République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 24 avril 1998 à 17h
54e législature - 1re année - 7e session - 16e séance
PL 7838 et objet(s) lié(s)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
décrète ce qui suit :
Art. 1 Crédit extraordinaire d'investissement
Art. 2 Budget d'investissement
Art. 3 Financement et couverture des charges financières
Art. 4 Amortissement
Art. 5 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève
Art. 6 Cas d'urgence pour une dépense nouvelle
Généralités
Tout traitement de l'information par des moyens informatiques comporte une gestion de dates. Le problème posé par l'an 2000 est universel, toute entreprise ou administration informatisée y est confrontée et sera amenée à le résoudre.
Ce problème trouve ses racines dans l'origine de l'informatisation :
• le nécessaire gain de place, sur les cartes perforées d'abord, puis sur les espaces disques ensuite ;
• la réduction des temps de saisie.
Cette double préoccupation a été amplifiée par l'état de l'art des systèmes informatiques qui délivrent le millésime sur deux positions. Ceci en conformité avec le phénomène culturel qui conduit à s'exprimer avec deux chiffres.
En outre, les responsables des systèmes informatiques ont sous-évalué la durée de vie des systèmes informatiques qu'ils ont mis en place. Plutôt que de reconstruire des systèmes entiers, les entreprises ont le plus souvent préféré ajouter des programmes supplémentaires aux programmes existants afin de répondre à meilleur compte à leurs besoins de traitements administratifs. Le coeur de nombreuses applications informatiques bat encore et toujours au rythme des programmes des années septante.
Dimension du problème
D'un point de vue purement technique, pris unitairement au niveau d'un programme, la mise à niveau consiste à changer un format de date de six à huit positions. C'est une tâche simple.
La dimension du problème provient du fait qu'un système informatique est un ensemble d'applications, que chaque application est un ensemble de programmes et qu'un programme est un ensemble de lignes de commandes. Au bout du compte, ce sont des millions de lignes qu'il faut vérifier et quelques-unes qu'il faut changer. Puis, il faut tester les systèmes et les mettre en production.
Toutes les catégories informatiques sont concernées : informatique de gestion, industrielle, médicale, moyens généraux et ce, aussi bien dans leur finalité applicative qu'au niveau des moyens de production (matériels et logiciels) et de développement. Il n'y a pas, dans l'histoire récente, de problème comparable.
Il faut également souligner le caractère "; électronique " de ce problème et non pas seulement sur les applications informatiques. L'analyse détaillée de la situation sur le terrain montre que les dates sont partout. Dans les ordinateurs et les programmes de gestion, mais également dans les robots, les automates industriels, les centraux téléphoniques, les systèmes de mesure et d'analyses médicales, les contrôles et systèmes de surveillance, les alarmes, les ascenseurs et également les magnétoscopes, les horloges, les agendas électroniques, ...
La date est stockée dans les composants électroniques puis distribuée aux différentes "; couches " des systèmes. Le champ couvert par le problème du passage est extrêmement vaste et large en technologie : matériels, logiciels, systèmes d'exploitation, les données, toute la technologie est concernée, mais ce qui ne veut pas nécessairement dire que rien ne fonctionnera au 1er janvier 2000. Cependant, de récents tests effectués sur des PC achetés en 1996 ont démontrés qu'ils ne sont pas totalement compatibles avec l'an 2000.
L'an 2000 n'est donc pas qu'un problème d'informatique. Il s'agit plutôt d'un problème de représentation technologique d'une donnée universelle dans les composants matériels (électroniques) et immatériels (logiciels).
Délais
Il est impératif de réussir les projets an 2000 dans les délais : cette date limite et l'avalanche des problèmes à régler est telle que la production informatique serait perturbée pendant plusieurs semaines voire plusieurs mois si les tests préalables ne sont pas réalisés d'ici là. Ce projet est prioritaire sur tout autre projet. Il faut relever que pour certains domaines (souvent stratégiques), la date butoir n'est pas le 1er janvier 2000 mais largement avant.
Quelques caractéristiques
Par rapport à des projets classiques, le projet An 2000 comporte certaines particularités évidentes, mais qui méritent d'être rappelées :
• Οn ne peut pas repousser l'échéance, mais c'est probablement la toute première fois que les entreprises, et les administrations avec leurs informaticiens seront confrontées à une date butoir sur laquelle on ne peut réellement rien faire.
• Les corrections peuvent coûter très cher et le retour sur investissement est parfois nul. On ne gagne rien à passer l'an 2000, si ce n'est la pérennité du service au citoyen.
• Le temps est l'ennemi numéro 1. Chaque journée qui passe est une journée perdue qui n'est pas rattrapable. L'an 2000 est réellement une course contre la montre ; il reste 650 jours avant l'an 2000 dont environ 450 ouvrables.
• L'an 2000 est bissextile : il faut passer le 1er janvier 2000, mais aussi prévoir le 29 février 2000 et le 31 décembre 2000 qui représente donc le 366e jour de l'année.
La démarche
La résolution du problème an 2000 passe en grande partie par une optimisation du temps qui reste jusqu'au passage effectif au 01/01/2000. La démarche adoptée se décline en 6 étapes principales :
• lancement du projet d'entreprise qui comporte entre autre la prise en compte de la problématique; la sensibilisation des cadres des départements
• les inventaires (machines, matériels, logiciels, applications)
• définition des plans d'actions
• mise en oeuvre des plans d'actions (modifications, remplacement) et tests
• installation
• surveillance, plan de crise 31 décembre 1999, 29 février 2000, 31 décembre 2000.
Organisation du projet et objectifs
Compte tenu de l'importance de la tâche et des aspects stratégiques, il est important de piloter l'ensemble des travaux. Un comité an 2000 a été constitué. Ses objectifs et sa fonction sont :
• communication et information des instances administratives et politiques,
• plan de formations, de sensibilisation,
• coordination, déploiement,
• choix d'outils, orientations stratégiques,
• contrôle d'avancement,
• liaison avec les groupes opérationnels.
L'objectif du comité an 2000 peut se résumer en une phrase : "; faire le nécessaire pour que l'Etat de Genève puisse passer le cap de l'an 2000 en maintenant ses prestations ".
Le comité an 2000 a également cerné les limites de son action : applications informatiques, matériels et logiciels de base, réseaux et télécommunication. Par contre, chaque département, chaque service devra examiner les éventuels impacts de l'an 2000 pour tous les appareils et systèmes comprenant des composants électroniques.
Etat d'avancement du projet
Fin 1996 déjà, le centre des technologies de l'information a cherché à évaluer l'impact an 2000 dans le cadre de l'enquête de reprise des 40 sites informatiques de l'Etat. Cette enquête a été réalisée sur la base d'un questionnaire dans lequel figurait la question "; Votre application est-elle compatible avec l'an 2000 ? ".
Le projet an 2000 proprement dit de l'Etat de Genève a effectivement démarré en mars 1997 avec la mise sur pied d'une équipe de projet prenant en compte aussi bien les questions d'exploitation que les questions applicatives. Lors du démarrage du projet, une séance d'information a été faite à l'intention de la maîtrise d'ouvrage et de la maîtrise d'oeuvre.
Se fondant sur la première enquête de 1996, un inventaire systématique plus fouillé entièrement dédié à la problématique de l'an 2000 a été réalisé entre octobre 1997 et février 1998.
Pour la réalisation de cette étape, une assistance externe a été sollicitée. Un appel d'offres a été lancé début juillet 1997. Un consortium de deux entreprises a été choisi parmi 14 sociétés. Le choix de ce consortium a été basé sur ses bonnes connaissances de l'informatique de l'Etat, sa maîtrise des principales plates-formes, son approche et ses références an 2000.
L'inventaire a livré les résultats suivants :
• 23 systèmes d'exploitation différents ;
• environ 180 machines ;
• 430 applications ;
• 44 000 programmes ;
dont 15 000 ne sont pas compatibles avec l'an 2000.
Parmi les applications non compatibles dont la liste est jointe en annexe, figurent notamment :
• le paiement des prestations (OCPA)
• les paies (Office du personnel et DIP)
• le registre des entreprises (OCIRT)
• la gestion des horaires
• la production, la perception, la comptabilisation de l'impôt (AFC)
• les comptabilités des départements (dont la comptabilité intégrée) et la gestion de la trésorerie/caisse
• la gestion du personnel
• les applications des offices des poursuites (en raison du retard pris par le projet en cours)
• les applications du service des automobiles et de la navigation
• les applications de la protection civile
• certaines applications de la police.
Coût du projet
Pour cerner la charge de travail et le coût d'adaptation à l'an 2000, il n'y a pas d'autre démarche possible que d'utiliser les ratios observés par d'autres entreprises et administrations. Aidé dans ce travail par des spécialistes du consortium, le comité an 2000 est arrivé à la conclusion qu'il fallait compter une charge globale d'environ 30 000 jours / homme (dont 4000 pour l'AFC). Sur la base d'un coût journalier maximum de 1500 F (prix tenant compte de la surenchère prévue sur le marché de l'emploi dans le domaine de l'informatique à l'approche de l'an 2000), la dépense globale maximale est estimée entre 40 et 45 millions, y compris les équipements.
Cette fourchette est parfaitement dans la norme des grandes entreprises qui prévoient un investissement correspondant aux dépenses courantes en matières informatiques durant une année. La presse a cité par exemple les coûts que représente le passage à l'an 2000 pour quelques grandes entreprises suisses et pour la Confédération :
• SBS 400 millions ;
• Crédit Suisse 160 millions ;
• SAirGroup 130 millions ;
• UBS 100 millions ;
• Zürich plus de 100 millions ;
• Migros 40 millions ;
• Winterthur 30 millions ;
• Confédération 100 millions.
Cependant, tous les travaux d'adaptation des applications à l'an 2000 ne seront pas confiés à des entreprises externes. Elles disposent certes d'outils permettant d'automatiser une partie des adaptations, mais elles n'ont pas la connaissance des différentes applications qu'ont nos collaborateurs.
Le principal handicap que doit surmonter toute entreprise ou administration est d'absorber dans un délai relativement court un volume de travail considérable avec un effectif stable. Le personnel du centre des technologies de l'information ne comprend au plus que quatre-vingts collaborateurs dans le secteur développement et maintenance. Si par hypothèse, l'on décidait de suspendre tous les projets en cours et la maintenance quotidienne et d'affecter toutes les forces de travail au problème de l'an 2000, il faudrait près de 3 ans pour parvenir à adapter tous les programmes.
Dans le cas présent, le Conseil d'administration des technologies de l'information a décidé de réaliser parallèlement à l'adaptation des applications à l'an 2000, la plupart des projets en cours et les maintenances prévues afin de ne pas dégrader le niveau de prestations offertes par l'administration.
Le cas de l'administration fiscale (AFC)
Les tâches inhérentes à la mission de l'AFC et leur ampleur ont justifié un recours aux technologies de l'information dès leur apparition. Le système informatique de l'AFC a ainsi été constitué par des "; couches successives " à partir des années 60. L'origine du système actuel remonte, quant à lui, au milieu des années 70.
La totalité des activités de l'AFC fait aujourd'hui appel à l'informatique et la notion de "; temps " ou de "; date " est évidemment omniprésente. L'AFC est d'ailleurs déjà confrontée à la problématique de l'an 2000 car certaines tâches impliqueraient dès aujourd'hui la saisie de dates postérieures au 31 décembre 1999. Les premiers traitements relatifs à la période fiscale 2000 débuteront dès février 1999. L'adaptation du système revêt donc un caractère extrêmement urgent.
Les premières conclusions du groupe de travail "; Etude préalable An 2000 " mandaté par le Centre des technologies de l'information, chargé de l'analyse globale de la problématique pour l'ensemble de l'Etat, ont mis en évidence le caractère particulièrement critique de cet aspect pour l'AFC. L'impact d'un échec aurait en effet des conséquences dramatiques sur le fonctionnement global de l'Etat et le risque que cela se produise est malheureusement très élevé.
Actuellement les activités de l'AFC sont gérées par trois sous-systèmes informatiques. Le plus ancien, Unisys, qui traite la gestion des adresses, la production des personnes physiques, la perception et la comptabilité doit être intégralement adapté. Le sous-système Magic avec lequel ont été développés les rôles et quelques applications périphériques doit être partiellement adapté à l'an 2000. Le sous-système Oracle Unix utilisé pour développer le projet Impôts assistés par ordinateur est compatible avec l'an 2000, sous réserve des incidences sur les interfaces avec les autres sous-systèmes.
Pour des applications aussi complexes, sensibles et d'une conception en partie très ancienne, l'investissement est très important et le risque élevé. Le nombre de programmes, leur imbrication, les nombreuses interfaces rendent l'adaptation à l'an 2000 particulièrement délicate. A titre d'exemple, le sous-système Unisys est composé de 1348 programmes dont plus de la moitié devra être corrigée. Les analyses effectuées ont démontré que l'adaptation de tous ces programmes de l'administration fiscale correspond à environ 4000 jours/homme de travail. auxquels il faudra ajouter 500 jours/homme de ressources internes (essentiellement les utilisateurs pour la préparation et la conduite des tests). Toutes les phases du processus ont été prises en considération dans cette évaluation : l'analyse des changements, la définition d'une stratégie de test, le développement d'un plan d'implantation, la programmation, la préparation des tests, les tests de non-régression, les tests de l'an 2000, la mise en production, l'uniformisation des changements, etc.
Selon les estimations du groupe de travail, environ 73 % de la charge totale de travail informatique incombera à des ressources externes. Cela nous donne une estimation de 3,9 millions de F (2600 jours à 1500 F).
L'état précaire des applications de l'AFC et leur intégration réciproque nécessiteront encore la réalisation de nombreuses maintenances correctives délicates, non directement liées à l'an 2000. Cet aspect constituera un facteur de risque supplémentaire et absorbera une grande partie des compétences internes.
L'adaptation des programmes ne suffira pas à elle seule à garantir le passage à l'an 2000. Des actions de stabilisation technique des trois sous-systèmes seront d'autant plus nécessaires étant donné que le système actuel est, du moins dans sa grande partie, appelé à perdurer au moins jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi sur l'imposition des personnes physiques (LIPP) au premier janvier 2001.
La réalisation de ces mesures, sans ajouter de nouvelles fonctionnalités, permettra toutefois une stabilisation technique du système, une relative fiabilisation des traitements et des résultats ainsi qu'une amélioration de l'intégrité des données.
Parmi les mesures susceptibles de minimiser les risques, le groupe de travail a identifié la possibilité d'acquérir des outils ou des progiciels. Un travail de prospection est censé permettre de recenser les éventuelles opportunités.
Le coût de cette opération de stabilisation est chiffré à 6,2 millions de F.
Il s'agira aussi de conduire simultanément les travaux de développement, l'essentiel des tests et les grands traitements de masse. L'acquisition et l'exploitation d'une deuxième machine destinée au développement et aux tests s'avère incontournable en raison des contraintes liées à la production courante et par mesure de sécurité (séparation des environnements tests et développement de celui "; production ").
Le coût global du volet matériel pourra atteindre 1,6 million de F.
Dans le cas présent, la difficulté est accrue par le fait qu'une partie des équipements électroniques ne passera pas, elle non plus, l'an 2000. Il faut donc intégrer dans la démarche leur remplacement. L'objectif étant de doter l'ensemble des collaborateurs de l'AFC de matériel performant en mesure d'accueillir les nouveaux outils bureautiques et les futures applications nécessaires à l'accomplissement de leurs tâches.
Le coût de cette opération, y compris l'adaptation des outils bureautiques et la formation des utilisateurs, se monte à 1,6 million de F.
L'ampleur des tâches, la situation relativement difficile à laquelle l'AFC est confrontée depuis quelques années ainsi que le fait que les moments cruciaux de l'exercice d'adaptation à l'an 2000 correspondront avec les périodes les plus chargées de l'année en ce qui concerne ses prestations habituelles, rendent impératif un renforcement de la structure d'assistance à la maîtrise d'ouvrage. La complexité du problème et tout particulièrement l'évaluation constante des risques, leur maîtrise et la coordination des éventuels "; plans catastrophe " nécessiteront une structure de pilotage très performante et réactive. Une attention particulière devra être apportée à la certification des applications compatibles ou adaptées à l'an 2000.
A cet effet, les mesures suivantes sont prises :
• 3 postes de haut niveau durant au moins deux ans affectés à la cellule de crise dépendant directement de Mme Calmy-Rey, présidente du département des finances. Dès le projet de budget 1999, ces collaborateurs seront introduits dans les effectifs du département des finances, car ils constitueront à terme l'assistance à la maîtrise d'ouvrage dédiée à l'ensemble du département cette fois. Pour le deuxième semestre 1998, il est donc prévu 200 000 F environ.
• 3 autres postes, issus du Centre des technologies de l'information et du département des finances, sont également temporairement affectés à ce projet tout en restant budgétairement rattachés à leur centre de responsabilité.
• 2 postes sont entre autre prévus pour pouvoir provisoirement remplacer 2 collaborateurs de l'AFC qui seront "; sortis " de leurs activités habituelles (120 000 F/an x 2 postes x 2 ans, soit 480 000 F).
• 2 consultants hautement qualifiés, un familier du système d'information de l'AFC, l'autre dans la définition de stratégies et d'élaboration de jeux de tests, pour un montant de 400 000 F.
• Enfin, il est prévu une enveloppe globale de 80 000 F pour l'équipement informatique, le mobilier, etc. nécessaires à ces personnes.
L'AFC est confrontée à une autre échéance rapprochée et incontournable: l'adaptation des dispositions relatives à l'imposition des personnes physiques à la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes. L'ultime délai pour l'adaptation des lois cantonales expire le 31 décembre 2000. Le Grand Conseil a déjà adopté le volet "; imposition dans le temps " (loi sur l'imposition dans le temps des personnes physiques) le 4 décembre 1997. Le Conseil d'Etat a ensuite reporté du 1er janvier 1999 au 1er janvier 2001 son entrée en vigueur. L'intégralité de la future LIPP fait actuellement l'objet d'un examen par la commission fiscale et sera prochainement soumise au Grand Conseil.
Les modifications légales auront des incidences sur l'ensemble du processus d'imposition des personnes physiques et du système informatique car elles toucheront aux principes d'assujettissement, à la détermination de l'assiette fiscale, à la production, à la comptabilisation des bordereaux dans les comptes des contribuables et de l'Etat ainsi qu'à la procédure de recouvrement.
L'analyse des incidences revêt un caractère très urgent et doit être menée parallèlement aux autres actions.
L'AFC sera en parallèle engagée dans un projet de "; refonte ", démarche visant à la réorganisation de son système d'information et dont l'objectif est un système intégré, construit autour d'une base de données unique. L'étape préalable est représentée par la reconfiguration de ses processus, exercice qui sera mené au cours de l'année 1998 et qui aboutira à la définition de lignes directrices conformes à l'objectif final et cohérentes entre elles. Il s'agira ensuite de procéder à des analyses aboutissant à l'élaboration de cahiers des charges nécessaires à lancer la phase "; conception " des projets sectoriels: registre fiscal, taxation, perception et comptabilité. Les coûts de cette analyse se monteront à environ 1,2 million de F et sont essentiellement destinés à couvrir les frais d'intervention d'une société spécialisée dans la modélisation et la reconfiguration de processus administratifs.
Il serait trop risqué de viser une refonte intégrale immédiate du système d'information de l'AFC avec dans le même temps l'entrée en vigueur de la LIPP. Afin de permettre la transition, assurant la mise en oeuvre de la LIPP, entre le système actuel et le futur système intégré, il sera mis en production la première version, limitée aux fonctionnalités de base, d'une application. Il est donc prévu un montant de 2,5 millions de F.
La refonte totale du système d'information de l'AFC nécessitera au moins un investissement similaire. Un second projet de loi sera déposé vraisemblablement en l'an 2000 auprès du Grand Conseil.
Récapitulation des montants selon la nature :
• correction des programmes existants 3 900 000 F
• mesures de fiabilisation de l'existant 6 200 000 F
• équipement, matériel, exploitation 1 600 000 F
• renouvellement du parc, logiciels et formation 1 600 000 F
• assistance à la maîtrise d'ouvrage, consultants 1 200 000 F
• reconfiguration des processus 1 200 000 F
• première version des applications LIPP 2 500 000 F
Total : 18 200 000 F
L'estimation des différentes charges a été effectuée sur la base des indications communiquées par le Centre des technologies de l'information.
Portée du projet de loi et financement
Le présent projet de loi ouvre un crédit de 48,2 millions de francs, TVA comprise, mais sans le volume de travail interne. Ce montant devrait permettre la mise à jour des applications de l'administration. Ne sont pas concernés par ce projet de loi les systèmes de l'Université, ceux des établissements publics médicaux et autonomes.
Il va sans dire que les application stratégiques seront traitées en priorité absolue.
Comme le chiffrage des montants reste sommaire en raison des difficultés d'évaluation, il est prévu un niveau maximum par un crédit pouvant atteindre 48 200 000 F.
Ce montant permettra d'une part de recourir à des forces de travail externes pour adapter les programmes existants pour un montant estimé à 37,7 millions de francs, mais également de remplacer les équipements obsolètes qui ne sont pas compatibles avec l'an 2000 et dans certains cas d'acquérir des logiciels lorsqu'il est possible de répondre à des besoins standards avec des produits du marché pour environ 10,5 millions de francs. Quant aux collaborateurs de l'administration, le volume de travail qu'ils prendront en charge est évalué à environ 20 millions de francs.
Il ne devrait pas y avoir de nouveaux frais d'exploitation entraînés par cet investissement puisqu'il ne s'agit que d'adapter les applications existantes. Au contraire, dans certains cas, si le changement d'un équipement s'avère nécessaire, son coût d'entretien sera vraisemblablement revu à la baisse.
Par ailleurs, et en raison notamment de la situation particulière représentée par l'AFC, 18,2 millions F lui sont affectés spécifiquement.
Enfin, le contexte particulier de toute cette opération a rendu nécessaire l'engagement de dépenses et le lancement d'un appel d'offres (pour obtenir les forces externes indispensables) avant le dépôt et le vote par le Grand Conseil du présent projet de loi.
Par conséquent, il a été fait usage de la clause prévue à l'art. 6 de la loi établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'année 1998 (comme chaque année) "; cas d'urgence pour une dépense nouvelle " :
"; A titre exceptionnel, si des circonstances particulières empêchent absolument le Conseil d'Etat de consulter le Grand Conseil avant d'engager une dépense nouvelle, le gouvernement doit immédiatement après avoir engager la dépense transmettre au Grand Conseil un projet de loi la sanctionnant ".
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre à votre bienveillante attention le présent projet de loi.
Annexe: applications recensées non compatibles avec l'an 2 000 et devant faire l'objet d'une priorisation ultérieure
Dep
Service
Nom de l'application
DF
Administration fiscale
Comptabilité
DF
Administration fiscale
Perception
DF
Administration fiscale
Production
DF
Administration fiscale
Rôles (fichiers adresses)
DF
Administration fiscale
Comptabilité tourisme
DF
Administration fiscale
Gestion du personnel
DF
Administration fiscale
Rôle employeurs
DF
Administration fiscale
Saisie Magic
DF
Administration fiscale
Attestation LAMA
DF
Administration fiscale
Impôt source
DF
Administration fiscale
Gestion des comptes
DF
Administration fiscale
Mensualisation
DF
Administration fiscale
Traitement de fin d'années
DF
Administration fiscale
Statistiques
DF
Direction générale des finances de l'Etat
Comptabilité intégrée (utilisée par 7 départements et pour la consolidation)
DF
Direction générale des finances de l'Etat et Office du personnel
Docubase
DF
Economat cantonal
Economat cantonal
DF
Office du personnel
Assurances de l'Etat
DF
Office du personnel
Budget
DF
Office du personnel
Gestion des pensionnés
DF
Office du personnel
Paie
DF
Office du personnel
Service de santé
DF
Office du personnel
SigaGip Personnel
DF
Office du personnel
Evaluation des fonctions
DEP.
SERVICE
NOM DE L'APPLICATION
DF
Office du personnel
Gestion des cours du Centre de formation
DIP
Collège Calvin
ERSO
DIP
DGCO
Base de données élèves
DIP
DGCO
Classes d'accueil
DIP
DGCO
Service classes d'accueil et insertion
DIP
Division informatique et gestion
Budget
DIP
Division informatique et gestion
Comptabilité
DIP
Division informatique et gestion
SAEA
DIP
Division informatique et gestion
SSJ
DIP
Division informatique et gestion
Statistiques des absences
DIP
Division informatique et gestion
Gestion ressources humaines
DIP
OOFP
Notes
DIP
OOFP
Test d'orientation professionnel
DIP
OOFP
TOPMAN
DIP
Recherche en éducation
CRIEE
DIP
Recherche en éducation
Hypercard
DIP
SIPO
Inventaire
DIP
Centre horticole
Gestion de laboratoire
DJPT
Admin. pénitentiaire
Calitime
DJPT
Admin. pénitentiaire
WinWay Z
DJPT
Pouvoir judiciaire
Caisse et comptabilité
DEP
SERVICE
NOM DE L'APPLICATION
DJPT
Pouvoir judiciaire
Gestion des procédures civiles
DJPT
Pouvoir judiciaire
Gestion des procédures pénales
DJPT
Pouvoir judiciaire
JUR-All-in-One
DJPT
Bureau du quartier-maître
QMA
DJPT
OCP
Calvin
DJPT
OPF
Traitement des poursuites GIOP
DJPT
OPF
Faillites
DJPT
OPF
Hypsis (Comptabilité)
DJPT
OPF
Saint-Pierre
DJPT
OPF
Poursuites sur support informatique
DJPT
Pouvoir judiciaire
Gestion des Prud'hommes
DJPT
Police
Véhicules
DJPT
Police
SIT Généralisé
DJPT
Police
Gestion des accréditations
DJPT
Police
Affaires minimum
DJPT
Police
Bulletins d'hôtels
DJPT
Police
Contrôle des interrogations
DJPT
Police
Gestion des armes
DJPT
Police
Gestion des codes SPITAB
DJPT
Police
Véhicules volés
DJPT
Service cantonal des objets trouvés
Contrôle des entrées et sorties du SCOT
DJPT
Service des automobiles et de la navigation
RADA
DJPT
Votations et élections
VOTA
DAEL
Amarrages
Domaine public cantonal
DAEL
Dir. des bâtiments
Nicodemus
DEP.
SERVICE
NOM DE L'APPLICATION
DAEL
Dir. des bâtiments
Pibat
DAEL
Dir. des bâtiments
Messerli
DAEL
Direction de la police des constructions
S.A.D-II:
DAEL
Secrétariat général
Gestion d'adresses
DAEL
Service de la gérance
Gérance
DAEL
Services des amarrages
Amarrage
DAEL
Service des routes cantonales
Edition de soumissions
DAEL
Service financier
Routes nationales
DAEL
Service financier
Comptabilité
DAEL
Service voirie et nettoiement du canton
Véhicules
DAEL
Office cantonal du logement
Gestion des subventions
DAEL
Office cantonal du logement
Gestion logements
DAEL
Direction générale du logement
Subventions
DIAE
Protection civile
Gestion des astreints
DIAE
Protection de la nature et des paysages
Délivrance des permis de pêche
DIAE
STE
DATASTEP
DIAE
STE
DATAPOMP
DIAE
Surveillance des finances communales
Budget des communes
DIAE
Registre foncier
Historique des parcelles
DEEE
OCIRT
Application CCT
DEEE
OCIRT
Base AIIT
DEEE
OCIRT
Base CFST
DEEE
OCIRT
Base comptable
DEP.
SERVICE
NOM DE L'APPLICATION
DEEE
OCIRT
Base environnement
DEEE
OCIRT
Base inspection
DEEE
OCIRT
Base RELTRAV
DEEE
OCIRT
Gestion du courrier
DEEE
OCSTAT
Votations
DEEE
Office cantonal de l'emploi
Gestion du personnel
DEEE
Office cantonal de l'emploi
WinOce
DEEE
Office cantonal de l'emploi
Gestion des événements
DEEE
Office cantonal de l'emploi
Sécurité
DASS
CRAVS
Rôle : suivi des recours
DASS
Direction générale de l'action sociale
LORO
DASS
Direction générale de l'action sociale
Subventionnés
DASS
IUML
Dossiers UMPT
DASS
IUML
Gestion QCP
DASS
IUML
Médecine judiciaire
DASS
OCPA
Gestion des prestations OCPA
DASS
Secrétariat général et directions générales
Gestion d'adresses
DASS
Secrétariat général
Grand Conseil
DASS
Secrétariat général
LITAO
DEP.
SERVICE
NOM DE L'APPLICATION
DASS
Service du médecin cantonal
Vaccins
DASS
Service du pharmacien cantonal
Suivi des contrôles
DASS
SPD
STAT PERSI
DASS
SPD
Système CR
DAM
Recrutement
Conscrits
Proposition de motion
(1205)
sur les dysfonctionnements informatiques de l'Etat
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
- le récent rapport d'expertise sur l'informatique de l'administration fiscale, datant de septembre 97 mais publié en mars 98, qui révèle des disfonctionnements très graves ;
- l'échec avéré de la réforme symphonie, qui a coûté très cher et n'a servi à rien ;
- le fait que tout informaticien auquel on parle d'un problème informatique vous proposera aussitôt une solution… informatique, si possible très chère et longue à mettre en application ;
- le fait que les 300 programmeurs de l'Etat se sont souvent construit des châteaux-forts, entourés de fossés profonds, des petits royaumes dont ils sont les seuls maîtres et qui ne peuvent communiquer avec les royaumes voisins ;
- le fait qu'il faut aujourd'hui casser ces cloisonnements, en adoptant des normes et protocoles communs à tous les services, et ouverts sur le monde extérieur ;
invite le Conseil d'Etat
- à préciser l'état des lieux de l'informatique de l'Etat ;
- à publier celui-ci dans un langage compréhensible par les députés et le public ;
- à proposer des solutions dans un rapport, avec des protocoles et des moyens de communication communs, et à améliorer progressivement la communicabilité entre les services et l'ouverture de ceux-ci sur le monde extérieur (internet). Le rapport comprendra également un échéancier et des coûts prévisionnels sur 5 ans.
EXPOSÉ DES MOTIFS
L'informatique de l'Etat va mal, très mal même. Dans l'exposé des motifs ci-dessous, nous voudrions commencer par vous citer quelques passages explicites du dernier rapport sur l'informatique de l'administration fiscale, passages à notre avis illustratifs de la situation :
1. Etat des lieux : "; Il est important de relever qu'aucun lien dynamique n'est établi entre ces outils et les bases de données. Les utilisateurs recopient manuellement les informations. En plus de la perte de temps, il existe un risque non négligeable d'erreurs de transcription. " (p. 2)
Les problèmes d'intercommunicabilité dont nous parlions ci-dessus, dans les considérants, sont faciles à expliquer : Chaque informaticien s'est construit son trou dans le fromage de l'Etat, sans se préoccuper de communiquer ses données aux voisins. C'est ce que résume à merveille la phrase suivante :
2. "; Nous avons le sentiment que les diverses applications ont été développées indépendamment les unes des autres, souvent par des sociétés de service différentes et selon des normes et standards propres à chacune d'elles " (p. 3)
3. 3 systèmes différents sont employés :
- Unisys - utilisé pour la compta et la perception, est très vieux et obsolète, il marche en fait comme une imprimante non paramétrable, et ne peut passer l'an 2000 à cause du format des dates.
- Magic/Novell ne marche pas bien, il sert au rôle et aux services immobiliers, il est à refaire (v. p. 17 étude de ATAG)
- IAO marche sous Unix/Oracle, il est plus récent et on peut espérer qu'il passe l'an 2000. Il fait la taxation des PP et des PM.
Ces 3 systèmes ne communiquent pas bien, sont obsolètes pour partie, très chers et lourds et inefficients. On lit à la page 8, à propos de Magic :
"; Il faut savoir que l'espace disque disponible (5 Mb !) ne permettra pas d'initialiser le rôle du service des personnes physiques pour 1998.
M. Bossart signale depuis plusieurs mois les problèmes rencontrés, tant pour MAGIC qu'en ce qui concerne l'urgence des adaptations du hardware.
Pourquoi toutes ces demandes parfaitement motivées et documentées (cf recueil de messages et rapport établi par M Bossart) sont-elles restées sans réponse? ? ? "
4. Une brève expertise de la sécurité des données aboutit à la constatation suivante : "; dans l'ensemble, les auditeurs ont jugé le niveau de contrôle informatique comme faible, comparativement à d'autres organisations de taille similaire. En l'état actuel des choses, il existe des risques graves quant à la confidentialité et à la disponibilité des données. "
5. Motivation des utilisateurs : les utilisateurs sont démotivés par la lourdeur et l'inefficacité et l'incompétence du système. C'est en gros la conclusion du chapitre "; constat général " :
"; manque d'interactivité entre les divers systèmes (UNISYS / MAGIC / IAO). Le fait de devoir attendre une semaine pour qu'une information saisie dans une système soit répliquée dans l'autre, entraîne un sentiment d'insécurité et représente probablement la source de certains dysfonctionnements (saisie à double de la même information, par exemple). "
6. Pour pouvoir connaître la liste des contribuables, (un exercice aujourd'hui impossible, ce qui révèle si besoin était la profondeur du gouffre dans lequel nous nous trouvons : On n'est même pas sûr que tous les contribuables soient connus !), il faut que l'administration fiscale puisse communiquer avec le registre foncier (pour les propriétaires de villas) avec l'OCP (office cantonal de la population pour les résidents), avec le RC (pour les sociétés), or ceci est difficile, comme on le voit à la page 19, et entraîne des dysfonctionnements.
Passons sur les pages suivantes de ce rapport, pour nous concentrer sur le reste de l'informatique de l'Etat.
Posons quelques questions qui devront bien trouver réponse un jour :
7. Est-il vrai que la teradata, une machine à 6 millions, n'a jamais été utilisées et rouille dans une cave ? Qui avait pris la décision de commander cette machine ? Combien l'Etat a-t-il perdu dans cette affaire, en comptant les salaires des 30 informaticiens qui ont été envoyés en Angleterre pour se former pendant 2 ans ?
8. Pourquoi 2 responsables du CPIE (comité de pilotage de l'informatique de l'Etat) ont-ils démissionné ?
9. Pourquoi avoir choisi de séparer les 300 informaticiens de l'état en 2 structures rivales (CDTI et CETI), pour ensuite remarquer qu'on ne peut séparer développement et exploitation et tenter bien maladroitement et sans explications de les remettre ensemble ?
10. Quelles sont les tâches administratives que l'informatique peut résoudre facilement, à peu de frais et fiablement ? Et quelles sont celles qui doivent continuer à être faites à la main, parce qu'elles sont trop atomisées pour pouvoir être facilement informatisées ?
11. Pour faciliter la communication interservices nous proposons les protocoles de l'internet, TCP/IP, Win 95 et office-access pour les petites bases de données, et Unix / Oracle pour les grosses. Que propose le Conseil d'Etat ?
12. Faut-il regrouper tous les informaticiens de l'Etat dans une méga-structure, en les faisant tous déménager par exemple aux Acacias, ou bien faut-il au contraire les laisser dans les services, là où ils peuvent aider les utilisateurs, en leur imposant simplement des normes et protocoles fédérateurs ?
13. Certains responsables de l'informatique de l'Etat détestent l'internet, qu'ils décrivent comme plein de dangers et de virus. Ils se méfient de l'ouverture au monde. Le Conseil d'Etat partage-t-il cette prévention ? L'un de ces responsables vient de quitter son poste. Est-ce pour cette raison-là ?
Compte tenu de ce qui précède, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à faire bon accueil à cette motion et à la renvoyer directement au Conseil d'Etat.
Préconsultation
M. Chaïm Nissim (Ve). Il faut renvoyer à la commission des finances le projet de loi nous demandant un crédit extraordinaire de 48 millions pour adapter les équipements informatiques à l'an 2000 et la proposition de motion. La commission pourrait conclure que nos systèmes requièrent une adaptation au problème gigantesque du passage à l'an 2000. Le crédit de 48 millions renvoyé aujourd'hui en commission ne sera peut être pas suffisant; cette somme pourrait être supérieure : l'hôpital et l'université ne sont notamment pas compris dans ce projet de même que la refonte d'une grande partie de l'informatique de l'AFC. Cela ajouterait 18 millions aux 48 que nous votons ce soir. Il faut de toute façon renvoyer ce projet en commission; nous avons appris que le Conseil d'Etat a déjà commencé à dépenser l'argent...
Une voix. C'est très mal !
M. Chaïm Nissim. C'est mal dans un certain sens, Monsieur Dupraz, mais les projets doivent être commencés à temps afin de pouvoir adapter l'informatique à l'an 2000. Il faut en comprendre l'urgence. Cela est mon intervention sur le premier point.
M. Dupraz me glisse in petto qu'il y a deux mille ans que nous savons qu'il y aura l'an 2000. Il a raison... (Rires. Le président agite la cloche.) Il est certain que les informaticiens de l'Etat s'y sont pris un peu tard.
En ce qui concerne la motion déposée par un certain nombre d'entre nous, Madame Brunschwig Graf, nous recevons chaque année des échos alarmants sur l'informatique de l'Etat. Cela va en empirant et, cette année, les deux rapports qui nous ont été soumis, celui remis à la commission fiscale et celui de l'ICF, sont pires que tout ce qui pouvait être imaginé. J'ai franchement l'impression que nous sommes sur le Titanic, en train de couler alors que l'orchestre continue à jouer pour essayer de calmer la panique des passagers. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Madame Brunschwig Graf, depuis trois ans «Symphonie» a coûté cher et n'a servi à rien. Vous nous informez très peu de ce qui se passe dans ce système. Nous apprenons que les anciens sigles : le CPIE, Comité de pilotage de l'informatique de l'Etat; le CETI, Exploitation des technologies de l'information; le CDTI, Développement et technologie de l'information; l'OT, Observatoire technologique, ont changé mais les responsables demeurent. Il y a un CATI à la place du CPIE mais, en dehors de deux démissions importantes, les gens à l'intérieur sont les mêmes pour la plupart. J'ai bien peur que ces personnes ne soient pas capables de gouverner le bateau. M. Mabut est parti mais d'autres responsables sont restés.
Il me semble, Madame Brunschwig, que ce sont là des soubresauts frénétiques qui m'angoissent; vous n'arrivez pas à gérer la barque. Je ne suis que député, vous êtes conseillère d'Etat et je ne prétends pas avoir la solution. Franchement, il va falloir quelqu'un avec un peu plus - excusez l'expression - de poils au cul ! (Exclamations.)
Une voix. N'importe quoi !
M. Chaïm Nissim. Il va falloir oser prendre des décisions, secouer le cocotier. Il y a des responsables incompétents dans l'informatique de l'Etat; ces personnes devront être déplacées. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Il faut pouvoir compter sur des informaticiens motivés qui soient bien dirigés; actuellement ils sont désespérés. Il va falloir leur fournir programme et bilan, nommer des chefs et que les directives soient suivies.
Depuis vingt ans, un des principaux problèmes est que chaque informaticien a développé un bastion, un château fort isolé des autres services informatiques qui ne communiquent pas entre eux. Cela a généré du travail exécuté à double, voire à triple ou à quadruple. Chaque fois qu'un sujet était repris par un autre service, il fallait ressaisir manuellement les données sur les clients de ces services. Cela doit changer. Il va falloir décloisonner ces bastions, abattre ces murs et faire que soient définis et imposés des normes et des standards communs. Il va falloir atteindre un bon équilibre entre ce qui va être confié en sous-traitance, ce qui va être fait «maison» et ce qui sera acheté tout fait...
Le président. Veuillez conclure, Monsieur le député !
M. Chaïm Nissim. Tout cela pourrait être fait à condition que la direction soit claire et j'ai peur de vous dire, Madame Brunschwig, qu'à mon avis ce n'est pas le cas. Vous nous deviez un rapport depuis six mois sur ce sujet, nous ne l'avons toujours pas reçu.
Le président. Ont demandé la parole successivement MM. et Mmes les députés Froidevaux, Bolay, Vaudroz, Brunier, Annen et Wenger.
M. Pierre Froidevaux (R). Notre groupe soutient un examen rapide mais attentif de ce projet de loi en commission. La facture semble considérable et à divers titres : elle l'est et à pure perte car elle ne sert qu'au passage de l'an 2000. L'informatique de l'Etat comporte vingt-trois systèmes d'exploitation différents avec quarante-quatre mille programmes dont quinze mille sont surannés; les investissements informatiques de l'Etat n'ont pas été conduits mais abandonnés à des initiatives éparses. En définitive notre exécutif, à l'image d'un grand nombre de gens, a eu peur de l'informatique. Ce n'est pas le propre de nos édiles. Nous en avons un exemple tout récent. Un président d'un pays voisin à qui il était demandé, lors d'une foire informatique, de prendre en main la souris, est allé la chercher sous la table pour voir où elle courait ! (Rires).
L'informatique étatique fait peur. Elle semble provoquer des psychoses comme celles initiées par les fiches de la police fédérale. Le pouvoir politique l'a donc laissée en mains subalternes, celles de fonctionnaires pleins de bonne volonté certes, mais servant aussi de verrou en cas de nécessité. Il n'a ainsi pas osé exprimer sa volonté de vouloir coordonner lui-même ce formidable outil de gestion que l'informatique aurait dû être aujourd'hui.
Nous ne pouvons que regretter la négligence du projet de loi 7036 qui se trouve toujours à la commission de la santé... (Rires.) ...des finances, pardon, déformation professionnelle !
Une voix. Aux soins intensifs !
M. Pierre Froidevaux. Aux soins intensifs au niveau de l'informatique cantonale, ce projet qui malheureusement aurait pu apporter des solutions car il date du 7 septembre 1993. Depuis cinq ans, il n'a fait l'objet d'aucune investigation. Pour l'ensemble de la société, l'informatique est devenue un lien privilégié de l'activité humaine. Même au sein de notre conseil, les plus récalcitrants, comme M. John Dupraz qui vient de s'exprimer, seront obligés de s'y soumettre pour obtenir les informations en son temps, car cet outil développe - et je vous prie de m'écouter, Monsieur Dupraz ! - le concept de l'information asynchrone. En vous parlant, seuls ceux qui veulent bien m'écouter pourront savoir ce que je dis. Mon mode d'information est synchrone. Pour devenir asynchrone, les députés de la buvette devront lire mon discours dans le Mémorial, soit bien après que ce projet de loi sera passé en commission, revenu dans ce parlement et voté, du moins je l'espère. Ils n'auront donc en fait jamais mon message. Si je voulais que tous les députés aient vraiment accès à mes dires, je devrais utiliser la messagerie du Grand Conseil... (Remarque de M. Claude Blanc.) ...ainsi chacun - s'il en a l'envie, Monsieur Blanc - pourrait connaître mes propos. Il le ferait de manière asynchrone.
Cette manière d'obtenir toute l'information au moment choisi est le privilège exclusif de l'informatique. Elle permet de faire circuler en tous sens, à tous les niveaux et en temps voulu l'information nécessaire à la prise de décision...
M. Claude Blanc. N'importe quoi!
M. Pierre Froidevaux. ...pas seulement les bêtises de M. Blanc. Elle permet aussi de pouvoir contrôler l'exécution des tâches...
M. Claude Blanc. On s'adresse au président!
M. Pierre Froidevaux. Je vois que M. Blanc est gêné lorsqu'on lui parle... surtout de l'informatique ! (Rires.) Elle constitue ainsi le lien entre tous les collaborateurs d'une entreprise publique ou privée, elle est d'une totale et absolue nécessité. N'avoir pas osé, n'avoir pas compris engendre aujourd'hui des coûts; ces investissements auraient rapporté à l'Etat, s'ils avaient été réalisés en temps opportun. L'absence de stratégie devient un cauchemar. Nous payerons une cinquantaine de millions seulement pour permettre le passage à l'an 2000 et ne pouvons espérer au mieux que 9 millions en retour sur ces investissements. Quel gâchis ! Alors qu'une informatisation conduite, réfléchie et mieux comprise aurait permis le passage que l'on sait et une gestion adéquate de l'Etat.
Nous attendons du travail en commission un soutien à ce projet de loi et espérons que son rapporteur pourra nous faire part alors de la future architecture de l'informatique de l'Etat qui ne peut avoir qu'un seul but : le guichet unique !
Mme Dolores Loly Bolay (AdG). Le dysfonctionnement informatique de l'Etat et plus particulièrement celui du département des finances est quelque chose qui doit être dénoncé avec force dans ce parlement. Je ne citerai pourtant que quelques exemples : en ce qui concerne la 27e période de l'impôt fédéral direct touchant les personnes morales, tous les fichiers informatiques ont été détruits. Il a fallu faire des photocopies à la cave. Par ailleurs, de nombreux contribuables disparaissent régulièrement des systèmes informatiques à cause des différentes applications en vigueur. En effet, les interfaces ne sont pas compatibles. Combien de milliers voire de millions l'Etat perd-il ? La question reste posée.
Concernant les déclarations simplifiées pour les salariés et les personnes sans activité, dix fois plus de formulaires sont imprimés que nécessaire alors que le système informatique permet justement de cibler la demande. Un haut fonctionnaire, qui n'est d'ailleurs plus au département des finances, avait déclaré en son temps à la presse que l'on pouvait envoyer les déclarations fiscales par disquette alors que cela était impossible. Conséquence : des centaines de disquettes sont inutilisables. Lorsqu'un nouveau collaborateur est engagé, il lui faut au minimum deux voire trois semaines pour qu'il puisse être opérationnel. La lourdeur du système lui en interdit l'accès dans les 48 heures.
Par ailleurs, le manque de directives précises provoque la gué-guerre entre les différentes structures informatiques, le CDTI et le CETI. Au lieu de tout mettre en oeuvre pour avoir une meilleure collaboration, ils se déchirent entre eux, provoquant des dysfonctionnements quotidiens. Si le département des finances n'a pas chaviré, c'est surtout grâce à l'ensemble des chefs de service et au personnel dévoué qui contre vents et marées ont fait l'impossible pour éviter le naufrage. Pour remédier à l'incurie qui sévissait au sein de l'administration fiscale et pour lui permettre de faire face à ses échéances, le personnel a dû fournir de nombreuses heures supplémentaires. Ces dépenses viennent s'ajouter au coût d'un système informatique défaillant. Rappelons par ailleurs qu'une machine teradata a été achetée à l'époque et a coûté 6 millions de francs; elle dort toujours à la cave. Ce manque à gagner pour l'Etat a probablement contribué pour une grande part au déficit que nous connaissons maintenant et dont la charge devrait être portée par le contribuable.
La première erreur commise par l'ancien chef du département des finances a sans doute été de faire confiance à des hauts fonctionnaires dont l'incompétence en matière d'informatique était de notoriété publique. Ces erreurs ont causé les graves dysfonctionnements auxquels le département doit faire face aujourd'hui. Raison pour laquelle l'Alliance de gauche soutient cette motion et demande que des personnes compétentes et responsables soient mises aux postes clés afin de mettre un terme à ces problèmes.
M. Jean-Claude Vaudroz (PDC). Il est important de distinguer dans le projet de loi 7838 le passage à l'an 2000 et la problématique de l'administration fiscale cantonale. M. Nissim s'est très bien exprimé sur ce dernier point, malgré quelques propos excessifs. Même si M. Blanc pense que, depuis deux mille ans, nous savons que nous aurons ce passage à l'an 2000, cela fait à peu près vingt-cinq ans que l'informatique est en place. Il est vrai que c'est une problématique qui existe aussi bien au niveau de l'Etat que dans les secteurs privés. Il reste à l'Etat de Genève encore une année et demie pour résoudre l'ensemble de ces problèmes et j'ai totalement confiance en ses services.
Il y a deux aspects à mettre en évidence pour l'administration fiscale : le passage à l'an 2000 et un certain nombre de réformes conduisant à un outil informatique performant en matière de calcul fiscal. Là effectivement c'est quelque peu inquiétant; nous pouvons constater dans le projet de loi 7838 qu'entre 8 et 10 millions sont destinés à envisager une nouvelle application. Il est fait allusion assez clairement au fait qu'une somme probablement équivalente aux 18 millions déjà dans ce projet de loi sera à voter prochainement pour cette réforme fiscale.
Il faut éviter toute précipitation. Nous venons d'en faire l'expérience avec un certain nombre de projets informatiques - dont peut-être l'IAO - et nous constatons que cela ne fonctionne pas à satisfaction. La seule recommandation que j'aurais en matière de décision au niveau de la commission des finances, c'est que le délai accordé pour l'étude de ce projet soit suffisant pour pouvoir rendre un travail de qualité.
Il est important de faire toute la lumière sur l'ensemble des projets informatiques, comme demandé dans la motion, au niveau du management, au niveau de la stratégie à mettre en place pour l'ensemble de l'opération. Je pense également à l'ensemble de ces structures qui ont connu différentes réformes. Il serait important pour la commission des finances d'avoir les idées claires là-dessus, sur le plan financier également.
Compte tenu des finances publiques, il ne paraît pas acceptable au parti démocrate-chrétien, de travailler totalement dans le brouillard en considérant que l'Etat a toujours les moyens. Nous avons pu le constater, grâce à «radio-bistrot» tout à l'heure, qu'aux yeux de la population notre parlement donne véritablement l'impression de faire souvent n'importe quoi et en particulier en matière informatique. Nous attendons en commission des finances d'avoir un certain nombre d'informations sur l'ensemble de ces sujets. C'est pourquoi le parti démocrate-chrétien vous recommande de renvoyer ce projet de loi ainsi que la motion à la commission des finances.
M. Christian Brunier (S). Ouvrir un crédit extraordinaire d'investissement de 48,2 millions dont 18,2 millions pour l'administration fiscale afin d'adapter l'informatique et la technologie à l'an 2000 paraît justifié. L'exposé des motifs ne permet pas de distinguer ce qui est directement lié à l'an 2000 de ce qui est lié au mauvais fonctionnement de l'informatique de l'Etat. Il sera utile de clarifier cela en commission. Il est de plus fort inquiétant de traiter un tel crédit aujourd'hui seulement. Les entreprises et les administrations qui ont pris le bon virage pour amorcer le passage de l'an 2000, l'ont fait pour la plupart il y a deux, trois, voire quatre ou cinq ans. Certes, comme disait notre collègue Nissim, mieux vaut tard que jamais !
Si une partie du travail a heureusement commencé, il est tout de même regrettable que le précédent gouvernement n'ait pas su anticiper un tel défi pourtant largement connu du monde informatique. Aujourd'hui, malgré l'existence de ce projet de loi, nous sommes en droit de nous inquiéter surtout en connaissant l'atmosphère qui règne actuellement dans les instances informatiques de l'Etat. Dans ce contexte, et en attendant les détails certainement très intéressants que les travaux de commission nous fourniront, nous soutiendrons probablement ce crédit qui permettra - nous l'espérons - de sauver les meubles !
M. Bernard Annen (L). Aucun des orateurs entendus n'a proposé une solution aux maux évoqués. Un médecin a fait des propositions comparables à ce que l'alchimie est à la médecine, mais en définitive rien de raisonnable.
Dans un problème aussi délicat, il ne faut pas regarder ce qui se passe à l'Etat de Genève uniquement. Il faudrait également que les chantres du privé regardent aussi dans leur secteur. En toute objectivité, les plâtres essuyés dans le privé sont exactement les mêmes que ceux que nous essuyons aujourd'hui. Le passage à l'an 2000 coûte cher. Pour certaines entreprises, souvent citées en exemple, le coût d'une telle opération oscille entre 30 millions et 400 millions. L'Etat de Genève est dans une cible tout à fait raisonnable, ce qui ne veut pas dire qu'il faille investir sans discernement. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Personne n'est capable de maîtriser globalement la problématique de l'informatique. M. Nissim, qui est l'un des spécialistes de notre parlement, a essayé de chercher quelqu'un mais il reconnaît lui-même s'être trompé sur son choix. Il manque effectivement à l'Etat de Genève un contrôle ou un audit permanent et indépendant des services. Toute entreprise a sa comptabilité contrôlée par une fiduciaire indépendante. Cela pourrait être appliqué en matière d'informatique. Il existe une profession dans ce domaine : l'audit informatique. Certains établissements, bancaires notamment, ont eu recours à ces spécialistes afin de pouvoir accréditer une application informatique.
M. Nissim critique le responsable du gouvernement en charge du programme Symphonie en déplorant que la situation n'ait pas été présentée telle qu'elle était. En tant que président de la commission des finances, je souligne que nous avons tenté de le faire - non pas parce que le conseiller d'Etat concerné ne pouvait pas s'en charger - mais que la commission des finances n'avait pas la compétence pour traiter cette question. Ce n'est pas aussi facile que cela paraît.
Tout le monde sait aujourd'hui que le matériel informatique a une durée de vie maximum de trois ans et que les programmes informatiques ont une durée de vie de cinq ans. Après le constat des problèmes de l'administration fiscale et sachant que les programmes datent des années 1970, faut-il encore se poser des questions ? Pourquoi ces problèmes n'ont-ils pas été traités auparavant ? L'objectivité commande de reconnaître qu'à l'intérieur même du système l'utilisateur est parfois réticent à l'introduction d'une nouvelle application.
Cela pourrait justifier un système de contrôle de l'informatique de l'Etat de manière à rassurer d'une part le Conseil d'Etat et, d'autre part, les hauts fonctionnaires, les chefs de service, les utilisateurs et à être certains que l'informatique répond aux besoins de la population. Un informaticien de métier, s'il ne connaît pas l'ensemble de la problématique, aura besoin de plusieurs mois, voire plusieurs années pour essayer de maîtriser les différentes données. J'invite les donneurs de leçons à se mettre à disposition de l'Etat pour les problèmes informatiques. Ce sont des compétences recherchées, difficiles à trouver. Par conséquent, je vous engage à davantage de compassion.
M. Bernard Annen (L). En premier lieu, je prie Mme Brunschwig Graf de bien vouloir accepter mes excuses.
Deuxièmement : M. Annen a évoqué le peu de solutions proposé au problème que nous traitons actuellement. Voici quelques propositions supplémentaires que j'aimerais vous soumettre : il faudrait travailler davantage en termes de système d'information, à savoir englober non seulement l'informatique mais également le fonctionnement psychologique des employés; c'est un point important.
Troisièmement : il serait important de mieux cerner les limites de l'informatique. Toutes les tâches ne sont pas informatisables; certaines se prêtent mieux à un traitement manuel.
M. Dominique Hausser (S). STAT PERSI, LITAO, LORO, DATAPOMP, S.A.D-II, RADA, Saint-Pierre, Hypsis, Calitime, CRIEE, TOPMAN...
Le président. Notre langue est le français, Monsieur le député !
M. Dominique Hausser. Cela figure en page 16 à 18 de l'exposé des motifs du projet de loi 7838. Ce sont quelques-unes des applications qui mériteraient, selon le Conseil d'Etat, d'être révisées pour répondre au problème de l'an 2000. M. Nissim a raison de souligner qu'en matière informatique les expressions sont parfois obscures. Nous n'avons pas besoin de ces noms d'oiseaux mais plutôt de la description de ces applications et leur utilité ainsi que leur éventuelle modification afin d'assurer le bon fonctionnement des services en l'an 2000.
Les socialistes n'ont pas signé cette motion car ils estimaient que ni les considérants, ni les invites ne répondaient à la véritable problématique des dysfonctionnements de l'informatique de l'Etat. Depuis plusieurs années, nous demandons des éclaircissements à ce sujet. L'inspection cantonale des finances a été saisie d'un mandat visant à examiner si les objectifs de la réforme Symphonie ont été atteints tant par l'entreprise GEMINI que par les autres organes chargés de coordonner l'informatique de l'Etat. Ce mandat devrait permettre de souligner le manque quasi total de satisfaction de la part des utilisateurs du système informatique.
Bien que nous saisissions le fond de la motion, nous estimons qu'elle devra être refondue et faire l'objet d'amendements en commission. Cela nous permettra d'obtenir les nouvelles informations dont nous avons besoin et non pas un nouveau rapport qui est déjà en cours d'exécution à l'inspection cantonale des finances et dont nous demanderons et obtiendrons certainement une copie. Il ne s'agira pas, en ce qui nous concerne, d'avoir des détails techniques sur les protocoles de communication mais bien de s'assurer que nous avons les outils nécessaires pour permettre à l'administration d'exécuter les tâches qui lui sont confiées.
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Toute carrière politique implique des choix, Monsieur Nissim, quelle que soit la morphologie de la personne! (Rires.) J'ai accepté, il y a trois ans, d'entamer une réforme et de prendre des responsabilités dans un domaine périlleux. Celles et ceux qui auront regardé la télévision ces derniers jours auront pu apprécier ce véritable péril en voyant M. Bill Gates, dont on ne peut pas soupçonner qu'il n'emploie pas les meilleurs informaticiens, subir en public le bug de l'année en présentant un produit d'ailleurs fort attendu sur le marché. Cela n'excuse en rien ni les erreurs ni les difficultés qui peuvent survenir à l'Etat de Genève en matière informatique. Cela permet d'illustrer à quel point ce domaine est exposé à des difficultés de toutes sortes qui ne sont pas liées à l'incompétence mais à d'autres phénomènes propres à l'informatique.
M. le député Nissim a toujours reçu une écoute attentive de ma part lorsqu'il m'a présenté ses suggestions en matière d'informatique. Il m'avait entre autres recommandé, sauf erreur il y a deux ans, de m'entourer de conseils extérieurs. Le même député a fait preuve d'honnêteté en reconnaissant que la personne qu'il m'avait recommandée, et pour laquelle je n'avais pas donné suite, n'avait finalement pas les compétences requises.
Je ne vous raconte pas cela pour mettre au pilori le député Nissim; le pilori n'est pratiqué que par le Palais de justice... (Exclamations.) Il n'est parfois pas si simple de savoir à long terme en matière informatique ce qu'il convient de faire. Rappelons qu'en tant que politiciens nous avons un désavantage que les entreprises privées n'ont pas. Elle ne doivent pas rendre compte en public ni de leurs erreurs, ni de leurs choix, ni de leur gaspillage, ni de leur tromperie. Elles agissent dans la discrétion alors que l'Etat de Genève est tenu à la transparence. Cela implique les diverses attaques et remarques dont nous sommes la cible mais tout spécialiste en informatique vous dira aujourd'hui que l'histoire de l'Etat de Genève c'est celle de la majorité des entreprises qui ont commencé il y a quelque vingt ou trente ans dans l'informatique. Je crois même que le député Nissim est d'accord avec moi sur ce point.
Cela n'enlève en rien la nécessité de devoir s'adapter aujourd'hui à l'an 2000 ainsi que l'a fait - dans la discrétion - l'Etat de Genève pour deux tiers de ses applications. Vous aurez appris par les journaux que la Confédération allait devoir dépenser 100 millions pour la mise à jour de son informatique à l'an 2000. Ce dont nous sommes sûrs, c'est qu'il est indispensable de prendre encore un certain nombre de mesures qui ne peuvent entrer dans le cadre normal qui a déjà absorbé - sans bruit - les deux tiers de ce qu'il y avait à faire. Des mesures ont été prises dans différents départements pour pouvoir réaliser une partie du travail.
En ce qui concerne la motion, nous vous devons des comptes ainsi que nous l'avons déjà fait à diverses reprises avec les deux députés délégués. Nous vous devons la clarté et la modestie sur ce qui est réussi et sur ce qui ne l'est pas.
En revanche, je ne peux pas accepter d'entendre dire que Symphonie est une erreur ou un échec. Cette réforme a commencé progressivement il y a trois ans. Les différents collaborateurs travaillent ensemble depuis six mois seulement dans une nouvelle configuration.
Une transformation qui implique un changement d'organisation entraînant de nouvelles habitudes ne peut pas s'opérer en un jour. Il faut également faire face à la résistance au changement de la part de certains utilisateurs. Je suis d'accord avec les députés qu'un double contrôle est nécessaire dans l'accompagnement de notre besogne : celui des députés et un contrôle extérieur. Vous le savez mieux que moi, Monsieur le député Nissim, un avocat ou un informaticien égale un avis et l'addition de tous ces avis ne constitue pas toujours une politique.
Le problème majeur n'est pas dû à la configuration anatomique que vous avez décrite ! Gardons-nous de céder parfois à la rumeur et autres bruits de couloir et poursuivons notre travail ! La mise en oeuvre d'une réforme peut se solder par un échec sous la pression des uns et des autres. Je me réserve le droit à votre égard de vous fournir tous les renseignements nécessaires et je vous demanderais aussi de nous accompagner dans cette réforme. Ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain par égard pour les quelque trois cents informaticiens qui travaillent à l'Etat de Genève. Nous avons une longue histoire dont nous payons la transformation. Il ne s'agit pas d'un problème de courage mais bien plutôt d'obstination, de continuité et de contrôle. La collaboration de tous nous est nécessaire. J'ai été également députée dans ce parlement; j'ai vécu le moment où personne ne posait de questions et votait comme un seul homme toute une série de projets. Faites-nous au moins la grâce de reconnaître que, durant la dernière législature, vous avez reçu l'ensemble des projets accompagnés d'explications et de discussions comme vous n'en avez jamais eu. Cela doit continuer. Nous payons le prix de cette transparence dans la critique mais c'est la seule façon de maîtriser ensemble une informatique non pas pour l'an 2000 mais éventuellement pour l'an 2005 si les informaticiens nous y autorisent.
Ma collègue se joint à moi pour vous recommander de renvoyer ce projet de loi en commission, de dégager les moyens nécessaires pour la mise en oeuvre de l'administration fiscale et le passage à l'an 2000 dans des conditions acceptables pour l'ensemble de l'Etat et surtout pour les citoyens qui finalement sont nos véritables commanditaires.
En ce qui concerne la motion, vos suggestions seront les bienvenues mais nous déciderons ensemble des risques à prendre.
Mme Micheline Calmy-Rey, conseillère d'Etat. Ce projet de loi comporte deux volets. L'administration fiscale cantonale n'est en effet pas incluse dans le volet an 2000 de l'Etat de Genève et ceci pour diverses raisons.
La première : il ne s'agit pas simplement pour l'administration fiscale d'un passage à l'an 2000 mais elle doit également résoudre un certain nombre de dysfonctionnements apparus depuis quelques années. A savoir : un système d'information trop atomisé avec des sous-systèmes communiquant mal entre eux; une très mauvaise qualité des données entraînant une perte d'informations, des redondances ainsi qu'une saisie manuelle. Un système obsolète dont toute maintenance engendre à coup sûr des dysfonctionnements majeurs. Des applications inadaptées qui rendent problématiques la tenue et la mise à jour des dossiers des contribuables. Un service des rôles surchargé jusqu'aux limites de l'intolérable. Un sous-système IAO ne répondant pas aux besoins de la taxation et actuellement partiellement mis en veilleuse. Selon un rapport d'expertise, les applications de la comptabilité doivent être revues en profondeur. Depuis 1985, en effet, il y a divergence entre le total des soldes de comptes des contribuables et le compte débiteur de l'administration fiscale cantonale sans que l'on puisse en expliquer la raison. Il faut ajouter à cela des lacunes au niveau de l'organisation de l'administration fiscale cantonale et les problèmes propres au passage à l'an 2000.
L'autre raison du traitement particulier du volet administration fiscale est la loi sur l'imposition des personnes physiques. L'administration fiscale doit faire face à une échéance incontournable qui est celle de la modification des dispositions relatives à l'imposition des personnes physiques pour les rendre conformes à la loi fédérale d'harmonisation des impôts. L'ultime délai pour l'adaptation des lois cantonales expire le 31 décembre 2000. Ces modifications légales auront des incidences sur l'ensemble des processus d'imposition des personnes physiques, car elles toucheront au principe d'assujettissement, à la détermination de l'assiette fiscale, à la production, à la comptabilisation des bordereaux dans les comptes des contribuables et dans les comptes de l'Etat ainsi qu'à des procédures de recouvrement.
Actuellement chaque changement législatif pose des problèmes extrêmement graves au système informatique. Face à un changement aussi fondamental, la démarche de modernisation et de refonte est indispensable. Elle vise à la réorganisation du système d'information de l'AFC, l'objectif étant un système intégré.
Troisième raison à cette situation particulière : la maîtrise des ressources. Les investissements en matière informatique y compris les ressources humaines, comme l'assistance à la maîtrise d'ouvrage, figurent sur les rubriques budgétaires de l'administration fiscale cantonale dans le but de garantir la cohérence du projet; d'éviter par exemple que le passage à l'an 2000 ne soit traité au détriment de la modernisation et pour permettre un travail très étroit avec les personnes de l'administration fiscale cantonale. Bien entendu, une collaboration est instaurée avec le CTI, Centre des technologies de l'information.
Mesdames et Messieurs, nous allons donc assurer le fonctionnement de ce qui existe, en réaliser la modernisation, faire passer l'an 2000 à tout ce système et engager une refonte parallèle, déjà commencée en 1998, qui sera étalée jusqu'en 2002.
Nous n'avons pas opté pour une stratégie du tout ou rien, ni pour une refonte complète et immédiate du système. Nous avons préféré une stratégie de minimisation des risques. Nous avons préféré assurer les rentrées fiscales de l'Etat sans lesquelles il ne peut y avoir de prestations. Nous avons été raisonnables dans la démarche qui nous a animés pour assurer une réforme et une refonte de l'ensemble du système informatique de l'administration fiscale cantonale.
Je vous remercie de bien vouloir renvoyer ce projet en commission et de le traiter avec une certaine urgence car, en ce qui concerne l'administration fiscale, le délai pour le passage à l'an 2000 échoit au 31 décembre 1998.
PL 7838
Ce projet est renvoyé à la commission des finances
M 1205
Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission des finances.