République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 17 mars 2000 à 17h
54e législature - 3e année - 6e session - 14e séance -autres séances de la session
No 14/II
Vendredi 17 mars 2000,
nuit
La séance est ouverte à 20 h 30.
Assistent à la séance : Mmes et MM. Guy-Olivier Segond, président du Conseil d'Etat, Carlo Lamprecht, Gérard Ramseyer, Martine Brunschwig Graf, Micheline Calmy-Rey et Laurent Moutinot, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Robert Cramer, conseiller d'Etat, ainsi que Mme et MM. Juliette Buffat, René Ecuyer, Claude Haegi, René Koechlin et Charles Seydoux, députés.
3. Discussion et approbation de l'ordre du jour.
M. Christian Grobet(AdG). Je sais que vous avez espéré que nous pourrions reprendre le solde de notre ordre du jour après les points qui étaient prévus... Si tel est le cas, il serait souhaitable, pour des raisons financières et vu la lettre adressée par la Ville de Genève, que nous puissions voter la loi sur les agents de ville, ASM.
Le président. Monsieur Grobet, j'ai eu une bonne dose d'utopie en disant cela, mais il est vrai que cela n'empêche pas de pouvoir traiter des objets qui sont plus urgents que les autres... Nous en tiendrons compte.
4. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Néant.
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de demandes d'interpellations;
Néant.
e) de questions écrites.
Néant.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons comme prévu notre ordre du jour avec les quatre objets que nous avons souhaité traiter en priorité ce soir. Nous prenons tout d'abord, le projet de loi 8199, pour une subvention à la Croix-Rouge suisse en faveur des victimes des inondations en Afrique australe.
Une voix. C'est quel point ?
Le président. Ce point ne figure pas dans notre ordre du jour. Il a été déposé en urgence par le Conseil d'Etat, et le texte a été déposé sur vos pupitres.
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
1 Une subvention de 100 000 F est allouée à la Croix-Rouge suisse pour soutenir son action en faveur des victimes des inondations en Afrique australe.
2 Le Conseil d'Etat est autorisé à prélever cette somme sur la part du droit des pauvres attribuée à l'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
L'Afrique australe est dévastée. Le cyclone et les pluies torrentielles qui ravagent depuis quelques semaines cette partie du monde ont déjà fait d'innombrables victimes, plus particulièrement, au Mozambique. Les régions traversées par les fleuves Limpopo et Save dans le sud du pays connaissent une situation dramatique.
Les sans-abri se comptent par centaines de milliers, les récoltes sont perdues et les infrastructures détruites. En raison des inondations, l'évacuation des victimes et leur approvisionnement ne sont possibles que par hélicoptère, ce qui multiplie le coût des opérations de secours.
Les bénévoles de la Croix-Rouge interviennent sur tout le territoire touché. Il devient extrêmement urgent de distribuer des denrées alimentaires, de l'eau potable, des tentes et des couvertures aux rescapés. C'est pourquoi, la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, qui coordonne les actions d'aide, a lancé un appel afin de récolter 4,6 millions de francs qui lui permettraient d'assister 100 000 personnes pendant trois mois.
A ce jour, la Confédération a débloqué 2,02 millions de francs en vue de l'aide d'urgence. C'est encore loin du montant nécessaire.
La Croix-Rouge suisse s'est déjà engagée pour un montant de 300 000 F qui couvre, d'une part, l'achat de 300 tentes familiales pour des victimes du Mozambique et du Swaziland et, d'autre part, une partie des coûts occasionnés par le transport des marchandises ainsi que les frais entraînés par l'envoi sur place d'un expert en logistique.
Au bénéfice de ce qui précède et compte tenu de l'urgence de la situation, nous vous proposons, Mesdames et Messieurs les députés, d'accueillir favorablement le projet de loi et d'accepter d'allouer une subvention de 100 000 F à la Croix-Rouge suisse pour son action de soutien aux victimes des inondations en Afrique australe. Il sera rendu compte de l'utilisation de ces fonds dans le rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil concernant la politique régionale et européenne et la coopération au développement.
Préconsultation
M. Olivier Vaucher (L). Monsieur le président, je demande la discussion immédiate de cet objet.
Mise aux voix, la proposition de discussion immédiate est adoptée.
Premier débat
M. Carlo Lamprecht. Le 21 février dernier, un cyclone s'abattait sur l'Afrique australe et plus particulièrement sur le Mozambique, provoquant les pires inondations jamais vues depuis cinquante ans. Les victimes de ces intempéries catastrophiques qui ont dévasté la région ont besoin d'une aide urgente. Nous avons tous vu à la télévision ces images de rescapés tentant désespérément d'échapper aux crues et, aujourd'hui encore, alors que la décrue s'amorce, la situation reste extrêmement préoccupante. Outre les morts et les disparus difficiles à dénombrer, des centaines de milliers de sans-abri ont été contraints de se réfugier dans des terres boueuses et une épidémie de paludisme se propage, sans compter que les inondations ont gravement touché les campagnes en détruisant les récoltes. Bref, il faut des vivres et du matériel pour abriter la population qui doit être secourue par hélicoptère, ce qui augmente encore les coûts des opérations menées par les organisations humanitaires.
La Fédération des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge qui coordonnent des actions d'aide a lancé une récolte de fonds. Il lui faudrait 4,6 millions de francs pour pouvoir assister cent mille personnes pendant trois mois, ce qui est loin d'être suffisant face à l'ampleur du désastre.
Mesdames et Messieurs les députés, les besoins sont immenses, et le canton de Genève ne saurait rester indifférent à cette catastrophe, qui touche une fois de plus l'une des régions les plus pauvres du globe. C'est pourquoi, pour répondre à l'appel de la Croix-Rouge suisse, qui s'est déjà engagée à raison de 300 000 F pour acheter des tentes et couvrir les coûts de transport du matériel, le Conseil d'Etat propose au Grand Conseil de voter sans attendre une aide urgente de 100 000 F, en faveur des victimes du Mozambique et de l'Afrique australe.
M. Luc Gilly (AdG). Ecoutez, je suis très content de cette proposition, mais je pense que nous pourrions facilement doubler la somme, vu l'urgence, vu que les intempéries continuent et vu qu'il semble difficile de trouver du matériel héliporté. Je suis toutefois étonné du fait qu'on trouve toujours facilement le matériel nécessaire en cas de guerre et que ce soit si difficile pour faire face à des situations de détresse...
Les finances genevoises étant à la hausse, je propose donc formellement que la somme soit doublée. Merci.
Le président. Monsieur Gilly, veuillez s'il vous plaît déposer votre amendement, même si nous l'avons bien compris.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Article unique
Le président. M. Gilly nous présente un amendement qui consiste à modifier le montant de la subvention en la faisant passer de 100 000 F à 200 000 F. Je vous soumets cette proposition.
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article unique ainsi amendé est adopté.
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(8199)allouant une subvention à la Croix-Rouge suisse en faveur des victimes des inondations en Afrique australe
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
1 Une subvention de 200 000 F est allouée à la Croix-Rouge suisse pour soutenir son action en faveur des victimes des inondations en Afrique australe.
2 Le Conseil d'Etat est autorisé à prélever cette somme sur la part du droit des pauvres attribuée à l'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
La diminution des montants alloués à l'assistance et à l'hébergement des requérant-e-s ainsi qu'à leur encadrement, décidée simultanément par la Confédération et par Genève, provoque une réduction totale des prestations de l'ordre de 19.6 millions de francs. Cette somme représente, pour le canton, une baisse de 26% sur le montant global attribué à l'asile, quel que soit le nombre de demandeurs.
La décision de réduire une nouvelle fois les montants d'assistance aux requérants d'asile est non seulement inhumaine et révoltante, mais elle représente aussi une grave erreur politique.
En effet, les réfugiés demandeurs d'asile, qui ont dû quitter leur pays pour des raisons le plus souvent liées à la guerre ou à des persécutions, ont non seulement l'interdiction de travailler pendant la première année, mais de plus doivent vivre avec moins de la moitié du minimum vital reconnu aux résidents (suisses ou au bénéfice d'un permis B ou C). Ce n'est sûrement pas nécessaire d'expliquer comment ils peuvent s'en sortir pour s'habiller, se nourrir, payer les frais d'électricité et de téléphone avec Fr. 451.- par mois, même s'ils sont logés… Il ne leur reste plus que le choix entre se dégrader psychiquement et physiquement dans la solitude, traîner dans les rues et mendier, se livrer à des trafics louches, ou encore se trouver du travail au noir. Dans tous les cas de figure, notre démocratie est perdante, que ce soit en terme de sécurité publique ou en terme d'économie.
Mais la plus grave erreur politique réside ailleurs. Depuis des années déjà, les populistes de l'UDC gagnent du terrain avec des idées simplistes et mensongères qui dénoncent la classe politique comme pourrie et qui prônent l'enfermement culturel, basé sur un passé mythique, sur le chacun pour soi et en famille, sur l'armée comme rempart contre les dérives des autorités politiques, et surtout sur la désignation d'un bouc émissaire : l'étranger ; mais parmi l'étranger, le plus dangereux, assimilé au délinquant réel, supposé ou en puissance, c'est le réfugié. L'UDC n'a cessé d'avancer des exigences de plus en plus éloignées des droits de la personne, des conventions internationales et, c'est plus grave, de nos lois. A chaque fois, la classe politique dans son ensemble, droite comprise, s'est rebiffée en dénonçant ces exigences comme inacceptables parce que contraires à la dignité humaine, aux conventions signées par la Suisse et surtout contraires à la tradition humanitaire suisse. Et chaque fois, une année plus tard, les responsables politiques des partis bourgeois ont, sans état d'âme, repris ces initiatives à leur compte. La liste est longue de ces gages ignobles donnés à l'extrême droite : que ce soit les renvois musclés avec morts à l'appui, l'accord de renvoi passé avec le dictateur Milosevic, à la police duquel on a remis des centaines de Kosovars à la veille du nettoyage ethnique qui s'annonçait, les mesures de contraintes qui enferment dans nos cantons des personnes non délinquantes, non coupables et non condamnées, y compris des adolescents, simplement parce que l'on veut s'assurer de pouvoir les mettre à la porte, même si c'est dans un an et très aléatoire. Développement d'un droit d'exception, de zones de non droits pour la partie la plus fragile de notre population. Suppression des féries judiciaires, droit pourtant garanti à toute procédure administrative, pour ce qui touche au droit d'asile, limitation du droit au travail, diminution des prestations correspondant à la moitié du minimum vital reconnu à tous. Interdiction de conduire à Nidwald, de bénéficier d'une greffe de rein ailleurs, etc.
Ces concessions, les partis bourgeois, tétanisés par l'avancée de l'UDC, les ont parfois même fait entériner par le peuple, notamment lors du vote récent sur un nouveau durcissement de la politique d'asile. Quitte à se réveiller maintenant pour dire que l'on n'avait pas voulu ça. Tout le monde rivalise de mea culpa sur le passé, l'Etat, puis l'Eglise, pour n'avoir pas protesté contre des mesures similaires appliquées au cours de la dernière guerre, sans jamais faire le lien avec ce qui se passe aujourd'hui. C'est pourquoi nous devrions institutionnaliser le rapport Bergier, afin qu'il tisse un constat continu de notre politique face aux réfugiés qui, aujourd'hui comme hier, ne sont perçus qu'en terme de dangers pour notre pureté culturelle, de profiteurs et de délinquants potentiels.
Pourtant, nous savons bien que l'on ne lutte pas contre l'antisémitisme par des mesures antisémites. Le rapport Bergier nous le rappelle à chaque page. On ne lutte pas non plus contre l'UDC en appliquant sa politique. Ce type de politique ne fait, au contraire, que légitimer ses pratiques nauséabondes.
La banalisation du mal est déjà bien avancée. La population a fini par trouver supportable de marcher sur des abris de PC dans lesquels des familles entières, qui sortaient de l'enfer du nettoyage ethnique, ont dû vivre pendant des mois. Cela n'a même pas révolté outre mesure les services sociaux ou médicaux. Il va devenir difficile d'expliquer à la population, à nos enfants, en quoi le rapport Bergier devrait nous poser question. Il va devenir difficile demain de dire aux travailleurs sociaux qu'ils ne devraient pas trouver normal qu'un chômeur doive se contenter d'une aumône de Fr. 500.- par mois, après leur avoir appris qu'il était normal de faire vivre un requérant avec une telle somme.
Mesdames et Messieurs les députés, par le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat, notre parlement jouera pleinement son rôle, celui de relayer l'opinion de la population de ce canton qui se révolte contre le retour à de telles pratiques, qui en d'autres temps ont fait le lit du fascisme. Si tous les Grands Conseils et Conseils Municipaux de ce pays se prononçaient à leur tour, l'autre Suisse, pas celle des Blocher, pas celle des politiciens bourgeois qui tremblent pour leur siège, mais celle de ceux qui ont honte de ce qui s'est déjà passé et de ce qui se passe encore, cette autre Suisse pourrait permettre d'imaginer autre chose que la négation de tout droit aux pauvres, que leur refoulement vers le danger ou la misère.
Débat
Mme Jeannine de Haller (AdG). Mesdames et Messieurs les députés, nous vous proposons cette motion dans l'urgence, parce que suite aux diminutions drastiques des subsides fédéraux - depuis le 1er mars - les réfugiés demandeurs d'asile ne reçoivent plus suffisamment d'argent pour pouvoir se nourrir décemment.
Vous avez en première page de la motion un tableau qui vous donne les barèmes avant et après le 1er mars pour les requérants qui ont déjà séjourné un an à Genève. A titre de comparaison, la troisième colonne vous montre le barème d'assistance pour les résidents, soit les Suisses et les personnes au bénéfice d'un permis B ou C. Je ne compte pas les frais de logement et de santé qui sont pris en charge pour tous : requérants et résidents.
Le requérant adulte qui vit seul prend en charge, avec les 503,50 F qui lui sont alloués depuis le début de ce mois - 697,50 F lui étaient alloués jusqu'au 1er mars - l'abonnement des Transports publics genevois qui coûte 52,50 par mois. Il ne lui reste donc aujourd'hui déjà plus que 451 F pour vivre chaque mois. Avec ces 451 F, il va devoir assumer tous ses frais de subsistance, d'habillement, d'électricité, de téléphone, d'entretien de son logement, de lessive, d'hygiène, etc. Je ne parle bien entendu pas de ses loisirs ni de son argent de poche. Pourquoi diable en aurait-il besoin ?
Le résident adulte qui vit seul - dont le barème a été calculé en fonction de ce que l'on appelle le minimum vital - touche 1091 F par mois, transports et téléphone non compris... C'est-à-dire que l'on reconnaît que ces 1091 F sont déjà à ce point limite que l'on octroie au résident, en plus de cette somme, l'argent nécessaire à ses frais de transports et de téléphone, pour que la personne ait un minimum de vie décente et la possibilité de s'intégrer à notre société. 1091 F, ce n'est déjà pas beaucoup... C'est officiellement le minimum vital.
Et 451 F, c'est quoi, alors ? Non seulement Berne diminue les montants d'assistance et d'hébergement - ce qui provoque la baisse des barèmes dont je viens de parler - mais, en plus, le Conseil fédéral réduit les forfaits d'encadrement des requérants. Non seulement Berne diminue tous ces forfaits mais, en plus, Genève décide de ne plus engager de fonds cantonaux dans l'accueil des réfugiés. En même temps, simultanément, la réduction totale des prestations se monte à près de 20 millions, soit une diminution de 26% du montant attribué à l'asile, et cela, quel que soit le nombre de personnes qui arrivent à Genève pour demander l'asile.
La décision de réduire encore une nouvelle fois les montants d'assistance aux requérants est particulièrement inhumaine et révoltante. En effet, ces personnes, déjà fragilisées par des traumatismes dus à la guerre ou à la torture, par le déracinement, l'éclatement de leur famille, l'isolement, l'inquiétude pour le sort des proches restés au pays, l'incertitude face à l'avenir, n'ont plus depuis début mars de quoi se nourrir décemment. Par manque d'encadrement et de soutien, elles risquent en outre de subir de graves répercussions sur leur état de santé, tant physique que psychique.
Mesdames et Messieurs les députés, je crois que le temps est venu de décider quelle politique d'accueil nous voulons appliquer à Genève : celle de l'UDC, qui prône des idées simplistes et mensongères et désigne un bouc émissaire : l'étranger et en particulier le réfugié, ou une politique d'ouverture, digne du pays d'Henri Dunant et de la Genève humanitaire.
C'est pourquoi, nous invitons le Conseil d'Etat à renoncer à la suppression de la subvention cantonale, à demander à Berne le rétablissement des forfaits d'assistance et d'hébergement, et nous lui demandons de renoncer à baisser les montants dévolus à l'encadrement des requérants et de compenser intégralement ces montants forfaitaires au cas où Berne ne répondrait pas favorablement à sa demande. (Applaudissements de la gauche.)
M. Bernard Annen (L). S'il est un sujet délicat c'est bien celui de l'aide aux requérants ! La démonstration que le monopole du coeur n'appartient pas seulement à une frange de ce Grand Conseil, si elle devait être faite, a été faite tout à l'heure lorsque nous avons répondu à la proposition de notre collègue Gilly.
C'est vrai, Madame, que le problème que vous évoquez est un problème réel. Mais il est vrai également - et vous l'avez souligné - qu'un certain nombre d'autres personnes avancent des faits sans apporter aucune preuve, propageant ainsi de fausses idées dans la population. Si votre motion a une vertu, c'est de pouvoir enfin démontrer la situation exacte. En effet, si nous renvoyons purement et simplement cette motion au Conseil d'Etat, cela ne sera pas suffisant, de mon point de vue, pour que nous ayons une idée exacte de la réalité, qui soit admise par l'ensemble de ce parlement.
C'est la raison pour laquelle, je vous demande d'accepter le renvoi en commission de cette motion, de manière que nous ayons un rapport clair et net sur ce sujet. Cela évitera les mauvaises interprétations qui sont faites, selon lesquelles les réfugiés, les requérants, etc., reçoivent plus d'argent que nos personnes âgées au bénéfice de l'AVS.
Il me semble donc nécessaire d'éclaircir la situation, et je vous remercie d'avoir fait cette proposition. Un rapport complet et concret nous donnera la possibilité de connaître enfin la situation exacte.
Le président. Monsieur le député, voulez-vous préciser à quelle commission vous souhaiteriez que cet objet soit renvoyé ?
M. Bernard Annen. A la commission sociale, je pense !
M. Christian Brunier (S). Je veux simplement réagir à votre intervention, Monsieur Annen. Vous êtes membre de la commission des finances, et j'espère que vous vous en rappelez... Alors, ou vous avez des troubles de la mémoire ou vous êtes vraiment de mauvaise foi, comme vous l'êtes régulièrement !
Dans le rapport du budget 2000 figurent tous les chiffres. M. Segond nous a donné tous les chiffres qui démontrent clairement que les requérants d'asile reçoivent beaucoup moins que les personnes âgées de Genève. M. Segond a joué la transparence et, je le répète, il nous a donné tous les chiffres en détail et avec toutes les explications nécessaires dans le rapport sur le DASS, que j'ai moi-même écrit. Monsieur Annen, vous êtes donc hyper informé, et M. Segond pourra le confirmer tout à l'heure.
Aujourd'hui, derrière cette pseudo non-information à laquelle vous essayez de nous faire croire, Monsieur Annen, vous développez une forme de xénophobie... (Exclamations.) Cela n'est pas acceptable, car vous avez eu toutes les données et que nous avons largement discuté en commission des finances ! Le débat d'aujourd'hui tourne à la démagogie, ce qui est regrettable, car le sujet est éminemment douloureux et qu'il faut garder une certaine éthique. Je regrette votre attitude démagogique et de fermeture, Monsieur Annen !
M. Bernard Annen (L). Xénophobe, démagogique : si c'est la définition que vous en donnez, Monsieur Brunier, je l'accepte très volontiers, car elle vient de vous... Alors, ce n'est pas bien grave !
Cela étant, Monsieur Brunier, ce que vous dites n'est pas faux, mais je n'ai pas parlé pour moi, Monsieur Brunier, j'ai parlé pour le grand public, et vous le savez très bien ! Si vous voulez me faire un procès d'intention, faites-le ! Monsieur Brunier ! Vous êtes en train de faire le nid de l'UDC, et vous en porterez l'entière responsabilité ! (Exclamations.)
En ce qui me concerne, j'ai essayé de faire une proposition honnête. Mais je vais vous dire une chose, Monsieur Brunier, si vous la refusez et que la motion passe au vote, je la voterai. Et si c'est ce que vous voulez m'entendre dire, je le dis ! Alors, vos procès d'intention je m'assieds dessus !
Mme Jeannine de Haller (AdG). Deux mots seulement.
Monsieur Annen, votre idée d'avoir une large discussion et beaucoup d'informations sur ce sujet est très bonne. Par contre, je pense qu'il est extrêmement urgent de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat, vu les conditions de vie des réfugiés et des requérants à Genève depuis le 1er mars.
M. Christian Brunier (S). Je me réjouis, Monsieur Annen, que vous votiez cette motion.
A mon avis le renvoi en commission ne fera pas avancer les choses : il fera perdre du temps à tout le monde. M. Segond connaît très bien les chiffres, aussi je lui demande de nous les communiquer, ce qui permettra, comme vous le voulez, Monsieur Annen, de communiquer les chiffres à l'ensemble de la population, ce qui est une bonne chose. Mais, je le répète, M. Segond est en mesure de répondre ce soir, et il n'est vraiment pas utile de renvoyer ce projet en commission.
M. Guy-Olivier Segond, président du Conseil d'Etat. Il y a, dans les préoccupations des motionnaires, deux problèmes qui, s'ils touchent les requérants d'asile qui sont accueillis dans notre canton, sont néanmoins d'ordre différent.
Le premier problème est le barème d'assistance financière aux requérants d'asile qui est défini par Berne et qui a été réduit au mois d'octobre. Nous devons, à partir du 1er mars, en tirer les conséquences : ce sont des fonds fédéraux. Nous agissons au nom et pour le compte de la Confédération. Nous devons donc adapter les barèmes 1999 aux barèmes 2000, tels qu'ils ont été décidés par la Confédération en octobre 1999. Voilà pour les barèmes d'assistance.
Le deuxième problème est spécifiquement cantonal. L'organisation de l'accueil et de l'hébergement des requérants d'asile sur le territoire du canton de Genève se caractérise - vous le savez - par un dispositif en deux temps : les douze premiers mois, les requérants d'asile sont placés sous la houlette de l'AGECAS et, à partir du treizième mois, ils sont placés sous la houlette de l'Hospice général.
A l'origine, lorsque ce dispositif a été mis en place, il avait une logique : on pensait que les requérants d'asile obtiendraient une décision définitive de l'autorité fédérale au plus tard le douzième mois. A ce moment, il n'y avait, en bonne logique, que deux possibilités : ou ils obtenaient le statut de réfugiés statutaires, et alors ils entraient dans le dispositif ordinaire de l'Hospice général, ou ils ne l'obtenaient pas, et ils devaient quitter le territoire suisse.
Cette idée de double accueil - l'AGECAS les douze premiers mois et l'Hospice général dès le treizième mois - avait une logique. Le seul défaut, c'est que ce système n'a jamais fonctionné : les décisions n'ont jamais été rendues dans les douze premiers mois... !
C'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat a demandé en septembre de l'année passée aux deux directeurs de l'AGECAS et de l'Hospice général d'étudier une nouvelle forme d'accueil et d'hébergement sur le territoire du canton, avec avantages et inconvénients; - avec économies possibles et avec dépenses supplémentaires. C'est dans ce cadre-là que s'est posée la question de la subvention cantonale complémentaire de 6,9 millions, que les membres de la commission des finances connaissent bien : elle se présente à chaque exercice sous forme d'une avance du département des finances à l'Hospice général, qui est ensuite régularisée au moment des comptes par une augmentation de la subvention versée à l'Hospice général.
Il y a donc deux sujets différents dans les préoccupations de la motion : il y a, d'une part, la question des barèmes d'assistance, qui dépendent de la Confédération et qui doivent être appliqués à Genève comme sur le territoire des vingt-cinq autres cantons, et il y a, d'autre part, la question spécifiquement genevoise de l'organisation de l'accueil et de l'hébergement.
La question de l'organisation de l'accueil et de l'hébergement a fait l'objet d'un rapport qui a été mis en consultation auprès des deux institutions concernées, auprès des syndicats et des commissions du personnel des deux institutions concernées, et, enfin, auprès de l'ensemble des organisations associatives, réunies sous la houlette de «Coordination asile», qui ont rendu leurs observations écrites et orales au Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat prendra donc bientôt les décisions nécessaires sur la base de l'ensemble des éléments d'appréciation.
Un dernier mot pour confirmer, à la demande de M. Brunier - mais je crois que vous le savez tous - qu'il n'y a pas de commune mesure entre les prestations financières - celles de 1999 ou celles de 2000 - versées aux requérants d'asile et les prestations AVS versées aux personnes âgées.
Pour un requérant d'asile, loyer payé et cotisation d'assurance-maladie payée, la prestation est inférieure à 800 F, alors qu'un rentier AVS ou un rentier AI, bénéficiaire des prestations de l'OCPA, toujours loyer payé et cotisation d'assurance-maladie payée, touche à peu près 2 100 F. La somme versée passe presque du simple au triple.
Le président. Je mets aux voix la proposition de renvoyer cette proposition de motion à la commission des affaires sociales.
Mise aux voix, cette proposition est rejetée.
Le président. Je mets maintenant aux voix la proposition de motion et son renvoi au Conseil d'Etat.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
Motion(1331)pour des conditions d'accueil dignes à l'égard des réfugiés demandeurs d'asile
Le président. Nous passons maintenant au point 67 de notre ordre du jour comme nous l'avons décidé.
1.
Arrêté du Conseil d'Etat constatant l'aboutissement de l'initiative, publié dans la Feuille d'avis officielle le
25 juin 1999
2.
Débat de préconsultation sur la base du rapport du Conseil d'Etat au sujet de la validité et de la prise en considération de l'initiative, au plus tard le
25 septembre 1999
3.
Décision du Grand Conseil au sujet de la validité de l'initiative sur la base du rapport de la commission législative, au plus tard le
25 mars 2000
4.
Sur la base du rapport de la commission désignée à cette fin, décision du Grand Conseil sur la prise en considération de l'initiative et sur l'opposition éventuelle d'un contreprojet, au plus tard le
25 décembre 2000
5
En cas d'opposition d'un contreprojet, adoption par le Grand Conseil du contreprojet, au plus tard le
25 décembre 2001
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
La Commission législative a examiné la validité de l'initiative114 « Pour le libre choix du mode de transport », tant sur le plan formel que matériel.
Certains députés ont fait valoir qu'à leur avis l'alinéa 3 de l'article 160B proposé dans l'initiative 114, du moins les paragraphes a) et b), était contraire au droit fédéral, dans la mesure où leur rédaction extrêmement contraignante empêchait concrètement des mesures de restriction du trafic que l'Etat serait tenu d'ordonner en vertu de la loi fédérale sur la protection de l'environnement et de ses ordonnances d'application, soit l'ordonnance sur la protection de l'air (OPAIR) et l'ordonnance sur la protection contre le bruit (OPB).
En effet, l'OPAIR contraint les autorités cantonales à prendre des mesures contre les immissions excessives en vertu des articles 31 et suivants OPAIR, sous forme d'adoption d'un plan de mesures. L'article 32 OPAIR fixe le contenu du plan de mesures. Son alinéa 1, lettre c), impose l'adoption de « mesures propres à réduire les immissions excessives ou à y remédier ». L'alinéa 2, lettre b), précise que par mesure, au sens de l'alinéa 1, lettre c) précité, il faut entendre...« pour les installations destinées aux transports, des mesures touchant la construction ou l'exploitation de ces infrastructures ou visant à canaliser ou à restreindre le trafic ».
Il est notoire que l'air est fortement pollué dans notre canton et que le trafic automobile est l'une des causes principales de cette pollution. Il en résulte que pour répondre aux normes OPAIR, des mesures de réduction de la circulation automobile doivent être prises. Or, le texte de l'alinéa 3 de l'article 160B de l'initiative est à ce point contraignant qu'il vise à empêcher toute mesure de réduction de trafic, même provisoire (par exemple sous forme de restriction de l'usage des automobiles en période de pollution atmosphérique) ou très modeste (par exemple diminution du temps de passage à des carrefours munis de feux de signalisation). En effet, le texte de l'article 160B, alinéa 3, de l'initiative prévoit qu'aucune mesure ne pourra être mise en place avant que « des mesures de substitution et d'accompagnement adéquates soient mises en place pour améliorer la fluidité du trafic ». Le paragraphe b) va jusqu'à prévoir que toute réduction du trafic pendulaire vers le centre ville, qui est l'une des causes principales de la pollution atmosphérique, et toute canalisation du trafic de transit à l'extérieur du centre ville « ne peuvent être décidées que si des mesures de substitution et d'accompagnement sont préalablement mises en place, notamment par la réalisation d'ouvrages routiers ».
Il en résulte que le plan de mesures OPAIR, que le canton est tenu d'adopter pour contribuer à l'assainissement de l'air, sera inapplicable si les mesures de substitution prévues à l'alinéa 3 précité, et qui visent à maintenir le statu quo en matière de trafic automobile doivent être mises en place avant toute mesure de réduction du trafic.
Cette exigence est manifestement contraire aux exigences de l'OPAIR, comme à celles de l'article 19, alinéa 2, lettre d) de l'ordonnance sur la protection contre le bruit (OPB). Elle vise, en effet, à empêcher toute mesure de réduction du trafic avant la mise en place de mesures de substitution. Les mesures d'assainissement peuvent ainsi être bloquées, si les mesures de substitution, notamment la construction de nouvelles routes, ne sont pas réalisées, par exemple parce qu'elles s'avèrent irréalisables, ou parce que les communes concernées, tout particulièrement la Ville de Genève qui est maître de son réseau routier, s'y refusent ou parce qu'une mesure de substitution serait annulée sur recours par une autorité judiciaire du fait qu'elle serait contraire aux exigences OPAIR et OPB.
Pire, les mesures de substitution doivent être mises en place avant celles destinées à réduire le trafic automobile et les mesures de réduction du trafic pendulaire vers le centre ville ne pourront pas être décidées avant que les mesures de substitution n'aient été mises en place. Or, ces mesures de substitution aggraveront la situation, sans que l'on soit certain que les mesures de réduction puissent être concrétisées !
Les exigences des paragraphes a) et b) de l'alinéa 3 du projet de l'article 160 B sont à ce point impératives et restrictives qu'il n'y a aucune possibilité de les interpréter d'une manière permettant de respecter les exigences du droit fédéral rappelées plus haut. Cela est d'autant plus gênant qu'il s'agit de normes constitutionnelles, hiérarchiquement supérieures aux lois d'application, qui ne peuvent donc pas y déroger.
En ce qui concerne l'OPB, il y a lieu de souligner que le cadastre du bruit du canton de Genève, que les cantons ont l'obligation d'établir en vertu de l'article 37 OPB, a recensé environ 300 km du réseau routier cantonal, - dont la plus grande partie est située en ville de Genève -, dépassant les valeurs limites d'immission de bruit extérieur provenant de la circulation routière fixées dans l'annexe 3 de l'OPB, dont 30 km environ dépassent même la valeur d'alarme.
Des mesures d'assainissement doivent donc être prises impérativement. Le remplacement, particulièrement onéreux pour les collectivités publiques, du revêtement des voies de circulation pour ramener les immissions à des valeurs inférieures aux valeurs limites fixées par l'OPB ne permettra pas, dans certains cas, de ramener le bruit en dessous des valeurs limites. Il n'y aura donc aucun autre moyen pour répondre aux exigences du droit fédéral, que de prendre des mesures réduisant le trafic routier et plus particulièrement celui généré par les pendulaires et le trafic de transit.
Il est évident que la réduction du trafic routier, notamment en ce qui concerne la protection de l'air, devra intervenir de manière globale, de sorte que les mesures de substitution exigées par l'article 160 B, alinéa 3, pour chaque mesure de réduction du trafic routier ou de maintien de sa fluidité (ce qui signifie le maintien du même volume de trafic en le faisant passer ailleurs) ne pourra être mise en place sans violer le droit fédéral, ce d'autant plus que l'adoption de mesures de substitution préalablement à toute réduction du trafic aggravera encore la situation illégale dans laquelle se trouve déjà notre canton.
Le but de l'initiative est clair et il est confirmé par son exposé des motifs. Il s'agit d'empêcher toute réduction du trafic automobile et même de le développer en garantissant le libre choix du mode de transport. C'est la raison pour laquelle un certain nombre de députés ont considéré que l'alinéa 3 de l'article 160B proposé qui définit les moyens de concrétiser l'objectif du texte constitutionnel proposé viole le droit fédéral, y compris le paragraphe c) qui demande que « le stationnement des véhicules automobiles (soit) organisé de manière à répondre aux besoins propres des divers types d'usagers ».
En effet, pour répondre aux besoins des divers types d'usagers comme le demande cette disposition, il faudrait augmenter de façon vertigineuse le nombre de places de parking au centre ville, comme le réclament les organisations qui ont lancé l'initiative 114, ce qui aurait pour effet d'attirer encore plus de voitures automobiles au centre-ville. La politique du stationnement et la limitation de ce dernier est l'un des éléments-clé pour une gestion du trafic automobile permettant de réduire les nuisances qu'il provoque. Créer, par exemple, des places de stationnement supplémentaires pour satisfaire les besoins du type d'usager que constituent les pendulaires, entraînerait une très forte augmentation du trafic automobile et des nuisances qui doivent impérativement être diminuées. Cet afflux de voitures supplémentaires annihilerait tous les efforts déployés pour favoriser le transfert modal en incitant les pendulaires à utiliser les transports publics précisément dans le but de réduire le trafic automobile et les nuisances générées par ce dernier et ne permettrait pas de répondre aux exigences OPAIR et OPB.
D'autres députés, tout en reconnaissant que la lucarne qui existe pour légiférer dans le respect du droit fédéral est extrêmement étroite, ont considéré qu'il est possible, malgré la rédaction très contraignante du projet d'article 160B, d'interpréter le texte d'une manière compatible avec le droit fédéral. Ils considèrent que la recevabilité de l'initiative 114 doit, en conséquence, être admise.
Mme Christine Sayegh, dans un avis de droit très bien étayé et aimablement produit à l'attention de la Commission législative, a estimé dans ses conclusions « A la lecture de l'article 160B, al. 1, qu'il est proposé d'introduire dans la Constitution genevoise, il est bien précisé que les réseaux routiers des communes et des cantons sont conçus et organisés dans les limites du droit fédéral ; l'alinéa 2 rappelle également les limites du droit fédéral et l'alinéa 3 fait référence à l'alinéa 2. Toutefois la compétence cantonale est limitée à des mesures tendant exclusivement à la modération du trafic. Dans l'hypothèse où les mesures de substitution qui seraient prises en application de l'alinéa 3 a) et b) avaient pour but de faire obstacle à une réduction du trafic voire l'interdisaient, il y aurait contradiction avec le droit supérieur. Il s'agit donc d'une question d'application qui pourrait être contestée par voie de recours le cas échéant ».
Votes de la commission
Les points de vue étant assez tranchés, le président mit au vote la question de la recevabilité de l'initiative. Sur les neuf membres de la commission, quatre (2 L, 1 DC, 1 R) ont voté en faveur de la recevabilité et quatre autres (2 AdG, 1 S, 1 Ve) ont voté contre la recevabilité, un député socialiste s'abstenant. L'égalité des voix entraînant, selon le règlement du Grand Conseil, le rejet de la proposition, la recevabilité de l'initiative a été refusée.
Le président de la commission a alors relevé que le résultat du vote aurait été inverse si la question posée avait portée sur l'irrecevabilité de l'initiative. Certains députés ont estimé qu'il aurait été plus judicieux de voter d'abord sur les articles litigieux et ensuite sur la recevabilité.
Afin d'y voir plus clair, la commission a pris connaissance des articles 64 et suivants de la Constitution relatifs à l'exercice du droit d'initiative et, plus particulièrement, de l'article 66 relatif à l'invalidation d'une initiative populaire.
Cet article dispose, en son alinéa 4, que le « Grand Conseil déclare nulle l'initiative dont une partie est manifestement non conforme au droit ». La commission aurait dû se prononcer sur l'invalidation de l'initiative et non sur sa recevabilité, selon le président. Les membres de la commission n'ont toutefois pas partagé cette opinion, en faisant valoir que le rapport du Conseil d'Etat, dont la commission avait été saisie, porte sur la recevabilité de l'initiative.
Le président a alors relevé que l'alinéa 3 de l'article 66 de la Constitution prévoit que le Grand Conseil déclare partiellement nulle l'initiative si la partie ou les parties de celle-ci qui subsistent sont en elles-mêmes valides. Il en est résulté un second vote sur la question de savoir si l'initiative devait être considérée comme partiellement valable moyennant l'annulation uniquement de l'alinéa 3 de son article 160B.
Les partisans de l'initiative ayant déclaré que, dans cette hypothèse, ils considéraient que l'initiative serait vidée de toute substance, deux libéraux, un PDC et un radical ont voté contre la recevabilité partielle de l'initiative. Seuls trois députés (2 AdG, 1 Ve) ont voté en faveur de celle-ci, les députés socialistes s'abstenant.
Au vu de ce qui précède et de l'incertitude de la procédure à suivre du fait que le rapport du Conseil d'Etat n'indique pas la question sur laquelle le Grand Conseil doit se prononcer, il serait souhaitable que le Bureau du Grand Conseil examine la manière dont le Grand Conseil doit prendre sa décision.
J'estime pour ma part, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il serait judicieux que le Grand Conseil se prononce d'abord sur la question de la non conformité au droit fédéral de l'alinéa 3 de l'article 160B de l'initiative et, ensuite, selon le résultat du vote, sur la recevabilité ou l'invalidation partielle ou totale de l'initiative.
Etant entendu que le présent rapport de majorité, pour les raisons de procédures énoncées ci-dessus, conclut à l'irrecevabilité de l'initiative 114.
ANNEXE
Le Groupement Transports et Economie a lancé l'initiative populaire intitulée "; Pour le libre choix du mode de transport ", qui a abouti.
Le tableau ci-dessous indique les dates ultimes auxquelles cette initiative doit être traitée aux différents stades du processus d'examen des initiatives prévus par la loi.
1.
Arrêté du Conseil d'Etat constatant l'aboutissement de l'initiative, publié dans la Feuille d'avis officielle le
25 juin 1999
2.
Débat de préconsultation sur la base du rapport du Conseil d'Etat au sujet de la validité et de la prise en considération de l'initiative, au plus tard le
25 septembre 1999
3.
Décision du Grand Conseil au sujet de la validité de l'initiative sur la base du rapport de la commission législative, au plus tard le
25 mars 2000
4.
Sur la base du rapport de la commission désignée à cette fin, décision du Grand Conseil sur la prise en considération de l'initiative et sur l'opposition éventuelle d'un contreprojet, au plus tard le
25 décembre 2000
5
En cas d'opposition d'un contreprojet, adoption par le Grand Conseil du contreprojet, au plus tard le
25 décembre 2001
Initiative populairePour le libre choix du mode de transport
Les citoyens et citoyennes soussignés, électeurs et électrices dans la République et canton de Genève, demandent, en vertu des articles 64 et 65A de la constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, et des articles 86 à 93 de la loi sur l'exercice des droits politiques, du 15 octobre 1982, que la constitution de la République et canton de Genève (A 2 00) soit modifiée comme suit :
Article unique
La constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est modifiée comme suit:
Art. 160A Choix du mode de transport (nouveau, l'art. 160A actuel devenant l'art. 160C)
La liberté individuelle du choix du mode de transport est garantie.
Art. 160B Principes (nouveau, l'art. 160B actuel devenant l'art. 160D du titre XC)
1 Le réseau routier des communes et du canton est conçu et organisé, dans les limites du droit fédéral, de manière à assurer un équilibre entre les divers modes de transport. Il doit répondre aux besoins de mobilité de la population, des entreprises et des visiteurs par une bonne accessibilité de l'agglomération urbaine et de l'ensemble du territoire cantonal.
2 Le réseau routier des communes et du canton est conçu et organisé, dans les limites du droit fédéral, par les autorités cantonales de manière à assurer la meilleure fluidité possible du trafic privé, ainsi qu'une accessibilité optimale au centre ville en complémentarité avec les transports publics.
3 L'objectif énoncé à l'alinéa 2 est réalisé de la manière suivante :
EXPOSÉ DES MOTIFS
La conception globale de la circulation à Genève (C2000) ainsi que la nouvelle version encore en discussion (C2005) ont pour but de rendre encore plus difficile le trafic privé et cela dans des proportions inacceptables et contraires au principe de complémentarité voté par le peuple en 1975. Pour preuve la diminution du volume du trafic qui est prévue (30 à 50 %) par le biais de mesures contraignantes (rétrécissement de la chaussée, suppression de voies de circulation, etc.).
Ces mesures ont clairement pour but de porter atteinte à la liberté de choix du mode de transport et de décourager les utilisateurs d'un véhicule privé, afin de les contraindre à se rabattre sur les transports publics ! De nombreuses personnes ont un besoin impératif d'un véhicule privé dans le cadre de leurs activités sociales et professionnelles, lesquelles se trouveraient considérablement entravées. Dans de nombreux cas, la voiture représente le mode de transport le plus rapide et le plus approprié, dans la mesure où les transports publics ne couvrent de loin pas tous les besoins.
Dans l'absence d'un cadre constitutionnel fixant les principes à respecter, les conceptions globales de circulation (C2000 et C2005) reflètent trop d'options technocratiques et de pressions partisanes. Elles pourraient aller largement au-delà de l'objectif déclaré. En voulant supprimer, sans mesures d'accompagnement et de substitution appropriées, les trafics pendulaires et de transit, par exemple par la simple création artificielle de discontinuités d'axes et de poches étanches, les mesures envisagées pénaliseront lourdement l'accès même à certains secteurs, notamment en ville, ainsi que la circulation des véhicules privés et professionnels à l'intérieur de certains quartiers.
C'est pourquoi l'initiative vise à donner un cadre constitutionnel - à préciser ultérieurement par la loi - qui permettra notamment d'organiser la hiérarchie du réseau des routes de manière claire et précise, et ceci dans le respect des institutions démocratiques. La garantie du libre choix du mode de transport assurera l'accessibilité à l'ensemble du territoire, à l'agglomération urbaine comme à la campagne, par un équilibre entre les différents modes de transport. On réconciliera ainsi les besoins de mobilité avec les contraintes de la gestion du trafic et de la préservation du cadre de vie.
RAPPORT DE LA MINORITÉ
Les 9 membres de la Commission législative n'ayant pas réussi à se départager (4 contre 4 et 1 abstention), le préavis de la commission sur la recevabilité de l'initiative 114 est donc négatif. Par conséquent, la minorité tient à faire valoir son point de vue.
Conformément au principe de la force dérogatoire du doit fédéral, les initiatives cantonales doivent respecter l'ensemble du droit fédéral
Voir par exemple, ATF 117/1991 Ia 147, Verein « Kantonales Komitee gegen Sondermülldeponien im Kanton Basel-Landschaft »
En principe, pour qu'une initiative ne soit pas conforme au droit supérieur, il est nécessaire que son objectif et les moyens pour l'atteindre violent ce droit
ATF 109/1983 Ia 134/141, Bieler und Mitbeteiligte
De plus, en toute hypothèse, l'initiative doit être interprétée de manière conforme à la Constitution.
Le Tribunal fédéral a confirmé ces principes dans son récent arrêt concernant l'initiative 109, « Genève République de Paix ». Il a jugé que :
« De manière générale, une initiative populaire cantonale ne doit rien contenir qui viole le droit supérieur, qu'il soit cantonal, intercantonal, fédéral ou international (cf. ATF 124 I 107 consid. 5b p. 118/119).
L'autorité appelée à statuer sur la validité matérielle d'une initiative doit en interpréter les termes dans le sens le plus favorable aux initiants. Lorsque, à l'aide des méthodes reconnues, le texte d'une initiative se prête à une interprétation la faisant apparaître comme conforme au droit supérieur, elle doit être déclarée valable et être soumise au peuple.
L'interprétation conforme doit permettre d'éviter autant que possible les déclarations d'invalidité. Lorsque seule une partie de l'initiative apparaît inadmissible, la partie restante peut subsister comme telle, pour autant qu'elle forme un tout cohérent et qu'elle puisse encore correspondre à la volonté des initiants (ATF 124 I 107 consid. 5b p. 117, 121 I 334 consid. 2a p.338 et la jurisprudence citée)
ATF 125/1999 I 227/231-232, G
En l'espèce, l'article 160B, alinéa 3, de l'initiative propose un catalogue de moyens destinés à mettre en oeuvre le but défini à l'article 160B, alinéa 2, soit une meilleure fluidité du trafic privé ainsi qu'une accessibilité maximale au centre ville en complémentarité avec les transports publics. Ces moyens doivent être interprétés en relation avec le but qu'ils permettent d'atteindre.
Dans ce sens, l'article 160B, alinéa 3, se réfère expressément à l'alinéa 2 : « l'objectif énoncé à l'alinéa 2 est réalisé de la manière suivante… ». Il existe donc un lien intrinsèque clair entre ces deux dispositions.
Or, l'article 160B, alinéa 2, mentionne expressément le nécessaire respect du droit fédéral en utilisant les termes « dans les limites du droit fédéral ». La référence au respect du droit fédéral démontre que les moyens mis en oeuvre pour atteindre cet objectif doivent être conformes au droit fédéral. Il s'agit d'un argument fort en faveur de la conformité de l'article 160B, alinéa 3, au droit supérieur, comme l'a admis le Tribunal fédéral dans son arrêt concernant l'initiative 109, même s'il n'est pas suffisant
ATF 125/1999 I 227/232, G
En premier lieu, l'article 160B, alinéa 3, litt. a, prévoit la mise en place prioritaire de mesures de substitution ou d'accompagnement adéquates pour assurer la fluidité du trafic avant l'adoption de mesures restrictives pour le trafic privé.
Cette norme n'exclut pas toute mesure restrictive. Elle se limite à imposer aux autorités un examen de toutes les solutions possibles puis, conformément au principe de la proportionnalité, de n'adopter des dispositions restrictives que si d'autres mesures sont exclues.
En conséquence, cette disposition n'entrave pas l'application de l'OPB ou de l'OPAIR. Bien au contraire, elle peut être interprétée de manière conforme à ces ordonnances en permettant normalement la mise en place de mesures de substitution compatibles avec celles-ci ou, lorsqu'elles sont insuffisantes ou inadéquates, l'adoption de mesures restrictives.
En deuxième lieu, l'article 160B, alinéa 3, litt. b impose de compenser la canalisation du trafic de transit à l'extérieur du centre-ville par des mesures d'accompagnement ou de substitution.
A nouveau, la seule lecture de ce texte ne permet pas d'affirmer que ce moyen serait contraire au droit fédéral. Ce projet de norme doit, au regard de la jurisprudence du tribunal fédéral que nous avons mentionné ci-dessus, être interprété dans un sens conforme au droit fédéral et, notamment, à la loi fédérale sur la protection de l'environnement et ses ordonnances d'exécution. Le projet n'exclut pas toute canalisation du trafic de transit, il impose uniquement aux autorités de réfléchir aux solutions permettant de porter le moins atteinte aux droits des citoyens conformément au principe de la proportionnalité.
Cette règle ne peut pour ce seul motif violer le droit fédéral.
Enfin, l'article 160B, alinéa 3, litt. c prévoit que le stationnement des véhicules soit organisé de manière à tenir compte des besoins des usagers. Pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, ce projet ne contient pas une obligation à charge du canton qui soit contraire au droit fédéral. Il impose uniquement aux autorités d'effectuer les choix politiques et juridiques en matière de stationnement d'une manière non seulement conforme aux exigences de la protection de l'environnement, mais aussi aux besoins des usagers.
Pour ces raisons, l'article 160B, alinéa 3 est donc conforme au droit supérieur. Les représentants de la minorité n'ont pas accepté lors d'un second vote de la commission la recevabilité partielle de l'initiative à l'exclusion dudit article.
En effet, privée de l'art. 160B, alinéa 3, l'initiative est complètement vidée de sa substance et ne mérite pas d'être soumise au peuple.
La minorité de la commission regrette que la majorité ait refusé de se prononcer en droit, préférant livrer un préavis de pure opportunité politique : les buts de l'initiative nous dérangent, nous les déclarons donc non conformes au droit fédéral. L'analyse ne va pas plus loin et fait preuve d'un véritable mépris à l'égard des citoyens qui ont signé l'initiative.
Notre collègue, Mme Christine Sayegh, a eu l'amabilité de remettre aux membres de la commission le texte résultant d'une étude juridique à laquelle elle s'est livrée. Vous le trouverez en annexe au présent rapport. Par d'autres voies, il rejoint exactement les conclusions de la minorité de la commission.
Pour toutes ces raisons, les 4 représentants de la minorité (2 L, 1 R, 1 DC) vous prient, Mesdames et Messieurs les députés, de déclarer recevable l'initiative 114 dans son intégralité.
Annexe : mentionnée
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Débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, le traitement de cet objet par la commission législative a interpellé votre Bureau qui a souhaité mettre en place ce soir une procédure claire pour l'ensemble des parties concernées, pour vous, Mesdames et Messieurs les députés, les initiants, les citoyens ou encore la presse. La procédure choisie a été présentée aux chefs de groupe, aux rapporteurs ainsi qu'au président de la commission législative et a été acceptée.
Il s'agit en l'occurrence de soumettre tout d'abord à votre approbation, tout à l'heure après le débat, l'article contesté qui ne serait pas en conformité avec le droit fédéral, à savoir l'article constitutionnel 160B, alinéa 3, lettres a) et b). Votre acceptation ou votre refus permettra d'engager la procédure menant soit à la recevabilité totale, soit à la recevabilité partielle, soit enfin à l'irrecevabilité. Je vous recommande par ailleurs d'orienter le débat exclusivement sur la validité de l'initiative populaire 114 et non pas sur le fond. En effet, c'est le rôle de la commission des transports d'être saisie de cet objet en suivi de procédure, s'il est accepté ce soir, pour la prise en considération et sur l'opposition éventuelle d'un contre-projet.
Merci de votre collaboration.
Mme Fabienne Bugnon (Ve), rapporteuse de majorité. La commission législative a examiné la validité de l'initiative 114 tant sur le plan formel que sur le plan matériel. La commission confirme le rapport du Conseil d'Etat en ce qui concerne la recevabilité formelle. L'unité de la matière est conforme, puisqu'il peut être répondu par oui ou par non aux modifications constitutionnelles proposées qui sont l'objet d'une unique question.
L'unité de la forme est également respectée... (Brouhaha.)
Le président. Mesdames et Messieurs, s'il vous plaît !
Mme Fabienne Bugnon, rapporteuse de majorité. ...puisqu'il s'agit d'une initiative constitutionnelle rédigée au sens de l'article 65A de la constitution genevoise.
Enfin, l'unité du genre est respectée, puisque l'initiative propose exclusivement une révision partielle de la constitution genevoise par une modification de ses titres XB, XC et XD et l'adjonction de deux nouveaux articles 160A et 160B.
La recevabilité formelle est donc conforme en tout point et la commission législative partage les conclusions du Conseil d'Etat à ce sujet. Le problème posé par cette initiative, selon la majorité de la commission législative, concerne la recevabilité matérielle et, plus particulièrement, sa conformité au droit supérieur. Ce n'est pas tant l'objectif poursuivi par l'initiative qui n'est pas conforme au droit supérieur - puisque la commission n'a pas combattu la liberté de choix du mode de transport tel que proposé dans le chapitre I, article 160A, le droit à la liberté de mouvement étant par ailleurs garanti par l'article 10, alinéa 2 de la Constitution fédérale révisée -mais bien les moyens pour parvenir à cet objectif que nous contestons.
Le chapitre II ensuite pose les principes en son article 160B. Il fait référence dans son alinéa 1 aux limites du droit fédéral, ce qui le rendrait donc conforme au droit supérieur. Malheureusement, comme je viens de le dire, les moyens pour atteindre les objectifs découlant de ces principes sont libellés d'une manière tellement restrictive et contraignante qu'ils ne peuvent en aucun cas être considérés comme conformes au droit supérieur.
En effet, la lettre a) de l'alinéa 3 prévoit que : « avant toute mesure restrictive affectant le trafic privé, des mesures de substitution et d'accompagnement adéquates sont mises en place pour améliorer la fluidité du trafic ». Ce qui sous-entend, Mesdames et Messieurs les députés, que toute mesure de restriction du trafic que notre canton souhaiterait entreprendre - ne serait-ce que pour tenter de respecter les normes OPair et OPB édictées par le Conseil fédéral - devrait être précédée de mesures de substitution pour améliorer la fluidité du trafic. Cela aurait pour conséquence de ne rien diminuer du tout, mais au contraire d'augmenter les émissions excessives, puisque les mesures visant la fluidité du trafic devraient être réalisées préalablement aux mesures de restriction.
On conçoit sans peine à la lecture de cet article qu'une telle démarche irait en sens contraire de ce que la Confédération souhaite imposer au canton pour respecter les normes édictées. En effet, les normes OPair contraignent les autorités à prendre des mesures contre les émissions excessives en vertu des articles 31 et suivants sous forme d'adoption d'un plan de mesures. Pour les installations stationnaires, la loi fédérale prévoit des délais d'assainissement plus courts ou une limitation des émissions complémentaire ou plus sévère. Pour les installations destinées au transport, elle prévoit des mesures touchant la construction ou l'exploitation de ces infrastructures ou visant à canaliser ou à restreindre le trafic.
Il n'est un secret pour personne, Mesdames et Messieurs les députés, que notre canton a pris un retard considérable dans ce plan de mesures. Si l'initiative était appliquée telle quelle, nous n'y arriverons tout simplement jamais... C'est la raison pour laquelle les moyens annoncés à l'alinéa 3 ne sont pas conformes au droit fédéral. L'assainissement serait compromis et les normes contre le bruit, selon l'ordonnance pour la protection contre le bruit, ne pourraient pas, elles non plus, être respectées, puisqu'en empêchant toute mesure de réduction du trafic avant la mise en place de mesures de substitution on bloquerait toute mesure d'assainissement, ce qui ne permettrait pas de respecter les normes fédérales.
Il y a lieu, à titre d'exemple, et je l'ai mentionné dans mon rapport, de souligner que le cadastre du bruit du canton de Genève, que les cantons ont l'obligation d'établir en vue de l'article 37 OPB, a recensé environ 300 km du réseau routier cantonal, dont d'ailleurs la plus grande partie est située en Ville de Genève. Sur ces 300 km de réseau routier cantonal dépassant les valeurs limites d'immissions de bruits extérieurs, ceux-ci provenaient de la circulation routière fixée dans l'annexe 3 de l'OPB et 10% environ - soit 30 km - dépassent même la valeur d'alarme.
On voit bien à travers cet exemple - et je pourrais en donner d'autres - que des mesures d'assainissement doivent être prises impérativement. Le changement des revêtements des voies de circulation ne suffira pas et, de plus, il est très onéreux. Le seul moyen pour parvenir à prendre des mesures efficaces pour répondre aux exigences fédérales restent donc les mesures de restriction de circulation. Autre exemple que nos voisins français et italiens connaissent bien : c'est la mesure de restriction provisoire lors des pics de pollution. Cette mesure, qui a montré son efficacité lorsque la pollution atteint des taux inquiétants, ne pourrait même pas être mise en place, car il faudrait là encore qu'elle soit précédée de mesures de substitution.
Mesdames et Messieurs les députés, vous l'aurez compris, la majorité de la commission législative ne rejoint pas le Conseil d'Etat sur la recevabilité matérielle. Elle estime, sur la base de ces exemples, que les lettres a) et b) de l'alinéa 3 de l'article 160B de cette initiative empêchent notre canton de répondre aux normes fédérales contraignantes et, de ce fait, qu'elles doivent être reconnues non conformes à ce droit et retirées de l'initiative.
Nos travaux en commission, comme cela est relaté dans les deux rapports, ont manqué de clarté. Etant donné les délais très courts, nous n'avons eu qu'une heure de séance pour traiter cet objet. Après un débat sur la conformité, les avis étant assez tranchés, le président a immédiatement mis aux voix la question de la recevabilité de l'initiative. Le résultat étant l'égalité, l'initiative a été déclarée irrecevable. Les votes se sont arrêtés là, ce qui explique qu'il y ait ce soir un rapport de majorité et un rapport de minorité.
De mon point de vue, il aurait fallu voter d'abord sur l'article visé par la non-conformité, soit l'article 160B, alinéa 3, et, au vu du résultat, mettre aux voix la recevabilité partielle de l'initiative. Pour en avoir discuté par la suite, autant avec M. Christian Grobet, président de la commission, qu'avec les autres membres de la majorité, cet avis est partagé. D'ailleurs, Monsieur le président du Grand Conseil, vous avez annoncé en préambule que vous étiez d'accord avec cette procédure, et je vous en remercie.
J'insiste enfin sur un point sur lequel nous aurons l'occasion de revenir au cours du débat : nous sommes très attachés à l'usage du droit démocratique que représente l'initiative. Par conséquent, nous n'entendons pas priver les initiants d'un verdict populaire sur les objectifs de l'initiative, et nous pouvons tout à fait concevoir, comme le Tribunal fédéral en a décidé pour l'initiative «Genève, République de paix», de déclarer cette initiative partiellement recevable.
Mesdames et Messieurs les députés, je vous demanderai en conclusion d'accepter de déclarer l'initiative partiellement recevable, à l'exclusion de l'alinéa 3, en particulier des lettres a) et b) - l'exclusion de la lettre c) relevant plutôt du débat politique.
M. Claude Blanc (PDC), rapporteur de minorité. Malgré l'intervention liminaire du président du Grand Conseil, Mme la rapporteuse de majorité s'est livrée à un exposé complet sur le fond de l'initiative, tel qu'il aurait dû ou pu être fait lors de la discussion sur le fond. En réalité, il ne s'agit pas aujourd'hui de discuter sur le fond, mais vous voulez évidemment confondre le fond et la forme, parce que cela vous arrange ! Mais lorsque les autres le font, vous les accusez d'enfreindre les lois démocratiques...
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, que dit l'article en quelque sorte incriminé - l'article 160B, alinéa 1, précisément - «Le réseau routier des communes et du canton est conçu et organisé dans les limites du droit fédéral, de manière à assurer...». «Dans les limites du droit fédéral...» ! Lorsque vous dites que cet alinéa n'est pas conforme au droit fédéral, vous vous contredisez vous-mêmes !
Mme Fabienne Bugnon, rapporteuse de majorité. Ce n'est pas celui-là, c'est le 3 !
M. Claude Blanc, rapporteur de minorité. Ce n'est pas celui-là, mais comme l'alinéa 3 précise : «L'objectif énoncé à l'alinéa 2... - car l'alinéa 2 indique les moyens - ...est réalisé de la manière suivante...», les articles 2 et 3 sont donc indissociables de la condition posée par l'alinéa 1. La bonne foi l'impose ! (Exclamations. Le président agite la cloche.)
D'ailleurs, l'excellente Mme Sayegh, dans une étude à laquelle elle s'est livrée et qu'elle a remise aimablement aux membres de la commission, arrive à la même conclusion. Vous ne pouvez pas dire a priori que les mesures prévues aux alinéas 2 et 3 n'entrent en aucun cas dans le cadre du droit fédéral ! Je vous concède que la porte est étroite, que le nombre des mesures qui pourront être prises en application du droit fédéral sera peut-être limité... Mais même si la porte est étroite, Mesdames et Messieurs les députés, même si un fil seulement nous permettait de rejoindre le droit fédéral, vous n'avez pas le droit de couper ce fil, parce que le peuple doit pouvoir se prononcer sur ce fil ! Je veux bien reconnaître que la porte est étroite, mais ce n'est pas une raison pour la fermer. Pourtant, c'est ce que vous faites d'entrée de cause, parce que vous ne voulez pas entrer en matière sur le fond, parce que vous ne voulez pas que le peuple ait à se prononcer sur le fond.
C'est votre droit, puisque vous êtes majoritaires, mais enfin vous savez très bien que chaque fois qu'une initiative populaire est un peu contestée dans ce canton elle finit où elle doit finir : au Tribunal fédéral ! En effet, dans la plupart des cas le parlement cantonal est totalement incapable de faire la part des choses, c'est-à-dire de séparer le formel du fond. Le parlement cantonal est toujours embarqué dans ce qu'il veut ou ne veut pas, mais il ne se préoccupe absolument pas de la manière dont cela doit être présenté ; il ne se préoccupe absolument pas du droit fédéral. Et pourtant, il l'invoque souvent ! Alors, faites ce que vous voulez... Faites comme vous voulez... Il n'en reste pas moins que le droit primera !
Mme Françoise Schenk-Gottret (S). La référence au droit supérieur est abondamment utilisée dans le texte de l'initiative. Si cette même référence ne nous était pas venue à l'esprit à propos des ordonnances fédérales OPair et OPB, l'insistance avec laquelle elle a été utilisée dans l'initiative nous y aurait amenés inéluctablement.
Voyons donc quelle est la politique des transports dans notre canton, cela précisément dans le suivi de l'application des ordonnances OPair et OPB. Depuis de nombreuses années, une politique des transports à la fois globale et conforme aux exigences du développement durable a été engagée, tout en répondant aux légitimes besoins de la mobilité de tous les habitants du canton, non seulement des 30% de la population ne disposant pas d'un véhicule privé - ceux-là représentent un pourcentage plus important qu'on ne pourrait le croire - mais aussi des automobilistes dont la mobilité est de plus en plus limitée par la densité de la circulation.
Il convient de rappeler les exigences de base d'une telle politique, lesquelles sont aujourd'hui pour l'essentiel formulées par le droit en vigueur et concrétisées par les décisions du Conseil d'Etat, telles que le plan de mesures OPair de 1991, les plans de circulation et la planification du développement des transports collectifs.
Ces exigences sont :
- la nécessaire réduction des atteintes à l'environnement en matière de bruit et de pollution de l'air ;
- un usage économe et rationnel de toutes les formes d'énergie ;
- l'amélioration de la sécurité pour tous les usagers, notamment pour les plus faibles : les personnes âgées, les enfants, les piétons et les cyclistes ;
- un partage équitable de l'espace disponible par une répartition modale équilibrée ;
- la limitation de l'engorgement dans les quartiers urbains et l'amélioration de leur habitabilité par des mesures de modération de la circulation ;
- l'amélioration importante de l'offre en transports collectifs et l'encouragement des déplacements à vélo et à pied ;
- le respect de l'histoire de l'urbanisation et du patrimoine bâti.
Ces objectifs indispensables pour retrouver un milieu urbain attractif et vivant impliquent une diminution importante des déplacements en véhicule automobile privé, lesquels avaient été unilatéralement favorisés jusqu'au début des années 80 au détriment de toute autre forme de mobilité.
En parallèle, il est impératif que soient entièrement réalisés les programmes d'extension des transports publics plébiscités en votations populaires et que soient améliorées sans discontinuité les conditions de déplacement des piétons et des vélos.
Si ces principes ont été reconnus et adoptés par les pouvoirs législatif et exécutif genevois, force est de constater que les mesures retenues n'ont été que partiellement réalisées contrairement aux affirmations mensongères de l'initiative «Pour le libre choix du mode de transport».
En réalité, sous des aspects faussement anodins et trompeurs, cette initiative a pour but d'enlever toute signification et possibilité de réalisation au programme de mesures adopté.
Permettons donc la pleine réalisation de ces mesures dans toute leur envergure, restons fidèles à ces références à ce droit supérieur qu'est le droit fédéral et aux ordonnances OPair et OPB et déclarons irrecevable l'alinéa 3 de l'article 160B proposé dans l'initiative !
Le président. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir vous concentrer sur la forme et la validité de l'initiative et d'éviter de nous rapporter les débats de la commission des transports...
Je vous donne la parole, Monsieur Halpérin.
M. Michel Halpérin (L). Ce débat hors du fond présente l'intérêt pour moi de constater qu'une fois de plus, lorsque nous sommes en prise avec un problème qui nous interpelle politiquement et qui nous pose une question de principe nous donnons ou non la priorité au politique sur les principes en fonction de la place que ce problème occupe dans notre propre échelle des valeurs...
Nous le voyons souvent dans toutes sortes de débats, mais je dois dire que pour celui qui nous occupe ce soir et qui est rigoureusement un problème de recevabilité formelle d'une initiative, j'ai connu la commission législative mieux inspirée. Il fut un temps pas très éloigné où la commission législative s'imaginait - cela tenait peut-être à la composition qui était alors la sienne - que son devoir, lorsqu'elle examinait la recevabilité d'une initiative, était de faire abstraction des questions politiques pour tenter, puisque c'est son rôle, de faire du droit et par conséquent de faire prévaloir les quelques principes juridiques finalement assez simples à la bonne application desquels elle doit veiller. J'ai dit que je l'ai connue mieux inspirée, parce qu'en lisant le rapport de majorité, ou en écoutant tout à l'heure Mme Bugnon, rapporteur - ou rapporteuse - j'ai eu le sentiment, mais sans en être autrement surpris, que, contrairement à son habitude, Mme Bugnon - et avec elle le groupe qu'elle représente - a cette fois-ci fait le choix du politique plutôt que celui des principes.
Au chapitre de la recevabilité, Mesdames et Messieurs les députés, une seule question est posée : le texte de cette initiative est-il ou non conforme au droit supérieur ? Et la réponse se trouve très simple et en toutes lettres sous la plume du Tribunal fédéral, correctement et exactement cité par le rapporteur de minorité, M. Blanc, qui nous dit des choses d'une simplicité évangélique, et c'est sans doute pourquoi il a su les citer avec tant de verve... (Rires.) Par exemple : «Une initiative populaire cantonale ne doit rien contenir qui viole le droit supérieur». Et le Tribunal fédéral ajoute : «L'autorité appelée à statuer sur la validité matérielle d'une initiative doit... - doit, pas peut ! - ...en interpréter les termes dans le sens le plus favorable aux initiants. Lorsque, à l'aide des méthodes reconnues, le texte d'une initiative se prête à une interprétation en la faisant apparaître comme conforme au droit supérieur, elle doit... - elle doit, pas elle peut ! - ...être déclarée valable et être soumise au peuple. La règle du jeu est donc parfaitement simple, elle est limpide, elle est accessible à chacun, et il se trouve que les membres de la commission législative que je connais, à commencer par son président, pratiquent ces principes en général avec bonheur, sauf lorsqu'ils contredisent leurs priorités politiques.
Donc, Mesdames et Messieurs les députés, la seule question que nous ayons à nous poser est de savoir si l'alinéa 3 est ou non conforme aux principes du droit supérieur et s'il existe plusieurs interprétations possibles de cet alinéa 3, pour autant qu'il y en ait une qui soit conforme au droit supérieur, nous devons - pas nous pouvons - la soumettre au souverain.
Le titre de cet alinéa 3 est «Moyens». D'où l'on comprend, parce qu'on est intelligent et rédacteur de textes, qu'il s'agit des moyens à mettre en oeuvre pour réaliser les principes qui sont définis à l'alinéa 1 et les objectifs qui sont définis à l'alinéa 2, lesquels principes et objectifs sont répétitivement soumis expressément au droit fédéral supérieur. Il suffit de lire - mais je ne vous ferai pas l'injure de les relire à votre place, parce que vous l'avez certainement fait avant de venir ce soir... - les lettres a), b) et c) pour comprendre qu'elles fixent un programme d'accompagnement en cas de mesures restrictives de la circulation et que la définition de ces mesures d'accompagnement ne permette nullement de dire, comme l'ont fait tout à l'heure Mme Schenk-Gottret ou Mme Bugnon, que le droit supérieur est violé : tout dépendra des mesures concrètes qui seront prises ! Il se peut que des mesures concrètes soient prises qui violent le droit fédéral, auquel cas elles devront être combattues et elles le seront victorieusement devant le Tribunal fédéral. Il se peut au contraire que l'autorité d'exécution choisisse parmi l'éventail des mesures à sa disposition celles qui seront conformes au droit supérieur, et il n'y aura pas de problème.
Tout simplement, à ce stade, nous pouvons dire ceci : puisqu'il existe des hypothèses abstraites et donc nombreuses - ça n'est même pas une porte étroite, Monsieur Blanc, c'est une porte large : une porte cochère, par laquelle le département ou les autorités qui devront appliquer cette initiative auront le choix des moyens ; puisque ce choix des moyens existe et qu'il comporte des méthodes qui seront conformes au droit supérieur, nous n'avons tout simplement pas le droit de subtiliser cette initiative et de la soustraire à la volonté populaire, fût-ce partiellement.
J'ajoute - ce sera ma conclusion - Mesdames et Messieurs les députés, et en particulier ceux qui préconisent aujourd'hui, par une abstention occasionnelle et par une égalité des voix en commission, le rejet de la recevabilité de cette initiative, que dans d'autres débats vous êtes plus soucieux de la volonté populaire... Je ne suis donc pas peu surpris d'entendre tout à l'heure Mme Schenk-Gottret faire référence à des textes voulus par le peuple comme pour les opposer à d'autres qui seraient également voulus par le peuple... Il y aurait à vous entendre - du moins entre les lignes - non pas un bon et un mauvais peuple mais des bons textes qui seraient votés par la bonne fraction du peuple et d'autres qui, pour être votés par l'autre fraction, ne seraient, eux, pas de la même veine...
Mesdames et Messieurs les députés, on ne peut pas être un peu démocrate... On l'est ou on ne l'est pas ! Notre choix à nous, c'est de l'être ici comme nous l'avons été à vos côtés, en d'autres circonstances !
M. Christian Grobet (AdG). J'ai écouté vos propos, comme d'habitude avec beaucoup d'attention, Monsieur Halpérin. Et je n'ai pas pu m'empêcher, cher collègue, de sourire, car depuis 1969 que je fréquente les bancs de cette salle... (Exclamations.) ...je pourrais énumérer le nombre d'initiatives dont vos amis politiques ont remis en cause la validité par rapport au droit fédéral.
Je ne vous ferai pas l'injure - pour reprendre votre expression favorite - de vous rappeler ces nombreux débats. En certaines circonstances, votre majorité a eu gain de cause. En de nombreuses autres occasions cela n'a pas été le cas. Je ne veux pas dire que la majorité à l'époque faisait des choix politiques - ce que vous nous accusez de faire ce soir - mais j'avoue avec vous qu'en matière de recevabilité d'une initiative, dans le sens d'apprécier sa compatibilité avec le droit fédéral, l'exercice n'est pas facile. Mais il a été fait, je le rappelle, depuis trente ans et même probablement avant par ce Grand Conseil.
Un exemple me revient à l'esprit qui date de 61 : il s'agissait d'un arrêté cantonal à l'époque des arrêtés législatifs interdisant les démolitions de maisons d'habitation qui avaient été portées au Tribunal fédéral. Il y a donc longtemps que ce Grand Conseil examine non pas, Monsieur Blanc, la question formelle par rapport au fond mais la question de la validité de l'initiative par rapport au droit fédéral.
Nous pensons aujourd'hui simplement que deux phrases de l'alinéa 3 du projet d'article 160B ne sont pas compatibles avec le droit fédéral. Bien entendu nous connaissons comme vous la jurisprudence du Tribunal fédéral qui a rappelé, comme vous l'avez dit, que : l'autorité appelée à statuer sur la validité matérielle d'une initiative doit en interpréter les termes dans le sens le plus favorable aux initiants. C'est vrai ! Mais faut-il encore, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il y ait une marge d'interprétation du texte ! C'est très souvent le cas. Certains textes sont rédigés de telle manière qu'on peut les interpréter et, dans certains cas, une interprétation conforme au droit fédéral peut être trouvée.
Mais dans le cas présent, les deux paragraphes en cause sont rédigés avec une telle précision et, surtout, un tel pouvoir contraignant que je ne vois pas comment on pourrait les interpréter de manière qu'ils soient conformes au droit fédéral. Alors, c'est vrai, Monsieur Blanc, vous avez fait preuve d'un trésor d'imagination. Vous nous dites : en ce qui concerne le premier des paragraphes...
M. Claude Blanc, rapporteur de minorité. Vous voulez que je vous aide ?
M. Christian Grobet. Oui, oui, vous pouvez m'aider ! (Rires.) Je voulais simplement vous relire, Monsieur Blanc. Vous dites : «Cette norme n'exclut pas toute mesure restrictive. Elle se limite à imposer aux autorités un examen - un examen, écrivez-vous ! - ...de toutes les solutions possibles...». Mesdames et Messieurs les députés, reprenez le texte de l'initiative qui figure à la page 9 du rapport de Mme Bugnon et qui dit à l'alinéa 3, lettre a) «L'objectif énoncé à l'alinéa 2 est réalisé de la manière suivante : a) avant toute mesure restrictive affectant le trafic privé, des mesures de substitution et d'accompagnement adéquates sont mises en place pour améliorer la fluidité du trafic ;». Il ne s'agit pas du tout, Mesdames et Messieurs, d'examiner ce que l'on pourrait faire. Pas du tout ! C'est pour toute mesure et pas simplement certaines !
Monsieur Halpérin, vous nous dites qu'il y a probablement certaines mesures restrictives de circulation pour lesquelles on pourrait prendre des mesures de substitution. Vous avez peut-être raison, mais nous, nous disons qu'il n'est pas possible de prendre des mesures de substitution dans tous les cas. Et c'est cela que demande l'initiative ! Elle est malheureusement mal rédigée. Si elle avait dit qu'il faut examiner dans chaque cas si des mesures de substitution peuvent être prises et les prendre, si c'est possible, nous n'aurions bien entendu pas contesté la recevabilité de l'initiative... (Exclamations.) Mais votre formulation implique de prendre des mesures de substitution dans tous les cas. Et nous, nous disons qu'il n'est pas possible dans tous les cas de prendre des mesures de substitution telles qu'elles sont prévues !
Mais je dois dire que votre imagination, Monsieur Blanc, dont on sait qu'elle est toujours très fertile, a montré toute sa mesure à la lettre b). Votre description dépasse tout ce qui peut valablement, cher collègue, entrer dans le cadre des principes juridiques que M. Halpérin et vous-même êtes en train de nous rappeler avec beaucoup d'autorité... Vous dites, en ce qui concerne la lettre b) : «Le projet n'exclut pas toute canalisation du trafic de transit, il impose uniquement aux autorités de réfléchir... - de réfléchir ! - ...aux solutions permettant de porter le moins atteinte aux droits des citoyens conformément au principe de la proportionnalité.»
Alors, j'ose espérer qu'il n'y a pas besoin de rappeler dans la loi aux autorités qu'elles doivent réfléchir avant de faire quelque chose ! (Exclamations.) Vis-à-vis de M. Ramseyer, votre texte ne fait pas preuve de la plus grande courtoisie, Monsieur Blanc ! (Rires.) Mais vous arrangerez vos affaires entre vous ! Je vous en prie, lisez à nouveau la lettre b) ! Où parle-t-on de réfléchir ? Nulle part ! Il est dit - ce qui est encore plus restrictif - que : «la réduction du trafic pendulaire vers le centre ville et la canalisation du trafic de transit à l'extérieur du centre ville ne peuvent... (L'orateur insiste sur le mot «peuvent».) ...être décidées que si des mesures de substitution et d'accompagnement sont préalablement mises en place...». Mais enfin, Mesdames et Messieurs, on ne parle pas là de réfléchir ! On dit qu'il faut mettre des mesures en place pour toute mesure de réduction du trafic !
Alors, nous disons : non ! Nous pouvons nous tromper, Monsieur Halpérin...
M. Michel Halpérin. Oh, oui !
M. Christian Grobet. Nous verrons bien ce que dira le Tribunal fédéral ! Car nous sommes certains que les initiants interjetteront recours. De toute façon, chaque fois que le texte d'un initiant est légèrement retoqué par le Grand Conseil, il recourt au Tribunal fédéral. A notre avis, ces deux paragraphes sont tellement contraignants qu'ils ne sont pas compatibles avec le droit fédéral.
C'est vrai - j'en terminerai par là, Monsieur le président - avec ce que vous croyez être une subtilité, vous dites, Monsieur Blanc, que l'alinéa 2 stipule que : «Le réseau routier des communes et du canton est conçu et organisé, dans les limites du droit fédéral...». Reste encore à savoir exactement ce que veut dire cette phrase et si cette référence s'applique à la fin de l'alinéa, mais peu importe.
Mesdames et Messieurs les députés, on ne peut pas rédiger un texte de loi cantonale manifestement contraire au droit fédéral et rajouter à la fin que, bien entendu, le droit fédéral est réservé... Ce serait trop facile ! On ferait comme les juges de paix il y a soixante ans, lorsqu'ils s'arrogeaient le droit de prononcer... - maintenant on peut prononcer le divorce - ...le divorce ! On ne peut pas s'arroger des compétences et dire ensuite que c'est dans le cadre du droit fédéral ! Du reste, ce simple renvoi à un autre alinéa n'est pas suffisant. Il faut véritablement bien examiner dans quelle mesure il y a effectivement une possibilité d'interprétation du texte qui permettrait une application dans un certain nombre de cas.
Alors, nous voulons bien admettre qu'il y a des applications dans certains cas, mais en l'occurrence le texte nous précise que des mesures de substitution doivent être prises dans tous les cas - dans tous les cas ! Pour nous, ce n'est pas possible : il n'y a pas de marge d'interprétation pour trouver une solution de substitution dans tous les cas de mesures restrictives. Il sera parfois nécessaire, même temporairement, de prendre certaines mesures, comme par exemple d'interdire la circulation pendant quarante-huit heures en raison de pollution atmosphérique et il ne sera pas possible de prendre des mesures de substitution préalables, comme le demande l'initiative.
C'est la raison pour laquelle nous soutenons le rapport de majorité.
M. Bénédict Fontanet (PDC). Je m'aperçois qu'à chaque fois que nous parlons de la recevabilité d'une initiative populaire, nous sommes très mauvais. Nous l'avons été sur l'initiative : «Genève, République de paix», je le conçois volontiers sur un mouvement d'humeur... (Exclamations.) Oui, nous l'avions renvoyée telle quelle ! Nous avons aussi été très mauvais quand on essayait de faire du juridisme s'agissant de l'affaire Kasper... (L'orateur est interpellé.) Très mauvais ! Si vous me le permettez, c'est mon opinion ! Ce n'était peut-être pas une initiative, mais à chaque fois qu'on essaye de faire du juridisme et du juridique on est mauvais, parce qu'on utilise des arguments qui sont d'ordre purement juridiques pour essayer de défendre une thèse qui, en fin de compte, est une thèse politique !
Il faudrait peut-être revoir à l'occasion la manière dont on traite de la recevabilité ou de la non-recevabilité des initiatives populaires, dont on traite d'un certain nombre de compétences judiciaires que le Grand Conseil peut avoir en matière d'aménagement, en matière de grâces, ou en matière de responsabilité ou non de magistrats. Il serait également peut-être judicieux de donner cette faculté d'apprécier si oui ou non une initiative est conforme au droit supérieur à une autorité judiciaire qui, elle, est débarrassée des contraintes qui sont les nôtres. En effet, au même titre que lorsqu'on veut tuer son chien on dit qu'il a la rage, quand on ne veut pas d'une initiative, on explique avec délice, et en s'imaginant être un grand jurisconsulte, qu'elle n'est pas recevable.
Ce débat en est l'illustration, puisque sur vos bancs, Mesdames et Messieurs, vous expliquez dans la joie, la bonne humeur et la componction que le texte va à l'encontre de normes qui ont été voulues par le législateur et le constituant fédéral, normes que vous soutenez parce que vous ne souhaitez pas que l'on puisse ne pas réduire la circulation ou ne pas limiter les immissions les immixtions, ce que vous voudrez... Mais en fait d'immixtions, on fait une immixtion ou une immission, car on se débrouille pour faire un débat de fond à l'occasion d'un débat de préconsultation.
Là encore, nous sommes à mon sens dramatiquement mauvais. Le Tribunal fédéral tranchera une fois de plus, là n'est pas le problème. Vous pouvez décider ou choisir de faire comme vous le voulez. Monsieur Grobet, à mon avis, c'est pourtant à la portée d'un étudiant en droit qui a fait trois mois de droit en première année... Ne vous en déplaise, lorsque dans une disposition constitutionnelle proposée par voie d'initiative on réserve par deux fois l'application et le droit fédéral, j'imagine mal qu'on puisse dire que ces dispositions permettent ensuite d'édicter des normes qui soient contraires à la Constitution fédérale... Trois mois de droit à l'uni, ça suffit, Monsieur Grobet ! Vous êtes suffisamment brillant avocat et juriste émérite pour le savoir et je n'aurai pas le front de vous le rappeler !
Mesdames et Messieurs, essayons ce soir d'être intelligents, même si j'ai conscience que cela sera difficile pour un certain nombre d'entre nous... (Rires.) Acceptons la recevabilité de cette initiative, et nous verrons ensuite, dans le cadre des dispositions d'application qui seront propres à cette initiative, de quoi il en ira. Sinon, je suggère à chacun d'entre nous d'aller suivre quelques semaines à la faculté de droit - je le répète, je pense que trois mois suffiront - ou un stage dans l'une ou l'autre des études des avocats, qui sont représentées autour de la table ce soir, pour apprendre les rudiments de la lecture d'un texte juridique, ce que certains d'entre nous ont manifestement grand besoin de faire ! Je vous remercie et je vous saurais gré de bien vouloir...
M. Pierre Marti. Tu payes bien tes stagiaires ?
M. Bénédict Fontanet. Ah, ce serait un bonheur pour moi d'avoir M. Grobet avec moi, parce qu'il est tellement pugnace quand il veut quelque chose que je suis sûr qu'il serait un avocat très efficace au sein de mon étude, mais je ne suis pas certain qu'il se ferait une joie de nous rejoindre... Mais, Monsieur Grobet, on peut toujours discuter si vous le souhaitez... (Rires.)
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, soyons intelligents : acceptons la recevabilité de cette initiative des deux mains et faisons en sorte que notre Conseil tranche sur le fond de cette initiative pour que le peuple puisse se prononcer sans restriction.
M. Pierre Froidevaux (R). Je rejoins les propos de M. le député Fontanet sur le fait qu'il n'est pas nécessaire de faire du juridisme ici.
En entendant vos propos, Monsieur le député Grobet, je pense à un débat télévisé auquel vous aviez participé à propos d'une initiative populaire et qui consistait à interdire le génie génétique. C'était une initiative fédérale dont nous avions débattu il y a quelques années. Je me souviens, alors que vous expliquiez que cette initiative consistait vraiment à interdire tout génie génétique, que vous disiez aussi qu'il ne fallait pas s'inquiéter car des lois seraient faites ensuite au niveau national pour permettre tout de même de sauvegarder certains développements au niveau de l'industrie. Et vous appeliez le peuple à soutenir cette initiative...
Je rejoins les propos de M. Fontanet. On voit effectivement que lorsque se mêlent le juridisme et la politique, il vaut mieux faire des choix ! Le groupe radical fait un choix politique : il se veut démocratique en toutes circonstances, et il soutiendra donc cette initiative sur le plan d'une acceptation formelle, sans aucune... (L'orateur est interpellé.) On pourra toujours parler de l'initiative «Genève, République de paix»... Effectivement, l'initiative «Genève, République de paix» est arrivée dans un contexte très particulier... (Exclamations.) ...très particulier, qui fait qu'un certain laps de temps s'est écoulé...
Je souhaite exprimer la position du parti radical : nous avons été très surpris de voir que cette initiative qui ne contenait pas véritablement d'arguments juridiques a été refusée par la commission législative qui aurait dû accomplir un acte législatif et non un acte politique. Le groupe radical estime quant à lui que l'initiative 114 est recevable et souhaite que le débat politique ait lieu tout d'abord à la commission des transports, puis devant notre Conseil et, enfin, devant le peuple.
Je dirai très brièvement sur le fond ce qui suit. Les radicaux considèrent que l'initiative déposée par le groupement «Transports et économie» est justifiée et doit être débattue. En effet, alors que les mesures contraignantes à l'égard du trafic privé ont été prises ces dernières années et que la subvention accordée aux Transports publics genevois augmente chaque année, il nous semble important qu'un débat ait lieu au niveau cantonal sur la liberté du choix du mode de transport. Nous relevons également que l'initiative prévoit expressément le respect du droit fédéral. De plus, elle mentionne que la fluidité du trafic privé doit se faire en complémentarité avec les transports publics.
Nous vous remercions donc, Mesdames et Messieurs les députés, de considérer l'initiative 114 comme entièrement recevable et de la renvoyer à la commission des transports, où nous nous réjouissons de pouvoir en discuter avec vous tous.
M. Michel Balestra (L). L'initiative 114 «Pour le libre choix du mode de transport» est une initiative équilibrée. Son objectif, sous réserve du droit fédéral - ne vous en déplaise - est d'assurer un équilibre entre les divers modes de transport. C'est son principe, que vous ne contestez pas.
L'objectif de cette initiative c'est de concevoir et d'organiser, dans les limites du droit fédéral toujours, le réseau routier pour assurer la fluidité du trafic et, plus exactement, pour assurer la meilleure fluidité du trafic possible dans les limites du droit fédéral.
Les moyens, ce sont les mesures de substitution et d'accompagnement adéquates pour atteindre ces objectifs dans les limites du droit fédéral.
Mesdames et Messieurs les députés, l'objectif OPAir, ordonnance sur la protection de l'air, et OPB, ordonnance sur la protection contre le bruit, ne sont pas des ordonnances visant à interdire des mesures de substitution adéquates pour assurer la fluidité du trafic, sous réserve du droit fédéral, mais bien des ordonnances visant, dans les limites que permet la technique, d'atteindre une meilleure qualité de l'air et une moindre pollution sonore.
Mesdames et Messieurs les députés, dans l'initiative «Rétro trafic» les initiants voulaient diminuer le trafic de moitié. Elle n'a pas été déclarée irrecevable ni même partiellement recevable, malgré son objectif utopique, excessif et irréalisable. Par contre la population - et là nous sommes dans le droit supérieur - a heureusement déclaré cette initiative irrecevable à 80%, ce qui, vous le reconnaîtrez, redéfinit la volonté populaire générale au niveau de la nation en matière de droit supérieur et de circulation.
Il n'en sera pas de même, Mesdames et Messieurs les députés, au sujet de l'initiative 114. Et c'est pourquoi la majorité de la commission législative, qui d'ailleurs soutenait «Rétro trafic», entend la priver de son caractère contraignant qui est rédigé à l'alinéa 3.
Mesdames et Messieurs, comme on vous l'a déjà dit, la majorité de la commission législative ne respecte pas la pratique de notre Conseil en matière de recevabilité. Elle avait l'esprit beaucoup plus large lorsque les sujets étaient plus proches de ses aspirations et de sa pensée politique, Madame le rapporteur de minorité...
Une voix. Ce sera dans une année !
Des voix. De majorité !
M. Michel Balestra. Je devrais dire, Madame le rapporteur de majorité : plus proches de vos fantasmes politiques... (Exclamations.) Le peuple vous fait peur, Mesdames et Messieurs de la majorité de gauche, mais le peuple vous fait plus peur encore depuis que, dimanche dernier, à 80% il a refusé la modération du trafic... Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés de la majorité, si vous avez peur du peuple le peuple vous le rendra, et il vous le rendra au centuple ! Vous seriez donc bien inspirés de respecter ses droits en général et l'esprit du droit d'initiative en particulier ! Avant que le Tribunal fédéral ait redonné le droit au peuple souverain de Genève et pour que le peuple sache qui a peur de lui, nous demandons l'appel nominal !
M. Claude Blanc (PDC), rapporteur de minorité. Permettez à un non-spécialiste de dire que plus on fait de droit plus on avance de travers ! (Rires.) En réalité, les éminents juristes siégeant sur les divers bancs de ce parlement, comme toujours d'ailleurs - ce n'est pas nouveau - essayent d'assaisonner le droit en fonction de leurs opinions politiques. La majorité actuelle n'a pas l'apanage de ce genre d'attitude. Il est vrai que par le passé - il faut le reconnaître, mes chers collègues - nous avons aussi tenté d'utiliser l'argument de l'irrecevabilité pour éviter de soumettre certains problèmes au peuple...
M. Christian Grobet. C'est le confessionnal ! (Le président agite la cloche.)
M. Claude Blanc, rapporteur de minorité. Ce n'est pas une raison pour continuer !
Une voix. C'est trop leur demander !
M. Claude Blanc, rapporteur de minorité. Vous nous avez tant accusés de jouer ce jeu et de manquer de démocratie... Alors, pourquoi aujourd'hui agissez-vous de la même manière ? Pourquoi entrez-vous dans le même jeu ? C'est parce que vous n'êtes pas meilleurs... - j'allais dire pas meilleurs que nous - ...que les autres et le jeu est malheureusement toujours le même.
J'en reviens maintenant à la dernière initiative qui avait été déclarée irrecevable par la majorité d'alors du Grand Conseil, je veux parler de l'initiative : «Genève, République de paix» qui était un foutoir - passez-moi l'expression - tous azimuts. Le Grand Conseil à l'époque avait jugé que cela ne valait pas la peine de trier ce qui était acceptable de ce qui ne l'était pas. Il avait préféré la déclarer globalement irrecevable. Vous avez fait recours au Tribunal fédéral qui vous a donné partiellement raison - partiellement ! Parce qu'en réalité le Tribunal fédéral a enlevé dans votre initiative tout ce qui à ses yeux était irrecevable ; il a enlevé l'essence même de cette initiative. Il n'en restait que les intentions ! D'ailleurs, je disais à quelques-uns de vos amis, avant le scrutin de dimanche, que dans le fond si on lisait le texte tel qu'il est sorti du Tribunal fédéral sans idée politique préconçue, honnêtement, on pouvait le voter...
Une voix. C'est trop tard !
M. Claude Blanc, rapporteur de minorité. ...parce qu'il est totalement vidé de sa substance. Ce qui m'a étonné par contre, c'est que, même vidé de sa substance, le peuple n'en ait pas voulu... Mais ça, ça vient probablement plus de l'opinion que le peuple se fait de la personnalité des initiants que du texte qu'il aura lu !
Maintenant, Mesdames et Messieurs, revenons-en à notre texte. Franchement, nous devrions arriver à le lire avec des yeux sans a priori politiques. Il y a une seule juriste dans ce Grand Conseil qui s'est donné cette peine... Il faut quand même que je le dise ! Mme Sayegh n'était pas obligée de faire ce qu'elle a fait... Elle était encore moins tenue de livrer le résultat de son travail à la commission législative... (L'orateur est interpellé.) Oui, elle l'a fait aimablement, et elle n'était nullement obligée de le faire ! Elle l'a fait parce qu'elle est honnête ! Elle l'a fait parce qu'elle a voulu lire l'initiative avec des yeux - j'allais dire vierges... (Rires.) Avec un état d'esprit qui excluait toute idée préconçue. Puisque nous en sommes à faire des relectures ce soir, car tout le monde sait bien que la majorité des députés ne lisent pas les rapports et encore moins les annexes, je me permets quand même de vous relire la conclusion de Mme Sayegh au sujet de l'initiative 114.
Elle dit ceci : «A la lecture de l'article 160B, alinéa 1, qu'il est proposé d'introduire dans la constitution genevoise, il est bien précisé que les réseaux routiers des communes et des cantons sont conçus et organisés dans les limites du droit fédéral ; l'alinéa 2 rappelle également les limites du droit fédéral et l'alinéa 3 fait référence à l'alinéa 2. Toutefois, la compétence cantonale est limitée à des mesures tendant exclusivement à la modération du trafic. Dans l'hypothèse où les mesures de substitution qui seraient prises en application de l'alinéa 3 a) et b) avaient pour but de faire obstacle à une réduction du trafic voire l'interdisaient, il y aurait contradiction avec le droit supérieur. Il s'agit donc d'une question d'application qui pourrait être contestée par voie de recours le cas échéant. Aussi, au stade pur de la recevabilité, l'IN 114 n'est pas incompatible avec le droit supérieur.»
Mais, évidemment, si pour des raisons politiques vous continuez à vouloir déclarer cette initiative incompatible, nous serons une fois de plus obligés d'aller nous ridiculiser devant le Tribunal fédéral, qui finit par n'avoir plus que nous comme clients et qui sait bien que nous sommes incapables d'apprécier le droit nous-mêmes et que nous essayons toujours d'apprécier le droit en fonction de nos idées préconçues.
Mme Christine Sayegh (S). Nous avons eu une brillante démonstration sur le fait que nous étions totalement incapables en tant que députés de prendre une décision non politique...
Je crois que nous avons aussi été un peu utopiques à la commission législative, il y a pas mal d'années maintenant, lorsque nous avons revu le droit pour contrôler les initiatives... Nous avions notamment estimé que nous pouvions prendre assez de recul par rapport à l'objectif d'une initiative pour en analyser la recevabilité formelle et matérielle. Tout a été dit ce soir sur la pratique de la commission, sur des éléments qui n'ont effectivement rien de juridiques. Cela me fait réfléchir et me dire que nous devons franchement nous demander si nous sommes compétents pour effectuer le contrôle de la recevabilité des initiatives.
Monsieur le rapporteur de minorité, j'ai été très surprise de voir que... - d'ailleurs sans m'en avertir, mais ce n'est pas grave : j'assume mon avis de droit - ...vous avez annexé mon avis de droit ! Je pourrais même vous envoyer une note d'honoraires ! (Rires et exclamations.) Trêve de plaisanterie ! (L'oratrice est interpellée.) Je vois que je suis appuyée par le parti libéral de surcroît !
Vous avez parlé en commission d'un avis de droit que vous aviez également demandé à un autre juriste, qui arrivait aux mêmes conclusions. Il aurait donc été intéressant que vous le produisiez, puisqu'on dit toujours qu'il y autant d'avis qu'il y a de juristes. Alors pour une fois que nous étions trois à avoir la même position : le juriste du Conseil d'Etat, le juriste que vous avez mandaté et moi-même, cela aurait valu la peine de le porter à la connaissance de tout le parlement !
Si l'on veut discuter de la recevabilité c'est une chose, mais tout le monde a parlé de la prise en considération alors que ce débat doit avoir lieu à la commission des transports qui peut également décider, s'il y a des critiques sur certains moyens, de faire un contreprojet. Je ne pense donc pas que c'est au niveau de la recevabilité de cette initiative qu'il faut décider d'un éventuel contreprojet.
Toutefois, puisque les votes sont politiques, je m'abstiendrai sur ce sujet !
Le président. Je constate, Madame Sayegh, que vous êtes aussi en avance sur votre temps car votre avis de droit est daté du 18 février 2094 !
Mme Christine Sayegh. Je vous remercie, Monsieur le président... Vous êtes le seul à l'avoir vu, à part moi ! (Rires.)
Le président. Si bien que nous aurons le temps avant de recevoir la note d'honoraires ! (Rires.)
Je vous passe la parole, Monsieur Ferrazino.
M. Christian Ferrazino (AdG). J'ai pris acte d'un certain nombre d'aveux qui ont été faits ce soir par M. Blanc tout d'abord - avec une candeur qui ne le caractérise pas toujours, il est vrai - et par M. Froidevaux. Ils nous ont dit, avec combien de remords, qu'ils se sont, dans cette enceinte et il n'y a finalement pas si longtemps, moqués des droits populaires. Ils le regrettent aujourd'hui : nous en prenons acte !
Nous vous disions à l'époque, effectivement, que l'initiative du GSsA était elle aussi dans les limites du droit fédéral. Monsieur Balestra, je n'ai pas compté, mais je crois que vous avez dit dix ou douze fois dans votre intervention : «dans les limites du droit fédéral». Je pense que vous faites une fixation dans le cadre de l'initiative du GSsA, parce que c'était précisément la phrase qui avait été introduite dans l'initiative, que vous aviez combattue ici même - et avec quelle énergie - en nous disant qu'elle était totalement contraire au droit fédéral. Le Tribunal fédéral vous a répondu, mais, malheureusement, vous n'en avez pas tiré les fruits, puisque vous continuez à interpréter cette notion de la même manière.
Je vous dirai, Monsieur Balestra, et à vous également, Monsieur Froidevaux, qu'il n'est même pas nécessaire d'insérer la phrase : «dans les limites du droit fédéral» dans un texte de ce genre, dans la mesure où c'est une obligation constitutionnelle. Alors, vous pouvez le répéter encore quinze fois, Monsieur Balestra, c'est tout à fait inutile, puisque, j'insiste, c'est une obligation constitutionnelle, comme est une obligation constitutionnelle le fait que ce parlement vérifie la validité matérielle des initiatives dont nous sommes saisis.
Nous l'avons voulu ! Le législateur, contrairement à ce qui était le cas auparavant - nous n'examinions pas, ou nous le faisions de façon facultative, la constitutionnalité des initiatives qui nous sont proposées - a voulu introduire cet examen obligatoire par ce parlement du respect des initiatives par rapport au droit supérieur. Pourquoi ? Non pas pour faire de la politique, comme certains sur les bancs d'en face font mine de le croire ou de le prétendre aujourd'hui, mais simplement pour ne pas tromper l'électeur ! En voulant laisser croire que cette initiative est conforme au droit supérieur, alors que - la démonstration est faite - elle ne l'est pas, vous induisez en erreur les électeurs que vous prétendez défendre ! (Exclamations.) C'est assez extraordinaire de votre part !
Ce soir, mis à part les aveux très touchants qui ont été faits, nous avons entendu des tas d'expressions peu concrètes, de M. Blanc : «porte étroite», puis plus poétiquement, «nous sommes sur un fil : ne le brisons pas !» ; de M. Halpérin : «Il y a des hypothèses qui sont un peu abstraites, je le concède». Mais pas une seule personne n'a été à même - et l'exposé du rapport de minorité n'en reprend pas d'autre - de donner un seul exemple qui permettrait de montrer comment, concrètement, cette initiative pourrait être conforme au droit supérieur avec les moyens qu'elle préconise. Cette absence totale d'exemple démontre, s'il en était besoin, qu'il n'en existe pas. Car, si - et vous avez pris des précautions oratoires, Monsieur Halpérin, qui vous honorent - dans certains cas, effectivement, il était possible de prendre des mesures de substitution préalablement à toute réduction du trafic, vous savez pertinemment, non seulement comme nous mais comme tout le monde, qu'il ne serait pas possible de prendre de telles mesures de substitution dans tous les cas. Et vous vous êtes justement bien gardés de donner des exemples qui permettraient de rendre cette initiative compatible au droit supérieur !
Nous considérons quant à nous qu'il est de notre devoir de ne pas laisser un texte induire en erreur les citoyens, et ce texte n'est manifestement pas conforme au droit supérieur. Nous ne faisons pas de la politique, nous ne faisons qu'assurer le rôle juridique de ce parlement dans le cadre de cet examen, comme nous l'avons souhaité dans le cadre de la matérialité des initiatives populaires. Voilà ce que nous faisons !
Nous avons pris acte de vos aveux, je le répète. Quant à nous, nous entendons jouer clairement les règles du jeu... (Exclamations.) ...raison pour laquelle nous n'avons pas conclu à l'invalidité totale de cette initiative. Les principes subsistent, les objectifs subsistent et les moyens, dès lors qu'ils sont incompatibles avec le droit supérieur, doivent effectivement être supprimés.
Mme Fabienne Bugnon (Ve), rapporteuse de majorité. Je crois que la différence qui caractérise un côté de la salle et l'autre, c'est la considération montrée à l'égard des personnes qui déposent des initiatives... (Exclamations.) De votre côté, lorsque vous avez une initiative qui ne vous plaît pas, c'est vite fait, vous la lisez et puis vous dites qu'elle est globalement irrecevable, que vous n'en voulez pas et vous la jetez. Vous en avez fait la démonstration d'une manière que vous avez cru convaincante lors de l'initiative «Genève, République de paix». Qui s'est fait retoquer au Tribunal fédéral ? Cela reste à prouver ! Toujours est-il que vous n'aviez pas entièrement raison !
Aujourd'hui, nous sommes beaucoup plus soucieux que vous des initiants, qui sont plutôt de votre bord d'ailleurs. En effet, nous ne contestons pas le chapitre I qui prévoit le choix du mode de transport, pas plus que le chapitre II qui comporte un certain nombre de principes en son alinéa 1. Nous ne contestons pas non plus l'objectif, mais nous contestons les moyens mis en place pour atteindre cet objectif - je l'ai déjà expliqué.
Mesdames et Messieurs les députés, à chaque fois que nous avons un débat de ce genre, il y a une chose que j'adore : c'est la parfaite union de M. Halpérin et de M. Fontanet, lequel intervient généralement dix minutes après... Et la main sur le coeur, ils disent en résumé que lorsque des non-juristes parlent de droit, ce qui arrive est normal...
M. Bernard Annen. Voilà ce qui arrive quand c'est M. Ferrazino qui parle ! (Rires.)
Mme Fabienne Bugnon, rapporteuse de majorité. Monsieur Halpérin, vous nous avez beaucoup manqué à la commission législative. Vous vous y faites trop rare. C'est dommage, car vous auriez pu venir nous dire tout ce que vous nous dites ce soir... Cela aurait été un véritable plaisir ! Vous savez que nous aimons débattre avec vous : nous aurions aimé le faire en commission législative, mais vous ne nous en avez pas donné l'occasion !
Enfin, toujours est-il que l'intervention la plus intéressante reste celle de mon grand ami Balestra qui, dans une grande envolée lyrique, nous a dit que l'OPAir représentait des objectifs à atteindre. Eh bien, non, Monsieur le député ! Et c'est bien là tout le problème du débat de ce soir ! L'OPAir et l'OPB ne sont pas des objectifs : ce sont des ordonnances ! Et il va bien falloir qu'un jour ou l'autre le canton de Genève accepte le fait que le Conseil fédéral ait édicté des ordonnances importantes, l'une sur la protection contre le bruit, l'autre sur la protection de l'air. Or, l'initiative qui nous est présentée ce soir ne nous permet pas de respecter ces ordonnances.
C'est la raison pour laquelle je vous demande encore une fois, Mesdames et Messieurs les députés, à mon tour la main sur le coeur... (Exclamations.) ...d'accepter de déclarer une partie de cette initiative irrecevable et de renvoyer le reste de cette initiative à la commission des transports pour qu'on puisse y traiter du fond.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je donne encore la parole à M. Balestra, et je vous propose ensuite de procéder aux différents votes.
M. Michel Balestra (L). Je rappelle que les ordonnances sur la protection de l'air et sur la protection contre le bruit s'entendent dans les limites de la technique et pour autant qu'elles soient économiquement supportables. Ce sont des objectifs «sous réserve de»... Oui, cela figure dans le texte, mon cher Maître ! Et il est tout à fait inacceptable que vous disiez que nous trompons le peuple ! Cette affirmation est inacceptable ! Après un détournement du droit cantonal au profit des communes en matière de restriction de circulation - ce qui est le droit de la majorité - nous assistons ce soir à un détournement du droit d'initiative de la population de Genève au profit de la politique partisane d'un conseiller administratif qui désire paralyser la circulation sur la commune de Genève ! (Exclamations.) Et ça c'est totalement incompatible avec le rôle de député ! Je trouve cela scandaleux, et j'espère que les électeurs genevois sauront se souvenir de tout cela ! (Applaudissements.)
M. Christian Grobet (AdG). Nous avons entendu vos tirades, Monsieur Balestra, qui permettent de détendre l'atmosphère, car des fois, dans la flamme du débat, votre bon sens habituel est oublié pour des excès que vous ne montrez généralement pas, en tout cas en commission...
Cela étant dit, j'aimerais rappeler, une fois de plus, qu'effectivement l'OPB et l'OPair ne sont pas des objectifs. Ces deux ordonnances fédérales imposent au canton de prendre des mesures pour que les normes en matière de protection contre le bruit et les normes en matière de protection de l'air soient respectées. Or, on sait qu'à Genève elles ne le sont pas. Nous avons donc le devoir de prendre des mesures, notamment en matière de réduction du trafic - cela figure noir sur blanc dans l'ordonnance - et nous ne pouvons pas y échapper... (Le président agite la cloche.) C'est vrai, certains milieux veulent par le biais de cette initiative populaire tenter d'obtenir que Genève n'applique pas les ordonnances fédérales ou donner des moyens pour promouvoir des recours interminables qui empêcheraient la mise en place des mesures qui doivent être prises.
M. Claude Blanc, rapporteur de minorité. Ce n'est pas mal, ça !
M. Christian Grobet. Mais chacun a le droit de faire un recours, c'est évident ! J'aimerais simplement dire - et c'est très important -qu'effectivement en supprimant uniquement les deux alinéas en cause il est tout à fait possible de corriger l'initiative et de prévoir des moyens d'application qui soient conformes au droit fédéral dans le cadre de lois d'application, si ces articles constitutionnels sont acceptés et non pas ceux qui sont proposés dans l'initiative.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, comme je vous l'ai proposé en préambule, je fais voter tout d'abord sur l'article contesté. Le vote nominal a été demandé... Est-il appuyé ? C'est le cas. (Appuyé.) Mesdames et Messieurs les députés, celles et ceux qui déclarent l'article 160B, alinéa 3, lettres a) et b), conforme au droit fédéral supérieur répondront oui, et celles et ceux qui le déclarent non conforme répondront non.
Monsieur Blanc, vous avez la parole.
M. Claude Blanc (PDC), rapporteur de minorité. Je ne sais pas, Monsieur le président, si votre manière de voter est exacte... En effet, nous devons nous prononcer sur un texte qui existe... Ce sont donc ceux qui veulent le modifier qui doivent à mon avis voter oui !
Le président. Monsieur Blanc, je crois que le vote est clair.
Je souhaite que tout le monde soit à sa place. Monsieur Hodgers, Monsieur Hiler, Monsieur Büchi, Monsieur Meyll, Monsieur le conseiller d'Etat Moutinot... (Rires.) S'il vous plaît ! (Exclamations.) La discipline est de rigueur pour tous les pouvoirs !
Nous votons sur la conformité de cet article. Je m'en tiens à la proposition que je viens de vous faire. Celles et ceux qui déclarent l'article 160B conforme répondront oui, et celles et ceux qui le déclarent non conforme répondront non.
Mise aux voix, la proposition de déclarer l'article 160B, alinéa 3, lettres a) et b), conforme est rejetée par 49 non contre 43 oui et 1 abstention.
Ont voté non (49) :
Esther Alder (Ve)
Charles Beer (S)
Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)
Dolorès Loly Bolay (AG)
Anne Briol (Ve)
Christian Brunier (S)
Fabienne Bugnon (Ve)
Nicole Castioni-Jaquet (S)
Alain Charbonnier (S)
Bernard Clerc (AG)
Jacqueline Cogne (S)
Jean-François Courvoisier (S)
Pierre-Alain Cristin (S)
Anita Cuénod (AG)
Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)
Régis de Battista (S)
Jeannine de Haller (AG)
Erica Deuber Ziegler (AG)
Alain Etienne (S)
Laurence Fehlmann Rielle (S)
Christian Ferrazino (AG)
Magdalena Filipowski (AG)
Luc Gilly (AG)
Alexandra Gobet (S)
Gilles Godinat (AG)
Mireille Gossauer-Zurcher (S)
Marianne Grobet-Wellner (S)
Christian Grobet (AG)
Cécile Guendouz (AG)
Dominique Hausser (S)
David Hiler (Ve)
Antonio Hodgers (Ve)
Georges Krebs (Ve)
Pierre Meyll (AG)
Louiza Mottaz (Ve)
Chaïm Nissim (Ve)
Danielle Oppliger (AG)
Rémy Pagani (AG)
Véronique Pürro (S)
Jean-Pierre Restellini (Ve)
Elisabeth Reusse-Decrey (S)
Jacques-Eric Richard (S)
Albert Rodrik (S)
Françoise Schenk-Gottret (S)
Myriam Sormanni-Lonfat (S)
Jean Spielmann (AG)
Pierre Vanek (AG)
Alberto Velasco (S)
Salika Wenger (AG)
Ont voté oui (43) :
Bernard Annen (L)
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Luc Barthassat (DC)
Roger Beer (R)
Jacques Béné (L)
Janine Berberat (L)
Claude Blanc (DC)
Nicolas Brunschwig (L)
Thomas Büchi (R)
Marie-Françoise de Tassigny (R)
Gilles Desplanches (L)
Jean-Claude Dessuet (L)
Hubert Dethurens (DC)
Pierre Ducrest (L)
John Dupraz (R)
Henri Duvillard (DC)
Bénédict Fontanet (DC)
Pierre Froidevaux (R)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Philippe Glatz (DC)
Nelly Guichard (DC)
Janine Hagmann (L)
Michel Halpérin (L)
Yvonne Humbert (L)
Bernard Lescaze (R)
Armand Lombard (L)
Pierre Marti (DC)
Alain-Dominique Mauris (L)
Jean-Louis Mory (R)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Vérène Nicollier (L)
Jean-Marc Odier (R)
Michel Parrat (DC)
Catherine Passaplan (DC)
Pierre-Louis Portier (DC)
Jean Rémy Roulet (L)
Stéphanie Ruegsegger (DC)
Louis Serex (R)
Walter Spinucci (R)
Micheline Spoerri (L)
Olivier Vaucher (L)
Pierre-Pascal Visseur (R)
S'est abstenue (1) :
Christine Sayegh (S)
Etaient excusés à la séance (5) :
Juliette Buffat (L)
René Ecuyer (AG)
Claude Haegi (L)
René Koechlin (L)
Charles Seydoux (R)
Etait absent au moment du vote (1) :
Hervé Dessimoz (R)
Présidence :
M. Daniel Ducommun, président.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter maintenant sur la validité partielle de l'initiative 114-B.
Mise aux voix, la validité partielle de l'initiative 114-B est adoptée.
Cette initiative est renvoyée à la commission des transports.
Présidence de Mme Elisabeth Reusse-Decrey, première vice-présidente
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Art. 1 Crédit extraordinaire d'investissement
Un crédit extraordinaire d'investissement de 107 500 000 F est ouvert au Conseil d'Etat pour l'acquisition d'actions nominatives de la Banque cantonale de Genève.
Art. 2 Inscription au patrimoine administratif
Les actions nominatives seront inscrites dans le bilan de l'Etat de Genève au patrimoine administratif.
Art. 3 Financement et couverture des charges financières
Le financement de ce crédit extraordinaire est, au besoin, assuré par le recours à l'emprunt hors cadre du volume d'investissement « nets-nets » fixé par le Conseil d'Etat, dont les charges financières en intérêts sont à couvrir par l'impôt et/ou le produit des dividendes distribués.
Art. 4 Amortissement
En raison de la nature de cet investissement, celui-ci ne donne pas lieu à amortissement.
Art. 5 Autorisation d'acquisition
Le Conseil d'Etat est autorisé à acquérir, au nom de l'Etat de Genève, des actions au porteur de la Banque cantonale de Genève pour un montant de 138 700 000 F.
Art. 6 Financement et couverture des charges financières
Le financement de cette acquisition est, au besoin, assuré par le recours à l'emprunt, dont les charges financières en intérêts sont à couvrir par l'impôt et/ou le produit des dividendes distribués.
Art. 7 Inscription au patrimoine financier
Les actions au porteur seront inscrites dans le bilan de l'Etat de Genève au patrimoine financier.
Art. 8 Transfert des actions au porteur au patrimoine administratif
Le Conseil d'Etat est habilité à transférer les actions au porteur au patrimoine administratif si les circonstances le justifient.
Art. 9 Clause conditionnelle
L'entrée en vigueur de la présente loi est conditionnée par l'adoption de la modification des statuts régissant la composition du capital social.
Art. 10 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Vu son développement depuis la fusion, et afin de poursuivre son activité et répondre à la demande, la Banque cantonale de Genève a besoin aujourd'hui de procéder à une augmentation de capital.
L'augmentation de capital projetée consiste à porter le capital social de 225 millions de CHF à désormais 337,5 millions de CHF, par émission de 1'325'516 nouveaux titres nominatifs B au nominal de 50 CHF chacun et de 462'242 nouveaux titres au porteur au nominal de 100 CHF chacun.
La Banque cantonale de Genève se propose de faire appel aux actionnaires existants en leur offrant la possibilité de participer à l'opération dans les proportions suivantes :
1 nouvelle action nominative B pour 2 anciennes actions nominatives ;
1 nouvelle action au porteur pour 2 anciennes actions au porteur.
La nouvelle catégorie d'actions nominatives B qui serait ainsi créée permettrait à la Banque cantonale de Genève de les rémunérer par un dividende proportionnellement identique à celui versé pour les actions au porteur, soit à un rendement de l'ordre de 4,5 % à l'heure actuelle. Ce dividende devrait permettre de couvrir tout ou partie d'un éventuel emprunt consenti pour l'acquisition de ces nouvelles actions.
Concrètement ce schéma offre la possibilité de souscription suivante pour les principaux actionnaires :
Cette manière de procéder permet de conserver les mêmes proportions de participation au capital-actions de la Banque, à savoir 33,35 % pour l'Etat de Genève, 20,65 % pour la Ville de Genève et 8,80 % pour les communes, soit un total de 62,80 % en mains des collectivités publiques.
En terme de nombre de voix, les proportions demeureront également les mêmes, soit 39,52 % pour l'Etat de Genève, 25,99 % pour la Ville de Genève et 11,08 % pour les autres communes, ce qui donne un total de 76,59 %.
Les actions nominatives B qui seront nouvellement acquises seront inscrites au patrimoine administratif, tandis que les actions au porteur feront l'objet d'une inscription au patrimoine financier, avec possibilité de les transférer au patrimoine administratif si les circonstances le justifient.
Du point de vue financier, et avec un prix de souscription envisagé maximum de 150 CHF pour les actions nominatives B et de 300 CHF pour les actions au porteur, cette opération devrait permettre à la Banque cantonale de Genève d'engranger un montant de 337'500'000 CHF. La part minimale qui incomberait à l'Etat devrait dès lors s'établir à 112'538'700 CHF, correspondant à la souscription des 662'758 actions nominatives B de nominal 50 CHF au prix d'émission de 150 CHF et des 43'750 actions au porteur de nominal 100 CHF au prix d'émission de 300 CHF.
Toutefois, ne connaissant pas à ce jour l'intérêt que manifesteront les actionnaires privés, ni même certaines communes par rapport à cette augmentation de capital, l'Etat pourrait être amené à compléter son apport afin que l'opération puisse être menée à terme. Cette hypothèse a été évaluée. C'est pourquoi il a été tenu compte, d'une part, d'une souscription émanant des autres communes de l'ordre de 75 % - les 25 % restant étant inclus dans la demande de crédit extraordinaire - et d'autre part, d'une prise en charge possible par l'Etat de Genève de l'intégralité des actions au porteur, soit 138 672 600 F.
A noter enfin qu'il n'est pas nécessaire de modifier la loi sur la Banque cantonale pour cette opération mais que seuls les statuts le seront lors de l'assemblée générale des actionnaires afin de les mettre en conformité avec le nouveau capital social.
Au bénéfice des explications qui précèdent, nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, d'adopter le présent projet de loi.
567Préconsultation
M. Christian Grobet (AdG). L'Alliance de gauche se félicite de la présentation de ce projet de loi par le Conseil d'Etat et du fait que celui-ci ait pris ses responsabilités en demandant à ce Grand Conseil d'accorder les moyens financiers nécessaires pour que la Banque cantonale de Genève puisse assurer son avenir, auquel notre formation politique - et je ne doute pas que ce soit le cas des autres - est particulièrement attachée.
La réalité - nous l'avions dit depuis plusieurs années - c'est que la Banque cantonale de Genève avait dû assumer des pertes considérables plus importantes que celles qui avaient été admises au moment de la fusion des deux banques, des pertes qui nécessitaient un assainissement. Ce dernier ayant trop tardé, l'équilibre financier de la banque s'est dégradé. Il est évident que notre canton doit faire ce qui a été fait dans d'autres cantons, plus particulièrement le canton de Berne, mais il n'est jamais trop tard pour réagir comme il le faut. Et nous espérons que les sommes qui ont été calculées répondront effectivement aux besoins.
Nous avions déjà dit, lors de la création de la Banque cantonale de Genève, que c'étaient les pouvoirs publics qui avaient apporté l'essentiel des actifs et que c'est grâce à eux que la banque a pu être créée. Il s'agit donc d'une banque publique. Mais, contrairement à ce qu'il en est dans la plupart des autres cantons, le canton ne dispose pas du pouvoir majoritaire au sein de cette banque, puisque le capital-actions est réparti de telle manière que l'Etat ne dispose que d'environ 30% des voix.
Ailleurs, et plus particulièrement en Suisse alémanique, le canton dispose si ce n'est de tous les pouvoirs en tout cas de la très grande majorité des pouvoirs. Nous n'en demandons pas tant ! Tout ce que nous demandons, c'est qu'au moment où le canton est appelé à apporter une seconde importante contribution - celle qui sera à vrai dire décisive pour sauver la banque - celui-ci dispose de la majorité des voix. Cela paraît naturel, et c'est ce qui se passe dans n'importe quelle société privée ! Cela nous paraît indispensable aujourd'hui parce qu'une banque, et surtout lorsqu'elle se trouve en difficulté, ne peut pas être gérée de manière efficace s'il n'y a pas de majorité à l'assemblée générale.
Or, la situation actuelle fait que, pour des raisons historiques, le capital-actions est dispersé entre l'Etat, les communes et des particuliers. C'est une singularité de Genève, puisque dans le cadre de la révision de la loi fédérale sur les banques à laquelle j'ai participé il y a une année le Sonderfall Genf a été expressément consacré dans la loi fédérale sur les banques, concernant précisément cette dispersion du capital entre l'Etat et les communes. Mais lorsqu'il faut prendre des décisions, qui plus est des décisions importantes, il convient d'avoir une vraie majorité. Cette majorité se justifie non seulement par rapport à la participation financière de l'Etat mais, surtout, pour que des décisions qui ont trop tardé puissent effectivement être prises et pour garantir cette prise de décisions.
Bien entendu, ce projet de loi, dont nous souhaitons également le renvoi en commission, devra être examiné attentivement. Il faudra que nous sachions exactement quelles sont les exigences émises par la Commission fédérale des banques et nous assurer que les participations prévues sont suffisantes. Nous attendons évidemment également de connaître l'autre volet législatif que le Conseil d'Etat promet, à savoir la création de cette entité... Faut-il l'appeler «entité de défaisance», comme le fait la Commission fédérale, ou faut-il l'appeler «entité de valorisation» de biens, qui sont réels mais qui sont grevés de dettes ? Peu importe ! Il s'agit là de l'autre volet très important sur lequel nous ne pourrons pas nous prononcer ce soir.
Nous voudrions toutefois souligner, vu l'apport financier de l'Etat, qu'il est important que les actifs qui seront remis à cette entité ne soient pas bradés et que le Conseil d'Etat puisse donner son accord aux solutions qui seront trouvées par cette entité. En effet, il serait très grave, après que l'Etat eut apporté deux fois des contributions financières particulièrement importantes, que certains actifs soient bradés et que des intérêts publics qui ont été lésés continuent à l'être, comme cela a été le cas dans le cadre de la gestion malheureusement défaillante des deux banques qui ont fusionné dans la Banque cantonale de Genève, sans parler d'un certain nombre d'erreurs qui ont été commises par la suite.
Mme Christine Sayegh (S). Ce projet de loi fait partie des mesures d'assainissement proposées par le Conseil d'Etat. Nous remarquons avec satisfaction que le Conseil d'Etat a pris conscience de son devoir de contrôle, non seulement en tant qu'autorité exécutive de notre canton mais également en tant qu'actionnaire et en tant que garant de la Banque cantonale de Genève.
Ce premier projet de loi répond déjà partiellement à la motion que nous avons mise en conclusion du rapport de la commission d'enquête, aussi nous le soutenons et acceptons bien évidemment son renvoi en commission.
M. Jean-Marc Odier (R). Ce projet de loi est une nouvelle possibilité pour le groupe radical de réaffirmer la nécessité, pour l'économie genevoise et en particulier pour les PME, de pouvoir compter sur l'appui d'une collaboration bancaire différente : une collaboration de proximité, une collaboration affinée aux particularités des acteurs de la vie économique genevoise. Une collectivité publique qui s'engage dans le capital d'une banque cantonale n'attend pas de cette banque qu'elle accorde des conditions financières de faveur. La collectivité souhaite que la banque développe une motivation particulière envers la clientèle cantonale individuelle ou PME, notamment par la promotion active de produits capables de générer un essor économique direct ou indirect, ou par des spécificités complétant le service bancaire ordinaire en apportant un réel soutien logistique.
Atteindre les objectifs d'une banque cantonale peut comporter des risques spécifiques notamment pour deux raisons :
La première est le risque de subir, d'une manière ou d'une autre, une influence politique au détriment de la pure analyse financière.
La deuxième raison est que les moyens mis en oeuvre pour atteindre les objectifs d'une banque cantonale sont coûteux et que la propre rentabilité de la banque ne lui permet pas forcément de dégager un bénéfice suffisant à la constitution de réserves et, par la suite, à l'augmentation de son capital.
Aidés par une conjoncture de crise économique, ces deux facteurs risques ont agi, nécessitant aujourd'hui de consolider le bilan de la banque. L'augmentation du capital doit permettre le développement des affaires donc du cash-flow et, d'un autre côté, la société de valorisation recueillera les mauvaises créances. La décision de la banque, soutenue par le Conseil d'Etat, de proposer un assainissement sur les deux facteurs : capital et créances, est une proposition certes brutale, mais juste. Car une demi-mesure ne permettrait pas à la banque de poursuivre sur une base saine.
Nous devons aller de l'avant, et c'est dans l'intérêt général que l'Etat, la Ville et l'ensemble des communes doivent impérativement rester solidaires par leur nouvel engagement. Si les erreurs du passé ne doivent pas nous empêcher d'aller de l'avant, en revanche nous devons en tirer certaines conclusions.
S'il est entendu que la recherche du profit maximum d'une banque cantonale est pondérée par sa vocation de collaboration à l'essor économique du canton, la direction d'une telle banque doit absolument se dégager de l'influence politique. La répartition actuelle entre l'actionnariat public et privé n'est pas propice à la diminution de cette influence politique, et il serait important à l'avenir de penser à ouvrir davantage le capital de l'actionnariat privé.
Le groupe radical approuve l'orientation du Conseil d'Etat, et soutiendra sa proposition après une étude attentive en commission du projet de loi.
Mme Micheline Calmy-Rey. Je ferai simplement quelques remarques.
La volonté du Conseil d'Etat est d'avoir une banque cantonale forte, capable d'assumer son rôle dans le développement économique local. D'ailleurs, la loi sur la banque cantonale précise que son but principal est : de contribuer au développement économique du canton et de la région. Et c'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat se tient aujourd'hui au côté de la banque pour la soutenir dans sa démarche d'assainissement.
La deuxième chose que je voulais vous dire a trait à la surveillance de la banque. Pendant longtemps, il a été dit que la surveillance de la banque était entièrement à la charge de la Commission fédérale des banques. Aujourd'hui, nous sommes conscients de la responsabilité que doit assumer également le canton dans la surveillance de la banque : le canton en tant qu'actionnaire principal, qui détient 39% des voix - 33% du capital - et le canton qui assure une garantie de plus de 4 milliards sur les dépôts d'épargne.
Par conséquent, aujourd'hui, nous nous donnons les moyens de pouvoir assurer cette surveillance ; nous en prenons et nous en assumons la responsabilité.
Par ailleurs, le Conseil d'Etat donne les moyens nécessaires à la banque pour la rendre capable de faire table rase de son passé. Et le projet de loi qui vous est soumis ce soir n'est qu'une des mesures d'assainissement qui est prévue. Cette mesure sera assortie d'une série d'autres mesures et en particulier de la plus spectaculaire d'entre elles : la création d'une société de «défaisance», avec la garantie de l'Etat ! Du reste, j'espère pouvoir vous présenter le projet de loi sur la garantie de l'Etat d'ici peu, mais il doit être précédé d'un inventaire de tous les biens à transférer, des provisions y relatives, pour que nous puissions fixer l'enveloppe de transfert.
Enfin, les mesures prises sont une bonne chose pour la banque. Nous espérons qu'elles lui permettront de continuer et de repartir sur de bonnes bases, avec des fonds propres corrects, pour assurer le développement de ses nouvelles activités et pour lui garantir un développement de son cash-flow.
Par rapport à la politisation - ce sera ma conclusion - le canton, alors qu'il assume la totalité des risques liés à l'assainissement, est actuellement dans une situation d'actionnaire minoritaire, ce qui est évidemment la situation la plus défavorable possible pour assumer correctement les prises de risques liées à cette opération d'assainissement.
Je vous remercie du bon accueil que vous réserverez à ce projet, et je me réjouis d'en parler avec vous en commission.
Ce projet est renvoyé à la commission des finances.
Présidence de M. Daniel Ducommun, président
Le président. M. le député Grobet a fait la proposition, qui n'a pas été contestée, de traiter ce soir le point 71 de notre ordre du jour, projet de loi 8149-A.
Présidée par M. Michel Balestra, la Commission judiciaire s'est réunie à quatre reprises, du 13 janvier au 10 février 2000, pour achever de démêler l'écheveau juridique qu'est devenu le statut des agents municipaux de la Ville de Genève. Accompagnant la commission dans les méandres de ce dossier, MM. Christophe Friederich, secrétaire adjoint/DJPT et Laurent Walpen, chef de la police/DJPT ont apporté leur contribution à cette oeuvre de salut public. M. le conseiller d'Etat Gérard Ramseyer a, quant à lui, éclairé par intermittence les travaux de la commission, du fait d'une grippe passagère et de ses nombreux rendez-vous. Quant à Mme Pauline Schaefer, procès-verbaliste, elle a très consciencieusement marqué de son stylo assuré les étapes des travaux de notre commission, qu'ils en soient ici tous remerciés.
Préambule
Au-delà de la problématique juridique, le statut des agents de sécurité municipaux soulève quelques problèmes politiques qu'il est utile d'identifier :
La mise en place des zones bleues ou, plus généralement, la nouvelle politique de stationnement doit-elle être accompagnée de moyens adéquats tant en postes de travail qu'en modifications routières pour être mise en oeuvre et être réellement efficace ?
Au manque de poste de policiers dénoncé régulièrement par M. Gérard Ramseyer au moyen de graphiques et de statistiques, peut-on répondre par une meilleure synergie entre les effectifs des agents municipaux des communes, en particulier ceux de la Ville de Genève, et le corps de police cantonal ?
Historique
La loi sur la police a été modifiée le 5 novembre 1998 pour introduire les nouveaux statuts d'agents de sécurité municipaux et d'agents municipaux affectés au contrôle des véhicules (concept dit ASM 2000 qui permet notamment une coopération accrue (patrouilles mixtes) entre la police cantonale et les agents de sécurité municipaux des communes). Dans ce contexte, la Constitution genevoise, qui contenait une disposition particulière applicable à la Ville de Genève (art. 156, al. 2) prévoyant que les agents municipaux de la Ville ne pouvaient s'occuper que de la surveillance des halles et des parcs, a également été abordée. En effet, en raison d'une rédaction très restrictive de cet article constitutionnel, il n'est pas possible que ces agents notifient des amendes d'ordre ou dressent des rapports de contravention comme la loi le stipule pour les autres communes qui ne sont pas soumises à un tel article constitutionnel.
Ainsi, lors de l'adoption par le Grand Conseil de l'article 125A nouveau de la Constitution permettant, en son alinéa 3, de déléguer au personnel qualifié des communes des pouvoirs de police limités, en particulier de percevoir des amendes d'ordre relevant de la législation fédérale sur la circulation routière (article approuvé le 13 juin 1999 par le corps électoral), cette disposition a été complétée d'une disposition transitoire (article 182 de la Constitution) ayant la teneur suivante :
L'abrogation de l'article 156, alinéa 2, n'entre en vigueur qu'au moment où la loi adoptée en application de l'article 125A, alinéa 3, a réglé les rapports entre l'Etat et la Ville de Genève concernant la délégation à cette dernière de pouvoirs de police limités.
Dès lors que l'alinéa 3 de l'article 125A de la Constitution est entré en force, il convenait de modifier la loi sur la police et la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière pour permettre à la Ville de Genève d'intégrer le concept ASM 2000, et donc de mettre des amendes d'ordre et de faire appliquer de nombreuses lois et règlements cantonaux. Tel est le but de ce projet de loi dont l'adoption est indispensable pour que l'article 156, alinéa 2, de la Constitution, limitant les compétences des agents municipaux de la Ville de Genève, soit définitivement abrogé et que ces derniers puissent non seulement retrouver les prérogatives qui leur ont été déniées par un arrêt du Tribunal fédéral fondé sur l'application de l'article constitutionnel précité, mais encore intégrer le concept ASM 2000 et bénéficier ainsi de compétences plus étendues.
En substance, ce projet de loi vise au toilettage de l'article 4 et à l'abrogation y consécutive de l'article 4A de la loi sur la police, d'une part, et à donner la possibilité à la Ville de Genève d'intégrer le concept ASM 2000, d'autre part. De plus, lorsque la loi sur les agents de sécurité municipaux a été adoptée, il a été précisé que le Conseil d'Etat fixait les prérogatives des agents de sécurité municipaux. Ainsi, quatorze communes, sans la Ville de Genève, bénéficient aujourd'hui d'un traitement identique normalisé par le Conseil d'Etat; quatre ou cinq communes supplémentaires de la rive droite ont d'ores et déjà émis l'idée d'intégrer, elles aussi, le concept ASM 2000.
Enfin, il s'agissait pour la Commission judiciaire de proposer une nécessaire clef de répartition du fruit des amendes d'ordre entre l'Etat et la Ville de Genève, l'intégration de la Ville dans le concept ASM 2000 étant susceptible de représenter une perte financière de l'ordre de 10 à 15 millions de francs pour l'Etat de Genève.
Que font les agents municipaux de la Ville de Genève ?
Les agents ne mettent pas seulement des amendes. Le gros de leur travail consiste à la mise en place des marchés durant la semaine. Il faut savoir que Genève compte 23 marchés hebdomadaires, dont les Puces, les Artisans, fruits et légumes, etc. Ces agents sont responsables des autorisations et des contrôles (exemples : glaciers, étalagistes) et actifs lors de diverses manifestations. Il semble que l'activité d'îlotier se soit fortement développée ces dernières années - les agents sont affectés à des quartiers spécifiques - la « politique îlotière » privilégiant les contacts avec les habitants.
Les agents s'occupent aussi de la surveillance dans les secteurs jeux pour les enfants, ils régulent les conflits entre propriétaires de chiens et entre ces derniers et le voisinage, sans oublier la surveillance permanente dans les parcs. Il a été aussi évoqué par les autorités municipales la possibilité d'organiser la surveillance aux abords des écoles, notamment dans les préaux. Voilà rapidement esquissée l'activité des 70 agents de Ville.
Une histoire de gros sous
Considérant que la Ville de Genève a encaissé 5 millions de francs en 1998 par le biais des amendes d'ordre et des contraventions de droit cantonal, le Conseil d'Etat a négocié l'an dernier une clef de répartition provisoire dans le but de se donner le temps de négocier les conditions de mise en place du statut des ASM en Ville de Genève.
Lorsqu'on se penche sur le détail des chiffres, il est articulé le montant de 3,6 millions de francs pour les amendes d'ordre, sans oublier de rappeler que lorsque les amendes d'ordre restent impayées à la Ville, elles sont alors transformées en contraventions, dont le recouvrement est effectué par et au profit de l'Etat de Genève.
Produit des amendes d'ordre (LCR exclusivement)encaissées par la Ville de Genève
1996 : frs. 3'048'761.-
1997 : frs. 3'276'481.-
1998 : frs. 3'417'528.-
Contentieux renvoyé au canton
1996 : frs. 234'000.-
1997 : frs. 318'000.-
1998 : frs. 1'635'000.-
Auditions de Mme Janine Currat, directrice, Département des sports et de la sécurité, M. Dominique Clavien, chef de service, Service des agents de Ville et du domaine public, M. André Hediger, conseiller administratif, chef du Département des sports et de la sécurité, et de M. André Schmidlin, responsable administratif, Service des agents de Ville et du domaine public.
En préambule, M. Hediger rappelle qu'à la suite d'un arrêt du Tribunal fédéral stipulant que la situation des agents municipaux de la Ville de Genève était inconstitutionnelle, ceux-ci ont dû cesser de mettre des amendes d'ordre, ce qui a provoqué une perte de recettes. En juin 1999, poursuit le conseiller administratif, le peuple a approuvé l'abrogation de l'article constitutionnel incriminé. M. Hediger évoque, au surplus, l'existence de la disposition transitoire. Cela étant précisé, l'intervenant laisse entendre que la Ville souhaite être mise sur le même pied que les autres communes, mais qu'il faudrait pourtant donner un statut spécifique à la Ville de Genève.
Au surplus, la question de la compétence des agents municipaux de la Ville de Genève doit également être débattue. M. Hediger estime que ces personnes devraient pouvoir être dotées d'un certain nombre de pouvoirs, dont le maintien de la sécurité aux abords des écoles où l'on rencontre des problèmes de violence et de drogue. A l'heure actuelle, rappelle M. Hediger, ces agents ne sont pas habilités à procéder à des contrôles d'identité, ni à des fouilles. En définitive, M. Hediger signale que le Conseil administratif (ci-après CA) de la Ville de Genève souscrit à ce projet de loi aux fins d'obtenir les mêmes avantages que les autres communes.
Un député interpelle l'intervenant en voulant d'abord clarifier un point. M. Hediger, en effet lors de cette audition a laissé aussi entendre que le CA de la Ville souhaitait que les recettes des parcomètres reviennent à la Ville. Ce député aimerait dès lors s'assurer qu'elle est bien consciente du fait que, dans la mesure où on légifère ici pour permettre aux agents de la Ville de verbaliser, ils n'auront pas le monopole. Ainsi, précise le député, la brigade des contractuels de la police en Ville et les agents de police seront-ils toujours actifs dans ce domaine, si bien que les agents de Ville constitueront la troisième force : « la loi proposée ne vise pas à donner le monopole à la Ville ». Quant aux agents de Ville, ce député observe que la loi sur la police ne parle pas d'agents de Ville, mais d'agents de sécurité municipaux et d'agents municipaux affectés exclusivement au contrôle des véhicules en stationnement, avec des compétences qui ne sont pas les mêmes. La Ville accepte-t-elle désormais ces statuts d'agents de sécurité municipaux et d'agents municipaux affectés exclusivement au contrôle des véhicules en stationnement, tels que définis dans la loi sur la police ?
M. Hediger répond que oui. Il s'engage même à l'attester par écrit au nom du Conseil administratif.
Pour terminer cette audition, M. Schmidlin fait savoir que le budget de fonctionnement du service s'élève à 12 millions de francs et que les salaires représentent 9 millions de francs.
Discussion au sein de la commission
Une députée estime que ces 70 personnes se déplacent pour faire de la dénonciation et qu'elles sont actuellement empêchées d'exécuter ce mandat, alors que M. Ramseyer répète à l'envi qu'il manque de policiers pour toute une série de tâches. Il y a de quoi s'étonner. Ne faudrait-il pas enlever des tâches relatives aux amendes aux policiers pour les donner aux agents ?
Au titre d'exemple, M. Friederich signale que, pour l'année 1998, le produit de toutes les infractions à la LCR avoisine les 35 millions de francs pour le canton, mais que ce chiffre n'inclut pas les amendes d'ordre infligées par les communes et, en particulier, la Ville de Genève, sur la base des conventions en vigueur. M. Friederich voudrait encore donner quelques chiffres sur les contrôleurs du stationnement. En ce qui concerne l'année 1999, il articule pour ce corps cantonal une estimation de ce qui a été encaissé sur le territoire de la Ville de Genève de l'ordre de 11 millions de francs, selon les sources de M. Pierre Hospital, directeur, Service des contraventions/DJPT. L'estimation de l'ensemble des amendes d'ordre encaissées par la police cantonale sur la Ville de Genève se monte à environ 12 millions, ajoute le représentant du DJPT, dont 11 millions du Service des contrôleurs du stationnement. Toutefois, selon la catégorie, cela peut changer car les amendes d'ordre peuvent ensuite passer en contraventions, si bien que s'ajoutent des frais et des émoluments.
Un autre député remarque que s'il est vrai de dire que le projet de loi dont on discute ne traite que d'une partie du problème relatif aux doublons, le commissaire juge pourtant que si l'on pouvait, à cette occasion, apporter quand même une réponse globale et définitive, il faudrait tenter d'y parvenir et ce député d'inviter la commission à aller dans ce sens. En effet, pour ce député, quand M. Ramseyer réclame un certain nombre de postes dans la police, on pourrait lui répondre qu'en collaborant davantage avec les agents de Ville, il serait alors possible de trouver une solution partielle, même si l'on perdait quelques millions. Ce député conclut qu'il est préférable de voir les choses sous cet angle, plutôt que de dépenser cet argent pour des postes de policier. L'ensemble des commissaires semble adhérer à ces propos.
Pour une autre députée, il s'agit seulement de restituer aux agents de la Ville les prérogatives qu'ils exerçaient précédemment, soit avant que l'arrêt du Tribunal fédéral ne considère qu'ils n'avaient pas le droit de verbaliser, tout en étendant leurs compétences à celles actuellement admises pour les ASM.
Les commissaires tombent d'accord sur le fait que cette affaire doit avancer et qu'elle ne doit pas être englobée dans une vaste réflexion de réorganisation (tous les doublons) avec la Ville qui risque de prendre du temps. Aux yeux de la commission, il est judicieux de régler un à un les problèmes Etat/Ville.
Au terme de cette discussion et en ce qui concerne la clef de répartition financière, l'ensemble des députés estime qu'il est indispensable d'insérer dans la loi une disposition particulière en ce qui concerne la Ville, afin que son intégration dans le concept ASM 2000 puisse satisfaire les parties concernées en rendant, et en étendant même, leurs compétences aux agents municipaux de la Ville et en évitant que les intérêts financiers de l'Etat ou de la Ville de Genève soient lésés. Ainsi, si la Ville encaissait plus de 5 millions par année en amendes d'ordre, le surplus reviendrait à l'Etat à concurrence de 75 %, les 25 % restant servant à défrayer la Ville de Genève pour l'activité qu'elle aura tout de même déployée.
Le président propose qu'on fixe les objectifs au niveau de la stratégie à adopter. Résumant la situation, il constate que :
les commissaires sont d'accord que la Ville et ses agents doivent adhérer au statut des ASM ;
les députés s'accordent à dire que l'opération financière (clef de répartition Ville/Etat) doit être arbitrée par le Grand Conseil. S'il est insatisfaisant de penser que septante agents sont dépourvus de statut, il ne faut pas non plus que l'opération se fasse au détriment de quiconque ;
la gestion du contentieux doit être rationalisée et donc prise en charge par un seul service.
Commentaire article par article
Loi sur la police
Article 4 (nouvelle teneur)
La distinction entre la Ville de Genève et les autres communes du canton ne se justifiant plus du fait de la suppression de l'article 156, al. 2 de la Constitution genevoise, l'article 4A de la loi sur la police devient l'article 4, qui est modifié en conséquence, l'article 4A étant abrogé.
Note marginale et alinéa 1
La note marginale de l'article 4 et l'alinéa 1 sont modifiés pour viser tous les types d'agents que les communes sont autorisées à avoir et une lettre c) est introduite à l'alinéa 1 dans le même but, ce qui entraîne la disparition de la teneur actuelle de l'alinéa 3.
Alinéas 2, 3 et 4
Ces alinéas sont des reprises des alinéas correspondants de l'actuel article 4A, auxquels les gardes auxiliaires visés par le nouvel article 4, alinéa 1, lettre c) sont ajoutés pour rappeler leurs statut, rattachement organique et compétence territoriale.
Alinéa 5, 1er paragraphe et lettres a) à e)
Cet alinéa est la reprise de l'actuel alinéa 5 de l'article 4A. Pour plus de clarté, il a été spécifié que les dispositions transitoires visées par cette disposition sont celles du règlement d'exécution et non celles de la présente loi.
Alinéa 6
Cet alinéa est une reprise conforme de l'actuel alinéa 6 de l'article 4A.
Alinéa 7
L'actuel alinéa 7 de l'article 4 A est modifié pour englober toutes les infractions visées par les compétences des agents de sécurité municipaux et des agents municipaux. En effet, la seule référence à des contraventions, qui concernent en l'espèce des infractions au droit cantonal, peut laisser entendre que l'obligation de mentionner les modalités de contestation ne concerne pas les amendes d'ordre, qui relèvent pour leur part de la législation fédérale. Par ailleurs, la compétence formelle de sanctionner des contraventions appartenant actuellement seulement au chef de la police, aux officiers de police et aux maires (cf. infra ad art. 3, al. 2), il convient de supprimer le membre de phrase qui laisse penser que les agents de sécurité municipaux et les agents municipaux ont la compétence de sanctionner eux-mêmes ces types d'infraction.
Alinéas 8 et 9
Ces alinéas sont des reprises conformes des alinéas 8 et 9 de l'article 4A.
Alinéa 10
Nouveau, cet alinéa est destiné à garantir la neutralité financière de l'intégration de la Ville de Genève dans le concept ASM 2000. En effet, les compétences des agents de sécurité municipaux et des agents municipaux sont très considérablement étendues en matière de contrôle du stationnement des véhicules et de circulation routière par rapport à celles qui découlaient de la convention du 10 mai 1982 conclue entre l'Etat et la Ville de Genève, jugée anticonstitutionnelle par le Tribunal fédéral. Les agents de sécurité municipaux et agents municipaux de la Ville de Genève présentent par conséquent un risque important de « concurrencer » fortement les contrôleurs du stationnement, qui relèvent de l'Etat, avec comme conséquence une perte potentielle de l'ordre de 12 à 15 millions de francs par année pour ce dernier. Le montant de cinq millions de francs (5'000'000 F) prévu par cet alinéa, qui ne concerne que les amendes d'ordre découlant de la loi fédérale sur les amendes d'ordre, à l'exclusion donc des contraventions découlant de la législation cantonale, réserve une marge de croissance non négligeable (env. 40 %) à la Ville de Genève sur ce point, le produit encaissé par celle-ci en 1998 de ce chef de compétence s'élevant à trois millions six cent mille francs (3'600'000 F). La clé de répartition prévue (25 %/75 %) vise à permettre à la Ville de Genève de couvrir ses frais pour les amendes d'ordre perçues au-delà de la limite de cinq millions de francs, étant rappelé que le produit des contraventions en vertu du droit cantonal n'est pas soumis à ce plafond.
Dispositions transitoires (art. 2)
Afin de permettre à la Ville de Genève de répondre aux exigences posées par le règlement sur les agents de sécurité municipaux, du 12 mai 1999, un délai au 30 juin 2001 lui est accordé pour faire acquérir la formation nécessaire à ses agents de Ville.
Dans ce délai, les agents de Ville auront les compétences déterminées par cet alinéa et seront ainsi globalement mis dans la situation qui était la leur avant l'arrêt du Tribunal fédéral jugeant anticonstitutionnelle la convention du 10 mai 1982 conclue entre l'Etat et la Ville de Genève, les problèmes de leur compétence et de la validité des amendes d'ordre qu'ils pourraient infliger ne se posant plus.
Modifications à d'autres lois (art. 3)
Alinéa 1
La distinction entre la Ville de Genève et les autres communes ne se justifiant plus, l'art. 12, al. 3 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière, du 18 décembre 1987, doit être adapté pour faire suite de la fusion de ses lettres a) et b), dont l'existence séparée n'a plus de raison d'être.
Alinéa 2
Dans sa teneur actuelle, l'article 212 alinéa 1 du code de procédure pénale, du 29 septembre 1977, prévoit, au niveau des communes, que seul le maire est habilité à sanctionner des infractions constituant des contraventions passibles des peines de police et pour lesquelles seule une amende apparaît justifiée. Pour les communes disposant d'un conseil administratif, cela a comme conséquence que les conseillers administratifs ne bénéficient pas de ce pouvoir.
Compte tenu des compétences accrues dévolues aux communes et de la charge de plus en plus lourde qui pèse sur les maires, il s'avère souhaitable de permettre, le cas échéant, aux autres membres du Conseil administratif, qui sont également des élus, de se voir accorder cette compétence, tout particulièrement pour ce qui concerne le conseiller administratif responsable de la sécurité.
Ainsi, la Commission judiciaire vous recommande à l'unanimité d'accepter le projet de loi 8149 ainsi modifié.
Premier débat
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur. Je vais en préambule situer un peu les enjeux du débat. Il s'agit de redonner à septante agents municipaux la prérogative d'infliger des amendes d'ordre.
Nous proposons cela pour deux raisons : d'une part, la Ville de Genève a mis en place des zones bleues, et il faut faire respecter cette nouvelle politique étant donné que des parcages un peu impromptus se font dans ces zones, et, d'autre part, nous espérons que ce projet de loi, s'il est accepté en plénière, évitera un certain nombre de doublons, notamment en redonnant cette prérogative aux agents municipaux, qui déchargeront un minimum - ou un maximum - les policiers et les gendarmes de notre ville, qui infligent des amendes quasiment quotidiennement.
Voilà, Monsieur le président. Je mentionnerai en temps voulu certaines modifications très légères du texte du projet de loi, mais j'y reviendrai au moment du deuxième débat.
Autre point important : en commission, nous avions exigé, puisqu'il y a évidemment une question de gros sous derrière ce projet de loi, que la Ville de Genève puisse à nouveau infliger des amendes d'ordre, ce qui veut dire qu'il lui reviendrait 5 millions, voire plus : 25% du solde de ces amendes. Mais, en contrepartie, la Ville de Genève doit s'engager à s'aligner sur les normes de l'ensemble des communes s'agissant des agents de sécurité municipaux. Nous avons écrit, le président de la commission et moi-même, à la Ville de Genève qui nous a fait parvenir hier une lettre ratifiant la position de la Ville de Genève et du conseiller administratif Hediger, disant que la Ville de Genève est d'accord de se soumettre au régime ASM, dans les meilleurs délais et selon des modalités à préciser.
Je crois avoir fait le tour des points essentiels de ce projet de loi.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur. Si vous avez des amendements à proposer, il faudra nous les faire parvenir. Nous votons maintenant la prise en considération de ce projet de loi.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Article 1 (souligné)
Art. 4
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur. Nous proposons une modification à l'article 4, alinéa 5, lettre d) qui consiste à remplacer : «...du produit des amendes relatives aux contraventions sanctionnées par ces agents...» par : «...du produit des amendes relatives aux amendes d'ordre infligées et aux contraventions dénoncées par ces agents...». Cela dans le but d'être plus précis au niveau des prestations effectuées par ces agents.
Le président. Je suis désolé, Monsieur le rapporteur, mais il faudrait me faire parvenir cet amendement !
Monsieur le rapporteur, nous avons accepté de traiter ce projet de loi en urgence pensant que la commission unanime avait accepté ce texte...
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur. Je précise que je suis intervenu, parce que le département de justice et police et des transports m'a adressé un mail pour apporter une modification à ce texte. Cette modification se justifie pour que le texte corresponde à l'esprit de la loi. Je vous en fais donc simplement part, mais si vous n'en voulez pas tant pis ! La loi sera votée comme cela... Cela ne change strictement rien sur le fond !
Le président. Le Bureau n'ayant toujours pas cet amendement, je poursuis la lecture des articles !
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que les articles 2 et 3 (soulignés).
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(8149)
modifiant la loi sur la police (F 1 05)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La loi sur la police, du 26 octobre 1957, est modifiée comme suit :
Art. 4 Agents de sécurité municipaux, agents municipaux et gardes auxiliaires des communes (nouvelle teneur)
1 Les communes peuvent avoir :
2 Les agents de sécurité municipaux, les agents municipaux et les gardes auxiliaires sont aux frais des communes. Leur nomination doit être approuvée par le département. Ils ne sont pas armés.
3 Les agents de sécurité municipaux, les agents municipaux et les gardes auxiliaires sont engagés par les communes et soumis à l'autorité du maire ou du Conseil administratif.
4 Les agents de sécurité municipaux, les agents municipaux et les gardes auxiliaires exercent leurs attributions sur l'ensemble du territoire de leur commune. En vertu d'accords intercommunaux, l'exercice des attributions des agents de sécurité municipaux peut être étendu au territoire d'une ou de plusieurs autres communes.
5 Le Conseil d'Etat fixe, en accord avec chaque commune concernée, les conditions dans lesquelles les agents de sécurité municipaux et les agents municipaux peuvent exercer leurs compétences, notamment en ce qui concerne :
6 Le Conseil d'Etat fixe, en accord avec chaque commune concernée :
7 Les formules relatives aux amendes d'ordre et aux contraventions doivent mentionner les modalités de contestation.
8 Le Conseil d'Etat fixe, en accord avec chaque commune concernée, les modalités d'accomplissement de missions des agents de sécurité municipaux en commun avec la police. Dans ce cas, la compétence territoriale de ces agents s'étend à l'ensemble du territoire cantonal.
9 Les agents de sécurité municipaux sont habilités à exiger de toute personne qu'ils interpellent qu'elle justifie de son identité si ce contrôle se révèle nécessaire à l'exercice des compétences qui leur sont attribuées. Si la personne n'est pas en mesure de justifier de son identité, elle peut être conduite dans un poste ou un bureau de police.
10 Lorsque le produit des amendes d'ordre encaissées par la Ville de Genève dépasse 5 millions de francs sur une année civile, le surplus est partagé avec l'Etat, à concurrence de 75% pour celui-ci et de 25% pour la Ville de Genève.
Art. 4A (abrogé)
Article 2 Dispositions transitoires
1 Un délai au 30 juin 2001 est accordé à la Ville de Genève pour se conformer aux exigences du règlement sur les agents de sécurité municipaux, du 12 mai 1999.
2 Tant qu'ils n'ont pas acquis la formation d'agent de sécurité municipal, les agents de Ville de la Ville de Genève ne peuvent que :
Article 3 Modifications à d'autres lois
(H 1 05)
1 La loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière, du 18 décembre 1987, est modifiée comme suit :
Art. 12, al. 3 (nouvelle teneur)
3 Les agents de sécurité municipaux et les agents municipaux, dans les limites fixées par la loi, en application de l'article 4 de la loi sur la police, du 26 octobre 1957, sont également compétents pour infliger des amendes d'ordre.
(E 4 20)
2 Le code de procédure pénale, du 29 septembre 1977, est modifié comme suit :
Art. 212, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Lorsque le chef de la police, les officiers de police ou les maires et conseillers administratifs reçoivent des procès-verbaux ou des rapports relatifs à une infraction passible des peines de police et qu'ils estiment que seule l'amende doit être prononcée, ils fixent le montant de celle-ci et en avisent le contrevenant.
En date du 3 décembre 1998, le Grand Conseil a renvoyé au Conseil d'Etat une motion qui a la teneur suivante :
« Le Grand Conseil de la République et canton de Genèveconsidérant :
¾ qu'en matière de politique énergétique comme dans d'autres domaines, les cloisonnements administratifs sont générateurs de blocages ;
¾ le fait que le label E 2000 est encore très mal connu en Suisse romande, et à Genève en particulier ;
invite le Conseil d'Etat :
¾ en particulier, à mieux informer l'économat cantonal de l'existence du label Energie 2000, et à encourager celui-ci à acheter dans la mesure du possible des appareils qui portent ce label (ordinateurs, fax, modems, photocopieurs...) ;
¾ et à faire rapport sur tous ces sujets au Grand Conseil ».
La question soulevée par les motionnaires touche plusieurs domaines, qui sont abordés dans le même ordre par le rapport du Conseil d'Etat.
Collaborations et synergies possibles avec les organismes fédéraux d'Energie 2000
La collaboration avec Energie 2000 et les organismes fédéraux est permanente, même si, comme le relèvent les motionnaires, occasionnellement la coordination n'a pas été parfaite. Il faut prendre en compte le fait que la Confédération a une mission d'envergure nationale, qui ne peut s'adapter aux spécificités de chaque dossier ni à celles de chaque canton. De son côté, l'administration cantonale, et plus particulièrement l'OCEN, a justement cette opportunité d'intégrer chacun des projets dans la politique énergétique locale.
A Genève, le droit cantonal a largement précédé le droit fédéral et les quelques dysfonctionnements qui ont pu être constatés dans la conduite des programmes sont, pour la plupart, inhérents à ce décalage mais restent totalement marginaux par rapport à l'immense travail produit ensemble, que ce soit avec les autres cantons romands, avec les cantons suisses ou avec la Confédération.
Quelques exemples qui illustrent la variété des collaborations sont cités ci-dessous :
· Harmonisation des législations cantonales par le développement d'outils communs d'application. Le préavis thermique appliqué à toutes les requêtes en autorisation de construire de bâtiments est issu de l'un de ces projets.
· Mise en place de dispositions cantonales semblables pour l'application du décompte individuel des frais de chauffage (DIFC) en Suisse romande (Genève, Vaud, Neuchâtel, Fribourg, Valais, sauf Jura).
· Recherche de solutions communes au niveau suisse pour favoriser les véhicules à faible consommation d'énergie.
· Partage des ressources romandes en matière d'information. Par exemple, le magazine l'Energie est né à Genève. Puis il est devenu romand avec l'appui de la Confédération et maintenant il est Energie et Environnement, organe des cantons et de la Confédération pour ces deux domaines.
· Développement romand des activités pédagogiques.
· Edition des recommandations pour les matériaux écologiques sur la base des travaux d'un groupe associant des municipalités, des organismes cantonaux et fédéraux et des entités privées.
· Diffusion au niveau suisse des outils de diagnostic développés lors de l'étude sur l'indice électrique.
Le Conseil d'Etat saisit cette occasion pour préciser que la loi fédérale sur l'énergie, entrée en vigueur au 1er janvier 1999, va dès l'an 2000 profondément influencer les attributions respectives de la Confédération et des cantons. Mais ce sont surtout les décisions qui seront prises quant à l'avenir des divers projets de taxe sur l'énergie ou le CO2 qui vont probablement bouleverser le paysage de la politique énergétique conduite par les collectivités. Le Conseil d'Etat suit avec beaucoup d'attention ces développements et essaie, dans la mesure du possible, d'anticiper ces mutations afin que Genève puisse, dès que les incertitudes seront levées, profiter pleinement des nouvelles conditions.
Enfin, revenant sur l'exposé des motifs des motionnaires, le Conseil d'Etat tient à préciser que l'étude sur l'indice électrique a été prise en charge pour moitié par la Confédération en raison de son intérêt, et d'autre part que cette étude a fait l'objet d'un projet de loi (PL 6757) qui a été approuvé par le Grand Conseil. Quant aux résultats, ils ouvrent des perspectives particulièrement intéressantes et l'OCEN vient d'organiser des cours de formation à l'attention des professionnels électriciens pour qu'il soit largement fait usage de cette nouvelle possibilité de maîtriser les consommations d'énergie électrique dans les immeubles locatifs. La Confédération, de son côté, souhaite à notre connaissance également diffuser cet outil au niveau suisse.
Utilisation du label Energie 2000 à l'Etat
Dès l'apparition du Label Energie 2000, l'économat cantonal a été informé et invité à prendre ce critère en compte. Auparavant, en 1988, l'économat cantonal en collaboration étroite avec l'OCEN, avait mis en place une opération de changement des lampes, dont on rappelle qu'elle a généré une économie d'environ un million de KWh par an.
Plus récemment, en 1999, de nouveaux travaux ont été engagés par ces deux services pour la qualification de luminaires sur pied équipés de lampes économiques et de régulation automatique. Il est intéressant de souligner à ce propos que c'est une entreprise genevoise qui a proposé un produit efficace et 30 % moins cher que le meilleur marché des produits concurrents en lice dans le cadre de l'appel d'offre.
Cela fait donc dix ans que l'Economat cantonal intègre dans ses critères d'achats d'équipement, des critères de consommation d'énergie. Il poursuivra et même intensifiera ce mouvement à l'avenir notamment dans le cadre de sa politique d'achat qui intègre largement les normes et standards en matière d'écologie et de consommation d'énergie. Par ailleurs, l'économat cantonal est fortement associé et engagé dans le projet de mise en place de l'Agenda 21 au niveau cantonal, dès lors que ses activités constituent un champ d'application direct et naturel pour les principes du développement durable.
En matière informatique, qui relève de la compétence du CTI (Centre des technologies de l'information) pour les aspects techniques et de l'économat cantonal pour les aspects commerciaux, pratiquement tous les matériels utilisés à l'Etat répondent aux labels existants, que ce soit le label européen Energy ou les labels américains ou internationaux EnergyStar et TCO, dont la notoriété est plus grande.
Toutefois, il faut être conscient que d'autres facteurs que des facteurs techniques influencent la consommation d'énergie des ordinateurs personnels. Or, ces facteurs sont fluctuants et susceptibles d'évoluer très vite de sorte que ce qui est vrai aujourd'hui peut être rapidement dépassé.
Il s'avère en effet que la consommation directe des appareils en service, en attente ou à l'arrêt (durant lequel certains sous-ensembles restent sous tension et consomment) ne sont que la première composante de la consommation finale d'énergie résultant de l'usage de l'informatique de bureau.
La seconde composante est formée par les automatismes qui gèrent le passage d'un état à l'autre et par les comportements des utilisateurs. Les automatismes de passage à l'état de moindre consommation étaient, dans la période 1992 à 1998, plutôt commandés par le système interne d'organisation de l'ordinateur alors que la nouvelle tendance est à une commande située dans les logiciels d'exploitation. Bien évidemment, la présence de deux commandes indépendantes pour une même décision est source de conflit. Le CTI et l'OCEN ont lancé courant 1999 un projet visant à assurer une gestion optimale de l'énergie dans la nouvelle plate-forme bureautique de l'Etat et ce problème sera résolu sous peu. L'enjeu est de un million de kWh par an.
Pour influencer le comportement des utilisateurs, on rappellera que le Conseil d'Etat a lancé en 1999 une opération pilote d'information dans 4 bâtiments administratifs de l'Etat. Parmi les messages diffusés aux collaborateurs figurent des consignes d'extinction des ordinateurs et plus spécialement des écrans selon la durée probable de non-utilisation. Cette campagne d'information sera reconduite à plus large échelle dès l'an 2000.
La troisième composante résulte du besoin en équipements annexes. Par exemple, un écran qui n'est pas traité anti-reflets peut conduire son utilisateur à demander des aménagements d'éclairage coûteux, notamment en énergie. Ce problème est aujourd'hui résolu, le traitement anti-reflets est un standard pour tous les écrans à usage professionnel. Second exemple. La densité d'équipements ou plus précisément la densité de dégagements de chaleur internes peut conduire la température des locaux à s'élever au-delà du raisonnablement supportable et rendre nécessaire la mise en oeuvre d'installations de rafraîchissement. Il faut alors payer, en plus de l'électricité utilisée par les appareils,
un investissement pour l'installation de rafraîchissement nécessaire à faire ressortir la chaleur dégagée et
la consommation électrique de cette installation de rafraîchissement (en première approximation; pour un watt dissipé dans le bâtiment, il faut un watt pour le faire sortir).
Cette importante composante est prise en compte lors du concept énergétique des bâtiments publics.
Promouvoir de manière générale les appareils qui permettent un meilleur rendement, comme par exemple la cuisson à haute fréquence pour les cuisines scolaires, les frigos bien isolés, etc. Et les labels qui permettent la transparence de l'achat aux consommateurs.
Des éléments de réponse - toujours d'actualité - ont déjà été donnés à cette question dans le cadre de la réponse à la motion 726. On peut encore préciser ce qui suit.
Le magazine « Energie Environnement » édité notamment par la Conférence romande des délégués à l'énergie et diffusé à 200'000 exemplaires, à Genève, deux fois par an, depuis de nombreuses années, cherche à promouvoir tous les équipements électriques à haute performance parmi lesquels la cuisson à haute fréquence, les frigos à basse consommation, etc. De même, ce magazine fait très régulièrement des rappels sur la valeur du label Energie 2000 et aujourd'hui du nouveau label européen « Energy ».
Dans cet ordre d'idée, l'OCEN a été présent de nombreuses années à la Foire de Genève. Lors de la dernière participation, en 1993, des fiches-conseils ont été développées et publiées pour permettre aux consommateurs intéressés d'évaluer de façon très simple la qualité énergétique des produits proposés dans l'enceinte de Palexpo. La plupart des marques présentes dans la Foire ont été préalablement contactées et ont accepté de faire figurer ces fiches sur leur stand. Ces fiches sont encore disponibles et diffusées actuellement. On citera également le logiciel d'aide au choix des appareils électroménagers, disponible tant au centre d'information sur l'énergie de l'OCEN, qu'auprès de la Fédération romande des consommatrices (FRC) ou d'Electricité romande.
Enfin, la conception générale de l'énergie marque la volonté du Conseil d'Etat d'engager une politique cohérente qui tienne compte des travaux engagés sur le plan fédéral et de la nécessité de structurer une formation incitative aux économies d'énergie.
En conclusion, le Conseil d'Etat entend réitérer son intention de continuer à développer tant la collaboration entre l'administration cantonale et fédérale que la politique d'information, conformément aux dispositions de la conception générale de l'énergie.
Comme le soulignent les motionnaires dans leur propre conclusion, de nouvelles pistes sont explorées et testées en permanence. Les solutions mises en évidence sont partagées au niveau international, confédéral et bien entendu local, par exemple avec les associations professionnelles, les services techniques des communes et de la Ville de Genève. Bien que ces actions concernent tous les domaines de consommations d'énergie et d'eau, le Conseil d'Etat veille également à ce que celles qui concernent l'utilisation efficace de l'électricité soient considérées comme prioritaires afin de contribuer au renoncement à l'importation d'électricité d'origine nucléaire dans le sens de la décision du Souverain de décembre 1986.
Au bénéfice de ces explications, le Conseil d'Etat vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à prendre acte du présent rapport.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
En date du 3 décembre 1998, le Grand Conseil a renvoyé au Conseil d'Etat une motion qui a la teneur suivante :
« Le Grand Conseil de la République et canton de Genève considérant :
que l'information au grand public est l'un des éléments clés d'une politique énergétique ;
qu'une information critique digne de ce nom doit parler de tous les sujets, y compris du nucléaire, pour motiver la population et l'informer ;
que le journal tous ménages « l'Energie », édité par l'OCEN (entre autres), donne l'impression par son absence de réflexion critique, d'être rédigé en partie par des pro-nucléaires.
invite le Conseil d'Etat
à faire rapport un rapport au Grand Conseil sur sa politique d'information au grand public en matière d'énergie. »
La politique d'information au grand public en matière d'énergie s'articule en trois axes principaux :
1. la publication du magazine « l'Energie » devenue aujourd'hui « Energie-Environnement » ;
2. le centre d'information sur l'énergie ;
3. les activités pédagogiques,
auxquels s'ajoutent diverses actions ponctuelles, telles les Rencontres (conférences-débats avec les professionnels).
Le magazine « l'Energie »
Le journal « l'Energie » a été lancé en juin 1988 par l'OCEN. Cette publication diffusée tout ménage est destinée à sensibiliser le public, à lui offrir des conseils pratiques. Elle ne prétend pas détenir la vérité, encore moins la cacher. Ce magazine répond à un voeu d'information clairement exprimé par la population genevoise lors d'un sondage d'opinion réalisé l'année précédente (1987). Le magazine est devenu en 1998 « Energie-Environnement ». Il est aujourd'hui édité par la Conférence romande des délégués à l'énergie, les services romands info-environnement, l'Office fédéral de l'énergie, l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage. Dans aucun des numéros édités à ce jour, le magazine n'a vanté ou critiqué des agents énergétiques. Le magazine veut être une source de conseils pratiques à l'usage du grand public pour une meilleure gestion des ressources énergétiques.
A ce point, le Conseil d'Etat relève qu'il y a dans l'exposé des motifs des motionnaires un curieux amalgame entre le journal « Les cahiers de l'électricité » édité par électricité romande, et donc étranger au débat, et le magazine « Energie-Environnement ». Et c'est pour cette raison que le Conseil d'Etat, lors de la séance du Grand Conseil du 3 décembre 1998 au cours de laquelle la motion a été déposée, a tenu à marquer clairement qu'il n'acceptait pas l'exposé des motifs mais seulement l'invite de la motion. Le magazine « Energie-Environnement » s'est effectivement ouvert en 1997 à des collaborations extérieures; les producteurs d'énergie, à savoir l'électricité, le gaz et les produits pétroliers. Les électriciens, cités par les motionnaires, étaient représentés par « Electricité romande ».
En raison de la difficulté prévisible de collaboration avec certains de ces nouveaux partenaires, une charte déontologique a été mise en place par les cantons comme cadre contraignant à cette expérience. Elle a été appliquée avec rigueur.
Pour des motifs qui lui appartiennent, Electricité romande a préféré cesser sa collaboration fin 1997, après deux numéros. Quant aux éditions parues durant cette période, un examen minutieux montre que les messages que citent les motionnaires dans leur exposé des motifs n'ont jamais réussi à passer le filtre. En même temps, plusieurs dizaines de milliers de francs ont été économisés sur les budgets cantonaux.
Certes, on peut regretter dans un premier temps que les diverses évolutions qu'a subies le magazine au fil des années n'aient pas toutes eu le succès attendu. Néanmoins, le Conseil d'Etat relève que le coût pour le contribuable genevois de l'exemplaire distribué en boîte aux lettres, tous frais confondus, est passé de 1,20 F en 1988 à 12 cts aujourd'hui. Alors qu'en même temps, ce journal a été reconnu par l'ensemble de la Suisse romande et la Confédération et s'est ouvert aux préoccupations de la protection de l'environnement. Il est également nécessaire d'être conscients que cette évolution s'est faite au détriment de l'autonomie rédactionnelle puisqu'aujourd'hui des représentants des nombreuses entités qui l'éditent participent à sa rédaction.
Il faut savoir qu'en raison des difficultés de financement qui ne font que s'accroître, les cantons romands ont remis en discussion, tant sur le fond que sur la forme, la suite qui doit être donnée à cette publication pourtant essentielle à leurs yeux. D'une part, la contribution fédérale n'est garantie que jusqu'à fin 2000. D'autre part, la période d'essai de coopération avec les instances romandes fédérales et cantonales de l'environnement s'achève également à cette date. Le Conseil d'Etat saisit cette occasion pour exprimer son soutien au magazine dont il considère l'édition indispensable.
Enfin, le Conseil d'Etat relève avec satisfaction que les sondages conduits par des organismes indépendants, notamment le dernier en date, sous mandat de la Confédération, qui montre que le taux de satisfaction des lecteurs de ce magazine est exceptionnellement élevé pour une publication de ce type. Le taux de lecteurs dépasse 30 % de la population adulte et le taux de satisfaction de lecteurs dépasse 95 %. Même la publicité dont la contribution financière est essentielle est sévèrement sélectionnée. De nombreuses publicités, notamment pour des chauffages électriques, ont dû être refusées.
Centre d'information sur l'énergie
Créé en 1989, le Centre d'information sur l'énergie offre une large palette de prestations. Il s'adresse à toute personne qui a une interrogation ou un projet relatif à l'utilisation économe et rationnelle de l'énergie et au développement des énergies renouvelables.
Au-delà des simples demandes d'information ou de renseignements qui permettent à la population de prendre conscience de la vraie valeur que représente l'énergie pour la société, ce sont surtout les centaines de projets concrets pour lesquels le centre d'information est intervenu qui marquent son activité. Pour les professionnels, l'accompagnement se fait non pas par la mise à disposition de solutions toutes faites, mais bien plus par l'apport de nouveaux thèmes de réflexions, de méthodes de travail, d'actualisation de leurs connaissances toujours dans le sens de l'utilisation économe et rationnelle de l'énergie et du développement des énergies renouvelables.
En parallèle, le centre d'information a édité de nombreux documents de synthèse, mis à disposition des logiciels techniques et organisé, depuis près de quatre ans, mensuellement des conférences à l'attention des professionnels intéressés.
Il est malheureusement pratiquement impossible de chiffrer en énergie l'efficacité du centre d'information au fil des années, bien que l'on sache que de très nombreux projets ont été modifiés suite à ses interventions. En 1996, l'OCEN a confié une évaluation du centre d'information sur l'énergie à une entreprise indépendante (Kalvin Associate SA), laquelle conclut par « On peut affirmer que le centre d'information sur l'énergie répond à un besoin des professionnels de la construction et offre un service de qualité à ceux qui s'en servent. »
Activités pédagogiques
Le choix de s'adresser aux jeunes est évident mais l'organisation des activités doit répondre à deux exigences qui sont l'objet d'une réflexion permanente :
1. Une réelle efficacité énergétique, c'est-à-dire une influence durable sur le regard que porteront ces jeunes sur le rôle de l'énergie dans la société et, par-là, sur leurs comportements futurs.
2. Le respect d'un code de déontologie qui doit permettre de préserver l'enfant.
C'est ainsi qu'est née une charte rassemblant l'essentiel des messages que devrait pouvoir retenir l'enfant à l'issue des animations. Les messages de la charte, bien qu'essentiels, sont neutres et peuvent même paraître banals lors d'une première lecture. Ce document est destiné aux enseignants et animateurs et sert de référence pour la création et la conduite des activités. La charte est en cours de révision et l'ancienne version (1996) est annexée à la présente réponse.
Ainsi, au travers d'activités ludiques de débats ou de projets scolaires, l'enfant peut échafauder sa propre pensée. En fait, cette maturation de l'intérieur est bien plus forte et durable qu'une pensée imposée de l'extérieur.
Aujourd'hui les activités sont de trois types :
les classes vertes énergie : d'une durée d'une semaine au cours de laquelle une classe, en général de 6e primaire, est immergée dans un programme ludique et de réflexion, de sensibilisation et de responsabilisation à l'égard de nos ressources en énergie et de la préservation de notre environnement et également d'actions visant à une utilisation plus économe de l'énergie au quotidien. Ces classes vertes sont organisées en partenariat avec les Services industriels qui, durant une journée, montrent le rôle essentiel d'un approvisionnement régulier et fiable de notre société ainsi que des démonstrations sur les risques que peuvent encourir les enfants en manipulant de façon maladroite l'électricité ;
les camps de vacances énergie : il s'agit de camp d'une durée d'une à deux semaines qui, sur le fond, ressemble aux classes vertes. Le contexte des vacances autorise toutefois deux types de nouveautés, l'une consiste à expérimenter de nouvelles activités, à les évaluer dans le but d'améliorer les activités pédagogiques qui peuvent être proposées aux jeunes, et l'autre d'intégrer des entités indépendantes poursuivant des buts similaires, par exemple la conférence romande des délégués à l'énergie ou l'association WWF, etc.
La maison « Clos des Sapins », propriété de l'Etat qui abrite les activités, est équipée depuis Pâques d'une installation solaire. Cette installation, financée notamment grâce à la direction des bâtiments du DAEL, a été réalisée par des enfants, y compris la construction proprement dite des capteurs. Cette installation de 15 m2 fonctionne et préchauffe l'eau sanitaire du bâtiment au service de tous les enfants et adultes qui le fréquentent durant l'année.
les classes énergie qui intègrent durant l'année scolaire ou une partie de cette année scolaire l'énergie dans leur programme. L'OCEN collabore étroitement avec l'enseignant pour la conduite d'un programme qui permet à la classe de devenir experte dans son école. Une classe experte est une classe consciente des enjeux de l'énergie, responsable de sa bonne utilisation et qui a acquis les connaissances fondamentales lui permettant d'agir correctement. Mais c'est surtout une classe qui va, à terme, entraîner les autres classes de l'école et leurs enseignants vers une gestion plus rigoureuse, plus économe de l'énergie et surtout plus respectueuse de l'environnement.
En règle générale, la mise en place d'une classe énergie accompagne une action technique d'assainissement de l'école et des autres bâtiments communaux conduite par la commune en collaboration avec l'OCEN.
En matière d'information sur l'énergie, l'OCEN participe également à diverses manifestations ponctuelles, par exemple aux quais de l'immobilier, dans des expositions d'entreprise ou lors de l'exposition Air qui a ouvert ses portes le 29 novembre 1999 au Musée d'histoire naturelle.
Pour l'avenir, deux tendances majeures se dessinent : la collaboration de plus en plus étroite avec les cantons romands afin de partager les expériences acquises par les uns et les autres, et surtout dans le but de partager les ressources et les moyens financiers dont ils disposent, et cela bien entendu dans le but d'accroître l'efficacité et de réduire les coûts des programmes d'information.
Le second grand projet est la création d'une maison de l'énergie à Genève, comme cela figure dans la conception générale de l'énergie 1999, afin de regrouper géographiquement les activités didactiques et pédagogiques de l'énergie, d'en accroître la puissance grâce aux opportunités de partenariat et de synergie que peut offrir un tel regroupement. Ce projet est en cours d'élaboration. Il sera présenté, sous réserve d'approbation de la conception générale de l'énergie, au tournant 1999/2000 afin d'être entrepris en cours de législature.
Dans ses considérants et dans l'exposé des motifs, les motionnaires ont insisté sur une meilleure prise en compte de la volonté populaire de renoncer à l'énergie nucléaire dans la politique d'information.
Le Conseil d'Etat observe que ce point figure explicitement dans le projet de conception générale de l'énergie qu'il a présenté au Grand Conseil pour approbation et que la Commission parlementaire de l'énergie et des Services industriels a modulé dans le sens suivant : « Au-delà de l'information pratique visant une utilisation rationnelle de l'énergie et le développement des énergies renouvelables, l'information à la population précisera que le but de l'utilisation rationnelle de l'énergie est aussi le renoncement à l'usage d'énergie d'origine nucléaire ». Le Conseil d'Etat se propose de prendre en compte ce mandat qui complète celui défini à l'article 18
Art. 18 Informations et conseils
En collaboration avec les établissements de droit public, notamment avec les Services industriels et les établissements d'enseignement, ainsi qu'avec les entreprises du secteur privé, le canton et les communes mettent à la disposition de la population les informations utiles et conseils se rapportant à l'énergie et à son utilisation rationnelle et économe, afin de sensibiliser les consommateurs sur la nécessité d'économiser l'énergie.
Bien entendu, la proposition de la Commission parlementaire de l'énergie et des Services industriels devra encore être entérinée par le Grand Conseil.
On le voit, la dynamique de l'information est le fruit de partenariats divers. L'importance de l'énergie pour la société, pour son fonctionnement économique, ses prestations sociales et la protection de l'environnement font que la politique d'information en cette matière est un sujet délicat et parfois controversé. Le Conseil d'Etat entend mettre à disposition de la population une information qui prend en compte de façon équilibrée les trois pôles du développement durable.
Au bénéfice de ces explications, le Conseil d'Etat vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à prendre acte du présent rapport.
Annexe : charte de l'énergie
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Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
Dans sa séance du 19 novembre 1999, votre Grand Conseil, sur rapport de la Commission des droits politiques et règlement du Grand Conseil chargée d'étudier la motion 1286, a renvoyé au Conseil d'Etat cette motion amendée en retenant la formulation suivante :
« Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
le nombre de Confédérés vivant à Genève ;
l'importance de promouvoir des actions visant à rapprocher les ressortissants suisses ;
la date symbolique de l'an 2000 ;
la nécessité de simplifier la procédure administrative ;
invite le Conseil d'Etat
à accorder aux Confédérés l'obtention simplifiée de la nationalité genevoise ;
à simplifier la procédure pour les Confédérés résidant à Genève depuis 2 ans. »
Sensible aux souhaits du Parlement et désireux de marquer concrètement son plein accord avec les invites qui lui sont faites, notre Conseil a l'honneur de vous informer qu'il est prêt à simplifier les procédures administratives pour les Confédérés désireux d'acquérir la nationalité genevoise.
Considérant le caractère urgent de cette simplification destinée à marquer symboliquement l'entrée dans la dernière année du XXe siècle, et ainsi que vous l'en avez prié, notre Conseil a transmis ses propositions directement à la Commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil de façon à ce qu'elles puissent être prises en considération dans le cadre de l'examen du projet de loi 8066 modifiant la loi sur la nationalité genevoise.
En résumé, notre Conseil propose que le Confédéré puisse acquérir pour lui-même et, le cas échéant son conjoint et ses enfants mineurs, la nationalité genevoise sur simple requête au Conseil d'Etat.
Les conditions actuelles de résidence à Genève sont inchangées, à savoir 2 ans dont les 12 mois précédant la demande. Les seuls frais se résument à un émolument de chancellerie, ne dépassant pas 100 F ainsi que vous l'aviez souhaité.
Conformément à l'invite que vous lui aviez faite, le Conseil d'Etat propose de renoncer à l'enquête et au préavis communal prévus par la législation actuelle, estimant que rien ne peut objectivement s'opposer à la naturalisation genevoise d'un Confédéré.
Pour autant que ces propositions soient acceptées par la commission et entérinées par votre Parlement, la procédure de naturalisation genevoise des Confédérés sera ainsi simplifiée à l'extrême pour l'avenir.
Pensant avoir ainsi pleinement répondu à l'invite de la motion citée ci-dessus, le Conseil d'Etat vous prie, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter le présent rapport.
Annexes: copie de la note du 6 janvier 2000 adressée à la Commission des droits politiques et les amendements.
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Débat
Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Le groupe radical est heureux d'avoir porté sur les fonts baptismaux une motion qui fait avancer l'intégration des étrangers à Genève.
En effet, combien parmi nous sont d'origine des sommets valaisans, des vallons verdoyants fribourgeois, des bords du lac de Neuchâtel ou du Lavaux, et même d'Outre-Sarine, et doivent montrer patte blanche à l'aide de leur livret de Confédérés. Malgré notre engagement inconditionnel pour la République, nous restons toujours des étrangers pour les Martin, les Revillod, les Duboule, Pitard, Rilliet, Pictet et Lullin...
Alors, les radicaux sont heureux d'avoir trouvé un écho favorable auprès du Conseil d'Etat pour permettre à ceux qui le désirent de mieux s'intégrer dans ce canton qui nous est cher. C'est un premier pas vers un objectif extrêmement important : le droit de vote des étrangers au niveau communal, qui aurait le mérite de reconnaître un droit pour ceux qui font vivre la cité.
A l'aube de ce nouveau millénaire, le groupe radical vous demande d'accepter ce rapport avec enthousiasme vu cet avancement de la citoyenneté.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Art. 1 But
Il est institué une commission dénommée « Commission cantonale de partenariat avec La Poste » (ci-après la Commission) ayant notamment pour but de :
Art. 2 Organisation
1 Le Conseil d'Etat nomme les membres de la Commission qui est formée de :
2 Les membres de la Commission sont nommés pour une période de quatre ans. Ils sont rééligibles au terme de leur mandat.
3 La commission élit son Président et les membres de son bureau formé de cinq membres. Elle décide pour le surplus de son mode de fonctionnement.
4 La Commission est soumise à la loi concernant les membres des commissions officielles (A.2.20). Ses membres touchent des jetons de présence. Son secrétariat dépend de la Chancellerie.
Art. 3 Entrée en vigueur
La présente loi entre en vigueur le … (à préciser)
EXPOSÉ DES MOTIFS
La fermeture de l'office postal de Saint-Jean a provoqué un vent d'indignation non seulement dans ce quartier, mais encore dans tout le canton et au-delà. Le plan de restructuration de La Poste, qui préconise la fermeture de nombreux offices postaux, notamment dans les centres urbains, a exacerbé les esprits.
Face à ces projets de démantèlement d'un service public fondamental, le présent projet de loi propose de créer une commission officielle formée de représentants des différents milieux intéressés, afin d'analyser la situation, les besoins du canton et les intentions de La Poste et, à partir de là, de définir une stratégie et d'engager les démarches nécessaires pour sauvegarder les intérêts du canton et de sa population.
Au bénéfice de ces explications, nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que le présent projet de loi recevra un bon accueil de votre part.
Préconsultation
Le président. Nous sommes en préconsultation, je vous rappelle que vous avez droit à cinq minutes par groupe.
M. Pierre Vanek (AdG). Nous sommes en débat de préconsultation, mais nous avons déjà abondamment parlé de la Poste et dit combien nous étions attachés au maintien de ce service public fédéral et à la défense des prestations qu'il offre à la population.
Il y a en effet eu plusieurs débats successifs : résolution, motion et séance extraordinaire de ce Grand Conseil sous le coup, certes, d'une certaine émotion, notamment liée à la fermeture de la poste de Saint-Jean, mais aussi des séances dans le cadre desquelles nous avons pu développer une critique des motivations du projet Optima qui annonçait la fermeture de plus de la moitié des offices de poste en ville de Genève et qui aurait entraîné la fermeture d'un grand nombre d'offices et de bureaux de poste dans la campagne genevoise.
Aujourd'hui, la Poste a un tant soit peu reculé. Dans un communiqué du 1er mars 2000, le conseil d'administration de la Poste indique à propos du projet Optima et du nombre de bureaux de poste en ville que, je cite : «Une évaluation sommaire a notamment permis de constater que les chiffres avancés, s'agissant du nombre d'offices à fermer dans certaines villes, ne sont pas réalistes.» Ils font donc marche arrière sur ce point, comme ils ont également fait marche arrière au sujet de nombre de régions qu'ils entendaient constituer au niveau du pays.
Bref, nous sommes dans une situation de flou et de brouillard, mais ce qui subsiste, ce sont les intentions déclarées de faire primer, par rapport au développement ou au maintien de ce service, les exigences de la rentabilisation marchande... - et ce n'est pas moi qui le dit - ...dans les considérants généraux du projet Optima qui ont encore été confirmés au début du mois de janvier par le conseil d'administration de la Poste. Et cette orientation est maintenue, je cite : «Il s'agit d'une réflexion qui prend sa source dans les besoins du marché et non dans les mécanismes chers à certains... - dont nous sommes - ...mais périmés parce que dépassés, et il s'agit de mettre en oeuvre, dans cette restructuration de l'entreprise, les idées de base issues du marché.»
Alors, pour nous, il existe une logique différente, celle que M. Lamprecht a évoquée tout à l'heure en disant, je le cite librement, que : le Conseil d'Etat est fermement attaché à la défense du service public postal dans ce canton. On a retrouvé ces indications, y compris à la une de la «Feuille d'avis officielle». Alors, que faut-il faire aujourd'hui ? Faut-il simplement organiser une table ronde et discuter sur ce que nous dira la Poste ? La Poste nous disait qu'elle allait fermer la moitié des bureaux de poste dans la ville, mais aujourd'hui elle nous dit qu'elle fera peut-être autre chose. Elle disait qu'elle créerait quatre régions en Suisse, mais elle nous parle aujourd'hui de sept. Elle pratique une politique d'informations fluctuantes et de flou absolu...
Notre projet de loi évoque une démarche différente. Il parle d'une démarche - et nous l'avions annoncé à l'occasion de cette séance - que l'on retrouve dans la résolution que nous avions votée le 14 janvier à l'unanimité de ce Grand Conseil - moins les absents qui avaient tort... Cette résolution demande à la Poste de saisir les autorités cantonales et municipales d'un projet de conception globale en ce qui concerne la desserte du territoire cantonal en matière postale, projet qui devrait faire l'objet d'un débat et d'une large concertation prenant en considération le point de vue des habitants, des milieux économiques, des organisations syndicales concernées ainsi, bien sûr, que les élu-e-s.
Aujourd'hui, la Poste a fait la claire démonstration - et elle l'admet - qu'elle n'a pas de conception globale concrète. Elle a des orientations marchandes, mais pas de conception globale concrète pour notre canton ! Vu que leur propre projet a été trouvé «irréaliste» par le conseil d'administration de la Poste, que faut-il faire ? Attendre, les bras croisés, que la Poste présente un plan pour Genève ? Non, nous pensons - et c'est ce que devrait faire la commission dont nous proposons la constitution - qu'il faut, de manière autonome, dresser l'inventaire des services postaux desservant le canton et les besoins de la population dans ce domaine ! C'est une tâche que les élu-e-s genevois peuvent impulser - même s'ils ne le font pas eux-mêmes - et à laquelle ils doivent associer un certain nombre de partenaires. C'est dans ce sens-là que nous demandons la création de cette commission : pour prendre position sur les projets de réorganisation des services postaux et examiner les mesures qui pourraient être envisagées pour améliorer la qualité des prestations de la Poste dans ce canton... Les améliorer ! Pas se contenter de rester dans une logique défensive pour que la Poste se dégrade le moins possible !
Ce sont les buts de cette commission, à l'article 1 : recueillir l'avis de la population à ce sujet. Nous avons eu un avis global de la population, qui nous a largement appuyés quand nous nous battions contre la fermeture de la poste de Saint-Jean, mais il faut recueillir des avis concrets. Ensuite, il faut négocier avec la direction de la Poste les questions relevant du fonctionnement des antennes de la régie fédérale sur la base de ce bagage recueilli sur le terrain genevois que nous connaissons bien - et dont la Poste a fait la démonstration qu'elle ne le connaissait pas du tout - tant sur le plan des besoins concrets de la population que sur sa capacité à négocier et à discuter avec les utilisateurs.
Cette logique est une logique de négociation volontariste des Genevois en direction de la régie postale. Bien sûr, ce projet ne comporte aucun aspect contraignant, car la Poste relève du droit fédéral...
M. Michel Balestra. Sous réserve du droit fédéral !
M. Pierre Vanek. Ce projet de loi permet simplement que nous soyons armés pour discuter de ces questions de manière utile, armés en associant à la préparation de cette négociation tous les milieux... - je vous ferai grâce de vous les indiquer, nous en reparlerons en commission - ...qui devraient être associés à un tel travail.
Pour l'instant, nous sommes en préconsultation sur ce projet de loi, alors je reviendrai plus tard sur la résolution 418 qui est proposée comme alternative à ce projet, ce qui est explicite dans l'exposé des motifs, Mesdames et Messieurs les radicaux, puisque le projet de loi 8189 y est cité.
On nous dit que ce projet de loi, présenté par un certain nombre de députés de l'Alliance de gauche - par tout le groupe, même, je crois - propose des mesures «drastiques et rigides» qui «figent» la situation... Or, nous proposons de créer une commission cantonale qui va nous permettre d'accumuler des informations, pour être réellement le relais de la population dans cette affaire. Nous sommes tout à fait conscients qu'il n'est pas possible de contraindre en la matière ! Et aucune ligne de ce texte ne va dans ce sens ! Au contraire, ce projet de loi permet de donner au canton la souplesse et la flexibilité nécessaires, précisément pour répondre aujourd'hui à cette situation de menace profonde de dégradation du service postal que personne, je l'espère, ne souhaite dans cette salle.
J'interviendrai à nouveau au moment du débat sur la résolution. En attendant, je vous invite donc à accepter le renvoi en commission de ce projet de loi 8189, pour pouvoir en débattre assez rapidement si possible vu l'importance du sujet et en renvoyant le cas échéant aussi la résolution 418. Cette dernière nous propose une table ronde qui n'a pas d'autre objectif précisé que : «d'assurer le maintien du service public postal en milieu urbain et rural à Genève». Je crois que le projet de loi apporte des éléments supplémentaires pour se donner les moyens d'assurer - ou tout du moins tenter d'assurer - ce service postal.
Je préfère donc le projet à la résolution, mais nous sommes toutefois prêts à en discuter en commission. Je vous invite donc aujourd'hui à ne pas voter la résolution, mais, si vous le voulez, je m'associerai à son renvoi en commission. Je ne suis pas persuadé - on l'a vu sur d'autres sujet - que la mise sur pied d'une table ronde aboutira forcément à un succès.
M. John Dupraz (R). La résolution du groupe radical est un contreprojet au projet de loi de l'Alliance de gauche qui veut instituer une commission composée notamment d'un représentant par parti politique.
Mais le problème n'est pas là ! Le problème se pose concrètement sur le territoire, notamment dans les communes. En fait, nous proposons une cellule... - c'est plus qu'une table ronde - ...du suivi de ce qui se passe pour trouver des alternatives au fameux projet Optima qui a déjà été retiré en partie... On ne sait d'ailleurs pas très bien ce qui se passe... Mais je ne vois pas ce que les représentants des partis politiques ont à faire dans cette histoire !
Ce n'est quand même pas cette commission qui va dicter la façon dont la Poste doit s'adapter aux conditions du moment et se restructurer pour faire face aux échéances d'aujourd'hui et de demain. C'est une vue de l'esprit ! Ce projet de loi «sent le Grobet» à plein nez ! Tout est prévu, tout est réglementé, tout est quadrillé... On ne sort pas de ce schéma ! C'est par réaction à cette espèce de monolithisme étatique que vous proposez... (Exclamations.) ...et cette raideur législative que nous suggérons une solution beaucoup plus souple ! Ce n'est pas un représentant des communes qu'il faut ! Il faudrait que tous les représentants des communes entre Arve et Lac soient réunis à cette table de discussion pour trouver les solutions adéquates à cette région. Ce n'est pas un représentant des communes qui peut s'engager pour trouver les solutions aux propositions qui sont faites par la Poste ! Et il est nécessaire que le Conseil d'Etat fasse preuve d'autorité dans ce groupe de travail pour sensibiliser la Poste et ses nouvelles autorités au maintien du service public. C'est cela qui est important !
Le projet de loi déposé par l'Alliance de gauche est digne des fameuses républiques démocratiques populaires... On sait où ça les a menées ! (Rires.)
Nous proposons une solution beaucoup plus pragmatique, plus souple, plus efficace et adaptée à chaque cas pour trouver des solutions aux problèmes.
Le président. La parole n'est plus demandée... Ah, ça se manifeste... Madame Sormanni, vous avez la parole !
Mme Myriam Sormanni (S). Monsieur le président, j'ai un petit problème... J'ai oublié mon intervention à la maison, et j'ai dû en faire une au pied levé... (Rires et exclamations.) Excusez-moi !
En date du 22 décembre 1999, j'ai lu un article dans le journal sur les directives de la Poste, disant que : les autorités doivent être concernées par le devenir des services postaux.
Curieusement, nous n'avons trouvé trace de cet article dans aucun de nos quotidiens, dont le secret, je pense, devait être bien gardé...
Le président. Madame Sormanni, pouvez-vous essayer de parler moins près du micro ? Naturellement... Normalement... Ainsi, nous arriverons à régler les micros pour enregistrer votre voix, Madame !
Mme Myriam Sormanni-Lonfat. Oui, Monsieur le président, excusez-moi !
Le projet de loi 8189 sur le partenariat s'inscrit donc bien dans ce sens-là. La mobilisation citoyenne de Saint-Jean et sa résistance ont certainement eu une incidence sur la régie fédérale, puisque cette directive a bel et bien été écrite. Et, comme nous avons pu effectivement le constater, les choses s'améliorent quelque peu depuis le changement de direction, en la personne de M. Gigy, qui est quand même - je le rappelle - un syndicaliste...
On voit ce qui s'est passé avec Swisscom et le syndicat de la communication... Bien que Swisscom ne soit pas totalement privatisé, il se comporte comme tel !
Ce projet de loi permettra de veiller à ne plus accepter que les clients soient au service de la Poste, mais bien que cette dernière soit au service des usagers - je fais bien le distinguo entre les usagers et les clients... Face à ce démantèlement, nous nous devons de réagir !
C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, je vous propose de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'économie. Je vous remercie.
M. Claude Blanc (PDC). Mon collègue Dupraz a déjà dit avec d'autres mots ce que je pense... Ce projet de loi est typique d'une certaine manière de penser qui veut que les problèmes se résolvent au niveau de la pression de la rue...
Le genre de commission que vous voulez instituer vise ni plus ni moins à court-circuiter la manière ordinaire de fonctionner de l'Etat. Quand un problème se pose et quand une négociation doit être menée avec le pouvoir fédéral ou ses représentants, c'est le gouvernement qui doit le faire, et je crois qu'il le fait consciencieusement. D'ailleurs, je pense que le Conseil d'Etat a fait tout ce qu'il devait faire pour discuter avec la Poste, au moment où il y a eu le problème de Saint-Jean... Que voulez-vous de plus ? Croyez-vous, Mesdames et Messieurs, que votre «commission bidon» vous permettra d'obtenir davantage que par une négociation entre le Conseil d'Etat et le Conseil fédéral ? C'est tout de même encore le Conseil fédéral qui est l'autorité de tutelle de la Poste ! Et en finale, c'est quand même encore le Conseil fédéral qui dira à la Poste ce qu'elle doit faire !
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, je crois que nous avons, dans cet ordre démocratique, des organes qui sont qualifiés pour traiter avec l'administration fédérale. Le Conseil d'Etat est parfaitement à même de le faire, et il le fait... Vous ne pouvez pas lui reprocher d'être resté passif dans l'affaire de la Poste ! Vous cherchez donc à substituer à l'organe normal de négociation avec l'autorité fédérale un «machin» que vous constituez à votre guise en y mettant des représentants de toutes sortes d'associations qui ne sont en tout cas pas les représentants légitimes du peuple ! Les représentants légitimes du peuple ils sont ici et ils sont là-bas... (L'orateur fait signe en direction des conseillers d'Etat.) ...et il se trouve que ce sont eux qui sont qualifiés pour négocier. Par conséquent, tout ce que vous pourrez bien fabriquer d'autre est illégitime, et je vous prie de bien vouloir en prendre note !
Vous pourriez ainsi multiplier les commissions de ce genre pour toutes sortes de discussions avec l'administration fédérale. Ainsi, on en arriverait... - M. Dupraz l'a dit autrement - ...à un gouvernement de soviets - au pluriel ! (Rires.)
M. Carlo Lamprecht. Chacun ici a envie d'avoir une poste au service du public. Le Conseil d'Etat y tient également, mais il y a tout de même la manière de le faire si nous voulons être efficaces.
J'ai dit tout à l'heure que le projet Optima était loin d'être finalisé, qu'il ne concerne pas seulement le canton de Genève, ni la Ville de Genève, ni Saint-Jean, mais tout le pays ! La Poste s'est effectivement engagée, lorsque ce concept sera mis au point, de venir à la table ronde, avec un public élargi qui pourrait être un public tout à fait semblable à la commission que vous voulez mettre sur pied, Monsieur Vanek. Il semble du reste que la résolution du parti radical propose aussi d'organiser un forum.
Je vois très mal pour ma part - mais on peut toujours essayer - comment cette commission que vous voulez nommer pourrait elle toute seule, sans la participation de la Poste, élaborer le concept nouveau du fonctionnement de la Poste à Genève... De quel droit pourrait-elle le faire ? Quelles seraient ses compétences ? Quelles sont ses connaissances en matière de coût, en matière de personnel, en matière de services, en matière de développement de la Poste pour l'avenir ? Je le répète, je vois très mal ce travail se faire sans la participation de la Poste ! Or, je doute véritablement que la Poste vienne négocier du début à la fin son projet Optima ou un nouveau projet avec une commission... J'imagine cela très mal.
Par contre, si la Poste fait son travail, qu'elle accepte de se mettre autour d'une table et de parler avec la commission que vous voulez mettre sur pied, nous aurons au moins quelques bases de départ que nous n'avons pas aujourd'hui. Je ne pense pas que nous puissions avoir la prétention, j'insiste, de faire le travail à la place du conseil d'administration de la Poste, à la place du Conseil fédéral.
Il faudrait permettre à la Poste de venir expliquer son projet dans un forum élargi. Le projet que vous proposez, Monsieur Vanek, peut très bien être renvoyé en commission, pour examiner quel pourrait être le rôle de l'Etat et du Grand Conseil dans cette affaire... Mais je ne vois vraiment pas comment une commission sans aucun appui de l'entreprise pourrait imaginer quoi que ce soit ! Vous voulez réinventer une nouvelle poste, mais nous n'en avons pas les moyens !
Je préconise pour ma part que les deux propositions qui ont été faites soient mises ensemble ; que dans un premier temps, on attende le projet de la Poste. Lorsque ce projet nous sera présenté, nous pourrons l'évaluer, le critiquer et, ensuite, nous verrons ce que nous déciderons... Je rappelle toutefois que la Poste s'est engagée par écrit à discuter avec les personnes concernées, c'est-à-dire avec chaque commune ou la Ville de Genève, pour trouver le cas échéant des partenariats, pour voir comment faire en sorte de maintenir ce service public.
Alors, laissons d'abord travailler la Poste sur ce projet, écoutons ses propositions, soyons critiques - très critiques s'il le faut - par rapport à un service public qui pourrait être amputé des qualités que nous lui connaissions jusqu'à ce jour et, ensuite, nous verrons bien les mesures qu'il faudra prendre.
Ce projet est renvoyé à la commission de l'économie.
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
les nombreux débats suscités à la suite de l'annonce de la fermeture de l'office postal du Beulet ;
l'inquiétude de la population face au projet Optima de la Poste ;
l'absence d'information des collaborateurs, des usagers, des communes et de l'Etat ;
la nécessité de maintenir le service public de la Poste sur tout le territoire du canton ;
invite le Conseil d'Etat
à mettre sur pied, sous l'autorité du Conseil d'Etat, une table ronde réunissant le canton, les communes, la Poste et les usagers pour assurer le maintien du service public postal en milieu urbain et rural à Genève.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Lundi 14 février, un grand quotidien annonçait la fermeture probable de nombreux offices postaux dans le canton de Genève, aussi bien dans les villages de campagne qu'en Ville de Genève. Aujourd'hui, le projet de restructuration de la Poste n'est connu ni des usagers, ni des collaborateurs, ni des autorités politiques de ce canton.
Une grande inquiétude règne dans le personnel des postes ainsi que dans la population face à ce projet dont on ne connaît que ce que la presse en a relaté dernièrement.
Force est de constater qu'après les différents changements de directeurs à la tête de la Poste et les différents projets de restructuration, cette régie publique est tout sauf une maison de verre. Il est grand temps que le dialogue s'instaure entre les partenaires, qu'ils soient employés, usagers ou responsables politiques, afin de trouver des solutions adéquates pour le maintien du service public postal.
La situation est d'autant plus pénible que, d'une part des hausses de tarif sont annoncées et que, d'autre part, en même temps, des diminutions de prestations sont prévues, notamment par la fermeture d'offices postaux.
Cette situation est inadmissible et n'est plus acceptable. Il est temps que les responsables politiques du canton prennent en main la situation. Le dialogue est indispensable entre tous les intéressés afin de trouver des solutions garantissant le maintien du service public postal.
Le projet de loi 8189 prévoit des mesures drastiques et rigides figeant pratiquement la situation. Ce projet va trop loin et c'est pourquoi le groupe radical propose, à travers cette résolution, une solution négociée, pratique, souple et flexible, afin de permettre à la fois la réforme de la Poste et le maintien du service public.
Il est bien difficile aujourd'hui de faire des propositions concrètes, car les objectifs poursuivis par la Poste relèvent aujourd'hui de la grande nébuleuse. C'est pourquoi, nous estimons indispensable de nouer ce dialogue avec tous les intéressés. C'est la seule voie pour trouver la solution à ce problème épineux, préoccupant l'ensemble de la population.
Nous vous invitons donc, Mesdames et Messieurs les députés, à réserver un accueil favorable à notre résolution.
Débat
M. John Dupraz (R). Je serai très bref, car j'estime que l'affaire a été traitée avec le projet de loi. Je demande donc simplement que cette résolution soit renvoyée à la même commission, afin qu'il en sorte le meilleur résultat possible pour les intérêts des administrés de ce canton.
Le président. Merci de votre pragmatisme, Monsieur Dupraz ! Madame, Sormanni, vous avez la parole.
Mme Myriam Sormanni (S). Je voudrais simplement intervenir, Monsieur Blanc, car vous faites le distinguo entre les citoyens et les politiques. Alors, je vous rappelle que si nous sommes ici c'est bien parce que des citoyens nous ont élus...
M. Claude Blanc. Ils s'en mordent les doigts !
Mme Myriam Sormanni-Lonfat. Je vous prie de rester poli !
La proposition demande d'intégrer les habitants des quartiers dans les discussions, et je pense que c'est tout à fait justifié. Le mouvement tel que celui de Saint-Jean a sa place, et même une place primordiale.
C'est tout ce que je voulais vous dire.
M. Pierre Vanek (AdG). Je ne voudrais pas trop prolonger ce débat, mais puisque ces deux objets figurent sous deux points différents de l'ordre du jour, je me permets d'intervenir une deuxième fois.
On a dit de façon un peu excessive que la commission consultative que nous proposions relevait des méthodes des «démocraties populaires»... Que c'était le gouvernement de la rue... Que c'était le régime des soviets... Tout ça c'est de la rigolade, bien évidemment ! (Exclamations.)
Certes, cette commission vise à tenir compte de l'opinion des citoyens et à traiter le problème de la Poste à Genève dans sa globalité, ce qui correspond à ce que nous avons voté tous ensemble - moins les absents libéraux, bien sûr - lors de la séance du 14 janvier. Dans une des invites de la motion que nous avons adressée au Conseil d'Etat - dont nous attendons la réponse - nous disions qu'il y avait lieu de demander à la Poste de saisir les autorités cantonales et municipales d'un projet de conception globale en ce qui concerne la desserte du territoire cantonal en matière postale.
Les interventions de tout à l'heure ont une logique fondamentale consistant à attendre que la Poste présente son projet et que nous discutions ensuite, quartier par quartier, village par village - comme M. Dupraz, l'a évoqué - pour : «arranger les bidons» comme on peut... Or, nous sommes en présence, dans la logique mise en oeuvre, d'un plan dont les orientations sont très fermes, même si les détails sont flous et si le brouillard est répandu sur le projet Optima - d'ailleurs, en réalité, ce n'est pas un plan mais une direction. Et ces orientations conduisent à une dégradation radicale du service public...
Alors, il ne s'agit pas de se retrouver entre gens de bonne compagnie - certains le sont moins que d'autres - quartier par quartier ou commune par commune, mais bien de poser le problème réel. Nous sommes effectivement des élus du canton de Genève, au parlement, et nous devons nous demander ce que nous pouvons faire à l'échelle de ce canton pour avoir une vision globale, en partant des besoins des habitant-e-s, des besoins des utilisateurs de la Poste, des besoins de l'économie genevoise et de ce que nous voulons comme service public postal.
Il n'est bien entendu pas question d'en réinventer tous les rouages, Monsieur Lamprecht ! Il est question de présenter une demande globale en la matière. Il ne s'agit pas non plus de cumuler les observations de chaque quartier. Nous aurions pu proposer - cela aurait été une démarche rigide et détestable, comme on nous l'a prêtée à tort de l'autre côté de la salle - pour la conception cantonale de la Poste à Genève, de mettre tel niveau de desserte pour tel nombre d'habitants. Eh bien, non, nous avons dit qu'il fallait d'abord essayer de dresser un inventaire ! En avons-nous un aujourd'hui ?
Le président. Monsieur Vanek, excusez-moi, mais nous devons parler de la résolution 418. J'ai peur qu'il y ait confusion ! Votre projet de loi a déjà été renvoyé en commission !
M. Pierre Vanek. Je sais, Monsieur le président ! Mais notre ami John Dupraz a présenté la résolution du groupe radical comme étant un contreprojet à ce projet de loi. Et quand on parle d'un contreprojet, les objets sont liés ! Ce n'est qu'un seul débat ! (L'orateur est interpellé.) Si vous me permettez de poursuivre, cela ira plus vite...
Une voix. J'aimerais aller me coucher !
M. Pierre Vanek. Moi aussi, j'aimerais aller me coucher, mais j'aimerais d'abord terminer le débat sur ce point !
Nous sommes en présence de deux logiques : l'une que M. Lamprecht a assez honnêtement annoncée qui consiste à attendre que la Poste présente son projet et discuter ensuite avec elle et l'autre qui est, pour employer un terme que je n'aime pas, car c'est un anglicisme à la mode, «proactive», c'est-à-dire qui prend en main le problème, qui s'est réellement posé de manière aiguë à Genève, pour essayer d'alimenter cette négociation future avec la Poste avec un certain nombre de points de vue alimentés par l'avis des habitants, par l'avis des organisations syndicales, par l'avis d'un certain nombre d'autres milieux économiques. Cette deuxième démarche est parfaitement conforme à l'esprit de nos institutions.
Alors, j'accepte volontiers de renvoyer cette résolution en commission, puisqu'il s'agit d'un projet et de son contreprojet, mais je tiens à dire qu'à mes yeux il y a lieu de prendre un certain nombre d'initiatives et non d'attendre. Mme Sormanni a dit dans son intervention que l'on pouvait espérer des choses positives en raison de la présence de M. Gigy... Non, je ne le crois pas ! J'ai regardé un peu le pedigree de ce monsieur... Eh bien, il est entre autres l'auteur des «lignes directrices» du Département des finances fédérales. Tout un chapitre est consacré aux privatisations et va tout à fait dans la logique existante du projet Optima...
En conclusion, M. Blanc - qui ne m'écoute pas, qui n'est plus là ou qui est parti - à tort, disait que tout cela serait réglé par les autorités fédérales et qu'en fin de compte c'est le Conseil fédéral qui dira à la Poste ce qu'elle doit faire... Eh bien non ! On le voit pour Swisscom et on l'a vu pour l'affaire de la Poste : le Conseil fédéral s'en lave les mains. Moritz Leuenberger a dit à plusieurs reprises à propos du cas de Saint-Jean qui nous a tant occupés que cela relevait du domaine opérationnel de la Poste et d'aucune manière de la compétence du Conseil fédéral.
Et il est vrai que nous sommes en train de faire un boulot qui ne devrait pas forcément être le nôtre, mais nous le faisons face à un vide, à un vide voulu pour permettre un processus qui va dans le sens d'une poste purement marchande et privatisée dans quatre, cinq ou dix ans... C'est contre cela qu'il faut résister ! Et c'est modestement dans cet esprit en prenant les intérêts de la population de ce canton à coeur que nous avons présenté ce projet de loi.
M. Albert Rodrik (S). Une table ronde et une commission consultative montrent bien par leur côté dérisoire l'énormité du problème auquel nous sommes confrontés quand il s'agit d'une dégradation aussi importante du service public.
Je ne sais pas quel travail vous ferez en commission de l'économie, mais au lieu de mettre sur pied une commission consultative ou une table ronde, il faudrait pouvoir obtenir de l'autorité fédérale une implication, dès l'origine, des autorités cantonales qui ne devraient plus se retrouver devant des faits accomplis et ingurgiter un projet Optima. Il faudrait obtenir le droit, pour les cantons, d'être prévenus quand de telles choses, aussi importantes pour la destinée de ce pays, se concoctent ; on ne devrait pas avoir à courir derrière pour éteindre des incendies. Si nous trouvions un tel moyen d'être associés au comportement des régies fédérales, peut-être ferons-nous oeuvre utile...
Pour ma part, je doute fortement qu'une régie fédérale vienne s'expliquer sur ses intentions réelles devant de telles enceintes. Par contre, renforcer la main du Conseil d'Etat, obtenir si possible dans les lois fédérales régissant ces régies le droit des cantons à être associés aux décisions et être prévenus à temps, mériterait peut-être de lancer une initiative cantonale, qu'il vaudrait la peine d'étudier.
M. John Dupraz (R). Je suis très heureux d'apprendre que je suis votre ami, Monsieur Vanek, et je suis très honoré de l'estime que vous me portez... C'est réciproque, cher ami ! (Rires.)
Monsieur Rodrik, vous avez parlé de la loi fédérale sur la Poste, mais il faudrait d'abord savoir de quoi on parle ! Dans les buts et objets de cette loi, il est dit, à l'alinéa 2 : «La présente loi règle l'offre de prestations de l'entreprise de la poste suisse» ! Alors, je crains, Monsieur Vanek, avec votre commission, vous vous preniez pour le directeur de la Poste ! (Exclamations.) Mais c'est justement ce qui ne va pas, car la Poste a des objectifs !
La loi dit aussi que : «La Poste assure un service universel suffisant par la fourniture de prestations relevant des services postaux et des services de payement.» C'est sur ce point que nous devons agir pour que le service universel soit suffisant ! Et pour cela, nous avons besoin des gens concernés : l'autorité du Conseil d'Etat et les communes concernées ; pas des nabots de politiciens qui siègent dans ce Grand Conseil ! (Rires et exclamations.)
Mise aux voix, cette proposition de résolution est renvoyée à la commission de l'économie.
La séance est levée à 23 h 5.