République et canton de Genève

Grand Conseil

No 12/II

Vendredi 20 mars 1998,

nuit

Présidence :

M. Jean Spielmann,premier vice-président

puis

M. René Koechlin,président

La séance est ouverte à 20 h 50.

Assistent à la séance : MM. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat, Carlo Lamprecht, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

Le président donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : Mmes et M. Martine Brunschwig Graf, Guy-Olivier Segond, Micheline Calmy-Rey, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Fabienne Blanc-Kühn, Juliette Buffat, Christian de Saussure, Erica Deuber-Pauli, Bénédict Fontanet, Claude Haegi, Dominique Hausser et Antonio Hodgers, députés.

3. Discussion et approbation de l'ordre du jour.

Le président. Tout à l'heure, le président, M. Koechlin, vous a dit que nous commencerions l'ordre du jour par le point 50, motion 1194, puis le point 72 et 73, concernant les Services industriels, projets de lois 7833 et 7442-A, le point 85, résolution 362, et le point 44 bis, projet de loi 7792-A.

Je vois à la tribune des personnes qui se sont déplacées afin d'assister au débat sur la résolution concernant les anciens Brigadistes de la guerre d'Espagne. Je saisis l'occasion de les saluer et vous propose de prendre ce point tout de suite après les annonces et dépôts.

4. Annonces et dépôts :

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

Néant.

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

Néant.

e) de questions écrites.

Néant.

R 362
5. Proposition de résolution de Mme et MM. Dolores Loly Bolay, Jean Spielmann et Christian Grobet pour la réhabilitation des Brigadistes suisses et des anciens résistants qui ont combattu en Espagne et en France, contre les forces fascistes et nazies. ( )R362

EXPOSÉ DES MOTIFS

Il y a 60 ans, le 17 juillet 1936, éclatait la guerre d'Espagne. Une partie de l'armée stationnée au Maroc se soulève contre le gouvernement légal de la République installé à Madrid. Franco et d'autres généraux sont à la tête du soulèvement.

Lorsqu'en août 1936, fut prise la décision de créer les "; Brigades Internationales ", ce sont plus de 40'000 volontaires venant de différents pays, qui au travers de bien des difficultés, se joignirent aux forces armées espagnoles restées fidèles à la République et aux volontaires espagnols pour défendre la démocratie, la liberté et pour combattre les forces fascistes qui ne menaçaient pas seulement l'Espagne, comme ce fut malheureusement prouvé 3 ans plus tard.

De Suisse plus de 700 volontaires s'engagèrent dans les Brigades internationales.

Dans la population suisse un grand et large mouvement de solidarité active se développa. Dans tout le pays des comités d'aide à l'Espagne républicaine se constituèrent et auxquelles participèrent des représentants de tous les milieux progressistes.

Cette solidarité se manifesta par un soutien politique permanent et par une aide humanitaire d'une grande ampleur.

La solidarité se manifesta aussi par l'aide apportée à de nombreux volontaires des pays voisins qui voulaient traverser la Suisse pour se rendre en Espagne.

Les Brigadistes suisses qui rentrèrent au pays, après avoir combattu pour la démocratie, la liberté et contre le fascisme, qui s'apprêtait à déclencher la guerre mondiale, auraient mérité d'être accueillis avec reconnaissance, non seulement par la majorité de notre peuple mais également par ses autorités.

En ce qui concerne ces dernières il n'en fut rien, au contraire les Brigadistes furent traduits devant des tribunaux militaires pour "; atteinte à la puissance défensive du pays ". 239 d'entre eux furent condamnés à des peines de prison allant de un à trois mois, d'autres écopèrent neuf à dix mois de prison, ainsi qu'à la suppression des droits civiques, pour des périodes allant de deux à cinq ans.

Dès le début de ce procès, de multiples interventions et manifestations eurent lieu pour réclamer l'acquittement, et plus tard en faveur d'une amnistie générale, et enfin pour obtenir la réhabilitation des Brigadistes suisses.

Jusqu'à ce jour et malgré les nombreuses interventions parlementaires, les dernières toutes récentes, cette réhabilitation n'a pas encore été obtenue.

C'est pourquoi nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les députés, de voter cette résolution.

ANNEXE

"; NOUS NOUS SENTONS DES CONFÉDÉRÉS "

Les volontaires suisses qui attendaient en Espagne leur retour au pays, ont envoyé la lettre suivante au Comité d'Amnistie :

"; A nos compatriotes : "

Au camp de démobilisation des Brigades Internationales, dans une assemblée de Suisses, nous avons lu l'appel du Comité d'Amnistie. Nous attendons avec impatience le résultat de vos efforts et nous voyons avec satisfaction et avec une grande joie que les cercles les plus larges du peuple suisse sont à nos côtés dans la lutte active que nous avons engagée dan la guerre d'indépendance espagnole et qu'ils demandent que nous soyons amnistiés. Pourquoi somme-nous partis en Espagne ? Pourquoi des centaines de Suisses de toutes les conditions sociales et de tous les cantons, de toutes les couches populaires et de diverses opinions politiques ont-ils quitté leur patrie, leur famille, leur travail, leurs affaires, leurs études, pour risquer leur vie et leur santé en Espagne ? Sont-ils partis pour la guerre mus par la soif d'aventures ? Non, nous étions tous persuadés qu'il s'agissait de défendre la liberté et la démocratie d'un peuple ami contre deux ennemis puissants qui avaient attaqué son pays. Pendant deux ans nous avons aidé nos frères Espagnols, à défendre leur liberté et leur démocratie, à organiser leur armée et leur industrie de guerre. Nous Suisses, qui avons été forgés au feu de la lutte d'indépendance espagnole, nous ne demandons ni compassion, ni pardon. Non, nous sommes fiers de ce que nous avons fait. Nous n'avons fait que notre devoir et défendu l'héritage le plus sacré de nos pères : LA LIBERTÉ !

Nous nous sentons des Confédérés et nous reviendrons au pays, que nous soyons amnistiés ou non. Nous avons appris ici, en Espagne, qu'un petit peuple peut aussi défendre sa liberté contre des adversaires puissants et brutaux, quand il a la volonté de sauvegarder son indépendance. Et la grande majorité du peuple suisse sait déjà qui menace son indépendance. C'est pourquoi, au moment du danger, nous reviendrons, dans notre patrie aussi, pour remplir notre devoir, unis et résolus.

Serment des volontaires des Brigades Internationales

"; JE SUIS ICI PARCE QUE JE SUIS VOLONTAIRE, ET JE DONNERAI, SI NÉCESSAIRE JUSQU'A LA DERNIÈRE GOUTTE DE MON SANG POUR SAUVER LA LIBERTÉ DE L'ESPAGNE, LA LIBERTÉ DU MONDE TOUT ENTIER.

PÉTITION

pour la réhabilitation

des Brigadistes et anciens Résistants

Il y a maintenant plus de 60 ans, en juillet 1936, des généraux espagnols déclenchaient une rébellion de l'armée dans le but de renverser le Parlement et le Gouvernement espagnols démocratiquement élus. Leur but était de détruire la République et d'instituer un régime dictatorial, qui aura sévi près de 40 ans.

Cette atteinte particulièrement grave à la démocratie suscita une très forte émotion dans les pays démocratiques déjà inquiets par la montée du fascisme et du nazisme. Des démocrates d'origines les plus diverses décidèrent de témoigner concrètement leur solidarité avec la démocratie espagnole en péril. Ils s'engagèrent dans les Brigades internationales qui combattirent courageusement à côté des troupes loyalistes contre les généraux félons.

Environ 700 de nos compatriotes se joignirent aux quelques 40 000 Brigadistes qui ont personnifié, dans l'honneur, le respect des valeurs démocratiques qui constituent le fondement de notre société moderne.

Nombre d'entre eux y ont laissé leur vie. Les autres, de retour en Suisse, ont été condamnés injustement par les tribunaux militaires à de lourdes peines d'emprisonnement.

Depuis 1978, une série d'interventions parlementaires ont demandé au Conseil fédéral de prononcer la réhabilitation des combattants suisses en Espagne. Le 17 décembre 1992, le Conseil national a même accepté un postulat du Conseiller national Massimo Pini demandant au Conseil fédéral d'accorder, en vertu de l'article 85, chiffre 7, de la Constitution fédérale, une amnistie générale en faveur des combattants suisses en Espagne, afin de "; redonner officiellement une dignité morale et civique à ces concitoyens, dont certains vivent encore ".

Le 22 mars 1996, le Conseiller national Christian Grobet, intervint auprès du Conseil fédéral sous forme d'une question écrite, pour rappeler la prise de position du Conseil national sur le postulat Pini et sa déclaration faite le 7 mai 1995 à l'occasion de la commémoration du 50e anniversaire de la fin de la 2e Guerre Mondiale et de la libération de l'Europe. Il lui demandait comment il entendait concrétiser ce postulat et s'il pensait faire une déclaration officielle réhabilitant les Brigadistes suisses.

Dans sa réponse du 22 mai 1996, le Conseil fédéral rendit hommage à ces derniers en déclarant que s'il avait refusé l'amnistie, il avait néanmoins "; reconnu que les Suisses ayant combattu en Espagne avaient agi en cédant à un mobile honorable, qu'ils avaient depuis lors rempli leur devoir de citoyen et qu'ils jouissaient pleinement de leurs droits civiques ". Le Conseil fédéral cita encore l'allocution officielle de Madame la conseillère fédérale Ruth Dreifuss faite à l'occasion de la réunion de la communauté des combattants suisses en Espagne qui s'est tenue le 23 avril 1994 à Zurich, au cours de laquelle elle a qualifié "; a lutte des combattants suisses en Espagne contre la dictature fasciste de courageuse et de nécessaire au maintien de la démocratie dans la République espagnole, l'histoire l'a prouvé " en concluant que "; les combattants suisses étaient pleinement réhabilités d'un point de vue politique et moral ".

Le Conseil fédéral, dans sa réponse à la question précitée, a encore précisé qu'il "; saisit cette occasion pour faire savoir qu'il partage cette opinion " et a rappelé que, dans sa réponse à l'interpellation du Conseiller national Nils de Dardel du 4 octobre 1995 concernant la réhabilitation des Suisses ayant participé à la résistance française, "; le Conseil fédéral a exprimé sa gratitude et témoigné sa reconnaissance à toutes les personnes qui se sont opposées au nazisme et ses terribles conséquences pendant la seconde Guerre mondiale ", ajoutant que "; ces remerciements s'adressent également aux Suisses qui ont combattu en Espagne contre les forces fascistes ".

Le Conseil fédéral a donc reconnu officiellement le juste combat des Brigadistes suisses durant la Guerre d'Espagne. Il leur a témoigné sa gratitude et a considéré qu'ils étaient pleinement réhabilités d'un point de vue politique et moral. Il n'en demeure pas moins qu'il n'a pas pleinement tiré les conséquences de cette prise de position : il n'a pas décrété la réhabilitation de ces défenseurs de la démocratie et des libertés sur le plan juridique dans le cadre d'une déclaration s'adressant directement à ces derniers et leurs familles.

Au même titre que Paul Grüninger, ancien chef de la police de Saint-Gall, qui a été à juste titre réhabilité par une récente décision d'un Tribunal saint-gallois, il appartient aux autorités de la Confédération, compétentes en matière de condamnations par les tribunaux militaires, de prononcer officiellement la réhabilitation tant attendue par les anciens combattants suisses en Espagne et leurs familles. Cette réhabilitation se justifie d'autant plus que le Parlement espagnol a décidé au moment de la commémoration du 60e anniversaire de la résistance espagnole au soulèvement militaire de 1936 de décerner la citoyenneté espagnole à tous les volontaires étrangers qui avaient combattu les forces fascistes durant la Guerre d'Espagne.

A la suite de cet acte officiel du Gouvernement espagnol reconnaissant l'honneur des combattants en Espagne, les autorités suisses se doivent à leur tour de réhabiliter ceux qui ont courageusement défendu, au péril de leur vie, les valeurs de notre démocratie.

En outre, les Autorités suisses doivent également réhabiliter les citoyens suisses qui ont participé à la Résistance française.

Tel est donc le but de la présente pétition, adressée à l'Assemblée fédérale et appuyée par les soussigné(e)s faisant usage de leur droit de pétition garanti par la Constitution fédérale : obtenir la réhabilitation officielle, y compris à titre posthume, des Suisses qui ont combattu, en Espagne et en France, contre les forces fascistes et nazies.

Débat

Mme Dolores Loly Bolay (AdG). A l'heure où la Suisse est amenée à reconsidérer avec un sens critique l'attitude de ses dirigeants au cours de la Seconde Guerre mondiale, à l'heure où la commémoration des cent cinquante ans de l'Etat fédéral devrait surtout être l'occasion d'un regard non complaisant sur le passé, il paraît plus que justifié de se souvenir de la manière peu glorieuse avec laquelle ont été traités et criminalisés, au moment de leur retour au pays, les volontaires suisses de la guerre d'Espagne.

Plus de sept cents volontaires suisses s'engagèrent dans les brigades internationales à côté des quarante mille autres volontaires venant du monde entier; nombreux y ont laissé leur vie. De retour au pays après avoir combattu pour la démocratie, la liberté et contre le fascisme qui s'apprêtait à déclencher la guerre mondiale, les Brigadistes suisses auraient mérité d'être accueillis avec reconnaissance. Il n'en fut rien. Les Brigadistes suisses et les anciens résistants furent traduits devant les militaires suisses pour atteinte à la puissance défensive du pays. La Suisse officielle de l'époque s'est montrée impitoyable avec ces hommes et ces femmes qui ont personnifié, dans l'honneur, le respect des valeurs démocratiques qui constituent le fondement de notre société moderne.

Cinq cent cinquante procès, quatre cent vingt jugements définitifs, des peines de prison allant de un à huit mois, la suppression des droits civiques pour des périodes allant de deux à cinq ans. Aucun Etat démocratique ne s'est montré aussi dur. Dès le début de ces procès, de multiples interventions et manifestations eurent lieu pour réclamer l'acquittement et, plus tard, en faveur d'une amnistie et, enfin, pour demander la réhabilitation. Jusqu'à ce jour et malgré les nombreuses interventions parlementaires, les dernières toutes récentes, cette réhabilitation n'a pas encore été obtenue. Il est pourtant nécessaire de reconnaître qu'en s'engageant ainsi contre le fascisme et la barbarie, au début des heures les plus noires que l'Europe ait connues au cours de ce siècle, ils ont accompli un geste qui mérite de la reconnaissance et non pas du mépris. La guerre d'Espagne a été une triste répétition générale pour les forces du fascisme; le geste de ceux qui sont allés se battre pour l'Espagne républicaine appartient donc pleinement à la lutte contre la déferlante brune en Europe.

De ce point de vue, le fait que la Suisse ne les ait toujours pas pleinement réhabilités est absolument incompréhensible et totalement inacceptable. Raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de voter cette résolution et de l'envoyer à l'Assemblée fédérale.

M. Albert Rodrik (S). Je pense qu'il est difficile d'imaginer aujourd'hui l'élan de solidarité et de mobilisation qui s'est manifesté dans toute l'Europe et même en Amérique du Nord au moment où se nouait le drame de la guerre d'Espagne. Entre 1936 et 1939, des hommes et des femmes, certains avant même la constitution des brigades internationales, sont partis, prémonitoires et pionniers, pour défendre ce qu'ils percevaient être la grande tragédie de la liberté et de la démocratie.

Le drame qui se déroulait là, où plus d'un million de morts devait être le bilan, n'était encore qu'un lever de rideau et un lever de rideau déjà particulièrement instructif. Cette leçon, malheureusement, les démocraties occidentales ne l'ont pas comprise ou l'ont comprise quand il était trop tard, quand cette peste brune était déjà non seulement à leur porte mais dans leurs foyers. De ces hommes et de ces femmes qui sont partis là-bas, de Suisse comme de tous les autres pays d'Europe et d'Amérique du Nord, un certain nombre en sont revenus et d'autres ne sont pas revenus. Certains sont restés, ont pris les chemins de l'exil et sont allés combattre pour la même cause en France. A l'égard de ces combattants, la Suisse, à l'instar d'autres pays dits démocratiques et plus que les autres pays, a fait preuve de zèle dans la criminalisation et la transformation en délinquants de gens qui étaient l'honneur de ce pays parce que peut-être, avant l'heure et avant leurs compatriotes, ils avaient su que l'honneur était d'aller, à ce moment, arrêter ce qui se préparait, là où cela se faisait.

Mesdames et Messieurs, en 1938, en 1939, on se posait la question en disant : «Va-t-on mourir pour l'Autriche de l'Anschluss ? Va-t-on mourir pour Dantzig ? Va-t-on mourir pour les Sudètes ?» et on a signé Munich. C'est cette imprégnation des esprits, cette manière de s'incliner devant la loi du plus fort qui a permis cela, et c'est cela que nous voulons aujourd'hui effacer. Nous avons peut-être enfin compris les leçons de l'Histoire et nous avons un certain nombre de choses à faire pour que réparation soit faite. La première est que tout soit entrepris pour que jamais à tout jamais, dans la mémoire de chaque Suisse et dans la mémoire collective des Suisses, ne soient oubliés et perdus ce drame qui s'est noué là-bas, ni les gens qui sont morts pour que la démocratie et la liberté soient préservées dans le reste du monde.

La deuxième, nous l'avons demandée il y a plus d'une année au Conseil municipal de la Ville de Genève - et nous espérons qu'elle se concrétisera - c'est un monument pour célébrer le sacrifice des combattants suisses et genevois des brigades internationales.

Le troisième volet est cette amnistie : il n'est pas tolérable que restent dans les registres des marques qui font de gens qui sont allés payer de leur vie la lutte pour la liberté, des délinquants.

Cela doit être effacé et, enfin, le quatrième volet : le problème de la double nationalité, le cadeau généreux de l'Espagne, qui a provoqué sans le vouloir un imbroglio juridique.

Ces quatre volets : ne pas oublier, ne pas effacer des mémoires, ériger un monument à la mémoire des Suisses et des Genevois qui ont combattu, obtenir l'amnistie totale et régler le problème de cette double nationalité, voilà le devoir de dignité que nous avons face à l'Histoire et c'est pourquoi nous vous demandons d'adresser cette résolution aux Chambres fédérales pour que cet épisode trouve enfin un épilogue heureux.

M. Bernard Lescaze (R). Je ne comptais pas parler ce soir d'un sujet qui est délicat, mais les propos qui viennent d'être tenus, si nobles soient-ils, comportent malgré tout une part de ce que je ne veux pas qualifier de pharisaïsme mais, malgré tout, de bonne conscience un peu facile. Tout à l'heure l'un des préopinants a dit: «Il faut effacer ceci.» Malheureusement on ne peut pas effacer le passé; on peut avoir une volonté d'oubli, on peut avoir une volonté même de regret mais on ne peut pas effacer ce qui s'est passé. Et l'honneur des Brigadistes d'Espagne, c'est peut-être d'avoir su choisir, avec davantage de lucidité que beaucoup de gens dans d'autres pays, leur camp. Cela, c'est leur véritable honneur.

Aujourd'hui nous céderions à la facilité simplement en reconnaissant qu'ils ont choisi le bon camp ou qu'ils ont choisi ce que leur dictait leur conscience. Nous le faisons d'autant plus volontiers que, soixante ans après, il est particulièrement aisé de savoir quel était le bon camp. J'ai cru lire dans un journal de la bouche d'un des Brigadistes que celui-ci en tout cas, peut-être pas les autres, ne réclamait rien et son raisonnement était, à mon sens, parfaitement exact, parfaitement juste.

Nous pouvons faire ce que nous désirons, nous pouvons manifester un regret. Mais en réalité, Mesdames et Messieurs les députés, le véritable hommage que nous devrions, chacun d'entre nous, si nous ne nous payons pas de mots, rendre à un combattant de la guerre d'Espagne, ce serait aujourd'hui, hic et nunc, dans nos sphères, de continuer un combat semblable pour les valeurs auxquelles nous croyons, pour les valeurs : liberté, démocratie, par exemple, que nous partageons. Mais évidemment le choix, aujourd'hui, n'est pas du tout aussi évident et, bien entendu, cela nécessite des engagements personnels beaucoup plus percutants et qui parfois, peut-être, s'inscriront dans la chair, dans le sang, dans l'existence des gens. Alors personnellement, bien que j'admire une partie en tout cas du passé, bien qu'il soit certain que la guerre d'Espagne soit un des grands événements historiques de ce siècle, magnifié d'ailleurs dans la littérature internationale, que ce soit «Pour qui sonne le glas ?» d'Hemingway ou «L'Espoir» de Malraux, je m'abstiendrai sur cette résolution parce que je pense que le seul hommage que nous puissions rendre au combat que les Brigadistes ont mené, c'est de persévérer dans ce qu'ils ont fait, mais aujourd'hui et demain, et non pas de regarder vers le passé.

Finalement s'il y avait une leçon que pour ma part et à titre tout à fait personnel je retiens de la guerre d'Espagne, c'est ce mot de la Passionaria : «Mieux vaut mourir debout que vivre à genoux.» Eh bien, ceci est effectivement une leçon qui durera et c'est une leçon que je souhaiterais que chacun d'entre nous intègre en lui-même, mais il n'y a pas besoin de résolution pour cela, puisqu'il s'agit de quelque chose de purement personnel.

M. Alberto Velasco (S). M. Lescaze prétend qu'il est aisé soixante ans plus tard de savoir quel était le camp le plus acceptable. M. Lescaze oublie qu'en Espagne il y avait une république qui avait été démocratiquement élue et dépossédée justement par une insurrection militaire qui, elle, n'avait rien de démocratique.

Or, pour les démocrates de toute l'Europe, il était évident que leur camp était de défendre la République démocratiquement élue et institutionnellement installée. Je regrette, Monsieur Lescaze, que vous ayez fait un tel lapsus historique.

Mise aux voix, cette résolution est adoptée et renvoyée au Conseil fédéral. (Applaudissements.)

Le président. Je me permets de saluer encore une fois à la tribune deux anciens Brigadistes de la guerre d'Espagne qui ont eu l'amabilité de participer à cette séance.

La résolution est ainsi conçue :

Résolution(362)

pour la réhabilitation des Brigadistes suisses et des anciens résistants qui ont combattu en Espagne et en France, contreles forces fascistes et nazies

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant que :

- les Brigadistes suisses et les anciens résistants qui se sont battus durant la guerre d'Espagne et en France furent traduits devant des tribunaux militaires suisses pour "; atteinte à la puissance défensive du pays ";

- malgré plusieurs interpellations, adressées au Conseil fédéral dans ce sens encore récemment, demandant une réhabilitation pleine et entière, les Brigadistes suisses n'ont toujours pas obtenu leur réhabilitation;

demande au Conseil fédéral

- d'amnistier les Brigadistes suisses et les anciens résistants qui ont personnifié, dans l'honneur, le respect des valeurs démocratiques qui constituent le fondement de notre société moderne.

 

M 1194
6. Proposition de motion de Mmes et MM. Jeannine de Haller, Alberto Velasco, Fabienne Bugnon, Pierre Marti, Janine Hagmann, Gilles Godinat, Elisabeth Reusse-Decrey et Esther Alder : Solidarité avec la Kosove, humanité pour les Kosovars. ( )M1194

EXPOSÉ DES MOTIFS

La motion suivante sera soumise au Conseil d'Etat genevois le 19 mars prochain

SOLIDARITÉ AVEC LA KOSOVE,

HUMANITÉ POUR LES KOSOVARS.

Le 1er septembre 1997 est entré en vigueur un accord entre la Suisse et la "; République Fédérale de Yougoslavie " (RFY), soit la Serbie et le Monténégro, accord prévoyant le renvoi vers la RFY des requérants d'asile kosovars déboutés définitivement. Plus de 300 personnes ont déjà été renvoyées de Suisse en RFY du fait de cet accord.

Nous ne pouvons accepter le renvoi de force de plus de 15'000 Kosovars vers un Etat qu'ils ont fui parce que la situation qui leur y était faite était devenue intolérable. La "; République Fédérale de Yougoslavie " est une fiction juridique, n'a de "; République " que le nom, de "; Fédérale " que le qualificatif et de "; yougoslave" que le projet d'"; épuration ethnique " des régions dominées ou convoitées par la Serbie. La "; République Fédérale de Yougoslavie " n'est en effet que le masque du régime serbe qui a aboli l'autonomie de la Kosove (peuplée à 90 % d'Albanais), déclenché une guerre contre la Slovénie, puis une autre contre la Croatie, puis une troisième contre la Bosnie et mène en Kosove depuis dix ans une politique de "; purification ethnique à froid " qui risque à tout moment de déboucher sur une guerre ouverte.

La situation n'a jamais été aussi tendue en Kosove depuis ces dix ans : la violence y est généralisée et s'exerce régulièrement contre des manifestants pacifiques, les violations des droits de l'Homme y sont systématiques (exécutions sommaires, arrestations en masse, attentats, agressions contre les déserteurs, les réfractaires et les opposants, tortures et brutalités dans les lieux de détention). Le système scolaire de Kosove a été entièrement démantelé, la police et l'armée renforcent constamment leur dispositif répressif et multiplient les interventions provocatrices contre la population albanaise. Or c'est vers ce pays que la Suisse entend renvoyer ceux qui l'ont fui, et c'est à ce régime qu'elle entend les livrer.

Le Conseil fédéral vient d'ailleurs d'aggraver encore ses décisions précédentes, en annulant l'admission collective des déserteurs et réfractaires venus de l'ex-Yougoslavie - et donc celle des Kosovars, ce qui équivaut à remettre entre les mains de l'armée serbe, sans se soucier du sort qu'elle leur réservera, ceux qui l'ont désertée ou se sont soutraits à leur incorporation parce qu'ils refusaient de participer aux sales guerres menées par le régime de Belgrade, et de cautionner l'occupation militaire de la Kosove.

Débat

Le président. Madame la secrétaire, je vous prie de bien vouloir lire ici la pétition 1197, comme cela a été demandé hier.

Pétition(1197)

Solidarité avec la Kosove

N.B. : 11 062 signatures

M. .

p.a. Université Populaire Albanaise112, rue de LyonCase postale 5931211 Genève 13

Présidence de M. René Koechlin, président

Mme Jeannine de Haller (AdG). Depuis le dépôt de cette proposition de motion, le 3 mars dernier, la situation en Kosove n'a fait que se dégrader et confirmer nos pires craintes. Le régime serbe a lancé contre la population albanaise de la Kosove plus de cent mille policiers et soldats dans une opération de soi-disant lutte contre le terrorisme, massacrant ainsi indistinctement femmes et hommes, adultes et enfants, lors des récentes attaques dans la région de Drenica. La plupart des manifestations qui ont eu lieu là-bas depuis et qui regroupent à chaque fois des dizaines de milliers de personnes sont violemment réprimées par les forces serbes.

Vous êtes sans doute tous au courant de ce qui se passe là-bas du fait que, depuis que la Kosove a été dépossédée de son statut d'autonomie par la Serbie en 1989, les Albanais de la Kosove connaissent une situation quasi comparable à celle des Noirs sud-africains du temps de l'Apartheid. Ils sont exclus de toutes les structures étatiques: administration, santé, éducation, sauf s'ils renoncent à leur langue, à leur propre culture et à leur dignité. L'accès aux hôpitaux leur est limité, les élèves et étudiants albanais ont été expulsés des écoles.

Cent quatre-vingt mille Kosovars résident en Suisse. Environ quatre cents d'entre eux, dont la demande d'asile a été rejetée, ont déjà été rapatriés depuis septembre 1997, date à laquelle est entré en vigueur un accord de réadmission signé par la Suisse et la République fédérale de Yougoslavie. Près de quinze mille renvois devraient suivre jusqu'en mai 1999. Cet accord n'a pas été remis en cause par le Conseil fédéral, alors même que le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés a demandé aux gouvernements européens de suspendre les renvois vers la Kosove. En effet, les ministres de la justice, Arnold Koller, et des affaires étrangères, Flavio Cotti, estiment qu'il n'y a pas actuellement de «guerre civile ouverte» ni de «violence généralisée» en Kosove.

Ainsi la Suisse ne va pas cesser de renvoyer les demandeurs d'asile kosovars déboutés. MM. Koller et Cotti ont réussi à déclarer que la pratique suisse est conforme aux recommandations du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, alors même que celui-ci demande officiellement aux gouvernements européens de ne plus renvoyer ces requérants d'asile. Et, bien que les cinq délégués du Comité international de la Croix-Rouge en Kosove aient été retirés car la situation sur place était estimée trop dangereuse pour eux, la Suisse continue d'expulser chaque jour des Kosovars.

Il est parfaitement évident que le risque de massacre en Kosove est très réel. Comment et pourquoi Milosevic n'appliquerait-il pas en Kosove les mêmes méthodes que celles mises en oeuvre en Bosnie ? Ni lui ni ses complices, accusés de crimes contre l'humanité, n'ont été le moins du monde inquiétés jusqu'à présent. Pourquoi hésiterait-il ? C'est pourquoi nous nous insurgeons contre le renvoi forcé des Kosovars, décidé par M. Arnold Koller, à l'encontre des recommandations du Haut-Commissariat des réfugiés.

Une dizaine de cantons (dont Neuchâtel, le Jura, Bâle-Ville, Lucerne, Zoug et le Tessin) ont renoncé depuis le début de ce mois à renvoyer les Kosovars. Des directeurs de départements de justice et police d'autres cantons estiment ouvertement que la situation est trop fluctuante et que de tels renvois seraient «irresponsables». C'est pourquoi nous demandons que le canton de Genève fasse de même et sursoie immédiatement à tout renvoi.

Monsieur Ramseyer, bien que vous ayez affirmé, il y a une semaine, qu'en aucun cas vous n'accepteriez de désobéir aux directives fédérales, vous avez simultanément fait apparaître en première page de la FAO du 16 mars dernier une proclamation du Conseil d'Etat sur la Déclaration universelle des droits de l'homme. En tant que président, vous y rappelez l'attachement du Conseil d'Etat aux valeurs fondamentales de la nature humaine et le fait qu'au cours de ces derniers siècles il a toujours existé un lien traditionnel et fort entre l'esprit de Genève et les droits de l'homme. Si la Suisse s'obstine à renvoyer des milliers de personnes dans une région où les violations des droits de l'homme sont systématiques, c'est donc bien à Genève et à son Conseil d'Etat d'être à la hauteur de ce qu'il proclame en refusant de toutes ses forces et par tous les moyens le renvoi des ressortissants kosovars vers la République fédérale de Yougoslavie. Parce qu'il est légitime de s'opposer à l'application de lois injustes nous demandons, en cas de refus des autorités fédérales de surseoir à ces renvois, que le Conseil d'Etat genevois suive la volonté du Grand Conseil de ne plus renvoyer aucun ressortissant kosovar résidant sur le territoire genevois.

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). En 1989, cela vient d'être dit, le statut d'autonomie dont disposait la Kosove a été supprimé par un certain Milosevic! A l'époque la communauté internationale n'a rien dit et n'a rien fait. Les Kosovars devenaient alors un peuple interdit bien que peuplant à 90% cette région. Arrestations arbitraires, tortures, exécutions sommaires, fermeture des écoles, cela s'appelle une politique d'apartheid et à cela les Kosovars ont répondu par la résistance pacifique. Des institutions parallèles sont nées dans ce pacifisme, des institutions de santé et d'éducation. Là encore, la communauté internationale a laissé faire. Mais la résistance pacifique cède depuis peu la place à la révolte et la résistance s'engage de manière plus énergique. A cela le 5 mars Milosevic a répondu par des massacres d'innocents. Et aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, c'est la guerre, une guerre qui était prévisible, une guerre avec son cortège de souffrances et ses colonnes de réfugiés sur les routes.

Le Kosovo est désormais une poudrière, une poudrière dans les Balkans qui d'un jour à l'autre pourrait s'embraser. Et aujourd'hui la communauté internationale doit faire quelque chose. Nous devons faire quelque chose pour éviter de nouveaux drames. Mme de Haller vient de le dire, lorsque cette motion a été déposée, les premières rockets n'avaient pas encore été tirées sur le peuple kosovar. Elle est donc d'autant plus importante aujourd'hui, au vu des événements qui se sont déroulés depuis et j'ose espérer qu'elle sera votée avec un très large appui dans ce Grand Conseil.

La situation là-bas est grave; même le CICR, qui pourtant est habitué à travailler dans des zones dangereuses, s'est retiré de la Kosove. Je vous demande donc de voter cette motion. Ses invites, bien que la situation ait changé, restent absolument identiques. La dernière invite qui nous concerne plus particulièrement en tant que canton demande à M. Ramseyer, qui a reçu la semaine dernière, le 11 mars très exactement, une délégation de Kosovars et a décidé de suspendre les renvois durant quelques jours, et bien nous lui demandons de maintenir cette position de manière à ce que plus aucun ressortissant de la Kosove ne soit renvoyé de notre canton.

M. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat. Bien que ce point ne soit pas inscrit dans le programme de mon département, j'y réponds volontiers, en accord avec M. le conseiller d'Etat Carlo Lamprecht.

Je veux dire d'emblée que j'ai beaucoup de compréhension pour ce qui se passe au Kosovo, beaucoup de compréhension aussi pour les problèmes que connaissent les ressortissants de ce pays, réfugiés ou requérants d'asile ici à Genève. C'est la raison pour laquelle je les ai reçus et leur ai précisé, entre autres, qu'il était totalement exclu - et je le confirme - que je désobéisse aux directives de la Confédération. (Manifestation de désapprobation, sifflets.) Je regrette beaucoup, Mesdames et Messieurs, je suis un magistrat élu, je respecte les lois de ce pays et je n'aime pas entendre qu'une fraction politique me dicte ses lois! (Brouhaha.)

Deuxième élément: en plus de cette affirmation, que j'ai faite d'ailleurs avec un écho tout à fait normal, très différent du vôtre, de la communauté qui était présente, j'ai pris la peine de téléphoner à Berne, d'avoir au téléphone le responsable de l'Office des réfugiés en l'informant que j'avais en mains des éléments qui donnaient un éclairage différent de celui que j'ai reçu en début de semaine concernant la situation sur place. J'ai, dans les vingt-quatre heures, reçu une information qui contredisait en partie ce qui vient d'être dit.

Il est faux de prétendre que le CICR a quitté le Kosovo. L'exemple qui a été cité est celui de quatre personnes retirées d'un village dans lequel, en revanche, la structure du CICR est restée en place. C'est l'appréciation de situation qui m'a été donnée par le Département fédéral des affaires étrangères. J'ai simplement pris sur moi d'inciter l'autorité fédérale à une certaine circonspection. Dès lors que la situation est évolutive, j'ai estimé qu'il était certainement discutable de prendre des décisions le vendredi avec le risque de les voir devenir caduques le lundi. J'ai donc dit à la Confédération non pas, à l'instar d'un autre collègue romand, que je ne respecterai pas les directives fédérales; j'ai simplement dit que je pensais qu'il était préférable de se montrer circonspect. Le chef du service des réfugiés m'a téléphoné : il m'a d'abord remercié de l'attitude loyale du canton de Genève et m'a dit me laisser le soin d'apprécier sur place, selon la situation que vous connaissez.

J'aimerais néanmoins dire, Mesdames et Messieurs les députés, de manière extrêmement claire - et je l'ai dit en ces termes aux trente et une personnes présentes dans mon bureau et, je le précise d'emblée, calmes, polies, réservées, nuancées - qu'il n'y aurait aucune espèce de compréhension pour les délinquants présents. Je leur ai dit également que j'espérais qu'il n'y avait pas de délinquants dans le groupe présent car, si tel était le cas, ces personnes devaient savoir qu'elles ne pourraient pas demander la générosité de notre canton, ni implorer sa compréhension si par ailleurs leur comportement était répréhensible.

La situation est maintenant la suivante : nous n'avons pas fait de recherches particulières, nous n'avons pris aucune mesure concernant ces Kosovars, la situation est celle que Berne nous a indiquée. J'ai plaidé la circonspection, j'ai obtenu la circonspection, nous en sommes là. Vous pouvez bien voter une motion attirant l'attention de l'autorité fédérale sur la situation au Kosovo. Cette même autorité est parfaitement consciente de cette situation et inquiète de son développement. Pour l'instant vous avez par ailleurs connaissance d'une situation politique locale; vous demandez que l'on en change : libre à vous ! J'ai simplement dit et je le répète, mais je le répète avec dignité : j'aimerais que vous sachiez qu'en tant que conseiller d'Etat élu d'une république et d'un canton comme celui de Genève, je ne peux pas décider de faire ce que je veux dans un pays qui est régi par des lois.

Au-delà des lois, au-delà des règlements, demeure le problème de sécurité publique, problème particulièrement aigu dans cette communauté. Cette communauté elle-même nous demande d'essayer de mettre de l'ordre chez les Kosovars qui commettent des délits chez nous. Ils ressortent généralement de la catégorie dite des célibataires. Le problème est bien connu de certains d'entre vous. Il n'y a, en ce qui me concerne, qu'une seule réalité : la base légale dont je dispose.

L'autre réalité, c'est une évolution des faits sur place qui m'inquiète et pour laquelle j'ai la plus grande compréhension. Actuellement rien ne se passe sur le terrain ici à Genève et je continue à naviguer avec cette situation évolutive. Je voulais que vous sachiez comment les choses se passent. Encore une fois j'agis en tant que chef de département, mais j'agis aussi en tant que responsable de la sécurité publique.

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). La déclaration de M. Ramseyer appelle quand même quelques commentaires.

Le premier, c'est que je n'ai pas entendu de réponse, Monsieur Ramseyer. Les personnes qui ont pris la parole tout à l'heure vous ont demandé de suspendre les renvois des Kosovars. Vous avez dit que vous agiriez avec circonspection. Excusez-moi, j'aimerais avoir un peu plus de clarté sur ce que vous entendez par «agir avec circonspection».

Deuxième remarque que je voudrais faire : il est vrai que les Kosovars traînent une image relativement négative d'eux-mêmes. Dans la population, ils sont souvent associés, comme vous l'avez dit, à des délinquants. Grand nombre de ces Kosovars luttent contre cette image, ont une conduite absolument irréprochable et lorsque, dans le discours que je viens d'entendre, j'entends répéter ce genre de propos, qu'en général les célibataires sont des Kosovars délinquants, j'ai de la peine à accepter cela de la part d'un chef de département.

Enfin, dernière remarque : vous avez dit que vous refusiez de désobéir à des lois, même si vous êtes sensible à ce qui se passe là-bas. On l'a dit, c'est la guerre là-bas, Monsieur Ramseyer. Il ne vous est pas demandé de désobéir à des lois. Il s'agit de directives fédérales et non de lois !

Et j'aimerais quand même dire que cette année sera attribué probablement, dans ce canton, le Prix des droits de l'homme qui s'appellera le Prix Paul Grüninger, quelqu'un qui a osé désobéir ! (Applaudissements.)

M. Luc Gilly (AdG). Je m'associe grandement à ce que vient d'exprimer Elisabeth Reusse; je ne répéterai donc pas l'essentiel de ce qu'elle vient de nous dire.

Monsieur Ramseyer, je suis quand même un peu abasourdi d'entendre des choses pareilles. J'ai eu connaissance il n'y a pas longtemps d'une statistique à propos de ces fameux Kosovars; le problème n'est pas de savoir s'ils sont délinquants ou pas; ces délinquants représentent, si j'ai bien compris, 0,2% de la population kosovar en Suisse. Si cela justifie votre discours, Monsieur Ramseyer, je ne pourrais en tout cas pas y souscrire. Nous venons de voter une résolution pour réhabiliter les Brigadistes en Espagne. Allez-vous renvoyer des gens, des familles chez un fasciste qui s'appelle Milosevic ? Allez-vous livrer des gens qui vont se faire arrêter à l'aéroport ? Excusez-moi, dans le cas des célibataires aussi, Monsieur Ramseyer, il y a beaucoup de réfractaires, de gens qui n'ont pas voulu aller servir dans l'armée serbe pour tuer leur propre peuple. Ce sont les premiers qui seront arrêtés, torturés et emprisonnés; vous le savez bien, Monsieur Ramseyer ! Si, en Suisse, il y a quelques années, les objecteurs étaient encore mis en prison, imaginez ce qui se passe en Serbie maintenant pour ces gens-là.

Alors j'aimerais également, comme Mme Reusse, entendre une déclaration claire et ferme de votre part suite à la proclamation que vous avez faite, dont nous avons parlé hier en votre absence et au sujet de laquelle vous m'avez répondu tout à l'heure dans une langue de bois, ce que je trouve totalement inadmissible. Je regrette, Monsieur Ramseyer, j'ai mal de savoir qu'un gouvernement ne peut pas prendre une décision beaucoup plus claire par rapport à une population qui est menacée. La même chose a été dite pour les Algériens : «Oh, dans la région d'Alger, ce n'est pas grave, ils peuvent être renvoyés.» Le lendemain, c'était justement dans la région d'Alger que les attentats et les assassinats avaient lieu. Monsieur Ramseyer, je vous en prie, montrez-vous adulte face à un problème grave ! Quand les lois doivent être bafouées parce qu'il y a mort d'hommes, mort de familles, mort d'enfants, qu'il y a des tortures, il faut prendre les décisions qui s'imposent. Je me demande pourquoi nous revisitons l'histoire suisse de 1939-45 pour refaire la même chose soixante ans après. (Applaudissements.)

Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). La situation du Kosovo a empiré depuis le dépôt de cette proposition. En effet, ce pays poursuit son éclatement à l'instar des Balkans toujours en ébullition. Cette crise était en préparation depuis de longues années, mais nous n'avons pas réagi à temps pour soutenir le peuple kosovar, pour lui permettre de restaurer son niveau d'autonomie.

A ce jour, nous avons accueilli 150 000 Albanais d'Albanie, du Kosovo et de la Macédoine. Mettons-nous à la place de tous ces réfugiés. Croyez-vous vraiment qu'ils n'aspirent pas à retourner dans leur pays où ils ont leurs racines et leur coeur ? Malheureusement la réalité est telle qu'ils ne peuvent en aucun cas retourner sur leur terre au risque de trouver un sol miné et des conflits sournois. De plus leurs enfants sont intégrés dans notre pays et en cours de formation. Pouvons-nous mettre fin subitement à un des rares bénéfices de leur déracinement ? Ce sont quelques arguments qui nous amènent à soutenir cette motion par solidarité à ce peuple en souffrance. (Applaudissements.)

M. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat. En d'autres temps, je me chagrinerais de la mauvaise querelle que d'aucuns me cherchent. J'ai passé le stade de m'exciter pour n'importe quoi. La suspension des renvois est une décision qui incombe au Département fédéral de justice et police et non pas aux départements cantonaux.

Concernant les délinquants, j'aimerais quand même dire que vous n'avez pas besoin de faire appel aux statistiques; il vous suffit de lire la presse. J'ai discuté de ce problème, par exemple, avec M. Leuenberger, qui est l'un des responsables de l'Université populaire albanaise. Celui-ci a parfaitement convenu qu'il était détestable que quelques éléments épars, largement minoritaires bien sûr, portent un pareil discrédit sur une communauté qui mérite notre intérêt. C'est ce dont nous avons parlé, nous n'avons rien dit d'autre.

Concernant maintenant la circonspection, je rappelle que nous sommes le seul canton à être intervenu à Berne sur ce problème et nous sommes le seul canton à avoir prêché la circonspection. Vous avez des informations, le Département fédéral des affaires étrangères nous en donne d'autres, je dois savoir apprécier entre ces divergences d'opinions. J'appréhende la situation en tenant compte du fait qu'il est nécessaire de ne pas prendre des décisions qui pourraient être remises en cause la semaine suivante.

Par conséquent, je ne prends pas de décision de renvoi en dehors de ce qui se fait couramment. J'ai émis une seule réserve : celle dont je viens de parler. Depuis que j'ai rencontré personnellement ces trente et un Kosovars, depuis que j'ai rencontré le patron de l'Université populaire albanaise, il ne s'est rien passé et il ne se passera rien aussi longtemps que j'estimerai que nous sommes dans une situation évolutive. La seule chose que je ne peux pas faire - et je vous demande tout de même de le comprendre - c'est de prendre une décision avec des délais, avec des mesures; cela n'est pas en mon pouvoir.

Je pense que l'intérêt des Kosovars, l'intérêt de ceux qui défendent cette motion - encore une fois je peux le comprendre - est que vous laissiez les choses comme elles sont maintenant parce que pour l'instant rien ne se passe qui soit désagréable ou contraire aux Kosovars ici à Genève. J'ai noué un dialogue personnel - rien ne m'y obligeait - avec l'Université populaire albanaise, avec M. Leuenberger qui est certainement un des meilleurs spécialistes de ce canton sur cette question et je continuerai ce dialogue. Je vous demande simplement de ne pas me répéter qu'il faut désobéir. Je vous le répète : il y a des règles, je m'y conforme; ce sont les règles démocratiques de ce pays. Cela ne m'empêche pas d'être tout à fait compréhensif face à cette situation.

Vous n'avez enregistré aucun renvoi de Kosovars, alors votez cette motion, marquez l'envie qui est la vôtre, marquez votre intention à l'égard de l'autorité fédérale mais, je vous en supplie, laissez-moi manoeuvrer comme je l'entends sans quoi, je suis forcé de vous le dire, on laissera Berne agir et je ne crois pas que ce sera dans l'intérêt des gens que vous défendez ! (Applaudissements.)

Mme Madeleine Bernasconi (R). C'est vrai que ce problème est vraiment extrêmement important. Vous dites qu'il faut garder ces personnes. Vous dites que nous n'avons pas fait ce qu'il fallait au moment des différentes crises dans les Balkans. J'aimerais savoir ce qu'il faudrait faire, quel est le gouvernement qui pourrait aller ou quelles sont les personnes qui pourraient représenter ce qu'est une démocratie sans que cela laisse supposer de l'ingérence. C'est cela qui m'interpelle. Je sais qu'il y a des personnes qui sont là, dans notre assemblée, qui font un travail formidable en Albanie où elles amènent leur savoir et tout ce qui est nécessaire pour soigner ces personnes. Je trouve que c'est une action formidable. Je crois que l'on doit répondre à une cause du moment et M. le président a répondu.

Vous ne serez peut-être pas satisfaits mais moi j'ai de grandes interrogations. Quand j'entends à la télévision, dimanche soir, que ces personnes sont rançonnées et doivent donner 3% de leur salaire pour acheter des armes... (Protestations.) C'est ce qui a été dit lors de l'émission de dimanche, c'est ainsi que je l'ai compris, Madame de Haller ! Vous aurez compris ce que vous voulez, moi je l'ai compris comme ça. Mais oui, absolument ! Je n'aimerais pas que l'on dise dans quelque temps que ces personnes ont pu avoir de l'argent en Suisse et qu'elles ont pu acheter des armes. Si vous pouvez me donner la garantie que tel n'est pas le cas, que le travail qui est fait en Suisse a pour but de les aider et leur permettre de repartir dans leur pays, je serai d'accord avec vous à ce moment-là. Mais pour l'instant, je me pose beaucoup de questions et, lorsque vous dites que l'on ne s'en est pas occupé, dites-moi comment il aurait fallu procéder pour ne pas être taxé d'ingérence.

J'ai lu, dans le «Courrier des lecteurs», quelque chose de très beau. Ça doit être un Serbe - et nous sommes en train de mélanger les Serbes et les Kosovars. Ça veut dire que l'on dresse deux peuples l'un contre l'autre au lieu d'essayer de leur permettre de s'entendre. Le peuple n'est pas aussi violent que certaines personnes du gouvernement. Lorsqu'un homme, qui doit certainement être de ce pays, dit : «Réveille-toi, réagis, chante ta volonté de paix et de tolérance, chante ton amour de l'autre, dépêche-toi, peuple serbe, car déjà les enfants de l'Europe murmurent», je crois que c'est important. Autant transmettre un message d'amour que dresser les gens les uns contre les autres.

En tout cas c'est mon souci ce soir et je suis révoltée par les problèmes que certains peuvent causer. Mais je fais aussi la différence avec les familles qui sont touchées profondément, avec les gens qui se conduisent tout à fait correctement, comme nous, ou en tout cas ce que nous essayons de faire selon notre culture et ce qu'elle représente. Mesdames et Messieurs, pour moi, M. le président du Conseil d'Etat a répondu de façon satisfaisante.

M. Pierre Meyll (AdG). M. Ramseyer se souviendra certainement qu'un soir du 1er Août, il y a huit ans, alors président du Conseil municipal de Versoix, je me suis permis de tirer un certain parallèle avec les terroristes, qui étaient à l'époque considérés comme tels, les Waldstätten qui luttaient contre la tutelle des Habsbourg. Le parallèle est vite fait, Monsieur le président. Nous savons ce qui se passe par la presse, mais également par des canaux qui sont sûrs. En constatant les massacres perpétrés dans la Kosove, on peut aussi penser qu'il s'agit d'une question de tutelle et de lutte de ces «terroristes». Rappelez-vous que ces terroristes du jour, dans les années qui suivent, deviennent des héros. Mais des héros morts, c'est trop tard. Alors, dans certains cas, il faut savoir désobéir.

Le procès que nous vivons actuellement à Bordeaux fait la démonstration de ce que peut entraîner une obéissance aveugle aux lois. Il y a des moments où le héros est celui qui désobéit. J'aimerais, quand bien même vous ne voulez pas devenir un héros, que vous puissiez de temps à autre désobéir, ce que je vous conjure de faire. Beaucoup de ces gens sont devenus des héros; alors faisons en sorte qu'ils ne souffrent pas trop et qu'ils restent vivants.

Mme Jeannine de Haller (AdG). Je voudrais juste répondre à Mme Bernasconi au sujet de la soi-disant rançon qui n'en est bien sûr pas une. Il s'agit de 3% que les Kosovars cèdent volontairement de leur salaire pour payer les professeurs bénévoles qui se sont engagés à donner des cours aux élèves kosovars qui n'ont plus accès aux écoles. Ils enseignent dans des conditions incroyables dans les maisons privées et cet argent est destiné uniquement à l'enseignement et à la santé des enfants sur place.

Avec ce qui vient d'être dit à propos de l'Espagne, il eût mieux valu sans doute ne pas parler d'ingérence, Madame Bernasconi ! Heureusement que des gens à l'époque en ont parlé; ils ont même osé y aller et aujourd'hui nous leur en sommes fort reconnaissants.

Par ailleurs, je trouve que ce débat se disperse. Il n'a aucune raison d'être. Les faits sont d'une telle gravité que je vous demande de passer au vote. Ça suffit ! On ne va pas délibérer des heures sur un sujet aussi douloureux, grave, pénible et horrible pour plein de gens !

Le président. Mme Reusse-Decrey et M. Brunier renoncent à prendre la parole. M. Marti ne renonce pas...

M. Pierre Marti (PDC). Non, je ne renonce pas ! Il me semble qu'il se dit beaucoup de choses et que l'on ne relit plus suffisamment la proposition de motion qui a été faite. Il n'y a aucune demande de désobéissance quelle qu'elle soit ! On dit simplement : «S'il vous plaît, Messieurs les responsables, prenez le temps de la réflexion dans un moment des plus cruciaux !» C'est tout ce qui est demandé dans cette motion. Je l'ai signée; je ne serais pas du tout d'accord de signer une motion qui me demanderait d'être désobéissant. Mais il est important pour la vie de nombreuses personnes de prendre ce temps de réflexion, un temps qui permettra peut-être à beaucoup de gens d'être encore en vie ces prochains mois. (Applaudissements de la gauche.)

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

considérant :

- la situation des droits de l'Homme en Kosove;

- le danger de plus en plus pressant du déclenchement d'un conflit armé dans cette région;

- le caractère totalement inacceptable des pratiques du gouvernement serbe dans les domaines des droits démocratiques, des droits des peuples et des droits de la personne humaine,

exprime sa solidarité avec le peuple albanais de Kosove et :

invite le Conseil d'Etat

d'une part, à exprimer aux autorités fédérales les demandes suivantes :

- la suspension de tous les renvois de requérants d'asile, de déserteurs et de réfractaires kosovars vers la "; République fédérale de Yougoslavie " aussi longtemps que les autorités de la RFY ne garantiront pas la sécurité des rapatriées et rapatriés et que la situation des droits de l'Homme en Kosove ne se sera pas améliorée d'une manière substantielle et vérifiable;

- l'admission provisoire pour tous les requérants d'asile kosovars en Suisse;

- l'engagement déterminé de la Suisse pour une solution pacifique de la crise en Kosove;

- l'engagement déterminé de la Suisse pour la surveillance du respect des droits de la personne humaine en Kosove;

d'autre part, à surseoir momentanément au rapatriement pour les requérants d'asile de Kosove. 

PL 7833
7. a) Projet de loi constitutionnelle de Mme et MM. Pierre Vanek, Rémy Pagani, Christian Grobet, Fabienne Bugnon et Chaïm Nissim modifiant la Constitution de la République et canton de Genève (A 2 00). ( )PL7833
PL 7442-A
b) Rapport de la commission de l'énergie et des Services industriels chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Roger Beer, John Dupraz, Jean-Claude Genecand, Gabrielle Maulini-Dreyfus, Evelyne Strubin et Sylvie Châtelain modifiant la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève (SIG) (L 2 13). ( -) PL7442
Mémorial 1996 : Projet, 2530. Renvoi en commission, 2537.
Rapport de majorité de M. René Longet (S), commission de l'énergie et des Services industriels de Genève
Rapport de minorité de M. Rémy Pagani (AG), commission de l'énergie et des Services industriels de Genève
PL 7824
c) Projet de loi constitutionnelle de Mmes et MM. Janine Berberat, Hervé Dessimoz, Henri Duvillard, Laurence Fehlmann Rielle, René Longet, Olivier Vaucher et Alberto Velasco modifiant la Constitution de la République et canton de Genève. (A 2 00) ( )PL7824

Projet de loi constitutionnelle(7833)

modifiant la Constitution de la République et canton de Genève(A 2 00)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article 1

La Constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est modifiée comme suit :

Art. 159, al. 1, lettre a, e et f (nouvelle teneur)

L'administration des Services industriels est confiée à un conseil d'administration dont les membres sont nommés à raison de :

a) 1 membre de chaque parti représenté au Grand Conseil, désigné par ce dernier;

e) 3 membres par les conseillers municipaux des autres communes, choisis au sein d'exécutifs communaux;

f) 4 membres faisant partie du personnel des SIG, élus par l'ensemble du personnel au bulletin secret selon le système proportionnel.

Art. 2

La loi constitutionnelle no 7801, du 23 janvier 1998, modifiant l'article 159 de la Constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est abrogée.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le présent projet de loi constitutionnel a pour but de modifier l'article 159 de la Constitution fixant la composition du Conseil d'administration des Services industriels en fonction des propositions d'adaptation prévues dans le projet de loi modifiant la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève.

Nous espérons que vous ferez bon accueil à ce projet de loi.

Rapport de la commission de l'énergie et des services industriels chargée d'étudier le projet de loi modifiant la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève (SIG) (7442)

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

Le projet de loi 7442, déposé par deux députés radicaux, un démocrate-chrétien, une élue verte, une élue de l'alliance de gauche et une socialiste en date du 29 mars 1996, a été renvoyé à la commission de l'énergie et des SIG lors de la séance du Grand Conseil du 9 mai 1996 (Mémorial p. 2530-37).

A teneur de l'exposé des motifs, il s'agit essentiellement :

- de découpler la fonction de directeur général et de président du conseil d'administration;

- de créer en conséquence au sein du conseil d'administration un bureau, et au niveau de la direction un comité de direction.

Les auteurs du projet n'entendaient pas modifier la composition du conseil lui-même, mais proposent néanmoins de fixer une limite d'âge de 65 ans, de ramener la durée du mandat à 4 ans, et d'exclure que la présidence puisse être assumée par un conseiller d'Etat ou un conseiller administratif. Par ailleurs, le projet vise à ancrer dans la loi la pratique d'un contrôle fiduciaire externe.

Dans le débat de préconsultation, un des auteurs, M. J.-C. Genecand, mettait en question les restrictions proposées à l'accès à la fonction de président. M. C. Nissim soulignait que le poste du prochain directeur devait faire l'objet d'un appel public de candidature, et M. L. Moutinot souhaitait, pour le groupe socialiste, que les mandats ne soient pas indéfiniment renouvelables.

Travaux de la commission

La commission de l'énergie et des SIG a consacré, sous la présidence de M. Pierre Vanek, président, 7 séances à l'examen de ce projet de loi, entre décembre 1997 et février 1998. Elle a bénéficié de l'assistance active du DIAE, soit de M. Robert Cramer, conseiller d'Etat, ainsi que de Mme K. Salibian, juriste, et des représentants de l'OCEN, soit, alternativement, MM Genoud, Sella et Spierer.

Entrée en matière

Un premier débat au sein de la commission a concerné le mode de traitement du PL. Pour certains commissaires, il vaut mieux attendre une restructuration plus fondamentale des SIG, suite aux réflexions qui vont se développer dans le cadre des défis auxquels est confronté l'établissement, et en premier lieu celui de la libéralisation du commerce de l'électricité. La séparation des fonctions de président du conseil d'administration (ci-après CA) et de directeur général n'apporterait rien dans ce contexte. Par ailleurs, elle pourrait déjà être pratiquée par décision interne. C'est pour l'essentiel la position des libéraux.

Pour d'autres, dont le chef du département, le Conseiller d'Etat Cramer, ces réflexions vont encore prendre du temps, et il n'est pas bon de retarder ce qu'on peut déjà faire maintenant. Par ailleurs, la réforme prévue allégerait les charges à assumer à la tête de l'entreprise. Ce qui est ainsi un bon préalable aux autres travaux qui attendent ses responsables.

La commission tranche ce débat le 12 décembre, en décidant, par 10 voix contre 1 opposition et une abstention (libérales), de traiter immédiatement ce projet et de ne pas le lier aux autres réformes en discussion ou déjà proposées (PL 7535, par exemple).

L'entrée en matière est ensuite votée le 16 janvier, par 6 oui (1 radical, 2 socialistes, 1 vert, 2 alliance de gauche) et 4 abstentions (3 libéraux, 1 radical).

Audition de M. Gérard Fatio, directeur général des SIG

Le 16 janvier, la commission reçoit M. Fatio, qui n'est pas opposé au principe de la séparation des fonctions, bien qu'il n'en attende aucune aide. Il souhaite également d'abord faire le point sur ce qui attend l'entreprise; de plus, il s'agira d'adapter les cahiers de charge des directeurs. Par ailleurs, le PL est neutre en termes de coût, puisque la fonction de président ne sera plus rémunérée comme un mandat professionnel. Enfin, M. Fatio signale que la séparation peut déjà être mise en oeuvre par le CA.

La commission procède d'abord à un premier tour d'horizon sur les modifications proposées par le PL puis l'examine article par article.

Commentaire article par article

Article 6

Cet article n'avait pas été visé par le PL.

Représentation des communes

Plusieurs commissaires (MM. Mauris et Duvillard) soulèvent la question d'optimiser la représentation des communes. Dans ce sens, ils proposent, dans un premier temps, que l'élection des 3 membres représentant les communes se fasse par l'Association des Communes genevoises. Puis, dans un deuxième temps, avec l'assentiment de l'ACG, la proposition est amendée en ce sens que les communes seraient obligatoirement représentées par un membre de leur exécutif, à l'instar de ce qui est la règle pour la Ville de Genève.

Cette proposition amendant la lettre e) de la loi est adoptée par 12 oui contre 3 abstentions (2 verts et 1 AdG) le 13 février.

Représentation des salariés des SIG

M. Velasco demande, aussi en vue des périodes difficiles qui attendent les SIG, que la représentation du personnel soit renforcée, passant de 3 à 4 membres. Cet amendement à la lettre f) est adopté le 6 février par 10 voix (2 radicaux, 1 démocrate-chrétien, 3 socialistes, 3 alliance de gauche et 1 vert) contre 3 oppositions (libérales) et deux abstentions (1 démocrate-chrétien et 1 vert).

Lors de la séance de la commission du 20 février, présidée par M. O. Vaucher, vice-président, le DIAE soumet des corrections à l'art. 6, consistant à :

- englober au présent texte la modification votée en deux débats le 23.1.98 par le Grand Conseil à la lettre a), par le PL 7762, relative à la représentation de tous les partis au CA;

- apporter des changements rédactionnels à la teneur de la lettre e) (au lieu de "; désignés parmi leurs exécutifs " on a maintenant "; choisis au sein d'exécutifs communaux ").

Au vote lettre par lettre, le 20 février, la lettre a) est confirmée à l'unanimité (deux abstentions libérales), la lettre e) également (2 abstentions libérales); quant à la lettre f) elle est votée par 5 oui (1 AdG, 3 socialistes, 1 démocrate-chrétien) contre 3 non (2 libéraux et 1 radical). L'ensemble de l'article ainsi modifié est accepté à l'unanimité moins 3 abstentions (2 libéraux et 1 radical).

Ces deux amendements nécessitent une modification constitutionnelle.

- La restriction à l'éligibilité au CA des SIG n'est en soi pas contraire à la lettre de la constitution. Elle constitue cependant un changement suffisamment important de la pratique pour qu'il soit préférable d'être explicite à son sujet.

- Le nombre de représentants des salariés des SIG étant fixé à 3 dans la constitution, une correction à ce niveau s'impose.

La commission, à l'instar de ce qu'a décidé la commission des droits politiques qui, en examinant le PL 7762 a déposé le PL constitutionnel 7801, a dès lors souhaité accompagner le présent rapport d'un projet de modification de la constitution.

Lors de la séance susmentionnée du 20 février, le DIAE a soumis deux variantes d'article constitutionnel, qui seront discutées plus bas (voir sous "; article constitutionnel ").

Article 10

A l'alinéa 1, M. Velasco propose de remplacer la formulation "; sont indéfiniment rééligibles " par "; sont rééligibles deux fois de suite ". Ils peuvent ainsi exercer au maximum trois mandats successifs.

Cet amendement est adopté le 30 janvier par 10 oui (libéraux, démocrates-chrétiens, socialistes, alliance de gauche) contre 2 abstentions (verts).

A l'alinéa 3, Mme Berberat propose de supprimer la limite d'âge.

D'après les informations apportées par le Département, seul le CA des TPG connaît une limite d'âge, fixée à 65 ans. Pour le reste c'est la loi sur les commissions officielles du 24 septembre 1965 qui s'applique (75 ans). Cet amendement est adopté par 12 oui et 2 abstentions (alliance de gauche).

Ainsi amendé, l'article 10 est accepté à l'unanimité, en date du 30 janvier.

Article 15

Aux alinéas 1 et 2 est introduite à l'unanimité la même disposition qu'à l'art. 10, al. 1, concernant la durée des mandats.

A l'alinéa 2, sur proposition de M. Vaucher, "; désigne " est remplacé à l'unanimité par "; élit ".

L'article 15 est voté à l'unanimité le 30 janvier.

Article 16

Cet article énumérant les compétences du CA, la commission se demande dans quelle mesure la séparation des fonctions entre directeur général et président du CA entraîne des ajustements concernant les compétences du CA. Une étude comparative effectuée par le Département, notamment des CA des TPG, de l'aéroport et de la Banque cantonale, établit qu'il n'y a pas de problèmes, et qu'il convient d'en rester aux modifications apportées par le PL aux lettres b) et n).

A la lettre b), la commission introduit la même formulation qu'à l'art. 15, al. 2 : élit en lieu et place de désigne.

Les deux lettres modifiées sont votées le 6 février à l'unanimité, les commissaires libéraux s'abstenant.

Article 17

Le nouvel alinéa 7 est retenu à l'unanimité le 30 janvier.

Article 18

A l'alinéa 1, la commission introduit, le 30 janvier, la même modification qu'aux art. 10 et 15 (limitation à trois mandats successifs).

A l'alinéa 3, M. Pagani propose de prévoir que parmi les membres du bureau il y ait obligatoirement "; un membre du CA choisi parmi le personnel des SIG ". Cette proposition est écartée par 3 oui (alliance de gauche), 7 non (les libéraux, radicaux, démocrates-chrétiens) et 5 abstentions (les socialistes et les verts).

En revanche, l'alinéa 3 de la loi actuelle excluant les représentants des salariés du bureau du CA est biffée par 10 oui (radicaux, socialistes, verts, alliance de gauche) contre 3 non (libéraux) et 2 abstentions (démocrates-chrétiennes). Ainsi, le CA est libre de nommer les membres qu'il souhaite au sein de son bureau.

L'article ainsi amendé est voté le 30 janvier par 11 voix contre 3 (libéraux) et 1 abstention (démocrate-chrétienne).

Article 19

Il convient également de modifier l'alinéa 3, pour y remplacer la référence au conseil par celle au bureau.

Adopté à l'unanimité.

Article 20

Adopté à l'unanimité, le 6 février (2 abstentions libérales).

A l'alinéa 2, suite à une correspondance adressée le même jour par les SIG à la commission et portant sur les art. 20, 20A et 23, la commission biffe le 13 février le mot "; toutes " (3 abstentions libérales). En revanche, la commission refuse par 10 non contre 3 oui (les libéraux) et 2 abstentions (démocrates-chrétiennes) de reprendre la proposition présentée par les SIG dans leur lettre (voir la lettre en annexe).

Article 20A

L'alinéa 1, déjà adopté le 30 janvier tel que proposé par le PL, est modifié en date du 13 février dans le sens souhaité par les SIG (voir ci-dessus). Il s'agit d'indiquer que la composition du comité de direction sera définie par le CA, plutôt que de prévoir impérativement qu'il comporte "; les directeurs des services et le secrétaire général " (unanimité, moins trois abstentions libérales).

A l'alinéa 2, la commission biffe, le 6 février, par 9 oui (3 libéraux, 1 radical, 2 démocrates-chrétiens, 1 socialiste et deux verts) contre 2 (1 socialiste et 1 alliance de gauche) et 2 abstentions (socialiste et alliance de gauche) la phrase "; ils consacrent tout leur temps à leur fonction ".

Il va de soi que les membres du conseil de direction doivent tout leur temps de travail à leur fonction. Si ce temps de travail était à temps partiel, ils doivent naturellement s'abstenir de toute activité professionnelle annexe entraînant confusions ou contradictions d'intérêts; s'il est à temps plein, une autre activité rémunérée est exclue de plein droit. Le CA demeure maître d'intervenir pour interdire à un directeur une activité annexe, si besoin était; par ailleurs, toute précision utile peut être ajoutée aux cahiers des charges et aux contrats de travail.

L'article dans son ensemble, avant les modifications susmentionnées à l'al. 1, est voté le 6 février par 12 oui contre 3 abstentions (libérales).

Article 20B

Adopté par 12 oui et 3 abstentions (libérales), le 6 février

Article 21

Le PL prévoyait que la gestion des SIG fasse l'objet d'un contrôle annuel effectué par une fiduciaire privée, et développait cette idée dans la modification qu'il proposait de l'art. 23 de la loi. Le terme de "; gestion " employé dans cette proposition pouvait cependant laisser entendre qu'il y aurait un audit annuel des SIG, ce qui serait disproportionné. Par contre, un contrôle de gestion tel qu'il est à l'étude pour l'ensemble de l'Etat devra naturellement englober les établissements publics comme les SIG. Il est toutefois inadéquat d'anticiper dans la loi sur les SIG une telle disposition.

Pour ces raisons, une majorité de commissaires a rejeté, le 6 février, la version proposée par les auteurs du projet, par 11 non contre 4 oui (1 vert, 2 radicaux, 1 socialiste), et décida ainsi de ne pas modifier l'article 23.

En revanche, la lettre susmentionnée des SIG proposait à l'article 23 que "; les comptes des Services industriels font l'objet d'un contrôle externe annuel, effectué par une fiduciaire privée ". La commission accepta alors le 13 février de reprendre le texte proposé par les SIG en lui ajoutant l'alinéa 2 de l'article 23 proposé par le PL. Cet alinéa précise que les rapports sont adressés aux membres du CA et au Conseil d'Etat. Il est clair qu'ils doivent également être remis à la commission de l'énergie et des SIG du Grand Conseil dans le cadre de l'examen, par cette dernière, des comptes des SIG.

Ces dispositions sont introduites à l'article 21, dans un nouvel alinéa 7, comportant la note marginale "; contrôle externe " (unanimité et 1 abstention libérale).

Article 22

La modification à l'alinéa 1 est adoptée par 12 oui et 3 abstentions (libérales), le 6 février.

Article 2 souligné

M. le conseiller d'Etat Cramer ayant rendu attentive la commission à la contradiction entre la nécessité de mettre en vigueur rapidement les présentes modifications à la loi sur les SIG, afin que la procédure de nomination d'un directeur général puisse être effectuée au plus tôt, et l'exigence de modifier préalablement la constitution pour que les amendements à l'article 6 puissent entrer en vigueur, décision fut prise de prévoir une mise en vigueur différenciée.

L'article 2 souligné est ainsi modifié en ce sens que les amendements à l'article 6 n'entrent en application qu'au lendemain du vote populaire sanctionnant les amendements correspondants à l'article 159 de la constitution, par le PL constitutionnel ci-joint. Cette précision étant apportée, rien ne s'oppose à adopter la présente loi en trois débats et de la mettre en vigueur dès l'expiration du délai référendaire.

Vote final sur la loi

Au vote final, les propositions ci-jointes sont adoptées à l'unanimité, moins trois abstentions libérales.

Article constitutionnel

Comme dit plus haut, la commission a souhaité modifier également l'article 6 de la loi; dès lors, une révision de l'art. 159 de la constitution devient nécessaire.

Il s'ajoute à cela que la révision constitutionnelle votée le 23 janvier dernier par le Grand Conseil sur proposition de sa commission des droits politiques et du règlement (PL 7801) comportait une erreur, en ce sens qu'elle s'était contentée de remplacer la lettre a) de l'alinéa 1 de l'article en cause, pour y inscrire la représentation de tous les partis politiques, sans corriger le chapeau de l'alinéa. Or, ce dernier dit que le CA comportera 19 membres, alors qu'avec le modification votée, ils seront au nombre de 21.

Devant la décision de la commission de l'énergie et des SIG de préparer une nouvelle révision de l'article 159, après diverses discussions, notamment entre le Bureau du Grand Conseil et le Conseil d'Etat, ce dernier a retiré le texte du PL 7801 de l'agenda du vote populaire du 7 juin, au bénéfice du nouvel article à créer.

Nouvel article 159

En date du 20 février, le DIAE soumettait à la commission deux variantes en vue des modifications à apporter à l'art. 159.

La première variante maintient le contenu de l'article 159, en apportant à son alinéa 1 les compléments discutés ci-dessus.

La seconde variante transfère l'entièreté du contenu de l'article 159 dans le domaine de la loi.

Après une brève discussion, la majorité de la commission (tous les membres présents sauf le représentant de l'alliance de gauche) a opté pour cette seconde solution. En effet, l'ensemble des exigences qui font l'objet des 4 alinéas de cet article se retrouvent dans la loi sur les SIG; s'agissant de la composition du CA, on évitera d'avoir à passer devant le peuple chaque fois que l'on veut la modifier. De la même manière, la composition du CA de la Banque cantonale ou des TPG ne se trouve pas non plus dans la constitution.

C'est ainsi ce souhait de souplesse qui a conduit les commissaires présents à opter pour la variante II. Le rapporteur se voit contraint néanmoins de relever qu'une décision de cette portée a dû être prise en moins d'une heure et dans une composition singulièrement réduite (2 libéraux, 1 démocrate-chrétien, 1 radical, 3 socialistes, 1 alliance de gauche). Pour cette raison, il a été décidé de joindre au présent rapport pour information également la variante I (cf. tableau synoptique), qui est d'ailleurs reprise dans le rapport de minorité de M. Pagani.

Enfin, les deux variantes prévoient, logiquement, l'abrogation de la loi constitutionnelle 7801 du 23 janvier, qui devient caduque.

Au vu des explications fournies dans le présent rapport, la commission vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, à faire bon accueil aux présentes propositions de révision de la loi sur les SIG et de la constitution.

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article 1

La Constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est modifiée comme suit :

Art. 159  Organisation (nouvelle teneur)

L'organisation des Services industriels est réglée dans la loi.

Art. 2

La loi constitutionnelle 7801, du 23 janvier 1998, modifiant l'article 159 de la Constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est abrogée.

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RAPPORT DE LA MINORITÉ

concernant le projet de loi constitutionnelle modifiant la Constitution de la République et canton de Genève (A 2 00) (7824)

L'Alliance de Gauche approuve les modifications relatives au projet de loi 7442 et notamment sont article 6 qui vous est soumis. Par contre le projet de loi constitutionnel dit 2e variante ne remporte pas notre adhésion. En effet, à la suite d'une pesée d'intérêts prenant en compte la volonté du Grand Conseil de revitaliser cette entreprise par une modification de structure, pour aller vite il avait été convenu, lors de la dernière séance de la commission de l'énergie, que le Conseiller d'Etat Robert Cramer fournirait aux commissaires un projet de modification de l'article 159 de la constitution. Ce texte devait traiter de la représentation des partis, de la participation des exécutifs communaux et de la représentation du personnel. Une séance technique de la commission devait entériner ce choix. Malheureusement les participants à cette ultime séance n'ont pas voulu ratifier la volonté de la majorité de la commission. Ils se sont ralliés à un projet qui met en péril le fonctionnement ultérieur des SIG. Soumettant tout changement ultérieur de structure de cette entreprise à la voie législative et non constitutionnelle. Rendant ainsi aléatoire, en fonction de majorité parlementaire du moment, tout projet à long terme.

Pour notre groupe la proposition de modification constitutionnelle inscrivant dans ce texte supérieur la composition du conseil d'administration des SIG est la seule solution capable d'une part de donner les meilleures conditions à un vote populaire positif car respectant la volonté exprimée par l'ensemble des intervenants et d'autre part de permettre à cette entreprise d'envisager sereinement son avenir, du moins du point de vue de ses structures.

Reste la question du taux de représentativité au sein du conseil d'administration des communes et notamment de la Ville de Genève. Cette question nous parait pouvoir trouver une solution par une proposition d'amendement que nous présenterons en plénière après avoir auditionné, en commission, les représentants des communes et notamment de la Ville de Genève.

En conséquence, nous proposons que le Grand Conseil reprenne à son compte le projet initial proposé par le Conseiller d'Etat Robert Cramer à savoir la variante 1 du projet de loi constitutionnel art. 159 ci-annexée.

Variante de l'article 159 du projet de loi constitutionnelle

Art. 159, al. 1, lettre a, e et f  Administration (nouvelle teneur)

L'administration des Services industriels est confiée à un conseil d'administration dont les membres sont nommés à raison de :

a) 1 membre de chaque parti représenté au Grand Conseil, désigné par ce dernier;

e) 3 membres par les conseillers municipaux des autres communes, choisis au sein d'exécutifs communaux;

f) 4 membres faisant partie du personnel des SIG, élus par l'ensemble du personnel au bulletin secret selon le système proportionnel.

Premier débat

M. René Longet (S), rapporteur de majorité. Ces deux points de l'ordre du jour, 72 et 73, sont joints; si vous les prenez ensemble vous avez en fait quatre propositions. Sur ces quatre objets, trois d'entre eux sont des variantes d'articles constitutionnels et le dernier est un projet de loi. J'aimerais vous signaler que ce projet de loi a été proposé par la commission de manière à pouvoir être voté ce soir indépendamment du sort que nous ferons aux articles constitutionnels.

Si vous prenez le rapport à la page 13, vous trouverez l'article 2 souligné et vous verrez que nous avons prévu une solution d'entrée en vigueur différenciée qui nous permet de voter ce soir, sans problème juridique quelconque, le projet de loi 7442-A.

En revanche, s'agissant des articles constitutionnels, nous avons devant nous trois variantes et la proposition que nous vous présentons ce soir est la suivante. A savoir : les projets d'articles constitutionnels sont renvoyés à la commission avec mission pour celle-ci de revenir à la séance d'avril avec un seul projet. Cela n'a pas beaucoup de sens, ce soir à 22 h, d'entamer un débat sur des alinéas d'articles constitutionnels. Il y a trois propositions, quatre alinéas, qui pourraient susciter passablement de débats ce soir, je crois que ce n'est ni le lieu ni l'heure.

Je vous propose, par conséquent, de renvoyer le volet constitutionnel en commission en priant cette dernière de faire diligence afin que nous puissions approuver un seul texte et nous mettre d'accord sur son contenu lors de la session d'avril. Pour le reste, le projet de loi doit être discuté ce soir; cela ne pose aucun problème.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. D'entrée de cause, je souscris à tout ce que vient de dire mon collègue René Longet et, afin que ne soient pas répétés les couacs d'hier soir, je suggère effectivement que les deux projets d'articles constitutionnels soient renvoyés en commission ainsi que nous le proposons majoritairement. Nous aurons largement le temps de défaire ce que nous avons fait ou de refaire ce que nous avons défait !

M. Roger Beer (R). J'interviendrai tout particulièrement sur le projet de loi 7442-A visant à découpler la fonction de président du conseil d'administration de celle de directeur général des Services industriels. Ce projet de loi date du 29 mars 1996 et a été renvoyé en commission par le Grand Conseil le 9 mai 1996.

Il est vrai que lors de la dernière législature, à la commission de l'énergie, nous avons eu quelque peine à nous faire entendre comme les auteurs du projet de loi. J'aimerais, à cet égard, remercier la nouvelle commission qui, en deux mois, a réussi à régler ce problème avec une bonne majorité après près de deux ans d'attente.

Nous aurions toutefois pu obtenir une majorité la dernière fois également. Je crois que les gens des SI eux-mêmes ne se sont pas du tout opposés à cette distinction entre une direction générale professionnelle et un conseil d'administration qui a un rôle politique. Mesdames et Messieurs les députés, c'est cette modification que nous vous demandons de voter ce soir.

Il est bien évident que dans le cadre du débat, alors que le projet de loi ne s'attaquait qu'à cette problématique, d'autres propositions ont été émises, ainsi que l'ont énoncé les deux rapporteurs. Celles-ci font partie de projets de lois constitutionnelles, car elles changent la constitution.

Le parti radical est également d'accord avec cela; il ne s'agit donc pas d'avoir cette discussion ici. Il est plutôt question de prendre le temps de discuter en commission de ces changements concernant le conseil d'administration. Le principe de la séparation des fonctions de directeur et président peut être en revanche voté ce soir.

M. Olivier Vaucher (L). Ainsi que l'a dit le préopinant, la commission a fait diligence, en effet, sur ces différents projets de lois durant les deux derniers mois que nous avons vécus. D'autre part il nous a été demandé, par le Conseil d'Etat en charge, d'agir rapidement pour mener à bien ces projets de lois; tant celui déposé par un certain nombre de députés que les projets de lois constitutionnelles. Ces derniers ont été étudiés et soumis au Conseil d'Etat; les variantes apportées par celui-ci ont été étudiées par la commission.

En ce qui nous concerne, des solutions intéressantes avaient été retenues et nous ne voyons pas pour quelle raison les projets de lois constitutionnelles devraient retourner en commission. Je crois qu'il faut observer une certaine droiture dans notre travail. Nous avons étudié et travaillé avec célérité; il n'y a dès lors pas de raison pour recommencer le travail qui a été fait.

D'autre part, je tiens à souligner qu'en ce qui concerne le projet de loi 7442-A, le groupe libéral s'est toujours abstenu dès le début. Pourquoi ? Parce que depuis plus d'une année déjà les SI ont reçu le mandat de revoir leur organisation, d'essayer de redresser la barre avec le déficit dont ils ont hérité; en effet, la présidence actuelle a hérité d'un lourd fardeau financier et déficitaire. (Protestations.) Ce qui est assez intéressant, Monsieur Dupraz...

Le président. Monsieur Dupraz ! Un peu de silence, Mesdames et Messieurs !

M. Olivier Vaucher. Ce qui est assez intéressant, c'est que le projet de loi est issu de vos rangs. On peut dès lors se demander pourquoi vous ne l'avez pas sorti il y a deux ans lors d'une précédente présidence qui émanait de vos rangs, cher Monsieur. En l'occurrence, nous devons nous féliciter, je crois, du travail qui a déjà été accompli par les SI depuis plus d'une année. La nouvelle équipe a su redresser ou stopper l'endettement des SI. En ce qui nous concerne, nous ne voyons pas pourquoi il aurait fallu court-circuiter le travail effectué par les SI, travail dont le résultat devrait nous être communiqué avant l'été. C'est pour cela que le groupe libéral s'est abstenu sur ce projet de loi. In fine, je serais très intéressé d'ici quelques mois, quand ce projet de loi sera passé, de voir qui sera élu à ce nouveau poste de directeur général. Nous serons peut-être étonnés !

M. John Dupraz (R). Certaines choses dites par M. Vaucher ne peuvent pas être passées sous silence. C'est bien la première fois que le groupe libéral s'abstient sur un projet de cette envergure qui concerne une des régies les plus importantes de notre République. Nous avons déposé ce projet de loi afin de séparer la fonction de directeur de celle de président du conseil d'administration, car - conformément à la tradition genevoise - toutes les grandes régies publiques comprennent un conseil d'administration avec un président et un directeur responsable de l'administration. Le système mis en place aux SI nous apparaissait comme un anachronisme mal adapté à la conjoncture actuelle. Nous estimons que la proposition qui a été faite de clarifier les choses et qui a été largement appuyée par ce Grand Conseil doit être retenue. Il est souhaitable qu'il y ait un conseil administration qui donne les grandes options, qui vote le budget et les comptes et un directeur qui administre et gère l'entreprise. Cela m'apparaît nécessaire pour une saine et claire gestion de cette régie publique. C'est pourquoi nous vous demandons d'accepter ce projet de loi.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Le projet de loi 7442-A qui est soumis à discussion à l'instant ainsi que les deux projets de lois que - semble-t-il - la majorité du Grand Conseil se propose de renvoyer en commission, sont issus du Grand Conseil. Par conséquent, le Conseil d'Etat n'interviendra dans ce débat que de façon très modérée. Cela dit, Monsieur Vaucher, vous rendez hommage, à juste titre, au travail effectué actuellement par le président des SI, M. Fatio. Je regrette vivement que, pour ce faire, il vous ait semblé utile de critiquer le travail accompli par son prédécesseur. Mesdames et Messieurs les députés, Louis Ducor a été un très grand président des SI. Notre canton lui doit beaucoup et le Conseil d'Etat se doit de le dire dans ces débats. Monsieur Vaucher, je ne peux pas laisser passer ce que vous venez de dire !

Pour le surplus, il est absolument nécessaire que ce projet de loi 7442-A, qui a été accepté par la commission et qui, semble-t-il, ne rencontre aucune opposition au Grand Conseil, puisse être effectivement mis en application. Il est nécessaire que vous le votiez le plus rapidement possible afin de nous permettre de trouver le directeur que vous souhaitez et le président du conseil d'administration qui vous semble utile; ainsi que vous le savez, les mandats des titulaires actuels arrivent à échéance à la fin de l'année.

En ce qui concerne les deux projets constitutionnels, il n'y a pas de difficulté particulière à les renvoyer en commission pour autant que la commission travaille rapidement.

En effet, si la commission arrive à présenter un rapport sur ces objets lors d'une séance du Grand Conseil du mois d'avril ou du mois de mai, nous serons dans les délais pour que le peuple puisse se prononcer cet automne au sujet de ces modifications constitutionnelles. De sorte que les règles du jeu pourront être fixées à l'échéance prévue, soit à la fin de l'année.

M. Pierre Vanek (AdG). Je renonce, Monsieur le président. J'avais demandé la parole avant que M. Cramer ne la prenne et je crois que l'essentiel a été dit sur cet objet.

M. Olivier Vaucher (L). J'aimerais rectifier ce qui suit : il me semble que M. le conseiller d'Etat Cramer a soit mal interprété, soit mal compris mes propos. Mon intention n'était nullement de critiquer la précédente présidence des SI; en revanche, je relève qu'à l'origine les auteurs du projet de loi sont radicaux; j'en suis d'autant plus étonné que ceux-ci n'ont pas eu le courage de déposer ce projet de loi pendant la présidence de M. Ducor. Cela ne veut pas dire que je critique - tant s'en faut - le travail de M. Ducor !

PL 7442-A

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Loi(7442)

modifiant la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève(L 2 35)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article 1

La loi sur l'organisation des Services industriels de Genève, du 5 octobre 1973, est modifiée comme suit :

Art. 6 Composition et mode de nomination (nouvelle teneur)

L'administration des Services industriels est confiée à un conseil d'administration dont les membres sont nommés à raison de :

a) 1 membre de chaque parti représenté au Grand Conseil, désigné par ce dernier;

b) 4 membres, dont un conseiller d'Etat, par le Conseil d'Etat;

c) 4 membres par le Conseil municipal de la Ville de Genève;

d) 1 membre choisi en son sein par le Conseil administratif de la Ville de Genève;

e) 3 membres par les conseillers municipaux des autres communes, choisis au sein d'exécutifs communaux, dont un par ceux de la rive droite, un par ceux des communes entre Arve et lac et un par ceux des communes entre Arve et Rhône. Leur mode d'élection est déterminé par un règlement du Conseil d'Etat;

f) 4 membres faisant partie du personnel des Services industriels, élus par l'ensemble de ce personnel au bulletin secret et selon le système proportionnel appliqué à l'élection du Conseil national, à l'exception de la disposition concernant le cumul. Seuls ont le droit de vote et d'éligibilité les employés et ouvriers engagés à titre régulier, qui sont assurés ou déposants auprès de la caisse d'assurance. Aucun autre employé ou ouvrier des Services industriels ne peut faire partie du conseil d'administration.

Art. 10, al. 1  Durée des fonctions (nouvelle teneur)

1 Quel que soit leur mode de nomination, les membres du conseil d'administration sont nommés pour 4 ans et sont rééligibles deux fois de suite.

Art. 15, al. 1 et 2 Présidence, vice-présidence, rémunération, secrétariat  (nouvelle teneur)

1 Le Conseil d'Etat désigne le président du conseil d'administration, lequel ne peut être ni un conseiller d'Etat ni un conseiller administratif. Il le choisit, pour la durée de 4 ans, parmi les membres de ce conseil. Il peut le reconduire deux fois.

2 Le conseil d'administration élit, pour la durée de 4 ans, son vice-président qu'il choisit parmi ses membres. Il est rééligible deux fois de suite.

Art. 16, al. 2, lettres b et n (nouvelle teneur)

b) il fixe les compétences du bureau du conseil d'administration et, sous réserve du président et du vice-président, élit les 3 autres membres appelés à en faire partie. Il fixe également les compétences du comité de direction;

n) il nomme et révoque le directeur général, les directeurs et le secrétaire général, ainsi que le personnel, sous réserve des attributions du comité de direction et des dispositions du statut du personnel concernant le droit de recours;

Art. 17, al. 7 (nouveau)

7 Le directeur général assiste aux séances du conseil d'administration.

Chapitre III Bureau du conseil d'administration

Art. 18 Composition et mode de nomination (nouvelle teneur)

1 Le bureau du conseil d'administration (ci-après: le bureau) se compose de 5 membres, soit du président et du vice-président du conseil d'administration qui en font partie de droit et de 3 autres membres. Ces derniers sont désignés pour une période de 4 ans par ce conseil. Ils sont rééligibles deux fois de suite.

2 Le bureau est présidé par le président ou, à défaut, par le vice-président du conseil d'administration.

3 Le directeur général assiste aux séances du bureau.

4 Le secrétariat du bureau est assumé par le secrétaire du conseil d'administration.

Art. 19, al. 1, 3 et 6 Séances (nouvelle teneur)

1 Le bureau se réunit aussi souvent qu'il est nécessaire pour la bonne marche des Services industriels et l'exécution des affaires dont il est chargé.

3 Il doit aussi être convoqué si deux de ses membres le demandent.

6 Les délibérations du bureau sont constatées par des procès-verbaux, avec mention des membres présents.

Art. 20 Attributions (nouvelle teneur)

1 Les attributions du bureau sont définies par le conseil d'administration, conformément à l'article 16, alinéa 2, lettre b.

2 Le bureau a notamment pour attribution d'examiner les questions de gestion courante des affaires et de préparer les délibérations du conseil d'administration, les rapports, propositions et suggestions à lui présenter.

Chapitre III A Comité de direction (nouveau)

Art. 20 A Composition et mode de nomination (nouveau)

1 Sous l'autorité du conseil d'administration et de son bureau, les Services industriels sont dirigés par un comité de direction, présidé par le directeur général et dont la composition est définie par le conseil d'administration.

2 Les membres du comité de direction sont nommés et révoqués par le conseil d'administration.

3 En cas de besoin, ils assistent aux séances du bureau, du conseil d'administration et des commissions mises en place par celui-ci.

Art. 20 B Attributions (nouveau)

Le comité de direction a les attributions suivantes:

a) il pourvoit à l'exécution des décisions du conseil d'administration et veille à la bonne marche des Services industriels dont il suit la gestion courante;

b) il exerce les pouvoirs qui lui sont délégués par le conseil d'administration;

c) il procède aux nominations du personnel que le conseil d'administration place dans sa compétence;

d) il propose au conseil d'administration les études techniques, économiques et financières sur toutes les questions intéressant les Services industriels et lui fournit toutes informations, notamment sur les possibilités nouvelles d'exploitation qu'offrent les progrès scientifiques et techniques.

Chapitre IV Contrôle financier et contrôle de gestion

Art. 21, al. 7  Contrôle externe (nouveau)

7 Les comptes des Services industriels font l'objet d'un contrôle externe annuel effectué par une fiduciaire privée, dont le rapport est adressé à tous les membres du conseil d'administration et du Conseil d'Etat.

Art. 22, al. 1 Rapports (nouvelle teneur)

1 Le contrôle financier fait régulièrement rapport sur son activité et ses constatations au bureau et au comité de direction.

Art. 2 Entrée en vigueur

Les modifications apportées à la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève, du 5 octobre 1973 (L 2 13), entrent en vigueur à l'épuisement du délai référendaire, à l'exception de celles apportées à l'article 6, lesquelles entrent en vigueur dès l'adoption de la révision de l'article 159 de la Constitution.

PL 7833 et PL 7824

Le président. Maintenant, pour la forme, je mets au vote le renvoi en commission des deux projets de lois constitutionnelles portant les N° 7833 et 7824. Nous sommes en vote, Monsieur Vanek ! Voulez-vous vous exprimer sur le vote ? Bien, vous avez la parole !

M. Pierre Vanek (AdG). Merci, Monsieur le président. En ce qui concerne la procédure, nous sommes d'accord que ces projets de lois soient renvoyés en commission. Ces deux projets sont présentés pour la première fois dans cette enceinte, sous la signature d'un certain nombre de députés; il n'y a pas lieu de faire un vote sur le renvoi en commission. Le cas échéant, si quelqu'un en demandait la discussion immédiate, il faudrait faire un vote sur la proposition de discussion immédiate. A priori, ils partent automatiquement en commission.

Le président. Monsieur le député, un des deux projets de lois fait l'objet d'un rapport. Quand un projet de loi fait l'objet d'un rapport et qu'il est proposé de le renvoyer en commission, je suis contraint par le règlement de mettre aux voix le renvoi en commission de ce projet.

Je suis d'accord avec vous : sur la forme, il ne serait pas nécessaire de procéder de cette façon pour le projet 7833 mais, dans l'enthousiasme général, je proposais le renvoi en commission de ces deux projets.

Mis aux voix, ces projets sont renvoyés à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève.

M 1190
8. Proposition de motion de Mmes et MM. Alberto Velasco, Christian Brunier, Christine Sayegh, Luc Gilly, Dolores Loly Bolay, Christian Ferrazino, Anne Briol, Antonio Hodgers et David Hiler : La maison des associations socio-politiques. ( )M1190

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le monde associatif

Nous sommes - en réalité - dans une époque où il faut reconquérir les espaces de la citoyenneté qui sont en train de se rétrécir et de s'appauvrir, alors que les espaces du Marché et de la Technologie s'élargissent et s'enrichissent de plus en plus. Les mouvements associatifs et tous ceux qui agissent au sein de la société civile ont un rôle fondamental à jouer. Sans leur action, il n'y aura pas de contrat social mondial.

Riccardo Petrella

Chef de la Division ";Recherche sociale"

Commission européenne, Bruxelles

Citation tirée de ";Nouveau contrat socialou Apartheid mondial"

Son importance et ses enjeux

Selon le dictionnaire Larousse, une association est un "; Groupement de personnes réunies dans un intérêt commun, différent de la poursuite de bénéfices ".

Se concentrant sur un aspect socio-politique, que ce soit en soutenant un peuple ou des personnes opprimées, oeuvrant pour le désarmement, ou faisant la promotion d'un développement durable, les associations transmettent les valeurs et les préoccupations de leurs membres dans le débat public.

Les associations socio-politiques remplissent une fonction parallèle à celle des partis politiques en représentant des communautés d'intérêt.

La particularité du monde associatif est d'agir à la périphérie du domaine politique et non de le briguer.

Les associations garantissent le maintien de la communication entre les demandes et les préoccupations de la société civile d'une part, et les autorités publiques d'autre part.

Depuis les années 60, de nombreux changements socio-politiques ont amélioré notre quotidien, cela a souvent été dû à l'action déterminante des associations.

Par exemple:

- l'adoption de lois antiracistes,

- l'arrêt des essais nucléaires,

- le Service civil,

- le développement du commerce équitable,

- l'adoption de produits provenant de l'agriculture biologique par les grandes surfaces et les consommateurs,

- le développement d'un réseau de pistes cyclables en ville et à la périphérie,

- le développement de coopératives d'habitation et les baux associatifs,

- les Maisons de quartier et Centres de loisirs,

- la protection concrète des lacs et rivières,

- l'interdiction de fabrication des mines anti-personnels.

C'est à force d'organiser des actions, des manifestations, des conférences publiques, de lancer des débats, des initiatives populaires, de tenir des stands d'information, des conférences de presse, de réunir des signatures et de publier des rapports que ce qui était tenu pour être ";idéaliste" s'est transformé peu à peu en une réalité quotidienne.

L'importance des acteurs non-étatiques dans les relations internationales

Les associations, appelées ONG dans ce contexte, tiennent un rôle toujours plus important dans la politique internationale.

A chaque grande rencontre de l'ONU, nous constatons un nombre croissant d'ONG accréditées. De nombreux dossiers de l'agenda de l'ONU sont initiés par des ONG. Les conventions internationales sont souvent rédigées dans le sens voulu par des coalitions d'ONG (interdiction des essais nucléaires, droit de la mer, droit de l'enfant ...).

La force des ONG provient du fait qu'elles représentent une des seules instances exprimant directement les préoccupations de l'opinion publique.

La disproportion entre les moyens dont disposent les ONG et les rôles qu'elles remplissent est saisissante, spécialement si l'on pense aux conditions de travail dont jouissent les organisations internationales. C'est pourquoi les autorités, au titre du soutien à la Genève internationale, doivent reconnaître et soutenir le monde associatif.

La réalité des associations

Malheureusement, nous ne pouvons que constater que la grande majorité des associations à Genève vivent des situations difficiles que ce soit du point de vue organisationnel ou financier.

Les principales causes de cette situation sont les locaux.

La recherche de locaux sur le marché immobilier n'offre que des loyers prévus pour des entreprises à but lucratif. Ces loyers sont souvent prohibitifs ou représentent un budget annuel équivalent au salaire d'un permanent. C'est pourquoi, trop souvent, des associations se trouvent dans le dilemme de prendre des locaux ou de rémunérer le travail de coordination nécessaire à leur bon fonctionnement.

D'autre part, il est important que les dons provenant du public servent aux campagnes et non pas à payer des loyers.

Les associations ont un réel besoin de locaux à loyer modérés.

Un travail reconnu

Trop souvent, nous remarquons que ce sont des bénévoles qui font vivre les associations. Ils y travaillent week-ends, soirées, congés, toute la vie privée est sacrifiée. Ce qui ne peut être fait pendant les "; heures de bureau " reste en attente ou est effectué dans l'urgence. De telles conditions sont inacceptables en comparaison à celles existant dans le monde du travail.

D'autre part, nous constatons que les sujets travaillés demandent une spécialisation grandissante du fait des enjeux soulevés et de la complexité qu'ils représentent.

Les associations ont un réel besoin de permanents salariés pour effectuer correctement leur travail.

La Maison des associations socio-politiques

Le regroupement en la Fédération pour l'Expression Associative - FEAS - est la solution qu'une cinquantaine d'associations se sont données pour obtenir des locaux, bénéficier de synergies et faire des économies d'échelle.

A près deux ans de consultation et suite au dépouillement d'un questionnaire rempli par ses associations membres, la FEAS est à la recherche active de locaux à loyers modérés. Ce bâtiment qui aurait pour nom la "; Maison des associations socio-politiques " mettrait des bureaux à disposition des associations.

La FEAS veut également faire de ce lieu un espace facilitant l'accueil du public, les échanges thématiques, des débats, des expositions, des conférences, et le partage du matériel.

Il est important que les associations puissent avoir une place suffisante en vue d'installer des structures communes. Comme par exemple:

- des salles de réunions

- une grande salle de conférences et de projection

- des surfaces d'exposition

- une salle multimédia

- un cinéma

- un service d'impression

- une bibliothèque

- un restaurant associatif

- des surfaces de stockage de matériel

- une menuiserie

- des arcades associatives

- des camionnettes collectives

- une crèche

Un accent particulier sera mis sur la mise en commun des différentes stratégies d'actions et pratiques dans le but d'une meilleure utilisation de la spécificité de chacun.

La dispersion de la vie associative genevoise ne pose pas seulement problème aux associations, elle est également un obstacle à l'accès des citoyens à cette source d'information, d'idées, d'actions et de débats. Le regroupement de diverses associations en un lieu commun permettrait à la population de prendre contact avec toute la richesse de l'ensemble de la vie associative genevoise, ce qui fait si cruellement défaut à l'heure actuelle.

A partir des moyens qu'offrira cette Maison des associations socio-politiques, la FEAS prévoit de réaliser différents projets pour soutenir et développer le travail des associations.

Par exemple:

- un Forum international regroupant associations, groupements et ONG. Cette conférence internationale sera organisée exclusivement par ces dernières pour présenter leurs préoccupations face à la situation mondiale,

- un bureau de travail temporaire associatif,

- une présence socio-politique d'associations dans des événements culturels de la vie genevoise.

Des exemples à suivre...

Il existe de nombreuses "; Maisons associatives " dans différents pays tels que le Canada et la France.

A ce titre vous trouverez en annexe un extrait du dossier de la Maison associative de Chambéry.

C'est pourquoi nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à renvoyer cette motion à la commission des travaux.

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Débat

Mme Christine Sayegh (S). Nous fêtons cette année le cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme. «Les droits de l'homme, c'est un échec accablant !», s'est exclamée Mary Robinson, haut-commissaire de l'ONU aux droits de l'homme. Ceci démontre à quel point les valeurs immatérielles sont ignorées. Notre société en détient notamment une qui se rappelle à nous plus particulièrement en période de difficulté économique : cette valeur, c'est le monde associatif.

Ces associations qui trouvent leur énergie principalement dans le bénévolat pour défendre le respect du citoyen, dénoncer les injustices sociales, offrir une aide, une écoute, motiver la solidarité, animer les quartiers, contribuer à l'amélioration de notre qualité de vie; ces associations sont un relais nécessaire entre la population et les instances politiques.

Cette nécessité doit être reconnue, non seulement par un constat, mais aussi par des actes. Offrir un lieu adéquat contribuant favorablement à leurs activités devrait rencontrer un large consensus. J'ai été pour ma part impressionnée par le sérieux et la détermination de quelque septante associations réunies en fédération pour l'expression associative afin de mener à bien un projet de maison des associations.

Les anciens locaux de «La Suisse» sont vides et une étude très complète a été présentée au président du DAEL comprenant un projet d'aménagement avec plan à l'appui, une évaluation du coût de fonctionnement avec le mode de financement sous forme de location des surfaces et engagement financier des associations. Le projet est crédible. C'est pourquoi il y a urgence et je vous remercie d'avoir accepté de traiter cette motion ce soir car l'affectation des locaux SONOR SA serait idéale tant par la surface disponible que par la situation.

Toutefois une vente aux enchères de ces locaux est prévue prochainement, au plus tard en juin. Il n'y a pas d'offres fermes d'achat actuellement mais il est possible qu'à fin mars nous ayons une réponse d'une personne qui souhaiterait les acquérir.

Mme Dolores Loly Bolay (AdG). A Genève, beaucoup d'associations peinent pour trouver des locaux à leur portée financière. Les loyers souvent prohibitifs associés au manque d'argent pour payer les permanents constituent un frein au développement de ces associations. Pourtant personne ne pourra contester ici le rôle important que ces associations jouent tant au niveau culturel que sur le plan social et humain. Leur regroupement en une fédération pour l'expression associative est la solution qu'une cinquantaine d'associations se sont donnée pour obtenir des locaux, bénéficier des synergies et réaliser des économies d'échelle. La maison des associations socio-politiques existe déjà dans d'autres pays: en Espagne, en France ou même au Canada qui ont la volonté ferme de promouvoir la vie associative, élément essentiel de la cohésion sociale d'une ville et de l'intégration de chacun et chacune de ses habitants.

M. David Hiler (Ve). Sur le fond tout a été dit. Il reste maintenant le catalogue des mesures proposées. Il avait été question à l'origine de débattre de cela en commission. Les délais ne le permettant pas, j'aimerais - en tant que signataire - préciser deux ou trois points :

Je ne crois pas qu'il soit bon que nous achetions et que nous louions les locaux. Je pense que nous devons nous contenter de les acheter et de les remettre en droit de superficie. En tant que signataire de cette motion, je n'ai jamais entendu octroyer des subventions indirectes. Je ne crois pas non plus qu'il soit très opportun de garantir des déficits pendant trois ans.

Pourquoi ? Parce que normalement si un plan financier ne marche pas les trois premières années, il y a assez peu de chances pour qu'il marche les années suivantes. Je crois qu'il faut vraiment s'en tenir à une politique où nous considérons ces associations comme des partenaires responsables, capables d'assumer leurs engagements. Cela signifie que nous intervenons au niveau de l'acquisition du terrain - car c'est souhaitable - et que, pour le reste, une intervention en capital est envisageable au niveau des fonds propres. Il ne s'agit pas, par le biais de cette maison, d'augmenter de façon indirecte des subventions au moment où - par ailleurs - nous en bloquons d'autres ou nous en baissons certaines. Il est extrêmement important que nous gardions le contrôle de ce qui est effectivement versé afin de maintenir l'équité entre les différentes associations qui s'adressent à nous pour les soutenir et qui ne seront pas toutes, je le rappelle, dans cette maison. Nous encourageons vivement le Conseil d'Etat à conclure ce qui peut l'être, à étudier ce qui doit l'être mais à ne pas mettre le doigt dans un engrenage qui nous pousserait non seulement à faciliter cette opération mais graduellement à la financer un peu plus chaque jour avec un argent qu'actuellement, à vrai dire, nous ne possédons pas.

M. Luc Gilly (AdG). Je vais être bref puisque mes prédécesseurs ont expliqué l'enjeu de cette maison associative. Je rappellerai deux choses: plus de soixante associations, voire septante font partie maintenant de cette nouvelle fédération. Septante associations, cela représente sur Genève des milliers de personnes qui travaillent sur des projets, qui s'engagent bénévolement ou presque puisque certaines sont des permanents comme moi-même. Je crois simplement que, pour une ville comme Genève, ce serait une reconnaissance urgente à toutes ces personnes et autres qui sont dispersées un petit peu dans toute la ville et qui ont du mal à mieux se faire connaître ou à échanger plus rapidement leurs informations.

Le deuxième point de cette intervention...

Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît, Mesdames et Messieurs ! Je prie les personnes qui ont des conversations privées de bien vouloir les tenir en dehors de cette enceinte. Merci. Poursuivez, Monsieur le député!

M. Luc Gilly. Le deuxième point de cette intervention concerne effectivement l'urgence du projet. Vous avez peut-être lu que les bâtiments de «La Suisse» risquaient d'être rachetés de façon morcelée et, si cela devait être le cas, ces bâtiments seraient effectivement perdus pour le projet qui est déjà très avancé dans sa préparation. Tout le dossier a été fait avec un très grand sérieux...

Le président. Monsieur Annen, Monsieur Lombard, veuillez tenir vos conversations en dehors de l'enceinte, s'il vous plaît ! (Protestations.) On entend votre voix jusqu'ici, Monsieur, et je n'entends plus celle de l'orateur !

M. Luc Gilly. Etant donné l'urgence et puisque - je le répète - un dossier est déjà extrêmement bien préparé sur cet objet, il serait bien que le Conseil d'Etat puisse se pencher au plus vite tant sur les propositions financières pour réaliser ce projet que sur les propositions d'architecture et la répartition des différents locaux. Vous avez sous les yeux toute la liste ainsi que le projet dans la motion 1190; je ne veux pas allonger le débat là-dessus. J'espère que le conseiller d'Etat Robert Cramer avec Laurent Moutinot, je pense, pourront le plus vite possible travailler d'arrache-pied sur ce dossier.

M. Claude Blanc (PDC). Je voudrais d'abord remercier M. Hiler d'avoir clarifié la situation. Je pense que ce qu'il a dit était nécessaire. Cette motion a un certain nombre d'invites qui sont toutes plus mirifiques les unes que les autres. L'évaluation des coûts n'a cependant absolument pas été faite. Il est demandé au Conseil d'Etat d'acheter un groupe d'immeubles mais il n'est pas précisé de quelle manière il va être géré. Je trouve à la limite de l'honnêteté de procéder par la voie d'une motion sans avoir au préalable analysé tout ce que cela pourrait coûter à l'Etat.

Si vous voulez être tout à fait francs, Mesdames et Messieurs les députés, vous devez présenter un projet de loi qui doit avoir un coût; ce coût doit être évalué afin qu'un référendum puisse ou non être demandé. Il n'est pas loyal d'essayer de nous entraîner dans une spirale dont on ne sait absolument pas ce qu'elle va nous coûter finalement. Je crois que c'est une motion... (Brouhaha.) Finalement ça vous ressemble ! C'est la démocratie telle que vous l'entendez, mais malheureusement je n'ai jamais conçu la démocratie ainsi et j'aimerais bien que le peuple soit mis au courant et sache combien ça va lui coûter.

M. David Hiler (Ve). J'aimerais répondre à M. Blanc qui se livre à des interprétations politiques discutables. Il serait préférable de lire ce qui est écrit: ce qui est demandé de façon spécifique, c'est un crédit d'étude. Ensuite il y a les différentes possibilités envisagées.

Il est permis d'imaginer que le Conseil d'Etat, qui est responsable des achats de terrains selon la répartition des compétences, va se montrer circonspect et ne va pas s'engager dans une dépense de fonctionnement de quelque cinq millions par l'achat de cette maison si véritablement il n'y a pas moyen de trouver une solution. Je crois que M. Moutinot est mieux habilité à étudier le projet de plan financier, à le modifier et, le cas échéant, à trouver des formules alternatives.

En dernière analyse, je vous rappelle qu'il s'agit d'une motion. Si M. Moutinot estime que ce projet n'est pas réalisable, qu'il nous entraîne dans des dépenses difficiles à supporter qui seraient en fait des subventions qui ne figureraient pas dans le budget, il nous fera un rapport. Le cas échéant, il prendra les mesures ainsi qu'il peut le faire lorsqu'une motion est votée.

Monsieur Blanc, je suis persuadé qu'il aurait été préférable d'étudier cette motion en commission. Mais en l'occurrence, comme elle a une chance sur deux de ne plus avoir aucun effet quand elle en sortira, je crois qu'il vaut mieux indiquer clairement ce que l'on veut, ce que l'on souhaite et puis - permettez-moi de le souligner - il faut parfois faire confiance au Conseil d'Etat ! (Exclamations.)

M. Christian Grobet (AdG). Je comprends vos préoccupations, Monsieur Blanc, mais elles m'étonnent quand même un peu. Vous savez comme moi qu'il y a une longue pratique dans cette République conformément du reste aux prérogatives qui sont accordées au Conseil d'Etat, à savoir que le Conseil d'Etat procède à des acquisitions immobilières sans que celles-ci fassent l'objet d'autre chose que l'octroi d'un crédit enveloppe par le Grand Conseil. C'est M. Robert Ducret qui a introduit cette pratique du crédit enveloppe; jusqu'en 1985 ou 1988. Monsieur Blanc, vous aviez dans votre parti un excellent magistrat, M. Jean Babel, qui a... (Brouhaha.)

M. Claude Blanc. Vous le mettez à toutes les sauces quand ça vous arrange !

M. Christian Grobet. Comment, vous sous-estimez M. Jean Babel ?

M. Claude Blanc. C'est n'importe quoi !

M. Christian Grobet. J'ai de la peine à vous entendre, vous parlerez tout à l'heure, mais moi je rends toujours hommage à M. Jean Babel pour sa politique d'acquisition foncière laquelle, comme vous l'avez toujours estimé, était un modèle du genre. Je ne vais pas vous rappeler toute une série d'acquisitions foncières qui ont été faites du temps de M. Jean Babel et qui ont bénéficié à divers groupements dont un certain nombre sont proches de votre parti. Je vous ferai grâce d'en établir la liste ce soir.

Ce que je voulais simplement dire, c'est que le fait que l'Etat acquière des valeurs immobilières, des immeubles, entre parfaitement dans ses prérogatives et qu'il n'est pas nécessaire de présenter à cette fin un projet de loi ad hoc. Cela étant dit, c'est vrai que vous avez parfaitement raison, le projet de loi est pré-analysé afin de savoir si les acquisitions envisagées sont bonnes ou non, s'il y a d'autres solutions. Nous estimons qu'il est important de soutenir les associations qui ont énormément de peine à trouver des locaux et qui jouent un rôle essentiel dans la vie sociale de notre canton. Dans une commune qui est chère du reste à un conseiller d'Etat de votre parti, Onex, il existe une Maison onésienne qui est à disposition des associations locales de cette commune. Il y aurait lieu de s'inspirer de ce modèle et d'arriver aussi en Ville de Genève à mettre à disposition des locaux pour des associations. Cela a été fait dans le passé par un certain nombre de magistrats dont moi-même. Je ne vois pas où est le problème.

Je profite cependant de cette occasion pour dire à M. Moutinot, et je pense qu'il y aura peut-être une intervention à ce sujet, qu'il y aurait lieu effectivement, les choses coûtant cher, d'éviter de jeter à l'Arve la valeur d'environ trois millions - je pense - d'un bâtiment qui ne prend qu'une très petite place dans le périmètre de l'ancien Palais des expositions et qui pourrait servir précisément de lieu de réunion pour les associations. Ce bâtiment possède une très belle salle qui est en parfait état. Sa démolition et la construction d'un nouveau bâtiment coûteraient au moins 3 millions. Vu l'état de ce bâtiment, il n'y aurait pas besoin d'engager des frais de rénovation.

Le président. Monsieur le député Roux... Ah, pardon, je me suis trompé de villa, il s'agit du député Blanc !

M. Claude Blanc (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, M. Grobet est vraiment un artiste. Je dirais qu'il est un funambule parce qu'il arrive à utiliser n'importe quel argument pour arriver à ses fins. Je l'avais déjà analysé tout à l'heure quand on parlait de Montbrillant. Je vous ai vu utiliser successivement au moins quatre ou cinq voies pour essayer de brouiller les cartes. J'avoue franchement que je ne cesserai jamais de vous admirer. (Exclamations.)

Je dois dire que vous en mettez un peu trop quand même. Vous dites aujourd'hui : le Conseil d'Etat est libre de procéder aux acquisitions de terrains, je suis d'accord avec vous. Dans la foulée, vous venez de dire qu'il faut d'abord acquérir les bâtiments, ce qui est dans les prérogatives du Conseil d'Etat et qui lui est demandé par motion. Mais tout le reste ? Une fois que nous aurons ces bâtiments, il faudra bien en faire quelque chose ! Il faudra bien voter une loi ! Ensuite vous viendrez nous dire : «Puisque nous avons les bâtiments, nous sommes obligés de voter la loi.» Alors, vous comprenez, la ficelle est un peu grosse ! Vous allez voter cette motion ce soir, mais j'espère que le Conseil d'Etat sera conscient de ses responsabilités et qu'il ne va pas nous engager dans une opération qui nous mènera un jour devant le peuple qui nous dira non. Ces soixante-dix associations, vous vous gardez bien de nous en donner la liste. Nous aimerions tout de même savoir... (Brouhaha.)

Une voix. Mais si, il y a «l'association pour la feuille de coca» !

M. Claude Blanc. C'est qui ça ?

M. Daniel Ducommun. Les amis du chanvre !

M. Claude Blanc. Les amis du chanvre ? (Rires.)

J'aimerais savoir à qui ces locaux sont destinés. J'aimerais que l'on puisse dire la vérité. Vous essayez par la voie d'une motion de demander au Conseil d'Etat de faire une acquisition puis ensuite vous pensez que nous serons obligés de l'utiliser à vos fins. Moi, je vous dis: il faudra que l'on sache une fois la vérité et que toute la lumière soit faite. Vous nous mettez la tête dans un sac; excusez-moi, mais je refuse de voter la tête dans un sac.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je n'ai pas l'habitude de pratiquer la langue de bois. Ce que je vais dire ne va certainement pas faire plaisir aux motionnaires. J'ai reçu au début de l'année 1998 la fédération qui prône l'instauration d'une maison des associations socio-politiques. Je lui ai dit clairement que ce projet était un projet intéressant mais qu'il lui appartenait prioritairement de le mettre en oeuvre et subsidiairement à l'Etat d'y donner la main.

En d'autres termes, je lui ai dit que je n'entendais pas faire cette maison à sa place. J'ai même été plus clair en disant qu'il appartenait à cette fédération de militer et qu'il m'appartenait de gouverner.

Dans la motion qui vous est proposée... (Brouhaha, rires.)

C'est la maison du rire ici ! Dans cette motion, Mesdames et Messieurs les députés, il y a un mélange considérable d'invites dont certaines peuvent être aisément retenues, d'autres ne le peuvent pas vraiment. Je n'entends pas déposer un crédit d'étude devant votre parlement parce que j'ai fait étudier les bâtiments de «La Suisse» par les services du département et qu'il en coûterait, si nous devions les acquérir, une somme de l'ordre de 6 à 8 millions non compris les travaux nécessaires de transformation. J'estime que ce montant est manifestement excessif et qu'il n'est par conséquent pas raisonnable de vous présenter un tel projet.

Il pourrait en revanche être bien entendu possible, et c'est l'une des invites, d'envisager par exemple une garantie financière sur un projet déposé par la fédération. Dans ce cas, la participation de l'Etat serait limitée à des proportions raisonnables. L'Etat peut parfaitement et doit - je considère aussi que c'est son rôle - soutenir les associations mais ceci avec une certaine proportionnalité dans l'engagement des moyens. Je remercie d'ailleurs M. Hiler, l'un des motionnaires, d'avoir reconnu cette difficulté et d'avoir en quelque sorte un peu pressenti le fait que je ne pourrais pas donner suite intégralement à cette motion. Je répète à la fédération ce que je lui ai dit directement, je le répète aux députés qui soutiennent cette fédération: présentez-nous un projet qui nous permette de vous soutenir ! Mais là, manifestement, nous nous trouvons hors des capacités de l'Etat.

J'ai le souvenir d'avoir participé à des manifestations en 1970 pour un centre autonome. Certains d'entre vous d'ailleurs y étaient, je crois en reconnaître quelques-uns... La revendication que nous avions à l'époque, et qui me paraît toujours philosophiquement et politiquement juste, était que ce centre devait être autonome. Or vous me demandez en l'occurrence de créer un centre d'Etat pour associations. Je préférais la philosophie des années 70 en la matière. (Applaudissements de la droite.)

M. Régis de Battista (S). Je voulais simplement dire qu'en tant que membre du comité de la fédération je ne vais pas participer au vote.

M. Alberto Velasco (S). Je tiens à répondre à M. le conseiller d'Etat : ce ne sera pas un centre d'Etat pour les associations; ce sont les associations qui géreront ce centre. Ceci est bien explicité dans le projet. Il y a septante associations qui auront des contrats de bail, ceci est bien clair.

M. Claude Blanc (PDC). On m'a enfin apporté la liste ! Evidemment, c'est ce que l'on appelle un millefeuille. Il y a une couche de crème, une couche de fromage, une couche de crème, une couche de jambon... (Rires.) Il y a tout ce que l'on veut !

Alors, évidemment, il y a l'Entraide protestante suisse; ça, c'est pour faire bien ! Mais il y a un truc qui s'appelle «L'Aberration»; c'est quoi ça ? (Rires.) Il y a «l'Institut pour une synthèse planétaire», il y a «La radio sans chaîne»... (Rires.) Non, franchement, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais en savoir davantage sur tous ces gens-là avant d'engager les finances de l'Etat.

M. Christian Grobet (AdG). Monsieur le président, je m'en voudrais d'apporter un complément d'information ! Ce que je voudrais simplement dire, c'est que je déplore comment ceux qui sont opposés à une revendication qui est légitime et sérieuse la tournent en dérision. C'est toujours facile évidemment sur une liste d'associations d'en pointer une ou deux, surtout si on ne sait même pas de qui il s'agit.

J'avoue, Monsieur Blanc, que vous avez un excellent sens de l'humour, mais il n'empêche qu'à part ces associations, qui sont peut-être parfaitement honorables même si vous les tournez en dérision, il y a d'autres associations qui, à Genève, cherchent des locaux. Et ça, c'est une réalité : quand j'étais au département des travaux publics, je peux vous dire que la liste des associations était longue... (Rires et remarques.)

Le président. Un peu de silence, Mesdames et Messieurs. Même si l'époque était bénite...

M. Christian Grobet. La liste des associations sérieuses qui cherchaient des locaux était longue et je doute qu'aujourd'hui cette liste ait été totalement purgée parce qu'il y a toute une série d'associations qui effectivement ne trouvent pas de locaux et qui ne peuvent pas payer 350 F le m2, qui est le prix usuel offert actuellement sur le marché. (Protestations.) Absolument ! (L'orateur est interpellé par M. Dupraz.) Monsieur Dupraz, les spéculateurs ne sont pas de ce côté de l'enceinte. Les prix que je viens de donner sont ceux indiqués par le Service cantonal des statistiques comme étant la moyenne actuellement des locaux qui sont offerts. C'est vrai qu'il y a 200 000 m2 de surface de plancher qui sont libres. Vous verrez combien de propriétaires sont d'accord de les louer à des prix raisonnables. La réalité, c'est que le marché est fermé. Les propriétaires ne veulent pas louer des locaux bon marché afin d'éviter de casser les prix. C'est ça la réalité ! Aujourd'hui, vous savez aussi bien que moi que, pour une association, il est très difficile de trouver des locaux et c'est facile évidemment maintenant de tourner ce problème en dérision.

Cette fédération a proposé différentes solutions. Je suis d'autant plus à l'aise pour soutenir cette motion que personnellement je ne suis pas convaincu par la solution des locaux de «La Suisse», pour les mêmes raisons que M. Moutinot. Cette motion ne propose pas uniquement cette solution. Elle propose d'autres alternatives: par exemple celle de mettre d'autres locaux ou des terrains à disposition. Il n'y a même pas besoin d'acheter des terrains pour les mettre en droit de superficie. Je peux vous citer un certain nombre de parcelles qui sont en ville, qui sont propriété de l'Etat et qui pourraient effectivement être mises en droit de superficie au profit de cette fédération, pour une construction nouvelle qui pourrait se faire par étape, en fonction des intéressés.

Je pense qu'il serait effectivement plus sage de construire des locaux en fonction des associations qui sont prêtes à payer un certain loyer plutôt que d'acheter des locaux que l'on n'est pas certain de remplir. Or la motion évoque expressément cette solution. M. Moutinot arrivera peut-être à la conclusion qu'effectivement les locaux de «La Suisse» ne sont pas la meilleure solution. Je pense qu'effectivement ces locaux vont poser des problèmes. On ne sait même pas qui seront les autres propriétaires de l'immeuble, il y a donc des problèmes réels. Par contre, il y a d'autres solutions qui peuvent être mises en place sans faire preuve de beaucoup d'imagination. Je pense qu'aujourd'hui il est important de venir en aide à un certain nombre d'associations qui cherchent des locaux et qui n'en trouvent pas. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous demandons de voter cette motion, parce qu'elle présente un certain nombre de solutions alternatives à celle de «La Suisse». Il faudrait pour le moins les explorer. C'est la moindre des choses que l'on puisse faire.

M. Christian Brunier (S). Lorsque nous sommes en campagne électorale, je crois que tous les partis - de droite comme de gauche - valorisent la responsabilité des citoyens, la participation, la démocratie locale, la concertation. Les associations jouent un rôle moteur dans le domaine. C'est le vivier de la démocratie vivante; se moquer du monde associatif, c'est un peu léger, Monsieur Blanc ! Je vous rappelle que le monde politique est très content de trouver des associations pour lutter contre la toxicomanie, lutter contre le sida, lutter en faveur des droits de l'homme. Il faut être cohérent avec les combats qu'on mène en campagne électorale et soutenir le monde associatif aussi lorsque la campagne est finie. Moi, je donnerais raison à M. Ramseyer : vous avez raison, il faut vraiment se méfier des célibataires !

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

considérant :

- qu'il est important de mettre à disposition un lieu aux associations privilégiant des actions d'intérêt public liées à la défense de la paix, de l'environnement, des Droits de la personne et du développement durable;

- qu'à Genève, plus d'une centaine d'associations ayant des statuts selon les articles 60 et suivants du Code civil sont parties prenantes de ce projet, soit "; La maison des associations socio-politiques ", afin de se regrouper pour créer des synergies et de diminuer leurs frais de fonctionnement;

- que ce projet s'inscrit dans "; l'Esprit de Genève ", de par son contenu associatif et solidaire, contribuant ainsi au rayonnement de notre cité;

- que celles-ci représentent des revendications importantes de notre société;

- qu'il existe une Fédération pour l'expression associative (FEAS) regroupant plus de 60 d'entre elles désirant s'organiser dans un tel espace;

- que les associations jouent un rôle moteur dans la conception d'une démocratie vivante;

- que les locaux du feu journal "; La Suisse " pourraient représenter un des derniers lieux disponibles au centre ville, adéquat pour matérialiser ce projet.

invite le Conseil d'Etat

à aider et soutenir le projet "; La maison des associations socio-politiques " en prenant l'une et/ou l'autre des dispositions suivantes :

- création, pour ces associations, de locaux répondant à leurs besoins dans un seul lieu et pouvant leur permettre d'exercer pleinement, efficacement et à moindre coût, leurs activités reconnues et indispensables;

- allocation d'un crédit d'étude pour expertiser les locaux de l'ancien journal de "; La Suisse " ainsi que pour confirmer la faisabilité du projet de la "; Maison des associations socio-politiques ", en collaboration avec les représentants de la FEAS et ses partenaires;

- étude rapide de la possibilité d'obtention par la FEAS des anciens locaux du Journal "; La Suisse " (parcelles N° 304 et 2413, 2410, 300, 2409 de la feuille cadastrale N° 2 de Plainpalais) en collaboration avec la Ville de Genève et les représentants de la FEAS :

 en accordant une garantie financière permettant l'acquisition des locaux par la FEAS;

 ou en achetant le terrain en vue d'accorder un droit de superficie à la FEAS;

 ou encore en achetant les locaux et le terrain en vue de les louer à la FEAS;

 en participant au capital de départ à titre de subvention unique;

 et/ou en couvrant financièrement d'éventuels déficits de fonctionnement pour une période de 3 ans.

 

PL 7792-A
9. Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit pour les travaux de réfection des façades de l'école supérieure de commerce de Saint-Jean, 3e étape. ( -) PL7792
Mémorial 1997 : Projet, 10115. Renvoi en commission, 10128.
Rapport de M. Luc Gilly (AG), commission des travaux

La commission des travaux a étudié le projet de loi 7792 lors des séances des 20 et 27 janvier 1998, présidées par Dominique Hausser. C'est avec l'aide et la présence de M. Laurent Moutinot, chef du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, de M. F. Reinhard,directeur des bâtiments, de M. R. Chapel, directeur adjoint des bâtiments et de M. J.-M. Tschopp, ingénieur, que nous avons mené à bien nos travaux.

Introduction

Le crédit de Fr. 7.654.963.-- demandé, représente la somme à payer pour réaliser la troisième et dernière étape des travaux de rénovation et d'aménagement portant sur les façades, des salles de gymnastique et de l'administration de l'école supérieure de commerce de Saint-Jean.

Cette école construite au début des années 1960 a déjà été l'objet d'extension, de transformations et de rocades à l'intérieur pour mieux répondre aux besoins de l'enseignement. Le mauvais état général n'a pu cependant être amélioré. C'est pourquoi dès 1993, le DTPE engage une nouvelle étude de remise en état complète des bâtiments vu la détérioration avancée , surtout les vitrages de façades.

1re étape réalisée et terminée début 1995 (façades pour 52 classes, dysfonctionnement des fenêtres et grand danger d'usure, coût : Fr. 4 013 576.--.

2e étape : réfection des façades sud et est de l'administration. Travaux terminés début 96 (coût Fr. 1 789 000.--)

3e étape : le projet de loi qui donc nous concerne devrait être la dernière étape des travaux de rénovation pour les façades des salles de gymnastique et de l'administration. La situation budgétaire ne nous permet plus de financer ces travaux sur ses crédits annuels d'entretien hors grands travaux.

Description des travaux

Réfection à neuf des façades nord et est du bâtiment des classes - façade nord de l'administration - rénovation complète des salles de gymnastique. Construction de deux locaux de dépôts de matériel - réactualisation des vestiaires et sanitaires - création de quelques locaux.

1. Vestiaires et sanitaires réactualisés : deux dépôts de matériel de gym seront construits. La nouvelle structure isolée et étanchée selon les normes en vigueur, remplacera la toiture actuelle qui par son manque d'étanchéité fait perdre beaucoup de chaleur et évidemment l'eau s'y infiltre.

Il y aura pose de coupoles translucides pour un éclairage zénithal, il y aura création de fenêtres sur les façades latérales et côté rue de Saint-Jean. Sols et plafonds et équipements d'exploitation seront remplacés. Le réseau de ventilation et de chauffage sera adapté pour un meilleur confort des vestiaires et des salles de gym.

2. Une salle de biologie, de réunion des maîtres et un local de photocopies seront réalisés dans l'aile est de l'administration.

3. La rénovation des façades nord et est du bâtiment des classes ainsi que l'appartement du concierge seront réalisés après les points 1 et 2 ci-dessus.

Il est également prévu de moderniser les locaux sanitaires, les réseaux d'alimentation et d'écoulement des eaux pluviales et usées. Les prescriptions énergétiques seront respectées pour la modernisation de la distribution de chaleur.

Audition de MM. G. Zurn, directeur de l'ESC de Saint-Jean, Marchel, doyen et E. Bieler, Service technique du DIP.

Il nous fut d'abord rappeler que depuis la construction de cette école (1964) les ennuis de constructions n'ont pas arrêtés. Toutes les fenêtres ont été condamnées en 85 et 86 pour cause de danger, il y a eu infiltration dans les salles de gym, le toit ouvrant de celles-ci fut également condamné !! Il y a donc urgence à passer à la troisième phase des travaux (cités dans ma précédente description.

M. Zurn demande que les travaux puissent commencer le plus vite possible, ceux-ci seront coordonnés avec la direction de l'école pour que les élèves puissent travailler normalement durant les rénovations. Les vacances d'été offriront aussi le temps nécessaire pour entreprendre les travaux les plus gênants.

Certains commissaires ont demandé si démolir/reconstruire serait envisageable et moins onéreux. M. Reinhard répond que les structures de l'école sont bonnes et que du neuf reviendrait à environ 50 millions. Il s'agit globalement de 13 millions pour la rénovation. Il est difficile de comparer ce type d'école à d'autres, affirme M. Macherel et ajoute que cette troisième étape sera la dernière...?

A savoir, si tout le programme de rénovation doit être fait (en regard des finances de l'Etat), M. Zurn rappelle la grande vétusté des salles de gym et des sanitaires, donc que tout doit être refait en regard des questions de salubrité. Les mandataires devront également utiliser des matériaux écologiques et réactualisés (M. Tschopp).

Discussion de la commission

L'essentiel du débat des commissaires s'est porté sur le nombre d'interventions déjà coûteuses pour cette école, somme toute pas si ancienne que ça ! La mal-prévision/construction et la non-maîtrise pour ce type de bâtiment des années 60 est hélas un fait courant. Il n'est pas possible de se retourner contre le constructeur, il y a prescription depuis longtemps... Pourquoi l'Etat n'est-il pas intervenu tout de suite? Mystère, mystère... M. Moutinot a tracé les grandes lignes qu'il entend mettre en place sur la politique en matière d'entretien des bâtiments et du patrimoine de l'Etat. Mais ce débat n'a pas lieu d'être dans ce rapport. M. Moutinot fera bientôt part des propositions qu'il prépare de concert avec MM. Reinhard et Chapel, spécialistes en la matière. Malgré des moyens financiers à la baisse, des solutions seront trouvées pour que Genève tente de rattraper le grand retard qu'elle a en matière d'entretien de ses immeubles publics et privés.

En première lecture le mode de calcul, d'honoraires et les comptes d'amortissement ont posé quelques problèmes à la commission. Le Département nous a alors fourni plus de détails, annexés à mon rapport.

Un seul amendement a été apporté et accepté par 12 oui et 1 abstention (DC). Tout le monde a compris que le titre du projet de loi était par trop réducteur et trompeur. ainsi que l'article 1. Voici donc la nouvelle teneur de l'article 1 : "; Un crédit de 7 654 963 F (y compris renchérissement et TVA), est ouvert au Conseil d'Etat pour les travaux de réfection des façades, 3e et dernière étape, rénovation complète des salles de gymnastique, construction de deux locaux de dépôts de matériel et réactualisation des vestiaires et sanitaires, création de quelques locaux (biologie, réunion et photocopie), de l'école supérieure de commerce de Saint-Jean, rue de Saint-Jean 62. "

Conclusion

C'est par 11 oui (2 L, 1 R, 2 DC, 3 S, 3 AdG) et 2 abstentions (L, Ve) que ce projet de loi amendé est accepté. Vu l'état du bâtiment et l'urgence des travaux à mettre en route (nécessité et timing pour ses utilisateurs), la commission dans sa majorité a compris le bien-fondé de ce projet de loi et vous demande, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter ce crédit indispensable pour terminer ces travaux de rénovation dans les plus brefs délais. Un vote positif du parlement soulagera un grand nombre d'élèves appelés a passer leurs études dans cette école dans des conditions bien meilleures, d'autant plus que le maximum de mesures sera entrepris pour ne pas perturber les cours durant ces nouveaux aménagements.

annexe

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Premier débat

Le président. Avez-vous quelque chose à ajouter à votre rapport, Monsieur le député ?

M. Luc Gilly (AdG), rapporteur. Est-ce que je peux m'asseoir, Monsieur Koechlin ? (Rires.)

Le président. Mais bien sûr, Monsieur ! Jamais nul dans cette salle ne vous en a contesté le droit. Moi le dernier !

M. Luc Gilly, rapporteur. Merci ! Je vais être assez bref en ce qui concerne ce projet. Il est juste dommage qu'il ait fallu attendre autant d'années pour entreprendre toute une série de travaux à l'école de commerce de Saint-Jean. Vous avez peut-être pu lire dans mon rapport que cette école construite en 1964 a, dès les premières années, connu déjà passablement de problèmes. Des défauts ont été remarqués et non des moindres. Il y a eu de nombreuses infiltrations d'eau un petit peu à tous les niveaux. Des fenêtres très dangereuses ont été scellées par la suite pour la sécurité des élèves. Les salles de gym ont été en partie détruites par des infiltrations successives au cours d'intempéries.

Mais le but n'est pas de faire l'historique maintenant de cette école de commerce; le but de ce projet de loi est de proposer un dernier crédit de rénovation, une dernière étape pour la réfection de l'école supérieure de commerce. On nous a parlé des façades et c'était un des problèmes en tout cas en commission. Il est vrai qu'il y a effectivement pas mal de façades à refaire. Par ailleurs, en étudiant le projet de loi, on a vu que les salles de gymnastique ainsi que les sanitaires allaient être refaits. Toute une série de mesures complémentaires ont été envisagées dans ce projet. Au sein de la commission, tout le monde était d'accord pour aller de l'avant. Il y a eu une ou deux abstentions, je crois, si je relis bien mon rapport.

J'aimerais signaler que nous avons proposé un amendement par rapport au titre, que vous retrouverez dans ce projet de loi, dans mon rapport. Nous avons précisé le titre et l'article premier; je vous lis le changement: «Un crédit de 7 654 963 F (y compris renchérissement TVA) est ouvert au Conseil d'Etat pour les travaux de réfection des façades, 3e et dernière étape, rénovation complète des salles de gymnastique, construction de deux locaux de dépôts de matériel et réactualisation des vestiaires et sanitaires, création de quelques locaux (biologie, réunion et photocopie), de l'école supérieure de commerce de Saint-Jean, rue de Saint-Jean 62.»

Vous constatez que, par rapport au titre initial qui parlait uniquement de réfection des façades de l'école supérieure de commerce de Saint-Jean, la différence est assez grande. Aussi, j'aimerais que cet amendement soit accepté.

Le président. Est-ce un amendement que vous proposez pour le titre, Monsieur le rapporteur ?

M. Luc Gilly, rapporteur. Oui, pour le titre et qui devient aussi article premier.

Le président. Voulez-vous que l'article premier en entier figure dans le titre ? C'est peu usuel, Monsieur le rapporteur.

M. Luc Gilly, rapporteur. Je crois qu'il faut préciser les changements au niveau du titre comme de l'article premier puisqu'il est trompeur et quelque peu mensonger. Il n'est question que des façades alors que d'autres objets vont être mis en travaux.

Le président. Monsieur le rapporteur, tout ce que vous avez lu, c'est l'article premier ?

M. Luc Gilly, rapporteur. Oui !

Le président. Il paraît superflu de répéter un article dans le titre. Le titre est général. Il me semble que le titre convient. Mais enfin, si vous le voulez, je mets aux voix votre amendement. Mais il me paraît inadéquat.

M. Luc Gilly, rapporteur. Non, c'est corrigé. Gardons le titre tel quel et...

Le président. Ça me paraît plus raisonnable !

M. Luc Gilly, rapporteur. ...précisons l'article premier tel que je l'ai lu tout à l'heure. Je vous remercie, Monsieur le président. Cela dit, j'aimerais assurer ici le parlement qu'il faut voter ce projet de loi le plus vite possible. Nous avons les assurances... (Brouhaha.)

Le président. Vous avez terminé ? Bien. Mesdames et Messieurs, nous procédons au vote...

M. Luc Gilly, rapporteur. Je peux terminer, Monsieur Koechlin ? Nous avons les assurances de la part de la direction des écoles que les travaux pourront se faire sans trop déranger élèves et enseignants.

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Loi(7792)

ouvrant un crédit pour la 3e et dernière étape des travaux de réfection de l'école supérieure de commerce de Saint-Jean

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit:

Art. 1 Crédit

Un crédit de 7 654 963 F (y compris renchérissement et TVA), est ouvert au Conseil d'Etat pour les travaux de réfection des façades, 3e et dernière étape, rénovation complète des salles de gymnastique, construction de deux locaux de dépôts de matériel et réactualisation des vestiaires et sanitaires, création de quelques locaux (biologie, réunion et photocopie), de l'école supérieure de commerce de Saint-Jean, rue de Saint-Jean 62.

Il se décompose de la manière suivante:

Travaux 6 148 350 FHonoraires, essais, analyse 892 650 FTVA 457 665 FAttribution au fonds de décoration 61 483 FRenchérissement 95 035 F

Total 7 654 963 F

Art. 2 Budget d'investissement

Ce crédit est inscrit au budget d'investissement sous la rubrique 34.13.00.503.07.

Art. 3 Financement

Le financement de ce crédit est assuré par le recours à l'emprunt, dans les limites du cadre directeur du plan financier quadriennal adopté le 2 septembre 1992 par le Conseil d'Etat fixant à environ 250 millions de francs le maximum des investissements annuels, dont les charges en intérêts et amortissements sont à couvrir par l'impôt.

Art. 4 Amortissement

L'investissement est amorti chaque année d'un montant calculé sur sa valeur résiduelle et qui est porté au compte de fonctionnement.

Art. 5 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.

PL 7817
10. Projet de loi de MM. Rémy Pagani et Christian Ferrazino invitant les partenaires sociaux à conclure des conventions collectives dans tous les secteurs économiques du canton de Genève et le cas échéant imposant des contrats-type de travail. ( )PL7817

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

décrète ce qui suit :

Article 1

La loi instituant un service des relations du travail (J 1 05), du 6 octobre 1943, est modifiée comme suit :

Art. 8A (nouveau)

1 Le Conseil d'Etat mandate l'Office Cantonal de l'Inspection et des Relations du Travail (ci-après OCIRT) pour que ce dernier convoque :

- les associations représentatives des travailleurs et des employeurs des branches, des secteurs et, le cas échéant, des métiers concernés,

- à défaut leurs associations faîtières,

qui ne sont pas régies par des conventions collectives de travail (ci-après CCT).

2 L'OCIRT mandaté par le Conseil d'Etat invite les associations de branches, de secteur et de profession (employeurs et travailleurs) à conclure des conventions collectives dans un délai de 12 mois. L'OCIRT peut aider à la négociation et à la conclusion de conventions collectives si l'un des partenaires le souhaite.

Art. 8B (nouveau)

L'OCIRT informe régulièrement le Conseil d'Etat et le Grand Conseil de l'avancement de ses travaux.

Art. 8C (nouveau)

1 Le Conseil d'Etat édicte des contrats-type de travail dans toutes les branches, dans tous les secteurs et, le cas échéant, dans tous les métiers importants qui resteraient sans convention collective au-delà de la période de 12 mois.

2 Le contrat-type de branche de secteur ou de profession s'applique également aux entreprises qui emploient de la main-d'oeuvre temporaire.

Art. 8D (nouveau)

Avant d'être édictés, les contrats-type de travail sont publiés d'une manière suffisante, avec indication d'un délai de 3 mois pendant lequel quiconque justifie d'un intérêt peut présenter des observations par écrit; en outre, l'autorité prend l'avis des associations professionnelles et des sociétés d'utilité publique intéressées conformément au droit fédéral.

Art. 8E (nouveau)

1 Les contrats-type doivent respecter, au minimum, les conditions usuelles en matière de salaires et de conditions de travail, en vigueur dans la branche, le secteur ou la profession concerné.

2 Les contrats-type établis par le Conseil d'Etat stipulent que les accords en défaveur du travailleur dérogeant à la durée du travail, au travail supplémentaire, aux salaires minimaux, à la durée des vacances, aux absences justifiées, aux délais de congé doivent être conclus par écrit en mentionnant dans leur totalité la clause du contrat-type à laquelle il est dérogé.

Art. 8F (nouveau)

Tous les 3 ans le Conseil d'Etat réunit l'ensemble des partenaires sociaux du canton en vue d'évaluer les effets des présents articles et, le cas échéant, de les modifier.

Art. 8G (nouveau)

Les travailleurs ou les employeurs y compris leurs sous-traitants qui viendraient à déroger à une quelconque clause du contrat-type ou des CCT les régissant ne pourront bénéficier des commandes de l'Etat. (J 1 54.04).

Art. 8H (nouveau)

Il est confié à l'Office Cantonal de la Statistique (OCSTAT) un mandat permanent pour recenser les salariés conventionnés, leurs conditions salariales et de travail.

Par ailleurs le Conseil d'Etat mandate l'OCSTAT pour recenser les salaires et les conditions de travail usuels dans le canton en se fondant, entre autres, sur le recensement fédéral des entreprises.

Ces études permettant au Conseil d'Etat d'établir les conditions usuelles des contrats-type.

Art. 2

La présente loi est applicable dès sa promulgation.

Exposé des motifs

Le texte de loi qui vous est proposé, veut harmoniser les conditions-cadre qui touchent à l'ensemble du personnel salarié du canton concernant notamment : la limitation des heures supplémentaires et plus généralement la durée du travail, la durée des vacances, les absences justifiées, le régime d'assurance, les délais de congé et enfin les salaires minimaux. Il se veut interprofessionnel dans la mesure où il permet, le cas échéant, aux partenaires sociaux comme au Conseil d'Etat de réguler les conditions salariales et sociales de l'ensemble des salariés d'une branche, d'un secteur ou d'une même entreprise. Ce projet de loi n'est, de loin, pas révolutionnaire, il a pour objectif de tenter de juguler une inclination du marché du travail : la baisse des salaires par la non-indexation et la sous-enchère salariale à l'embauche. En matière de régulation du marché du travail, il n'est pas précurseur puisque depuis un certain nombre d'années notre canton, comme l'ensemble des cantons suisses, s'est donné des instruments de contrôle et donc de régulation basés, entre autre et principalement, sur l'origine de la main-d'oeuvre. Les conditions de cette politique ont été largement dénoncées pour leur caractère discriminatoire.

Ce projet de loi s'inscrit dans une réalité sociale et économique qui devient chaque jour plus préoccupante pour les travailleurs. En effet, depuis plusieurs années, un certain nombre de secteurs économiques (taxis, carrosserie, nettoyage, etc.) sont soumis à des distorsions de concurrence ayant pour corollaire, entre autres, l'aggravation des conditions salariales et sociales. De plus, le cadre conventionnel qui régit les rapports entre travailleurs et employeurs est en constante régression.

Ainsi, sous l'effet de ces distorsions, pressions locales, régionales, nationales et internationales, une partie significative de l'économie du canton est entrée, depuis le début des années 1990, dans une pratique généralisée de sous-enchère salariale. Ce projet de loi veut mettre un terme à ce processus dévastateur.

Petit rappel historique

Alors que, dans certains secteurs, les rapports conventionnels ont été introduits dans un cycle de croissance où la main-d'oeuvre était rare, ces contrats ont permis de réguler le marché du travail et notamment de contenir l'explosion du coût du travail en faveur des employeurs. A contrario lorsqu'il s'agit aujourd'hui de contenir la baisse des salaires et des prestations sociales, certains employeurs refusent de jouer le jeu et quittent le cadre conventionnel. En effet et par exemple, l'an passé une majorité des employeurs du nettoyage a abandonné l'association patronale les rattachant à la convention collective de leur branche en vue de se soustraire aux obligations découlant du texte qu'ils avaient eux-mêmes signé. Dernièrement, on a appris qu'ils avaient formé une nouvelle association professionnelle et signé une nouvelle convention collective en dessous des normes précédentes pour le personnel à temps partiel majoritaire dans cette branche.

Quelques rappels généraux

-  A la mi-novembre 1997, 120 conventions collectives régissaient les rapports de travail entre employeurs et travailleurs de ce canton. Quatre-vingt-deux d'entre elles, organisaient des secteurs d'activités et trente-huit des entreprises. De 1992 à 1997, 5 CCT ont été dénoncées, sans parler des employeurs du nettoyage qui ont déserté leur association professionnelle pour rendre impossible l'application de leur CCT. En réaction à ce désengagement, les syndicats représentants des employés de la carrosserie et de la floriculture ont exigé du Conseil d'Etat qu'il édicte un contrat-type de travail. Ce qui a été fait dans le courant 1996 et 1997. Plus tard, pour la carrosserie, un recours a été déposé au Tribunal fédéral par des employeurs mécontents de la norme édictée par les autorités. Par contre 5 CCT ont vu le jour (cliniques privées, petite enfance, préparateurs en pharmacie, Fondation de l'école internationale, et Pain d'Or).

- Depuis de nombreuses années les conditions de travail de certains secteurs économiques précaires sont régies par des contrats-type de travail. Les articles 359, 359a , 360 du Code des Obligations régissant ses contrats-type imposent aux cantons de les édicter obligatoirement pour les travailleurs agricoles et le service de maison, et laissent la compétence à l'Etat cantonal d'en promulguer pour les autres secteurs. Conformément au droit fédéral, le gouvernement genevois a imposé un contrat-type dans l'économie domestique à temps partiel et à temps plein ainsi que pour le secteur agricole, les jeunes au pair et les jeunes aides de ménage.

- Depuis le début des années 1990, on assiste à une dégradation des conditions de travail : les heures supplémentaires et la flexibilité du travail augmentent et les salaires diminuent par le phénomène de la non-indexation couplé à la sous-enchère à l'engagement. C'est une réalité économique incontournable et pourtant ces dernières affirmations peuvent être sujettes à caution. En effet, en ce domaine et du point de vue statistique, notre canton est extrêmement pauvre. Pour tous les professionnels du marché du travail il paraît toutefois sensé d'affirmer que, dans certains secteurs, la non-indexation des salaires a réduit le pouvoir d'achat des salariés de plus de 15 % et, si l'on y ajoute les diminutions de salaire imposées lors d'une restructuration, d'une fusion, ou d'un rachat d'entreprise, c'est d'une baisse se situant aux alentours de 25 % du pouvoir d'achat dont il est question.

- Rappelons encore deux injustices flagrantes qui touchent principalement les femmes. A savoir, d'abord, les différences scandaleuses de rémunération avec leurs collègues hommes en relation avec la responsabilité et la formation. Et enfin les contrôles exercés sur l'immigration notamment sur son niveau de rémunération par l'octroi de permis de travail, contrôles qui sont inexistants pour l'ensemble des salariés locaux non soumis à une convention collective.

- Et, pour terminer, n'oublions pas le lent mais inexorable processus dans lequel s'inscrit une personne qui perd son travail stable et qui trouve des emplois précaires, temporaires, intermittents (ou de courte durée). Son salaire baissant régulièrement au gré de ses périodes d'allocations chômage, réduit de 20 ou 30% par rapport à son dernier emploi.

Le mythe des conventions collectives

Loin de nous l'idée de croire qu'une convention collective ou un contrat-type serait un véritable rempart contre les baisses de salaire. Encore moins qu'une CCT ou un contrat-type corresponde, du point de vue de la rémunération du travail, à la pratique réelle dans les entreprises. De trop rares études ont déjà mis à mal ce mythe répandu dans le monde syndical qui consiste à croire en l'efficacité des grilles salariales négociées paritairement. Seule l'introduction d'un salaire minimum d'environ Fr. 4'000.- pourrait permettre de contenir cette baisse dans les secteurs les plus précaires. Ce projet de loi veut faire un pas dans cette direction tout en permettant, à terme, d'une part d'avoir une idée plus juste de cette réalité du monde du travail et, d'autre part, de faciliter l'établissement de cette norme.

Sur le fond notre idée est de garantir les mêmes conditions de travail sur l'ensemble du territoire de notre région, secteur par secteur, voire pour certaines professions, profession par profession, comme par exemple, les secrétaires et ainsi freiner et même stopper toute forme de concurrence entre employeurs fondée sur le marché du travail. Dans les rapports sociaux actuels, pour des niveaux de pénibilité et de formation équivalents, les conditions de travail de l'ensemble des salariés sont régies par la seule loi de l'offre et de la demande. Dans cette logique capitaliste, seules comptent la pléthore ou la rareté de la main-d'oeuvre. Il est pris secondairement en considération les qualifications, le degré de responsabilité, les compétences, par exemple. Il s'agit aujourd'hui de mettre en place de nouveaux instruments qui soient adaptés aux conditions économiques actuelles en respectant notamment la primauté de la personne sur l'économie.

Un défi : réguler d'une autre manière le marché du travail

Depuis un certain nombre d'années, le canton de Genève comme l'ensemble des cantons suisses, s'est donné des instruments de régulation basés, entre autre et principalement, sur l'origine de la main-d'oeuvre. Cette politique a été largement dénoncée notamment pour son caractère discriminatoire. Elle a induit une conception raciste dans les relations de travail. La formule aseptisée des trois cercles a validé définitivement ce concept. Dernièrement la remise en question de cette notion n'a pas changé le fondement de cette politique. Les mesures proposées par la présente loi sont à l'opposé de ces pratiques et pourtant elles se fondent sur un des aspects les moins controversé de l'application de l'ordonnance fédérale : le respect des usages professionnels.

Enfin le Conseil d'Etat ou le parlement devra donner de réels moyens à l'administration pour mettre en place cette nouvelle politique. Le texte de loi adopté, de nouveaux engagements devront être envisagés, il n'interdit toutefois pas d'imaginer des rocades.

Commentaires article par article

L'article 8A :

- alinéa. 1 invite tous les partenaires sociaux, les associations de travailleurs voire leurs associations faîtières, professionnelles ou interprofessionnelles de secteurs ou de professions inorganisés, à ce rencontrer pour établir des conventions collectives là où il n'y en a pas. C'est l'objectif principal de ce projet de loi. Par cet article les représentants des secteurs ou des branches économiques, des entreprises ou des professions sont priés de se rencontrer et d'établir un cadre légal qui règle leurs rapports de travail, soit avec le concours des autorités, soit entre eux, soit même devant l'office de conciliation éventuellement mandatée comme tribunal arbitral.

- alinéa 2 fixe un délai de 12 mois pour conclure les pourparlers. Pourquoi un délai aussi long ? Il nous paraît convenable de laisser la possibilité aux deux parties de réunir plusieurs fois les assemblées générales de leurs mandants, voire d'appeler et de construire un regroupement professionnel ou sectoriel.

L'article 8B établit qu'il sera fait rapport par l'OCIRT au gouvernement et au parlement de l'état d'avancement de l'application du présent texte. Ainsi le Conseil d'Etat pourra prévoir, en cours de procédure, des études particulières concernant certains secteurs difficiles en vue d'établir, le cas échéant, un contrat-type.

L'article 8C :

- impose au Conseil d'Etat de promulguer des contrats-type là où des CCT feraient défaut après 12 mois. Cette disposition ne devrait être employée que dans la mesure ou les parties n'ont pas pu se mettre d'accord ou refusent de se réunir et d'établir un texte qui paraisse raisonnable au vu des conditions de travail couramment usitées dans leurs domaines respectifs.

L'alinéa 2 assujetti l'ensemble des entreprises temporaires aux conventions collectives et, le cas échéant, aux contrats-type édictés par le Conseil d'Etat mettant ainsi fin à une situation de non-droit qui n'a que trop duré à Genève.

L'article 8D fait référence à la procédure légale et donne un délai raisonnable aux parties pour faire valoir leur point de vue. La loi fédérale ne donne pas de délai précis elle se contente de la notion de "; délai ". Pourtant, il nous apparaît qu'une période de 3 mois serait largement suffisante pour conclure un travail d'élaboration codifié par des services administratifs. Elaboration qui devrait avoir débuté, rappelons-le, depuis le jour ou les parties ont été convoquées et qu'elles ont, soit fait valoir leur mésentente ou que l'autorité les soupçonne de ne pas vouloir élaborer une CCT sous le régime de la bonne foi. Ainsi, ces secteurs ou professions seront très rapidement identifiés au début de la procédure d'invite ou même dans le courant de celle-ci.

L'article 8E alinéa 1 impose un plancher au législateur en l'occurrence le Conseil d'Etat. En effet, il deviendrait contre-produisant d'édicter des normes qui soient en-deçà des pratiques usuelles sous prétexte de les aligner sur le plus petit dénominateur commun.

L'article 8E alinéa 1 tente d'éviter qu'un certain nombre d'employeurs déroge à la norme édictée par le Conseil d'Etat au moyen d'un contrat individuel de travail. Ainsi, il impose à l'employeur qui voudrait se soustraire au texte du contrat-type, s'il le fait, de soumettre par écrit à son employé les droits qu'il entend lui accorder en supplément ou lui soustraire. Le salarié étant alors libre de refuser ou contraint d'accepter des clauses qui dérogeraient en sa défaveur au contrat-type. Il resterait à ce dernier, à la fin de ses rapports de travail ou dans le courant de ceux-ci, à faire valoir ses droits devant le Tribunal des Prud'hommes, la justice ayant alors tout loisir d'établir la contrainte.

L'article 8F garantit que l'ensemble de ces dispositions pourront être modifiées et qu'elles présentent une véritable et perfectible tentative de régulation du marché du travail.

L'article 8G permet à l'Etat d'empêcher des appels d'offres en faveur d'employeurs qui ne joueraient pas le jeu. Cette manière de faire est déjà courante dans le secteur du bâtiment et dans d'autres secteurs. De plus, nous aurions pu faire référence à une politique similaire en ce qui concerne les permis de travail mais s'est à dessein que nous l'avons écartée. En effet, la nouvelle norme sociale que nous proposons ici diffère radicalement des usages légaux qui ont court actuellement dans certains secteurs. Les pratiques de l'office cantonal de la population, et notamment celles de la tri-partite, n'étant que l'instrument fédéral de cette politique. Ce nouveau texte de loi se veut à l'opposé de l'exercice actuel de la loi qui est, quoi qu'on en dise, discriminatoire, voire xénophobe, envers des populations entières. Pourtant notre idée est de sauvegarder comme références régulatrices les "; usages professionnels " tels que définit dans l'article 9 OLE.

En effet, l'ordonnance fédérale sur la limitation des étrangers, en son article 9, tentent d'éviter une distorsion de concurrence en imposant aux autorités cantonales de faire respecter les usages professionnels dans l'octroie des permis de travail. En cas d'adhésion de la Suisse à l'Europe, cet article de l'ordonnance serait abrogé ou modifié et le grave problème du personnel détaché referait son apparition. Ainsi, la concurrence sur les salaires par le bas s'accentuerait sans aucun doute. Au contraire, le projet de loi présenté ici et, dans la mesure ou il sera adopté et mis en place avant cette échéance, se substituera à cette politique discriminatoire en offrant un cadre légal conforme à la libre circulation des personnes et surtout conforme aux droits de l'homme.

L'article 8H invite le Conseil d'Etat à mandater l'OCSTAT pour que soient établies de véritables statistiques touchant les rapports conventionnels. L'objectif de cette étude étant de soustraire les conditions salariales et sociales réellement pratiquées dans les entreprises conventionnées de l'enquête fédérale des entreprises et d'avoir ainsi une vision plus juste de ce que sont les conditions de travail de l'ensemble des salariés du canton et notamment des salaires pratiqués sous l'emprise d'un régime de CCT. De plus, cette statistique permettra de fonder objectivement la notion d'usages professionnels comme pivot de la présente loi.

En résumé, les propositions d'articles de loi qui vous sont soumises ont pour but, d'une part, d'harmoniser les conditions-cadre qui touchent à l'ensemble du personnel salarié et, d'autre part, de réguler le marché du travail. Au vue des échéances européennes à venir que la Suisse devra affronter tôt ou tard, cette nouvelle politique nous paraît être la solution la plus respectueuse des intérêts de l'ensemble des travailleuses et des travailleurs ainsi qu'un moyen efficace de régulation du marché du travail et de la concurrence qui y fait rage. Ainsi, sera donné un coup d'arrêt salutaire à la baisse inexorable des salaires qui s'est enclenchée au début des années 1990.

Au bénéfice des explications qui précèdent, nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver bon accueil au présent projet de loi.

Préconsultation

Le président. Nous sommes en débat de préconsultation. Je vous rappelle la règle : un intervenant par groupe; temps de parole cinq minutes. Monsieur Pagani, vous avez la parole.

M. Rémy Pagani (AdG). Lorsque nous avons commencé à rédiger ce projet de loi, nous n'avions pas encore connaissance de la fusion de la SBS avec l'UBS. Pas encore connaissance de la très grave crise économique que subissent certains pays d'Asie du Sud-Est. Il est clair aujourd'hui que, pour notre pays, la fin de ce siècle restera fortement marquée par ces deux événements. En effet, ils précipiteront les uns dans un peu plus de misère et les autres, une minorité, dans un océan infini de billets de banque. Quelques chiffres simples résument l'inefficience du système capitaliste dans lequel nous vivons. Au début des années 90, sur 100 F qui circulaient autour de la planète, seuls cinq étaient investis dans l'économie réelle. Fin 1997 plus que, si j'ose dire, 3 F. Et ce processus destructeur de l'économie mondiale va continuer jusqu'au jour où cette proportion ne représentera plus que quelques centimes.

Dans ces conditions notre devoir est tout d'abord de dénoncer cette logique qui consiste à penser que la mondialisation et la concurrence sont l'alpha et l'omega du seul véritable objectif que s'est fixé l'humanité dans son évolution, satisfaire ses besoins et améliorer collectivement et solidairement les conditions globales de la vie. Ensuite, il nous faut démontrer qu'il est possible d'envisager d'autres systèmes fondés, entre autres valeurs, sur la solidarité, le respect du travail de l'autre, la régulation des échanges. C'est dans ce cadre que nous voulons inscrire notre proposition. En quelques mots et avant que les uns et les autres tirent à boulets rouges sur ce projet de loi, nous voudrions qu'au moins chacun comprenne correctement la mécanique qui sous-tend cette nouvelle manière de concevoir les rapports de travail.

En définitive, c'est extrêmement simple. Nous envisageons de faire établir une statistique par l'Office cantonal concernant les conditions salariales et sociales pratiquées dans les entreprises de ce canton. Nous en avons les moyens. Le recensement fédéral des entreprises existe depuis des années. Il est établi tous les cinq ans. Il s'agirait aussi de répertorier ces données pour toutes les entreprises soumises actuellement au régime des conventions collectives. Partant de là, nous pourrions mettre en oeuvre des outils performants pour réguler le marché du travail sur la base d'un salaire moyen ou médian du secteur, de la branche ou de la profession concernée et donc tenter de mettre un frein à la concurrence acharnée que se livrent les acteurs du marché sur le dos de leurs futurs employés. (Exclamations.)

Avant qu'une telle mesure ne soit prise, les employeurs et les travailleurs pourraient toutefois se mettre d'accord pour conclure une convention collective dans les secteurs, les branches ou les professions dépourvus de tels contrats. Pour ce faire, il leur serait garanti un délai d'une année au-delà duquel l'Etat interviendrait pour sanctionner la minorité d'employeurs ou de travailleurs qui n'aurait par conclu de tels contrats. Mettons tout de suite les choses au point pour éviter de faux débats.

Premièrement. Il ne s'agit pas ici de faire la part belle aux syndicats en leur offrant des conditions-cadres qui leur permettraient pour ainsi dire de se reposer sur leurs lauriers, bien au contraire ! (Exclamations.) Je ne vous le fais pas dire ! Puisque chaque employeur et chaque travailleur et travailleuse aura toujours la possibilité de s'associer à une convention collective ou de surseoir à ce contrat-type par un contrat individuel. On pourrait résumer le projet proposé par une tentative de rééquilibrer la balance en considérant qu'aujourd'hui, dans cette crise économique où le travail est rare, au moment de la signature d'un contrat de travail, le salarié est en position d'infériorité. Le but étant de garantir à l'ensemble des travailleurs et travailleuses de notre région une certaine équité lors de la signature d'un contrat de travail.

Deuxièmement. J'entends déjà certains membres de notre Alternative mettre à mal ce projet de loi en imaginant que ces contrats-type pourraient détériorer les conditions de travail des employés sous convention collective, voire ravaleraient l'ensemble des rapports de travail aux normes les plus basses. Ces critiques sont non fondées dans la mesure où d'une part, pour les secteurs où ces contrats-type existent, l'économie domestique par exemple, le fait de recenser les salaires réels pratiqués dans la branche ne peut que tirer vers le haut les salaires minimums scandaleusement bas des contrats-type imposés par le Conseil d'Etat ou par l'Office de conciliation. Ces contrats-type sont établis sur la base de critères aléatoires si ce n'est politiques. Et si, par pure hypothèse, ces critiques étaient fondées, il nous suffira en commission d'envisager des amendements garde-fous.

Quant aux salaires minimums établis par les conventions collectives, ils ne peuvent être touchés, n'étant pas remis en cause par ce projet de loi.

Le président. Veuillez conclure, Monsieur le député !

M. Rémy Pagani. Je conclurai provisoirement sur ce sujet en disant qu'il nous faut mettre en perspective ce projet avec les accords bilatéraux que la Suisse conclut en ce moment au niveau européen. (Brouhaha.) Le principe de la libre circulation des personnes auquel notre groupe adhère impliquera de toute manière une refonte de nos conceptions contractuelles. Le Conseil fédéral et l'OFIAMT ont déjà rédigé des propositions précises que le canton va recevoir en consultation prochainement. Si le dossier des transports se débloque...

Le président. Vous avez dépassé votre temps de parole, Monsieur le député !

M. Rémy Pagani. Oui, mais ils m'ont interrompu !

Le président. Non, non, ils ne vous ont pas interrompu ! Je vous prie de conclure sinon je serai obligé de vous interrompre. Vous disposez de cinq minutes en débat de préconsultation.

M. Rémy Pagani. Ces propositions, c'est l'extension des conventions collectives, la généralisation des contrats-type et la mise sous toit d'une loi pour protéger les travailleurs détachés. Nous vous livrons ce texte en espérant que nous pourrons, sur cet objet, poursuivre notre débat sereinement et surtout oeuvrer pour le bien commun et notamment celui de l'écrasante majorité du peuple de Genève, les salariés, les sans-emploi. Merci.

M. Daniel Ducommun (R). Si le projet de loi qui nous est présenté ce soir ne passe par la rampe de ce Grand Conseil, il pourrait sans autre être exploité avec succès par le cinéma. (Rires.) L'exposé des motifs nous rappelant tellement le scénario des «Visiteurs», actuellement sur nos écrans, Christian Ferrazino, le comte Godefroy de Montmirail dit «Le Hardi», et Rémy Pagani dit «Jacquouille». (Rires.)

Vous nous présentez, Messieurs, un projet nous transportant sans nuances de l'époque médiévale au 3e millénaire. De plus, le dernier exemple angoissant d'une économie planifiée étatique est celui du communisme que le Mur de Berlin, par sa destruction, a pu enfin libérer.

Quelle idée saugrenue que de vouloir à nouveau donner les moyens à l'Etat de contrôler l'ensemble de l'économie genevoise en imposant à toutes les entreprises des conditions de travail ne tenant nullement compte de la réalité économique de chacun des secteurs d'activité. Dans votre projet, vous ignorez par dogmatisme les principes du partenariat social suisse et genevois qui a assuré, en dehors de toute contrainte légale, un progrès social et des conditions de travail exemplaires. Si la globalisation des marchés entraîne un taux de chômage inacceptable, il n'en reste pas moins que notre paix sociale, liée à la qualité des rapports entre représentants du monde patronal et ouvrier, est une référence citée comme exemple dans le monde entier.

Alors, Messieurs, pourquoi vouloir aller à contre-courant de notre Histoire, redonner à l'Etat des pouvoirs tutélaires mettant ainsi fin à la pratique constante du dialogue et du partenariat que nous connaissons en la vidant de toute substance et marge de manoeuvre ?

Au-delà de ces considérations de principe, nous relevons que, pour ce qui est de l'obligation de conclure des contrats-type de travail, les CCT, vous violez le droit constitutionnel fédéral aussi bien en ce qui concerne la liberté de commerce et d'industrie que l'article 19 du CO garantissant la liberté contractuelle. En définitive, le groupe radical s'oppose à cette mesure dogmatique hors des réalités du monde du travail. Nous respectons toutefois le principe qui veut que chaque projet de loi soit discuté sereinement en commission. Nous souhaitons vivement qu'en commission de l'économie «les Visiteurs», Godefroy de Montmirail et Jacquouille, quittent leur habit d'époque pour redevenir des citoyens raisonnables de l'an 2000.

M. Jean-Claude Vaudroz (PDC). Après l'avis du cinéma, j'en donnerai peut-être le titre : j'avais pensé effectivement que ce projet de loi ressemblait à une vision de notre économie qui évoquait les «Temps modernes» de Chaplin. Evidemment, je ne partage pas du tout les objectifs de ce projet de loi et il me semble même que ce projet de loi va complètement à contresens de notre situation actuelle. Je pense que l'unique intérêt que l'on pourrait effectivement y trouver, pour certains d'ailleurs, serait la promotion de ces conventions collectives. M. Ducommun l'a rappelé; en fait le droit fédéral au niveau constitutionnel garantit finalement deux libertés que ce projet de loi viole manifestement : il s'agit de la liberté du commerce et de l'industrie et bien entendu la liberté contractuelle.

D'autre part - et ma deuxième remarque a trait à l'évolution finalement socio-économique que vivent nos entreprises - il me semble, Monsieur Pagani, que lorsque vous parlez des entreprises vous parlez évidemment de la fusion UBS-SBS, mais vous oubliez certainement que le tissu économique de notre pays est formé à 80% d'entreprises qui sont des PME employant moins de vingt personnes. Evidemment la situation de ces entreprises est essentiellement liée à la situation de leur marché ou de leur niche et elle est très différente finalement s'il s'agit d'entreprises de commerce, d'entreprises de type industriel ou d'entreprises du secteur du bâtiment. Malheureusement les conventions collectives de travail ne règlent finalement pas le problème économique que les entreprises ont à affronter. Cela entraîne, bien entendu, un certain nombre de conséquences. Je suis tout à fait d'accord que des périodes comme celles que nous vivons aujourd'hui dans nos entreprises ne sont pas favorables à l'évolution sociale de l'ensemble du personnel.

Toutefois, je pense qu'aujourd'hui la situation actuelle démontre que les organismes existants, tant syndicaux que patronaux, fonctionnent bien et donnent parfaitement satisfaction pour toute une série de raisons. Les raisons principales, à mon avis, sont tout d'abord une parfaite connaissance des uns et des autres des différents marchés les concernant, des différentes branches concernées ou des différents secteurs. Ces différents acteurs sont extrêmement présents finalement sur le terrain, ce qui permet d'obtenir un dialogue constant entre les responsables d'entreprises et les responsables du personnel. L'objectif étant bien entendu la paix du travail.

Le président. Vous devez conclure, Monsieur le député !

M. Jean-Claude Vaudroz. Ce qui m'inquiète essentiellement et ce qui me paraît extrêmement intéressant dans la situation actuelle, c'est de voir les uns et les autres évoluer dans différentes voies alors que les conventions collectives devraient au contraire se concentrer de plus en plus vers l'unité c'est-à-dire l'unité même qu'est l'entreprise. Monsieur Pagani, lorsque je vous dis «TQM», cela ne doit probablement pas vous dire grand-chose et pourtant le «Total Quality Management», par exemple, non seulement parle des questions de qualité et de la relation que l'entreprise doit avoir avec son client, mais parle également de la relation extrêmement importante qu'une entreprise doit avoir avec l'ensemble de son personnel. Aujourd'hui, si nous voulons avancer, cette relation est prioritaire.

Le président. Monsieur, je vous prie instamment de conclure. Vous avez dépassé votre temps de parole !

M. Jean-Claude Vaudroz. Il est essentiel que nous ayons une relation de qualité. Le parti démocrate-chrétien évidemment ne peut pas accepter un tel projet et, s'il devait partir en commission, nous le voterions du bout des lèvres.

M. Charles Beer (S). Le sujet qui nous est proposé par le projet de loi est éminemment d'actualité. Je crois que le dumping social et salarial est devenu malheureusement une réalité dans notre canton, non seulement par le fait des difficultés économiques que connaissent effectivement certaines entreprises, mais également par des pratiques honteuses exercées par certains employeurs. Cela dit, juste pour mesurer un peu ce que cela représente en termes de chiffres, j'aimerais dire que cette baisse des salaires, pour autant que l'on puisse l'évaluer dans le canton de Genève, je la limiterais pour ma part à 1,5%, ce qui est déjà considérable puisque compte tenu du revenu cantonal le recul, y compris la suppression d'emplois, ne dépasse pas 6,6%. Voilà pour ce qui est de la réalité du dumping social et salarial qui risque de s'accentuer au cours des années à venir.

Deuxième chose. L'ordre juridique sur lequel nous travaillons en matière de droit du travail est représenté respectivement par la loi sur le travail, le code des obligations, les conventions collectives de travail ainsi que les usages professionnels pratiqués notamment par les commissions du marché de l'emploi et lesdites commissions tripartites. Je déplore, pour ma part, que les personnes ou le parti qui déposent le projet de loi assimilent les pratiques de la commission tripartite à une pratique xénophobe et raciste, pratique qui ne fait que veiller à ce que les conditions d'entrée sur le marché du travail soient bien adéquates aux usages professionnels. Voilà pour ce qui est du constat.

Maintenant, le contrat-type au niveau simplement juridique est de droit dispositif. Ainsi que l'a dit M. Pagani tout à l'heure, il suffit de signer un contrat individuel pour déroger au contrat-type, pour autant qu'il ne soit pas dérogé aux clauses normatives essentielles du code des obligations. Voilà pour ce qui est rapidement de l'ordre juridique. L'enjeu, la libre circulation, j'y reviendrai tout à l'heure dans ma conclusion.

Que nous propose le projet de loi par rapport au constat effectivement grave que je partage avec mes collègues de l'Alliance de gauche ? Le projet de loi nous propose: une obligation de négocier, un délai et un contrat-type fixés par le Conseil d'Etat et des statistiques qui nous seront évidemment utiles.

En ce qui concerne l'obligation de négocier, j'aimerais dire, à titre personnel, ceci : en tant que syndicaliste je me refuse, et je me refuserai toujours, à négocier des conditions de travail au nom de salariés qui ne nous ont rien demandé. Le syndicalisme détient ses mandats de ses membres et n'a pas d'autre faculté d'agir que celle-ci. Sans quoi il y a des risques que soit fixé n'importe quoi et je peux vous citer quelques exemples de conventions où il n'y a pas de membres dans les syndicats. Ce sont des conditions extrêmement graves qui ont plutôt tendance à cautionner des pratiques douteuses des employeurs.

Deuxième élément : les moyens. En ce qui concerne l'OCIRT, les postes ayant diminué, il faudra donner des moyens supplémentaires à l'Office cantonal de l'inspection et des relations du travail si on lui confie la tâche de suivre de telles négociations. Enfin le contrat-type : le contrat-type reste et restera de droit dispositif. C'est-à-dire qu'il ne va pas être établi de salaire minimum, de même qu'il n'y aura pas de définition d'un minimum s'agissant des conditions de travail. Il sera toujours possible, en tout temps, d'y déroger puisque ce sont les contraintes du droit fédéral actuel. La solution qui nous est présentée serait que le Conseil d'Etat fixe les conditions de travail. Je tiens à dire, en tant que député socialiste, en tant que député de gauche, que je ne comprends pas comment une majorité de gauche vise aujourd'hui à dire qu'il appartient à un gouvernement à majorité de droite de fixer le contenu minimum des conditions de travail. Oui, je vois des risques de pression à la baisse sur les salaires, de même que je vois des risques de pression à la baisse sur les conditions de travail en général. Voilà pour ce qui est de la mécanique proposée. De là à dire encore que c'est le juge du Tribunal des prud'hommes qui devrait déclarer...

Le président. Il vous reste trente secondes pour conclure, Monsieur le député !

M. Charles Beer. ...que le contrat-type est obligatoire, eh bien, nous nous trouvons en pleine confusion des pouvoirs.

J'arrive à la conclusion en disant ceci. La libre circulation des travailleurs à venir, que nous souhaitons, doit reposer sur des mesures compensatoires qui notamment donnent un contenu réel au contrat-type et permettent d'étendre les conventions collectives de travail. Elles doivent également porter sur un maintien de la commission tripartite et sur la création d'emplois et les luttes sociales. Car c'est de cette manière-là que nous arriverons à protéger valablement les travailleurs. Je termine, Monsieur le président...

Le président. C'est terminé, Monsieur !

M. Charles Beer. ...en disant ceci : je déplore simplement qu'un tel projet de loi, aussi important, puisqu'il y a des mesures cantonales à prendre, ait été rédigé dans le plus parfait mépris de la concertation puisque aucun syndicat de la Communauté genevoise d'action syndicale en tant que tel n'a été de près ou de loin consulté. Imaginez ce que cela donnerait si un projet de loi était déposé sur le logement ou la fonction publique sans que tel ou tel député de gauche n'ait consulté respectivement l'ASLOCA ou le Cartel ! (Applaudissements.)

M. Gilles Desplanches (L). Le groupe libéral a toujours été un partisan des contrats collectifs négociés entre les partenaires sociaux. C'est ce que l'on appelle la liberté contractuelle. Faut-il rappeler aux initiants que le but premier des conventions collectives est une négociation entre les partenaires sociaux sur les droits et devoirs de chaque partie ? Ce projet de loi jette le discrédit aussi bien sur les syndicats que sur les patrons. Il tend à désinformer les députés en insinuant que la paix du travail est fortement menacée, que les syndicats ne sont pas en mesure de s'exprimer ni de revendiquer les droits élémentaires des travailleurs et que la plupart des patrons sont de véritables profiteurs. Or la situation est bien différente. A la lecture de l'exposé des motifs, on constate que cent vingt conventions collectives régissent le droit du travail. Certaines de ces conventions sont des conventions nationales qui sont traitées en amont par les partenaires sociaux concernés, d'autres sont des conventions cantonales ou d'entreprises. Ainsi que les initiants l'ont rappelé, seules cinq CCT en l'espace de cinq ans ont été dénoncées. Cinq autres dans la même durée ont été créées.

Est-il utile de rappeler ici que notre canton vit une période difficile économiquement ? Qu'un grand nombre d'entreprises ont de sérieuses difficultés à tourner et que l'économie est en pleine mutation ? Dans notre canton, le tissu économique est composé à plus de 90% par des petites entreprises. Ce sont elles qui font l'économie, qui créent des emplois et qui s'acquittent de la plupart des taxes et impôts pour le fonctionnement de notre canton. Il est faux de croire que depuis 1990 les entreprises sont dans une dynamique exponentielle, bien au contraire. La plupart d'entre elles, et bien souvent les plus petites, équilibrent juste les dépenses au détriment des investissements. Contrairement au secteur public, une entreprise ne peut pas s'endetter à l'infini car à très court terme elle mettrait la clef sous la porte. C'est malheureusement pour cette raison que les patrons ne sont pas toujours en mesure d'accorder les augmentations désirées. Les initiants demandent l'introduction d'un salaire minimum. Sur quels critères vont-ils statuer ? Sur les heures supplémentaires ? Sur les heures hebdomadaires ? Sur les qualifications professionnelles ? Sur le type de travail ? En tenant compte du treizième ? Ou tout simplement sans critère préalable ?

Contrairement à ce qui est affirmé dans l'exposé des motifs, la qualification, les compétences, le niveau de responsabilité ainsi que celui de la pénibilité sont les critères qui permettent d'évaluer les salaires. Est-il raisonnable de croire qu'il est dans les compétences du parlement de s'immiscer dans les entreprises en leur indiquant quel est le salaire à offrir à leurs employés ? Il est utile de préciser que tous les types de métier n'ont pas la même marge de bénéfice; que chaque profession subit de façon différente la concurrence, qu'elle soit cantonale, transfrontalière ou internationale. Il m'apparaît que le projet de loi peut avoir un effet dévastateur pour l'emploi et pour la précarité de celui-ci en imposant les conditions d'emploi dans certains secteurs, ce qui pourrait avoir pour conséquence tout simplement d'encourager certains à engager des travailleurs non déclarés et de favoriser le travail au noir. Ce n'est pas dans l'intérêt des associations professionnelles ni dans celui des travailleurs.

En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe libéral souhaite que d'autres CCT voient le jour. C'est pour cette raison que nous vous invitons à laisser aux partenaires sociaux le soin légitime de négocier les conditions de travail. C'est leur devoir et leur droit. Nous essayerons de vous convaincre en commission.

M. David Hiler (Ve). En premier lieu les constats. Les auteurs du projet de loi constatent que, dans un marché du travail peu favorable aux salariés, il y a évidemment une pression assez forte à la baisse des salaires. Il ne faut pas la dramatiser, elle n'est pas aujourd'hui insupportable mais elle devrait s'aggraver si le chômage devait se poursuivre. Il y a donc un risque. La baisse effective du salaire réel constatée depuis quelques années nous conduit à chercher des solutions pour essayer de rétablir l'équilibre. Il est vrai qu'il existe beaucoup de petites entreprises en difficulté; je comprends tout à fait ce discours et je veux bien y adhérer. Il est vrai également, et il ne faudrait pas l'oublier peut-être sur certains bancs, que les entreprises qui réalisent de coquets bénéfices, disons-le, ne sont pas forcément petites. A voir les taux de rendement souhaités sur les fonds propres pour un certain nombre d'entre elles, on n'a pas l'impression qu'il y ait un partage équitable entre les salariés et les actionnaires. Je crois qu'il faut dire la vérité; il y a ces deux réalités: d'un côté les entreprises qui ont des difficultés et qui font ce qu'elles peuvent; de l'autre le déséquilibre patent entre la part réservée aux actionnaires et celle dont bénéficient les travailleurs dans certaines entreprises.

Ce constat nous contraint à chercher des solutions. Je crains tout de même que les cris effrayés que j'ai entendus, en l'occurrence sur ma gauche, ne soient pas vraiment justifiés. Le danger est plutôt celui souligné par Charles Beer. Le droit fédéral est assez catégorique. Si les salariés sont trop favorisés dans ces contrats-type, ils seront cassés tout simplement par le Tribunal fédéral. Autrement, ils risquent bien de stratifier le minimum des minimums pratiqués. Mais ce que nous allons vérifier en commission, je crois, c'est l'impact réel qui, selon moi, est assez différent de ce que à droite et à gauche on veut nous faire croire. La dramatisation du débat, sa «théâtralisation» me paraissent totalement inutiles.

Quelles seraient les conséquences réelles ? Elles sont déterminées avec précision au vu du droit; la commission saura s'en charger. Puis vient la question fondamentalement philosophique sur laquelle chacun devra trancher: est-il possible qu'une société puisse fonctionner si les conditions minimales et les salaires sont fixés branche par branche ? Nous nous ferons notre opinion au cours de ce débat. C'est intéressant. Personnellement, je vous avoue quelques doutes. J'ai l'impression que ce que l'Etat peut faire, mais au niveau fédéral, il est vrai, c'est fixer un salaire minimum. Pour toutes les branches et non pas par branche, approche un peu inquiétante.

Par ailleurs, fixer ce qui doit l'être dans la loi sur le travail, c'est important, mais aller au-delà, branche par branche, je crains que cela commence à ressembler à une économie administrée et je ne suis pas du tout certain que l'on en tire tous les avantages que l'on en attend.

D'autre part, et c'est ce qui m'inquiète le plus dans ce projet, c'est le message que l'on envoie aux gens - cela, je le dis avec une certaine insistance à M. Pagani : vous laissez entendre que l'on pourrait compter sur l'Etat pour tout régler, malgré les déséquilibres sociaux. Je crois que cela n'est simplement pas vrai. Cela me rappelle la déclaration de M. Moutinot tout à l'heure. Il va falloir que les gens se syndiquent s'ils veulent tenir le coup. Il va falloir qu'ils luttent, qu'ils négocient leurs contrats, il va falloir qu'ils se battent. En effet, nous ne pouvons pas, ni au niveau fédéral ni au niveau cantonal, poser les rapports de force sur l'ensemble de la société, pour la simple et bonne raison que toutes les économies administrées que nous avons connues ont échoué dans les conditions que vous connaissez. C'est regrettable mais il faut bien en tenir compte. Pour ces raisons, je crois qu'il est quand même intéressant d'aller au fond des choses sur l'aspect juridique et sur la réalité de ce qui est proposé. Cela me paraît essentiel. Hors de l'idéologie, vous verrez que c'est plutôt décevant lorsqu'on aborde les termes réels. Ce sera effectivement une bonne manière pour la gauche de plus en plus plurielle, m'a-t-il semblé entendre ce soir, de voir quelle stratégie elle entend développer pour réguler l'économie...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

M. David Hiler. C'est bon, j'ai conclu... Mais vous m'avez coupé mon effet final ! (Rires.)

Le président. Ah, pardon ! Désolé, Monsieur le député ! Il n'était pas dans mon intention de couper votre effet final !

M. David Hiler. Je suis désolé aussi !

M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. Ce projet de loi à vrai dire me laisse quelque peu perplexe. Il faut en effet savoir que les conventions collectives de travail sont du ressort et de la compétence exclusive des partenaires sociaux. Je dois dire ici combien j'apprécie ces partenaires sociaux dans les différentes commissions de mon département; ils me sont très précieux. Des partenaires sociaux qui savent trouver la juste mesure aux difficultés économiques, aux difficultés de l'emploi aujourd'hui et qui cherchent toujours la bonne solution pour l'intérêt à la fois des entreprises et des travailleurs.

Je considère également que ce n'est pas le rôle de l'Etat de multiplier des contrats-type de travail et, si M. Beer craint que la majorité du Conseil d'Etat puisse jouer sur des baisses de salaires, sachez que nous n'en voulons pas. Confier ce rôle à l'Etat est à mon sens une erreur fondamentale.

Le rôle de l'Etat aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, est de créer des conditions-cadres pour que notre système économique puisse se développer harmonieusement, pour créer des emplois, pour créer des conditions qui permettent à nos entreprises, dans une situation très difficile, de s'adapter plus rapidement aux mutations constantes du marché et de le faire en tenant compte surtout de l'emploi comme nous vous l'avons dit. Ces deux arguments évoqués suffiraient, à eux seuls, pour que le Conseil d'Etat et moi-même manifestions notre réticence face à ce projet. Vous l'avez relevé, Monsieur Hiler, je crois qu'il est bon d'aller au fond des choses parce que, s'agissant des propositions qui sont faites, il est possible, en les traitant en commission, qu'elles nous apportent quelque chose de positif. C'est pour cette raison que le Conseil d'Etat accepte volontiers le renvoi en commission de ce projet.

Ce projet est renvoyé à la commission de l'économie.

 

M 1101-A
a) Proposition de motion de Mme et MM. Nicolas Brunschwig, Barbara Polla, Jean-Claude Vaudroz et Hervé Dessimoz concernant les mesures pratiques de responsabilisation collective en faveur de l'emploi. ( -) M1101
Mémorial 1997 : Développée, 1019. Renvoi en commission, 1030.
Rapport de Mme Yvonne Humbert (L), commission de l'économie
M 1102-A
b) Proposition de motion de Mme et MM. Nicolas Brunschwig, Barbara Polla, Jean-Claude Vaudroz et Hervé Dessimoz pour la coopération intercantonale et interrégionale entre les bureaux de placement, notamment lémaniques. ( -) M1102
Mémorial 1997 : Développée, 1019. Renvoi en commission, 1030.
Rapport de Mme Yvonne Humbert (L), commission de l'économie

11. Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier les objets suivants :

Lors de sa séance du 28 avril 1997, la commission de l'économie, présidée par Mme Marie-Françoise de Tassigny, et en présence de MM. Bernard Gabioud, secrétaire général, Jean-Charles Magnin, directeur général auprès du secrétariat et Yves Perrin, directeur général de l'Office cantonal de l'emploi, a examiné les projets des motions 1101 et 1102 où il est clairement énoncé que l'emploi reste une préoccupation primordiale pour tous et qu'il est indispensable de favoriser la prise d'emploi plutôt que de pérenniser le chômage tout en étant conscient que le marché de l'emploi local n'est pas en mesure de proposer un poste adéquat à toute personne recherchant un emploi. La possibilité d'étendre le champ d'action permettrait d'augmenter les chances de trouver un travail à sa convenance.

Les motionnaires proposent pour ceux qui trouveraient un emploi dans un autre canton, de faciliter leur déménagement et leur installation ceci en relation avec la Confédération et le canton d'accueil. Pour les jeunes chômeurs, ils suggèrent le financement de stages dans un autre canton ou même à l'étranger ceci en collaboration avec l'Etat et la Confédération. En outre, ils proposent le développement d'une collaboration intercantonale entre les bureaux de placements publics.

M. Bernard Gabioud, secrétaire général, nous indique qu'aucune disposition cantonale n'existe actuellement concernant le concept de déménagement des chômeurs. L'article 68 de la LACI ne prévoyant qu'une contribution aux frais de déplacements hebdomadaires. L'OFIAMT n'a encore jamais accepté le placement de chômeurs dans d'autres cantons, ni le forfait déménagement.

M. Yves Perrin, directeur général de l'office cantonal de l'emploi, insiste sur l'importance de la mise en concordance entre les demandes d'emplois et les besoins du marché. A ce sujet, la nouvelle LACI met l'accent sur les mesures actives telles que mesures de recyclage, mesures de soutien à la réinsertion professionnelle, mesures d'aide financière à la formation.

M 1102

Les mesures actives.

En 1996, 8960 décisions de mesures actives ont été prises qui comprennent 9248 décisions de cours, 527 décisions d'AIT, 149 relatives aux indépendants et 8 décisions d'allocations d'études. Il n'y eut que 85 refus. Par rapport à 1995, 5043 décisions furent rendues contre 3634 en 1994, on constate une augmentation non négligeable.

Trois catégories de cours ont été proposées. Des cours d'informatique dont des cours techniques (10%) et de bureautique (67%) destinées à 2844 personnes, des cours de langues pour 2099 personnes et des cours de technique de recherche d'emplois pour 1518 personnes. Des clubs emploi et des mesures de suivi permettent d'entretenir la formation. Des allocations de formations existent également pour une durée de 3 ans pour lesquelles certaines conditions sont exigées.

Les cours de langue.

Les cours de langue concernaient le français pour les non francophones, 761 personnes; l'anglais, 850 personnes et l'allemand, 167 personnes.

Parmi les candidats inscrits au 31 décembre 1996, 1486 personnes étaient des primo demandeurs dont 81% de jeunes parmi lesquels on trouve 28% d'universitaires.

Les stages en entreprises.

Quant aux mesures actives de stages en entreprises, près de 1000 décisions ont été prises. Le placement immédiat fut possible dans 44% des stages de 6 mois et 23% des stages de 3 mois. Ces derniers paraissent moins profitables. Il faut relever que ce n'est pas forcément l'entreprise dans laquelle le stage fut effectué qui engage les stagiaires.

Les séjours linguistiques.

Concernant les séjours linguistiques à l'étranger, ceux-ci sont réservés aux jeunes âgés de 18 à 30 ans au chômage depuis 6 mois. Les séjours s'effectuent en Allemagne et en Grande-Bretagne pour des durées qui varient entre 12 à 13 semaines. La première volée est sortie en septembre 1996, elle comprenait 12 participants genevois dont 7 sont partis en Grande-Bretagne et 5 en Allemagne.

Les stages linguistiques en Suisse ont réuni 412 participants en 1994 et 1006 l'année suivante. Ils comprenaient 70% de Romands. On relève que 17 Genevois se sont déplacés en Suisse alémanique alors que 36 personnes d'autres cantons sont venues à Genève. Une liste d'attente comprend actuellement 390 personnes.

Depuis le mois de mai 1997, le LMMT est mis en place, son rôle est d'analyser les besoins des entreprises et ceux des demandeurs d'emplois.

Les bornes SSI.

Au niveau de la collaboration entre institutions, l'OFIAMT et les ORP, il faut faire une distinction entre ces deux entités. L'OFIAMT invite à ouvrir au maximum l'accès aux demandes d'emplois ceci par le biais de la diffusion de bulletins d'informations et la mise en place de bornes SSI (self service information) situées dans les différents offices de travail, pouvant être consultées par tout un chacun, la base de données, secteur professionnel par secteur professionnel ceci dans tous les cantons. Elles permettent d'obtenir des fiches d'offres d'emploi provenant de plusieurs sources. Les entreprises elles-mêmes les signalent à l'OCE. La presse quotidienne est aussi consultée ainsi que les annonces de l'Etat. L'employeur concerné donnant son accord. Il serait judicieux de pouvoir installer ces bornes dans d'autres lieux ainsi que sur le domaine public.

Le télétexte.

Le Télétexte offre aussi une sélection d'offres d'emplois. Leur validité est de 2 mois.

Internet.

L'OFIAMT a aussi mis en place un site Internet sur lequel figurent les profils anonymisés des demandeurs d'emplois.

Ce qui fait que les Offices régionaux de placement se retrouvent en situation de concurrence sur le marché de l'emploi. Un travail en réseau informatique devrait améliorer les bases de données actuelles.

Les bourses de l'emploi.

A l'origine, les bourses de l'emploi ont débuté dans le secteur du bâtiment. Pour ce faire, une commission paritaire avait été mise sur pied avec pour mission, le placement. Les secteurs de l'hôtellerie et de la restauration ont suivi cet exemple. Actuellement, des bourses à caractère collectif et à caractère individuel existent encore, ces dernières sont des micro bourses destinées à une seule entreprise difficilement exportables dans tous les secteurs. La métallurgie en souhaitait, elle y renonça. Il en est de même pour le secteur de la vente.

Discussion et vote de la commission.

Il est proposé de voter ces deux motions à l'unanimité toutefois le groupe socialiste s'abstiendra par le fait que la plupart des propositions contenues dans les textes ont déjà été mises en place. Quant à l'Alliance de gauche, elle se prononcera contre ces deux motions, la M 1102 étant déjà réalisée et la M 1101 l'oblige à constater que les employeurs écrèment le marché et ne font preuve d'aucune flexibilité et que certains exigent systématiquement la connaissance de l'allemand et de l'anglais alors que la pratique de ces langues n'est pas vraiment indispensable car peu ou pas usitée.

Il est aussi relevé qu'actuellement les entreprises se soucient aussi des aspects sociaux qui touchent leurs employés toutefois il faut aussi reconnaître que celles-ci cherchent à engager les personnes les plus performantes possibles tout en relevant que beaucoup d'entre elles entreprennent des efforts importants dans la formation continue, faut-il encore que le personnel l'accepte.

Vote de la M 1101 : pour 6 ( 4 L, 2 R)

 contre 3 (Adg)

 abstentions 2 (P)

Vote de la M 1102 : pour 6 (4 L, 2 R)

 contre 3 (Adg)

 abstentions 2

Il vous est proposé, Mesdames et Messieurs les députés, d'inviter le Conseil d'Etat à fournir un rapport portant sur l'évolution des différentes mesures prises en vue de la diminution du chômage.

M 1101-A

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Motion(1101)

concernant les mesures pratiques de responsabilisation collective en faveur de l'emploi

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

considérant :

invite le Conseil d'Etat

M 1102-A

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Motion(1102)

pour la coopération intercantonale et interrégionale entre les bureaux de placement, notamment lémaniques

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

considérant :

invite le Conseil d'Etat

12. Ordre du jour.

Le président. Nous abordons le point 29 de notre ordre du jour, département de justice et police et des transports. (Vives protestations.) Il s'agit du rapport de la commission judiciaire chargée d'étudier le projet de loi de Mme et MM. Laurent Moutinot, Dominique Hausser, Michèle Wavre, Bernard Lescaze, René Longet, Christian Grobet, Gilles Godinat, Jean Spielmann, Bénédict Fontanet et Olivier Lorenzini modifiant le code de procédure pénale, et dont le rapporteur est M. John Dupraz. (Brouhaha, protestations.)

Mesdames et Messieurs les députés, nous n'avons que fort peu avancé dans notre ordre du jour ! Il n'est que 23 h 15 et je vous suggère de terminer nos travaux à 23 h 30. Nous sommes en présence de quatre projets qui ne semblent pas poser de problème, aussi je vous suggère de les traiter rapidement.

Monsieur Dupraz, je vous prie de prendre place à la table des rapporteurs !

M. John Dupraz, rapporteur. L'horaire syndical m'interdit de travailler après 23 h 15 ! (Rires.)

Le président. Bien, je mets aux voix la poursuite de nos travaux.

Mise aux voix, cette proposition est rejetée.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous informe que votre manière de faire impliquera une séance supplémentaire ce printemps. C'est vous qui l'aurez voulue ! Je le regrette, car nous aurions pu l'éviter. Tant pis pour vous, je lève la séance ! Nous reprendrons nos travaux dans un mois, en avril.

La séance est levée à 23 h 15.