République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 18 novembre 1999 à 17h
54e législature - 3e année - 1re session - 52e séance -autres séances de la session
54e législature
No 52/IX
Jeudi 18 novembre 1999,
après-midi
La séance est ouverte à 14 h 30.
Assistent à la séance : Mmes et MM. Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat, Guy-Olivier Segond, Gérard Ramseyer, Carlo Lamprecht, Micheline Calmy-Rey et Laurent Moutinot, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
Le Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Robert Cramer, conseiller d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Nicolas Brunschwig, Juliette Buffat, Erica Deuber Ziegler, Bénédict Fontanet, Alexandra Gobet, Armand Lombard, Catherine Passaplan et Pierre-Pascal Visseur, députés.
3. Discussion et approbation de l'ordre du jour.
M. Rémy Pagani (AG). Monsieur le président, je souhaiterais que le point 51, soit la motion 1309 sur la participation suisse au Millenium Round, soit traité à la séance de demain vendredi, à 20 h 30. En effet, si tel ne devait pas être le cas, elle n'aurait plus de raison d'être, puisque l'ouverture de la conférence de l'OMC à Seattle aurait déjà eu lieu.
Une voix. Ça ne changera rien !
M. Rémy Pagani. Non, mais nous espérons au moins sauver l'honneur !
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
4. Pétitions.
Le président. La commission des pétitions nous informe qu'elle désire renvoyer la pétition suivante :
Il en sera fait ainsi.
Par ailleurs, la pétition suivante est parvenue à la présidence :
Cette pétition est renvoyée à la commission des pétitions.
M. Rémy Pagani (AG). Monsieur le président, je propose la lecture de cette pétition pour qu'elle figure au Mémorial.
Le président. Madame la secrétaire, je vous prie de bien vouloir procéder à la lecture de cette pétition.
Pétitiondu personnel des EMS demandant une augmentation des effectifs
Mesdames etMessieurs les députés,
Les personnes signataires de cette pétition demandent que soit inscrit dans le budget 2000 de l'Etat de Genève, une augmentation des effectifs dans le secteur des EMS.
Cette revendication se base sur les réalités suivantes :
L'introduction de la nouvelle loi sur les EMS en janvier 1998 clarifie clairement la mission de ces établissements et impose en son article 5 alinéa e) que le Conseil d'Etat "prend toute mesure à l'amélioration de la qualité des prestations fournies par les établissements médico-sociaux". D'autre part, via cette loi les établissements "affectent à la prise en charge des pensionnaires un personnel, suffisant en nombre,... " (Article 9 alinéa h).
L'introduction de la CCT en 1998 a permis pour un nombre important de personnel de percevoir, à part la question de la rémunération, une amélioration concernant des périodes de vacances, des congés supplémentaires via le pont de fin d'année, congés spéciaux prévus par la CCT. Ces améliorations entraînent une diminution de temps de présence au lieu de travail et n'ont pas été suivies par une augmentation des effectifs. Le personnel est donc confronté à une augmentation importante de sa charge de travail. Raison pour laquelle il demande que des moyens supplémentaires soient débloqués permettant d'assurer des conditions de travail et des prestations correctes, par l'octroi de postes supplémentaires.
Avec la planification sanitaire actuelle, l'effort de l'Etat est mis sur l'extension des soins à domicile et un raccourcissement de la durée des hospitalisations. Ces choix que nous ne remettons pas en cause, ont pour effet que les personnes arrivant dans les EMS sont de plus en plus dépendantes, ce qui entraîne un alourdissement, de la prise en charge des personnes âgées dans les EMS. Indépendamment des résultats de l'évaluation PLAISIRS, le DASS (Département de l'action social et de la santé) a bloqué à 2913 postes pour l'an 2000. Ces 2913 postes selon les estimations du DASS, ne couvriront qu'environ 87% des postes requis par l'évaluation PLAISIRS. Pour avoir une couverture de 100%, il serait nécessaire d'avoir une augmentation d'environ 400 postes.
Les EMS sont des lieux de vie pour des personnes âgées. Si des améliorations organisationnelles peuvent encore avoir lieu, une réelle amélioration des conditions de vie des pensionnaires à long terme ne peut se traduire que par une augmentation des effectifs.
N.B. : 1205 signatures
SIT, SSP/Vpod, ASI, SYNA, ACTIONS
M. Daniel Häringp.a. SITCase postale 32871211 Genève 3
5. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Néant.
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de demandes d'interpellations;
Néant.
e) de questions écrites.
Néant.
Le président. Je vous propose de terminer les points 30 et 31 de notre ordre du jour, que nous avions commencés dans la séance précédente, soit la motion 1308 et la pétition 1195-A. Nous passerons ensuite aux interpellations urgentes.
6. Suite du débat sur les objets suivants:
Suite du débat
Mme Nelly Guichard (PDC). Même si nous enfonçons des portes ouvertes, comme se plaisent à le souligner avec insistance certains députés, nous soutenons toujours cette motion dans sa teneur générale.
En effet, le problème d'un enseignement de français de qualité, je dirais surtout efficace, qui permette à tous les élèves de savoir lire et écrire - comme on dit communément - est très souvent - quasi quotidiennement - mis en exergue dans tous les milieux. Et, jusqu'à preuve du contraire, une bonne maîtrise du français est favorable à une égalité des chances, dont beaucoup se réclament par ailleurs dans cette enceinte aussi.
Des doléances nous parviennent régulièrement tant au sujet des étudiants, des collégiens que des apprentis. Il s'agit donc d'en parler sur un plan très général. Et cette motion répond à cette nécessité. C'est pourquoi nous demandons qu'un soin particulier soit apporté au français de manière globale - transversale si vous préférez - tant en expression qu'en écriture et en lecture.
D'autre part, je suis tout à fait d'accord avec la proposition émise par Mme Dallèves ce matin. Je pense que son amendement va dans le bon sens et nous le soutiendrons, bien sûr. Je vous recommande donc, Mesdames et Messieurs les députés, de soutenir cette motion.
M. Jean-François Courvoisier (S), rapporteur de majorité. Je trouve les considérants de la motion certes très intéressants, mais il reste une grande place pour travailler en petits groupes, notamment dans des classes de français plus réduites.
En 1798, l'Académie de Berlin avait mis comme sujet de concours : les raisons de la supériorité de la langue française et de son utilisation dans les relations diplomatiques. A ce moment-là on ne discutait pas de la supériorité de notre langue, de notre civilisation, de notre culture... On s'en demandait seulement les raisons ! Jusqu'à la guerre de 14-18, toute l'élite de l'Europe parlait français, qu'il s'agisse de Tolstoï, de Stefan Zweig, de Goethe, lequel avait d'ailleurs dit qu'il n'avait rien lu d'aussi admirable que Diderot, notamment «Jacques le Fataliste», qu'il avait lu d'une traite sans pouvoir s'arrêter.
Alors, aujourd'hui, il est absolument indispensable de cultiver le français, non seulement pour savoir s'exprimer, lire et comprendre, mais aussi pour avoir accès à notre littérature et à notre patrimoine. Pendant des siècles, des minorités ont lutté contre les persécutions pour garder leur langue et leur littérature, et nous allons céder, sous de simples pressions économiques, pour réduire l'enseignement du français aussi bien au cycle d'orientation que dans les écoles ? Je trouve cela très regrettable ! Maintenir le français comme enseignement principal est une manière de défendre notre patrie, notre patrimoine et notre civilisation, même si l'anglais est nécessaire. Il ne faut pas sacrifier le français par petits groupes, quitte à rajouter des heures de cours à tous les stades de l'enseignement.
Je vous demande de soutenir cette pétition, qui est primordiale à mes yeux.
M. Charles Beer (S). J'aimerais situer cette proposition dans le contexte. Nous avons d'abord été saisis de cette pétition et, finalement, nous nous sommes aperçus que bon nombre de députés et députées prenaient très au sérieux le fait que les pétitionnaires, même s'ils évoquaient indirectement leur travail, manifestaient le souci qu'ils avaient de la qualité et de la quantité de l'enseignement de la langue française. Nous avons donc travaillé sur ce sujet et, finalement, la commission s'est trouvée comme toujours devant trois cas de figure : le classement pur et simple, le renvoi sur le bureau du Grand Conseil et le renvoi au Conseil d'Etat. A ma connaissance, il ne s'agit pas d'un acte législatif majeur, mais il semblerait qu'un acte comme le renvoi de la pétition au Conseil d'Etat puisse être pris de façon négative - cela peut varier d'un département à l'autre. En tout cas cela semble être le cas au département de l'instruction publique !
Une voix. Mais non !
M. Charles Beer. C'est un peu l'impression que nous avons eue, lorsque la motion est sortie tout à coup du chapeau !
Je reprends ce que j'ai dit tout à l'heure à l'occasion d'un autre débat - on s'aperçoit que c'est le cas pour de nombreuses motions - on prend de l'élan pour enfoncer des portes ouvertes ! Ce qui me dérange, c'est qu'il n'y a pas de motivation sous-jacente. En tout cas elle n'est pas apparue en commission ! Par contre, ce qui était clair, c'était la nécessité de trouver un autre cheminement que le renvoi au Conseil d'Etat, qui nous a été présenté comme une alternative au renvoi au Conseil d'Etat de la pétition, qui n'est pas du tout le même objet.
Il est donc important de situer cette motion dans le contexte. Si on peut dire qu'elle ne mange pas de pain, on peut dire aussi que cela n'est pas une motivation suffisante pour notre parlement... La problématique est bien entendu extrêmement sérieuse, mais ce n'est pas en y répondant par une motion «qui ne dérange personne» qu'on va s'en saisir ! Alors, j'aimerais bien qu'on ne fasse pas une telle confusion, surtout lorsque l'on sait qu'il faut des années pour traiter une telle motion - on l'a vu dans l'ordre du jour précédent avec la motion sur la revalorisation de la filière de l'apprentissage. J'espère, Madame Brunschwig Graf, que vous ne m'en voudrez pas, mais c'est le cas au département de l'instruction publique : il faut parfois plusieurs années pour traiter les motions !
Est-il vraiment important de vous renvoyer une telle motion, alors que vous menez peut-être une politique claire en la matière, et ne conviendrait-il pas d'attendre quelques années pour la connaître ? Pour ma part, je ne pense pas que cette motion apporte quelque chose et j'ai besoin d'une autre motivation que celle «d'avoir répondu au fait de n'avoir dérangé personne» pour voter une motion !
Mme Jeannine de Haller (AdG). Je ne vais pas allonger les débats, d'autant que je suis entièrement d'accord avec les propos de M. Beer et de M. Courvoisier.
Tous les considérants de cette motion sont des évidences et nous ne pouvons qu'y adhérer... Nous ne sommes pas contre le français : nous sommes archi-pour le français ! Mais, comme vient de le dire M. Beer, cela ne résout pas le problème.
Par contre, je trouve la deuxième invite de votre motion discriminatoire et dangereuse. Qu'on la prenne telle quelle ou même en la modifiant en supprimant «...en particulier lors des évaluations...», il faudrait souligner que cela doit se faire en dehors des évaluations ! A ce moment-là, cette motion ne fera effectivement de mal à personne. Elle ne fera pas avancer le «schmilblick» non plus, mais ce n'est pas grave !
Par contre, la pétition est importante parce qu'elle envoie un message très précis. Et puisque vous continuez à prétendre que vous êtes favorables à l'amélioration de l'enseignement du français, faites en sorte que l'enseignement du français soit amélioré, entre autres en privilégiant les groupes de petits effectifs et non pas en faisant des classes de vingt-quatre élèves ! C'est parfaitement ridicule ! Tout le monde sait bien qu'on travaille mieux dans une classe de douze élèves que dans une classe de vingt-quatre, spécialement dans les domaines de la dissertation et de la rédaction !
Mme Janine Hagmann (L), rapporteuse de minorité. Pour clore ce débat, j'aimerais situer exactement le problème. Il se trouve à deux niveaux.
Une pétition demande le maintien des acquis. Certains membres de la commission pensent que le maintien de ces acquis n'est pas indispensable à l'amélioration de l'enseignement du français. Dont acte ! A part cela, une minorité de la commission a préparé cette motion, parce qu'elle s'est précisément rendu compte qu'il y avait un réel problème à traiter et qu'il était possible de le traiter sans faire de l'épicerie avec une demi-heure par-ci, une demi-heure par-là, et sans exiger l'égalité entre tous les collèges.
Alors, pour montrer que nous n'avons vraiment pas envie de faire de la politique politicienne, je pense que nous pourrons accepter l'amendement de Mme Dallèves qui demande que «...l'enseignement secondaire prenne en compte, hors évaluation normative, la qualité et la correction de l'expression orale et écrite des élèves».
Par contre, il nous paraît vraiment très important que cette motion soit renvoyée au Conseil d'Etat. Si vous ne le faites pas, cela prouvera un manque évident de motivation de votre part, s'agissant de faire une évaluation sur la situation actuelle de l'enseignement du français à Genève !
Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. Première remarque générale. S'il est vrai que le département produit peu de rapports, il faut reconnaître que lorsqu'il les produit c'est la plupart du temps sur la base des actions qu'il a menées. Nous passons donc plus de temps à agir qu'à répondre aux motions : c'est parfaitement exact ! Nos fonctionnaires sont engagés pour agir plus que pour rédiger des rapports : ceci explique sans doute cela - je le dis avec tout le respect que je porte au Grand Conseil !
Pour avoir suivi, par le biais des P.-V. et du rapport, l'essentiel de vos travaux, j'ai cru comprendre que vous aviez tous des préoccupations par rapport à la maîtrise du français; c'est une nécessité qui n'est d'ailleurs pas propre au collège de Genève; elle est valable pour tous les étudiants. Je fais une légère parenthèse pour vous dire qu'on retrouve les mêmes préoccupations, s'agissant de la maîtrise de la langue et de l'orthographe, dans les Mémoriaux qui ont paru dans les années 50, pour ne pas parler de ceux qui ont paru au début du siècle... Cela ne manque pas de m'inquiéter tout en relativisant les choses !
En examinant vos motivations, il m'est apparu ce qui suit.
La pétition part de la nécessité de donner des cours de français dans des classes à effectif réduit de moitié, particulièrement pendant la quatrième année du collège, pour pallier «le manque de maîtrise de la langue française» et les conséquences qui en découlent.
Personnellement, je ne suis pas dérangée par le fait que vous me renvoyiez cette pétition, sauf peut-être dans le sens où je respecte les pétitions. Mais, en l'occurrence, si vous acceptiez de les entendre, chaque enseignant de chaque discipline vous expliquerait avec conviction combien il est indispensable de rajouter, pour des raisons impératives, des heures au programme et des demi-classes ! Alors je vous le dis très franchement, pour avoir rencontré les parents d'élèves récemment, cela devient ingérable, d'une part du point de vue des horaires des élèves qui sont déjà trop lourds et d'autre part pour ce qui est du financement, dont il faut souligner qu'il doit être réparti en fonction d'un programme intelligemment établi !
J'en viens à la motion et aux problèmes qu'elle soulève. Il est parfaitement exact - j'ignorais à ce moment-là l'existence de cette motion - que nous avons envisagé, au niveau du département, de renforcer, sur l'ensemble du cursus scolaire, les cours de français pour améliorer la maîtrise du français. Ces efforts se font notamment au niveau de l'enseignement primaire, mais aussi largement au niveau du cycle d'orientation. En effet, j'ai tenu à modifier la nouvelle grille précisément pour mettre l'accent sur l'enseignement du français et des mathématiques. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle certains enseignants, ou plutôt certains syndicats, se sont sentis t-autorisés à dire...
M. Claude Blanc. T-autorisés ?
Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. ...autorisés à dire - excusez-moi ! Je me suis entendue moi-même, mais je ne me suis pas reprise pour voir votre tête, Monsieur Blanc ! (Rires.) Je disais donc : ...se sont sentis autorisés - z-autorisés, même...
Une voix. m-autorisés !
Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. ...m-autorisés, oui... (Rires.) Bref, ils ont prétendu que tout ceci était une façon de se soumettre au diktat des entreprises et de l'économie.
Alors, je vous le dis clairement, le plan du département est bel et bien d'assurer un enseignement cohérent et solide du français et de le renforcer. Les objectifs ont été définis et toutes les structures en place : structures d'accueil, classes d'accueil, cours renforcés, appui, ont bel et bien pour mission de les atteindre. Cette motion n'enfonce donc pas des portes ouvertes : elle est un encouragement à aborder la question de façon globale, et non pas de façon sectorielle.
Mesdames et Messieurs - et je terminerai par là - toutes celles et ceux qui connaissent la population estudiantine du collège de Genève savent que ce n'est pas en ajoutant une cinquième heure, sous forme d'une demi-classe, que l'on va résoudre les problèmes de langue qui seraient apparus à un moment du cursus scolaire des élèves... Vous ne me ferez pas croire que cette cinquième heure rendrait les élèves capables de maîtriser les arcanes et les subtilités de la langue française là où douze ans d'enseignement n'ont pas réussi, hélas ! Et cela, alors que l'année suivante la plupart d'entre eux seront appelés à entrer à l'université, dans des auditoriums qui comptent plus de cent étudiants.
Et c'est bien la raison pour laquelle il semble plus opportun de prévoir un concept global, de vous en rendre compte et de vous démontrer que les efforts sont précisément faits pour que l'on ne soit pas obligé, la dernière année, de dédoubler des classes sous prétexte qu'il faut rattraper le temps perdu.
Il faut savoir que chaque enseignant peut demander à être auditionné par le biais d'une pétition qu'il peut faire signer par ses collègues, comme je l'ai vu faire au cycle d'orientation. Et il faut savoir aussi que chaque enseignant qui la signe souhaite augmenter le nombre d'heures consacré à sa discipline dans la grille horaire.
Alors, je le répète, j'ai beaucoup de respect pour les pétitions, mais, en l'occurrence, cette pétition est «entendue» par le biais de la motion.
Ou bien vous votez les budget en conséquence, ad aeternum, chaque fois qu'un pétitionnaire débarque dans la commission de l'enseignement, ou bien vous admettez que l'autorité, avec les enseignants, est à même d'établir des programmes qui tiennent compte des budgets, des nécessités de la grille horaire et des moyens qui sont mis à disposition des différents collèges. En revanche, vous devez considérer que ce qui est important c'est le programme global et que les efforts qui sont faits à l'école primaire et au cycle d'orientation sont les plus à même d'éviter ce type de problèmes au collège.
Néanmoins, je m'étonne, Mesdames et Messieurs les députés, que vous, qui êtes si passionnés par cette pétition, soyez si peu intéressés à améliorer le français dans nos écoles professionnelles et dans notre école de culture générale... C'est pourtant tout aussi nécessaire que pour les élèves du collège ! La motion, elle, va dans ce sens. Je trouve vraiment très curieux que vous vous préoccupiez de ceux pour lesquels un maximum d'efforts a été fait dans ces domaines et que vous vous désintéressiez aussi fortement des autres, qui ont tout autant besoin de la maîtrise du français, même si certains pensent que c'est «se soumettre aux besoins de l'économie» !
M. René Koechlin (L). M'sieur le préses, m'sieu dames, des fois qu'on se foutrait du françouse dans les biturnes... (Rires.) ...faudrait s'replanter dans la caboche que le frouze qu'on cause dans c'te «tu parles-tu-mens» est aussi exemplatoire que le châssis d'une gonzesse qui ferait basculer un camionneur ! (Rires et applaudissements.)
Une voix. Mais personne ne parle comme ça !
Une autre voix. Ah, quoique !
Le président. Je crois qu'après cette démonstration nous pouvons passer au vote !
Je vous propose de voter d'abord sur la pétition, parce qu'au fond elle détermine tout le débat majorité/minorité. Ensuite, nous voterons sur l'amendement à la motion et sur la motion.
Celles et ceux qui acceptent les conclusions du rapport de majorité sont priés de le manifester en levant la main.
P 1195-A
Mises aux voix, les conclusions du rapport de majorité de la commission de l'enseignement et de l'éducation (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées.
M 1308
Le président. Nous allons voter d'abord sur l'amendement proposé par Mme Caroline Dallèves-Romaneschi, qui consiste à remplacer dans la deuxième invite : «en particulier lors des évaluations» par : «hors évaluation normative», ce qui donne :
«...prenne en compte, hors évaluation normative, la qualité et la correction...».
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mise aux voix, cette motion ainsi amendée est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
Motion(1308)
pour un renforcement de la qualité de l'enseignement du français
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
que le français, langue de scolarité des élèves des écoles genevoises, n'est pas la langue maternelle d'une proportion importante d'entre eux ;
que la maîtrise de la langue de scolarité joue un rôle fondamental dans l'ensemble de la formation scolaire et professionnelle ;
qu'en particulier, les exigences de la nouvelle maturité gymnasiale augmentent quant aux capacités des élèves à exprimer leur pensée dans une forme synthétique, précise et structurée ;
que les plans d'étude cadre assignent à l'enseignement de la langue de scolarité une place prépondérante dans la formation dispensée par les écoles préparant à la maturité ;
que, de façon plus générale, la maîtrise de la langue française devient de plus en plus nécessaire pour participer de façon efficace à la vie professionnelle, sociale, politique, associative, culturelle, d'une société qui devient elle-même de plus en plus complexe ;
que le développement des nouveaux moyens d'information et de communication, loin de reléguer l'usage de la langue au second plan, nécessite au contraire une maîtrise plus étendue tant du code écrit que du code oral, et une capacité de décryptage et de synthèse de l'information à la fois plus rapide et plus sélective, dans tous les domaines cités plus haut ;
que la maîtrise de la langue de scolarité (et/ou de la langue maternelle) est la condition sine qua non de la bonne acquisition des langues secondes ;
que la qualité de l'enseignement dépend pour une bonne mesure des conditions de celui-ci (possibilité de prise en compte de l'hétérogénéité croissante des élèves, même s'il s'agit de collégiens, travail et soutien personnalisés dans les domaines de la dissertation et de la rédaction) ;
à étudier les moyens de parvenir à renforcer la qualité de l'enseignement du français à Genève, tout au long du cursus de l'élève, tant dans la scolarité obligatoire que dans la scolarité postobligatoire, et en tenant compte des particularités des diverses filières ;
à faire en sorte que l'ensemble des disciplines de l'enseignement secondaire prenne en compte, hors évaluation normative, la qualité et la correction de l'expression orale et écrite des élèves.
M. John Dupraz (R). Mon interpellation s'adresse plus particulièrement au chef du département de l'intérieur et de l'agriculture. Elle s'intitule : «Décision curieuse de la commission foncière agricole ».
Le 24 novembre prochain, les immeubles de la Cave coopérative de Genève, en liquidation, seront mis en vente forcée. Dans l'annonce faite dans la «Feuille d'avis officielle» et adressée aux actionnaires de la Cave coopérative de Genève, société anonyme, il est dit - notamment dans la présentation du dossier concernant certains immeubles - que l'ensemble se situe en zone agricole.
Selon la décision de la commission foncière agricole, le 15 juin 1999, cet ensemble n'est plus assujetti au régime de la zone agricole, car non approprié à l'agriculture et ne dépendant pas d'une exploitation agricole. Or, les installations d'une cave dépendent des exploitations agricoles et sont appropriées à l'exploitation agricole.
Je ne comprends pas cette décision et poserai donc deux questions : Qui a saisi la commission foncière agricole pour qu'elle en arrive à une telle décision ? Sur quelle base légale cette décision est-elle appuyée, car elle m'apparaît contraire à l'état de fait ?
M. Bernard Annen (L). Mon interpellation s'adresse à M. Ramseyer, président du département de justice et police.
J'ai lu avec intérêt - tout en saluant le départ de M. Dupraz venu uniquement pour développer son interpellation urgente... (Rires.) - le reportage de la «Tribune de Genève» du 8 novembre dernier, consacré à la transformation en zone piétonne de la rue du Rhône, ainsi que votre réponse qui a fait la Une de la Tribune des lecteurs. Je tiens à préciser d'emblée que je n'ai rien contre les zones piétonnes, bien au contraire.
De nombreux exemples en Europe nous révèlent l'importance sociale et économique des zones piétonnes au centre-ville. Mais ce qui m'inquiète dans cette affaire est l'absence de toute mesure d'accompagnement à la réalisation d'un tel projet. Les zones piétonnes auxquelles j'ai fait allusion tout à l'heure, et qui rencontrent un plein succès, sont toutes desservies par des parkings de proximité. Or il n'en est nulle part question dans le projet présenté par la «Tribune».
Créer une zone piétonne au centre-ville sans offrir de places de parking en suffisance dans les environs et, par conséquent, sans mettre en place des conditions d'accessibilité adéquates est tout simplement une aberration économique. Il est totalement illusoire de penser que les gens se déplaceront tous à pied ou en TPG, sans oublier les personnes âgées, d'une part, et les handicapés, d'autre part.
Pour mémoire, le parking du Mont-Blanc est déjà saturé, tout comme l'ensemble des parkings qui bordent l'hyper-centre. C'est la démonstration de besoins évidents de la population genevoise.
Monsieur le président, je suis particulièrement inquiet pour le commerce genevois. Le centre-ville est le plus grand centre commercial du bassin genevois. Il a un rôle économique et social qui n'est plus à démontrer. Celui-ci doit faire face à une concurrence acharnée, vous le savez, notamment venant des centres commerciaux, tant suisses que français, qui tous offrent des conditions d'accessibilité et un confort d'achat que le centre-ville n'a pas.
La création d'une zone piétonne à la rue du Rhône doit se faire en tenant compte des intérêts économiques en jeu. Les commerçants de ce centre-ville attendent de vous une position claire, nette et précise. Je dirai que cette conception doit être celle du Conseil d'Etat et je désire savoir quelles seront les mesures d'accompagnement que le Conseil d'Etat entend mettre en place s'il devait fermer la rue du Rhône.
Je désire également savoir comment le Conseil d'Etat entend prendre en compte l'intérêt des commerçants dans le cadre de ce projet. Enfin, et cela me paraît primordial, le Conseil d'Etat pense-t-il mettre en place une étude d'impact économique relative à ce projet, car il en va de l'avenir du commerce du centre-ville ?
M. Christian de Saussure (L). Mon interpellation s'adresse à M. Segond, président du DASS.
Monsieur le président, dans son édition du 4 novembre 1999, «GHI» a publié un encart qui fait appel aux citoyens de plus de 55 ans qui souffrent de troubles de la mémoire et de la concentration. Il leur est proposé de participer à une étude clinique internationale lancée par une grande entreprise pharmaceutique, dont le but est de tester la possibilité d'influencer favorablement ces symptômes à l'aide d'un médicament développé et d'enrayer l'évolution vers une maladie plus grave.
Je n'insisterai pas aujourd'hui sur la gratuité de la prise en charge médicale, bien précisée dans le texte, mais sur l'anonymat de ce placard. En effet, il n'est nulle part fait mention de qui conduira cette étude à Genève. Seul un numéro de téléphone figure au bas de l'annonce et ce numéro aboutit à la «consultation-mémoire» des institutions universitaires de gériatrie.
J'aimerais savoir, Monsieur le président, si la commission d'éthique des HUG a approuvé une telle manière anonyme de recruter des volontaires et, qui plus est, dans une partie de la presse locale et si cette même commission a approuvé le texte imprimé qui donne des informations lacunaires sur cette recherche et ses conséquences possibles. Enfin, j'aimerais savoir ce qu'aurait dit votre département ou le service du médecin cantonal si un médecin ou un groupe de médecins privés avaient procédé de la sorte pour faire appel à des candidats dans un programme de recherche clinique qu'ils conduiraient.
Présidence de M. Daniel Ducommun, premier vice-président
M. Pierre Ducrest (L). Ma première intervention s'adresse à M. Ramseyer.
Depuis le mois de juin apparaissent, par médias interposés, des velléités de modifier, tous azimuts, la circulation routière. Toujours dans ces mêmes médias, des prises de position surprenantes émanant de diverses personnes en charge, soit de politique soit d'un service d'Etat, sont étalées, pêle-mêle, sous la plume de journalistes fort imaginatifs.
Cette nouvelle façon de procéder est assurément orchestrée par un nouveau magistrat, une entité importante, voire «fusionnable» de notre canton. Celui-ci grossit, à outrance, ses prérogatives municipales en matière de circulation routière, telle la grenouille voulant se faire plus grosse que le boeuf. N'y voyez pas, Monsieur le président, de comparaison de personnes !
Une voix. Non, non !
M. Pierre Ducrest. Comme ce genre d'affrontements stériles est relaté par la presse sur un sujet brûlant qui préoccupe la population genevoise, je vous pose les questions suivantes : Quand mettrez-vous le holà à ce genre d'ambiguïté, en montrant clairement qui est le responsable des transports du canton de Genève, responsable qui, actuellement, est sur la défensive en recourant, comme un simple citoyen, au courrier des lecteurs de la «Tribune de Genève» ? Quand donnerez-vous des ordres de patron au directeur et aux collaborateurs de votre service pour leur rappeler leur devoir de réserve sur la position de votre département au sujet des transports ?
M. Pierre Ducrest (L). Mon interpellation urgente s'adresse à Mme Calmy-Rey qui n'est pas là, mais dont les oreilles doivent siffler !
Des rumeurs flottant dans le Landerneau genevois font état d'un grand chambardement au sein de l'Hôtel des finances. Il s'agit, plus précisément, de déménagement.
M. Claude Blanc. Il y a longtemps qu'elle déménage !
M. Pierre Ducrest. Mais, au contraire des publicités de mon collègue Balestra sur lesquelles on peut lire : «Nous ménageons ce que nous déménageons», ce déménagement se fait de manière un peu brutale.
Pourquoi ce déménagement, ai-je demandé ? Pour y installer une crèche dès le 1er janvier prochain, m'a-t-on répondu. Qui est déménagé ? Des collaborateurs importants pour l'Etat, puisqu'ils s'occupent d'informatique et notamment de ce qui concerne le passage à l'an 2000, et qui ne sauront plus où aller, à moins que d'autres départements ne veuillent bien les accueillir.
Est-il normal d'installer une crèche interne dans ces locaux, alors que l'on cherche des locaux libres pour les collaborateurs de l'Etat ? Où trouvez-vous, Madame, les moyens financiers ? serait-ce dans les rubriques budgétaires relatives au budget 2000 et, subsidiairement, dans votre département ?
Mme Barbara Polla (L). Mon interpellation s'adresse à Mme Martine Brunschwig Graf et concerne le RUIG, le Réseau universitaire international de Genève.
Madame la présidente, dans un indescriptible brouhaha de fin de séance, nous vous avons adressé en urgence, au mois de juin, un rapport et une motion concernant le RUIG qui demandait, notamment, que cette importante nouvelle structure universitaire genevoise soit opérationnelle dès la rentrée de cet automne.
Par ailleurs, les textes des autres invites de la motion insistaient sur les nécessaires collaborations au sein même de l'université et sur les indispensables conventions relatives aux fonds mis en commun. Nous désirons être informés de ce qu'il en est et savoir si le RUIG est opérationnel. A l'heure actuelle, quels sont les moyens à sa disposition ? Quels sont le ou les programmes retenus et quel est l'état de leur avancement ? Quelles sont les plates-formes d'interaction interne et externe d'ores et déjà opérationnelles ? Comment se développe l'interaction fonctionnelle entre le RUIG et le milieu universitaire dans son ensemble et avec le nouveau rectorat, en particulier ? Quelles sont les éventuelles difficultés qui restent à résoudre ?
C'est la commission de l'enseignement supérieur unanime qui vous avait adressé la motion susdite au mois de juin. Elle vous remercie d'avance, Madame la présidente, des réponses que vous voudrez bien nous apporter sur ce sujet particulièrement important pour le développement des compétences et des relations internationales de notre université, notamment dans le cadre du développement durable.
Mme Marie-Paule Blanchard-Queloz (AdG). Cette interpellation sera aussi courte que l'évacuation d'urgence de vingt personnes âgées de la Maison de retraite des Rives du Rhône, ordonnée et organisée par le département de l'action sociale et de la santé, il y a juste une année.
Pour «fêter» cet anniversaire - c'était le 6 novembre 1998 - je rappelle qu'on a donc pratiqué une évacuation en force, en ambulance, qui a duré quelques heures, et que cela fait une année que les victimes attendent de recevoir les réponses aux questions légitimes qu'elles ont posées.
Au mois d'avril 1999, notre Grand Conseil a envoyé la pétition des pensionnaires, de leurs amis et du personnel au Conseil d'Etat. Je vous rappelle que le délai de réponse de six mois est écoulé.
De deux choses l'une, soit les raisons de l'évacuation d'urgence se sont avérées justifiées et, dans ce cas, ces décisions ont été expliquées aux victimes, soit - et c'est ce que je serais tentée de croire - le département a beaucoup de peine à justifier cet acte abusif. Aurez-vous le courage de présenter des excuses aux citoyens que vous avez malmenés ?
M. Alberto Velasco (S). Mon interpellation s'adresse à l'ensemble du Conseil d'Etat, car l'aéroport est un établissement de droit public et la présidence du conseil d'administration est exercée par un membre de ce Conseil d'Etat. On a appris, ces derniers jours, que le directeur de cet établissement avait présenté un recours au Tribunal fédéral contre la décision de notre Grand Conseil concernant l'indemnisation des riverains de l'aéroport.
Ma question est la suivante : Comment est-il possible que le directeur d'un établissement de droit public puisse recourir contre une décision émanant de son autorité de tutelle ?
M. Rémy Pagani (AdG). Mon interpellation s'adresse à M. Lamprecht en tant que responsable de la caisse cantonale de chômage. J'ai en main une convention 2000, portant sur l'application de la LACI par les caisses de chômage, que le Département fédéral de l'économie a adressée à toutes les caisses de chômage.
Cette proposition de convention devait être renvoyée avec commentaires, le 19 novembre. A l'article 4, condition e), il est fait mention du salaire au mérite. Le fondateur - entendez le Conseil d'Etat - de la caisse chômage s'engage fermement à introduire la notion de performance dans sa réglementation salariale.
Mes questions portent sur l'introduction du salaire au mérite dans notre administration. En effet, comme vous le savez, le B5 05 ne donne aucun aval à notre gouvernement pour l'introduction du salaire au mérite et surtout pas de manière ferme. Quelle a été la réponse du Conseil d'Etat ou celle de la caisse de chômage à cette condition-cadre ? Dans le cas où la réponse du gouvernement contient cet engagement ferme, comment le gouvernement fera-t-il pour rectifier cette position ? Dans le cas où le gouvernement a pris une position opposée - ce que je souhaite - comment posera-t-il ses conditions ou ses réserves à la signature de cette convention ?
M. Luc Gilly (AdG). Au mois de septembre déjà, je voulais vous parler de ce sujet, mais mon émotion était trop grande et j'y ai renoncé.
Suite au décès, cet été, de mon ami Maxime Chalut, j'ai en effet été très ému par l'hommage que lui a rendu le président du Grand Conseil, lors de notre séance de fin septembre 1999.
Je rappelle, pour ceux qui ne connaissent pas ou plus Maxime Chalut, qu'il fut député - peut-être même à la place que j'occupe, je n'en sais rien. Il a siégé longtemps au Municipal et au Grand Conseil. J'ai pensé demander au gouvernement s'il entendait faire quelque chose en son honneur, car Maxime Chalut a été l'un des seuls à refuser de quitter la caserne de Lausanne en 1932 pour aller tirer sur la foule des manifestants à Genève.
Or, année après année, Madame la présidente, Madame Brunschwig Graf - la dame du DAM - un silence, une amnésie politique et historique se sont installés sur ce fait d'arme, sur ce courageux militaire... - pour une fois que c'est dans l'autre sens ! - ...et cette amnésie me fait énormément de peine, car les années passent et jamais un mot n'est venu de la part du gouvernement, jamais les médias n'ont parlé de cette affaire d'une autre manière, en évoquant le courage de cet homme. Alors, des citoyens s'en occupent.
Au moment où la droite - le fascisme aussi - est en train de reprendre du poil de la bête un peu partout en Europe, en Suisse également, je m'étonne que l'on n'ait pas pensé, en cette dernière année du millénaire, à lier 1932 au futur et à rendre un hommage tout particulier à Maxime Chalut qui, courageusement, refusa de se rendre à Genève avec la troupe.
Depuis six ans que je siège au Grand Conseil, j'ai reçu presque chaque mois des invitations pour rendre des honneurs militaires à des gens qui sont morts pour la patrie. J'en reçois pour l'Escalade, pour les Vieux-Grenadiers qui vont encore faire bénir leurs canons devant la cathédrale Saint-Pierre, etc. Je m'étonne que tous ces événements militaires soient commémorés d'une façon ou d'une autre et que les autorités ne pipent mot sur les civils morts en 1932, à Genève - je vous rappelle que treize civils sont morts et qu'il y a eu plus de quatre-vingts blessés - qui revendiquaient l'interdiction d'un meeting fasciste à Genève.
Madame Brunschwig Graf, vous connaissez très bien cette période historique qui a été grave pour notre République. En tout cas, l'honneur de ces gens n'a jamais été défendu par les autorités. Je suis un peu ému de raconter tout cela, car durant six ans de parlement, alors que j'ai reçu des invitations en permanence pour ceci ou cela, il ne s'est trouvé personne pour parler de ces gens-là, surtout dans une perspective historique. Je trouve que ce n'est pas très correct. (Applaudissements.) Je demande au gouvernement s'il lèvera le petit doigt dans cette affaire pour le 9 novembre de l'an prochain ?
M. Pierre Marti (PDC). Mon interpellation urgente est adressée au conseiller d'Etat M. Gérard Ramseyer.
Si j'en crois la presse, il serait question d'installer une zone piétonne à la rue du Rhône. Ce projet est de nature à inquiéter les détenteurs de véhicules professionnels, notamment ceux qui travaillent dans la construction et les métiers d'entretien et qui s'alarment des entraves supplémentaires qu'une telle mesure pourrait encore créer dans leur activité quotidienne.
La rue du Rhône traverse une partie très active du centre-ville. Outre l'approvisionnement des commerces et des services, cette partie de notre cité fait l'objet d'un volume croissant de travaux de construction, de rénovation et d'entretien. Je pense, par exemple, aux travaux de rénovation du bâtiment de la Banque cantonale de Genève en l'Ile. Ce genre de travaux exige un va-et-vient très important de véhicules professionnels chargés de débarrasser les déchets et d'approvisionner les chantiers en matériaux. Des interventions quotidiennes et ponctuelles de différents corps de métier ont également lieu à l'intérieur de ce périmètre.
Je reconnais bien volontiers que la situation actuelle n'est guère satisfaisante et qu'il est bien difficile de faire coexister tous les usagers privés et publics qui doivent, à un titre ou à un autre, utiliser cette artère. Des solutions doivent être examinées et il ne sera pas aisé de satisfaire tout le monde.
S'il y a lieu de faire appliquer avec rigueur les règlements sur le stationnement de courte durée ou sur l'interdiction d'arrêt, j'estime toutefois que la mise en zone piétonne donne la priorité à une seule catégorie d'usagers au détriment d'autres, comme les professionnels, pour qui il est tout aussi important d'utiliser cette rue marchande sans trop de contraintes.
Monsieur le président, pouvez-vous nous dire où en est ce projet et si, le cas échéant, vous avez prévu d'associer étroitement les usagers professionnels de la rue du Rhône à l'étude de cet éventuel changement de statut de cette dernière ?
M. Bernard Clerc (AdG). Mon interpellation s'adresse au Conseil d'Etat. Elle est relative à la situation du journal «Le Courrier». Vous n'êtes pas sans savoir que si nous ne faisons rien, ce journal risque de disparaître à la fin de l'année, alors même qu'une réorganisation de ce quotidien - incluant la volonté de l'imprimer à Genève - est en cours et devrait intervenir au début de l'an prochain.
Il y a dix-huit mois, ce Grand Conseil adoptait une motion à l'unanimité qui prévoyait deux choses. D'une part, que le Conseil d'Etat utilise tous les moyens d'aide indirecte à la presse pour contribuer au maintien du quotidien «Le Courrier» et, d'autre part, que les communiqués et annonces de l'Etat et des établissements publics soient distribués de manière à ne pas défavoriser «Le Courrier». Or il a fallu attendre le mois de juin de cette année pour que, enfin, l'un ou l'autre département commence à faire paraître les offres d'emploi de l'Etat de Genève dans les colonnes de ce journal.
Ce retard est particulièrement fâcheux. Vous savez que la part de la publicité dans le journal «Le Courrier» est faible, environ 15%, et que les annonces de l'Etat peuvent jouer un rôle non négligeable. Cette mesure peut se faire sans coûts supplémentaires pour l'Etat. A l'époque, d'ailleurs, nous l'avions déjà proposée. Il s'agit simplement de réduire quelque peu le format des annonces prévues dans les autres quotidiens - qui, eux, ne sont pas discriminés et qui reçoivent systématiquement les annonces - afin de les inclure dans «Le Courrier» qui, évidemment, est beaucoup moins cher du point de vue du coût de ces annonces.
Ma question est très simple. Des directives ont-elles été adressées à tous les offices du personnel des départements et des établissements publics en ce qui concerne les annonces et les offres d'emploi à faire paraître dans «Le Courrier» ?
M. Charles Beer (S). Mon interpellation urgente s'adresse à l'ensemble du Conseil d'Etat, mais particulièrement à MM. Segond et Lamprecht ainsi qu'à Mme Calmy-Rey, s'agissant des données que je souhaite obtenir en réponse à cette interpellation urgente.
En premier lieu, cette interpellation urgente concerne la problématique des bas salaires à Genève et de ceux que l'on appelle les «working poors». Vous n'êtes pas sans savoir que l'Union syndicale suisse a lancé une campagne dont le but est d'obtenir un salaire minimum de 3 000 F net pour un emploi à plein temps, ce qui correspond à 3 400 F brut environ. Cette campagne de l'Union syndicale suisse englobe également le thème des «working poors». Le syndicat Actions-Unia rallie cette campagne, qui a lieu dans l'ensemble de la Suisse.
Nous avons remarqué, en tant qu'acteurs dans le mouvement syndical, que certains secteurs sont délicats et il nous paraissait important que ces interpellations urgentes soient formulées dans l'ensemble de la Suisse, afin d'obtenir des réponses, pas seulement sur la question des salaires, mais également sur les questions budgétaires.
Comme vous le savez certainement, nous commençons les négociations salariales dans le secteur du commerce de détail et dans celui de l'hôtellerie-restauration. Ces deux secteurs sont connus pour recenser un nombre important de bas salaires et en général, malgré le redémarrage, l'adaptation salariale a du mal à se faire; tout comme dans les secteurs de l'imprimerie et du bâtiment qui, aujourd'hui, se voient pratiquement confrontés à la question du débrayage.
Nous souhaitons connaître les conséquences des bas salaires, notamment dans les secteurs du commerce de détail et de l'hôtellerie-restauration, sur le budget du canton. Mes questions sont les suivantes - je souhaite que M. Segond écoute mes questions, car ce serait bien qu'il nous réponde vendredi.
- Premièrement, dans le canton de Genève, combien de salariés dans l'hôtellerie et le commerce de détail gagnent moins de 3 400 F brut par mois ?
- Deuxièmement, quel est le pourcentage des personnes assistées aujourd'hui, dans le cadre de l'Hospice général ? Nous souhaitons savoir combien de personnes travaillant dans l'hôtellerie-restauration et dans le commerce de détail doivent aujourd'hui compter sur un complément de l'Hospice général pour vivre. Evidemment, cette question débouche sur la problématique des temps partiels, puisque la précarisation des conditions de travail passe bien souvent par une érosion du statut et par des contrats à temps partiel imposés.
- Troisièmement, combien coûte à la République cette assistance aux bas salaires ?
- Quatrièmement, que compte faire l'exécutif pour éviter que la République n'ait à subventionner des bas salaires et à verser un certain nombre de compléments, sachant qu'il s'agit d'entreprises pouvant être relativement importantes, que ce soit dans le cadre du commerce de détail ou dans l'hôtellerie-restauration ?
Présidence de M. Jean Spielmann, président
Mme Janine Berberat (L). Mon interpellation s'adresse à M. Cramer, mais puisqu'il n'est pas là je vais tenter le «virtuel» !
Monsieur le conseiller d'Etat, une publicité par voie d'affichette, style tout-ménage, ainsi qu'un encart paru hier dans la «Tribune de Genève» nous apprennent la tenue d'une table ronde demain soir à Uni-Bastions sur le thème du retraitement des déchets radioactifs, avec la participation de Mme Monique Séné, directrice de recherche au CNRS ; M. Didier Anger, conseiller régional pour les Verts en Basse-Normandie, représentant du CRIHAN ; M. Pierre Lehmann, physicien, et M. Jacques Mirenovic en tant que modérateur.
Ce qui surprend, au-delà d'une réunion entre copains, c'est que le logo de votre département est utilisé et figure en face de celui du WWF en haut d'une page, sans aucune autre référence de personnes responsables.
Mes questions sont les suivantes :
- Sous quelle égide est organisée cette table ronde ?
- Si le DIAE est l'organisateur, comment se fait-il qu'aucun membre du département ne figure parmi les intervenants ?
- Si l'organisateur est le WWF, peut-il utiliser un logo officiel et, dans ce cas, quelle caution le département dont vous êtes en charge apporte-t-il à cette manifestation animée par des intervenants connus exclusivement pour leurs thèses antinucléaires ?
Enfin, plus largement, si une association comme le WWF, engagée dans les combats que nous connaissons, peut utiliser le logo de votre département, peut-on envisager, dans un souci d'équité, que des associations moins dépendantes de vos milieux puissent aussi organiser des manifestations sous la bannière du DIAE ?
M. Pierre Meyll (AdG). Je m'adresse au chef du département de justice et police. C'est presque une conversation entre communiers versoisiens, puisqu'il s'agit d'un accident grave qui s'est déroulé au croisement de la route des Fayards et de la route de Malagny - que vous connaissez bien, Monsieur le président - dans lequel un enfant a été grièvement blessé.
Il est regrettable que les précautions nécessaires au ralentissement du trafic ne soient pas prises sur cette route cantonale qui passe à proximité de la route des Fayards, où sont situés les immeubles fort peuplés du nouveau quartier de la Pelotière, à l'extrémité sud de Versoix. Les enfants, ainsi que les nombreux habitants de ces immeubles, doivent traverser la route assez fréquentée des Fayards, où les automobilistes roulent généralement à une vitesse supérieure à 50 km/h, ignorant bien souvent le panneau de circulation placé à l'entrée de ce quartier.
Les enfants qui se rendent à l'école de Saint-Loup ou à l'école enfantine de Courvoisier sont obligés de traverser cet axe. Après que bien des accidents ont pu être évités, il s'en est produit un assez grave. J'aimerais donc vous demander d'appuyer de tout votre poids à l'OTC, afin que soient prises les mesures nécessaires au ralentissement de la vitesse à cet endroit devenu très dangereux.
Ces mesures pourraient comprendre toutes sortes de moyens susceptibles d'inciter les automobilistes à considérer que ce parcours est très fréquenté par des piétons, dont la sécurité n'est guère assurée, notamment en raison du manque de trottoirs. Je vous remercie de l'attention que vous prêtez à ces propos et suis persuadé que vous y prendrez garde et que vous ferez au mieux pour les intérêts des Versoisiens.
M. Christian Brunier (S). Mon interpellation concerne le président du département de justice et police et des transports.
En tant que défenseur de la Genève internationale, Monsieur Ramseyer, vous devez certainement savoir que la commission européenne économique des Nations Unies, siégeant dans notre cité, a décidé de décréter une semaine internationale de la sécurité routière, du 1er au 7 mai 2000. Cette semaine d'action se déroulera d'ailleurs dans tous les pays de l'OCDE.
Etant donné que l'impulsion part de notre ville, Genève, du Palais des nations et étant donné que ce thème est une préoccupation importante des Genevoises et des Genevois, j'espère que le département de justice et police et des transports ne restera pas les bras croisés. De ce fait, ma question est simple : que compte entreprendre le DJPT pour honorer cette semaine internationale de la sécurité routière ?
Le président. Nous sommes parvenus au terme des interpellations urgentes, auxquelles il sera répondu lors d'une prochaine séance.
23. Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier les objets suivants :
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
En date du 30 avril 1999, le Grand Conseil a renvoyé à la Commission d'aménagement du canton le projet de loi 7559-B concrétisant la deuxième invite de l'initiative 21 intitulée « Halte à la spéculation foncière » (cf. annexe 6).
Le Grand Conseil entendait ainsi donner suite au courrier du 19 mars 1999, joint au présent rapport (cf. annexe n° 1), dans lequel la Chambre genevoise d'agriculture (ci-après CGA) avait en effet déclaré s'inquiéter des déclassements de terrains agricoles et estimait que l'agriculture courait le risque d'une « perte de substance en terme de durabilité ». Se référant à la loi neuchâteloise en la matière, qui prévoit que le fonds de compensation « participe à la prise en charge d'intérêts de fonds empruntés par des exploitants pour l'achat de terres agricoles », elle préconisait d'amender le projet de loi 7559-B en ce sens qu'il prévoie qu'une partie du produit de la taxe perçue sur les plus-values soit affectée au désendettement de l'agriculture. Le 24 mars 1999, soit la veille de la session plénière du Grand Conseil au cours de laquelle le projet de loi 7559-B devait être traité, la CGA avait demandé à être auditionnée. La Fédération genevoise des métiers et du bâtiment, l'Association des promoteurs constructeurs genevois et de l'Association des propriétaires de la Chambre genevoise immobilière (ci-après FMB, APCG et CGI), par lettres séparées du même jour, avaient procédé à une démarche similaire (cf. annexes nos 2 à 5).
Le Grand Conseil souhaitait, dès lors, que soient examinées attentivement les propositions et amendements de dernière heure soulevés par la CGA, ce qui n'était pas possible en séance plénière.
Tel était le mandat précis de la Commission de l'aménagement du canton. C'est dire que, pour saisir l'essentiel de ce dossier, le lecteur voudra bien se référer au précédent rapport de la commission, du 3 mars 1999, plus particulièrement le rapport de minorité (cf. annexe 6) qui explicite en détail le projet de loi 7559, tel qu'il résulte des travaux de la commission, ainsi qu'au rapport du DAEL visant le projet de concrétisation de la 2e invite de l'initiative 21 concernant l'aménagement du territoire (cf. annexe n° 7).
Travaux de la commission
Sous la présidence de M. Hervé Dessimoz, la Commission de l'aménagement s'est réunie à deux reprises les 2 et 16 juin 1999. La séance du 2 juin 1999 a été entièrement consacrée aux auditions.
Audition de la FMB, de l'APCG et de la CGI
Ces trois organisations sont d'avis que le projet de loi 7559-B, en instaurant un nouvel impôt, se tromperait de cible. Selon elles, l'adoption de ce projet de loi n'aurait pratiquement pas d'effet sur la spéculation foncière, mais serait en revanche dissuasif en ce qui concerne la volonté d'entreprendre. Au surplus, ces organisations ont formulé une série d'amendements touchant l'ensemble des dispositions du projet de loi 7559-B, sans toutefois traiter spécifiquement du problème soulevé par la Chambre genevoise d'agriculture. Pour plus de détails, on voudra bien se référer aux documents de la FMB et de l'APCG joints au présent rapport (annexes n° 8et 9).
Compte tenu du contenu relativement précis du mandat que lui avait confié le Grand Conseil, la majorité de la commission n'a pas souhaité rouvrir un débat sur ces questions, abondamment traitées lors de ses précédents travaux. Néanmoins, une proposition en ce sens de M. Olivier Vaucher, demandant que soient repris les amendements de la FMB, a été formellement refusée par 8 voix (3 AdG, 3 S, 2 Ve) contre 7 (3 L, 2 R, 2 DC).
Audition de la CGA
La CGA, représentée par son directeur, M. Neil Ankers, reconnaît que, face à une demande de terrains dopée par l'urbanisation du canton, l'agriculture a payé un prix fort à la spéculation immobilière. Ce sont 773 ha de surfaces agricoles qui ont disparus du canton au cours de ces 12 dernières années, soit l'équivalent de 1 000 terrains de football.
Aujourd'hui, la situation est différente. L'agriculture suisse est très endettée. Pour le seul canton de Genève, la dette représente près de 90 millions de francs pour 450 entreprises. Toute diminution de la zone agricole signifie à terme une perte sèche pour une agriculture durable.
En conséquence, la CGA a proposé d'amender le projet de loi 7559-B d'un article 30D alinéa 2 nouveau, relatif au fonds de compensation, qui stipulerait que « les 2/3 du produit des taxes perçues en vertu desarticles 30 E et suivants et concernant à l'origine la zone agricole sont affectés à l'amélioration de la compétitivité de l'agriculture genevoise ». A noter que la CGA renonçait à sa proposition initiale, qui visait à ce que la taxation des plus-values serve à la prise en charge partielle des intérêts des dettes liées à la zone agricole, cette dernière notion posant problème.
Par ailleurs, elle souhaitait que l'article 30J du projet de loi 7559-B, relatif aux exonérations, soit amendé d'une nouvelle lettre d, qui préciserait que « leur réemploi par le bénéficiaire de la plus-value pour acquérir des immeubles afin d'y continuer l'exploitation de son entreprise agricole, ou s'il acquiert en réemploi de l'entreprise aliénée une autre entreprise agricole en Suisse, au sens de l'art. 32 de la LDFR. Le prix payé ne doit pas être surfait au sens de l'art. 66 LDFR » (cf. annexe n° 10).
Discussion
Si les préoccupations de la CGA sont apparues légitimes, en revanche, la formulation des amendements au projet de loi 7559-B n'a pas trouvé l'assentiment d'une majorité de la commission.
Parmi les objections soulevées, on retiendra que la proposition d'affecter à la « compétitivité » de l'agriculture genevoise les 2/3 du produit de la taxe tiré de mesures d'aménagement conférant des plus-values à des terrains « concernant à l'origine la zone agricole » reviendrait à créer une sorte de « fonds dans le fonds ». Il y aurait ainsi un « sous-fonds agricole » au sein du fonds de compensation, à gérer spécialement, ce qui n'apparaît pas souhaitable d'un simple point de vue de technique comptable. Pourquoi, par exemple, ne pas créer un « sous-fonds industrie » pour les plus-values issues de mesures d'aménagement concernant les terrains industriels ? Par ailleurs, la notion de « compétitivité » n'est pas d'une clarté absolue ; l'intervention du DIAE paraît ici indispensable, selon des modalités qui restent à définir. En outre, pourquoi limiter les sommes disponibles pour l'agriculture à 2/3 du montant du produit des taxes perçues sur les plus-values générées par des mesures d'aménagement ayant pour origine des terrains appartenant à la zone agricole ?
Quant à l'exonération des taxes perçues sur les plus-values concernant des terrains sis en zone agricole en cas de remploi, autre amendement proposé par la CGA, une telle mesure pourrait se justifier si le paiement de la « taxe IN 21 » sur un déclassement de terrain agricole privait l'agriculteur de tout bénéfice en lui laissant tout juste les moyens d'acquérir un nouveau terrain agricole de surface équivalente. Or, des simulations effectuées par le DAEL ont montré que tel n'est pas le cas, le gain pour chaque m2 de terrain en zone agricole « déclassée » étant à ce point considérable qu'il permet en toute hypothèse de procurer au propriétaire un bénéfice appréciable, même après l'acquisition d'une surface agricole équivalente et la perception tout à la fois de la taxe sur la plus-value voulue par l'initiative 21 et, le cas échéant, de l'impôt sur le gain immobilier.
Nouvelle formulation de l'article 30D, alinéa 1, relatif au fonds de compensation
Finalement, la majorité de la commission a préféré suivre la proposition du DAEL visant à simplement fixer, dans le cadre de la loi, le principe d'un accès, pour l'agriculture, au fonds de compensation instauré par le projet de loi 7559. Les modalités de cet accès devront, le cas échéant, être définies avec les milieux intéressés dans le règlement d'application du projet de loi 7559-B.
Concrètement, cet amendement concernant l'article 30D, al. 1, relatif au fonds de compensation, est scindé désormais en deux alinéas et reformulé de la façon suivante :
Art. 30 D Fonds de compensation
1 Un fonds de compensation recueille le produit des taxes perçues en vertu des articles 30E et suivants ci-après et finance les indemnités versées en application de l'article 30F.
2 Il peut participer, dans la mesure de ses disponibilités, aux frais relatifs aux :
Outre la référence à l'agriculture, cette nouvelle version distingue entre le financement d'une part, qui vise les indemnités pour expropriation matérielle et la participation financière d'autre part, qui vise les mesures d'aménagement au sens large prises par l'Etat et les autres mesures compensatoires. Cette distinction vise à marquer l'idée que le fonds de compensation prévu par le projet de loi 7559-B a pour but premier de permettre à l'Etat de s'acquitter des éventuelles indemnités dues pour expropriation matérielle, avant tout autre chose.
Au vote :
l'alinéa 1 est accepté par 8 oui (3 AdG, 3 S, 2 Ve), 1 non (1 L) et 5 abstentions (1 L, 2 R, 2 DC) ;
(un député rejoint la séance pour la suite des votes)
l'alinéa 2, lettre a est accepté par 8 oui (3 AdG, 3 S, 2 Ve) et 7 non (3 L, 2 R, 2 DC) ;
l'alinéa 2, lettre b est accepté par 8 oui (3 AdG, 3 S, 2 Ve) et 7 non (3 L, 2 R, 2 DC).
Proposition d'amendement de M. René Koechlin
Au surplus, M. René Koechlin, revenant sur les objections déjà soulevées dans son rapport de mars 1999, a proposé un amendement à l'art. 30J, concernant les cas d'exonération.
Craignant de voir la taxe sur les plus-values augmenter le prix de revient des opérations de construction et surtout les loyers des logements concernés, M. Koechlin a proposé d'amender cet art. 30J d'un troisième alinéa, ainsi libellé :
« Cette taxe n'est perceptible que dans la mesure où elle n'accroît pas le prix de revient des opérations »
Cet amendement a été rejeté par la majorité de la commission, par 8 voix (3 AdG, 3 S, 2 Ve) contre 7 (3 L, 2 R, 2 DC).
La majorité de la commission a considéré que cette crainte est sans fondement pour tous les terrains sis dans les zones de développement, soit le type de zone le plus souvent créé par le législateur, où se trouve concentré l'essentiel du potentiel à bâtir du canton et où se réalise la plus grande partie des projets de construction. Dans ces zones, le prix du terrain, qui est fonction du coefficient d'utilisation du sol fixé par le plan localisé de quartier, est strictement contrôlé par l'Office cantonal du logement et ne peut figurer qu'au prix maximum admis par le Conseil d'Etat, en application de la loi générale sur les zones de développement, du 29 juin 1957 (L 1 35). Actuellement, les plus-values réalisées dans ces zones ne sont pas taxées. Si une taxe sur la plus-value était adoptée, elle aurait pour seul effet de prélever un pourcentage de la plus-value réalisée, sans que le prix du terrain admis dans les plans financiers n'en soit augmenté, ni par conséquent les loyers ou la subvention de l'Etat.
Quant au risque d'augmentation du prix de revient de l'opération de construction envisagée et d'augmentation des loyers pour les terrains situés en dehors des zones de développement, il est également minime, voire inexistant pour les raisons qui suivent.
Il convient, tout d'abord, d'observer que les autorisations de construire délivrées en conformité d'une zone ou d'un plan d'affectation, sans dérogation, sont réputées ne pas entraîner de plus-value (art. 30E, al. 4) et ne donnent donc pas lieu à taxation. Il ne peut, en effet, y avoir de taxation que pour les autorisations de construire délivrées par voie dérogatoire, concernant des terrains sis hors des zones de développement.
En pratique, le Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement a octroyé, pour l'année 1997, 296 dérogations concernant 287 dossiers (cf. annexe n° 7, p. 11). De ces 296 dérogations, on peut soustraire 117 cas de dérogation au rapport des surfaces en zone villa (art. 59 LCI), les villas n'étant en principe pas destinées à la location, de même que 23 cas de transformations et reconstruction de bâtiments sis hors des zones à bâtir (art. 26A LaLat), 13 cas de transformation dans des hameaux en zone agricole et en limite de zone (art. 22 et 27 LaLat). Il convient encore de retrancher 49 cas de dérogations à la LDTR, exonérés de toute taxe par l'art. 30J, comme il sera plus loin exposé.
C'est dire que la question soulevée ne concerne, pour l'année 1997, potentiellement et au maximum, qu'une centaine (94) d'autorisations de construire délivrées par voie dérogatoire, soit un nombre très restreint de dossiers au regard des 2 421 autorisations délivrées par le DAEL en 1997, soit environ 4 %, déduction faite des autorisations de démolir et des LER.
Encore faut-il que l'octroi de la dérogation considérée entraîne une plus-value supérieure à 25 000 F et qui, surtout, ne tombe pas sous le coup des exonérations prévues par l'article 30J. Cette disposition prévoit, en effet, des exonérations notamment lorsque les dérogations ont pour objectif la réalisation d'au moins 60 % de surfaces brutes de plancher destinées à des logements d'utilité publique au sens de l'article 16 al. 1 lettre a de la loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977 (art. 30J, al. 1, let a) et la réalisation de surfaces brutes de plancher destinées à des logements mis au bénéfice d'une dérogation en vertu des articles 6 et 8 de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation, du 25 janvier 1996 (art. 30J, al. 1, let. c), qui vise à la protection des logements qui répondent, quant à leur genre, loyer ou prix, aux besoins prépondérants de la population.
L'augmentation du prix de revient d'une opération à raison de la taxe sur la plus-value due à une mesure d'aménagement ne touchera donc qu'un nombre très restreint de dossiers. Mais même pour ce petit nombre d'autorisations de construire, l'augmentation du prix de revient ne signifie cependant pas que les loyers seront augmentés en proportion !
En effet, si les loyers étaient fixés sur la seule méthode des coûts, dans laquelle intervient le prix de revient, la question pourrait peut-être se poser. La méthode des coûts n'est, cependant, pas la seule existante pour fixer le loyer. Les propriétaires ont également à disposition la méthode de fixation des loyers fondée sur le marché, consacrée par l'article 269a CO, qui stipule que « ne sont en règle générale pas abusifs les loyers qui, notamment, se situent dans les limites des loyers usuels dans la localité ou dans le quartier », soit « les loyers des logements et des locaux commerciaux comparables à la chose louée quant à l'emplacement, la dimension, l'équipement, l'état et l'année de construction » (cf. art. 11 de l'Ordonnance sur le bail à loyer et le bail à ferme d'habitations et de locaux commerciaux, du 9 mai 1990).
Dès lors, de deux choses l'une : soit, pour l'opération de construction envisagée, le niveau du loyer qui résulte de l'application de la méthode des coûts devrait être inférieur à celui qui résulte de la méthode du marché, soit il devrait être supérieur.
Dans le premier cas, les propriétaires ayant la possibilité d'aligner les loyers des nouveaux locaux aux tarifs pratiqués sur le marché pour un même objet, on voit mal ce qui les conduirait à renoncer à user de cette faculté. Dans ce cas, la taxe prévue par le projet de loi 7559 et le second volet de l'initiative 21 réduira simplement leur marge bénéficiaire, mais n'aura pas d'effet sur les loyers.
Dans le second cas, c'est-à-dire lorsqu'il apparaît qu'en fonction notamment de la taxe sur la plus-value créée par le projet de loi 7559, le prix de revient de l'opération de construction envisagée devrait être tel que les loyers à fixer selon la méthode des coûts devraient excéder les loyers qui résulteraient de la méthode du marché, le propriétaire sera simplement amené à retarder la réalisation de son opération, sauf à prendre le risque de ne pas trouver preneur des nouveaux locaux.
A noter que la réalisation de cette dernière hypothèse ne devrait pas avoir lieu trop souvent, dans la mesure où le propriétaire dont le terrain fait l'objet d'une mesure d'aménagement part, faut-il le rappeler, avec un avantage sur d'autres constructeurs, puisque, sauf cas de spéculation manifeste contre laquelle l'initiative 21 se propose justement de lutter, il est censé avoir acquis son terrain à un prix inférieur à celui résulte de la mesure d'aménagement dont il a bénéficié, ne devant acquitter que 30 % de la plus-value due à cette mesure.
En définitive, on s'aperçoit que la taxe instaurée par le projet de loi 7559 n'aura pas d'effets significatifs sur les loyers.
Vote final
A l'issue des travaux, le projet de loi ainsi amendé (incluant le nouvel article 30D, al. 1 et 2 plus haut cité) est accepté par 8 oui (3 AdG, 3 S, 2 Ve), 6 non (3 L, 2 R, 1 DC) et une abstention (DC).
Tels sont les motifs qui nous amènent à vous recommander, Mesdames et Messieurs les députés, l'adoption du projet de loi 7559-C issu des travaux de la commission et qui figure en annexe.
Projet de loi(7559)
modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (L 1 30)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
La loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, est modifiée comme suit :
Art. 30C Principe (nouveau)
Les avantages et les inconvénients décrits aux articles 30E et 30F résultant de mesures d'aménagement du territoire font l'objet d'une compensation, selon les articles 30D à 30O.
Art. 30D Fonds de compensation (nouveau)
1 Un fonds de compensation recueille le produit des taxes perçues en vertu des articles 30E et suivants ci-après et finance les indemnités versées en application de l'article 30F.
2 Il peut participer, dans la mesure de ses disponibilités, aux frais relatifs aux:
3 La part du fonds qui, au 31 décembre de chaque année, excède le montant de 25 millions F, est versée à la caisse de l'Etat. A titre exceptionnel, le Grand Conseil peut cependant décider de laisser subsister ce montant excédentaire sur le fonds.
4 Le Conseil d'Etat présente à la fin de chaque législature au Grand Conseil un rapport sur l'utilisation du fonds.
Art. 30E Avantage (nouveau)
1 Une mesure d'aménagement entraînant un avantage, soit une plus-value d'un ou de plusieurs biens ou actifs immobiliers compris dans le périmètre concerné par celle-ci et représentant un montant total supérieur à 25 000 F, donne lieu à taxation.
2 Par mesure d'aménagement, on entend :
3 Dans la mesure où il sont susceptibles d'entraîner un avantage au sens de l'alinéa 1, sont assimilés à des mesures d'aménagement les actes administratifs suivants :
4 Les autorisations de construire délivrées en conformité d'une zone ou d'un plan d'affectation, sans dérogation, sont réputées ne pas entraîner de plus-value foncière. En zone de développement, il en va de même des plans localisés de quartier dont l'indice d'utilisation du sol est inférieur ou équivalent à celui, usuel, de cette zone, fixé dans le réglement d'application.
Art. 30F Indemnisation (nouveau)
1 Une indemnité ne peut être accordée que lorsque les inconvénients provoqués par une mesure d'aménagement sont équivalents à une expropriation matérielle.
2 Mention est faite au Registre foncier de tels versements.
Art. 30G Assujettissement (nouveau)
1 Le débiteur de la taxe sur la plus-value résultant d'une mesure d'aménagement au sens de l'article 30E est le propriétaire du terrain au moment de l'adoption de celle-ci.
2 Lorsque plusieurs personnes sont propriétaires d'un immeuble, elles sont solidairement obligées envers l'Etat.
Art. 30H Calcul de la plus-value (nouveau)
1 La plus-value soumise à taxation est calculée sur la base des éléments déterminants existant au moment où la mesure d'aménagement est adoptée. Il est notamment tenu compte de l'affectation future, de l'indice d'utilisation du sol et, selon la nature des mesures d'aménagement considérées, du prix de revient, dont le coût usuel de construction au m3 SIA selon l'indice genevois des prix de la construction de logements, et de la valeur de rendement. La plus-value équivaut à la différence de la valeur du bien ou actif immobilier, considéré avant et après l'adoption de la mesure d'aménagement considérée.
2 La valeur de rendement est déterminée sur la base du taux moyen des hypothèques de premier rang pratiqué par la banque cantonale de Genève, augmenté d'un pourcentage pour couvrir les charges, fixé par le règlement d'application.
Art. 30I Taux de la taxation (nouveau)
1 Le taux de la taxation de la plus-value est de 30 %.
2 Le montant de la taxe est adapté à l'indice suisse des prix à la consommation à dater de la notification du bordereau.
3 En cas de déclassement de terrains, réputés inconstructibles, en zone à bâtir ordinaire ou de développement, il est tenu compte des mesures de compensation simultanées consenties par le même bénéficiaire de ladite mesure de déclassement. Ces mesures sont portées en déduction, m2 pour m2, des surfaces déclassées en zone à bâtir ordinaire ou de développement.
Art. 30J Exonération (nouveau)
1 Les plus-values résultant des mesures d'aménagement visées à l'article 30E peuvent être exonérées lorsqu'elles ont pour objectif :
2 Dans les cas visés à l'alinéa 1er, lettre b, la taxation et la perception ont lieu simultanément lors de l'aliénation du terrain.
Art. 30 K Taxation (nouveau)
La taxation s'opère sur la base d'un bordereau notifié par le département simultanément à l'adoption d'une des mesures d'aménagement au sens de l'article 30E. La décision de taxation fait l'objet d'une mention au registre foncier. L'article 30I, alinéa 2 est réservé.
Art. 30L Perception (nouveau)
La créance découlant de la taxe visée à l'article 30E est exigible lors de l'aliénation du terrain ou lors de la délivrance d'une autorisation définitive de construire, au plus tard à l'ouverture du chantier de construction découlant de la mesure d'aménagement considérée.
Art. 30M Révision (nouveau)
Au cas où, postérieurement à la décision de taxation, l'un des éléments entrant dans le calcul de celle-ci subit une modification de nature à influencer sensiblement les possibilités de mise en valeur du terrain et pour autant que celui-ci n'ait pas changé de propriétaire, le département peut, d'office, ou à la demande de ce propriétaire, procéder à une révision de la taxe.
Art. 30N Hypothèque légale (nouveau)
1 Le paiement des taxes prévues au présent titre est garanti par une hypothèque légale. L'hypothèque prend naissance, sans inscription, en même temps que la créance qu'elle garantit. Elle est en premier rang, en concours avec les autres hypothèques légales de droit public, et prime tout autre gage immobilier.
2 L'hypothèque est inscrite au registre foncier à titre déclaratif, sur la seule réquisition du département, accompagnée du bordereau de taxation.
3 L'hypothèque est radiée d'office au paiement complet de la taxe.
Art. 30O Recouvrement (nouveau)
1 Les bordereaux définitifs relatifs au paiement des taxes, établis en application de l'article 30K, sont assimilés à des jugements exécutoires au sens de l'article 80 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, du 11 avril 1889. Le recouvrement est poursuivi à la requête du conseiller d'Etat chargé du département, représentant l'Etat, conformément aux dispositions de ladite loi.
2 Les dispositions de l'article 86A de la loi sur les contributions publiques, du 9 novembre 1987, sont, le cas échéant, applicables au recouvrement de la taxe.
3 Le paiement de la taxe prévue à l'alinéa 1 constitue, le cas échéant, une impense déductible au sens de l'article 82, alinéa 8 de la loi générale sur les contributions publique et son acquittement ne dispense pas l'aliénateur ou ses ayants-cause de tous autres impôts prévus par cette loi.
Art. 30P Règlement (nouveau)
Le Conseil d'Etat fixe par voie de règlement les modalités d'application des articles 30C à 30O.
Art. 34, al. 2 Recours contre les décisions du département (nouveau)
2 En dérogation à l'alinéa 1, les décisions prises en application de l'article 30K peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la commission cantonale de recours en matière d'impôts, instituée par la loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887. Le Tribunal administratif, siégeant en plénum, connaît des recours interjetés contre les décisions de la commission cantonale de recours en matière d'impôts rendues en vertu du présent alinéa.
Art. 36 Demandes d'indemnité (nouveau)
Les demandes d'indemnité pour expropriation matérielle au sens de l'article 30F peuvent être adressées au Tribunal de première instance dans un délai du 5 ans à dater de l'entrée en vigueur de la mesure d'aménagement considérée. Une transaction judiciaire peut intervenir pendant la procédure à tous les stades de celle-ci.
ANNEXE 6
Date de dépôt: 3 mars 1999Messagerie
IN 21-DPL 7559-B
Rapportde la Commission d'aménagement du canton chargée d'étudier :
a) IN 21-D l'initiative "; Halte à la spéculation foncière "
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
Rapporteur : M. René Koechlin
Mesdames etMessieurs les députés,
Après que le 13 juin 1997, le Grand Conseil lui ait une nouvelle fois confié la tâche, délicate, de donner forme à un projet de loi concrétisant le deuxième volet de l'initiative 21, la Commission d'aménagement a consacré plus d'une demi-douzaine de séances à ce travail, d'abord sous la présidence de Mme Fabienne Bugnon, puis sous la conduite de M. Hervé Dessimoz.
Ont assisté aux séances M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat chargé du DAEL, ainsi que Mmes et MM. Sophie Lin, cheffe du Service du plan directeur, Anni Stroumza, chargée de mission, Georges Gainon, chef de la Division de l'information du territoire et des procédures, Didier Mottiez, secrétaire adjoint, Jean-Charles Pauli, juriste, Raymond Schaffert, directeur de l'aménagement et Bernard Trottet, adjoint au Service du plan directeur, tous employés du DAEL.
Le 3 décembre 1997, la commission a examiné le projet de loi 7559 ; puis, le 21 janvier 1998, elle a chargé les services du DAEL de bien vouloir élaborer un texte de synthèse entre ledit projet de loi 7559 et les projets issus des nombreux, volumineux et interminables travaux précédents. Vous trouverez en annexe le "; Bref historique " résumant ces derniers et qui figurait au rapport de majorité traitant du même sujet et soumis au Grand Conseil le 13 juin 1997 ; est également reproduite la première partie du commentaire qui suivait.
Le 28 janvier 1998, la commission a interrompu ses travaux à la lecture des taux de taxation (art. 30I) et chargé un groupe d'étude du DAEL d'établir un "; test pratique " permettant de vérifier le bien-fondé du projet de loi, de mettre en évidence les difficultés d'application de ce dernier et, cas échéant, de proposer des modifications.
Ce groupe, composé d'une quinzaine de collaborateurs du DAEL, a entrepris un travail considérable consigné dans un rapport et une annexe qui ensemble comportent plus de 220 pages. Il remit ces documents et les présenta à la commission en décembre 1998. Celle-ci, sur la base de ces textes, a finalement élaboré le projet de loi qui vous est présenté aujourd'hui, mais qu'au vote final, la moitié des commissaires a refusé pour le principal motif qu'une partie du projet, par certains de ses articles, non seulement n'aura aucun effet contre la spéculation foncière - ce qui le dépouille du rôle de concrétiser l'initiative 21 - mais risque en revanche de décourager un bon nombre de propriétaires et autres constructeurs et de les dissuader d'entreprendre ; car la taxe en cause accroîtrait sensiblement et de manière prohibitive le coût de leur opération.
Commentaire :
C'est cet effet pervers du projet que la moitié de la commission déplore et qu'avec l'appui du Grand Conseil elle voudrait encore tenter de supprimer. Cette correction serait d'autant plus justifiée qu'elle porterait sur des mesures qui n'auront aucun effet sur la spéculation foncière, mais contribueraient en revanche à renchérir purement et simplement les opérations de construction ; tous les cas de dérogations présentés par le groupe de travail du DAEL nous en fournissent la preuve. Notons en passant que ces exemples tablent sur une taxe égale à 20 % de la plus-value, alors que le projet de loi qui ressort des travaux de la commission prévoit un taux de 30 % ; ce dernier accroît par conséquent de moitié tous les montants "; prélevables " mentionnés dans le document du DAEL.
De plus, il s'avère en réalité, comme signalé plus haut, que chaque fois qu'un projet bénéficie d'une dérogation, la taxe en augmenterait d'autant le prix de revient. Car dans ces cas de figure, il est d'usage de ne pas inclure dans le plan financier la plus-value du fond ou du bien que l'opération implique, afin de ne pas en alourdir la charge locative, quelle qu'en soit la nature. En revanche, dans tous les cas de déclassement de zone, la taxe s'incorporerait au prix du terrain et ne "; péjorerait " nullement l'usuel plan financier de l'opération. Elle ne ferait que réduire le profit du tenant du fond, ce que l'on peut considérer comme un moindre mal, quand bien même cette diminution de gain pourrait dissuader un certain nombre de propriétaires d'entreprendre ou de vendre.
Nous appuyons ces propos notamment sur les trois exemples suivants dont l'un fut cité le 13 juin 1997 par M. le député Christian Grobet, coauteur du projet de loi 7559. Ce dernier évoquait le cas d'un agriculteur qui se construirait une maison sur son terrain sis en zone agricole, dérogeant au régime de celle-ci. En vertu de la présente proposition de concrétisation du deuxième volet de l'initiative 21, dont nous contestons la teneur, ce propriétaire, pour construire son logement, se verrait taxé d'une telle manière qu'il devrait probablement renoncer à son projet. Car en fait, cela reviendrait à l'obliger à augmenter le coût de son opération du tiers de la valeur supposée ou estimée de son terrain, ou, en d'autres proportions, de décupler la charge de ce dernier.
Ainsi, en supposant que le paysan en question construise une villa de 200 m2 de planchers, il verra s'accroître le prix de revient de sa réalisation de 100 500 F calculés comme suit :
Terrain affecté : 200 m2 pl. / CUS 0.2 = 1000 m2 t.
1000 m2 t. X 335 F (plus-value estimée par M. Grobet) = 335 000 F
Selon l'article 30I, tel qu'il ressort des travaux de la commission, le propriétaire en cause devra s'acquitter d'une taxe égale à 30 % de cette plus-value, soit 100 500 F, comme indiqué plus haut.
Relativement à un coût maximal de réalisation d'environ 500 000 F, cette taxe pénaliserait l'opération d'un surcoût égal à 20 % de son prix de revient. Un handicap qui risquerait fort de contraindre l'agriculteur à renoncer à son projet. Un agriculteur qui, par ailleurs, n'aurait rien d'un spéculateur. Il pourrait être soupçonné de l'être s'il vendait sa maison immédiatement après l'avoir construite - ou s'il la louait à un tiers - en incluant dans son prix une valeur du terrain affecté égale à celle de la cinquième zone "; villas ". Mais dans ce cas, il se verrait imposé par le fisc en vertu de la loi sur les gains et bénéfices immobiliers à raison d'environ 45 % de la plus-value ou, en cas de location, sur le revenu et la fortune. La taxe que prévoit le projet de loi serait nécessairement déductible et par conséquent superflue.
Autre cas d'espèce :
Un propriétaire institutionnel obtient l'autorisation de surélever son immeuble sis en troisième zone. Ce dernier atteindrait, par dérogation, 24 mètres de hauteur à la corniche au lieu des 21 mètres conformes aux règles régissant la dite zone.
L'immeuble, d'une valeur globale de 10 millions de francs, comporte un terrain estimé par expertise à 2 millions de francs.
L'étage supplémentaire implique une plus-value de 14,3 % du bien en cause. Reportée sur le seul terrain, déduction faite des coûts de réalisation, elle s'élèverait à 286 000 F; et la taxe sur cette plus-value serait de 85 800 F équivalant à 30 % de ladite plus-value.
Or, elle ne ferait que renchérir l'opération d'autant. Répercutée sur les loyers de l'étage supplémentaire, elle les augmenterait d'environ 6 000 F (pour un rendement brut de 7,0 %). Cela constituerait une hausse pure et simple d'environ 7,5 % de l'état locatif de la surélévation.
Surélévation que l'institution en cause ne requiert pas nécessairement par spéculation. D'ailleurs, le résultat d'une requête de dérogation est suffisamment aléatoire pour exclure toute intention spéculative de la part de son auteur. Il dépend en effet uniquement du bon vouloir et de l'appréciation de l'administration et de l'autorité exécutive dont elle dépend.
Il appert des deux exemples susmentionnés que les auteurs du projet de loi 7559, sous prétexte de lutter contre la spéculation foncière, cherchent plutôt à mettre un terme à toute requête de dérogation en matière de construction, si nécessaire ou justifiée fut-elle. Ils devraient avoir au moins l'honnêteté de le dire.
La moitié de la commission, pour sa part, estime qu'en matière de dérogation, la taxe telle que proposée dans le nouveau projet de loi s'avère inopportune, voire "; contreproductive ". Elle ne se justifierait que dans le cas où elle serait incorporée au plan financier d'une opération de construction sans en accroître le prix de revient.
Troisième cas d'espèce :
Ainsi, par exemple, lorsqu'un terrain en cinquième zone (villas) est déclassé par le Grand Conseil en troisième zone de développement avec un CUS, usuel, de 1,2, sa valeur unitaire passe de 320 F à 650 F le mètre carré (valeur OCL).
La plus-value est dans ce cas de 330 F le mètre carré et la taxe qui en découlerait s'élèverait à environ 100 F (soit 30 % de 330 F).
Or, ce dernier montant ne ferait que réduire d'autant le profit du propriétaire du fond, sans modifier le prix de 650 F figurant au plan financier de la réalisation.
Il appert clairement que dans tous les cas semblables, l'introduction d'une taxe ne péjore pas le prix de revient. Elle ne rompt pas l'équilibre économique des opérations.
Tandis qu'en matière de construction par dérogation, elle en accroît le coût présumé qui n'inclut usuellement pas la valeur accrue du terrain. La taxe sur la plus-value présumée devrait, dans ces cas, être perçue uniquement lors de l'aliénation du bien. Elle pourrait être alors assimilée à l'impôt sur les gains et bénéfices immobiliers.
C'est pourquoi il conviendrait de retenir pour principale règle en cette matière que la taxe concrétisant le deuxième volet de l'initiative 21 devrait n'être applicable ou perceptible - comme il est dit plus haut - que lorsqu'elle n'augmenterait pas le prix de revient de l'opération en cause.
Conclusion :
C'est avec cette condition pour objectif que le Grand Conseil devrait à nouveau charger la Commission d'aménagement de bien vouloir élaborer le projet de loi concrétisant le deuxième volet de l'initiative 21.
Cela n'empêche que la moitié de ladite commission se demande également si le moment n'est pas particulièrement mal choisi pour introduire un nouvel impôt - car c'est bien de cela dont il s'agit - alors que l'industrie du bâtiment est aux abois, que le marché immobilier est au plus bas et que la spéculation foncière - contre laquelle l'initiative 21 est dirigée - est pratiquement inexistante. Soumettre au peuple, dans de telles circonstances, l'introduction d'une nouvelle taxe paraît hasardeux et pour le moins inopportun.
Pour ces motifs, la moitié des commissaires présents vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer une fois encore le projet à la Commission d'aménagement pour qu'elle le réexamine et le modifie au moins dans le sens évoqué, soit selon la règle ci-dessus énoncée.
RAPPORT DE LA MINORITÉ
Rapporteur : M. Alain Etienne
Mesdames et
Introduction
En dépit de son titre ("; rapport de minorité "), exact sur le plan formel mais néanmoins trompeur quand au fond, le présent rapport doit être considéré, de fait, comme reflétant l'avis réel de la majorité de la commission, laquelle n'était pas au complet lors du vote final qui a clos ses travaux sur le projet de loi 7559.
Les représentants des partis de droite ont, en effet, cru bon de profiter de l'absence d'un député de l'AdG au moment du vote final (certes coupable d'arrivée tardive !), pour se prévaloir d'une règle de procédure qui veut qu'en cas d'égalité des voix, la proposition est considérée comme non adoptée (art. 186 al. 4 de la loi portant règlement du Grand Conseil), et en votant contre le texte issu des travaux de la commission, plutôt qu'en choisissant, ce qui eut certes été élégant, l'abstention pour laisser transparaître la réelle volonté de la majorité de la commission à l'issue de deux ans de travaux.
En effet, le 3 février 1999, alors que le texte issu de ces deux ans de travaux et qui figure en annexe venait de faire l'objet d'une deuxième lecture article par article, chaque article ayant été accepté à l'unanimité, ce même texte, au vote d'ensemble, en fin de compte, a été refusé par 7 voix pour (2 AdG, 3 S, 2 Ve) contre 7 voix contre (3 L, 2 R et 2 PdC) !
On notera donc que, plus de 11 ans après le dépôt de l'initiative 21 intitulée "; Halte à la spéculation foncière ", 7 ans après que le Grand Conseil, pourtant à majorité de droite à l'époque, ait déclaré recevable cette initiative et se soit par là-même engagé à mettre au point un projet de loi concrétisant le 2e volet de celle-ci et à l'adopter afin de le soumettre à votation populaire, les représentants des partis de droite persistent à donner dans la manoeuvre procédurière dilatoire. Méprisant les mêmes droits populaires dont ils se prévalaient bruyamment lorsqu'il s'agissait de concrétiser une autre initiative non formulée qui avait leur préférence, à savoir la traversée de la rade, ils préfèrent ne rien faire, et ainsi cautionner le système caractérisé de privatisation des bénéfices et de socialisation des pertes, conforme au dogme néolibéral qui prévaut actuellement.
A suivre le raisonnement tenu par les partis de droite, alors même qu'un rapport du DAEL estime le total des plus-values générées par l'ensemble des plans d'affectation du sol (plans de zone et plans localisés de quartier) adoptés en 1997 à près de F 17 millions, soit un montant dérisoire en regard des dizaines, voire des centaines de millions susceptibles d'être générées par les autorisations de construire délivrées par voie dérogatoire (11 millions pour 6 autorisations prises au hasard et représentant 3 % des cas), l'Etat ne devrait pas prélever de taxes sur ces plus-values dues aux mesures d'aménagement qu'il est amené à prendre, sans toutefois que les propriétaires ne disposent d'un droit. L'Etat devrait se contenter du modeste impôt sur les gains immobiliers, qui ne peut être perçu qu'en cas de vente, en évoluant à la baisse en fonction du temps pendant lequel le vendeur a été propriétaire, pour atteindre 0 % au bout de 25 ans. C'est le principe de la privatisation des bénéfices, qui, en l'occurrence, veut que les plus-values tirées des mesures d'aménagement restent autant que possible dans la seule poche des heureux bénéficiaires, sans que l'Etat, pourtant à l'origine de l'heureuse fortune de quelques propriétaires qui se trouvent soudainement privilégiés par rapport aux autres, ne bénéficie de cette manne tombée du ciel.
En revanche, lorsque l'Etat est amené à prendre des mesures d'aménagement susceptibles de léser plus particulièrement un propriétaire, par exemple lorsqu'il doit exproprier un terrain pour la création d'une route ou d'un équipement public, ces mêmes milieux ne voient aucun inconvénient, bien au contraire, à ce que l'Etat indemnise ces propriétaires. A titre d'exemple, on pourrait peut-être rappeler que le Grand Conseil est toujours saisi d'un projet de loi du Conseil d'Etat (PL 7610) ouvrant un crédit de 60 millions pour l'indemnisation des propriétaires riverains de l'Aéroport. L'on ne parlera même pas des coûts indirects qui ont pour origine des opérations de spéculation, à charge de l'Etat. On est très loin de la petite dizaine de millions (9,8) qu'a rapporté, en 1997, l'impôt sur les gains immobiliers ! C'est le principe de la socialisation des pertes, qui en l'occurrence veut que les pertes dues à la prise de mesures d'aménagement, au contraire des bénéfices tirés de ces mêmes mesures, soient pleinement supportées par l'Etat, et donc reportées sur la collectivité, puisque l'Etat tire ses ressources d'impôts frappant l'ensemble des contribuables.
Tel est, en réalité, l'objectif poursuivi par le projet de loi 7559 : lutter contre la spéculation et le système de privatisation des bénéfices et de socialisation des pertes qui prévaut actuellement en matière d'aménagement du territoire, une fois de plus cautionné par les représentants des partis de droite qui ont, in extremis, refusé d'adopter ce projet de loi.
Travaux de la commission
Sous les présidences successives de Mme Fabienne Bugnon, M. Hervé Dessimoz et M. Rémy Pagani (pour une séance), la Commission de l'aménagement s'est réunie à 9 reprises, les 3 et 10 décembre 1997, 21 janvier, 28 janvier, 4 février et 16 décembre 1998, 13 janvier, 20 janvier et 3 février 1999 pour traiter du projet de loi 7559.
Ont assisté aux séances, partiellement ou en totalité, M. Laurent Moutinot, chef du Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, M. Didier Mottiez, secrétaire-adjoint, Mme Anni Stroumza, chargée de mission, M. Georges Gainon, chef de la division de l'information du territoire et des procédures, M. Jean-Charles Pauli, juriste, M. Daniel Cheminat, contrôleur technique, M. Georges Albert, directeur de l'Office cantonal du logement et M. Claude Page, directeur a.i. de ce même office.
Sans vouloir dresser un "; historique " complet de ce dossier, il convient tout de même d'en rappeler quelques dates qui en résument les épisodes les plus significatifs :
- 22 juin 1979 : adoption de la LAT
La loi fédérale sur l'aménagement du territoire, adoptée à cette date (ci-après LAT), oblige les cantons à "; établir un régime de compensation permettant de tenir compte équitablement des avantages et des inconvénients majeurs qui résultent de mesures d'aménagement " (art. 5, al. 1 LAT).
Le fondement de cette disposition est limpide : le législateur fédéral a en effet estimé qu'il ne serait pas équitable qu'un particulier réclamant un dédommagement pour les restrictions que la collectivité publique apporte à son droit de propriété, puisse en outre bénéficier sans contrepartie des avantages que peuvent lui procurer ces mesures d'aménagement, alors qu'il n'a droit à aucun avantage (cf. Message relatif à la LAT, FF 1972 I 520). En d'autres termes, les mêmes mesures d'aménagement qui peuvent donner lieu à indemnisation pour expropriation matérielle doivent également pouvoir donner lieu à taxation sur la plus-value. C'est le principe dit de la symétrie des mesures, l'idée à la base des contributions de plus-value répondant à la simple exigence de l'égalité de traitement.
- 27 mars 1985 : dépôt du PL 5717 sur l'aménagement du territoire
A Genève, l'idée de créer un fonds de compensation, qui recueillerait le produit des taxes prélevées sur les plus-values résultant de mesures d'aménagement auprès des propriétaires pour financer les indemnités d'expropriation, date au moins de mars 1985. C'est, en effet, le moment choisi par le Conseil d'Etat de l'époque pour déposer un projet de loi de loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (PL 5717; ci-après Lalat), dont l'article 3 figurait à la dernière place de la partie introductive, juste après le but, le champ d'application et la désignation des autorités compétentes. La Lalat, dans sa teneur finale du 4 juin 1987, ne comporte toutefois plus aucune trace de cette très importante disposition.
- 8 février 1988 : dépôt de l'IN 21
C'est dans ce contexte que l'initiative IN 21, intitulée "; Halte à la spéculation foncière ", a été déposée en chancellerie le 8 février 1988 par le Parti du Travail.
Il s'agit, sauf erreur, de la dernière initiative non formulée déposée sous l'ancien droit constitutionnel et encore régie par celui-ci. Pour mémoire, les modifications apportées à la Constitution genevoise en 1992 fixent au Grand Conseil des délais pour traiter des initiatives non formulées, délais qui sont, en l'occurrence, amplement dépassés, comme il n'aura échappé à personne.
Cette initiative non formulée demande que le Grand Conseil légifère "; aux fins de combattre efficacement la spéculation foncière ", en proposant la mise au point et l'adoption de dispositions poursuivant cet objectif en matière de fiscalité, d'aménagement du territoire, de régime du crédit bancaire à l'achat de terrains et d'acquisition de terrains par les collectivités publiques.
- 15 octobre 1992 : le Grand Conseil déclare recevable l'IN 21
Le Grand Conseil, en date du 15 octobre 1992, s'est prononcé favorablement quant à la recevabilité de cette initiative, à l'exception du 3e volet de celle-ci, relatif au régime du crédit bancaire à l'achat de terrains. Il a, ainsi, évité que cette initiative soit, en tant que telle, soumise à votation populaire, seul le projet de concrétisation de l'un ou l'autre des volets de celle-ci devant faire l'objet d'une consultation populaire, étant encore précisé que, selon un avis de M. Andreas Auer, professeur de droit constitutionnel à l'Université de Genève, il ne peut y avoir qu'un seul projet de loi par volet, et non plusieurs à choix.
A partir de cette date, le Grand Conseil s'est donc engagé à concrétiser, notamment, le second volet de cette initiative, relatif à l'aménagement du territoire et qui est ainsi formulé :
"; L'aménagement du territoire "
Le deuxième moyen est la mise au point d'un système de prélèvement d'une plus-value immobilière résultant de la simple délivrance d'une autorisation de construire. La loi fédérale d'aménagement du territoire permet au canton de prélever une telle plus-value. "
La Commission d'aménagement du canton fut alors chargée d'élaborer un projet de loi concrétisant cette invite.
Elle est parvenue, en juin 1995, à un avant-projet de loi proposant notamment de ne taxer que la plus-value d'un bien ou actif immobilier "; résultant de la création d'une zone à bâtir en lieu et place d'une zone inconstructible " et reprenant l'idée précitée du fonds de compensation. Ce résultat ne satisfaisait toutefois pas une forte minorité de membres de la commission, au demeurant proche des initiants. Ces derniers auraient voulu voir figurer les autorisations de construire génératrices de plus-values, en particulier celles obtenues au moyen d'une dérogation, au nombre des mesures d'aménagement soumises à taxation.
La commission sollicita alors le professeur Andreas Auer plus haut nommé, qui, le 25 septembre 1995, a rendu un avis de droit sur la question. Selon ce dernier, la taxation de la plus-value résultant de la simple délivrance d'une autorisation de construire ne constituait pas "; un point crucial et central de l'initiative sans lequel cette dernière n'aurait plus aucun sens " (p. 9, point 27). Toutefois, le projet de loi appelé à concrétiser l'initiative "; traduirait probablement mieux le sens de l'initiative 21 s'il soumettait la plus-value résultant de la création d'une zone à bâtir mais aussi celle qui naît d'une dérogation exceptionnelle aux normes de la zone et à toute mesure législative de planification ou de construction ".
Le 26 mars 1996, la Commission d'aménagement sollicita la Commission fiscale en lui posant un certain nombre de questions. Le 28 novembre 1996, cette dernière lui répondit en lui communiquant son vote, négatif, quant à l'acceptabilité de la constitution d'un fonds de compensation et à l'opportunité d'une taxe de déclassement. Selon la Commission fiscale, la loi du 23 juin 1994 modifiant la loi sur les contributions publiques (selon PL 6737), relative à l'impôt sur les gains immobiliers, concrétisant le 3e volet de l'initiative 21, aurait également concrétisé le second volet de l'initiative 21 concernant l'aménagement du territoire.
- 8 janvier 1997 : dépôt du PL 7559 concrétisant la 2e invite de l'IN 21
Les travaux de la Commission de l'aménagement étaient pratiquement enlisés lorsque, le 8 janvier 1997, un groupe de députés déposa le projet de loi 7559, concrétisant la deuxième invite de l'initiative 21, qui fait l'objet du présent rapport. Ce projet de loi, parmi d'autres propositions, proposait la taxation d'une "; autorisation de construire ayant pour effet d'accorder un avantage particulier à un bien immobilier, notamment du fait de l'application des normes d'une zone de développement lorsque celles-ci ne correspondent pas aux normes de la zone de fond, ou du fait de la mise au bénéfice d'une dérogation aux normes de la zone, à un plan d'affectation du sol, à la loi sur les constructions et installations diverses ou à toute autre loi fixant des règles en matière de construction " (art. 30D, let. b).
La Commission de l'aménagement reprit alors ses travaux et rendit, le 8 avril 1997, deux rapports, l'un de majorité, l'autre de minorité. Le rapport de majorité concluait au refus d'entrer en matière sur ce projet. Il était assorti d'une résolution (R 336) invitant le Grand Conseil à déclarer que la loi votée le 23 juin 1994 (PL 6737), concrétise le 2e volet de l'initiative 21. Le rapport de minorité, pour sa part, concluait à l'acceptation du projet de loi 7559 en l'état.
- 13 juin 1997 : renvoi en commission du PL 7559
Le 13 juin 1997, le Grand Conseil a décidé de ne suivre les conclusions d'aucun de ces deux rapports et de renvoyer le projet de loi 7559 à la Commission de l'aménagement. Quant à la résolution R 336, elle n'a pas été retirée et figurait toujours dans la liste des objets en suspens.
Auditions
C'est dans ce contexte que, le 3 décembre 1997, la Commission de l'aménagement du canton, renouvelée suite aux élections de l'automne 1997, reprit ses travaux sur le projet de loi 7559, en procédant à une série d'auditions. Certaines de ces interventions ont fait l'objet d'une prise de position écrite, qui figure en annexe. Pour l'essentiel, on en retiendra ce qui suit :
Audition de la Chambre genevoise d'agriculture (M. N. Ankers, le 3.12.1997)
La CGA a surtout attiré l'attention sur le nombre croissant d'agriculteurs endettés. Pour ceux-ci, la vente de terrains déclassés constituerait "; souvent l'issue de secours, pour permettre aux exploitations saines dans leurs structures de repartir, et très rarement une réalisation de capital destinée à la consommation ". La taxe sur les déclassements prévue par l'initiative 21 et le projet de loi 7559 s'apparenterait à un "; nouvel impôt sur les gains immobiliers ", qui aboutirait à une "; double imposition ". Les recettes découlant de déclassements de terrains de la zone agricole à la zone à bâtir devraient être affectées aux crédits d'investissements dans l'agriculture. Enfin, il ne devrait pas être question de cette taxe en cas de succession.
Audition de l'association des promoteurs constructeurs genevois (MM. J. Blanc et Th. Barbier-Muller, le 10.12.1997)
L'APCG a estimé que le principe de la taxation est juste et mérite d'être soutenu en cas de déclassement d'un terrain agricole en terrain constructible. Elle n'était en revanche pas d'accord avec le principe de la taxation d'une autorisation de construire délivrée par voie de dérogation, qui ne remplirait pas les conditions d'un avantage "; majeur ", au sens de l'article 5, alinéa 1 LAT, conféré à un terrain par une mesure d'aménagement et ne serait pas justifié par un intérêt public.
Audition de la Chambre genevoise immobilière (Mme M.-C. Dulon et M. M. Muller, président)
Pour la CGI, seul un déclassement de zone inconstructible en zone constructible serait susceptible de constituer un avantage "; majeur " au sens de l'art. 5 LAT. Toutefois, les déclassements en zone de développement devraient être exclus de cette taxe, les prix étant contrôlés dans cette catégorie de zone.
Pour la perception de la taxe, seul le moment de l'aliénation du terrain devrait être pris en compte. Au surplus, cette taxe ferait double emploi avec l'impôt sur les gains immobiliers. En fin de compte, la Chambre genevoise immobilière préconisait de s'en tenir au projet de loi de concrétisation de l'initiative 21 élaboré sous la précédente législature.
Entrée en matière et nouvelle suspension des travaux
Le 10 décembre 1997, la commission est finalement entrée en matière sur le projet de loi 7559, par 8 voix (3 S, 3 AdG, 2 Ve) contre 6 avis contraires (3 L, 2 R, 1 PdC) et 1 abstention (PdC).
Cette entrée en matière paraissait signifier, implicitement, le rejet de la résolution n° 336, formellement voté le 3 février 1999. En effet, la plus-value due à une mesure d'aménagement mûrement réfléchie par l'autorité, mais pour l'obtention de laquelle le particulier ne dispose pas d'un droit, doit être distinguée, ne serait-ce qu'en vertu du principe de l'égalité de traitement déjà évoqué, du simple gain immobilier, sans changement de statut du terrain, dû aux seules fluctuations du marché ou à des circonstances particulières, lequel n'est en outre pas imposable après 25 ans de propriété continue.
Le même jour, la commission a effectué une première lecture article par article du projet de loi 7559. Cette première lecture a fait apparaître que les articles de ce projet de loi étaient rédigés de manière alambiquée, certaines dispositions traitant en un bloc de plusieurs sujets problématiques, ce qui rendait la discussion malaisée. Telles sont sans doute les raisons pour lesquelles cette première lecture n'est finalement pas arrivée à terme.
En effet, sur proposition du DAEL, le 21 janvier 1998, la Commission de l'aménagement a admis le principe de poursuivre ses travaux sur la base d'une nouvelle mouture du projet de loi, élaborée par le département. Cette nouvelle version était bien sûr axée sur le projet de loi 7559, dont les propositions et le contenu étaient pour l'essentiel repris. Elle tenait cependant compte, dans la mesure du possible, de certaines propositions émanant du texte du projet de loi issu des travaux de la commission de la précédente législature.
Ce nouveau texte présentait l'avantage d'une meilleure systématique, sériant plus distinctement les difficultés, ce qui était de nature à faciliter les débats.
L'on procéda alors à une première lecture de ce document, le 28 janvier 1999, qui s'arrêta toutefois à la lettre 30J. En dépit des améliorations apportées au texte, il s'avéra qu'aussi longtemps que des simulations de calculs chiffrant la plus-value due à certaines mesures d'aménagement concrètes n'auraient pas été effectuées, la discussion serait ardue, voire impossible. Aussi, la commission décida, le 4 février 1998, de suspendre ses travaux dans l'attente de documents chiffrés qui lui seraient fournis par le département.
Rapport du DAEL
Le 16 décembre 1998, chaque membre de la commission a reçu un exemplaire d'un rapport, élaboré par le DAEL, intitulé "; IN 21, projet de concrétisation de la 2e invite concernant l'aménagement du territoire, essai d'application de la version DAEL du PL 7559 ", accompagné d'une volumineuse annexe (191 pages), comprenant et commentant les calculs de taxation proprement dits, fondés sur des mesures d'aménagement effectivement adoptées en 1997, d'un tableau comparatif à deux colonnes, comprenant des propositions de modification du texte distribué en janvier 1998 (un exemplaire est disponible au service du Grand Conseil), lui même assorti d'un commentaire qui fait le lien entre ces propositions de modifications et les propositions de modifications issues des conclusions du rapport précité. Les travaux de la commission ont donc repris par la présentation, par le DAEL, de son rapport. Ce dernier répond à un bon nombre de questions complexes, notamment juridiques, qui ont pu être soulevées à différents stades des travaux. On voudra donc bien s'y référer en cas de besoin. Pour l'essentiel, nous en retiendrons ce qui suit :
a) Pour que soit applicable le système envisagé de compensation et de prélèvement d'une taxe sur la plus-value due à une mesure d'aménagement, il y a lieu de définir celle-ci comme équivalant à la différence de la valeur du bien ou actif immobilier, considérée avant et après l'adoption de la mesure prévue. En d'autres termes, il y a lieu de prendre en compte, le plus strictement possible, la différence de valeur imputable au seul changement de statut des terrains, à savoir aux nouvelles possibilités constructives qui se rattachent à ceux-ci, suite à l'adoption de la mesure d'aménagement concernée.
Cela implique que l'on renonce à la notion de valeur "; vénale ", que ne retiennent d'ailleurs, à juste titre, ni le texte initial du projet de loi 7559, ni le texte issu des travaux de la précédente législature. Il convient de faire abstraction des transactions effectives qui ont pu avoir cours dans un cas donné, trop souvent sans raison "; objective " apparente, pour se concentrer uniquement sur la valeur qui résulte des nouvelles possibilités constructives d'un terrain suite à l'adoption de la mesure d'aménagement considérée par rapport à celles qui résultaient de son statut antérieur.
b) La méthode de calcul diffère fondamentalement selon que le terrain considéré se trouve, ou est déclassé, en zone de développement ou selon qu'il se trouve ou est déclassé en zone à bâtir ordinaire. En d'autres termes, la méthode de calcul diffère selon la mesure d'aménagement considérée.
En zone ordinaire, il y a lieu d'appliquer la "; méthode bâloise ", en référence au canton de Bâle-Ville, où est appliqué depuis 20 ans un système de prélèvement d'une plus-value portant non seulement sur les plans d'affectation, mais aussi sur les autorisations délivrées par voie dérogatoire.
Selon cette méthode, la plus-value équivaut à la valeur de rendement supplémentaire accordée potentiellement à la parcelle ou à la construction par la mesure d'aménagement prise, déduction faite du coût de construction des surfaces brutes de plancher (SPB) à réaliser pour bénéficier de cette valeur de rendement supplémentaire. Il s'agit, en bref et sans rentrer dans tous les détails de cette méthode, tout d'abord de déterminer les surfaces brutes de plancher supplémentaires obtenues grâce à la mesure d'aménagement, de déterminer ensuite le revenu brut locatif qui en résulte, lequel permet enfin, sur la base d'un taux de capitalisation, de déterminer la valeur de rendement de l'immeuble. Il ne reste plus qu'à soustraire de cette valeur de rendement le coût nécessaire pour obtenir la plus-value due à la mesure d'aménagement considérée.
En zone de développement, cette méthode ne peut pas être appliquée, dans la mesure où l'office financier du logement (ci-après OFL) exerce un contrôle indirect des prix de terrain, limitant artificiellement ceux-ci afin de lutter contre la spéculation.
Dans ces zones, il y a lieu d'appliquer la méthode que le rapport du DAEL nomme "; méthode OFL ". Selon les normes actuellement en vigueur, le prix maximum qui peut être admis par l'OFL dans les plans financiers des opérations de construction selon les normes de la zone de développement est de 650 F/m2 de terrain, pour un IUS de 1,2. Lorsque l'IUS est supérieur à 1,2, le prix du terrain peut dépasser 650 F/m2 ; à l'inverse, lorsque l'IUS est inférieur à 1,2, le prix du terrain est réduit proportionnellement à la réduction de l'IUS.
Pour déterminer la plus-value, il faudra dès lors calculer la différence entre la valeur du terrain après la mesure d'aménagement adoptée, selon les normes susvisées, et sa valeur avant ladite mesure. L'application de cette méthode suppose que des prix de référence soient retenus pour des parcelles situées dans diverses zones ordinaires, qui devraient être fixés dans un règlement d'application.
c) Au niveau des résultats, le total des plus-values générées par l'ensemble des plans d'affectation du sol (plans de zone et plans localisés de quartier) adoptés en 1997 se monterait à près de 17 millions de francs. Ce chiffre doit être rapproché de celui de 11 millions de francs, qui correspond au total des plus-values générées par 6 autorisations de construire délivrées par voie dérogatoire, représentant 3 % de ce type d'autorisations de construire pouvant être concernées par le projet de loi 7559, le département ayant, pour celles-ci, dû procéder par sondage.
Cet élément constitue sans doute l'enseignement le plus intéressant du rapport, qui met donc en évidence que, "; sur le plan comptable, les plus-values réalisées grâce à des dérogations sont plus importantes que celles dues à l'adoption de plans d'affectation du sol. Cela est dû au fait que l'immense majorité des plans d'affectation du sol adoptés en 1997 ont trait à des zones de développement, où le prix du terrain est limité et ne suit pas les règles du marché, ce qui démontre d'ailleurs l'efficacité de ce type de zone dans la lutte contre la spéculation " (p. 26).
d) C'est dire que les autorisations de construire délivrées par voie dérogatoire sont à même de conférer à un terrain un avantage "; majeur " au sens de l'article 5, alinéa 1 LAT. Dès lors, leur inclusion dans la liste des mesures d'aménagement susceptibles de conférer à un terrain une plus-value et de faire l'objet d'une taxation se justifie pleinement.
e) Au surplus, le rapport conclut à la nécessité de modifier un certain nombre de dispositions contenues dans le texte distribué par le DAEL en janvier 1998, notamment en vue d'éviter le report éventuel de la taxe sur le prix de revient des constructions. Ces modifications ont été formulées par le DAEL dans un tableau comparatif, assorti d'un commentaire qui fait le lien avec les propositions issues du rapport précité, comme dit plus haut (cf. annexes).
Nouvelle lecture
C'est sur la base de ce nouveau tableau, dont la colonne de gauche reprend le texte de janvier 1998 incluant les amendements résultant de la première lecture (incomplète) du 28 janvier 1998 et la colonne de droite indique les nouveaux amendements présentés par le DAEL suite à son rapport, que les 13 janvier et 20 janvier 1999, la commission a entrepris la lecture article par article du projet de loi, qui a abouti au vote du texte final, le 3 février 1999.
Commentaire article par article
Le commentaire qui suit ne se veut pas exhaustif, certains articles étant parfaitement clairs et n'ayant, par ailleurs, pas fait l'objet de discussions particulières ou d'amendements significatifs. Le résultat des votes de 1re lecture est précisé à titre d'information, étant rappelé qu'en 2e lecture tous les articles ayant été acceptés à l'unanimité en 2e lecture, comme il a déjà été dit.
Art. 30 C : Principe
Pas d'observations.
Au vote 1re lecture, l'article 30C est accepté à l'unanimité.
Art. 30D : Fonds de compensation
L'alinéa 1 illustre les 3 axes de l'utilisation préconisée du fonds de compensation : le versement d'indemnités pour expropriation matérielle d'une part (let. a), le financement de mesures d'aménagement prises par l'Etat ou les communes d'autre part (let. b) et enfin le financement d'autres mesures compensatoires (let. c).
Il n'est pas inutile de rappeler que le budget de l'Etat ne prévoit actuellement aucune ligne pour les indemnités à verser en raison d'une expropriation matérielle ou des droits de voisinages, qui constituent, par essence, le poste de dépense naturel et principal du fonds.
Outre le financement des indemnités pour expropriation matérielle, le fonds de compensation pourrait également servir au financement de mesures d'aménagement. Cette notion doit être comprise dans un sens très large, plus large en tout cas que celui qui prévaut à l'article 30E, alinéa 2, dont il sera question plus loin. Il peut s'agir, par exemple, de l'acquisition de terrains par l'Etat (pour lequel le budget ne prévoit pas de ligne ordinaire), en vue de favoriser des opérations de construction, par exemple la réalisation de logements sociaux ou d'équipements publics. On pourrait aussi imaginer que ce fonds puisse alimenter le bonus conjoncturel à la rénovation prévu par la LDTR, soulageant le budget d'investissement de l'Etat.
Enfin, des mesures compensatoires, destinées à pallier certaines conséquences négatives résultant de la densification des quartiers pourraient trouver là un financement. On peut songer, par exemple, à la création de zones de verdure en milieu bâti.
L'article concernant le fonds de compensation, s'inspirant du modèle neuchâtelois, n'avait initialement pas été conçu pour un fonds susceptible de recevoir, à terme, plusieurs dizaines de millions de francs par an, comme c'est le cas avec un projet de loi incluant les dérogations. C'est la raison pour laquelle il a paru nécessaire de prévoir des alinéas donnant des directives un peu plus précises quant à son utilisation.
Ainsi, l'alinéa 2 prévoit que le fonds de compensation verse à la caisse de l'Etat les montants qui, sans la taxation, auraient été perçus, le cas échéant, au titre de l'impôt sur les gains immobiliers. La raison en est que le paiement de la taxe sur la plus-value instaurée par la présente loi constitue une impense qui vient en déduction de l'impôt sur les gains immobiliers (art. 30O, al. 3). Sans cette disposition, la caisse de l'Etat perdrait une partie de ses recettes dues à l'impôt sur les gains immobiliers, ce qui, compte tenu de la situation budgétaire actuelle, n'est pas acceptable.
Un montant important étant susceptible de s'accumuler sur ce fonds, il convient de fixer une limite au-delà de laquelle, sauf décision contraire du Grand Conseil (qui pourrait être motivée, par exemple, par un projet dont le financement est acquis et connu, mais devrait intervenir lors du prochain exercice budgétaire), le surplus de liquidités qui pourrait exister à la fin de chaque année doit être reversé à la caisse de l'Etat (al. 3). Enfin, vu l'importance probable des montants appelés à alimenter le fonds, il a paru légitime de demander au Conseil d'Etat de présenter à la fin de chaque législature, un rapport sur l'utilisation de celui-ci, afin que le Grand Conseil soit informé au mieux de l'utilisation du fonds (al. 4).
Au vote 1re lecture, l'article 30D est accepté à l'unanimité.
Art. 30E : Avantage
Le titre de l'article a été amputé de l'adjectif "; avantage majeur ", pour signifier que le projet de loi, s'il vise bien à mettre en place un système de compensation des avantages et inconvénients résultant de mesures d'aménagement, n'entend pas se limiter à la simple mise en oeuvre de l'article 5, al. 1 LAT. Le projet de loi s'assigne également d'autres buts, en particulier la lutte contre la spéculation foncière et ses effets négatifs.
L'alinéa 1, en tant qu'il définit l'avantage conféré par une mesure d'aménagement comme une "; plus-value d'un ou de plusieurs biens ou actifs immobiliers compris dans le périmètre concerné par celle-ci et représentant un montant total supérieur à F 25'000.- ", trace implicitement la limite entre un avantage mineur et un avantage majeur. Cette disposition s'inspire de l'article 10 de l'avant-projet d'ordonnance fédérale sur la compensation des avantages et inconvénients dus à des mesures d'aménagement du territoire, de mars 1994.
L'alinéa 2 définit les mesures d'aménagement au sens de l'alinéa 1, lesquelles sont assez strictes et ne doivent pas être confondues avec les mesures d'aménagement dont il est question à l'article 30D, al. 1, lettre b, relatif au fonds de compensation.
Il s'agit tout d'abord de l'adoption ou la modification d'un plan d'affectation du sol au sens de la Lalat (let. a), peu importe que le terrain en cause ait été, selon son statut antérieur, constructible ou non, que ce plan soit général (plan de zone) ou spécial (par exemple : plan localisé de quartier). Une réserve toutefois : les plans localisés de quartier en zone de développement dont l'indice est inférieur ou équivalent à celui, usuel, de cette zone sont réputés ne pas entraîner de plus-value (cf. al. 4).
Il s'agit ensuite de l'octroi d'une autorisation de construire en dérogation aux normes de la zone ou d'une autre plan d'affectation du sol au sens de l'article 13 Lalat et ... "; ayant une influence sur l'aménagement du territoire ". Ces derniers termes signifient que la dérogation doit avoir une influence sur la capacité constructive du terrain en cause, et donc sur la valeur de celui-ci. Les dérogations purement "; techniques " n'entrent donc pas en ligne de compte pour la perception d'une éventuelle taxe, y compris celles qui permettraient de diminuer le coût de la construction envisagée sur le territoire concerné.
L'alinéa 3 découle d'une proposition, issue du rapport du DAEL, qui reprend peu ou prou l'idée dite de la "; taxation provisoire " du texte initial du projet de loi 7559. Le but poursuivi par cette disposition consiste à éviter autant que possible que le coût de la taxe puisse être reporté sur le prix de revient de l'immeuble et ne vienne augmenter les loyers. A cet égard, le rapport du DAEL a mis en évidence certains cas de vente et revente de terrains en cours de procédure d'adoption d'une mesure d'aménagement, au prix du statut futur du terrain. En d'autres termes, il existe des cas où, l'autorité ayant donné un signe selon lequel elle envisage l'adoption d'une mesure d'aménagement génératrice de plus-value dans un futur relativement proche, le propriétaire d'un terrain a pu trouver un acquéreur pour sa parcelle à un prix correspondant plus ou moins au statut futur de celle-ci, en tout cas largement supérieur à son statut actuel.
Dans de tels cas d'anticipation de la plus-value, qui s'apparentent peu ou prou à de la spéculation, contre laquelle l'initiative 21 entend précisément lutter, le fait de taxer le propriétaire au moment de l'adoption de la mesure (art. 30G et 30K) revient à toucher le nouveau propriétaire, qui a acheté au prix fort le terrain et n'a pas bénéficié de la plus-value, économiquement parlant. Le vendeur, qui, lui, a effectivement encaissé la plus-value, ne devrait s'acquitter d'aucune taxe ! Seul entrerait en ligne de compte l'impôt sur les gains immobiliers, et encore pour autant que soient remplies les conditions nécessaires à la perception de celui-ci, notamment la durée de possession. La taxe viendrait ainsi s'ajouter de façon indue au prix de revient de l'immeuble à construire, ce qui constitue un effet pervers à éviter.
D'où l'idée d'assimiler à des mesures d'aménagement les actes administratifs susceptibles de constituer les premiers signes, pour un propriétaire, que l'autorité est prête à envisager la prise d'une mesure d'aménagement génératrice de plus-value touchant son bien-fonds.
Les actes administratifs que l'on peut envisager d'assimiler, pour la circonstance, à des mesures d'aménagement sont la mise à l'enquête publique d'un projet de mesure d'aménagement au sens de l'art. 30E, al. 2 et la publication dans la Feuille d'avis officielle d'une demande de renseignement impliquant la mise à l'enquête publique d'une telle mesure d'aménagement ou de la réponse favorable à celle-ci (art. 30E, al. 3 let a et b).
A noter que la taxation ne signifie pas encore la perception, laquelle ne pourra avoir lieu qu'au moment de la réalisation de la plus-value, soit lors de la vente ou lors de l'autorisation définitive de construire (art. 30L). La taxation et la perception ne doivent donc pas être confondues.
L'alinéa 3 vise donc, comme dit plus haut, à éviter que la taxe ne vienne s'ajouter au prix de revient de l'immeuble et puisse être répercutée sur le niveau des loyers.
Enfin, l'alinéa 4, bien que cela ne soit pas nécessaire, précise, à toutes fins utiles, que les autorisations de construire délivrées sans dérogation, de même que les plans localisés de quartier dont l'indice d'utilisation du sol est inférieur ou équivalent à celui, usuel, de cette zone, fixé dans le règlement d'application, sont réputés ne pas entraîner de plus-value foncière, ce qui exclut la perception d'une taxe dans de tels cas. Bien entendu, il devrait en aller de même lorsque la loi qui a instauré la zone de développement a fixé un indice maximum d'utilisation du sol et que le plan localisé de quartier respecte cet indice.
Au vote 1re lecture :
- l'alinéa 1 est accepté par 11 oui et 4 abstentions (3 L, 1DC) ;
- l'alinéa 2 est accepté par 8 oui et 7 abstentions ;
- l'alinéa 3 est accepté à l'unanimité ;
- l'alinéa 4 est accepté par 14 oui et 1 abstention (L).
Art. 30F : Indemnisation
Cette disposition rappelle le principe figurant à l'article 5, al. 2 LAT. Elle illustre le principe de symétrie induit par le régime de compensation proposé : les inconvénients donnent lieu à indemnisation, les avantages donnent lieu à taxation.
Au vote 1re lecture, l'article 30F est accepté à l'unanimité.
Art. 30G : Assujettissement
Pas d'observations.
Au vote 1re lecture, l'article 30G est accepté par 10 oui et 5 abstentions (3 L, 1 R, 1 DC).
Art. 30H : Calcul de la plus-value
Cette disposition définit la plus-value et indique les critères à prendre en compte pour le calcul de celle-ci. Ceux-ci, en bref, reprennent les notions dégagées dans le rapport du DAEL précédemment évoquées, si bien qu'il n'y sera pas revenu pour éviter d'inutiles redites.
En bref, les termes "; selon la nature des mesures d'aménagement possible " entendent consacrer la distinction à opérer pour le calcul de la plus-value selon que les terrains concernés sont sis ou déclassés en zone de développement ou en zone à bâtir ordinaire, l'alinéa 1 mentionnant les principaux critères utilisés par la méthode dite "; OFL ", applicable aux premiers, et la méthode dite "; bâloise ", applicable aux seconds.
Un amendement tendant à ce que seuls les critères de l'affectation et de l'indice d'utilisation du sol soient mentionnés dans cette disposition a été rejeté par une majorité de la commission (8 non contre 6 oui et 1 abstention).
Suite à ce vote de principe, la commission a, en revanche, tenu à préciser, au niveau de la loi, certains critères d'application de la méthode bâloise. Ainsi, il y a lieu de déduire de la valeur de rendement, non pas seulement le prix de construction, mais le prix de revient usuel de l'immeuble, dont le coût de construction est certes l'élément le plus important (C.F.C. 2). Il y a aura vraisemblablement lieu de considérer les autres postes du Code des coûts de construction (C.F.C) et de leur fixer un pourcentage moyen par rapport aux coûts de construction (C.F.C. 2) proprement dits. De même, il a paru utile de préciser que la valeur de rendement est déterminée sur la base du taux moyen des hypothèques de premier rang pratiqué par la Banque Cantonale de Genève, augmenté d'un pourcentage pour couvrir les charges, fixé par le règlement d'application, ce qui a été approuvé à l'unanimité. Selon le rapport du DAEL, la jurisprudence du Tribunal administratif rendue en matière d'expropriation formelle, sur laquelle se fonde cet article, a fixé ce pourcentage supplémentaire pour couvrir les charges à 1,5.
Au vote 1re lecture :
- l'alinéa 1 est accepté par 12 oui et 3 abstentions (L, R, DC) ;
- l'alinéa 2 est accepté à l'unanimité.
Art. 30I : Taux de taxation
L'alinéa 1 fixe, de manière uniforme, à 30 % le taux de taxation, quelle que soit la mesure d'aménagement génératrice de plus-value. Le texte initial du projet de loi 7559 le situait entre 20 et 40 % "; selon l'importance de l'avantage concédé au bien et actif immobilier ", critère un peu flou. La première version du texte DAEL proposait comme critère une distinction à opérer en fonction de la nature des différentes mesures d'aménagement envisagées. En fin de compte, il a paru plus simple de fixer un taux unique, qui soit tout simplement fonction du montant de la plus-value générée par une mesure d'aménagement.
Un amendement visant à fixer à 20 % le taux de la taxation a été refusé par la majorité de la commission (8 non contre 6 oui et 1 abstention).
Au vote 1re lecture :
- l'alinéa 1 est accepté par 8 oui contre 6 non et 1 abstention (DC) ;
- l'alinéa 2 est accepté par 8 oui contre 4 non (2 L, 1 R, 1 DC) et 3 abstentions (L, R, DC) ;
- l'alinéa 3 est accepté à l'unanimité.
Art. 30J : Exonération
Il a paru nécessaire d'ajouter un article traitant des exonérations, qui ne figurait pas dans le texte initial du projet de loi 7559.
La réalisation d'au moins 60 % de surfaces brutes de plancher destinées à des logements d'utilité publique, à des équipements publics ou à des logements soumis à la LDTR peut ainsi être exonérée de la taxe.
L'exonération ne peut pas être automatique. A titre d'exemple, le propriétaire d'un terrain déclassé, qui a bénéficié de la plus-value et qui construit du logement social à raison de 60 % sera exonéré, de telle façon que la taxe ne vienne pas s'ajouter au prix de revient de l'immeuble en cause. En revanche, on ne voit pas pourquoi il ne faudrait pas taxer le propriétaire qui a vendu son terrain à un prix qui tient compte de la plus-value, au motif que le nouvel acquéreur entend réaliser du logement social sur ce terrain : ce nouvel acquéreur ne bénéficiera en aucune façon de cette exonération.
Par conséquent, l'autorité devra apprécier, de cas en cas, l'opportunité d'une mesure d'exonération, étant encore précisé que l'emploi du terme "; peut " signifie aussi que l'exonération peut n'être que partielle, le cas échéant.
A noter qu'un amendement visant à inclure les premiers F 25'000 de plus-value dans la liste des exonérations possibles a été rejeté (8 voix contre 6).
La notion d'équipement public (al. 1, let. b) peut aussi viser des équipements sportifs réalisés par une commune.
Au vote 1re lecture, l'article 30J est accepté à l'unanimité.
Art. 30K : Taxation
Pas d'observations.
Au vote 1re lecture, l'article 30K est accepté par 7 oui (3 S, 2 Ve, 2 AdG), 1 contre (DC) et 4 abstentions (3 L, 1 R).
Art. 30L : Perception
La créance de la taxe instituée par la présente loi est exigible lors de l'aliénation du terrain ou de la délivrance d'une autorisation définitive de construire.
L'idée générale poursuivie par cette disposition consiste à différer le paiement de la taxe au moment où le propriétaire qui a reçu son bordereau de taxation réalise concrètement la plus-value et est en mesure de l'acquitter, c'est-à-dire au moment de l'aliénation, d'une part, ou au moment de la délivrance d'une autorisation définitive de construire, au plus tard à l'ouverture du chantier de construction, d'autre part.
Le terme autorisation "; définitive " de construire exclut que la taxe puisse être exigible lors de la délivrance d'une autorisation préalable de construire. Quant au terme "; aliénation ", il exclut que la taxe ne devienne exigible en cas de succession, ce qui répond notamment à l'une des préoccupations émises par la Chambre genevoise d'agriculture.
Au vote 1re lecture, l'art. 30L est accepté par 7 oui et 5 abstentions (3 L, 1 R, 1 DC).
Art. 30M : Révision
Il est bien entendu qu'au cas où, postérieurement à la décision de taxation, l'un des éléments entrant dans le calcul de celle-ci subit une modification de nature à influencer sensiblement les possibilités de mise en valeur du terrain, le département pourra réviser la taxe. Cette révision aura lieu d'office ou à la demande du propriétaire.
Une même parcelle pouvant successivement faire l'objet de plusieurs mesures d'aménagement ou actes administratifs assimilables (ex. : réponse favorable à une demande de renseignement, mise à l'enquête publique, adoption d'un plan de zone, d'un plan de quartier, dérogation), cette disposition est appelée à faire l'objet d'un usage intensif, la révision intervenant probablement d'office dans nombre de ces cas.
Encore faut-il que ce terrain n'ait pas été aliéné et n'ait pas changé de propriétaire entre-temps. Il s'agit, en effet, d'éviter qu'un propriétaire qui aurait vendu son terrain à un moment donné, suite à l'adoption d'une mesure d'aménagement, en fonction de la plus-value conférée par cette mesure et donc bénéficié économiquement de celle-ci, ait ensuite qualité pour demander une révision de la taxe qu'il a dû acquitter parce que, par la suite, la valeur de son terrain (qui ne le concerne plus, mais concerne désormais le nouveau propriétaire) s'est modifiée, par exemple suite à l'adoption d'une mesure d'aménagement moins favorable.
Au vote 1re lecture, l'article 30M est accepté par 7 oui et 6 abstentions (3 L, 2 DC, 1 R).
Art. 30N : Hypothèque légale
Bien que l'alinéa 1 dispose que l'hypothèque prend naissance sans inscription, il a paru utile, pour des raisons de publicité, de préciser, comme le fait l'article 22 du règlement d'application de la loi générale sur les zones de développement à propos des taxes d'équipement, que cette hypothèque peut être inscrite au registre foncier, à titre déclaratif, à la réquisition du département. Cette hypothèque sera radiée d'office lorsque la taxe aura été complètement acquittée.
A noter que cette hypothèque ne porte pas intérêt, le problème de l'adaptation de la taxe étant réglé par l'article 30I, alinéa 2 relatif à la taxation, qui dispose que le montant de la taxe est adapté à l'indice suisse des prix à la consommation à dater de la notification du bordereau.
Au vote 1re lecture :
- l'alinéa 1 est accepté par 7 oui et 6 abstentions ;
- l'alinéa 2 est accepté par 7 oui et 6 abstentions ;
- l'alinéa 3 est accepté à l'unanimité ;
- l'article 30N est accepté par 7 oui et 7 abstentions (3 L, 2 R, 2 DC).
Art. 30O : Recouvrement
Il convient ici de signaler que l'alinéa 3 de cette disposition éclaircit de façon décisive le lien qui peut exister entre la taxe instituée par la présente loi et l'impôt sur les gains immobiliers : cette taxe diminue le gain immobilier imposable. Elle en constitue, le cas échéant (c'est-à-dire pour autant que les conditions prévues par la loi sur les contributions publiques pour la perception de l'impôt sur le gain immobilier soient remplies), une impense déductible au sens de l'art. 82, alinéa 8 LCP. La taxe sur la plus-value ne revient donc pas à taxer deux fois le même objet pour la même cause et ne constitue pas davantage un cas de double imposition, étant de surcroît observé que cette dernière notion a une portée intercantonale (art. 46, al. 2 Cst féd) et non cantonale.
Un alinéa disposant que "; les poursuites sont exercées dans le canton, quel que soit le domicile du débiteur " a été supprimé par la commission (7 oui et 7 abstentions), pour cause de redondance avec le droit fédéral et afin d'alléger un peu cette disposition.
Au vote 1re lecture :
- l'alinéa 1 est accepté par 7 oui et 7 abstentions ;
- l'alinéa 3 est accepté par 10 oui et 4 abstentions (2 L, 1 R, 1 AdG).
Art. 30 P : Règlement d'application
Un certain nombre d'articles se référant à des dispositions d'application à prendre dans un règlement, il a paru utile, bien que pas nécessaire pour toutes les disposition, de rappeler l'utilité d'un tel règlement.
Au vote 1re lecture, l'article 30P est accepté à l'unanimité.
Art. 34, al. 2 : Recours contre les décisions du département
Pas d'observations.
Au vote 1re lecture, l'article 34, alinéa 2 est accepté par 7 oui et 7 abstentions.
Art. 36 : Demandes d'indemnité
Dans la suite logique de l'article 30F qui rappelle le principe de l'indemnisation en cas d'expropriation matérielle et du principe de symétrie des mesures appliqué par ce projet de loi, cette disposition indique l'autorité compétente pour connaître des demandes d'indemnisation et les délais nécessaires à cette fin, en formalisant la pratique actuelle en la matière, qui n'a jamais été indiquée jusqu'à présent.
Il est en outre précisé qu'une transaction judiciaire peut intervenir pendant la procédure à tous les stades de celle-ci. Il s'agit là d'une faculté accordée à l'autorité en faveur des propriétaires lésés, de telle sorte que ceux-ci soient indemnisés rapidement lorsque le dommage apparaît indiscutable et son montant difficilement contestable. L'autorité devra utiliser cette faculté en faisant preuve de toute la réserve voulue. Le rapport sur l'utilisation du fonds (art. 30D, al. 4) devra contenir des explications circonstanciées pour tout versement qui interviendrait sans qu'un jugement définitif ne soit en force.
Au vote 1re lecture, l'article 36 nouveau est accepté par 10 oui et 5 abstentions (3 L, 1 R, 1 DC).
Au surplus, l'intitulé et la numérotation du titre de la Lalat sous lequel seront contenus les articles de la présente loi sont acceptés par 10 voix et 5 abstentions (3 L, 1 R, 1 PdC).
Deuxième lecture et vote final
En 2e lecture, comme il a déjà été dit, tous les articles ont été acceptés à l'unanimité, sans qu'aucun amendement ne soit présenté.
Toutefois, au vote final du texte dans son ensemble, le projet de loi issu des travaux de la commission est rejeté par 7 voix pour (2 AdG, 3 S, 2 Ve) contre 7 voix contre (3 L, 2 R, 2 DC), suite à la manoeuvre politicienne déplorable évoquée au début du présent rapport.
Tels sont les motifs qui nous amènent à vous recommander, Mesdames et Messieurs les députés, l'adoption du texte issu du projet de loi 7559 et qui figure en annexe.
ANNEXE 7
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ANNEXE 8
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ANNEXE 9
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ANNEXE 10
RAPPORT DE LA MINORITÉ
Après des années de va-et-vient, un projet de loi concrétisant le deuxième volet de l'initiative 21 ressort des travaux de commission sans pour autant que le texte revu, corrigé, amendé, contribue de quelque manière que ce soit à lutter contre la spéculation foncière. Il ne remplit ainsi nullement le but avoué de l'initiative.
Les spéculateurs en matière immobilière - que la minorité au nom de laquelle je m'exprime condamne autant si non plus que la majorité - achètent un bien et attendent le meilleur moment que leur offre le marché pour le revendre plus cher, sans chercher à le mettre en valeur d'une quelconque manière.
Or, le projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la commission ne fait que pénaliser ceux qui entreprennent et s'efforcent précisément, par leur travail, de procéder à la mise en valeur évoquée en construisant. De plus, le projet propose une série de mesures propres à dissuader les investisseurs déjà peu enclins à financer la réalisation d'immeubles à Genève. Car il entraînera immanquablement un accroissement du prix de revient des opérations et par conséquent un renchérissement des loyers ou des prix de vente, sans valeur ajoutée.
Ces défauts, majeurs, nous les avons relevés dans nos précédents rapports. La minorité de la commission a tenté de les corriger en proposant des amendements ; en vain.
La courte majorité de la commission ayant voté l'entrée en matière et adopté le texte tel qu'il vous est soumis, nous nous bornerons à tenter une dernière fois de l'améliorer autant que faire se peut par la série d'amendements qui suit et qui émanent des milieux directement concernés par le projet.
D'avance, la minorité de la commission vous remercie de la bienveillante suite que vous donnerez à ces propositions.
Propositions d'amendements:
Art. 30C Principe
Les avantages et les inconvénients majeurs décrits aux articles 30 et 30F résultant d'une mesure d'aménagement du territoire font l'objet d'une compensation, selon les articles 30D à 30O.
Commentaire :
Il s'agit de rendre le texte conforme au droit fédéral (droit supérieur) qui limite les mesures aux avantages et inconvénients majeurs conférés aux propriétaires.
Art. 30D Fonds de compensation
Alinéa 1, lettre c)
D'autres mesures compensatoires, prises par la collectivité, destinées à améliorer durablement l'aménagement cantonal (politique foncière, agricole ou forestière, etc.).
Commentaire :
Art. 30E Avantage
Alinéa 1
Une mesure d'aménagement entraînant un avantage, soit une plus-value d'au moins 20% d'un ou de plusieurs immeubles compris dans le périmètre concerné par celle-ci et représentant un montant total supérieur à Fr. 25 000.-, donne lieu à taxation.
Commentaire :
Le seuil au-delà duquel une plus-value est assujettie à la taxe doit être exprimé en pourcent. En effet, une plus-value de Fr. 25 000.- relativement à un immeuble de Fr. 100 000.- constitue un avantage majeur. Cela n'est plus le cas lorsque l'immeuble vaut Fr. 1 000 000.- ou plus.
Alinéa 2 lettre b) ajouter à la fin:
...sauf lorsque le département est tenu d'accepter la dérogation parce que le texte légal l'y oblige expressément ou implicitement.
Commentaire :
D'une manière générale, l'octroi d'une autorisation de construire en dérogation aux normes de la zone ou d'un PLQ donne rarement lieu à un « avantage majeur » soumis à taxation au sens du droit fédéral.
Par ailleurs, soit la dérogation est conforme à la loi (art. 24 LAT) et la perception d'une taxe est abusive, soit elle ne l'est pas et la taxe n'est autre qu'un « pot-de-vin légal ».
Le rapport du DAEL (p. 8 et 9) indique bien que le département peut être tenu d'accorder la dérogation si les conditions légales sont remplies. Il convient donc de compléter le texte dans ce sens.
Alinéa 3 Supprimé.
Commentaire :
Il est notoirement prématuré de considérer comme « mesure d'aménagement » entraînant une plus-value soumise à taxation, la mise à l'enquête ou la publication d'une demande de renseignement. Le projet auquel des mois voire des années plus tard celle-ci aboutit est généralement très différent de celui qui a fait l'objet desdites enquête ou publication. La taxation que ces dernières provoqueraient serait par conséquent erronée parce qu'inadaptée. Il faut attendre que la mesure d'aménagement (déclassement ou PLQ) soit entrée en force.
Il convient donc de supprimer l'alinéa 3 du projet de loi.
Alinéa 4 (nouveau)
Si l'alinéa 3 n'est pas supprimé
Dans le cas soumis à l'alinéa 3, il ne peut s'écouler plus de trois ans entre la taxation et l'adoption de la mesure d'aménagement. A défaut, la taxe est caduque.
Cet amendement pallierait aux inconvénients ci-dessus évoqués si l'alinéa 3 était adopté.
Car seule l'entrée en force d'une mesure d'aménagement peut justifier la taxation de la plus-value que celle-ci implique.
Art. 30F Indemnisation
Une indemnité est accordée lorsqu'une mesure d'aménagement visée à l'article 30E entraîne une moins-value d'au moins 20 % d'un ou de plusieurs immeubles compris dans le périmètre concerné par celle-ci et représentant un montant total supérieur à Fr. 25 000.-.
Alinéa 3 (nouveau)
Les articles 30K à 30M sont applicables par analogie à l'indemnisation.
Art. 30G Assujettissement
Alinéa 1
Le débiteur de la taxe sur la plus-value résultant d'une mesure d'aménagement au sens de l'article 30E est le propriétaire du terrain au moment de l'adoption de celle-ci. Il en va de même du créancier d'une indemnité au sens de l'article 30F.
Alinéa 2
Lorsque plusieurs personnes sont propriétaires d'un immeuble, elles sont solidairement débitrices ou créancières de l'Etat.
Commentaire:
A cette dernière fin, le pourcentage et le montant minimaux sont, dans la proposition d'amendement, identiques à ceux qui figurent à l'alinéa 1 de l'article 30E.
Les autres amendements relèvent du même souci de « symétrie » ou d'égalité de traitement.
D'ailleurs, l'alinéa 1 de l'article 5 LAT pose clairement le principe de cette symétrie; en voici la teneur : « un régime de compensation permettant de tenir compte équitablement des avantages et des inconvénients majeurs qui résultent de mesures d'aménagement. »
La loi cantonale ne peut s'écarter ni du concept ni de l'esprit de la loi fédérale.
Dans le même ordre d'idée, l'article 36 ci-après doit être supprimé.
Art. 30H Calcul de la plus-value et de la moins-value
Alinéa 1
La plus-value soumise à taxation ou la moins-value sujette à indemnisation est calculée sur la base des éléments déterminants existant au moment où la mesure d'aménagement est adoptée, et de la manière suivante:
Commentaire :
Dans le projet proposé, la taxation risque de se rapporter à la valeur ajoutée plutôt qu'à la plus-value, dès lors qu'elle se réfère notamment au prix de la construction au m3 SIA.
Le règlement d'application devrait proposer une formule permettant de déduire les impenses du propriétaire comme lors du calcul de l'impôt sur les gains et bénéfices immobiliers.
Par ailleurs, le projet tel qu'il ressort des travaux de la commission fait état de la valeur de rendement mais ne parle que du taux de capitalisation. Il omet l'autre facteur essentiel du calcul qui est le revenu de l'immeuble (brut ou net). La question peut être tranchée par voie réglementaire.
Alinéa 2
La valeur de rendement mentionnée à l'alinéa 1, lettre a) est déterminée sur la base du taux de capitalisation mentionné à l'article 5A du règlement d'application des diverses dispositions de la loi générale sur les contributions publiques.
Commentaire :
La valeur d'un immeuble ne dépend pas du taux hypothécaire moyen pratiqué par la BCGe !
La référence au taux de capitalisation fixé chaque année par le Conseil d'Etat correspond davantage à la réalité.
Ce taux est établi précisément afin de déterminer la valeur des immeubles locatifs pour la perception de l'impôt sur la fortune et l'impôt immobilier complémentaire. Il est fixé en fonction des rendements sur la base desquels les ventes d'immeubles locatifs ont été conclues pendant les douze derniers mois.
La référence à ce taux paraît logique lorsqu'il s'agit de déterminer la valeur d'immeubles pour la perception d'une taxe.
Art. 30I Taux de taxation
Alinéa 2 Supprimé.
Commentaire:
L'adaptation du montant de la taxe à l'indice suisse des prix à la consommation est contraire à la loi fiscale qui ne prévoit aucune indexation du prix de base (ou prix au départ) pour le calcul de la plus-value d'un bien immobilier.
Il paraît non seulement inéquitable mais encore contraire à l'esprit du droit supérieur d'indexer une taxe et non les prix qui servent à l'établir !
Art. 30J Exonération
Alinéa 1, lettre a)
La réalisation d'au moins 60 % de surfaces brutes de plancher destinées à des logements de caractère social, répondant à un besoin prépondérant de la population.
Commentaire :
La référence à l'article 16 alinéa 1 lettre a de la LGL a pour effet de limiter l'exonération à la construction de HBM. Cela ne correspond vraisemblablement pas à l'intention même de la majorité de la commission.
Alinéa 1, lettre b)
La réalisation de surfaces brutes de plancher destinées à des équipements publics fédéraux, cantonaux ou communaux, à des organisations internationales ou à des représentations diplomatiques.
Art. 30K Taxation
La taxation s'opère sur la base d'un bordereau provisoire notifié par le département......
Art. 30L Perception
La créance découlant de la taxe visée à l'article 30E est exigible lors de l'aliénation du terrain ou lors de la délivrance d'une autorisation de construire, au plus tard à l'ouverture du chantier de construction découlant de la mesure d'aménagement considérée. A ce moment, le département procède à une taxation définitive sur la base de la plus-value effectivement conférée à l'immeuble par la mesure d'aménagement qui a donné lieu à la taxation provisoire.
Commentaire :
Il paraît logique d'introduire la notion de taxation provisoire survenant au moment où la mesure d'aménagement est prise, et respectivement définitive lors de la perception effective correspondant à la réalité du cas. Ainsi, par exemple, un déclassement en zone de développement peut impliquer un indice d'utilisation du sol de 1,2 et le PLQ ne comporter qu'une densité de 0,8. La taxation définitive devra dès lors être adaptée à cette dernière.
Art. 30N Hypothèque légale
Alinéa 1
Le paiement des taxes prévues au présent titre est garanti par une hypothèque légale. L'hypothèque prend naissance, sans inscription, quarante jours après la notification du bordereau de taxation définitive. Elle est en premier rang...
Commentaire :
Il est excessif et contraire à l'usage que l'hypothèque légale - qui est une grave restriction du droit de propriété - prenne naissance en même temps que la créance qu'elle garantit. Il est correct de laisser le temps au débiteur de s'acquitter de sa dette avant de le pénaliser par une mesure aussi restrictive et aussi désobligeante qu'une hypothèque légale.
Art. 30O Recouvrement
Alinéas 2 et 3
Supprimer le terme : « le cas échéant ».
Commentaire:
Le terme « le cas échéant » laisse planer le doute sur l'obligation de respecter la teneur des deux alinéas qui le comportent. Autant le supprimer.
Art. 34 Recours contre les décisions du département
Alinéa 2 (nouveau)
En dérogation à l'alinéa 1, les décisions prises en application de l'article 30K peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la Commission cantonale de conciliation et d'estimation instituée par la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, du 10 juin 1933. Le Tribunal administratif est compétent pour trancher les recours en dernière instance cantonale.
Commentaire :
L'autorité compétente en cette matière très spécifique d'évaluation de biens immobiliers est la Commission cantonale de conciliation et d'estimation instituée par la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, du 10 juin 1933, plutôt que la Commission cantonale de recours en matière d'impôts qui est spécialisée en matière plus fiscale qu'immobilière.
Par ailleurs, l'amendement proposé suggère de supprimer l'obligation pour le Tribunal administratif de siéger en plénum, de manière à éviter de prolonger indéfiniment les procédures. Question d'efficacité.
Art. 36 (nouveau)
Supprimé.
Commentaire:
Premier débat
M. Alain Etienne (S), rapporteur de majorité. J'aimerais tout d'abord signaler que le texte de l'initiative n'a pas, cette fois-ci, été annexé à ce dernier rapport, mais elle figure dans le précédent. Je demande donc aux députés de s'y référer si nécessaire.
Ensuite, je vous informe que la commission d'aménagement du canton s'est réunie le 10 novembre dernier, afin de traiter les amendements proposés par M. Koechlin dans son dernier rapport de minorité. Vous avez reçu sur vos tables une nouvelle version du projet de loi, intégrant les amendements qui ont été acceptés par la commission, en gras dans le texte. Je vous demande, Monsieur le président, de bien vouloir en tenir compte le moment venu.
Comme vous pouvez le remarquer, le titre du projet de loi 7559 a été modifié en ces termes : «Projet de loi modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire et concrétisant la 2e invite de l'IN 21 : «Halte à la spéculation foncière» (L 1 30)». Je dois aussi souligner que le texte présente une modification à l'article 30D : il s'agit de réparer là un oubli qui s'est produit dans la version finale. Mais nous reviendrons sur ces amendements en temps voulu.
Cela dit et pour ouvrir le débat, j'aimerais rappeler tout d'abord que cela fait onze ans que l'initiative 21 intitulée «Halte à la spéculation foncière» a été déposée par le parti du Travail et cela fait sept ans que le Grand Conseil a déclaré cette initiative recevable. Le délai est largement dépassé, vous en conviendrez... Il est donc temps de voter ce projet de loi, ne serait-ce que par respect des droits politiques des citoyens et des citoyennes de ce canton !
Il s'agit donc aujourd'hui de concrétiser la deuxième invite de l'initiative relative à l'aménagement du territoire, par le biais de ce projet de loi 7559 dont l'objectif est la lutte contre la spéculation foncière. Pour lutter contre la spéculation foncière, le projet de loi présenté prévoit d'établir un système de compensation entre les avantages et les inconvénients dus aux mesures d'aménagement. J'aimerais rappeler à ce sujet que, dans son article 5, la loi fédérale sur l'aménagement du territoire oblige les cantons à établir un tel système de compensation. Il ne s'agit donc pas d'une disposition à bien plaire, mais bel et bien d'une obligation.
A ce propos, je ne peux m'empêcher de citer les paroles de Fred Baumgartner, chef de la section Structure du territoire, urbanisme et paysage à l'Office fédéral de l'aménagement du territoire, tenues dans la revue «L'information immobilière», je cite : «La disposition de l'article 5 n'a quasiment pas été appliquée par les cantons, et Genève est l'un des rares cantons à avoir empoigné ce sujet, ce qui est méritoire en soi.» Donc, empoignons ce sujet et concrétisons !
Il s'agit donc de mettre en place un système de compensation et de prélèvement d'une taxe sur la plus-value due à une mesure d'aménagement que l'Etat est amené à prendre, ceci en créant un fonds de compensation qui recevra le montant des taxes sur les plus-values immobilières et qui permettra à l'Etat de s'acquitter des indemnités dues aux expropriations matérielles selon le principe de la symétrie des mesures voulue par le législateur fédéral. Le principe de la création d'un fonds n'a d'ailleurs été contesté par personne, ni en commission par les députés ni par les associations professionnelles. Notons aussi que le budget de l'Etat ne prévoit actuellement aucune ligne pour les indemnités à verser en raison d'une expropriation matérielle et que les plus-values ne sont pas encore taxées. L'idée d'un tel fonds avait déjà été proposée en 1985 dans le projet de loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du Conseil d'Etat, le 27 mars 1985. Mais, en fin de compte, cette disposition n'a pas été retenue par le législatif à majorité de droite.
Pourquoi ne pas avoir accepté à ce moment-là de mettre en place un système de taxe sur les plus-values, à une époque où la spéculation foncière était flagrante ? Je comprends bien là le souci des associations professionnelles de la promotion immobilière et de la construction qui trouvent que l'image de leurs membres a quelque peu été ternie à une certaine époque par l'action de quelques outsiders et qui, somme toute, reconnaissent aujourd'hui être assez favorables à la lutte contre la spéculation foncière.
Finalement, pourquoi s'opposer à ce projet de loi ? Il est un peu facile de venir nous dire aujourd'hui, Monsieur Koechlin, que vous condamnez, autant sinon plus que la majorité actuelle, les spéculateurs en matière immobilière... Le Grand Conseil à majorité de droite n'a pas été capable, depuis le 15 octobre 1992, d'élaborer un projet de loi concrétisant cette deuxième invite de l'initiative 21, relative à l'aménagement du territoire. Alors, profitons de l'occasion qui nous est donnée aujourd'hui - puisque vous-même, Monsieur Koechlin, affirmez vouloir lutter contre les spéculateurs immobiliers - de mettre en place le régime de compensation, afin de prémunir notre République de la spéculation foncière !
Taxer la plus-value d'un bien ou d'un actif immobilier résultant de la création d'une zone à bâtir en lieu et place d'une zone inconstructible, jusque-là tout le monde semble être d'accord. Mais il s'agit d'aller plus loin ! Les initiants nous le demandent expressément ! La deuxième invite de l'initiative est limpide : il faut taxer les autorisations de construire génératrices de plus-values, y compris celles obtenues au moyen d'une dérogation.
Je vous rappelle aussi que l'initiative a été jugée recevable par le Grand Conseil et que le professeur Auer, dans son avis de droit, affirme que l'article 5, alinéa 1, de la LAT donne la possibilité au canton de taxer des plus-values immobilières résultant de la simple délivrance d'une autorisation de construire, page 37 du rapport du projet de loi 7559-A.
Concernant les dérogations, le rapport du DAEL nous apporte un éclairage précieux. En effet, afin de pouvoir nous prononcer en toute connaissance de cause sur le texte du projet de loi, il nous fallait des simulations chiffrées relatives à la taxation des plus-values dues à certaines mesures d'aménagement. Vous avez, dans l'annexe N° 7, le rapport du DAEL intitulé : «Essai d'application de la version «DAEL» du PL 7559». Je tiens ici à remercier le département pour le travail considérable qu'il a fourni.
Que dit ce rapport ? Au niveau des résultats, le total des plus-values générées par l'ensemble des plans d'affectation du sol, plans de zone et plans localisés de quartier, adoptés en 1997, se monte à près de 17 millions de francs, alors que le total des plus-values générées par six autorisations de construire délivrées par voie dérogatoire, représentant seulement 3% de ce type d'autorisations de construire, se monte à 11 millions de francs ! Donc, les plus-values réalisées grâce à des dérogations sont considérables et sans commune mesure avec l'adoption de plans d'affectation du sol.
Nous le voyons bien, les autorisations de construire délivrées par voie dérogatoire confèrent à un terrain un avantage majeur au sens de l'article 5, alinéa 1, de la LAT. Il est donc nécessaire de maintenir les dérogations dans les mesures d'aménagement pouvant être taxées. Avec la taxe, le profit de l'opération immobilière spéculative devient alors moins intéressant. De plus, je le rappelle, la dérogation est, par essence, une exception que l'autorité n'est pas tenue d'accepter.
Vous nous dites que la taxe va augmenter le prix de revient des opérations et, en conséquence, les loyers... J'aimerais rappeler ceci, et il faudra s'en souvenir tout au long du débat : une autorisation de construire, conforme aux normes de la zone, donc sans dérogation, n'entraîne pas de plus-value, et, par conséquent, pas de taxation.
Pourquoi toujours rechercher des dérogations si ce n'est pour augmenter le profit ? N'est-il pas possible d'investir et de construire là où cela est possible, conformément aux normes en vigueur ? Respectons en priorité le zoning décidé par le Grand Conseil et l'aménagement du territoire s'en portera mieux ! Ce projet de loi devrait plutôt inciter les propriétaires à demander un changement de zone, qui relève de la compétence du Grand Conseil, et les dissuader de demander des dérogations motivées uniquement par l'espoir de faire des plus-values. A mon sens, il est indécent de parler d'émolument déguisé, de pot-de-vin légal ou encore d'impôt spéculatif, comme j'ai pu le lire ici ou là ! C'est avoir une piètre conception de la République que de penser cela !
Nous voulons simplement défendre le principe d'égalité de traitement. Et puis, il ne faut pas exagérer : le propriétaire garde tout de même 70% de la plus-value ! Nous avons fixé dans la loi le taux de taxation à 30%. A Bâle, il est de 40% !
Le propriétaire dont le terrain fait l'objet d'une mesure d'aménagement part avec un avantage sur d'autres constructeurs, puisqu'il est censé avoir acquis un terrain à un prix inférieur à celui qui résulte de la mesure d'aménagement. Monsieur Koechlin, je crois tout comme vous à l'esprit d'entreprise, mais permettez-moi de ne pas supporter le monde des affaires où l'argent se gagne trop facilement !
Concernant le fonds de compensation, Monsieur Koechlin, vous vous préoccupez de l'utilisation du produit des taxes. J'aimerais tout d'abord rappeler que le fonds est utilisé en premier lieu pour le financement des indemnités pour expropriation matérielle. Mais ce fonds peut aussi, dans la mesure de ses disponibilités, servir au financement de mesures d'aménagement, au sens large, prises par l'Etat et d'autres mesures compensatoires. Il peut s'agir, en effet, de l'acquisition par l'Etat de terrains en vue de favoriser des opérations de construction, comme par exemple la réalisation de logements sociaux ou d'équipements publics. Actuellement, le budget de l'Etat ne prévoit aucune ligne ordinaire pour cela.
S'agissant plus particulièrement des mesures compensatoires, il peut s'agir de la création de zones de verdure en milieu bâti venant compenser la densification des quartiers. Je tiens à rappeler ici que la création de zones de verdure fait partie intégrante de l'aménagement du territoire. Dans la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, nous trouvons l'article 25, alinéa 1, qui nous dit expressément que «le Conseil d'Etat propose au Grand Conseil l'extension de la zone de verdure au fur et à mesure de l'accroissement des besoins de l'agglomération urbaine».
Nous avons également voulu répondre aux agriculteurs en prévoyant d'utiliser le fonds pour encourager l'exploitation agricole des terrains en zone agricole, ceci pour couvrir le risque de perte de substance liée au déclassement, cela même qui intéresse en premier lieu les spéculateurs.
Pour terminer, Mesdames et Messieurs les députés, je dirai que le projet de loi qui vous est proposé aujourd'hui est clair dans ses objectifs et dans sa mise en application. La majorité de ce parlement ne veut pas mettre par ce projet de loi un frein à l'investissement et à l'économie de la construction, mais veut simplement un peu plus de moralité dans l'acte d'investir et de construire !
Voilà, Monsieur le président, ce que je tenais à dire en préambule.
M. René Koechlin (L), rapporteur de minorité. Après des années d'études, de tergiversations et de tentatives infructueuses, l'Alternative de gauche aboutit dans l'une de ses innombrables et répétées démarches qui relèvent d'une politique psycho-maniaque visant à accroître la charge fiscale. Car, si le Grand Conseil n'a pas réussi en sept ou huit ans à concrétiser le deuxième volet de l'initiative 21, c'est que ce même Grand Conseil se montre toujours très circonspect lorsqu'il est question d'introduire un nouvel impôt, surtout si celui-ci doit, de surcroît et nécessairement, être soumis au peuple, puisque je vous le rappelle, le texte que nous étudions ce soir, s'il est voté, sera soumis au souverain.
Dans le cas présent, on propose d'introduire une taxe sur la plus-value foncière sous prétexte - et sous le seul prétexte - de lutter contre la spéculation immobilière...
M. Pierre Meyll. Ça existe !
M. Olivier Vaucher. Ça a existé !
M. René Koechlin, rapporteur de minorité. Ça existe, mais on s'aperçoit que, en aucun cas d'espèce, ce nouvel impôt - car c'est bien de cela dont il s'agit - n'entravera la spéculation foncière !
M. Pierre Meyll. Il faudra trouver une autre combine !
M. René Koechlin, rapporteur de minorité. Oui, probablement que le vrai spéculateur trouvera une autre combine, comme vous le dites, Monsieur Meyll ! En revanche, cet impôt pénalisera toutes les personnes qui entreprennent et qui confèrent au bien qu'ils réalisent une valeur ajoutée grâce à leur travail. (Exclamations.) Oui, et je sais de quoi je parle ! Vous avez beau ricaner, moi je sais ce que c'est le travail dans le domaine de la construction, parce que c'est mon travail ! Et c'est cette raison qui nous retient, précisément.
De plus, cette taxe ne saurait dissuader en aucune manière le véritable spéculateur - ça, je peux vous le dire - qui achète à bon compte, ou ce qu'il croit être à bon compte, et n'entreprend strictement rien. Il se contente d'attendre que les conditions du marché soient propices à une revente moyennant un bénéfice substantiel. Et, s'il réalise un tel bénéfice, eh bien, l'impôt sur les gains et bénéfices immobiliers est là pour le pénaliser et le taxer.
Alors pourquoi inventer quelque chose qui existe déjà ? Cette taxe n'aura aucune influence dissuasive sur ce genre de personnes pour lesquelles l'appât d'un gain facile, taxé ou non, demeure sinon la seule, du moins la principale motivation. Cette taxe est par conséquent trompeuse - ou c'est peut-être simplement le titre de l'initiative qui est trompeur... On ne sait pas ! En effet, si l'initiative visait réellement à lutter contre la spéculation foncière, on pourrait s'attendre à ce qu'elle propose des instruments qui soient réellement efficaces dans cet objectif. Mais si l'instrument est celui qu'on nous propose ce soir, alors, évidemment, on ne peut être que déçu et constater que le titre de l'initiative est trompeur.
M. Pierre Meyll. Il faut l'accepter !
M. Olivier Vaucher. Tais-toi, Meyll !
M. René Koechlin, rapporteur de minorité. Qui plus est, cette taxe, je le répète - je crois que ce n'est pas inutile - ne fera que péjorer la mise en oeuvre des opérations de construction, y compris et notamment celle d'immeubles répondant aux besoins de la population, tout simplement. Je sais que dans cette enceinte peu nombreux sont ceux qui tentent de mettre sur pied des opérations de construction répondant aux besoins le plus souvent prépondérants de la population. Mais je peux vous dire que pour persuader un propriétaire de terrain propice à ce genre d'opération, il faut beaucoup de temps, beaucoup de patience et une série de démarches qui prend des mois, voire des années, sans parler ensuite de toutes les démarches administratives qu'une opération de ce genre implique. Et cette taxe vient encore alourdir et réduire les possibilités d'aboutir dans ce genre d'opération.
Je crois d'ailleurs avoir démontré dans mes précédents rapports - vous l'aurez constaté, je n'en suis pas à mon premier rapport, car il m'échoit toujours d'être le rapporteur sur ce sujet, et il me semble que c'est le troisième ou le quatrième - j'ai démontré, disais-je, par un certain nombre d'exemples que l'effet de cette taxe était nécessairement dissuasif non pas pour les spéculateurs mais pour ceux qui entreprennent.
C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, je n'allongerai pas le débat, mais je vous invite - tout au moins ceux qui sont raisonnables - à ne pas entrer en matière sur ce projet de loi, car nous l'avons dit dans une résolution : l'impôt sur les gains et bénéfices immobiliers suffit à lui seul à concrétiser le deuxième volet de l'initiative. Et si, par malheur, la majorité de ce parlement acceptait l'entrée en matière, alors je vous demanderais de prendre en considération les amendements que nous avons déposés. Nous avons eu la prudence d'étudier ces amendements en commission, pour ne pas venir en séance plénière avec des propositions en vrac ; suite à leur examen par les services compétents du département, je peux dire que la majorité de ces textes ont été retenus par la commission, à la satisfaction de votre serviteur, pour la simple raison qu'ils sont raisonnables et non pas pour leur motivation politicienne. Ils avaient tous une justification purement technique.
Voilà, Monsieur le président. Je me permettrai de reprendre la parole en deuxième débat, lorsque nous examinerons ces amendements si c'est nécessaire.
Le président. Ce sera un plaisir de vous entendre à nouveau !
M. Georges Krebs (Ve). Ce projet de loi a été particulièrement bien préparé par le département, et je dois dire que nous avons rarement eu d'aussi bons documents pour préparer un projet de loi.
Ce projet de loi est équitable. Monsieur Koechlin, cette loi ne freinera pas la construction de logements sociaux, puisqu'il est prévu des exonérations, précisément, pour construire des logements sociaux et des objets d'intérêt public. Quand un profit résulte d'un déclassement administratif, il est juste que la plus-value fasse l'objet d'un impôt : cela me semble tout à fait équitable.
Il a également été tenu compte des amendements proposés par M. Koechlin dans cette loi, ce qui l'a améliorée. Nous avons bien fait de reprendre ces amendements en commission avant de débattre en séance de Grand Conseil.
C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, les Verts accepteront ce projet de loi et vous invitent à faire de même.
M. Rémy Pagani (AdG). M. Koechlin en appelle aux députés «raisonnables» tout en nous traitant de psycho-maniaques : je trouve cela un peu facile et le procédé un peu spécieux !
Cela étant, comme l'a rappelé M. Etienne, le projet de loi qui vous est soumis traîne depuis onze ans dans les tiroirs... Cela fait onze ans que la majorité de droite refuse d'entrer en matière, d'abord par une première joute oratoire qui visait à concrétiser ce projet par l'impôt sur les gains immobiliers - c'était la proposition de M. Koechlin - et, ensuite, par toute une série de mesures... Et nous ne sommes pas prêts d'aboutir, puisque la droite a déjà annoncé, avant même que ce projet ne soit soumis en votation pour concrétiser cette initiative - je vous le rappelle, il doit être obligatoirement soumis au vote populaire, à moins que des problèmes juridiques ne se posent - qu'elle irait au Tribunal fédéral.
Je trouve les arguments de la droite assez fallacieux sur le fond du problème, qui prétend que c'est une taxe supplémentaire, alors que le but est simplement d'équilibrer les comptes de l'Etat en prenant des mesures d'aménagement qui me semble évidentes. En effet, étant dans un régime de zones, il faut à un certain moment faire passer des terrains d'une zone à une autre pour répondre à certains besoins. D'un côté, quand on fait passer des terrains d'une zone à une autre, c'est le propriétaire qui en profite - par exemple, de la zone villas à la zone 3 de développement - et d'un autre, quand l'Etat doit construire une route, il doit indemniser les propriétaires pour compenser le déclassement.
Il y a là, si j'ose dire, une privatisation des bénéfices et une collectivisation des pertes qui est inadmissible. Le droit fédéral propose ces mesures. C'est assez étonnant que notre parlement, l'un des pionniers en Suisse s'agissant d'aménagement, ne se soit pas saisi de cette proposition de loi beaucoup plus tôt pour équilibrer les choses dans ce domaine et faciliter sur le long terme, tant au niveau pécuniaire qu'au niveau des procédures d'aménagement, l'ensemble des procédures. C'est le fond du problème, alors qu'on ne vienne pas aujourd'hui nous dire que c'est un impôt de plus... C'est un fonds de compensation qui est nécessaire, à mon avis, pour mener une politique d'aménagement saine.
Viennent ensuite les problèmes de spéculation. J'ai été complètement stupéfait - encore hier, en commission d'aménagement - d'entendre un avocat répondre, à une question quant à la volonté du propriétaire de modifier le projet d'aménagement, que le propriétaire est seigneur et maître sur ses terres !
Une voix. Ce n'est pas un avocat !
M. Rémy Pagani. C'est un architecte !
Une voix. C'est encore pire !
M. Rémy Pagani. C'est encore pire, oui, exactement ! C'est la conception actuelle dans cette République et je trouve un peu prétentieux et même moyenâgeux de voir certains propriétaires et architectes, voire avocats, se comporter ainsi. Ce sont des personnes qui croient qu'il est possible de gagner beaucoup d'argent - plus qu'à la bourse puisque des rendements de 3000% sont évoqués pour certains terrains - et de décrocher le jack-pot avec une conception qui date du Moyen-Age.
C'est donc sur cette question qu'il est important de prendre position. Je signale à M. Koechlin que cette loi introduit la non-taxation après vingt-cinq ans, ce qui protège les propriétaires d'un terrain qui voudraient l'aménager après une longue vie de labeur - je pense à certains agriculteurs notamment. On ne peut donc pas traiter ce projet de loi en passant par-dessus la jambe la question de la lutte contre la spéculation foncière... Oui, Monsieur Koechlin, cette loi lutte contre la spéculation foncière en taxant ceux qui veulent profiter immédiatement d'une mesure d'aménagement !
Nous soutiendrons, bien évidemment, ce projet de loi. Je tiens à souligner le travail considérable qui a été fait en commission par le département, notamment pour reprendre les amendements qui ont été présentés par M. Koechlin et les intégrer à la loi.
Le département a fourni des exemples qui montrent concrètement avec quelle facilité va s'appliquer la loi et qui seront profitables tant au niveau du Tribunal fédéral, pour ceux qui voudront aller devant cette juridiction, qu'au niveau de la mise en application par le département. Je vous recommande de voter ce projet de loi avec les derniers amendements adoptés par la commission d'aménagement, qui s'est réunie la semaine passée.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Comme l'a très justement rappelé M. Etienne tout à l'heure, il est plus que temps de concrétiser le deuxième volet de l'IN 21 contre la spéculation foncière en adoptant le projet de loi qui nous est soumis ce soir. En effet, depuis trop longtemps, les opposants à cette initiative font de l'obstruction en avançant différents arguments plus ou moins spécieux et, surtout, en actionnant tous les lobbies intéressés des milieux immobiliers, de la construction, en passant par la Chambre d'agriculture.
Dans ce débat, je pense qu'il faut mettre en évidence le principe de l'égalité de traitement. Est-il légitime que certains profitent de la possibilité d'augmenter leurs droits à bâtir et les avantages qui en découlent par le jeu des dérogations, et cela sans contrepartie, alors que d'autres sont pénalisés parce qu'ils respectent le régime des zones actuelles, ce qui est, à mon sens, l'attitude normale ?
Il importe donc d'accepter la possibilité de taxer les plus-values, qu'elles résultent d'une mesure d'aménagement suite à l'adoption d'un plan d'affectation du sol ou de l'octroi d'une autorisation de construire en dérogation aux normes des zones.
En commission, de longues discussions ont tourné autour de l'opportunité de taxer une plus-value résultant d'une simple autorisation de construire, illustrant à mon sens la volonté de certains députés de l'Entente de s'opposer activement à la progression des travaux... Si le principe de taxer les plus-values n'a pas été formellement mis en cause, certains députés se sont néanmoins focalisés avec opiniâtreté sur cette question des plus-values émanant d'une simple autorisation de construire...
Or, comme on l'a rappelé tout à l'heure, les chiffres présentés par le DAEL sont éloquents : pour 1997, alors que le total des plus-values générées par l'ensemble des plans d'affectation du sol adoptés s'élevait à environ 17 millions, on relève que six autorisations délivrées par voie de dérogation représentaient à elles seules 11 millions ! C'est dire l'importance d'intervenir, afin de rétablir un certain équilibre et cesser de cautionner cette prime à la spéculation.
Ce projet de loi devrait aussi inciter les propriétaires et les promoteurs à demander des changements de zones plutôt que des dérogations motivées par la perspective de gains supplémentaires. Cela aurait un avantage pour la démocratie, puisque les décisions de déclassement émanent du Grand Conseil.
Enfin, selon les députés de l'Entente et, en particulier, de M. Koechlin - il nous l'a encore répété ce soir - cette taxe devrait décourager la liberté d'entreprendre... Faut-il rappeler qu'il n'y a pas de taxation sur la plus-value, lorsque l'autorisation de construire intervient en conformité avec la zone ? Il n'y a donc pas d'atteinte à la liberté d'entreprendre, seulement la volonté d'instaurer une égalité de traitement entre propriétaires. Enfin, en cas de taxation, le propriétaire gardera tout de même 70% de la plus-value... Il est donc facile de dire que cette taxe est trompeuse, quand on a tout mis en oeuvre pour éviter qu'elle soit introduite !
En conclusion, le groupe socialiste votera ce projet de loi, avec les propositions d'amendement qui ont été acceptées par la commission, et nous vous demandons d'en faire de même.
M. Hubert Dethurens (PDC). Le projet de loi qui nous est soumis ce soir est censé concrétiser l'IN 21, intitulée «Halte à la spéculation foncière». En fait, ce projet de loi devrait plutôt s'intituler «Pour un impôt nouveau en matière de construction» !
Elle date déjà de onze ans et c'est vrai que le Grand Conseil a quelque peu tardé pour concrétiser cette initiative 21. Mais à qui la faute ? Je vous rappelle qu'un consensus avait presque été trouvé, lors des travaux d'une sous-commission présidée par M. John Dupraz. Je ne crois donc pas que la faute en incombe seulement à la droite de ce parlement !
Dans son rapport, M. Etienne parle de «privatisation des bénéfices» en matière d'impôt sur les gains immobiliers. Privatisation des bénéfices, voilà une belle formule ! Pour lui, le fait d'avoir acheté une maison 200 000 F en 1960 et de la revendre 500 000 F aujourd'hui sans avoir à payer d'impôts est purement scandaleux. Je vous rappelle qu'il y a eu référendum et que la majorité des Genevois trouvent normal que 200 000 F de 1960 équivalent à 500 000 F en 1999. Je rappelle à la gauche que, si elle avait accepté certains amendements à la loi sur les bénéfices immobiliers, le peuple genevois l'aurait peut-être acceptée.
Toujours dans son rapport, M. Etienne parle de 17 millions de plus-values en 1997, en se référant aux exemples donnés par le DAEL. Soit dit en passant, il comptabilise le déclassement de la Gambade et de Veissy... Alors, quand on parle d'excellent travail ! Le département aurait au moins pu retirer ces deux déclassements !
Bref, cet impôt aurait produit l'énorme somme de 6,6 millions - somme brute ! J'espère que le DAEL ne devra pas engager une vingtaine de taxateurs pour ce faire, sinon cela vaudra encore moins la peine...
Le seul point d'accord, Mesdames et Messieurs les députés, était la taxation de la plus-value lors de nouveaux déclassements. Ceci touche le monde agricole de près et nous admettons que passer d'une valeur de 10 F le mètre à 300 F par un simple acte administratif et législatif justifiait un impôt. Le monde agricole attendait beaucoup du dernier renvoi de ce projet de loi devant la commission...
Mais quelle déception ! Une simple phrase - je devrais dire une «phrase simplette» - je cite : «...notamment en vue d'encourager l'exploitation de terrains en zone agricole...». Cette phrase a été quelque peu améliorée par les derniers amendements, mais si on a renvoyé ce projet en commission pour en arriver là, eh bien, plus langue de bois, on meurt ! Je dois dire que j'ai essayé de comprendre le sens de cette première phrase pendant un certain temps, mais je n'ai pas trouvé...
Autre paradoxe de cette loi : elle va taxer une densification, alors même, Messieurs de la gauche, que vous réclamez cette densification à grands cris... C'est tout de même curieux ! De plus, elle est un frein supplémentaire à l'industrie du bâtiment... Vous irez expliquer aux travailleurs du bâtiment que c'est un nouveau moyen de lutte contre la spéculation et que cela vaut bien quelques suppressions d'emplois !
Comme dans la loi sur les bénéfices immobiliers, la gauche de ce Grand Conseil en veut trop. Elle risque, devant le peuple, de tout perdre.
Le groupe démocrate-chrétien ne se battra pas dans une guerre d'amendements. Il soutiendra néanmoins ceux proposés récemment en commission. Il trouve cette loi mal ficelée et l'améliorer, même un peu, pourrait contribuer à son adoption devant le peuple. C'est pourquoi il la refusera en bloc et pas seulement article par article. Cela pour faire comprendre à M. Etienne qu'il n'est pas nécessaire de contester chaque virgule pour trouver le texte mauvais !
M. Christian Ferrazino (AdG). On peut être pour ou on peut être contre la taxation des plus-values qui résultent d'une mesure d'aménagement, mais cela n'autorise pas à dire n'importe quoi... Monsieur Dethurens, vous mélangez à dessein un peu tout ça avec l'impôt sur les gains immobiliers et M. Koechlin reprend à son compte cette argumentation en disant que, finalement, il a déjà été répondu à ce volet de l'initiative en votant l'impôt sur les gains immobiliers...
Alors, je constate que votre conception du débat démocratique comporte un certain nombre de limites qu'il m'appartient de mettre en évidence. En effet, si pour vous la taxation d'une plus-value qui résulte d'une mesure d'aménagement trouve sa réponse dans l'imposition sur les gains immobiliers, cela voudrait dire qu'il faudrait impérativement que celui qui bénéficie de la mesure sur la plus-value vende son bien, puisqu'il n'y a pas d'impôt sur le gain immobilier si on ne fait pas de gain, c'est-à-dire si on ne le vend pas... Vous devriez savoir, Monsieur Koechlin... (L'orateur est interpellé.) Voilà ! C'est justement l'erreur que vous avez écrite et que vous avez répétée oralement ! Notre but n'est pas d'instaurer un impôt, comme vous le dites un peu rapidement, mais une taxe pour les plus-values qui résultent d'une mesure d'aménagement. Bien évidemment, si un gain devait intervenir dans le cadre d'une vente, eh bien la loi sur les gains immobiliers s'appliquerait ! Mais ce sont deux domaines totalement différents, qui n'ont absolument rien à voir l'un avec l'autre.
Vous nous traitez de «psycho-maniaques», mais vous devriez vous regarder pour vous rendre compte de l'attitude obsessionnelle rigide qui est la vôtre depuis une dizaine d'années, puisque vous avez toujours, avec des subterfuges nouveaux, essayé d'éviter, précisément, que la population ne se prononce sur cette disposition. Or, vous savez pertinemment, puisque c'est l'ancien droit qui régit cette initiative, que, dès que la proposition est adoptée par ce Grand Conseil - certains l'ont rappelé tout à l'heure - le souverain est obligatoirement amené à se prononcer.
Alors de deux choses l'une, soit vous voulez éviter que le souverain ne se prononce, et vous suivez M. Koechlin qui ne veut pas voter l'entrée en matière, soit vous avez une notion de la démocratie un peu plus large, et vous pensez que le souverain doit pouvoir s'exprimer et qu'il faut voter l'entrée en matière à l'unanimité. Ainsi, ceux qui souhaitent critiquer ce projet le feront dans le cadre de la votation populaire et ceux qui le soutiennent s'exprimeront à leur tour à cette occasion.
Mais, quoi qu'il en soit, une votation doit avoir lieu sur ce volet de l'initiative 21, car je vous rappelle tout de même, Monsieur Koechlin, que le volet de la fiscalité comportait une anomalie que vous avez vous-même reconnue en commission. En effet, ce Grand Conseil a formalisé le volet fiscal de l'initiative 21 sans pour autant le soumettre ensuite en votation populaire. Ce vice de forme a été reconnu par tout le monde. Alors aujourd'hui, ce serait la moindre des choses de se rattraper en proposant cette votation au souverain, chiffres à l'appui.
Vous avez eu raison, Madame Rielle, de relever que le département a fait un important travail, d'abord pour nous expliquer les mécanismes de ce projet de loi, ensuite pour calculer les montants qui pourraient en résulter. Pour six dossiers seulement, on arrive à 11 millions - sauf erreur ! C'est vrai, il s'agissait de dérogations consécutives à une autorisation de construire et non à un déclassement de zone agricole. Monsieur Dethurens, l'annexe du rapport montre clairement que les montants les plus importants qui pourraient être recueillis par ce fonds ne résultent pas des déclassements de zones, de plans d'affectation du sol, mais de dérogations dans le cadre de demandes d'autorisations de construire. C'est vous dire que ce projet de loi devrait rapporter des dizaines de millions à l'Etat, car certains bénéficient régulièrement de dérogations.
Vous dites, Monsieur Dethurens, que c'est normal de bénéficier d'un déclassement, que c'est le fait du prince... En l'occurrence, le prince c'est nous : la seule compétence de ce Grand Conseil en matière d'aménagement du territoire c'est de voter des déclassements. Mais il y a d'autres princes : je veux parler du Conseil d'Etat qui peut accorder des dérogations précisément dans le cadre soit de plans d'affectation du sol soit dans la délivrance d'autorisations de construire ! Et vous savez - parce que vous avez lu tout comme nous les annexes qui figurent à ce rapport - que c'est précisément lorsque le «prince-Conseil d'Etat» accorde des dérogations dans le cadre de ces autorisations de construire que le propriétaire bénéficie d'importantes plus-values. Et vous êtes choqués qu'un tout petit 30% soit prélevé sur toutes ces plus-values pour un fonds de compensation ? (L'orateur est interpellé par M. Vaucher.) Oui, petit, Monsieur Vaucher ! On vous l'a déjà dit, mais apparemment cela vous a échappé : certains cantons appliquent en effet un taux plus élevé.
Une voix. On pourrait faire 100%...
M. Christian Ferrazino. La commission a fait preuve de retenue en fixant ce taux à 30%, car il aurait été possible de prévoir des taux supérieurs. Nous nous réservons d'ailleurs de démontrer dans le cadre de cette votation populaire, précisément sur quelques exemples bien connus de la population, quels montants l'Etat aurait perçus si la loi avait été en vigueur lorsque ces dossiers ont été présentés. Malheureusement, ces montants sont perdus par la faute de ceux qui s'ingénient depuis des années à retarder la mise en votation populaire de ce texte de loi, qui finalement ne fera que rendre justice à l'initiative qui avait été lancée il y a plus de dix ans par le parti du Travail. Il nous restera un volet à régler, car ce soir nous ne sommes pas au bout de nos peines : il y aura en effet encore un volet à régler, sur les quatre que l'initiative comportait, et qui sera vraisemblablement traité par la commission du logement, puisqu'il vise à l'acquisition de terrains par l'Etat.
Pour ce qui est de la taxation des plus-values et de ce volet de l'IN 21 et puisque tout le monde pense avoir l'esprit démocratique, ceux-là mêmes qui voudraient combattre ce projet devraient voter l'entrée en matière pour pouvoir s'exprimer devant le souverain, lors de la votation populaire qui sera obligatoirement organisée.
M. Alain Etienne (S), rapporteur de majorité. J'aimerais juste revenir sur l'argument évoqué par M. Koechlin par rapport à la valeur ajoutée. Nous travaillons tous et nous avons tous une mission à remplir à ce niveau-là : nous apportons tous une valeur ajoutée par rapport à notre travail. Monsieur Koechlin, vous le savez, les plus-values sur les constructions sont souvent dues aux dérogations, notamment suite à la surélévation d'un bâtiment. J'aimerais donc que cet argument ne soit pas toujours invoqué !
M. René Koechlin (L), rapporteur de minorité. Mme Fehlmann Rielle a confondu spéculation et dérogation, mais je pense que c'est une confusion involontaire, du moins je lui en fais le crédit.
J'invite M. Ferrazino à relire l'article 30L tel qu'il ressort des travaux de la commission, car il est bien dit que la taxe - c'est la première phrase de cet article - est perceptible lors de l'aliénation du terrain. Or, c'est la majorité des cas ! Le véritable spéculateur aboutit toujours à une aliénation, parce que c'est son but. Il achète à un prix donné et il revend. Il n'achète que dans le but de revendre. Et c'est contre ces spéculateurs que nous nous élevons, nous aussi ! Et je vous assure que nous les professionnels sommes, autant que vous sinon plus, affectés par ce genre de personnes, beaucoup plus que vous ne le croyez ! Et c'est justement parce que nous les connaissons un peu que nous ne pouvons que constater, malheureusement, que la mesure qui est proposée ce soir risque d'être tout à fait inefficiente et inopérante...
Toujours à propos de l'article 30L, il est dit ensuite - j'en conviens - que la taxe est perceptible, cas échéant, à l'ouverture du chantier de construction correspondant. On fait ici allusion à tous les cas de dérogations. Or, hormis ces cas, qui sont une petite minorité et qui ne concernent que très peu les véritables spéculateurs, je tiens à relever ici que du montant de 11 millions - qui figure à la page 28 du rapport, sauf erreur - n'ont pas été déduits les frais et coûts de construction, ce qui fait qu'en réalité la plus-value est très nettement inférieure à 11 millions - je tenais aussi à le souligner.
M. Laurent Moutinot. La loi fédérale sur l'aménagement du territoire prévoit à son article 5 que les cantons peuvent organiser un système de taxation des plus-values découlant de mesures d'aménagement du territoire.
L'IN 21, dont la concrétisation, s'agissant du deuxième volet, fait l'objet de notre débat de ce soir, nous donne la direction dans laquelle il convient d'interpréter cet article 5 de la LAT. En effet, on pourrait bien évidemment imaginer de ne taxer que très modérément et de ne taxer que certaines mesures d'aménagement. Or, l'IN 21 que le Grand Conseil doit concrétiser dit clairement que nous devons aller dans une direction large d'une taxation, effectivement non négligeable, de l'ensemble des processus d'aménagement ou de construction qui peuvent donner lieu à plus-value, puisque l'initiative elle-même parle des autorisations de construire.
Toutefois, pour ne pas arriver à un système absurde, vous avez vu dans le texte que les plus-values en dessous de 25 000 F sont exonérées. Alors, Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes dans le cadre du droit fédéral avec une option politique donnée par l'IN 21 que le Grand Conseil doit concrétiser. Je remercie toutes celles et ceux qui ont mis en évidence le travail remarquable des collaborateurs du département. C'est grâce à ce travail et au vôtre, Mesdames et Messieurs les députés, que nous n'engagerons pas aujourd'hui une bataille de texte mais un pur débat idéologique sur des principes, puisque même ceux qui combattent le texte aujourd'hui admettent, à l'exception peut-être de M. Dethurens, que ce texte est celui qu'il faut adopter pour concrétiser l'initiative 21, dans le sens que j'ai indiqué.
L'une des problématiques relevée par les opposants à ce projet est celle de son effet sur les prix. Cette question, il faut l'avouer, est légèrement controversée. Certains experts immobiliers pensent qu'une taxation a un effet à la hausse sur les prix. Ce n'est pas l'avis de M. Gugenheim, ancien directeur de l'Office fédéral du logement, qui a été questionné à ce sujet.
Je pense, quant à moi, que le vendeur a tendance à intégrer la taxation dans le prix de vente, ce qui peut avoir un effet à la hausse, mais l'acheteur, lui, tenu par son plan financier, ne veut pas entrer en matière. Par conséquent, l'effet sur les prix devrait être minime. A supposer qu'il y en ait un, il y a exonération s'agissant des opérations spécifiques qui touchent notamment le logement social.
Vous m'avez demandé s'il faudrait engager vingt taxateurs au DAEL pour appliquer cette loi. La réponse est non. Dans sa version actuelle, nous sommes en mesure d'appliquer cette loi avec les postes figurant au budget du département.
Mesdames et Messieurs les députés, il ne s'agit pas d'un impôt nouveau. Il s'agit en réalité tout simplement de la répartition d'un bénéfice entre celui qui bénéficie d'une mesure d'aménagement et l'Etat qui la lui accorde. Il est vrai que la plus-value résultant d'une mesure d'aménagement ou d'une dérogation constructive est un acte de l'Etat, qu'il s'agisse d'une décision de votre Grand Conseil, du Conseil d'Etat ou d'un département. Le partage de la plus-value résultant de cette décision n'a non seulement rien de choquant, mais il répond au but de l'initiative que nous devons concrétiser et est susceptible, je le crois, de recevoir un excellent accueil dans la population genevoise.
PL 7559-C
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons travailler sur la dernière version du projet de loi que vous avez reçue, qui tient compte d'une série d'amendements qui, si j'ai bien compris, ont été adoptés en commun par la majorité et la minorité. Vous proposerez vos modifications sur la base de ce texte.
Titre et préambule
M. René Koechlin (L), rapporteur de minorité. Par souci de transparence et de clarté vis-à-vis des électeurs qui devront se prononcer sur ce projet de loi, je suggère d'ajouter au titre la vérité, c'est-à-dire : «Taxe sur la plus-value».
M. Rémy Pagani (AdG). Nous avons longuement discuté du titre de ce projet de loi étant donné qu'effectivement les électeurs devront se prononcer à son sujet. Une commission ad hoc doit d'ailleurs se prononcer sur un problème lancinant, s'agissant de la manière de poser les questions aux électeurs. La majorité de la commission de l'aménagement, pour ne pas dire toute la commission, était d'accord qu'il fallait trouver une meilleure formulation. J'avais moi-même formulé un autre amendement que j'opposais à celui de M. Koechlin, mais je vous en ferai grâce. Toujours est-il que nous nous sommes mis d'accord sur le libellé exact du projet de loi qui vous est soumis, aussi je vous suggère d'en rester là.
M. Olivier Vaucher (L). Contrairement à ce que vient de dire le préopinant, cet avis n'était, et de loin, pas partagé par la majorité de la commission ! Je dois dire que le titre «Halte à la spéculation foncière» a au moins dix ou quinze ans de retard. Il est totalement inopportun aujourd'hui. Les abus, s'agissant de spéculation foncière, n'existent heureusement plus.
Je soutiendrai donc, et mon groupe aussi, l'amendement proposé par M. Koechlin.
Le président. Il faut que les choses soient bien claires pour tout le monde. Il n'est pas possible de modifier le titre «Halte à la spéculation foncière» de l'initiative. La modification porte sur le titre du projet de loi. Monsieur Koechlin, c'est bien le titre de la loi que vous voulez changer ?
M. René Koechlin (L), rapporteur de minorité. Monsieur le président, le titre du projet de loi selon le texte qui ressort du travail de la commission est : «Projet de loi modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire et concrétisant la 2e invite de l'IN 21 «Halte à la spéculation foncière». Mon amendement consiste à ajouter à ce texte, après «foncière» : «Taxe sur la plus-value», pour être tout à fait transparents et dire ce que contient réellement ce projet de loi. Cela nous paraît la moindre des corrections vis-à-vis de l'électorat !
M. Pierre Meyll (AdG). Je crois qu'il ne faut pas jouer sur les mots. Vous pensez que «taxe sur la plus-value» peut paraître plus anodin. Mais «spéculation foncière» veut bien dire ce que ça veut dire, seulement vous voulez faire croire au peuple qu'il y a des nuances ! C'est clair et net : il s'agit dans ce projet de «spéculation foncière». Même si M. Vaucher prétend qu'elle a disparu depuis quinze ans, un retour de manivelle peut toujours se faire. Du reste, c'est déjà le cas, il suffit de constater l'augmentation des coûts ! Il n'y a aucun doute à ce sujet, mais, une fois de plus, vous craignez le verdict du peuple ! «Spéculation foncière», c'est le titre et il reste comme il est : un point c'est tout !
M. Olivier Vaucher (L). Comme je l'ai dit tout à l'heure, pour être transparents vis-à-vis de la population - et nous devons être transparents quelle que soit la tendance politique, Monsieur Meyll - nous devons dire : «Halte à la spéculation foncière». Taxe sur la plus-value». La transparence doit être complète !
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je crois que tout le monde a compris le sens de cette modification. Nous allons passer au vote.
M. René Koechlin (L), rapporteur de minorité. Monsieur le président, pour que nous connaissions les noms de ceux qui veulent réellement que le peuple sache de quoi il est question en lisant le titre de ce projet, quand il se prononcera, et de ceux qui, au contraire, veulent tromper le souverain en évitant la clarification de ces termes, je demande l'appel nominal pour cet amendement. (Appuyé. )
Le président. Nous allons voter à l'appel nominal la modification du titre du projet de loi. L'amendement de M. Koechlin prévoit d'ajouter les termes «Taxe sur la plus-value» après «Halte à la spéculation foncière». Je précise bien que vous modifiez le titre de l'initiative, ce qui n'est, à mon avis, pas possible.
M. Christian Ferrazino (AdG). Monsieur Koechlin, non seulement vous souhaitez modifier les titres des initiatives après les avoir combattues pendant dix ans, mais vous, Monsieur Vaucher, vous prétendez que le titre a dix ans de retard ! Il faut vous en prendre à vous-mêmes, Monsieur Vaucher, car nous étions prêts, quant à nous, à l'adopter très rapidement ! Alors, si vous voulez être précis, soyez-le jusqu'au bout ! Si vous nous proposiez : «Modeste taxe tardivement introduite sur la plus-value»... (Rires.) ...nous pourrions y souscrire. Mais pas au titre que vous nous proposez, Monsieur Koechlin !
M. René Koechlin (L), rapporteur de minorité. Monsieur le président, je ne modifie pas le titre de l'initiative. D'ailleurs, ce titre figure entre guillemets. Le titre de l'initiative, c'est ce qui est entre guillemets, et ensuite je complète le titre du projet de loi, qui porte le N° 7559 et qui est censé concrétiser le deuxième volet - il ne concrétise qu'un volet de l'initiative - avec les termes «Taxe sur la plus-value».
Le président. La confusion vient du fait que vous avez deux textes sous les yeux, mais j'ai bien précisé sur lequel nous devions travailler. Nous allons procéder au vote sur votre amendement, Monsieur Koechlin. Les termes «Taxe sur la plus-value» que vous voulez ajouter se placent après les guillemets du titre initial, ce qui donne :
«Projet de loi modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire et concrétisant la 2e invite de l'IN 21 «Halte à la spéculation foncière». Taxe sur la plus-value» (L 1 30).
L'appel nominal ayant été demandé, nous allons y procéder. Celles et ceux qui acceptent cet amendement répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.
Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie d'interrompre vos téléphones mobiles pendant l'appel nominal. Nous commencerons quand vous aurez fait silence ! Madame la secrétaire, veuillez procéder à l'appel nominal.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 46 non contre 37 oui.
Ont voté non (46) :
Esther Alder (Ve)
Charles Beer (S)
Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)
Dolorès Loly Bolay (AG)
Anne Briol (Ve)
Christian Brunier (S)
Fabienne Bugnon (Ve)
Nicole Castioni Jaquet (S)
Pierre-Alain Champod (S)
Alain Charbonnier (S)
Bernard Clerc (AG)
Jacqueline Cogne (S)
Jean-François Courvoisier (S)
Pierre-Alain Cristin (S)
Anita Cuénod (AG)
Régis de Battista (S)
Jeannine de Haller (AG)
René Ecuyer (AG)
Alain Etienne (S)
Laurence Fehlmann Rielle (S)
Christian Ferrazino (AG)
Magdalena Filipowski (AG)
Luc Gilly (AG)
Mireille Gossauer-Zurcher (S)
Marianne Grobet-Wellner (S)
Christian Grobet (AG)
Cécile Guendouz (AG)
Dominique Hausser (S)
David Hiler (Ve)
Antonio Hodgers (Ve)
Georges Krebs (Ve)
Pierre Meyll (AG)
Louiza Mottaz (Ve)
Chaïm Nissim (Ve)
Danielle Oppliger (AG)
Rémy Pagani (AG)
Véronique Pürro (S)
Jean-Pierre Restellini (Ve)
Elisabeth Reusse-Decrey (S)
Albert Rodrik (S)
Christine Sayegh (S)
Françoise Schenk-Gottret (S)
Myriam Sormanni (S)
Pierre Vanek (AG)
Alberto Velasco (S)
Salika Wenger (AG)
Ont voté oui (37) :
Bernard Annen (L)
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Luc Barthassat (DC)
Jacques Béné (L)
Janine Berberat (L)
Madeleine Bernasconi (R)
Claude Blanc (DC)
Christian de Saussure (L)
Marie-Françoise de Tassigny (R)
Gilles Desplanches (L)
Hervé Dessimoz (R)
Jean-Claude Dessuet (L)
Hubert Dethurens (DC)
Daniel Ducommun (R)
Pierre Ducrest (L)
Henri Duvillard (DC)
Pierre Froidevaux (R)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Nelly Guichard (DC)
Janine Hagmann (L)
Michel Halpérin (L)
Yvonne Humbert (L)
René Koechlin (L)
Bernard Lescaze (R)
Pierre Marti (DC)
Alain-Dominique Mauris (L)
Jean-Louis Mory (R)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Jean-Marc Odier (R)
Barbara Polla (L)
Pierre-Louis Portier (DC)
Stéphanie Ruegsegger (DC)
Walter Spinucci (R)
Micheline Spoerri (L)
Olivier Vaucher (L)
Jean-Claude Vaudroz (DC)
Personne ne s'est abstenu
Etaient excusés à la séance (8) :
Nicolas Brunschwig (L)
Juliette Buffat (L)
Erica Deuber Ziegler (AG)
Bénédict Fontanet (DC)
Alexandra Gobet (S)
Armand Lombard (L)
Catherine Passaplan (DC)
Pierre-Pascal Visseur (R)
Etaient absents au moment du vote (8) :
Roger Beer (R)
Thomas Büchi (R)
Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)
John Dupraz (R)
Philippe Glatz (DC)
Gilles Godinat (AG)
Claude Haegi (L)
Louis Serex (R)
Présidence :
M. Jean Spielmann, président.
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Article unique (souligné)
Mis aux voix, l'article 30C est adopté, de même que l'article 30D.
Le président. Nous poursuivons : article 30 E, article 30 F...
M. René Koechlin (L), rapporteur de minorité. Monsieur le président, j'avais une proposition d'amendement à faire à l'article 30 E...
Le président. C'est hélas trop tard, Monsieur Koechlin... Mais je vous donne la parole quand même ! (Rires.)
Art. 30E
M. René Koechlin, rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président ! J'ai quelques ascendants bernois qui ralentissent mes réflexes !
Nous avions proposé d'introduire un pourcentage plutôt qu'une somme fixe de 25 000 F, parce que cette somme nous paraît énorme par rapport à une plus-value de 100 000 F par exemple, ou même de 50 000 F, mais dérisoire par rapport à une plus-value d'un million ou plus. C'est la raison pour laquelle nous pensions plus équitable de fixer un pourcentage tout en gardant la somme de 25 000 F comme chiffre de base. C'est le sens de l'amendement qui figure dans mon rapport et que je vous prie de bien vouloir voter.
Le président. Je mets aux voix l'amendement proposé par M. Koechlin à l'article 30E, alinéa 1, que vous trouverez au bas de la page 98 du rapport, je cite :
«1Une mesure d'aménagement entraînant un avantage, soit une plus-value d'au moins 20% d'un ou de plusieurs immeubles compris dans le périmètre...»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Mis aux voix, l'article 30E est adopté.
Mis aux voix, l'article 30F est adopté, de même que les articles 30G à 36.
Mis aux voix, l'article unique (souligné) est adopté.
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7559)
modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire et concrétisant la 2e invite de l'IN 21 "; Halte à la spéculation foncière " (L 1 30)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
La loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, est modifiée comme suit :
Art. 30C Principe (nouveau)
Les avantages et les inconvénients majeurs décrits aux articles 30E et 30F résultant de mesures d'aménagement du territoire font l'objet d'une compensation, selon les articles 30D à 30O.
Art. 30D Fonds de compensation (nouveau)
1 Un fonds de compensation recueille le produit des taxes perçues en vertu des articles 30E et suivants ci-après et finance les indemnités versées en application de l'article 30F.
2 Il peut participer, dans la mesure de ses disponibilités, aux frais relatifs aux:
3 Le fonds de compensation verse à la caisse de l'Etat les montants qui, sans la taxation prévue à l'article 30K, auraient été perçus, le cas échéant, au titre de l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers.
4 La part du fonds qui, au 31 décembre de chaque année, excède le montant de 25 millions F, est versée à la caisse de l'Etat. A titre exceptionnel, le Grand Conseil peut cependant décider de laisser subsister ce montant excédentaire sur le fonds.
5 Le Conseil d'Etat présente à la fin de chaque législature au Grand Conseil un rapport sur l'utilisation du fonds.
Art. 30E Avantage (nouveau)
1 Une mesure d'aménagement entraînant un avantage, soit une plus-value d'un ou de plusieurs immeubles compris dans le périmètre concerné par celle-ci et représentant un montant total supérieur à 25 000 F, donne lieu à taxation.
2 Par mesure d'aménagement, on entend :
3 Dans la mesure où ils sont susceptibles d'entraîner un avantage au sens de l'alinéa 1, sont assimilés à des mesures d'aménagement les actes administratifs suivants :
4 Les autorisations de construire délivrées en conformité d'une zone ou d'un plan d'affectation, sans dérogation, sont réputées ne pas entraîner de plus-value foncière. En zone de développement, il en va de même des plans localisés de quartier dont l'indice d'utilisation du sol est inférieur ou équivalent à celui, usuel, de cette zone, fixé dans le règlement d'application.
Art. 30F Indemnisation (nouveau)
1 Une indemnité ne peut être accordée que lorsque les inconvénients provoqués par une mesure d'aménagement sont équivalents à une expropriation matérielle.
2 Mention est faite au Registre foncier de tels versements.
Art. 30G Assujettissement (nouveau)
1 Le débiteur de la taxe sur la plus-value résultant d'une mesure d'aménagement au sens de l'article 30E est le propriétaire du terrain au moment de l'adoption de celle-ci. Il en va de même du créancier d'une indemnité au sens de l'article 30F.
2 Lorsque plusieurs personnes sont propriétaires d'un immeuble, elles sont solidairement obligées envers l'Etat.
Art. 30H Calcul de la plus-value (nouveau)
1 La plus-value équivaut à la différence de la valeur de l'immeuble, considéré avant et après l'adoption de la mesure d'aménagement au sens de l'article 30E. Elle est calculée sur la base des éléments déterminants existant au moment où la mesure d'aménagement est adoptée, de la manière suivante :
2 La valeur de rendement est déterminée sur la base du taux moyen des hypothèques de premier rang pratiqué par la banque cantonale de Genève, augmenté d'un pourcentage pour couvrir les charges, fixé par le règlement d'application.
Art. 30I Taux de la taxation (nouveau)
1 Le taux de la taxation de la plus-value est de 30 %.
2 Le montant de la taxe est adapté à l'indice suisse des prix à la consommation à dater de la notification du bordereau.
3 En cas de déclassement de terrains, réputés inconstructibles, en zone à bâtir ordinaire ou de développement, il est tenu compte des mesures de compensation simultanées consenties par le même bénéficiaire de ladite mesure de déclassement. Ces mesures sont portées en déduction, m2 pour m2, des surfaces déclassées en zone à bâtir ordinaire ou de développement.
Art. 30J Exonération (nouveau)
1 Les plus-values résultant des mesures d'aménagement visées à l'article 30E peuvent être exonérées lorsqu'elles ont pour objectif :
b) la réalisation de surfaces brutes de plancher destinées à des équipements publics fédéraux, cantonaux ou communaux, ou à des organisations intergouvernementales au bénéfice d'un accord de siège ;
2 Dans les cas visés à l'alinéa 1er, lettre b, la taxation et la perception ont lieu simultanément lors de l'aliénation du terrain.
Art. 30 K Taxation (nouveau)
La taxation s'opère sur la base d'un bordereau notifié par le département simultanément à l'adoption d'une des mesures d'aménagement au sens de l'article 30E. La décision de taxation fait l'objet d'une mention au registre foncier. L'article 30I, alinéa 2 est réservé.
Art. 30L Perception (nouveau)
La créance découlant de la taxe visée à l'article 30E est exigible lors de l'aliénation du terrain ou lors de la délivrance d'une autorisation définitive de construire, au plus tard à l'ouverture du chantier de construction découlant de la mesure d'aménagement considérée.
Art. 30M Révision (nouveau)
Au cas où, postérieurement à la décision de taxation, l'un des éléments entrant dans le calcul de celle-ci subit une modification de nature à influencer sensiblement les possibilités de mise en valeur du terrain et pour autant que celui-ci n'ait pas changé de propriétaire, le département peut, d'office, ou à la demande de ce propriétaire, procéder à une révision de la taxe.
Art. 30N Hypothèque légale (nouveau)
1 Le paiement des taxes prévues au présent titre est garanti par une hypothèque légale. L'hypothèque prend naissance, sans inscription, en même temps que la créance qu'elle garantit. Elle est en premier rang, en concours avec les autres hypothèques légales de droit public, et prime tout autre gage immobilier.
2 L'hypothèque est inscrite au registre foncier à titre déclaratif, sur la seule réquisition du département, accompagnée du bordereau de taxation.
3 L'hypothèque est radiée d'office au paiement complet de la taxe.
Art. 30O Recouvrement (nouveau)
1 Les bordereaux définitifs relatifs au paiement des taxes, établis en application de l'article 30K, sont assimilés à des jugements exécutoires au sens de l'article 80 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, du 11 avril 1889. Le recouvrement est poursuivi à la requête du conseiller d'Etat chargé du département, représentant l'Etat, conformément aux dispositions de ladite loi.
2 Les dispositions de l'article 86A de la loi sur les contributions publiques, du 9 novembre 1987, sont applicables au recouvrement de la taxe.
3 Le paiement de la taxe prévue à l'alinéa 1 constitue une impense déductible au sens de l'article 82, alinéa 8 de la loi générale sur les contributions publiques et son acquittement ne dispense pas l'aliénateur ou ses ayants cause de tous autres impôts prévus par cette loi.
Art. 30P Règlement (nouveau)
Le Conseil d'Etat fixe par voie de règlement les modalités d'application des articles 30C à 30O.
2 En dérogation à l'alinéa 1, les décisions prises en application de l'article 30K peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la Commission cantonale de conciliation et d'estimation instituée par la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, du 10 juin 1933. Le Tribunal administratif est compétent pour trancher les recours en dernière instance cantonale.
Art. 36 Demandes d'indemnité (nouveau)
Les demandes d'indemnité pour expropriation matérielle au sens de l'article 30F peuvent être adressées au Tribunal de première instance dans un délai du 5 ans à dater de l'entrée en vigueur de la mesure d'aménagement considérée. Une transaction judiciaire peut intervenir pendant la procédure à tous les stades de celle-ci.
IN 21-E
Le président. Il nous faut maintenant encore renvoyer l'IN 21 à la commission du logement pour concrétiser le quatrième volet de l'initiative.
Mis aux voix, le renvoi de l'initiative à la commission du logement est adopté.
La séance est levée à 16 h 40.