédits hypothécaires, commerciaux et autres placements de clients qui ont payés normalement leurs intérêts débiteurs ;
faillites ;
licenciement du personnel, près de 1000 postes de travail.
L'AdG pour une Fondation de droit public
Si l'Alliance de gauche est favorable à une Fondation de droit public, c'est pour éviter que les milieux qui ont tiré de grands avantages de la banque cantonale et des deux autres établissements avant la fusion ne profitent de nouveau de la situation au cas où, comme le propose la majorité ces opérations se feraient par le biais d'une Fondation de droit privé, sans aucun contrôle démocratique du Grand Conseil et sans transparence.
L'AdG n'est pas d'accord de faire payer à des innocents les fautes de gestion commises par certains. Par contre, il est indispensable de donner des garanties minimales quant aux exigences de transparence complètes.
Une confiance à rétablir
A notre avis l'engagement important des contribuables impose la mise en place d'une Fondation de droit public permettant à la population et à ceux qui la représentent d'avoir un minimum de contrôle démocratique et la transparence nécessaire sur le traitement des dossiers transmis à la Fondation de valorisation. Si, comme le propose la majorité, la Fondation de valorisation conserve un caractère privé, elle sera soumise à la pression des banques, et sera rapidement contrainte de passer au bradage des biens.
Le motif principal d'une Fondation de droit public est une question de confiance qu'il faut rétablir. Depuis quelque temps, l'Alliance de gauche est interpellée par des citoyens qui sont très inquiets de ce qui se passe à la banque cantonale et qui se rendent compte aujourd'hui qu'ils ont été trompés, qu'on leur a donné de fausses explications, voire mensongères et que la situation de la banque était effectivement beaucoup plus grave que ce que ses dirigeants prétendaient. Beaucoup de gens aujourd'hui donnent raison à l'Alliance de gauche d'avoir posé un certain nombre de questions parce qu'ils se rendent compte de la gravité de la situation. C'est la raison pour laquelle la transparence est la condition indispensable à la réussite du sauvetage de la banque et le seul moyen de la garantir est la création d'une Fondation de droit public qui a l'obligation de rendre des comptes devant le Grand Conseil alors qu'une Fondation de droit privé peut faire ce qu'elle veut. Elle suivra la même politique que la banque cantonale en disant qu'elle n'a pas d'explications à donner publiquement et continuera à engendrer la suspicion.
Transparence et contrôle démocratique
Une Fondation de droit privé permettrait précisément à ces milieux d'acquérir des biens immobiliers à des prix qui n'ont rien à voir avec les valeurs du marché. Ce que nous voulons c'est éviter le bradage, qui suivrait comme cela a été le cas du pillage de la banque. Tels sont les motifs pour lesquels nous faisons le choix d'une Fondation de droit public qui seule permettra la transparence et l'exercice du droit démocratique sur le fonctionnement de la Fondation de valorisation. Cela n'empêchera aucun particulier de se porter acquéreur des objets immobiliers qui seront transférés à la Fondation de droit public, mais permettra d'éviter le bradage des objets.
C'est la raison pour laquelle il n'est pas question pour nous d'accepter une recapitalisation de la banque avec l'argent des contribuables sans avoir au préalable décidé sur la création d'une Fondation de droit public, avec tous les paramètres et conditions mis en place dans les amendements présentés par les partis de l'Alternative au projet du Conseil d'Etat. Ces amendements ont été distribués à l'ensemble des députés pour leur permettre de prendre position dans leur groupe respectif avant la séance du Grand Conseil.
Conditions préalables pour un vote du projet 8194 par l'AdG
C'est à cette condition que nous acceptons de participer à une recapitalisation et que pourrons voter le projet de loi 8194.
Nous espérons vivement qu'une majorité du Grand Conseil comprendra enfin que le rétablissement de la confiance à l'égard de la BCG implique une politique totalement différente, impliquant la transparence et le contrôle démocratique. Si cela ne devait pas être le cas, l'AdG en tirera les conséquences.
Dans une telle perspective nous mettons en garde la majorité du Grand Conseil qu'il n'est pas exclu que cette question soit posée devant le peuple, comme l'envisage déjà certains. Il est évident que des solutions qui ne garantissent pas un véritable changement ne manquerait pas de renforcer le manque de confiance grandissant de la population.
Annexe lettre M. Grobet et Mme Sayeg + projet de loi
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ANNEXE, « Amendements au projet de loi 8194 » à filmer (5pp.)
Premier débat
La présidente. Nous allons donc traiter les points concernant la Banque cantonale de Genève. Je rappelle - c'est pour cette raison que M. Ducommun m'a passé le relais - que l'article 24 de la loi portant règlement du Grand Conseil stipule que les députés ayant un intérêt personnel direct à l'objet soumis à la discussion ne peuvent ni intervenir ni voter.
Les rapporteurs étant à la table des rapporteurs, nous allons aborder le débat de manière globale sur ces trois projets.
En préambule, le Conseil d'Etat nous a fait part de son souhait de faire une déclaration. Monsieur le président du Conseil d'Etat, je vous donne la parole.
M. Guy-Olivier Segond, président du Conseil d'Etat. Il y a maintenant sept ans, le 12 mars 1993, par un vote clair, le peuple de Genève a décidé de créer la Banque cantonale de Genève.
Selon l'article 177 de la constitution genevoise, la Banque cantonale de Genève - qui est propriété du canton et des communes, qui détiennent la majorité des voix attachées au capital social - est une société anonyme de droit public qui a pour but principal de contribuer au développement économique du canton et de la région.
Créée par la fusion de la Caisse d'épargne, fondée en 1816, et de la Banque hypothécaire, fondée en 1847, la Banque cantonale de Genève a repris les actifs et les passifs de ces deux institutions.
Dès le début, la situation créée par la reprise des risques hérités des deux anciennes banques publiques genevoises a pesé sur les activités de la Banque cantonale de Genève.
En effet, à la différence d'autres institutions bancaires, qui ont subi des pertes de l'ordre de 10 milliards, la Banque cantonale de Genève a décidé, conformément à sa vocation, une politique progressive d'assainissement de ces risques, à inscrire dans la durée.
Ce choix stratégique, effectué à l'époque d'entente avec la Commission fédérale des banques et en accord avec les autorités cantonales, a été régulièrement discuté dans les milieux professionnels, dans les instances politiques et dans la presse, occultant le fait que les résultats opérationnels de la Banque cantonale de Genève étaient positifs.
C'est pourquoi la Commission fédérale des banques, le Conseil d'Etat et la Banque cantonale ont été amenés, à la suite de ces discussions publiques, à réexaminer la politique progressive d'assainissement des risques telle qu'elle était pratiquée ces dernières années.
Cet examen, engagé à l'occasion de l'augmentation du capital social de la Banque cantonale de Genève, a permis d'établir les points suivants :
- d'abord, les actifs de la Banque cantonale de Genève s'élèvent à près de 20 milliards de francs suisses ;
- ensuite, les crédits à la clientèle s'élèvent à 16,2 milliards, dont 11,1 milliards sont des crédits hypothécaires ;
- par ailleurs, les crédits présentant des risques s'élèvent, selon l'organe de révision, à 6,6 milliards ;
- et enfin, la Banque cantonale dispose de correctifs de valeurs et de provisions de 1,27 milliard de francs, compte tenu de la provision de 500 millions effectuée lors du bouclement de l'exercice 1999.
Sur la base de ces données, une nouvelle stratégie d'assainissement a été décidée par le Conseil d'Etat et la Banque cantonale, en accord complet avec la Commission fédérale des banques.
Dans une première étape et afin que les efforts de la Banque cantonale se concentrent sur le présent et sur l'avenir plutôt que sur le passé, le portefeuille des débiteurs doit être assaini en une seule fois.
A cet effet, les dossiers difficiles de la Banque cantonale portant sur des objets immobiliers seront repris et gérés par une fondation de valorisation dont les emprunts seront garantis par l'Etat de Genève. La situation de la banque étant ainsi assainie, son capital social sera alors augmenté de 225 millions à 337,5 millions.
Qu'elle soit de droit public ou de droit privé, la Fondation de valorisation sera totalement indépendante de la Banque cantonale sur le plan du droit, sur le plan des personnes et sur le plan des opérations. Elle sera placée sous la surveillance soit du Conseil d'Etat, dans le cas d'une fondation de droit public, soit du service cantonal des fondations, dans le cas d'une fondation de droit privé.
Le conseil de fondation sera formé de cinq membres nommés par le Conseil d'Etat dans les deux hypothèses, non pas en raison de leur appartenance politique mais sur la seule base de leur compétence professionnelle.
La Fondation de valorisation recevra de la Banque cantonale des dossiers de crédits immobiliers d'un montant total de 4,9 milliards relatifs à environ 1300 objets immobiliers. Dès sa constitution, la fondation fera évaluer par un organe indépendant les risques et les pertes potentiels. Et cette évaluation ne se fera pas de manière globale, mais sur chaque actif transféré et sur la base d'une inscription dans la durée.
De ce fait, la Fondation de valorisation ne sera pas, comme on a pu le lire ce matin, une menace pour le marché immobilier genevois : au contraire, confiée à des professionnels compétents et responsables, elle deviendra un bon outil de régulation d'un marché qui est à nouveau en forte croissance.
Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, il y a plusieurs semaines, le Conseil d'Etat annonçait que les comptes 1999 se bouclaient par un boni. Ce résultat favorable de l'exercice 1999 ne permet pas seulement une baisse de la dette de l'Etat et une amélioration de l'autofinancement des investissements : il entraîne aussi une nouvelle baisse des impôts cantonaux de 7% - portant la baisse totale des impôts cantonaux à 12% - tout en mettant un terme à une longue période de douze années de déficit.
Ce soir, il s'agit également de mettre un terme à une autre situation : la situation créée il y a maintenant sept ans par la reprise des risques hérités des deux anciennes banques publiques, qui a pesé, dès le début, sur les activités de la nouvelle banque cantonale.
Pour arriver à prendre des décisions définitives répondant dans les délais fixés aux exigences posées par le droit fédéral sur les banques et par la Commission fédérale des banques, le Conseil d'Etat et le Grand Conseil ont dû recourir à des procédures d'urgence.
Mais ce soir l'essentiel est là, soulageant la Banque cantonale d'un fardeau qui la pénalise : l'opération d'assainissement d'une part et l'augmentation du capital social d'autre part, combinées avec le changement des instances dirigeantes, permettront à la Banque cantonale, qui a - et le Conseil d'Etat a pu le constater récemment - le soutien de l'ensemble des milieux économiques de notre canton et des partenaires sociaux, de mieux mettre en valeur le rôle effectif qu'elle joue dans l'économie genevoise.
Le Conseil d'Etat et, plus généralement, les autorités de notre canton - qui garantit, conformément à la loi, le remboursement en capital et en intérêts des dépôts d'épargne et de prévoyance effectués auprès de la Banque cantonale - sont convaincus que les décisions que le Grand Conseil doit prendre ce soir permettront à la Banque cantonale de ne plus concentrer ses efforts dans la liquidation du passé, mais de les concentrer sur le présent et l'avenir.
Mme Micheline Calmy-Rey. Le Conseil d'Etat assume un choix : celui de se tenir au côté de la Banque cantonale et de participer aux mesures d'assainissement qui lui permettront de poursuivre ses activités.
La Banque cantonale de Genève vit depuis le début de l'année en insuffisance de fonds propres, avec une dérogation de la Commission fédérale des banques. Les mesures d'assainissement que nous vous soumettons ce soir, soit une augmentation de capital et un transfert d'actifs, ont pour but premier de résorber cette insuffisance. Courant 1998, le Conseil d'Etat a demandé à la banque de lui communiquer son business plan. Connu en automne 1999, ce dernier démontrait la nécessité d'une augmentation de capital eu égard aux besoins de fonds propres. Il incluait en outre un échelonnement des provisions pour couvrir les pertes potentielles jusqu'en 2003, conformément à la politique poursuivie jusque-là par la banque.
La Commission fédérale des banques a mis son veto à cette manière de faire et exigé qu'une provision de 500 millions soit constituée sur l'exercice 1999, par prélèvement sur la réserve générale. C'est ainsi que les fonds propres de la banque ont été diminués de 500 millions. L'augmentation de capital permettra de combler partiellement ce manque. Etant donné la baisse du cours de l'action, il est possible que le nombre d'actions émises soit plus important que prévu pour atteindre l'enveloppe totale de 300 millions de fonds propres. Mais en tout état de cause, nous vous proposons de suivre cette augmentation du capital et le montant pour y parvenir figure dans le projet de loi pour un maximum de 246 millions de francs. Mesdames et Messieurs, il ne s'agit pas d'une dépense mais d'un investissement dont les charges financières seront, si tout va bien, couvertes par des dividendes !
Quant au transfert d'actifs à une Fondation de valorisation d'un montant de 4,9 milliards, il permettra d'alléger les besoins en fonds propres de la banque de 160 millions de francs et d'améliorer sa marge d'intérêts de quelque 40 millions de francs par année, selon la fiduciaire.
Une fois ce transfert concrétisé, il restera à la banque 1,681 milliard de crédits en blanc, en partie couverts par des provisions. Il sera en effet indispensable de compléter ces provisions à hauteur de 150 millions sur l'exercice 2000 pour couvrir les risques générés par ces crédits. Ainsi, l'opération d'assainissement sera terminée.
Le financement de ces provisions supplémentaires est assuré par réalisation des réserves latentes.
Concernant le coût de cette mesure pour l'Etat, les frais financiers, à savoir la différence entre les états locatifs encaissés et les charges financières totales des prêts octroyés par la fondation, seront à la charge de la banque. Seront également à la charge de la banque les frais de fonctionnement de la fondation et les frais et les montants nécessaires pour que la fondation contrôle les opérations de portage et la rémunération de la garantie de l'Etat. La banque effectuera le remboursement de ces sommes en fonction de son résultat annuel, sauf pour ce qui concerne la rémunération de la garantie dont le montant est fixe.
L'Etat quant à lui prendra en charge les pertes sur la réalisation des actifs transférés, et ce, en fonction de la situation financière de la banque.
Enfin, l'Etat participera à la réalisation des réserves latentes de la banque en achetant pour 30 millions de francs d'actions au porteur liées en emprunt convertible. Il s'agit là encore d'un investissement dont les charges financières devraient être couvertes.
Dans la balance, il convient de considérer que, de fait, l'Etat supporte déjà aujourd'hui un coût lié à la rentabilité insuffisante de la banque, car, comme actionnaire, nous ne bénéficions pas du versement d'un dividende normal. Il convient de considérer aussi qu'en cas de fermeture de la banque, le coût pour l'Etat serait élevé compte tenu de la perte du capital social, de la mise en jeu partielle ou totale de la garantie de l'Etat sur les dépôts d'épargne et de prévoyance, des pertes d'emplois et des liquidations forcées d'actifs qui pourraient en résulter, sans compter les effets indirects sur l'économie genevoise.
Quant à parler de l'acquisition par un tiers de la Banque cantonale genevoise, quelles qu'en soient les modalités, elles ne feraient pas disparaître la nécessité d'une restructuration au vu des conditions imposées par la Commission fédérale des banques. Cela suppose que l'éventuel acquéreur reprenne les 4,9 milliards de crédits susceptibles d'être initialement transférés à la fondation et injecte lui-même les sommes nécessaires à la reconstitution des fonds propres... Autant dire qu'en l'état il est douteux qu'un acquéreur accepte une telle responsabilité financière sans contrepartie de l'Etat !
Le projet concrétisant les mesures d'assainissement de la banque est, sur le plan financier - vous me permettrez de le dire - relativement raisonnable si on peut parler de «raisonnable» dans un tel contexte. Il est relativement raisonnable dans la durée et par comparaison au choix de reprise et de liquidation. Une fois les mesures d'assainissement concrétisées, la structure du capital et des fonds propres de la banque devrait lui permettre d'améliorer petit à petit sa rentabilité.
Mesdames et Messieurs les députés, l'augmentation de capital à elle seule ne suffit pas à rétablir la situation. Les deux mesures : à la fois l'augmentation de capital et le transfert d'actifs, sont nécessaires pour permettre à la banque d'envisager un fonctionnement normal.
De surcroît ces mesures sont urgentes, car l'activité bancaire repose sur la confiance, et, depuis plusieurs mois maintenant, la banque est fragilisée. Or, près de 50% des Genevoises et des Genevois entretiennent des relations bancaires, financières, avec la Banque cantonale. Les petites et moyennes entreprises ont besoin de son soutien, et l'incertitude qui règne autour de son avenir ne peut durer sans dégâts : pour elle, pour les gens et pour les entreprises.
Considérant ces faits, la majorité de la commission des finances, avec l'appui du Conseil d'Etat, propose un amendement corrigeant le projet de loi 8194, portant sur l'augmentation de capital, par des dispositions notamment sur la Fondation de valorisation, le tout assorti d'une clause d'urgence.
J'ajoute que le Grand Conseil étudie en ce moment un projet de renforcement de la surveillance de la banque, instaurant un meilleur contrôle public et une plus grande transparence. Ces mesures structurelles devront impérativement être prises rapidement, tout comme il convient de tirer les conclusions de la situation existante pour ce qui concerne le conseil d'administration et le management.
Je tiens enfin à remercier le Grand Conseil et la commission des finances qui ont travaillé rapidement et efficacement.
Je vous demande, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir voter ce soir les dispositions qui vous sont soumises. Je vous remercie.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je salue à la tribune la présence d'un de nos anciens collègues, M. François Grosjean... (Applaudissements.) ...ainsi que M. Alain Peyrot et M. Albert Otter, que je prie de bien vouloir m'excuser. (Applaudissements.)
Madame la rapporteuse de majorité, je vous donne la parole.
Mme Marianne Grobet-Wellner (S), rapporteuse de majorité. Mesdames et Messieurs, je vais faire un résumé de mon rapport, que vous avez reçu il y a deux jours seulement.
Je rappelle tout d'abord que la Banque cantonale de Genève est issue de la reprise des actifs et passifs des deux banques : la Caisse d'épargne de Genève et la Caisse hypothécaire. Son but principal est de contribuer au développement économique du canton de Genève et de la région. Lors de la création de la banque, une estimation de l'importance des créances à risques et des pertes potentielles a été faite, afin de déterminer le montant des provisions nécessaires pour couvrir ces risques identifiés.
L'insuffisance de ces provisions est rapidement apparue.
Il est aujourd'hui admis que l'estimation des provisions nécessaires pour couvrir ces risques était beaucoup trop optimiste à l'époque de la création de la banque. L'une des raisons a certainement été la volonté de faire aboutir la création de la Banque cantonale de Genève.
La survenance d'une crise et ses effets néfastes n'ont pas suffisamment été anticipés. C'est pourquoi la Commission fédérale des banques, qui s'est d'abord déclarée d'accord avec cette stratégie à long terme, a finalement insisté sur la nécessité d'un assainissement plus rapide, par un transfert de 500 millions de francs pris sur les réserves de la banque, faisant partie de ses fonds propres.
J'ai choisi de résumer la discussion de la commission en quelques questions :
l. Que va-t-il se passer si le Grand Conseil dit non à la demande d'augmentation du capital de la BCG ?
- Soit elle ferme ;
- soit elle demande le remboursement anticipé de crédits actuels de quelques milliards de francs ;
- soit elle cherche un acquéreur pour essayer de lui vendre la banque.
Ces trois solutions ne vont pas sans mal :
Dans le premier cas, les employés de la banque et les clients de celle-ci devront trouver un autre employeur, respectivement un autre prêt ou crédit. Même dans la conjoncture actuelle, cela ne sera pas tâche facile.
Dans le second cas, la banque devra dénoncer des crédits en cours et mettre fin, en tout cas momentanément, à ses activités de bailleur de fonds.
Enfin, la vente de la banque risque de s'avérer ardue, le choix d'un repreneur approprié n'étant pas aisé.
2. Quelle est l'importance pour Genève d'avoir une banque cantonale ?
La BCG a pour mission de contribuer au développement économique du canton et de sa région. En effet, aucune autre banque n'a pour mission de fournir un soutien aux PME de la région. Pour réaliser cet objectif, la banque doit privilégier la clientèle des PME, clientèle que les grandes banques suisses jugent souvent insuffisamment intéressante. Ce soutien aux PME a des effets positifs sur les finances du canton sous forme de places de travail créées ou maintenues, de rentrées fiscales, etc. De la même manière, les PME doivent pouvoir compter, en période de crise, sur le rôle anticyclique de la Banque cantonale de Genève.
3. Comment a-t-il été possible - tout le monde se pose cette question - de se tromper à ce point sur le montant des crédits à risques et les besoins de provisions pour ces mêmes risques ? Quel remède pouvons-nous envisager pour éviter que cela ne se reproduise ?
L'évaluation des risques d'un crédit se fait en tenant compte de plusieurs facteurs, et les raisons de certains manquements doivent sans doute être cherchées dans le peu de perspicacité de certains des organes de la banque, qui ont mal apprécié les risques de certains crédits et le coût potentiel pour la collectivité d'une évolution défavorable de la conjoncture. Il est en conséquence urgent de remédier à cette situation par une plus grande transparence et par un professionnalisme adéquat des représentants de l'Etat dans le conseil d'administration de la banque.
4. La Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève : quelle importance a-t-elle dans l'assainissement de la banque ?
La Banque cantonale de Genève n'est plus en mesure de respecter la législation bancaire et ses normes relatives aux fonds propres et aux provisions qu'exigent certains crédits. C'est pourquoi la banque va augmenter ses fonds propres par l'augmentation de capital. Au lieu d'augmenter ses provisions pour risques, la Banque cantonale de Genève va diminuer les crédits à son bilan liés à ces provisions. Une partie des crédits anciennement couverts par ces provisions sera donc transférée à la fondation sans que celle-ci reprenne les provisions. Par conséquent, la banque gardera un montant de provisions pratiquement inchangé qu'elle pourra affecter à des crédits sensibles. Elle sera ainsi - et c'est important - en conformité avec le droit bancaire suisse. La fondation, elle, peut véritablement adopter une politique de valorisation et de réalisation dans la durée, puisque aucun délai ne lui est imposé pour liquider ses actifs et gages.
Des discussions ont ensuite eu lieu pour regrouper les deux projets qui nous sont présentés aujourd'hui - la fondation, dont je viens de vous parler, et l'augmentation du capital - en un seul projet intégrant le projet de loi de la fondation et celui de l'augmentation du capital.
Ces amendements portent également sur l'adjonction d'une clause d'urgence.
La constitution est claire à ce sujet : il est possible d'avoir recours à la clause d'urgence en cas de loi d'emprunt, à condition qu'il y ait péril en la demeure et s'il peut être clairement démontré que l'Etat ne peut pas attendre pour utiliser l'emprunt, qui doit être affecté au patrimoine financier.
La jurisprudence du Tribunal fédéral est évidemment restrictive en ce qui concerne le recours à la clause d'urgence : elle n'est admissible que s'il y a une urgence objective. Cela est indéniablement le cas, en l'occurrence. La loi d'emprunt ne peut servir qu'à des acquisitions qui vont dans le patrimoine financier. Et l'acquisition d'actions d'une société anonyme - la banque en est une - entre dans le cadre du patrimoine financier de l'Etat.
La loi sur la Banque cantonale de Genève n'indique nulle part que les actions nominatives doivent figurer dans le patrimoine administratif. Elle précise uniquement que les actions nominatives doivent être détenues par l'Etat et par les communes. Cela laisse la possibilité aux communes de les vendre à l'Etat et vice versa. Le fait d'inscrire ces actions nominatives dans le patrimoine financier est conforme, dans la mesure où ces actions donnent droit à un rendement sous forme de dividendes.
Le texte qui vous est proposé prévoit que le transfert éventuel de ces actions nominatives du patrimoine financier au patrimoine administratif doit être soumis à une décision du Grand Conseil et ne peut avoir lieu sur simple décision du Conseil d'Etat.
En ce qui concerne la Fondation de valorisation, il s'agit indiscutablement d'un patrimoine administratif. Le capital de démarrage nécessaire dans l'immédiat peut être réduit à 100 000 F, de sorte que le crédit qui est sollicité à cet effet est inférieur à la limite de 125 000 F au-dessus de laquelle la clause d'urgence ne peut pas être utilisée.
La garantie de 5 milliards est une subvention virtuelle : tant qu'on ne fait pas appel à la garantie, celle-ci n'est pas considérée comme une dépense. En cas d'appel à la garantie, il faudrait demander un crédit extraordinaire au Grand Conseil, ce qui sauvegarde les droits populaires.
A partir de là, l'on tient la route par rapport aux exigences constitutionnelles quant à la notion d'une loi d'emprunt et quant à la notion du patrimoine financier. Je vous remercie de votre attention.
M. Jean Spielmann (AdG), rapporteur de minorité. Je n'entends pas ici refaire l'historique de la Banque cantonale de Genève, mais je tiens tout de même à donner quelques points de repère par rapport à la position que nous allons prendre ce soir et, principalement, par rapport aux responsabilités dans lesquelles nous avons l'intention de nous engager concernant l'avenir de la Banque cantonale de Genève.
Je rappelle que la fusion des deux banques a provoqué beaucoup de discussions à l'époque. Certains parlaient de «fusion sauvetage», d'autres de «fusion raison», etc. On peut dire aujourd'hui qu'il s'est agi en partie d'une «fusion sauvetage» qui permettait aux deux banques de redémarrer, mais, visiblement, à cette époque-là déjà, les risques n'avaient pas été évalués exactement à leur juste valeur et posaient le problème de la transparence et de la situation réelle de la banque par rapport au Grand Conseil.
Au moment de cette loi, nous avions présenté une série d'amendements - ils ont malheureusement été refusés par la majorité - portant notamment sur la structure de la future Banque cantonale, sur son orientation, sur l'éthique, la transparence et la démocratie.
Bien sûr, nous n'imaginions pas à l'époque que nous nous retrouverions si rapidement dans la situation que nous connaissons aujourd'hui. Il faut bien constater que les craintes qui étaient les nôtres - nous les avons exprimées dans ce Grand Conseil en posant un certain nombre de questions - se sont avérées en définitive encore en dessous de la réalité. En effet, les pertes admises par les directeurs sont allées bien au-delà de ce que nous avions pu imaginer !
Malgré cela, il faut faire une analyse objective de la situation, examiner quelles sont les responsabilités des uns et des autres et quel est le rôle de la Banque cantonale pour la collectivité genevoise et dans quel contexte nous entendons la voir se développer. Il faut préciser - il n'est pas inutile de le rappeler, au moment où nous avons des décisions à prendre - que nous avons toujours été favorables à la création d'une banque cantonale, parce que nous considérons que c'est un instrument utile et nécessaire pour une collectivité comme la nôtre, pas seulement pour répondre aux besoins publics de placements d'épargne, mais aussi pour soutenir les industries, les PME et les petits artisans. Cette fonction anticyclique permet ainsi à notre canton de surmonter un certain nombre de difficultés économiques.
L'évolution du monde bancaire dans notre pays, depuis l'époque de la fusion de l'ancienne Banque hypothécaire et de la Caisse d'épargne, a encore exacerbé la situation. Le retrait d'une grande partie des grandes banques - ou les restrictions émises par ces dernières - s'agissant de soutenir la relance économique, l'emploi, et de venir en aide, en accordant les crédits nécessaires, à ceux qui veulent entreprendre et être actifs dans le secteur industriel de notre canton, renforce encore le rôle de la Banque cantonale de Genève. Sans l'apport de cette dernière, de nombreuses entreprises ne bénéficieraient pas aujourd'hui de lignes de crédit de confiance et n'auraient pas pu développer leurs activités. Je crois que cela méritait également d'être dit, au moment où nous faisons l'analyse de la situation de la Banque cantonale de Genève.
Je tiens à dire aussi que l'année 1999 - cela se voit dans le bilan - montre le poids énorme des différentes opérations dont je reparlerai tout à l'heure et des risques pris par la banque : la fuite en avant et l'énorme spéculation ont été stoppées, suite au tassement des développements conjoncturels. Il fallait donc bien que quelqu'un paye l'addition ! Il faut dire que la Banque cantonale de Genève, au cours de l'année 1999, a ouvert 10 000 nouveaux comptes, a octroyé 6 600 crédits pour un montant de plus de 3 milliards de francs, a attribué 4 200 nouveaux crédits hypothécaires pour un montant de 1,2 milliard de francs et établi 5 300 nouveaux contrats. C'est dire qu'elle a joué son rôle et que nous entendons bien maintenant lui donner les moyens de poursuivre dans cette voie !
A partir de ce constat, le problème s'est posé en commission - c'est la raison pour laquelle j'ai fait un rapport de minorité - de voir comment nous allions orienter et assurer le redémarrage des activités de la Banque cantonale de Genève et quelle solution il convenait d'apporter pour les crédits à risques.
En première analyse, l'ensemble de ces crédits à risques a été estimé à 4,9 milliards. C'est le moment de dire qu'en dépit de toutes les questions que nous avons posées depuis bientôt plus d'une dizaine d'années dans cette enceinte nous n'avons jamais autant appris sur la situation économique réelle de la banque qu'au cours des trois dernières séances de la commission des finances, où, tour à tour, les réviseurs et les directeurs de la banque sont venus expliquer la situation. Nous avons enfin pu analyser la situation exacte de la banque sur la base d'éléments concrets. Nous avons également pu - cela démontre que la transparence est importante - éliminer un certain nombre de nos doutes et faire taire des rumeurs qui circulaient dans la République, alimentées notamment par la presse, sur des opérations douteuses et des opérations à risques. Nous avons pu constater qu'en ce qui concerne la CBG et d'autres activités, ces dernières étaient tout à fait dans l'ordre des choses et que le résultat final n'est pas le découvert extraordinaire que certains nous annonçaient. Au contraire, le résultat était positif : 73 millions de francs pour la banque et aucun client qui ne soit allé de la Banque cantonale de Genève vers cette institution, contrairement à ce que la rumeur laissait entendre !
Le risque a donc été cerné, les problèmes ont pu être identifiés, et nous nous sommes rendu compte que les directives de l'Office fédéral de contrôle des banques, qui demandait à la Banque cantonale de Genève d'augmenter ses actifs et de réaliser une partie de ses réserves latentes, conduisaient celle-ci à faire des opérations qui étaient en définitive contraires à l'intérêt de la population. On peut même dire que la réalisation de réserves latentes avec la CBG et la vente d'une série d'activités ont, en définitive, nui à l'essor de la banque qui a donc dû trouver des réserves, puisque les autres secteurs étaient insuffisamment rentables. La banque a dû se séparer de ses «bijoux de famille» - comme certains l'ont dit - et des affaires qui étaient le plus à même d'être positives pour l'avenir de la banque.
Par rapport à l'abandon de ces activités, la poursuite dans la même voie aurait signifié qu'il aurait fallu réaliser des réserves sur l'ensemble des crédits à risques. C'est la raison de la proposition qui vous est faite aujourd'hui. En effet, on a estimé que le risque réel se monterait entre 900 millions et 1,5 milliard - personne ne peut le dire avec précision, c'est l'avenir qui le dira, selon la gestion qui sera effectuée. - sur les crédits à risques, qui se montent au total à plus de 4,9 milliards - on parle de 5 milliards de francs. La réalisation rapide de ces biens conduirait à brader ces quelque 5 milliards d'actifs de la banque ! C'est-à-dire que ceux-là mêmes qui ont profité de crédits, souvent de complaisance, et qui ont bénéficié de la bienveillance de la banque - qui a été dénoncée à plusieurs reprises - pourraient retrouver leurs biens en vendant très rapidement des biens immobiliers et des équipements pour assurer les réserves latentes de la banque et la poursuite de son activité !
D'où la solution, qui a d'ailleurs aussi été préconisée par l'Office fédéral des banques pour d'autres banques cantonales, celle de Berne, de Soleure et d'autres : la création d'une fondation qui se charge non pas de liquider mais de valoriser ces biens, d'assurer non seulement leur vente mais aussi leur gestion intelligente, pour faire fructifier ce patrimoine immobilier et en tirer ainsi le maximum de ressources afin que la banque retrouve son équilibre financier.
Si la fondation ne conduisait pas une telle opération par rapport à ces biens, la banque serait contrainte de les réaliser rapidement, c'est-à-dire qu'elle les braderait. Après cette période de difficultés, il serait désastreux et inacceptable pour ceux qui assument la garantie de la Banque cantonale de Genève que ce patrimoine soit bradé. Nous avons donc voulu, dès le départ, que cette option soit publique, parce qu'elle doit répondre aux exigences de transparence et de démocratie qui sont une priorité pour obtenir le changement d'attitude que nous souhaitons au niveau de la Banque cantonale de Genève.
Restent les problèmes de contrôle et de structure. Nous nous sommes mis d'accord pour les traiter dans une deuxième étape. Cela ne signifie pas que nous les laissons de côté - nous avons du reste déposé plusieurs projets de lois à ce sujet - ils seront traités avec sérieux. Mais aujourd'hui l'opération que ce Grand Conseil se doit de conduire est une opération d'assainissement, de redémarrage de la banque et de rétablissement de la confiance.
Or, pour nous, le rétablissement de la confiance dans la banque et l'intervention des pouvoirs publics, avec une recapitalisation et la création d'une fondation, passent par une plus grande transparence. Le Grand Conseil doit donc pouvoir concrètement contrôler l'évolution future de cette banque et, à travers ce Grand Conseil, la population qui va à nouveau investir en elle.
Lorsque nous avons voté en commission la première fois sur la création d'une fondation publique, nous avons été battus. Mais nous n'avons pas abandonné l'idée de trouver une solution, et je me plais à relever aujourd'hui qu'une grande, une très grande majorité de ce Grand Conseil s'est mise autour de la table pour tenter de trouver une solution viable, c'est-à-dire la création de cette fondation, son organisation, la gestion des biens et la recapitalisation. Cela se fait - cela a été dit tout à l'heure - en utilisant la clause d'urgence : c'est une nécessité absolue face aux délais qui nous échoient et face à l'importance du sujet. Il faut régler ce problème plus que rapidement.
Nous souhaitons donc qu'au cours de cette séance du Grand Conseil les décisions adéquates soient prises. Malgré toutes les rumeurs qui ont circulé partout, nous sommes prêts quant à nous à prendre nos responsabilités, toutes nos responsabilités, pour que la Banque cantonale de Genève puisse continuer à travailler dans l'intérêt de la collectivité genevoise ! (Applaudissements.)
M. Dominique Hausser (S). J'ai eu la charge et le plaisir de présider la commission des finances dans ses travaux concernant la Banque cantonale de Genève et c'est à ce titre que je m'exprime ici ce soir.
Le travail de la commission des finances a été effectué dans des conditions fort difficiles, et je tiens à remercier toutes celles et ceux qui ont oeuvré à l'aboutissement de la proposition qui sera votée ce soir.
Les informations données par l'organe de révision ont été transmises à la commission des finances il y a une quinzaine de jours seulement. Ces informations étaient indispensables pour justifier concrètement les mesures d'assainissement proposées par le Conseil d'Etat, en particulier la raison pour laquelle il faut conjointement accepter l'augmentation de capital et la constitution d'une Fondation de valorisation des biens immobiliers, gages de créances sensibles, afin de répondre aux exigences de la loi fédérale sur les banques et sur les caisses d'épargne.
Permettez-moi de rappeler les éléments factuels principaux. En effet, beaucoup de choses ont été dites et écrites, mais certaines étaient, hélas, imprécises, en raison principalement du manque d'informations ou des informations données tardivement.
Premièrement, la Commission fédérale des banques a exigé que le processus d'assainissement de la Banque cantonale de Genève soit modifié dans le sens d'un règlement du problème en une seule fois et non plus sur la durée, comme cela avait été décidé lors de la création de la banque.
Deuxièmement, les crédits sensibles se montent à quelque 6,6 milliards : 1,7 milliard de crédits en blanc et 4,9 milliards de crédits immobiliers. Les crédits en blanc sont constitués, pour moitié environ, de reliquats de ventes immobilières et, pour moitié environ, de crédits commerciaux. Ces crédits en blanc sont partiellement couverts par des provisions et restent à la banque. Les créances immobilières sont transférées à une fondation de valorisation. Une partie seulement des biens immobiliers sont propriété de la banque et deviendront donc propriété de la fondation. Ceux-là seulement seront soumis à une autorisation du Grand Conseil pour les aliéner à une entité privée, et non si l'acquéreur est une entité de droit public. Pour ne pas se retrouver dans la situation bernoise, la fondation devra donc gérer les biens dans le but de les réaliser au mieux et de minimiser les pertes potentielles.
Troisièmement, les réponses aux exigences de la loi fédérale sur les banques et caisses d'épargne doivent être décidées avant fin juin, ce qui implique de voter ce soir l'augmentation de capital et la création de la fondation, munies de la clause d'urgence. Formellement, la commission des finances n'a été saisie que du projet de loi sur l'augmentation de capital, mais, comme cela a été dit, la constitution de la Fondation de valorisation est une nécessité pour l'assainissement de la banque. C'est la raison pour laquelle une large majorité de ce parlement, avec l'accord du Conseil d'Etat, présente un amendement visant à intégrer la fondation dans le projet de loi 8194, projet muni de la clause d'urgence.
Quatrièmement, un long débat a eu lieu pour savoir si la fondation devait être de droit public ou de droit privé. Il s'agit d'un débat théorique dans la mesure où nous considérons tous que les objets d'intérêt public ne doivent pas être bradés dans le dos du parlement. La plupart des arguments préalablement avancés en faveur d'une fondation de droit privé sont tombés ; les avantages d'une fondation de droit public sont nettement plus importants, en particulier en ce qui concerne la transparence des opérations.
Enfin, dernier point, si des mesures d'assainissement doivent être réalisées immédiatement, tous les députés de la commission des finances ont souligné la nécessité de clarifier la stratégie future de la Banque cantonale de Genève pour les prochaines années, qui doit être clairement celle d'une banque de proximité permettant le développement durable de Genève. Ils ont également ajouté que le conseil d'administration et la direction de la banque doivent être complètement et rapidement assainis.
En conclusion, ne pas sauver la banque serait catastrophique pour des dizaines d'entreprises qui seraient déstabilisées et des milliers d'emplois seraient menacés.
Mesdames et Messieurs les députés, merci de voter ce soir l'autorisation d'emprunt et le crédit extraordinaire d'investissement pour permettre à la Banque cantonale de Genève de poursuivre sa tâche d'utilité publique pour la collectivité genevoise.
M. Philippe Glatz (PDC). Vous m'en excuserez, mais je ne suis pas de ces anciens combattants capables de vous refaire dans le détail l'histoire lointaine de la Banque cantonale de Genève...
Cependant, il est un certain nombre de choses que nous avons dernièrement eu l'occasion d'apprendre dans le cadre de notre participation à la commission des finances, dont M. Spielmann soulignait qu'elle fut intéressante à bien des points de vue, dans le cadre d'une nouvelle transparence.
Il en est une plus que d'autres que nous avons retenue : c'est de notre sens des responsabilités et de nos décisions de ce soir que dépend le sort de la Banque cantonale de Genève qui est encore, à l'heure où je vous parle, le cinquième établissement de Suisse par ordre d'importance - je dis «encore»... Chacun, dans cet hémicycle, s'accordera à reconnaître le rôle important que la Banque cantonale de Genève peut et doit encore jouer au profit de l'économie genevoise, dans le soutien primordial qu'elle apporte aux petites et moyennes entreprises ainsi qu'à l'emploi dans notre canton.
Et c'est bien pour cela, Mesdames et Messieurs les députés, que nous nous apprêtons, dans le sérieux et dans la sérénité, au-delà des fantasmes et des guerres de clan, à prendre ensemble les décisions qui s'imposent dans l'intérêt supérieur de notre canton. L'heure n'est plus aux clivages ni aux luttes d'influence politiques et égoïstes mais à l'union et à la réconciliation, que certains qualifieraient de «citoyennes»... (Exclamations.) Oui, Mesdames et Messieurs les députés, je suis de ceux qui regardent l'avenir, par rapport à ceux qui se complaisent dans les débats d'anciens combattants !
Cet élan, aujourd'hui nécessaire et salutaire, ne doit pas nous empêcher de conserver une vision des enjeux comme des luttes d'intérêt dont les banques cantonales puis la Banque cantonale ont pu faire l'objet au cours des années passées - et sur lesquelles, d'ailleurs, je ne reviendrai pas - ni ne doit nous voiler la face sur les erreurs commises dans leur conduite et pilotage d'autrefois. En effet, nous savons tous les exagérations commises par le passé dans l'octroi de crédits trop faciles, cela durant les années de folle croissance que furent les années 1980 à 1992, il y a déjà de cela dix à vingt ans. Tous ceux qui avaient cru à la déraisonnable croissance des années folles, ne jurant que par elle, persuadés que la spirale infernale ne pourrait que grandir, se sont irrémédiablement retrouvés rappelés aux dures réalités des cycles économiques et du monde tel qu'il est. La récession pointait à l'horizon...
Dans ce contexte, l'établissement cantonal, issu des deux banques hypothécaire et de gestion en 1994, fut, dès sa naissance, plombé des crédits inconsidérés tels qu'accordés précédemment dans un climat d'euphorie et ceci, plus encore, sans que l'appréciation de leur portée en ait été évaluée de manière adéquate au moment de la fusion.
Certains s'attendaient alors à ce qu'une nouvelle progression de l'économie puisse corriger dans le temps les effets néfastes des crédits exagérés, hérités des temps de la folle croissance. L'espoir était qu'une reprise économique permette de redonner de la valeur aux objets et aux entreprises qui avaient bénéficié de ces crédits, atténuant ainsi sensiblement les pertes dont ils pouvaient être l'objet.
Cependant, depuis lors et jusqu'à ce jour, nous n'avons connu que de sombres années de récession ! La crise économique accentuait encore, dans une baisse drastique, les corrections déjà importantes amorcées précédemment. Les gestionnaires et responsables ayant choisi la stratégie consistant à compter sur le temps pour corriger les effets néfastes des exagérations précédentes se sont donc trompés ou ont été mal servis par la trop longue récession et stagnation de l'économie. Parmi les cogestionnaires et coresponsables de tous bords...
M. Jean Spielmann, rapporteur de minorité. Des noms !
M. Philippe Glatz. ...qui ont présidé aux destinées de la Banque cantonale de Genève durant toutes ces années, seuls deux d'entre eux aujourd'hui sont désignés, de leur très médiatique démission, à payer le prix de ces erreurs stratégiques et temporelles, comme s'il suffisait de deux victimes expiatoires pour toute explication à la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui... (Exclamations.) Voilà qui semble facile, mais peu honnête intellectuellement ! Il ne faudrait pas que, nous tous ici présents, nous nous sentions dégagés de nos coresponsabilités, ou que nous nous croyions permis de dire ou faire n'importe quoi à cet égard ! (La présidente agite la cloche.) Voilà également pourquoi en introduction j'en appelais au sens des responsabilités comme à un examen de conscience plus large.
Il conviendrait sans doute, Mesdames et Messieurs les députés, que nous nous posions aussi plus sereinement la question de la pertinence du maintien de liens politiques avec la Banque cantonale de Genève, tant il est vrai que chacune des composantes de cet hémicycle, sans exception aucune, a participé à la haute conduite de notre établissement bancaire... (Exclamations.) ...à toutes les époques, à tous les degrés et pour les résultats que nous connaissons !
Mais point n'est nécessaire ici de se battre la coulpe plus que de raison. Car s'il fut des erreurs certaines, il fut aussi des qualités essentielles, particulièrement dans les années de crise. Il est singulier de constater que ce fut durant ces sombres années de récession générale que la Banque cantonale de Genève connut la plus forte croissance de son bilan, non point pour profiter et spéculer sur la croissance, mais bien au contraire pour soutenir l'économie cantonale, l'emploi et les PME du canton.
Dans toutes ces années difficiles, il était, Mesdames et Messieurs les députés, quasiment impossible d'obtenir de la part d'autres établissements bancaires les crédits nécessaires au maintien et à la création de nouvelles entreprises, pourtant si attendues. Les autres établissements bancaires ne croyaient plus en Genève. Seule la Banque cantonale de Genève était alors au front. Reconnaissons là son mérite ainsi que le rôle important qu'elle a joué dans cette période ! Puisse-t-elle encore à l'avenir contribuer au développement de l'économie genevoise, comme elle a pu le faire durant les années de crise !
Maintenant, nous le savons tous, il s'en faudrait de très peu pour que cet établissement essentiel sombre rapidement dans le marasme, au risque de disparaître définitivement. En effet, nous savons que, quelles que soient les données objectives fondamentales ayant trait aux bilans ou aux comptes, la solidité et, partant, la pérennité de tout établissement bancaire, dépend avant tout de la confiance que peuvent avoir en lui tous ses publics. Si ce soir, par nos décisions, nous nous apprêtons, dans le cadre de mesures techniques et financières, à permettre l'amélioration de données fondamentales - assainissement du bilan, reconstitution de fonds propres - il nous faut également nous demander comment contribuer à améliorer l'image que nous en avons laissé transparaître, en particulier ces derniers temps.
Ce n'est donc que par un vote solide et consensuel que nous montrerons à nos concitoyens que nous avons tous pris conscience de nos coresponsabilités en la matière et qu'il serait bien inutile de vouloir nous en défausser dans de vaines disputes. Certes, les projets de lois qui nous sont soumis ce soir pouvaient encore être discutés sur de nombreux aspects, tant il est vrai qu'ils restent imparfaits sur bien des modes d'application, en particulier, pour le groupe PDC, dans le cadre de l'organisation et des modalités d'application de la Fondation de valorisation.
De notre point de vue, celle-ci peut être considérablement améliorée et rendue bien plus efficace. Cependant, pour toutes les raisons que j'ai déjà expliquées, Mesdames et Messieurs les députés, le parti démocrate-chrétien, conscient de l'importance de l'enjeu comme de la nécessité d'agir rapidement, vous invitera à voter toute la loi, telle qu'elle est définie par l'amendement proposé, qui malheureusement lie toutes les modalités d'assainissement en un seul bloc, ce que nous regrettons. Nous souhaitons néanmoins confirmer notre soutien à la Banque cantonale de Genève, utile et nécessaire, dans un élan que nous espérons dans ce parlement large et unanime.
Une voix. Rompez !
M. Christian Grobet (AdG). Mesdames et Messieurs, j'aimerais tout d'abord vous rappeler - je vous prie de m'excuser de le dire à chaque fois que nous parlons de la Banque cantonale de Genève - que les partis de gauche qui siègent dans ce Grand Conseil se sont battus depuis la fin de la dernière guerre mondiale - depuis 1945 - d'abord par une initiative du parti du Travail, puis par divers projets de lois, dont celui du regretté Burtin, pour créer cette banque cantonale. Il a fallu quarante ans - presque cinquante ans - pour être entendus ! Et la Banque cantonale de Genève a enfin été créée en 1993, ce dont nous nous sommes réjouis.
Aujourd'hui, sept ans plus tard, cette banque se trouve dans une situation très délicate - chacun le sait. Néanmoins, Monsieur Annen, je ne suis pas aussi pessimiste que vous. Peut-être souhaitez-vous la voir à l'agonie... (Exclamations.) C'est le mot que vous avez prononcé ! Nous, nous avons non seulement le souhait mais la conviction, si les mesures qui sont proposées ce soir sont votées, que la Banque cantonale de Genève continuera à remplir la mission que nous avons voulu lui donner lorsqu'elle a été créée en 1993.
Au fil des années, nous avons obtenu un certain nombre de renseignements qui nous ont convaincus, il y a deux ans déjà, que le bilan de la Banque cantonale de Genève n'était malheureusement pas le reflet de la réalité et qu'un certain nombre de mesures s'imposaient. Nous n'en avions bien entendu pas la preuve, parce que, Monsieur Glatz, contrairement à certains de vos amis politiques, nous n'étions pas dans le secret des dieux, nous ! C'est vrai, nous avions un strapontin au conseil d'administration, qui, comme M. Ducrest l'a rappelé tout récemment, se réunit tous les deux mois et n'est donc pas en mesure de prendre les décisions principales de la banque, ce qui nous amènera, du reste, à proposer que le conseil d'administration se réunisse au moins une fois par mois pour pouvoir assumer ses responsabilités.
Nous n'avions donc pas les éléments dont beaucoup de gens, dans cette enceinte et en dehors de cette enceinte, avaient connaissance. Et, malheureusement, on a trop tardé à prendre les mesures qui devaient être prises, qui sont aujourd'hui imposées par la Commission fédérale des banques et que nous devons effectivement prendre dans l'urgence, en raison des délais qui sont impartis.
Cela dit, hier soir en rentrant chez moi, une dame s'est assise à côté de moi dans le bus... (Exclamations.)
Une voix. Il y avait un article le lendemain dans la «Tribune de Genève» !
M. Christian Grobet. Un article le lendemain dans la «Tribune de Genève» ? Rassurez-vous, ce n'était pas une journaliste de la «Tribune de Genève», mais une honnête citoyenne... (Rires.) ...dont j'ignore l'identité, qui après m'avoir fait le plaisir de quelques propos fort aimables, que je ne vous répéterai pas... (Rires.) ...à l'intention de l'Alliance de gauche - je les garderai donc pour mes collègues de parti - m'a interpellé sur la Banque cantonale de Genève. Elle m'a demandé ce que beaucoup de gens ont dû aussi vous demander : «Comment se fait-il que nous, les contribuables, devions payer la casse pour celles et ceux qui ont mis la banque en péril ?». Elle s'est même étonnée que les responsables semblent rester en place sans répondre de leurs responsabilités, pour parler en termes pudiques.
A mon avis, il est important de dire aujourd'hui - et c'est pour cela que nous avons travaillé sur une nouvelle proposition, sur la base des projets de lois qui ont été préparés par le Conseil d'Etat - que les contribuables ne vont pas payer ! Le Conseil d'Etat nous demande une somme d'argent pour acheter des actions de la Banque cantonale de Genève avec un rendement, témoignant ainsi sa confiance future dans la Banque cantonale de Genève. Nous ne sommes donc pas en train aujourd'hui de voter un crédit avec une dépense à fonds perdus pour verser de l'argent à la banque... Nous achetons des actions !
C'est la raison pour laquelle nous avons proposé un autre projet de loi, et nous remercions tout particulièrement les députés radicaux et démocrates-chrétiens d'avoir cosigné ce projet de loi avec les députés de la gauche et les Verts, sous la forme d'une loi d'emprunt. Parce qu'il s'agit, Mesdames et Messieurs, aujourd'hui, de financer, par voie d'emprunt, l'acquisition des actions qui permettront à la Banque cantonale de Genève d'augmenter ses fonds propres et de répondre ainsi aux exigences de la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne. Aujourd'hui, nous ne mettons pas les contribuables à contribution : il est important de le dire ! Il est aussi important de dire que la fondation dont nous demandons la création - qui a pour but de soulager le bilan de la banque - ne reprend pas 6 milliards de dette ! Elle reprend 5 milliards d'actifs sous forme de crédits qui ont des taux de rendement variables, mais il ne s'agit pas d'une «Fondation des casseroles» comme on l'a appelée, ce que je regrette.
Si j'ai un appel à faire, il est le suivant : que la presse donne un compte rendu correct de ces débats aux citoyens, au moment où notre banque doit faire face à un défi important !
Pourquoi devons-nous sauver cette banque, pour répondre aux citoyens et aux citoyennes qui nous posent cette question ?
Tout d'abord, parce qu'elle joue un rôle décisif dans l'économie de notre canton - les députés de tous les bancs de ce Conseil l'ont dit et répété - et nous croyons en cette banque cantonale : il faut donc déjà la sauver pour cette raison. Combien de députés, combien de représentants de petites et moyennes entreprises n'ont-ils pas dit que le pire des drames pour notre canton serait de ne plus avoir de banque cantonale et de devoir dépendre des grandes banques, avec les conditions qu'elles imposent et que vous connaissez bien !
La deuxième raison pour la sauver est que si elle devait tomber en faillite, ce sont 4,5 milliards de garantie de l'Etat qui risqueraient de devoir être versés ! C'est la somme réelle qui est en cause.
Troisièmement, ce sont mille emplois, Mesdames et Messieurs les députés ! Mille emplois dans la banque qui sont en jeu !
Enfin, ce sont des dizaines d'entreprises, si ce n'est des centaines, qui demain, si elles voient leurs crédits être coupés, peuvent être acculées à la faillite ! Et je ne parle pas des autres clients de la banque qui ont obtenu des crédits pour leur logement, pour leur habitation, pour leur immeuble, qui, en cas de défaut de crédit de la banque, vont se trouver dans une situation impossible !
C'est pour notre canton un enjeu économique décisif. Et nous ne voulons pas que ce qui s'est passé il y a septante ans avec la Banque de Genève se reproduise avec la Banque cantonale de Genève. C'est la raison pour laquelle il faut prendre aujourd'hui, avec la clause d'urgence demandée par le Conseil d'Etat, les mesures qui permettront à la banque de répondre aux conditions imposées par la loi fédérale sur les banques en ce qui concerne le quota des fonds propres nécessaires pour qu'elle puisse assurer ses activités.
Je l'ai dit tout à l'heure, nous avons retravaillé à quelques-uns les projets de lois du Conseil d'Etat, en étroite collaboration avec Mme Calmy-Rey et ses collaborateurs. Nous vous présentons ce soir un amendement - j'aurai l'occasion de donner des explications complémentaires plus tard - qui constitue en fait une nouvelle formulation de ces projets de lois en une seule loi. Le but de ce projet de loi est d'abord de revenir au principe qui me paraît juste, à savoir que l'opération de refinancement que nous faisons ce soir doit être financée par un emprunt. Il est vrai que le fait de choisir cette formule permet de retenir la clause d'urgence souhaitée par le Conseil d'Etat.
A ce sujet, je voudrais dire, Mesdames et Messieurs les députés, que ce n'est pas par hasard que la constitution de notre canton prévoit la possibilité pour le Grand Conseil, en cas de nécessité, de décréter la clause d'urgence. Nous sommes les premiers à défendre bec et ongles les droits populaires et il est évident que la clause d'urgence signifie qu'un référendum ne pourra pas être lancé contre cette loi, mais notre constitution dit que la clause d'urgence peut être adoptée lorsqu'il y a une urgence objective. La rapporteuse de majorité a rappelé tout à l'heure quelle est la condition objective de la clause d'urgence : c'est la nécessité impérieuse qu'une mesure soit prise immédiatement, sans attendre qu'une votation ait lieu, votation en l'occurrence qui devrait être annulée parce que devenue sans objet si, entre-temps, la Banque cantonale de Genève devait fermer ses portes ! Notre constitution prévoit donc la possibilité de voter la clause d'urgence pour une loi d'emprunt.
C'est la raison pour laquelle nous proposons ce soir une loi d'emprunt. Mais cette loi reprend les deux lois du Conseil d'Etat. Pourquoi ? Parce que - Mme Calmy-Rey l'a fort bien expliqué tout à l'heure - les deux mesures sont indissociables pour le rétablissement de l'équilibre financier de la banque. Il faut non seulement l'augmentation du capital-actions de la banque pour trouver une part des fonds propres nécessaires, mais il faut un transfert de crédits d'environ 5 milliards, sur un bilan de 20 milliards, pour ramener le bilan à 15 milliards, diminuant ainsi le ratio des fonds propres nécessaires par rapport au bilan. Ces deux mesures sont donc indissolubles...
M. John Dupraz. Indissociables !
M. Christian Grobet. Indissociables... Merci de corriger mon français, cher professeur ! (Rires et exclamations.)
M. John Dupraz. Je ne suis pas professeur !
M. Christian Grobet. Vous avez toujours dit que vos connaissances d'agriculteur vous permettaient d'intervenir avec autorité sur tous les sujets... Nous le savons du reste, et on vous apprécie à Berne ! Comme vous le savez, je n'étais pas très fort à l'école primaire, j'apprécie donc beaucoup que vous m'aidiez dans mon français...
Cela étant dit, le Conseil d'Etat a dû agir rapidement. Je ne lui fais aucun grief, mais je crois qu'il s'est rendu compte aujourd'hui que, du fait que ces deux mesures - je ne vais pas refaire de faute de français... - devaient être prises conjointement... (Rires.) ...elles méritaient d'être intégrées dans une seule loi. Nous aurons l'occasion tout à l'heure de donner plus d'indications sur cet amendement global, dont le but est de faire une seule loi, d'avoir une loi d'emprunt et d'utiliser la clause d'urgence qui s'impose pour répondre aux exigences de la constitution.
Je voudrais enfin dire que nous devons aujourd'hui donner un message à la population. En effet, tout le monde nous interpelle à ce sujet, nous demande quel est l'avenir de la banque et pourquoi l'Etat doit intervenir. Eh bien, l'Etat doit intervenir aujourd'hui parce que la banque a besoin d'un apport de fonds propres supplémentaires, la participation de l'Etat étant rémunérée par un dividende ; parce que nous voulons éviter un cataclysme économique et parce que nous avons besoin de cette banque. Nous pouvons dire aujourd'hui - c'est important et je crois que les médias doivent le faire savoir - que si les conditions sont votées ce soir, notre banque répondra aux exigences de la loi fédérale sur les banques et sur les caisses d'épargne et aux exigences de la Commission fédérale des banques. Ainsi, les clients de la banque pourront être rassurés quant à l'avenir de celle-ci. (Applaudissements.)
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Lorsque j'entendais il y a quelques instants le vibrant plaidoyer de notre collègue démocrate-chrétien, M. Glatz, et en constatant l'amnésie qui le caractérisait, je me disais qu'il était plus facile d'être Vert pour intervenir dans ce débat... (Exclamations.)
Une voix. Vert de rage !
Mme Fabienne Bugnon. J'aimerais poser un certain nombre de questions, donner des réponses et vous faire part de l'analyse des Verts.
1. Où en est aujourd'hui la Banque cantonale de Genève ?
Vous connaissez évidemment tous la réponse : la Banque cantonale de Genève est gravement menacée si, d'ici le 30 juin, les collectivités publiques qui en sont les actionnaires principaux ne lui donnent pas les moyens de continuer son action en n'augmentant pas le capital. Nous savons aussi que cette mesure est insuffisante et que d'autres mesures d'assainissement sont nécessaires, en particulier la création de la Fondation de valorisation.
Ce premier constat entraîne bien évidemment une deuxième question.
2. Comment avons-nous pu en arriver là ?
La réponse ici, même si elle doit être nuancée, doit être claire.
Première explication : la conjoncture, sans aucun doute, est l'une des raisons. La banque qui vit dans son microcosme local a été durement touchée, par ricochet, par la crise économique et la crise immobilière en particulier. Ces pertes font partie de l'activité normale d'une banque, et la banque aurait pu les assumer seule.
Mais il y a un deuxième type de pertes, Mesdames et Messieurs les députés, et celles-ci sont beaucoup moins excusables. Chacun sait, par la lecture de la presse, que des promoteurs immobiliers, souvent de très mauvaise réputation, ont obtenu des prêts incroyables alors qu'ils ne présentaient aucune garantie personnelle et que les valeurs des gages étaient totalement surévaluées. Ceux qui ont prêté, dans les années 80, à cette race de spéculateurs qui exerçaient une séduction incroyable sur une partie du monde politique, du monde économique et des médias, sont les responsables de ce qui se produit aujourd'hui. Il est tout de même essentiel de le rappeler. Lors de la création de la Banque cantonale de Genève, il aurait fallu tirer la leçon de la déroute de la fin des années 80, mais cet examen de conscience n'a pas été fait, et j'en viens par là à la troisième question.
3. Que s'est-il passé depuis la fusion des deux banques et la création d'une nouvelle entité ?
Bien sûr, la Banque cantonale de Genève n'a pas commis les erreurs commises par la Banque hypothécaire ou la Caisse d'épargne, mais le fait qu'on ait mis à la tête de cette banque cantonale ceux-là mêmes, Mesdames et Messieurs les députés, qui ont été, à un titre ou à un autre, à la direction de la Banque hypothécaire et de la Caisse d'épargne, ceux-là mêmes qui avaient mené une politique imprudente sur le plan économique, est totalement immoral, Mesdames et Messieurs, et c'est ce que vous avez fait !
Ainsi, le président du conseil de la nouvelle banque était membre influent du comité de la Banque hypothécaire. Le directeur de la nouvelle banque était celui qui avait proposé au conseil d'administration de la Caisse d'épargne de prêter en blanc 80 millions à M. Stäubli...
Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, les personnes que l'on a choisies pour sortir du marasme !
Par ailleurs, la solidité de la Banque cantonale de Genève, lors de sa fondation, a manifestement été surestimée, parce que les risques sur les crédits ont été sous-évalués. L'ont-ils été volontairement par les trois fiduciaires qui ont fixé le montant des provisions nécessaires ? Difficile à dire ! Mais il est évident que toutes ces fiduciaires, comme la direction de la banque, comme ceux qui ont eu accès à ces chiffres, ont fait une évaluation des risques que l'on peut qualifier de très optimiste. Chacun tablait en effet sur une reprise rapide du marché immobilier, reprise qui n'a jamais eu lieu et qui, en réalité, était une hypothèse de travail difficilement justifiable.
Dès lors, la Banque cantonale de Genève est partie en 1994 avec un lourd passif. Et ce lourd passif, les dirigeants de la banque n'ont eu pour seul souci que de le dissimuler aux yeux du public. Il est vrai qu'il est difficile, et nous le constatons aujourd'hui encore, d'annoncer des mauvaises nouvelles sans détruire la confiance de la clientèle. Il n'empêche, Mesdames et Messieurs les députés, qu'en refusant de dire la vérité sur la situation de l'établissement ces personnes couvraient évidemment leurs activités passées à la tête des deux établissements fusionnés.
Nous n'avons par ailleurs pas relevé que l'ancien Conseil d'Etat ait exercé une surveillance très rapprochée sur la nouvelle banque. Nous pensons même qu'il n'a tout simplement pas essayé de l'exercer !
Le nouveau Conseil d'Etat, après avoir tout de même gardé sa confiance au président de la Banque cantonale de Genève, s'est inquiété à juste titre. Il a essayé d'obtenir des informations, mais celles-ci lui ont été distillées au compte-gouttes...
La loi du silence voulue par les responsables de la banque a été longtemps respectée, le but étant d'en dire le moins possible, le moins possible au comité de banque, le moins possible au conseil d'administration, le moins possible aux représentants de l'Etat de Genève, pourtant actionnaire principal.
Mais il est venu un temps où tous ceux à qui l'on cherchait à dissimuler la gravité de la situation de la banque depuis sa création se sont montrés plus insistants. Alors il a bien fallu commencer, bribe par bribe, à leur dire la vérité. Il n'était plus possible de la cacher. A ce moment-là, malheureusement, il était déjà trop tard pour prendre des mesures d'assainissement paisibles qui auraient évité ce que nous voyons maintenant, à savoir que la banque entre dans une tourmente et que son existence est menacée, si nous ne prenons pas ce soir les décisions qui s'imposent.
Cette analyse, Mesdames et Messieurs les députés, conduit le groupe des Verts à accepter tant l'augmentation de capital que la création de la Fondation de valorisation. Cette augmentation de capital doit toutefois s'accompagner d'un contrôle très renforcé, par une vigilance de tous les instants de la part du gouvernement à l'égard des activités de la Banque cantonale de Genève. Il n'est pas question que l'on tolère que les graves erreurs qui ont été commises dans les années 80 se reproduisent ! Il n'est pas question non plus que la politique du mensonge se poursuive !
Nous acceptons sans joie la création d'une Fondation de valorisation qui risque de coûter très cher à l'Etat de Genève. Nous l'acceptons car c'est la seule solution possible. Nous aurions pu discuter, en commission et ce soir encore, de la taille de cette fondation, du montant total des crédits qui y seront portés, mais il n'est malheureusement plus temps de discuter. Il est temps de décider !
Cette fondation est bel et bien nécessaire. Elle présente des avantages immenses, à savoir que pour la première fois la liquidation du passif de la banque se fera au grand jour et non pas au travers de petites sociétés de portage.
C'est cette raison, Mesdames et Messieurs les députés, qui nous fait préférer, après une longue analyse, la structure d'une fondation de droit public. En effet, seule une telle fondation permet un contrôle suffisant du parlement, donc du peuple.
Nous avons décidé de ne pas valider le compromis boiteux préféré par une majorité de la commission à laquelle nos commissaires s'étaient ralliés : notre groupe ne les a pas suivis.
Ce que notre Grand Conseil va faire ce soir n'est qu'une première étape. L'Etat fait ce qui est en son pouvoir pour donner des chances de survie à cette banque. Le reste est une question de stratégie d'entreprise. C'est maintenant au conseil d'administration, au nouveau président, au nouveau comité de banque et au nouveau directeur général de prendre le relais. Le management de la banque doit être entièrement revu. Les pouvoirs des différents organes de la banque doivent être définis clairement. Les représentants de l'Etat au conseil doivent se montrer à la hauteur, sinon il faudra les remplacer rapidement.
C'est un gros travail que l'assainissement durable de cette banque ! Tout ne sera probablement pas rose. Nous attendons de la banque une nouvelle stratégie, une véritable charte éthique, un nouvel état d'esprit, qui rassurent à la fois les usagers mais également le personnel fortement déstabilisé. Sans ce changement de cap, tous les sacrifices financiers des collectivités publiques seront inutiles à l'avenir.
Reste pour terminer la question de la clause d'urgence. L'adoption d'une telle clause est évidemment contraire à nos principes qui nous font privilégier la défense des droits démocratiques. Mais cette fois, Mesdames et Messieurs les députés, c'est une question de responsabilité ! Voter la clause d'urgence, c'est refuser de prendre le risque que le peuple soit amené à se prononcer sur l'avenir d'une banque qui aurait déjà cessé d'exister... Chacun connaît les conditions de la Commission fédérale des banques. Chacun sait que si la situation continue à se dégrader plus rien ne pourra sauver la banque. Nous appliquerons, parce qu'il le faut, le principe de précaution qui nous est cher dans ce domaine également.
Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
Mme Christine Sayegh (S). Comme le président du Conseil d'Etat l'a rappelé en début de séance, il y a sept ans notre parlement répondait favorablement à la création de la Banque cantonale de Genève en réunissant la Caisse d'épargne et la Banque hypothécaire. Une majorité acceptait que l'on se satisfasse des assurances, s'agissant des dossiers à risques, que la future BCG reprenait.
Un premier regret pourtant, à ce stade de la création déjà, doit être relevé : la charte d'éthique proposée par la gauche n'a pas eu de succès, c'est le moins que l'on puisse dire ! On nous reprochait d'entraver, voire de compliquer de manière disproportionnée l'activité bancaire... Aujourd'hui, les regards sont moins dédaigneux à l'égard de ce genre d'exigence, qui fait malgré tout trop lentement son chemin.
Il a fallu l'examen de la commission parlementaire d'enquête, des compétences cantonales en matière de surveillance de la banque, pour que les mécanismes de surveillance sortent de leur léthargie et que les informations commencent à circuler entre la banque et le Conseil d'Etat. Ces informations ne devaient pas être très encourageantes, puisque nous voici ce soir réunis pour décider des mesures d'assainissement de la banque que nous propose le gouvernement.
A l'évidence, la Banque cantonale de Genève a voulu grandir trop vite et a pris des risques en dessus de ses moyens et, surtout, au-delà de la mission qui lui avait été confiée. Une analyse approfondie de l'état des lieux, menée efficacement par la présidente du département des finances, a conduit le gouvernement à nous proposer d'accepter la demande d'augmentation de capital sollicitée par la banque et le transfert des créances peu récupérables ou dont le remboursement s'annonce problématique dans une structure de valorisation. A nos yeux, ces deux mesures ne suffisent pas et un contrôle interne renforcé est indispensable pour assurer le respect du but poursuivi, qui ne consiste pas à rivaliser dans les performances mais bien à soutenir l'économie de la région.
Un projet de loi qui est déjà étudié en commission devra rencontrer, ce soir j'espère, un assez large consensus.
Pour en revenir aux propositions d'assainissement, les socialistes approuvent la démarche, mais souhaitent que la meilleure solution soit trouvée pour donner toutes les chances aux mesures proposées de parvenir à un résultat positif.
En commission des finances, nous avons d'emblée annoncé notre préférence pour une fondation de droit public. Le refus d'une majorité des commissaires à ce moment-là a été catégorique, refus motivé par des arguments non convaincants - peut-être que le mot «public» suffit à irriter certains au point d'inhiber leur réflexion, car aucune discussion de fond n'a pu être engagée à ce moment-là... Or, il est impératif que la Fondation de valorisation des créances de la BCG qui vont être transférées soit une fondation de droit public, que la teneur de ses statuts soit intégrée dans une loi sur laquelle le contrôle parlementaire existe.
La commune de Meinier l'a d'ailleurs bien compris, puisqu'elle s'est adressée à notre président, M. Daniel Ducommun, en date du 16 mai dernier annonçant qu'elle avait participé à l'augmentation du capital-actions de la Banque cantonale de Genève par l'acquisition de 1880 actions nominatives B. Dans ce courrier, le Conseil municipal émet cependant le souhait que la fondation qui va être créée pour la gestion du parc immobilier soit une fondation de droit public. Ces faits démontrent que la surveillance, telle que dévolue aujourd'hui au gouvernement, n'est pas suffisante et ne garantit pas une application stricte de la loi.
N'oublions pas que les contribuables genevois garantissent cet établissement pour plus de 6 milliards, dans le cadre d'un assainissement, et en tout cas 5 milliards en cas de faillite, sans compter les dégâts non estimables qu'une faillite entraînerait, ne serait-ce qu'en termes de perte d'emplois et de graves perturbations dans notre économie, plus particulièrement pour les petites et moyennes entreprises !
Le Grand Conseil doit pouvoir exercer le contrôle d'une bonne application de la volonté populaire et de la volonté du législateur. Il est en conséquence exclu qu'un organisme de droit privé se charge de traiter des dossiers de revalorisation et que son activité échappe à tout contrôle.
Rappelons que la fondation n'a en tant que telle aucune activité bancaire. Elle reprend les créances problématiques pour permettre à la banque de reprendre une activité normale et conforme non seulement à notre attente mais surtout aux exigences de la Commission fédérale des banques.
Les opposants à cette fondation de droit public argumentent leur position en brandissant l'interventionnisme du parlement pour toute vente de ses biens immobiliers. Or, vous le savez bien - vous le savez aussi, Monsieur Annen - cet argument est erroné : l'aval du Grand Conseil n'interviendra qu'une fois le processus de valorisation terminé, uniquement pour les cas où la fondation voudrait vendre les immeubles gagés dont elle serait devenue propriétaire ! D'autres craignent que l'Etat ne devienne l'acquéreur privilégié, ce qui est utopique. Le risque serait bien plus grand avec une fondation de droit privé échappant à toute obligation de renseignement et permettant le bradage des biens ! Les opposants n'ont donc pas d'arguments sérieux.
Enfin, si nous voulons vraiment soutenir la Banque cantonale de Genève, prenons les mesures qui évitent les faiblesses du passé et votons le projet de loi tel que nous l'avons amendé !
M. Luc Gilly (AdG). Il m'est vraiment difficile de parler, après tous les ténors de la politique de cette enceinte, sur un sujet tel que les finances. Je voudrais néanmoins m'exprimer devant vous tranquillement, sans que mes propos ne provoquent de commentaires...
Tout le monde le sait, la Banque cantonale de Genève est peut-être au bord d'un krach, ce qui provoquerait un séisme bancaire comme Genève n'en a jamais connu, hormis dans les années 30 avec la Banque de Genève. Vous le savez et beaucoup de gens en dehors de cette enceinte le savent aussi : je ne suis ni expert-comptable, ni financier, ni banquier et encore moins escroc... Et pourtant des professionnels largement payés... (L'orateur est interpellé par M. Vaucher.) Monsieur Vaucher, vous prendrez la parole plus tard ! Et pourtant des professionnels largement payés pour gérer cette banque, avec l'aide de politiques qui sont dans cette enceinte et d'anciens conseillers d'Etat, nous ont menti depuis des années...
Une voix. Des noms !
M. Luc Gilly. Eux se sont peut-être comportés comme des escrocs !
Et maintenant, nous devons politiquement et financièrement sauver la Banque cantonale de Genève - malgré tout en partie avec l'argent du peuple genevois, Monsieur Grobet - pour essayer d'éviter le pire ! Comme cela a déjà été dit : éviter le pire, c'est éviter la faillite. La faillite entraînerait certainement un grand nombre de licenciements au sein de la banque elle-même, un grand nombre de petites et moyennes entreprises en subiraient les conséquences puisqu'elles ne pourraient plus bénéficier de son aide, alors qu'elle leur a permis de mener effectivement quelques projets à bien depuis quelques années.
J'aimerais quand même savoir comment il a été possible de cacher tout cela durant tant d'années, jusqu'à il y a peu de temps encore ! Comment se fait-il qu'aujourd'hui les responsables de la banque ne soient pas le moins du monde inquiétés au niveau pénal ? J'imagine que depuis quelques jours un nombre considérable de documents compromettants disparaissent quotidiennement, effaçant ainsi toute trace des centaines d'affaires douteuses et délictueuses... Pourquoi n'est-il fait aucune allusion dans ce rapport 1999 de la BCG, rapport sur papier glacé que vous avez tous reçu, à cette situation, telle qu'elle nous est décrite ces derniers jours ? En effet, rien de cette situation catastrophique n'y transparaît réellement... Nous découvrons pratiquement tout depuis une semaine... En tant que député et d'abord en tant que citoyen, j'ai le droit de savoir, ainsi que vous tous, Mesdames et Messieurs, ce qui s'est réellement passé dans les coulisses de la Banque cantonale de Genève ! Il est trop facile, lors des auditions, de se retrancher, comme le font les responsables, derrière le secret bancaire !
Je me permettrai donc peut-être d'intervenir une deuxième fois, si on m'en laisse le loisir, pour poser certaines questions urgentes auxquelles les citoyens et les députés doivent absolument recevoir des réponses d'ici fin juin. En effet, je ne pense pas, malgré tout ce que nous voterons ce soir, que nous ayons toutes les garanties pour l'avenir de la Banque cantonale de Genève. J'ai de la peine à imaginer en voyant les chiffres, même si je ne suis pas expert en la matière, que le vote de ce soir suffira à faire sortir, en deux coups de cuillère à pot, la banque du marasme dans lequel elle se trouve et lui permettre un avenir que j'espère, comme vous tous, florissant.
Mme Alexandra Gobet (S). Mon intervention porte plus particulièrement sur le premier projet de loi sur lequel nous allons délibérer, le point 94 de l'ordre du jour, soit le projet de loi 8244.
Il comporte les valeurs nouvelles de la banque qu'il nous incombe encore de définir, de modeler, contrairement aux deux projets de lois suivants, qui, eux, ont été dûment traités à la commission des finances. Ce projet de loi est notamment appelé à définir la forme future du contrôle à instaurer dans les mécanismes de fonctionnement de la Banque cantonale de Genève. Il nécessite, vu son importance, une analyse et un choix politique dûment pesé que nous n'avons pas encore eu l'occasion de réaliser jusqu'au bout. Il comporte par ailleurs une option d'éthique et de transparence devenues désormais indispensables en ce qui concerne les liens d'intérêt des organes de la Banque cantonale de Genève dans des sociétés tierces, créancières ou débitrices de la banque, voire «acquéreuses» trop généreuses de gages immobiliers détenus par la Banque cantonale de Genève.
Bien que la commission de contrôle de gestion, sous la conduite diligente de son président, ait consacré plusieurs séances à l'examen anticipé de ce projet de loi, nous n'avons pu le finaliser. C'est la raison pour laquelle nous vous proposons le renvoi formel de ce projet en commission de contrôle de gestion, avec promesse de revenir rapidement pour le voter. Il s'agit d'examiner certaines observations à bien des égards pertinentes, en particulier celles des personnes qui, jusqu'à présent, ont fait fonctionner la banque, notamment celle de la conseillère d'Etat chargée des finances.
Ce projet de loi n'influence bien sûr pas le vote en urgence des deux autres objets ni les explications de notre collègue et rapporteuse, Mme Grobet-Wellner, et de mes autres préopinants.
M. Christian Brunier (S). Depuis le début de l'affaire, j'ai affirmé, comme mon parti, être totalement favorable à la recapitalisation de la Banque cantonale de Genève étant donné que cette banque est un outil indispensable à la politique économique de notre canton et un soutien important pour l'emploi.
Je ne rappellerai donc pas tous les arguments qui ont déjà été avancés dans ce débat - certains l'ont été avec beaucoup de talent d'ailleurs.
Néanmoins, cette recapitalisation a un goût amer pour deux raisons essentielles :
Premièrement, parce que aujourd'hui l'Etat, c'est-à-dire la collectivité publique, doit jouer aux pompiers pour couvrir en partie les ardoises laissées par des personnes peu scrupuleuses et provoquées par des erreurs de gestion graves.
Je me réfère au tableau que nous avons reçu hier soir que je vous invite à regarder. Il décrit les objets douteux composant les 6,6 milliards à haut risque. Je ne parlerai pas de la moitié des citoyennes et des citoyens qui ont emprunté, certainement pour de bonnes raisons, de quelques francs jusqu'à un million et dont la situation a mal tourné. Je me concentrerai sur la partie supérieure de ce tableau. Nous y voyons que la banque a accordé des prêts pour environ 2,5 milliards qui correspondent à 68 objets. Je dis bien «objets» et pas «clients». En effet, le tableau qui nous a été fourni a été fait par objets, alors que nous avions demandé une description de la clientèle douteuse. Et sur ces 68 objets, certains clients ont certainement emprunté plusieurs fois, ce qui signifie que ces 2,5 milliards concernent très peu de clients.
La Banque cantonale de Genève a donc prêté l'équivalent de la moitié du budget du canton à une poignée de personnes qui ont présenté peu ou pas du tout de garantie sérieuse... Je pense ne pas être le seul ce soir à éprouver une certaine révolte face à ces faits.
La deuxième raison de mon amertume est le traitement qui est réservé au personnel de cette banque. Depuis des mois, Mesdames et Messieurs les députés, les membres du personnel vivent dans la peur de voir sombrer leur banque et de perdre ainsi leur emploi. Depuis des mois, la direction distille l'information au compte-gouttes à ses collaboratrices et collaborateurs. Imaginez un peu le climat d'incertitude qui règne aujourd'hui à la Banque cantonale de Genève pour ces mille employés !
De plus, les futurs ex-dirigeants de cette banque l'ont confirmé en commission : les plans financiers qu'ils ont élaborés prévoient 80 à 100 licenciements à court terme. Cela est totalement scandaleux et suicidaire, Mesdames et Messieurs les députés ! Dans une période où la Banque cantonale de Genève, avec l'aide de l'Etat, des communes, de certains clients, tente de retrouver l'équilibre et de tourner la page, il est odieux et dangereux de faire de tels projets de licenciements. Si, comme le prétend la direction de la banque, il est indispensable de réduire les effectifs pour garder une certaine efficacité, les socialistes s'opposeront fermement à tout licenciement. Ils demanderont à la banque d'entreprendre plutôt un encouragement à la retraite anticipée avec un PLEND digne de ce nom et un programme d'incitation au partage du travail.
Finalement, je mettrai en garde le Conseil d'Etat, suite à la nomination de M. Perrot à la présidence de cette banque. Je ne connais pas les qualités de ce monsieur, mais je vous demande de garantir le plus possible que M. Perrot, administrateur de plusieurs sociétés et patron de fiduciaire, n'ait plus aucun lien d'intérêt - je dis bien : n'ait plus jamais aucun lien d'intérêt - entre ses affaires privées et son activité à la présidence de la Banque cantonale de Genève. Nous avons besoin d'une présidence irréprochable, d'un modèle de transparence et d'honnêteté.
En souhaitant que la banque reparte sur de nouvelles bases respectant une certaine éthique et soit proche des citoyennes et des citoyens de ce canton et des PME de ce canton, nous vous invitons ce soir à soutenir la Banque cantonale de Genève.
M. Michel Halpérin (L). Le débat qui s'est engagé ce soir porte à première vue sur l'assainissement, la restructuration, le renforcement et, somme toute, l'avenir de la Banque cantonale de Genève. Mais ce que nous avons entendu au cours de la dernière heure comporte aussi une part d'amertume, Monsieur Brunier, et une part d'interrogations, sans doute légitimes, sur les raisons pour lesquelles cet établissement connaît les malheurs qui sont les siens aujourd'hui.
C'est à juste titre que plusieurs d'entre vous ont posé cette question. C'est un peu moins à juste titre qu'ils ne l'ont posée, semble-t-il, qu'à mi-voix ! Après tout, dans toute entreprise, il y a des hommes, des femmes, et ceux qui sont à la tête des établissements, qu'ils soient privés ou publics, assument les responsabilités des heurs et des malheurs. Je suis pour ma part de ceux qui sont un peu surpris de constater, devant l'ampleur du malheur, que si peu de conséquences en aient été tirées, qu'il y ait eu si peu de démissions dans le conseil d'administration, qu'il y ait eu si peu de conséquences au niveau des leçons à en tirer en termes de bonne gestion et bonne conduite des affaires. Par conséquent, je crois que ce débat méritait à tout le moins d'être esquissé.
Je comprends cependant que ce ne soit pas aujourd'hui le bon soir pour aller jusqu'au bout de ce débat. En effet, il nous emmènerait bien plus loin que nos capacités respectives ne nous le permettent. Par ailleurs, l'intégrité commande tout de même de dire qu'à l'heure où nous parlons, nous ne savons pas vraiment grand-chose des origines de tous ces déboires, même si plusieurs d'entre vous ont visiblement quelques idées à ce sujet, et il ne me paraîtrait pas équitable de jeter l'anathème, un peu au petit bonheur la chance, sur les administrateurs de tous bords, puisque chacun de nos partis politiques a dépêché les siens.
Le maître mot, Mesdames et Messieurs les députés, visiblement ce soir est celui de la confiance. Je suis intéressé quant à moi de découvrir dans quelques-unes des interventions que nous avons entendues ce soir tout le mérite que vous attribuez à cette vertu. Oui, Mesdames et Messieurs les députés, la confiance ça se gagne ! Ça se mérite ! Mais ça ne s'ordonne pas !
Et même vous, Monsieur Grobet, avec le talent qui est le vôtre, vous ne pouvez pas donner l'ordre aux médias d'imposer la confiance à la population, parce qu'ils ne diront que ce qu'ils pensent ou croient penser, et ils penseront ou croiront penser ce que nous leur aurons dit ce soir, en table ouverte, ou à d'autres occasions en cercle plus fermé. Vous me permettrez de dire, Monsieur Grobet, à vous et à d'autres, que je trouverais du sens à un exercice comme celui de ce soir si nous en profitions aussi pour faire notre propre examen de conscience...
M. Rémy Pagani. Ah oui !
M. Michel Halpérin. Ah oui, Monsieur Pagani, c'est un exercice difficile ! Nous n'avons pas beaucoup de mémoire, les uns et les autres, et nous avons un peu de peine à nous rappeler que, dans le grand exercice de démolition de la banque qui a été amorcé sur des constatations faites plutôt par les uns que par les autres, l'effort de dénonciation public qui a été conduit ici même et dans vos rangs, n'est pas une des moindres données dans la perte de la confiance dans cet établissement bancaire.
Il ne suffit donc pas de dire aujourd'hui : confiance, confiance, confiance... Il faut faire en sorte que cette confiance soit méritée ! Il ne suffit pas non plus de dire qu'une banque doit se conduire avec éthique - ce qui me paraît être la moindre des choses - avec transparence - jusqu'à un certain point et dans le respect probablement de la sphère privée de ceux qui veulent lui confier l'argent et les affaires qui sont les leurs - ou avec esprit de démocratie. Il faut pratiquer soi-même ces vertus. Il faut par exemple admettre - cela aurait été une leçon intéressante à entendre dans vos bouches - que cette banque, créée il y a sept ans par cette assemblée et par ce Conseil, est composée exclusivement d'administrateurs politiques qui ont été désignés ainsi pour que nous ayons une banque éthique, transparente et démocratique, alors que nous avons apparemment, si je vous entends bien, une banque qui n'est ni éthique, ni transparente, ni démocratique, en dépit du fait qu'elle est politique ! Cela pourrait nous amener à nous poser en toute humilité la question de savoir si l'éthique, la transparence et la démocratie se pratiquent en politique... (Exclamations.)
Mais le débat de ce soir n'est pas un débat philosophique, c'est un débat concret sur la Banque cantonale de Genève. Est-il besoin que je dise ici que le groupe libéral est naturellement à la fois consterné de l'état dans lequel il découvre cet établissement et convaincu, comme vous tous, de la nécessité de contribuer à son redressement ? En effet, Mesdames et Messieurs les députés, la Banque cantonale de Genève joue un rôle éminent dans la vie d'un certain nombre de petites et moyennes entreprises de ce canton, et nous ne devons pas porter atteinte à ce tissu.
Mesdames et Messieurs les députés, il y a des réponses économiques que nous a présentées notre ministre des finances tout à l'heure et parmi elles les suivantes : il faut recapitaliser la banque, il faut probablement une entité de défaisance ou de valorisation, qui pourra reprendre ces canards boiteux qui font pencher la balance du mauvais côté du bilan pour la banque et qui, par conséquent, l'empêchent de s'assainir. Bien sûr, il faudra faire tout cela !
Mais que nous propose-t-on ce soir techniquement ? On nous propose une augmentation de capital avec laquelle, naturellement, nous sommes d'accord. On nous propose la création d'une entité de valorisation avec laquelle, bien entendu, nous sommes d'accord. On nous propose que l'Etat décrète une garantie de 5 milliards, Mesdames et Messieurs les députés - l'équivalent d'un budget annuel ou la moitié de notre endettement résiduel - en faveur de cette société de valorisation et nous serions encore d'accord. Mais voilà qu'on nous propose, à l'heure de la transparence et de la démocratie, d'adopter une clause d'urgence dans le cadre d'une fondation de droit public ! Et il va falloir que l'on s'explique sur ces deux particularités du projet, que celui-ci soit un projet associé ou dissocié, car la clause d'urgence aurait pu être apposée dans deux textes au lieu d'un seul !
Je vous dis, Mesdames et Messieurs les députés, que cette proposition de clause d'urgence, pour commencer par elle, n'est certainement pas démocratique, parce que son seul objectif consiste à soustraire à l'examen de la population, c'est-à-dire au référendum, la décision que nous prendrons ce soir. Franchement, Mesdames et Messieurs les députés, imaginez-vous vraiment que notre population va retrouver confiance dans un établissement dont on lui dit qu'il va lui falloir, au moins virtuellement - je reprends le mot utilisé par Mme Calmy-Rey - un apport de la poche des contribuables, sans donner à ces mêmes contribuables la possibilité de s'exprimer à ce sujet ? Cela vous paraît-il suffisamment transparent et démocratique pour inspirer confiance ? Et on nous répond que c'est faisable à rigueur de textes constitutionnels !
Notre constitution prévoit, il est vrai, la clause d'urgence et elle n'incombe qu'à nous, Grand Conseil. Cette clause d'urgence, aux conditions qui ont été dites tout à l'heure, est définie à l'article 55 de notre constitution qui prévoit tout de même, à l'article 56, qu'en matière financière sont soumises obligatoirement au référendum facultatif toutes les lois entraînant pour le canton et pour un même objet une dépense unique de plus de 125 000 F ou une dépense annuelle de plus de 60 000 F.
J'ai écouté avec soin les explications qui nous ont été fournies. Dans le texte du projet amendé, on voit que le capital qui sera mis à disposition de cette fondation sera de 100 000 F - il est donc inférieur à 125 000 F - et on nous explique que pour cette raison la dépense n'atteindra pas les 125 000 F... Mesdames et Messieurs les députés, en est-il un seul parmi vous dans ces travées pour croire ce soir que nous nous engageons au moment de ce vote sur une non-dépense, ou sur une dépense inférieure à 60 000 F par an, ou sur une dépense inférieure à 125 000 F ? S'il en est un, je serai heureux de l'entendre m'expliquer tout à l'heure par quel exploit intellectuel et arithmétique il parvient à ce résultat !
Je vous rends, Mesdames et Messieurs les députés, attentifs à l'article 96 de notre constitution, qui prévoit que toute dépense nouvelle doit être couverte par une recette correspondante, toujours avec cette même limite des 60 000 F. Et l'alinéa 3 de cet article 96 nous dit que l'emprunt ne peut être considéré comme recette au sens du présent article. Ne trouvez-vous pas, Mesdames et Messieurs les députés, que l'exercice auquel vous vous proposez de vous livrer ce soir, qui consiste à voter la clause d'urgence pour éviter le référendum, ressemble extraordinairement à une manipulation ? Mesdames et Messieurs les députés, ne trouvez-vous pas que ça n'est pas une manière normale, satisfaisante, transparente, démocratique, rigoureuse et, par conséquent, éthique de gagner la confiance de nos compatriotes ?
M. John Dupraz. Tu veux tuer la banque ?
M. Michel Halpérin. Monsieur Dupraz, vos invectives ne m'intéressent pas : ce n'est pas l'enjeu d'aujourd'hui !
Je pose la question que chacun de nous se pose ce soir en son for intérieur et que chacun de nos compatriotes, demain, se posera en lisant le journal : est-il normal que le peuple n'ait pas son mot à dire dans un processus dans lequel nous nous engageons et dans lequel nous devons nous engager, alors qu'il s'agit finalement de ses contributions ? Je prétends que le procédé est juridiquement pour le moins contestable et que nous prenons des risques non négligeables de le voir sanctionner par une autorité judiciaire ! Je prétends aussi qu'il est politiquement inacceptable !
Deuxième sujet : celui de la nature de l'entité de valorisation. Cette entité de valorisation, Mesdames et Messieurs les députés, pourrait être une société, une fondation de droit public ou de droit privé. Les conditions dans lesquelles la Banque cantonale de Genève, si nous votons cette hypothèse, pourra se décharger des objets qui l'encombrent aujourd'hui rendent difficilement envisageable, j'en conviens, qu'une simple société de droit privé puisse faire cet exercice de reprise. La fondation est probablement la nécessité qui s'impose. Et d'ailleurs, on voit mal que l'Etat donne sa garantie à une entité qui n'aurait pas une structure de ce type.
Reste la question de la fondation de droit public ou de droit privé. En quoi consiste essentiellement la différence ? Mesdames et Messieurs les députés, c'est une question de confiance ! Si nous avons affaire à une fondation de droit public nous aurons une mainmise directe de l'Etat sur le patrimoine - créances et gages immobiliers - dont la banque va se décharger. Autrement dit, nous avons une mainmise directe de l'Etat sur un patrimoine dont je suis incapable d'assurer moi-même l'évaluation, mais dont quelques-uns des préintervenants ont indiqué qu'il se chiffrait à quelques milliards pour quelques centaines d'objets ou davantage.
Je pense que c'est une erreur de jugement de vouloir combiner deux pensées politiques, celle qui consiste à vouloir sauver la banque et à permettre la valorisation des objets qui sont devenus difficiles en ses mains, mais qui pourraient avoir le temps de valoir mieux dans celles d'une entité de valorisation, et celle qui consiste à vouloir tenter une vague opération aménagiste à l'occasion de cette mise en place : une fondation de droit public dans laquelle, si j'ai bien compris le texte, l'Etat pourra empter ou préempter comme il lui conviendra pour acheter un morceau de terrain ici, un immeuble là...
Le deuxième sujet qui fait problème avec la fondation de droit public, c'est notre constitution telle que vous l'avez voulue amendée il y a quelques années, qui dit à l'article 80A qu'une fondation de droit public ne pourra vendre les biens immobiliers dont elle sera devenue propriétaire qu'après débat et approbation par notre Conseil.
Mesdames et Messieurs les députés, croyez-vous qu'il en est un dans cette salle pour s'imaginer que l'on va encourager la valorisation de ces actifs, lorsque les acheteurs éventuels sauront que, pour que la vente à laquelle ils peuvent éventuellement prétendre se réalise, il faut attendre le temps de la préemption par le Conseil d'Etat et le temps du vote par notre assemblée, sachant les conditions dans lesquelles nous travaillons déjà aujourd'hui et celles - qu'il n'est pas difficile d'imaginer - dans lesquelles nous travaillerons demain, alors que nous aurons à chaque séance dix ou quinze objets immobiliers dont il faudra décider la vente de préférence, j'imagine, devant un public qui ne sera pas celui de ce soir, mais qui sera doté d'appendices nasaux rouges et qui, aux termes de «RHINO, RHINO», nous demandera de préférer son investissement gratuit en coopérative plutôt que le méchant spéculateur qui achèterait les biens de la société de valorisation à leur valeur vénale ! C'est cela la différence entre une fondation de droit public et une fondation de droit privé !
J'ai vécu, comme la plupart d'entre vous, assez longtemps dans ce Conseil pour savoir comment se déroulent nos débats. Ce n'est pas parce que ce soir, comme l'imagine M. Glatz, très provisoirement maire de Champignac... (Rires.) ...nous faisons l'union sacrée que demain cette union sacrée portera ses fruits ! Demain, lorsqu'il faudra assurer la valorisation de ce patrimoine garanti par les contribuables à hauteur de 5 milliards de francs, nous serons dans l'incapacité de vendre, parce que nos débats internes nous conduisent toujours à l'incapacité de tout... C'est la moindre des choses de le dire tant nous le vivons !
J'ajoute, Mesdames et Messieurs, que nous avons un dernier motif d'empêchement. S'agissant du cautionnement, ou de la garantie de 5 milliards émise par l'Etat, la forme qui a été donnée dans ce texte pour essayer de répondre aux exigences de la constitution fait que, lorsque, pour une raison ou pour une autre, la fondation, qu'elle soit publique ou privée, fera appel à la garantie, le Grand Conseil devra à nouveau se prononcer sur cette garantie tranche par tranche. C'est dire que de deux choses l'une : ou le vote que nous devrons faire sera purement et simplement indicatif - et dans ce cas-là pourquoi tricher aujourd'hui dans le texte ? - ou le vote sera significatif, et la garantie que nous donnerions aujourd'hui ne serait pas une vraie garantie !
Voilà, Mesdames et Messieurs, les raisons pour lesquelles le groupe libéral soutient l'augmentation de capital, soutient la création d'une entité de valorisation, mais ne peut pas s'associer à la démarche qui consiste à voter la clause d'urgence pour la Fondation de valorisation.
Nous pouvons le faire, pour les raisons qui ont été bien expliquées tout à l'heure par M. Grobet, au sujet du capital. Le capital est effectivement rémunéré dans des conditions un peu mystérieuses, mais il est rémunéré. En conséquence de quoi nous pouvons voter une augmentation de capital et nous pouvons la voter au moyen d'un emprunt et l'assortir de la clause d'urgence. Mais les 5 milliards pour la Fondation de valorisation qui sont prétendument virtuels et dont nous savons qu'ils ont un risque d'actualité plus que potentiel, nous ne devons pas les soustraire à la possible sanction populaire si tant est qu'elle ait lieu ! Et nous devons avoir le courage, si nous voulons gagner la confiance que nous paraissons appeler de nos voeux, de nous conduire en gens qui soient dignes de la mériter plutôt qu'en cachottiers manipulateurs qui, par définition, seront déshonorés dans l'optique de ceux qui les regardent faire, parce qu'ils nous prêteront des turpitudes que nous n'avons peut-être pas ! Mais vous savez bien qu'on ne prête qu'aux riches ! (Applaudissements.)
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, il reste sept députés inscrits. Je vous propose maintenant de clore la liste des intervenants. Vous aurez toujours le loisir de reprendre la parole lors du deuxième débat, tout à l'heure. Mais, vu l'heure, je clos la liste des intervenants pour l'instant.
Je vous donne la parole, Monsieur Roger Beer.
M. Roger Beer (R). Ce soir, nous faisons le ménage ! J'imagine que c'est par hasard ou par une drôle de coïncidence que le Bureau n'est composé que de dames... Je vous remercie de le constater ! (Exclamations, rires et huées.)
Une voix. Un peu macho !
M. Roger Beer. C'était pour détendre les débats !
Je reviens à des choses plus sérieuses. Nous avons entendu depuis près de deux heures l'historique et toutes les analyses sur la Banque cantonale de Genève. Nous sommes dans une situation extrêmement difficile... (Brouhaha.) ...et la position que nous devons prendre ce soir, en députés responsables, est également très difficile. Aujourd'hui, effectivement - cela a été dit dans tous les rangs - nous devons sauver la banque, qui n'est toutefois pas encore perdue. Nous devons prendre une décision qui permettra à la banque de continuer à travailler, de jouer son rôle de banque cantonale de proximité, de soutenir les petites et moyennes entreprises de Genève. Et cela, Mesdames et Messieurs, a un prix : il est de 5 milliards ! Le groupe radical, comme tous les groupes, est d'accord sur ce point.
Mais la population, les médias, journaux, télé, et même les députés se posent une question - je me la pose aussi : comment se fait-il qu'il n'y ait pas de responsables dans cette affaire avec tout ce que nous avons appris à son sujet ? Pour ma part, j'ai de la peine à le comprendre ! C'est vrai que je ne suis ni banquier, ni administrateur : je suis simplement député ! Malgré tout la question se pose. Ce soir, étonnamment, à part M. Grobet, personne n'a vraiment abordé cette question... Nous allons voter - j'en suis persuadé - cette augmentation de capital et ce transfert d'actifs, ce qui permettra à la banque de continuer à travailler, mais nous pensons qu'un certain nombre de conditions doivent être posées.
Le premier projet qui avait été présenté en commission des finances proposait la création d'une fondation de droit privé, ce qui nous paraissait être la meilleure solution, parce qu'elle permettait de travailler sans le poids des travaux du parlement - c'est vrai. Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés - c'est comme cela en politique : vous avez travaillé, vous vous êtes mis d'accord - vous nous présentez un projet de loi amendé qui propose une fondation de droit public et qui me paraît tout à fait acceptable. Effectivement, vu la situation, ce projet pourra être voté, mais nous proposerons peut-être un amendement à l'article 25. En effet, vous évoquez dans cet article la vente de villas et d'appartements d'une valeur estimée à moins de 2 millions : nous pensons qu'il faut élever cette valeur à 3 ou 4 millions, histoire de gagner en efficacité et que la Fondation de valorisation puisse travailler sans avoir systématiquement recours au Grand Conseil.
Nous avons entendu beaucoup de choses sur le conseil d'administration, sur les présidents de la banque et des deux banques fusionnées. Ce soir le Conseil d'Etat nous demande de lui faire confiance par rapport au projet de loi proposé, qui sera amendé, et d'accepter ses propositions. Moi, je veux bien et je pense que le groupe radical sera d'accord aussi, mais j'estime que le Conseil d'Etat a tout de même péché dans la nomination de ces différents présidents. Je peux comprendre la transparence exigée par certains groupes et le projet de loi tel qu'il est proposé pour la fondation ne nous satisfait pas totalement.
Nous proposerons donc, malgré la commission de contrôle de gestion, une motion demandant que le Grand Conseil crée une commission de la banque qui soit régulièrement - trois ou quatre fois par année - informée des activités de la banque. La nomination d'administrateurs par le monde politique n'est malheureusement pas une bonne chose. Que les administrateurs soient des politiciens de gauche ou de droite n'est pas la question : en l'occurrence, ce n'est pas leur métier et cette histoire nous montre qu'il faudrait aujourd'hui nommer des professionnels et pas seulement des représentants du monde politique ! Cela n'empêchera pas le Conseil d'Etat de garder ses prérogatives. Il faut des professionnels au conseil d'administration de la Banque cantonale de Genève et au conseil de la Fondation de valorisation, qui va devoir vendre les différents objets, pour que l'Etat perde le moins d'argent possible et le moins longtemps possible. La création d'une commission du Grand Conseil, qui serait informée régulièrement, assurerait une certaine transparence et le travail de la fondation ne serait pas rendu difficile par les travaux du parlement, dans lesquels, il faut bien le dire, nous ne sommes pas des plus efficaces...
Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que j'avais envie de vous dire ce soir. Il faut maintenant voter le projet de loi sur la fondation, il faut accepter l'augmentation de capital, il faut accepter le transfert des actifs et, ensuite - mais il faut le faire avant l'été - il faudra définir la mission de la banque en tant que banque de proximité pour éviter que ne se reproduisent des faits tels que ceux que nous apprenons aujourd'hui. J'avoue qu'en sachant qu'on a prêté 160 millions à un artiste peintre peu connu, j'ai du mal à faire confiance au conseil d'administration ! Je vous ai entendu dire, Monsieur Halpérin, qu'il fallait faire de l'ordre et changer le conseil. J'imagine que le conseil d'administration devra effectivement être renouvelé et composé de professionnels. Les choses doivent se passer comme cela.
Je m'adresse aux libéraux : vous ne voulez pas voter, vous n'êtes pas tout à fait d'accord... Je trouve votre position tout à fait compréhensible, même si elle me semble peu responsable, dans la mesure où vous savez que, ici ce soir, la majorité se fera autour de ce projet même sans vos voix. A mon avis, il faudrait montrer à la population que tous les députés du Grand Conseil sont unis pour que cette banque puisse poursuivre ses activités de Banque cantonale de Genève.
La présidente. A voir l'état des bancs de ce Grand Conseil, votre coup de balai est d'une efficacité redoutable, Monsieur Beer ! (Rires.)
Je vous donne la parole, Monsieur Jean-Marc Odier.
M. Jean-Marc Odier (R). Lors du débat de préconsultation, le groupe radical réaffirmait la nécessité pour l'économie genevoise, et notamment pour les PME, de pouvoir compter sur l'appui d'une collaboration bancaire différente, une collaboration affinée aux particularités des acteurs de la vie économique genevoise.
Nous avons approuvé l'orientation du Conseil d'Etat visant à réajuster les capacités de la banque tout en souhaitant une plus grande ouverture à l'actionnariat privé, afin de dégager la banque de l'influence politique.
Depuis, l'étude de ces projets a apporté aux députés quelques précisions. D'autres leur venaient par les journaux et d'autres, enfin, ne sont pas venues du tout : secret bancaire exige ! Ce manque d'information n'est pas réservé aux députés : c'est également le cas pour les collaborateurs de la banque et même pour les administrateurs, en tous les cas ceux qui n'appartiennent pas au comité de banque. Malgré l'absence de clarté dans l'information, ce soir, la responsabilité de décider revient aux députés, une responsabilité plus lourde encore depuis l'introduction dans ce projet de loi de la clause d'urgence qui interdit, comme cela a été expliqué, le référendum et soustrait aux citoyens un droit démocratique.
Que dire de cette situation où un outil économique - la banque - est soumis à une décision des politiques mis devant le fait accompli ? Le système est mauvais ! La banque ne devrait pas être soumise aux politiques ! On ne peut exiger d'une société, dans une situation de concurrence, à la fois d'être rentable et de soutenir des situations anormalement risquées, car c'est vouloir la quadrature du cercle !
Paradoxalement, si la décision est lourde, la réponse est simple ! Notre conviction est que la banque a le potentiel pour remplir son rôle de banque de proximité, qui développe notamment une motivation particulière envers la clientèle cantonale individuelle ou PME par la promotion active de produits capables de générer un essor économique direct ou indirect.
En conséquence, le groupe radical continuera à soutenir la banque et votera ce projet de loi. Par contre, au-delà de cette étape il sera nécessaire de revoir totalement le système de relation Etat/banque, afin que l'influence politique sur la banque disparaisse.
Mme Erica Deuber Ziegler (AdG). J'essaye de regarder la situation en face sans préconçu idéologique...
On demande aux contribuables - M. Halpérin a raison - sinon de sortir 5 milliards du moins de s'exposer au risque d'en perdre autant, cela sans conditions, s'agissant de la future gestion de la banque qu'on soulage de ses casseroles et qu'on recapitalise du même coup par l'achat d'actions. Nous nous sommes vu refuser à réitérées reprises les conditions d'un véritable contrôle. Le ménage à la banque n'a pas été fait. Son nouveau président siège depuis 1992 au comité de banque ; il est «mouillé» dans le marécage de la filiale de Lyon et dirige toute une série de sociétés domiciliées à la Banque cantonale de Genève. Pour moi et pour beaucoup de nos concitoyens, il n'est pas possible d'accepter cela !
Ce parlement a voulu dans sa majorité fermer les yeux pendant plus de quinze ans sur les pratiques d'abord des deux banques, puis de la Banque cantonale de Genève après la fusion, et continue aujourd'hui de vouloir aller de l'avant sans les ouvrir. Nous sommes - c'est évident - devant un choix très clair : laisser la banque aller à la faillite, avec les conséquences qui ont été dites, la remplacer peut-être comme on le fait par exemple à Zurich par une société publique qui cautionnerait les prêts aux PME - pourquoi pas ? - ou alors sauver la banque, mais la sauver, pas seulement en prenant des mesures qui sollicitent le financement du parlement et du public, mais aussi en désignant à sa tête des professionnels qualifiés, mandatés pour l'assainir, installer des organes, une structure de contrôle, se passer des organes de contrôle actuels, faire la transparence, comme l'a réclamé tout à l'heure mon collègue Luc Gilly, comme le réclame le public et comme nous sommes nombreux à être convaincus de l'exiger. Ces professionnels nettoieraient les écuries d'Augias, assainiraient la banque et permettraient d'instruire aussi le procès de ceux qui ont déterminé la «cacade» actuelle, détourné la banque de ses missions et trahi leur devoir de service à l'intention du bien public de ce canton.
Nous n'avons pas été capables de poser ces conditions et de les lier aux propositions de ce soir. M. Halpérin a parlé de confiance... Personnellement, je n'ai pas confiance ! Cette confiance, nous ne pourrons pas l'avoir tant qu'une claire volonté politique ne se dégagera pas pour faire le ménage à la Banque cantonale de Genève !
J'aimerais encore évoquer la Fondation de valorisation. M. Halpérin a raison de dire qu'elle sera lourde en étant publique. Mais les pratiques en matière de spéculation foncière et immobilière, quel qu'ait été le contrôle étroit exercé par l'Etat sur l'aménagement du territoire, ont conduit à des situations de friche urbaine, de destructions immobilières, de dévalorisations et ont conduit la banque à la situation que l'on connaît aujourd'hui. Je pense qu'on ne pourra pas faire pire et qu'il n'appartient pas aux rangs des libéraux, qui se sont toujours refusés à condamner ces pratiques, de nous dire comment, par des mesures d'aménagement adéquates, l'Etat pourra à l'avenir, avec le concours du Grand Conseil, contribuer à la valorisation des biens impliqués dans la Fondation de valorisation. Je pense que nous avons aujourd'hui une chance et que cette chance, nous ne pouvons la saisir qu'en créant une fondation publique.
M. Christian Grobet (AdG). Je suis toujours très intéressé quand vous prenez la parole, Monsieur Halpérin, parce que, je dois le dire, vous avez un aplomb extraordinaire.
Vous nous avez déclaré que vous «découvriez des choses»... Un peu comme M. Glatz, du reste. On est frappé de voir que ceux qui sont si proches de ceux qui ont assumé les responsabilités de la Banque cantonale de Genève déclarent, comme cela, qu'ils n'étaient au courant de rien jusqu'à ces derniers jours... Dont acte !
Vous dites, Monsieur Halpérin, qu'il faut rétablir la confiance - en quoi vous avez parfaitement raison. Et à partir de là, vous avez évidemment repris le disque rayé et essayé de nous faire croire que les problèmes de la Banque cantonale de Genève proviendraient du fait qu'un groupe politique dans cette enceinte, préoccupé de ce dont les autres se préoccupent ce soir, ait posé un certain nombre de questions et proposé un certain nombre de mesures... Au demeurant, vous allez même jusqu'à dire que nous ne proposons pas de mesures - je reviendrai tout à l'heure sur ce point.
Eh bien, Monsieur Halpérin, votre niveau de connaissance du dossier ne vous autorise pas à affirmer des choses dont vous savez à quel point elles sont totalement fausses ! Le problème... (L'orateur est interpellé par M. Michel Halpérin.) Non, non, vous savez fort bien que si un certain nombre de clients ont effectivement éprouvé des craintes ces derniers mois à l'égard de l'avenir de la banque, la clientèle n'avait pas perdu confiance jusqu'aux récents événements.
Les problèmes auxquels la banque est confrontée existent depuis des années ! Et si elle se trouve aujourd'hui confrontée à une situation extrêmement grave et à la nécessité de recapitalisation, c'est en raison des cachotteries auxquelles vous faisiez allusion et qui provenaient des gens que vous connaissez et qui ont tenté de tout cacher ! Vous savez en tant qu'avocat que la pire des choses est précisément de retarder les échéances : plus on les retarde et plus le trou s'agrandit ! J'ai entendu certains députés reprendre la rengaine des années de spéculation, d'affaires faciles, etc. Je veux bien que dans cette ambiance d'euphorie on ait prêté un peu généreusement, mais je ne vais pas refaire le procès de la banque maintenant. Monsieur Halpérin, Monsieur Glatz, il ne s'agit pas de cela ! La banque ne se retrouve pas dans la situation d'aujourd'hui en raison des prêts accordés trop généreusement en période d'euphorie ! Il y a des prêts - cela a été rappelé tout à l'heure - qui n'auraient jamais dus être consentis, quelle qu'ait été la conjoncture !
Nous pourrons reparler de cela une autre fois, car ce n'est pas le propos d'aujourd'hui. Aujourd'hui, il faut impérativement prendre les mesures qui permettent à la banque de poursuivre son activité. A cet égard, je dois dire, Monsieur Halpérin, que vous ne manquez pas de culot en prétendant que nous ne proposons pas de mesures !
La confiance résulte, comme beaucoup l'ont dit tout à l'heure, du fait que les affaires sont gérées correctement, dans la transparence. Et pour que les affaires soient gérées correctement et dans la transparence, il faut des règles de transparence et il faut surtout qu'un contrôle soit exercé. Le problème de la Banque cantonale de Genève est qu'elle a été beaucoup trop autonome. Ce n'est pas seulement une affaire de politiciens, comme on essaye de le dire aujourd'hui ! Les personnes nommées par le Conseil d'Etat n'avaient pas d'étiquette politique.
Ce qui s'est passé, c'est que la banque n'a pas été contrôlée et que celles et ceux qui étaient à la tête de la banque ont pu faire ce qu'ils voulaient. C'est cela qui n'est pas acceptable ! Je vous rappelle que cela fait deux ans que notre formation politique demande, sous des formes diverses, qu'il y ait une véritable autorité de contrôle sur la banque. Toutes nos propositions, Monsieur, vous les avez refusées, et encore au mois de février, lorsque nous présentions le rapport de minorité sur la création d'une commission d'enquête que certains souhaitent ce soir - je les en félicite, mais je tiens à rappeler qu'il y a trois mois seule l'AdG la demandait ! Alors, ça me fait doucement rigoler de voir ce soir certains réclamer que des enquêtes soient effectuées ! Nous étions seuls ! Dans notre rapport de minorité, nous demandions de nouveau, par une proposition législative, de créer un organe de contrôle indépendant de la banque. Je ne vous ferai pas l'injure de relire ce soir les propos de certains dans le Mémorial du mois de février ni les sarcasmes et les injures dont nous avons fait l'objet !
Entre-temps, nous avons proposé une nouvelle solution, soit de renforcer l'organe de contrôle interne de la banque... Vous pouvez toujours sourire, Monsieur Halpérin, mais vous êtes amnésique au point d'oublier qu'à l'ordre du jour de ce soir figure ce projet de loi...
M. Michel Halpérin. Je n'ai pas dit ça ! Vous n'écoutez pas ce que je dis !
M. Christian Grobet. Non, mais vous dites qu'on ne propose pas de mesures ! Nous en proposons concrètement dans un projet de loi dont nous aurions souhaité qu'il soit voté ce soir, simultanément aux mesures de restructuration financière, tant il est évident, comme l'ont dit certains, et indispensable aujourd'hui que le contrôle de la banque soit renforcé !
Néanmoins et bien que ce projet de loi ait été discuté trois ou quatre fois en commission de contrôle de gestion, nous accepterons ce soir qu'il soit renvoyé en commission pour que vous ayez le loisir de nous faire part de vos observations éventuelles, mais, je le répète, ne dites pas que nous n'avons pas fait de propositions. Par contre, vous, vous n'en avez fait aucune ! En commission aujourd'hui, vous n'avez formulé aucune proposition d'amendement au projet de loi dont je vous parle. Toutefois, malgré votre mutisme, nous sommes encore d'accord d'en discuter en commission.
Je reviens maintenant sur l'objet principal de votre intervention : vos réserves, vos réticences par rapport à la clause d'urgence et votre plaidoyer pour la démocratie.
Voyez-vous, Monsieur Halpérin, je supporte avec peine le double langage. Vous avez fait un excellent plaidoyer pour la démocratie, qui vous a valu quelques applaudissements à la tribune... Et vous avez clairement fait comprendre que vous accepteriez la clause d'urgence pour le crédit principal qui va être voté ce soir, si une fondation de droit privé, plutôt que de droit public, était créée pour s'occuper de la valorisation des actifs de la banque.
Je souligne, Monsieur, puisque vous avez parlé de dépenses, que le montant financier principal sont les 246 millions qui font l'objet de la loi d'emprunt et que vous admettez la clause d'urgence pour cet emprunt tout en en dénonçant le principe. Mais vous dites par contre que la clause d'urgence ne peut pas être appliquée pour la Fondation de droit public qui vous gêne tant, tout en nous disant qu'il ne faut pas de cachotteries. Eh bien, voyez-vous, si on veut la transparence, c'est bien par le biais d'une fondation de droit public qu'on pourra y arriver !
Vous donnez un certain nombre d'arguments pseudo-juridiques pour prétendre qu'avec une fondation de droit public - ce qui est parfaitement grotesque - l'Etat aurait davantage la mainmise sur les biens immobiliers transférés à cette fondation que si c'était une fondation de droit privé. Vos députés en commission étaient d'accord pour une fondation de droit privé, telle qu'elle était proposée par le Conseil d'Etat, incluant un droit de préemption de l'Etat sur les biens immobiliers qui seront transférés à cette fondation. Alors, que vous votiez pour la fondation de droit public ou la fondation de droit privé, sur la question spécifique que vous avez évoquée tout à l'heure, soit la possibilité pour l'Etat ou les communes - car nous avons élargi le droit de préemption aux communes et vous devriez être sensible à ce fait - c'est kif-kif bourricot ! Et vous le savez !
M. Michel Halpérin. Alors, si c'est la même chose, votons la fondation de droit privé et n'en parlons plus ! (Rires.)
M. Christian Grobet. Non, la fondation de droit public a l'avantage d'éviter les cachotteries, parce qu'elle devra s'expliquer devant ce Grand Conseil ! Et puis vous prétendez que cette fondation sera paralysée par l'article 80A de la constitution ! Vous savez, puisque vous êtes un excellent avocat, qu'aujourd'hui des biens immobiliers ne sont pas transférés par la Banque cantonale de Genève à cette fondation ; il s'agit exclusivement de crédits. Ce n'est que dans l'hypothèse d'une vente aux enchères pour réalisation de gage et si la fondation devait considérer que l'objet part à une valeur insuffisante qu'elle pourrait éventuellement l'acquérir. Alors, ne nous faites pas croire aujourd'hui que tous les crédits qui sont transférés seront soumis à l'approbation du Grand Conseil car c'est une contrevérité. Et vous le savez bien, Monsieur !
La notion de droit public - je terminerai par là - est d'autant plus importante, dans le cadre du vote de la clause d'urgence, qu'une fondation de droit public représente un intérêt public évident. Je ne suis pas convaincu que la fondation de droit privé dont vous souhaitez la création, et qui constituerait à mon sens une privatisation des crédits transférés par la Banque cantonale de Genève, réponde suffisamment à l'intérêt public.
Au vu de ces considérations, nous estimons, quant à nous, que la clause d'urgence doit s'appliquer à l'ensemble du projet de loi et que ce n'est que dans la mesure où les deux mesures sont adoptées ce soir que l'on permettra à la banque d'assainir la situation, ce dont elle a besoin pour poursuivre ses activités.
M. Jean Spielmann (AdG), rapporteur de minorité. Je vais donner quelques réponses aux questions posées par certains députés sur la démarche qui est proposée, et j'interviendrai ensuite à propos de l'intervention de M. Halpérin.
Tout d'abord, je me plais à relever que la plupart des députés qui sont intervenus l'ont fait dans le sens des propositions qui sont faites ce soir. Je rappelle également que je suis rapporteur de minorité, et que je n'étais donc pas du tout d'accord avec les démarches qui sont proposées. Mais, au cours du débat et des échanges que nous avons eus et face à notre responsabilité par rapport à ce problème, nous avons tous fait des pas dans la direction d'une solution rapide pour la banque. Même M. Halpérin accepte l'idée de la clause d'urgence. Tout le monde a donc fait un pas, ce qui est important.
La première question posée à laquelle il n'a pas été répondu concerne l'éthique, la transparence, la démocratie que vous appelez de vos voeux, Monsieur Halpérin. Je vous rappelle tout de même qu'au moment où nous avons voté la loi sur la Banque cantonale de Genève nous avions justement fait des amendements à la loi et envisagé des modifications de structure prévoyant, précisément, l'introduction de tels éléments dans la loi. Ce sont les libéraux et leurs amis qui s'y sont opposés et qui ont empêché que ce dispositif soit déjà en place.
M. Bernard Annen. Je n'ai rien compris !
M. Jean Spielmann, rapporteur de minorité. Vous n'avez rien compris, Monsieur Annen ? J'ai simplement voulu dire que vous parlez d'éthique mais que, lorsqu'il faut voter des projets concrets qui fixent certaines mesures dans la loi, vous les refusez ! Alors, ne parlez pas d'éthique ! (Exclamations.)
Deuxième observation. Il y a plus d'une année, nous avions déposé un projet de loi modifiant les structures de la banque et augmentant le contrôle et les possibilités d'intervention pour régler certains problèmes. Nous avions dit lors du débat de préconsultation que nous ne souhaitions pas faire du problème de la Banque cantonale de Genève un problème de personnes, mais qu'il y avait des problèmes de structures. Par exemple, elles sont insuffisantes au niveau des connaissances industrielles, or, à partir du moment où on participe à la gestion d'une entreprise, il faut avoir ces compétences. Nous avions également indiqué que nous devions mettre en place un dispositif sur trois leviers : celui de la recapitalisation, celui de la fondation et celui du contrôle et des modifications de structures de la banque. Nous avons accepté, parce que nous avons le sens des responsabilités, que les problèmes de contrôle et de modification de structures soient reportés à un débat ultérieur pour trouver une solution aujourd'hui. Chacun faisant un pas, nous arriverons au résultat escompté : que la Banque cantonale de Genève puisse continuer à jouer son rôle.
Monsieur Beer, vous avez fait une observation par rapport aux difficultés liées au passage de chaque objet devant le Grand Conseil, comme du reste M. Halpérin. C'est inexact ! Des informations nous ont été transmises sur la Fondation de valorisation et sur les transferts prévus, qui figurent d'ailleurs dans le rapport de minorité. Si M. Gilly avait lu ce rapport, cela lui aurait évité d'intervenir comme il l'a fait tout à l'heure... La transparence est là, les informations sont données : encore faut-il se donner la peine de les lire !
S'agissant des logements et des villas transférés, il y a, en tout, près de 1300 objets, dont plus de 700 ne passeront pas devant le Grand Conseil, car ils sont d'une valeur inférieure à 2 millions de francs et seront réglés par le biais d'une mesure qui est prévue dans la loi que vous avez sous les yeux. Si cette limite était augmentée à 3 millions de francs, comme le demande M. Beer, elle me semblerait beaucoup trop élevée, car elle dépasserait le prix d'un simple appartement ou d'une simple villa. Il me semble donc qu'au-dessus de la barre des 2 millions il est tout à fait légitime que les dossiers passent devant le Grand Conseil.
En conclusion, le pas que chacun a fait sur cette question permet de trouver des solutions d'ensemble qui répondent à tous les critères, y compris celui du financement. En effet, il a été fait référence à l'article 96 de la constitution, 3e alinéa, sur la couverture financière. Eh bien, ceux qui se sont donné la peine de lire la loi dans le détail, notamment l'article 4, verront que le troisième alinéa précise exactement où est prise la couverture financière de cet investissement. Il sera comptabilisé dès 2000 sous la rubrique 22.00.00.524.01. Vous verrez que cette rubrique permet le prélèvement de ce montant. Il n'y a donc pas de problème constitutionnel de couverture financière pour ce crédit extraordinaire d'investissement. Tous les problèmes sont réglés dans cette loi.
Tous ceux qui ont le sens des responsabilités et qui veulent donner une chance à la Banque cantonale de Genève de poursuivre ses activités, et répondre à tous les impératifs devront voter ce projet de loi. Dans le fond, nous sommes devant un dilemme : voter la proposition majoritaire acceptée par tous les partis qui ont tous fait des concessions pour sauver la banque ou ne pas la voter et ne pas la sauver. M. Halpérin s'est du reste bien gardé de faire une proposition : il s'est contenté de dire ce qu'il ne fallait pas faire... Mais j'aurais pourtant été heureux de l'entendre dire ce qu'il fallait faire !
Il faut tout de même savoir que si on ne sauve pas la banque ce sont mille emplois qui sautent et, en plus, comme dans un jeu de dominos, ce sont toutes les entreprises qui ont des lignes de crédit qui se retrouveraient dans des difficultés considérables ! Ce serait surtout, avant tout, la fin de l'instrument Banque cantonale, tellement nécessaire à l'économie de notre canton, aux 200 000 clients et aux petits épargnants envers lesquels elle a une responsabilité ! Devant de tels enjeux, nous devons avoir le sens des responsabilités et voter la proposition qui nous est faite ce soir !
Mme Micheline Calmy-Rey. Une question m'a été posée à propos de M. Perrot.
Le Conseil d'Etat a demandé à ce dernier de démissionner de tous les conseils d'administration des sociétés dont il était membre, sociétés auxquelles la Banque cantonale de Genève avait octroyé des crédits, ce qu'il a fait aujourd'hui.
Mesdames et Messieurs, vous me permettrez d'ajouter encore un mot. Le rôle de l'Etat de Genève est considéré par certains d'entre vous comme étant négatif à l'égard de la Banque cantonale de Genève. Je dois dire que je ne peux pas accepter de tels propos sans réagir !
L'Etat de Genève n'a rien demandé, et la situation financière du canton de Genève s'améliorait. Je dois avouer que je trouve particulièrement frustrant de constater une situation telle que celle-ci et de devoir intervenir dans l'urgence et de façon drastique pour assainir la Banque cantonale de Genève. Mais nous y tenons, alors nous le faisons !
Le rôle de l'Etat n'est pas négatif. L'Etat - et c'est normal - doit surveiller la banque pour laquelle il accorde une garantie de 4,4 milliards sur les dépôts d'épargne et sur les dépôts de prévoyance ! Cette garantie de l'Etat est tout à fait positive, dans la mesure où elle permet aux épargnants de ne pas être en souci aujourd'hui par rapport à leurs dépôts à la Banque cantonale de Genève, malgré les difficultés qu'elle rencontre. L'Etat de Genève se tient aujourd'hui au côté de la banque, il s'investit, il joue un rôle positif, il joue un rôle d'actionnaire de référence, comme n'importe quel actionnaire privé dans cette situation le ferait ! L'Etat de Genève prend aujourd'hui ses responsabilités, comme vous le faites en votant les mesures d'assainissement, ce dont je vous remercie.
PL 8194-A
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, selon la procédure de vote retenue entre le Bureau et les chefs de groupe, je vous propose maintenant de passer au vote d'entrée en matière sur le projet de loi 8194-A
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
M. Guy-Olivier Segond, président du Conseil d'Etat. Au moment où le Grand Conseil commence le deuxième débat, je vous confirme, au nom du Conseil d'Etat, deux points importants :
- d'une part, le Conseil d'Etat a été étroitement associé, ces derniers jours, aux travaux conduits par les chefs des groupes parlementaires, qui ont abouti à réunir dans une seule loi d'emprunt les deux projets de lois déposés par le Conseil d'Etat relatifs à la Fondation de valorisation et à l'augmentation de capital. Je vous invite donc à poursuivre votre discussion sur la base des amendements au projet de loi 8194-A, tels qu'ils ont été déposés par les chefs de groupe de l'AdG, des socialistes, des Verts, des radicaux et des démocrates-chrétiens.
- d'autre part, le Conseil d'Etat, tenant compte des dispositions de la législation fédérale sur les banques, des exigences de la Commission fédérale des banques et des délais fixés, vous invite à voter la loi d'emprunt avec la clause d'urgence, afin d'assurer rapidement à la Banque cantonale de Genève les moyens de procéder à l'augmentation requise de ses fonds propres et de poursuivre ses activités.
M. Christian Grobet (AdG). Comme je l'ai dit tout à l'heure, cinq groupes de ce Grand Conseil se sont unis - les socialistes, les Verts, les radicaux, les démocrates-chrétiens et l'Alliance de gauche - pour présenter des amendements au projet de loi 8194, sous la forme d'un projet de loi intégralement rédigé à nouveau, mais reprenant des dispositions du PL 8194 - sur laquelle vous avez ouvert le débat, Madame la présidente, et qui portait sur l'ouverture de deux crédits extraordinaires - et le PL 8246, instituant la garantie au profit de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève.
Mesdames et Messieurs, vous avez tous reçu ce document, et je voudrais rapidement faire quelques commentaires pour faciliter la compréhension de la démarche.
En ce qui concerne le titre I, il s'agit en fait d'un regroupement des articles 1 à 8 du projet de loi 8194. Vous constaterez qu'au lieu de demander un crédit, la loi autorise le Conseil d'Etat à contracter un emprunt de 246 millions, permettant l'acquisition à la fois d'actions nominatives et d'actions au porteur de la BCG. Par rapport au projet de loi du Conseil d'Etat, il y a une distinction : à savoir que nous proposons que toutes ces actions soient portées au patrimoine financier de l'Etat, étant précisé qu'il est prévu à l'article 3 que le Conseil d'Etat peut transférer au patrimoine administratif des actions au porteur si cela se justifie. Par contre, en ce qui concerne les actions nominatives, nous demandons que le transfert soit approuvé par le Grand Conseil.
Le titre II du projet de loi porte sur le crédit d'investissement de la Fondation de valorisation qui est ramené à 100 000 F. Il n'y a pas, en ce qui concerne la Fondation de valorisation, d'autre crédit demandé. A ce sujet, j'aimerais indiquer, s'agissant de la garantie de 5 milliards qui est fournie à la fondation et qui figure dans les dispositions du titre III du projet de loi relatif à la constitution de la Fondation de valorisation, plus précisément à l'article 14, qu'une garantie n'implique pas de dépense - cela pour répondre à l'intervention de M. Halpérin. L'article 14 prévoit expressément que, dans la mesure où il serait fait appel à la garantie, c'est-à-dire qu'il faille engager des dépenses en vertu de cette garantie, cet appel à la garantie devra se faire sous forme d'une demande de crédit extraordinaire. Et nous avons ajouté : «soumise au Grand Conseil», pour qu'il n'y ait pas de doute à cet égard. C'est un peu enfoncer une porte ouverte dans la mesure où le Conseil d'Etat l'avait prévu dans son projet de loi. Cela signifie que toute dépense résultant de la mise à contribution de la garantie doit faire l'objet d'une loi, loi bien entendu soumise à référendum.
C'est la raison pour laquelle nous disons aujourd'hui, Monsieur Halpérin, qu'il n'y a pas de dépense proposée pour la fondation, même s'il est probable que cela vienne. A ce moment-là, si vous voulez lancer un référendum en temps voulu, vous en aurez tout le loisir.
Le titre III se rapporte donc à la constitution de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève. Nous avons repris les dispositions prévues par le Conseil d'Etat dans le projet de loi 8246, c'est-à-dire à la fois les dispositions légales et les dispositions statutaires qui figuraient en annexe de ce projet de loi. A côté de chaque article est notée entre parenthèses la référence d'où la disposition a été prise, soit l'article des statuts, soit l'article du projet de loi 8246. Et nous avons souligné toutes les modifications qui ont été apportées à ces textes ou aux adjonctions pour que le débat soit parfaitement clair.
A ce sujet, il est vrai que dans le cadre de la fondation de droit public, dont nous avons mis en évidence qu'elle était plus souple que la fondation de droit privé, nous avons proposé un certain nombre de règles qui fixent un meilleur contrôle et une meilleure transparence de cette fondation par rapport à la solution proposée par le Conseil d'Etat en matière de fondation de droit privé. Je pense que les libéraux, qui ne veulent pas de cachotteries et qui désirent que les choses soient bien contrôlées, devraient être sensibles à cet effort de complément qui a été apporté au projet de loi.
Enfin, le titre IV, Dispositions finales, contient la disposition principale nouvelle qui a été introduite, selon le souhait du Conseil d'Etat, à savoir la clause d'urgence dont la motivation - motivation, du reste, reprise du titre du projet de loi - réside dans le respect des exigences de la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne, applicables à la Banque cantonale de Genève, avec comme but de lui assurer immédiatement, vu les délais, les moyens de procéder à l'augmentation requise de ses fonds propres et de poursuivre ses activités. La clause est donc dûment motivée. Je pense vous avoir expliqué en quelques mots en quoi ce projet de loi diffère des deux projets de lois qui nous avaient été soumis, tout en en reprenant toutes les dispositions qui avaient été imaginées par le Conseil d'Etat, mais en y apportant les adaptations nécessaires.
M. Hervé Dessimoz (R). Je voudrais, en guise de préambule, vous lire l'extrait d'un article paru hier dans la «Tribune de Genève», qui est assez éloquent sur l'appréciation des milieux économiques dans le débat que nous avons ce soir. Il s'agit des propos d'un éminent banquier privé genevois qui dit, je cite : «Le système politique suisse attire la médiocrité : il faut toujours trouver un consensus. Les gens habitués à réaliser les choses sont vite usés par ce système. Il faut adorer boire des verres pour se faire connaître ; adorer les conversations stériles où l'on fait mine d'écouter l'autre. Ce n'est pas étonnant que les personnalités vraiment qualifiées renoncent à faire de la politique.»
Il faudrait effectivement que le travail que nous faisons ce soir ne donne pas raison à cet éminent banquier privé genevois...
Je voudrais relever que certains propos qui ont été tenus à gauche et à droite ne sont pas tout à fait fondés, par rapport aux problèmes réels de la banque. En tout cas, ceux qui pensent que les crédits portés dans le compte de la banque ont plombé l'avenir de la banque font une affirmation erronée. Je rappellerai simplement que les députés qui ont travaillé à l'époque à la création de la banque - M. Spielmann en était - avaient demandé à ce que les comptes audités par les organes de contrôle de chacune des banques soient ensuite audités par les organes de contrôle de l'autre. Nous avions également demandé une surexpertise de la part de la société Arthur Andersen. Alors, ne dites pas que les crédits à risques avaient été sous-évalués à l'époque !
Cela étant, les radicaux pensent effectivement que la réussite de l'opération doit être fondée sur une confiance avérée de tous les acteurs dans le futur. Et cette confiance ne peut se révéler que dans la transparence la plus totale. Le contrôle de la Fondation de valorisation par le pouvoir politique ne saurait réaliser les indispensables conditions de confiance, et il faut absolument éviter les erreurs du passé, les non-dit et les débats stériles que nous avons eus dans cette enceinte.
Au nom de plusieurs députés radicaux, je vous propose de conforter le vote sur les projets de lois 8246 et 8194-A amendés en acceptant la motion suivante que je vous lis :
«Projet de motion pour la constitution d'une commission parlementaire permanente dite de la Banque cantonale de Genève
«Considérant les difficultés rencontrées par la Banque cantonale de Genève depuis quelques années, les investissements engagés en mai 2000 par le Grand Conseil, en vue de l'assainissement de la Banque cantonale de Genève, le Grand Conseil décide de demander au Conseil d'Etat de préparer un projet de loi visant à la création d'une commission parlementaire de la Banque cantonale de Genève dont les missions principales seront les suivantes :
- participer au côté du Conseil d'Etat à la redéfinition des tâches et de la vocation de la banque ;
- participer au côté du Conseil d'Etat à la désignation du conseil d'administration, de la direction et de l'organe de contrôle de la banque ;
- rencontrer régulièrement la future direction de la banque et faire un rapport trimestriel au Grand Conseil sur l'activité de la Banque cantonale de Genève.
La commission sera constituée par les représentants de tous les partis siégeant au Grand Conseil à raison d'un représentant par parti.»
Cette motion constitue plus qu'une simple déclaration, puisqu'elle propose à une délégation du Grand Conseil de travailler au côté du Conseil d'Etat et, ainsi, d'informer régulièrement ce sérail pour éviter, comme l'a évoqué tout à l'heure M. Grobet, que pendant deux ans des questions ne soient posées au gré des événements et qu'aucune réponse ne soit donnée correctement.
M. Christian Grobet (AdG). Nous n'avons pas reçu le texte de cette motion, mais j'en ai écouté la lecture avec attention.
Monsieur Dessimoz, sur le principe de cette motion, je pense que notre groupe pourra être favorable, puisque nous avions, en plusieurs circonstances, souhaité que notre Grand Conseil soit mieux associé au contrôle de la banque, proposition qui jusqu'à présent n'avait pas reçu beaucoup d'écho au sein de cette enceinte... Nous sommes heureux de constater aujourd'hui que vous tenez un nouveau discours dans vos rangs !
Je vous suggère de renvoyer la motion à la commission de contrôle de gestion, en même temps que le projet de loi 8244 dont les objectifs sont les mêmes, pour essayer, Monsieur Dessimoz, de la concrétiser immédiatement dans une loi plutôt que d'attendre que le Conseil d'Etat le fasse. Quoi qu'il en soit, je ne doute pas qu'une solution sera trouvée si on la renvoie à la commission de contrôle de gestion.
M. Hervé Dessimoz (R). J'apprécie l'intervention de M. Grobet et je pense pouvoir accepter cette proposition, par souci d'efficacité.
Toutefois, je ne voudrais pas non plus que d'aucuns se méprennent sur l'intention de cette motion dont le but n'est pas de créer une commission de contrôle, mais de créer une commission de réflexion, de discussion, pour favoriser le contact avec le Conseil d'Etat, qui a pour ainsi dire tous les pouvoirs au sein de la Fondation de valorisation. Nous voudrions simplement que ce sérail, qui prend la décision ce soir d'accorder la confiance à la banque, puisse être associé à cet acte de gestion dans le futur.
La présidente. Je salue à la tribune la présence de M. Patrice Mugny, conseiller national. (Applaudissements.)
Monsieur Armand Lombard, vous avez la parole.
M. Armand Lombard (L). Je pense que le débat est déjà assez complexe avec celui des différents projets de lois qui nous sont présentés pour ne pas y ajouter la motion de M. Dessimoz ! Je ne comprends pas exactement ce qu'elle vient faire, mais peut-être n'ai-je pas été assez attentif...
S'il s'agissait de trouver une nouvelle formulation de gestion de cette banque, je trouverais judicieux de la renvoyer en commission, comme vous le suggériez, Monsieur Grobet, mais, en l'occurrence, je ne comprends pas ce que vient faire cette commission de contrôle, pas plus que le type de gestion qui est proposée.
Que le Grand Conseil doive exercer un contrôle, c'est évident ! Et nous avons bien pu constater que ce contrôle a été insuffisant ! Mais de là à créer une commission ad hoc permanente de contrôle du Grand Conseil sur la Banque cantonale de Genève, alors vraiment je ne comprends pas le sens de cette proposition, que je trouve malvenue !
Etant donné que ce n'est pas le moment d'engager un débat ni d'échauffer les oreilles de M. Dessimoz par des propos désagréables, je m'en tiendrai là, mais notre groupe ne suivra en aucun cas une telle motion.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'un amendement que je qualifierai de «global», présenté par les députés suivants : M. Christian Grobet, M. Dominique Hausser, Mme Fabienne Bugnon, M. Jean-Marc Odier et Mme Nelly Guichard. Cet amendement se rapporte au texte issu des travaux de la commission des finances qui figure dans le rapport que vous avez reçu. Le texte de cet amendement global est le document signé par les députés que je viens de citer et qui vous a été distribué ce soir. Ces députés sont en fait les chefs de groupe de cinq partis de ce parlement, à l'exception du parti libéral.
Je vous propose de mettre aux voix la prise en considération de cet amendement global, ce qui nous permettra de travailler ensuite sur ce texte, article par article, s'il est accepté. Ceux qui acceptent la proposition de prendre en considération le texte qui vous a été distribué ce soir, en lieu et place du texte issu de la commission sont priés de lever la main.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 4.
Art. 4 bis
M. Nicolas Brunschwig (L). Comme l'a évoqué M. le député Halpérin, nous sommes d'accord avec la clause d'urgence en ce qui concerne la partie liée à l'augmentation du capital de dotation de la Banque cantonale de Genève. Il s'agit donc d'inscrire cette clause d'urgence dans un article nouveau 4 bis et de supprimer l'article 30.
Il ne me semble pas nécessaire d'expliciter cet amendement plus longtemps, puisque cela a déjà été fait lors de l'intervention du groupe libéral.
M. Christian Grobet (AdG). Nous vous invitons à refuser cette proposition d'amendement. Je n'ai pas l'intention d'analyser maintenant la sémantique des députés libéraux, qui considèrent qu'on peut adopter la clause d'urgence pour l'emprunt qui porte sur le montant principal et qui veulent retirer la clause d'urgence s'agissant de la Fondation de valorisation qui, en l'état actuel des choses, n'engage pas de dépenses.
Toutefois, j'aimerais souligner ce qui a déjà été dit par Mme Calmy-Rey, à savoir que les deux mesures vont de pair et doivent entrer en vigueur simultanément et qu'il est - vous le savez - impensable de se trouver dans un cas de figure où une mesure s'appliquerait et l'autre pas ! Cela impliquerait tout simplement que les conditions exigées par la Commission fédérale des banques ne seraient pas réunies et qu'il faudrait fermer la banque. Alors, si c'est ce que vous désirez, dites-le ouvertement, mais en ce qui nous concerne nous suivrons la proposition de montage financier qui a été présentée par la banque en collaboration avec la Commission fédérale des banques et le Conseil d'Etat ! Il faut savoir en effet qu'il n'est plus possible de modifier ce montage financier. Peut-être qu'on aurait pu le faire il y a deux mois, mais aujourd'hui il faut bien le prendre tel quel et dans sa totalité !
M. Nicolas Brunschwig (L). Monsieur Grobet, il ne s'agit pas de sémantique ! Il est clair que la clause d'urgence peut s'appliquer à cette disposition dans la mesure où il ne s'agit pas d'une dépense, ni unique ni pluriannuelle, de fonctionnement et que, dans ce cas-là, nous ne sommes pas en contradiction avec la constitution. En revanche, la fondation de droit public avec une garantie de l'Etat de 5 milliards correspond tout à fait, dans l'esprit, à une disposition à laquelle nous ne pouvons pas ajouter l'urgence, et vous le savez ! En l'occurrence, vous avez fait une espèce de montage juridique que nous ne pouvons ni cautionner ni accepter !
D'autre part, nous pensons qu'en mettant la clause d'urgence sur cette augmentation de capital, qui sera donc, par définition, non soumise à référendum, nous donnons les moyens à la Banque cantonale de Genève d'atteindre le premier objectif, soit une augmentation de capital.
Comme vous le savez, Monsieur Grobet, pour avoir participé aux débats de la commission des finances concernant ce sujet, nous sommes favorables à la Banque cantonale de Genève et nous pensons que celle-ci doit bien évidemment pouvoir poursuivre ses activités.
M. Michel Halpérin (L). Je suis un peu lassé d'entendre M. Grobet me prendre à contre-pied pour m'expliquer que je cherche à ruiner la banque...
Nous avons accepté à contrecoeur, car le procédé ne nous paraît pas idéal, la clause d'urgence, mais exclusivement pour les raisons que vient de donner M. Nicolas Brunschwig sur la question de l'augmentation du capital, parce que l'explication que vous-même, Monsieur Grobet, vous nous avez fournie, comme l'a fait Mme Calmy-Rey en début de soirée sur la présentation des comptes, nous convient et nous paraît compatible avec la constitution !
Je vous ai indiqué tout à l'heure pourquoi l'hypothèse que cette caution soit virtuelle, malgré l'explication que vous avez bien voulu nous donner récemment sur le fait que le droit de tirage ne s'exercerait que par à-coups devant le Grand Conseil, avec un référendum ponctuel - j'allais dire virtuel - tranche par tranche, au lieu de l'exercer en une seule fois, est un exercice antidémocratique. J'ajoute qu'à partir du moment où nous votons ce soir, et avec la clause d'urgence, l'augmentation de capital, le problème de la banque n'est plus un problème d'existence et encore moins un problème de survie !
S'il faut débattre du reste devant la population, nous aurons le temps de le faire et, si la population ne souhaite pas en débattre, nous aurons au moins agi dans la transparence, qui - je le répète parce qu'apparemment vous n'avez pas très bien écouté ce que j'ai dit tout à l'heure - est la garantie de la confiance !
Mme Marianne Grobet-Wellner (S), rapporteuse de majorité. Je rappelle simplement brièvement que les deux mesures en question doivent impérativement entrer en vigueur simultanément pour assurer la survie de la banque. Je vous invite donc à voter la clause d'urgence sur les deux mesures.
M. Christian Grobet (AdG). Je dois quand même revenir sur ce qui vient d'être dit par MM. Brunschwig et Halpérin, qui affirment que l'augmentation du capital-actions serait suffisante pour atteindre les fonds propres nécessaires à la banque afin qu'elle puisse poursuivre ses activités. Or vous savez que tel n'est pas le cas, puisque la Commission fédérale des banques a imposé une exigence plus élevée, qui ne serait précisément atteinte que dans la mesure où 160 millions sont retrouvés à travers le transfert de 5 milliards d'actifs de la banque à la Fondation de valorisation ! L'objectif ne serait donc pas atteint par la seule augmentation du capital-actions et vous le savez !
M. Michel Halpérin (L). Cette partie de ping-pong pourrait s'éterniser toute la nuit, ce qui n'est pas mon intention.
Je voudrais simplement vous rendre attentif au fait que je n'ai pas dit que cette augmentation reconstituerait les fonds propres nécessaires ; j'ai dit que cela permettrait à la banque de continuer d'exister, le temps que l'on voie si la population souhaite s'exprimer sur le deuxième volet. Car après tout on demande à la population pas moins qu'une annuité complémentaire d'impôts à travers la garantie !
Je tiens également à vous rendre attentif à un deuxième facteur très important pour la survie de cet établissement, Monsieur Grobet : s'il se trouve dans la population un seul citoyen pour interjeter un recours contre la clause d'urgence et que cette clause d'urgence soit affectée uniquement à l'opération qui porte sur l'augmentation du capital, nous aurons probablement sauvé la banque. Si vous la mettez sur l'ensemble du texte et que le Tribunal fédéral décrète l'effet suspensif, c'est l'ensemble qui se cassera la figure et c'est vous qui en assumerez la responsabilité, pas nous ! (Applaudissements.)
M. Jean Spielmann (AdG), rapporteur de minorité. Je fais les deux observations suivantes par rapport à ce qui vient d'être dit.
Je conteste le fait que la mesure que nous proposons viole la constitution. Les articles 55, 56 et 57 sur le problème de la clause d'urgence sont tout à fait clairs et ce n'est pas par hasard que nous avons modifié le montant dans la loi. L'alinéa 1 de l'article 56 prévoit que sont soumises obligatoirement au référendum facultatif toutes les dépenses de plus de 125 000 F. Le montant en question étant de 100 000 F, nous sommes tout à fait conformes au droit par rapport à cet article.
Deuxième observation : quand le Grand Conseil décide d'octroyer une garantie, que ce soit pour la réalisation d'immeubles HLM ou pour d'autres projets, nous n'avons jamais voté parallèlement les crédits de dépenses afférentes à ces garanties. Peut-être faudrait-il revoir le problème, mais pour l'instant et en l'état du droit, il est tout à fait clair que le Grand Conseil n'a pas à voter les crédits concernant la garantie que nous avons donnée. Il faudra voir ce qui se passe une fois que le gage sera engagé.
Les propositions qui sont faites sont donc tout à fait conformes au droit et je conteste qu'on dise qu'elles ne le sont pas. Même si ces choses peuvent être jugées, pour notre part nous avons pris toutes les assurances auprès des juristes. On ne peut jamais être certain de tout, mais le risque que nous prenons aujourd'hui est un risque mesuré et juridiquement fondé !
Une voix. On verra au Tribunal fédéral !
La présidente. Je mets aux voix l'amendement de MM. Nicolas Brunschwig et Michel Halpérin qui consiste à ajouter un article 4 bis, nouveau et à supprimer l'article 30. Le texte de l'article 4 bis vous a été distribué et a la teneur suivante :
«Les emprunts autorisés à l'article 1 et à l'article 4 sont déclarés urgents en vertu des articles 55 et 57 de la constitution et ne peuvent faire l'objet d'un référendum.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Art. 5
M. Nicolas Brunschwig (L). Lors des tout premiers débats que nous avons eus en commission des finances et dès que les partis de l'Alternative nous ont dit vouloir transformer cette fondation de droit privé en fondation de droit public, nous avons exprimé nos doutes et nos réserves. Nous avons alors évoqué, contrairement à ce qu'a dit Mme la députée Sayegh, l'ensemble des raisons qui nous faisaient croire que c'était une très mauvaise solution. Non pas une mauvaise solution politique dans l'absolu, mais une mauvaise solution par rapport à l'objectif principal que nous visons, soit de minimiser le coût, la perte financière pour la collectivité publique.
Comme vous le savez, cette fondation sera amenée, bien qu'elle acquière des créances dans un premier temps - des créances de débiteurs douteux qui ne vont pas devenir moins douteux parce que c'est une fondation qui les gère à la place de la Banque cantonale de Genève - à réaliser les gages immobiliers pour couvrir une partie des créances. Dans le cadre de ces réalisations, des ventes seront certainement faites à des tiers, mais il arrivera aussi que la fondation ait un certain nombre de biens - «certain» est un euphémisme... - immobiliers. La fondation sera donc amenée fréquemment à vendre des biens immobiliers.
La proposition qui est faite, dans le cadre de ce projet amendé, est incompatible sur le plan juridique avec la constitution. Vous le savez, l'article 80A de la constitution dit que les actifs immobiliers cédés par une fondation de droit public doivent passer devant notre Grand Conseil pour avoir l'autorisation de cession. Dès lors, nous instituons un processus d'une lourdeur incroyable.
De plus, nous voyons un premier problème de nature juridique au fait que vous vouliez que les actifs inférieurs à 2 millions n'aient pas besoin de passer devant le Grand Conseil. En effet, il y a une contradiction entre la mesure législative que nous allons prendre aujourd'hui et la disposition constitutionnelle de l'article 80A. C'est pour nous un problème juridique majeur.
Le deuxième problème est la lourdeur de ce mode de faire, même si ne seront concernés que les objets de plus de 2 millions. Je vous donne un simple exemple que tous les membres de la commission des finances ont certainement à l'esprit. L'université était - ou est toujours - propriétaire d'un immeuble à la rue de Candolle. Cet immeuble est entre autres occupé par un locataire qui est un professeur tout à fait honorable et compétent de l'institution. Il désirait, avec sa femme qui utilise le rez-de-chaussée pour un cabinet médical, faire l'acquisition de ce bien immobilier que l'université n'avait pas les moyens d'entretenir. Le prix était tout à fait conforme à un prix de marché et il y avait un vendeur, l'université, et un acquéreur qui s'étaient mis d'accord. Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons passé plusieurs séances en commission des finances pour, finalement, refuser, pour des raisons que je n'ai pas encore comprises, la cession de ce bien immobilier ! Voyez-vous, c'est ce type de complication que nous allons rencontrer et il est clair que de tels processus décourageront certainement les investisseurs dont nous aurons besoin pour réaliser ces biens immobiliers. Cette mesure est totalement incompatible avec le nombre important des dossiers que nous devrons traiter ! C'est carrément scandaleux !
Je vous rappelle en outre que dans le projet de loi du Conseil d'Etat - qui a d'ailleurs mis une énergie modeste, c'est le moins que l'on puisse dire, à défendre son propre projet de loi. - il est prévu une surveillance que nous trouvons tout à fait normale et légitime par le Grand Conseil sur cette fondation. Ne nous dites donc pas qu'il s'agit d'un problème de transparence et de manque de surveillance ! Nous acceptons les principes qui ont été évoqués par le Conseil d'Etat, c'est-à-dire une surveillance de l'activité de cette fondation par une commission. Par contre, nous trouvons que le passage devant le Grand Conseil pour la cession de biens immobiliers d'une valeur supérieure à 2 millions est un processus beaucoup trop lourd et conduira certainement à ce que de nombreux acquéreurs potentiels de ces biens immobiliers renoncent ! Et le coût pour la collectivité sera donc bien plus élevé avec une fondation de droit public qu'avec une fondation de droit privé !
Je vous encourage donc à voter cet amendement visant à revenir au principe d'une fondation de droit privé.
M. Claude Blanc (PDC). J'avais tenu le même langage que celui de M. Brunschwig devant la commission des finances. Je l'avais même si bien tenu que j'avais obtenu d'être suivi par une majorité éphémère de la commission des finances, qui a conduit M. Spielmann à faire un rapport de minorité, ce qui est assez paradoxal ! (Rires.)
Dans l'intervalle et après toutes les discussions que nous avons eues, je me suis rendu compte que ce débat est purement académique. En effet, la fondation ne sera propriétaire des biens, dont elle pourrait demander la réalisation de gage, que dans très peu de cas probablement. Il y a actuellement des sociétés de portage qui seront remises à la fondation et qui sont probablement déjà propriétaires de quelques biens. Dans ces cas-là, nous sommes d'accord, la fondation sera propriétaire et, si elle veut vendre les biens en question, elle devra obtenir l'approbation du Grand Conseil.
Je suis néanmoins convaincu que, dans la plupart des cas, elle ne servira que de détonateur, sans être elle-même propriétaire. Par conséquent, ces opérations ne seront pas soumises aux dispositions de l'article 80A. Alors, si c'est un des seuls points d'achoppement qui nous reste, je crois vraiment que cela ne vaut plus la peine de s'accrocher. Il faut cesser ce débat académique et admettre, comme l'a dit quelqu'un tout à l'heure, que c'est blanc bonnet, bonnet blanc !
M. Michel Halpérin. Il a dit : «Kif-kif bourricot» !
M. Claude Blanc. Oui, mais c'est la même chose : c'est un synonyme !
La présidente. Je mets aux voix l'amendement de MM. Halpérin et Brunschwig qui consiste à remplacer, à l'article 5, «...une fondation de droit public...» par «...une fondation de droit privé...», ce qui donne :
«Afin de favoriser la gestion (...) une fondation de droit privé régie par les dispositions de la présente loi.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Mis aux voix, l'article 5 est adopté.
Mis aux voix, l'article 6 est adopté, de même que les articles 7 à 29.
Art. 30
M. Claude Blanc (PDC). Madame la présidente, je me demande si, pour la bonne forme et pour éviter toute discussion ultérieure, vous ne devriez pas faire voter très formellement le Grand Conseil sur cet article 30 qui est la demande de la clause d'urgence ?
La présidente. Il en sera fait ainsi, Monsieur le député, puisque j'ai entendu des exclamations qui abondent dans votre sens ! Je mets donc aux voix l'article 30 Clause d'urgence, tel que libellé dans le document que vous avez sous les yeux.
Mis aux voix, l'article 30 est adopté.
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(8194)
accordant une autorisation d'emprunt de 246 200 000 F au Conseil d'Etat pour financer l'acquisition d'actions nominatives et au porteur de la Banque cantonale de Genève et ouvrant un crédit extraordinaire d'investissement pour la constitution d'un capital de dotation de 100 000 F en faveur de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale afin d'assurer l'augmentation requise des fonds propres de la Banque cantonale et de répondre aux exigences de la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Art. 1 Autorisation d'emprunt
Le Conseil d'Etat est autorisé à contracter, au nom de l'Etat de Genève, un emprunt de 246 200 000 F, aux conditions du marché les plus avantageuses, afin d'assurer l'acquisition d'actions nominatives de la Banque cantonale de Genève à concurrence de l07 500 000 F et l'acquisition d'actions au porteur de la Banque cantonale de Genève à concurrence de 138 700 000 F.
Art. 2 Inscription au patrimoine financier
Les actions nominatives et au porteur seront inscrites dans le bilan de l'Etat de Genève au patrimoine financier.
Art. 3 Transfert des actions au patrimoine administratif
Le Conseil d'Etat est habilité à transférer les actions au porteur au patrimoine administratif si les circonstances le justifient. Le transfert des actions nominatives au patrimoine administratif a lieu sur décision du Grand Conseil.
Art. 4 Crédit extraordinaire d'investissement
1 Un crédit extraordinaire d'investissement de 100 000 F est ouvert au Conseil d'Etat pour la création du capital de dotation de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe instituée à l'art. 5.
2 Le capital de dotation de 100 000 F sera inscrit dans le bilan de l'Etat de Genève au patrimoine administratif sous "; capital de dotation de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe ".
3 Ce crédit extraordinaire ne figure pas au budget d'investissements 2000. Il sera comptabilisé dès 2000 sous la rubrique 22.00.00.524.01.
4 Le financement de ce crédit est assuré, au besoin, par le recours à l'emprunt hors cadre du volume d'investissements "; nets-nets " fixé par le Conseil d'Etat.
5 En raison de la nature de cet investissement, celui-ci donnera lieu à la constitution d'une provision dans l'année de versement du capital de dotation.
6 La constitution mentionnée à l'alinéa 5 aura pour conséquence la dissolution à due concurrence d'une partie de la provision relative à la Banque cantonale de Genève inscrite dans les comptes de l'Etat.
Art. 5 Dénomination
Afin de favoriser la gestion, la valorisation et la réalisation de certains actifs de la Banque cantonale de Genève, il est constitué, sous la dénomination de "; Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève " (ci-après la Fondation) une fondation de droit public régie par les dispositions de la présente loi.
Art. 6 Siège et durée
La Fondation est déclarée d'utilité publique. Son siège est à Genève. Sa durée est indéterminée. Elle est inscrite au Registre du commerce à Genève. Elle est placée sous la surveillance du Conseil d'Etat.
Art. 7 But et activité
1 La Fondation a pour but de gérer, valoriser et réaliser les actifs de la Banque cantonale de Genève (BCGe) qui lui seront transférés et par là de contribuer à l'assainissement de celle-ci.
2 En cas de mise en vente d'actifs immobiliers repris par la Fondation, l'Etat de Genève et la commune du lieu de situation bénéficient d'un droit de préemption, celui de l'Etat étant prioritaire.
3 La Fondation notifiera toute cession d'actif immobilier et les conditions y relatives au Conseil d'Etat et à la commune du lieu de situation de l'actif en cause, lesquels disposeront d'un délai de 90 jours, dès réception de la notification, pour décider d'acquérir les biens immobiliers. L'acquisition se fera aux mêmes conditions de celles de l'offre notifiée. Les dispositions de la loi générale sur le logement et la protection des locataires en matière de droit de préemption sont réservées.
Art. 8 Capital de dotation
Le capital de dotation de la Fondation est de 100 000 F alloué par l'Etat de Genève.
Art. 9 Ressources financières de la Fondation
Les ressources de la Fondation sont constituées par les revenus des actifs cédés par la Banque cantonale de Genève et par les produits des réalisations, par les remboursements des frais de la Banque ainsi que des avances de l'Etat. La Fondation sera, en outre, financée par les prêts de la Banque cantonale de Genève ou de l'Etat de Genève ou de toute autre manière sur les marchés financiers, avec la garantie de l'Etat de Genève.
Art. 10 Evaluation des actifs transférés
Dès sa constitution, la Fondation fera évaluer par un organe de révision indépendant les risques et pertes potentielles sur chaque actif transféré.
Art. 11 Prise en charge par la Banque cantonale de Genève
1 La Banque cantonale de Genève rembourse à la Fondation sur une base annuelle :
2 La Banque cantonale de Genève effectuera les remboursements des montants mentionnés aux lettres a), b) et c) en fonction de son résultat annuel après :
Art. 12 Prise en charge par l'Etat de Genève
1 Les pertes sur la réalisation des actifs transférés sont prises en charge par l'Etat sous réserve des contributions de la Banque cantonale de Genève en fonction de sa situation financière.
2 Elles seront financées par la dissolution de la provision relative à la Banque cantonale de Genève et, au besoin, par un crédit supplémentaire visant à réalimenter la provision.
Art. 13 Avances à la Fondation
1 Le Conseil d'Etat est autorisé à faire des avances nécessaires au fonctionnement de la Fondation.
2 Ces avances sont remboursables après encaissement des montants versés par la Banque cantonale de Genève selon l'article 11 ci-dessus.
Art. 14 Garantie de l'Etat
1 Le Conseil d'Etat est autorisé par caution simple à garantir le remboursement de prêts d'un montant maximum de 5 milliards de francs en faveur de la Fondation.
2 Cette caution simple sera mentionnée au pied de bilan de l'Etat de Genève.
3 Cette garantie fait l'objet d'une rémunération par la Fondation selon des modalités à fixer par convention conclue entre le Conseil d'Etat, la Banque cantonale de Genève et la Fondation.
4 Un éventuel appel de la garantie sera financé par une demande de crédit extraordinaire soumise au Grand Conseil.
Art. 15 Organes de la Fondation
Les organes de la Fondation sont :
Art. 16 Conseil de Fondation
1 La Fondation est administrée par un Conseil de Fondation composé de cinq membres, nommés par le Conseil d'Etat, dont un sur proposition de la Banque cantonale de Genève et un autre sur proposition de la Ville de Genève. Les membres sont nommés pour une période de 4 ans et peuvent être reconduits dans leur fonction pour deux nouvelles périodes de quatre ans chacune au maximum. Ils doivent être au bénéfice de compétences professionnelles élevées, soit sur le plan juridique, soit dans les domaines financier ou immobilier.
2 Le Conseil d'Etat désigne également le président du Conseil de Fondation.
3 Les membres du Conseil de Fondation doivent être indépendants de la Banque cantonale de Genève.
4 Le Conseil de Fondation désigne un vice-président et un secrétaire. Ce dernier peut être pris en dehors des membres du Conseil de Fondation; dans ce cas, il siège aux séances du Conseil de Fondation avec voix consultative.
5 Les membres du Conseil de Fondation doivent s'abstenir de participer à toute délibération ou décision s'ils y ont un intérêt personnel. Il sont soumis, ainsi que le personnel de la Fondation, au secret de fonction et au devoir de confidentialité pour les faits soumis au secret bancaire.
6 Le membre du Conseil de Fondation qui, sans excuse valable, n'a pas assisté aux séances du Conseil de Fondation pendant six mois est réputé démissionnaire de plein droit.
7 Le Conseil d'Etat peut révoquer le mandat des membres du Conseil de Fondation en tout temps pour de justes motifs. Est notamment considéré comme juste motif le fait que, pendant la durée de ses fonctions, le membre du Conseil de Fondation s'est rendu coupable d'un acte grave, a manqué à ses devoirs ou est devenu incapable de bien gérer.
8 Il est pourvu au remplacement des membres du Conseil de Fondation décédés, démissionnaires ou révoqués avant la fin de leur mandat.
Art. 17 Rémunération et responsabilité
1 Les membres du Conseil de Fondation et le secrétaire sont rémunérés par des jetons de présence dont le montant est fixé par le Conseil d'Etat. Les membres du personnel de la Fondation sont engagés sur la base de contrats de droit privé dont les conditions sont approuvées par le Conseil d'Etat.
2 Les membres du Conseil de Fondation sont personnellement responsables envers la Fondation et subsidiairement envers l'Etat des dommages qu'ils causent en manquant intentionnellement ou par négligence à leurs devoirs.
Art. 18 Attributions du Conseil de Fondation
1 Le Conseil de Fondation est l'organe suprême de la Fondation. Il est investi des pouvoirs les plus étendus pour la gestion et l'administration de la Fondation.
2 Il édicte le Règlement de Fondation, soumis à l'approbation du Conseil d'Etat, ce règlement fixe notamment l'organisation interne du Conseil de Fondation.
3 Le Conseil de Fondation a les attributions suivantes :
4 Le Conseil de Fondation peut :
Art. 19 Réunions du Conseil de Fondation
1 Le Conseil de Fondation se réunit aussi souvent que les activités de la Fondation l'exigent, mais au moins une fois par mois. Il est convoqué par le président ou en cas d'empêchement par le vice-président.
2 Les décisions et élections se font à la majorité absolue des membres présents.
3 Le secrétaire du Conseil de Fondation dresse un procès-verbal de chaque réunion et décision du Conseil de Fondation. Ce procès-verbal sera certifié conforme par la signature du président et du secrétaire.
4 Le Conseil de Fondation est également habilité à prendre des décisions par correspondance et tout moyen de communication, sur proposition écrite au sujet de laquelle chaque membre aura donné son avis et pour autant que cette proposition ait recueilli l'adhésion de l'unanimité des membres.
Art. 20 Représentation et signature
Le Conseil de Fondation désigne les personnes autorisées à représenter et engager la Fondation vis-à-vis des tiers. Le mode de signature est collective à deux, dont au moins un membre du Conseil de Fondation.
Art. 21 Comptes
1 La Fondation est soumise à la loi sur la gestion financière et administrative de l'Etat. Elle tient une comptabilité adaptée à la nature et à l'étendue de ses activités. Elle adopte comme cadre de référence les normes comptables internationales IAS (International Accounts Standards). Le Conseil de Fondation veille à ce que les comptes annuels comprennent les bilans ainsi que les comptes de résultat et à ce que ceux-ci répondent aux exigences précitées.
2 Les comptes annuels, bilans et comptes de pertes et profits, accompagnés du rapport de gestion et du rapport de l'organe de révision, sont transmis, à l'exclusion de tout élément soumis au secret bancaire, au Conseil d'Etat dans les six mois qui suivent la clôture de chaque exercice pour être soumis à l'approbation du Grand Conseil.
3 L'exercice comptable prend fin le 31 décembre de chaque année.
Art. 22 Résultats
1 Le bénéfice net de la Fondation fait l'objet d'un report ou d'une attribution à une réserve générale.
2 La réserve générale peut être dissoute pour augmenter le capital de la Fondation avec l'approbation du Grand Conseil
3 La perte nette de la Fondation peut être portée en compte pendant une durée de temps limitée fixée par le Conseil d'Etat.
Art. 23 Organe de révision
1 Le Conseil de Fondation désigne chaque année pour contrôler les comptes un organe de révision indépendant et particulièrement qualifié, agréé par le Conseil d'Etat.
2 L'organe de révision soumet chaque année au Conseil de Fondation un rapport écrit qui est joint aux comptes annuels.
Art. 24 Commission de contrôle du Grand Conseil
1 Le Grand Conseil nomme en son sein une commission de contrôle de la Fondation formée de neuf membres.
2 La commission de contrôle a pour but :
3 La commission de contrôle donne son avis au Conseil de Fondation sur la nomination de la direction de la Fondation ainsi que sur le choix de l'organe de contrôle externe, son cahier des charges et son programme de travail.
4 La commission de contrôle peut également donner son avis sur les opérations de réalisation d'actifs que le Conseil de Fondation est tenu de porter à sa connaissance.
5 La commission de contrôle rédige un rapport annuel à l'attention du Grand Conseil.
Art. 25 Application de l'art. 80A de la constitution
Le Grand Conseil peut autoriser la vente de villas et d'appartements d'une valeur estimée à moins de 2 000 000 F par objet, devenus propriété de la Fondation, dans le cadre d'une loi portant sur plusieurs de ces biens immobiliers à la fois et indiquant le prix de vente minimum envisagé pour ceux-ci.
Art. 26 Exonération d'impôts
La Fondation est exonérée de tout impôt cantonal et communal sur le bénéfice, le capital et la liquidation, ainsi que de l'impôt immobilier complémentaire, de l'impôt sur les gains immobiliers, des droits d'enregistrement et de la taxe professionnelle communale.
Art. 27 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, du 7 octobre 1993.
Art. 28 Entrée en vigueur de la loi
1 La loi entre en vigueur le 25 mai 2000.
2 La garantie de l'Etat déploie ses effets rétroactivement à partir du 1er janvier 2000.
Art. 29 Clause conditionnelle
L'entrée en vigueur de la présente loi est conditionnée par l'adoption de la modification des statuts régissant la composition du capital social.
Art. 30 Clause d'urgence
Afin de respecter les exigences de la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne applicables à la Banque cantonale de Genève et de lui assurer immédiatement les moyens de procéder à l'augmentation requise de ses fonds propres et de poursuivre ses activités, la présente loi d'emprunt est déclarée urgente en vertu des art. 55 et 57 in fine de la constitution et ne peut pas faire l'objet d'un référendum.
Mme Micheline Calmy-Rey. Je demande que le point 94 de l'ordre du jour, projet de loi 8244, soit renvoyé en commission et j'annonce le retrait du projet de loi 8246 au point 95.
PL 8244
Ce projet est renvoyé à la commission de contrôle de gestion.
PL 8246
Le Grand Conseil prend acte du retrait de ce projet.
La séance est levée à 23 h 50.