République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1190
8. Proposition de motion de Mmes et MM. Alberto Velasco, Christian Brunier, Christine Sayegh, Luc Gilly, Dolores Loly Bolay, Christian Ferrazino, Anne Briol, Antonio Hodgers et David Hiler : La maison des associations socio-politiques. ( )M1190

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le monde associatif

Nous sommes - en réalité - dans une époque où il faut reconquérir les espaces de la citoyenneté qui sont en train de se rétrécir et de s'appauvrir, alors que les espaces du Marché et de la Technologie s'élargissent et s'enrichissent de plus en plus. Les mouvements associatifs et tous ceux qui agissent au sein de la société civile ont un rôle fondamental à jouer. Sans leur action, il n'y aura pas de contrat social mondial.

Riccardo Petrella

Chef de la Division ";Recherche sociale"

Commission européenne, Bruxelles

Citation tirée de ";Nouveau contrat socialou Apartheid mondial"

Son importance et ses enjeux

Selon le dictionnaire Larousse, une association est un "; Groupement de personnes réunies dans un intérêt commun, différent de la poursuite de bénéfices ".

Se concentrant sur un aspect socio-politique, que ce soit en soutenant un peuple ou des personnes opprimées, oeuvrant pour le désarmement, ou faisant la promotion d'un développement durable, les associations transmettent les valeurs et les préoccupations de leurs membres dans le débat public.

Les associations socio-politiques remplissent une fonction parallèle à celle des partis politiques en représentant des communautés d'intérêt.

La particularité du monde associatif est d'agir à la périphérie du domaine politique et non de le briguer.

Les associations garantissent le maintien de la communication entre les demandes et les préoccupations de la société civile d'une part, et les autorités publiques d'autre part.

Depuis les années 60, de nombreux changements socio-politiques ont amélioré notre quotidien, cela a souvent été dû à l'action déterminante des associations.

Par exemple:

- l'adoption de lois antiracistes,

- l'arrêt des essais nucléaires,

- le Service civil,

- le développement du commerce équitable,

- l'adoption de produits provenant de l'agriculture biologique par les grandes surfaces et les consommateurs,

- le développement d'un réseau de pistes cyclables en ville et à la périphérie,

- le développement de coopératives d'habitation et les baux associatifs,

- les Maisons de quartier et Centres de loisirs,

- la protection concrète des lacs et rivières,

- l'interdiction de fabrication des mines anti-personnels.

C'est à force d'organiser des actions, des manifestations, des conférences publiques, de lancer des débats, des initiatives populaires, de tenir des stands d'information, des conférences de presse, de réunir des signatures et de publier des rapports que ce qui était tenu pour être ";idéaliste" s'est transformé peu à peu en une réalité quotidienne.

L'importance des acteurs non-étatiques dans les relations internationales

Les associations, appelées ONG dans ce contexte, tiennent un rôle toujours plus important dans la politique internationale.

A chaque grande rencontre de l'ONU, nous constatons un nombre croissant d'ONG accréditées. De nombreux dossiers de l'agenda de l'ONU sont initiés par des ONG. Les conventions internationales sont souvent rédigées dans le sens voulu par des coalitions d'ONG (interdiction des essais nucléaires, droit de la mer, droit de l'enfant ...).

La force des ONG provient du fait qu'elles représentent une des seules instances exprimant directement les préoccupations de l'opinion publique.

La disproportion entre les moyens dont disposent les ONG et les rôles qu'elles remplissent est saisissante, spécialement si l'on pense aux conditions de travail dont jouissent les organisations internationales. C'est pourquoi les autorités, au titre du soutien à la Genève internationale, doivent reconnaître et soutenir le monde associatif.

La réalité des associations

Malheureusement, nous ne pouvons que constater que la grande majorité des associations à Genève vivent des situations difficiles que ce soit du point de vue organisationnel ou financier.

Les principales causes de cette situation sont les locaux.

La recherche de locaux sur le marché immobilier n'offre que des loyers prévus pour des entreprises à but lucratif. Ces loyers sont souvent prohibitifs ou représentent un budget annuel équivalent au salaire d'un permanent. C'est pourquoi, trop souvent, des associations se trouvent dans le dilemme de prendre des locaux ou de rémunérer le travail de coordination nécessaire à leur bon fonctionnement.

D'autre part, il est important que les dons provenant du public servent aux campagnes et non pas à payer des loyers.

Les associations ont un réel besoin de locaux à loyer modérés.

Un travail reconnu

Trop souvent, nous remarquons que ce sont des bénévoles qui font vivre les associations. Ils y travaillent week-ends, soirées, congés, toute la vie privée est sacrifiée. Ce qui ne peut être fait pendant les "; heures de bureau " reste en attente ou est effectué dans l'urgence. De telles conditions sont inacceptables en comparaison à celles existant dans le monde du travail.

D'autre part, nous constatons que les sujets travaillés demandent une spécialisation grandissante du fait des enjeux soulevés et de la complexité qu'ils représentent.

Les associations ont un réel besoin de permanents salariés pour effectuer correctement leur travail.

La Maison des associations socio-politiques

Le regroupement en la Fédération pour l'Expression Associative - FEAS - est la solution qu'une cinquantaine d'associations se sont données pour obtenir des locaux, bénéficier de synergies et faire des économies d'échelle.

A près deux ans de consultation et suite au dépouillement d'un questionnaire rempli par ses associations membres, la FEAS est à la recherche active de locaux à loyers modérés. Ce bâtiment qui aurait pour nom la "; Maison des associations socio-politiques " mettrait des bureaux à disposition des associations.

La FEAS veut également faire de ce lieu un espace facilitant l'accueil du public, les échanges thématiques, des débats, des expositions, des conférences, et le partage du matériel.

Il est important que les associations puissent avoir une place suffisante en vue d'installer des structures communes. Comme par exemple:

- des salles de réunions

- une grande salle de conférences et de projection

- des surfaces d'exposition

- une salle multimédia

- un cinéma

- un service d'impression

- une bibliothèque

- un restaurant associatif

- des surfaces de stockage de matériel

- une menuiserie

- des arcades associatives

- des camionnettes collectives

- une crèche

Un accent particulier sera mis sur la mise en commun des différentes stratégies d'actions et pratiques dans le but d'une meilleure utilisation de la spécificité de chacun.

La dispersion de la vie associative genevoise ne pose pas seulement problème aux associations, elle est également un obstacle à l'accès des citoyens à cette source d'information, d'idées, d'actions et de débats. Le regroupement de diverses associations en un lieu commun permettrait à la population de prendre contact avec toute la richesse de l'ensemble de la vie associative genevoise, ce qui fait si cruellement défaut à l'heure actuelle.

A partir des moyens qu'offrira cette Maison des associations socio-politiques, la FEAS prévoit de réaliser différents projets pour soutenir et développer le travail des associations.

Par exemple:

- un Forum international regroupant associations, groupements et ONG. Cette conférence internationale sera organisée exclusivement par ces dernières pour présenter leurs préoccupations face à la situation mondiale,

- un bureau de travail temporaire associatif,

- une présence socio-politique d'associations dans des événements culturels de la vie genevoise.

Des exemples à suivre...

Il existe de nombreuses "; Maisons associatives " dans différents pays tels que le Canada et la France.

A ce titre vous trouverez en annexe un extrait du dossier de la Maison associative de Chambéry.

C'est pourquoi nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à renvoyer cette motion à la commission des travaux.

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Débat

Mme Christine Sayegh (S). Nous fêtons cette année le cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme. «Les droits de l'homme, c'est un échec accablant !», s'est exclamée Mary Robinson, haut-commissaire de l'ONU aux droits de l'homme. Ceci démontre à quel point les valeurs immatérielles sont ignorées. Notre société en détient notamment une qui se rappelle à nous plus particulièrement en période de difficulté économique : cette valeur, c'est le monde associatif.

Ces associations qui trouvent leur énergie principalement dans le bénévolat pour défendre le respect du citoyen, dénoncer les injustices sociales, offrir une aide, une écoute, motiver la solidarité, animer les quartiers, contribuer à l'amélioration de notre qualité de vie; ces associations sont un relais nécessaire entre la population et les instances politiques.

Cette nécessité doit être reconnue, non seulement par un constat, mais aussi par des actes. Offrir un lieu adéquat contribuant favorablement à leurs activités devrait rencontrer un large consensus. J'ai été pour ma part impressionnée par le sérieux et la détermination de quelque septante associations réunies en fédération pour l'expression associative afin de mener à bien un projet de maison des associations.

Les anciens locaux de «La Suisse» sont vides et une étude très complète a été présentée au président du DAEL comprenant un projet d'aménagement avec plan à l'appui, une évaluation du coût de fonctionnement avec le mode de financement sous forme de location des surfaces et engagement financier des associations. Le projet est crédible. C'est pourquoi il y a urgence et je vous remercie d'avoir accepté de traiter cette motion ce soir car l'affectation des locaux SONOR SA serait idéale tant par la surface disponible que par la situation.

Toutefois une vente aux enchères de ces locaux est prévue prochainement, au plus tard en juin. Il n'y a pas d'offres fermes d'achat actuellement mais il est possible qu'à fin mars nous ayons une réponse d'une personne qui souhaiterait les acquérir.

Mme Dolores Loly Bolay (AdG). A Genève, beaucoup d'associations peinent pour trouver des locaux à leur portée financière. Les loyers souvent prohibitifs associés au manque d'argent pour payer les permanents constituent un frein au développement de ces associations. Pourtant personne ne pourra contester ici le rôle important que ces associations jouent tant au niveau culturel que sur le plan social et humain. Leur regroupement en une fédération pour l'expression associative est la solution qu'une cinquantaine d'associations se sont donnée pour obtenir des locaux, bénéficier des synergies et réaliser des économies d'échelle. La maison des associations socio-politiques existe déjà dans d'autres pays: en Espagne, en France ou même au Canada qui ont la volonté ferme de promouvoir la vie associative, élément essentiel de la cohésion sociale d'une ville et de l'intégration de chacun et chacune de ses habitants.

M. David Hiler (Ve). Sur le fond tout a été dit. Il reste maintenant le catalogue des mesures proposées. Il avait été question à l'origine de débattre de cela en commission. Les délais ne le permettant pas, j'aimerais - en tant que signataire - préciser deux ou trois points :

Je ne crois pas qu'il soit bon que nous achetions et que nous louions les locaux. Je pense que nous devons nous contenter de les acheter et de les remettre en droit de superficie. En tant que signataire de cette motion, je n'ai jamais entendu octroyer des subventions indirectes. Je ne crois pas non plus qu'il soit très opportun de garantir des déficits pendant trois ans.

Pourquoi ? Parce que normalement si un plan financier ne marche pas les trois premières années, il y a assez peu de chances pour qu'il marche les années suivantes. Je crois qu'il faut vraiment s'en tenir à une politique où nous considérons ces associations comme des partenaires responsables, capables d'assumer leurs engagements. Cela signifie que nous intervenons au niveau de l'acquisition du terrain - car c'est souhaitable - et que, pour le reste, une intervention en capital est envisageable au niveau des fonds propres. Il ne s'agit pas, par le biais de cette maison, d'augmenter de façon indirecte des subventions au moment où - par ailleurs - nous en bloquons d'autres ou nous en baissons certaines. Il est extrêmement important que nous gardions le contrôle de ce qui est effectivement versé afin de maintenir l'équité entre les différentes associations qui s'adressent à nous pour les soutenir et qui ne seront pas toutes, je le rappelle, dans cette maison. Nous encourageons vivement le Conseil d'Etat à conclure ce qui peut l'être, à étudier ce qui doit l'être mais à ne pas mettre le doigt dans un engrenage qui nous pousserait non seulement à faciliter cette opération mais graduellement à la financer un peu plus chaque jour avec un argent qu'actuellement, à vrai dire, nous ne possédons pas.

M. Luc Gilly (AdG). Je vais être bref puisque mes prédécesseurs ont expliqué l'enjeu de cette maison associative. Je rappellerai deux choses: plus de soixante associations, voire septante font partie maintenant de cette nouvelle fédération. Septante associations, cela représente sur Genève des milliers de personnes qui travaillent sur des projets, qui s'engagent bénévolement ou presque puisque certaines sont des permanents comme moi-même. Je crois simplement que, pour une ville comme Genève, ce serait une reconnaissance urgente à toutes ces personnes et autres qui sont dispersées un petit peu dans toute la ville et qui ont du mal à mieux se faire connaître ou à échanger plus rapidement leurs informations.

Le deuxième point de cette intervention...

Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît, Mesdames et Messieurs ! Je prie les personnes qui ont des conversations privées de bien vouloir les tenir en dehors de cette enceinte. Merci. Poursuivez, Monsieur le député!

M. Luc Gilly. Le deuxième point de cette intervention concerne effectivement l'urgence du projet. Vous avez peut-être lu que les bâtiments de «La Suisse» risquaient d'être rachetés de façon morcelée et, si cela devait être le cas, ces bâtiments seraient effectivement perdus pour le projet qui est déjà très avancé dans sa préparation. Tout le dossier a été fait avec un très grand sérieux...

Le président. Monsieur Annen, Monsieur Lombard, veuillez tenir vos conversations en dehors de l'enceinte, s'il vous plaît ! (Protestations.) On entend votre voix jusqu'ici, Monsieur, et je n'entends plus celle de l'orateur !

M. Luc Gilly. Etant donné l'urgence et puisque - je le répète - un dossier est déjà extrêmement bien préparé sur cet objet, il serait bien que le Conseil d'Etat puisse se pencher au plus vite tant sur les propositions financières pour réaliser ce projet que sur les propositions d'architecture et la répartition des différents locaux. Vous avez sous les yeux toute la liste ainsi que le projet dans la motion 1190; je ne veux pas allonger le débat là-dessus. J'espère que le conseiller d'Etat Robert Cramer avec Laurent Moutinot, je pense, pourront le plus vite possible travailler d'arrache-pied sur ce dossier.

M. Claude Blanc (PDC). Je voudrais d'abord remercier M. Hiler d'avoir clarifié la situation. Je pense que ce qu'il a dit était nécessaire. Cette motion a un certain nombre d'invites qui sont toutes plus mirifiques les unes que les autres. L'évaluation des coûts n'a cependant absolument pas été faite. Il est demandé au Conseil d'Etat d'acheter un groupe d'immeubles mais il n'est pas précisé de quelle manière il va être géré. Je trouve à la limite de l'honnêteté de procéder par la voie d'une motion sans avoir au préalable analysé tout ce que cela pourrait coûter à l'Etat.

Si vous voulez être tout à fait francs, Mesdames et Messieurs les députés, vous devez présenter un projet de loi qui doit avoir un coût; ce coût doit être évalué afin qu'un référendum puisse ou non être demandé. Il n'est pas loyal d'essayer de nous entraîner dans une spirale dont on ne sait absolument pas ce qu'elle va nous coûter finalement. Je crois que c'est une motion... (Brouhaha.) Finalement ça vous ressemble ! C'est la démocratie telle que vous l'entendez, mais malheureusement je n'ai jamais conçu la démocratie ainsi et j'aimerais bien que le peuple soit mis au courant et sache combien ça va lui coûter.

M. David Hiler (Ve). J'aimerais répondre à M. Blanc qui se livre à des interprétations politiques discutables. Il serait préférable de lire ce qui est écrit: ce qui est demandé de façon spécifique, c'est un crédit d'étude. Ensuite il y a les différentes possibilités envisagées.

Il est permis d'imaginer que le Conseil d'Etat, qui est responsable des achats de terrains selon la répartition des compétences, va se montrer circonspect et ne va pas s'engager dans une dépense de fonctionnement de quelque cinq millions par l'achat de cette maison si véritablement il n'y a pas moyen de trouver une solution. Je crois que M. Moutinot est mieux habilité à étudier le projet de plan financier, à le modifier et, le cas échéant, à trouver des formules alternatives.

En dernière analyse, je vous rappelle qu'il s'agit d'une motion. Si M. Moutinot estime que ce projet n'est pas réalisable, qu'il nous entraîne dans des dépenses difficiles à supporter qui seraient en fait des subventions qui ne figureraient pas dans le budget, il nous fera un rapport. Le cas échéant, il prendra les mesures ainsi qu'il peut le faire lorsqu'une motion est votée.

Monsieur Blanc, je suis persuadé qu'il aurait été préférable d'étudier cette motion en commission. Mais en l'occurrence, comme elle a une chance sur deux de ne plus avoir aucun effet quand elle en sortira, je crois qu'il vaut mieux indiquer clairement ce que l'on veut, ce que l'on souhaite et puis - permettez-moi de le souligner - il faut parfois faire confiance au Conseil d'Etat ! (Exclamations.)

M. Christian Grobet (AdG). Je comprends vos préoccupations, Monsieur Blanc, mais elles m'étonnent quand même un peu. Vous savez comme moi qu'il y a une longue pratique dans cette République conformément du reste aux prérogatives qui sont accordées au Conseil d'Etat, à savoir que le Conseil d'Etat procède à des acquisitions immobilières sans que celles-ci fassent l'objet d'autre chose que l'octroi d'un crédit enveloppe par le Grand Conseil. C'est M. Robert Ducret qui a introduit cette pratique du crédit enveloppe; jusqu'en 1985 ou 1988. Monsieur Blanc, vous aviez dans votre parti un excellent magistrat, M. Jean Babel, qui a... (Brouhaha.)

M. Claude Blanc. Vous le mettez à toutes les sauces quand ça vous arrange !

M. Christian Grobet. Comment, vous sous-estimez M. Jean Babel ?

M. Claude Blanc. C'est n'importe quoi !

M. Christian Grobet. J'ai de la peine à vous entendre, vous parlerez tout à l'heure, mais moi je rends toujours hommage à M. Jean Babel pour sa politique d'acquisition foncière laquelle, comme vous l'avez toujours estimé, était un modèle du genre. Je ne vais pas vous rappeler toute une série d'acquisitions foncières qui ont été faites du temps de M. Jean Babel et qui ont bénéficié à divers groupements dont un certain nombre sont proches de votre parti. Je vous ferai grâce d'en établir la liste ce soir.

Ce que je voulais simplement dire, c'est que le fait que l'Etat acquière des valeurs immobilières, des immeubles, entre parfaitement dans ses prérogatives et qu'il n'est pas nécessaire de présenter à cette fin un projet de loi ad hoc. Cela étant dit, c'est vrai que vous avez parfaitement raison, le projet de loi est pré-analysé afin de savoir si les acquisitions envisagées sont bonnes ou non, s'il y a d'autres solutions. Nous estimons qu'il est important de soutenir les associations qui ont énormément de peine à trouver des locaux et qui jouent un rôle essentiel dans la vie sociale de notre canton. Dans une commune qui est chère du reste à un conseiller d'Etat de votre parti, Onex, il existe une Maison onésienne qui est à disposition des associations locales de cette commune. Il y aurait lieu de s'inspirer de ce modèle et d'arriver aussi en Ville de Genève à mettre à disposition des locaux pour des associations. Cela a été fait dans le passé par un certain nombre de magistrats dont moi-même. Je ne vois pas où est le problème.

Je profite cependant de cette occasion pour dire à M. Moutinot, et je pense qu'il y aura peut-être une intervention à ce sujet, qu'il y aurait lieu effectivement, les choses coûtant cher, d'éviter de jeter à l'Arve la valeur d'environ trois millions - je pense - d'un bâtiment qui ne prend qu'une très petite place dans le périmètre de l'ancien Palais des expositions et qui pourrait servir précisément de lieu de réunion pour les associations. Ce bâtiment possède une très belle salle qui est en parfait état. Sa démolition et la construction d'un nouveau bâtiment coûteraient au moins 3 millions. Vu l'état de ce bâtiment, il n'y aurait pas besoin d'engager des frais de rénovation.

Le président. Monsieur le député Roux... Ah, pardon, je me suis trompé de villa, il s'agit du député Blanc !

M. Claude Blanc (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, M. Grobet est vraiment un artiste. Je dirais qu'il est un funambule parce qu'il arrive à utiliser n'importe quel argument pour arriver à ses fins. Je l'avais déjà analysé tout à l'heure quand on parlait de Montbrillant. Je vous ai vu utiliser successivement au moins quatre ou cinq voies pour essayer de brouiller les cartes. J'avoue franchement que je ne cesserai jamais de vous admirer. (Exclamations.)

Je dois dire que vous en mettez un peu trop quand même. Vous dites aujourd'hui : le Conseil d'Etat est libre de procéder aux acquisitions de terrains, je suis d'accord avec vous. Dans la foulée, vous venez de dire qu'il faut d'abord acquérir les bâtiments, ce qui est dans les prérogatives du Conseil d'Etat et qui lui est demandé par motion. Mais tout le reste ? Une fois que nous aurons ces bâtiments, il faudra bien en faire quelque chose ! Il faudra bien voter une loi ! Ensuite vous viendrez nous dire : «Puisque nous avons les bâtiments, nous sommes obligés de voter la loi.» Alors, vous comprenez, la ficelle est un peu grosse ! Vous allez voter cette motion ce soir, mais j'espère que le Conseil d'Etat sera conscient de ses responsabilités et qu'il ne va pas nous engager dans une opération qui nous mènera un jour devant le peuple qui nous dira non. Ces soixante-dix associations, vous vous gardez bien de nous en donner la liste. Nous aimerions tout de même savoir... (Brouhaha.)

Une voix. Mais si, il y a «l'association pour la feuille de coca» !

M. Claude Blanc. C'est qui ça ?

M. Daniel Ducommun. Les amis du chanvre !

M. Claude Blanc. Les amis du chanvre ? (Rires.)

J'aimerais savoir à qui ces locaux sont destinés. J'aimerais que l'on puisse dire la vérité. Vous essayez par la voie d'une motion de demander au Conseil d'Etat de faire une acquisition puis ensuite vous pensez que nous serons obligés de l'utiliser à vos fins. Moi, je vous dis: il faudra que l'on sache une fois la vérité et que toute la lumière soit faite. Vous nous mettez la tête dans un sac; excusez-moi, mais je refuse de voter la tête dans un sac.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je n'ai pas l'habitude de pratiquer la langue de bois. Ce que je vais dire ne va certainement pas faire plaisir aux motionnaires. J'ai reçu au début de l'année 1998 la fédération qui prône l'instauration d'une maison des associations socio-politiques. Je lui ai dit clairement que ce projet était un projet intéressant mais qu'il lui appartenait prioritairement de le mettre en oeuvre et subsidiairement à l'Etat d'y donner la main.

En d'autres termes, je lui ai dit que je n'entendais pas faire cette maison à sa place. J'ai même été plus clair en disant qu'il appartenait à cette fédération de militer et qu'il m'appartenait de gouverner.

Dans la motion qui vous est proposée... (Brouhaha, rires.)

C'est la maison du rire ici ! Dans cette motion, Mesdames et Messieurs les députés, il y a un mélange considérable d'invites dont certaines peuvent être aisément retenues, d'autres ne le peuvent pas vraiment. Je n'entends pas déposer un crédit d'étude devant votre parlement parce que j'ai fait étudier les bâtiments de «La Suisse» par les services du département et qu'il en coûterait, si nous devions les acquérir, une somme de l'ordre de 6 à 8 millions non compris les travaux nécessaires de transformation. J'estime que ce montant est manifestement excessif et qu'il n'est par conséquent pas raisonnable de vous présenter un tel projet.

Il pourrait en revanche être bien entendu possible, et c'est l'une des invites, d'envisager par exemple une garantie financière sur un projet déposé par la fédération. Dans ce cas, la participation de l'Etat serait limitée à des proportions raisonnables. L'Etat peut parfaitement et doit - je considère aussi que c'est son rôle - soutenir les associations mais ceci avec une certaine proportionnalité dans l'engagement des moyens. Je remercie d'ailleurs M. Hiler, l'un des motionnaires, d'avoir reconnu cette difficulté et d'avoir en quelque sorte un peu pressenti le fait que je ne pourrais pas donner suite intégralement à cette motion. Je répète à la fédération ce que je lui ai dit directement, je le répète aux députés qui soutiennent cette fédération: présentez-nous un projet qui nous permette de vous soutenir ! Mais là, manifestement, nous nous trouvons hors des capacités de l'Etat.

J'ai le souvenir d'avoir participé à des manifestations en 1970 pour un centre autonome. Certains d'entre vous d'ailleurs y étaient, je crois en reconnaître quelques-uns... La revendication que nous avions à l'époque, et qui me paraît toujours philosophiquement et politiquement juste, était que ce centre devait être autonome. Or vous me demandez en l'occurrence de créer un centre d'Etat pour associations. Je préférais la philosophie des années 70 en la matière. (Applaudissements de la droite.)

M. Régis de Battista (S). Je voulais simplement dire qu'en tant que membre du comité de la fédération je ne vais pas participer au vote.

M. Alberto Velasco (S). Je tiens à répondre à M. le conseiller d'Etat : ce ne sera pas un centre d'Etat pour les associations; ce sont les associations qui géreront ce centre. Ceci est bien explicité dans le projet. Il y a septante associations qui auront des contrats de bail, ceci est bien clair.

M. Claude Blanc (PDC). On m'a enfin apporté la liste ! Evidemment, c'est ce que l'on appelle un millefeuille. Il y a une couche de crème, une couche de fromage, une couche de crème, une couche de jambon... (Rires.) Il y a tout ce que l'on veut !

Alors, évidemment, il y a l'Entraide protestante suisse; ça, c'est pour faire bien ! Mais il y a un truc qui s'appelle «L'Aberration»; c'est quoi ça ? (Rires.) Il y a «l'Institut pour une synthèse planétaire», il y a «La radio sans chaîne»... (Rires.) Non, franchement, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais en savoir davantage sur tous ces gens-là avant d'engager les finances de l'Etat.

M. Christian Grobet (AdG). Monsieur le président, je m'en voudrais d'apporter un complément d'information ! Ce que je voudrais simplement dire, c'est que je déplore comment ceux qui sont opposés à une revendication qui est légitime et sérieuse la tournent en dérision. C'est toujours facile évidemment sur une liste d'associations d'en pointer une ou deux, surtout si on ne sait même pas de qui il s'agit.

J'avoue, Monsieur Blanc, que vous avez un excellent sens de l'humour, mais il n'empêche qu'à part ces associations, qui sont peut-être parfaitement honorables même si vous les tournez en dérision, il y a d'autres associations qui, à Genève, cherchent des locaux. Et ça, c'est une réalité : quand j'étais au département des travaux publics, je peux vous dire que la liste des associations était longue... (Rires et remarques.)

Le président. Un peu de silence, Mesdames et Messieurs. Même si l'époque était bénite...

M. Christian Grobet. La liste des associations sérieuses qui cherchaient des locaux était longue et je doute qu'aujourd'hui cette liste ait été totalement purgée parce qu'il y a toute une série d'associations qui effectivement ne trouvent pas de locaux et qui ne peuvent pas payer 350 F le m2, qui est le prix usuel offert actuellement sur le marché. (Protestations.) Absolument ! (L'orateur est interpellé par M. Dupraz.) Monsieur Dupraz, les spéculateurs ne sont pas de ce côté de l'enceinte. Les prix que je viens de donner sont ceux indiqués par le Service cantonal des statistiques comme étant la moyenne actuellement des locaux qui sont offerts. C'est vrai qu'il y a 200 000 m2 de surface de plancher qui sont libres. Vous verrez combien de propriétaires sont d'accord de les louer à des prix raisonnables. La réalité, c'est que le marché est fermé. Les propriétaires ne veulent pas louer des locaux bon marché afin d'éviter de casser les prix. C'est ça la réalité ! Aujourd'hui, vous savez aussi bien que moi que, pour une association, il est très difficile de trouver des locaux et c'est facile évidemment maintenant de tourner ce problème en dérision.

Cette fédération a proposé différentes solutions. Je suis d'autant plus à l'aise pour soutenir cette motion que personnellement je ne suis pas convaincu par la solution des locaux de «La Suisse», pour les mêmes raisons que M. Moutinot. Cette motion ne propose pas uniquement cette solution. Elle propose d'autres alternatives: par exemple celle de mettre d'autres locaux ou des terrains à disposition. Il n'y a même pas besoin d'acheter des terrains pour les mettre en droit de superficie. Je peux vous citer un certain nombre de parcelles qui sont en ville, qui sont propriété de l'Etat et qui pourraient effectivement être mises en droit de superficie au profit de cette fédération, pour une construction nouvelle qui pourrait se faire par étape, en fonction des intéressés.

Je pense qu'il serait effectivement plus sage de construire des locaux en fonction des associations qui sont prêtes à payer un certain loyer plutôt que d'acheter des locaux que l'on n'est pas certain de remplir. Or la motion évoque expressément cette solution. M. Moutinot arrivera peut-être à la conclusion qu'effectivement les locaux de «La Suisse» ne sont pas la meilleure solution. Je pense qu'effectivement ces locaux vont poser des problèmes. On ne sait même pas qui seront les autres propriétaires de l'immeuble, il y a donc des problèmes réels. Par contre, il y a d'autres solutions qui peuvent être mises en place sans faire preuve de beaucoup d'imagination. Je pense qu'aujourd'hui il est important de venir en aide à un certain nombre d'associations qui cherchent des locaux et qui n'en trouvent pas. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous demandons de voter cette motion, parce qu'elle présente un certain nombre de solutions alternatives à celle de «La Suisse». Il faudrait pour le moins les explorer. C'est la moindre des choses que l'on puisse faire.

M. Christian Brunier (S). Lorsque nous sommes en campagne électorale, je crois que tous les partis - de droite comme de gauche - valorisent la responsabilité des citoyens, la participation, la démocratie locale, la concertation. Les associations jouent un rôle moteur dans le domaine. C'est le vivier de la démocratie vivante; se moquer du monde associatif, c'est un peu léger, Monsieur Blanc ! Je vous rappelle que le monde politique est très content de trouver des associations pour lutter contre la toxicomanie, lutter contre le sida, lutter en faveur des droits de l'homme. Il faut être cohérent avec les combats qu'on mène en campagne électorale et soutenir le monde associatif aussi lorsque la campagne est finie. Moi, je donnerais raison à M. Ramseyer : vous avez raison, il faut vraiment se méfier des célibataires !

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

considérant :

- qu'il est important de mettre à disposition un lieu aux associations privilégiant des actions d'intérêt public liées à la défense de la paix, de l'environnement, des Droits de la personne et du développement durable;

- qu'à Genève, plus d'une centaine d'associations ayant des statuts selon les articles 60 et suivants du Code civil sont parties prenantes de ce projet, soit "; La maison des associations socio-politiques ", afin de se regrouper pour créer des synergies et de diminuer leurs frais de fonctionnement;

- que ce projet s'inscrit dans "; l'Esprit de Genève ", de par son contenu associatif et solidaire, contribuant ainsi au rayonnement de notre cité;

- que celles-ci représentent des revendications importantes de notre société;

- qu'il existe une Fédération pour l'expression associative (FEAS) regroupant plus de 60 d'entre elles désirant s'organiser dans un tel espace;

- que les associations jouent un rôle moteur dans la conception d'une démocratie vivante;

- que les locaux du feu journal "; La Suisse " pourraient représenter un des derniers lieux disponibles au centre ville, adéquat pour matérialiser ce projet.

invite le Conseil d'Etat

à aider et soutenir le projet "; La maison des associations socio-politiques " en prenant l'une et/ou l'autre des dispositions suivantes :

- création, pour ces associations, de locaux répondant à leurs besoins dans un seul lieu et pouvant leur permettre d'exercer pleinement, efficacement et à moindre coût, leurs activités reconnues et indispensables;

- allocation d'un crédit d'étude pour expertiser les locaux de l'ancien journal de "; La Suisse " ainsi que pour confirmer la faisabilité du projet de la "; Maison des associations socio-politiques ", en collaboration avec les représentants de la FEAS et ses partenaires;

- étude rapide de la possibilité d'obtention par la FEAS des anciens locaux du Journal "; La Suisse " (parcelles N° 304 et 2413, 2410, 300, 2409 de la feuille cadastrale N° 2 de Plainpalais) en collaboration avec la Ville de Genève et les représentants de la FEAS :

 en accordant une garantie financière permettant l'acquisition des locaux par la FEAS;

 ou en achetant le terrain en vue d'accorder un droit de superficie à la FEAS;

 ou encore en achetant les locaux et le terrain en vue de les louer à la FEAS;

 en participant au capital de départ à titre de subvention unique;

 et/ou en couvrant financièrement d'éventuels déficits de fonctionnement pour une période de 3 ans.