République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 26 février 1999 à 17h
54e législature - 2e année - 4e session - 8e séance
M 1258
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
la volonté du Conseil d'Etat de soutenir la création d'entreprises et les démarches favorisant la réinsertion professionnelle ;
que le Conseil d'Etat a sollicité la collaboration des communes, au moyen des mesures actives du marché du travail, en vue de leur participation à la lutte contre le chômage (lettre de l'Association des communes genevoises (ACG) du 15.12.97, propositions de l'Office cantonal de l'emploi (OCE) du 2.12.97) ;
que Vernier, commune la plus touchée par la chômage sur Genève, a confié un mandat à l'association Vernier intégration emploi (VIE) afin de réaliser une politique de réinsertion socioprofessionnelle sur son territoire ;
que ce type de programmes ne représente aucune charge pour le budget cantonal, à partir du moment où ils ont obtenu l'agrément de l'Office fédéral du développement économique (OFDE) ;
que les directives et exigences ne sont pas claires quant à la constitution d'un dossier de soumission de projet à la Commission de réinsertion professionnelle (CRP) ;
que l'engagement pris par la LMMT (Logistique des mesures actives du marché du travail) de mettre au point des critères d'évaluation en partenariat avec les organisateurs de Mesures actives du marché du travail (MMT) n'a pas été tenu ;
que les discussions entre la LMMT et les organisateurs de MMT (Mesures actives du marché du travail) sont au point mort ;
que l'organisation de l'OCE (unique en Suisse) est la source de nombreux dysfonctionnements, car les conseillers en personnel n'ont pas la maîtrise complète des mesures favorisant l'insertion et la réinsertion professionnelle des chômeurs ;
invite le Conseil d'Etat
à permettre le démarrage des programmes d'emplois collectifs ayant pour objectif la lutte contre le chômage (du type projet VIE - Vernier intégration emploi), et à favoriser le développement de mesures actives du marché du travail du même type ;
à faire respecter les engagements de collaboration entre l'OCE et les communes, présentés à l'Association des communes genevoises, ainsi qu'entre l'OCE et les différents partenaires promoteurs de projets, par une charte de fonctionnement ;
à résoudre rapidement les dysfonctionnements au sein de l'OCE, en particulier de la LMMT pour ce qui est de sa mission de contrôle des mesures actives, et ce dans un esprit de partenariat avec les prestataires de services ;
à établir les critères d'évaluation des programmes en cours et des projets déposés ;
à demander un rapport à l'OCE, quantitatif et qualitatif, sur les programmes en cours, en collaboration avec la CEPP (Commission d'évaluation des politiques publiques) ou par une organisation externe à l'administration et qualifiée ;
à clarifier les rôles respectifs de l'OCE et de la LMMT, du Conseil de surveillance du marché de l'emploi, et de la Commission de réinsertion professionnelle.
EXPOSÉ DES MOTIFS
La situation que vit le canton de Genève au niveau des personnes sans emploi, et en particulier des jeunes sans formation et sans perspective d'avenir immédiat, est préoccupante. Dans ce contexte, des initiatives se sont développées ces dernières années dans le canton en lien avec l'Office fédéral du développement économique (OFDE), parmi lesquelles on peut citer les mesures actives du marché du travail (MTT). Malheureusement et malgré les efforts du département, nous devons constater aujourd'hui des dysfonctionnements quant à la mise en oeuvre de ces mesures au niveau de l'Office cantonal de l'emploi (OCE), et en particulier de la logistique des mesures actives du marché du travail (LMMT).
Pour illustrer ces dysfonctionnements, on peut relater l'expérience de l'association VIE (Vernier intégration emploi), qui a été mandatée par la commune de Vernier afin de concrétiser un pacte communal pour l'emploi. En effet, le 22 avril 1997, le Conseil municipal de Vernier décidait de demander au Conseil économique et social (CES) la réalisation d'une étude sur le développement de l'emploi dans la commune. L'étude réalisée fut approuvée par les autorités de Vernier le 16 septembre 1997. Le 26 novembre 1997 était constituée l'association VIE, titulaire d'un contrat de prestations lui imposant la mise sur pied du Pacte communal pour l'emploi avec :
création d'un service de placement pour les jeunes en difficultés ;
boutique services et réseau ressources ;
création de deux quotidiens de quartier dans les deux cités majeures de la commune (Les Avanchets et Le Lignon) ;
et deux projets complémentaires :
animation des permanences chômage ;
réalisation d'un programme d'emplois temporaires fédéral et individuel.
Novateur dans le canton, le projet de l'association VIE propose un programme d'emplois temporaires fédéral individuel basé sur un modèle existant (SOS-Travail) qui gère avec succès 150 postes de travail dans le canton de Vaud, et dont on trouve des équivalents dans la plupart des cantons suisses.
La pertinence et l'originalité de ce projet dans le cadre de la lutte contre l'exclusion socio-économique, ont d'ailleurs été reconnues sous forme de soutien par la Loterie suisse romande, l'OSEO (Œuvre suisse d'entraide ouvrière), la Banque Pictet & Cie ainsi que par l'UBS pour un montant global de 75 000 F. Fait encore plus important, le projet a été agréé par l'Office fédéral du développement économique (OFDE).
Et pourtant... Et pourtant, l'Office cantonal de l'emploi a refusé en juin 1998 d'agréer un projet qui ne coûtera rien à l'Etat de Genève, qui répond à la volonté politique de la commune de Vernier et qui a été agréé par la Confédération ! Quels sont donc les dysfonctionnements de l'Office cantonal de l'emploi qui ont amené à cette décision ? Est-ce que l'arbitraire serait la règle dans un office dont les critères de décision ne semblent pas très clairs ?
L'objectif de cette motion est précisément d'éviter que des situations du même type ne se reproduisent. C'est pourquoi nous demandons au Conseil d'Etat de résoudre rapidement les dysfonctionnements au sein de l'OCE, en particulier de la LMMT pour ce qui est de sa mission de contrôle des mesures actives ; d'établir des critères d'évaluation des programmes en cours et des projets déposés ; de demander un rapport à l'OCE, quantitatif et qualitatif, sur les programmes en cours, en collaboration avec la CEPP (Commission d'évaluation des politiques publiques) ou par une organisation externe à l'administration et qualifiée ; et enfin de clarifier les rôles respectifs de l'OCE et de la LMMT, du Conseil de surveillance du marché de l'emploi, et de la Commission de réinsertion professionnelle.
Enfin, de manière subsidiaire, nous demandons au Conseil d'Etat de permettre le démarrage du projet VIE dans la commune de Vernier, projet qui a obtenu l'agrément de tous les partenaires concernés à l'exception de l'Office cantonal de l'emploi. Plus généralement, nous souhaitons que les engagements de collaboration entre l'OCE et les communes, présentés à l'Association des communes genevoises, ainsi qu'entre l'OCE et les différents partenaires promoteurs de projets, soient respectés et garantis par la mise sur pied d'une charte de fonctionnement.
En espérant que vous aurez été sensibles à la problématique soulevée par cette motion, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à la renvoyer à la Commission de l'économie.
Débat
M. Alberto Velasco (S). En 1998, j'avais interpellé le président du département de l'économie au sujet d'un projet qui s'adressait aux jeunes en premier emploi et impliquait les communes de Meyrin et Vernier. Le financement de ce projet devait être assuré par l'Office fédéral du développement économique dans le cadre de la LACI, après avoir obtenu l'aval de l'OCE. Malgré votre intervention, Monsieur le président, ce projet a été - après des mois de travail - purement et simplement rejeté par l'Office cantonal de l'emploi et ce n'est malheureusement pas le seul.
D'autre part, il semble que les directives et exigences de la commission de réinsertion professionnelle pour la constitution du dossier ne soient pas très claires. Il semble aussi que les engagements pris par la logistique des mesures actives du marché du travail, visant à mettre au point des critères d'évaluation en partenariat avec les organisateurs de ces mesures, n'ont pas été tenus et que les discussions soient au point mort.
De plus, les conseillers en personnel de l'OCE n'ayant pas la maîtrise complète des mesures favorisant la réinsertion professionnelle des chômeurs, cette carence est à même de provoquer des dysfonctionnements.
Enfin, je tiens à vous faire remarquer que, selon les indicateurs du marché du travail du mois de décembre, le nombre de demandeurs d'emploi, par rapport au mois précédent, était en augmentation et qu'il s'élevait à 18 287, la classe d'âge se situant entre 15 et 29 ans représentant les 26,2%. Parallèlement, le volume des offres d'emploi annoncées à l'OCE en un mois a subi une baisse de 16,9%.
Partant de ce constat et dans l'esprit d'améliorer la qualité des prestations aux personnes sans emploi - qui, soit dit en passant, ne devraient pas être les otages d'une telle situation - nous vous invitons, Monsieur le président, à apporter un certain nombre de réponses aux invites de la présente motion, tout en tenant compte évidemment du mandat de prestations 2000 que l'Office fédéral du développement économique et de l'emploi est en train de préparer à l'intention des offices régionaux de placement et de la logistique des mesures du marché du travail.
Le groupe socialiste vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à renvoyer cette motion à la commission de l'économie.
Mme Magdalena Filipowski (AdG). Selon la motion 1258, l'Office cantonal de l'emploi entraverait la mise en place des projets de réinsertion des personnes au chômage. Le manque de clarté des directives, l'inexistence des critères d'évaluation des programmes et des projets et, enfin, l'OCE qui agit en cavalier seul, sans collaboration adéquate avec les commissions ou les partenaires promoteurs de projets, tels sont les dysfonctionnements dénoncés par la présente motion. Notre système économique produit le chômage et y condamne une partie de la population. Ce système pousse d'autres à un surtravail, tout en les menaçant, eux aussi, du chômage.
Pour que le spectre du chômage cesse de hanter nos populations, les projets de réinsertion doivent être basés sur des éléments solides, sur des informations claires. Il est extrêmement important que les emplois proposés pour les chômeurs le soient dans des conditions correctes, notamment en ce qui concerne les salaires.
Dans cette situation, l'AdG propose de faire étudier, au sein de la commission de l'économie, le texte de la motion proposée, afin de contribuer à l'amélioration du fonctionnement de l'Office cantonal de l'emploi.
M. Carlo Lamprecht. Le refus de l'OCE d'entrer en matière sur le financement d'un programme d'emplois temporaires proposé par l'association Vernier Intégration Emploi (VIE) est tout à fait justifié à mes yeux. J'aurais souhaité qu'il n'en soit pas ainsi, mais ce projet ne correspond pas aux critères définis par la loi et par l'OFDE en la matière. J'ai d'ailleurs déjà eu l'occasion d'intervenir ici même à ce sujet - et vous l'avez rappelé, Monsieur Velasco - le 26 juin 1998, lors de l'une de vos interpellations urgentes. Je me suis expliqué à deux reprises avec les initiants de ce projet et avec Mme Gabrielle Falquet, maire de Vernier. Vous avez parlé de Meyrin mais cette commune n'est pas du tout concernée; il s'agit bien du projet de la mairie de Vernier.
Mesdames et Messieurs les députés, parler de dysfonctionnement du service est pour le moins inélégant - pour ne pas dire abusif - à l'égard d'hommes et de femmes confrontés jour après jour à une tâche délicate et difficile, dans un système qui l'est tout autant. Les aspects positifs de leur travail, leur réussite et les compliments qui leur sont adressés par des personnes qui ont bénéficié d'un encadrement soutenu et qui, grâce à des mesures actives, ont retrouvé un travail et en même temps leur dignité et le goût à la vie, de cela, bien entendu, il n'en est jamais question ! Ils sont payés pour ça, me direz-vous, et c'est normal. Mais il suffit d'une réclamation individuelle ou d'un cas comme celui qui fait l'objet de cette motion pour que d'emblée on emploie des termes que je ne peux accepter.
Revenons-en au projet de la commune de Vernier qui est à l'origine de cette proposition de motion. Ce plan d'action émane d'un projet global issu du Conseil économique et social appelé «pacte pour l'emploi», projet qui a été approuvé par le Conseil municipal de Vernier le 16 septembre 1997. Ce pacte - je le reconnais très volontiers - est ambitieux et intéressant à plusieurs égards. Il comprend également des mesures touchant directement des structures étatiques et d'autres institutions.
En date du 12 novembre 1997, le Conseil d'Etat a invité les représentants de la commune de Vernier à des rencontres avec l'Office cantonal de l'emploi et l'Office d'orientation et de formation professionnelle, pour analyser le contenu de ce projet et pour assurer la coordination des mesures préconisées, mais aussi pour éviter les redondances avec des prestations déjà existantes par ailleurs; plusieurs séances ont eu lieu dans ce sens.
Le projet de l'association VIE a trait à un programme d'emplois temporaires que la commune veut établir sous un régime fédéral. Ce projet, qu'on le veuille ou non, Mesdames et Messieurs, ne remplit pas les conditions de la loi fédérale sur l'assurance-chômage pour les raisons suivantes. Les emplois temporaires fédéraux sont de deux sortes : les emplois collectifs organisés autour d'une seule et même tâche, qui peuvent bénéficier de l'encadrement payé par l'assurance-chômage; les emplois individuels, où des chômeurs sont placés dans divers services avec des tâches différentes et dont l'encadrement incombe aux services bénéficiaires des prestations.
Or, Mesdames et Messieurs les députés, le projet de l'association VIE ne correspond pas à la définition des emplois temporaires collectifs. Il est, en effet, composé d'emplois individuels dans différents services de l'administration communale. C'est la raison pour laquelle il ne peut pas bénéficier d'un encadrement payé par l'assurance-chômage; la loi le prévoit ainsi et l'OCE ne peut rien y faire. J'ajoute aussi que la décision de l'Office cantonal de l'emploi a été prise après examen du projet par la Commission de réinsertion professionnelle (CRP), qui est composée des partenaires sociaux et des représentants des départements de l'instruction publique et de l'économie. Le CRP lui a opposé un préavis négatif et l'Office cantonal de l'emploi a strictement respecté les procédures de décision.
Cela étant précisé, je suis prêt, Mesdames et Messieurs les députés, à répondre à chacune des invites de cette motion. Vous dites, notamment, qu'il faut faire respecter les engagements de collaboration avec les communes et établir une charte de fonctionnement.
J'aimerais rappeler ici que le projet de la commune de Vernier a été examiné par le groupe de travail Etat-communes pour la lutte contre le chômage dès le 10 juin 1997. Ce groupe de travail comprend les représentants des communes et des départements de l'économie, de l'instruction publique et de l'action sociale. Déjà à ce stade, l'Office cantonal de l'emploi avait attiré l'attention de la commune de Vernier sur ce qui était acceptable ou pas en matière de législation. Le 3 juillet 1998, des contre-propositions ont été faites à ma demande à la commune de Vernier : détacher à la commune un conseiller en emploi et - s'il le fallait - engager à la commune, à travers un statut de stagiaire, des demandeurs d'emploi. Ces propositions, Mesdames et Messieurs les députés, la commune de Vernier les a refusées.
En ce qui concerne l'établissement d'une charte de collaboration entre l'OCE et les communes, il convient de rappeler qu'il s'agit d'une proposition de l'Office cantonal de l'emploi qui, le 20 janvier 1998, n'a pas été jugée prioritaire par les communes représentées dans le groupe de travail, dont la ville de Vernier.
En tout état de cause, ce sont les textes légaux et les directives officielles qui prévalent et que l'on doit respecter.
Cette même motion fait état d'autres griefs - ou dysfonctionnements, comme vous les appelez - et elle invite l'OCE à établir des critères d'évaluation des programmes en cours et des projets déposés. Les critères d'évaluation des programmes ont été cités plusieurs fois, notamment par Mme Filipowski. Je dois vous rappeler ici que ces critères ont été transmis pour consultation à une dizaine d'organisateurs de cours pour demandeurs d'emploi le 12 janvier 1998, il y a un an, et qu'ils ont rencontré leur assentiment. Le 3 avril 1998, ces critères d'évaluation ont été validés lors d'une séance extraordinaire de la CRP; il ne faut donc pas dire qu'ils n'existent pas. Ils ont été validés, il y a six mois déjà !
Les députés Velasco et Brunier, cosignataires de cette motion, connaissent ces documents. En tant que députés membres de la commission de l'enseignement et de l'éducation du Grand Conseil, ils ont reçu du directeur de l'Office cantonal de l'emploi des informations détaillées sur les procédures d'évaluation des mesures, ainsi que les grilles d'évaluation, les 21 et 28 janvier 1998. De surcroît, Monsieur Velasco, en juin 1998, vous aviez reçu une nouvelle fois tous ces documents lors d'une demande d'agrément dans le cadre de l'Université populaire albanaise. Permettez-moi donc de m'étonner de certaines accusations de dysfonctionnement, alors que toutes ces explications vous ont été données, d'une façon précise, par l'Office cantonal de l'emploi. Je suis prêt, je le rappelle, à répondre à chacune des invites si vous le voulez, mais je ne voudrais pas le faire ici et allonger inutilement les débats.
En ce qui concerne le cas de Vernier, les réponses que je viens de vous donner me paraissent suffisantes à ce stade. La cause, il faut le savoir, est en main de la justice, puisque l'association VIE Vernier a fait recours contre la décision de l'OCE auprès du Tribunal administratif. Alors, attendons le jugement, mais je suis néanmoins prêt à répondre point par point aux accusations portées contre l'Office cantonal de l'emploi dans cette motion. Je me rallie volontiers - si vous le souhaitez - à son renvoi au Conseil d'Etat, voire - si vous ne craignez pas une surcharge de travail - à son renvoi à la commission de l'économie.
M. Christian Brunier (S). M. Lamprecht est un homme éminemment sympathique, mais il vient de nous faire une démonstration de l'impuissance genevoise face au chômage !
Prenez une commune comme celle de Vernier, qui est actuellement la plus affectée par le chômage à Genève...
Claude Blanc. Parce qu'elle est de gauche !
M. Christian Brunier. Cette commune a décidé d'agir en essayant de faire preuve de créativité dans un domaine qui n'est pas forcément de sa compétence. Pour soutenir ceux de ses habitants qui souffrent du chômage, elle a décidé de mettre en place divers systèmes, en travaillant avec un certain nombre d'organisations. Elle a ainsi permis la création d'une vingtaine d'emplois, de six mois environ, dans des secteurs de l'administration communale, mais aussi dans le secteur associatif, dans lequel elle a réalisé une véritable promotion, ce qui est éminemment important pour une commune qui connaît un certain nombre de problèmes sociaux.
Afin de valoriser son expérience, la commune a fait appel à la Confédération et au canton et, particulièrement, à l'Office cantonal de l'emploi. Au lieu d'admettre que cette expérience est intéressante - en dépit peut-être de quelques défauts - et de manifester, Monsieur Lamprecht, une volonté de l'aider en essayant de trouver des moyens pour pallier ces défauts, vous êtes en train de nous faire une démonstration de juridisme étroit, sans montrer aucune volonté de valoriser cette expérience. Résultat : avec une telle attitude, le chômage perdure à Genève. La créativité, l'imagination et l'action ne sont en tout cas pas encouragées; cela est déplorable, vu le taux de chômage régnant à Genève
M. Carlo Lamprecht. J'apprécie autant que vous ce que la commune de Vernier est en train de faire pour ses chômeurs. Lorsque j'étais magistrat dans la commune d'Onex, j'ai aussi mis sur pied, il y a longtemps déjà, des structures pour essayer d'aider les chômeurs sur le plan communal. En l'occurrence, j'ai reçu la commune de Vernier et j'ai essayé de faire tout ce qui était en mon possible pour l'appuyer. Je lui ai fait d'autres propositions, que j'ai citées et que je pouvais tenir. Sachez que je déteste les contraintes des lois. En tant que conseiller d'Etat, les lois vous ligotent parfois et vous empêchent de suivre la logique du terrain et des besoins. Mais quand nous voulons transgresser ces lois, vous êtes les premiers à protester. Je suis obligé de tenir compte des lois qui existent, que vous avez votées, Mesdames et Messieurs, ou qui ont été votées aux Chambres fédérales.
J'ai rencontré à deux reprises Mme Falquet pour trouver un arrangement, mais la commune de Vernier veut garder son concept, qui n'est pas admissible aujourd'hui légalement. Ou alors l'argent devra être débloqué ici, dans ce parlement, puisque Berne ne paiera pas. C'est vous qui devrez payer, Mesdames et Messieurs : votez-moi un crédit de 500 000 ou de 200 000 F pour la commune de Vernier ! Quant à moi, je n'ai pas les moyens sur le plan légal d'agir autrement; le Conseil d'Etat doit respecter la loi. Sachez que ce n'est pas par mépris : j'admire, au contraire, ce que fait la commune de Vernier, mais je suis dans l'impossibilité de la soutenir.
Cela dit, ce qui m'irrite profondément, c'est que, alors que nous cherchons à respecter la loi, on accuse l'Office cantonal de l'emploi de dysfonctionnement en prétendant que les gens ne savent pas travailler. Vous mettez en cause les services du chômage, mais ils ne sont pas responsables de cette situation. Les employés de l'Office cantonal de l'emploi reçoivent tous les jours des centaines et des centaines de dossiers; ils font tout ce qu'ils peuvent. Bien que le chômage ait baissé d'une manière significative en 1998, je vous rappelle que 14 801 mesures d'insertion ont été accordées aux demandeurs d'emploi du canton de Genève.
Je peux comprendre votre dépit par rapport au projet de Vernier, qui est valable, mais je n'accepte pas que l'on tire sur l'Office cantonal de l'emploi et qu'on discrédite un service qui, à mes yeux, travaille correctement - nonobstant les défauts qui peuvent affecter chaque service de l'Etat et que l'on connaît aussi dans les entreprises privées.
M. Christian Brunier (S). Monsieur Lamprecht, vous venez de nous dire que ce projet pourrait coûter 500 000 F pour vingt emplois plus un encadrement. Ou vous articulez des chiffres au hasard, ou c'est un excellent investissement.
On ne va pas épiloguer très longtemps ce soir. Aussi bien vous que nous avons envie de valoriser le projet de la commune de Vernier, de corriger éventuellement ses défauts et c'est pourquoi je propose un renvoi à la commission de l'économie. Cela nous permettra d'analyser calmement les choses, d'entrer en matière sur cette motion et de soutenir la commune de Vernier dans son action contre le chômage.
M. Claude Blanc (PDC). Les motions vont en priorité au Conseil d'Etat, surtout si celui-ci les accepte, sachant déjà toutes les réponses qu'il va donner.
Je propose que cette motion soit renvoyée au Conseil d'Etat et que ce dernier s'engage - dans un délai raisonnable - à nous donner des réponses circonstanciées; après quoi, la commission se saisira de ce rapport s'il ne convient pas au Grand Conseil. Cette motion demande d'ailleurs un certain nombre de choses au Conseil d'Etat; elle ne les demande pas à la commission.
Ce sont les motions mal rédigées que l'on renvoie en commission. Ce n'est pas le cas de la vôtre qui est bien rédigée. Il n'y a donc pas lieu de la renvoyer à la commission, mais bien au Conseil d'Etat qui vous répondra dans les délais.
Le président. Nous devons nous prononcer sur le renvoi de cette motion en commission de l'économie. Cette proposition prime sur les autres propositions.
Mise aux voix, la proposition de renvoyer cette proposition de motion à la commission de l'économie est adoptée.