République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 18 décembre 1997 à 17h
54e législature - 1re année - 3e session - 60e séance
PL 7770-A
Conformément à l'article 221, alinéa 3, de la loi portant règlement du Grand Conseil, votre commission de l'énergie et des Services industriels a été saisie par le Conseil d'Etat du projet en titre déposé en date du 19 novembre 1997. Elle l'a examiné au cours de sa séance du 28 novembre 1997, sous la présidence de son vice-président, M. Vaucher. Les SIG étaient représentés par MM. Gérald Fatio, président, Jean-Gabriel Florio, secrétaire général, Christian Michelet, directeur du service comptabilité et finances, Edouard Wohlwend, directeur des services généraux, René Volery, responsable des ressources humaines, Hans-Peter Rüfenacht, chef de division au service de l'eau, Sidney Mattatia, sous-directeur du service de l'électricité, et Michel Gregorio, chef de division au service du gaz.
La commission vous propose à l'unanimité de ses membres de voter le budget tel que présenté. Il convient cependant de faire les observations suivantes, qui conditionnent, pour la majorité de la commission, l'acceptation en séance plénière du budget des SIG.
En effet, à l'instar du budget de l'Etat, le budget des SIG est un budget de transition, souffrant du fait d'exprimer les choix politiques de la majorité sortante mais devant engager la majorité nouvelle sortie des urnes le 12 octobre dernier. Or, parmi les domaines où un changement substantiel de politique s'impose figure la politique de l'énergie. Ce Grand Conseil sera saisi simultanément au rapport 7770-A du rapport de minorité devenu rapport de majorité de M. Chaïm Nissim sur la conception cantonale de l'énergie(R 338-A); nous vous renvoyons dès lors à ce document qui esquisse les grands axes de la volonté politique qui doit maintenant prévaloir.
En quelques mots, notre souhait est de sortir d'une situation hautement instable dans laquelle est engagée notre société, à savoir de dépendre à 85% d'énergies non renouvelables et polluantes, et de consommer avec 25% de la population les deux tiers des ressources énergétiques du monde. Nous voulons que la transition énergétique soit sérieusement engagée, et que l'on mobilise notre potentiel et notre savoir-faire autour de cet objectif. Cette vision est d'ailleurs consignée dans l'article 160C de la constitution issu de l'initiative «L'énergie notre affaire», approuvée par le peuple le 7 décembre 1986 (!) et dont la mise en oeuvre à ce jour est restée très en retrait des possibilités et des exigences.
Or, il n'est pas possible de séparer la mission des SIG des objectifs de politique énergétique. A ce sujet, la première mesure à prendre est de clarifier le rôle et le mission des SIG dans le cadre du mandat de l'article 160C. Le potentiel et la capacité d'innovation des plus de 1 400 collaboratrices et collaborateurs des SIG doit dès lors être mobilisé autour de la transition énergétique, à savoir:
- la valorisation des énergies renouvelables;
- la valorisation des améliorations des rendements des énergies, dans le cadre d'une mission renforcée de service public.
A cet égard, la négociation d'un contrat de prestations et l'examen des projets de loi constitutionnels en attente auprès de notre commission s'avèrent décisifs. Les textes constitutionnels permettront de clarifier la hiérarchie des articles, entre le titre XA et le titre XD de la constitution. Le contrat de prestations permettra de fixer une série d'objectifs, de conditions, de moyens et de déterminer l'état du controlling parlementaire.
Or, dans les «observations d'ordre général» des pages A1 et A2 du budget des SIG du 2 septembre 1997 auxquelles l'exposé des motifs du Conseil d'Etat se réfère, se trouvent des orientations que la majorité ne peut aucunement partager. Ce contrat de prestations devrait en effet, pour les 5 années de sa validité, soit pour une période allant au-delà de la législature qui s'ouvre, comporter notamment l'engagement des SIG à ne pas augmenter les tarifs de l'électricité ! Chacun sait aujourd'hui que ce sont les bas prix des énergies conventionnelles qui dissuadent tout investissement dans les énergies renouvelables et les améliorations de rendements. Le conseiller fédéral Moritz Leuenberger lui-même signalait dans sa présentation, le 12 septembre dernier à Fribourg, du 7e rapport annuel d'Energie 2000, que les coûts de l'énergie avaient diminué en francs constants de quelque 30% en 25 ans...
De tels engagements sont inacceptables. Sur la procédure, et ici nous parlons clairement au nom de l'ensemble de la commission, il est exclu que le contrat de prestations soit négocié entre les SIG et le Conseil d'Etat sans que le Grand Conseil ne puisse se prononcer. La procédure doit être au moins la même que celle qui a été mise en place pour les TPG, lorsque l'article constitutionnel a été modifié et le rôle du Grand Conseil clairement reconnu. Nous nous référons également à l'alinéa 3 de l'article 160 Cst que propose le projet de loi 7534, déposé en date du 11 octobre 1996 par les députés Armand Lombard, Henri Duvillard, Bénédict Fontanet, Janine Berberat, Jean-Philippe de Tolédo et Daniel Ducommun: «Le Conseil d'Etat soumet à l'approbation du Grand Conseil un contrat de prestations, établi pour une période de 5 ans, déterminant la politique d'investissements et de financement proposée par les Energies de Genève.»
S'agissant ainsi de définir les orientations des prochaines années, la majorité de la commission conditionne son vote du budget à une déclaration claire du Conseil d'Etat quant:
a) au rôle actif des SIG dans la mise en oeuvre de l'article 160C Cst;
b) à la réserve des droits du Grand Conseil quant à l'approbation du contrat de prestations.
Remarques sectorielles
Par ailleurs, la commission fait part des éléments suivants:
Bilan social
La majorité ne saurait accepter une politique de réduction constante des postes. L'exposé des motifs signale une réduction de 35,5 postes en 7 ans au service de l'eau, et le budget 1998 prévoit 1394,5 postes pour l'ensemble de l'entreprise, contre 1 425,6 au budget 1997 ! (comptes 1996: 1 382,9). Il est apparu également que l'entreprise recourait dans une mesure non déterminée à des personnes en fins de droits placées par l'Etat, ce qui constitue une pratique pour le moins discutable, et un subventionnement caché des SIG par la collectivité. Enfin, la politique de partage du travail semble bien trop timide et ne saurait se limiter aux retraites anticipées.
Hausse du prix de l'eau
S'agissant de l'évolution du prix de l'eau, le vote du budget préconisé par la commission implique l'approbation de la hausse du prix de l'eau; vous trouverez en annexe le tableau détaillé fourni par les SIG lors de leur audition. En séance, suite à une question de M. Dethurens, député, les SIG ont assuré que les systèmes de comptage permettant aux agriculteurs de bénéficier du tarif de nuit pour l'arrosage des cultures seront effectivement mis en place, ce que la commission ne peut que souhaiter vivement.
Modulations de tarifs en fonction des situations économiques
Suite à la question d'un commissaire, les SIG n'excluent pas de moduler la perception des tarifs en fonction des situations effectives des entreprises. Une étude est cependant nécessaire.
Conclusion générale
La commission souligne, enfin, que les SIG ont, en 1997, considérablement pu réduire leur déficit.
Compte tenu de toutes ces considérations, la commission vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, le vote du budget 1998 des SIG, sous réserve, en ce qui concerne la majorité, de la déclaration du Conseil d'Etat susmentionnée.
Premier débat
M. René Longet (S), rapporteur. S'il est un domaine où un changement de politique s'impose, c'est bien celui de l'énergie. Il y a plus de dix ans, nous avons voté un complément à la constitution, définissant tout un programme d'engagement du canton dans le domaine de l'énergie. Jusqu'alors, ce programme n'a été que très partiellement réalisé.
Ce soir, nous parlons de l'avenir des SIG en insistant sur le fait qu'ils devront faire face aux défis de la libéralisation du marché de l'électricité et de ceux, tout aussi importants, de la mise en oeuvre d'une politique énergétique. Nous tenons à ce que les SIG jouent leur rôle - et tout leur rôle - dans la politique de l'énergie. Pour la majorité de la commission, le vote du budget des SIG doit être l'occasion de marquer ce virage important. Dès lors, nous attendons du Conseil d'Etat - comme stipulé dans mon rapport - une définition du rôle des SIG dans cette politique de l'énergie.
Ensuite, nous discuterons de la hausse des tarifs de l'eau. En votant le budget, ce parlement avalise une décision qui est du ressort du Conseil d'Etat. La commission souscrit à cette décision, mais souhaite qu'une catégorie d'usagers de l'eau, à savoir une trentaine d'exploitations maraîchères, puisse bénéficier des mesures techniques, comme, par exemple, l'utilisation du tarif de nuit. La commission demande aux SIG et au Conseil d'Etat d'abonder dans ce sens. A ce sujet, une motion préparée par M. Beer sera traitée en janvier. Je souhaite, au nom de la commission, qu'une solution soit trouvée pour ces cas très particuliers. La commission vous recommande de voter le budget des SIG, sous réserve, pour la majorité, d'une clarification de la part du Conseil d'Etat qui devrait signaler le changement de cap que nous attendons.
M. Chaïm Nissim (Ve). Mon groupe est favorable à la hausse des tarifs de tous les fluides, car plus ils seront onéreux et moins les utilisateurs seront tentés de les gaspiller. Cela servira la politique du développement durable.
Pour certaines catégories d'utilisateurs, comme les maraîchers, il est vrai que les hausses des tarifs sont difficiles à accepter. Toutefois, il existe les moyens que propose M. Longet, comme les tarifs de nuit, ou autres. Madame Bernasconi, il est tout à fait possible de subventionner ceux qui rencontrent des difficultés dans le paiement des factures de certains fluides. Cela peut se faire, il n'y a pas de problème, mais il faut que l'ensemble des utilisateurs ayant les moyens de payer plus cher le fassent, car cela les encourage à prendre une douche plutôt qu'un bain !
M. Roger Beer (R). Ce soir, vous assistez à une chose extraordinaire. Depuis neuf ans, c'est la première fois que le budget des Services industriels a été voté à l'unanimité en commission. De ce fait, le débat devrait être écourté ce soir et ce budget assez facilement voté.
Comme M. Longet l'a fait dans son rapport, il convient de souligner l'effort accompli par les SIG; eux qui se trouvent dans une situation fort délicate. En effet, cette entreprise doit assumer non seulement la gestion d'un monopole - ce qui lui permet une certaine autonomie dans les prix - mais également celle d'un personnel soumis à une réglementation publique, soit à discussion dans des parlements, notamment, et duquel on attend qu'il soit compétitif en regard du marché extérieur à Genève et à la Suisse. Cela n'est pas possible.
M. Longet a cité la problématique de l'eau, dont nous reparlons. Les énergies - quelles qu'elles soient - ont un prix. Dans celui-ci doivent être comprises les notions d'écologie, de parcimonie et d'économie, mais, également, celles de rentabilité et de maintien à long terme.
Le nouveau magistrat en charge des SIG et la majorité qui devrait se dessiner assez facilement au Grand Conseil risquent de transformer - j'espère en bien, pour le bien de la population - le discours et les relations avec les SIG.
A l'avenir, il serait bon que les députés soient saisis plus rapidement du budget des SIG, afin qu'ils puissent en parler plus calmement que durant ces deux vendredis du mois de novembre, sous une pression intenable en raison des délais à respecter.
Nous avons obtenu l'unanimité de la commission - et c'est peut-être la chance de la nouvelle législature - mais, auparavant, les membres de la commission ont toujours demandé que ce budget leur parvienne plus rapidement, afin de l'étudier et de faire des choix politiques fondés. Cela n'a pratiquement jamais été le cas, car celui-ci devait passer des SIG, au Conseil d'administration, puis au Conseil d'Etat pour enfin arriver aux mains des députés, à la fin novembre, donc beaucoup trop tard.
Le groupe radical acceptera ce budget et, bien sûr, à titre personnel - mais aussi au nom du groupe - je me réjouis qu'on étudie la motion concernant l'eau, afin d'en parler sérieusement en janvier.
M. Pierre Vanek (AdG). Notre groupe votera le budget des SIG. (Exclamations.) Dans le cadre de la préparation de mon intervention, j'ai relu dans le Mémorial les propos que j'ai tenus lorsque je fus interpellé l'an dernier. Si vous désirez les entendre à nouveau, je puis vous le répéter.
Des voix. Oui, oui !
M. Pierre Vanek. Je précise donc que l'article 24 n'a rien à y faire...
Des voix. Ah ! (Etonnement feint.)
M. Pierre Vanek. ...étant interpellé à réitérées reprises sur cet objet, j'ai probablement déjà répété trois fois ces propos dans cette enceinte. Si vous insistez, on débattra non pas du budget des SIG mais de la possibilité ou non pour Pierre Vanek de s'exprimer dans cette enceinte...
Le président. Ne vous laissez pas influencer par les commentaires, Monsieur le député !
M. Pierre Vanek. Bien volontiers, Monsieur le président ! Je vous demanderai, évidemment, un droit de parole supplémentaire pour parler du budget et, également, de faire taire cette bande d'excités !
Le président. Ne leur prêtez pas une oreille attentive, Monsieur le député !
M. Pierre Vanek. Non, mais cela induit une spirale. Ils font du bruit, je parle plus fort et tout le monde s'énerve, alors... (Exclamations indignées.)
Le président. Poursuivez, Monsieur Vanek !
M. Pierre Vanek. Tout cela ferait mentir la déclaration de notre collègue Roger Beer disant que le débat serait court !
Le président. Poursuivez, Monsieur Vanek ! Monsieur Dupraz, taisez-vous !
M. Pierre Vanek. Je tente de poursuivre... Si le débat promet d'être court, c'est grâce à l'unanimité politique réunie au sein de la commission de l'énergie. Si cette unanimité a pu avoir lieu, ce n'est pas par la grâce du Saint-Esprit ou grâce à une élection qui a renouvelé ce parlement, mais bien parce que ce sujet a été largement débattu auparavant. J'ai relu dans le Mémorial les débats de l'an dernier sur le budget des SIG et je me demande ce que sont devenues certaines contradictions politiques.
A cette époque, nous étions concentrés sur la question des hausses de tarif des fluides. Or, il est assez cocasse de constater que M. Beer, rapporteur à l'époque, prétendait que toute hausse de tarif était absolument exclue, car le risque était trop grand de «couler l'économie»; bien qu'une bataille politique ait été menée, y compris par les SIG pour l'augmentation des tarifs, non seulement de l'eau mais également de l'électricité et, plus modérément, du gaz.
Aujourd'hui, M. Beer nous annonce que les prix doivent englober une notion écologique. C'est fort bien, mais, pour le moment, cet élément n'a pas été pris en compte dans la tarification. Nous n'avons néanmoins pas voulu sanctionner les SIG en refusant leur budget, puisqu'ils ont très courageusement, l'an passé, mené cette bataille et l'ont perdue face à l'ancien Conseil d'Etat et à l'ancienne majorité.
Par conséquent, ce débat doit bien être politique sur les questions de fond touchant la mise en place de la politique énergétique. Nous aurons l'occasion d'y revenir lorsque nous parlerons de la conception cantonale de l'énergie. Ce débat est agendé, et aura lieu sous peu. Nous ne saisissons donc pas le prétexte du budget des SIG pour en parler.
Je pense - tout comme le M. Beer de ce soir et non pas celui du rapport de l'an dernier sur le budget des SIG - qu'il faut intégrer dans les prix des fluides ce qu'il a appelé la notion écologique; ce que l'ancienne conception cantonale de l'énergie, dans un de ses postulats fondamentaux, considérait comme un surcoût des tarifs de l'énergie que l'on pouvait imposer en vue de financer une politique énergétique. Voilà le débat de fond.
En s'appuyant sur les accords de l'OMC, un certain nombre de personnes présentes sur les bancs d'en face ont défendu l'idée selon laquelle tout cela était irréalisable, qu'il ne fallait surtout pas introduire cette notion d'écologie, mais, au contraire, imposer des tarifs minimum. D'après elles, il n'existait aucune possibilité de mener une quelconque politique énergétique et d'instaurer une autre politique tarifaire que celle impliquée par une conception ultra libérale appliquée de manière radicale, si j'ose dire. Or cette thèse est en contradiction avec l'article 160 C de la constitution dans lequel il est inscrit que la tarification doit être conforme à la politique cantonale en matière d'énergie. Il serait bon que cette référence constitutionnelle trouve sa réalisation pratique. Ainsi, il faut choisir entre la constitution genevoise, que vous avez tous juré de respecter et de défendre, et les accords de l'OMC. C'est évidemment et démocratiquement la constitution genevoise qui prime.
Lors de l'assermentation des conseillers d'Etat à la cathédrale Saint-Pierre, certaines paroles abondaient en ce sens. Il a été dit que le Conseil d'Etat veillerait à ce que la politique cantonale en matière d'énergie continue à être fondée sur les économies d'énergie, le recours aux énergies renouvelables et le respect de l'environnement. Toutes ces références sont concentrées à l'article 160C de la constitution.
Toutefois, comme l'a dit René Longet, il ne s'agit pas simplement de «continuer» dans ce sens, mais bien d'infléchir la politique vers une application bien plus ferme de ces conceptions. C'est ce que nous attendons de la part du conseiller d'Etat en charge de ce département. En disant cela, je pense refléter les intentions de la majorité de ce Grand Conseil qui votera ce budget avec les réserves que je viens d'exprimer.
En résumé, la politique des SIG doit être dirigée par un débat politique que nous aurons bientôt. Le vote du budget qui aura lieu ce soir n'implique en aucune manière l'approbation d'un certain nombre d'éléments figurant dans les observations d'ordre général qui précèdent le budget et prévoient, par exemple, un contrat de prestations excluant, pour cinq ans, toute augmentation des tarifs électriques.
Une voix. Bravo !
M. Bernard Lescaze (R). Il est intéressant de constater qu'avec le budget des SIG on apprend chaque année de nouvelles choses. Je remercie M. Vanek de m'apprendre, ce soir, que le discours de M. Beer n'est pas le même que celui de l'an dernier. Pour moi, il ne m'apparaît pas aussi différent.
Bien entendu, le groupe radical votera le budget des SIG. M. Nissim nous dit qui a les moyens de payer plus cher, mais il ne répond pas aux questions de fond. Quels que soient les intérêts économiques légitimes de certains maraîchers, il faut aussi penser aux difficultés que peuvent rencontrer certaines familles face à la hausse constante des tarifs administrés des SIG, que ce soient ceux de l'eau, de l'électricité ou du gaz.
Sans anticiper sur le débat qui aura lieu le mois prochain, je désire dire fermement que les familles et les citoyens, notamment des communes suburbaines et de la ville, ne peuvent pas accepter sans réagir une hausse constante de ces tarifs, dont ils seraient les seuls à subir les conséquences, puisqu'un certain nombre de groupes d'intérêt souhaitent en exempter d'autres.
En revanche, la décision de la commission de l'énergie, soit que les contrats de prestations passés entre l'Etat et les SIG soient soumis au vote du Grand Conseil, est très intéressante. Je me réjouis que cette avancée démocratique - notamment par rapport à ceux qui réclament toujours un contrôle parlementaire dans d'autres domaines - s'applique aussi en matière de tarifs des SIG. De ce point de vue, je ne peux que souscrire à ces propos.
M. Olivier Vaucher (L). Depuis deux ou trois ans, la nouvelle direction des SIG nous offre la chance d'avoir une transparence totale sur les comptes et les budgets de ses services. C'est probablement grâce à cela que la majorité et l'unanimité de la commission ont pu se faire dans le vote de ce budget.
Comme je l'ai déjà dit en commission, le débat politique de fond pourra certes avoir lieu, mais il faut laisser aux SIG - à qui nous avons clairement fait comprendre qu'il fallait se remettre en question et revoir les principes de base de leur organisation, ce qu'ils ont fait jusqu'à maintenant avec une très grande célérité et une grande rapidité - le temps de nous faire parvenir le rapport qu'ils préparent sur la restructuration de cet immense service.
M. Claude Blanc (PDC). C'est la première fois que j'interviens dans un débat sur les SIG... (Protestations.)
M. Pierre Vanek. C'est la deuxième !
M. Claude Blanc. Oui, Monsieur Vanek, vous êtes très attentif, c'est la deuxième ! Je n'avais pas l'intention de le faire, mais le débat de ce soir devient tellement psychédélique... (Rumeurs.) ...qu'il faut tout de même que je dise ce que j'ai sur le coeur.
Une voix. Vas-y Claude !
M. Claude Blanc. On a commencé par parler du prix de l'eau. Il est clair que tous les fluides livrés par les SIG aboutissent quelque part et contribuent le plus souvent à la formation des prix de revient de toutes les industries qui les utilisent. Le prix de l'eau entre, pour une grande partie, dans la formation des prix de revient de l'agriculture. Tout le monde sait que, avec les nouvelles dispositions en matière de politique agricole fédérale, le revenu de l'agriculture baisse de plus en plus. En effet, il a baissé de 15% depuis 1990 et devra encore être réduit de 15% jusqu'en 2002 - date limite pour la mise en vigueur de la nouvelle loi sur l'agriculture.
Les corps de métiers, dont les revenus ne cessent de s'amenuiser, sont obligés de regarder d'un peu plus près tous les intrants dont ils ont besoin pour produire et toutes les charges auxquelles ils sont soumis et qui grèvent leurs prix de revient.
Le problème de la motion déposée sera discuté en janvier. Toutefois, on ne peut pas la passer sous silence aujourd'hui. En effet, on sait que l'augmentation du prix de l'eau est tout à fait nécessaire aux SIG, étant donné les investissements importants auxquels ils ont dû se livrer en matière de service des eaux, comme le changement complet de toutes les installations de pompage et de filtrage, afin que notre eau soit conforme aux normes fédérales en matière d'hydrobiologie. Cela ne fait de doute pour personne, mais les frais entraînés par ces investissements doivent être compris dans le prix de l'eau. Il n'y a pas de miracle !
Les SIG, dont je suis administrateur - je le redis sans honte - doivent s'efforcer de livrer les fluides à des conditions aussi acceptables que possible par ceux qui les utilisent dans la production et la revente de cette dernière. La santé économique de nos industries est à ce prix et nos SIG ont le devoir d'y contribuer. Ils peuvent le faire par la maîtrise de leurs propres coûts de production.
Ce matin, lors de la réunion du Conseil d'administration des SIG... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Le président. Excusez-moi, Monsieur l'orateur ! Je prie les personnes qui ont des conversations privées de bien vouloir les tenir en dehors de l'enceinte. Merci d'avance !
M. Claude Blanc. Mais ils ne me dérangent pas du tout !
Le président, s'adressant à l'assemblée. Veuillez respecter les propos de l'orateur autant que vous voudriez que l'on respecte les vôtres quand vous prenez la parole !
M. Claude Blanc. Ils ne me dérangent pas du tout, Monsieur le président; soyez sans crainte, je n'en ai pas peur !
Le président. Oui, mais moi, ils me dérangent, Monsieur !
M. Claude Blanc. Au conseil d'administration des SIG, notre excellent collègue, M. Vaissade, conseiller administratif de la Ville de Genève, nous a commenté quelques graphiques très significatifs commandés par les services financiers de la Ville de Genève, afin d'établir des comparaisons de salaires à qualifications égales entre les SIG, la Ville de Genève et l'Etat.
Nous n'avons pas été surpris de constater que les SIG égalent le Nirvana, en ce sens que, à qualifications égales, on y gagne entre 5 à 10% de plus qu'à la Ville de Genève et que, à la Ville de Genève, à qualifications égales, on gagne entre 5 et 10% de plus qu'à l'Etat de Genève.
Dans notre République, nous avons trois catégories principales de fonctionnaires : ceux des SIG, de la Ville de Genève et de l'Etat. Or il se trouve qu'il existe trois modes de traitement différents. Ces disparités ainsi engendrées sont un peu déraisonnables. Si les SIG veulent demeurer compétitifs - nous nous y engageons - et aider l'économie genevoise à l'être, il faudra qu'ils s'adaptent et essaient de trouver avec la Ville et l'Etat un modus vivendi, afin que les rétributions soient au moins à peu près égales entre ces trois administrations. Il faut que cesse cette concurrence qui consiste à offrir davantage de salaire pour obtenir du personnel. D'après ce que l'on a pu constater, les fonctionnaires de l'Etat ne sont pas à plaindre. La Ville et les SIG devraient donc faire un effort pour aplanir ces différences. Il faut que ces personnes sachent qu'elles participent à un effort économique général et que tout le monde doit y participer, même ceux dont les revenus baissent.
M. Chaïm Nissim (Ve). Monsieur Lescaze, si vous preniez de temps en temps une douche plutôt qu'un bain... (Rires.) ...vous pourriez économiser un facteur 10 sur votre facture d'eau et sur celle de votre mazout, la facture pour chauffer l'eau que vous utilisez pour votre douche. Ce faisant, vous économiseriez de l'argent tout en ayant la même prestation; vous seriez propre en sortant de votre douche en ayant dépensé dix fois moins d'argent ! Ainsi, cela vous permettrait d'accepter une légère hausse des tarifs de l'eau des SIG. En parlant ainsi, mon but n'est pas de mettre les familles sur la paille, mais de leur indiquer d'autres façons de se laver beaucoup moins onéreuses.
M. Pierre Vanek (AdG). M. Lescaze était presque émouvant lorsqu'il parlait des familles. Vous savez que la hausse moyenne des tarifs électriques prévue pour un ménage, et refusée l'an dernier, était de l'ordre de 2 F par mois. En comparaison de hausses bien plus importantes et de non-rentrées que subissent les familles, on peut dire que celle-ci est minime et que leur situation économique n'est pas péjorée par la menace d'une hausse du tarif électrique.
Rassurez-vous, je n'entrerai pas dans le débat salarial comparatif entre les SIG, la Ville et l'Etat - ce n'est pas l'heure de le faire. M. Blanc disait que le revenu des agriculteurs était à la baisse et parlait des corps de métiers se trouvant dans des difficultés financières et pour lesquels il y aurait éventuellement un effort à faire.
Certes, Monsieur Blanc, on peut parfaitement entrer dans le jeu d'une tarification politique à la tête du client, mais je vous signale que c'est contraire aux dogmes libéraux. Personnellement, je suis partisan de cette méthode. Mais si l'on suit votre idée, certains consommateurs d'électricité, comme, par exemple, la United Bank of Switzerland, pourraient, voire devraient, sans doute, payer plus cher leur consommation d'électricité, cela en raison des conditions économiques très favorables liées à cette branche d'activités. Je termine, et ne reprendrai plus la parole. (Soupirs de soulagement.)
M. Bernard Annen (L). L'un des critères essentiels de n'importe quelle activité économique ayant pour corollaire la création d'emplois est d'avoir suffisamment d'énergies et, entre autres, celles dont on parle ce soir. La constitution - à laquelle se réfèrent tant le rapporteur que M. Vanek ou d'autres - y consacre l'article 160C. A mon point de vue, l'article 158, le premier de ce chapitre de la constitution, est prépondérant. Il oblige les SIG à fournir et à distribuer l'eau, le gaz et l'électricité à Genève. C'est dire à quel point il ne nous est pas permis d'entraver la distribution de ces énergies.
Le fait que notre collègue ait formulé dans son rapport une sorte de condition, de chantage, consistant à essayer de faire appliquer, sans autre et complètement, l'article 160C par le Conseil d'Etat me déplaît. (M. Dominique Hausser éternue bruyamment.)
Une voix. Santé !
M. Bernard Annen. Ce n'est rien ! Le député Hausser a pour habitude d'interrompre ou d'essayer de déstabiliser ses collègues... Il devrait savoir que j'y suis peu sensible ! (Protestations.) Or, si vous conditionnez cet article 160C à l'approbation des SIG, vous refuserez leur budget et leur interdirez l'obligation constitutionnelle qu'ils ont de distribuer l'énergie aux citoyens.
Dans cet article que vous connaissez aussi bien que moi, Monsieur Longet, un certain nombre de dispositions sont tout simplement impossibles à appliquer. Je ne vous en citerai qu'une seule, celle du décompte individuel des frais de chauffage qui fait partie de l'article 160C. Si nous devions l'appliquer, cela impliquerait une hausse de 10, ou 15, voire 20% de plus d'investissement se répercutant sur les loyers à Genève.
Pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, depuis le temps que cet article a été voté - cela doit faire une douzaine d'années environ - ces dispositions n'ont-elles toujours pas été appliquées ? Tout simplement parce que les décideurs et vous, partis de l'opposition, n'osez pas trop y toucher, vous doutant bien du coût que cela entraînerait. Le principe selon lequel le plus grand utilisateur de chauffage est celui qui paie les plus grands frais est tout à fait libéral. Vous savez aussi que les plus grands utilisateurs sont les personnes âgées et les enfants, en particulier. A un certain moment, on ne peut pas choisir l'un ou l'autre des articles de la constitution, suivant ce qui nous intéresse, avant d'agir.
En vue de sauver des emplois, certains défendent les activités industrielles et le prix de l'eau qui est un des critères les plus importants du prix de revient dans l'industrie, mais d'autres parlent d'augmenter son prix, alors que, dans l'agriculture ou dans certains corps de métier, comme les maraîchers ou les secteurs de l'industrie du bâtiment, on s'inquiète d'une telle augmentation. Nous devons nous poser ces questions essentielles, afin de trouver un équilibre.
J'apprécie mon collègue Nissim, dont les idées un peu farfelues font avancer le «schmilblik» - si vous me passez l'expression - mais de là à déterminer une importante augmentation du prix de l'eau en se basant sur la problématique des douches, il y a un pas qui est loin d'être franchi. S'il veut passer devant le peuple pour lui demander de ne plus se laver, cela reste son problème et non le mien.
Par contre, je me sens très concerné par la question des emplois et celle de l'énergie, dont ce canton a besoin comme d'une denrée vitale. Mesdames et Messieurs les députés, nous devons avoir le droit à l'énergie. Comme le docteur Hausser vient de vous le dire, il me reste encore cinq bonnes minutes de temps de parole. Par conséquent, il patientera et m'écoutera.
Le président. Il vous reste deux minutes, Monsieur le député !
M. Bernard Annen. Mais cela me suffira et M. Hausser me supportera encore deux minutes. L'énergie, quelle qu'elle soit, est un droit et doit être distribuée en respectant l'équilibre entre le besoin qu'elle requiert et le prix à payer pour... (L'orateur hésite, l'assemblée rit.) ...se la procurer. Ne vous inquiétez pas, Monsieur Hausser, je modifierai mon intervention dans... (L'orateur rit.) ...le Mémorial !
Monsieur le rapporteur, prenez vos responsabilités, votez ce budget ou refusez-le, mais, je vous en supplie, ne faites pas de chantage au budget !
Une voix. Très bien !
M. Pierre-Alain Champod (S). Dans le groupe socialiste, deux de nos collègues, Pierre-Alain Cristin et Christian Brunier sont employés des SIG. Par conséquent, ils n'ont pas participé au débat et ne voteront pas. (Applaudissements.)
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat vous remercie de la confiance que vous lui avez témoignée en commission en votant, à l'unanimité, le budget des SIG. Nous sommes sensibles à la confiance dont nous bénéficions pour commencer notre mandat.
Cet accord en commission sur le budget des SIG n'a pas empêché le déroulement de ces débats intéressants et passionnés au Grand Conseil qui accompagnent régulièrement la présentation des budgets des SIG. Vous constaterez que l'on peut être unanimes quant au fond sans perdre le goût de la dispute, dans le sens le plus élevé de ce terme, naturellement.
Ce serait toutefois une erreur d'opposer l'article 160C de la constitution à l'article 158, car ces dispositions se complètent. L'article 160C concerne la conservation de l'énergie, c'est-à-dire les économies d'énergie, le développement prioritaire des sources d'énergies renouvelables et le respect de l'environnement. Il s'inscrit dans le cadre de l'approvisionnement cantonal en énergie, donc dans les tâches des SIG, énumérées à l'article 158 de la constitution, celles de fournir, à tous les citoyens de ce canton, de l'eau, de l'électricité, du gaz, de la chaleur et, demain, des informations.
Vous avez voté le budget des SIG en assortissant votre vote de deux conditions. Le débat de ce soir a montré que ces deux conditions étaient plutôt deux réflexions, puisque chaque groupe s'est d'ores et déjà engagé à voter le budget.
Le Conseil d'Etat répondra très volontiers à ces deux observations. La première porte sur le respect de l'article 160C de la constitution. Vous avez entendu le discours de Saint-Pierre. Le Conseil d'Etat s'est référé de façon très explicite à cette obligation constitutionnelle qui, bien entendu, nous concerne tous, ainsi que les SIG, au double titre d'établissement autonome et chargé de fournir l'énergie dans notre canton, directement visé par cette disposition constitutionnelle.
Dans ce discours, il était question de l'important processus de réflexion que mènent les SIG quant à leur avenir. Aujourd'hui se profile à l'horizon la libéralisation des marchés de l'énergie, tant celui de l'électricité - c'est la première libéralisation que les SIG devront affronter - que celui du gaz qui a déjà fait l'objet d'une norme européenne et qui, très vraisemblablement, fera bientôt l'objet d'une législation suisse.
Les SIG doivent mener leur propre réflexion, en toute indépendance, sur ce processus de libéralisation. Il n'est pas question que le Conseil d'Etat leur impose une réflexion sur leur devenir, car ce dernier n'est qu'une autorité de tutelle. Les SIG soumettront, ensuite, leur rapport qui pourrait entraîner des modifications constitutionnelles au Conseil d'Etat et enfin, à vous, Mesdames et Messieurs les députés.
Cependant, les réflexions en cours doivent englober les fondements de la politique cantonale en matière d'énergie. Ces prochains mois, nous engagerons, avec l'office cantonal de l'énergie et les SIG, des discussions qui permettront de définir les rôles des deux partenaires en matière de politique de l'énergie du canton; l'Etat, d'une part, et les SIG, d'autre part. Dans le cadre de ces discussions, nous veillerons à ce que chacun continue l'action en matière de politique de l'énergie, comme vous nous y invitez dans votre rapport sur le projet de budget.
Dans ce rapport, vous vous référez à l'approbation du contrat de prestations par le Grand Conseil ou, en tout cas, à la réserve des droits du Grand Conseil quant à l'approbation du contrat de prestations. Effectivement, la formulation que vous avez choisie - celle de réserver les droits du Grand Conseil - est une formule particulièrement heureuse. En effet, il convient de ne pas se méprendre sur les termes. Lorsqu'on parle de contrat de prestations en ce qui concerne les SIG, cela n'a rien à voir celui des TPG. Ce contrat recouvre une série d'engagements pris par une entreprise en échange d'une enveloppe. Pour les SIG, il n'y a rien de tel. Ils sont financièrement autonomes, puisque leurs ressources proviennent des tarifs des différentes énergies qu'ils distribuent et leur permettent ainsi de mener leurs différentes activités. Ce que l'on a improprement qualifié de contrat de prestations n'est rien d'autre qu'un certain nombre de conditions négociées entre le Conseil d'Etat et les SIG, afin que ces derniers obtiennent des garanties quant à leurs tarifs ou, en tout cas, un cadre dans lequel ils ont pu obtenir une première augmentation de 10 centimes des tarifs de l'eau et un cadre dans lequel ils indiquent les raisons pour lesquelles ils souhaiteraient voir les tarifs de l'eau augmenter encore à deux reprises de 10 centimes ces deux prochaines années. C'est tout et cela n'est pas, à proprement parler, un contrat de prestations.
Cela étant, il est tout à fait nécessaire que ce document - soumis au Conseil d'Etat par les SIG - soit également soumis au Grand Conseil. Pour une prochaine séance du Grand Conseil, nous déposerons un rapport du Conseil d'Etat qui contiendra ce que l'on a improprement qualifié de contrat de prestations et permettra ainsi d'ouvrir un débat au sein du Grand Conseil sur les activités des SIG.
A vrai dire, ce ne sont pas tant les conditions auxquelles l'augmentation des tarifs de l'eau a été soumise qui rendent ce document intéressant, mais, bien plutôt, cet immense travail de description auquel les SIG se sont attachés sur leurs différentes activités, métiers et projets. Il est souhaitable et nécessaire que vous soyez saisis, Mesdames et Messieurs les députés, de cette synthèse extrêmement riche et de cette mine de renseignements sur l'activité des SIG qui se trouvent dans ce rapport. C'est ce que fera le Conseil d'Etat, dès une prochaine séance du Grand Conseil.
Encore un mot sur une observation faite lors des débats, et dont je parlerai plus longuement demain, en répondant à M. Beer. Il s'agit des effets de la hausse des tarifs de l'eau, notamment sur les milieux des maraîchers. Sur ce point, un certain nombre de discussions ont déjà eu lieu entre les SIG et les associations de maraîchers. Un certain nombre de craintes que faisait naître cette augmentation des tarifs de l'eau ont pu - si ce n'est être apaisées - du moins trouver un certain nombre d'explications et de réponses. Aujourd'hui, les milieux des maraîchers sont beaucoup moins préoccupés face à cette hausse des tarifs de l'eau qu'ils ne l'étaient avant ces premières rencontres. Celles-là ont débouché sur un certain nombre d'engagements des SIG, notamment celui d'instaurer une tarification qui tienne compte des heures creuses et pleines permettant des tarifs préférentiels durant les heures de nuit. Les dispositions trouvées ont été très bien accueillies par les milieux professionnels concernés. Quelques autres points ont été relevés lors de ces discussions. Je les évoquerai dans la réponse que j'apporterai demain à l'intervention de M. Beer.
Au sujet des dates de vote du budget, le Conseil d'Etat fait diligence pour vous transmettre le budget des SIG quand il le reçoit... Malheureusement, il ne peut pas vous le transmettre avant que les SIG ne le lui ai communiqué ! Quant à la date à laquelle les SIG communiquent leur budget, elle dépend de la marche de cette entreprise, de l'engagement d'un certain nombre d'administrateurs qui sont dans cette salle - puisqu'ils ont été désignés par le Grand Conseil pour représenter le Grand Conseil auprès des SIG - et vos collègues du Grand Conseil sauront se faire l'écho auprès du Conseil d'administration des SIG de votre souci d'obtenir le budget des SIG plus rapidement.
Fort de ces quelques explications, je me réjouis de votre exceptionnelle approbation unanime du budget des SIG et je vous donne rendez-vous pour le débat sur les comptes.
Le président. Celles et ceux qui approuvent l'entrée en matière sont priés de le faire en levant la main... (M. Vaucher lève la main pour demander la parole.) Nous sommes en vote, on ne prend plus la parole !
M. Olivier Vaucher. Il s'agit d'une motion d'ordre !
Le président. Je vous écoute !
M. Olivier Vaucher (L). Je désire savoir sur quoi nous votons, car, dans ce rapport, manque le budget des SIG. Le projet de loi proprement dit n'est pas dans le rapport.
Le président. Le projet de loi a été distribué à la précédente séance, Monsieur le député. Vous l'aviez en main et vous ne l'avez pas pris avec vous, mais il est vrai qu'il n'était pas joint au rapport.
M. René Longet (S), rapporteur. Il s'agit d'une erreur technique, mais je vous rappelle que ce projet n'a absolument pas été modifié. Il date du 19 novembre 1997. Le rapport a été déposé deux semaines après et ne comporte aucun amendement. Vous pouvez donc considérer le projet de loi 7770 en sa forme actuelle.
Une voix. C'est inadmissible, ce n'est pas correct !
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
approuvant les budgets d'exploitation et d'investissementdes Services industriels de Genève pour l'année 1998
LE GRAND CONSEIL,
vu l'article 160, alinéa 1, lettre a, de la constitution genevoise, du 24 mai 1847;
vu l'article 37, lettre a, de la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève, du 5 octobre 1973,
Décrète ce qui suit:
Article 1
Le budget d'exploitation des Services industriels de Genève est approuvé conformément aux chiffres suivants:
F
a) recettes: 728 726 800;
b) dépenses: 730 029 800;
c) résultat: -1 303 000.
Art. 2
Le budget d'investissement des Services industriels de Genève, s'élevant à 103 701 000 F, est approuvé.
Art. 3
La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1998.
5. Déclaration du Conseil d'Etat.
M. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat. Permettez-moi une remarque préliminaire... Quand vous dites Altesse à un ambassadeur, celui-ci est flatté. Quand vous dites Excellence à un prince régnant, vous donnez la pénible impression de dégager une forte ambiance de terroir. Que M. le président du Grand Conseil veuille bien pardonner à nos services une promotion momentanément prématurée, qu'il accepte toutes nos excuses pour notre courrier de ce jour.
J'en viens à la déclaration du Conseil d'Etat que j'ai l'honneur de lire devant vous :
Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le premier débat budgétaire de la nouvelle législature illustre combien l'art de gouverner est difficile. Avec six rapports de partis et sans aucun rapport de majorité, comment obtenir le vote d'un budget devant permettre de servir les prestations sociales, de verser les salaires et de payer les factures ?
Votre Grand Conseil, cependant, ne peut faire autrement que de trouver une majorité, s'il est attaché à la pérennité de l'Etat, en lui donnant les moyens de faire face à ses obligations sociales et d'employeur.
Pour sa part, le Conseil d'Etat s'est fixé un double objectif institutionnel et financier.
L'objectif institutionnel est clair. Pour obtenir le vote du budget, le Conseil d'Etat, à majorité d'Entente, et le Grand Conseil, à majorité d'Alternative, doivent nécessairement aboutir à une transaction.
L'objectif financier est tout aussi clair. Pour ne pas dégrader davantage la situation des finances publiques, le déficit du budget 1998 doit rester fixé à 453 millions.
Afin d'atteindre ce double objectif, le Conseil d'Etat a rencontré, ces derniers jours, le Bureau du Grand Conseil et les chefs de tous les groupes parlementaires. En outre, il a reçu les représentants des organisations du personnel. Ma collègue, Mme la conseillère d'Etat Micheline Calmy-Rey, vous exposera tout à l'heure le résultat de ces entretiens, en ce qui concerne les recettes et les dépenses, les impôts et les subventions.
En ce qui concerne les dépenses relatives au personnel de l'Etat et des établissements publics, le Conseil d'Etat a décidé, au titre de la continuité des institutions, de respecter l'accord passé avec les syndicats. Il respectera donc intégralement cet accord qu'il n'entend, en aucune manière, remettre en cause. Concrètement, cela signifie qu'il y aura en 1998 une double annuité et une double progression de la prime de fidélité, mais qu'il n'y aura ni indexation ni réduction des effectifs. En proposant que l'effectif 1998 soit identique à l'effectif 1997, le Conseil d'Etat entend faire un choix clair, celui de privilégier l'emploi à l'indexation.
Dans ces conditions, le Conseil d'Etat est donc convaincu qu'au terme des débats une majorité du Grand Conseil votera le projet de budget 1998, avec un déficit de 453 millions.
Mme Micheline Calmy-Rey (S), conseillère d'Etat. Je tiens à remercier le président du Conseil d'Etat qui a posé le cadre de notre proposition.
Nous savons que nous sommes confrontés à une mutation en même temps qu'à une crise. Nous avons donc à construire de nouvelles régulations pour une société qui a profondément changé.
Dans ce contexte, et pour atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés en termes d'emploi et de cohésion sociale, nous rencontrerons, début février, les représentants de la fonction publique dans le but d'arriver à un accord global pour la législature, accord qui portera sur les effectifs, la rémunération, le partage du travail et la réforme de l'Etat. De la sorte, les chiffres inscrits dans les budgets successifs seront le résultat d'accords négociés et conclus.
Le Conseil d'Etat a, en outre, confié à trois personnalités reconnues du canton une évaluation du déficit du compte de fonctionnement et sa mise en perspective par rapport à une situation économique peu courante, et ce avec un délai à fin février. Ces personnes sont Mme Gabrielle Antille, professeur d'économie, M. Marc Fues, directeur de la Banque cantonale, et M. Marc Bétemps, expert-comptable.
L'intention est triple :
- favoriser le développement des ressources de l'Etat, dans un contexte où les budgets sociaux croissent sous l'effet de coûteux ajustements structurels pour l'emploi;
- mesurer les conséquences du déficit sur l'emploi et l'activité économique;
- rétablir la confiance.
Cela nous permettra de nous tourner vers l'avenir et, au-delà des divergences idéologiques, de prendre des décisions sur des bases que nous souhaitons incontestées.
A court terme, il convient d'examiner dans quelle mesure le projet de budget 1998 est politiquement acceptable par une majorité de ce parlement, l'objectif du Conseil d'Etat étant d'avoir un budget, en conclusion de cette séance.
Pour nous, en effet, l'essentiel est de pouvoir disposer d'un instrument budgétaire qui fixe le cadre et les règles. Sans cela, il n'y a ni stabilité, ni confiance, ni anticipation possibles.
Le projet de budget présenté par le précédent Conseil d'Etat montre un déficit de 453 millions de francs après quelques correctifs et le retrait du projet de retraite des femmes âgées de 62 ans. Sur cette base se greffent des propositions d'amendements touchant aux subventions, la suppression de la progression à froid, des investissements supplémentaires pour les TPG et le vote, en commission, de deux projets de lois apportant des recettes supplémentaires.
Or, ce budget ne trouve pas de majorité. L'indexation et le rétablissement des effectifs ne peuvent pas être proposés par le parlement sans couverture financière, bien qu'ils conditionnent, du moins partiellement, l'acceptation du budget par l'Alternative.
De leur côté, les députés de l'Entente sont inquiets de voir s'aggraver le déficit, ce qui serait le cas si le Conseil d'Etat faisait siennes les corrections touchant aux effectifs et à l'indexation. D'ailleurs, un référendum est d'ores et déjà annoncé par le mouvement «Halte aux déficits», si ce cas de figure devait se concrétiser.
Dans ce contexte, il appartient donc au Conseil d'Etat de formuler des propositions pouvant satisfaire une majorité de députés.
Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat prend le déficit très au sérieux. Il est chronique sur la durée 1994/1998. Le canton s'endette pour couvrir ses dépenses courantes et transfère sur les contribuables futurs la charge du remboursement de la dette accumulée. La situation n'est pas satisfaisante après deux plans de redressement pluriannuels. On nous laisse, aujourd'hui, entrevoir des perspectives économiques plus favorables, mais le rééquilibrage de nos finances demandera plus qu'un retour de croissance, tant il est vrai qu'une part du déficit est structurelle et nécessite des mesures particulières.
Une politique rationnelle d'assainissement des finances publiques doit cependant tenir compte de quelques constats : dans la plupart des secteurs de dépenses, il n'y a plus de marge de manoeuvre si l'on se refuse à affaiblir l'attrait de notre place économique et qu'au contraire on cherche à l'augmenter, et si l'on se refuse également à augmenter le potentiel des conflits sociaux.
Permettez-moi de rendre hommage à mon prédécesseur dont les efforts, pour rééquilibrer les finances cantonales, ont été importants. En effet, durant la législature 1993/1997, les dépenses publiques ont connu une croissance moyenne annuelle plus faible que celle du revenu cantonal. Sans les facteurs extraordinaires dus à la mauvaise conjoncture, cet écart aurait été encore plus marqué.
Dans le projet de budget 1998, les charges de fonctionnement sont inférieures de 50 millions à celles figurant dans les comptes de 1996, et de 35 millions par rapport au budget de 1997.
La marge de manoeuvre du Conseil d'Etat est encore doublement limitée du côté des dépenses. D'une part, l'impact de la situation économique sur les finances publiques est largement sous-évalué. Les dépenses en faveur des chômeurs et des chômeuses, de même que les dépenses sociales se sont fortement accrues. Cette croissance a moins à voir avec le développement des prestations sociales qu'avec une augmentation du nombre des personnes dans le besoin et nous sommes d'avis que diminuer les dépenses sociales est humainement inacceptable et, au surplus, économiquement inopportun, ces dernières jouant un rôle lorsqu'il s'agit de soutenir la consommation.
D'autre part, le poids de l'assainissement a été porté par la fonction publique : plus de 1,5 milliard de francs en cinq ans du fait de la non-indexation, du blocage des annuités et primes de fidélité, de la réduction de deux mille postes de travail sur la même durée, ce qui n'est pas sans effet sur le taux de chômage cantonal.
En tout état de cause, le Conseil d'Etat n'entend pas poursuivre dans la voie des restrictions d'effectifs.
Enfin, Mesdames et Messieurs les députés, le rééquilibrage doit provenir aussi d'une action sur les recettes. Dans le discours en la cathédrale Saint-Pierre, le Conseil d'Etat s'est prononcé pour une stabilité, s'agissant de l'imposition des personnes physiques. Par conséquent, il n'entre pas dans ses vues d'augmenter les impôts des ménages. Il n'en reste pas moins que le rendement de l'impôt peut être amélioré dans le cadre de la loi actuelle et par un fonctionnement plus efficace de l'administration fiscale elle-même. C'est la raison pour laquelle je souhaite augmenter significativement les effectifs qui lui seront attribués en 1998.
Quant à vouloir, comme le proposent certains, augmenter sans autre la dotation des recettes, permettez-moi de faire remarquer que ce projet de budget contient quelques événements budgétaires uniques, pas simples à réaliser, comme une meilleure gestion des débiteurs ou la plus-value provenant de la vente d'actions Swissair, par ailleurs toujours dans le patrimoine administratif de l'Etat. Ces événements corrigent la dotation des recettes à la hausse de 31 millions de francs net. Il me semble, par conséquent, inopportun de corriger encore dans le même sens.
Enfin, revoir les recettes à la hausse ne peut, en aucun cas, se justifier par une évolution économique plus favorable que celle, anticipée, lors de l'élaboration du budget en septembre de cette année. La prudence s'impose d'autant plus que la rubrique des recettes affiche des montants supérieurs de quelque 30 millions aux estimations de la direction générale des finances et que les résultats estimés de 1997 montrent, en regard du budget, une surbudgétisation de la production des impôts cantonaux. En d'autres termes, les comptes 1997 risquent d'être plus mauvais que prévu.
Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat a fait sienne une priorité : c'est celle de l'emploi. Conscient des liens entre politique budgétaire et emploi, il entend modifier le projet de budget 1998 en rétablissant les effectifs de la fonction publique de cent nonante-neuf postes et en prenant à sa charge les amendements proposés par la commission des finances et les partis aussi bien de l'Alternative que de l'Entente. Vous trouverez les propositions du Conseil d'Etat résumées dans un document déposé sur vos tables. Elles sont financées de la façon suivante :
- cent cinquante-six postes concernant les établissements publics médicaux sont portés à la rubrique de la direction du personnel des hôpitaux;
- quarante-deux postes, pour un coût de 5 millions de francs, sont portés en augmentation des charges, à la rubrique «Office du personnel du département des finances».
Ces dotations de postes ne seront pas diffusées dans les services, mais centralisées et attribuées par le Conseil d'Etat, conformément à ses priorités.
Une partie des amendements portant sur les subventions pouvant être supportée par des corrections de subventions et par le droit des pauvres, le déficit est ainsi maintenu.
Pour autant que les projets de lois soient votés tout à l'heure et compte tenu de la suppression de la progression à froid et des frais d'emprunt liés à l'augmentation des investissements TPG, la situation du déficit se présente comme suit : 453 millions de francs équilibrés avec 6,7 millions de recettes nouvelles et autant de dépenses supplémentaires nettes.
Le projet de budget amendé respecte les accords signés par le précédent gouvernement avec la fonction publique en ce qui concerne la reprise des annuités, la reprise de la progression de la prime de fidélité et le versement des mécanismes bloqués en 1997. Il annule, en outre, la mesure de réduction des effectifs.
Quant au projet de loi, visant à rendre obligatoire la retraite des femmes de 62 ans, il a été retiré.
Je tiens à ajouter que les recettes ne sont pas suffisantes aujourd'hui pour que le Conseil d'Etat entre en matière sur deux demandes émanant des représentants de la fonction publique : celle de l'indexation et celle du rétablissement de la participation de l'Etat à l'assurance-accidents non professionnelle, le tout pour un montant de 52 millions de francs.
Qu'il me soit enfin permis de livrer quelques réflexions en guise d'épilogue provisoire.
Le Conseil d'Etat sortant a présenté son projet de budget le 3 septembre dernier. A elle seule, cette date illustre la difficulté qu'il a éprouvée à l'établir. Que dire, alors, des huit jours dont le nouveau gouvernement a disposé pour élaborer collégialement une proposition de conciliation qui tienne compte des souhaits des uns et des autres, mais aussi des réalités incontournables des finances cantonales ?
Le Conseil d'Etat a pris sur lui de fournir un effort de discipline. Il vous convie à faire de même. Nous n'avons pas l'ambition d'avoir produit la panacée du siècle. Personne ne peut être extrêmement satisfait de ce que nous proposons. Néanmoins, nous avons l'intime conviction d'avoir pratiqué une écoute attentive de tous et une répartition équitable des sacrifices.
A vous de nous dire, d'ici demain soir, si nous avons réussi. A vous de faire en sorte que nous ayons un budget. Je vous remercie. (Applaudissements du groupe socialiste.)
M. Bernard Clerc (AdG). Rassurez-vous, je n'entends pas ouvrir le débat sur le budget qui se déroulera demain matin et qui nous permettra de donner notre point de vue sur les orientations qui viennent d'être définies.
Afin que nous puissions discuter de ce budget en toute connaissance de cause, il importe de disposer d'un certain nombre d'éléments d'information relatifs aux recettes.
C'est pourquoi je demande au Conseil d'Etat de nous fournir ces données pour la discussion de demain qui portera sur trois points, dont le premier concerne la réorganisation de l'administration fiscale.
Madame la cheffe du département, quand vous siégiez en notre compagnie, vous avez dénoncé à maintes reprises les dysfonctionnements de l'administration fiscale. Dès lors que des postes sont affectés pour 1998 et que vous-même en souhaitez d'autres, à juste titre, pour améliorer le rendement de cette administration, pourriez-vous nous indiquer à combien vous évaluez les rentrées fiscales supplémentaires dues à ces réorganisations et à ces acceptations de postes ?
Le deuxième point concerne la loi sur l'exonération des droits d'enregistrement lors d'achats de biens immobiliers dont on nous a dit, lors du vote, qu'elle diminuerait les recettes d'environ 7 millions. Cette loi étant applicable depuis le mois d'août, des diminutions fiscales, pour l'exercice 1997, sont entrées en vigueur au cours de ce dernier trimestre. Par conséquent, j'aimerais connaître les recettes fiscales qui pourraient être escomptées si cette loi venait à être abolie, auquel cas les personnes concernées seraient obligées d'acquitter les émoluments.
Le troisième point est relatif aux taxes dues par les cafetiers-restaurateurs, et néanmoins boycottées par eux durant un certain temps. M. Ramseyer a attendu ce mois de décembre pour commencer à les relancer. Je présume que les sommes encaissées ne seront pas portées sur l'exercice 1997. Par conséquent, je vous prie de nous indiquer quel montant vous prévoyez de porter sur l'exercice 1998.
La connaissance de ces éléments nous permettra d'entamer une discussion extrêmement précise sur les dépenses et les recettes.