République et canton de Genève

Grand Conseil

R 370-A
13. a) Rapport de la commission ad hoc chargée d'étudier la résolution de Mmes Fabienne Bugnon, Jeannine de Haller et Marianne Grobet-Wellner pour la nomination d'une commission d'enquête parlementaire ad hoc sur les événements qui ont secoué Genève durant la commémoration du 50e anniversaire de l'OMC. ( -) R370
Mémorial 1998 : Développée, 2627. Adoptée, 2659. Commission ad hoc, 2660.
Rapport de majorité de Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve), commission ad hoc
Rapport de minorité de M. Bernard Lescaze (R), commission ad hoc
R 398
b) Proposition de résolution de Mmes et M. Elisabeth Reusse-Decrey, Anne Briol et Christian Ferrazino adressée au Conseil d'Etat pour qu'il mette sur pied dans les trois mois des Assises au sujet de la violence. ( )R398

Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve), rapporteuse de majorité. Voilà un an déjà que se sont déroulés les événements dont traite ce rapport. Et ce n'est qu'aujourd'hui que nous l'examinons. La voie parlementaire est lente, et cela nous semble un peu lointain.

Mais le but de cette commission, vous le savez, n'était pas de réagir à chaud pour stigmatiser des coupables de part et d'autre, quels qu'ils soient. Tout au plus avons-nous tenté de déterminer quelques responsabilités dans le seul et unique objectif de prévenir de tels événements à l'avenir.

Le rapport de la commission s'est voulu objectif et impartial. Pour ma part, c'est dans cette optique que je l'ai rédigé, que ce soit le compte rendu des faits, celui des auditions ou les conclusions.

Depuis ces événements, d'autres se sont produits qui concernent aussi, hélas, des jeunes confrontés au phénomène de la violence. J'en citerai deux. Je ne peux m'empêcher d'évoquer la tragédie de Denver, qui a eu lieu la semaine dernière; ce type de tragédie n'est pas nouveau aux Etats-Unis, mais il n'a jamais atteint de telles proportions.

A Genève, nous n'en sommes pas encore là - Dieu, merci - mais ce drame souligne l'importante nécessité de s'atteler très sérieusement à cette problématique avant qu'elle n'empire. Je pense également à la manifestation des squatters, au début du mois, qui s'est mal passée, puisqu'il y a eu affrontement entre les jeunes et les forces de la police.

Ces deux événements n'ont aucune commune mesure dans leurs proportions, mais cela me fait dire qu'il faut absolument casser l'engrenage de l'escalade de la violence.

La presse a accusé la commission de faire porter les responsabilités à tout le monde, dans ses conclusions : police, organisateurs de la manifestation, organisation OMC, société. Il aurait été certainement plus croustillant de trouver la cause unique et identifiable qui aurait provoqué ces troubles. Mais cette démarche n'aurait pas été honnête, car chacun ici sait qu'à tout phénomène correspondent des causes multiples, ou, plutôt, si l'on peut dire, des causes profondes, puisque la violence exprime toujours une révolte, et nécessite des facteurs qui permettent à cette révolte de s'exprimer.

Ce qui a surpris tout le monde dans cette manifestation de mai 1998, c'est le nombre de jeunes - de très jeunes, même - qui y ont participé. Mais, au fond, pourquoi s'en étonner ? Les jeunes se voient confrontés à une sorte de «multicrise» : crise économique, crise écologique, crise internationale et, aussi, crise politique. Les jeunes s'estiment, et sont sans aucun doute, les victimes d'un système économique injuste et d'un effondrement de notre système de valeurs. Certains, victimes de la relégation sociale, rentrent par effraction dans l'actualité.

A mon avis, il est plutôt positif de constater que les discours omniprésents que sont l'apologie de la compétition et l'éloge de la surconsommation macdonaldienne n'ont pas tué chez eux l'aspiration à une autre idéologie. Soyons vigilants pour que l'enthousiasme des premières manifs ne dégénère pas en actes de violence et de «chacun pour soi». Puisque cette manière de s'exprimer est la seule qu'ils aient trouvée, sachons l'écouter. Pour éviter les débordements, la simple répression ne suffit pas : elle est inefficace.

Il faut absolument identifier les causes des révoltes, qu'elles soient le fait de jeunes ou de moins jeunes. Nous pensons qu'il faut rechercher du côté des menaces que le court terme fait peser sur l'avenir, des exigences de performance d'une société en apparence tolérante et ouverte aux multiples opinions, mais qui, en réalité, rejette souvent ce qui n'est pas conforme à ce qui est considéré comme le «bien agir» et le «bien penser».

C'est dans cette voie qu'il faut creuser, et c'est pourquoi je me réjouis vivement de l'initiative prise par le Conseil d'Etat d'organiser des assises. Je l'en remercie et ne peux que souhaiter que des propositions concrètes en sortiront et qu'elles seront prises au sérieux. Nous y veillerons.

M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de minorité. Dans une atmosphère certainement plus sereine qu'il y a quelques mois, nous débattons aujourd'hui des questions qui ont surgi dans ce parlement au sujet des manifestations de mai 1998. Vous venez d'entendre un rapport très «soft», pour parler français... (Rire de M. Blanc.) ...et prononcé d'une voix très douce, qui ne correspond peut-être pas entièrement à l'ambiance des travaux de la commission. Faisons donc ici abstraction du fait que celle-ci a été très heurtée et que, finalement, les conclusions de la majorité ont été votées par cinq députés... sur quinze, les dix autres se refusant à prendre part aux travaux de cette commission, à partir de l'automne !

Alors, bien sûr, on peut dire que sur le plan de la stricte procédure parlementaire, il s'agit d'une vieille histoire : vous avez en face de la rapporteuse de majorité, un rapporteur de minorité qui tenait quand même, au nom d'une bonne partie en tout cas de ceux qui n'ont pas assisté à la fin des travaux, à dire et à rappeler qu'on n'avait jamais vu de telles manifestations à Genève : il y a eu quinze policiers blessés, dont deux grièvement; cent quatre-vingts plaintes et si la rapporteuse de majorité, aujourd'hui - aujourd'hui, au printemps 1999 - a raison de s'insurger contre la violence, notamment la violence des jeunes, elle oublie peut-être - mais j'en suis sûr involontairement - qu'elle ne fait allusion qu'à une violence qui a lieu dans des sociétés policées. En effet, elle a donné deux exemples qui se produisent dans des sociétés qui ne connaissent pas la guerre. J'imaginais qu'elle nous parlerait de la violence au Kosovo, en Serbie, au Kurdistan et dans tant d'autres pays.

Je trouve un tout petit peu surréaliste de ne pas faire tous les efforts possibles - vous me direz que c'est un autre problème - pour lutter contre la violence dans ces pays en guerre et de s'interroger - moi aussi, je félicite le Conseil d'Etat d'organiser des assises sur la violence - sur les violences qui surgissent dans des sociétés peut-être trop calmes, trop ouatées, dont les raisons semblent ne pas avoir été véritablement examinées par la commission. Toujours est-il, je pense, que la situation s'est en grande partie décantée. Je crois que personne ne va s'opposer à la résolution qui avait été déposée par trois députés en février 1999, puisque le Conseil d'Etat avait déjà pris ou allait prendre - peu importe le calendrier - la décision d'organiser ces assises sur la violence.

J'aimerais tout de même souligner ici qu'en ce qui concerne les manifestations de l'OMC une bonne partie de ce Grand Conseil ne peut pas accepter les faits tels qu'ils se sont passés et pense que, quelles que soient les investigations faites lorsque la commission était au complet, ou les nouvelles auditions faites ensuite, la commission parlementaire n'a pas véritablement répondu aux deux questions qui étaient posées.

La première était évidemment vaste : quelles sont les causes qui peuvent être mises en relation avec les pillages et, plus généralement, avec la violence des jeunes ? La réponse aurait certainement été empruntée, parce que Genève n'est certainement pas la ville la plus misérable d'Europe.

La seconde : la police est-elle préparée à cette nouvelle forme de protestation et son comportement a-t-il été adapté en toute circonstance ? Les réponses apportées - par cinq députés sur quinze, je le rappelle - sont consternantes dans la mesure où on a cherché à prendre en faute la police et pas du tout à mieux comprendre son comportement. Je rappelle tout de même qu'une partie importante de ce Grand Conseil est consciente des difficultés rencontrées par la police et tient à la remercier de l'ordre qu'elle fait respecter tant bien que mal dans cette cité. Nous trouvons extrêmement regrettable que le rapport de majorité rejette la faute sur tout le monde : sur la presse, sur les journalistes, sur les policiers, sur les politiques, sur tout le monde sauf sur les organisateurs des quatre manifestations prévues, annoncées, il est vrai - nous ne parlerons pas des manifestations les plus douloureuses qui ont eu lieu et qui, paraît-il, n'étaient organisées par personne... C'est quelque chose d'inacceptable pour la minorité !

Mesdames et Messieurs les députés, je demande donc que les conclusions du rapport de majorité soient rejetées, puisque des assises sur la violence vont avoir lieu.

Mme Nelly Guichard (PDC). Monsieur le président, je demande que soit lue la lettre de Mme Ariane Piguet, comme M. Pierre-François Unger vous l'avait demandé lors de la dernière séance du Grand Conseil.

Le président. Madame la secrétaire, je vous prie de bien vouloir procéder à la lecture de cette lettre.

Annexe lettre Mme Piguet

M. Pierre-Pascal Visseur (R). Le soi-disant rapport de majorité, émanant de cinq députés sur quinze, qui vous est présenté cet après-midi ne mériterait ni plus ni moins qu'un classement vertical s'il ne fourmillait de mensonges, d'insultes et de subjectivité...

Mensonges, car dès le début un député qui n'avait rien à y faire y était pourtant présent jusqu'au bout des débats. Je ne m'étendrai pas sur cet incident qui a été très bien décrit par le rapporteur de minorité.

Insultes parce que ce rapport-croupion se permet de remettre en cause un ancien et brillant conseiller d'Etat, feu Henri Schmitt, qui n'est plus parmi nous pour répondre à ces critiques, mais que nous nous ferons un honneur de défendre. Critiquer sa façon d'assumer la responsabilité du Conseil d'Etat dans les manifestations des années 70 dénote bien de l'état d'esprit des auteurs de ce rapport-croupion qui, pour ceux qui n'étaient plus dans leur berceau, étaient bien du côté des manifestants, voire des casseurs qui, déjà à l'époque, n'étaient pas forcément les mêmes.

Votre serviteur se souvient fort bien de quelle façon malhonnête la Ligue marxiste révolutionnaire de l'époque et leurs petits copains de la brèche nous distribuaient - à nous autres, collégiens bourgeois de Calvin - des tracts appelant à venir casser du flic au nom de l'anti-impérialisme américain, entre autres. (Exclamations.)

M. Alberto Velasco. Toi, tu n'étais pas là !

M. Pierre-Pascal Visseur. Nombreux, parmi nous, furent ceux qui se laissèrent manipuler - Monsieur Velasco - se fichant parfaitement des buts souvent légitimes des manifestations, mais prenant plaisir à casser non seulement du flic mais aussi des petits commerces et dans des mesures bien plus importantes que lors des manifestations anti-OMC de l'année passée.

La police était certes encore moins bien équipée qu'aujourd'hui, mais sa réaction trop dure aux yeux des manifestants, déjà à l'époque, était bien trop molle aux yeux de toutes les victimes de ces manifestations. L'effort des responsables de l'époque, de feu Henri Schmitt, du chef de la police et du commandant de la gendarmerie, M. Zweigart, était déjà visible.

Subjectivité, parce que les auteurs de ce rapport-croupion sont passés comme chat sur braise sur la responsabilité des organisateurs alors qu'ils s'étalent en long et en large sur celle de la police et sur celle de l'Etat. L'un des témoignages les plus significatifs, car il émane d'un journaliste de la Télévision suisse bien connu pour son appartenance à un parti de gauche français, qui observe annuellement plusieurs manifestations internationales, est celui-ci : il a relevé à quel point le manque de prévision et de service d'ordre de la part de l'organisation mondiale des peuples avait joué un rôle négatif dans la dégénérescence des manifestations. Même les Kurdes, lors des dernières manifestations, ont su éviter les violences grâce à un service d'ordre bien organisé, comme ont pu le constater certains membres de la commission-croupion.

C'est pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, qui démontrent que le rapport que l'on nous présente aujourd'hui n'est pas légitime, que nous vous engageons à le refuser purement et simplement.

Une voix. Il faut engager les Kurdes ! (Rires.)

Le président. Le renvoi de ce rapport en commission a été demandé... Madame Bugnon, vous avez la parole.

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Tout d'abord, un mot par rapport à la lettre qui vient d'être lue, de Mme Ariane Piguet. Je regrette : les faits indiqués ne sont pas exacts ! Mme Piguet a en effet parlé à la secrétaire du Grand Conseil, mais elle ne m'a jamais parlé directement. Je n'ai donc jamais pu lui dire que la commission terminait ses auditions et qu'il ne serait pas nécessaire qu'elle vienne. Je regrette ce courrier, je regrette de devoir y répondre, mais, enfin, il en est ainsi.

J'aimerais souligner, Mesdames et Messieurs les députés, la qualité du rapport de Mme Dallèves-Romaneschi. Ce rapport est en parfaite concordance avec tout ce qui a été entendu dans cette commission.

Nous avons deux possibilités aujourd'hui : aller dans le sens de Mme Romaneschi, c'est-à-dire de parler des risques inhérents à ces manifestations et d'avoir des discussions pour examiner tout ce qui peut être fait pour éviter cette violence à Genève, notamment en mettant des assises sur pied. Je remercie d'ailleurs le Conseil d'Etat d'avoir d'ores et déjà accepté de les mettre sur pied. L'autre possibilité, exprimée par les députés de l'Entente, est d'entrer une nouvelle fois dans la polémique.

Cette commission a soulevé plus de polémique que je n'en ai jamais vue en plus de dix années de Grand Conseil. C'est très regrettable. A l'issue des travaux, je dois dire que je suis assez fière, comme les personnes qui faisaient partie de cette commission, du contenu de ce rapport. En effet, grâce à notre insistance à poursuivre les travaux, malgré le petit nombre de députés qui y ont participé, ce rapport contient des témoignages de qualité d'une grande importance pour les prochaines assises. Tout ce qui a été dit par les personnes auditionnées sera une base de travail très importante pour le jour où nous en débattrons. Je tenais à le dire.

Je relève toutefois que ce rapport ne parle pas uniquement de la police, Monsieur Visseur, il parle également des organisateurs, de leurs faiblesses, du fait qu'ils ne se sont pas rendu compte de l'ampleur que pouvaient prendre ces différentes manifestations, en prenant le risque d'organiser des manifestations sur plusieurs jours, ce qui est difficilement gérable - en effet, certains groupes de manifestation ont éclos à divers endroits. Si vous lisez le rapport comme il faut, chapitre par chapitre, vous verrez que ce sujet est évoqué également.

Ce rapport parle aussi de la presse. Il serait très intéressant pour vous de lire le livre de M. Windisch qui vient de sortir, suite à la demande du Conseil d'Etat de faire un rapport. M. Windisch dit à plusieurs reprises qu'il existe une inadéquation entre les images que nous avons pu voir à la télévision et les images qui ont été prises par des vidéastes amateurs. Il vaudrait la peine d'en discuter et d'examiner quel a été le rôle de la presse : ce qu'elle a souhaité montrer, à quel moment et pourquoi. Ce point est également évoqué dans le rapport.

Il évoque aussi l'attitude du Conseil d'Etat, qui n'a pas manqué de nous étonner. En effet, le conseiller d'Etat responsable du département a attiré l'attention de tous les députés sur un article paru dans «L'Hebdo», en le leur envoyant pour qu'ils le lisent. Et puis, ensuite, après que nous en eûmes pris connaissance, il a refusé énergiquement que nous entendions les policiers qui avaient été interrogés par «L'Hebdo». Je ne peux pas comprendre une telle manière de faire, pas plus que je ne peux comprendre les dérapages verbaux dont le dernier en date, le 18 février 1999, est paru dans le GHI. Je pense que tout cela n'est pas digne d'un conseiller d'Etat, et que cela n'a servi qu'à mettre de l'huile sur le feu.

Monsieur Lescaze, vous avez dit que la commission n'avait pas répondu aux questions. Je crois qu'il faut avoir une certaine humilité, une certaine modestie, et penser que c'est une question vaste et importante et que nous n'avons simplement pas pu y répondre. Nous nous sommes contentés d'apporter notre contribution, pas seulement par notre réflexion mais à l'aide

des témoignages. C'est ce qui est important. Il faut espérer que de ces assises sortiront des réponses à ces questions, ou au moins des éléments permettant d'agir préventivement pour éviter que de tels événements ne se reproduisent.

Enfin, je tiens à réagir à certains propos de M. Visseur - quelques-uns sont tellement révoltants, comme la comparaison avec les Kurdes, que je préfère ne pas en parler... Il a parlé de mensonges, d'insultes et d'injures : ce rapport n'en contient pas ! Vous avez une vision souvenir de M. Henri Schmitt qui est la vôtre; ce n'est pas la mienne ! Je me souviens que celui-ci avait fait vider le Prieuré avec une violence incroyable, alors qu'il y avait des mômes de 15 ans à l'intérieur - et je faisais partie de ces mômes. A chacun ses souvenirs. Nous avons simplement parlé d'un lien qui existe avec les événements de l'époque. Cela ne me semble pas être une insulte, et nous ne retirons pas nos propos. (Applaudissements.)

M. Claude Blanc (PDC). Il y a effectivement un énorme fossé entre les travaux de la commission - si on peut appeler cela des travaux, d'ailleurs - et les propos lénifiants de la rapporteuse de majorité, qui tente aujourd'hui de faire dévier le débat sur des considérations d'ordre général sur la violence, sur ses causes et sur les moyens d'y remédier.

En réalité, les membres de la commission, dès les premières séances, se sont aperçus que la commission allait dans une direction, sous une présidence partiale et téléguidée, qui ne permettait pas un débat serein. J'en veux pour preuve, que, lorsque nous avons entendu le témoignage d'un journaliste qui faisait l'objet d'une plainte de la part d'un membre de la commission, ce dernier n'a même pas eu la pudeur de quitter la séance à ce moment-là... Comment voulez-vous que ce journaliste puisse témoigner librement en présence de la personne ayant porté plainte contre lui ? C'est de l'intimidation ! Bien sûr, cela fait partie de certaines méthodes politiques que nous avons souvent connues et que, malheureusement, certains pays connaissent encore, mais ce ne sont pas nos méthodes à nous. Je regrette !

Pour ma part, j'ai été très choqué de la manière dont vous avez tenté d'orienter ces travaux. Dès le premier jour, nous nous sommes aperçus - et M. Visseur l'a dit - que certains voulaient «manger du flic» et, surtout, atteindre le chef du département de justice et police et des transports en l'accusant - presque - d'avoir lui-même fomenté les troubles pour pouvoir taper sur les manifestants, d'avoir lui-même attisé la violence par ses propos. En réalité, la violence a été attisée par un certain nombre de personnes qui, à l'appel de l'Organisation mondiale des peuples, sont venues de toute l'Europe uniquement pour créer des troubles et pour empêcher l'Organisation mondiale du commerce de fêter son cinquantième anniversaire. Madame Bugnon, vous disiez tout à l'heure, avec pour une fois beaucoup de justesse... (Rires.) ...que vous faisiez partie des jeunes qui avaient été matraqués par Schmitt, à l'époque...

Une voix. Elle le mérite !

M. Claude Blanc. Evidemment, ce sont les mêmes qui «cassaient du flic» dans les années 1968/70, qui, aujourd'hui, ayant un peu blanchi sous le harnais, gardent des réminiscences de leurs violences de l'époque et qui encouragent la violence d'aujourd'hui... (Remarques et exclamations.) Et ils viennent ensuite, comme Raminagrobis, dire que nous devons nous pencher sur le symptôme de la violence... Mesdames et Messieurs, votre hypocrisie est incommensurable ! (Rires.) Comme M. Lescaze, je pense que le rapport de la commission croupion ne mérite que l'indifférence !

M. Gilles Desplanches (L). Comme mes préopinants, je tiens à exprimer ma déception quant à l'objectivité de cette commission, déception qui a été partagée. En réalité, seuls deux partis ont poursuivi les travaux de la commission, puisque nous nous sommes aperçus de certaines incohérences, notamment lorsque le député qui était partie prenante a tout de même estimé qu'il pouvait siéger en commission. Nous devons donc nous demander si les députés sont au-dessus de l'ordre moral ou s'ils ne doivent pas avoir une certaine retenue lorsqu'ils sont partie prenante et s'abstenir de faire partie d'une commission. Le but n'est pas de montrer du doigt l'un ou l'autre.

Cette commission devait jouer un rôle prépondérant par rapport à la violence; en réalité, les partis étaient venus dans le but d'apporter un éclairage, le plus objectif possible, mais, malheureusement - nous nous en sommes aperçus dès les premières séances - cela n'était plus possible, en raison justement de la présence de ce député qui s'est cru au-dessus de l'ordre moral, estimant pouvoir être juge et partie. Il a commis une faute, ce qui a entraîné toute la commission à tenir un raisonnement qui aurait pu manquer de lucidité.

Les différents procès-verbaux sur l'audition ne manquent pas de pertinence mais, par contre, il n'en est pas de même pour le rapport. Sa conclusion, comme une grande partie des travaux de la commission du reste, manque d'objectivité, et j'imagine que bon nombre de citoyens vont s'interroger sur l'esprit parlementaire de Genève.

Les commissaires admettent que le but de la protestation anti-OMC n'a pas joué un rôle significatif dans les violences et que bon nombre de manifestants n'avaient pas d'idées politiques : je l'ai repris du rapport.

Certains, une minorité, étaient présents dans le but de casser, de piller. Ce type de comportement est proche de l'hooliganisme. Les commissaires admettent que les organisateurs, après avoir lancé un appel international, auraient dû prévoir un service d'ordre digne de ce nom, ce qui n'a pas été fait.

Quant à la police, la commission estime qu'elle a péché par omission et qu'elle n'a pas pris les manifestations suffisamment au sérieux : quand on sait le nombre d'heures supplémentaires effectuées par la police genevoise - je ne parle pas des polices confédérées, car il ne faut tout de même pas oublier que certaines polices d'autres cantons sont venues prêter main-forte - on peut douter réellement que la police ait sous-estimé l'envergure de ces manifestations. Avec ce raisonnement, on pourrait imaginer que les commissaires ont estimé que les fonctionnaires genevois n'étaient pas à la hauteur, alors que certains policiers ont effectué plus de quarante heures supplémentaires, ce qui est plus qu'honorable.

De plus, certains commissaires estiment que la police genevoise devrait prendre exemple sur la France, où il existe des brigades d'intervention spéciales : les CRS. Ce sont des brigades musclées dont le but, justement, est de casser les manifestations. Mais on ne peut pas comparer Genève à la France. Il faut faire la différence entre une ville comme Genève et un petit canton, comptant moins de quatre cent mille habitants, et un pays comme la France, qui en compte plus de soixante millions, et dont les pelotons de CRS se déplacent d'un département à l'autre.

Ce rapport ne parle pratiquement pas des dégâts subis par les commerçants. Pourtant, je doute que lors des prochaines manifestations les commerçants attendent sagement que les manifestants viennent casser et piller leurs vitrines. La violence de ces jeunes est forte : il faut trouver des solutions. Peut-être les assises permettront d'y répondre, sinon entièrement du moins partiellement, mais il est malheureux que le travail entrepris par la commission, dont le but était de mettre ces violences en évidence, ait tout simplement été ignoré par une partie de cette commission. Il en restera donc un point d'interrogation.

Les commerçants ont été extrêmement déçus de lire ce rapport, car trois malheureuses lignes seulement évoquent la casse qui a été constatée dans les entreprises et les commerces. Si dans quelques années, dans quelques mois ou dans quelques jours, nous sommes confrontés à des mouvements de révolte et que les commerçants veulent se défendre, eh bien, Mesdames et Messieurs qui avez fait et soutenu ce rapport, vous devrez admettre qu'en ne tenant pas compte de tous les intéressés, commerçants y compris et les jeunes, bien sûr, on n'attise pas la violence, mais on l'encourage !

M. Rémy Pagani (AdG). J'ai été pris à partie dans ce débat et dans cette commission d'enquête. J'aimerais donc relever un ou deux faits qui me paraissent évidents.

Contrairement à ce que vous prétendez, Monsieur Lescaze, les membres de la minorité de la commission ne voulaient pas seulement exclure un membre mais tous les membres de cette commission qui auraient participé aux manifestations. J'en veux pour preuve - je me réfère à une interprétation relativement fallacieuse de M. Lescaze - la lettre que nous a adressée, en date du 24 juin 1998, soit au début des travaux de la commission...

Une voix. On s'en fout !

M. Rémy Pagani. ...M. Desplanches qui demandait, je cite : «Dans un souci d'équité, il nous semble indispensable de ne pas discréditer la commission par la présence de députés ayant manifesté au côté de l'AMP.» C'est là que réside le problème : la minorité qui s'est retrouvée, contrairement à l'habitude ces cinquante dernières années, en état de minorité n'a pas accepté que le problème de la violence dans notre cité soit traité autrement que par la violence et la répression.

Nous estimions que les questions concernant la montée de la violence, et le terreau dans lequel cette violence prend naissance, devaient être posées tout d'abord. Nous avons donc travaillé assidûment à cet objectif et nous n'avons effectivement pas répondu à l'ensemble des questions que nous nous posions. Toujours est-il que nous avons posé des jalons pour qu'un travail de prévention réel soit enfin entrepris dans notre République, ce qui est tout de même mieux que d'attendre que la situation dégénère et que certaines catégories de la population se paupérisent, afin d'exercer la répression et montrer comment «M. Gendarme» est nécessaire... Nous pensons qu'il y a d'autres moyens et qu'il est possible de prévenir la violence, notamment en tenant compte de l'ensemble des revendications sociales des catégories que le néolibéralisme a exclues de notre système. C'est cela que vous n'avez pas supporté, et j'en ai fait les frais - cela m'est égal, du reste. Monsieur Lescaze, le véritable problème réside en cela.

Je tiens à dire par ailleurs que le Conseil d'Etat, dans sa majorité - j'espère que M. Ramseyer y a également participé - a décidé de créer des assises, ce qui va dans la bonne direction : mener une véritable réflexion collective, qui fait défaut dans notre République, pour prévenir la violence. Le Conseil d'Etat a donc abondé dans le sens de la résolution qui vous est soumise. Ces assises permettront, je l'espère, de déterminer les causes de la violence et de trouver les remèdes à ce phénomène de société, qui est répandu dans toute l'Europe. Strasbourg, chaque année, est le théâtre de violences. Il faut donc faire en sorte que le moyen d'expression légitime de certaines catégories de la population, qui sont exclues, ne soit plus la violence.

Nous estimons ainsi avoir répondu à notre mandat.

M. Olivier Vaucher (L). Je ne pensais pas intervenir, mais suite aux propos que certains préopinants se sont permis de tenir, je voudrais apporter quelques précisions complémentaires.

Tout d'abord, le rapport de majorité évoque le témoignage, en page 11, de M. Linker. Je suis choqué, pour ne pas dire outré, de la manière dont Mme la rapporteuse de majorité a rapporté les propos de M. Linker. J'ai assisté à cette séance en tant que remplaçant, je n'ai donc pas assisté aux séances précédentes et ensuite, comme vous le savez, nous avons renoncé à participer aux travaux de cette commission pour les raisons déjà évoquées. J'étais présent, je le répète, et j'ai été touché par les propos de M. Linker, propos que Mme la rapporteuse de majorité s'est bien gardée de retranscrire avec objectivité. Elle transforme les faits avec force détails truculents; pourtant j'ai une bonne mémoire et je n'ai absolument pas entendu la même version de la bouche de M. Linker. Par contre, M. Linker dit - ce qui est mentionné - que lorsqu'il a volontairement et sciemment franchi le barrage de police il savait à quoi il s'attendait, c'est-à-dire à recevoir des coups, mais qu'il en avait l'habitude, comme certains des manifestants - comme M. Pagani... - qui sont des manifestants professionnels.

Alors, je n'apprécie pas du tout la version mensongère de ce rapport. Certains des préopinants ont parlé de : «rapport objectif reflétant toute la réalité de ce qui a été dit en commission»... Je m'inscris en faux !

En outre, il est surprenant de constater que certains des manifestants aient pu être auditionnés deux fois et que d'autres, victimes de ces manifestants, n'ont même pas pu être entendus.

La lettre qui a été lue tout à l'heure m'a particulièrement stupéfait. Elle montre encore les manquements graves de cette commission.

En conséquence, je vous demande de ne pas vous rallier à ce rapport de majorité qui, je vous le rappelle, est loin d'être une majorité. D'ailleurs, Monsieur le député Pagani, vous avez évoqué le fait que vous n'étiez pas le seul député à avoir participé à la manifestation. Je serais intéressé de connaître le nom des autres. Si cela se trouve, ils ont oublié - comme vous - l'article 24 en participant aux travaux d'une commission, alors qu'ils n'en avaient pas le droit.

Pour l'instant, il faut donc plutôt nous rallier au rapport d'expert, puis, par la suite, aux conclusions des assises.

Enfin, comme M. le rapporteur de minorité le dit en page 51, à ma connaissance, il n'a été clairement répondu à aucune question posée.

Mme Marianne Grobet-Wellner (S). J'aimerais que ma collègue, Elisabeth Reusse-Decrey, qui a demandé la parole avant moi, s'exprime d'abord pour donner la position du parti socialiste. J'interviendrai ensuite.

Le président. La parole est à M. Ferrazino !

M. Christian Ferrazino (AdG). Je ne répondrai pas aux différentes provocations des bancs d'en face... Vous nous montrez aujourd'hui, une fois de plus, qu'au lieu de débattre du fond des problèmes, vous préférez rester au niveau des injures et des provocations. Monsieur Blanc, nous n'avons pas de leçons de morale et d'éthique à recevoir de votre part, surtout par les temps qui courent... (Exclamations.)

Cela étant précisé, je ne suis pas étonné du contenu de votre rapport, Monsieur Lescaze, étant donné que vous ne vouliez pas de cette commission. Il est donc assez normal - cohérent avec vous-même - que vous ayez tout fait pour tenter de paralyser son travail. Eh bien, voyez-vous, Monsieur Lescaze, vos efforts ont été totalement inutiles, parce que, en l'occurrence, si cette commission n'était pas très nombreuse elle était de qualité, et vous pouvez vous rendre compte que la qualité des ses travaux est inversement proportionnelle au nombre de ses participants. On ne peut donc que s'en féliciter. Mais je ne prendrai pas votre habitude de rester sur des invectives, pour ne pas aborder le fond du problème.

Je trouve tout à fait regrettable que votre unique obsession... (Un téléphone portable sonne.) (Rires.) Certains ont de la peine à se réveiller... Je me demande qui c'est... Je trouve dommage que votre unique obsession soit de vous en prendre au travail de cette commission, d'une part, et aux conclusions auxquelles elle est parvenue, d'autre part. Monsieur Lescaze, vous avez dit, je vous cite, que vous souhaitiez que les conclusions du rapport de majorité ne soient pas acceptées. Je me contenterai de vous dire ceci : ces conclusions sont exactement les mêmes que celles auxquelles les experts mandatés par le Conseil d'Etat sont parvenus. C'est dommage que vous n'ayez pas pris la peine de lire le livre de M. Windisch qui est un des professeurs...

M. Bernard Lescaze, rapporteur de minorité. Je ne l'ai pas !

M. Christian Ferrazino. Il est possible de l'acquérir en librairie, Monsieur Lescaze ! Au lieu de vous focaliser sur les conclusions, que vous contestiez avant de les avoir lues, du rapport de majorité de la commission, vous auriez pu voir, en lisant le livre de M. Windisch, qu'il fait exactement le même constat... Mme Caroline Dallèves, en page 48, nous dit que les responsabilités sont largement partagées et qu'il faut mettre l'accent en priorité sur le travail de prévention, ce qui implique, soit dit en passant, que M. Ramseyer change effectivement d'attitude lorsqu'il fait des déclarations à la presse sur ce genre d'objets. M. Windisch va encore plus loin... (L'orateur est interpellé par M. Vaucher.) Oui, je sais, Monsieur Vaucher, que les insultes font partie de votre démarche habituelle, mais vous me permettrez de ne pas entrer dans votre jeu. Nous voulons simplement aborder le fond du problème. (Le président agite la cloche.) Vous nous faites perdre du temps, comme d'habitude, de manière peu utile, Monsieur Vaucher !

La conclusion à laquelle parvient l'expert mandaté par le Conseil d'Etat est, précisément, de créer un observatoire de la prévention et de la sécurité. Cela lui a semblé nécessaire, après avoir passé en revue, comme l'a fait la commission, mais encore plus en détail, puisqu'il a visionné l'ensemble des films, des vidéos, de la presse, etc. C'est exactement la même conclusion.

Alors, Mesdames et Messieurs des bancs d'en face, avant de vous en prendre au travail de cette commission avec l'acharnement et l'aveuglement qui vous caractérisent, prenez connaissance du rapport de l'expert mandaté par le Conseil d'Etat, et vous verrez que les conclusions auxquelles il parvient sont exactement les mêmes.

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Vous aurez constaté que le rapport de minorité parle au nom des groupes libéral, démocrate-chrétien et radical et non pas au nom du parti socialiste. En page 2 du rapport de majorité, vous aurez également pu constater que les représentants des partis libéral, radical, démocrate-chrétien et socialiste ont déclaré qu'ils exigeaient le départ de l'un des commissaires désignés par l'Alliance de gauche, sans quoi ils refusaient de continuer à siéger.

Il incombe d'apporter quelques précisions et de contredire ces propos.

Permettez en préambule un petit rappel des faits. Au lendemain de la conférence de l'OMC, qui, comme on l'a dit, a été marquée par des événements violents et pas vus à Genève depuis longtemps, divers députés de l'Alternative ont décidé de déposer devant ce Grand Conseil une demande de création d'une commission parlementaire chargée d'étudier et de comprendre le déroulement des événements. Dans un climat qui était déjà extrêmement crispé où fusaient les insultes, c'est à une courte majorité que cette proposition de résolution a été acceptée par le parlement et renvoyée à ladite commission.

Dès le début, le parti socialiste a exprimé très clairement qu'il n'entendait pas faire de cette commission une commission-juge, cherchant des têtes et des coupables, mais qu'il souhaitait mener une analyse objective et impartiale sur les événements qui avaient secoué Genève, d'en tirer des leçons et, surtout - surtout - d'essayer d'élaborer des propositions pour l'avenir. Les enjeux en étaient et en sont toujours aujourd'hui très importants : le malaise d'une certaine jeunesse, le fonctionnement de la police et de sa hiérarchie, l'influence de la presse, l'avenir de la Genève internationale et je passe d'autres sujets tout aussi importants. Tous ces sujets, Mesdames et Messieurs les députés, représentent les vrais enjeux de notre société. Travail d'analyse, de recherche, de réflexion, de compréhension, mené avec une approche quelque peu différente de celle des autres commissions parlementaires habituelles.

Le sujet étant extrêmement sensible, il fallait tout faire, à notre avis, pour que cette commission puisse débattre dans des conditions sereines. C'est donc dans ce souci et pour travailler de manière objective, avec l'intention de parvenir à des résultats concrets, que le parti socialiste, en plein accord avec les députés concernés et même à leur initiative, a renoncé à faire siéger dans cette commission les personnes qui avaient été particulièrement impliquées. La question ne s'est pas posée en terme de droit, chaque député ayant sans doute le droit de siéger dans cette commission. Mais il s'agissait du choix du parti socialiste, de manière à donner à cette commission des possibilités de travail maxima. Choix - j'aimerais le préciser, ici - qui n'impliquait nullement que le groupe socialiste allait renier les valeurs qu'il avait à défendre dans cette commission, telles que, par exemple, le droit de manifester librement, l'écoute des jeunes, la non-violence, la lutte contre la globalisation, etc.

C'est donc dans cet esprit que le groupe socialiste a entrepris ces travaux avec une volonté d'aboutir et beaucoup d'intérêt lors des premières auditions auxquelles nous avons pu assister. Malheureusement, cette commission a progressivement éclaté et, dès lors, les socialistes ont choisi de ne plus s'associer aux travaux de ce qu'ils considéraient ne plus être une commission parlementaire. Des débats menés à deux ou trois groupes ne peuvent en effet plus être crédibles et les résultats n'ont que peu de valeur, car ils ne sont pas le reflet d'un réel débat parlementaire. C'est pourquoi aujourd'hui nous regrettons que le débat dérape de nouveau avec des insultes et des attaques.

Je me permets tout de même d'apporter une petite précision, parce que je ne peux pas accepter vos propos, Monsieur Vaucher. Vous accusez la rapporteuse de n'avoir pas retranscrit objectivement l'audition de M. Linker, en particulier. Alors, parlons-en ! La rapporteuse a peut-être aussi «oublié» la manière dont vous préjugiez des personnes auditionnées. Puisque vous avez parlé de M. Linker, nous pourrions également parler des petits billets qui circulaient entre les membres du groupe libéral, lors de l'audition de ce dernier, l'accusant d'être un drogué... Il me semblait que cela devait être clairement dénoncé ! (L'oratrice est interpellée.) (Le président agite la cloche.) Les auteurs de ce genre de billets feraient mieux de ne pas les oublier sur leur place, à la fin des séances de commission... (Rires.)

Le groupe socialiste souhaite maintenant aller de l'avant. Il ne sera pas question de voter le rapport de majorité ou le rapport de minorité. Ces rapports ne sont pas soumis à un vote. Le Grand Conseil doit simplement en prendre acte. Nous refuserons la proposition de M. Lescaze de renvoyer ce rapport en commission. Nous souhaitons maintenant aller de l'avant; comme cela a été dit par plusieurs députés, le Conseil d'Etat a pris la décision d'organiser des assises, et cela nous satisfait pleinement. Nous avions d'ailleurs signé la résolution qui le demandait. Nous espérons qu'elles aboutiront à des propositions concrètes, qui permettront à l'avenir d'éviter ce genre de conflits.

Mme Marianne Grobet-Wellner (S). Le groupe socialiste prend donc acte du rapport de la majorité de la commission tout en regrettant le refus de la rapporteuse de la majorité de joindre en annexe de son rapport la position des commissaires socialistes. Soit dit entre parenthèses, cela illustre quelque peu les difficultés rencontrées lors de nos travaux.

Quant au rapport de la minorité, nous tenons à rectifier une inexactitude s'agissant de la non-participation de l'un de nos députés aux travaux de la commission. Contrairement à ce qui est indiqué à la page 51, au troisième paragraphe, nous n'avons nullement eu besoin de prier un des nôtres qui avait participé à la manifestation contre l'OMC de ne pas siéger dans la commission parlementaire tant il était évident qu'il était souhaitable, voire indispensable, pour le bon fonctionnement de la commission, que les personnes directement impliquées devaient renoncer à y siéger. En effet, la valeur des travaux et des conclusions de cette commission dépendait d'une large participation, cela d'autant plus qu'aucun d'entre nous, à ma connaissance, ne pourrait prétendre être expert en la matière.

Bien que ce travail de réflexion reste à faire, en y associant tous les milieux concernés, nous nous opposons au renvoi de ce rapport en commission étant donné que rien ne nous indique que nous ne rencontrerions pas les mêmes difficultés. Nous saluons par contre l'initiative du Conseil d'Etat de mettre sur pied cet automne un forum, traitant des phénomènes de violence au sein de la société, allant dans le sens de la résolution 398.

Mme Dolorès Loly Bolay (AdG). J'aimerais vous dire, Monsieur Vaucher, que cette manifestation comptait cinq à six mille personnes dont quelques députés - et pas seulement M. Pagani !

C'était une manifestation non violente. Je rappelle les principes mêmes de base de l'AMP : la résistance non violente, en précisant que c'est surtout la désobéissance civile non violente qui avait été prônée. Malheureusement, un groupe de casseurs s'est invité à cette manifestation, avec les conséquences que l'on connaît...

Je reviens à la question de la résolution, évoquée par M. Lescaze : quelles sont les causes qui peuvent être mises en relation avec les pillages et plus généralement avec la violence exprimée par certains jeunes ? De toute évidence, le rapporteur de minorité s'attendait à une réponse simpliste sur les causes de la violence des jeunes. Une telle attente est contraire à toute approche sociologique sérieuse. Les analyses et les débats que suscite la violence des jeunes dans notre société prouvent la complexité de la question.

Pour ce qui est de la deuxième question concernant la police, il y a eu trois cents interpellations; cent sept personnes déférées devant le juge d'instruction; septante-cinq plaintes de manifestants. Tout cela justifie que l'on consacre plus de temps à essayer de comprendre - ce que nous avons essayé de faire.

C'est la raison pour laquelle je vous invite à voter le rapport de majorité.

Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve), rapporteuse de majorité. Je suis vraiment navrée de voir la tournure que la droite a voulu donner à ce débat. Mon intervention - c'est vrai - a dû beaucoup vous décevoir, puisque je l'ai voulue non violente. Vous avez sans doute dû penser qu'elle n'était pas assez stimulante pour assouvir votre besoin d'en découdre. Ne comptez pas sur moi pour vous suivre dans ces petites querelles personnelles...

Ayant été mise en cause, je vais tout de même répondre aux critiques qui ont été faites à propos de mon rapport. Certains ont dit que je suis quelque peu perverse et que j'invente des détails truculents; d'autres disent que j'ai transformé les propos des personnes auditionnées... Alors, je vous demande de consulter les procès-verbaux et, ensuite, de me montrer ce qui ne correspond pas. Je trouve un peu trop facile de lancer des accusations de cet ordre sans preuve, et je ne les accepte pas. Je n'ai pas inventé les détails anatomiques donnés par M. Linker en commission. Ce n'est pas pour le plaisir que je les ai rapportés. J'ai simplement voulu montrer à quel point la violence était grande, et je n'ai pas du tout truqué son témoignage.

Pour ce qui est de la police, je vous signale tout de même que nous n'avons pas du tout oublié le surmenage de la police et les circonstances atténuantes qui ont pu la pousser à réagir d'une certaine manière. Je crois d'ailleurs que vous êtes bien les seuls à vous indigner de la façon dont nous en avons parlé, puisque la police elle-même semble plutôt satisfaite de notre rapport.

En effet, dans sa lettre adressée en février à Mme Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat, l'Union du personnel du corps de police dit : «De même, lors des conférences de l'OMC, notre hiérarchie ne semble toujours pas préoccupée par la vie privée de ses subalternes et ne se soucie guère du risque de dérapage que peut provoquer leur fatigue aux endroits stratégiques qu'ils ont pour mission de protéger. C'est d'ailleurs un point qui a bien été relevé dans le rapport de la commission ad hoc chargée de relever

les causes de tous les débordements qui ont lieu en marge desdites conférences». Alors, si vous savez mieux que la police elle-même ce qui manque à notre rapport sur la police, eh bien vous êtes vraiment très forts !

Je constate simplement - je ne vous accuse pas de mauvaise volonté - que vous n'êtes pas suffisamment intéressés par ce sujet pour lire le rapport comme il faut ni pour lire les procès-verbaux. De même que vous n'avez pas été intéressés à assister aux séances de commission, vous n'êtes pas intéressés cet après-midi... à voir les bancs d'en face qui sont vides ! Je le regrette sincèrement, parce que, finalement, le fond du problème c'est d'essayer d'éviter ces violences à l'avenir - j'en reviens à ce que je disais au début - et j'aurais aimé trouver en face de moi des partenaires pour discuter de ce point et non pas des partenaires qui s'amusent, comme d'habitude, à polémiquer. En effet, pour certains d'entre vous, hélas, la politique n'est qu'un jeu qui vous permet de faire perdre le temps de tous les députés ! (Commentaires et applaudissements.)

M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de minorité. Mme Dallèves a en tout cas un auditeur attentif en ma personne, et, je l'espère, quelqu'un qui va lui répondre.

Je souhaite tout d'abord rectifier une ou deux imprécisions de M. le député Pagani. Il n'est pas juste de dire, en s'appuyant sur une lettre de M. Desplanches, écrite au début des travaux de la commission, que les députés de l'Entente voulaient exclure beaucoup de personnes. Ils ne voulaient, en fait, exclure personne. Ils souhaitaient simplement, comme l'a rappelé Mme Reusse-Decrey, que les travaux se déroulent sereinement.

Contrairement à ce que le débat pourrait laisser croire, ce n'est qu'à fin septembre que les choses ont pris une tournure désagréable. Je rappelle que c'est la députée socialiste qui nous a quittés, et non la présidente de la commission, après avoir «explosé» suite à l'audition du journaliste, M. André Klopmann. Ce n'est qu'à ce moment-là, après avoir assisté à plusieurs séances de la commission, que j'ai découvert l'existence du conflit entre M. Pagani et M. Klopmann. J'ai alors rejoint le camp de ceux qui pensaient que la présence d'un certain député n'était peut-être pas ce qui était le mieux pour atteindre le but que la commission s'était fixé. Nous en avons discuté avec le chef de groupe de l'Alliance de gauche et nous avons proposé toutes sortes de solutions qui auraient permis à l'Alliance de gauche et à son représentant de

sauver la face. Elle n'a pas accepté ces solutions, c'est son problème. Je ne veux pas aller plus avant sur ce point, mais je suis prêt à donner d'autres précisions s'il le fallait.

S'agissant de la phrase relevée par Mme Grobet-Wellner à la page 51, je lui en donne volontiers acte, d'autant plus volontiers que, si je comprends bien, M. le député Hausser s'est récusé de lui-même dans cette commission. Il faut croire que l'éthique n'est pas la même selon qu'on est socialiste ou membre de l'Alliance de gauche !

J'aimerais maintenant aborder le fond du problème, soulevé par M. Ferrazino et Mme Bolay. Mme Bolay me prend pour plus bête que je ne suis... Je le regrette... Cela ne fait jamais plaisir ! Il est évident que je n'attendais pas une réponse simple au problème complexe de la violence des jeunes. Je souhaitais bien entendu des réponses nuancées - elles ont été apportées en partie. Je regrette de ne pas avoir eu connaissance du rapport de M. Ueli Windisch, pas plus que la rapporteuse de majorité. Je le regrette d'autant plus que je connais bien M. Windisch.

Toutefois, il n'est pas nécessaire d'avoir un observatoire pour observer que la prévention n'est pas toujours suffisante. Parfois, il faut agir avec fermeté. Si un jour, en raison de troubles continuels, Genève voyait les organisations internationales la quitter, vous le savez bien, Mesdames et Messieurs les députés, ce serait sur le plan économique, sur le plan culturel et même sur le plan de l'esprit de cette cité, une très lourde perte, sans parler du manque à gagner financier. Je n'ai pas lu le rapport de M. Windisch, mais hier, au Palais Eynard, je me trouvais avec la présidente du Conseil d'Etat pour célébrer les 80 ans du choix de Genève comme ville-siège de la Société des Nations, le 28 avril 1919 : c'est une tradition que nous devons respecter. Si Genève a été choisie comme siège de la Société des Nations, c'était aussi - pas seulement - parce qu'elle offrait un havre de paix propice aux négociations internationales : il faut le rappeler, ici.

Madame la rapporteuse de majorité qui citez volontiers le Bulletin de la police - je l'avais reçu, mais je n'y avais jeté qu'un regard négligent - vous avez vous-même, dans votre rapport de majorité - que j'ai lu - cité M. Prevosto, qui, au nom du personnel de la police relève combien les policiers ont effectué une tâche difficile et qui ajoutait, je cite : «Dans ces conditions, il est intolérable d'émettre un quelconque jugement à l'encontre de ces hommes. Leur comportement a été exemplaire par rapport aux

conséquences qui auraient pu en découler. Il faut relever le courage de certains gendarmes qui, blessés, ont décidé de continuer, par solidarité envers leurs collègues.»

Madame la rapporteuse, vous avez retranscrit, sans l'approuver forcément, cette citation qui figure, sans guillemets d'ailleurs, en page 14. Il est bien dommage que vous ne l'ayez pas reprise dans la conclusion de votre rapport.

Monsieur le président, pour terminer, ce n'était que subsidiairement que je demandais le renvoi en commission, c'est-à-dire au cas où le rapport serait refusé. En raison de la décision du Conseil d'Etat d'organiser ces assises de la violence, le rapport sera probablement renvoyé - je ne crois pas que l'on puisse éviter le vote, contrairement à ce que disait Mme la députée Reusse-Decrey - au Conseil d'Etat. Ma proposition subsidiaire n'a donc plus grand sens, aussi, pour simplifier la procédure, je la retire bien volontiers.

M. René Koechlin (L). Je constate qu'il est difficile de parler de la violence sans passion. En prenant la violence pour alibi, je m'aperçois qu'il est aussi difficile sinon davantage de parler de sujets très controversés comme l'OMC sans passion aussi.

Or, qu'on ne s'y trompe pas : il s'agit bien de l'OMC et de toute la controverse à propos de l'OMC, en marge du débat qui a lieu en ce moment. Car il y a ceux qui soutiennent les personnes qui ont manifesté contre cette organisation - soutien politique, idéologique - et ceux qui, au contraire, soutiennent l'organisation. Mais tout ce débat, en réalité, serait très différent s'il n'était pas sous-tendu par le combat - de caractère uniquement politique et idéologique - qui porte sur cette organisation qu'est l'OMC. Qu'on ne s'y trompe pas : ne confectionnons pas un semblant de débat, avec des semblants d'arguments !

Puisque nous voulons parler de la violence, j'y reviens. J'ai lu, pour ma part, avec intérêt le rapport de Mme Dallèves-Romaneschi... Oui, Madame, je l'ai lu avec intérêt ! Je dirais même que je l'ai trouvé plutôt bon... (Exclamations.) ...et relativement objectif. Même si je n'en partage pas les moindres détails et pas forcément non plus les conclusions, votre rapport montre en tout cas un souci d'objectivité, ce que je salue en passant. Vous avez fait un effort de concision, et il faut le reconnaître. Je ne trouve donc pas votre rapport aussi mauvais que certains préopinants voudraient le laisser croire.

J'ajoute que notre groupe ne s'oppose pas aux manifestations. J'en veux pour preuve - je vous invite à le lire - l'article qui est paru ce matin dans l'organe de notre parti sous la plume de Carlo Poncet, qui brise une lance en faveur des manifestations justement. Il estime que le droit à la manifestation est un des symptomes de la démocratie et de la liberté d'expression, auquel, je peux vous l'affirmer, notre parti adhère sans réserve. Donc, qu'on ne s'y trompe pas ! Pour nous, les manifestations doivent être soutenues, évidemment dans la mesure du possible sans débordements, sans dérapages, sans violence.

Mais en marge de ce débat - c'est ce qui me paraît finalement le plus relevant, car on reviendra sur le sujet de la violence - il se pose un problème de forme, soulevé dans le rapport de minorité. Comment y répondre ? De deux choses l'une, ou bien nous admettons qu'un député impliqué ostensiblement dans un cas traité par ce Grand Conseil peut indifféremment et impunément prendre part aux travaux et au vote de la commission chargée du dossier et aux décisions du parlement - ce qui est le cas ici - ou bien nous estimons que déontologiquement ce n'est pas possible. Cette question me semble beaucoup plus grave et importante qu'il n'y paraît.

Monsieur Pagani, je ne vous en veux pas d'avoir participé aux travaux de la commission et d'avoir pris la parole tout à l'heure, mais lorsque nous traiterons d'un autre objet, si un membre de notre groupe, visiblement impliqué dans le sujet examiné, prenait la parole et prenait part au vote, vous seriez le premier à manifester votre désaccord et à lui adresser des reproches.

C'est pourquoi je le répète, ou bien nous admettons que cela n'a pas d'importance dans tous les cas qui se présentent ou bien nous jugeons que cela est inadmissible, et, alors, il ne doit être fait aucune exception. Mais nous devons être clairs et cohérents avec nous-mêmes !

Quant aux assises - je reviens à la violence - je ne sais pas s'il en sortira quelque chose car, comme je l'ai dit tout à l'heure, il est difficile de parler de ce sujet sans passion. Certains d'entre vous le savent probablement, j'ai vécu la violence dans ma chair lorsque j'étais enfant. S'il est un sujet qui me tient particulièrement à coeur, c'est vraiment celui-là. C'est pourquoi, si l'on décidait d'organiser des assises à ce propos, je voudrais d'abord que l'on fasse en sorte que les débats qui s'y dérouleraient aient lieu dans la sérénité, si possible dans l'objectivité et au-dessus de toute passion. Je formule donc le voeu que les personnes qui participeraient à ce débat soient non seulement fondamentalement et profondément non violentes, mais qu'elles aient encore et si possible connu ou subi la violence. Car elles parleraient en toute connaissance de cause. A cette condition, il pourrait ressortir quelque chose de positif d'un débat de ce genre.

M. Christian Ferrazino (AdG). Monsieur Koechlin, vous vous étonnez que certains membres de cette commission puissent y siéger activement alors qu'ils ont participé à cette manifestation. Mais voyez-vous, si les députés qui connaissent les sujets devaient se retirer des commissions, vous devriez vous retirer de la commission de l'aménagement sous prétexte que les architectes n'ont rien à y faire; les avocats devraient se retirer de la commission judiciaire... (L'orateur est interpellé.) Rassurez-vous je n'y suis plus ! (Le président agite la cloche.) Nous pouvons comprendre votre point de vue et nous admettons que vous puissiez juger que moins un député connaît le sujet plus il est judicieux qu'il siège dans une commission... Mais vous nous permettrez de faire le raisonnement contraire ! Pour notre part, nous pensons que mieux un député connaît le sujet, mieux il est placé pour en parler.

Et ne laissez pas croire un certain nombre de choses fausses. M. Pagani - puisqu'il s'agit de lui - n'est pas du tout un organisateur de cette manifestation, contrairement à d'autres. Il s'est contenté d'y participer, et il n'est pas le seul. Nous avons donc considéré - et nous sommes toujours persuadés que nous avions raison - qu'une personne qui a participé à ces événements et qui les a vus était toute désignée pour en parler. Il est possible de ne pas partager notre avis, mais vous nous permettrez d'avoir cet avis-là.

Monsieur Vaucher, vous évoquez l'article 24 du règlement un peu rapidement. Si vous le lisiez, vous vous apercevriez que cet article parle simplement «d'intérêts personnels». En conclusion, vous seriez bien inspiré d'en parler plus souvent à votre collègue M. Béné qui ferait mieux... de se taire, lorsque nous traitons des sociétés de portage ! (L'orateur est interpellé.) Oui, j'allais dire autre chose ! (Exclamations et rires.) En effet, dans son cas, l'article 24 s'applique tout à fait, ce qui n'est pas le cas dans le cadre de ces manifestations. M. Pagani pouvait donc siéger sans scrupule au sein de la commission.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, cinq orateurs sont encore inscrits. Le Bureau vous propose de clore la liste des orateurs et de passer au vote, ensuite.

M. Dominique Hausser (S). Je ne m'exprimerai pas sur le fond. Je me contenterai de vous livrer simplement quelques éléments de forme.

Que des députés s'expriment publiquement, qu'ils tiennent des stands, des forums publics ou qu'ils manifestent est évidemment parfaitement légitime. Que les députés reflètent leur position et celle de ceux qu'ils défendent en plénière et en commission est également parfaitement légitime. La raison pour laquelle j'ai renoncé à siéger à la commission parlementaire en question, c'est que, contrairement aux autres députés qui se sont contentés de participer aux différentes manifestations, j'ai participé à l'organisation de ces manifestations. Il était donc difficile de siéger dans une commission où je me trouvais être juge et partie. C'est la seule raison pour laquelle j'ai renoncé à participer aux travaux de la commission et pour laquelle je ne m'exprime pas sur le contenu de ce rapport, même si je n'ai aucun intérêt personnel dans cette affaire et que l'article 24 ne m'oblige pas à m'abstenir.

M. René Koechlin (L). Monsieur Ferrazino, vous dites, à l'appui de considérations générales, que les députés architectes ou ingénieurs ne devraient pas siéger à la commission de l'aménagement. Il est évident que si un député est concerné par un sujet précis et particulier, il ne doit pas prendre part aux travaux. Par contre, s'il n'est pas directement concerné, il peut y participer et y apporter toutes ses compétences. Je suis surpris, Monsieur Ferrazino, que vous utilisiez des arguments aussi grossiers dans un plaidoyer qui débouche, finalement, sur pas grand-chose.

C'est pour exprimer cette nuance que je me suis permis de prendre encore la parole.

M. Michel Balestra (L). J'interviens sur le même sujet. Il ne s'agit pas de savoir si un député connaît ou non un sujet, mais de savoir s'il a le droit d'être juge et partie. Connaître le sujet pour avoir participé à la manifestation donne la légitimité pour être auditionné par la commission, mais en aucun cas pour instruire. Personne n'aurait contesté à un commissaire le droit, ou le devoir, d'avoir participé un jour à une manifestation. Par contre, le fait d'avoir participé à cette manifestation le rend juge et partie et, comme l'a rappelé mon collègue Koechlin, il est hors du cadre autorisé par le règlement.

M. Olivier Vaucher (L). Je vous remercie, Monsieur Hausser, de votre intervention et de la clairvoyance de vos propos. Nous estimons, Monsieur Pagani, que vous auriez pu tenir le même raisonnement et vous abstenir.

Je relève une seule chose. La commission avait tout à fait toléré votre présence, même si nous ne la trouvions pas spécialement bienvenue, mais votre présence lors de l'audition de M. Klopmann contre lequel vous aviez déposé plainte a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Il aurait semblé normal que vous vous absteniez, au moins pour cette séance.

Monsieur Ferrazino, je vous rappelle, s'agissant de l'article 24, que vous êtes l'avocat du WWF, que vous déposez des recours contre des décisions prises par la commission de l'aménagement, à laquelle, pourtant, vous participez ! Alors, vous feriez mieux de retirer vos propos !

Mme Martine Brunschwig Graf. Compte tenu de la tournure des débats, je ne trouve pas grand-chose à ajouter. C'est la raison pour laquelle, au nom du Conseil d'Etat, je vous dis ce qui suit.

Le Conseil d'Etat souhaite aborder cette réflexion, mais avec une vision beaucoup plus large que les seuls événements que vous avez évoqués en long, en large et en travers, dans le cadre du forum qu'il désire organiser cet automne, et espère vous y retrouver.

R 370-A

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.

R 398

Mise aux voix, cette résolution est adoptée. Elle est renvoyée au Conseil d'Etat.

Elle est ainsi conçue :

Résolution

(398)adressée au Conseil d'Etat pour qu'il mette sur pied dans les 3 mois des Assises au sujet de la violence

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant:

le rapport de la Commission d'enquête parlementaire ad hoc sur les événements qui ont secoué Genève durant la commémoration du 50e anniversaire de l'Organisation mondiale du commerce ;

les conclusions des experts mandatés par le Conseil d'Etat sur ce même objet qui devraient être rendues publiques dans un proche avenir ;

les conclusions de l'équipe de chercheurs de l'Université de Genève pilotée par MM. Wisler et Rossiaud sur ce même objet ;

l'ensemble des réflexions, qu'elles soient publiques ou internes, à l'administration sur le thème de la montée de la violence dans notre société ;

les préoccupations légitimes de nombreux membres de notre communauté face à la violence de notre jeunesse et de notre société en général ;

invite le Conseil d'Etat

à prendre les mesures nécessaires pour que chacune des parties concernées par les événements qui ont secoué Genève durant la commémoration du 50e anniversaire de l'Organisation mondiale du commerce soit informée des conclusions et recommandations issues des travaux de la Commission d'enquête parlementaire ;