République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7882-A
4. Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit d'investissement avec subvention pour la construction d'une installation de méthanisation des déchets organiques sur le site de Châtillon. ( -) PL7882
Mémorial 1998 : Projet, 4753. Renvoi en commission, 4769.
Rapport de M. Alberto Velasco (S), commission des travaux

La Commission des travaux, sous la présidence de M. Dominique Hausser, s'est réunie les 13 octobre, 20 octobre et 3 novembre 1998, pour examiner le projet de loi 7882, déposé le 30 juillet 1998 et renvoyé par le Grand Conseil en Commission des travaux lors de la séance des 24/25 septembre 1998.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat chargé du Département de l'intérieur, de l'agriculture, de l'environnement et de l'énergie a participé aux travaux de la commission lors des séances du 13 et 20 octobre et 3 novembre assisté de M. Claude Calame, chef du service planification et constructions.

Introduction

Le concept de valorisation des déchets organiques par le processus de compostage, adopté à Genève en 1992, préconisant la diminution de la quantité de déchets à incinérer et l'intensification de leur valorisation, répond aux exigences de l'Ordonnance sur le traitement des déchets de 1990 (OTD).

L'article 7 y précise en effet que "; les cantons encouragent la valorisation des déchets compostables par les particuliers eux-mêmes, notamment par le biais d'informations et de conseils. Si des particuliers n'ont pas la possibilité de valoriser eux-mêmes leurs déchets compostables, les cantons veillent à ce que les déchets soient dans la mesure du possible collectés séparément et valorisés ".

En 1987, le Grand Conseil a accepté un crédit de Fr. 2,6 millions (loi 5930 du 9 avril 1987) pour la réalisation d'une installation pilote de compostage sur le site de Châtillon, d'une capacité de 3 000 tonnes par an.

L'expérience s'étant révélée concluante, le Conseil d'Etat a décidé, en 1990, de compléter cette installation en l'agrandissant de manière à pouvoir traiter 10 000 tonnes de déchets organiques par an. Le Grand Conseil adoptait alors le crédit de Fr. 6,4 millions (loi 6508 du 21 juin 1990), nécessaire à la réalisation de ces travaux

C'est le 27 mai 1993, que le nouveau complexe de traitement des déchets organiques des communes d'Avully, Avusy, Bernex, Chancy, Confignon, Dardagny, Carouge, Laconnex, Lancy, Meyrin, Onex, Satigny, Soral, Vernier et de quelques quartiers de la Ville de Genève est mis en service. Suite aux odeurs nauséabondes émanant de l'installation, et à la plainte des habitants de la commune de Bernex, une série de mesures est prise afin de limiter ces inconvénients. Notamment par le traitement des déchets le jour même de leur arrivée. En effet, une étude olfactive, entreprise en 1996, a montré qu'une part importante des odeurs était imputable au compostage.

En 1997, une augmentation considérable du tonnage des déchets à traiter chaque semaine, environ 350 tonnes - alors que l'installation ne peut accepter que des pointes de l'ordre de 200 tonnes - a entraîné de nouvelles nuisances olfactives. C'est alors qu'au mois de juin 1997, la commune de Bernex a présenté au DIER une pétition signée par 550 citoyens de la commune, destinée à "; soutenir le projet d'une installation de traitement des ordures ménagères par méthanisation sur le site de Châtillon ". Cette installation devant permettre dans les plus brefs délais et en substitution du centre de compostage actuel, d'éradiquer l'émission des odeurs nauséabondes que subit la population voisine. A titre de mesures urgentes, les déchets organiques provenant des ménages seront dirigés sur l'usine des Cheneviers durant les mois de juillet et d'août 1997, et une étude pour la réalisation d'une telle installation est entreprise par le Conseil d'Etat. Les modalités d'inscription et de participation pour la construction de cette installation sont publiées le 6 août 1997 dans la FAO et la FOSC. En référence aux accords du GATT/OMC, la procédure d'adjudication sélective a été choisie. Au terme du délai d'inscription, soit le 5 septembre 1997, huit groupes ont déposé leur candidature et c'est le 19 décembre 1997 que ces concurrents déposaient leur dossier pour l'ouverture publique des offres.

La proposition la plus coûteuse se chiffrait à 11 444 375 francs (hors taxe). Quant à l'offre la plus économique, elle se chiffrait à 7 460 663 francs HT.

Un jury composé de membres du DIAE, de l'Office cantonal de l'énergie (OCEN) et d'Energie 2000, a évalué l'ensemble des projets afin de déterminer le montant du crédit d'investissement ainsi que le montant des subventions demandées à l'Office fédéral des questions conjoncturelles. La Confédération ayant, d'ores et déjà, accordé une subvention de 700 000 francs au titre de la relance économique.

Dès octobre 1996, dans le cadre de la commission de gestion globale des déchets, un groupe de travail "; valorisation des déchets organiques " est constitué. Ce groupe de travail, composé de conseillers administratifs ou de maires de communes, de représentants d'associations de défense de l'environnement, de fonctionnaires de l'Etat et de la Ville présente, en décembre 1997, un rapport sur la valorisation des déchets organiques du canton de Genève. Ce rapport, faisant partie intégrante du plan cantonal de gestion des déchets, conclut à l'édification de trois centres de traitement des déchets organiques sur le canton et propose, comme action prioritaire, de réaliser l'extension du centre de compostage du site de Châtillon par la réalisation d'une installation de méthanisation.

Objectifs de la nouvelle installation de Châtillon

La nouvelle installation de Châtillon a été dimensionnée pour avoir une capacité de traitement de 10 000 tonnes par an et néanmoins pouvoir absorber les fluctuations saisonnières des déchets organiques. La capacité de 10 000 tonnes par an a été déterminée sur la base des quantités actuelles de 5 000 tonnes par an sur le site de Châtillon et d'une augmentation induite par l'accroissement du nombre de communes dont les déchets verts devraient être traités. En effet, le nouveau projet de gestion des déchets organiques prévoit entre autres l'extension des levées sur la totalité de la Ville de Genève. Compte tenu du digestat qui sera introduit dans l'installation de compostage actuelle (3 000 t/an), la capacité totale de l'installation de Châtillon sera de 17 000 tonnes par an.

En outre, le projet doit en optimisant sa rentabilisation, par l'utilisation de technologies modernes, répondre aux exigences actuelles de respect de :

- l'environnement ;

- l'hygiène ;

- l'ergonomie.

Pour l'usine de méthanisation, il s'agira de :

- Traiter les déchets organiques par le biais de la méthanisation.

- Garantir la qualité de l'air.

- Respecter les normes de qualité pour les sous-produits de la méthanisation.

- Offrir de bonnes conditions de travail au personnel (moins d'exposition aux nuisances, limitation des déplacements).

- Garantir la sécurité du personnel, des visiteurs et une qualité de vie des riverains.

- Commande optimalisée des installations.

- Gestion informatisée de l'exploitation.

- Faciliter les problèmes de maintenance et d'exploitation.

- Rationaliser l'exploitation et réduire le travail de nuit ou de fin de semaine.

Technologie utilisée

La digestion anaérobie (micro-organisme pouvant se développer sans air ni oxygène) est une technique qui répond parfaitement aux attentes actuelles dans le domaine de la gestion des déchets puisqu'elle permet, outre la récupération de la matière organique, de produire de l'énergie en limitant les émissions dans l'atmosphère, notamment de composés malodorants.

Le procédé choisi, digestion en une étape, offre la possibilité de réaliser une installation fiable avec un seul digesteur. Grâce à l'absence de tout dispositif mécanique à l'intérieur du digesteur, la maintenance se trouve simplifiée.

Processus de chargement

La réception des déchets se passe dans une halle de déchargement fermée, isolée de l'extérieur par un portail automatique et est mise en dépression, ce qui évite la propagation des odeurs. Le concept du digesteur vertical permet une extraction gravitaire. Le compost brut est ensuite amené par bandes transporteuses capotées jusqu'au pied de la bande transporteuse existante, à destination de l'aire de maturation.

En ce qui concerne le traitement des odeurs, une aspiration d'air est prévue à tous les endroits du traitement où le produit n'est pas hermétiquement isolé. L'air aspiré fait l'objet d'un traitement biologique spécifique. Aucune odeur due à l'installation de digestion ne sera perceptible aux limites de propriété.

Production de gaz, d'énergie électrique et consommation sur le site

La productivité du gaz attendue est de 119 Nm3 par tonne de déchets bruts, la teneur en méthane attendue est de 55 % en moyenne, le reste étant de la vapeur d'eau et du gaz carbonique. L'autoconsommation de l'installation est réduite a 46 kWh biogaz et de 26 kWh électriques par tonne de déchets traités.

Energie produite

Trois variantes ont été étudiées :

- Consommation par le site de l'énergie produite jusqu'à concurrence de ses besoins, l'excédent de production étant reversé dans le réseau des SIG et rétribué selon un tarif figurant dans la loi.

- Lavage du gaz produit et introduction de celui-ci dans le réseau des SIG à Bernex (prix de rachat de l'énergie sous forme de gaz très nettement inférieur au prix de rachat de l'électricité).

- Utilisation d'un groupe chaleur-force pour la production de l'énergie nécessaire au fonctionnement du site, le solde du gaz est traité comme carburant pour les véhicules de service (solution entraînant un investissement supplémentaire de 2,5 millions de francs dont l'amortissement impliquerait une augmentation de 70 F par tonne pour le traitement des déchets)

Parmi ces trois variantes, c'est la première qui a été choisie par le département en raison des avantages techniques et économiques. L'installation sera équipée de deux groupes chaleur-force de 200 kW électriques ; ils seront asservis à la production de gaz. Un gazomètre sera construit afin d'absorber les pointes de production. Compte tenu du dimensionnement des groupes et des fluctuations de la quantité de déchets à traiter en cours d'année, le fonctionnement des groupes sera le suivant :

- durant 70 % du temps, soit 6130 heures, un seul groupe sera en fonction avec une puissance variant de 50 % à 100 % ;

- durant 24 % du temps, soit 2100 heures, deux groupes seront en fonction avec une puissance variant de 50 % à 100 % ;

- durant 6 % du temps, soit 530 heures, les deux groupes fonctionneront à pleine puissance.

Le surplus de production électrique sera injecté sur le réseau des Services industriels de Genève (SIG). Cette énergie étant considérée comme provenant de source renouvelable (biomasse), selon l'article 21A de la loi sur l'énergie (L 2 30) du 18 septembre 1986, les SIG ont l'obligation de reprendre cette production pour un montant équivalant à trois fois le prix de vente. C'est sur cette base que les recettes ont été évaluées.

Il est à relever qu'au cas où cette loi devrait être modifiée, et que le prix de rachat de l'énergie soit égal à celui de vente, le coût de traitement des déchets serait augmenté de 15 F à 20 F par tonne.

La chaleur sera partiellement utilisée pour chauffer les locaux sociaux du site qui, actuellement, sont chauffés par des convecteurs électriques. L'excédent de chaleur produite, soit 3 GWh/an sera rejeté dans l'atmosphère. L'impact environnemental a été considéré comme étant acceptable. Actuellement, le service est discussion avec l'OCEN pour de possibles améliorations au niveau du projet afin de revaloriser cette énergie calorifique.

Le bilan énergétique annuel est représenté par le schéma ci-après.

Délais d'exécution

- Ouverture du chantier janvier 1999

- Fin des travaux décembre 1999

- Mise en service janvier à juillet 2000

Pour avoir droit aux subventions fédérales, cette planification doit être impérativement respectée.

Coût du projet

Le coût hors taxe de la réalisation projetée se décompose de la manière suivante :

1. Coût de la construction selon offre de l'entreprise générale 7 465 000 F

2. Equipements complémentaires (gazomètre, chauffage, structure) 615 000 F

3. Divers et imprévus 300 000 F

4. Prestation de management de projet 180 000 F

5. Fonds de décoration 1%      86 000 F

6. Total de la construction HT 8 646 000 F

7. Subventions de la Confédération   - 700 000 F

8. Total net HT 7 946 000 F

HT= hors taxe

Le montant du crédit ne comprend pas la TVA. En effet, les taxes de traitement des déchets organiques étant assujetties à la TVA, l'impôt préalable peut être récupéré.

Données financières concernant l'exploitation

Les budgets d'exploitation de l'installation actuelle et du projet futur se décomposent comme suit :

Budget actuel

Budget 2000

Ecart

Charges

Charges du personnel

360 000 F

450 000 F

90 000 F

Intérêts et amortissement

400 000 F

1 017 400 F

617 400 F

Frais d'entretien bâtiment et installations

300 000 F

512 000 F

212 000 F

Consommables

0 F

26 000 F

26 000 F

Divers et évacuation

0 F

150 000 F

150 000 F

Prestation interne, autres services de l'Etat (usine des Cheneviers)

200 000 F

200 000 F

0 F

Total

1 260 000 F

2 355 400 F

1 095 400 F

Recettes

Vente du compost

100 000 F

100 000 F

0 F

Taxe sur le tonnage des déchets

1 160 000 F

1 765 400 F

605 400 F

Economie d'énergie (autosuffisance)

0 F

90 000 F

90 000 F

Prévision de vente d'énergie

0 F

400 000 F

400 000 F

Total

1 260 000 F

2 355 400 F

1 095 400 F

Résultat

0

0

0

Les charges supplémentaires seront couvertes par une augmentation de taxe de traitement. Ceci en vertu du principe pollueur-payeur.

En effet, lorsque l'installation de biométhanisation fonctionnera à plein régime avec une production annuelle d'environ 17 000 tonnes, la taxe perçue sera d'environ 130 F la tonne, alors que celle-ci est actuellement de 155 F pour les déchets organiques provenant des levées. Ces 130 F pourraient être augmentés d'environ 20 F, si l'hypothèse énoncée à la page 6 (§ 3) concernant le prix de vente de l'énergie se réalise. Néanmoins, le coût de traitement restera très avantageux par rapport à celui de l'incinération. Celui-ci, actuellement de 215 F par tonne, devrait augmenter significativement ces prochaines années.

Couverture financière du projet d'investissement

Dépense nouvelle d'investissement

Crédit brut proposé Fr. 8 646 000

Subvention Fr. 700 000

Crédit net proposé Fr. 7 946 000

Charges financières annuelles

Annuités constantes (amortissement 20 ans) Fr. 617 400

Intérêts passifs  0

Total Fr. 617 400

Revenus supplémentaires annuels (1)

Recettes propres Fr. 1 005 400

Economies prévues Fr. 90 000

Total des revenus supplémentaires Fr. 1 095 400

Charges supplémentaires annuelles (2)

Total des charges financières Fr. 617 400

Charges en personnel Fr. 90 000

Dépenses générales (nouv. bâtiment et ouvrage) Fr. 388 000

Total des charges Fr. 1 095 400

Couverture du projet

Insuffisance de couverture 0

Taux de couverture 100 %

Audition

La commission a procédé à l'audition des représentants des communes "; rive gauche ", soit Mme L. Martin - MM. P.-Y. Gerber, C. Martin, accompagnés par M. Barras de la maison Atag.

M. Gerber présente le projet GICAL qui signifie : Groupement intercommunal de compostage Arve et Lac. Ce projet qui est conçu depuis quelque temps avec une étude d'impact, pourrait démarrer, pour autant que le Département de l'intérieur donne son accord pour l'extension.

Le GICAL désirerait recevoir quelques précisions quant au financement de l'installation prévue à Châtillon. Il aimerait être sûr que le prix à la tonne, qui est moins élevé que celui de leur projet, comprend bien les mêmes paramètres de calcul, y compris les investissements.

La particularité de ce centre où tout le traitement se fera en méthanisation et en andins à demi-enterrés, est qu'il sera couplé à l'installation horticole d'un propriétaire qui utilisera le compost. Ainsi, la chaleur produite est valorisée en énergie de chauffage de la serre ou sous forme d'un groupe chaleur-force pour la production d'énergie électrique.

L'association, dotée d'une structure juridique, a été prévue avec un capital social de 2 millions, souscrit par l'ensemble des communes intéressées au projet, en proportion du nombre d'habitants.

D'autre part, afin de garantir un prix de revient assez bas, les communes s'engagent à porter leurs déchets au centre. L'objectif étant de garantir un certain volume, qui serait d'environ 10 000 tonnes/an. Le coût est d'ordre financier, d'amortissement et de fonctionnement. Il s'agit d'une société sans but lucratif. L'investissement total consenti pour ce projet qui s'élève à 11,3 millions, est financé par : le capital social souscrit par les communes, un prêt sociétaire souscrit également par les communes (ce prêt subordonné est rémunéré) et un prêt hypothécaire de 20 ans.

La participation retenue n'étant pas celle du pollueur-payeur, elle se fera par une souscription de 14 commune (50 000 habitants), selon son nombre d'habitants. Afin de garantir la viabilité du projet, le volume traité doit atteindre 10 000 tonnes par an. Pour l'ensemble du canton, le potentiel de déchets à traiter est de 30 000 tonnes. Ce centre étant conçu pour traiter le tiers des déchets du canton, correspondant à un bassin de population de 130 000 personnes, cela signifie qu'il faudra trouver la contribution de 90 000 personnes supplémentaires pour que le volume à traiter soit suffisant.

Le prix à la tonne serait de Fr. 156.-, puis Fr. 124.- après 10 ans. Au terme de la durée de vie de ce centre, les frais sont remboursés et la société a ainsi créé des liquidités pour reconstituer le capital initial.

M. Gerber précise que la première étape du Nant-de-Châtillon a été financée par l'ensemble des contribuables du canton et la seconde va l'être par le pollueur-payeur. Il se demande s'il est normal que les communes rive gauche paient la construction de leur centre, sans aucune aide de l'Etat ? Ils désirent être mis sur pied d'égalité avec le Nant-de-Châtillon et non uniquement en concurrence.

Discussion

Un des soucis de la commission a été de savoir si l'installation proposée était conçue de manière à absorber l'augmentation du volume des déchets, ainsi que les périodes de pointe. Les graphiques figurant aux annexes 3 et 4, montrent que les volumes de déchets livrés sur le site obéissent à une certaine périodicité. C'est ainsi que l'on passe, par rapport à une valeur moyenne annuelle, de -40 % en hiver à + 80 % en été. Le département nous confirme que l'installation a été dimensionnée pour absorber cette pointe de production qui, actuellement, représente 350 tonnes par semaine et à l'avenir peut-être 600 tonnes. Quant à la question de savoir si l'on aurait pu, avec l'installation actuelle, moyennant l'augmentation de la halle et le dégazage de celle-ci, éviter les problèmes liés d'odeur et de sous-capacité, il est répondu que non seulement il y a une difficulté à écouler la quantité de compost produite actuellement, mais que cette installation, mis à part le fait qu'elle produira de l'énergie, et donc permettra une baisse des coûts, a l'avantage de pas augmenter trop la production de compost. Au cas où l'écoulement du compost produit viendrait à être un problème, il pourrait être résolu en l'offrant gratuitement sans les frais de transport. Le surcoût serait de 5 F la tonne. Dans l'hypothèse où les SIG baisseraient de manière significative le prix de rachat de l'énergie produite, ce qui aurait comme conséquence de renchérir d'environ 20 F la tonne, le coût de traitement, serait malgré tout inférieur à celui d'aujourd'hui et largement concurrentiel par rapport aux Cheneviers.

Face aux problèmes soulevé par le GICAL sur le tonnage optimal de déchets permettant la rentabilisation de leur installation - 10 000 tonnes/an - alors que le potentiel de la zone rive gauche est d'environ 7 000 tonnes/an, le coût de traitement des déchets qui s'avère supérieur à celui de Châtillon, plusieurs commissaires ont soulevé la question, à savoir si le département avait prévu une péréquation financière ou quantitative (volumes des déchets) entre l'ensemble des sites de traitement du canton. M. Cramer indique (voir annexe 7) que le plan cantonal des déchets prévoit un système de découpage du canton. Si ce plan ne s'avère pas adéquat, une négociation sera à prévoir pour rééquilibrer. Il a donné la garantie au GICAL qu'il y aura un système de négociation des quantités de déchets entre les différentes installations en fonction de leur importance. Le plan de gestion des déchets parle des quantités de traitement ; en revanche, la péréquation n'a pas lieu sur le plan économique. Ces projets ont chacun leur logique. Le département respecte la démarche du GICAL, néanmoins l'Etat veut que la politique de gestion des déchets soit une réussite.

D'autre part, le département confirme son désir de voir diminuer la quantité de déchets à incinérer. Dans ce cadre, il ne faut pas que les installations se fassent concurrence, au contraire, elles doivent travailler en partenariat et développer une synergie. M. R. Cramer confirme que, s'il devait y avoir des difficultés, il y aura de l'entraide et que le principe adopté est celui du pollueur-payeur.

Les commissaires ont soulevé la question du déclassement des terrains qui seraient en zone agricole et auquel une compensation devrait être trouvée. M. R. Cramer, qui s'est engagé à effectuer les démarches nécessaires afin de régulariser la situation, nous informe que l'installation serait plutôt en zone de forêt et qu'une compensation allant dans le sens d'un reboisement est entreprise

Conclusion

Des considérations telles que la surcharge actuelle de l'installation, les odeurs nauséabondes qu'elle propage, l'intérêt évident de fournir de l'énergie renouvelable et l'économie substantielle des frais de traitement pour les collectivités publiques, confirment l'utilité pour la collectivité de la réalisation de l'installation de biométhanisation.

Vote

Soumise au vote, l'entrée en matière du projet est acceptée par la majorité de la commission, 10 oui (2 L, 1 R, 1 DC, 2 S, 1 Ve, 3 AdG) moins 1 abstention (1 L).

Après une relecture article par article, la majorité de la Commission des travaux s'est déclarée d'accord avec le projet, 9 oui (2 AdG, 2 DC, 3 S, 2 Ve) moins 3 abstentions (3 L) et recommande au Grand Conseil d'accepter le projet de loi 7882.

Annexes :

1.  Plan d'implantation

2.  Schéma de fonctionnement

3, 4, 5. Graphiques

6  Figure des zones d'apport

7  Etude relative aux émissions d'odeurs

ANNEXES

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Premier débat

M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Je n'ai rien à ajouter à mon rapport qui est suffisamment explicite et complet.

M. Jean-Pierre Gardiol (L). Notre groupe s'est abstenu sur ce projet de loi car il n'a pas été totalement convaincu. En effet, les libéraux ont été plus que surpris par la proposition du Conseil d'Etat de construire cette installation, qui devrait s'ériger dans une zone industrielle, sur un terrain se trouvant en zone de forêt. Cela paraît un peu surprenant en regard de toutes les misères qu'endure aujourd'hui le propriétaire privé qui veut construire dans notre canton. D'autre part, la conception de cette installation qui prévoit un broyeur à l'entrée de la chaîne nous a laissés songeurs. En effet, cette installation traitera demain les déchets organiques à grande échelle, c'est-à-dire nos poubelles qui auront dû être triées au préalable par nos concitoyens. Avec ce système de broyage, à la moindre erreur : un médicament, une pile, ici plutôt que là, le compost sera pollué globalement.

C'est également pour cette raison que nous avons émis des réserves quant à la qualité future de ce compost. Nous sommes en effet convaincus que les analyses d'aujourd'hui ne seront pas celles de demain. De ce fait, nous sommes très perplexes quant à la vente de ce compost, car le marché n'est pas évident. Même si ce compost est donné gratuitement, qui paiera le transport ? Qui paiera l'épandage sur les champs ? En relevant rapidement ces points de nos réflexions et en tenant compte des coûts qui pourraient être bien plus élevés que prévus, nous ne sommes, en définitive, pas convaincus que le compost coûtera moins cher que l'incinération. Malgré toutes ces réticences brièvement résumées, le président Cramer a estimé qu'il fallait tenter l'expérience et c'est la raison pour laquelle il nous a convaincus de nous abstenir. Nous comptons néanmoins sur lui pour suivre l'expérience de près et agir - en bon gestionnaire qu'il est - si l'expérience s'avérait négative.

Par contre, lors de l'étude de ce projet de loi, nous avons eu l'occasion d'entendre - comme le rapport le relate - des représentants du GICAL, c'est-à-dire ceux des communes de la rive gauche désirant également réaliser un centre de compost. Même si le président Cramer garantit les zones d'apport à ce centre, qui sera géré par un privé, de nombreuses questions se posent. A nos yeux, le montage financier présente de grands risques. La conception n'est pas la même qu'au Nant-de-Châtillon car il n'a pas été prévu d'injecter la production d'électricité sur le réseau des Services industriels. Mais tout ceci n'est rien en regard de sa situation proche de l'hôpital de gériatrie, proche des habitations et proche d'une école.

En effet, je possède ici un rapport explosif concernant les effets sur la santé publique que la construction d'un tel centre pourrait entraîner. En fonction des dangers encourus, l'OMS préconise l'interdiction d'implanter des sites de compostage industriel à moins d'un kilomètre des zones d'habitation et à moins de deux kilomètres des hôpitaux, des foyers pour personnes âgées, des écoles, des crèches, et recommande l'implantation en milieu rural ou forestier.

Sans entrer dans les détails, les risques courus par la population aujourd'hui sont très importants par rapport au tas de compost qui est en ce moment entreposé à cet endroit. Ces risques deviennent encore plus importants lors de l'agitation et de l'aération des tas de compost. Les risques sont de trois types : rhinoconjonctivite, asthme, urticaire; inflammation broncho-pulmonaire; lésions irréversibles des poumons. Cette situation, gérée d'une manière incompréhensible par la majorité du Conseil municipal de Vandoeuvres, m'amène aux questions suivantes : Monsieur le président, comment a-t-on pu autoriser une telle construction à cet endroit au vu des recommandations de l'OMS ? Comment a-t-on autorisé une construction industrielle sur un terrain cette fois-ci agricole ? Ce centre a-t-il été fermé ? Comment va-t-on évacuer ce tas sans mettre en danger la population ? Le département va-t-il donner son accord pour l'extension au mépris de la santé des habitants et des problèmes déjà rencontrés à l'époque à Genève dans une situation analogue près d'un hôpital ?

Mme Janine Hagmann (L). Je crois que nous nous souvenons tous, dans cette enceinte, des nombreuses interpellations et questions posées à propos du Nant-de-Châtillon. En effet, M. Mauris, ici présent, a retranscrit les plaintes des habitants de Bernex et des environs concernant les odeurs nauséabondes dégagées par l'amas de déchets verts. Je me souviens que M. Haegi s'était rendu sur place avec un «nez» pour prouver que les odeurs étaient vraiment nauséabondes. En fait, j'aimerais rappeler ici que ce sont surtout les déchets humides qui provoquent des nuisances, bien que l'amoncellement de déchets de jardin non compostés au fur et à mesure provoque des ennuis écologiques.

Je suis bien placée pour le savoir puisque la décharge située sur la commune de Vandoeuvres - qui n'accueillait que des déchets de jardin - vient d'être fermée par M. Cramer. Malgré des crédits déjà énormes - 2,6 millions en 1987, 6,4 millions en 1990 - on nous demande d'accepter aujourd'hui un investissement de 8,5 millions. M. Cramer essaie de nous prouver que ces 8 millions et demi ne coûteront rien au contribuable : en raison de la loi du pollueur-payeur, cet investissement sera complètement amorti par les déchets livrés au Nant-de-Châtillon.

J'espère, Monsieur le président, que tout a été bien calculé, bien pensé et bien prévu, que les comptes sont transparents, car le contribuable n'accepterait sûrement pas de gonfler à l'infini ce coût du Nant-de-Châtillon. J'espère que l'on ne s'engage pas dans un gouffre financier, si des problèmes de dysfonctionnements devaient survenir au cours de l'exploitation, ce qui obligerait à modifier le budget et les frais à la hausse ou les recettes à la baisse.

Le contribuable a déjà beaucoup donné pour cette station de compostage qui n'est effectivement pas satisfaisante. Je ne conteste pas son amélioration par l'apport de méthanisation, car je crois que les usines de méthanisation, celle de Zoug et celle d'Amiens par exemple, donnent entière satisfaction. Mais il est clairement indiqué à la page 3 du rapport de M. Velasco que le Nant-de-Châtillon doit être réalisé comme action prioritaire.

Ce qui me gêne, c'est que les contribuables d'Arve-Lac ont déjà participé aux péripéties du Nant-de-Châtillon. Maintenant qu'ils désirent construire, entièrement à la charge des communes, une station rive-gauche, ils apprennent qu'il y aura des zones d'apport imposées par l'Etat; qu'ils n'auront pas le droit d'apporter leurs déchets au Nant-de-Châtillon, même pendant la construction du GICAL; que des dérogations limitées dans le temps pour l'apport chez des paysans ne seront plus possibles; qu'il faut tout acheminer dès maintenant aux Cheneviers, à plus de 200 F la tonne, vous le savez très bien. Comment M. le président Cramer expliquera-t-il aux gens qu'ils doivent trier leurs déchets s'ils apprennent ensuite que tout est brûlé pêle-mêle aux Cheneviers ? Comment expliquer à la population d'Arve-Lac que leur compost au GICAL leur coûtera 156 F la tonne alors qu'il est prévu à 130 F au Nant-de-Châtillon ? Y aura-t-il une guerre d'apport des déchets pour se disputer les fournisseurs ? Etes-vous sûr que nous ne sommes pas en train de voir trop grand et qu'il est bien raisonnable de mener de front la même année le Nant-de-Châtillon, 8 millions, et le GICAL, 12,5 millions - même si cet argent ne provient pas du même porte-monnaie, puisque l'investissement de l'un est garanti par l'Etat et l'autre par les communes ?

Je conteste d'ailleurs un peu le discours de mon prédécesseur. Nous ne sommes pas là pour discuter du GICAL qui est un projet dépendant uniquement des communes. Nous ne sommes là que pour discuter en ce moment du Nant-de-Châtillon que nous devons voter rapidement, je vous le rappelle, si nous voulons obtenir une subvention fédérale. Pour moi, je le voterai ce soir, mais avec des promesses de discussions et de concertations pour qu'il y ait une équité dans le canton. L'écologie coûte cher, nous sommes d'accord. Admettons que c'est un plus indispensable à léguer à nos successeurs, mais ne prenons pas de décisions hâtives, irréfléchies. La population participe bien au jeu du tri, ne la dissuadons pas en allant trop loin et trop vite.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. J'aimerais commencer par une observation d'ordre général, tout en remerciant vivement le groupe libéral de son abstention constructive, si j'ai bien compris. En matière d'investissement, en tout cas pour ce que j'ai vu ce soir, si l'on devait compter sur le groupe libéral pour arriver à faire tourner l'économie de notre canton, nous n'irions malheureusement pas très loin. (Protestations.) Cela dit, les diverses interventions qui ont été faites, celle de M. Gardiol, celle de Mme Hagmann, montrent que nous sommes actuellement davantage dans un débat qui concerne le GICAL et la commune de Vandoeuvres que dans le débat qui était annoncé dans notre ordre du jour, qui est celui du Nant-de-Châtillon. En l'occurrence, en espérant que nous pourrons revenir à ce qui est l'objet de cet ordre du jour, je veux bien vous donner quelques indications.

Tout d'abord, je dirai à M. Gardiol que je n'ai pas sa connaissance de ce qui se passe sur le site de compostage de Vandoeuvres, n'ayant pas, comme lui, le privilège d'habiter à quelques centaines de mètres de ce site, ce qui suscite peut-être une attention accrue de sa part quant aux techniques qui y sont pratiquées. Je ne suis pas non plus en situation de campagne électorale pour les municipales.

Mme Hagmann, pour sa part, a posé un certain nombre de vraies questions auxquelles je dois répondre. Le premier point : je tiens encore une fois à affirmer de la façon la plus claire devant le Grand Conseil que le principe qui s'applique en matière de politique des déchets, qu'il s'agisse des déchets incinérés ou compostés, est le principe du pollueur-payeur. Il n'y a pas un centime provenant de l'impôt qui soit destiné au traitement des déchets. Le financement est assuré intégralement par les usagers : communes, collectivités publiques ou industries qui amènent des déchets à la décharge, dans des sites de compostage ou dans des sites d'incinération.

Sur ce point, je tiens à être parfaitement explicite. Nos comptes sont transparents; ceux en particulier de l'usine des Cheneviers sont contrôlés par les usagers, c'est-à-dire pour une bonne partie par les communes, qui sont très bien représentées dans la commission de gestion, et vous savez parfaitement bien, Madame Hagmann, quels sont les principes de calcul. Du reste, pendant longtemps, la comptabilité des Cheneviers incluait également les comptes du site de compostage. Je crois que, sur ce point, vous avez facilement les moyens, en tant que magistrat communal, d'être totalement rassurée, au cas où il y aurait encore, à vos yeux, la moindre ambiguïté à ce sujet.

Deuxièmement : je tiens tout de même à vous rappeler, en ce qui concerne les incertitudes évoquées par M. Gardiol, que le site du Nant-de-Châtillon traite actuellement 10 000 tonnes de déchets par an. Nous allons accroître la capacité de cette installation pour passer de 10 000 à 17 000 tonnes. Les collaborateurs qui travaillent au Nant-de-Châtillon ont réussi jusqu'ici à maîtriser la technologie adaptée pour traiter ces grandes quantités de déchets. Il n'y a aucune raison d'avoir de la suspicion ni à cet égard ni en ce qui concerne les technologies envisagées pour augmenter la capacité de cette usine.

Troisièmement : vous vous posez la question, Madame Hagmann, de savoir si nous ne sommes pas en train de voir trop grand. Je crois que nous voyons juste. Actuellement, dans le canton de Genève, les installations dont nous disposons ne parviennent pas à traiter tous les déchets compostables qui sont d'ores et déjà amenés par les usagers, cela alors même que dans une grande partie du canton - je pense notamment à la Ville de Genève qui représente tout de même la moitié de la population de ce canton - peu d'efforts ont été faits en matière de récupération de déchets organiques. Si ces efforts ont été très modestes, c'est notamment parce que l'on savait qu'il nous manquait les installations nécessaires pour traiter les déchets récoltés.

Aujourd'hui, le Nant-de-Châtillon est en situation de saturation. Ce site conçu pour 10 000 tonnes de déchets se trouve actuellement avec un apport de 12 000 tonnes. Vous savez mieux que moi, Madame, ce qu'il en est dans votre région, à Vandoeuvres, et dans les régions environnantes, puisque l'installation actuelle du GICAL n'arrive plus - et de loin - à répondre aujourd'hui à la demande. Comme vous le savez parfaitement bien, les quantités sont suffisantes dans la zone de récolte du GICAL pour que l'installation prévue puisse fonctionner dès demain. Vous le savez tellement bien que vous êtes préoccupée, à juste titre, par la perspective que, si le centre de compostage nécessaire ne peut pas être créé, toutes les communes de cette zone d'apport seront contraintes de faire incinérer les déchets, et de le faire de façon très coûteuse pour les communes puisqu'il en découlera un surcoût de l'ordre de 30 à 50%.

J'en viens enfin à la conclusion de votre intervention pour vous dire encore une fois, et devant ce Grand Conseil, que le département est particulièrement attaché, sur ce dossier comme sur d'autres, à mener à bien nos projets en matière de gestion des déchets en concertation étroite avec les communes et les usagers. Cela n'est pas seulement une affirmation que je fais devant cette assemblée, cela résulte de la façon dont nous avons jusqu'ici mis sur pied ensemble le plan de gestion des déchets. Vous savez que la commission qui s'est occupée de la révision de ce plan de gestion des déchets était présidée par un magistrat communal. Il s'agissait du maire de la ville de Carouge. Dans cette commission, plus d'un tiers des membres étaient des magistrats communaux. Vous savez qu'il en ira de même aussi bien dans la commission de gestion de l'usine des Cheneviers que dans la commission de gestion des déchets prévue par le projet de loi sur les déchets que avez renvoyé en commission lors de cette session.

En matière de zones d'apport, à plusieurs reprises et publiquement, j'ai donné la garantie à toutes les personnes qui sont en train de se lancer dans le cadre de sites de récupération - le Nant-de-Châtillon, le GICAL à Vandoeuvres et également l'installation qui se fera à Bellevue - que nous partagerons les déchets organiques, si cela est nécessaire, au prorata de l'importance de nos installations respectives. En d'autres termes, la question de savoir comment les zones d'apport sont dessinées sur les cartes n'a qu'une importance secondaire. Ce qui a de l'importance, c'est la garantie d'avoir les quantités de déchets nécessaires pour faire tourner les installations. Comme vous m'y invitez encore une fois, je répète cette assurance et j'y ajoute cette assurance supplémentaire qu'aux yeux du département il est important que nous puissions mener ensemble cette politique ambitieuse de gestion des déchets.

Cela implique que nous allons nous entraider les uns et les autres. Les communes ont beaucoup aidé l'Etat pour mettre sur pied sa politique de gestion des déchets. L'Etat aidera, si cela est nécessaire, les communes pour que l'on puisse réaliser cette politique. J'espère ainsi vous avoir suffisamment rassurée pour que non seulement vous-même, Madame la maire et Madame la députée, votiez ce projet de loi, mais qu'également il se trouve quelques autres voix sur vos bancs pour l'adopter également.

Présidence de M. Jean Spielmann, président

M. Alain-Dominique Mauris (L). Faudra-t-il augmenter l'impôt communal de Bernex d'un centime pour offrir aux Bernésiens et à la région - dont le vice-président de notre parlement est un éminent habitant - une pince à nez ? Tout vient à point à qui sait attendre, mais à quel prix ! Celui qui est le plus cher, le temps de la patience. Le temps de croire que l'autorité, sensibilisée par les relents nauséabonds subis par les villageois de Bernex et de la région, allait enfin y prêter attention.

Ce soir encore, Mesdames et Messieurs, tout le monde retient son souffle. Non seulement à cause des odeurs, un peu plus rares par temps froid, mais dans l'attente du vote du parlement. N'osant pas trop y croire, plusieurs habitants voulaient amener ce soir une à deux tonnes de déchets pour recouvrir notre cour extérieure, afin que l'assemblée puisse vraiment se rendre compte à quel point ces odeurs sont nauséabondes et insupportables. Parmi nous, certains n'y prêtent toujours pas attention, ceux-là mêmes qui sous d'autres cieux dans notre canton, à pleines narines, respirent l'air pur de leur région. Eh bien oui, sachez qu'à Bernex et dans la région il y a des personnes qui aspirent aussi à respirer un jour à pleines narines l'air pur de Châtillon. Ce d'autant plus que le coût d'investissement de 8,6 millions - important, il est vrai - est couvert par les recettes des déchets traités.

La description de ce projet, déjà étudié par M. Claude Haegi et repris par M. Cramer, montre que c'est un bon projet. Je vous encourage à ne point tarder davantage et à voter ce projet de loi porteur de solutions et innovant dans le domaine de l'environnement. Les habitants de toute une région vous remercient.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur. J'aimerais répondre à M. Gardiol en disant que la réponse à sa question figure dans le projet. Dans l'hypothèse d'une distribution gratuite du compost, le transport et l'épandage seraient à la charge de l'usager.

En ce qui concerne la question des odeurs évoquée par Mme Hagmann, la méthanisation a été prévue pour éliminer ces odeurs. Je tiens à dire, d'autre part, que cette installation est largement financée puisque non seulement le coût sera baissé à 130 F la tonne, alors qu'aujourd'hui il est à 156 F, mais que de ce fait nous disposerions, le cas échéant, de 20 F de marge sur chaque tonne produite pour amortir cette installation.

M. Walter Spinucci (R). Nous n'avions pas besoin des paroles rassurantes du président Cramer pour nous convaincre du bien-fondé de ce projet. Nous le soutiendrons parce que nous le trouvons très bon, voire excellent. Nous le soutiendrons par solidarité avec la population de Bernex. Nous savons ce qu'elle souffre lorsque les odeurs nauséabondes se dégagent de la station de Châtillon. Nous le soutiendrons aussi et surtout, peut-être, parce que nous ne voulons plus payer 215 F la tonne d'ordures compostables que nous récoltons avec beaucoup de soin dans nos communes. Vous avez notre appui, Monsieur le président.

M. Bernard Annen (L). Je n'entendais pas nécessairement prendre la parole ce soir, mais je ne peux m'empêcher de répondre à un certain nombre d'assertions. Ainsi, par exemple, lorsqu'un avocat me donne des leçons d'économie, je me pose toujours des questions, car, pour lui, il s'agit de faire passer son message plutôt que d'étudier les chiffres. Dans le cas qui nous intéresse, j'ai pu poser un certain nombre de questions auxquelles il n'a naturellement pas été répondu. J'aimerais simplement vous donner un exemple : en général, lorsqu'un investissement est étudié à la commission des travaux, tout le monde s'attache à essayer d'avoir le prix de la dernière bride qui serre un tuyau d'écoulement. Dans le cas qui nous occupe, il nous est proposé un prix en bloc, point, terminé ! C'est dire à quel point il nous est facile de nous prononcer sur ce genre d'investissement.

Cela étant, il me paraît quand même relativement important de relever ce qui suit. Tout d'abord en ce qui concerne Vandoeuvres : il est vrai que le GICAL ne nous regarde pas, que nous ne nous prononçons pas là-dessus, mais en attendant c'est bien l'Etat qui devra donner l'autorisation pour cette usine qui se trouve sur un terrain agricole. Or personne ne nous en parle. Au Nant-de-Châtillon, le site se trouve sur une zone forêt. Personne ne nous en parle. Pourtant, lorsqu'il y a, dans un endroit ou dans un autre, une petite entorse au règlement, quelles réactions, quelles demandes en tout genre n'entendons-nous pas, dans les rangs d'en face, pour empêcher une construction ! Force est de constater qu'il y a deux poids et deux mesures.

De même, lors des demandes d'autorisation de construire, les gens qui y sont opposés se manifestent et demandent des études d'impact sous n'importe quel prétexte. Or, aujourd'hui, j'apprends qu'il y a des normes OMS, mais tout le monde préfère les oublier. Personne ne veut s'atteler à les examiner. Nous aimerions à cet égard avoir un certain nombre d'informations.

En matière de vision d'ensemble dans ce domaine, M. Cramer nous a expliqué qu'il y avait un plan global avec une répartition rive-gauche, rive-droite, Nant-de-Châtillon, pour les usines de compostage. Naturellement, au niveau des mécanismes économiques, un certain nombre de questions lui ont été posées. Que nous a-t-il répondu ? Qu'il déciderait lui-même quelles sont les communes qui iront dans tel centre ou dans tel autre. C'est parfaitement scandaleux. C'est une méthode dictatoriale et rien d'autre. Nous attendons par conséquent quelques éclaircissements dans ces domaines respectifs.

Cela étant, je ne veux pas nier les nuisances mentionnées par notre collègue, maire de la commune de Bernex. C'est vrai que nous devons faire quelque chose mais il faudrait peut-être, cher collègue, vous tourner vers ceux qui, à l'époque, ont été responsables de la construction du Nant-de-Châtillon, alors que nous avions, nous libéraux, refusé la première étape en disant qu'il allait y avoir des nuisances. En l'état, je me réjouis de voir que nos adversaires aujourd'hui veulent réparer les erreurs du passé et nous allons soit nous abstenir, soit voter ce crédit, car effectivement ce qui existe aujourd'hui au Nant-de-Châtillon est une mauvaise expérience que nous devons corriger.

Cela dit, Monsieur le président du département, nous attendons de votre part que des règles du jeu soient établies, qu'elles soient acceptées par tout le monde. Il n'est plus possible aujourd'hui de vous entendre tenir le discours de tout à l'heure et d'entendre les maires des communes avoisinantes et d'ailleurs dire exactement le contraire. Ainsi que je vous l'ai dit en commission, je vous crois, je vous fais confiance, mais sachez, Monsieur le président, que nous serons derrière pour savoir si vous respectez vos engagements.

M. Pierre Meyll (AdG). Il est évident que nous n'allons pas faire ici le procès du GICAL et des circonstances dans lesquelles ce projet a été réalisé. S'agissant du site de Châtillon, je crois qu'il faudrait quand même insister sur un argument d'importance, c'est que nous pouvons obtenir une subvention fédérale de 700 000 F pour autant que les travaux commencent avant janvier de l'année prochaine. N'oublions pas qu'une somme de 700 000 F est en jeu. Monsieur Annen, vous mettez en doute les prix indiqués, mais il y a quand même des conditions qui sont prévues et qui seront tenues. Je pense que vous avez pu poser en commission passablement de questions auxquelles il a été répondu. Que quelques réponses vous aient paru un peu bizarres, je peux le comprendre. Quant à la position de M. Gardiol, elle est totalement différente. Je dirais même qu'il pourrait y avoir là certains liens d'intérêt qui ont été évoqués récemment, mais cela ne concerne pas le GICAL, je le précise. En conclusion, il faut voter ce projet, car je vous le rappelle, à vous qui êtes si attachés aux intérêts du canton : 700 000 F sont en jeu. Pour les libéraux, ce n'est peut-être rien, mais pour nous c'est beaucoup.

M. Christian Grobet (AdG). Je vois que M. Annen continue de mener des batailles d'arrière-garde. Je rappellerai simplement qu'au moment où il s'est agi d'agrandir l'usine des Cheneviers pour faire face à l'augmentation des déchets, le Grand Conseil a voulu que soit mis au point un plan de traitement des déchets par recyclage et récupération. Il est vrai que les députés de votre parti n'étaient pas chauds à l'égard de cette autre forme de gestion des déchets. Vous étiez attaché à l'élimination par incinération, dont on ne peut pas se passer, il est vrai, en l'état actuel des choses, mais qui pose quantité de problèmes. A l'époque, vous traîniez les pieds pour mettre en place des sites de compostage. Le premier, réalisé au Nant-de-Châtillon, a effectivement posé des problèmes, mais la décharge elle-même provoquait de longue date des plaintes de la part de la commune de Bernex en raison des odeurs qui en émanaient. Je crois donc qu'il ne faut pas tout mettre sur le dos du compostage.

Cela étant dit, je me félicite que M. Cramer ait pris cette affaire en mains. J'espère que le concept qui avait été mis au point il y a six ans, d'entente avec les communes genevoises, et qui prévoyait la réalisation de trois centres cantonaux de compostage pour faire face à la grande quantité de déchets organiques susceptibles d'être compostés, pourra être mis en place. Il est vrai, et nous l'avions toujours dit à l'époque, que la mise en place de ces centres n'est pas évidente, car il y a des problèmes de nuisances et il n'est pas facile de trouver des sites. Il n'empêche que c'est tout de même la solution la plus écologique en ce qui concerne le traitement de nos déchets.

Nous soutiendrons bien entendu ce projet, en remerciant M. Cramer d'avoir contribué à sortir de l'ornière cette voie du compostage qui, malheureusement, a pris quatre ans de retard sous le gouvernement monocolore. Nous espérons que les deux autres centres cantonaux verront le jour. J'aimerais dire enfin à M. Annen qu'à moins que ma mémoire ne me trahisse, le Grand Conseil, dont vous faisiez partie à l'époque, a bel et bien voté pour le site de Châtillon une zone d'équipements publics. Par voie de conséquence, les installations ne se trouvent ni en zone agricole, ni en zone de bois et forêts, mais en zone d'équipements publics.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Je tiens à revenir brièvement sur l'intervention de M. Annen, qui s'est mieux terminée qu'elle n'avait commencé. Je souhaite revenir sur les trois points qui ont été abordés. Le premier : Monsieur Annen, je ne sais pas qui peut donner des leçons d'économie à l'autre dans cette affaire, mais ce que je puis dire, en tout cas, c'est que ce n'est pas grâce à vous assurément que ce projet de loi est aujourd'hui devant le Grand Conseil. Ce que je puis dire aussi, c'est que la guerre de tranchées, les manoeuvres dilatoires que vous avez utilisées en commission et que vous continuez d'utiliser lors de cette séance sont susceptibles de coûter 700 000 F à notre canton. C'est là au moins une constatation comptable qui est simple.

Une voix. Une menace !

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Non, ce n'est pas une menace, comme je l'entends dans cette salle. C'est un fait. La Confédération nous garantit un versement de 700 000 F pour autant que le projet de loi soit exécutoire d'ici la fin de l'année et que les travaux puissent commencer au mois de janvier. Si tel n'est pas le cas, c'est-à-dire si un vote n'intervient pas à cette séance, nous n'obtiendrons pas cette subvention. Si vous êtes en mesure, Mesdames et Messieurs les députés, de voter aujourd'hui, c'est - je tiens à le dire - grâce au rapporteur, M. Velasco, qui a bien voulu rédiger son rapport en vingt-quatre heures, parce que les méthodes qui ont été utilisées en commission, la façon dont on a voulu différer le débat, auraient eu pour effet, sans cette célérité, que l'on n'aurait pas pu voter aujourd'hui.

Quant au second point, Monsieur Annen, que vous avez abordé. En ce qui concerne la définition des sites, ici aussi vous savez précisément ce qu'il en est. Il existe dans ce canton un plan cantonal de gestion des déchets. M. Grobet y a fait allusion tout à l'heure. Ce plan a été réactualisé par le Conseil d'Etat et, au mois d'octobre, la nouvelle version du plan est entrée en vigueur. Ce plan, je l'ai rappelé tout à l'heure, n'est pas le fait du président du département. Ce plan a été élaboré par une commission dont l'essentiel des membres étaient des magistrats communaux et également des industriels qui travaillent dans l'industrie des déchets. Ce sont les destinataires de ces installations qui ont décidé ce qu'elles devaient être, où elles devaient être et quelles étaient les zones d'apport de ces différents sites. L'assurance que je donne en plus et qui va au-delà de ce plan consiste à dire que, si les zones d'apport, telles que définies dans le plan, ne sont pas suffisantes, nous procéderons à une répartition différente de façon à ne pas défavoriser les trois installations prévues dans ce plan.

En ce qui concerne la zone sur laquelle va se construire le Nant-de-Châtillon, effectivement la question du déclassement se pose. Vous savez, Monsieur Annen, pour l'avoir entendu en commission, que j'ai approché le DAEL pour que nous engagions les procédures nécessaires à ce déclassement, de sorte que votre Grand Conseil va être prochainement saisi d'un projet de loi à cet effet. J'ajoute que les autorisations de construire permettant aussi bien la réalisation du centre de compostage de Vandoeuvres que celle du centre de compostage du Nant-de-Châtillon ont déjà été délivrées il y a une année ou sont sur le point d'être délivrées, de sorte que, dès l'instant où vous aurez voté et une fois le délai référendaire échu, nous pourrons immédiatement engager les travaux.

Espérant vous avoir ainsi apporté les quelques renseignements qui manquaient encore, je conclus en étant confiant quant à votre vote.

M. Claude Blanc (PDC). Je ne sais pas si j'ai bien entendu ce qu'a dit tout à l'heure M. Grobet, mais j'ai cru comprendre qu'il affirmait que ces terrains avaient été déclassés en zone d'équipement public... (L'orateur est interpellé.) Je ne sais pas, Monsieur le président, si la mémoire de M. Grobet devient tout à coup défaillante, mais j'ai participé aux travaux de la commission et je trouve la confirmation à la page 13 du rapport de M. Velasco : il semblerait que non seulement ces terrains n'ont pas été déclassés, qu'une partie serait en zone agricole mais qu'une autre partie serait en zone de forêts. Ce qui est un comble quand on se souvient du pointillisme de M. Grobet concernant les destinations de zones et l'attention qu'il portait à ce que personne ne puisse déborder d'une zone sur une autre. Je croyais - comme vous, Monsieur Grobet - que ces terrains avaient été déclassés depuis longtemps, qu'avant de construire la décharge de Châtillon vous auriez pris soin de faire déclasser ces terrains. Tel n'a pas été le cas, semble-t-il, puisqu'il nous a été affirmé que ces terrains n'avaient pas été déclassés. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Monsieur Grobet, qui voulez donner des leçons aux autres, c'est encore un de vos héritages que nous avons là. Vous nous avez dit tout à l'heure que cette affaire avait dormi pendant le gouvernement monocolore. Je constate que cette affaire a été mal traitée avant le gouvernement monocolore, et devinez qui était responsable de cette affaire avant le gouvernement monocolore ? Cela étant, je voterai le projet car c'est un bon projet.

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Loi(7882)

ouvrant un crédit d'investissement avec subvention pour la construction d'une installation de méthanisation des déchets organiques sur le site de Châtillon

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Art. 1 Crédit d'investissement

1 Un crédit de 8 646 000 F (hors TVA et y compris renchérissement) est ouvert au Conseil d'Etat pour la construction d'une installation de méthanisation sur le site de Châtillon.

2 Il se décompose de la manière suivante :

• construction de l'installation 7 465 000 F

• équipements complémentaires 615 000 F

• divers et imprévus 300 000 F

• prestation de management de projet 180 000 F

• attribution au fonds de décoration 1 % 86 000 F

• renchérissement           0 F

• Total 8 646 000 F

Art. 2 Budget d'investissement

Ce crédit est réparti en tranches annuelles inscrites au budget d'investissement dès 1998, sous la rubrique 69.79.00.541.37.

Art. 3 Subvention fédérale

Une subvention fédérale au titre de la relance économique est prévue. Elle sera comptabilisée sous la rubrique 69.79.00.660.37 et se décomposera comme suit :

• montant retenu pour la subvention 8 646 000 F

• subvention 700 000 F

• financement à charge de l'Etat 7 946 000 F

Art. 4 Couverture financière

Les charges financières en intérêts et en amortissement du crédit sont couvertes par une adaptation des recettes du site de Châtillon.

Art. 5 Amortissement

L'investissement est amorti chaque année sous la forme d'une annuité constante et est porté au compte de fonctionnement du site de Châtillon.

Art. 6 Utilité publique

L'ensemble des travaux résultant de la réalisation prévue à l'article 1 est décrété d'utilité publique au sens de l'article 3, alinéa 1, lettre a, de la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, du 10 juin 1933.

Art. 7 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.