République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 29 avril 1999 à 17h
54e législature - 2e année - 6e session - 16e séance -autres séances de la session
54e législature
No 16/III
Jeudi 29 avril 1999,
nuit
La séance est ouverte à 20 h 30.
Assistent à la séance : Mmes et MM. Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat, Guy-Olivier Segond, Carlo Lamprecht, Micheline Calmy-Rey et Laurent Moutinot, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
M. Pierre-Louis Portier est assermenté. (Applaudissements.)
3. Personnes excusées.
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : MM. Gérard Ramseyer et Robert Cramer, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Christian de Saussure, Marie-Thérèse Engelberts, Bénédict Fontanet, Philippe Glatz et Pierre Meyll, députés.
4. Discussion et approbation de l'ordre du jour.
M. Pierre-Alain Champod(S). Mesdames et Messieurs les députés, vous avez reçu tout à l'heure la motion 1281 pour l'accueil et le regroupement familial des réfugiés de la guerre dans les Balkans. Je demande que cette motion puisse être traitée pendant cette session. Nous devrons tout à l'heure aborder, sur le même thème, le projet de loi 8063 du Conseil d'Etat allouant une subvention au CICR et je vous propose que cette motion soit traitée en même temps.
Le président. En ce qui concerne les points que vous venez d'évoquer, Monsieur Champod, je propose à cette assemblée la procédure suivante.
Après discussion au sein du Bureau, nous avons fixé demain à 14 h le débat général sur le budget et les comptes, à raison de deux fois cinq minutes par groupe, ce qui entraînera environ une heure de débat. Je vous propose qu'immédiatement après nous traitions en un seul et unique débat la motion 1275, point 65 de l'ordre du jour, les projets de lois 7995 et 7996 et 7997, au point 104, le projet de loi 8063, allouant un crédit d'un million à la Croix-Rouge et la motion 1281. S'il n'y a pas d'opposition, nous ferons ainsi.
M. Michel Halpérin(L). Je propose que nous traitions dès à présent le point 72 de notre ordre du jour, projet de loi 7883 modifiant les limites de zones en faveur du stade de la Praille. Je rappelle qu'il s'agit d'un équipement sportif d'une importance majeure pour les associations sportives de ce canton, pour ceux qui s'intéressent au sport et j'ai un peu de peine à comprendre comment, sans discussion tout à l'heure, il a pu être considéré comme suffisamment secondaire pour être repoussé très loin dans l'ordre du jour. Je vous propose par conséquent que nous le traitions maintenant. L'attente de la population ne serait pas satisfaite par une nouvelle manifestation d'indifférence à l'égard de ce projet important, qui mériterait que nous nous y consacrions avec le même entrain que celui que nous mettons à traiter d'autres sujets parfois sensiblement moins urgents !
M. Claude Blanc(PDC). Je demande que, sur cette proposition, nous procédions à l'appel nominal ! (Exclamations.)
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Le projet de la Praille est effectivement un projet important, vous savez que le Conseil d'Etat le soutient et que je souhaite un vote largement positif. Toutefois, les demandes de modification de l'ordre du jour, d'appel nominal risquent d'aboutir à ce que ce dossier soit traité dans une atmosphère de conflit inutile. Je puis vous assurer qu'il n'y a pas péril en la demeure et qu'il peut être traité au plus tard à la prochaine session. Je souhaite, précisément pour que ce projet rencontre l'adhésion la plus large, que vous le traitiez en toute sérénité, sans qu'interviennent d'entrée de cause des discussions et obstacles de procédure qui auraient pour effet regrettable d'affaiblir quelque peu le soutien que mérite ce projet.
Le président. La proposition de MM. Halpérin et Blanc est maintenue. Mesdames et Messieurs, je vous prie de regagner vos places, nous allons voter à l'appel nominal. (Appuyé.)
Celles et ceux qui acceptent de traiter le projet de loi 7883 immédiatement répondront oui, et celles et ceux qui la rejettent répondront non.
Cette proposition est rejetée par 46 non contre 29 oui et 3 abstentions.
Ont voté non (46) :
Esther Alder (Ve)
Roger Beer (R)
Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)
Anne Briol (Ve)
Christian Brunier (S)
Thomas Büchi (R)
Fabienne Bugnon (Ve)
Nicole Castioni-Jaquet (S)
Pierre-Alain Champod (S)
Bernard Clerc (AG)
Jacqueline Cogne (S)
Jean-François Courvoisier (S)
Anita Cuénod (AG)
Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)
Régis de Battista (S)
Jeannine de Haller (AG)
Hervé Dessimoz (R)
Erica Deuber-Pauli (AG)
John Dupraz (R)
Alain Etienne (S)
Laurence Fehlmann Rielle (S)
Christian Ferrazino (AG)
Magdalena Filipowski (AG)
Pierre Froidevaux (R)
Luc Gilly (AG)
Alexandra Gobet (S)
Gilles Godinat (AG)
Mireille Gossauer-Zurcher (S)
Marianne Grobet-Wellner (S)
Christian Grobet (AG)
Dominique Hausser (S)
David Hiler (Ve)
Antonio Hodgers (Ve)
Georges Krebs (Ve)
Louiza Mottaz (Ve)
Chaïm Nissim (Ve)
Rémy Pagani (AG)
Jean-Pierre Restellini (Ve)
Elisabeth Reusse-Decrey (S)
Albert Rodrik (S)
Martine Ruchat (AG)
Christine Sayegh (S)
Françoise Schenk-Gottret (S)
Walter Spinucci (R)
Pierre Vanek (AG)
Alberto Velasco (S)
Ont voté oui (29) :
Bernard Annen (L)
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Luc Barthassat (DC)
Jacques Béné (L)
Janine Berberat (L)
Claude Blanc (DC)
Nicolas Brunschwig (L)
Juliette Buffat (L)
Gilles Desplanches (L)
Jean-Claude Dessuet (L)
Hubert Dethurens (DC)
Daniel Ducommun (R)
Henri Duvillard (DC)
Nelly Guichard (DC)
Janine Hagmann (L)
Michel Halpérin (L)
Yvonne Humbert (L)
René Koechlin (L)
Armand Lombard (L)
Pierre Marti (DC)
Alain-Dominique Mauris (L)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Barbara Polla (L)
Pierre-Louis Portier (DC)
Stéphanie Ruegsegger (DC)
Micheline Spoerri (L)
Olivier Vaucher (L)
Jean-Claude Vaudroz (DC)
Se sont abstenus (3) :
Dolorès Loly Bolay (AG)
Bernard Lescaze (R)
Salika Wenger (AG)
Etaient excusés à la séance (5) :
Christian de Saussure (L)
Marie-Thérèse Engelberts (DC)
Bénédict Fontanet (DC)
Philippe Glatz (DC)
Pierre Meyll (AG)
Etaient absents au moment du vote (16) :
Charles Beer (S)
Madeleine Bernasconi (R)
Pierre-Alain Cristin (S)
Marie-Françoise de Tassigny (R)
Pierre Ducrest (L)
René Ecuyer (AG)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Claude Haegi (L)
René Longet (S)
Jean-Louis Mory (R)
Jean-Marc Odier (R)
Danielle Oppliger (AG)
Véronique Pürro (S)
Louis Serex (R)
Myriam Sormanni (S)
Pierre-Pascal Visseur (R)
Présidence :
M. Jean Spielmann, président.
5. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Le président. J'annonce ici la motion :
Cette proposition de motion sera traitée demain, comme nous venons de le décider.
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de demandes d'interpellations;
Néant.
e) de questions écrites.
Néant.
Suite de la préconsultation
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Le parti socialiste accueille avec beaucoup de satisfaction ce projet de loi, non pas à cause de son contenu - soyons clairs, notre groupe a refusé de le signer - mais bien du fait même qu'il existe. En effet, à partir de ce projet, la discussion en commission sera ainsi permise sur la question des professions de la santé... (Brouhaha.)
Le président. Mesdames et Messieurs, je vous remercie de faire silence. Il est impossible de travailler dans un tel brouhaha.
Mme Elisabeth Reusse-Decrey. Ce projet est une réaction au faux pas, on ne peut l'appeler autrement, du Conseil d'Etat, qui a déposé un projet de loi interdisant la pratique d'un certain nombre de professions de la santé. Ce sera d'ailleurs un point qui sera évoqué dans un autre rapport figurant à notre ordre du jour.
Aujourd'hui les besoins en termes de santé ont évolué. S'il est indispensable de dispenser aux citoyens des techniques et des technologies avancées, ces derniers ont aussi besoin d'écoute, de retour à des valeurs plus profondes et à des approches plus naturelles. Et les pratiques des médecines douces sont aujourd'hui nécessaires dans notre société, dont le rythme est souvent insensé et qui a - personne ne peut le nier - des incidences importantes sur la santé. Est-ce à dire qu'il faut tout permettre ? Certes non. Il y a en effet des dangers, en cela le Conseil d'Etat a raison. La blouse blanche permet d'avoir beaucoup d'influence sur un certain nombre de personnes, surtout si leur santé est affaiblie, et il est important de poser des garde-fous.
En l'occurrence, ce projet de loi sera l'occasion d'élargir la loi sur les professions de la santé, tout en fixant des garde-fous pour éviter les risques de récupération sectaire. D'ores et déjà, le parti socialiste annonce qu'il renverra ce projet en commission pour aborder cette question extrêmement importante, mais qu'il le refusera.
M. Gilles Godinat (AdG). Les préopinants ont déjà développé les arguments essentiels à l'appui de ce projet et je serai donc bref.
Tout le monde a relevé que les pratiques dans le domaine de la santé avaient beaucoup évolué ces dernières années. La population a adopté ces nouvelles pratiques et les soutient largement, les caisses maladie pour la plupart les reconnaissent, et certains praticiens, afin d'éviter d'être assimilés à des sectes, nous demandent de légiférer. Notre devoir de politiciens, notre devoir politique dans cette enceinte est bien entendu d'entrer en matière lorsque des catégories de professionnels revendiquent ainsi une reconnaissance. Pour notre part, nous avons donc accepté d'entrer en matière.
Sur le fond, ce projet de loi soulève effectivement plusieurs questions que nous voulons débattre en commission, notamment celle de distinguer de nouvelles techniques et de nouvelles professions qui voudraient être reconnues dans le domaine de la santé. Nous aurons probablement à définir ces nouvelles professions et, le cas échéant, à rappeler les codes nécessaires dans le domaine de la déontologie, de l'éthique professionnelle en matière de nouvelles techniques. Les critères devront donc viser à mieux définir des pratiques qui, pour certaines, n'ont pas encore de reconnaissance au niveau national, ni même cantonal. Nous veillerons à ce que ce travail soit fait consciencieusement.
Pour notre part, nous tenons à élargir effectivement les pratiques actuelles, à reconnaître de nouvelles pratiques et de nouvelles identités professionnelles dans ce domaine et nous souhaitons vivement pouvoir travailler sur cette question, afin d'enrichir nos pratiques professionnelles.
Mme Nelly Guichard (PDC). Bien que je sois moi-même tout à fait favorable à la naturopathie et que je respecte, d'une manière générale, le travail effectué, je trouve que la procédure utilisée - dépôt d'un projet de loi - est peu adéquate. Tout cela est trop détaillé pour figurer dans une loi. Il me semble que cela aurait plutôt sa place dans un règlement et, même avec un texte aussi abondant, je doute que nous ayons fait le tour du sujet.
Je crains fort que nous nous trouvions au centre d'une tourmente entre ceux qui auront réussi à se faire inscrire dans la loi et tous ceux - et ils seront nombreux - qui se sentiront exclus. Mes craintes sont les mêmes en ce qui concerne les médicaments et autres potions plus ou moins magiques, qui font inévitablement partie du traitement.
Il est vrai que le projet de loi sur les professions médicales dont on parlera plus tard est pernicieux par certains de ses articles. Il rend carrément illégal les soins en médecine parallèle ou, comme mes préopinants l'ont dit, en médecine douce. Je réprouve également totalement cette position excessive. En l'état, cependant, je ne comprends pas très bien pourquoi mes collègues n'ont pas choisi de proposer plutôt des amendements à la loi qui est devant la commission de la santé.
Le problème des sectes auquel on a voulu pallier par le projet de loi sur les professions médicales est un problème en soi, un vrai problème dans certains cercles des professions de la santé en général. Il n'y a donc aucune raison de faire preuve d'ostracisme à l'égard des naturopathes en particulier. On peut aussi se demander si ce projet de loi est en accord avec les directives de la LAMal, sans quoi il n'aurait pas beaucoup de sens.
Quoi qu'il en soit, comme il a déjà été dit, il a le mérite de mettre le sujet sur la table ; la commission de la santé aura de quoi s'occuper durant quelques longues séances et elle aura tout loisir de prendre connaissance d'une correspondance aussi abondante que contradictoire, pour traiter cette problématique délicate et complexe.
Ce projet est renvoyé à la commission de la santé.
La commission a consacré 8 séances entre le 8 janvier 1998 et le 11 mars 1999 au traitement du projet de loi du Conseil d'Etat concernant la Chambre de conciliation et d'arbitrage. Déposé à la chancellerie le 19 février 1997, ce travail était devenu prioritaire depuis novembre 1998, date à laquelle le Tribunal fédéral a rendu un arrêt rendant caduques certaines décisions de l'actuel Office cantonal de conciliation, par défaut de base légale.
Sous l'éminente présidence de Mme Fabienne Bugnon et de MM. Michel Balestra et Pierre-François Unger, la commission a fait diligence pour améliorer au plus vite les compétences de cette juridiction. Elle s'est entourée des éclaircissements de M. le président Carlo Lamprecht, de M. Christian Goumaz, directeur des affaires juridiques au DEEE et de la haute compétence de M. le professeur Gabriel Aubert. Nous avons procédé, par ailleurs, à l'audition de MM. les juges Demeule et Weber, de M. l'ambassadeur Gyger et de son conseiller juridique, M. Perez, ainsi que des représentants de la CGAS, de l'UAPG et de la Commission paritaire genevoise.
Le rapporteur s'est appuyé sur le travail précis et méthodique de nos procès-verbalistes Mmes Pauline Schaefer et Eliane Monnin ainsi queM. Begoin à qui il adresse toute sa reconnaissance.
1. Les enjeux de la réforme
L'Office cantonal de conciliation est en place depuis 1918 et a donné globalement satisfaction. Il est saisi lors de conflits collectifs du travail et a essentiellement pour vocation d'amener les parties en présence à conclure un arrangement à l'amiable. A titre exceptionnel et à la demande expresse de toutes les parties, il peut toutefois se transformer en tribunal arbitral et rendre alors une décision à caractère obligatoire. Il joue également un rôle d'assistance en matière de conclusion de conventions collectives de travail et était - jusqu'à la remise en cause récente de cette compétence par le Tribunal fédéral (ci-après le TF) - l'autorité cantonale chargée d'édicter pour le canton de Genève les contrats types de travail.
Son travail et la difficulté de sa tâche se sont accrus dernièrement selon la rigueur de notre temps. La récente dégradation du climat économique a entraîné d'inévitables tensions dans le monde du travail rendant indispensable l'adaptation des instruments capables de les prévenir ou, si nécessaire, de les régler. L'enjeu de cette réforme peut se résumer par la légendaire formule : la paix du travail !
Cet enjeu est si important pour l'ensemble de nos citoyens qu'il a largement dépassé les habituels clivages politiques. La commission a donc travaillé dans la sérénité et dans un esprit parfaitement constructif. Tous les milieux, et en particulier les partenaires sociaux, ont donc oeuvré afin de conduire nos travaux législatifs en élaborant un projet de loi, certes consensuel, mais d'abord efficace.
La loi et le règlement régissant l'Office cantonal de conciliation appelaient impérativement la correction de quelques défauts :
Le régime légal actuel dépend tout d'abord d'une loi provisoire de deux articles remontant au 21 septembre 1918. Il manque ainsi une base légale formelle et durable. Ainsi, à l'occasion d'un récent conflit dans la branche de la carrosserie, l'Office cantonal de conciliation et d'arbitrage du canton de Genève a édicté un contrat-type pour l'ensemble de la profession. L'Union genevoise des carrossiers a recouru au Tribunal fédéral, qui a cassé la décision de l'Office.
Dans ses considérants, le Tribunal fédéral a notamment relevé que cet office n'avait pas la base légale nécessaire pour établir des contrats-types, le législateur d'alors ne lui ayant accordé formellement que la compétence de régler les différends à l'amiable.
En outre, compte tenu de l'entrée en vigueur, le 1er juillet 1996, de la loi fédérale sur l'égalité, et du fait que le Conseil d'Etat a confié à l'Office cantonal de conciliation le soin de gérer les litiges relatifs aux conflits collectifs de travail découlant de l'application de cette loi, de nouvelles compétences devaient aussi être précisées dans la loi lors de la réforme de cette juridiction.
Une proposition de changement d'appellation devenait également souhaitable, car le nom d'office pouvait être assimilé par certains de nos justiciables à une entité administrative. Le nouveau nom de Chambre des relations collectives de travail devrait permettre d'éviter une telle confusion.
2. Auditions
M. Pierre-Yves Demeule, juge à la Cour de justice, président suppléant de l'Office cantonal de conciliation (janvier 98)
M. le juge Demeule a été auditionné en janvier 1998 alors que nous traitions conjointement ce projet de loi avec la révision de la loi sur les prud'hommes. Il nous a rappelé que ce projet de loi devenait indispensable, cette juridiction ne disposant que d'un règlement, rendant sa base légale si légère qu'elle était alors attaquée au niveau du Tribunal fédéral.
Pour lui, le projet de loi n'est en réalité que la légalisation du règlement actuel, notamment dans sa spécificité de rédiger des contrats-types. C'est aussi le cas de la procédure arbitrale, qui n'est d'ailleurs presque jamais utilisée.
La faculté unilatérale de désigner un médiateur ne se retrouve pas dans le règlement, mais il s'agit d'une pratique de l'Office. Ce ne serait ainsi qu'une légalisation de la pratique.
La possibilité de communiquer aux médias fut un problème déjà rencontré dans le cadre de la révision de la législation concernant le Conseil supérieur de la magistrature. Certains magistrats veulent rectifier des inexactitudes parues dans la presse, ce qui contrevient au principe du secret de fonction. En l'espèce, il ne serait pas inutile de réserver cette possibilité aux magistrats.
Quant à l'abstention de toutes mesures de représailles, il estime que cette nouvelle disposition est utile pour un organe de conciliation. Les énumérations ne sont que des exemples; elles ne sont pas exhaustives.
Les représentants de la CGAS : Mmes Sylvie Cristina-Reichlin, Julie Andre et MM. Georges Tissot et René-Simon Meyer (janvier 98)
Les représentants de la CGAS soutiennent ce projet de loi. Ils souhaitent néanmoins que le projet de loi puisse lever toute ambiguïté entre la CRCT et la juridiction des prud'hommes, afin d'éviter tout risque de manoeuvres dilatoires entre les deux instances. Ils insistent sur la force obligatoire qui doit être donnée aux recommandations en demandant qu'il soit précisé qu'elles soient faites par écrit.
Quant à l'interdiction de la publicité, ils estiment que c'est souvent le seul moyen d'agir des syndicats. Par exemple, lorsque le délai de licenciement court pendant le délai de procédure, cela pose un grave problème ; c'est pourquoi la CGAS souhaite que les mesures prononcées avant le dépôt de la requête devant la CRCT soient suspendues pendant la durée de la conciliation, laquelle peut durer jusqu'à une année.
Ils estiment aussi qu'il est disproportionné de traiter dans le même alinéa de la publicité d'une part et des boycotts d'autre part. En effet, il s'agit de problèmes très différents. La compatibilité d'une telle disposition à la Convention européenne des droits de l'homme ne leur paraît d'autre part pas établie.
Ils recommandent la gratuité de la procédure.
Ils déplorent le fait qu'il n'ait pas été fait mention de moyens d'instruction, tels les expertises.
Quant au caractère obligatoire de la conciliation, cette caractéristique réjouit les syndicats. En effet ceux-ci constatent que maintenant - contrairement à autrefois - l'Etat a un rôle à jouer. De plus en plus, les organisations patronales sont absentes, voire inexistantes : les syndicats n'ont ainsi pas d'interlocuteur officiel pour faire valoir les prétentions des employés.
Les représentants de l'UAPG : Mme Béatrice Roetheli-Mariotti et MM. Claudio Rollini et Olivier Levy (janvier 98)
L'UAPG est l'organisme faîtier des patrons à Genève. Elle discute des politiques générales, mais ne négocie pas d'accords. Elle se dit favorable au dialogue et au partenariat social, branche par branche, même si les discussions impliquent parfois des conflits. L'UAPG est susceptible d'intervenir à ce stade. Ses représentants émettent les plus grandes réserves vis-à-vis de ce projet de loi, n'ayant pas été consultés par le Conseil d'Etat.
Ils rappellent par ailleurs qu'une convention collective de travail est fondée sur la liberté contractuelle. Cette dernière s'applique ainsi, non seulement à l'objet du contrat, mais aussi au choix même de conclure ou non le contrat.
Ils estiment qu'aujourd'hui, l'office intervient très bien. Dès lors, il ne faut pas changer son rôle. En effet, l'office a l'avantage de connaître une procédure souple et flexible. Il a aussi l'avantage de constituer un médiateur, et non de revêtir le rôle de celui qui prend des décisions.
Il leur apparaît illusoire de forcer les partenaires sociaux qui ne le souhaitent pas, car le dialogue risque d'être encore plus difficile après.
Contrairement au règlement actuel, le projet de loi prévoit la suppression de la différence de traitement selon la catégorie professionnelle. L'UAPG s'oppose à cet aspect du projet de loi, qui permettrait à l'office d'intervenir au niveau faîtier ; or, un organisme public n'a pas sa place dans des rapports de droit privé. La Suisse a été la première à instaurer des organismes paritaires. La solution préconisée introduirait un agent davantage perturbateur que facilitant la discussion.
Le Code des obligations règle la possibilité d'édicter des contrats types de travail. A part Genève, tous les autres cantons confient la rédaction des contrats-types au gouvernement ou au Parlement. Un recours de droit public concernant une affaire genevoise est d'ailleurs pendant en ce moment sur ce point : peut-on confier cette tâche à un organisme de l'Etat inférieur au gouvernement ? Si le Tribunal fédéral devait remettre en cause la compétence de l'office, c'est l'existence-même de ce dernier qui serait remise en cause (ndlr : cette audition s'est déroulée avant que le Tribunal fédéral ne rende son arrêt sur cet objet le 30 novembre 1998).
Aujourd'hui, l'arbitrage est subsidiaire à la conciliation. Le projet de loi met ces deux méthodes au même niveau. L'UAPG est favorable au maintien de la subsidiarité.
Une convention collective n'est en général pas étendue. Il faut veiller à son respect. Tout différend devrait être réglé par les partenaires sociaux, et non par un intervenant extérieur. Dès lors, l'UAPG s'oppose à ce qu'une décision puisse avoir valeur de jugement. En effet, la solution du projet de loi risque de déresponsabiliser les parties et d'entraver le dialogue social. De même, ils s'opposent à ce que le Conseil d'Etat impose la nomination d'un médiateur, contre la volonté des parties. Les deux parties doivent donner leur accord.
Le projet de loi inverse les rôles actuels. Une nuance de taille est à relever : si la Chambre de conciliation est dotée d'un pouvoir de pression sur les partenaires d'accepter l'arbitrage - éventuellement même contre la volonté des parties - on risque de provoquer un recours, ce qui impliquerait un manque de crédit du partenariat.
A quel titre la Chambre pourrait-elle communiquer des informations aux médias ? Il est possible que cette communication se fasse en désaccord avec l'une des parties, alors même que ces dernières n'ont pas le droit de parler. Enfin, la communication d'un conflit à un média risque davantage de l'attiser que de le résoudre.
L'UAPG est également favorable au maintien de la gratuité, sous réserve d'une action téméraire. Si des frais devaient être introduits, il faudrait qu'ils le soient à égalité pour chacun. En effet, l'idée d'une condamnation à payer à l'endroit du « perdant » est en contradiction avec le principe du partenariat.
En conclusion, l'UAPG se dit opposée à l'existence d'une Chambre qui ne pourrait rendre de bons services ; elle tient à ce que la procédure demeure simplie et à ce que la Chambre agisse en tant qu'instance neutre, et non en tant qu'instance judiciaire ou quasi-judiciaire.
M. Pierre-Christian Weber, juge à la Cour de justice, président de l'Office cantonal de conciliation (janvier 99)
M. le juge Weber a été associé très étroitement à l'élaboration de ce projet de loi qu'il avait appelé de ses voeux dès 1991.
La base légale actuellement déficiente
Il souligne que le Tribunal federal a mis entre-temps en exergue dans son arrêt du 30 novembre 1998, le fait que les contrats-types édictés par les cantons ne sont pas de simples actes d'exécution, mais constituent un acte de droit privé cantonal. Il nous rend aussi attentifs au fait que le Tribunal fédéral a aussi contesté l'opinion émise par le Conseil d'Etat selon laquelle la compétence instituée par le Règlement du 25 novembre 1955 découlerait de la loi genevoise du 21 septembre 1918. Il démontre le caractère provisoire de la loi genevoise puisqu'il est dit à son article 2 que « L'application de la loi du 26 mars 1904 sur les salaires et conflits est suspendue jusqu'au moment où le Grand Conseil édictera une loi créant un office de conciliation ». Or, le provisoire dure maintenant depuis plus de 80 ans.
Dans ces circonstances, le renvoi de la loi genevoise à la loi fédérale du 18 juin 1914 sur le travail dans les fabriques - qui impose aux cantons l'obligation de créer des offices de conciliation - ne suffit pas pour que le Conseil d'Etat délègue en sus, et sans habilitation formelle du législateur, à l'Office cantonal de conciliation le pouvoir d'édicter des contrats-types de travail. Il le peut d'autant moins que la loi genevoise est prévue comme réglementation provisoire et qu'elle s'appuie sur un arrêté du Conseil fédéral de 1918, édicté sur la base de pleins pouvoirs qui ont pris fin depuis longtemps. Le Tribunal fédéral conclut d'ailleurs son arrêt comme suit : « Sur un point aussi essentiel que la compétence pour édicter un contrat-type, il importe donc que l'autorité compétente soit désignée dans une loi, ou à tout le moins que la loi permette au Conseil d'Etat de désigner l'autorité compétente » .
Ses remarques générales sur cette juridiction
M. le juge évoque ensuite les difficultés rencontrées dans son travail de président de cette juridiction, s'estimant plus apte à faire appliquer le droit qu'à en édicter ses normes. En effet, édicter des contrats-types est un exercice difficile qui suppose un contenu politique, notamment en raison des négociations avec les partenaires sociaux. L'Office de conciliation est parvenu à le faire sans trop de peine en cas d'unanimité et en conciliation. Par contre, des difficultés sont apparues lorsqu'un texte a dû être promulgué sur l'arbitrage du seul président dans des affaires sans véritable consensus entre les assesseurs. Il souhaiterait dès lors que ce soit le Conseil d'Etat qui soit compétent pour édicter les contrats-types, comme dans de nombreux cantons.
Par ailleurs, l'Office de conciliation a eu des difficultés, par le passé, à faire participer des personnes récalcitrantes à la procédure de conciliation, puis le cas échéant à faire respecter l'accord intervenu. En particulier, il n'est pas à même d'infliger des amendes, faute, là encore, de base légale formelle.
Quant au projet de loi lui-même, il nous fait part de ses remarques en demandant de prévoir davantage de suppléants aux quatre juges assesseurs, ceci en raison des démissions et des règles de récusation. Il souhaite aussi que les procès-verbaux soient remis aux parties.
Pour expliciter le travail accompli par l'office en matière de conflits collectifs, M. Weber souligne que ce dernier peut établir des recommandations à l'employeur dans le cadre de certaines situations. Il procède aussi, à la demande des parties, à des arbitrages relativement nombreux, dont certains ont mis en cause un Etat étranger et ont été particulièrement coûteux. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle il estime qu'il devrait être possible de déroger à la gratuité de la procédure dans de tels cas.
On peut d'ailleurs relever deux types de problèmes fondamentaux : le non-respect des conventions collectives (ci-après CCT), voire leur absence.
La première hypothèse n'est malheureusement que trop fréquente dans le contexte économique actuel. Le non-respect des conventions se fait au détriment tant des employeurs que des employés respectueux de la branche concernée en créant une distorsion de concurrence en faveur d'entreprises pratiquant la sous-enchère salariale. L'Etat ne peut pénaliser ces dernières que lors de l'attribution des marchés publics ou de l'engagement de personnel étranger. L'action de l'Office lors de conflits est, elle aussi, limitée puisqu'il doit se contenter actuellement de tenter la conciliation et ne peut notamment rendre un jugement par la voie de l'arbitrage qu'en cas d'accord entre les parties.
La seconde hypothèse concerne les branches d'activité dépourvues de toute convention. C'est notamment le cas de la domesticité ou des secrétaires. L'office peut alors imposer par voie normative une contrat type de travail, discuté avec les partenaires sociaux. Le juge Weber relève toutefois que même si des règles sont prévues dans un contrat type, elles ne sont pas impératives en regard du droit fédéral, de telle sorte qu'il n'y a pas de moyen d'empêcher l'employeur d'y déroger par un contrat individuel de travail. A cela, un commissaire a rappelé que les corporations organisées ont des structures où les employeurs conviennent avec les syndicats de salaires minimums par le biais de conventions collectives de travail et que la situation qui a prévalu dans la carrosserie doit être considérée comme exceptionnelle, et non comme la règle.
M. l'ambassadeur Gyger, représentant permanent de la Suisse auprès des Organisations internationales, à Genève et de M. Amadeo Perez, juriste (janvier 99)
Bien qu'il s'agisse d'un problème relevant de la compétence cantonale et qu'il ne tienne en aucun cas à interférer, M. Gyger souhaite apporter le point de vue du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE). Après avoir rappelé, avec force chiffres, le rayonnement économique de la Genève internationale, il relève des aspects plus sombres dans le contexte des conditions de travail du personnel de maison et, plus particulièrement, du règlement des conditions de travail dans cette branche.
La domesticité des fonctionnaires internationaux est soumise à des directives fédérales
Soucieux du respect et de la dignité des personnes et confrontés à l'aspect pluriculturel que revêt cette problématique, le DFAE, la Mission suisse et les services compétents de l'Administration fédérale ont rédigé des directives, entrées en vigueur le 1er mars 1998, sur l'engagement des domestiques privés par les ambassades, les missions permanentes, les représentations consulaires et les fonctionnaires internationaux.
Il tient en outre à souligner que ces directives, ayant fait l'objet d'une concertation générale des milieux concernés, ont apporté de nettes améliorations, tant au niveau des conditions générales de travail qu'en matière de protection sociale. L'apport central que constitue l'entrée en vigueur de cette nouvelle réglementation réside, selon l'ambassadeur, dans l'élaboration d'une situation juridique claire concernant les droits et les obligations des parties en cause. Ces directives sont, de surcroît, en accord avec la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques et consulaires.
Le bien-fondé de cet outil juridique est en outre renforcé à Genève par l'existence, depuis 1995, du Bureau de l'amiable compositeur présidé parMe Jacques Vernet. Cette institution a pour but de régler les litiges de travail. Ces structures permettent, de l'avis du représentant de la Mission, d'affirmer que cette problématique jouit actuellement d'une législation et d'une institution adéquates.
Cela étant, et dans le cadre du projet de loi visant à instituer une Chambre des relations collectives de travail, M. Gyger entend rendre attentive la commission à un certain nombre de difficultés d'application des contrats types de travail. Selon lui, la législation que l'on prépare doit inclure les directives fédérales en la matière, faute de quoi, il y a risque de créer une grande confusion entre employés et employeurs.
Deux voies sont dès lors envisageables. L'une consisterait à reprendre le droit existant et l'institution du Bureau de l'amiable compositeur dans un contrat type. Cette solution soulève toutefois, d'après M. Gyger, d'épineuses questions si ce droit doit être renégocié, dans la mesure où il déboucherait sur plusieurs années de travail. La seconde préconiserait la modification de l'art. 2 du projet de loi, en introduisant une disposition spécifique, dont la teneur serait :
« Sont exclues de ses compétences, les employeurs ressortissants étrangers qui bénéficient de privilèges et immunités, conformément aux règles du droit international public ainsi que les employés ressortissants étrangers en carte de légitimation du Département fédéral des affaires étrangères qui sont soumis aux directives du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) sur l'engagement des domestiques privés ».
C'est cette deuxième proposition qui lui apparaît comme la plus réaliste. Des directives fédérales contrôlées par l'amiable compositeur permettraient mieux qu'un contrat-type cantonal de tenir compte des avantages comme de tous les aspects sociaux et culturels du milieu diplomatique évoluant à Genève.
La commission lui a objecté que le droit fédéral (art. 359 CO) oblige les cantons à édicter un contrat-type de travail pour le personnel domestique, et qu'il importe par conséquent de tenir compte, le cas échéant, de la spécificité des milieux internationaux dans l'élaboration d'un tel contrat-type et non au travers du projet de loi actuellement discuté qui a pour vocation d'établir les règles générales d'organisation et les compétences d'une juridiction.
Eviter la compétition de différentes législations
Pour M. Amadeo Perez, conseiller auprès de la Mission permanente de la Suisse près les Organisations internationales à Genève, les employeurs et employés en carte de légitimation ne sont pas subordonnés au droit ordinaire. Pour jouir d'un système complet, ces personnes sont dès lors soumises à des directives. Au niveau du DFAE, ce que stipule le CO n'est pas incompatible avec la Convention de Vienne. Il n'y aurait pas pire situation pour les employés d'ambassade que de se trouver devant un conflit juridique entre différents droits compétitifs, celui relevant du droit cantonal, celui dépendant de directives fédérales ou encore celui découlant des Conventions de Vienne.
Or, le Conseil d'Etat, en créant l'amiable compositeur, a déjà pu résoudre une soixantaine de cas. Par contre, le Tribunal des prud'hommes s'est révélé sans efficacité réelle pour juger les conflits du personnel diplomatique. En effet, la représentativité des fonctionnaires internationaux n'existe pas dans cette juridiction, ne serait-ce qu'en raison du problème de la nationalité. Une condamnation de la part de cet organisme n'est donc pas exécutable. Seule une pression politique produit certains effets. Cette pression se fait notamment par le biais du Comité diplomatique qui, lui, est représentatif. C'est d'ailleurs lui qui est chargé de transmettre à tous ses adhérents, avant même leur arrivée à Genève, les directives fédérales contenant notamment un modèle de contrat de travail pour l'engagement de domestiques privés.
Pour l'ambassadeur, le maintien du droit existant fait trois gagnants : l'employé, auquel on garantit des conditions de travail dans le respect et la dignité ; l'employeur qui évolue dans une situation juridique claire ; la Genève internationale, et, partant, Genève tout court, si tous les protagonistes travaillent ensemble pour les faire respecter. Genève pourrait ainsi servir d'exemple en la matière.
Audition de M. Roger Maillart, Commission paritaire genevoise, M. Jan Doret, SIB, M. Pasquale Reale, SINA (janvier 99)
Remarques préliminaires
Les représentants de la Commission paritaire rappellent aux commissaires l'urgence de ce projet de loi dans le climat économique et social actuel. Le non-respect des conventions collectives de travail (ci-après CCT), notamment dans le gros-oeuvre comme aussi dans le second, est un mécanisme de concurrence déloyale qui pourrait aller rapidement en s'aggravant si le vide juridique actuel n'était pas corrigé dans les meilleurs délais.
Ils émettent aussi de sérieuses réserves quant à certaines dispositions du projet de loi. Ils assistent, depuis quelques années, à une nouvelle tendance de l'Office cantonal de conciliation, renforcée d'ailleurs par ce projet de loi, visant à considérer comme applicables les dispositions du concordat intercantonal sur l'arbitrage lorsque l'office statue comme tribunal arbitral. Or, la sentence rendue par cet office devrait être exécutoire en évitant toute référence au concordat afin de simplifier la procédure et de ne permettre ainsi qu'un recours, celui au Tribunal fédéral. Le maintien de cette disposition ne pourrait poursuivre qu'un but : la lourdeur administrative et le ralentissement des procédures en ouvrant d'autres voies possibles de recours.
Faire appliquer les conventions collectives de travail (CCT)
A la question d'un commissaire souhaitant qu'en cas d'absence de conciliation, la Chambre tranche à la manière du Tribunal des baux et loyers ou encore de celui des prud'hommes, les représentants de la commission paritaire rendent les commissaires attentifs au fait qu'il y a plusieurs types de causes débattues devant cette juridiction. Il existe des situations où il faut absolument un accord commun pour aller jusqu'à l'arbitrage. Comme il existe des situations inverses, notamment lorsqu'une entreprise, soumise à la convention, est en infraction. On ne peut dès lors s'assujettir à son bon vouloir pour rendre le droit. C'est pourquoi des dispositions contraignantes sont aussi souhaitables. La solution actuelle est de recourir en commun aux prud'hommes, mais cette procédure est longue et lourde (deux instances cantonales puis le Tribunal fédéral).
Pour les entreprises soumises en droit aux CCT, il serait bon que la convention elle-même fasse référence à la compétence de la future Chambre des relations collectives de travail en cas de conflits collectifs. Cela lèverait le dernier doute juridique.
Nomination de la présidence de cette juridiction
Un commissaire a rappelé qu'« on ne se bouscule pas au portillon », lorsqu'il s'agit de faire acte de candidature à la présidence de cette juridiction. La Commission paritaire a soutenu alors le choix du président par le Grand Conseil, à condition que la loi précise les conditions préalables nécessaires à cette charge.
3. Discussion
La nécessité de cette nouvelle loi n'a fait aucun doute pour l'ensemble des commissaires au vu de l'exposé des motifs du projet de loi, de l'arrêt du Tribunal fédéral du 30 novembre 1998 et des auditions précitées. De rappeler aussi que les cantons ont l'obligation, en vertu de la loi fédérale sur les fabriques, d'instituer un office de conciliation pour traiter les litiges collectifs, tout en ayant la possibilité d'étendre les compétences de cet office à d'autres entreprises que les fabriques au sens strict.
Nos débats fondamentaux ont porté initialement sur la portée des actes de la future Chambre des relations collectives de travail (ci-après CRCT), entraînant nos réflexions autour du cadre législatif nécessaire pour atteindre les objectifs.
La CRCT, instance chargée d'édicter les contrats-types de travail
Le président actuel de l'Office de conciliation et d'arbitrage a témoigné de la facilité qu'il y avait à dire le droit, mais que la tâche devenait nettement plus ardue lorsqu'il s'agissait de concilier en édictant des normes par un contrat-type de travail. Il a alors émis le souhait que le pouvoir politique soit plus présent.
A cet égard, il a souligné que le Tribunal fédéral avait rappelé dans ses considérants que la compétence d'édicter des contrats-types incombe dans nombre de cantons au pouvoir exécutif. A cette remarque, le département nous a indiqué préférer s'en tenir au système actuel, à savoir que la CRCT ait la charge d'édicter les contrats-types de travail. Par ailleurs, à l'exception du personnel agricole et de maison qui sont les deux cas où les cantons ont l'obligation de prévoir un contrat-type, c'est dans le cadre d'un conflit de travail que le besoin d'une réglementation va émerger.
A son sens, l'organe qui participe à la gestion du conflit, en sa qualité d'autorité de conciliation, est également mieux à même que le Conseil d'Etat de se faire la meilleure opinion possible sur l'ensemble des données du conflit, et d'y apporter une solution satisfaisante. Edicter un contrat-type est d'ailleurs une activité qui se rapproche de la tâche d'émettre une recommandation dans un conflit collectif - ou de rendre une sentence arbitrale - fonctions qui sont expressément attribuées à la CRCT dans le cadre du projet de loi. D'autre part, en raison de sa composition, la CRCT est paritaire. Or il est opportun, dans toute la mesure du possible, de laisser au monde du travail le soin d'établir les règles qui le concernent directement et de ne pas faire intervenir dans ce domaine le monde politique si cela n'est pas absolument nécessaire. De surcroît, il faut être conscient que le Conseil d'Etat ne rédigera pas lui-même les contrats types, se contentant de ratifier un projet préparé par l'administration, laquelle ne connaîtra, selon toute vraisemblance, pas aussi bien que la CRCT les données de la situation conflictuelle. Or un tel système - écartant de la décision les principaux concernés - serait sans doute plus insatisfaisant que celui qui prévaut actuellement.
La commission s'est rangée aux arguments du département, car en attribuant cette compétence en définitive à l'exécutif cantonal, le risque devenait trop grand que tous les justiciables demandent systématiquement au Conseil d'Etat de trancher les conflits collectifs, rendant inopérant le travail de la CRCT par une politisation de ces derniers. Lui réserver un rôle, à l'arrière-plan, de négociateur, est apparu à tous plus conforme à sa fonction. En effet, celui-ci a toute latitude d'entendre les parties ou de désigner éventuellement un médiateur jouant un rôle complémentaire pour apaiser les discordes tout en ne s'attribuant pas le rôle de légiférer dans ce domaine.
La CRCT, instance de jugement
En instaurant cette chambre comme instance de jugement, le législatif répond aux attentes des partenaires sociaux. Il s'agit, par ce truchement, de permettre aux partenaires sociaux d'intervenir, par exemple, lorsqu'un employeur viole une convention collective. La CRCT sera ainsi amenée, à la demande des parties à la convention collective, ou de l'une d'entre elles, à juger tout litige relatif à l'interprétation ou à l'application des CCT.
A ce titre, la chambre pourra aussi saisir des employeurs qui ne sont pas membres des organisations professionnelles, et ce dans le cadre de l'exécution commune au sens de l'art. 357 b CO des conventions collectives bénéficiant d'un arrêté d'extension. On assurera ainsi, par cette nouvelle compétence donnée à la CRCT, un meilleur respect des CCT, et ce dans l'intérêt bien compris de tous.
Sur la même lancée, il est apparu utile de donner également à la CRCT la compétence de juger en droit tous les litiges relatifs aux conditions de travail qui lui sont soumis par une organisation professionnelle lorsque le droit fédéral reconnaît à cette dernière la qualité pour agir. Il en va notamment ainsi, en vertu de la loi fédérale sur l'information et la consultation des travailleurs dans les entreprises, des litiges portant sur la violation des droits de participation dans les domaines de la sécurité au travail et de la protection de la santé, du transfert d'entreprises et des licenciements collectifs.
La CRCT, instance d'arbitrage
La chambre est également une instance d'arbitrage statuant, pour autant qu'il y ait accord entre toutes les parties en cause sur cette compétence, sur d'autres conflits collectifs (par exemple la modification d'une convention). Selon le professeur Aubert, l'application du concordat intercantonal sur l'arbitrage est le « grain de sable dans la machine » et il est impératif de rejeter la proposition du Conseil d'Etat en la matière. En effet, en sa qualité d'instance étatique, la CRCT est un tribunal arbitral public et n'est de ce fait pas soumis au concordat intercantonal, contrairement aux tribunaux arbitraux privés. Or le concordat est source de complications et de lenteurs. Ainsi, en cas d'application de ce dernier, la sentence de la Chambre devrait d'abord être rendue exécutoire par une décision du Tribunal de première instance ; en outre, elle serait attaquable devant la Cour de justice, puis devant le Tribunal fédéral. Pour qu'elle devienne définitive, il faudrait donc saisir trois instances supplémentaires. En revanche, s'il s'agit d'une sentence rendue par un tribunal arbitral public, elle est exécutoire sans décision préalable du Tribunal de première instance et n'est attaquable que pour arbitraire devant le Tribunal fédéral.
La présidence
Traditionnellement, notre système judiciaire attribue la présence de cette juridiction à un juge de la Cour de justice. Cette habitude, gage d'impartialité, s'est justifiée jusqu'à ce jour dans la mesure où c'est, en général, là que se trouvent les juges ayant le plus d'expérience.
A la proposition d'une nomination du président de la CRCT par le Grand Conseil, le professeur Aubert nous a rappelé que la situation est très différente selon les cantons et que le débat était purement politique et qu'il ne pouvait y apporter de solution technique.
S'il devait être choisi par le Grand Conseil, celui-ci devrait par contre définir au préalable les critères précis à la base de son choix.
Après en avoir longuement délibéré, la commission a opté pour une présidence désignée par le Parlement, afin notamment de donner à son titulaire une forte légitimité. D'autre part, tout en élargissant quelque peu le cercle de recrutement, la commission a souhaité conserver un niveau identique de compétence juridique et d'expérience. Il sera ainsi possible d'élire à ce poste, outre un juge à la Cour de justice comme actuellement, un juge au Tribunal administratif (qui est également une instance supérieure), d'anciens magistrats de ces mêmes juridictions, un professeur de droit à l'Université ou d'autres personnalités ayant des compétences équivalentes.
Une juridiction indépendante
Quelques commissaires se sont interrogés sur la nécessité de garder cette juridiction indépendante ou de la rattacher à la juridiction prud'homale.
La juridiction des prud'hommes ne s'avère pas le lieu adéquat. En effet, un conflit collectif est infiniment plus complexe et ne relève pas simplement de savoir quelles dispositions légales peuvent être appliquées. La résolution de tels conflits nécessite souvent des efforts de négociations importants auxquels les juges prud'hommes ne sont en général pas préparés. De surcroît, la procédure prud'homale avec ses trois instances (conciliation, Tribunal et Cour d'appel) est beaucoup trop longue pour gérer des conflits collectifs de façon efficace. Il faut rappeler à cet égard que la tension sociale peut être extrême à de telles occasions et qu'il convient par conséquent de pouvoir agir rapidement et par le biais d'une instance spécialisée.
En conclusion, la commission unanime a considéré que cette juridiction devait donc garder son indépendance.
4. Vote d'entrée en matière
A la suite de ce débat le vote d'entrée en matière est matière est acceptée à l'unanimité moins 1 abstention DC.
5. Commentaires article par article
Intitulé
Comme rappelé ci-dessus, la commission a attribué à la CRCT une compétence nouvelle par rapport au projet de loi présenté par le CE, consistant à être une véritable instance judiciaire chargée de trancher, par une décision ayant force obligatoire, toute une série de litiges collectifs, et ce en qualité d'autorité cantonale unique.
L'intitulé proposé par le Conseil d'Etat devenait par conséquent trop restrictif, raison pour laquelle la commission lui a préféré celui de Chambre des relations collectives de travail, titre qui lui paraît pour le surplus mieux exprimer le rôle confié à cette autorité.
Article 1 Constitution et tâches
Tant l'actuel règlement de l'Office cantonal de conciliation que le projet de loi déposé par le Conseil d'Etat prévoient quatre missions principales pour cette juridiction, à savoir :
être une instance de conciliation pour les litiges collectifs concernant les conditions de travail ;
favoriser la conclusion de conventions collectives de travail (art. 356 CO) ;
être l'autorité cantonale qui édicte les contrats-types de travail, conformément à l'article 359 CO ;
trancher, le cas échéant et à la demande des parties, des différends collectifs en qualité de tribunal arbitral.
La commission judiciaire a ajouté une cinquième compétence faisant de la CRCT une véritable instance juridictionnelle puisqu'elle aura la faculté de juger, en instance cantonale unique, un certain nombre de litiges collectifs ayant trait pour l'essentiel à l'interprétation et à l'application des conventions collectives de travail et d'autres domaines du droit du travail où les associations professionnelles se voient reconnaître la qualité d'agir personnellement en justice.
lettre a)
Cette lettre vise la première compétence de la CRCT consistant à prévenir et concilier, dans la mesure du possible, les différends d'ordre collectif concernant les conditions de travail.
La rédaction initiale du projet du Conseil d'Etat est apparue un peu compliquée, de telle sorte que la Commission judiciaire en a simplifié le texte à la forme, tout en en conservant le fond.
A titre d'exemples non exhaustifs on relèvera que la CRCT sera notamment compétente, en sa qualité d'autorité de conciliation, pour traiter des litiges entre :
un employeur et ses travailleurs,
un employeur et une ou plusieurs associations de travailleurs,
plusieurs employeurs ou associations d'employeurs et une ou plusieurs associations de travailleurs.
D'autre part, la commission a expressément prévu que la CRCT pourrait également être saisie en matière d'application de la loi fédérale sur l'égalité, pour autant bien évidemment qu'il s'agisse de conflits collectifs. Les conflits individuels resteront pour leur part de la compétence de la commission ad hoc instituée par la loi d'application de la loi fédérale sur l'égalité entre femme et homme en ce qui concerne la phase de conciliation, puis de la Juridiction des prud'hommes ou du Tribunal administratif, selon que le litige relève du droit privé ou du droit public.
La présente loi constituant aussi, pour partie, la loi cantonale d'application de la loi fédérale sur les fabriques du 18 juin 1914 (qui impose aux cantons d'établir des offices de conciliation), il a paru utile de préciser à cet endroit que la chambre remplit, entre autres, la fonction d'un tel office au sens de la loi précitée.
lettre b)
Le terme « susciter W a été préféré à celui de « provoquer », afin de mieux souligner le rôle incitatif attribué à la CRCT en matière de conclusion de conventions collectives de travail.
lettre c)
La commission est d'avis que les contrats-types doivent aussi pouvoir être proposés par des organisations syndicales ou patronales. C'est la raison d'un amendement au texte initial, consistant à préciser que la CRCT édicte les contrats-types de travail « d'office ou sur la proposition d'intéressés ». Il va cependant de soi que la chambre reste en tout état libre de suivre ou de ne pas suivre une proposition, de telle sorte qu'elle ne saurait dès lors être contrainte à édicter un contrat-type de travail, quand bien même la requête lui en aurait été formellement adressée par les intéressés.
Comme cela a été évoqué ci-dessus, la possibilité pour la chambre de se contenter de rédiger des contrats-types de travail, devant être ensuite formellement approuvés par le Conseil d'Etat pour déployer leurs effets, n'a pas été retenue. Il sied de noter que dans plusieurs cantons l'Office de conciliation édicte déjà des contrats-types. De surcroît, cette pratique favorise l'entente entre les partenaires sociaux et renforce la crédibilité de cette juridiction.
lettre d)
Il s'agit là de la compétence nouvelle que la commission se propose d'attribuer à la CRCT par rapport aux tâches actuellement dévolues à l'Office cantonal de conciliation. L'article 1 se limitant toutefois à énumérer les diverses compétences de la chambre, on s'est contenté d'indiquer ici que la CRCT juge les litiges, comme instance judiciaire unique, dans les limites fixées par la présente loi. C'est à l'article 9 que seront ainsi définis dans le détail les contours de cette nouvelle compétence.
lettre e)
Il a été précisé que la CRCT agit, cas échéant, comme tribunal arbitral public, et ce afin de distinguer clairement cette autorité des tribunaux arbitraux privés qui, eux, sont assujettis au respect du Concordat intercantonal sur l'arbitrage.
alinéa 2
Il convient ici d'affirmer clairement l'indépendance totale de la CRCT de l'administration, et par là du pouvoir exécutif. La chambre doit en effet être considérée comme une instance juridictionnelle, au même titre que n'importe quel autre tribunal du canton.
Article 2
Cette disposition a pour but de préciser que la compétence de la CRCT se conçoit de façon large s'agissant du cercle des entreprises concernées. Ainsi, le fait de ne pas être soumis à la loi fédérale sur le travail dans l'industrie, l'artisanat et le commerce du 13 mars 1964, ne permet pas d'échapper au pouvoir de la chambre.
Article 3 Composition
alinéa 1, lettre a)
La présidence de cette chambre est particulièrement délicate car son titulaire doit allier les qualités de juge à celles de négociateur.
De surcroît, dans son rôle d'instance juridictionnelle, il est aussi fondamental que la chambre puisse être considérée par le Tribunal fédéral comme un tribunal supérieur du canton, afin que le recours en réforme auprès de ce dernier soit ouvert contre les décisions de la CRCT. En effet, la loi fédérale d'organisation judiciaire précise que le recours en réforme n'est pas recevable si le tribunal cantonal, qui statue en instance unique, n'est pas considéré comme ayant le statut de tribunal supérieur du canton.
A cet égard, les critères de choix et le mode de désignation du président sont des éléments importants et il convient d'y prendre garde, faute de quoi le Tribunal fédéral pourrait exiger qu'une voie d'appel cantonale soit instaurée contre les décisions de la CRCT, avant qu'il puisse être valablement saisi par la voie du recours en réforme (qui seule permet - à l'inverse du recours de droit public - de revoir de façon complète l'application du droit fédéral). Il va de soi que si une telle éventualité devait se produire, c'est toute l'organisation de la chambre, conçue comme instance cantonale unique, qui serait remise en cause.
La commission a toutefois souhaité pouvoir élargir quelque peu le cercle de recrutement actuel, qui se limite aux seuls juges de la Cour de justice, cooptés par leurs pairs, en permettant d'élire à cette fonction, outre ces derniers (qui ont rang de juges cantonaux dans les autres cantons), des juges au Tribunal administratif (qui est dans l'organisation judiciaire genevoise une juridiction de rang comparable à la Cour de justice), d'anciens magistrats de ces mêmes juridictions, des professeurs de droit à l'Université ou des personnes ayant des qualifications équivalentes. De surcroît, en prévoyant l'élection du président par le Parlement, on renforce encore sa légitimité, ce qui va dans le sens des exigences du Tribunal fédéral en matière de reconnaissance du caractère supérieur d'une juridiction. Le recours au Grand Conseil pour le choix du président permet aussi aux partenaires sociaux de donner leur avis sur cette question importante, et cela dans le but d'éviter une possible désaffection de la CRCT, si le juge choisi ne satisfaisait pas les parties en cause. Il est en effet essentiel que l'élu fasse l'unanimité.
lettre b)
Par rapport au projet de loi du Conseil d'Etat, un nombre plus important de suppléants pour les juges assesseurs a été prévu, et ce afin de pouvoir faire face, sans trop de difficultés, aux remplacements nécessaires pour cause d'indisponibilité ou de récusation.
Article 4 Désignation du président et des membres
alinéa 1
D'emblée la commission a souhaité qu'un suppléant, répondant aux mêmes critères de compétence, soit nommé par notre Conseil en même temps que le président de la CRCT. Pour parer à toute éventualité, la commission a prévu en outre la possibilité d'une suppléance extraordinaire (c'est-à-dire en cas d'indisponibilité tant du président, que du suppléant dûment désigné par le Grand Conseil) par le biais des juges de la Cour de justice. Il importe en effet que la pérennité du fonctionnement de la CRCT soit assurée, et ce quels que soient les cas de figure envisagés.
alinéa 2
Hormis quelques modifications de vocabulaire destinées à assurer la cohésion de la présente loi avec la loi sur la juridiction des prud'hommes votée récemment par notre Grand Conseil (salariés au lieu de travailleurs et titulaires à la place de délégués), la modification essentielle a consisté à préciser que les juges assesseurs - qui sont choisis paritairement parmi les juges prud'hommes - doivent avoir l'expérience qui leur permet d'être éligibles à la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes. Il importe en effet d'offrir à la CRCT les meilleurs gages de compétence et cela permet de surcroît de renforcer le caractère d'autorité judiciaire supérieure conféré à la CRCT et qui a été évoqué ci-dessus à propos du choix de la présidence.
Article 5 Fin des fonctions
Cet article, de conception plus large que l'article 3, alinéa 3 du projet de loi initial du Conseil d'Etat, est destiné à le remplacer. Il vise à instaurer une symétrie complète entre les fonctions de juge assesseur de la chambre et de juge prud'homme. Les conditions d'éligibilité étant les mêmes, il se justifiait de prévoir le même parallèle s'agissant de la fin des fonctions. A titre exemplatif, il s'agit de viser par ce biais l'atteinte de la limite d'âge, le fait pour un juge salarié de se retrouver employeur ou l'inverse, le changement de domicile hors du canton, etc.
Article 6 Récusation
Sur proposition du département, la commission a jugé utile d'introduire un article spécifiant les causes de récusation et la façon de juger de telles demandes.
Cette disposition est calquée sur celle analogue figurant dans la loi sur la juridiction des prud'hommes, à l'exception de l'alinéa 6. En effet, compte tenu de l'élargissement des possibilités de choix pour la présidence de la CRCT, il a paru préférable de confier au Conseil supérieur de la magistrature le soin de juger les demandes de récusation dirigées simultanément contre tous les juges de la chambre ou une majorité d'entre eux.
Article 8 Instance de conciliation
alinéa 2
Le texte du projet de loi du Conseil d'Etat a été légèrement modifié quant à la forme, afin qu'il soit bien clair qu'en cas de conciliation le procès-verbal de l'audience signé par les parties, le président et le secrétaire déploie tous les effets d'un jugement définitif et exécutoire rendu par un tribunal du canton. De ce fait, il vaut notamment titre de mainlevée définitive au sens de l'article 80 de la loi sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP).
Article 9 Instance de jugement
Cette compétence est totalement nouvelle par rapport au rôle actuellement attribué à l'Office cantonal de conciliation.
alinéa 1
La chambre est tout d'abord compétente pour juger tout litige relatif à l'interprétation et à l'application d'une convention collective de travail à la demande des parties contractantes ou de l'une d'entre elles. Cet alinéa vise spécifiquement les conflits entre signataires de la CCT, qui sont la plupart du temps des associations professionnelles d'employeurs et des syndicats. Il n'est à cet égard pas nécessaire que les deux parties en conflit agréent à la compétence de la CRCT, la demande d'une seule d'entre elles suffisant.
alinéa 2
La chambre sera également compétente pour juger tous les litiges opposant les parties à une convention collective de travail à un employeur ou un travailleur, et ce dans le cadre de l'exécution commune prévue à l'article 357b CO.
Il conviendra pour ce faire que la convention collective ait expressément prévu que les parties contractantes ont la possibilité de veiller ensemble - le cas échéant par voie judiciaire - à son respect à l'égard des employeurs et/ou travailleurs liés. D'autre part, comme son nom l'indique (exécution commune), la CRCT ne sera valablement saisie que pour autant que les parties contractantes de la CCT agissent de concert. Enfin - et aux mêmes conditions - cette compétence sera également reconnue à l'encontre d'employeurs ou de travailleurs non liés par la CCT, pour autant que le champ d'application de cette dernière ait été dûment étendu par un arrêté du Conseil fédéral ou du Conseil d'Etat.
Cette disposition est particulièrement importante, car elle devrait permettre d'agir judiciairement de façon rapide à l'encontre d'employeurs ou de travailleurs récalcitrants, et ce afin d'assurer un respect aussi solide que possible des conventions collectives de travail qui sont un outil extrêmement précieux pour préserver, d'une part la paix sociale et pour empêcher, d'autre part, que s'installent entre des entreprises des procédés de concurrence déloyale par le biais du dumping social.
Il va cependant de soi que tous les litiges relatifs à l'application et à l'interprétation d'une CCT ne deviennent pas par ce biais de la compétence de la CRCT. La chambre ne peut en effet être saisie que par les parties à la CCT et la juridiction des prud'hommes reste compétente s'il s'agit d'un conflit individuel, c'est-à-dire d'une demande déposée par un individu. Organiser les compétences autrement reviendrait à priver les prud'hommes d'une grande partie de leurs compétences, et le justiciable du double degré de juridiction. La chambre serait vite surchargée et ne pourrait pas traiter avec célérité les véritables conflits collectifs. Par contre, il va de soi que la décision prise, le cas échéant, par la CRCT contre un employeur à la demande des partenaires sociaux aura des effets indirects sur les litiges opposant les travailleurs de l'entreprise concernée à ce même employeur, ne serait-ce que parce que les prud'hommes pourront s'appuyer sur la solution adoptée par la chambre; il est même à prévoir que le règlement du litige collectif permettra tout naturellement, par économie de procédure, de concilier les litiges individuels, l'issue judiciaire pouvant alors être prédite avec une certaine assurance.
alinéa 3
Poursuivant sur la même lancée, la commission a considéré qu'il pourrait également être opportun de confier à la CRCT le soin de juger en droit d'autres litiges collectifs. Il faut en effet savoir que dans le domaine du droit du travail, pris dans son sens large, les organisations professionnelles se voient accorder de plus en plus la possibilité d'agir elles-mêmes en justice pour faire reconnaître - le plus souvent par la voie de l'action en constatation de droit - la violation de diverses dispositions légales.
Il en va notamment ainsi, en vertu de l'article 10 de la loi fédérale sur l'information et la consultation des travailleurs dans les entreprises, dunon-respect des droits de participation dans les domaines de la sécurité au travail et de la protection de la santé, du transfert de l'entreprise (art. 333 et 333a CO), et des licenciements collectifs (art. 335d à 335g CO). Ces nouvelles facultés reconnues aux associations professionnelles risquent d'ailleurs de s'étendre dans un avenir proche puisque, dans le cadre des mesures d'accompagnement à la libre circulation des personnes, introduites par les accords bilatéraux entre la Suisse et l'Union européenne, il est prévu de conférer aux organisations professionnelles la faculté d'agir directement en justice pour constater la violation de la future loi sur les travailleurs détachés, ainsi que le non-respect des salaires minimaux obligatoires institués par contrat type de travail.
Il se justifie pleinement que de tels litiges, qui ont éminemment une caractéristique collective puisqu'ils sont conduits par les organisations professionnelles, soient du ressort de la CRCT et non du Tribunal des prud'hommes, comme c'est actuellement le cas. La chambre, comme l'a souhaité la Commission judiciaire, doit en effet devenir l'instance spécialisée des relations collectives de travail, et l'on gagne ainsi en rapidité par rapport à la procédure prud'homale, puisque l'on évite notamment le double degré de juridiction cantonale, la voie du recours en réforme au Tribunal fédéral étant bien évidemment sauve.
La commission a également choisi une formulation pour cet alinéa qui soit à la fois précise et en même temps suffisamment souple pour pouvoir s'adapter à l'évolution du droit fédéral qui donne de plus en plus de compétences aux partenaires sociaux. Précise, en ce sens que dans ce domaine seules des organisations professionnelles auront accès à la CRCT, car il est exclu que cette dernière traite de litiges individuels qui doivent rester, eux, de la seule compétence des tribunaux de prud'hommes. Précise encore, parce que bien évidemment seuls les litiges concernant les rapports de travail - et non n'importe quel litige soumis par une organisation professionnelle - pourront être soumis à la chambre. Souple enfin, au travers du renvoi au droit fédéral pour fixer les cas où une organisation professionnelle a - ou non - la qualité pour agir à titre personnel. On ne se borne ainsi pas à l'état du droit actuel, mais on permet à la CRCT de voir ses compétences évoluer automatiquement en fonction des nouvelles possibilités d'action que le législateur fédéral entendrait donner aux partenaires sociaux.
Ces nouvelles compétences de la chambre sont extrêmement précieuses, car il sera notamment possible aux organisations professionnelles de faire constater rapidement, par une décision judiciaire ayant force exécutoire, que, par exemple, les règles prévues par le code des obligations en matière d'information et de participation des travailleurs lors des licenciements collectifs n'ont pas été respectées. Ce constat n'aura certes, en raison des limites conférées au droit d'action judiciaire des organisations professionnelles (action en constatation de droit), pas d'effet direct sur les contrats individuels des travailleurs concernés par les licenciements collectifs. Il n'en demeure pas moins que la décision de la CRCT sera d'un poids considérable dans la négociation que les syndicats pourront entreprendre avec l'employeur, de même qu'elle facilitera grandement la résolution des litiges individuels par la juridiction des prud'hommes.
alinéa 4
Il est prévu que la chambre applique par analogie la procédure prévue par la loi sur la juridiction des prud'hommes, car cette procédure est bien connue tant des juges assesseurs que des parties qui seront amenées à saisir la CRCT. Il a par contre été prévu que la chambre serait habilitée, contrairement au Tribunal des prud'hommes, à prendre elle-même des mesures provisionnelles. Cela se justifie pleinement en raison, d'une part, de la nature des litiges - qui supposent de pouvoir, le cas échéant, agir avec une extrême rapidité - et, d'autre part, de la haute compétence voulue pour la CRCT, notamment au travers du choix de sa présidence.
alinéa 6
Les parties signataires de conventions collectives de travail ayant toujours la faculté de prévoir que leurs litiges seront soumis, non à la juridiction ordinaire, mais à un tribunal arbitral privé, il se justifiait de réserver expressément, à cet alinéa, cette possibilité.
Article 10 Instance d'arbitrage
Par rapport au projet de loi du Conseil d'Etat, le changement le plus notoire consiste à prévoir que la chambre statue comme tribunal arbitral public et que, de ce fait, le Concordat intercantonal sur l'arbitrage, du 27 mars 1969, ne lui est pas applicable.
L'accord de toutes les parties en présence sera indispensable pour que la CRCT soit habilitée à rendre une sentence arbitrale. Cet aspect volontaire de l'arbitrage se retrouve dans la détermination de la procédure applicable, puisque cette dernière sera déterminée par les parties elles-mêmes ou, à défaut d'accord, par le président. Il va cependant de soi que la compétence d'arbitrage de la CRCT est résiduelle puisqu'elle n'interviendra que lorsque la chambre ne sera pas habilitée, en vertu de l'article 9, à fonctionner comme instance de jugement.
Article 11 Huis clos
La commission a amendé le texte initial afin de préciser formellement que les débats devant la chambre devaient se faire à huis clos, lorsque celle-ci débattait en tant qu'instance de conciliation. Cette précision était rendue nécessaire par le fait que la mission de la CRCT a évolué au cours des débats, puisqu'elle devient organe de conciliation et de décision dans la nouvelle loi. Or, en vertu des garanties contenues notamment dans la Convention européenne des droits de l'lomme, il convient que, dans la stricte phase de jugement, les débats soient publics.
Article 12 Interdiction de médiatisation et de mesures de combat
Initialement la note marginale de cet article faisait référence aux mesures de représailles. La commission a considéré ce terme comme trop archaïque et lui a préféré celui de « mesures de combat » qui lui paraît d'ailleurs plus exact.
alinéa 1
La commission s'est d'abord accordée à mieux définir dans le temps de la portée de cette disposition pour l'ensemble des partenaires en conflit. La locution « pendant toute la durée de la procédure » figurant dans le texte du projet de loi du Conseil d'Etat pouvant apparaître comme légèrement imprécise, la commission lui a préféré les termes « jusqu'à la fin de la procédure de conciliation ». En d'autres termes cela signifie que dès que la procédure de conciliation est engagée, par exemple par le dépôt d'une requête auprès de la CRCT par une des parties en présence, et jusqu'à ce que la chambre constate formellement soit l'aboutissement de la conciliation, soit son échec, les mesures de combat et la médiatisation du litige doivent être considérées comme prohibées. Une telle disposition a pour vocation d'assurer un climat aussi paisible que possible à la procédure de conciliation et d'empêcher les parties de « jeter de l'huile sur le feu ». On peut d'ailleurs relever que l'article 28 du projet de nouvelle constitution fédérale va dans le même sens, puisqu'il ne considère la grève ou le lock-out comme licites qu'après l'épuisement de la voie de la conciliation.
Certains commissaires se sont déclarés surpris des anglicismes « lock out » et « boycott », mais une expression plus francophone n'a pas été retenue en ce qui concerne lock-out, aucun équivalent français n'existant en apparence, puisque même le projet de constitution fédérale a été contraint de faire référence à ce même terme. Par contre, « boycottage » a pu être préféré à boycott.
De surcroît, la commission a choisi de remplacer le terme de « publicité » figurant dans le texte initial du Conseil d'Etat, par celui de médiatisation. En d'autres termes, c'est la publicité destinée au grand public, en tant que mesure de combat, qui est visée par cette disposition. Par contre, il est clair que les organisations professionnelles peuvent librement informer, en interne, leurs membres de l'évolution de la situation, et notamment de la procédure de conciliation, sans crainte d'engendrer les foudres de la loi. Pour la commission, la médiatisation se distingue clairement de l'information au sein même d'un syndicat ou d'une association patronale et n'inclut donc pas cette dernière. La volonté affichée est, là encore, d'offrir un cadre serein aux protagonistes pour ne pas assister à une prise en otage des négociateurs par des éléments extérieurs au conflit.
alinéa 2
La commission a préféré un texte plus explicite que celui prévu initialement en exprimant clairement le montant des amendes. Par souci d'efficacité, il est d'autre part apparu comme préférable que ce soit la chambre qui puisse prononcer elle-même la sanction - qui se conçoit ainsi comme une contravention de procédure - plutôt que de renvoyer la punition à la procédure pénale usuelle, ce qui serait source de lourdeur et sans doute d'inefficacité.
Article 13 Information au public
Cette disposition correspond à la pratique actuelle de l'office. Lors d'un conflit de travail en phase de conciliation, il peut s'avérer adéquat que la CRCT puisse diffuser les renseignements nécessaires à un plus large public afin de mettre fin à des rumeurs contraires à l'esprit de conciliation qui anime cette juridiction. Cette information est aussi de nature à éviter des effets de domino lorsque le conflit concerne tout un pan de l'économie. Elle permet donc au juge de s'exprimer sur l'état de la procédure.
Dans certaines circonstances, le public est en droit d'être tenu au courant de la situation, en particulier sur les moyens mis en oeuvre pour résoudre un différend qui, en quelque sorte, pourrait dépasser les simples acteurs du conflit. Cet alinéa est donc complémentaire à l'article 12. Il ne peut constituer un moyen de pression sur l'une ou l'autre partie, et ne devrait dès lors s'appliquer qu'avec l'accord des protagonistes en cause. Le libellé de cette disposition se veut, à dessein, de n'être pas trop fermé pour laisser une certaine liberté d'action aux conciliateurs.
Article 14 Consultation des salariés
La chambre peut ainsi, en cas de conflit, organiser une consultation de l'ensemble des travailleurs afin, par exemple, de sonder ces derniers sur l'opportunité d'élaborer une convention collective de travail. Un tel dispositif pourrait en effet offrir une alternative à des moyens de lutte plus importants, tels que notamment la grève.
Là encore, le texte de la disposition se veut ouvert pour sauvegarder un espace d'inventivité aux conciliateurs.
Article 17 Secret de fonction
Il s'agit d'un simple rappel aux juges qu'ils sont soumis, comme les fonctionnaires, au secret de fonction dont l'irrespect est sanctionné par l'article 320 du code pénal. Ce rappel paraît nécessaire en particulier à l'égard des juges laïcs qui siègent au sein de la chambre.
Article 18 Indemnités
Les indemnités des juges membres de la chambre sont calquées sur les jetons de présence des juges prud'hommes. Le département n'a pas pu nous proposer un calcul des coûts, dans la mesure où les commissions judiciaires sont payées sur la base d'un travail horaire, tandis que les juges prud'hommes le sont à la séance.
Vis-à-vis des anciennes dispositions, il nous a été cependant répondu que ce système ne devrait pas avoir de réelle incidence sur les coûts annuels de fonctionnement de la CRCT, tout en permettant une harmonisation bienvenue des traitements entre cette juridiction et celle des prud'hommes qui lui est toute proche.
Article 20 Règlement d'exécution
Un amendement a été proposé souhaitant que : « le Conseil d'Etat édicte les conditions d'exécution de la présente loi après consultation des partenaires sociaux ». Cet amendement n'a pas été retenu, car cette précision est apparue inutile.
En effet, les commissaires voient mal l'exécutif adopter un règlement d'exécution de cette loi sans tenir compte d'éventuelles remarques des partenaires sociaux. Mais ce doute était apparu aux commissaires en apprenant que l'UAPG n'avait pas été consultée lors de l'élaboration du projet de loi initial. Ils ont estimé que cela n'était qu'une erreur fortuite de procédure.
Article 23 Modifications à d'autres lois
alinéa 1 (loi instituant un service des relations du travail, du6 octobre 1943)
Les modifications proposées sont de nature purement rédactionnelle et visent, pour l'essentiel, à adapter le texte à la nouvelle dénomination de la chambre.
alinéa 2 (loi sur la juridiction des prud'hommes, du 25 février 1999)
L'abrogation de l'article 1, alinéa 1, lettre e) de la loi sur la juridiction des prud'hommes récemment adoptée par notre Conseil s'impose, car cette compétence est désormais totalement reprise par la CRCT, conformément à l'article 9, alinéa 3 ci-dessus. Il importe par conséquent d'éviter un conflit positif de compétence entre deux juridictions cantonales qui serait source de difficultés importantes.
Pour le surplus, la modification de l'article 5 vise à adapter son libellé pour tenir compte des dispositions de la présente loi relatives à la désignation des juges assesseurs de la CRCT.
6. Vote final
Après trois débats, le projet de loi tel qu'amendé a été adopté à l'unanimité. Seul le premier article a été voté avec une abstention. La commission fait ainsi le voeu que notre Conseil puisse en faire de même. Les commissaires ne peuvent que rappeler l'urgence de cette loi, puisque la chambre n'a plus la base légale nécessaire pour édicter les contrats-types de travail, créant ainsi un vide juridique qu'il est essentiel de combler sans délai. La commission a jugé si urgent de légiférer qu'elle a été jusqu'à supprimer le précédent article 20 du projet de loi du Conseil d'Etat qui prévoyait de laisser le soin au gouvernement de fixer la date d'entrée en vigueur de la loi. Ainsi, toute perte de temps supplémentaire sera évitée, puisque, en vertu des dispositions légales applicables, la présente loi devra être promulguée pour être exécutoire dans tout le canton, sitôt l'échéance du délai référendaire.
Annexes : - Tableau comparatif - la lettre de l'UAPG - la lettre de la CGAS
Projet de loi(7582)
concernant la Chambre des relations collectives de travail
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève,
décrète ce qui suit :
Art. 1 Constitution et tâches
1 La présente loi institue une Chambre des relations collectives de travail (ci-après la chambre) qui a les compétences suivantes :
2 La chambre est indépendante de l'administration.
Art. 2 Entreprises concernées
Les compétences de la chambre s'étendent à toutes les entreprises soumises ou non à la loi fédérale sur le travail dans l'industrie, l'artisanat et le commerce, du 13 mars 1964.
Art. 3 Composition
1 La chambre est composée :
2 Le président est assisté d'un fonctionnaire du greffe de la chambre pour tenir le procès-verbal.
Art. 4 Désignation du président et des membres
1 Tous les 6 ans, au début de chaque législature prud'homale, le Grand Conseil élit le président de la chambre et son suppléant. Les juges de la Cour de justice peuvent suppléer ces derniers en cas de besoin.
2 Les juges assesseurs et leurs suppléants sont désignés de la manièresuivante :
3 Les mandats du président, des juges assesseurs ainsi que de leurs suppléants sont renouvelables.
Art. 5 Fin des fonctions
Les fonctions de juge assesseur de la chambre prennent fin simultanément à celles de juge prud'homme.
Art. 6 Récusation
1 Tout juge est récusable :
2 Tout juge qui a connaissance d'une cause de récusation sur sa personne est tenu de la déclarer à la chambre, qui décide s'il doit s'abstenir.
3 Au surplus, les articles 85, 88, 90 à 92, 96, 97 et 100 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941, sont également applicables.
4 Le président indique aux parties, au début de l'audience, les noms des juges appelés à siéger.
5 La demande de récusation est jugée immédiatement à huis clos en l'absence du juge dont la récusation est demandée.
6 Les demandes de récusation dirigées simultanément contre tous les juges de la chambre ou une majorité d'entre eux sont jugées par le Conseil supérieur de la magistrature.
Art. 7 Greffe de la chambre
Le greffe de la chambre est organisé selon la loi instituant un service des relations du travail, du 6 octobre 1943.
Art. 8 Instance de conciliation
1 La chambre intervient d'office, à la requête d'une autorité ou d'intéressés. Le règlement d'exécution détermine la procédure applicable.
2 En cas de conciliation, l'accord des parties, revêtu de la signature du président et du secrétaire, déploie les effets d'un jugement exécutoire.
3 En cas d'échec de la conciliation, la chambre peut émettre une recommandation.
4 Si la recommandation n'est pas acceptée par toutes les parties intéressées, le Conseil d'Etat peut, exceptionnellement, désigner un médiateur ou tenter lui-même une conciliation.
Art. 9 Instance de jugement
1 La chambre est de plein droit compétente pour juger tout litige relatif à l'interprétation ou à l'application d'une convention collective de travail à la demande des parties contractantes ou de l'une d'entre elles.
2 Cette compétence s'étend également aux litiges entre les parties à une convention collective de travail, et un employeur ou un travailleur, au sens de l'article 357b CO (exécution commune).
3 La chambre est également compétente pour trancher tout litige qui lui est soumis par une organisation professionnelle, lorsque celle-ci a la qualité pour agir selon le droit fédéral et que le litige concerne les rapports de travail.
4 La chambre applique, par analogie, la procédure prévue par la loi sur la juridiction des prud'hommes. Elle peut prendre des mesures provisionnelles.
5 L'arrêt de la chambre est exécutoire sous réserve de recours au Tribunal fédéral.
6 Est réservée la compétence des tribunaux arbitraux privés institués par les conventions collectives de travail.
Art. 10 Instance d'arbitrage
1 La chambre peut statuer comme Tribunal arbitral public sur tout litige qui lui est soumis d'entente entre les parties.
2 La procédure est déterminée par accord entre les parties ou, à défaut d'accord, par le président. La chambre peut prendre des mesures provisionnelles.
3 Le concordat intercantonal sur l'arbitrage du 27 mars 1969 n'est pas applicable.
4 La sentence de la chambre n'est pas susceptible de recours sur le plan cantonal.
Art. 11 Huis clos
Les débats devant la chambre, en tant qu'instance de conciliation, ont lieu à huis clos.
Art. 12 Interdiction de médiatisation et de mesures de combat
1 Jusqu'à la fin de la procédure de conciliation, les parties doivent s'abstenir de toute médiatisation et de toutes mesures de combat telles que suspension générale ou partielle du travail, grève, lock-out, boycottage.
2 Celui qui enfreint l'interdiction statuée à l'alinéa premier est passible d'une amende de 1 000 F au maximum et de 5 000 F au maximum en cas de récidive, sans préjudice des autres peines prévues par les lois pour des infractions déterminées. Cette amende est prononcée par la chambre.
Art. 13 Information du public
Si elle le juge opportun, la chambre renseigne le public par voie de communiqué de presse sur l'état de la procédure de conciliation.
Art. 14 Consultation des salariés
Dans le cadre de sa mission de conciliation, la chambre peut notamment organiser la consultation des salariés.
Art. 15 Gratuité de la procédure
1 La procédure est en principe gratuite pour les parties.
2 Selon les circonstances, la chambre peut toutefois mettre tout ou partie des frais et débours à la charge des parties.
Art. 16 Conservation des actes de procédure
Les requêtes et autres pièces, les procès-verbaux, recommandations, transactions conciliatoires et sentences sont conservés en original au greffe de la chambre.
Art. 17 Secret de fonction
Les personnes désignées à l'article 3 de la présente loi, ainsi que le médiateur, sont tenus de garder le secret absolu sur les renseignements, documents et pièces dont ils ont connaissance dans les fonctions que la présente loi leur confère.
Art. 18 Indemnités
Les membres de la chambre reçoivent des jetons de présence suivant, par analogie, le tarif fixé par le Conseil d'Etat pour les juges prud'hommes, respectivement les présidents de la Cour d'appel.
Art. 19 Personnes citées et pénalités
1 Les personnes citées par la chambre sont tenues, sous peine d'amende, de comparaître, de prendre part aux débats et de fournir tous renseignements.
2 En cas d'infraction, elles sont passibles d'une amende pouvant s'élever à 1 000 F et 5 000 F en cas de récidive. Cette amende est prononcée par la chambre.
Art. 20 Règlement d'exécution
Le Conseil d'Etat édicte les dispositions d'exécution de la présente loi.
Art. 21 Clause abrogatoire
Sont abrogées :
Art. 22 Disposition transitoire
La loi s'applique aux requêtes dont l'office cantonal de conciliation était saisi au moment de son entrée en vigueur.
Art. 23 Modification à d'autres lois
1 La loi instituant un service des relations du travail, du 6 octobre 1943, est modifiée comme suit :
Art. 4 (nouvelle teneur)
Le service fonctionne comme greffe et secrétariat de la Chambre des relations collectives de travail, en préparant les audiences et en mettant à disposition un secrétaire qui tient le procès-verbal.
Art. 5, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Le service reçoit et examine toutes les réclamations qui lui parviennent et qui sont de la compétence de la Chambre des relations collectives de travail.
Art. 5, al. 2 (nouvelle teneur)
2 S'il s'agit de différends d'ordre collectif, il constitue le dossier, réunit la documentation nécessaire et communique le tout à la Chambre des relations collectives de travail.
Art. 5, al. 3, dernière phrase (nouvelle teneur)
3 ... Sur la base de cette enquête et pour autant qu'entre-temps un accord ne soit pas intervenu, il soumet un rapport à la Chambre des relations collectives de travail.
Art. 5, al. 4 (abrogé)
Art. 6, al. 2 (nouvelle teneur)
2 En cas de défaut non excusable, elles peuvent être citées à leurs frais devant la Chambre des relations collectives de travail.
2 La loi sur la juridiction des prud'hommes (juridiction du travail), du25 février 1999, est modifiée comme suit :
Art. 1, al. 1, lettre e (abrogée)
Art. 5 Désignation des membres de la Chambre des relations collectives de travail (nouvelle teneur)
1 Immédiatement après la prestation de serment, employeurs et salariés se réunissent en deux assemblées distinctes.
2 Chacune des assemblées désigne en son sein, parmi les juges prud'hommes éligibles à la Cour d'appel, et à la majorité relative, 2 titulaires et 8 suppléants qui siègent à la Chambre des relations collectives de travail.
ANNEXE 1
394041424344454647484950515253545556575859606162636465
ANNEXE 2
ANNEXE 3
68697071727374
1 Annexe au rapport : lettres M. Froidevaux et G. Aubert
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Premier débat
Le président. Un complément au rapport a été distribué sur les tables des députés. Monsieur Froidevaux, je vous laisse expliquer ce document. Par ailleurs, je tiens à annoncer que trois amendements ont déjà été déposés sur le bureau.
M. Pierre Froidevaux (R), rapporteur. Je demande en effet à cette assemblée d'accepter une manière de faire un peu originale ce soir. Le rapport de la commission était extrêmement urgent, car l'ancien office de conciliation - appelé dorénavant chambre des relations collectives de travail - manquait de légitimité pour rendre le droit. Aussi ai-je dû rédiger mon rapport durant les vacances pascales, et la rencontre que nous avions prévue avec les partenaires sociaux s'est déroulée après que je l'eus rendu. C'est la raison pour laquelle vous avez reçu ce complément, qui permet notamment de donner aux Syndicats patronaux les explications suffisantes, l'éclairage nécessaire à notre projet de loi, de façon qu'il soit parfaitement compris par l'ensemble des partenaires qui en seront les usagers.
Cela dit, je dois apporter quelques petites corrections à ce rapport, rédigé rapidement. A la page 24, quatrième ligne, je fais référence au droit au travail. Tout le monde aura compris que c'est le droit du travail, le droit au travail étant évidemment inexistant ! A la page 31, article 1, alinéa 1, lettre e), le tribunal arbitral ne prend pas de capitale. A la page 32, article 4, alinéa 2, lettre c), il convient d'écrire absence au singulier. A la page 33, article 6, alinéa 2, il faut ajouter une virgule après le mot chambre, et à l'alinéa 4, il convient d'écrire : «...les noms des juges...». Enfin, à la page 36, article 4, la mention et secrétariat est à supprimer.
Pour la clarté des débats, je suggère que, dans le Mémorial, on fasse figurer le complément que vous avez actuellement sous les yeux à partir de l'article premier jusqu'à l'article 13. Enfin, je souhaite que figure aussi la lettre de Gabriel Aubert, qui a relu ce rapport la semaine dernière et a fait certaines observations concernant notamment l'arbitrage public et privé.
Mme Christine Sayegh (S). L'office cantonal de conciliation et d'arbitrage qui fait l'objet du présent projet de loi fonctionne, comme l'a rappelé le rapporteur, depuis 1918. Toutefois, les compétences de cet office reposaient essentiellement sur une base réglementaire, insuffisante selon l'analyse du Tribunal fédéral. C'est ainsi que le Conseil d'Etat a proposé ce projet de loi.
Le travail en commission ne s'est pas limité à convertir un règlement en loi, mais a pris en considération la pratique de l'office. Les propositions des praticiens, des partenaires sociaux, ainsi que les conseils pertinents et avisés du professeur Gabriel Aubert, qui siégeait en qualité d'expert de la commission, ont contribué à présenter ce soir un projet de loi conforme, qui devrait permettre à la nouvelle Chambre des relations collectives de travail d'accomplir sa mission et de gagner en efficacité.
Dans cette perspective, les partenaires sociaux, ainsi que le professeur Aubert que nous venons de citer, ont suggéré quelques amendements après le dépôt du rapport et je propose, pour la clarté des débats, de prendre ces amendements en deuxième débat. Ils ne remettent pas en cause le fond même du projet de loi, mais précisent certaines modalités.
Le vote de ce projet de loi, vous l'aurez compris, est important et il devrait avoir lieu ce soir, car sans base légale les contrats types concernant quelque 15 000 employés restent actuellement sans effet juridique.
M. Christian Grobet (AdG). Le groupe de l'Alliance de gauche aimerait se féliciter du travail qui a été fait en commission judiciaire et qui a permis de modifier sensiblement le projet de loi initial du Conseil d'Etat. Celui-ci visait à donner la base légale indispensable à la Chambre des relations collectives de travail, dont je vous rappelle qu'une des décisions avait été cassée par le Tribunal fédéral en raison précisément de l'absence de base légale instituant cette chambre.
Le projet de loi du Conseil d'Etat était un projet très succinct et il est apparu nécessaire qu'il soit sensiblement amélioré, pour donner à cette chambre les compétences souhaitables dans le domaine des relations collectives de travail. J'aimerais profiter de cette occasion pour remercier le professeur Gabriel Aubert de ses propositions et compléments qui donnent aujourd'hui une véritable stature à ce projet de loi.
J'ai relu attentivement la note complémentaire de M. Froidevaux, explicitant certains commentaires article par article. Je n'ai pas d'observation particulière si ce n'est celle dont je vous ai fait part tout à l'heure, Monsieur Froidevaux. J'avais un doute en ce qui concerne la dernière phrase du commentaire de l'article premier, aliéna 1, lettre a), où vous indiquez que «les associations professionnelles ne peuvent être ainsi directement concernées», alors même que sous le commentaire de l'article 9, vous relevez que «les organisations professionnelles disposent d'un droit à agir personnellement en justice», ce que vous rappelez également dans le commentaire de l'alinéa 3 du même l'article 9.
J'ai donc pris contact à ce sujet avec le professeur Aubert, qui estime qu'effectivement la dernière phrase du commentaire de l'article premier, alinéa 1, lettre a) n'est pas claire, n'est pas correcte. Je vous transmets simplement ce qu'il m'a dit, cela n'enlève rien au mérite de la note en question, et je tiens d'ailleurs à remercier M. Froidevaux pour l'important travail qu'il a effectué et qui n'était pas facile pour un non-juriste. Si je me suis permis de faire cette petite observation, Monsieur Froidevaux, c'est que j'avais un doute et que M. Aubert, qui nous a guidés dans toute cette affaire, l'a levé dans le sens que je viens d'indiquer.
J'aimerais enfin souligner qu'il sera effectivement nécessaire d'adopter la modification que propose M. Aubert, dans sa lettre, à l'alinéa 4 de l'article 10. C'est un toilettage rédactionnel qui permet de préciser que la sentence arbitrale a bel et bien valeur de jugement, ce qui n'était pas évident dans la mesure où ce même article exclut l'application du concordat intercantonal en matière d'arbitrage. Le professeur Aubert met en évidence que les arbitrages rendus par cette Chambre des relations collectives de travail sont des arbitrages de droit public et non des arbitrages de droit privé. En l'occurrence, je remercie M. Froidevaux d'avoir joint à sa note cette lettre de M. Gabriel Aubert, car les explications que donne ce dernier sur la distinction entre l'arbitrage public et l'arbitrage privé sont particulièrement importantes. Cette question était litigieuse en raison de la prise de position du précédent président de la chambre, qui avait considéré que les arbitrages relevaient du droit privé et ceci manifestement à tort. Par voie de conséquence, je remercie le rapporteur ainsi que le professeur Aubert des compléments d'explications qu'ils ont fournis.
M. Pierre Froidevaux (R), rapporteur. Je remercie M. Grobet pour ses aimables propos. Toutefois, je souhaiterais mieux comprendre les remarques que M. Gabriel Aubert lui aurait faites.
L'explication de texte que je donne pour l'article premier, alinéa 1, lettre a) dit que les associations professionnelles ne sont pas directement concernées, dans la mesure où il faut un conflit du travail préexistant, qui porte sur les relations de travail, pour qu'effectivement, ensuite, les associations professionnelles puissent être mises en cause. Mais elles ne sont pas convocables dans un premier temps. Ce sont les parties en cause qui font ensuite, cas échéant, référence aux associations professionnelles - c'est ce que j'ai compris de notre travail législatif - et ceci n'est évidemment pas en contraction avec l'article 9. Voilà la compréhension que j'ai du texte.
M. Michel Balestra (L). Le Tribunal fédéral a confirmé à notre Grand Conseil que du provisoire qui dure quatre-vingts ans, s'agissant d'édicter une loi instituant une chambre de conciliation, c'est trop ! James Fazy aurait pu nous proposer cette loi ; c'est le radical Ramseyer qui relève le gant, l'honneur est donc sauf !
Il était temps de faire notre travail, ou le travail de nos lointains prédécesseurs. La commission a travaillé rapidement, et pourtant très sérieusement. Mais nul n'est parfait et les critiques dans les différents milieux n'ont pas manqué.
Cette chambre de conciliation et d'arbitrage doit être au service des partenaires sociaux et les quelques amendements proposés, d'où qu'ils viennent, sont de nature à clarifier une volonté politique unanime de la commission. Volonté clarifiée par la note complémentaire du rapporteur, puisque les choses vont parfois mieux en étant clairement dites.
Je vous propose de soutenir les amendements déposés par mes collègues et je leur demande de faire de même avec celui que je vous proposerai à l'article 13. Cette inquiétude de ne pas être suffisamment consultés est la base de tous ces amendements. Ils nous sont proposés, votons ce projet amendé ! C'est un bon projet, de nature à donner le poids et l'efficacité que la chambre de conciliation et d'arbitrage mérite et doit avoir. Nous passerons ainsi d'une illégalité de quatre-vingts ans à une efficacité du troisième millénaire !
M. Rémy Pagani (AdG). En commission, nous avons travaillé avec diligence sur ce projet de loi et nous avons mis fin, comme l'a dit M. Balestra, à quatre-vingts ans de no man's land juridique. Nous avons essayé de faire en sorte que les 15 000 personnes concernées aujourd'hui par l'absence de cadre légal et notamment de contrats types soient rapidement protégées, puisque ce sont les plus faibles d'entre nous, notamment le personnel de maison et le personnel agricole.
Nous avons essayé aussi - j'imaginais que nous y étions parvenus, mais j'ai maintenant un doute suite aux modifications et interprétations qui sont proposées - de mettre en place une instance efficace d'arbitrage et de justice concernant l'application des conventions collectives. Nous avons souhaité permettre aux partenaires sociaux de saisir la chambre pour faire appliquer la convention collective à un employeur qui l'aurait signée et qui y dérogerait sciemment.
Cela rappelé, ce soir un certain nombre de choses me paraissent bizarres. Il était effectivement juste de soumettre le projet de loi aux partenaires sociaux, mais je ne suis pas d'accord avec l'interprétation qui est faite de certains arguments, ni avec certaines des modifications proposées. Par exemple, M. Froidevaux nous a dit tout à l'heure qu'à l'article 4, page 36, stipulant que «le service fonctionne comme greffe et secrétariat de la Chambre des relations collectives du travail», il convenait de supprimer la mention du secrétariat. Nous avons longuement discuté de ce problème en commission et je vois mal qui va convoquer les parties, qui va convoquer la chambre, si ce n'est le secrétariat de l'OCIRT, à moins que M. Froidevaux imagine créer un greffe élargi ou une nouvelle structure, qui n'ont pas été discutés en commission. En ce qui me concerne, et en tant que commissaire, j'estime qu'il faut en rester au texte que nous avons voté.
Autre problème : d'après l'interprétation de M. Froidevaux, la chambre de conciliation, quand elle est saisie par des partenaires sociaux d'une demande de contrat type, pourrait ne pas répondre à cette demande. Or, quand nous avons auditionné l'ambassadeur suisse auprès des organisations internationales en ce qui concerne le personnel de maison des ambassades, l'ensemble des commissaires ont été d'accord pour reconnaître que, pour ce personnel, les ambassades pouvaient valablement, si elles le jugeaient nécessaire, demander à cette nouvelle chambre de conciliation un contrat type et que la chambre devait entrer en matière. En l'occurrence, Monsieur Froidevaux, vous interprétez mal les orientations de la commission. La commission voulait que les partenaires sociaux demandeurs d'un contrat type de travail soient entendus et qu'une procédure soit mise en route dès qu'une des parties le demande.
Un autre point qui me semble poser problème concerne l'article 13, et nous y reviendrons puisqu'un amendement est proposé. S'agissant de la publication des débats en cas de conflit, il est évident que la chambre ne doit pas rompre des lances de manière publique contre l'une ou l'autre des parties ; nous en sommes conscients et nous avons travaillé à ce que le huis clos soit garanti. Toutefois, nous avons réservé la possibilité au président de pouvoir, en tout temps, faire part de l'état des négociations pour notamment calmer le jeu. Or, Monsieur Froidevaux propose un amendement précisant qu'il ne peut le faire qu'avec l'accord des parties. Je rappelle ici, pour la forme, que la loi fédérale sur l'office fédéral de conciliation de 1949 prévoit en son article 4, alinéa 3, la possibilité pour l'office d'informer le public, même sans l'accord des parties. J'espère donc que le rappel de cette disposition fédérale vous convaincra de maintenir l'article 13 tel qu'il a été libellé.
Voilà globalement ce que j'avais à dire sur ces dérapages, que je mets sur le compte de l'inexpérience de M. Froidevaux à l'égard de cette chambre de conciliation. C'est vrai que le sujet est délicat et difficile, même pour moi qui le pratique depuis longtemps.
M. Pierre Froidevaux (R), rapporteur. J'ai entendu les quelques remarques de M. Pagani. Il faut savoir que je n'ai pas proposé d'amendements. J'entends être le fidèle rapporteur de nos travaux de commission et espère avoir fait passer l'esprit de notre travail. Il est vrai que l'interprétation peut toujours différer sur quelques petits détails et c'est la raison pour laquelle nous en débattons ce soir.
Concernant les modifications que j'ai proposées, ce ne sont que des modifications de forme. Je proposais, entre autres, de supprimer le mot secrétariat à l'article 4 (nouvelle teneur) de la page 36 et de ne garder que le mot greffe, car c'est le terme qui est utilisé du point de vue juridictionnel. Si on introduisait le mot secrétariat, il faudrait l'introduire à d'autres endroits et c'est pourquoi M. Aubert nous proposait de nous contenter du mot greffe. Mais il n'y a pas là d'intention politique, c'est un simple toilettage de la part de M. Gabriel Aubert.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 et 2.
Art. 3, al. 1, lettre a)
Le président. Nous sommes en présence d'un amendement signé de M. Charles Beer et de Mme Christine Sayegh.
M. Charles Beer (S). Il convient de compléter cet article 3 en préconisant qu'on prenne au moins la température des partenaires sociaux lors de la nomination du président et des instances de cette chambre de conciliation.
Pour le président, cela paraît évident, dans la mesure où la pratique de l'actuel office cantonal de conciliation montre à quel point le choix du président ou de la présidente est important. Ainsi, nous avons vécu, dans l'activité de cet office, un certain nombre de difficultés, non pas que telle ou telle partie, que ce soit le milieu syndical ou le milieu patronal, déplore un déséquilibre permanent en faveur de l'autre partie, mais tout simplement parce que tel ou tel président n'a pas forcément la vocation d'aller à la rencontre des problèmes soulevés par les partenaires sociaux en saisissant l'office de conciliation, respectivement, dans le nouveau projet, la Chambre des relations collectives de travail.
Nous souhaitons donc, par rapport au rôle de la conciliation et, le cas échéant, d'un jugement, que la personne retenue le soit après consultation des partenaires sociaux. L'amendement va peut-être un peu loin en parlant de président «proposé par les partenaires sociaux» ; on pourrait parler de simple consultation, mais l'important est qu'il y ait en tout cas un dialogue, de manière que le président bénéficie d'une légitimité, d'une reconnaissance de la part des partenaires sociaux, gage d'efficacité dans le lourd travail qui l'attendra.
Je signale à ce propos que nombre de tribunaux arbitraux privés fonctionnent dans le cadre de conflits relatifs aux conventions collectives de travail et que rares sont les cas où il y a des difficultés quant à la désignation d'un arbitre en commun. La simple consultation paraît donc, pour le moins, être le bon sens.
M. Rémy Pagani (AdG). Nous avons étudié cette proposition d'amendement, et je me réjouis de voir M. Beer rallier la proposition de sous-amendement que j'allais vous faire. Les termes «proposés par les partenaires sociaux» nous paraissent en effet un peu restrictifs, voire coercitifs, et il nous semble plus juste d'écrire : «...après consultation des partenaires sociaux». Effectivement, comme l'a relevé à juste titre le préopinant, les partenaires doivent être consultés afin que la personne élue par notre Grand Conseil bénéficie d'une large reconnaissance parmi l'ensemble des acteurs du monde du travail.
M. Bernard Annen (L). Une fois n'est pas coutume : je partage ce qui vient d'être dit et plus exactement ce qui a été dit par M. Beer. Effectivement, la consultation des partenaires sociaux me paraît totalement indispensable de façon que le président bénéficie au moins de la caution des partenaires sociaux face à un litige qui pourrait survenir. C'est dire que je crois que la solution de M. Beer est une bonne solution. Maintenant, est-elle coercitive ? Je ne le crois pas, Monsieur Pagani. Quant à moi je me rallierais plutôt à la proposition de M. Beer, mais la vôtre est quasiment identique, sauf si - et c'est la question que je me pose - vous avez des arrière-pensées en faisant cette contre-proposition. A mon sens, les deux propositions sont quasiment les mêmes et si, dans l'esprit des proposants, ce sont aussi les mêmes, je me rallierai à celle qui réunira la plus large majorité.
C'est dire que si M. Beer accepte la contre-proposition de M. Pagani, je le suivrai. Si M. Beer en revanche, comme moi, estime que sa proposition donne un peu plus de crédit à l'avis des partenaires sociaux, je me rallierai à sa position. Je prétends que la proposition de M. Beer donne en quelque sorte plus d'importance à la position et aux propositions des partenaires sociaux et c'est celle que je soutiendrai de préférence.
Le président. Avant de passer la parole à M. Balestra, je voudrais préciser que les amendements doivent être déposés sur le bureau du Grand Conseil et que pour le moment nous n'avons reçu qu'un seul amendement.
M. Michel Balestra (L). A la rédaction de cet article 3, nous avons voulu que le président et son suppléant soient des hommes de qualité pour une chambre de conciliation et d'arbitrage de qualité. La proposition de notre collègue Beer est une vraie bonne idée, car le risque de remise en cause du président, s'il ne trouve pas la caution des partenaires sociaux, est un risque important.
La priorité que notre Grand Conseil a voulu assigner à cette chambre de conciliation et d'arbitrage, c'est justement la conciliation. Or, comment atteindre les objectifs de conciliation si le président ne fait pas l'objet d'un consensus de la part des partenaires sociaux ? Que le président soit proposé par les partenaires sociaux est une meilleure solution que la consultation proposée par M. Pagani. Mais qui veut le plus veut le moins : je voterai donc l'amendement de M. Beer et, si nous sommes battus, celui de M. Pagani.
M. Charles Beer (S). Je crois que le problème technique qui peut se poser avec la formulation de notre amendement, c'est un blocage en cas de désaccord entre les partenaires sociaux. Il convient d'éviter tout blocage lors de la désignation du président de la nouvelle instance et c'est pourquoi j'étais tenté de dire que la consultation, qui permet de prendre le pouls, était le bon sens. Il est évident qu'il doit y avoir recherche d'une large légitimité, mais nous ne voulons en aucun cas introduire, à travers notre amendement, un risque de blocage de cette nouvelle chambre de conciliation.
M. Carlo Lamprecht. Il est vrai que cette consultation doit avoir lieu, elle est importante pour la crédibilité du président, mais comme vient de le souligner M. Charles Beer, s'il y avait désaccord entre les partenaires sociaux, nous nous trouverions devant une impasse. Aussi, j'estime que la proposition de M. le député Pagani est meilleure.
M. Charles Beer (S). En accord avec ma collègue Mme Sayegh, nous retirons notre amendement et nous nous rallions, comme le Conseil d'Etat, à la proposition de M. Pagani.
M. Michel Balestra (L). Je reprends l'amendement de M. Beer !
M. Claude Blanc (PDC). L'amendement de M. Pagani n'est qu'un ajout à celui de M. Beer... (Remarque.) Non ?
Le président. Non, Monsieur Blanc, ce sont deux phrases différentes.
M. Bernard Annen (L). Je comprends bien le souci du Conseil d'Etat en ce qui concerne le blocage, mais ce qui me gêne, c'est que la consultation est un degré inférieur par rapport à la proposition. A mon sens, il serait plus intelligent de dire : un, il y a proposition des partenaires sociaux et deux, en cas de blocage, le Grand Conseil s'en saisit. Je crois que cela donnerait beaucoup plus d'importance à la position des partenaires sociaux. Il ne s'agit d'ailleurs pas tellement de mettre en avant les partenaires sociaux, mais plutôt d'éviter que, pendant toute une législature, il y ait conflit suite à la nomination du président.
Jusqu'à aujourd'hui cela a toujours bien fonctionné et il n'y a jamais eu de blocage, de conflit entre les partenaires sociaux à propos de la désignation d'une personne ou d'une autre. Je pense donc qu'il faut prévoir une proposition par les partenaires sociaux et, en cas de blocage, que le parlement arbitre.
La proposition de M. Pagani, si elle est raisonnable, ne met pas en avant - et je m'adresse à lui en tant que partenaire social - la crédibilité des partenaires sociaux, et je le regretterais, Monsieur Pagani. En effet, je crois que, dans les conflits du travail, l'important - et c'est la seule raison qui me fait plaider dans ce sens-là - c'est justement qu'il y ait accord sur la forme, de manière à ce que les gens puissent trancher de manière totalement indépendante sur le fond.
Le président. Avant de donner la parole aux orateurs qui ont encore demandé la parole, je poserai une question à propos de cet amendement. Lorsqu'on parle de consultation des partenaires, qui consultera ? Le Grand Conseil ? la chambre ? le président ? J'aimerais bien qu'on réponde à cette question.
M. Christian Grobet (AdG). Monsieur le président, vous avez bien fait de mettre le doigt sur ce problème, un parmi d'autres. Je vous répondrai que le règlement d'exécution qui devra être établi par le Conseil d'Etat pourra régler cette question.
Cela dit, je constate que M. Annen en arrive à une troisième solution, qui rejoint du reste une proposition que nous avions faite en commission et qui a été rappelée par M. Froidevaux, à savoir que le président de cette chambre soit élu par le Grand Conseil dans une élection ouverte et non fermée. Mais c'est en l'occurrence un débat de commission, Monsieur Annen, et il n'est pas sérieux de faire ainsi, en séance plénière, une troisième proposition, qui n'est même pas formulée sous forme d'amendement.
Ces questions sont relativement délicates et quand on parle de désigner un président sur proposition des partenaires sociaux, il peut déjà y avoir un litige quant à savoir qui sont les partenaires sociaux habilités à présenter cette candidature. Par ailleurs, est-il légitime que seules certaines personnes aient le privilège de faire des propositions, et que d'autres soient exclues ? Dire que le président doit être élu sur proposition des partenaires sociaux pourrait mener à des impasses juridiques, à des recours de tierces personnes qui prétendraient aussi faire des propositions.
Je crois donc que la solution proposée par M. Pagani, à laquelle M. le conseiller d'Etat Lamprecht et M. Beer se sont ralliés, est juridiquement la plus sage - à moins que certains veuillent renvoyer cette affaire en commission, ce qui serait regrettable. Prévoir la simple consultation des partenaires sociaux est effectivement une solution plus souple. Si par hasard on oubliait un partenaire, ce ne serait pas une cause d'invalidation de l'élection, alors que la proposition par les partenaires sociaux risque de poser des problèmes juridiques.
Par voie de conséquence, il serait plus sage de partir sur la proposition de M. Pagani. Et s'il devait s'avérer, lors de la première désignation de ce président, que l'on ne tient pas compte de l'avis des partenaires sociaux, il serait toujours temps de compléter la loi dans un sens plus précis. Quoi qu'il en soit, les autres solutions qui ont été évoquées ce soir ne me paraissent pas satisfaisantes sur le plan juridique.
M. Charles Beer (S). Je voudrais insister une dernière fois sur le fait que la volonté des partenaires sociaux eux-mêmes, exprimée lors d'une entrevue très récente, était d'être consultés avant cette nomination, je dis bien consultés. Mme Sayegh et moi avons tenu, par le biais de notre amendement, à ce qu'on ne les oublie pas, quitte à aller un peu plus loin pour garantir au moins la consultation. Mais ne soyons pas plus royalistes que le roi : écoutons la sagesse des partenaires sociaux qui nous disent vouloir être consultés et contentons-nous de la consultation.
M. Michel Balestra (L). Nous ne cherchons pas, comme le suppose notre collègue Grobet, des mesures dilatoires pour retourner en commission. En l'occurrence, je répète que les notions de proposition et de consultation sont quand même différentes. Si les partenaires sociaux proposent une personnalité, cette personnalité sera forcément une personnalité consensuelle, car ils seront obligés de trouver la personnalité qui fait l'unanimité, par sa moralité, par son indépendance d'esprit, etc. S'il s'agit seulement de les consulter, la politisation du poste reste possible, au gré des alternances de majorité de ce Grand Conseil.
Je m'arrêterai là, car ce n'est pas la peine de débattre plus loin, mais je demanderai qu'on vote sur les deux possibilités : la proposition et la consultation. Quel que soit l'amendement qui obtiendra le plus de voix, je ne crois pas avoir démérité en exposant ici mon interprétation du droit !
Le président. Nous sommes en présence de trois amendements : un amendement de M. Beer reprise par M. Balestra ; un amendement de M. Pagani et un amendement de M. Annen qui vient d'être déposé. Je mets aux voix la proposition la plus éloignée, soit l'amendement de M. Annen : article 3, alinéa 1, fin de la lettre a) :
«...sur proposition des partenaires sociaux. En cas de désaccord, le Grand Conseil se prononce en dernière instance.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Le président. Nous votons l'amendement repris par M. Balestra, portant toujours sur l'article 3, alinéa 1, lettre a) :
«...ayant des qualifications équivalentes, proposés par les partenaires sociaux, élus par le Grand Conseil».
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Le président. Nous passons à l'amendement de M. Pagani qui vise à ajouter à la fin de la lettre a) :
«...élus par le Grand Conseil, après consultation des partenaires sociaux».
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 3 ainsi amendé est adopté, de même que les articles 4 à 9.
Art. 10, alinéa 4
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Cela a été dit à plusieurs reprises : le rapporteur a eu fort peu de temps pour établir son rapport et un certain nombre de choses ont été oubliées. C'est le cas à l'article 10, alinéa 4, où nous avons oublié de stipuler que la sentence de la chambre, outre qu'elle n'est pas susceptible de recours, est exécutoire comme un jugement. Je propose donc le nouveau libellé suivant :
«4 La sentence de la chambre est exécutoire comme un jugement. Elle n'est pas susceptible de recours sur le plan cantonal.»
M. Claude Blanc (PDC). Je souhaiterais que Mme Bugnon précise sa pensée : qu'entend-elle par «exécutoire comme un jugement» ?
M. Christian Grobet (AdG). La question de M. Blanc est tout à fait pertinente : c'est précisément parce que le texte actuel parle uniquement de sentence et non de jugement qu'il faut préciser que cette sentence a la valeur d'un jugement et qu'elle est exécutoire. C'est-à-dire que celui qui reçoit la sentence peut l'utiliser comme un jugement.
En tant que tel, le mot sentence ne veut pas dire jugement. Dans le concordat sur les arbitrages, il est précisé que les sentences valent jugement, mais vous constaterez que le même article 10 stipule que le concordat intercantonal ne s'applique pas, et cela puisque ce concordat s'applique aux procédures civiles et que nous sommes ici dans des procédures pénales. Par voie de conséquence, il est indispensable de préciser que la sentence rendue par la chambre a la même valeur qu'un jugement rendu par un tribunal ordinaire, qu'elle est exécutoire et qu'on peut donc immédiatement en demander l'exécution, d'autant qu'il n'y a pas de voie de recours prévue sur le plan cantonal. On pourra ainsi, par exemple, notifier un commandement de payer qui, en cas d'opposition, pourra faire l'objet d'une mainlevée d'opposition devant le tribunal.
Je rappellerai, Monsieur Blanc, pour en terminer, que dans la loi sur le Tribunal des prud'hommes, nous avons aussi stipulé que les procès-verbaux de conciliation ont valeur de jugement exécutoire, afin que celui qui a obtenu un procès-verbal de conciliation puisse le faire exécuter et que ce ne soit pas un simple papier dénué de la force qu'a le jugement ordinaire.
M. Bernard Annen (L). Je suis convaincu par les arguments qui viennent d'être avancés, mais je ne peux pas m'empêcher de rappeler à M. Grobet ce qu'il me reprochait tout à l'heure, à savoir que c'était un travail de commission. A cet égard, il faisait partie de la commission et je suis étonné qu'en fin juriste il ne se soit pas aperçu de cette lacune et que ce soit Mme Fabienne Bugnon, qui n'est en tout cas pas juriste, qui découvre qu'il manque quelque chose. Sans vouloir engager de polémique, je lui dirai qu'il a perdu tout à l'heure une occasion de se taire !
M. Christian Grobet (AdG). Monsieur Annen, c'est surtout vous qui avez perdu une bonne occasion de vous taire ! En effet, vous étiez absent lors de la dernière séance de la commission judiciaire où, en présence du professeur Aubert, j'ai précisément émis des doutes sur le contenu de l'article 10 de la loi. Et si vous vous étiez donné la peine de lire la note du professeur Aubert, annexée à celle de M. Froidevaux, qui se trouve sur votre place, vous auriez vu que cette proposition d'amendement a été faite par notre expert, reprise par le président de la commission... Mais oui, Monsieur, lisez les textes au lieu de grimacer bêtement ! Je ne suis pas l'auteur de cet amendement, Monsieur, c'est le professeur Aubert. Puisque vous faites semblant, en tant que représentant des partenaires sociaux, de vous intéresser à une loi qui les concerne directement, la moindre des choses, avant d'essayer de faire la leçon aux autres, ce serait de lire les deux notes qui ont été mises sur votre place !
Le président. Bien, je mets aux voix l'amendement présenté par Mme Bugnon à l'article 10, alinéa 4 :
«4 La sentence de la chambre est exécutoire comme un jugement. Elle n'est pas susceptible de recours sur le plan cantonal.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 10 ainsi amendé est adopté, de même que les articles 11 et 12.
Art. 13
M. Michel Balestra (L). Nous avons estimé, dans cet article 13, que, si elle le jugeait opportun, la chambre pouvait renseigner le public par voie de communiqué de presse. En l'occurrence, il s'agit aussi de ne pas dramatiser la situation et je proposais dans un premier temps que les parties soient d'accord avec cette publication. Or, M. Pagani tout à l'heure m'a fait la démonstration que mon amendement n'était pas conforme au droit supérieur, ce qui m'oblige à corriger mon amendement ainsi :
«Si elle le juge opportun, la chambre peut, après consultation des parties, renseigner le public par voie de communiqué de presse sur l'état de la procédure de conciliation.»
Il me semble que cette formulation est de nature à respecter le droit supérieur, à dédramatiser la situation en expliquant aux parties pourquoi on va s'adresser au public par voie de presse, et à améliorer ainsi la procédure en cours. Je rappelle que cette chambre n'est pas un organisme de combat ; c'est une chambre de conciliation et pour concilier il faut essayer de trouver la meilleure harmonie possible entre les parties en cause.
M. Rémy Pagani (AdG). J'ai déjà donné l'argument de fond contre cet amendement : même avec la modification proposée par M. Balestra, il ne correspondrait pas au droit supérieur. Je tiens à donner aussi un argument de forme : il serait dommage de retirer, non pas une arme, Monsieur Balestra, mais les moyens d'informer, aux juges, au président, lors d'un conflit de travail où celui-ci déciderait, pour calmer les choses, indépendamment des parties, d'informer le public sur l'état des négociations. Imaginez une grève - je ne vous souhaite pas d'en connaître une dans votre entreprise, Monsieur Balestra : si vous empêchez le président de dire simplement ce que fait la chambre de conciliation, vous retirez à cette chambre la possibilité d'exercer pleinement son pouvoir de conciliation. Ces deux arguments plaident pour le maintien de l'article 13 dans sa forme actuelle, tel qu'il ressort de la commission.
M. Michel Balestra (L). Ce sera ma dernière prise de parole ; au vote, nous verrons qui aura gagné le combat, puisque voilà des termes qui plaisent au député Pagani. M. le député Pagani a parlé d'arme, à propos d'une chambre de conciliation et d'arbitrage. Quant à moi, je ne parle pas d'arme, je parle de moyen pour obtenir une conciliation. Si, avant de se servir de ce moyen qu'est l'information du public par voie de presse, on consulte les parties, on leur explique pourquoi on veut informer, les choses se passent beaucoup mieux.
Voyez-vous, on dit que la vapeur contenue fait avancer des locomotives, mais qu'à l'air libre elle ne fait plus qu'un peu de buée sur les lunettes... J'ai déjà trop parlé, j'ai de la buée sur les lunettes ! Je vous demande donc de voter mon amendement et, si je suis battu, je ne serai pas fâché.
Mme Christine Sayegh (S). Je suis étonnée de la réaction de M. Pagani face à l'amendement corrigé de M. Balestra. En effet, cet amendement est conforme aux voeux de l'UAPG et de la CGAS et nous soutiendrons donc la proposition de M. Balestra.
Le président. Je mets aux voix l'amendement de M. Balestra à l'article 13 :
«Si elle le juge opportun, la chambre peut, après consultation des parties, renseigner le public par voie de communiqué de presse sur l'état de la procédure de conciliation.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 13 ainsi amendé est adopté.
Art. 14
M. Charles Beer (S). Nous proposons de supprimer l'article 14, qui représente à notre avis un certain danger. On sait que la conciliation et l'arbitrage reposent sur le principe que les parties qui saisissent l'instance soient représentatives des différentes catégories, soit le patronat, soit le personnel. Or, l'article 14 introduit un flou évident et un danger qui ne l'est pas moins, dans la mesure où il permet, notamment en ce qui concerne la volonté de conclure une convention collective de travail, de consulter directement le personnel, au-delà des syndicats.
J'aimerais dire clairement qu'à partir du moment où on laisse la possibilité au président et à la chambre elle-même de consulter le personnel sans avoir considéré l'avis des syndicats, on crée des précédents dangereux, qui malheureusement se sont déjà produits et ont posé des problèmes relativement graves. Je pense à un cas, dans la chimie, qui n'était pas exactement identique mais qui a montré le danger que pouvait représenter le fait de désavouer le syndicat en prenant l'avis d'une commission du personnel. J'aimerais également relever que tout le processus des négociations dans la fonction publique repose sur le fait que le partenaire social est désigné et connu, et jusqu'à preuve du contraire aucun syndicat n'admet qu'on consulte directement le personnel, lors d'un conflit du travail, sans passer par les organisations syndicales concernées.
M. Bernard Annen (L). De toute évidence, comme vient de le rappeler M. Beer, cet article vise directement la partie syndicale. Il n'en reste pas moins que, par rapport à la systématique des relations entre partenaires sociaux, nous estimons à notre tour que cet article n'est pas opportun. C'est la raison pour laquelle, dans l'esprit de conciliation qui anime l'UAPG et la CGAS, les partis de l'Entente soutiendront l'amendement de M. Beer.
M. Rémy Pagani (AdG). A mon sens, nous avons affaire, dans cet article 14, à la seule avancée progressiste de ce projet de loi. Il s'agit en l'occurrence de promouvoir la démocratie dans les entreprises.
J'en conviens, le libellé tel qu'il est prête à discussion. Notamment en cas de conflit, le président pourrait passer par-dessus les partenaires sociaux, notamment les syndicats, et j'imaginais bien qu'un certain nombre de personnes allaient crier au loup. Toutefois, je rappelle que nous sommes aujourd'hui, non pas dans un régime de conventions collectives généralisées, mais dans un régime quasiment de libre marché, en ce qui concerne l'emploi. Des secteurs entiers se précarisent et dans certaines entreprises il est très difficile, pour les syndicats comme pour les partenaires sociaux patronaux, de faire appliquer le droit minimum, notamment la loi sur le travail et le code des obligations. Certains employés travaillent dans des conditions inacceptables. Les syndicats doivent s'adapter à cette situation et cet article de loi a pour objectif de permettre au président de consulter démocratiquement l'ensemble des travailleurs.
A mon sens, il ne faut pas abandonner cette volonté, cette idée. C'est pourquoi je propose un amendement, pour rassurer M. Beer en ce qui concerne les dérapages possibles. Il faudrait donc ajouter à la fin de l'article : «... après accord des partenaires en conflit.» Ainsi, on verrouille cette proposition et il ne sera pas possible de passer sur l'avis prépondérant des partenaires sociaux.
Je rappelle le cas d'une boulangerie où l'office de conciliation a mené ce travail de consultation : après consultation des travailleurs, une convention a pu être mise sur pied. Il s'agit donc de préserver ici cette possibilité pour les syndicats et les employeurs de régulariser leurs conditions de travail et leurs relations sociales.
M. Michel Balestra (L). L'article 14 constituait une avancée, nous dit M. Pagani. Et maintenant, il la désamorce avec son amendement ! C'est dire que l'avancée créait la chienlit et qu'une chienlit désamorcée par un amendement, c'est toujours moins bon que la suppression de l'article en cause ! Voilà pourquoi je préfère la proposition de M. Beer, c'est-à-dire la suppression de l'article 14.
M. Charles Beer (S). J'aimerais signaler, sur le plan technique, qu'il y a évidemment un accord entre la CGAS et l'UAPG sur ce point.
Vous parlez de réelle avancée, Monsieur Pagani. Si vous estimez que c'est la démocratie dans l'entreprise que d'aller directement demander l'avis des salariés, si vous souhaitez, le cas échéant, prévoir également que lors d'un conflit dans la fonction publique on consulte directement le personnel, sans avis du Cartel intersyndical, sans avis du SFP, alors je déposerai volontiers un projet de loi avec vous sur ce sujet.
Mais vous savez que ce n'est pas judicieux, vous savez que ce n'est pas une avancée et vous l'avez si bien compris que vous avez proposé un amendement qui revient à vider l'article 14 de sa substance. En effet, du moment où les partenaires sociaux sont d'accord de consulter le personnel, il n'y a aucune objection à ce qu'on le fasse et il n'y a donc aucune raison de le préciser dans la loi.
M. Pierre Froidevaux (R), rapporteur. Pour revenir sur les propos de M. Charles Beer, il est évident que le président de cette chambre aura toujours la possibilité de discuter, ou de ne pas discuter, avec les employés en crise. Que cet article figure ou ne figure pas, cette possibilité existe et le respect des syndicats et de l'ensemble des partenaires sociaux est garanti par les autres articles. La suppression de cet article ne modifie en rien l'esprit de la loi telle qu'elle vous est proposée ce soir.
Le président. Je mets aux voix l'amendement visant à supprimer l'article 14.
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Le président. L'article 14 étant supprimé, l'article 15 devient l'article 14 et ainsi de suite.
Mis aux voix, les articles 14 à 18 (anciennement 15 à 19) sont adoptés.
Art. 19
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Comme cela a déjà été rappelé, nous avons entendu les partenaires sociaux après avoir déposé le rapport. Et pour les mêmes raisons que celles évoquées tout à l'heure, nous proposons un amendement à l'article 19, ancien article 20, que je vais lire tranquillement pour que M. Blanc entende et comprenne bien :
«Le Conseil d'Etat édicte les dispositions d'exécution de la présente loi après consultation des partenaires sociaux.»
Une voix. Ça va, Blanc ? Tu veux une explication de Grobet, ou on en reste là ?
Mme Fabienne Bugnon. Il faut venir aux séances de commission, Messieurs les démocrates-chrétiens, ainsi vous n'aurez pas besoin d'explication de texte !
M. Bernard Annen (L). Cet amendement va exactement dans l'esprit de cette loi et je vous suggère, Mesdames et Messieurs, de le soutenir.
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 19 ainsi amendé est adopté, de même que les articles 20 et 21.
Art. 22 Modification à d'autres lois
Art. 4 (nouvelle teneur)
M. Rémy Pagani (AdG). Monsieur le président, j'aimerais m'assurer que le mot secrétariat subsistera à l'article 4. Ici, lorsqu'on parle de secrétariat, on ne parle pas du greffe, c'est-à-dire des personnes qui aident la juridiction au moment de l'audience, mais du secrétariat de l'OCIRT. Dans les discussions de la commission, il s'agissait clairement de maintenir la relation entre cette chambre de conciliation et le secrétariat de l'OCIRT, qui aujourd'hui travaille utilement pour l'office de conciliation et donne notamment un certain nombre de renseignements généraux aux juges et aux juges assesseurs sur les conditions et les usages dans les différentes branches. Je demande donc que le Grand Conseil se prononce sur le maintien ou non du mot secrétariat. Ce n'est pas une question esthétique, mais une question de fond.
M. Pierre Froidevaux (R), rapporteur. La suppression du mot secrétariat était une des modifications rédactionnelles que je vous avais proposées au moment où j'ai pris la parole la première fois. Il n'y a pas là matière à débat politique et donc pas de raison de ne pas suivre la suggestion de M. Pagani.
Mis aux voix, les articles 4 (nouvelle teneur), tel qu'issu des travaux de la commission, à 5 Désignation des membres de la Chambre des relations collectives de travail (nouvelle teneur) sont adoptés.
Mis aux voix, l'article 22 souligné (anciennement article 23) est adopté.
M. Carlo Lamprecht. J'aimerais remercier ici très sincèrement la présidente de la commission et les commissaires, car ils ont fait un travail remarquable. Il y avait urgence, le sujet était délicat et, à la fin des débats de la commission, c'est un vote unanime qui a conclu ses travaux. Je voudrais également remercier les partenaires sociaux, le professeur Aubert, toutes celles et ceux qui ont été auditionnés et qui ont contribué à élaborer cette loi attendue, nécessaire et urgente. Monsieur le président, je demande le troisième débat.
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7582)
concernant la Chambre des relations collectives de travail
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève,
décrète ce qui suit :
Art. 1 Constitution et tâches
1 La présente loi institue une Chambre des relations collectives de travail (ci-après la chambre) qui a les compétences suivantes :
2 La chambre est indépendante de l'administration.
Art. 2 Entreprises concernées
Les compétences de la chambre s'étendent à toutes les entreprises soumises ou non à la loi fédérale sur le travail dans l'industrie, l'artisanat et le commerce, du 13 mars 1964.
Art. 3 Composition
1 La chambre est composée :
2 Le président est assisté d'un fonctionnaire du greffe de la chambre pour tenir le procès-verbal.
Art. 4 Désignation du président et des membres
1 Tous les 6 ans, au début de chaque législature prud'homale, le Grand Conseil élit le président de la chambre et son suppléant. Les juges de la Cour de justice peuvent suppléer ces derniers en cas de besoin.
2 Les juges assesseurs et leurs suppléants sont désignés de la manièresuivante :
3 Les mandats du président, des juges assesseurs ainsi que de leurs suppléants sont renouvelables.
Art. 5 Fin des fonctions
Les fonctions de juge assesseur de la chambre prennent fin simultanément à celles de juge prud'homme.
Art. 6 Récusation
1 Tout juge est récusable :
2 Tout juge qui a connaissance d'une cause de récusation sur sa personne est tenu de la déclarer à la chambre, qui décide s'il doit s'abstenir.
3 Au surplus, les articles 85, 88, 90 à 92, 96, 97 et 100 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941, sont également applicables.
4 Le président indique aux parties, au début de l'audience, les noms des juges appelés à siéger.
5 La demande de récusation est jugée immédiatement à huis clos en l'absence du juge dont la récusation est demandée.
6 Les demandes de récusation dirigées simultanément contre tous les juges de la chambre ou une majorité d'entre eux sont jugées par le Conseil supérieur de la magistrature.
Art. 7 Greffe de la chambre
Le greffe de la chambre est organisé selon la loi instituant un service des relations du travail, du 6 octobre 1943.
Art. 8 Instance de conciliation
1 La chambre intervient d'office, à la requête d'une autorité ou d'intéressés. Le règlement d'exécution détermine la procédure applicable.
2 En cas de conciliation, l'accord des parties, revêtu de la signature du président et du secrétaire, déploie les effets d'un jugement exécutoire.
3 En cas d'échec de la conciliation, la chambre peut émettre une recommandation.
4 Si la recommandation n'est pas acceptée par toutes les parties intéressées, le Conseil d'Etat peut, exceptionnellement, désigner un médiateur ou tenter lui-même une conciliation.
Art. 9 Instance de jugement
1 La chambre est de plein droit compétente pour juger tout litige relatif à l'interprétation ou à l'application d'une convention collective de travail à la demande des parties contractantes ou de l'une d'entre elles.
2 Cette compétence s'étend également aux litiges entre les parties à une convention collective de travail, et un employeur ou un travailleur, au sens de l'article 357b CO (exécution commune).
3 La chambre est également compétente pour trancher tout litige qui lui est soumis par une organisation professionnelle, lorsque celle-ci a la qualité pour agir selon le droit fédéral et que le litige concerne les rapports de travail.
4 La chambre applique, par analogie, la procédure prévue par la loi sur la juridiction des prud'hommes. Elle peut prendre des mesures provisionnelles.
5 L'arrêt de la chambre est exécutoire sous réserve de recours au Tribunal fédéral.
6 Est réservée la compétence des tribunaux arbitraux privés institués par les conventions collectives de travail.
Art. 10 Instance d'arbitrage
1 La chambre peut statuer comme Tribunal arbitral public sur tout litige qui lui est soumis d'entente entre les parties.
2 La procédure est déterminée par accord entre les parties ou, à défaut d'accord, par le président. La chambre peut prendre des mesures provisionnelles.
3 Le concordat intercantonal sur l'arbitrage du 27 mars 1969 n'est pas applicable.
4 La sentence de la chambre est exécutoire comme un jugement. Elle n'est pas susceptible de recours sur le plan cantonal.
Art. 11 Huis clos
Les débats devant la chambre, en tant qu'instance de conciliation, ont lieu à huis clos.
Art. 12 Interdiction de médiatisation et de mesures de combat
1 Jusqu'à la fin de la procédure de conciliation, les parties doivent s'abstenir de toute médiatisation et de toutes mesures de combat telles que suspension générale ou partielle du travail, grève, lock-out, boycottage.
2 Celui qui enfreint l'interdiction statuée à l'alinéa premier est passible d'une amende de 1 000 F au maximum et de 5 000 F au maximum en cas de récidive, sans préjudice des autres peines prévues par les lois pour des infractions déterminées. Cette amende est prononcée par la chambre.
Art. 13 Information du public
Si elle le juge opportun, la chambre peut, après consultation des parties, renseigner le public par voie de communiqué de presse sur l'état de la procédure de conciliation.
Art. 14 Gratuité de la procédure
1 La procédure est en principe gratuite pour les parties.
2 Selon les circonstances, la chambre peut toutefois mettre tout ou partie des frais et débours à la charge des parties.
Art. 15 Conservation des actes de procédure
Les requêtes et autres pièces, les procès-verbaux, recommandations, transactions conciliatoires et sentences sont conservés en original au greffe de la chambre.
Art. 16 Secret de fonction
Les personnes désignées à l'article 3 de la présente loi, ainsi que le médiateur, sont tenus de garder le secret absolu sur les renseignements, documents et pièces dont ils ont connaissance dans les fonctions que la présente loi leur confère.
Art. 17 Indemnités
Les membres de la chambre reçoivent des jetons de présence suivant, par analogie, le tarif fixé par le Conseil d'Etat pour les juges prud'hommes, respectivement les présidents de la Cour d'appel.
Art. 18 Personnes citées et pénalités
1 Les personnes citées par la chambre sont tenues, sous peine d'amende, de comparaître, de prendre part aux débats et de fournir tous renseignements.
2 En cas d'infraction, elles sont passibles d'une amende pouvant s'élever à 1 000 F et 5 000 F en cas de récidive. Cette amende est prononcée par la chambre.
Art. 19 Règlement d'exécution
Le Conseil d'Etat édicte les dispositions d'exécution de la présente loi, après consultation des partenaires sociaux.
Art. 20 Clause abrogatoire
Sont abrogées :
Art. 21 Disposition transitoire
La loi s'applique aux requêtes dont l'office cantonal de conciliation était saisi au moment de son entrée en vigueur.
Art. 22 Modification à d'autres lois
1 La loi instituant un service des relations du travail, du 6 octobre 1943, est modifiée comme suit :
Art. 4 (nouvelle teneur)
Le service fonctionne comme greffe et secrétariat de la Chambre des relations collectives de travail, en préparant les audiences et en mettant à disposition un secrétaire qui tient le procès-verbal.
Art. 5, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Le service reçoit et examine toutes les réclamations qui lui parviennent et qui sont de la compétence de la Chambre des relations collectives de travail.
Art. 5, al. 2 (nouvelle teneur)
2 S'il s'agit de différends d'ordre collectif, il constitue le dossier, réunit la documentation nécessaire et communique le tout à la Chambre des relations collectives de travail.
Art. 5, al. 3, dernière phrase (nouvelle teneur)
3 ... Sur la base de cette enquête et pour autant qu'entre-temps un accord ne soit pas intervenu, il soumet un rapport à la Chambre des relations collectives de travail.
Art. 5, al. 4 (abrogé)
Art. 6, al. 2 (nouvelle teneur)
2 En cas de défaut non excusable, elles peuvent être citées à leurs frais devant la Chambre des relations collectives de travail.
2 La loi sur la juridiction des prud'hommes (juridiction du travail), du25 février 1999, est modifiée comme suit :
Art. 1, al. 1, lettre e (abrogée)
Art. 5 Désignation des membres de la Chambre des relations collectives de travail (nouvelle teneur)
1 Immédiatement après la prestation de serment, employeurs et salariés se réunissent en deux assemblées distinctes.
2 Chacune des assemblées désigne en son sein, parmi les juges prud'hommes éligibles à la Cour d'appel, et à la majorité relative, 2 titulaires et 8 suppléants qui siègent à la Chambre des relations collectives de travail.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Il est notoire que l'établissement des comptes annuels de toute institution exige plusieurs mois et que l'on ne saurait de ce fait priver des institutions sociales reconnues d'utilité publique et bénéficiant régulièrement de subventions de l'Etat d'une avance sur la subvention qui leur est due et qui leur est indispensable pour assumer leur mission et répondre à des besoins flagrants (contrairement à certaines autres activités qui ont bénéficié d'appuis financiers de la part du DASS), ni leur faire payer la mauvaise humeur de certains à la suite de la votation du 20 décembre dernier.
Compte tenu de ce qui précède, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à faire bon accueil à cette motion.
Débat
M. Bernard Clerc (AdG). Cette motion fait suite aux informations publiées dans la presse selon lesquelles certaines dispositions concernant le versement des subventions auraient été modifiées récemment.
Un des prétextes pour justifier le non-versement des subventions est que certaines institutions constituent des réserves et le département exige donc, avant le versement des subventions, d'obtenir les comptes des institutions. Cette manière de faire pénalise évidemment les petites associations, qui ont en général très peu de moyens et n'ont pas la possibilité de payer une fiduciaire. Souvent, leur comptabilité est tenue par des bénévoles et les délais de remise des comptes sont plus longs. Or, ce sont les mêmes institutions qui ont aussi des problèmes de liquidités, parce qu'elles tournent sur un budget relativement restreint.
En l'état, l'argument des réserves ne nous semble pas particulièrement pertinent, puisqu'au moment de l'inscription de la subvention au budget le département compétent dispose des comptes de l'année précédente et est donc au courant de la réalité budgétaire de l'institution. Je vois mal - là je pense encore une fois aux petites institutions - qu'elles puissent constituer des réserves considérables en l'espace d'un exercice et il devrait être en tout cas possible de leur consentir des avances, quitte à ce que, dans des cas exceptionnels où on constaterait effectivement une réserve particulièrement importante à la remise des comptes, il y ait modification au moment du versement du solde de la subvention.
Mesdames et Messieurs, nous vous proposons de renvoyer directement cette motion au Conseil d'Etat, pour qu'il nous présente un rapport sur le changement de pratique en la matière et veille à ce que les institutions concernées bénéficient d'une avance sur les subventions qui leur sont destinées pour l'année 1999.
Mme Esther Alder (Ve). On ne peut qu'être d'accord avec le conseiller d'Etat Segond quant au devoir de transparence des associations subventionnées, et à cet effet des contrôles existent.
En revanche, il est injustifié de refuser des avances sur subventions, d'autant plus que les associations, même lorsqu'elles constituent des réserves, le font non pas pour faire fructifier un bas de laine, mais bien pour assurer leur fonctionnement d'une année à l'autre, ou en vue d'investissements indispensables. Par ailleurs, le financement d'un certain nombre d'associations est constitué, pour une grande part, de dons privés. Ces dons sont tout à fait aléatoires d'un exercice à l'autre et il est donc normal, à moins d'être inconscient, de faire preuve d'un minimum de prévoyance. D'autant que les problématiques auxquelles le social est confronté augmentent et que, depuis des années, les subventions sont soit bloquées, soit diminuées. J'ajouterai encore que personne ici n'imaginerait refuser le financement de l'appareil d'Etat, sous prétexte que les comptes n'ont pas été produits. Pour terminer, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous invitons à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.
M. Guy-Olivier Segond. Le Conseil d'Etat est prêt à accepter cette motion et à vous rendre le rapport demandé. Néanmoins, pour que votre information soit complète au moment du vote, j'aimerais vous dire tout d'abord qu'il y a au département de l'action sociale et de la santé 204 institutions subventionnées. Ces 204 institutions ont reçu la même lettre qui leur demandait de présenter, comme le prescrit la loi, leurs comptes, leur rapport d'activité et leur bilan, pour pouvoir toucher leur subvention. A ce jour, sur les 204 institutions subventionnées, seules trente-huit avaient fait une demande pour avoir une avance sur subvention. Sur les trente-huit qui avaient fait la demande, trente-cinq ont pu présenter leurs comptes, leur rapport d'activité et leur bilan et ont touché les avances sur subventions. Il y en a trois qui étaient incapables de présenter des comptes, quels qu'ils soient, définitifs ou provisoires et qui, de ce fait, n'ont pas touché l'avance sur subventions. Si la situation change d'ici au 30 mai, le Conseil d'Etat en tiendra compte dans la réponse qu'il vous adressera, si vous votez cette motion.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
Motion(1261)sur le blocage des subventions aux institutions sociales
Vu l'information publiée dans la presse selon laquelle M. Guy-Olivier Segond aurait refusé le versement des subventions ordinaires destinées à un certain nombre d'institutions sociales, tant qu'elles n'ont pas présenté leurs comptes de l'exercice écoulé ;
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvepar ces motifs
invite le Conseil d'Etat
à présenter un rapport sur un changement de pratique en matière de versement des subventions aux institutions sociales et à veiller que celles-ci bénéficient d'une avance sur les subventions qui leur sont destinées pour 1999.
La pétition 1218 a été renvoyée à la Commission des affaires sociales qui a traité ce sujet lors des séances des 17 et 24 novembre 1998, sous la présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny. La teneur en est la suivante :
Pétitionconcernant l'assistance publique
Mesdames etMessieurs les députés,
Par la présente, nous portons à votre connaissance que l'Hospice Général viole l'article 168, al. 1 de la Constitution de notre République.
Voici un résumé des faits. Nous vivons en concubinage. Mlle Pasteur est étudiante, elle touche 211,90 francs de la CIA, son père paye le loyer et lui verse 250.- francs, soit 461,90 francs par mois. M. Jérôme Béguin est chômeur en fin de droit. Fin mai, il a été mis fin à son droit au RMCAS.
Nous sommes alors allés nous inscrire au centre d'action sociale de Champel. C'est l'assistante sociale Mme Luthier-Shwarz qui a pris notre dossier en main début juillet. Sans nous donner d'argent. Elle nous a donné rendez-vous fin août parce qu'elle partait en vacances. A cette date, elle a confié notre dossier au chef de secteur M. Créchard.
Bref, au motif que « l'assistance n'est pas droit », et que M. Jérôme Béguin est fautif de ne plus bénéficier du droit au RMCAS, nous n'avons toujours pas à ce jour été pris en charge par l'Hospice général.
Nous nous sommes endettés, alors que nous sommes déjà pauvres, au motif, rappelons-le, que « l'assistance n'est pas un droit ».
Nous contestons ce motif qui va à l'encontre de l'article 168.
Sachant que notre cas n'est pas marginal, nous vous demandons de faire en sorte qu'il n'y ait pas de distinction entre « bons » et « mauvais » pauvres, que tous les démunis soient pris en charge par l'assistance publique, et qu'ainsi l'article 168 soit respecté.
44, rue de l'Athénée, 1206 Genève
Auditions
Mlle Christiane Pasteur et M. Jérôme Béguin, pétitionnaires, le 17 novembre 1998
M. Béguin a 24 ans. Il a fait la première partie de sa scolarité en France et l'a terminée à Genève après un an et demi à l'ECG. Il précise qu'il n'a pas pu suivre de formation pour des raisons psychologiques. Ensuite, il a fait des petits boulots avant de se retrouver au chômage puis de bénéficier du revenu minimum cantonal d'aide sociale (RMCAS).
M. Béguin ayant perdu son droit au RMCAS fin mai, s'est présenté, fin juin, avec sa compagne, Mlle Pasteur au centre d'action sociale de Champel pour obtenir une aide financière. Pendant deux mois et demi, ils n'ont rien obtenu aux triples motifs que M. Béguin était responsable de la perte de son droit, qu'il ne s'était présenté que fin juin et que l'assistance n'est pas un droit.
Ce n'est que le 19 septembre, après que les pétitionnaires aient déposé une plainte auprès du président du conseil d'administration de l'Hospice Général (HG), que le chef de secteur, qui s'occupe de leur cas, a consenti à les prendre en charge et l'HG à verser une prestation de Fr. 864.- au titre d'assistance publique (prestation qui leur sera définitivement annulée le 24 novembre 1998 après décision de la Commission des réclamations de l'Hospice Général).
Les motifs invoqués sont :
le refus d'exécuter une contre-prestation, sous la forme d'un travail ou d'une formation,
le fait que Mlle Pasteur peut subvenir aux besoins du couple.
Les pétitionnaires entendent attirer l'attention de la commission sur les points suivants :
ils n'ont pas obtenu de versement rétroactif pour les deux mois et demi ;
ils sont pénalisés par le fait de toucher une aide pour couple alors qu'ils ne sont pas mariés et que M. Béguin toucherait plus s'il s'était déclaré célibataire ;
M. Béguin ne peut répondre aux exigences de réinsertion comme « l'Orangerie », « Réalise » ou autres prestations, son incapacité sociale ne pouvant être résolue en faisant des bricolages. De plus, il met en doute la légitimité des contre-prestations, sont-elles en conformité avec les conventions du BIT, comme la No 25, concernant les travaux forcés ?
M. .
leur cas n'est pas unique ;
enfin, à l'aube de l'an 2000 il n'est pas normal que l'HG, par l'arbitraire de ses décisions, applique encore la charité des Eglises et qu'il est temps pour le politique de revoir les directives cantonales en matière d'assistance afin que quiconque en éprouve le besoin puisse obtenir un revenu minimal.
M. .
M. Cuenod fait un bref rappel historique de l'HG et souligne qu'au fil des siècles, l'assistance publique a beaucoup apporté mais qu'un certain nombre de limites sont apparues, comme le remboursement de la dette qui présente un effet dissuasif. Il constitue en lui-même les limites du contrat social en altérant le rapport entre l'assistant social et le consultant, obligeant le premier à devoir justifier en permanence le bien-fondé de l'aide versée et le second à prouver celui de ses actes. Il n'y a donc pas de dynamique, même si il y a une volonté de réintégration sociale et économique.
De cet état de fait jugé trop statique et mal adapté aux situations sociales d'aujourd'hui, comme les chômeurs en fin de droit, est née la loi sur le RMCAS, qui pose un cadre clair. Le principe ne se fonde plus sur les conditions d'octroi, mais sur l'avenir de l'intéressé par le biais des contre-prestations et des allocations de réinsertion. Aujourd'hui le taux de réinsertion est de 10 à 15 %.
S'agissant du cas de M. Béguin, les points suivants sont à relever :
La question du concubinage. La conférence suisse des institutions d'action sociale a rédigé récemment un rapport, comprenant une synthèse des décisions du Tribunal fédéral (TF), ainsi qu'une prise de position. Cette conférence a été validée par le TF et le texte sert de référence. Dans ce dernier figure un article sur le concubinage, selon lequel, « sous couvert de soutien mutuel, le revenu du concubin est pris en compte ». Cette même disposition figure dans la loi sur le RMCAS.
Le droit aux prestations. Dans le cadre d'un arrêt du TF, il est prévu le droit fondamental d'un minimum vital. « Cependant, il n'est pas question d'un revenu minimal garanti. Ce qui est imposé par le droit constitutionnel, c'est simplement ce qui est nécessaire à une vie digne de l'homme pour le protéger d'une existence de mendicité ». C'est avant tout la tâche de la collectivité de fixer dans le cas concret le genre et l'étendue des prestations offertes sur la base de sa législation.
Les contre-prestations. La question est donc posée aux cantons et aux organismes d'assistance publique de savoir quelle est la limite et que faire lorsqu'une personne refuse de collaborer ? Pour le TF, le retrait de prestation est admissible, si le comportement de l'intéressé relève de l'abus de droit, en refusant consciemment, par exemple, de participer à une activité lucrative.
M. Cuenod souligne que pour les contre-prestations, il est tenu compte du curriculum vitae de la personne et de ses souhaits ainsi que des besoins des associations et des services. L'HG privilégie la qualité plutôt que la quantité des contre-prestations. Cette qualité est précieuse comme outil de réinsertion. Actuellement 65 % des bénéficiaires du RMCAS sont actifs dans des contre-prestations et les demandes sont plus nombreuses du côté des associations.
Enfin, lorsque l'HG cesse ses prestations financières, on peut les estimer à 2 % dans le cadre du RMCAS ; dans tous les cas, il reste à l'intéressé la possibilité d'accéder à une information ainsi qu'à un accompagnement social.
Pour ce qui est des revendications financières des pétitionnaires, M. Cuenod apporte les compléments suivants :
un certain nombre de démarches ont été demandées à M. Béguin, dont l'inscription à l'Office cantonal de l'emploi (OCE), une activité compensatoire à « Radio-Cité » et au « Courrier », la prise de contact avec un centre de réinsertion par la formation comme « l'Orangerie » ou « Réalise ». Bien que ces conditions n'aient pas été remplies, l'HG est entré en matière le 21 septembre pour une aide ponctuelle, au titre d'assistance publique.
Discussion et vote
Pour ce qui est de la pétition de M. Béguin et de Mlle Pasteur l'ensemble des commissaires sont d'avis que :
M. .
les questions de fonds soulevées sur l'obligation d'entraide entre concubin, le droit au minimum vital et le principe des contre-prestations ont leurs réponses et justification tant dans l'arrêt du TF que dans la volonté du législateur genevois qui a souhaité inscrire dans la loi du RMCAS la notion de solidarité par l'octroi d'un droit et celle de réinsertion sociale et économique avec le devoir de contre-prestations. Il apparaît dès lors clairement à l'ensemble des commissaires que M. Béguin souhaite bénéficier de droits, sans contrepartie.
Toutefois, pour les commissaires, plusieurs questions restent ouvertes concernant le RMCAS comme, par exemple, celle des critères qui définissent le contenu et la durée des contre-prestations, ainsi que le choix des associations .
Une fois de plus, la commission réaffirme au département son souhait de recevoir le rapport d'évaluation sur le RMCAS, sur la base duquel elle pourra mieux évaluer l'adéquation entre les exigences de la loi et la réalité du terrain.
C'est à l'unanimité, que la commission vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des affaires sociales (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.
La Commission des affaires sociales, placée sous l'aimable présidence de M. Pierre-Alain Champod, a traité en 2 séances, en date du 15 décembre 1998 et du 5 janvier 1999, cette pétition déposée le 18 novembre 1998 auprès du Secrétariat du Grand Conseil par l'Association genevoise des parents et amis des pensionnaires des EMS. La teneur de la pétition est la suivante :
Pétitionconcernant l'évacuation en catastrophe des personnes âgées de la Maison de retraite des Rives du Rhône
Mesdames etMessieurs les députés,
Voilà une semaine que la bombe a éclaté !
Nous, les familles et amis des pensionnaires évacués en catastrophe des Rives du Rhône, exigeons une explication quant à la mesure prise, surtout à la procédure et aux moyens employés par M. Segond.
La plupart d'entre nous, avons été informés par lettre recommandée express le jeudi 5 novembre en fin d'après-midi de la décision de fermeture de l'établissement en raison d'irrégularités dans la gestion comptable.
Nous vous laissons imaginer notre stupéfaction et notre désarroi face à cette décision brutale que rien ne laissait présager.
A Genève, on n'aurait jamais pris une telle décision pour l'évacuation immédiate de squatters.
Nous étions entièrement satisfaits de la qualité de la prise en charge et des soins prodigués à nos parents dans cet établissement que nous avions librement choisi. Le vendredi 6 novembre, avec l'aide des infirmières du Service du médecin cantonal, nous avons dû trouver en urgence le nouveau lieu de vie de nos parents respectifs. Quelle responsabilité, quelle angoisse, comment faire le bon choix en un temps record pour des personnes âgées et des familles qui ne comprenaient pas ce qui leur arrivait, qui ne comprennent toujours pas en quoi ils sont concernés par la gestion de l'établissement. Cette gestion n'ayant jamais eu aucune influence sur la qualité de la prise en charge.
Pourquoi le déplacement en toute urgence de tous les pensionnaires, la suppression de vingt postes de travail et l'évacuation totale d'un établissement qui remplissait parfaitement sa mission auprès des personnes âgées et ce, dans de bonnes conditions d'hébergement ?
Question restée sans réponse, sinon que la maison allait être vendue aux enchères le 8 décembre. Prétexte qui ne nécessitait certainement pas les transferts en urgence, d'autant que la maison aurait pu présenter un intérêt pour un acquéreur intéressé à la reprise de l'immeuble avec son exploitation, vu l'équipement existant et l'excellente réputation de la pension.
Il est inadmissible que les personnes âgées, dont une dame de 102 ans y résidant depuis 10 ans, soient évacuées dans ces conditions.
Nous accusons M. Segond et ses méthodes :
non-respect du droit de la personne âgée qui doit pouvoir choisir librement son lieu de vie ;
de manquer gravement à l'éthique prônée par l'un de ses collaborateurs le Professeur C.-H. Rapin.
Le Professeur Rapin mène en effet une campagne contre la maltraitance depuis plusieurs mois dans notre canton. Pourquoi cette campagne n'est-elle qu'un discours qui semble ne pas devoir être soutenu par M. Segond.
Qu'en est-il de l'éthique des professionnels de la santé dont M. Segond est le patron ? Les décisions de M. Segond vont ainsi à l'encontre de la politique pratiquée par ses services en gériatrie, relative à l'éthique, aux droits de la personne âgée et à la lutte contre la maltraitance.
Car il s'agit bien ici d'une forme de maltraitance subie sur le plan psychologique par les pensionnaires et tous ceux qui leur sont proches.
Nous dénonçons le traumatisme subi par ces personnes âgées et par leurs familles et leurs amis dont nous tenons M. Segond pour seul responsable, lui qui n'a pas vu comment certains se cramponnaient au bus ambulancier qui devait les emmener. Que dire des 6 pensionnaires venus d'autres établissements suite à leur fermeture et qui ont ainsi dû être déplacés une seconde fois ? Serait-ce le nouveau tourisme gériatrique ? Nous tenons aussi à dénoncer l'injustice de la mesure prise à l'encontre d'une équipe de professionnels qui ont montré pendant plus de 20 ans une très grande attention empreinte de chaleur humaine et d'affection à l'égard des pensionnaires qu'ils ont reçus. Ils n'ont pas pu faire valoir leur point de vue ou faire contrôler la légalité ou le caractère justifié de cette décision avant qu'elle ne soit exécutée.
Pourquoi n'a-t-il pas été envisagé au pire des cas, de nommer une direction intérimaire comme cela fut le cas dans un autre établissement dont l'ancienne direction a été accusée de mauvaise gestion ?
Pourquoi deux poids, deux mesures ?
En conclusion, nous exigeons qu'une politique unique et claire soit définie et appliquée pour tout le monde dans le respect des droits de chacun lors des fermetures d'établissements, en tenant compte avant tout des intérêts et du droit des personnes âgées et de leurs familles.
PLUS JAMAIS CELA - C'EST IGNOBLE
Association genevoise des parents et amis des pensionnaires des EMS
p. a. Mme Yvette Tissot, 13, rue François-Jaquier, 1225 Chêne-Bourg
Auditions
Audition des pétitionnaires, Mmes Madeleine Muller, présidente de l'Association genevoise des parents et amis des pensionnaires des EMS, Anne Pradervand et Marie-Françoise Losi, infirmières à la Maison de retraite des Rives du Rhône (MRRR ci-après), Sylvanne Francisco et Marie-Claire Roulet, filles de pensionnaires de la MRRR :
L'Association genevoise des parents et amis des pensionnaires des EMS a été créée spécialement suite à l'évacuation de la MRRR pour dénoncer la rapidité et la précipitation de cette évacuation et les conditions épouvantables dans lesquelles elle s'est produite.
Les 18 pensionnaires de l'établissement ont été avertis et déplacés dans un délai variant de 1 à 6 jours, ce qui a profondément bouleversé ces personnes âgées et leurs familles averties la veille par courrier recommandé express. Ce courrier expliquait qu'il y avait des irrégularités dans la gestion comptable de l'établissement et que le bâtiment devait être vendu aux enchères le 8 décembre 1998, raisons pour lesquelles la MRRR ne pouvait plus poursuivre ses activités et devait être rapidement fermée. Plusieurs pensionnaires n'ont même pas compris ce qui leur arrivait, d'autres ont complètement paniqué. Les pétitionnaires soulèvent les questions de la maltraitance et du manque d'éthique dans la procédure exécutée par le DASS.
Quant aux 19 employés de l'établissement, ils ont perdu leur travail par surprise et ont dû se trouver une nouvelle place dans un délai extrêmement court.
On reproche aussi l'absence de consultation de la commission sur les EMS ou de mise au courant des autres intervenants impliqués, comme l'APAF par exemple.
L'intention des pétitionnaires est d'éviter qu'une fermeture de pension ne se reproduise plus à l'avenir dans des conditions aussi dramatiques.
Audition de M. Michel Gönczy, directeur de l'Action sociale, et de Mme Brigitte Grillet, infirmière au Service du médecin cantonal :
M. Gönczy expose à la Commission des affaires sociales les raisons pour lesquelles le DASS s'est vu contraint de fermer la MRRR. Depuis l'introduction de la nouvelle loi sur les EMS, la comptabilité de chaque établissement doit être conforme et chaque EMS doit disposer d'une personnalité juridique propre, ce qui n'était pas le cas de l'ancien EMS des Rives du Rhône qui était géré par une société anonyme, les Bords du Rhône, dont la comptabilité ne pouvait être exigée. Lorsque la MRRR s'est conformée à la nouvelle loi, il a été possible d'accéder aux comptes de la SA, comptes dans lesquels l'OCPA a découvert des bizarreries juridico-financières et des détournements de fonds pour une valeur d'environ 2 millions de francs, argent prélevé tant sur les deniers publics que sur l'argent des pensionnaires.
De plus, les intérêts du crédit hypothécaire de l'immeuble n'avaient plus été payés depuis de nombreuses années, raison pour laquelle la banque a décidé de la vendre aux enchères à la date du 8 décembre 1998, ce qui a été publié dans la FAO du 12 octobre 1998. Cette annonce a créé un climat d'incertitude au sein de la MRRR, mais le directeur a rassuré les employés et les pensionnaires en disant qu'il avait l'intention de racheter l'établissement. L'administrateur a tenté de soustraire l'immeuble à la vente forcée par diverses manoeuvres juridiques et financières peu orthodoxes.
De surcroît, l'immeuble dans lequel se trouve la MRRR est très vétuste et nécessite d'importants travaux de rénovation, en particulier au niveau de la toiture et du chauffage, ainsi que de la taille des chambres qui étaient trop petites et ne disposaient pas de sanitaires.
L'enquête sur les lieux a aussi montré un manque de personnel qualifié et de suivi infirmier. Il manquait une infirmière pour la nuit et il n'y avait pas de projet d'animation, les pensionnaires restant assis quelle que soit l'heure de la journée. Un contrat a été passé avec le directeur afin de rectifier la situation dans un délai assez bref, mais il n'a pas été respecté et la qualité de la prise en charge des pensionnaires est restée insuffisante.
Dans ces circonstances, l'avenir de la MRRR était fortement compromis à plus ou moins long terme. L'Etat ne pouvait racheter un immeuble si délabré et s'est donc trouvé contraint de fermer l'établissement, après avoir tenté moult négociations.
Concrètement, l'ancienne SA avait une autorisation valable d'exploiter la MRRR qui se terminait au 31 octobre 1998, autorisation qui n'a pas été renouvelée, étant donné le refus de collaborer du directeur et de l'administrateur, en particulier en ce qui concernait la gestion de leur comptabilité, et des autres circonstances énoncées ci-dessus. Le Tribunal administratif a refusé la demande d'effet suspensif en date du 13 novembre 1998.
Le DASS a aussi déposé une dénonciation pénale auprès du Procureur général et c'est en raison de cette plainte pénale qu'il a fallu jouer de l'effet de surprise et fermer l'établissement si rapidement, ce qui a permis de perquisitionner le jour-même et de prendre possession des pièces comptables manquantes. C'est aussi la raison pour laquelle personne n'a été avisé avant l'intervention, pas même la Commission cantonale des EMS.
Cependant, il n'en reste pas moins que le souci premier du Département était le sort des résidents et du personnel employé à la MRRR. Pensant qu'une courte période d'incertitude totale valait mieux qu'une longue période d'incertitude relative, il a été décidé de fermer l'établissement rapidement et Mme Grillet et ses collaborateurs se sont consacrés à replacer tant les pensionnaires que les employés. Grâce à l'aide du personnel et du directeur, on a pu trouver une nouvelle pension pour la totalité des 18 pensionnaires en l'espace de 3 jours. Les soignants sont restés jusqu'au bout de l'évacuation des pensionnaires malgré l'émotion vive suscitée par les départs successifs, ce qui n'aurait peut-être pas été le cas si la fermeture de l'établissement s'était étalée sur plusieurs semaines ou plusieurs mois.
Quant au personnel, à l'exception de 3 personnes qui n'étaient pas en état de travailler ou qui ne souhaitaient plus travailler en EMS, tout le monde a été replacé dans un nouvel établissement.
Au sujet de l'intervention des médias sur place pendant la fermeture de la MRRR, le DASS les avait informés le jour-même par un communiqué de presse, tout en les priant de ne pas se rendre sur place étant donné les tensions que provoquaient cette situation pénible et difficile à gérer. M. Gönczy a tenté lui-même de retenir les journalistes et de leur expliquer la situation, malheureusement sans succès.
Travaux de la commission
Les commissaires ont été très touchés et émus par l'ensemble de la situation et par l'apparente incompréhension des pétitionnaires quant à ce qui s'était passé et ce qui leur était arrivé. Les explications fournies par M. Gönczy et Mme Grillet nous ont permis d'y voir plus clair, mais aussi de réaliser que l'information dispensée aux pensionnaires, aux familles et aux employés de la MRRR avait été nettement insuffisante, d'où leur souffrance et leur réaction de révolte.
Le bilan de l'expérience tiré par les intervenants du DASS a été fait et les conclusions qui ressortent de cet exercice d'autocritique sont de trois ordres. D'abord, concernant le délai de fermeture d'un établissement, il serait souhaitable de disposer d'un temps plus long pour pouvoir préparer le terrain avant l'intervention, ce qui n'était pas possible dans les circonstances particulières de la fermeture de la MRRR. Ce délai ne devrait pas dépasser un à deux mois pour éviter une démotivation et une hémorragie du personnel. Il est important d'envisager le départ des pensionnaires par groupes pour éviter des départs individuels pathétiques et difficiles à supporter émotionnellement pour tout le monde. Ensuite, il faudrait à l'avenir mieux maîtriser l'information et la communication, par exemple en mettant en place une permanence téléphonique, et en évitant d'aviser les médias au mauvais moment. Dans le cas de la MRRR, le Département a été dépassé par les événements et a perdu le contrôle de la situation médiatique ; il a aussi fourni des informations insuffisantes sur les motifs de fermeture de l'établissement, créant ainsi des vives réactions et beaucoup d'incompréhension. Finalement, il faudrait mieux définir les rôles des différents partenaires engagés autour des EMS (Etat, syndicats d'employés, APAF, FGEMS, Poliger ou autres médecins, Commission cantonale des EMS, ...) et distribuer les différentes tâches, interventions et responsabilités en fonction des compétences de chacun.
Cette autocritique a été appréciée par de nombreux commissaires qui, une fois au courant de toutes les circonstances précises, ont considéré que la fermeture de la MRRR s'était effectuée de la « moins mauvaise manière possible ».
Plusieurs commissaires ont proposé l'élaboration d'un cadre plus précis et d'une grille en cas de procédure de fermeture d'EMS où certains critères seraient définis, protocolés et respectés, ceci afin de respecter un cadre éthique et de préserver une certaine dignité de part et d'autre, même dans des interventions pratiquées en urgence. Il est important de faire participer les familles des pensionnaires concernées et de leur laisser le temps de choisir un nouvel et futur établissement. La proposition est faite de mettre à disposition des familles une documentation les informant des différentes mesures susceptibles d'être prises au cours de l'application de la loi, ceci afin qu'elles sachent à quoi s'attendre et que l'Etat est là pour faire appliquer la loi et les défendre.
D'autres commissaires soulèvent la question des autres EMS en cours d'enquête, c'est-à-dire ne correspondant pas aux nouvelles normes édictées par la loi, et souhaiteraient que le DASS les informe de l'état actuel de la situation dans notre canton et des différents problèmes identifiés, en particulier s'il y a d'autres établissements qui devront être fermés. M. Gönczy précise en effet que les contrôles menés actuellement, plus approfondis que par le passé, font apparaître des problèmes importants dans un certain nombre d'EMS. Mme Grillet pense quant à elle qu'il faudra compter environ 5 ans pour changer la qualité réelle des soins et obtenir la réalisation concrète de tous leurs critères de qualité. Certains commissaires demandent au Département de leur fournir un rapport écrit sur tous ces points, en particulier sur les critères de fermeture d'un EMS et sur les procédures à suivre une fois une fermeture décidée. M. Gönczy s'engage à transmettre à notre commission le résultat de leurs travaux, actuellement en cours, dès qu'ils seront achevés.
Votes :
La proposition de renvoi de cette pétition 1225 au Conseil d'Etat est refusée par 10 voix contre 3 et 1 abstention.
La proposition de dépôt de la pétition 1225 sur le bureau du Grand Conseil est acceptée par 12 voix et 3 abstentions.
C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, la Commission des affaires sociales vous propose de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.
Débat
Le président. La rapporteuse, Mme Buffat, n'a rien à ajouter à son rapport. Madame Blanchard, vous avez la parole.
Mme Marie-Paule Blanchard-Queloz (AdG). Monsieur le président, je suis étonnée que la rapporteuse, Mme Buffat, n'ait rien à ajouter à son rapport !
Mesdames et Messieurs les députés, action sociale veut dire : «ensemble des actions concernant l'amélioration des conditions de vie des membres de la société», c'est le dictionnaire qui le dit. Et, par déduction, la direction de l'action sociale devrait donc, me semble-t-il, être l'exécutrice et le garant de cet objectif.
Il est question ici, dans cette pétition, de l'évacuation forcée, en urgence, de dix-huit pensionnaires âgés d'un EMS, décidée par la direction de l'action sociale. On se souvient de l'indignation et de la colère de M. le député Marti interpellant à ce propos le conseiller d'Etat M. Segond.
Les parents et amis de ces pensionnaires évacués ont créé une association, qui comprend aussi les professionnels de la santé concernés, tant ils ont été choqués par ces événements qui ont traumatisé leurs parents, respectivement leurs pensionnaires. Et ils ont posé la question : pourquoi le déplacement en toute urgence de tous les pensionnaires, la suppression de vingt postes de travail et l'évacuation totale d'un établissement qui remplissait parfaitement sa mission auprès des personnes âgées, et ce dans de bonnes conditions d'hébergement ? A l'époque des faits, le département leur a répondu : parce que la maison allait être vendue. Or, c'est parce qu'ils ne voyaient pas en quoi la gestion de l'établissement les concernait, en quoi cette soi-disant vente justifiait une évacuation d'urgence, qu'ensemble, parents, amis et personnel de l'EMS, ils ont formulé et déposé cette pétition devant ce Grand Conseil. Mais, au lieu de répondre à ces questions, ce rapport suscite encore plus de colère et de révolte.
Tout d'abord, il est navrant que la majorité de la commission des affaires sociales se soit contentée des explications fournies par la direction de l'action sociale, sans même vérifier les affirmations contenues dans son audition rapportée en page 5. Il est encore plus affligeant de parler, à l'instar de la rapporteuse Mme Buffat, «d'apparente incompréhension» de la part des pétitionnaires et «d'explications claires» fournies par le département. A la dénonciation par les pétitionnaires du traumatisme subi par leurs parents âgés succède l'humiliation de la proposition de classement pur et simple de cette pétition, après une molle autocritique du département, du genre : on fera mieux la prochaine fois ! Cela est inacceptable. Et puisque la commission n'a pas jugé bon de le faire, nous vérifierons ici, point à point, les raisons pour lesquelles la direction de l'action sociale s'est soi-disant, et là je cite, «vue contrainte de fermer en urgence la maison de retraite des Rives du Rhône».
Première raison de l'évacuation d'urgence : des bizarreries juridico-financières et des détournements de deniers publics pour 2 millions. Gérée anciennement par une société anonyme, la maison de retraite s'est conformée à la loi en se dotant d'une personnalité juridique propre. La société anonyme était en dépôt de bilan depuis plusieurs années, ce que le département savait. Comment parler alors de détournements de derniers publics, quand l'autorisation d'exploiter a été accordée par ce même département début 1998 ? Question : l'évacuation forcée des pensionnaires, avertis le soir pour le lendemain, a-t-elle permis de régler cette bizarrerie, et si oui en quoi ?
Deuxième raison de l'évacuation d'urgence : les intérêts du crédit hypothécaire de la société anonyme non payés, ce qui a décidé la banque à la vente forcée. Question : en quoi cela concernait-il la maison de retraite qui, elle, payait son loyer à la société anonyme ? La faillite ayant été prononcée, la vente forcée de l'immeuble n'aura donc pas lieu. Sur ces questions, les pétitionnaires affirment que les pensionnaires ne se sont jamais sentis concernés par la gestion et qu'elle n'a jamais eu d'influence sur la qualité de la prise en charge. Est-ce pour rassurer l'inquiétude des pensionnaires sur l'éventuelle vente de l'immeuble que le département les traumatise en les arrachant à leur lieu de vie - certains y vivaient depuis dix ans ?
Troisième raison de l'évacuation d'urgence : l'immeuble est très vétuste et nécessite d'importants travaux de rénovation au niveau de la toiture, les chambres sont trop petites et dépourvues de sanitaires. Question : la toiture s'est-elle effondrée depuis l'évacuation ? Une liste comparative montre que, sur vingt-cinq établissements, seuls onze ont des chambres à un ou deux lits avec sanitaires. Question : les autres établissements du canton vont-ils aussi être évacués d'urgence ?
Quatrième raison de l'évacuation d'urgence : l'enquête a montré un manque de personnel qualifié et de suivi infirmier. Et pourtant le Conseil d'Etat a bien autorisé, par des arrêtés, ces personnes qualifiées à exercer leur métier d'infirmières ! Tout cela n'a-t-il pas été vérifié lors de l'autorisation d'exploitation par les services de l'OCPA en juillet 1998 ? Ce même OCPA, qui prévoyait pour cet établissement un effectif du personnel pour 1998 de 13,8 postes, alors que l'établissement en comptait effectivement 14,7. Question : le département est-il si soucieux des soins prodigués aux pensionnaires qu'il les fait évacuer de manière brutale et sans avertissement, ou un avertissement quelques heures à l'avance, parce que l'établissement compte un poste de plus que prévu ?
Cinquième raison de l'évacuation d'urgence : pas de projet d'animation. Est-ce pour cette raison que, lors de cette évacuation, plusieurs pensionnaires étaient sortis en ville, emmenés par l'animatrice professionnelle en poste ? Cette personne aurait pu fournir à la commission les détails de son travail d'animation dans cet établissement. Est-ce pour procurer de l'animation aux pensionnaires que le département, si soucieux de leur bien-être, les fait évacuer sans les avertir ?
Sixième raison de l'évacuation d'urgence, et la plus douteuse : en raison d'une dénonciation pénale auprès du procureur, il a fallu jouer de l'effet de surprise pour perquisitionner le même jour, le 5 novembre 1998, les pièces comptables manquant. Faire évacuer dix-huit personnes âgées, dont une dame de 102 ans, pour saisir des pièces comptables ? Franchement, cela dépasse tout ce que l'on peut imaginer ! D'autant plus que, depuis ce jour-là, aucune pièce comptable n'a été saisie puisque la perquisition n'a été ordonnée que le 9 novembre par le procureur. Du reste, les pièces comptables ne se trouvaient pas dans l'établissement, mais au domicile du directeur !
Même la commission cantonale des EMS, dont le mandat législatif est d'assister le conseiller d'Etat et de veiller au bon fonctionnement des EMS, n'a pas été avisée de cette intervention. Question : est-ce ainsi que le département garantit l'application de l'article 7, lettre e), de la loi relative aux établissements médico-sociaux accueillant des personnes âgées, sous le chapitre Compétences de la commission, je cite : «La commission propose toute mesure utile à l'amélioration des prestations offertes par les EMS.»
Aussi, lorsque nous lisons en page 6 du rapport de Mme Buffat, je cite : «Il n'en reste pas moins que le souci premier du département était le sort des résidents et du personnel employé à la maison de retraite des Rives du Rhône», on ne décolère plus ! L'impression se confirme ici que toutes ces raisons ont été construites par le département après coup, pour justifier une intervention et un abus de pouvoir injustifiables. Le département serait bien inspiré, pour une fois, d'écouter les personnes concernées : les pensionnaires, leurs familles et le personnel. Il apprendrait que ces personnes étaient heureuses dans cet établissement. Le département serait bien inspiré de les interroger aujourd'hui sur leur état de santé, leur joie de vivre, qui a disparu pour certains, d'interroger aussi les employés dont certains n'ont pas retrouvé d'emploi, contrairement à ce qu'affirme le département. Et le département, enfin, serait bien inspiré de s'intéresser au sort des gens pour qui les lois sont faites. Je demande donc le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat, qui doit rendre des comptes sur ses agissements aux pensionnaires qu'il a maltraités, aux pétitionnaires et à la population qui est représentée ici ! (Applaudissements.)
M. Pierre Marti (PDC). Je n'ai plus grand-chose à ajouter après l'intervention de Mme Blanchard, si ce n'est que je voudrais relever le sentiment général de la commission, qui n'apparaît pas tout à fait dans le rapport. En effet, lorsque nous avons entendu les pétitionnaires, puis M. Gönczy, nous nous sommes trouvés devant deux points de vue diamétralement opposés. Il semblait vraiment qu'ils ne parlaient pas des mêmes faits, que les gens avaient vécu les uns à côté des autres mais n'avaient pas vécu le même événement. C'était assez difficile à comprendre et cela n'apparaît pas suffisamment dans le rapport.
Cela dit, je regrette vraiment, encore une fois, qu'on ait eu beaucoup moins d'égards envers des personnes âgées qu'on en a envers des squatters ! (Exclamations.) Je le regrette, mais c'est vrai ! Et je demanderai au Grand Conseil qu'il vote le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat, et non pas le dépôt sur le bureau, afin qu'après toutes les questions qui ont été posées nous puissions avoir un rapport circonstancié. M. Gönczy nous a affirmé qu'il était en train de mettre en place des procédures et des critères de fermeture, en réponse aux diverses questions, et c'est la raison pour laquelle je vous demande de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, qui nous transmettra le rapport voulu.
M. Guy-Olivier Segond. Dans toutes les réalités, ou les hypothèses décrites tout à l'heure par Mme la députée Blanchard, il manque un élément pour le moins important, à savoir la réalité juridique et les décisions qui avaient été prises par les tribunaux.
La réalité juridique, tout d'abord, s'agissant de l'autorisation d'exploitation de cette institution : depuis des années, l'autorisation d'exploitation était renouvelée à titre précaire, vu la quasi-impossibilité pour le département et ses différents services de collaborer avec le directeur et l'administrateur. Le dernier renouvellement temporaire de l'autorisation d'exploitation venait à échéance le 31 octobre 1998. Un recours avait été formé contre cette fin d'autorisation d'exploitation par la maison en question. Le Tribunal administratif a non seulement refusé la demande d'effet suspensif, mais a confirmé le retrait d'autorisation le 13 novembre 1998.
Par ailleurs, dans la «Feuille d'avis officielle» du 12 octobre 1998, il était annoncé - ce qui est d'ailleurs mentionné dans le rapport de Mme Buffat - que la maison de retraite serait mise aux enchères, nouvelle qui avait contribué à susciter une certaine émotion parmi les pensionnaires et le personnel : la maison devait être évacuée en tout état pour le 8 décembre 1998, peu avant Noël !
Il est possible que la direction de l'action sociale ait commis une erreur en préférant évacuer la maison à la fin de l'automne plutôt qu'à la veille de Noël ! Mais je pense que nous aurions essuyé encore plus de critiques si nous avions évacué cette maison au moment de la vente aux enchères, soit quelques jours avant Noël. Le bruit autour de cette fermeture - qui avait été annoncée à plusieurs reprises aux responsables - aurait été encore plus considérable. C'est pourquoi, malgré les faits que vous avez choisi de rappeler, malgré les hypothèses que vous avez essayé de formuler, la réalité juridique, la réalité judiciaire était un peu différente : la maison devait bel et bien être vendue aux enchères le 8 décembre, selon l'avis publié dans «Feuille d'avis» du 12 octobre 1998.
Le président. Je mets aux voix la proposition de Mme Blanchard-Queloz de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.
Le résultat est douteux.
Il est procédé au vote par assis et levé.
Le sautier compte les suffrages.
Cette proposition (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) est adoptée par 36 oui contre 24 non.
1. Introduction
A la suite du refus, par le corps électoral genevois, le 7 juin 1998, du Concordat instituant le réseau hospitalo-universitaire de Suisse occidentale (RHUSO), les gouvernements des cantons de Genève et Vaud, réunis en séance commune le 10 février 1999,
ont pris acte du fait que les fonds actuellement à disposition de l'Association Vaud-Genève pour la collaboration hospitalière permettent de financer les activités communes existantes jusqu'au 31 décembre 1999 ;
ont décidé de proposer aux deux Parlements, vaudois et genevois, dans le cadre des projets de budgets 2000, de continuer à financer le fonds Vaud-Genève par un prélèvement sur les budgets hospitaliers afin d'assurer la poursuite des activités communes existantes dès le 1er janvier 2000.
Par ailleurs, les 2 Conseils d'Etat ont décidé de présenter aux 2 Parlements un rapport commun dressant le bilan des 6 années de collaborations hospitalières, conduites par l'Association Vaud-Genève.
2. Résumé du rapport de l'association Vaud-Genève
2.1 Après une présentation des caractéristiques juridiques et organisationnelles de cette structure, le rapport de l'Association Vaud-Genève dresse un bilan des divers projets de collaboration et de développement, suite à l'appel d'offres lancé en 1993.
Il rappelle également la démarche institutionnelle lancée par les deux gouvernements et les deux parlements cantonaux, qui a permis l'adoption, après une procédure parlementaire unique en son genre, du plus ambitieux projet de collaboration jamais élaboré entre deux cantons suisses.
2.2 Créée en 1993, l'Association Vaud-Genève fixe « au rapprochement Vaud-Genève » deux axes principaux, à savoir :
a) la mise en place d'un plan directeur de répartition des activités médicales ;
b) un regroupement progressif par projets des deux centres hospitalo-universitaires.
2.3 L'Association lance, en 1993, un appel d'offres et, sur 105 esquisses reçues, sélectionne 25 projets communs. Ceux-ci relèvent des secteurs hospitaliers tels que la neurochirurgie, l'ORL, l'urologie, la pneumologie, l'hématologie, ainsi que des domaines de la logistique et de l'information.
2.4 Après quatre à cinq ans, ces projets aboutissent à trois types de résultats :
a) certains ont engendré des activités médicales communes entre les deux sites, qui perdurent et qui sont amenés à se développer ;
b) d'autres ont une valeur stratégique importante pour la collaboration intercantonale : ils développent des données communes et des moyens de télécommunications entre les deux sites ;
c) les derniers, enfin, ont conduit à la création de centres de soins ou de recherches appliquées Vaud-Genève et à des activités hospitalo-universitaires romandes.
2.5 Le rapprochement des deux informatiques hospitalières se réalise en menant des projets communs aux deux hôpitaux universitaires. Ceux-ci doivent répondre à deux critères, à savoir une économie d'échelle par un développement conjoint ou un transfert de connaissances et d'expériences d'un site vers l'autre.
2.6 Plusieurs projets de statistiques et d'analyse de coûts, y compris l'adoption de données communes en matière de comptabilité analytique, permettent aux hôpitaux d'harmoniser peu à peu leurs modes de gestion.
2.7 Parallèlement au développement d'activités communes aux deux sites, l'Association tente d'établir un plan directeur de rapprochement des deux centres hospitalo-universitaires, sans parvenir à rédiger un document commun.
2.8 Dès lors, les deux Conseils d'Etat chargent en juin 1995 le professeur Bernard Vittoz, ancien président de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, et le bureau exécutif de l'Association Vaud-Genève, de faire une étude sur la « création, dans le cadre des Universités de Lausanne et de Genève, d'une Ecole de médecine et d'un ensemble hospitalier commun aux cantons de Vaud et de Genève ».
Le groupe de travail présente deux scénarii et en recommande un.
Ce rapport est soumis à une large procédure de consultation. Sur la base de ces résultats, les deux Conseils d'Etat chargent un groupe de travail restreint de rédiger un concordat.
2.9 Le concordat instituant le réseau hospitalo-universitaire de Suisse occidentale est approuvé par les Parlements vaudois et genevois. Il fait l'objet d'un référendum à Genève et est rejeté le 7 juin 1998 en votation populaire.
3. Les interventions parlementaires
A la suite du refus du concordat mettant en place le RHUSO, trois motions ont été déposées devant le Parlement genevois. Il s'agit de :
3.1 La motion 1221 du 9 juin 1998 concernant le RHUSO de Mmes et MM. Pierre-François Unger, Stéphanie Ruegsegger, Jean-Claude Vaudroz, Juliette Buffat, Pierre Froidevaux, Barbara Polla et Walter Spinucci invitant le Conseil d'Etat « à reprendre immédiatement les négociations en vue d'une intensification de la collaboration entre les hôpitaux universitaires de Genève et de Vaud ».
3.2 La motion 1222 du 11 juin 1998 sur la collaboration hospitalière Vaud-Genève de Mme et MM. Pierre-Alain Champod, Gilles Godinat et Louiza Mottaz invitant le Conseil d'Etat « à proposer, en collaboration avec le Conseil d'Etat du canton de Vaud, un concordat de portée limitée permettant le regroupement des prestations de haute technologie (...) et le développement de pôles d'excellence (...) ».
3.3 La motion 1241 du 2 novembre 1998 pour le maintien et le développement de l'Association pour la collaboration entre les cantons de Vaud et de Genève dans le domaine de la santé publique et des Hôpitaux universitaires déposée par Mmes et MM. Barbara Polla, Janine Hagmann, Christian de Saussure, Juliette Buffat, Micheline Spoerri, Pierre-François Unger, Stéphanie Ruegsegger, Nelly Guichard, Marie-Thérèse Engelberts, Pierre Froidevaux, Pierre-Pascal Visseur et Marie-Françoise de Tassigny invitant le Conseil d'Etat :
- « à présenter un bilan prospectif et une vision d'avenir de l'Association Vaud-Genève, (...) pour contribuer à la réalisation d'une répartition efficace de certaines tâches entre Genève et Vaud ;
- à prendre en considération une participation plus grande des facultés de médecine à l'Association Vaud-Genève ».
Lors de ses séances des 5 novembre et 3 décembre 1998, le Grand Conseil a renvoyé ces trois motions à la Commission de la santé.
4. Les contre-propositions des opposants
Au cours de la campagne électorale précédant le vote populaire, les milieux à l'origine du référendum ont indiqué que leur opposition était liée à la forme plus qu'à la nécessité de collaborer. Ils ont annoncé qu'ils déposeraient une proposition alternative, susceptible de réunir l'accord des instances des deux cantons concernés.
A ce jour et à notre connaissance, aucun projet quelconque n'a été élaboré ou présenté.
5. L'appréciation du Conseil d'Etat
Sans vouloir polémiquer davantage, le Conseil d'Etat rappelle que le RHUSO - loin d'être un projet rapide et bâclé - était le résultat d'une longue réflexion entamée par les gouvernements et les parlements cantonaux ainsi que par les instances hospitalières et universitaires, médicales et administratives, des deux cantons concernés.
Par ailleurs, le Conseil d'Etat entend souligner deux éléments nouveaux, consécutifs au refus du RHUSO :
- d'une part, le canton de Vaud - qui a des frontières communes avec 4 autres cantons, dont l'un est le siège d'un hôpital universitaire - a conclu, ces derniers mois d'importants accords, régionaux ou ponctuels, avec ses voisins ;
- d'autre part, divers milieux étudient la possibilité d'améliorer l'organisation hospitalo-universitaire suisse - qui se caractérise par une grande complication et une grande dispersion - en en transférant, totalement ou partiellement, la responsabilité à la Confédération qui réglemente déjà la formation médicale, la recherche scientifique et les prestations à charge de l'assurance-maladie.
Dès que les opposants au RHUSO auront fait connaître leurs contre-propositions et dès que les interventions parlementaires auront été traitées par le Grand Conseil, le Conseil d'Etat genevois examinera avec le Conseil d'Etat vaudois les possibilités de collaboration qui seront encore ouvertes.
En outre, dans l'immédiat, il proposera au Grand Conseil, dans le cadre du projet de budget 2000, de continuer à financer le fonds Vaud-Genève par un prélèvement sur le budget hospitalier afin d'assurer la poursuite des activités communes existantes dès le 1er janvier 2000.
Annexe : rapport de l'Association Vaud-Genève 1992-1998
ANNEXE
RAPPORT CONCERNANT LES ACTIVITES DE
L'ASSOCIATION VAUD-GENEVE
Genève et Lausanne, janvier 1999
Table des matières
Page
I. Origine de l'Association 4
1. Convention intercantonale de collaboration dans le domaine
sanitaire entre les cantons de Genève et de Vaud 4
2. Loi relative au financement de la collaboration entre les
cantons de Vaud et de Genève dans le domaine de la santé
publique et des hôpitaux 5
II. Mise en place de l'Association Vaud-Genève 6
1. Elaboration de la politique de l'Association Vaud-Genève 7
2. Fonctionnement de l'Association Vaud-Genève 7
3. Développement des activités de l'Association Vaud-Genève 10
III. Regroupement progressif des deux Centres
hospitalo-universitaires par le développement de
projets communs et de structures Vaud-Genève 11
1. Lancement d'un appel d'offres et évolution des projets
de développement retenus 11
2. Création d'entités Vaud-Genève 21
3. Rapprochement des procédures de nomination des
professeurs des deux Facultés de médecine 27
4. Rapprochement des informatiques hospitalières 28
5. Harmonisation progressive de la gestion des Centres
hospitalo-universitaires 31
IV. Développement des relations avec d'autres partenaires 35
V. Approche institutionnelle 38
1. Plan directeur de la collaboration Vaud-Genève 1995-2000 38
2. Mandat d'étude pour la création d'un réseau
hospitalo-universitaire lémanique 39
3. Rédaction du "; rapport Vittoz " 40
4. Séance des deux Facultés de médecine à Beausobre 40
5. Contenu du "; rapport Vittoz " 41
6. Procédure de consultation du "; rapport Vittoz " 43
7. Rédaction du Concordat instituant le Réseau
hospitalo-universitaire de Suisse occidentale 44
8. Mise en place de la procédure interparlementaire 47
9. Examen et adoption du Concordat instituant le Réseau
hospitalo-universitaire de Suisse occidentale (RHUSO) 48
10. Lancement d‘une initiative dans le canton de Genève
et votation populaire 50
VI. Financement et gestion du fonds de coopération Vaud-Genève 50
Conclusion 53
I. origine de l'association
1. Convention intercantonale de collaboration dans le domaine sanitaire entre les cantons de Genève et de Vaud
Le 20 novembre 1990, MM. Guy-Olivier Segond et Philippe Pidoux, Conseillers d'Etat, signent la Convention intercantonale de collaboration dans le domaine sanitaire entre les cantons de Genève et de Vaud (voir annexe 1).
Devant les déficits budgétaires des deux cantons et l'explosion des coûts de la santé, les deux Conseils d'Etat décident de rapprocher les deux communautés sanitaires.
Sur la base de cette convention, une commission de coordination des Hôpitaux universitaires est créée. Elle a pour but de stimuler la coopération entre les établissements hospitaliers dans tous les domaines où cela est utile.
Cet accord prévoit également la création d'un fonds alimenté par les budgets cantonaux et destiné à financer certains projets de coopération nouveaux.
La commission de coordination se réunit pendant deux ans. Elle mène une réflexion sur les différentes spécialités médicales qui mériteraient d'être coordonnées. Elle donne mandat à un consultant de définir des critères de collaboration et de faire un inventaire des collaborations possibles.
Les principaux domaines retenus sont la neurochirurgie, la neurologie, la chirurgie pédiatrique, l'oncologie, les greffes, la médecine nucléaire, l'Institut universitaire romand de santé au travail, l'Institut universitaire d'histoire de la médecine, et la génétique moléculaire humaine.
Malgré l'importance de ces travaux, la Commission de coordination ne parvient pas à concrétiser les projets de collaboration qu'elle a sélectionnés.
Le fonds de coopération n'est par conséquent pas créé.
Pour réaliser véritablement des projets d'une telle envergure, il est manifestement nécessaire d'aller plus loin et de créer une structure permanente.
2. Loi relative au financement de la collaboration entre les Cantons de Vaud et de Genève dans le domaine de la santé publique et des hôpitaux universitaires
Durant l'automne 1992, la Commission de coordination entre les hôpitaux universitaires établit les conditions indispensables à la réalisation de projets de coordination et aboutit à la conclusion qu'une association comprenant les principaux acteurs hospitaliers et universitaires, appuyés par un secrétariat permanent, doit être mise en place afin de mener les projets Vaud-Genève.
C'est sur la base de ces réflexions que sont créés l' "; Association pour la collaboration entre les cantons de Vaud et de Genève dans le domaine de la santé publique et des hôpitaux universitaires " et le Fonds de coopération.
En octobre 1992 est déposé devant le Grand Conseil genevois le projet de loi relatif au financement de la collaboration entre les cantons de Vaud et de Genève dans le domaine de la santé publique et des hôpitaux.
Ce texte prévoit une subvention annuelle versée au fonds de coopération Vaud-Genève, prélevée sur les subventions accordées aux établissements publics médicaux à caractère universitaire.
En 1993, ce montant est égal à 1% des subventions accordées aux établissements publics médicaux, soit Fr. 5'600'000,-
Sur rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil, cette subvention peut être augmentée de 1% chaque année et cela jusqu'à 5% en 1997.
Le fonds de coopération Vaud-Genève a pour but de financer des activités communes aux deux centres hospitalo-universitaires. Il assurera progressivement une meilleure allocation des ressources grâce à une organisation plus rationnelle des moyens et permettra de garantir ainsi une nouvelle amélioration de la qualité des soins.
Le 18 décembre 1992, la loi relative au financement de la collaboration entre les cantons de Vaud et de Genève dans le domaine de la santé publique et des hôpitaux est adoptée par le Grand Conseil genevois (voir annexe 2).
A Lausanne, l'alimentation du fonds ne fait pas l'objet d'une loi spécifique, mais est incluse dans le processus budgétaire des Hospices cantonaux. L'apport au fonds de coopération Vaud-Genève est prélevé sur le fonds de réserve de cette institution.
II. Mise en place de l'Association Vaud-Genève
Les Statuts de l'Association Vaud-Genève sont adoptés le 28 janvier 1993 (voir annexe 3).
L'Assemblée générale, organe suprême, réunit les quatre Conseillers d'Etat de la Santé et de l'Instruction publique des deux cantons, et des représentants des Hôpitaux, des Facultés de médecine et des Universités.
Le Comité est composé des deux Conseillers d'Etat de la Santé publique, des Doyens des deux Facultés de médecine, du Directeur général des Hospices cantonaux du canton de Vaud, du Secrétaire général du Département de l'action sociale et de la santé du canton de Genève, des délégués des Collèges des chefs de service des deux Cantons, des Directeurs des deux centres hospitaliers universitaires.
Le Bureau exécutif assure le suivi des décisions de l'Assemblée générale et du Comité.
Le Conseil médical, composé de dix professeurs vaudois et genevois, fonctionne comme expert.
Dès le mois de mai 1993, le Secrétariat général est mis en place.
1. Elaboration de la politique de l'Association Vaud-Genève
Durant le deuxième semestre 1993, les membres du Bureau exécutif élaborent la stratégie de rapprochement.
A long terme, l'Association vise la création d'un pôle hospitalo-universitaire organisé sur deux sites complémentaires, centre d'un réseau d'activités sanitaires à vocation romande. Elle agit comme promoteur d'une unification des règles de fonctionnement des Facultés de médecine et des Hôpitaux vaudois et genevois et favorise le développement d'outils de gestion et de langages informatique et statistique communs.
Les quatre principaux axes que l'Association Vaud-Genève s'est fixés sont les suivants :
1. Identifier dans tous les domaines le potentiel de coopération existant et définir le schéma directeur de la répartition des activités de coopération identifiées.
2. Réaliser, par des regroupements institutionnels, un certain nombre de coopérations identifiées dans le cadre du schéma directeur.
3. Soutenir financièrement et coordonner les développements d'activités nouvelles de coopération (appels d'offres).
4. Promouvoir la coopération hospitalo-universitaire Vaud-Genève.
Ces quatre axes de développement restent aujourd'hui les objectifs de l'Association Vaud-Genève.
2. Fonctionnement de l'Association Vaud-Genève
Les membres du Bureau élaborent d'une part le règlement du Fonds de coopération, d'autre part les modalités de l'appel d'offres qu'ils souhaitent lancer, de même que le suivi des projets qui seront retenus.
1. Règlement du fonds de coopération
Les conditions d'attribution sont strictes puisque les prestations subventionnées doivent faire partie d'activités regroupées qui s'inscrivent dans un plan à long terme et doivent améliorer la qualité des prestations, réaliser des économies ou affirmer une compétence spécialisée.
Cette attribution peut se faire soit par sélection concurrentielle, soit par appel.
Dans ce cadre, le Bureau recourt à l'avis du Conseil médical de l'Association.
2. Procédure du premier appel d'offres
Les modalités de l'appel d'offres sont préparées par le Service de la planification et de l'évaluation du Service des Hospices cantonaux selon une méthodologie éprouvée scientifiquement.
La procédure, de même que les critères, sont discutés pendant de nombreux mois par le Bureau exécutif et le Conseil médical :
- L'appel d'offres est ouvert à tous projets communs de développement concernant les soins, la recherche, l'enseignement, la logistique des institutions universitaires et les actions de santé publique.
- Les critères de sélection retenus sont le potentiel de coopération, l'utilité du projet, sa qualité et le rapport coûts/efficacité.
- Une procédure de sélection à deux tours est retenue, selon laquelle un premier tri est effectué sur la base d'une esquisse de deux pages environ, présentée sur un formulaire ad hoc. Les projets retenus dans ce cadre font ensuite l'objet d'un document détaillé sur la base duquel les décisions définitives d'attribution sont prises.
Le lancement de l'appel d'offres est effectué en juillet 1993 et le choix définitif des projets intervient en mars 1994.
3. Conclusion des contrats
Les budgets de l'ensemble des projets sélectionnés sont attentivement examinés et revus à la baisse. Des contrats de trois ans sont signés, prévoyant qu'aucun montant supplémentaire ne sera accordé. Conjointement, une procédure d'évaluation est mise en place.
4. Procédure d'évaluation
La procédure d'évaluation est élaborée par un groupe de travail composé d'experts de l'assurance de qualité émanant des deux hôpitaux universitaires. Elle est examinée par les membres du Conseil médical et approuvée par le Bureau exécutif. Cet examen vise à contrôler non seulement la qualité, mais également l'utilisation adéquate des ressources accordées par l'Association Vaud-Genève.
Cette procédure prévoit une grille d'évaluation des activités médicales et un tableau de suivi budgétaire, remplis par les auteurs, ainsi qu'une visite sur place par deux experts, l'un émanant du Bureau de l'Association, l'autre du Conseil médical. Sur cette base, ces derniers rédigent un rapport qui est soumis pour approbation au Bureau de l'Association. Celui-ci prend la décision de poursuivre le projet évalué, de le réorienter, ou de l'arrêter.
Le Bureau exécutif décide de procéder à deux évaluations des projets, soit après 18 et 30 mois.
Au niveau administratif, tout ce processus est géré et coordonné par le Secrétariat général de l'Association, à savoir, deux personnes. Ainsi, toutes les sommes attribuées au Fonds de coopération sont utilisées pour les projets.
Tout comme la sélection des projets, la méthode d'évaluation s'est révélée appropriée, mais elle souffre de la même ambiguïté, à savoir, qu'elle est réalisée non pas par des experts extérieurs, mais par des pairs à l'intérieur des hôpitaux et qui sont parfois également auteurs de projets communs subventionnés.
Après 5 ans d'activité, les modes de fonctionnement adoptés demeurent efficaces et adéquats. Pour tous nouveaux projets, les critères de sélection, la conclusion des contrats et les contrôles de qualité décrits ci-dessus sont rigoureusement appliqués.
3. Développement des activités de l'Association Vaud-Genève
De 1994 à 1998, l'Association Vaud-Genève développe ses activités de la manière suivante :
1. Un rapprochement progressif des deux Centres hospitalo-universitaires est réalisé par le Bureau exécutif par la stimulation de projets communs et l'incitation à la création de structures communes, financées par le Fonds de coopération lorsque cela est nécessaire.
2. Une approche institutionnelle est menée par le Comité de l'Association, conjointement avec les deux Conseillers d'Etat chargés de l'Instruction publique.
Cette démarche, plus politique, est validée par les deux Conseils d'Etat. Elle aboutit au Concordat instituant le Réseau hospitalo-universitaire de Suisse occidentale (RHUSO), adopté par les deux Parlements vaudois et genevois et rejeté en votation populaire à Genève le 7 juin 1998.
Ces deux approches ne s'excluent pas l'une l'autre, mais sont parfaitement complémentaires.
III. Regroupement progressif des deux Centres hospitalo-universitaires par le développement de projets communs et de structures vaud-geneve
L'Association Vaud-Genève développe la collaboration entre les deux Centres hospitalo-universitaires dans cinq axes :
1. Lancer un appel d'offres et gérer les projets de développement retenus;
2. Créer et développer des entités communes Vaud-Genève;
3. Etablir progressivement une procédure de nomination commune aux deux Facultés de médecine;
4. Harmoniser les informatiques hospitalières;
5. Rapprocher les modes de gestion des deux centres hospitalo-universitaires.
1. Lancement d'un appel d'offres et évolution des projets de développement retenus
L'Association Vaud-Genève lance un appel d'offres en juin 1993. 25 projets sont sélectionnés, soit parce qu'ils conduisent à des recherches cliniques qui ne peuvent pas être menées séparément pour des questions de masse critique, soit parce qu'ils débouchent sur le système de communication entre les deux centres et améliorent la qualité de la gestion. Certains projets sont achevés après les trois ans prévus par le contrat. D'autres sont poursuivis, soit parce qu'ils ont créé des activités durables communes aux deux sites, soit parce qu'ils ont conduit au développement de centres médicaux ou de gestion unique Vaud-Genève.
1.1 Projets retenus par le Bureau de l'Association Vaud-Genève lors de l'appel d'offres de 1993
Sur 105 esquisses présentées conjointement par les professeurs de médecine de Lausanne et de Genève, 24 projets sont retenus. Le choix est difficile à réaliser.
Les experts mettent la priorité sur la potentialité de collaboration de chaque projet et sur leur excellence. Ils veillent aussi à ce que les différents secteurs de la médecine soient représentés. Lorsque leur choix est définitivement arrêté, les experts ont plusieurs séances de discussion avec les membres du Bureau.
Finalement, l'Association Vaud-Genève entérine la sélection de 22 projets lors de sa séance du 19 avril 1994, 5 projets faisant encore l'objet d'un examen complémentaire par les experts.
Les vingt-deux projets suivants sont retenus, pour un montant de Fr. 16'988'654.- :
Projets
Fr.
Chirurgie réfractive cornéenne dans le bassin lémanique
1'195'000,00
Chirurgie maxillo-faciale
329'900,00
Implants cochléaires
279'885,00
Centre romand de phoniatrie et d'audiophonologie
251'840,00
Financement d'un Centre d'évaluation pré-chirurgicale de l'épilepsie
3'253'000,00
Neurochirurgie pédiatrique
231'191,00
Demande de postes supplémentaires en neurochirurgie à Genève
893'0000,00
Centre pluridisciplinaire romand de stéréotaxie
2'415'000,00
Centre romand d'application laser en urologie
682'000,00
Centre pour l'investigation biologique des pneumopathies
203'480,00
Centre d'assistance respiratoire à domicile (CARAD)
209'588,00
Sérologie-virologie en pathologie humaine
706'300,00
Hémostase Vaud/Genève
455'520,00
Traitement supra-intensif des hémopathies malignes
2'037'030,00
Le passé dans le présent de la psychiatrie
873'515,00
Préparation de l'édition suisse romande du code des opérations ICD9-CM
80'000,00
Elaboration de statistiques hospitalière et ambulatoire Vaud/Genève
800'000,00
Implantation du système PRN de mesure prospective de la charge de travail en soins infirmiers
554'512,00
Evaluation de la qualité des soins hospitaliers et de la satisfaction globale des patients
279'393,00
Développement d'un système de vidéoconférences
769'000,00
Gestion des immobilisations
350'000,00
Mucoviscidose
139'500,00
Trois projets concernant la diabétologie sont acceptés ultérieurement sous réserve que leurs responsables assurent une coordination entre eux.
Il s'agit des projets suivants :
Projets
Fr.
Centre romand de formation pour médecins et autre personnel médical
1'548'000,-
Enseignement aux patients et prévention des complications à long terme
796'960,-
Développement d'outils pédagogiques pour l'enseignement de la diabétologie pédiatrique
291'000,-
1.2 Evaluation et état d'avancement actuel des projets retenus dans le cadre de l'appel d'offres de 1993
La majorité des projets ont fait l'objet des deux évaluations, à 18 et à 30 mois.
Ces évaluations se sont révélées positives.
Deux projets n'ont pas pu être réalisés, à savoir, la "; chirurgie réfractive cornéenne dans le bassin lémanique " et la "; gestion des immobilisations ".
Quatre projets, qui ont démarré plus tard, sont en cours de réalisation. Il s'agit de la "; Sérologie-virologie en pathologie humaine " et de trois projets concernant le diabète, à savoir le "; Centre romand de formation pour médecins et autre personnel médical ", l' "; Enseignement aux patients et prévention des complications à long terme " et le "; Développement d'outils pédagogiques pour l'enseignement de la diabétologie pédiatrique ".
En ce qui concerne les projets dont les auteurs ont épuisé les montants fixés par contrat, on peut identifier trois situations. Certaines études sont achevées, d'autres continuent parce qu'elles ont une importance stratégique sur les plans de la communication ou de la gestion; enfin un certain nombre de projets doivent être absolument poursuivis, parce qu'ils ont conduit à la création de centres Vaud-Genève significatifs :
1.2.1 Projets achevés
a) L'";édition romande du code des opérations ICD9-CM" permet aux deux hôpitaux d'effectuer un codage des dossiers avec des points de référence identiques.
b) En chirurgie maxillo-faciale et en ORL, les deux unités vaudoise et genevoise développent une recherche clinique et paraclinique sur les allogreffes; cette recherche débouche sur des résultats de recherche originaux qui font l'objet de plusieurs publications internationales. Ces résultats ont aussi un impact sur les soins.
Les travaux se poursuivent en commun, dans le cadre des budgets ordinaires des hôpitaux.
c) Le laboratoire d'hémostase à Genève travaille désormais pour les deux sites et son budget est intégré dans le budget ordinaire des HUG.
d) L'Institut universitaire romand d'histoire de la médecine et de la santé a achevé son projet sur "; le passé dans le présent de la psychiatrie ", qui a donné lieu à de nombreuses publications.
e) Le projet sur l'évaluation de la qualité des soins hospitaliers et de la satisfaction globale des patients est achevé dans le cadre de l'Association Vaud-Genève, mais est poursuivi dans les deux services concernés.
f) L'élaboration d'outils informatiques sous forme d'enseignement et de jeux pédagogiques pour apprendre aux enfants à aborder leur diabète et à le gérer, est financée par l'Association Vaud-Genève. L'exploitation de ces outils est désormais du ressort des deux Hôpitaux universitaires.
g) L'enseignement aux patients adultes atteints de diabète sucré vise à leur apprendre à adopter un comportement adéquat face à leur maladie et à éviter les complications à long terme. Cette méthodologie développée à Genève a été transmise aux collaborateurs du CHUV. La collaboration entre les deux hôpitaux dans ce domaine est entrée maintenant dans la routine.
Projets
Coûts
Code des opérations ICD-9-CM
80'030,95
Chirurgie maxillo-faciale
329'900,00
Hémostase Vaud-Genève
804'799,00
Le passé dans le présent de la psychiatrie
873'515,00
Evaluation de la qualité des soins hospitaliers et de la satisfaction globale des patients
313'744,80
Développement d'outils pédagogiques pour l'enseignement aux enfants diabétiques
291'000,00
Enseignement des patients diabétiques adultes et prévention des complications à long terme
886'950,00
3'579'939,75
Tous ces projets sont considérés comme achevés du point de vue de l'Association Vaud-Genève, mais leur utilité a été démontrée et les activités communes ainsi développées se poursuivent et sont financées par les budgets ordinaires des hôpitaux.
1.2.2 Projets importants pour la collaboration actuelle et future Vaud-Genève
Trois projets sont liés à l'informatique ou à la gestion et sont encore soutenus parce qu'ils sont essentiels au développement de la collaboration Vaud-Genève :
a) L'implantation du système de mesure prospective de la charge de travail en soins infirmiers (PRN) entre en phase de routine en ce qui concerne les hospitalisations. L'Association finance encore le développement de PRN pour les secteurs semi-hospitaliers et ambulatoires. Les données obtenues pourront être intégrées dans le calcul des AP-DRG (Diagnosis related group).
b) La mise en place des statistiques continue à être financée par l'Association. Après avoir validé les statistiques hospitalières, les données semi-hospitalières et ambulatoires sont en cours d'élaboration.
c) Le système de vidéoconférence est implanté sur les deux sites, mais sa gestion n'est pas encore optimale à Genève. Une équipe technique doit être formée pour que les Genevois puissent recourir encore davantage à ce mode de communication. En 1997, plus de 360 vidéoconférences ont eu lieu entre Vaudois et Genevois.
Projets
Coûts
Implantation du système PRN de mesure de la charge de travail en soins infirmiers
904'512,00
Statistiques hospitalières et ambulatoires Vaud-Genève
1'300'000,00
Vidéoconférences et téléradiologie
944'000,00
3'148'512,00
Ces développements ont une importance stratégique pour la collaboration Vaud-Genève, car ils favorisent les échanges entre les collaborateurs hospitaliers et académiques des deux sites.
De plus, il est indispensable de développer la télémédecine. L'Association soutient la télépathologie et la téléradiologie. Elle devrait aller au-delà et stimuler toutes demandes de télémédecine qui se justifient, ce qu'elle ne peut pas faire aujourd'hui, faute de ressources.
1.2.3 Projets ayant engendré la création d'un centre Vaud-Genève
Un certain nombre de projets ont conduit à la mise en place de centres de compétences Vaud-Genève.
Ces centres accomplissent des activités communes durables de soins ou de recherches appliquées et ils ont engagé du personnel à cet effet.
a) Le centre romand d'implants cochléaires s'est largement développé sur le site genevois. Il reçoit des patients de toute la Suisse romande.
b) Le centre romand de phoniatrie et audiophonologie est unique en Suisse romande et indispensable pour assurer le suivi des personnes sourdes francophones. Le nombre de ses consultations augmente régulièrement.
A terme, il devrait s'unir au centre romand d‘implants cochléaires pour former un grand centre romand pour sourds-muets.
c) Le centre pour l'investigation biologique des pneumopathies obtient des résultats significatifs et développe des recherches importantes pour les soins dans les deux hôpitaux.
d) Le centre d'assistance respiratoire à domicile permet de développer une prise en charge de malades qui, auparavant, auraient dû être hospitalisés pour de très longues périodes. Un réseau sur tout l'arc lémanique est en train de se constituer et il pourra être étendu au-delà, voire dans toute la Suisse romande.
e) Le traitement supra-intensif des hémopathies malignes constitue un exemple de distribution des activités médicales sur les deux sites, puisque les hématologues se sont répartis les autogreffes et les allogreffes. Par ailleurs, des recherches se poursuivent qui ne pourraient pas avoir lieu si les deux équipes ne travaillaient pas ensemble, à la fois à cause du bassin de population trop petit et par nécessité de regrouper les compétences médicales.
f) La sérologie-virologie en pathologie humaine vise à répartir les examens de laboratoire de haute technologie entre les deux sites. Cette démarche pourra s'étendre progressivement à d'autres laboratoires pour parvenir à une répartition de tous les examens rares et onéreux entre Lausanne et Genève.
g) Le projet sur la mucoviscidose permet aux deux pédiatries de développer une consultation spécifique pour les enfants atteints de cette maladie. Les dossiers médicaux sont aussi harmonisés sur les deux sites.
h) Le Centre romand d'application laser en urologie permet, par des recherches constantes en collaboration étroite avec l'EPFL, d'améliorer considérablement le traitement de plusieurs affections. Cette première expérience avec l'EPFL va vraisemblablement conduire à d'autres développements entre cette Ecole et les hôpitaux universitaires.
i) Le Centre romand de formation pour médecins et autre personnel médical développe un programme d'enseignement adressé aux médecins et aux soignants pour les aider à aborder de manière appropriée leurs relations thérapeutiques avec les patients chroniques et à apprendre à ces derniers quels sont les comportements qu'ils doivent adopter face à leur maladie.
Projets
Coûts
Centre romand d'implants cochléaires
551'610,00
Centre romand de phoniatrie et audiophonologie
914'980,00
Centre d'investigation biologique des pneumopathies
383'480,00
Centre d'assistance respiratoire à domicile (CARAD)
419'138,00
Traitement supra-intensif des hémopathies malignes
3'635'273,00
Sérologie-virologie en pathologie humaine
706'300,20
Mucoviscidose
219'540,00
Centre d'application laser en urologie
682'000,00
Centre romand de formation pour médecins et autre personnel médical
1'748'000,00
9'260'321,20
Les responsables de ces centres Vaud-Genève mettent l'accent sur leurs points forts respectifs et répartissent ainsi leurs activités sur les deux sites. Grâce à cette synergie, ces centres sont devenus plus performants. Ils doivent être soutenus financièrement et stimulés pour qu'ils continuent à être innovateurs.
1.3. Réajustement du financement des projets de développement Vaud-Genève (juillet 1998)
Lors des évaluations à 30 mois, de nombreux projets, qui se sont révélés particulièrement intéressants au niveau de la collaboration et du point de vue scientifique, sont poursuivis au-delà des contrats d'origine prévus pour trois ans.
Dans ces cas, le Bureau exécutif, après avoir discuté avec les auteurs de l'orientation et de l'avenir de ces projets, leur alloue des sommes supplémentaires prélevées sur le Fonds de coopération.
Après le refus du RHUSO par le peuple genevois, le Bureau reconsidère sa stratégie d'attribution de fonds à des projets communs, compte tenu que le Fonds de coopération n'est plus alimenté par les deux cantons.
Il ressort en effet, d'une étude financière de l'état du Fonds, que les sommes restantes permettront de financer partiellement les projets jusqu'à fin 1999 si les montants budgetés pour 1999 ne sont pas revus à la baisse.
Par conséquent, en juillet 1998, le Bureau réévalue la plupart de ces projets et décide de ne poursuivre le financement que des projets qui, à la fois, impliquent le développement d'unités communes entre Lausanne et Genève et conservent une activité de recherche prépondérante. Ainsi, tous les projets dont les travaux se situent désormais au niveau de l'exploitation devront être repris par les budgets ordinaires des hôpitaux.
Un petit groupe de travail, réunissant les deux Directeurs des hôpitaux, les deux Directeurs médicaux et la secrétaire générale de l'Association, veille à assurer cette transition.
Cette opération permet de dégager sur le Fonds de coopération des sommes supplémentaires pour financer jusqu'à fin 1999 les projets communs Vaud-Genève considérés comme prioritaires et, éventuellement, de soutenir ponctuellement le démarrage de nouveaux projets conjoints.
Ce recadrage implique la reprise par les hôpitaux d'un certain nombre de projets Vaud-Genève qui sont dans une phase d'exploitation. Toutefois, les risques sont grands que, faute de coordination par l'Association Vaud-Genève et de soutien financier par le Fonds de coopération, les responsables perdent l'impulsion nécessaire à poursuivre et à développer leurs activités. Cette situation est particulièrement critique pour les nouveaux centres Vaud-Genève qui ont engagé des collaborateurs dont les salaires sont jusqu'à ce jour financés sur le Fonds.
2. Création d'entités Vaud-Genève
Parallèlement au développement des projets de développement communs, l'Association Vaud-Genève crée plusieurs entités communes Vaud-Genève ou romandes.
2.1 Département hospitalo-universitaire romand de neurochirurgie
Le Service hospitalo-universitaire romand de neurochirurgie est la première grande structure médicale qui est constituée. Elle est dirigée par un seul professeur, M. Nicolas de Tribolet, qui répartit les activités de pointe entre les deux sites vaudois et genevois.
Le centre d'évaluation préchirurgicale de l'épilepsie est développé à Genève, alors que le centre de stéréotaxie est situé à Lausanne. Le projet de regroupement de la neurochirurgie pédiatrique doit être abandonné, principalement à cause de la résistance des familles vaudoises à voir leurs enfants hospitalisés à Genève.
Sur le plan de la gestion, il ressort qu'il est indispensable de regrouper les deux budgets vaudois et genevois de neurochirurgie. Des tableaux de bord communs sont mis en place, mais il n'a pas été possible de consolider les deux budgets, compte tenu des interdépendances existant avec les budgets d'autres services sur chaque site.
Après trois ans de fonctionnement sous la responsabilité exclusive du Prof. de Tribolet, le Prof. Jean-Guy Villemure est nommé à Lausanne, ce qui conduit à une restructuration du service unique de neurochirurgie qui devient un Département romand avec un professeur chef de service sur chaque site, la direction du Département étant assurée par chacun des deux chefs de service, en alternance.
La répartition des activités est redéfinie. A Genève, l'accent est mis sur l'épilepsie et la chirurgie neurovasculaire. A Lausanne, sont développées la neurochirurgie fonctionnelle, la neuro-oncologie expérimentale et la thérapie génique.
Ce premier Département romand a été le projet-pilote de l'Association Vaud-Genève. C'est pourquoi il a fallu, après quelques années d'expériences, revoir sa direction et son organisation. Actuellement, c'est aussi celui qui offre les preuves les plus tangibles des succès obtenus aux niveaux suisse et européen, par la mise en commun des compétences et des ressources.
Projets
Coûts
Centre d'évaluation préchirurgicale de l'épilepsie
6'076'000,00
Neurochirurgie pédiatrique
63'619,25
Centre romand de stéréotaxie
2'915'000,00
Neuropathologie
96'338,75
9'150'958,00,
2.2 Département hospitalo-universitaire romand de dermatologie et de vénéréologie
Dans le cadre de la nomination d'un nouveau professeur à Lausanne, il est décidé de créer un Département hospitalo-universitaire romand de dermatologie et vénéréologie (DHURDV).
Il est dirigé par un comité de direction constitué des deux chefs de service, les professeurs Jean-Hilaire Saurat et Renato Panizzon, le professeur Saurat étant le premier coordinateur.
Le collège du Département est composé des cadres du Département, à savoir, les médecins adjoints, les consultants, les infirmiers-chefs, les maîtres d'enseignement et de recherche, les biologistes.
Le comité de coordination interfacultaire, désigné par les deux Décanats, est l'organe de recours. Il est composé d'un membre du Décanat de chaque Faculté et d'un professeur chef de service de chaque site.
Un fonds de développement commun est alimenté par des subsides de l'Association Vaud-Genève (Fr. 500'000.- par an pour trois ans), les fonds de service de chaque site et les subsides de tout autre partenaire public ou privé.
Sur le plan médical, l'angiologie-phlébologie, la mycologie et la photobiologie-photothérapie sont développées à Lausanne tandis que Genève a mis l'accent sur l'allergo-immunologie, la chirurgie dermatologique et la dermatopathologie-immunopathologie.
Une enveloppe budgétaire de Fr. 500'000,- est attribuée par année académique pour permettre le développement d'un pôle d'excellence, et cela depuis 1996. Ce financement devrait être poursuivi au delà de 1999.
2.3 Département hospitalo-universitaire romand de médecine nucléaire
Le Département hospitalo-universitaire romand de médecine nucléaire est arrêté par les deux Doyens en juin 1998 dans le cadre de la nomination d'un nouveau professeur à Lausanne. Les professeurs Daniel Slosman à Genève et Angelika Bischof Delaloye géreront ensemble ce nouveau département dont la structure et le fonctionnement sont similaires à ceux des départements romands de neurochirurgie et de dermatologie. Les deux Doyens doivent soumettre ce nouveau département romand à leurs Conseils de faculté respectifs, puis aux deux Rectorats et aux deux Conseils d'Etat.
Le cyclotron est en cours d'installation aux HUG. Il sera utilisé par les deux sites. Son coût de fonctionnement sera assumé provisoirement par l'Association Vaud-Genève. Les dépenses sont estimées à Fr. 800'000,- par année.
2.4 Centre romand des grands brûlés
Depuis la nomination au CHUV du Prof. Daniel Egloff, le Centre des grands brûlés est en cours de restructuration.
Désormais, les patients de Suisse romande ne devront plus être déplacés à Lyon ou à Zurich mais peuvent être traités au CHUV.
A Genève, un moratoire de deux ans est fixé pour repourvoir le poste de chirurgie plastique. Le concept de prise en charge des grands brûlés au niveau romand est arrêté.
L'Association Vaud-Genève finance le démarrage de ce Centre romand des grands brûlés, qui se met en place progressivement, à raison de Fr. 250'000,- par an, et cela depuis 1997.
2.5 Institut universitaire romand de santé au travail (IURST)
La Fondation universitaire romande de santé au travail est créée le 18 janvier 1994.
Les collaborateurs de la section de santé au travail de Genève ont la possibilité de rejoindre l'institut de Lausanne et recevront une "; prime annuelle de coopération ". Seuls quatre collaborateurs de la section d'ergonomie acceptent ce transfert.
La Faculté de Genève doit encore nommer un professeur d'ergonomie à la tête de la section genevoise transférée à Lausanne. Un professeur vaudois est nommé directeur de l'IURST.
Les budgets des deux instituts sont fusionnés.
En ce qui concerne l'enseignement, l'IURST donne les cours de santé au travail à Lausanne et à Genève. Il commence à déployer une activité privée sous forme de mandat dans plusieurs cantons romands.
L'Association Vaud-Genève finance dès 1994 une prime de coopération pour les collaborateurs genevois, pour un montant de Fr. 60'000,- par an.
2.6 Institut universitaire romand d'histoire de la médecine et de la santé
La Convention entre l'Université de Genève d'une part, et l'Université de Lausanne et le Service des Hospices cantonaux d'autre part, consacre la gestion commune sur deux sites du nouvel Institut universitaire romand d'histoire de la médecine et de la santé.
L'institut est placé sous la responsabilité unique d'un professeur ordinaire, qui a notamment pour mission de gérer l'ensemble des ressources et d'organiser des recherches et des enseignements communs.
Chaque unité reste sur son site respectif et une répartition des activités est réalisée entre les deux cantons.
Le secteur de la psychiatrie a été développé grâce à un important projet réalisé sur les deux sites. "; Le passé dans le présent de la psychiatrie " a fait l'objet de nombreux séminaires et publications. Les travaux continuent dans ce domaine et sont financés notamment par le Fonds national de la recherche suisse.
L'Association Vaud-Genève a financé le démarrage des recherches, soit Fr. 873'515,-
2.7 Centrale commune d'achats Vaud-Genève
M. Ricardo Avvenenti, responsable de la Division des achats des HUG, mène avec ses collègues vaudois la réorganisation des achats du CHUV. Dans ce cadre, il apparaît avantageux de créer directement une Centrale commune d'achats Vaud-Genève.
Dès lors, le concept des achats et leurs négociations sont réalisés par cette Centrale d'achats pour l'ensemble des hôpitaux universitaires vaudois et genevois. Les commandes sont toujours effectuées sur chaque site.
La création de cette Unité Vaud-Genève engendrera une économie estimée à Fr. 15 mio sur trois ans.
2.8 Commission de matériovigilance Vaud-Genève
Suite à l'entrée en vigueur de l'Ordonnance sur les dispositifs médicaux (ODIM) au 1er juin 1998, une Commission de matériovigilance Vaud-Genève est créée afin d'édicter toutes les normes nécessaires au respect de cette ordonnance. Cette commission travaille en étroite relation avec la Centrale commune des achats et les deux centres de stérilisation centrale qui sont en train d'étudier également leur regroupement.
Les frais de secrétariat de cette commission sont assumés par l'Association Vaud-Genève pour un montant annuel de Fr. 31'500,-.
2.9 Autres rapprochements
Les deux centres de stérilisation centrale sont en cours de restructuration et, dans ce cadre, étudient leur regroupement. Leur rapport sera soumis au Bureau de l'Association Vaud-Genève à fin 1998.
D'autres rapprochements de structures sont en discussion. Il s'agit notamment des deux pathologies, pédiatries, gastro-entérologies et d'un éventuel centre régional de fabrication de médicaments hospitaliers.
Les Départements médicaux romands démontrent les gains en compétences obtenus par la mise en commun des ressources. Il développent des secteurs d'excellence sur chaque site et assurent simultanément les soins de proximité.
Les Instituts romands améliorent la qualité de leurs travaux grâce à une augmentation de la masse critique et du bassin de population.
Quant aux structures logistiques et administratives, elles contribuent à une meilleure gestion économique et des équipement lourds.
3. Rapprochement des procédures de nomination des professeurs des deux Facultés de médecine
Pour assurer une meilleure coordination entre les deux Facultés en ce qui concerne l'examen des structures et les nominations, des commissions paritaires sont mises en place pour les successions de chefs de service dans les secteurs où une coopération Vaud-Genève est envisagée.
1. Mise en place d'une procédure commune aux deux Facultés
Pour répondre aux exigences légales, différentes dans chaque canton, des commissions composées de 5 membres genevois et 5 membres vaudois sont mises en place, ceux-ci pouvant déléguer leur pouvoir à trois d'entre eux, afin d'accélérer les procédures. Un règlement de fonctionnement est en train d'être élaboré par les deux décanats, d'entente avec le Département de l'instruction publique du canton de Genève et le Département de la formation et de la jeunesse du canton de Vaud.
2. Création des commissions facultaires conjointes
Dans tous les secteurs où un rapprochement Vaud-Genève est envisagé, des commissions facultaires conjointes sont mises en place.
La liste de ces commissions et leur évolution sont suivies par le Bureau exécutif de l'Association, de manière à préparer des futurs regroupements.
Lorsque cela s'avère opportun, les mises au concours sont réalisées dans une perspective Vaud-Genève, en prévoyant une répartition des sous-spécialités entre les deux sites.
L'organisation de ces départements romands a été arrêtée d'entente entre les deux décanats et l'Association Vaud-Genève, et cela sur le modèle mis en place pour la dermatologie.
En effet, ce modèle a maintenant fait ses preuves; il permet de créer des pôles d'excellence romands tout en maintenant une décentralisation sur chaque site. Cette organisation a aussi l'avantage de répercuter immédiatement les progrès réalisés par la recherche sur l'amélioration de la qualité des soins de proximité.
4. Rapprochement des informatiques hospitalières
Sur mandat des deux Conseillers d'Etat chargés des départements de la santé, les deux Directeurs des hôpitaux étudient la possibilité de rapprocher les informatiques hospitalières.
Deux solutions sont envisagées, à savoir, le rapprochement progressif par projet des deux informatiques, sous la responsabilité d'un chef de projet dans le cadre de l'Association Vaud-Genève, ou la création d'un centre d'informatique hospitalière autonome.
Sur la base de ce rapport, un "; Comité de pilotage informatique " est créé en 1996, présidé par une personne extérieure reconnue pour ses compétences. M. Francis Randin, Directeur général d'UNICIBLE est désigné par le Comité de l'Association Vaud-Genève.
Le comité de direction informatique mandate un expert extérieur, pour faire effectuer un audit rapide des informatiques des deux centres hospitaliers. Cet expert recommande de renoncer à fusionner les deux informatiques hospitalières, mais de suivre les "; chemins de la convergence ", à savoir, procéder à un rapprochement informatique progressif.
Le comité de direction informatique décide de suivre cette recommandation et de mettre l'accent sur l'harmonisation des normes et des données, ainsi que sur les télécommunications :
a) Le projet sur les télécommunications hospitalo-universitaires lémaniques vise à créer une plate-forme technique permettant de conjuguer la téléphonie, l'informatique et l'imagerie. Les deux Universités sont associées à ce projet, notamment en raison de leur avance technologique en matière de réseaux multifonctions ATM. Le but final est la mise en place d'un réseau fibres optiques privé.
L'Association Vaud-Genève a acquis une fibre optique et finance sa liaison aux Hôpitaux et aux Universités. Les coûts des travaux ascendent pour l'instant à Fr. 366'000,-.
b) Le projet concernant la télépathologie constitue la mise en place d'un équipement technique permettant aux pathologues d'échanger des images à distance.
Les deux responsables de la pathologie à Lausanne et à Genève étudient la répartition effective des sous-spécialités entre les deux sites. L'Association finance cet équipement, sous réserve qu'une telle distribution des tâches ait lieu entre les deux sites. A terme, un département romand de pathologie devrait être créé.
Les coûts de cette installation s'élèvent à Fr. 365'000.-.
c) Le projet de téléradiologie consiste à mettre en place le cadre technique nécessaire pour développer progressivement la télémédecine entre les deux Centres hospitalo-universitaires et les deux Facultés de médecine.
L'Association Vaud-Genève finance le support technique nécessaire pour gérer cette liaison entre les deux sites, soit Fr. 60'000,- par année.
En outre, un certain nombre d'applications sont communes aux deux établissements hospitaliers. Leurs configurations seront, dans la mesure du possible, rapprochées et leur maintenance se fait en commun. Il s'agit de CARL (gestion matières), d'ARUNA (laboratoires de pathologie), EC-PEP (gestion des horaires et des plannings), WinPRN (mesure de la charge infirmière) et ORIAC (comptabilité et client/serveur).
En mars 1998, M. Randin démissionne de sa présidence, suite à son engagement à l'Etat de Vaud. Un nouveau président, M. Murat Kunt, professeur à l'EPFL, Directeur du Laboratoire de traitement des signaux, est désigné.
Sous la nouvelle présidence du Prof. Kunt, le Comité de direction informatique fait un bilan de ses activités et établit sa mission et un cahier des charges.
Il adopte une attitude plus volontariste par rapport aux deux services informatiques et considère, en conséquence, que "; sa mission est de stimuler par tous ses moyens la mise en place d'un système informatique dans l'arc lémanique ". Ce système sera centré autour du patient, permettra une saisie exhaustive et transparente de toutes les prestations fournies au patient et constituera la base du système dirigeant du réseau. L'accent sera mis sur l'informatique de gestion, la télémédecine et le développement d'équipements spécifiques aux services médicaux, comme cela a déjà été réalisé en pathologie.
Les prochains départements concernés sont la dermatologie et la médecine nucléaire.
5. Harmonisation progressive de la gestion des centres hospitalo-universitaires
Dans le cadre de l'appel d'offres, deux projets en matière de logistique hospitalière ont été retenus, à savoir, l'implantation du système PRN pour le calcul prospectif des soins infirmiers requis et les statistiques hospitalières.
Ces deux projets ont l'avantage, outre leur efficacité propre, de réunir les équipes vaudoises et genevoises travaillant à des statistiques et à la gestion. Cela permet de développer d'autres projets qui sont très importants en matière de gestion hospitalière.
1. Statistiques hospitalières et ambulatoires
Les deux équipes vaudoise et genevoise ont tout d'abord identifié les actes médicaux dans les séjours hospitaliers. Elles ont pu, grâce à l'aide des deux divisions financières, leur rattacher des coûts.
Actuellement, les coûts des actes médicaux et médico-techniques des séjours hospitaliers sont calculés. Les deux hôpitaux universitaires peuvent donc se comparer, sous réserve de certains secteurs où leur organisation est encore trop divergente.
Les statisticiens et gestionnaires impliqués travaillent désormais sur les coûts des actes médicaux et médico-techniques réalisés lors de séjours de moins de 24 heures et ambulatoirement.
Les secteurs de la psychiatrie devront encore être abordés. Pour le moment, ils ont été exclus de l'étude.
Ce projet est déterminant à plus d'un titre : les deux Hôpitaux connaissent progressivement leurs dépenses ce qui permet à chaque unité de mettre en place une comptabilité analytique coordonnée. Ils ont une meilleure position pour négocier ensemble avec les caisses-maladie.
L'Association a accordé un financement de Fr. 1'300'000,-.
2. Projet CESAR
Ce projet s'inscrit dans le cadre des exigences qu'imposent la Loi fédérale sur l'Assurance-maladie, le Concordat intercantonal de coordination universitaire et la Loi fédérale sur l'aide aux Universités.
Ces textes législatifs imposent aux facultés de médecine et aux hôpitaux universitaires d'identifier leurs dépenses dues aux soins, à l'enseignement et à la recherche.
L'Office fédéral des statistiques (OFS) à Berne lance une étude à ce sujet, qui donnera des indications, certes intéressantes, mais insuffisantes pour permettre aux hôpitaux universitaires d'imputer véritablement ces dépenses à des centres de charges adéquats et d'avoir donc en main un véritable outil de gestion.
C'est la raison pour laquelle, les Hospices cantonaux vaudois développent une analyse plus fine de ces coûts, correspondant davantage à la réalité hospitalière, et cela dans le cadre de cette enquête réalisée par l'OFS. Récemment les HUG et la Faculté de médecine de Genève ont décidé d'effectuer également cette étude.
Les Vaudois transmettent la méthodologie et les fichiers nécessaires à ce travail aux Genevois.
La réalisation conjointe de ce projet dans les deux centres universitaires permettra non seulement d'affiner leurs statistiques communes, mais de négocier ensemble, sur la base de données fiables, avec les Offices fédéraux concernés.
Par ailleurs, la séparation des dépenses liées aux soins, à l'enseignement et à la recherche contribuera à clarifier la composition des budgets. Les Hospices cantonaux vaudois utiliseront ces données déjà pour l'élaboration du budget 2000.
3. Projet MIMOSA
Le projet MIMOSA a été initialisé par la Faculté de médecine de Genève. Il vise à évaluer la qualité des activités académiques. Le but de ce projet est notamment de contrôler le retour sur investissement des ressources attribuées à la recherche et à l'enseignement par département.
Cette étude aboutit à des résultats intéressants à Genève, et, compte tenu que les Universités seront progressivement contraintes à évaluer la qualité de leurs activités, le Décanat de la Faculté de Lausanne souhaite réaliser aussi cette démarche.
Les Genevois ont, par conséquent, transmis leur méthodologie aux Vaudois. M. Jérôme Billotte, chef de projet à Genève, mènera également cette étude à Lausanne. Compte tenu qu'il travaille depuis quelques années avec les deux Décanats, il peut être immédiatement opérationnel.
Cette extension de MIMOSA à Lausanne est financée directement par l'Association Vaud-Genève.
Il faut noter que M. Billotte est également impliqué dans les deux projets CESAR à Lausanne et à Genève. Ces deux études sont totalement complémentaires et apporteront une contribution significative à la clarification des dépenses hospitalières et académiques. Elles donneront une base objective à d'éventuelles évaluations intercantonales.
Un montant de Fr. 150'000,- est attribué à cette étude qui devra être poursuivie.
4. Projet AP-DRG
Ce projet vise à introduire progressivement les codages dans plusieurs hôpitaux suisses, dont les cinq hôpitaux universitaires. Il est mené par l'Institut de santé et d'Economie (ISE) sous les auspices d'un groupe de travail au niveau suisse, en liaison avec la Communauté suisse des PCS (Patient classification system) dont fait partie l'Association Vaud-Genève.
Ce projet implique l'identification de tous les coûts des actes médicaux, médico-techniques, soignants, etc., et rejoint partiellement le travail qui doit être effectué dans le cadre de la comptabilité analytique.
Il ressort que, si tous les hôpitaux participant à ce projet sont d'accord sur l'identification des coûts par acte, il n'en est pas de même de leur regroupement. Les HUG et les Hospices cantonaux ont, quant à eux, la même philosophie, et imputent leurs coûts en fonction des patients.
L'Association Vaud-Genève soutient ce projet d'un groupe de travail fédéral, où les deux hôpitaux universitaires ont désormais une position dominante, et coordonne la diffusion des informations à l'intérieur des deux établissements.
5. Comptabilité analytique
Récemment, les Hospices cantonaux ont montré un intérêt pour les travaux réalisés à Genève en la matière. Les responsables financiers des deux sites décident de partager leurs expériences et leur méthodologie. Les HUG, qui ont pris une avance dans ce domaine, transmettront leur savoir-faire aux Vaudois.
Les deux équipes coordonnent leurs travaux dans ce domaine, et, en particulier, sur les deux éléments suivants :
a) Adoption des mêmes définitions des centres d'imputations dans les deux Centres hospitaliers;
b) Fixation des mêmes clés de répartition des coûts.
Cette coopération est un pas significatif vers un rapprochement des modes de gestion des Hôpitaux et notamment vers une harmonisation d'un certain nombre d'applications informatiques de gestion.
6. Communauté tarifaire
Depuis 1994, une "; communauté tarifaire " Vaud-Genève a été créée, et un groupe de travail essaie de négocier ensemble les tarifs avec les Caisses-maladie.
Pour l'instant, toutes les tentatives d'aller dans cette direction se sont soldées par des échecs, à l'exception de la Convention intercantonale romande.
Ces projets ont tous pour but de mettre en place des outils de gestion communs. Ils permettront aux deux Centres hospitalo-universitaires de se comparer et d'adopter progressivement une approche commune de leur gestion. Ils pourront alors réaliser des économies d'échelle. Ils pourront aussi adopter une position de force dans les négociations au niveau fédéral.
IV. Développement des relations avec d'autres partenaires
L'Association Vaud-Genève fait la promotion de la collaboration Vaud-Genève à l'extérieur et entretient des contacts réguliers avec de nombreuses associations du domaine de la santé. Elle fait connaître le plus largement possible ses projets, ses réalisations et ses expériences. A ce titre, le Concordat instituant le RHUSO a été souvent présenté et discuté. En Suisse et dans les pays francophones, ce projet est connu, de même que son issue.
Les activités de l'Association sont notamment les suivantes :
1. Comité directeur des cinq cantons universitaires
Sous l'égide de la Conférence des directeurs cantonaux des affaires sanitaires (CDS), un Comité directeur des cinq cantons universitaires, comprenant des représentants de la santé publique, des hôpitaux universitaires et des facultés de médecine, a tenté de lancer plusieurs projets communs aux cinq Centres hospitalo-universitaires.
Malheureusement, après quelques années, la plupart de ces projets ont été interrompus ou achevés, sans résultats significatifs.
La seule étude qui se poursuit est le développement des statistiques hospitalières, et cela en collaboration avec l'Office fédéral des statistiques et la Commission suisse des statistiques sanitaires.
Chaque partenaire participe au financement de ces projets fédéraux. L'Association Vaud-Genève assure la coordination de deux de ces projets et assume la charge financière de l'ensemble de ces études pour les hôpitaux vaudois et genevois, à savoir, Fr. 497'000,-.
2. Groupe de travail sur l'assurance de la qualité de H+
Suite à l'introduction de la LAMal, un groupe de travail a mis en place un modèle de contrat pour l'assurance de la qualité entre les hôpitaux et les assureurs-maladie. L'Association Vaud-Genève représente, dans ce groupe, les administrations hospitalières et la Suisse romande.
Ce modèle de contrat a été accepté par les deux parties. Actuellement, une Commission paritaire permanente (assureurs-maladie/hôpitaux) est créée, de même qu'un groupe d'experts, pour mettre en place les divers instruments de mesure de la qualité et assurer le suivi de ces contrats.
L'Association Vaud-Genève est membre du groupe d'experts.
3. Communauté de travail nationale pour la promotion de la qualité en santé publique (NAQ)
Ses membres élaborent un concept national de la promotion et de l'assurance de la qualité. Ils examinent les possibilités de mettre en place une procédure d'accréditation des hôpitaux au niveau suisse et de créer éventuellement une Commission d'accréditation.
L'Association représente les hôpitaux romands.
4. Communauté suisse de travail PCS (patient classification system)
La Communauté suisse de travail PCS vise à promouvoir les différents modèles de calcul des coûts par pathologie ou par patient.
Les HUG et les Hospices cantonaux font partie du projet-pilote AP-DRG. Ces deux hôpitaux, grâce aux divers projets Vaud-Genève concernant les statistiques hospitalières, sont leader dans la plupart des études menées dans ce domaine en Suisse et ont une influence significative.
L'Association Vaud-Genève est membre de la Communauté suisse de travail PCS et veille à ce que les projets menés par les deux hôpitaux, en particulier les AP-DRG, soient diffusés en Suisse.
5. Développement de relations privilégiées avec l'EPFL
L'Association Vaud-Genève développe des relations étroites avec la direction de l'EPFL et le Parc scientifique.
Elle veille à ce que des projets communs entre les deux hôpitaux universitaires et l'EPFL voient le jour. Plusieurs projets financés par l'Association Vaud-Genève impliquent la participation de l'EPFL (neurochirurgie, urologie, etc.).
Le prochain appel d'offres en génie médical sera lancé conjointement par l'EPFL, les deux Universités, les HUG et les Hospices cantonaux.
6. Association des pays latins pour l'analyse des systèmes de santé (ALASS)
L'Association Vaud-Genève a organisé plusieurs congrès sous l'égide de l'ALASS, dans les domaines de l'assurance de la qualité et des systèmes d'information.
Grâce à l'ALASS, l'Association Vaud-Genève noue de nombreux contacts avec le Canada, la Belgique et la France pour promouvoir ses activités et pour étudier les divers modèles de rapprochements hospitaliers qui sont réalisés ou à l'étude dans ces pays.
Des contacts réguliers avec les responsables de ces projets sont maintenus.
7. Club européen de la santé
Le Club européen vise à promouvoir la qualité en santé publique. L'Association est active dans la section suisse, ce qui lui permet de se faire connaître au niveau européen.
8. Association internationale d'économétrie appliquée
Cette association vise à développer les échanges entre les partenaires de la santé qui s'intéressent à l'économie, la gestion et l'administration de la santé.
V. Approche institutionnelle
1. Plan directeur de la collaboration Vaud-Genève 1995-2000
Le 16 août 1994, les quatre Conseillers d'Etat chargés de la santé publique et de l'instruction publique des cantons de Vaud et de Genève donnent mandat au Bureau de l'Association d'élaborer un plan directeur de la collaboration Vaud-Genève afin d'avoir une stratégie de coopération orientée vers une amélioration de la qualité et des économies d'échelle.
Le 31 août, une consultation interne aux deux Centres hospitalo-universitaires est lancée.
Les réponses obtenues au 15 octobre sont étudiées par les membres du Bureau durant les mois de novembre et décembre, sans pouvoir élaborer un plan directeur. Deux plans de cadrage vaudois et genevois sont remis aux quatre Conseillers d'Etat.
Devant cet échec, une séance extraordinaire du Bureau est convoquée le 31 mars 1995 au cours de laquelle les membres vaudois et genevois réaffirment la nécessité de rapprocher les deux Facultés de médecine et les deux Centres hospitalo-universitaires et de poursuivre la réflexion dans le cadre de l'Association Vaud-Genève.
Suite à un "; brain-storming " conduit par le Prof. Alain Junod, les membres du Bureau débouchent sur un nouveau projet, à savoir la création d'une "; Medical School lémanique ".
2. Mandat d'étude pour la création d'un réseau hospitalo-universitaire lémanique
En juin 1995, les deux Conseils d'Etat des cantons de Vaud et de Genève confient au Bureau exécutif de l'Association Vaud-Genève, présidé par le Prof. Bernard Vittoz, un mandat d'étude pour "; la création, dans le cadre des Universités de Lausanne et de Genève, d'une Ecole de médecine et d'un Ensemble hospitalier, communs aux Cantons de Vaud et de Genève, capables de compter parmi les centres européens et internationaux de référence dès le début du siècle prochain ".
La rédaction de ce mandat reprend les idées formulées par le Bureau lors de la séance de "; brain-storming " du 31 mars 1995 et notamment la vision d'une "; Medical School lémanique ".
3. Rédaction du "; rapport Vittoz "
Le Prof. Vittoz adjoint aux membres du Bureau deux représentants des Départements de l'Instruction publique vaudoise et genevoise et deux délégués de la médecine fondamentale des deux Facultés de médecine. Le groupe de travail avance rapidement dans sa réflexion.
Il procède à une consultation écrite envoyée à tous les membres des corps professoraux et aux cadres hospitaliers vaudois et genevois (plus de 600 personnes).
Après l'étude des résultats de cette consultation, le groupe de travail arrête trois alternatives.
1. La première formule est une option centralisatrice, qui a la faveur des gestionnaires, car elle vise à créer un seul établissement public autonome, ce qui permet d'avoir un seul centre de décision stratégique et d'introduire pour les hôpitaux et les facultés une gestion de type entrepreneurial.
2. A l'opposé, un réseau lâche, réunissant les Facultés de médecine et l'Ensemble hospitalier est constitué. Il est conduit pour toutes les options stratégiques par un Conseil Vaud-Genève détenant son pouvoir de coordination directement des deux Conseils d'Etat par le biais d'un concordat intercantonal. Il s'agît d'une "; Association Vaud-Genève renforcée ".
3. Enfin, une troisième voie, médiane, prévoit la création de deux établissements publics respectivement pour les Facultés de médecine et l'Ensemble hospitalier, réunis sous la responsabilité d'un Conseil qui détient son pouvoir de décision stratégique et de coordination directement des deux Conseils d'Etat par voie de concordat.
4. Séance des deux Facultés de médecine à Beausobre
Le 26 septembre 1995 a lieu à Morges, en présence des quatre Conseillers d'Etat, une séance d'information où tous les membres des deux Facultés et les cadres hospitaliers vaudois et genevois sont conviés.
Le Prof. Vittoz présente notamment la synthèse des réponses à la lettre-questionnaire du 20 juillet 1995 et le modèle d'organisation actuellement à l'étude.
Le modèle retenu alors par le groupe de travail est l'alternative la plus intégrée, à savoir la réunion des deux facultés et des hôpitaux universitaires en un seul établissement public intercantonal
5. Contenu du "; rapport Vittoz "
Le groupe de travail tient compte des nombreuses remarques enregistrées à Beausobre et aboutit à un modèle d'organisation décentralisée.
Le 31 janvier 1996, le Prof. Vittoz et son groupe de travail adressent leur rapport aux quatre Conseillers d'Etat chargés des Départements de la santé et de l'instruction publique des cantons de Vaud et de Genève.
Ils recommandent le schéma d'organisation suivant :
Canton de Vaud Canton de Genève
Grand Conseil
Concordat
Grand Conseil
Conseil d'Etat
Conseil d'Etat
reseau hospitalo-universitaire lémanique
Conseil
Comité de direction
Etablissement public
Etablissement public
Faculté de médecine de
Genève et de Lausanne
Ensemble hospitalier
UNIL
Conseil de Faculté
Conseil d'administration
____
Décanat
Comité de direction
UNIGE
Sites :
SHC (1) HUG (2)
Lausanne Genève
Ecoles
(1) Service des Hospices cantonaux vaudois
(2) Hôpitaux universitaires de Genève
Par concordat intercantonal, les institutions du Réseau sont réunies dans deux établissements intercantonaux autonomes de droit public : la Faculté de médecine des Universités de Genève et Lausanne, l'Ensemble hospitalier lémanique.
Les Conseillers d'Etat prennent acte du "; rapport Vittoz " et décident de lancer une large procédure de consultation.
6. Procédure de consultation du "; rapport Vittoz "
1. Lancement de la procédure de consultation
Le 6 mars 1996, les Conseils d'Etat des Cantons de Vaud et de Genève lancent une large procédure de consultation du "; rapport Vittoz " auprès de 350 organismes vaudois, genevois et fédéraux relevant des domaines académique et sanitaire.
2. Résultats de la procédure de consultation
D'une manière générale, les personnes consultées adhèrent au principe de la création du Réseau et expriment la volonté d'y participer. L'objectif est d'atteindre la taille critique - démographique et financière - capable d'assurer l'avenir d'une médecine de qualité, qu'il s'agisse des soins, de la formation ou de la recherche.
Les points suivants méritent d'être retenus de cette analyse :
1. Aucun des deux modèles retenus par le groupe de travail Vittoz n'est véritablement accepté, soit parce qu'ils sont trop complexes, soit parce qu'ils ne sont pas assez décrits dans le rapport. Les personnes consultées souhaitent un troisième modèle.
2. Pour la majorité, la nouvelle organisation apportera des bénéfices en ce qui concerne les prestations spécialisées dans les secteurs des soins et de la recherche grâce à l'augmentation de la masse critique.
Les soins de proximité risquent d'être pénalisés.
3. Le contrôle parlementaire n'est pas suffisamment étudié, et notamment le fonctionnement des contrats de prestations.
Une procédure interparlementaire doit être mise en place.
4. Il est nécessaire d'imaginer un nouveau modèle garantissant le maintien de l'appartenance de la Faculté de médecine aux deux Universités.
Ces travaux ont été réalisés essentiellement par le Bureau de l'Association, présidé par le Prof. Bernard Vittoz. Il a été fait appel occasionnellement à des consultants, essentiellement pour étudier les aspects organisationnels et économiques. Les coûts de cette opération réalisée de juin 1995 à août 1996 s'élèvent à Fr. 486'000,--.
7. Rédaction du Concordat instituant le Réseau hospitalo-universitaire de Suisse occidentale
Sur la base des résultats de la procédure de consultation, les deux Conseils d'Etat donnent formellement mandat à un groupe de rédaction restreint, composé de quatre hauts fonctionnaires des Départements de la santé et de l'instruction publique, d'un représentant des deux Rectorats, de Me Bernard Ziegler, mandataire, et de la secrétaire générale de l'Association Vaud-Genève, de rédiger un concordat.
Durant le premier semestre 1996, ce groupe de rédaction se réunit à cinq reprises avec le groupe de travail du Prof. Vittoz pour mener une réflexion sur l'organisation et le fonctionnement des divers organes du Réseau. Il étudie essentiellement l'organisation des deux Facultés réunies ainsi que le fonctionnement et la composition du Conseil décanal.
Des discussions ont lieu avec les deux Recteurs pour définir les relations entre les deux Facultés et les deux Universités, et notamment les attributions budgétaires et les processus de décisions.
Les membres du Bureau exécutif de l'Association Vaud-Genève sont informés lors de chacune de leurs séances de l'avancement des travaux.
Le groupe tient compte de toutes ces discussions; il examine de manière détaillée toutes les questions d'organisation et de fonctionnement des divers organes du Réseau et étudie tout particulièrement des points essentiels comme la décentralisation des diverses entités, les processus de décisions, les flux financiers, les contrats de prestations, les problèmes liés au patrimoine, les relations du Réseau avec les deux Universités et les deux systèmes sanitaires vaudois et genevois, ainsi que le contrôle parlementaire des activités du Réseau.
La version finale du Concordat est présentée au Bureau exécutif de l'Association. Ce texte est discuté article par article. Quelques modifications internes sont encore apportées.
L'organisation finalement retenue est la suivante :
R H U S O
10
Conseil d'administration
5
5
Comité de
direction
Conseil
décanal
5
5
Conseil
hospitalier
5
16
GENÈVE
LAUSANNE
HUG
CHUV+
FACULTÉS HÔPITAUX
Les quatre magistrats soumettent le dossier aux deux Conseils d'Etat qui l'approuvent dans leurs séances des 19 et 26 février 1997 et décident de l'envoyer pour examen aux deux Grands Conseils.
8. Mise en place de la procédure interparlementaire
Afin de respecter au mieux le contrôle parlementaire, une procédure ad hoc est mise en place par convention entre les deux Bureaux des deux Grands Conseils et les deux Conseils d'Etat.
La "; Convention relative à l'approbation du Concordat instituant un réseau hospitalo-universitaire lémanique " prévoit principalement la création d'une Commission interparlementaire composée de 15 députés vaudois et de 15 députés genevois, désignés par les deux Grands Conseils selon leur procédure respective. Cette commission, saisie du Concordat, fera des propositions d'amendement aux deux Conseils d'Etat qui les acceptent, les modifient ou les refusent. Le Concordat, accompagné d'un rapport de la Commission interparlementaire, est ensuite soumis aux deux Grands Conseils. Lors du premier examen, chaque Parlement a encore la possibilité de proposer des amendements que les deux Conseils d'Etat examinent. En cas de divergences entre les deux Conseils d'Etat et les deux Parlements, ou entre les deux Parlements entre eux, la commission interparlementaire peut être saisie pour éliminer les divergences. En dernier débat, les deux Parlements approuvent ou rejettent les projets de loi/décret d'adhésion au Concordat.
Cette procédure interparlementaire, dans le cadre des dispositions légales en vigueur, a l'avantage de permettre aux deux Grands Conseils d'examiner de manière approfondie le Concordat et de pouvoir proposer des modifications à ce texte.
La Convention relative à l'approbation du Concordat instituant un Réseau hospitalo-universitaire lémanique est adoptée à l'unanimité des membres des deux Bureaux des Grands Conseils élargis.
Elle est signée par les deux Présidentes des Grands Conseils Vaudois et Genevois et par les quatre Conseillers d'Etat des Départements de la Santé et de l'Instruction publique des deux cantons.
9. Examen et adoption du Concordat instituant le Réseau hospitalo-universitaire de Suisse occidentale (RHUSO)
La Commission interparlementaire est constituée à Nyon le 15 avril 1997. Elle siège à un rythme soutenu durant le printemps et l'été. Elle adopte le Concordat amendé le 20 août 1997 à la majorité des deux délégations vaudoise et genevoise.
Durant leurs travaux, les membres de la commission interparlementaire présentent 34 amendements, soit 17 par les partis de droite et 17 par les partis de gauche. Les amendements présentés par la droite visent essentiellement à renforcer le contrôle parlementaire. 8 de ces amendements ont été acceptés par les Conseils d'Etat. Les amendements présentés par la gauche tendent notamment à garantir le maintien du statut de droit public du personnel des hôpitaux et des droits acquis. 12 de ces amendements sont acceptés par les deux Conseils d'Etat.
25 articles sont modifiés, dont 5 à la demande de la Commission, et 20 à la demande de l'une des deux délégations ou les deux délégations ensemble.
Les modifications les plus importantes qui sont introduites sont les suivantes :
1. Le renforcement de la coordination entre la médecine privée et publique, avec une volonté claire de subsidiarité.
2. La création d'une Commission consultative médicale destinée à assurer la coordination avec la médecine privée.
3. L'introduction de l'exigence d'avoir des commissions paritaires de structure et de nomination des deux Facultés.
4. Les règles concernant l'élection des représentants du personnel au Conseil hospitalier.
5. L'exigence de maintenir un cadre de droit public à un éventuel "; troisième statut du personnel " :
- Ce statut doit être établi en concertation avec les organisations représentatives du personnel.
- Tout nouveau statut doit être approuvé par les deux Conseils d'Etat.
6. Le contrôle parlementaire est renforcé comme suit :
- Soumission aux Grands Conseils à l'appui de la demande de subventions du mandat de prestations avec le budget présenté conformément aux principes du modèle de comptes des cantons et le plan directeur du Réseau;
- Soumission des mandats de prestations pluriannuels;
- Introduction d'une procédure de vote en deux collèges vaudois et genevois au sein de la Commission interparlementaire contrôlant les activités du Réseau.
La Commission interparlementaire adopte le Concordat amendé le 20 août 1997 Délégation vaudoise : 8 oui, 2 non et 4 abstentions; délégation genevoise : 7 oui et 4 non).
Le projet de loi relatif au Concordat instituant le réseau hospitalo-universitaire de Suisse occidentale est adopté par le Parlement genevois en trois débats les 21 mars, 19 septembre et 3 octobre 1997.
Le projet de décret autorisant le Conseil d'Etat à adhérer au Concordat instituant le réseau hospitalo-universitaire de Suisse occidentale est accepté, par le Parlement vaudois, en deux débats les 17 et 23 septembre.
Les travaux ont été menés sur une période très courte, puisque la rédaction du Concordat, son examen par la Commission interparlementaire et son adoption par les Parlements vaudois et genevois, ont été réalisés en moins de deux ans.
Les coûts de ce projet sont de l'ordre de Fr. 195'000,00.- (travaux parlementaires non compris).
10. Lancement d'un référendum dans le canton de Genève et votation populaire
Le 20 novembre 1997, un référendum contre le Concordat aboutit dans le canton de Genève, muni de 15'796 signatures.
Le 7 juin 1998, le Concordat est refusé, en vote populaire, par une majorité du corps électoral genevois (58'560 NON contre 43'022 OUI / participation 51,10 %).
VI. Financement et gestion du fonds de coopération Vaud-Genève
Selon la loi relative au financement de la collaboration entre les Cantons de Vaud et de Genève dans le domaine de la santé publique et des hôpitaux, le 1% des subventions accordées aux établissements publics médicaux est versé en 1993, à savoir Fr. 5'600'000--.
Le Canton de Vaud assume une charge équivalente, la règle de la parité ayant été reconnue.
En outre, la loi prévoit que cette somme puisse être augmentée jusqu'à 5% des subventions attribuées aux établissements publics médicaux. Cette possibilité n'a pas été utilisée. Le Fonds est alimenté de manière à répondre aux besoins et sur la base de l'avancement des projets Vaud-Genève, son but n'étant pas de constituer des réserves, mais de financer le processus du rapprochement Vaud-Genève.
Durant les années 1993 à 1997, période de validité de la loi de financement genevoise, le fonds a été alimenté de la manière suivante :
Contributions
cantonales
Vaud
Genève
1993
5'600'000,00
5'600'000,00
1994
5'600'000,00
5'655'250,00
1995
3'600'000,00
3'600'000,00
1996
2'759'000,00
2'759'000,00
1997
1'500'000,00
1'500'000,00
Fr.
19'059'000,00
19'114'250,00
Fr. 38'173'250,00
Durant cette même période, les montants engagés pour des projets de collaboration Vaud-Genève ont été les suivants :
Projets
Coûts
Projets de développement médicaux
3'519'078,80
Projets de développement relatif à la gestion
2'614'542,95
Projets de développement informatique
1'763'971,00
Centres Vaud-Genève
9'260'321,20
Structures communes
12'702'458,00
Projets fédéraux des 5 hôpitaux universitaires CH
497'000,00
Approche institutionnelle
681'000,0
Total
31'038'371,95
(Voir tableau détaillé, annexe 4)
L'Association Vaud-Genève gère le fonds de coopération et assure le suivi de l'ensemble des projets de collaboration. Elle comprend deux collaborateurs permanents : la secrétaire générale et sa secrétaire. Les activités comptable et informatique sont confiées à des personnes extérieures, émanant essentiellement des Hospices cantonaux vaudois.
La gestion financière du fonds de coopération est confiée à deux banques, de manière à ce que les montants attribués produisent un rendement adéquat avant d'être engagés dans des projets concrets (voir tableau détaillé : annexe 4)
Fonctionnement de l'Association Vaud-Genève
Dépenses du
Secrétariat général
Recettes
( intérêts - frais
gestion)
Exercice 1993
273'942,38
89'465,05
Exercice 1994
386'446,89
565'998,15
Exercice 1995
439'916,48
1'070'022,12
Exercice 1996
474'863,53
684'416,92
Exercice 1997
412'310,77
847'530,69
Jusqu'en 1997, les revenus du fonds ont permis de financer le fonctionnement de l'Association.
Dès 1998, ce ne sera plus le cas, puisque le fonds n'a pas été réalimenté et que la collaboration Vaud-Genève s'est progressivement intensifiée, des projets toujours plus nombreux étant pris en charge.
Le fonds, en l'état actuel, permet de financer tous les projets de développement Vaud-Genève et le fonctionnement des structures communes mises en place jusqu'à fin 1999.
C o n c l u s i o n
En six ans, les échanges entre les deux centres hospitalo-universitaires ont considérablement augmenté.
Les projets de développement Vaud-Genève ont permis de rapprocher nombre de services médicaux et de départements. Ces réalisations démontrent qu'il est nécessaire, si l'on veut garder un enseignement et une recherche performants en Suisse romande, d'étendre le bassin de population et de réunir les ressources affectées à la médecine de pointe.
Par ailleurs, des projets tels que l'assistance respiratoire à domicile ou la prévention des complications du diabète prouvent que des regroupements sont aussi bénéfiques pour les soins de proximité.
Grâce au Fonds de coopération, des projets communs significatifs sont réalisés, qui conduisent à une augmentation notable des compétences et de la qualité des soins sur les deux sites. Leur gestion et leur coordination sont menées par une structure légère, si bien que les sommes affectées au Fonds sont entièrement attribuées à des actions concrètes.
Enfin, les projets institutionnels, en particulier le RHUSO, ont joué un rôle déterminant, d'une part pour accélérer la dynamique de la collaboration dans les institutions, d'autre part pour faire prendre conscience aux milieux politiques et socio-économiques de la nécessité de cette coopération pour l'avenir de la médecine académique romande.
Annexes mentionnées
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Débat
Mme Barbara Polla (L). Nous aimerions remercier le département de nous soumettre aujourd'hui ce rapport sur les activités de l'Association Vaud-Genève. En effet, ce rapport donne une idée tout à fait encourageante des acquis de la collaboration hospitalo-universitaire entre Vaud et Genève, notamment grâce à l'association du même nom, et apporte de l'eau au moulin de la motion 1241 que nous avons récemment envoyée à la commission de la santé et qui demande le maintien et le développement de cette association. Les travaux de la commission pourront donc se baser utilement sur ce rapport, car nous sommes bien tous d'accord ici - les ex-fans comme les ex-opposants au Rhuso - que son refus par le souverain ne règle en rien l'incontestable nécessité de collaboration entre Vaud et Genève dans le domaine hospitalo-universitaire.
Nous aimerions, pour compléter ce rapport, insister sur deux points. Il s'agit, d'une part, de pouvoir examiner un bilan non seulement rétrospectif mais aussi prospectif, c'est-à-dire un vrai projet d'avenir d'où découlera un mandat précis pour cette association, mandat permettant à la fois évolution et évaluation - c'est d'ailleurs ce qui est demandé dans la motion 1241. D'autre part, il s'agit d'augmenter la participation des départements de l'instruction publique respectifs au sein de l'Association Vaud-Genève, que ce soit la participation effective ou la participation financière, cette dernière bien sûr dans le cadre de l'enveloppe des facultés, sachant que les deux facultés de médecine, celle de Genève comme celle de Lausanne, sont prêtes à concrétiser cette possibilité d'une augmentation de participation.
Le deuxième point représente d'ailleurs, d'une certaine façon, un élément de réponse concret à la politique fédérale et au message du gouvernement en matière de réseau d'institutions universitaires, message qui incite fortement les universités à travailler ensemble. Nous réitérons donc nos remerciements au département ; nous prenons acte de ce rapport et nous nous réjouissons des suites qui lui seront apportées.
M. Jean-Pierre Restellini (Ve). J'interviendrai en quelques mots pour expliquer la position de notre groupe et plus concrètement notre demande de renvoi de ce rapport au Conseil d'Etat.
Au point 4, page 5 du rapport, le Conseil d'Etat se plaint, je cite, «qu'à ce jour aucun projet quelconque n'a été élaboré ou présenté» par les opposants au Rhuso. Je rappelle quand même respectueusement au Conseil d'Etat que la motion 1222, cosignée par notre groupe et citée dans ce rapport, invite le Conseil d'Etat «à proposer (...) un concordat de portée limitée permettant le regroupement des prestations de haute technologie (...) et le développement de pôles d'excellence».
Alors, bien entendu, on ne peut pas comparer cette proposition, qui tient en une ou deux phrases, avec le travail colossal qu'a représenté pour le DASS l'élaboration du projet Rhuso, mais en matière de concordat, si je ne m'abuse, le parlement n'est pas compétent. En d'autres termes, il incombe bien à l'exécutif, malgré son amertume compréhensible, de se remettre à la tâche selon les voeux exprimés par le souverain.
M. Pierre-Alain Champod (S). Je serai relativement bref, car nous n'allons pas refaire ce soir le débat sur le Rhuso, dont nous avons déjà eu l'occasion de débattre à plusieurs reprises dans cette enceinte.
Nous avons pris connaissance avec intérêt du rapport du Conseil d'Etat, qui pour l'essentiel fait l'historique de la collaboration entre les hôpitaux vaudois et genevois jusqu'à la mise en place du projet Rhuso et son refus par le peuple genevois. Le Grand Conseil aura l'occasion de revenir sur cette question, puisque la commission de la santé est saisie de plusieurs objets sur ce thème et qui sont mentionnés dans le rapport. Relevons à cet égard que ledit rapport ne mentionne pas la motion 1154, qui accompagnait le rapport de minorité de M. Dominique Hausser sur le Rhuso et qui invite le Conseil d'Etat à renforcer les collaborations dans le domaine de la planification sanitaire et de la politique de la santé.
Cela dit, j'ai été aussi surpris que M. Restellini en lisant, à la page 5, que les opposants n'avaient pas fait de proposition crédible. Je rappelle que les opposants au Rhuso, regroupés au sein du Forum Santé, ont tout au long de la campagne dit qu'ils étaient pour la collaboration, mais opposés à la structure proposée. Dans le document que nous avons distribué pendant la campagne de votation figuraient des propositions concrètes, qui n'étaient pas des propositions purement électorales en vue des votations, mais qui avaient été élaborées après de longues discussions entre les partis de l'Alternative, les syndicats et les différents milieux opposés au Rhuso. Il était donc parfaitement logique et cohérent qu'au lendemain de la votation nous déposions une motion : c'est effectivement la motion 1222 dont M. Restellini a cité l'essentiel.
Nous pensons que les propositions contenues dans cette motion constituent une bonne base pour étudier une meilleure collaboration que ce n'est le cas aujourd'hui entre les hôpitaux de Vaud et de Genève. Mais pour cela il faut admettre que le peuple a refusé le Rhuso, et qu'un Rhuso bis...
M. Bernard Lescaze. Hou hou ! Hou hou !
M. Pierre-Alain Champod. Monsieur Lescaze !
M. Bernard Lescaze. J'essaie de demander la parole, après vous évidemment... Allez-y, Monsieur Champod, je vous écoute avec beaucoup d'intérêt et d'amusement, comme vous allez le voir !
M. Pierre-Alain Champod. Je disais donc, quand j'ai été dérangé par M. Lescaze, que les propositions contenues dans cette motion devraient permettre d'améliorer la collaboration entre les deux cantons et que ce sont des propositions crédibles, à moins qu'aux yeux du département la seule proposition crédible soit un Rhuso bis, malgré le refus clair du premier par le peuple !
Le président. La parole est à M. Grobet ! (Rires.)
M. Christian Grobet (AdG). Je suis navré, Monsieur Lescaze, de vous avoir devancé, mais nous aurons tout loisir de nous amuser tout à l'heure lors de votre intervention, puisqu'il semble que ce soit votre désir !
Vous ne serez pas étonnés, Madame la présidente, Madame et Messieurs les conseillers d'Etat, que j'évoque également le bas de la page 5 de votre rapport et que je constate, comme les préopinants, que le Conseil d'Etat semble n'avoir toujours pas digéré le résultat de la votation, bien que celle-ci remonte à près d'un an !
Cela dit, je doute que ce soit le sentiment unanime du Conseil d'Etat : je suis en effet persuadé que M. Guy-Olivier Segond, lui, ne partage pas ce sentiment, car il nous a démontré en d'autres occasions qu'après avoir grogné dans son coin il reprenait toujours l'ouvrage et revenait avec des propositions qui finalement réussissaient à mettre tout le monde d'accord... Monsieur Segond, il est inutile de me regarder ainsi, souriez, comme M. Lescaze : je suis persuadé que vous saurez, comme en d'autres occasions, faire la synthèse entre les différentes contre-propositions qui ont été faites par les opposants au Rhuso !
A ce propos, vous me permettrez de dire deux choses. D'abord, le rapport sur l'Association Vaud-Genève annexé à celui du Conseil d'Etat démontre, si besoin est, que la collaboration - qui a, et on s'en réjouit, avancé dans maints domaines - ne nécessitait pas la mise sur pied d'une structure antidémocratique, objet de notre opposition. Notre opposition ne visait pas, comme certains ont voulu la caricaturer, la collaboration Vaud-Genève, que tout le monde souhaite, mais bien la mise en place d'une structure anti-démocratique qui aurait ôté le pouvoir de décision aux autorités institutionnelles et donc, cas échéant, le dernier mot au peuple.
C'est dire que nous souhaitons que cette collaboration continue et que, s'il faut mettre sur pied une structure, elle devra être démocratique. Or, à cet égard, nous vous avons déjà dit que l'heureux club des dix-huit membres de la pseudo-association Vaud-Genève n'est pas digne, Monsieur le conseiller d'Etat, des institutions démocratiques qu'historiquement votre parti a eu le privilège de défendre dans notre République. Et je crois qu'il est grand temps de trouver une solution - peut-être dans le sens de la fondation de droit public que nous avons proposée - qui permette effectivement une participation réelle, et que l'on mette fin à cette pseudo-association Vaud-Genève qui n'a d'association que le nom.
Nous ne désespérons pas que le message qui vous a été adressé ce soir par certains soit entendu et qu'un projet, qui est peut-être déjà en cours de rédaction, nous parvienne rapidement.
M. Bernard Lescaze (R). Mesdames et Messieurs les députés, vous imaginez bien que le groupe radical, qui a toujours défendu le réseau hospitalo-universitaire, ne peut pas rester sans réagir face à des propos aussi étonnants, mais à la réflexion peu surprenants, que ceux tenus par les préopinants !
Ceux-ci se plaignent, ceux-ci se lamentent de ne pas encore avoir reçu un rapport définitif, un projet qu'ils puissent soit voter, à ce qu'ils disent, soit déchiqueter, comme on l'a vu pour le précédent rapport. Aussi, je me permets de relever que le Conseil d'Etat a raison, lorsqu'il souligne que nous attendons toujours les nombreuses propositions dont le Dr Saurer, député Vert, nous avait annoncé le dépôt. Et que les quelques motions qui ont été déposées, notamment par MM. Champod et Godinat, se bornent en réalité à supplier M. Segond de présenter un nouveau projet, si possible bien ficelé, si possible différent de celui qui a été rejeté - car les opposants n'aimeraient pas devoir se déjuger complètement - mais qui ait en même temps tous les avantages qu'on a refusé de reconnaître au Rhuso à l'époque et qu'on se plaît à lui reconnaître maintenant qu'il a été rejeté !
Seul M. Grobet insiste sur un point précis, et c'est tout à son honneur, à savoir celui de la participation démocratique. Il est vrai, Monsieur Grobet, qu'en raison des sommes importantes qui seraient en jeu dans un nouveau réseau hospitalo-universitaire, que ce soit par le biais d'une fondation publique - personne n'ayant jamais parlé de fusion - que ce soit simplement par le biais de collaborations, un contrôle parlementaire est nécessaire. Mais, cela dit, il ne faut pas oublier que le but essentiel, le but ultime de cette collaboration, de ce rapprochement - appelez-le comme vous voudrez - c'est en fait un hôpital de qualité, une recherche de pointe. Et lorsque vous avez besoin d'un traitement médical de pointe ou d'une intervention urgente de pointe, vous ne demandez pas que les médecins votent pour savoir de quelle manière ils vont vous soigner ! Ce qui vous importe, c'est le résultat !
Ce soir, la déception que vous manifestez, tout en reconnaissant que le rapport soumis est très complet, ne doit pas s'adresser au Conseil d'Etat. En réalité, vous n'avez qu'à vous en prendre à vous-mêmes, car ce qui arrive, c'est très exactement ce que les partisans du Rhuso vous avaient annoncé. Et je suis quand même surpris de constater non seulement que nous n'avons pas vu les contre-propositions annoncées par les opposants au Rhuso, mais encore que vous êtes déçus aujourd'hui de voir se produire ce que les partisans du Rhuso vous avaient prédit !
Dans ces conditions, Mesdames et Messieurs les députés, je propose simplement de prendre acte de ce rapport - nonobstant les regrets nombreux qui se font jour sur ma droite, dans les rangs de la gauche - de façon que, plus rapidement peut-être que certains l'auraient souhaité, on aboutisse à un autre réseau hospitalo-universitaire solide et que les fameuses propositions que nous attendons depuis plus d'une année nous parviennent.
Pour l'instant, je remercie le Conseil d'Etat de poursuivre cette collaboration que, sur tous les bancs et cette fois-ci de manière résolue - et cela me fait plaisir - on souhaite voir se poursuivre. A cet égard, je vous rappellerai, Mesdames et Messieurs les députés, que, pour qu'une collaboration réelle se poursuive, il faut que les deux parties soient d'accord et que, pour l'instant, c'est Genève qui a malheureusement refusé la main tendue par le canton de Vaud. Alors les Vaudois sont-ils d'accord de continuer à collaborer aux conditions genevoises ? Je n'en sais rien. Peut-être faudra-t-il là un nouveau rapport, que vous pouvez toujours demander - je le dis avec un peu d'ironie - à M. le conseiller d'Etat chargé du département des affaires sociales et de la santé, rapport qu'il s'empressera de vous donner et qui sans doute suscitera de nouveau une cascade de regrets de votre part ! Ma foi, je le répète : prenez-vous-en à vous-mêmes, car la solution qui a été refusée par le peuple n'était peut-être pas parfaite, mais elle était en tout cas - je continue à le penser aujourd'hui, dix-huit mois après - la moins mauvaise !
M. Gilles Godinat (AdG). Je voudrais préciser deux ou trois choses qui ont, je le crains, échappé à l'attention de M. Lescaze. Il fait habituellement toujours preuve d'une grande sagacité et je suis surpris de voir qu'il omet deux éléments fondamentaux dans ce dossier.
L'Alliance de gauche, avant la votation sur le Rhuso, avait fait une proposition concrète sous forme d'un projet de loi, dont vous n'avez pas voulu et qui est en ce moment en commission. Ce projet de loi proposait de transformer l'Association Vaud-Genève en fondation de droit public ; nous avons toujours défendu cette option, nous sommes cohérents et nous continuons à la défendre. Cela dit, le problème politique qui s'est posé après le vote sur le Rhuso était de trouver un accord dans les rangs de l'Alternative et il a fallu, dans le cadre du Forum santé, plusieurs séances de discussion pour choisir entre des options émanant de sensibilités politiques différentes.
Pour ma part, j'ai pris sur moi - mon groupe n'étant pas d'accord avec cette option - de cosigner une motion où il est question d'entrer en matière sur un concordat limité. L'Alliance de gauche a toujours dénoncé ces concordats comme étant la porte ouverte à une mainmise exclusive de l'exécutif sur les décisions majeures concernant les orientations politiques, que ce soit dans le domaine de l'enseignement ou de la santé. J'ai néanmoins fait cette concession, dans le cadre du Forum santé, car j'estime que c'est un des moyens à étudier pour essayer de résoudre les problèmes de collaboration que nous ne pouvons pas résoudre autrement. Et tout en assumant cette responsabilité, tout en soutenant qu'il faut continuer d'examiner la solution du mini-concordat si nous n'en avons pas d'autres, je tiens ici à défendre clairement l'option d'une fondation de droit public Vaud-Genève. C'est une proposition que notre parlement peut faire au parlement vaudois.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
Le président. Comme nous l'avons annoncé au début de cette session, je vous propose de prendre maintenant le projet de loi 8010-A.
Le 25 mars 1999, le Grand Conseil a renvoyé sans débat ce projet de loi à la Commission de l'économie. Sous la présidence de M. Alain-Dominique Mauris, député, les commissaires ont consacré la séance du 19 avril à l'étude de ce projet. Ont également assisté à nos travaux, M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat, président du Département de l'économie, de l'emploi et des affaires extérieures (DEEE), Mme Laura Bertholon-Barchi, adjointe du directeur des affaires juridiques et M. Yves Perrin, directeur de l'office cantonal de l'emploi (OCE). Les représentants du département ont donné toutes les informations demandées et ont ainsi facilité les travaux de la commission; qu'ils en soient remerciés.
1. Introduction
La révision de la loi fédérale sur le chômage (LACI) de 1995 (entrée en vigueur en 1997 et pour certains articles en 1998) a obligé notre Grand Conseil à revoir la loi cantonale sur le chômage en 1997. Cette révision a occupé la Commission de l'économie de la précédente législature pendant de nombreuses séances. Parallèlement aux travaux de la commission, cette révision a également donné lieu à de nombreuses rencontres entre les partenaires sociaux. Finalement un compromis assez large a été trouvé et, en juin 1997, le Grand Conseil (par 69 oui, 9 non et 5 abstentions) a accepté cette révision (voir mémorial de juin 1997, pp. 4052 à 4218). Elle est entrée en vigueur le 1er juillet 1997.
La commission avait souhaité maintenir un article limitant à une seule occupation temporaire pendant une période de 4 ans et avait tout aussi clairement désiré conserver la possibilité pour les chômeuses et les chômeurs se trouvant à moins de trois ans et demi de la retraite de bénéficier d'une deuxième occupation temporaire dans le même délai de 4 ans.
Avec l'introduction des stages pour les moins de 25 ans et les allocations de retour en emploi. Les limites mentionnées ci-dessus ne figuraient plus dans le texte voté par la commission. En plénière, le département, par l'intermédiaire du conseiller d'Etat, a proposé un amendement pour corriger cette erreur. M. Maitre avait précisé que l'amendement de l'article 42 proposé au Grand Conseil n'allait rien modifier pour les chômeurs se situant à trois ans et demi de l'âge de la retraite. La majorité du parlement a voté l'amendement.
En réalité, la formulation proposée par le département supprimait la possibilité d'un deuxième emploi temporaire pour les personnes proches de la retraite.
Dans un premier temps le département a continué à offrir un deuxième emploi temporaire aux personnes à moins de trois ans et demi de l'âge de la retraite. Suite à une décision de la commission de réclamation, le département a dû appliquer la loi dans toute sa rigueur et refuser cette possibilité aux chômeuses et chômeurs proches de l'âge de la retraite.
C'est pour corriger cette erreur que le présent projet de loi a été déposé par trois parlementaires socialistes.
2. Travaux de la commission
Le département a indiqué au début de la séance que, selon les simulations qu'il avait calculées, ce projet n'entraînerait pas de dépenses supplémentaires pour l'Etat. En effet, sur une période de 4 ans, l'accroissement des charges pour le DEEE est compensé par une diminution des prestations versées par le DASS au titre du RMCAS.
De plus, dans un soucis de cohérence de la loi, le département a proposé un nouvel amendement pour ancrer dans la loi le principe que les règles appliquées pour les emplois temporaires le soient aussi pour les ARE (art 32, al. 2, lettres b et c).
Le département a également rédigé un amendement permettant à l'office de l'emploi de proposer des ARE à des chômeurs. (art. 30, al. 1 )
Enfin, le département a soumis à la commission une rédaction de l'article faisant l'objet du présent projet. Les auteurs ont estimé que la formulation du département était meilleure que le texte original et se sont ralliés à celle-ci (art. 42, al. 1, lettre c (nouvelle teneur), al. 2 (nouveau)).
Les votes de la commission ont donné les résultats suivants :
L'article 30, alinéa1 tel que proposé par le DEEE: unanimité (2 AdG, 3 S, 1 Ve, 1 DC, 1 R, 3 L)
L'article 32, alinéa 2 tel que proposé par le DEEE : Pour : 10 (1 AdG, 3 S, 1 Ve, 1 DC, 1 R, 3 L) et une abstention (AdG).
L'article 42, alinéa 1 et tel que proposé par le DEEE : unanimité (2 AdG, 3 S, 1 Ve, 1 DC, 1 R, 3 L)
Au vote final le projet de loi 8010 ainsi amendé a été accepté à l'unanimité (2 AdG, 3 S, 1 Ve, 1 DC, 1 R, 3 L) par la Commission de l'économie.
Etant donné que de nombreuses personnes attendent l'adoption de ce projet pour pouvoir débuter un emploi temporaire ou une ARE et que la commission est unanime, les commissaires ont souhaité qu'il puisse être soumis le plus rapidement possible au Grand Conseil.
3. Conclusion
Compte tenu des explications développées ci-dessus, la Commission de l'économie, unanime, vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à voter ce projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la commission.
Projet de loi(8010)
modifiant la loi en matière de chômage (J 2 20)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La loi en matière de chômage, du 11 novembre 1983, est modifiée comme suit :
Art. 30, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Les chômeurs ayant épuisé leur droit aux indemnités fédérales peuvent bénéficier d'une allocation de retour en emploi s'ils retrouvent un travail salarié auprès d'une entreprise active dans le canton de Genève. L'autorité compétente peut également proposer une telle mesure de sa propre initiative.
Art. 32, al. 2, lettres b et c (nouvelle teneur)
Art. 42, al. 1, lettre c (nouvelle teneur)al. 2 (nouveau)
2 En dérogation à l'alinéa 1 lettre c, l'autorité compétente propose, à défaut d'une allocation de retour en emploi, un second emploi temporaire au chômeur qui, au moment de la demande, se situe à moins de 3 ans et demi de l'âge usuel donnant droit à une rente de l'assurance-vieillesse.
Article 2 Entrée en vigueur
Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
ANNEXE
Tableau comparatif des articles modifiés
Texte actuel
Texte accepté par la commission
Art. 30, al 1
1 Les chômeurs ayant épuisé leur droit aux indemnités fédérales peuvent bénéficier d'une allocation de retour en emploi s'ils retrouvent un travail salarié auprès d'une entreprise active dans le canton de Genève
Art. 30, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Les chômeurs ayant épuisé leur droit aux indemnités fédérales peuvent bénéficier d'une allocation de retour en emploi s'ils retrouvent un travail salarié auprès d'une entreprise active dans le canton de Genève. L'autorité compétente peut également proposer une telle mesure de sa propre initiative.
Art. 32
2 Le chômeur doit en outre :
b) être âgé au moins de 25 ans révolus et se situer à plus de 3 ans et demi de l'âge usuel donnant droit à une rente de l'assurance-vieillesse;
c) ne pas avoir bénéficié d'un stage professionnel de réinsertion ou d'une allocation de retour en emploi au cours des 4 années précédant le dépôt de la demande;
Art. 32, al. 2, lettres b et c (nouvelle teneur)
2 Le chômeur doit en outre :
être âgé au moins de 25 ans révolus;
c) ne pas avoir bénéficié d'un stage professionnel de réinsertion, d'une allocation de retour en emploi ou d'un emploi temporaire au cours des 4 années précédant le dépôt de la demande;
Texte actuel
Texte accepté par la commission
Art. 42
1 Pour bénéficier de l'emploi temporaire, le chômeur doit :
c) ne pas avoir bénéficié d'un stage professionnel de réinsertion, d'une allocation de retour en emploi ou d'un emploi temporaire au cours des 4 années précédant le dépôt de la demande;
Art. 42, al. 1, lettre c (nouvelle teneur), al. 2 (nouveau)
1 Pour bénéficier de l'emploi temporaire, le chômeur doit :
c) ne pas avoir bénéficié d'un stage professionnel de réinsertion, d'une allocation de retour en emploi ou d'un emploi temporaire au cours des 4 années précédant le dépôt de la demande, sous réserve des cas visés à l'alinéa 2;
2 En dérogation à l'alinéa 1 lettre c, l'autorité compétente propose, à défaut d'une allocation de retour en emploi, un second emploi temporaire au chômeur qui, au moment de la demande, se situe à moins de 3 ans et demi de l'âge usuel donnant droit à une rente de l'assurance-vieillesse.
Premier débat
M. Pierre-Alain Champod (S), rapporteur. Ce projet de loi a été étudié rapidement par la commission de l'économie et celle-ci a demandé qu'il soit traité durant cette session pour deux raisons essentielles. La première, c'est que plusieurs dizaines de personnes sont concernées par ce projet de loi : ce sont des personnes qui sont à moins de trois ans et demi de l'âge de la retraite et qui devraient pouvoir bénéficier soit d'une deuxième ARE, allocation de retour en emploi, soit d'une seconde occupation temporaire. La commission était unanime au moment du vote de ce projet de loi, et c'est la seconde raison pour laquelle nous avons souhaité qu'il soit examiné ce soir.
J'ai constaté qu'une proposition d'amendement a été déposée sur nos bancs. Effectivement, à notre séance de commission de lundi dernier, Mme Filipowski a soulevé un problème concernant ce projet, mais nous avons estimé que l'intérêt des personnes proches de la retraite primait sur sa proposition d'amendement et avons décidé de vous soumettre le projet tel quel, quitte à ce que Mme Filipowski dépose un nouveau projet de loi qui sera étudié en commission tranquillement. Je vous invite donc à voter le projet tel qu'il ressort des travaux de la commission.
M. Bernard Clerc (AdG). Nous saluons ce projet de loi qui vise à permettre aux travailleurs âgés d'obtenir un deuxième emploi temporaire. Je dois dire que ce projet de loi correspond à la volonté de la commission de l'économie qui avait discuté de la refonte de la loi sur le chômage, commission à laquelle je participais à l'époque.
Nous devons cependant formuler une réserve concernant l'article 32, alinéa 2, lettre c). La formulation retenue empêche en effet un travailleur âgé ayant obtenu un emploi temporaire de bénéficier d'une allocation de retour en emploi, mais également tous les autres chômeurs, et cela est particulièrement absurde puisque les allocations de retour en emploi, chacun le sait, coûtent moins cher qu'un emploi temporaire. Ce n'est pas que nous valorisions a priori cette mesure par rapport aux emplois temporaires, mais nous ne voyons pas pourquoi un chômeur qui trouve une telle possibilité en serait privé, ni pourquoi l'autorité compétente ne pourrait pas, comme prévu à l'article 30, alinéa 1, proposer une telle mesure.
M. Champod nous propose de voter le projet de loi tel qu'il ressort des travaux, en disant qu'on pourra y revenir par la suite. Je trouve ce raisonnement un peu curieux. Nous sommes en train de modifier la loi sur le chômage et nous n'allons pas y revenir tous les mois, alors qu'il suffit de modifier l'article 32 alinéa 2, lettre c) en supprimant simplement la mention : «...ou d'un emploi temporaire...».
Par ailleurs, je remarque - et je ne sais pas si les membres de la commission y ont été attentifs - qu'il y a une contradiction entre le texte de l'article 32 et la disposition de l'article 42, alinéa 2, qui précise bien qu'un second emploi temporaire est offert au chômeur à moins de trois ans et demi de la retraite, je cite, «à défaut d'une allocation de retour en emploi». On se trouve devant deux dispositions absolument contradictoires, puisque l'article 32 stipule qu'il ne peut pas y avoir d'ARE pour une personne qui a déjà bénéficié d'un premier emploi temporaire et que l'article 42 pallie les cas où il n'est pas possible d'avoir une allocation de retour en emploi. Notre amendement nous paraît donc particulièrement justifié ; il ne modifie pas le fond de la disposition permettant effectivement au travailleur âgé de bénéficier d'un deuxième emploi temporaire, mais il n'empêche pas les autres chômeurs et les travailleurs âgés de bénéficier d'une allocation de retour en emploi, le cas échéant.
Voilà, Mesdames et Messieurs, pourquoi nous vous proposons cet amendement à l'article 32, alinéa 2, lettre c) visant à supprimer la mention : «...ou d'un emploi temporaire...».
M. Alain-Dominique Mauris (L). Je tiens à remercier le Bureau du Grand Conseil d'avoir accepté de traiter en urgence ce projet de loi. Il l'a fait à une condition, c'est que ce projet n'entraîne aucune discussion ce soir, puisqu'il avait été soutenu à l'unanimité par les membres de la commission de l'économie.
Or, il s'avère que Mme Filipowski - qui, pour des raisons qu'on comprendra, n'était pas présente lors du débat en commission - a néanmoins voulu déposer son amendement. A mon sens, il convient de voter en urgence ce projet de loi et de ne pas entamer un débat sur un amendement dont nous ne connaissons absolument pas les conséquences. Je soutiens donc totalement la proposition de M. Champod, à savoir de voter sans tarder ce projet de loi tel quel et de laisser l'Alliance de gauche déposer éventuellement un projet de modification. Engager maintenant une discussion sur cet amendement serait une erreur et irait contre la volonté de la commission de l'économie.
Mme Magdalena Filipowski (AdG). Je suis bien contente que, dans le rapport qui a été distribué, vous disposiez d'un tableau comparatif entre la loi telle qu'elle est actuellement et telle qu'elle est proposée par la commission. Ainsi, vous pouvez constater que notre amendement à l'article 32 vise uniquement à maintenir la loi telle qu'elle existe actuellement. Et, quand M. Mauris dit qu'on ne connaît pas les conséquences de notre amendement, je lui réponds que les conséquences sont celles de la loi telle qu'elle a été acceptée à l'époque par le Grand Conseil et telle qu'elle est actuellement appliquée.
Nous proposons de maintenir l'article 32 tel qu'il existe actuellement, afin de ne pas porter préjudice à tous les chômeurs âgés de 25 à 60 ans. En effet, il ne s'agit pas aujourd'hui de privilégier les personnes âgées de plus de 60 ans en pénalisant tous les autres chômeurs entre 25 et 60 ans.
Nous reconnaissons qu'il y a urgence en ce qui concerne le sort des chômeurs âgés. C'est dans cette optique que le projet du parti socialiste a été discuté en commission. Mais la modification qui a été proposée à l'article 32 n'a rien à voir avec la problématique des personnes âgées et constitue en fait une nouvelle exclusion des chômeurs, une nouvelle entrave à cette mesure de l'allocation de retour en emploi que M. Lamprecht souhaite mettre en place et dont il se sert dans la promotion économique. Sur la base de la loi actuelle, il y a sans doute, aujourd'hui, des chômeurs qui sont en relation avec les entreprises et qui sont en train de conclure un contrat en vue d'un engagement et en vue d'une insertion. Or, on en arriverait, si cette modification était votée, à les empêcher de bénéficier de cette allocation de retour en emploi pour la seule raison qu'ils auraient eu, en 1995, une occupation temporaire auprès de l'Etat, ne serait-ce que durant un mois ! Je ne pense pas que l'effort de M. Lamprecht pour mettre en place ces allocations de retour en emploi vise un tel but !
Par ailleurs, cette modification aurait aussi pour effet de décourager les entreprises, qui ne sauraient plus avec quels chômeurs elles peuvent discuter et avec lesquels elles ne le peuvent pas. Ce serait vraiment mettre des bâtons dans les roues, entraver l'insertion des chômeurs en fin de droit et décourager les entreprises qui commencent à s'intéresser à l'action que le département a engagée.
C'est donc bien une erreur d'avoir introduit cette notion d'emploi temporaire à la lettre c) de l'article 32. De plus, comme mon collègue l'a démontré, cette formulation est également en contradiction avec le deuxième alinéa de l'article 42. Par contre, supprimer cette notion redonne toute son harmonie à la seule modification qui est urgente, à savoir celle qui rend possible un deuxième emploi temporaire pour les personnes âgées. Alors, consacrons-nous à ce qui est urgent, votons cette amélioration et n'introduisons pas des entraves inutiles, absurdes et inhumaines, car on ne peut pas appeler cela autrement !
M. Olivier Vaucher (L). Mon intervention sera très brève. Quoique j'aie essayé de suivre Mme la députée Filipowski dans son explication, malheureusement je n'ai pas compris le sens de l'amendement qu'elle voulait nous convaincre d'accepter ce soir... (L'orateur est interpellé.) Monsieur Pagani, si mes oreilles sont bouchées, les vôtres sont mal débouchées !
Ce projet de loi a justement été déposé pour apporter quelque chose de nouveau par rapport à la loi actuelle. Et je ne vois pas très bien pour quelle raison Mme Filipowski se réfère à la loi actuelle, puisqu'il s'agit ici d'apporter des améliorations à celle-ci. Alors, bien sûr, on peut reprendre l'ancienne version... (Commentaires. Le président agite la cloche.) Mon intervention est brève, ne la rallongez pas, il est déjà assez tard !
Une chose est certaine, Mesdames et Messieurs les députés des bancs d'en face, c'est qu'à l'heure actuelle il y a entre 180 et 200 personnes qui attendent le résultat de notre vote de ce soir. Il est exclu en l'état - vous ne pourrez pas nous en convaincre - de rouvrir un débat de commission. La commission était d'ailleurs unanime et c'est ce qui nous a permis de faire passer en urgence ce projet de loi. Je vous demande donc simplement de le voter tel qu'il est, car cet amendement nous obligerait à le renvoyer en commission et à le réétudier. Or, il est exclu, par rapport aux personnes qui attendent notre décision, de la différer !
M. Bernard Clerc (AdG). Je crois que M. Vaucher n'a pas compris et que malheureusement la majorité des députés de ce parlement n'ont pas compris, parce qu'ils n'ont pas comparé attentivement le texte proposé par la commission et le texte de notre amendement.
Il y a effectivement une contradiction dans le texte qui vous est proposé par la commission et je vais essayer de la résumer de manière simple. L'article 32 fixe les conditions pour bénéficier d'une allocation de retour en emploi. La modification qui nous est proposée dit que, pour bénéficier de cette allocation de retour en emploi, il ne faut pas avoir bénéficié «d'un stage professionnel de réinsertion, d'une allocation de retour en emploi ou d'un emploi temporaire au cours des 4 années précédant le dépôt de la demande». Or, les chômeurs âgés - à qui on veut précisément donner un deuxième droit à un emploi temporaire - ont forcément déjà eu un premier emploi temporaire et sont donc de ce fait exclus de l'allocation de retour en emploi. Jusqu'ici, c'est simple ! Cela veut dire que, pour ces chômeurs âgés, on privilégie l'emploi temporaire au détriment de l'allocation de retour en emploi, qui est pourtant, je le rappelle, plus économique pour l'Etat.
Deuxième élément : l'article 42 définit les conditions pour bénéficier d'un emploi temporaire. Et l'alinéa 2 de cet article, qui est censé apporter une amélioration pour les chômeurs âgés, dit : «En dérogation à l'alinéa 1 lettre c), l'autorité compétente propose, à défaut d'une allocation de retour en emploi - qu'on a exclue précédemment - un second emploi temporaire au chômeur qui, au moment de la demande, se situe à moins de 3 ans et demi de l'âge usuel donnant droit à une rente de l'assurance-vieillesse.»
Il est évident qu'il y a là une contradiction entre l'article 42, alinéa 2, et l'article 32 ! C'est pourquoi nous vous proposons, et ce n'est pas la révolution, de modifier l'article 32 en supprimant la mention : «ou d'un emploi temporaire». J'espère avoir été assez... clair ! (Rires.)
Mme Magdalena Filipowski (AdG). Tout à l'heure, il a été dit qu'il y a des dizaines de personnes âgées qui attendent cette possibilité de deuxième emploi temporaire. Nous espérons que nous pourrons la leur offrir dès ce soir.
Cela dit, si l'amendement que nous proposons et qui vise au maintien de la loi actuelle ne devait pas passer, ce sont d'autres personnes qui seraient pénalisées et qui ne s'y attendent pas ! Ces personnes n'imaginent pas qu'elles vont être exclues de l'allocation de retour en emploi, nouvelle mesure qui vient de démarrer et qui doit leur permettre de s'insérer dans les entreprises privées, bénéficiant de subventions importantes pour justement engager les chômeurs difficilement plaçables, les chômeurs de longue durée.
Tout le monde n'est pas aussi sensible à cette problématique, mais tout le monde a deux bras et je vais donc utiliser une autre image ! Devons-nous aujourd'hui choisir entre couper le bras à toutes les personnes qui ont plus de 60 ans, ou bien accepter de couper le bras à ceux qui ont entre 25 et 60 ans ? C'est en effet de cette manière que se pose le problème, et ce chantage, nous ne pouvons pas l'accepter. C'est pourquoi nous vous proposons cet amendement, de manière que les personnes âgées puissent bénéficier d'un deuxième emploi, mais qu'en même temps on ne supprime, pour les autres, la possibilité de l'ARE, qui a été récemment offerte par la loi et qui est en train de se mettre en place dans les entreprises.
Je demande, Monsieur le président, un vote nominal sur cet amendement, car j'estime qu'il est extrêmement important.
M. John Dupraz (R). Il semble, à entendre les uns et les autres, que nous ne sommes pas très loin d'une solution. Comme nous siégeons demain, je proposerai de renvoyer ce projet en commission, avec l'amendement. La commission l'examinera demain en début d'après-midi et le Grand Conseil pourra le voter au cours de la journée.
M. Charles Beer (S). Il est évident qu'il y a une contradiction entre les articles 32 et 42, cela ne fait pas de doute, il faut le reconnaître. Mais c'est d'autant plus regrettable qu'il y avait unanimité en commission et que tout le monde était invité à y siéger.
Cela dit, je rappelle que l'ancienne teneur de la loi, que Mme Filipowski nous propose de rétablir, était floue et qu'elle n'est pas appliquée, vous le savez bien. Nous avons d'ailleurs voté une motion qui demande justement qu'on applique cet article de loi, motion dont vous êtes chargée, Madame, de faire le rapport depuis une année ! C'est dire que nous avons donc tous un peu pataugé !
Le département a tenté de jouer le jeu, en faisant un certain nombre de propositions, de manière à préciser, à corriger cette loi votée un peu rapidement en juin 1997. Il serait donc dommage de voter ce soir une loi contenant une telle erreur, une telle contradiction et il serait stupide et dangereux de passer en force, sans avoir pris la peine d'en discuter. C'est pourquoi la proposition de M. Dupraz me semble être le bon sens. Nous devons aller vite, mais nous devons malgré tout réétudier la chose. Sa proposition que la commission se réunisse demain en début d'après-midi me paraît être la meilleure.
M. Bernard Clerc (AdG). Je m'apprêtais à combattre cette proposition de renvoi en commission, car il y a effectivement urgence et je craignais que cela reporte le vote de ce projet au mois de juin, alors qu'il y a des chômeurs âgés qui ont besoin de ces emplois temporaires. Mais, si la commission peut siéger demain, je me rallie au renvoi en commission.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous propose la procédure suivante. Demain, nous siégeons dès 14 h. Je propose que la commission se réunisse à la salle Nicolas Bogueret en début de séance. Quand elle aura terminé ses travaux, nous remettrons ce projet à l'ordre du jour, s'il y a accord entre tous. Je pense en effet qu'il n'est pas raisonnable de faire attendre les chômeurs parce qu'une loi n'a pas été examinée correctement en commission ! Etes-vous d'accord avec cette proposition ?
C'est le cas, je lève donc la séance et vous donne rendez-vous demain à 14 h.
La séance est levée à 23 h.