République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7708-A
31. Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit de construction pour la réalisation d'un système séparatif et de confinement des terres souillées sur les terrains des démolisseurs du Bois-de-Bay à Peney. ( -) PL7708
Mémorial 1997 : Projet, 7853. Renvoi en commission, 7881.
Rapport de majorité de M. Chaïm Nissim (Ve), commission des travaux
Rapport de minorité de M. Bernard Annen (L), commission des travaux

RAPPORT DE MAJORITÉ

Notre commission des travaux a étudié ce projet de loi lors de sa séance du 16 décembre 97. Nous avions des experts de 2 départements pour nous présenter le projet, qui est complexe et a fait l'objet de 8 ans d'études dans les 2 départements concernés, à savoir celui de l'environnement et celui des constructions.

Les fonctionnaires suivants ont été auditionnés:

M. M. F. Reinhard, directeur des bâtiments

M. M. R. Chapel, directeur adjoint, direction des bâtiments

M. M. B. Vuagniaud, chef de la division de la gérance et conciergerie

M. M. B. Chappuis, chef du service du réseau d'assainissement, DIEE

M. M. Ph. Arrizabalaga, service de l'écotoxicologue cantonal, DIEE

I Introduction

Les fonctionnaires nous ont bien expliqué l'historique des problèmes de contamination des terres dans cette zone des démolisseurs du Bois-de-Bay:

En résumé, la situation a commencé à se dégrader après la guerre, le nombre de carcasses de voitures ayant augmenté considérablement. Dans les années 60, l'état a décidé de regrouper les démolisseurs dans la zone du Bois-de-Bay, dans des gravières désaffectées. Les polluants de toutes sortes ont dès lors commencé à pénétrer dans les sols. En gros, 2 sortes de polluants se sont accumulés :

Face à cette situation extrêmement grave, les services compétents de l'état se trouvent bien démunis: Diverses études ont été menées pour savoir comment remédier à cette triste situation. Mais, s'agissant d'une double pollution par les métaux lourds et les hydrocarbures, aucune technique éprouvée à des coûts raisonnables n'existe, semble-t-il pour l'instant.

Pour finir après de longues études la solution la plus raisonnable semble être la suivante :

II Financement du projet

L'OFEPF a évalué à 4000 en Suisse le nombre de ces zones hautement polluées et ";à risques". Le coût total des investissements nécessaires s'élèverait à 5 milliards de francs. Pour la zone qui nous occupe aujourd'hui, le coût total s'élève à 8,4 millions de francs, partagés grosso modo moitié-moitié entre la zone sud et la zone nord. Pour les 4 millions de la zone sud, les locataires actuels pourront payer, sous la forme d'une augmentation de leurs rentes et loyers, la rente passant de Fr. 1.50 par m2 actuellement à Fr. 5.72. Cette augmentation, dont le principe a été accepté par les locataires, devrait couvrir les frais des travaux envisagés.

Pour les 4 millions à investir immédiatement dans la zone nord, le projet de loi 7708 prévoit de les financer par l'impôt.

Mais au nom de la transparence des coûts, et du principe du pollueur payeur, le groupe écologiste présentera un amendement à l'article 4 du projet de loi qui vous est soumis ce soir:

Art. 4

";Une partie du financement de l'ouvrage est couverte par des contributions des superficiaires et des locataires".

L'amendement proposé par les verts consiste à ajouter :

";Le reste est financé par l'impôt-auto".

En commission, personne n'a contesté que le principe du pollueur payeur devait s'appliquer en l'état. L'internalisation des coûts externes dus à l'automobile et aux pollutions qu'elle provoque ne doit pas être payée par tous les contribuables, mais bien par les automobilistes eux-mêmes. L'amendement proposé n'a été accepté en commission que par les Verts et l'AdG, abstentions socialistes et refus bourgeois. Les refus et abstentions étaient surtout motivés par l'idée qu'il n'était pas logique de taxer les automobilistes actuels pour une pollution causée par leurs prédécesseurs. Nous reproposerons cet amendement en plénière.

En effet, il s'agit ici surtout d'une question de principe, une question éminemment POLITIQUE : Où voulons-nous prendre les 5 milliards nécessaires pour dépolluer - en partie seulement! - les 4000 sites recensés par l'OFEPF comme gravement pollués en Suisse? (ceci sans parler des 46 000 zones inventoriées comme moins gravement contaminées, et de toutes celles non encore inventoriées, et sans parler des normes qui vont se resserrer, des maladies inévitables qui vont devoir être soignées, etc.) Les Verts pensent qu'à terme cet argent doit être pris sur l'impôt auto, qui doit payer une partie au moins des dégâts provoqués, au nom d'une politique des transports basée sur le développement durable.

Au nom du même principe de transparence et de lisibilité des coûts, une remarque de M. Barro, qui ne constitue pas un amendement formel du projet de loi, mais qui concerne les annexes, a été acceptée à l'unanimité de la commission: En effet M. Barro nous signale qu'à l'annexe 4a du projet de loi, qui parle de la couverture financière du projet, aucune recette nouvelle n'est signalée, alors que nous savons bien que les rentes et loyers des déconstructeurs de voitures vont être augmentés pour couvrir la moitié environ des frais de ce projet. La réponse qui nous a été faite par les fonctionnaires est qu'ils ont consulté leurs collègues du département des finances à ce sujet, et qu'il leur a été répondu que ces revenus supplémentaires figurent déjà dans une autre rubrique du budget. Mais cette réponse n'est pas philosophiquement satisfaisante, et notre commission insiste pour que le département des finances accepte désormais une présentation plus transparente et plus lisible des projets. Le Département des finances sera prévenu par une note.

III Discussions en commission

L'ensemble de la commission est d'accord avec ce projet de loi.

Quelques remarques cependant furent faites, entre autres M. Gardiol qui ne comprend pas pourquoi on fait autant d'efforts pour dépolluer ici alors qu'on continue à laisser polluer ailleurs. Il ne veut pas citer de noms mais les transmettra directement aux fonctionnaires concernés.

Au vote, le refus d'entrée en matière de M. Annen est surtout dû à un problème sur la fixation du loyer.

Le reste de la commission accepte l'entrée en matière.

Lors du vote sur l'article 4, le président propose une reformulation de cet article, acceptée par tous:

Art. 4

";Les charges du financement de la zone des démolisseurs sont couvertes par une augmentation de la rente - loyer des superficiaires et locataires".

En fonction de cette modification, l'amendement du rapporteur devient:

";Les autres charges de financement sont couvertes par l'impôt auto".

Refusé par la commission, cet amendement sera reproposé en plénière.

Au vote final, la commission accepte le projet de loi avec l'amendement du président ci-dessus, et sans l'amendement des verts, à l'unanimité moins une abstention et un refus libéral.

RAPPORT DE MINORITÉ

Si le principe d'entreprendre des travaux d'assainissement du secteur du Bois-de-Bay à Peney n'a rencontré aucune opposition, c'est bien l'ensemble du processus conduisant au vote qui est pour le moins sujet à caution.

Le nouveau chef du Département, lors de sa première séance de commission, a formé le voeu de ne pas oublier trop rapidement les critiques qu'il partageait comme député devant les difficultés que devaient affronter le législatif pour assumer sa fonction. Ce projet est à cet égard exemplaire de ce qu'il ne faut pas faire pour au moins les trois bonnes raisons suivantes :

a) manque d'informations;

b) erreur ou imprécision minimisée par les collaborateurs du département;

c) politique du fait accompli.

a) Manque d'informations

Les commissaires demandent régulièrement les tableaux indiquant les coûts, cas échéant les recettes de fonctionnement, induits par l'investissement proposé.

Dans le plan financier présenté, il est prévu un droit de superficie (recettes induites) qui n'est pas du tout pris en compte.

A cette remarque, il nous a été répondu que le département des Finances n'a pas exigé que cette recette y figure. Comme si pour répondre aux exigences des députés, il fallait l'accord d'un département tiers.

Par ailleurs, on nous a expliqué qu'un accord sur le montant du droit de superficie avec l'association représentant les entreprises de démolition avait été signé. Nous aurions souhaiter prendre connaissance de celui-ci. Le département nous a répondu qu'il serait annexé au prochain procès-verbal.

A ce jour, nous ne l'avons toujours pas reçu.

b) Erreur ou imprécision minimisée par les collaborateurs  du département

Le soussigné a signalé une erreur de report de la charge financière qui influence directement le calcul de la rente foncière.

Sans grand effort d'humilité, il nous a été répondu que cette erreur avait été remarquée mais qu'elle n'avait pas pu être corrigée à temps.

Alors pourquoi ne pas la signaler aux commissaires ?

De plus, comment ne pas être emprunts de suspicion lorsque, comme il nous a été dit, ce projet est en préparation depuis huit ans.

Vous conviendrez que ce genre de comportement n'incite pas le député à penser qu'il est traité avec une très haute considération.

c) Politique du fait accompli

La couverture financière influence largement la prise de position relative à un investissement. Celui-ci dégage des recettes par un loyer, facteur prépondérant dans ce cas. Or, le département signe un accord de prix pour celui-ci sans réserver l'éventuel refus du Grand Conseil, ce qui relève malheureusement d'une politique du fait accompli

A elles seules, ces trois raisons justifient le présent rapport.

Qu'il me soit permis de rajouter quelques considérations complémentaires.

Le Département n'a pas pu répondre à la demande de chiffrage, même approximatif, du coût de la partie expérimentation du projet.

Il n'a pas pu donner non plus une estimation de la part de l'investissement qui découle de la responsabilité collective devant être mise à la charge de l'Etat, tandis que l'autre part aurait dû être mise à la charge du client de l'entreprise de démolition selon le principe : "; pollution - responsabilisation ", c'est-à-dire exacerber le sens des responsabilités de tous ceux dont l'action induit fortuitement ou non une pollution.

Dans cet esprit, il est tout simplement impossible d'évaluer si le prix négocié du droit de superficie qui nous intéresse tient compte d'une part de prévention ou non.

Il ne nous reste plus, dès lors, que la possibilité contestable, de comparer le loyer d'un droit superficie d'une zone industrielle (Fr. 7.50 minimum le m2) avec celui négocié avec les démolisseurs (Fr. 4.- le m2), et de conclure que probablement de département n'a pas inclus le facteur coût pollution dans son calcul.

Lors des travaux de la Commission, plusieurs commissaires se sont étonnés d'un certain laxisme des différents départements concernés, car dans la même région, des entreprises triant des déchets de chantier risquent de polluer ces sites, qu'il faudra assainir dans quelques années à la charge de la collectivité.

Conclusion

Bien que nous dénoncions la légèreté avec laquelle ce projet de loi nous a été présenté, force est de constater que nous ne pouvons pas nous y opposer.

Gageons toutefois qu'à l'avenir la Commission des travaux sera mieux considérée, afin qu'elle puisse assurer sa fonction légitime et non pas se transformer en chambre d'enregistrement.

En signe de protestation, je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, de vous abstenir lors du vote de ce projet.

Premier débat

M. Chaïm Nissim (Ve), rapporteur de majorité. J'annonce un amendement que je présenterai en deuxième débat.

M. Bernard Annen (L), rapporteur de minorité. Je signale une erreur au début de mon rapport, à la page 7. A la place «du secteur du Bois-de-Peney» il faut lire : «du secteur du Bois-de-Bay à Peney». Je transmets une copie de mon rapport à Mme la sautière en vue de cette correction.

Vous pourriez vous étonner, Mesdames et Messieurs les députés, d'un rapport de minorité qui vous invite à l'abstention. Ce n'est pas fréquent et si j'ai opté pour cette conclusion c'est qu'il y a eu pratiquement unanimité de la commission sur la problématique du Bois-de-Bay.

J'ai décidé de rédiger ce rapport de minorité pour deux raisons, l'une de forme et l'autre de fond.

Sur la forme, j'estime qu'un certain haut fonctionnaire devrait avoir plus de considération pour le législatif. Je m'en explique.

Une erreur, contenue dans le projet, a été signalée par votre serviteur. Il lui a été répondu que l'erreur avait été constatée, mais personne n'en a informé la commission, lors de la présentation du projet. La seule excuse donnée a été de dire : «Oui, nous l'avons vue !». Nous nous attendions à un mot d'excuse. Malheureusement, il n'en a rien été.

Selon le procès-verbal de notre séance, nous demandions la communication d'une lettre du Conseil d'Etat, traitant d'un accord entre les démolisseurs et l'Etat. Le président Hausser avait demandé que l'on joigne ce document au procès-verbal. D'où mon observation dans mon rapport : «A ce jour, nous ne l'avons toujours pas reçu.» J'ignore si mes collègues de la commission des travaux l'ont obtenu. En ce qui me concerne, je n'en ai eu la transmission, par fax, qu'à la veille de la dernière séance du Grand Conseil, alors que mon rapport de minorité était déjà imprimé. Je regrette que le législatif soit traité de cette façon.

Voici pour le fond :

Ma première remarque est que le législatif, dans ce cas précis, a été mis devant le fait accompli. Autrement dit, un des critères les plus importants qui aurait pu influencer la décision qu'il a dû prendre était celui du droit de superficie. Or il avait déjà été quasiment arrêté avec les démolisseurs. Pour une bonne collaboration des deux pouvoirs, le Conseil d'Etat aurait pu, à l'époque, dire que l'accord était conclu sous réserve de l'acceptation du Grand Conseil.

Ma deuxième remarque figure à la fin de mon rapport. Elle a trait aux terres souillées. Je suis heureux d'avoir affaire à MM. Moutinot et Cramer, leurs départements respectifs étant directement concernés par ce problème.

Nous avons été avertis que le tri des déchets de chantier se fait à ciel ouvert et de manière sauvage dans ce canton. On déverse des bennes de déchets de chantier, avec tout ce qu'elles peuvent comporter, en plein champ. Des ouvriers les trient conformément aux instructions qu'ils reçoivent.

Nous disposons pourtant d'un centre cantonal de tri, géré par une société privée soumise, elle, à de tout autres exigences. Par exemple, le tri des déchets doit être opéré sous couvert.

Je me suis rendu sur place pour voir ce qu'il en était. C'est désolant et cela l'est d'autant plus que le département est au courant. C'est inadmissible car d'ici quelques années ces terres risquent d'être irrémédiablement polluées.

Je ne puis admettre qu'une entreprise privée soit soumise à des contraintes qui font que son prix de revient est très élevé et qu'elle subisse, en plus, la concurrence déloyale d'entreprises qui, elles, trient les déchets en plein air, sans précaution aucune.

Je ne donnerai pas de noms publiquement, mais je les communiquerai volontiers à M. Cramer, lors d'un entretien privé.

Voilà ce qui m'a amené à écrire ce rapport de minorité. Je vous invite à suivre la conclusion quasiment unanime de la commission en votant ce crédit en faveur du Bois-de-Bay. Par contre, je vous demande de rejeter l'amendement de M. Nissim qui est une anomalie en ce sens que notre collègue, qui a voté le projet, voulait rédiger le rapport de minorité. Comme ce n'était pas possible, il a dû faire un rapport de majorité. Et son amendement a été rejeté à la quasi-unanimité de la commission.

Maintenant, il présente un rapport de majorité que je ne trouve pas très loyal puisqu'il aurait dû exprimer l'opinion de la majorité de la commission. Vous auriez pu, cher ami, transmettre votre amendement à un membre du parti des Verts, ce qui aurait été plus courtois.

M. Claude Blanc (PDC). J'ai voté ce projet de loi en commission et je le voterai ici.

S'il est vrai que ce projet concerne des faits anciens, il est vrai aussi que la loi est toujours bafouée. J'ai constaté aussi que l'on triait les déchets n'importe comment. Il semble que les services de l'Etat se renvoient la balle, car une partie du tri des déchets est du ressort de l'ancien département des travaux publics et l'autre de celui du département de l'intérieur. On continue donc à trier les déchets au risque de souiller le sous-sol et personne n'intervient pour faire respecter la loi.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Je dénote un mouvement d'humeur dans le rapport de minorité de M. Annen.

Je puis l'assurer que les fonctionnaires du département manifestent, en toutes circonstances, le respect dû au députés de ce Grand Conseil.

Monsieur Annen, vous relevez une exception. Elle est regrettable, mais encore une fois je puis assurer les députés de ce parlement du respect des fonctionnaires de mon département.

Il conviendra de voter ce projet de loi qui a remporté l'adhésion de la grande majorité de la commission. Si nécessaire, je m'exprimerai tout à l'heure sur l'amendement de M. Nissim pour vous inciter à le rejeter.

En ce qui concerne le tri des déchets, les départements ne se renvoient pas la balle, Monsieur Blanc ! M. Cramer et moi-même, nous nous sommes entretenus plusieurs fois à ce sujet. Nous sommes sur la même longueur d'onde et nous n'entendons pas que ce tri s'opère sauvagement et porte atteinte à l'environnement.

Le président. Je salue à la tribune la présence de M. Peter Tschopp, conseiller national. (Applaudissements.)

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Je n'ai guère à ajouter aux propos de M. Moutinot, si ce n'est que je tiens à remercier MM. Annen et Blanc de leurs interventions qui montrent à quel point ils se soucient du problème des terres souillées par le tri des déchets.

M. Moutinot et moi-même jugeons la situation préoccupante. Je serai donc amené à déposer prochainement un projet de loi devant ce Grand Conseil. J'espère être en mesure de le faire ce printemps encore. Les services de l'administration travaillent pour que cesse cette situation déplorable qui incite des personnes à se lancer, en toute illégalité, dans une activité extrêmement dommageable pour l'environnement.

Pour le surplus, nous avons pris des mesures immédiates à l'encontre des entreprises qui opèrent ces tris sauvages. Soyez assurés que les comportements qui doivent être sanctionnés le seront.

M. Bernard Annen (L), rapporteur de minorité. Je vous remercie de votre réponse, Monsieur le président Cramer. Néanmoins, je voudrais encore dire ceci :

Une ordonnance en vigueur vous permet d'intervenir avec effet immédiat.

Hier encore, je me suis rendu sur place. Rien n'avait changé. Les gens travaillaient sans aucune précaution. On peut le constater même sans descendre de voiture.

Vous pouvez faire cesser cette activité immédiatement.

M. Pierre Meyll (AdG). Excusez mon esprit d'escalier qui me fait intervenir après le Conseil d'Etat !

Le coût de cette opération est évalué à 8,5 millions de francs. Je m'en inquiète, car une possibilité de nettoyer les terres souillées avait été étudiée il y a de nombreuses années et, déjà à cette époque, elle avait suscité un projet d'un coût beaucoup plus élevé.

Je souhaite que l'on reste dans la fourchette prévue, mais des explications fournies en commission nous avons pu déduire que des dépenses beaucoup plus importantes pourraient être engagées.

Par conséquent, il faut s'attendre à voter une rallonge et c'est simplement pour attirer l'attention de ce Grand Conseil que je préconise la prise de mesures très strictes dès les travaux de démolition.

Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que lesarticles l à 3.

Art. 4

Le président. Cet article fait l'objet d'une proposition d'amendement qui figure à la page 5 du rapport de majorité.

M. Chaïm Nissim (Ve), rapporteur de majorité. Je présenterai mon point de vue sur ce projet de loi et mon amendement. Les interventions ont toutes fait état d'une pollution extrêmement grave, liée à une décharge de voitures de part et d'autre de la RC 75.

Les dépôts ont été effectués pendant trente ans environ et durant toute cette période des liquides de freins, des hydrocarbures...

Le président. Les députés qui conversent près de la porte de la buvette sont priés de poursuivre leurs entretiens à l'intérieur de celle-ci !

M. Chaïm Nissim, rapporteur de majorité. ...des huiles de boîtes à vitesse, ont pollué le terrain. La situation actuelle est extrêmement préoccupante. Vous connaissez les chiffres quantifiant cette pollution. Il y a environ cent vingt-six tonnes d'hydrocarbures dans ce terrain. C'est dire si cette pollution est grave. Malheureusement, elle n'est pas unique.

L'OFEFP, l'office fédéral responsable, a recensé les terrains pollués dans toute la Suisse, Il en a trouvé quatre mille à risques. Un premier calcul lui a démontré que leur dépollution reviendrait à cinq milliards, et cette dépollution ne sera jamais complète. Dans le cas du Bois-de-Bay, nous avons une pollution mixte provoquée par les métaux lourds et les hydrocarbures. Pour l'heure, il n'existe pas de technique pour nettoyer les terrains souillés par une pollution mixte. Des techniques de bioremédiation seront peut-être mises au point ces prochaines années. Cela explique la difficulté de concrétiser un tel projet et cela explique aussi la durée des travaux - huit ans ! - entrepris par les départements de MM. Moutinot et Cramer pour trouver des techniques pas trop coûteuses et acceptables du point de vue écologique.

Il s'agit de problèmes gravissimes. Ne vous imaginez surtout pas que vous les résoudrez avec les quelque 8 millions demandés ce soir ! Vous confinerez simplement cette pollution dans une sorte de baignoire de trois mètres de profondeur sur deux cents mètres de longueur, en attendant d'appliquer, dans plusieurs années, une technique efficace de dépollution.

En commission, le groupe écologiste et l'Alliance de gauche ont préconisé, dès le début, l'application du principe du pollueur payeur. Il est tout à fait normal que les automobilistes paient pour cette grave atteinte à notre environnement, de même qu'il est normal qu'ils paient pour les dégâts causés aux ponts et aux routes. A cet égard, nous reparlerons du principe du pollueur payeur.

Nous voulons la transparence des coûts. Il faut que les gens sachent, dès le départ, ce qu'il leur en coûtera quand ils feront démolir leur véhicule. Il faut qu'ils se rendent compte que le voiture pollue même quand elle ne roule plus, parce qu'elle laisse échapper des métaux lourds et des hydrocarbures qui polluent les sols. La collectivité doit y remédier, même imparfaitement.

C'est pourquoi mon amendement a été accepté par la commission dans un premier temps - je tiens à le souligner - puis a été rejeté pour diverses raisons politiques.

L'article 4 amendé comporte deux parts de financement. L'une, d'environ 4 millions, est à la charge des démolisseurs qui devront s'acquitter d'un loyer de 4 F par m2, je crois. L'autre, qui représente le solde, sera couverte par l'augmentation de l'impôt auto, compte tenu d'un temps d'amortissement sur plusieurs années, comme cela aurait été le cas pour la traversée de la rade.

Je vous demande donc de voter mon amendement qui consiste à compléter l'article 4 en ces termes :

«Les autres charges de financement sont couvertes par l'impôt auto.»

M. Alberto Velasco (S). Le groupe socialiste acceptera le projet de loi. En revanche, il rejettera l'amendement du groupe écologiste pour deux raisons :

1. Nous pensons que le principe du pollueur payeur tel qu'exposé dans le rapport de majorité est inacceptable. Le pollueur, dans le cas qui nous occupe, est l'entreprise. C'est uniquement elle qui doit payer pour ne pas avoir pris les mesures adéquates lors des démolitions.

2. Le prélèvement d'un impôt auto affecté à la dépollution causera un nouveau problème lié à son application. Par contre, une taxe anticipée, lors de l'achat ou de l'immatriculation, pourrait être envisagée. Cette taxe est prélevée à Fribourg - 10 F - et à Neuchâtel - 100 F.

Une ordonnance fédérale sur le traitement des déchets permet le prélèvement de telles taxes. Pour les automobilistes, c'est la taxe introduite en 1992, dite taxe anticipée de recyclage. Elle s'élève à 75 F par véhicule. A ce jour, elle a été appliquée à cent septante mille véhicules. La Fondation pour l'élimination écologique des véhicules à moteurs est chargée de la gestion de cette taxe prélevée par les garagistes. Par conséquent, c'est elle qu'il faut solliciter. Il est question qu'elle utilise les fonds recueillis pour construire une installation écologique pour l'élimination de ces déchets.

M. Pierre Meyll (AdG). La formulation de cet amendement est attirante puisqu'elle en appelle au principe du pollueur payeur.

En fait, il est impossible de citer un chiffre, l'impôt auto étant intégré dans la recette de l'Etat. On ne saurait le modifier en fonction des dégâts et sa refonte dépend d'une formulation entièrement nouvelle.

L'amendement, tel qu'il est formulé, est inacceptable. Il pourrait susciter un référendum qui ne ferait que retarder les travaux à entreprendre.

Pour l'instant, nous devons accepter ce projet de loi, rejeter l'amendement, puis étudier la refonte de l'impôt auto pour qu'il soit affecté, partiellement, aux travaux nécessités par la pollution automobile.

M. Bernard Annen (L), rapporteur de minorité. Paradoxalement, je me transforme en rapporteur de majorité, la majorité ayant refusé cet amendement en commission !

Mon collègue Nissim m'a fait remonter le temps, l'espace d'un instant, puisque je viens d'apprendre que MM. Moutinot et Cramer sont conseillers d'Etat depuis huit ans !

Trêve de plaisanterie ! Il y a deux manières d'aborder ce genre de problème : l'une, un peu péjorative, est adoptée par certains qui, à mon avis, devraient réfléchir avant de traiter les automobilistes de pollueurs payeurs; l'autre est la «pollution/responsabilisation», une formule qui fait appel à la responsabilité de chaque citoyen.

Il faut savoir que nous étudions, en commission, une série de projets pour des ponts atteints de carbonatation. Et, pour chaque projet, M. Nissim réclame un impôt spécifique. On ne parle plus de centimes additionnels, mais de dixièmes, voire de centièmes de centimes additionnels ! Cela deviendra vite ingérable.

En commission, j'ai fait remarquer que vous utilisiez, Monsieur Nissim, la tactique du saucissonnage pour ne pas effrayer les automobilistes. Comme je sais que vous avez du courage, je suis certain que vous accepterez de déposer un projet de loi qui traitera du sujet dans sa globalité, et les citoyens se détermineront en temps opportun.

M. Claude Blanc (PDC). J'interviens sur la forme. M. Nissim présente un amendement en commission et celui-ci est rejeté. Ensuite, la commission vote le projet, M. Nissim accepte de rédiger le rapport de majorité mais il y introduit son amendement.

Monsieur Nissim, cela s'appelle un abus de confiance. Si vous aviez l'intention de revenir avec un amendement qui n'avait pas été accepté par la commission, vous deviez renoncer à rédiger le rapport de majorité et, a fortiori, à y introduire votre amendement par la bande. C'est un réel abus de confiance.

Nous sommes en train de parler de l'impôt auto. Permettez-moi de dire qu'il s'agit d'une broutille comparé à ce qui s'est passé. Voici les faits, tels qu'ils se sont déroulés en commission : à l'exception d'un député radical, tout le monde s'est déclaré d'accord avec deux projets, d'un montant d'environ 15 millions, pour la réfection complète du pont de Lancy et du pont de l'Ecu. Sur ces entrefaites, M. Nissim a déposé subrepticement un amendement proposant une augmentation de l'impôt auto pour financer ces travaux. La commission a voté cet amendement. Mais, comme nous ne savions pas très bien comment l'énoncer, nous avons préféré remettre nos travaux à une séance ultérieure afin de présenter une formulation précise de l'article de M. Nissim.

A ladite séance, inutile de vous dire que nous avons été en butte à la grosse artillerie ! MM. Moutinot et Cordt-Möller ont fait ressortir la malhonnêteté du procédé. Ils nous ont dit que nous ne pouvions tromper les gens en augmentant l'impôt auto par petites tranches et que, si nous voulions le faire, nous devions agir franchement.

Je rends hommage à M. Moutinot pour cette déclaration conforme à une politique honnête. En revanche, je constate que la vôtre, Monsieur Nissim, est, pour le moins, tordue !

Les points sur les «i» ayant été mis par M. Moutinot, les socialistes ont tourné leur veste, comme ils l'ont déjà fait et le feront encore... (Protestations.) Même l'Alliance de gauche s'est écrasée. Finalement, il n'est resté que deux partisans du saucissonnage de l'augmentation de l'impôt auto : j'ai nommé M. Nissim et le député radical Visseur !

M. Chaïm Nissim (Ve), rapporteur de majorité. Pour faire plaisir à M. Blanc, si respectueux de la forme, je retire mon amendement qui, de toute façon, aurait été rejeté.

Monsieur Annen, vous préconisez la formule «pollution-responsabilisation». Certes, on peut s'exprimer différemment, mais il n'empêche que vous partagez mon concept qui est celui du pollueur payeur. On peut tortiller les mots, mais les idées et les concepts demeurent. Il est normal que les pollueurs soient les payeurs.

Monsieur Velasco, vous parlez d'un organisme fédéral qui pourrait collecter l'argent pour financer les projets dont nous débattons à la commission des travaux. M. Annen dit la même chose quand il préconise le traitement global du problème. Je suis d'accord, n'étant pas un adepte du saucissonnage.

Il nous faut un projet global et clair sur lequel le peuple se prononcera. Je partage votre point de vue, Monsieur Blanc. C'est pourquoi j'accepte bien volontiers de retirer mon amendement.

Il n'en demeure pas moins que ce Grand Conseil devra se pencher sur le problème des diverses pollutions indirectes émises par la voiture durant ces quarante dernières années, et cela coûtera très cher.

M. Moutinot a été de bon conseil quand il a recommandé à la commission des travaux de traiter globalement du problème.

Je rappelle que ce Grand Conseil avait majoritairement accepté le principe du pollueur payeur lors d'une séance exceptionnelle de la commission des travaux. Restait à en étudier la formulation. Et ce Grand Conseil va être très embarrassé pour faire admettre ce principe à la population. Il faudra la convaincre de sa justesse et mon amendement tendait principalement à susciter le débat. Il faut que la population soit consciente de la gravité de la pollution qui ne touche pas seulement les ponts et le Bois-de-Bay. Elle est généralisée ! Il faut donc que la population sache qu'elle devra payer cher pour une dépollution indispensable, bien que partielle.

Le président. Je prends acte du retrait de l'amendement de M. Chaïm Nissim et mets aux voix l'article 4, tel qu'il ressort des travaux de la commission.

Mis aux voix, l'article 4 est adopté, de même que les articles 5 et 6.

Troisième débat

M. Chaïm Nissim (Ve), rapporteur de majorité. Permettez-moi de commenter brièvement la fin du rapport de minorité de M. Annen.

Monsieur Annen, vos demandes en commission et celles de M. Barro étaient justifiées. M. Barro voulait obtenir le tableau des coûts, ce qui est légitime, pour l'annexer au projet. Idem pour votre souci de transparence, Monsieur Annen. Nous ne divergeons donc pas.

Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Loi

(7708)

ouvrant un crédit de construction pour la réalisation d'un système séparatif et de confinement des terres souillées sur les terrains des démolisseurs du Bois-de-Bay à Peney

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

décrète ce qui suit:

Art. 1 Crédit d'investissement

Un crédit de construction de 8 427 385 F (y compris TVA et renchérissement) est ouvert au Conseil d'Etat pour couvrir les frais relatifs à la réalisation d'un système séparatif et de confinement des terres souillées sur les terrains des démolisseurs au Bois-de-Bay à Peney.

Art. 2 Budget d'investissement

Ce crédit est réparti en tranches annuelles et inscrit au budget d'investissement dès 1997 sous la rubrique 54.02.00.501.04.

Art. 3 Financement

Le financement de ce crédit est assuré par le recours à l'emprunt, dans les limites du cadre directeur fixant à environ 250 millions de francs le maximum des investissements annuels, dont les charges en intérêts et en amortissements sont à couvrir par l'impôt.

Art. 4

Les charges du financement de la zone des démolisseurs sont couvertes par une augmentation de la rente - loyer des superficiaires et locataires.

Art. 5 Amortissement

L'investissement est amorti chaque année d'un montant calculé sur sa valeur résiduelle et qui est porté au compte de fonctionnement.

Art. 6 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.

Le président. Je salue à la tribune la présence de Mme Françoise Saudan, ancienne présidente du Grand Conseil et conseillère aux Etats. (Applaudissements.)