République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 27 mai 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 7e session - 19e séance -autres séances de la session
No 19
Vendredi 27 mai 1994,
soir
Présidence :
M. Hervé Burdet,président
La séance est ouverte à 17 h 15.
Assistent à la séance: MM. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat, Olivier Vodoz, Jean-Philippe Maitre et Philippe Joye, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Guy-Olivier Segond, Gérard Ramseyer et Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat, ainsi que MM. Pierre Ducrest, René Ecuyer, Bénédict Fontanet, Gilles Godinat et Laurent Rebeaud, députés.
3. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Néant.
c) de propositions de résolutions;
Le président. La proposition de résolution suivante est parvenue à la présidence :
Elle figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.
d) de demandes d'interpellations;
Le président. Les demandes d'interpellations suivantes sont parvenues à la présidence :
Cosignataires : Anne Briol, Andreas Saurer, Sylvia Leuenberger, Liliane Maury Pasquier, Sylvie Châtelain.
Cosignataires : Micheline Calmy-Rey, Christine Sayegh, Maria Roth-Bernasconi, Liliane Maury Pasquier, Liliane Charrière Urben.
Cosignataires : Claire Torracinta-Pache, Dominique Hausser, Sylvie Châtelain, Laurent Moutinot, Fabienne Blanc-Kühn.
Ces interpellations figureront à l'ordre du jour d'une prochaine séance.
e) de questions écrites.
Néant.
La commission de l'aménagement, sous la présidence de Mme Martine Roset puis de M. Hervé Dessimoz, a examiné la proposition de motion citée en titre, les 30 mars et 13 avril 1994.
MM. Philippe Joye, conseiller d'Etat, Georges Gainon, chef de la division des plans d'affectation, Jean-Chr. Pauli, juriste, assistaient à ces deux séances, et M. Raymond Schaffert à la première d'entre elles.
Constat préliminaire
Cette motion, déposée et renvoyée en commission de l'aménagement il y a plus de trois ans, n'a pas été traitée par cette dernière faute d'informations ou d'éclaircissements à propos de l'affectation des terrains et en ce qui concerne les besoins exprimés par les organisations internationales.
Il s'avère par conséquent nécessaire, préalablement à toute planification d'aménagement, de dresser l'inventaire des données et celui des besoins. Parmi les données figurent notamment, outre les bâtiments existants à conserver: la station des tramways de la ligne 13, les projets d'extension de l'OMPI et de l'UIT, ainsi que l'impérative affectation universitaire de la campagne Rigot. Parmi les besoins, retenons pour l'instant outre les programmes des projets ci-dessus mentionnés: celui de la célébration du 50e anniversaire des Nations Unies qui aura lieu l'an prochain, les affectations possibles de la campagne Cramer et le contenu de la «Maison des droits de l'homme» offerte par la Confédération.
Mais il reste encore à connaître les besoins futurs de celles des 36 institutions internationales qui pourraient être intéressées et à établir les conditions des baux à venir. La concurrence d'autres villes comme Vienne, Paris, Londres ou Bonn incite à réduire les charges immobilières imparties aux diverses organisations.
Il ressort de ce constat préliminaire qu'il reste à entreprendre un important travail préparatoire avant d'établir le programme d'aménagement du secteur, qui servirait de base à l'élaboration d'un projet de plan localisé de quartier. Cette dernière étude pourrait faire l'objet d'un concours international que l'Etat pourrait organiser en collaboration avec la ville de Genève et la FIPOI.
Travaux de la commission
Les membres de la commission ont abondamment questionné le chef du département des travaux publics et de l'énergie de même que ses collaborateurs à propos non seulement du travail accompli au cours de ces dernières années mais encore des tâches d'inventaire, d'analyse et de programmation qui restent à entreprendre.
Il est ressorti de ce dialogue la nécessité de compléter les invites de la motion conformément aux remarques et voeux exprimés tant par les députés que par les représentants de l'exécutif et de l'administration.
Une sous-commission fut désignée afin d'élaborer la nouvelle mouture de la motion. L'une des auteurs de celle-ci prit part à ce travail.
Il ressort de cette concertation un texte modifié que la commission à l'unanimité vous suggère, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir adresser au Conseil d'Etat.
ANNEXE
Débat
M. René Koechlin (L), rapporteur. Permettez-moi de citer l'éditorial dû à la plume d'une des journalistes qui suit régulièrement nos débats et qui dit à propos de la place des Nations dont il est ici question, je cite : «Longtemps, Genève a témoigné à son secteur international le même détachement qu'une chatte envers ses petits devenus grands. Qu'ils vivent leur vie et qu'ils me laissent vivre la mienne ! L'exemple le plus flagrant de cet abandon affectif étant la place des Nations : on aurait pu en faire un lieu significatif, architecturé à la gloire de la diplomatie multilatérale et de la concertation internationale. C'est resté un carrefour sans âme ni allure, les concours d'architecture lancés dans le passé s'étant enlisés dans l'indifférence générale.».
Eh bien, on peut dire que la commission de l'aménagement n'est pas restée indifférente au problème de la place des Nations. Elle l'a prouvé en apportant à la motion qui lui était soumise des amendements qui en renforcent la teneur et qui doivent être utiles à la poursuite de l'action et, nous l'espérons, à l'aboutissement d'un projet cohérent relatif à l'aménagement de ce lieu privilégié de notre canton.
C'est pourquoi la commission d'aménagement vous invite à voter à l'unanimité la motion qu'elle vous propose.
M. Jean-Pierre Lyon (AdG). Je ne remets pas en cause l'excellent rapport de la commission de l'aménagement.
Je veux simplement rappeler certaines réalités. En page 2, le rapporteur rappelle certaines réalités par rapport à des ville concurrentes comme Vienne, Paris, Londres ou Bonn. Ces villes sollicitent, en effet, la présence de ces organisations internationales. Mais nous, faisons-nous tout pour l'obtenir ? La Ville de Genève, par exemple, vient de voter un aménagement pour l'organisation internationale des télécommunications qui doit construire un bâtiment. Vous avez fait des propositions, mais avec de telles restrictions - fidèles en cela aux idées de Genève en la matière - que le projet a été retardé de plus de deux ans et demi. Le rapport veut montrer une unité, mais il ne signale pas cela.
Lorsque la Ville de Genève devra participer aux frais, vu les reports qu'exerce l'Etat sur les communes, il y a aura des grincements de dents. Il ne faudra pas dire, ensuite, que tout le monde est favorable à la venue des organisations internationales, alors que, dans le même temps, certains mettent des freins aux mesures d'encouragement.
M. Michel Ducret (R). Cette motion, complétée judicieusement en commission de l'aménagement, vient à la rencontre des préoccupations de notre groupe.
Que faut-il faire ? Il faut montrer notre détermination pour accueillir encore mieux les diverses organisations internationales qui ont contribué à la réputation de Genève dans le monde; détermination pour renforcer l'image de cette Genève qui représente aussi une part de notre économie. M. Lyon a raison de le relever : il y a de la concurrence. Mais on aimerait que ce même raisonnement s'applique à toutes les organisations internationales, je pense ici à la maison de l'Europe; détermination, également, pour renouveler notre urbanisme, l'aménagement du territoire dans une perspective ouverte et prospective et non plus conservatrice et passéiste - ce sont des éléments nécessaires à une relance dont chacun pourra bénéficier - détermination d'ouverture en ouvrant un concours international d'idées avec, si possible, un programme pas trop précis pour ne pas briser les imaginations.
Merci d'avance au chef du département d'en tenir compte. Certes, ce n'est qu'un début, mais ce lieu est symbolique. Il est concerné par les grands projets qui modifieront peu à peu notre environnement. Ce projet devra aussi intégrer certains problèmes de circulation privée, comme la traversée de la rade, et collective, comme le terminus du futur tram Cornavin/Nations, les liaisons avec de nombreuses autres lignes, du Park & Ride, etc. En outre, est-il souhaitable que ce concours tienne compte de la surface de la campagne Rigot, don de la Fondation Rockfeller à l'université de Genève dans le but d'y implanter des équipements universitaires et internationaux ?
Genève ne peut plus se contenter de ce carrefour non efficient, décoré de quelques aubettes pour attendre à l'abri des transports publics dispersés sur sa surface. Ce lieu est le centre de la Genève internationale, son image. Sans plan d'ensemble, on laisse construire des bâtiments à la hâte, mal étudiés, «inintégrables» dans un aménagement futur, telle la pseudo tour de six étages de l'extension de l'UIT, bazardée en catastrophe au nom des nécessités du moment, alors que cette demande traînait depuis sept ans dans les tiroirs du département des travaux publics !
J'ajouterai, pour conclure, que cette proposition va à la rencontre des intentions du Conseil municipal de la Ville de Genève qui vient d'accepter la motion 1182 demandant un schéma directeur pour l'ensemble du périmètre des organisations internationales et que, en 1990 déjà, le magistrat de cette commune alors en charge de l'aménagement, Michel Rossetti, avait demandé un aménagement de ce secteur Nations au Conseil d'Etat, lequel, à ce jour, n'a toujours pas répondu.
Toutes ces considérations conduisent le groupe radical à accepter cette proposition et à vous inviter à faire de même.
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. L'article de la journaliste parlait d'une chatte et de ses chatons. Eh bien, le matou du DTPE se préoccupe beaucoup de la place des Nations !
J'aimerais évoquer cinq objets.
1) Nous cherchons à trouver un aménagement provisoire de qualité pour le cinquantième anniversaire. La collaboration avec la Ville de Genève sera indispensable, et il me semble que, pour l'instant, nous sommes sur la bonne voie. Pour cela, il faut évidemment que les magistrats de la Ville acceptent d'être un peu plus souples que ce que certaines de leurs déclarations récentes pourraient laisser croire.
2) J'ai déjà évoqué le programme possible autour de la place des Nations. Il y a la Maison dite du Sud, pour les quarante pays les moins favorisés, qui serait financée par le canton, et la Maison des droits de l'homme, qui serait financée par la Confédération.
3) Ce point est lié à la remarque de M. Ducret au sujet de la Fondation Rigot. Des séances ont eu lieu à ce sujet, dont la dernière a été extrêmement fructueuse. Nous sommes tombés d'accord avec l'université de Genève, qui représente les intérêts de la Fondation Rigot, s'agissant du legs Rockfeller sur lequel se trouve aussi le collège Sismondi, pour une mise à disposition des terrains selon un droit de superficie de nonante-neuf ans, par exemple; les modalités ne sont pas encore fixées.
Un élément nouveau et très positif est apparu : le recteur Weber m'a déclaré qu'il ne s'opposerait pas à conserver le collège Sismondi sur le terrain, ce qui est très important pour nous. En effet, cela nous tire - si j'ose dire - une épine du pied, car nous aurions eu beaucoup de peine à recaser ce collège. Nous prévoirions également, au front de la place des Nations, une antenne qui pourrait être consacrée à l'université, pour honorer la place importante qui est la sienne dans les organisations internationales. Nous aurions donc trois éléments, la Maison du Sud, la Maison des droits de l'homme et l'antenne universitaire.
4) Comme je vous l'ai dit en commission, nous sommes en train de mettre sur pied un concours international d'architecture, avec l'aide de l'architecte cantonal. Nous avons déjà eu des discussions préliminaires avec Mme Burnand, conseillère administrative, et nous sommes tombés d'accord sur les modalités globales de ce concours dont les termes vous seront présentés en temps utile. Nous pensons, entre autres, organiser un concours restreint à environ quinze concurrents, dont la moitié sont des Suisses. Nous pensons associer dans le jury, comme partenaires, la Ville, le canton de Genève, l'ONU et probablement un représentant des grandes - si j'ose dire - régies para-onusiennes telles que OMPI, UIT, etc.
5) En ce qui concerne le schéma directeur, M. Rossetti, avec lequel j'ai eu des entretiens, m'a rappelé que, lorsqu'il était en charge de l'aménagement à la Ville, il avait développé un concept. Celui-ci n'est pas oublié. Avant d'établir un projet de concours, nous allons faire le tri de tous les projets extrêmement nombreux qui nous ont été soumis au sujet de la place des Nations. Il y avait une hypothèque très lourde - levée la semaine passée seulement - concernant la délimitation du périmètre au sud de la place des Nations. Le fait que nous soyons en train de trouver un accord avec la Fondation Rockfeller est extrêmement positif et nous permet d'entrevoir un projet qui inclurait probablement la totalité de la parcelle Rigot.
Il a fallu sept ans pour terminer l'UIT - M. Ducret l'a rappelé. La solution actuelle n'est pas très satisfaisante du point de vue de M. Rossetti qui aurait aimé voir trois tours, dont une à l'emplacement de l'UIT, mais la longueur des négociations et les besoins de l'UIT en matière de place ont fait comprendre à tous qu'il y avait urgence.
En ce qui concerne l'OMPI, l'accord a été trouvé avec la Ville, qui a collaboré de façon extrêmement élégante pour ces deux objets, et je voudrais l'en remercier. Enfin, pour ce qui est de la souplesse du programme, je peux rassurer M. Ducret : notre programme ne sera pas rigide. En effet, le but, lorsqu'on fait appel à des architectes de renom international et national, est de faire le plein de leurs remarques.
Voilà ce que j'avais à dire à propos de cette motion.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
MOTION
concernant l'aménagement de la place des Nations
LE GRAND CONSEIL,
considérant :
- que Genève a depuis fort longtemps la vocation d'accueillir les organisations internationales;
- les difficultés que rencontrent plusieurs d'entre elles pour faire face à leurs besoins en locaux;
- le site exceptionnel de la place des Nations qui peut et doit devenir l'image et le symbole de l'ouverture de notre cité au monde;
- l'incertitude qui subsiste quant à l'aménagemeent de ce lieu;
- les contraintes relatives à son affectation qui en rendent aléatoire toute planification,
invite le Conseil d'Etat
1. à mettre en oeuvre, le plus rapidement possible, en collaboration étroite avec la ville de Genève et les organisations internationales, l'aménagement de la place des Nations et de ses prolongements, en favorisant la création des bâtiments nécessaires aux besoins de diverses organisations internationales et universitaires;
2. à procéder, préalablement, à l'analyse des données et du site;
3. à établir en même temps l'inventaire des besoins;
4. à élaborer en conséquence un programme d'aménagement qui tienne compte des problèmes de circulation, de transports publics et de l'énergie, ainsi que des critères du «développement durable» tels qu'ils ont été élaborés par les Nations Unies;
5. à organiser un concours international d'idées - le cas échéant, de projets d'architecture - visant à obtenir une proposition d'aménagement du lieu qui réponde aux besoins consignés dans le programme et confère au site une fonction et un aspect à la mesure de sa qualité et de sa situation dans la cité;
6. à présenter au Grand Conseil, à la fin de chaque année, un rapport sur l'état d'avancement de ces études.
Rappel du texte de la motion
LE GRAND CONSEIL,
considérant :
- l'exigence constitutionnelle du canton de Genève visant à sensibiliser l'opinion publique et à faire diminuer les diverses consommations d'énergie;
- la nécessité pour l'Etat de mener une politique exemplaire dans ce domaine, afin de concilier les mots et les actes;
- l'importance dès lors, pour être crédible, de connaître en détail les consommations énergétiques des divers services de l'Etat et de leurs répartitions ainsi que d'instaurer une transparence totale sur ces chiffres,
invite le Conseil d'Etat
à établir un concept informatique lui permettant de connaître les consommations en énergie des divers services et bâtiments de l'Etat;
à faire figurer ces chiffres dans le cadre des comptes de l'Etat présentés chaque année au Grand Conseil.
RÉPONSE DU CONSEIL D'ÉTAT
Préambule
La Ville de Genève est citée en exemple par les auteurs de la motion pour s'être dotée de moyens visant à connaître de façon détaillée la consommation d'énergie de bâtiments appartenant au domaine public.
Il convient toutefois de relever deux différences essentielles entre le parc de la ville et celui de l'Etat.
· Le parc de la ville est relativement homogène avec principalement des bâtiments d'habitation, des écoles primaires et des bâtiments admi-nistratifs, alors que celui de l'Etat est particulièrement hétérogène avec, pour ne citer que quelques exemples, des stations de pompage des eaux usées, des écoles techniques, de grands bâtiments administratifs, des bâtiments à haute intensité énergétique, telles l'usine d'incinération des ordures des Cheneviers ou la buanderie de Bel Air, des bâtiments de très grande importance tels l'aéroport, l'hôpital cantonal, etc.
· La ville dispose de son propre service technique chargé de la gestion énergétique de ses bâtiments alors que le canton dispose d'un service technique réduit, une grande part des tâches étant confiée à des mandataires.
Actions entreprises à l'échelon de l'Etat
Des démarches en vue de la collecte de la publication systématique des consommations d'énergie des bâtiments de l'Etat ont été entreprises par l'office cantonal de l'énergie bien avant le dépôt de la motion 798. C'est ainsi qu'en 1990, l'office a lancé une opération consistant à calculer les indices de dépenses d'énergie des bâtiments de l'Etat, afin de connaître l'évolution de ces dernières pendant les dix saisons de chauffage précédentes. Portant sur une centaine d'immeubles, les résultats ont été transmis au service de gérance des bâtiments en vue d'une systématisation de la démarche.
Il convient de mentionner ici l'attention particulière portée par l'office à la consommation d'électricité des bâtiments cantonaux, qui est à l'origine du programme AURELA (action pour une utilisation rationnelle de l'électricité dans les locaux de l'administration) visant à déterminer le potentiel d'économie des immeubles analysés ainsi que les actions à entreprendre. Ce programme est appuyé par AURORE (action pour une utilisation rationnelle des objets raccordés à l'électricité) qui vise à sensibiliser et inciter le personnel de l'Etat à utiliser de façon économe et rationnelle les divers équipements électriques qui sont mis à sa disposition.
Collecte et publication systématiques des consommationsdes bâtiments de l'Etat
Le simple recueil systématique de données en vue d'une publication ne présente aucun intérêt s'il n'est accompagné d'analyses et de décisions visant à améliorer la gestion énergétique des bâtiments considérés.
Pour cette raison, dès 1990, l'office a collaboré avec une importante agence immobilière de la place afin de trouver une méthode d'évaluation rapide de l'état thermique des bâtiments d'un parc immobilier permettant d'en optimiser la gestion énergétique. Ces travaux ont abouti récemment à la réalisation du logiciel GEPI, applicable par les professionnels concernés à tous les bâtiments régulièrement chauffés. Il a été également présenté aux communes genevoises et au service de gérance des bâtiments de l'Etat.
Sur la base d'un nombre restreint de paramètres faciles à déterminer et représentatives de la consommation d'énergie d'un bâtiment, cette méthode permet:
· une comparaison entre les divers bâtiments d'un même parc;
· un étalonnage par rapport à des valeurs de référence;
· le suivi dans le temps de la consommation;
· l'orientation de la recherche des améliorations à apporter à un bâtiment.
De plus, un objectif de consommation est fourni ainsi qu'un indicateur de priorité d'intervention.
Sous la responsabilité de l'office cantonal de l'énergie, une analyse est effectuée depuis 1992 en vue de recueillir, publier et analyser systéma-tiquement les consommations des bâtiments de l'Etat. Ce travail est mené en étroite collaboration avec les Services industriels de Genève. Il apparaît ainsi clairement que la politique de gestion des bâtiments mis en oeuvre à l'Etat a précédé dans le temps la motion et dépassé dans l'ampleur les voeux exprimés par ses auteurs. Il est bien entendu que dès que les données auront été assemblées et validées, un compte rendu figurera dans le rapport de gestion annuel du Conseil d'Etat.
Conclusion
Il ressort de ce qui précède que plusieurs actions ont été prises en vue d'une gestion des bâtiments de l'Etat conforme aux objectifs du droit cantonal dans le domaine de l'énergie et que le logiciel développé par l'office cantonal de l'énergie va incontestablement dans le sens de la motion. L'efficacité de ce dernier ne pourra toutefois être évaluée qu'après deux ans d'exploitation. Il ne faut pas oublier l'importance qu'il devra avoir sur le bilan énergétique genevois global puisqu'il est amené à être diffusé aurpès de tous les milieux professionnels concernés.
Débat
M. Chaïm Nissim (Ve). La lecture de ce rapport nous a déprimés ! (Aahh de compassion dans la salle.) Une fois de plus, nous avons lu que l'OCEN a déjà fait tout ce que nous demandons dans notre motion. Or nous devons constater que ce n'est pas vrai !
Premier point. Le début de ce rapport explique pourquoi, à la Ville, chaque responsable de bâtiment donne, depuis trois ans déjà, soit depuis 1991, ses consommations de gaz et d'électricité séparément, alors que l'Etat n'en est pas capable encore aujourd'hui. On nous avance l'argument selon lequel la Ville a un service de l'énergie actif, alors que le parc de l'Etat est beaucoup plus hétérogène et dispersé et que, de plus, l'OCEN ne faisait pas partie du DTP jusqu'à présent, ce qui limitait son action. C'est bien joli, mais maintenant que l'OCEN en fait partie, il n'y a plus aucune raison qu'il ne remplisse pas son rôle dans les économies d'énergie. Je vous rappelle que le service de la Ville comporte environ une dizaine de collaborateurs et que la plus grande partie de leurs salaires est payée par les économies d'énergie faites par eux. En fait, le service de l'énergie de la Ville de Genève ne coûte rien à la Ville de Genève; il lui rapporte même certaines années un peu d'argent. Par contre, le service de l'énergie de l'Etat nous coûte 3 millions par an pour des études très onéreuses qui ne nous rapportent pratiquement rien !
Deuxième point. A deux reprises, une fois dans la conclusion et une fois dans le chapitre 2, le rapport nous indique que le service de l'Etat a enquêté bien avant cette motion pour connaître la consommation de chaque bâtiment. Je vous rappelle que, le 10 décembre 1991, M. Jean-Pascal Genoud et M. Jean-Philippe Maitre - son patron d'alors - ont fait une conférence de presse dans laquelle ils ont exprimé leurs inquiétudes par rapport aux dépenses d'énergie des bâtiments de l'Etat qui seraient passées de 7 à 11 millions; il faut dire qu'ils ne connaissaient pas la cause de ce supplément de 4 millions.
A la «Coordination énergie», avec mes amis Vanek et Elisabeth, nous nous sommes excités comme des fous sur cette histoire. (Rires sur tous les bancs.) Nous avons téléphoné un peu partout pour savoir d'où venaient ces 4 millions supplémentaires et à combien de kilowattheures ils correspondaient. Nous avons également téléphoné à l'OCEN. M. Genoud nous a répondu qu'il avait un listing de 300 pages, mais qu'il ne voulait pas nous en dire plus. Nous avons téléphoné aux Services industriels qui nous ont renvoyés au DTP. Nous avons téléphoné au DTP une trentaine de fois et pour finir, enfin, après quatre mois d'enquête, le service de M. Grobet nous a répondu que cette augmentation de 57% était fictive et qu'en réalité elle n'était que de 4,2% cette année-là.
Voilà comment les services de M. Genoud maîtrisaient la situation il y a deux ans; non seulement ils ne connaissaient pas la consommation de chaque bâtiment de l'Etat, mais ils ne connaissaient même pas la consommation totale des bâtiments de l'Etat. Nous demandons simplement que chaque responsable de chaque bâtiment connaisse sa consommation en eau, en électricité et en gaz, comme cela se fait à la Ville. Cela paraît la moindre des choses ! Sans cette comptabilité aucune entreprise ne peut être convenablement gérée. C'était l'objet de la motion et nous n'avons toujours pas obtenu satisfaction, même si on nous dit que l'on agit dans ce sens, par exemple en rentrant des données dans un logiciel. Mais à quand la publication des résultats ? A quand la possibilité pour chaque responsable de chaque bâtiment de connaître sa consommation ?
C'est la raison pour laquelle nous considérerons ce rapport, d'entente avec M. Montessuit et avec Mme Reusse-Decrey, comme médiocre. Nous attendons un véritable rapport.
M. Roger Beer (R). Cher collègue, bravo ! Vous avez été excellent ! J'ai été moins énervé que vous, mais c'est vrai que la lecture de ce rapport m'a quelque peu désappointé.
Le préambule fait, à lui seul, le tiers de la réponse et m'a étonné à deux reprises. Il prétend que le parc immobilier de la Ville est relativement homogène par rapport à celui de l'Etat, ce qui me laisse sans voix. Le Conseil d'Etat semble s'excuser, ce qui est étonnant. La bibliothèque botanique - je la cite parce que notre honorable président, M. Burdet, en est le patron et qu'il la connaît bien - est très vitrée. Si on compare le crématoire... (Grand éclat de rires de toute l'assemblée.) ...au bâtiment consacré à l'informatique qui est climatisé et «aseptisé» et si vous prenez encore les nombreux bureaux qui se trouvent à l'Hôtel de Ville, on peut considérer que le parc est homogène et on peut comprendre l'analyse du Conseil d'Etat.
Le rapport dit encore que l'Etat dispose d'un service énergétique réduit, contrairement à la Ville, alors que - M. Nissim vient de le dire - ils sont une dizaine seulement. Le préambule m'a vraiment étonné. Je ne veux pas m'étendre davantage, sinon pour dire que ce rapport n'est pas vraiment un rapport tant il est succinct. Il dit seulement que c'est une chance que les députés aient posé une question, mais que le Conseil d'Etat, lui, intelligent et prévoyant, a déjà tout fait ! Une fois de plus, lorsque des députés préparent une motion - ce qui leur prend un certain temps surtout que ce ne sont pas des professionnels - le Conseil d'Etat leur répond invariablement que cela tombe bien, parce qu'il étudie le problème depuis déjà deux ans et qu'il donnera les résultats incessamment, mais que cela demande du recul, qu'il faut deux, trois, voire quatre ans !
Tout cela pour vous dire que je suis probablement moins énervé sur les faits que ne l'est mon collègue Nissim, mais je trouve, comme lui, que ce rapport, certainement rédigé par l'office de l'énergie, est maigre. Maintenant que le service de l'énergie a été transféré au département des travaux publics, on va peut-être obtenir des données plus précises. Ce rapport est une réponse, mais en fait c'est une non-réponse, puisqu'on nous demande un délai. D'accord, Madame et Messieurs les conseillers d'Etat, nous vous accordons ce délai, mais nous nous réjouissons de comparer les chiffres dans les prochains comptes et surtout de recevoir un rapport digne de ce nom !
M. Chaïm Nissim. Très bien ! Bravo !
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Comme M. Nissim, ce rapport m'a déprimée, et, comme M. Beer, il m'a énervée.
Ce rapport a un parfum de déjà vu et déjà entendu, à savoir que l'on a déjà tout fait, tout entrepris, sans attendre la motion. Au surplus, l'OCEN prétend : «On est les meilleurs !». Une fois de plus nous avons l'impression que notre parlement est inutile : l'exécutif fait tout et tout seul ! Visiblement, derrière ce rapport se cachent la griffe de M. Genoud et l'ombre de M. Maitre ! (Rires.) Permettez-moi de citer ce dernier.
Lors du dépôt de cette motion, il nous disait avoir déjà préparé un logiciel prêt à fonctionner sur les consommations des différents secteurs de l'Etat et qu'il fallait juste améliorer un certain nombre de coordinations. Il trouvait que cette motion était incontestablement utile et qu'il y répondrait dans les plus brefs délais. Aujourd'hui, ce rapport nous explique que la motion avait été précédée dans le temps par l'Etat qui a même dépassé les voeux exprimés par les auteurs.
Nous en sommes très contents, mais nous aimerions savoir de quoi il s'agit, puisque cela a dépassé notre attente ! On nous indique, en outre, que l'on nous communiquera des informations dans deux ans ! Alors, nous, nous vous proposons de reprendre ce rapport, de le garder encore dans un tiroir et de nous le rendre au moment où vous aurez quelque chose de concret à nous mettre sous la dent !
Enfin, en conclusion, je me permets de répéter qu'il est urgent de connaître nos consommations pour pouvoir faire des économies en fonction de leur ampleur, ce qui n'est pas possible en l'état actuel des choses. La Ville - comme cela a été dit - le fait depuis très longtemps. Je rappelle, en outre, que les économies d'énergie n'ont pas pour seul but de faire plaisir aux esprits antinucléaires; elles sont bénéfiques pour tous.
M. Pierre Vanek (AdG). Tout a été dit pour l'essentiel.
Je partage parfaitement le point de vue de M. Beer. Ce rapport n'est pas satisfaisant. Les chiffres doivent être rendus publics. Il faut donc remettre cet ouvrage sur le métier et remettre ce rapport dans un tiroir. Par contre, les chiffres exacts concernant la consommation des bâtiments doivent être publiés. C'est une exigence tellement élémentaire que cela ne vaut même pas la peine d'en débattre plus longtemps.
M. Max Schneider (Ve). Pour ma part, je ne suis ni déprimé ni énervé...
Des voix. Bravo ! Bravo !
M. Max Schneider. ...mais plein d'espoir ! En effet, il y a eu ce mariage tant souhaité durant la dernière législature entre le département de l'économie publique et le DTP, entre M. Grobet et M. Maitre. Cela s'est réalisé, puisque l'OCEN fait partie du DTP. C'est vraiment formidable ! Nous allons avoir beaucoup de bonnes surprises, j'en suis certain, dans les prochains mois.
C'est l'organisation intérieure d'un département, mais cela ne suffit pas pour unir les hommes. Lorsque nous recevons l'Annuaire genevois, nous voyons bien que le service des bâtiments est en main de M. Reinhardt et le service cantonal de l'énergie est dirigé par M. Genoud. Derrière ces deux hauts fonctionnaires, il y a toute une série de personnes, et c'est là que le bât blesse en ce moment, car la coordination ne fonctionne pas. C'est le défi à relever. Ces deux hauts fonctionnaires devront travailler main dans la main pour permettre de mener une politique d'économies d'énergie. On obtiendra une synergie, car lorsqu'on ira entretenir un bâtiment l'OCEN sera présent pour faire son travail. Cette étroite collaboration portera des fruits pour notre consommation d'énergie et aussi pour notre économie.
Je pose donc une question au chef du département. Quand finira le temps où l'ingénieur et l'architecte se tournent le dos, comme c'est le cas actuellement ? Quand viendra le temps où l'architecte et l'ingénieur s'assiérons ensemble pour concevoir un bâtiment et obtenir un concept énergétique optimum ? Cela est valable pour les nouvelles constructions publiques ou privées, mais aussi pour les bâtiments devant être rénovés et où la maintenance doit être améliorée.
Monsieur Joye, vous qui avez fait le voeu d'être un président efficace et de promouvoir la transparence, j'espère que vous relèverez ce défi. Vous avez les capacités d'un homme qui a travaillé dans le bâtiment et vous êtes un meneur d'hommes. C'est pourquoi j'espère que l'office cantonal de l'énergie et celui des bâtiments, qui font partie de votre département, pourront travailler ensemble. Je souhaite simplement que l'OCEN ne sera pas soumise au service des bâtiments et que la collaboration sera équilibrée. Nous obtiendrons ainsi plus de transparence, des informations et une réduction notable de notre consommation d'énergie.
M. Jean Montessuit (PDC). A l'évidence - vous en comprendrez les raisons - je suis beaucoup moins énervé, déprimé et navré que mes collègues socialistes, écologistes et radicaux. J'avoue, malgré tout, que je reste également sur ma faim ! A la fin du rapport, on nous dit que des mesures précises sont prises depuis 1992, mais aucun chiffre n'est cité ni aucun résultat. C'est pourtant ce que nous demandions.
Je partage donc l'avis de mes collègues qui se sont déjà exprimés à ce sujet. Je souhaite qu'un rapport plus complet soit rendu dans les années qui viennent. J'insiste sur le fait que les résultats ne sont pas intéressants pour nous. Certes, ils sont intéressants dans le sens où ils permettront à Mme Reusse-Decrey d'intervenir à nouveau, mais ils sont surtout intéressants pour les personnes qui gèrent les bâtiments. En effet, connaître sa propre consommation permettra à chaque responsable de prendre les mesures nécessaires pour l'améliorer. C'était l'esprit de la motion. Nous n'avons pas abouti, hélas, mais nous ne désespérons pas d'y parvenir un jour !
M. Pierre Meyll (AdG). Ce rapport est plutôt un rapport-excuse ! Je ne vais pas revenir ce qui a été dit à ce sujet.
M. Schneider met en cause le service de M. Reinhardt. J'aimerais tout de même qu'il admette que, lors de la précédente législature, un service a été mis en place pour s'occuper tout particulièrement des problèmes énergétiques des bâtiments. M. Tschopp nous donnait tous les renseignements voulus sur les indices énergétiques. M. Nissim a insisté plusieurs fois pour les obtenir et il a reconnu à chaque fois le bien-fondé des déclarations de M. Tschopp et des mesures prises. Je ne comprends donc pas pourquoi, maintenant, certains prétendent que rien n'a été fait. Tous les bâtiments neufs réalisés dernièrement ont été contrôlés, vérifiés par MM. les écologistes. Il faut le reconnaître ! M. Tschopp a effectué un travail considérable dans ce domaine, sous l'égide du précédent président du département !
M. Chaïm Nissim (Ve). Je suis désolé, Monsieur Meyll, vous n'avez pas tout à fait raison.
J'ai effectivement beaucoup travaillé avec M. Tschopp qui m'a dit très précisément où il en était. Il ne connaît toujours pas la surface d'un certain nombre de bâtiments, il ne peut donc pas en calculer l'indice. Ensuite, on n'a toujours pas la décomposition de la consommation eau/gaz/électricité de chaque bâtiment, ce qui est regrettable. La Ville de Genève le fait depuis 1991. Enfin, il n'y a toujours pas de brochure, comme la Ville de Genève la publie chaque année, avec les résultats précis pour chaque énergie : gaz, mazout et électricité.
M. Tschopp était tout seul - son service était loin de compter une dizaine de personnes à l'époque - et, malgré tous ses efforts, il n'est pas parvenu aux résultats escomptés. Je ne remets pas en cause la compétence de ce fonctionnaire, mais les moyens mis à sa disposition étaient largement insuffisants pour la tâche qui lui était dévolue. Nous versons 3 millions à l'OCEN, qui comprend un certain nombre de collaborateurs, pour faire de coûteuses études. Je prétends que ces sommes pourraient être beaucoup mieux investies si on prenait des mesures d'économies d'énergie comme le fait la Ville de Genève depuis quinze ans !
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Même si certaines personnes ont dit qu'elles étaient moins énervées que d'autres, j'ai trouvé les propos de M. Beer aussi assassins que ceux des députés qui se sont déclarés très énervés. Rassurez-vous cela ne m'empêche pas de dormir... (L'assemblée s'écroule de rire.)
M. John Dupraz. Ce n'est pas le moment de dormir !
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Monsieur Dupraz, je vais répondre, soyez-en certain !
Tout d'abord, ce rapport n'est pas à la hauteur de votre attentes, mais il faudrait avoir les instruments adéquats pour procéder aux mesures souhaitées. Les remarques de M. Nissim sont exactes. Vous ne pouvez pas demander à M. Tschopp, qui est seul, de régler ces problèmes avec la même efficacité que ne le fait la Ville de Genève depuis plusieurs années, avec beaucoup d'intelligence et de fermeté. Une des préoccupations essentielles des services de Mme Burnand a toujours été d'accorder beaucoup d'importance aux coûts d'exploitation et de maintenance.
Je réfute complètement tout ce qui a été dit sur M. Genoud, chef de l'OCEN. En effet, c'est un homme d'une grande intégrité. Il s'est beaucoup dépensé dans des domaines qui ne sont pas très porteurs puisqu'il s'agit de la recherche. Il a instauré une collaboration intéressante avec l'université de Genève.
Depuis que l'OCEN est rattaché au DTPE ainsi qu'aux SI, il y a trois réunions pour regrouper ces entreprise extrêmement divergentes et dont les éléments restent attachés à leurs prérogatives. C'est tout à fait vrai, et c'est normal. Il est difficile de faire travailler ensemble des groupes qui ont travaillé séparément, sans souhaiter même avoir des contacts. Je vous dirai franchement que je n'ai pas encore trouvé la solution, mais, d'ici la fin de l'automne, j'aurai mis en place ce regroupement et j'aurai revu les fonctions respectives de chacun, les programmes informatiques, les modes de contrôles qui nous sont demandés à juste titre.
J'ai une grande pratique en matière de contrôles énergétiques, puisque j'ai travaillé pour des maîtres d'ouvrage très efficaces dont c'était la tâche. Je vous signale que le coût de l'installation d'un concept de contrôle énergétique des bâtiments, s'il est bien affiné, est très élevé. Pour l'instant ce coût ne figure nulle part sur les tabelles des investissements du département des travaux publics. Je vous signale aussi que le crédit dont dispose l'OCEN lui permet de remplir par ailleurs à satisfaction beaucoup de tâches, en particulier dans le domaine des énergies alternatives.
Enfin, nous avons traité de l'avenir avec la commission de l'énergie. C'est le futur qui nous intéresse et non pas les ombres du passé. Nous avons un passage obligatoire - tout le monde a été d'accord pour qu'on le respecte - qui passe par le résultat des deux enquêtes que nous sommes en train de mener concernant l'initiative déposée pour savoir comment économiser de l'énergie et comment réduire la portion de consommation d'énergie nucléaire cantonale de 40% à, si possible, 0%. L'initiative parlait d'une période de huit ou douze ans, nous l'avons étendue à dix et vingt ans. Nous avons deux bureaux, un suisse et un américain, qui s'occupent de ces questions fondamentales pour nous. Nous voulons donc d'abord avoir leurs résultats et ensuite nous pourrons prendre les mesures qui s'imposent.
Cela n'empêche pas que je vais me remettre à l'ouvrage tout de suite pour vous livrer un rapport intermédiaire qui sera beaucoup plus fourni et qui comportera entre autres les résultats des deux groupes qui auront travaillé pour les recherches importantes que nous effectuons afin de définir la politique énergétique de ce canton.
Je vous ai également promis - je tiendrai ma promesse - un concept énergétique conforme au désir de ceux qui luttent beaucoup dans ce domaine, c'est-à-dire plus complet que le concept énergétique que nous vous avons proposé. Certes, il est déjà très intéressant et très bien fait, mais son éclairage peut être revu.
Pour terminer, je suis sûr, grâce aux interventions de ce soir, que mes collaborateurs comprendront que c'est «moins cinq» pour collaborer intensivement, ce qui ne met pas du tout en cause leur intégrité personnelle ! C'est une simple question de fiançailles et de mariage !
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
M. Dominique Hausser (S). Je passerai très rapidement sur la manière totalement cavalière avec laquelle M. Haegi m'a répondu il y a un mois !
Je tiens simplement à revenir sur quelques éléments factuels qui lui permettront peut-être de corriger deux de ses réponses, les autres étant effectivement correctes.
Pour ce faire - vous l'avez dit, c'est un feuilleton à rebondissements multiples - je me bornerai à citer quelques dates de lettres présentées aimablement par M. Philippe Joye il y a quelques semaines.
La première, datée du 14 octobre 1993, provenait de l'avocat de M. Tamman, qui relevait les problèmes de coût des places de parking envisagées. Pour M. Tamman et la S.A. du Palais Wilson, le prix était beaucoup trop élevé. Il disait être à même de réaliser ce parking pour beaucoup moins cher. Des notes ont ensuite été adressées à M. Philippe Joye par M. Guy-Olivier Segond et M. Jean-Philippe Maitre, pour l'informer des problèmes potentiels sur les relations avec la Confédération liées à la Maison de l'environnement. Enfin, une lettre de la fin de l'année, adressée par l'administration fédérale, indiquait que, si l'autorisation de rénovation et de construction n'était pas accordée, il y aurait un dépôt de recours juridique. Le 2 janvier M. Tschopp adressait un courrier à M. Joye lui demandant ce qu'il pensait du coût et du devis du Palais Wilson. Le 14 janvier M. Joye a répondu à cette lettre en adressant une copie à l'administration fédérale.
La formulation de ma troisième question, demandant pour quelle raison M. Joye n'avait pas informé les autorités fédérales, était inappropriée. Vous aviez raison, Monsieur Haegi !
L'interpellation est close.
En date du 16 février 1994, Greenpeace-Genève remettait la pétition suivante munie de 1250 signatures au Grand Conseil:
PÉTITION
«Sauvons nos arbres»
Première action de la Maison de l'environnement
Dans le courant de l'été 1994, 2 séquoias plantés entre 1872 et 1875 seront abattus; 2 platanes, 1 hêtre et 1 tilleul subiront le même triste sort.
Cela pour faire place aux voitures des usagers de la Maison de l'environnement.
Vous avez dit grotesque ?
Nous demandons que ce projet ridicule soit modifié afin de préserver ces arbres respectables. Si cela était impossible, nous demandons l'abandon pur et simple de la construction d'un tel parking. Les usagers de la Maison de l'environnement peuvent montrer l'exemple et utiliser les transports publics.
La commission a étudié l'objet de cette pétition lors de ses séances des 7 et 21 mars 1994, sous la présidence de M. Bernard Lescaze. Pour ce faire, elle a procédé aux auditions de MM. Philippe de Rougemont et Salvator Pitarch, représentants de Greenpeace, de M. Roger Beer, directeur du service des espaces verts et de l'environnement (SEVE) et de M. Claude Morel, architecte.
Pour le maintien des séquoias ou contre la construction du parkingde la Maison de l'environnement ?
On peut en effet s'étonner de la réaction aussi tardive des pétitionnaires, puisque l'autorisation d'abattage de ces arbres a été délivrée le 26 août 1991 et qu'elle a été prolongée jusqu'en 1995. Au cours de la discussion, il est assez rapidement apparu que le phénomène le plus préoccupant pour Greenpeace était la menace de voir arriver 210 voitures supplémentaires capacité totale du parking qui provoqueraient à elles seules l'émission de 840 tonnes de CO2 par an dans le quartier des Pâquis.
Selon les pétitionnaires, la construction du parking de la Maison de l'environnement risque de jeter le discrédit sur les organisations vertes, le PNUE, d'autant qu'il y aurait selon eux des solutions de rechange bien moins onéreuses et plus respectueuses de l'environnement. Et de citer l'exemple de cette grande firme bâloise qui a préféré offrir à ses employés un vélo et un abonnement aux CFF plutôt que de construire un parking. En l'occurrence, offrir un abonnement TPG aux employés de la Maison de l'environnement ne coûterait que 120'000 F et l'abonnement général pour tous les transports publics en Suisse que 525'000 F.
Il est évident que si l'on compare ces chiffres au coût devisé du parking 12 millions de francs cela peut donner à réfléchir !
Les pétitionnaires relèvent en outre qu'il existe des places de parking disponibles dans le quartier: le parking du Prieuré offre 40 places qui sont souvent inoccupées car trop chères; celui de l'église de la Trinité où 180 places sont disponibles pour les mêmes raisons. Pourquoi ne pas étudier la possibilité de les louer aux employés du PNUE ?
Les séquoias de l'esplanade du Palais Wilson
Revenons à ces deux arbres respectables. Soulignons au passage que la pétition «Sauvons nos arbres» vise à protéger six arbres: outre les deux séquoias, il y est fait mention de 2 platanes, 1 hêtre et 1 tilleul également appelés à disparaître. C'est quasiment déjà fait, car il n'en fut jamais question au cours des discussions et des auditions !
Censément plantés entre 1872 et 1875, ces arbres devront être abattus pour permettre la construction et l'accès au parking de la Maison de l'environnement. Désireux d'en savoir plus sur ces arbres, les membres de la commission ont entendu M. R. Beer, directeur du SEVE.
On compte 300 séquoias en ville de Genève (450 sur tout le canton), dont une grande partie date du siècle dernier. Ces arbres ont, pour la plupart, été plantés dans le cadre de l'exposition nationale en 1896. Le séquoia est un arbre robuste qui pousse très vite en pépinière; en quelques années, il prend de l'allure et son écorce un aspect adulte. Il s'acclimate bien à Genève, malgré le sol peu profond qu'il a pour s'enraciner: 2 mètres seulement alors qu'aux Etats Unis il trouve des sols profonds de 10 à 15 mètres ce qui pourrait expliquer sa longévité de 1000 à 2000 ans.
A Genève, un séquoia commence à montrer des signes de faiblesse vers les 100 ans. Pour avoir des arbres toujours en bon état, il faudrait en remplacer 4 ou 5 par an. On plante des arbres de 3 à 4 mètres ne posant pas de problème de reprise. 7 séquoias viennent d'ailleurs d'être plantés le long de la route de Meyrin.
M. Beer estime que les 2 séquoias du quai Wilson pourraient encore largement vivre une dizaine d'années. Pour les conserver au-delà, il serait nécessaire de faire un aménagement du sol. L'un des deux, celui qui est proche de la rampe d'accès du parking a souffert lors de l'incendie du Palais Wilson mais surtout dans son feuillage, l'écorce est encore bonne.
Pour terminer, M. Beer relève la nécessité d'informer la population lorsque des arbres doivent être abattus. Il cite le cas d'un cèdre du Liban vieux de 275 ans qui a dû être abattu pour des raisons de sécurité. Des explications ont été données aux habitants du quartier, qui ont ainsi pu comprendre les enjeux de l'opération à laquelle ils ont été invités à assister, sans que cela donne lieu à des manifestations d'incompréhension. Le même jour, un «jeune» cèdre du Liban d'une quarantaine d'années a été planté, assurant ainsi la relève!
Le parking de la Maison de l'environnement
L'audition de M. C. Morel, un des architectes mandatés par la Confédération pour la construction de la Maison de l'environnement, permettra finalement de faire le tour des questions: Pourquoi un parking sous la Maison de l'environnement ? Existe-t-il une alternative ? Peut-on sauver les séquoias et maintenir le parking ?
M. Morel présente aux commissaires le plan de l'aménagement de l'esplanade. Nous reviendrons plus loin et pour l'anecdote sur cette photo.
Le parking est une exigence de la Confédération et de la Société des hôtels Président. Il est conçu sur deux niveaux: 105 places au niveau supérieur sont destinées au Centre des congrès et 105 places à l'étage inférieur à la Maison de l'environnement. En fait, les clients sont demandeurs d'un nombre beaucoup plus important de places de parking.
300 à 320 fonctionnaires du PNUE occuperont les bureaux de la Maison de l'environnement. Il y aura donc 1 place de parc pour 3 personnes, ce qui est encore insuffisant aux yeux de la Confédération. Mais il n'est pas envisageable vu les coûts déjà très élevés d'augmenter la capacité du parking.
La construction du parking fait partie de l'ensemble des négociations. Dès le début, la viabilité du projet global a été conditionnée par sa construction.
Le plan en annexe permet de bien visualiser l'implantation des deux séquoias. Le plus touché par l'incendie est situé au niveau de la rampe d'accès au parking; l'autre en bonne santé est en plein sur l'emplacement du garage. Vouloir conserver ces arbres signifierait renoncer à la construction du parking en raison de l'espace occupé par leur surface racinaire. Maintenir les arbres et le parking n'est pas réaliste non plus, car leurs racines seraient inévitablement touchées et blessées lors des travaux et par conséquent leur viabilité mise en danger.
Par ailleurs, l'emplacement de la rampe d'accès au parking qui compromet la survie d'un des deux séquoias, est le seul possible. D'autres approches éventuelles auraient été moins pratiques et n'auraient de toute façon pas permis la sauvegarde de l'arbre.
Enfin, M. Morel apporte quelques précisions sur l'aménagement futur de l'esplanade. Il y aura 1,50 m. de terre au-dessus du parking, ce qui permet la plantation de grands arbres, mais pas de séquoias. Le concept général d'aménagement n'est pas encore arrêté, mais le paysagiste mandaté a imaginé la création d'un parterre végétal selon un dessin de Jacques Elysée Goss, l'architecte qui a conçu l'Hôtel National au début du siècle. Ce parterre pourrait également être minéral, dans le style d'un jardin japonais sec.
Enfin, les commissaires se sont fait préciser un point, qui sort peut être du cadre direct de la pétition, mais qui nous semble important: le bâtiment de la future Maison de l'environnement ne sera pas climatisé, contrairement aux assertions de certains.
Avant de conclure, revenons à la photo non datée, mais censée représenter le site en 1920 et sur laquelle on voit à peine trace des deux séquoias qui auraient été plantés entre 1872 et 1875 selon les pétitionnaires. Soucieux de vérité historique, les commissaires guidés par leur président historien, se sont livrés à de savantes déductions et en ont conclu que cette photo doit plutôt dater des environs de 1910. Dans ce cas, si ces arbres avaient été plantés en 1875 comme les pétitionnaires le prétendent, ils auraient dû être nettement plus visibles sur la photo. Ceci pour l'anecdote !
Conclusions
L'ensemble de la commission regrette que dans cette affaire, une information adéquate n'ait pas été diffusée auprès de la population.
L'enjeu est clair et l'intérêt évident. La construction de la Maison de l'environnement amènera trois cents emplois à Genève. Or, cette construction passe obligatoirement par la création d'un parking, ce qui implique l'abattage de deux arbres vénérables, auxquels certainement bien des Genevois sont attachés.
«Le coeur a ses raisons que la raison ne connaît pas...»
C'est donc la raison qui a guidé la majorité des membres de la commission à voter par 10 voix pour, 1 contre (E) et 1 abstention (S) le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.
Nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, d'en faire de même.
DÉPLIANT
Débat
Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Si cette pétition soulève la question de l'abattage des arbres, le vrai problème reste l'exigence de réaliser un parking lié à l'octroi de la subvention fédérale pour rénover le Palais Wilson, parking dont la mauvaise conception oblige à abattre des arbres centenaires. Il est absolument inconcevable d'imaginer qu'on nous impose cela sans aucune discussion. Ce sont des commissions parlementaires fédérales qui en débattent, qui votent, qui auditionnent les gens intéressés. Je ne peux pas imaginer que la Confédération qui, d'un côté, impose des ordonnances très sévères au canton en matière de taux de pollution de l'air et du bruit oblige - et cela sans débat - d'un autre côté, la réalisation d'un parking sous la Maison de l'environnement, en plein centre-ville, alors que Genève ne respecte déjà pas les mesures imposées par l'OPair.
Comment se fait-il que le Conseil d'Etat ne se soit pas battu pour obtenir d'autres solutions pour transporter les fonctionnaires concernés, comme, par exemple, l'utilisation des parkings avoisinants ou la distribution d'abonnements des TPG ? Je suppose que dans cette décision la société des Hôtels Président a eu beaucoup plus de poids que la Confédération ou que des considérations d'ordre écologique. D'ailleurs, les mêmes remarques pourraient être faites concernant la façon de rénover ce bâtiment. Une Maison de l'environnement devrait être un modèle type en matière de conception écologique de l'habitat, du style économie d'énergie, énergie solaire, matériaux respectueux de l'environnement, matériaux non polluants, etc.
Je ne pense malheureusement pas que ce sera le cas ! Je voudrais connaître quel est le véritable enjeu pour le Conseil d'Etat : réaliser une Maison de l'environnement dont le rayonnement pratique et théorique dépasserait nos frontières ou toucher des subventions pour fournir du travail aux entreprises genevoises ? On pourrait être honnêtes en répondant que ces deux objectifs sont intéressants, mais l'on pourrait au moins se battre contre une aberration telle que ce parking souterrain et engager des architectes qui ont des notions de construction et d'aménagement respectueuses de l'environnement !
Ma question subsidiaire, soufflée par un de mes collègues, est la suivante : en cas de surcoût et de dépassement du montant de la subvention, qui payera ?
Pour toutes ces raisons, nous proposons le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.
Le président. La lecture d'une lettre de Greenpeace-Genève a été demandée. Madame la secrétaire, je vous prie de bien vouloir lire cette lettre.
Concerne : pétition 1026 : Sauvons nos arbres !
Madame, Monsieur,
L'abattage des arbres situés sur l'esplanade du Palais Wilson n'est pas une fatalité. Des solutions ne manquent pas pour sauvegarder ces arbres, faciliter les déplacements des futurs utilisateurs de la «Maison de l'environnement» et du Centre de congrès et éviter une congestion plus grande du trafic pendulaire dans le quartier des Pâquis :
- Une rapide enquête dans le quartier a permis d'évaluer à plus de deux cent dix le nombre de places de stationnement vacantes, parking de la Sainte-Trinité, parking du Prieuré. Ces places sont boudées par les habitants et pourraient être louées par le PNUE et le Centre de congrès.
- Une ligne de transports publics relie le Palais Wilson à la gare et au centre-ville. Des parkings d'évitement sont situés en périphérie de la ville reliée au centre par les CFF et les TPG.
L'abattage de ces arbres, dont deux séquoias plantés en 1872 et faisant partie intégrante du site, nous mène à la solution la plus coûteuse : 10,5 à 12 millions de francs, la plus enlaidissante pour le site, la plus contraire à l'esprit du PNUE et à sa mission.
Ce sera à partir d'actes concrets tels un aménagement responsable du Palais Wilson, future Maison de l'environnement, que Genève pourra prétendre au titre de «capitale de l'environnement».
A vous de jouer !
Mme Anita Cuénod (AdG). A titre personnel, je tiens à dire que je souscris à l'action de Greenpeace qui a pu - il faut le rappeler - mobiliser plus de mille deux cents personnes en 48 heures pour tenter de sauver ces deux séquoias centenaires. Ce sont deux symboles qui seront abattus pour faire place à un parking.
Quels funestes augures pour une maison de l'environnement !
M. Bernard Lescaze (R). La lettre qui vient d'être lue reprend les arguments des pétitionnaires. Or, si vous avez lu le rapport tel qu'il est sorti de la commission des pétitions, sous la plume de Mme Mascherpa, vous avez pu constater que les arguments avancés par les pétitionnaires ont tous été, d'une manière ou d'une autre, écartés, parce que non relevants. (L'orateur insiste sur ce dernier mot.) Nous en voulons simplement pour preuve la date de plantation de ces deux séquoias, dont le mauvais état n'est signalé nulle part - je vous rappelle que l'un d'entre eux a été gravement brûlé le 1er août 1987, lors de l'incendie du Palais Wilson. Ces séquoias n'ont pas du tout été plantés entre 1872 et 1875 comme on le prétend, puisque nous avons retrouvé dans la collection du Vieux Genève une photographie qui a dû être prise dans les années 1910, peut-être même au moment de la première guerre mondiale, et sur laquelle ces petits séquoias apparaissent comme de minuscules arbustes plantés à l'évidence quelques années auparavant. Vous savez, en effet, que les séquoias sont des arbres qui poussent rapidement.
Evidemment, une autre solution aurait été d'attendre encore un siècle ou deux et de faire, comme en Californie, un tunnel sous le tronc des séquoias ! Malheureusement, le Palais Wilson et sa restauration ne peuvent pas attendre autant de temps ! Il est tout à fait surprenant d'avancer l'argument des séquoias à propos de la Maison de l'environnement, alors que l'on sait depuis le début du dossier de restauration du Palais Wilson que ces arbres devront céder la place au parking. En effet, celui-ci n'a pas été prévu pour la Maison de l'environnement seulement, il était déjà prévu au moment où le Palais Wilson devait être transformé en centre de congrès et hôtel. Le Centre de congrès, d'ailleurs, continuera à se faire à côté de l'hôtel Président, et le bâtiment même du Palais Wilson, lui, changera d'affectation, et d'hôtel il deviendra Maison de l'environnement. Mais le programme en ce qui concerne le parking n'a pas varié.
On oublie un peu un dernier argument, c'est que, sans parking de deux cents places situé sous la Maison de l'environnement et le Centre de congrès, les voitures qui amèneraient les congressistes stationneraient dans le quartier des Pâquis. Or, les habitants des Pâquis, à plusieurs reprises, ont précisément demandé que leur quartier soit allégé d'un certain nombre de charges routières. C'est pour cela que, notamment, la Ville de Genève a fait fermer la place Chateaubriant et que le trafic a été en partie détourné sur le quai Wilson. Et tout d'un coup on voudrait, pour deux arbres dont l'un est brûlé et malade et qui, de toute façon...
Une voix. Arrête !
Une autre voix. C'est pas vrai !
Une autre voix. Faites-le taire !
Le président. Continuez, Monsieur Lescaze !
M. Bernard Lescaze. Monsieur le président, je souhaiterais pouvoir parler, mais si les conversations continuent, je prendrai tout mon temps !
Alors, nous sommes donc d'accord... (Eclat de rires général.) ...ces deux arbres ne sont pas sains - je le maintiens - après examen effectué par des gens compétents, même si certains ne voient pas combien ils ont été endommagés par l'incendie. D'ailleurs, les séquoias plantés en Europe ne peuvent pas atteindre la longévité des séquoias d'Amérique, chacun le sait. Je vous rappellerai - argument supplémentaire - que chaque année la Ville plante quelques séquoias. Ce ne sont donc pas des essences rares. Dans ces conditions, je crois que le bon sens veut que l'on prenne en considération les intérêts de la collectivité qui exigent que le Palais Wilson soit rénové, que le programme prévu depuis plusieurs années soit élaboré et que le parking soit réalisé.
C'est pourquoi, je vous invite à accepter les conclusions de la majorité de la commission des pétitions. (Applaudissements.)
M. Michel Balestra. Tu es nommé professeur honoris séquoias !
Mis aux voix, le préavis de la commission (dépôt sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) est adopté.
Le président. Monsieur Lescaze, nous vous écoutons avec impatience !
M. Bernard Lescaze (R). Il y a près d'un siècle, un romancier français célèbre donnait une définition dans la bouche d'un de ses héros d'un parlement. Il disait : «Un parlement qui travaille est un parlement qui se tait.». (Applaudissements, rires, chahut.)
Des voix. Assis ! Assis ! Tais-toi !
M. Bernard Lescaze. Si je suis presque persuadé que c'est bien là la définition du parlement telle que l'envisage le Conseil d'Etat, ce n'est pas la mienne et, donc, je ne vais pas me taire pendant quelques minutes !
Je dois exprimer ma profonde surprise face à certaines décisions du Conseil d'Etat relatives aux nominations dans les commissions extraparlementaires.
En effet, si le Grand Conseil choisit librement, à l'intérieur ou à l'extérieur du Grand Conseil, ses délégués dans les commissions extraparlementaires, le Conseil d'Etat avait, jusqu'alors, l'habitude de procéder à peu près de même tout en suivant les recommandations que pouvaient lui faire, à bien plaire, soit des associations professionnelles, soit des partis politiques, soit même des associations à but idéal. Et il se trouvait parfois dans ces associations, hasard ou nécessité, des députés, voire des gens ayant exercé un mandat politique.
A la fin de l'année dernière, sans semble-t-il qu'on n'y ait beaucoup prêté garde, le Conseil d'Etat, s'appuyant sur une modification de la loi sur les commissions, a, relativement subrepticement, modifié sa politique. Il a en effet considéré - mais sans en prévenir ces associations - que les nominations politiques relevaient de la compétence du Grand Conseil et que seul celui-ci pourrait choisir les représentants ayant une couleur politique, alors que lui ne prétendait nommer que des personnes civiles, c'est-à-dire des gens n'exerçant pas de mandat politique.
Il y avait là, évidemment, une bien fâcheuse confusion qui nous montre que le Conseil d'Etat, malgré sa grande somme de travail, a encore le temps de regarder le petit écran et, notamment, les chaînes françaises pour exercer son esprit critique. En effet, si on peut admettre qu'en France on distingue, d'ailleurs d'une manière artificielle, une société politique et une société civile, parce que les parlementaires français sont des professionnels payés pour cela, chacun d'entre nous dans cette assemblée sait bien ce que veut dire le mot de milicien. Nous sommes des parlementaires de milice. Nous ne sommes pas payés, nous sommes très modestement indemnisés. Nous nous dévouons... (L'orateur insiste sur ce mot.) ...pour la chose publique... (Bravos et applaudissements de la droite.)
Une voix. Bravo, Lescaze, on est les meilleurs ! (Rires.)
M. Bernard Lescaze. Il n'y a donc pas lieu de faire cette distinction entre société civile et société politique pour ce qui concerne Genève. Je dirai même que c'est particulièrement pernicieux, parce que, dans notre démocratie, le fondement de celle-ci repose encore, et je l'espère pour longtemps, sur les partis politiques. Certains ont peut-être la nostalgie des corporations. Nous savons, par expérience, le danger que cela comporte. Si on décidait d'écarter les suggestions des partis dans les nominations faites par le Conseil d'Etat - qui sont quand même l'essentiel des nominations, parce que le Conseil d'Etat nomme bien davantage que le Grand Conseil - on aboutirait à un très mauvais système. En effet, cela priverait certaines personnes qui ont, même s'ils sont députés, même si on peut les considérer comme des citoyens de seconde classe, de l'expérience et qui peuvent apporter une contribution positive à ces commissions extraparlementaires.
Faire de la politique ne veut pas dire être incompétent, contrairement à ce que la décision du Conseil d'Etat pourrait malheureusement laisser croire. D'une certaine manière, elle saperait la démocratie.
Je rappelle que sans les partis politiques le Conseil d'Etat ne serait rien, et sans les députés, il ne serait peut-être pas grand-chose ! (Aahh d'approbation, rires et applaudissements.) Malheureusement, je dois dire que le Conseil d'Etat - qui, lorsqu'on lui en a fait la remarque, a, avec une certaine hauteur, prétendu qu'il avait agi vigoureusement - a lui-même violé les règles qu'il s'est données.
Je vais vous donner deux ou trois exemples seulement. Il a commencé par les violer en nommant le président de la Banque cantonale, puisque celui-ci exerçait un mandat politique, et quel mandat politique ! Il a continué, peut-être par mégarde, puisque nous avons découvert qu'à la commission de la circulation siégeait encore une députée blonde et jeune. Etait-ce qu'elle a échappé au couperet parce qu'elle était socialiste ? C'est particulièrement intéressant. (Rires et commentaires.)
Des voix. Ouhh !
D'autres voix. Son nom ?
M. Bernard Lescaze. Elle n'est pas dans cette salle en ce moment !
Il est curieux de voir que le Conseil d'Etat explique cette nouvelle façon de nommer par sa volonté d'éviter un certain cumul de charges et de fonctions et une volonté de mieux répartir les rôles entre tous les citoyens intéressés aux affaires publiques. Cet argument est d'autant plus étonnant qu'il est avancé par d'honorables personnes revêtues d'un mandat important, celui de conseiller d'Etat, et qui font des pieds et des mains pour rester, l'un à la tête de l'aéroport, l'autre à la tête de l'hôpital... (Rires et applaudissements.)
Il faudra vraiment m'expliquer cette curieuse schizophrénie ! (Rires et applaudissements.)
En conclusion, je souhaite qu'à l'avenir le Conseil d'Etat assouplisse sa pratique, ne procède plus par exclusives contre ceux qui acceptent d'avoir un mandat public, parce que, sinon, nous ne trouverons plus personne pour exercer le mandat de député !
M. Christian Grobet. Ça vous arrive aussi ! Eh bien !
M. Bernard Lescaze. Vous n'avez pas commis, vous le savez bien, Madame et Messieurs, en face de moi... (Hurlements de rires.) ...de crime, mais, à mon avis, vous avait fait une faute politique ! (Bravos et très vifs applaudissement de tous les bancs.)
M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Vous avez raison, l'exercice n'est pas évident !
Tout d'abord, merci, Monsieur le député, Mesdames et Messieurs les députés de nous permettre d'exister ! Vous avez eu raison de nous le rappeler. Après tout, ce n'est pas vous qui l'ignorez, le génie est lié à la schizophrénie, et, grâce à vous, nous savons que nous n'en sommes pas totalement dépourvus ! (Eclat de rires.)
Examinant donc les conditions dans lesquelles notre Conseil a été appelé à désigner les membres des commissions extraparlementaires, vous en déduisez que les députés sont moins bien traités que d'autres citoyens. Tel n'est pas le cas. Votre analyse est fausse, vous le savez, au moins en partie.
Dans la plupart des commissions, les députés bénéficient d'un avantage qu'ils se sont légitimement accordés en prévoyant dans la législation que chaque parti serait représenté. Ainsi, six députés bénéficient d'un siège qui leur est réservé en fonction de leur qualité de député. Il pourrait, en effet, être occupé par quelqu'un d'autre, mais les résultats nous montrent que, généralement, ce sont des députés qui l'occupent. Il appartient au Conseil d'Etat de compléter la composition de ces commissions.
Celui-ci estime qu'il n'a pas à élargir systématiquement la prédominance des députés, mais qu'il doit aussi permettre à d'autres personnes d'assumer de telles responsabilités. Je répète, il ne doit pas le faire systématiquement. Laissons également une large place à ceux qui, sans avoir de mandat électif, acceptent de mettre à disposition de la collectivité genevoise leurs compétences et un peu de leur temps. Cela devrait même vous réjouir.
C'est l'occasion pour notre Conseil de dire à l'ensemble des partis politiques que si nous voulons dynamiser le fonctionnement de nos administrations et celui de nos institutions, il faut également savoir renouveler la composition des commissions, afin de les faire bénéficier de regards nouveaux qui compléteront l'expérience - le talent, devrais-je ajouter ! - acquise par les anciens et, notamment, par les députés qui siègent dans ces commissions.
Au cours de ces derniers mois, le Conseil d'Etat a saisi l'occasion donnée au moment de nouvelles nominations pour élargir son cercle de recrutement, sans tenir compte systématiquement des appartenances politiques, mais en s'intéressant aussi à des personnes dont les expériences et les connaissances pouvaient renforcer les équipes à constituer. Le Conseil d'Etat tente d'intéresser le plus grand nombre de citoyens à la gestion des affaires publiques et de faire un bon usage des forces dont il dispose. Il respecte le travail des députés et ne connaît pas de citoyens de deuxième classe.
Nous remercions et félicitons les députés de leur engagement et de leur disponibilité, comme M. Lescaze l'a rappelé dans son interpellation. Nous nous réjouissons de continuer à travailler efficacement avec vous.
M. Bernard Lescaze (R). En deux mots, je suis satisfait de la réponse de M. Haegi. Elle me prouve, comme à tous mes collègues, combien le Conseil d'Etat est incohérent dans sa position ! Je constate qu'il essaye de faire du neuf avec du vieux ! A mon avis, il n'y a pas tout à fait réussi.
Je le prie malgré tout de réfléchir plus sérieusement aux bases de notre démocratie. Tout le monde souhaite ouvrir le débat le plus largement possible. Il ne s'agit pas de réserver des sièges à des députés; il faut simplement que les personnes qui ont l'expérience des affaires publiques, notamment dans les partis politiques, voient se concrétiser certaines de leurs propositions. D'autre part, nous avons pu constater au cours des dernières nominations que les députés n'étaient pas les seuls à être considérés comme des citoyens de seconde classe. Mais, semble-t-il, c'était le cas de tous ceux qui exerçaient un mandat politique. Dès lors, les gens intéressés à participer à des commissions extraparlementaires ne voudront même plus être candidats, puisque cela représentera ensuite un handicap pour être choisis par le Conseil d'Etat.
Nous ne voulons pas de cette absurdité !
M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Je pense, Monsieur le député, que les mots que vous venez de prononcer ont un peu dépassé votre pensée !
M. Bernard Lescaze. Je ne le crois pas !
M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Vous ne pouvez pas porter un tel jugement sur les personnes qui ont été désignées dans des commissions. Ce n'est guère aimable pour eux de dire que nous faisons du neuf avec du vieux ! Je conçois, par contre, que vous attiriez notre attention sur le fait que vous ne devez pas être tenus à l'écart d'un certain nombre d'activités. Nous avons bien retenu votre message et nous n'avons imaginé que ce soit le cas. Nous vous avons expliqué dans quel esprit nous avions pris cette décision...
M. Christian Grobet. Vous avez pris combien de gens de la gauche ? (Grand chahut.)
M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat, s'adressant à M. Grobet. Rappelez-moi votre nom ! (Rires et chahut.)
L'interpellation est close.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi sur les heures de fermeture des magasins, du 15 novembre 1968, est modifiée comme suit:
CHAPITRE II
Fermeture le soir
SECTION 1
Principes généraux
Art. 9, al. 1 (nouvelle teneur)
Heures normales de fermeture
1 Sous réserve des régimes particuliers indiqués ci-après, ou prévus par le règlement, et des dispositions relatives aux fermetures retardées, les magasins doivent être fermés, du lundi au vendredi à 19 h 30, le samedi à 18 h pour les magasins appartenant essentiellement à la branche de l'alimentation et à 17 h pour les autres magasins.
SECTION 3
Fermetures retardées (intitulé, nouvelle teneur)
Art. 14 (nouvelle teneur)
Fermeture hebdomadaire
Les magasins peuvent rester ouverts un soir par semaine jusqu'à 20 h. Les conditions relatives, notamment, à l'occupation du personnel sont fixées par le département d'entente avec les associations professionnelles intéressées.
Art. 14 A (nouveau)
Fermeture en décembre
Pendant la période du 10 décembre au 3 janvier, les magasins peuvent rester ouverts, en plus de l'ouverture hebdomadaire jusqu'à 20 h, deux soirs jusqu'à 21 h 30 avec faculté de servir la clientèle jusqu'à 22 h. Les conditions relatives, notamment, à la compensation des heures supplémentaires et à l'occupation du personnel sont fixées par le département d'entente avec les associations professionnelles intéressées.
Art. 15 (nouvelle teneur)
Désignation des soirs
Le département, après avoir pris l'avis des associations professionnelles intéressées, désigne chaque année le soir pour la fermeture retardée hebdomadaire. Il procède de la même manière pour les 2 soirs de décembre.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Préambule
A Genève, le commerce de détail est la branche économique qui offre le plus d'emplois; 22 000 personnes occupées, réparties dans 3600 éta-blissements et 5000 points de vente. Cette activité économique permet de verser plus de 800 millions de F de salaires et dégage une valeur ajoutée de 1,1 milliard de F. C'est dire son importance.
Mais ce secteur est également atteint par la crise, qui affecte l'ensemble des pays industrialisés; les revenus ont diminué ou pour le moins stagné, la consommation a fléchi. Le commerce de détail se trouve ainsi touché après des années de progression régulière des affaires.
En outre, le commerce de détail genevois est placé devant une situation concurrentielle toujours plus vive vis-à-vis des surfaces de distribution qui, situées à proximité immédiate de nos frontières cantonales, sont aisément accessibles et bénéficient d'un régime d'ouverture plus souple.
La loi sur les heures de fermeture des magasins (LHFM) et sa dernière révision
Le régime actuel des heures de fermeture des magasins est fondé sur la loi cantonale du 15 novembre 1969 (LHFM J 3 14).
Cette loi a été révisée pour la dernière fois en 1991 après que les associations patronales et les syndicats, qui constituent les principaux acteurs économiques et sociaux du commerce de détail genevois, se furent mis d'accord pour renoncer à l'obligation de fermeture des magasins une demi-journée par semaine en plus du dimanche et pour introduire la semaine de travail de 5 jours dans leurs conventions collectives.
Indépendamment de la suppression de l'obligation de fermeture précitée, la révision de 1991 introduisit également diverses possibilités d'ouverture prolongées de magasins lors de circonstances spéciales (modèles nouveaux, inaugurations, signatures d'ouvrages dans les librairies, expositions d'art, etc.).
L'initiative populaire de 1988
Il y a lieu de rappeler qu'en 1988 une initiative populaire menée par le Groupement des jeunes dirigeants d'entreprises tendait à permettre une ouverture hebdomadaire des magasins jusqu'à 21 h 30.
Cette initiative échoua en votation populaire. Il est probable que parmi les raisons de cet échec se trouve le fait que les partenaires sociaux du secteur en question n'avaient pas été suffisamment associés à l'élaboration de ce projet. Ainsi, les organisations concernées se présentèrent divisées devant l'opinion publique, faute d'avoir eu la possibilité de se concerter suffisamment tôt pour tenter de trouver des solutions de convergence, notamment en ce qui concerne le régime de compensation à accorder au personnel.
Depuis l'échec de l'initiative populaire précitée, le Conseil d'Etat a eu l'occasion de dire qu'un réexamen de la question d'une fermeture retardée des magasins était souhaitable, compte tenu de la situation devant laquelle se trouvait le commerce de détail genevois et des difficultés économiques générales, d'une part, et du contexte concurrentiel particulier que nous connaissons à Genève, d'autre part. Ce faisant, le Conseil d'Etat a également clairement indiqué que la remise sur le métier de cette question n'était possible que dans la mesure où les partenaires sociaux de la branche parviendraient à un accord préalable.
Le renouvellement de la convention collective
Les parties signataires de la convention collective de travail du commerce de détail non alimentaire, soit les associations de détaillants rattachées à la Fédération patronale genevoise du textile et de l'habillement (détaillants en textiles, marchands de chaussures, magasins d'articles de sport, maroquiniers), d'une part, et l'Association des commis de Genève, la Fédération suisse des travailleurs du commerce, des transports et de l'alimentation - section de Genève, la Société suisse des employés de commerce, le Syndicat interprofessionnel des travailleuses et travailleurs, d'autre part, sont entrés en négociation au début de l'année 1993 dans le contexte du renouvellement de cette convention collective.
Ayant pris en considération des paramètres importants, comme l'état du marché, la concurrence, l'emploi et la situation de la branche, ainsi que le cadre juridique entourant l'activité du commerce genevois, les partenaires sociaux sont parvenus à un accord permettant le renouvellement de la convention collective pour une durée de 4 ans, soit du 1er janvier 1994 au31 décembre 1997. Ce renouvellement a en outre permis aux parties signataires de s'entendre pour:
a) permettre aux commerces genevois de rester ouverts une fois par semaine jusqu'à 20 h;
b) améliorer les conditions de travail du personnel de la vente.
Les dispositions arrêtées par les partenaires sociaux pour l'ouverture prolongée figurent ainsi dans la nouvelle convention collective de travail. L'accord vise une fermeture à 20 h et l'octroi au personnel d'une pause supplémentaire dans les magasins qui utiliseront cette faculté, et cela dans la mesure où la LHFM est modifiée pour prévoir expressément cette ouverture prolongée.
C'est dans ce contexte que la «Commission paritaire du commerce de détail non alimentaire» a expressément demandé d'instaurer une ouverture prolongée des magasins un soir par semaine jusqu'à 20 h.
Les caractéristiques de la modification proposée
1. L'avantage d'une fermeture repoussée à 20 h réside sur le plan légal dans le fait que le personnel ne sera pas amené à dépasser les limites du travail de jour, telles qu'elles sont fixées par la loi fédérale sur le travail. Par ailleurs, les partenaires sociaux n'ont pas eu besoin de se mettre d'accord sur des compensations particulières, puisque le personnel qui sera appelé à travailler jusqu'à 20 h n'effectuera pas de travail supplémentaire et ne dépassera pas, par conséquent, la limite maximum de 40 h par semaine fixée par le convention collective.
2. L'ouverture prolongée des magasins jusqu'à 20 h, une fois par semaine, ne constituera certes pas la panacée et ne permettra évidemment pas, à elle seule, de résoudre tous les problèmes que rencontre le commerce genevois face à la concurrence des grandes surfaces et centres commerciaux implantés dans les régions périphériques, que ce soit dans le canton de Vaud ou en France voisine.
Il s'agit cependant d'une mesure qui sera ressentie de manière positive par les consommateurs, dont les habitudes en matière d'achat ont fon-damentalement changé au cours de ces dernières années, en particulier pour les couples dont les conjoints exercent tous deux une activité lucrative. Elle permettra également une animation supplémentaire dans les principales zones commerciales de notre canton, ce qui est susceptible de contribuer à la promotion de l'image d'un commerce genevois dynamique et accueillant.
3. Les dispositions de la LHFM et leurs adaptations ont toujours été le résultat d'un consensus avec les partenaires sociaux. Aujourd'hui, et dans le même sens, la proposition qui vous est soumise prévoit que le département de l'économie publique fixe d'entente avec les associations professionnelles les modalités relatives à l'occupation du personnel dans ce secteur. Il est apparu en effet indispensable que les mesures de politique sociale concernant l'occupation du personnel puissent être adaptées à l'évolution économique du commerce de détail. Il s'agit d'une manière de procéder usuelle dans ce domaine.
Il sied de rappeler ici qu'une contrainte stricte est imposée par le respect de la législation fédérale sur le travail; cette dernière fixe en effet un cadre sur lequel le droit cantonal, soit notamment la LHFM, ne saurait empiéter, même en cas de consensus de toutes les parties intéressées. Les éventuelles modifications de la loi cantonale, de même que toutes mesures visant à introduire une plus grande flexibilité dans l'exercice du commerce, ne devraient en aucun cas entraîner une détérioration de la situation du personnel de vente.
4. Enfin, les associations professionnelles intéressées et les syndicats signataires de la convention collective, bien qu'ayant décidé de retenir le jeudi, ont estimé que le jour choisi pour l'ouverture prolongée ne devait pas figurer dans la loi. En effet, une telle précision constituerait un élément de rigidité, puisque le législateur serait obligé de modifier la loi si, expérience faite, les associations professionnelles et syndicales décidaient de porter leur choix sur un autre jour.
Il appartiendra donc au département de l'économie publique de fixer le jour de l'ouverture prolongée, après consultation des milieux intéressés, comme cela se fait depuis de nombreuses années pour les nocturnes de décembre.
Travaux de la commission consultative
Immédiatement après qu'un accord fut intervenu pour le renouvellement de la convention collective, le chef du département de l'économie publique prit la décision de réunir une commission consultative regroupant tous les milieux intéressés (représentants des associations patronales du commerce de détail, des syndicats du personnel de la vente, de la Chambre de commerce et d'industrie de Genève, de la Fédération romande des consommatrices).
La commission consultative à l'issue de ses travaux put prendre acte de l'adhésion de tous les participants au principe de l'ouverture prolongée des magasins.
Deux points ont cependant suscité des réactions qu'il convient de mentionner:
a) L'idée fut émise de n'accorder l'octroi d'une ouverture prolongée qu'aux seuls commerçants qui respecteraient les usages professionnels de la branche concernée. Comment «ancrer» juridiquement cette obligation dans la LHFM, comme le souhaitaient les syndicats?
b) Une proposition fut présentée de contraindre tous les commerces à pratiquer l'ouverture prolongée, comme le souhaitaient les représentants des petits commerces.
La première proposition n'a pu être résolue de manière satisfaisante en commission; toutefois une solution ultérieure a été trouvée et concrétisée par la nouvelle teneur de l'article 14 du projet de modification de la LHFM. On voudra bien se reporter ci-après au commentaire, article par article.
La deuxième proposition faite par les milieux du petit commerce traduit la crainte qu'une ouverture prolongée hebdomadaire profite uniquement aux magasins du centre-ville ainsi qu'aux centres commerciaux. Il est notoire que les petits commerces bénéficient de l'animation créée par les grandes surfaces qui drainent une importante clientèle. Ainsi, en cas d'ouverture hebdomadaire prolongée par secteurs géographiques, seuls les endroits où se trouvent des grands commerces ouverts attireraient des consommateurs au détriment des petits commerces décentralisés.
Or, malgré le souci légitime des représentants du petit commerce, la LHFM reste une loi de police, qui fixe les heures de fermeture des magasins; en d'autres termes, cette loi n'a pas le pouvoir d'imposer l'ouverture des commerces. Toutefois, la Fédération de syndicats patronaux, Coop et Migros, ont expressément déclaré par écrit vouloir ouvrir une très large majorité de leurs magasins et succursales et ne pas se limiter à retenir cette opportunité uniquement au centre-ville ainsi que dans les centres commerciaux.
Commentaire article par article
Article 9, alinéa 1
On vise en plus les dispositions concernant les fermetures retardées. Il s'agit là d'une simple adaptation technique.
Section 3 (nouvel intitulé)
La loi actuelle ne concerne que les fermetures retardées en décembre. Il convient dès lors d'élargir le champ d'application de cette section.
Article 14
Cette disposition renferme le principe de la fermeture hebdomadaire retardée.
Les conditions particulières de cette fermeture hebdomadaire retardée, concernant notamment le respect des usages, seront fixées par le département de l'économie publique d'entente avec les partenaires sociaux. Une telle pratique est utilisée à satisfaction depuis de nombreuses années pour l'ouverture des magasins le 31 décembre.
Article 14 A
Reprise du principe des nocturnes de décembre, qui seront cumulables avec l'ouverture hebdomadaire jusqu'à 20 h. En d'autres termes, les magasins qui pratiquent les nocturnes en décembre peuvent également bénéficier de l'ouverture hebdomadaire prolongée au cas où celle-ci tombe un autre jour.
Article 15
Comme cela se fait pour les noctures de décembre, le département de l'économie publique fixera, par arrêté et en accord avec les organisations professionnelles intéressées, le jour de l'ouverture hebdomadaire jusqu'à 20 h. Ce jour devra pour chaque semaine demeurer le même pendant une année au moins.
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En conclusion, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à approuver cette modification de la LHFM. S'inscrivant dans le cadre d'un renouvellement de la convention collective du commerce de détail non alimentaire entérinant une amélioration du statut des vendeuses et vendeurs, elle permet au commerce genevois de bénéficier de meilleures conditions pour affronter la concurrence et maintenir des emplois.
Préconsultation
M. Gilles Godinat (AdG). Après les nocturnes refusées par le peuple en 1988 et après la compensation accordée aux entreprises avec la prolongation de l'ouverture des magasins six jours sur sept, le Conseil d'Etat, avec le présent projet de loi, veut nous faire l'article pour le crépuscule !
A notre avis, il faut situer cette proposition dans le contexte des conditions-cadre pour l'économie genevoise que certains députés libéraux ont développées dans la motion 919, en particulier la flexibilité des horaires comme atout dans un régime de compétitivité accrue et de concurrence exacerbée. Effectivement, les enjeux d'une telle proposition doivent être examinés à différents niveaux : économique, syndical, social et culturel.
Sur le plan économique, le domaine de la vente et du commerce de détail plus particulièrement est dans un champ de tensions important. L'existence de nocturnes dans la région limitrophe est une concurrence réelle, mais quelle part attribuer à la concurrence sur les prix relativement à la concurrence sur les horaires ? Et en quoi l'ouverture modifierait-elle le comportement des consommateurs ? Une chose est certaine : le marché genevois pour le commerce de détail ne peut s'étendre dans la mesure où la consommation est proportionnelle au pouvoir d'achat de la population locale. Le phénomène le plus préoccupant n'est pas tant l'existence de quelques grandes surfaces dans la zone frontalière, voire sur le canton de Vaud, avec leurs horaires rallongés, mais la concurrence entre les grandes surfaces et le petit commerce à Genève.
Il faut savoir que le commerce de détail représente trois mille six cent neuf établissements, soit 16,5% des entreprises du canton avec vingt-deux mille emplois, donc 8,5% du total. 75% de ce total comptent entre un et quatre employés. Ce sont donc de très petites entreprises, voire des entreprises familiales. 23% comptent entre cinq et quarante-neuf employés et 1,4% restant occupe huit mille personnes, soit plus d'un tiers de ce secteur. L'enjeu d'une ouverture prolongée est actuellement plutôt favorable aux grandes surfaces et représente une menace pour le petit commerce. Ce dernier, avec peu de personnel, ne peut assurer des ouvertures prolongées aussi facilement que les grands commerces et, à terme, peut entraîner une perte d'emplois substantielle dans le secteur du petit commerce justement, avec des faillites ou des disparitions d'établissements.
Sur le plan syndical, il faut souligner ici d'emblée deux éléments. Une enquête interne, effectuée dans les magasins de la Placette, confirmée par son directeur, M. Beaulacre, établit que 80% du personnel de vente est opposé à l'ouverture jusqu'à 20 heures. Une enquête ayant réuni 844 réponses auprès du personnel de vente confirme ce résultat. 88% de réponses disent non à l'ouverture hebdomadaire jusqu'à 20 heures. Sur ces réponses 25% signalent en outre que l'heure de retour au domicile se situerait après 21 heures et pour 94% vers 20 h 45. Je ne vous décris pas ici les conséquences sur la vie de famille et sur la santé du personnel.
Rappelons encore que la loi fédérale sur le travail fixe à cinquante heures la durée légale du travail dans ce secteur, ce qui est très fréquent dans les petits commerces, sans compter les heures supplémentaires qui peuvent également atteindre deux cent vingt heures par an. La moitié du personnel de vente est frontalière. 56% sont des femmes, contre 45% pour l'ensemble du tertiaire. Ce personnel est peu syndiqué, ainsi les rapports de force sont peu favorables au personnel qui connaît donc des conditions salariales et des conditions de travail de moindre qualité que dans d'autres secteurs. Je reviendrai un peu plus loin sur la convention collective de travail récemment signée.
Sur le plan social, le problème des consommateurs touche directement la répartition entre le temps de travail et le temps de loisirs. Le temps d'achat n'appartient ni à l'un ni à l'autre. Il fait plutôt partie du temps indispensable pour se procurer les biens de première nécessité. Nous nous battons sur ce plan pour une nouvelle répartition entre une diminution du temps de travail, ce qui laisserait plus de temps pour les achats nécessaires, entre autres, sans avoir besoin d'une ouverture vespérale.
Sur le plan culturel, présenter l'activité d'achat comme une animation des centres commerciaux du centre-ville en particulier est un point de vue que nous ne partageons évidemment pas. Le «shopping» ne représente pas à nos yeux le «must» en matière d'émancipation et de créativité.
J'aborde le plan plus concret de la nouvelle convention collective qui représente incontestablement un progrès par son extension au personnel auxiliaire. Il y a par contre une possibilité de flexibilité accrue pour 20% du personnel fixe à temps partiel, entre autres. D'autre part, les vendeuses ne connaissent toujours pas les deux jours consécutifs de congé par semaine. Enfin, la compensation du quart d'heure de pause payée pour l'ouverture jusqu'à 20 heures existe déjà dans plusieurs établissements. Enfin, l'accord entre les partenaires sociaux lie l'ouverture hebdomadaire jusqu'à 20 heures à la condition expresse et incontournable de l'application des usages de la branche par les magasins. Les usages professionnels du commerce de détail de vente alimentaire sont actuellement en discussion, car ce document vient d'être adressé aux organisations concernées.
L'exposé des motifs du projet de loi parle d'un arrêté du Conseil d'Etat fixant les conditions ad hoc. Les organisations syndicales, dans leur lettre adressée à tous les députés de ce Grand Conseil le 20 mai 1994, insistent en précisant que le lien conditionnel n'est pas précisé dans le texte, alors qu'il représente, pour eux, un verrou.
Ce point semble soulever des problèmes juridiques délicats, raison pour laquelle nous demandons des éclaircissements en commission avec audition des personnes concernées.
M. Claude Blanc (PDC). Ce projet de loi est le fruit, une fois de plus, d'une concertation entre tous les milieux intéressés en vue d'améliorer la situation du commerce genevois. C'est un but dont on connaît les difficultés, eu égard à la concurrence de nos amis français et vaudois.
Je me souviens avoir participé, en tant que président du Grand Conseil, à l'inauguration du centre commercial de Chavannes où j'avais été aimablement invité. Vous le savez, j'ai le sens de l'humour, mais je ne l'ai pas tant quand il s'exerce à mes dépens ! Or, je n'ai pas beaucoup aimé le passage du discours de M. Ruey, conseiller d'Etat, qui se félicitait de l'ouverture de ce centre commercial important dont l'exploitation sera facilitée par la politique restrictive des autorités genevoises. Evidemment, tout le monde s'est esclaffé, sauf moi, parce qu'il mettait le doigt sur une différence qui n'est pas à notre avantage. Les autres, en fait, essayent de profiter de nos insuffisances dans la lutte qui s'est engagée, notamment pour le maintien de l'emploi. Nous ne pouvons pas continuer à nous laisser «danser sur le ventre» par nos voisins, si j'ose utiliser cette expression !
Cette loi - je le disais tout à l'heure - est le fruit d'une concertation entre tous les milieux intéressés, ce qui est important. J'ai reçu, comme vous tous, la lettre des organisations syndicales demandant à être entendues. En tant que président de la commission de l'économie, il est bien clair que je ferai tout le nécessaire pour que toutes les personnes intéressées soient entendues, notamment les représentants des petits commerçants. Il est vrai qu'ils ont des problèmes supplémentaires pour les horaires, car ils ont peu de personnel, alors que les grandes surfaces ont plus de facilité pour gérer une ouverture prolongée. Ils ont demandé que toutes les grandes surfaces utilisent la faculté qui leur est donnée, en espérant que leur ouverture dans certains quartiers périphériques permettra d'animer aussi le petit commerce. Cette disposition n'est pas inscrite dans le projet de loi, mais je crois qu'elle correspond à une demande que la commission appréciera attentivement. Celle-ci verra de quelle manière le Conseil d'Etat pourrait y répondre à défaut d'inscrire dans la loi des dispositions trop contraignantes.
La commission de l'économie va se charger maintenant de ce projet, car nous l'avons déjà agendé pour lundi prochain. Je vous assure qu'elle fera le maximum pour que tout le monde soit entendu et que cette loi, finalement, soit le résultat d'un consensus le plus général possible.
Mme Claude Howald (L). Le groupe libéral salue ce projet de loi, parce que, enfin, les Genevois, comme les ressortissants des autres cantons, pourront une fois par semaine - et c'est peu - faire leurs courses jusqu'à 20 heures. Il était grand temps que le commerce de détail genevois dispose d'armes un peu meilleures pour résister à la concurrence transfrontalière et transcantonale. Le groupe libéral salue également le fait que les partenaires sociaux soient parvenus à s'entendre dans le contexte du renouvellement de la convention collective de la branche, pour permettre au commerce genevois de rester ouvert jusqu'à 20 heures une fois par semaine et contribuer ainsi à améliorer les conditions de travail dans ce secteur.
Il faut d'ailleurs rappeler qu'à professions égales les conditions garanties par la convention collective genevoise sont meilleures que celles des autres cantons. Les nouvelles dispositions permettront aux collaborateurs du secteur de mieux organiser leur temps de travail, puisque l'accord stipule expressément que l'horaire hebdomadaire ne pourra en aucun cas dépasser quarante heures. Du reste, la contrainte stricte imposée par la législation fédérale interdit la détérioration de la situation et des conditions de travail du personnel de la vente, même en cas de consensus de toutes les parties concernées. C'est dans ces termes que la convention collective de travail a été renouvelée et qu'elle sera respectée.
Pour la branche concernée, cette ouverture retardée jusqu'à 20 heures doit être considérée comme un premier pas vers un élargissement des heures d'ouverture des magasins, puisqu'en termes de concurrence - je l'ai déjà dit - nos voisins immédiats offrent aux consommateurs des possibilités d'achats beaucoup plus larges. Le commerce genevois doit pouvoir s'affirmer; il doit pouvoir montrer qu'il sait accueillir les clients d'ici et d'ailleurs et qu'il peut, lui aussi, contribuer à l'animation de la cité et des zones commerciales.
Enfin, l'ouverture retardée à 20 heures, le jeudi, offre aux consommateurs la possibilité d'effectuer leurs achats sur d'autres plages horaires. Cela correspond - plusieurs études le montrent - à l'évolution des habitudes de consommation. De plus en plus, nous le savons tous, nous effectuons notre shopping autrement, souvent sur des plages horaires qui s'inscrivent dans des moments de loisirs. En d'autres termes, nous pratiquons de plus en plus volontiers ce que l'on pourrait appeler le «shopping-loisir». Le jeudi soir, ce sera possible également pour les Genevois.
C'est pour toutes ces raisons que le groupe libéral compte sur vos suffrages pour renvoyer ce projet de loi à la commission de l'économie.
M. Jean-Philippe de Tolédo (R). Lorsque l'on envisage de prolonger les heures d'ouverture des magasins, bien entendu, se pose la question de la relation entre employés et employeurs, comme l'a d'ailleurs très justement relevé M. Godinat. Si cette relation est importante, il faut rappeler que son existence dépend d'un facteur extérieur qu'on a, malheureusement, tendance à trop oublier : le client !
En effet, sans client pas de commerce, et sans commerce pas d'emplois ! Aujourd'hui, le client privilégie - beaucoup d'études le montrent, comme Mme Howald l'a dit - ses achats, notamment selon les critères de prix, de l'accueil et du confort d'achat, c'est-à-dire des horaires d'ouverture des magasins adaptés à son activité. Beaucoup d'entre vous qui êtes ici en profitent d'ailleurs souvent, le dimanche et les samedis soir, en zone frontalière. J'y viens, car on oublie trop souvent que Genève n'est pas entourée d'une muraille au-delà de laquelle s'étend un vaste désert. Nous avons 110 kilomètres de frontière avec la France !
Au cours des dernières années, l'offre commerciale de la zone frontalière s'est considérablement développée, tant en qualité qu'en quantité. Les conditions favorables d'exploitation dont bénéficient les commerçants français - je veux parler des loyers, bien sûr, qui sont le tiers, voire la moitié des loyers d'ici, idem pour les salaires, des procédures administratives qui sont beaucoup plus rapides que chez nous, certains exemples de distributeurs récemment installés le prouvent - leur permettent d'afficher des prix dans certains secteurs plus attractifs. En ce qui concerne les horaires d'ouverture, les magasins de la zone frontalière peuvent ouvrir jusqu'à 21 heures tous les soirs, samedi compris et pendant les jours de fête le dimanche. Cela est bien pratique et - je le répète - beaucoup d'entre nous en profitent.
Le commerce genevois doit donc faire face à cette concurrence très forte et il lutte à armes inégales. En conséquence, ces 60 minutes additionnelles, une fois par semaine, qui vous sont demandées constituent avant tout un signal manifestant une volonté de prendre en considération la situation difficile dans laquelle se trouve le commerce genevois et de l'aider à y faire face, car de nombreux emplois en dépendent.
Ainsi donc et pour donner le temps à chacun de se convaincre de la nécessité - je dirais même de l'impérieuse nécessité - d'obtenir cette heure additionnelle une fois par semaine, le groupe radical accepte le renvoi de ce projet en commission de l'économie, en souhaitant néanmoins qu'il en ressorte le plus vite possible !
Mme Micheline Calmy-Rey (S). Le projet de loi qui nous est soumis ce soir est important. Il améliore en effet les conditions-cadre et la compétitivité des entreprises dans un secteur qui a bien souffert ces dernières années. Le commerce de détail comptait cent cinquante chômeurs en juillet 1990. Il en comptait plus de mille deux cents en janvier 1994 !
Sans être un remède-miracle aux problèmes rencontrés aujourd'hui par le commerce genevois face à la concurrence vaudoise et à la concurrence française, on peut penser que l'ouverture retardée sera une mesure utile, pour autant qu'elle ne conduise pas à une précarisation des conditions de travail des employés de la branche.
C'est sur ce point que je souhaiterais intervenir plus précisément. Les organisations syndicales signataires de la convention collective de travail du commerce de détail non-alimentaire ont, en effet, informé tous les députés qu'elles avaient obtenu de la commission paritaire qu'elle lie la modification de la loi permettant l'ouverture des magasins jusqu'à 20 heures au respect des conditions de travail en usage dans ce secteur.
L'enjeu de la discussion au sujet de ce rapport de conditions est très important, puisqu'il s'agit de développer la protection sociale de près de six mille vendeurs et surtout vendeuses. Une enquête de «Genève gagne» portant sur le commerce de détail fait état d'un salaire statistique moyen de 3 078 F par mois pour du personnel non-qualifié, c'est-à-dire sans certificat fédéral de capacité, alors que, pour les autres secteurs de l'économie, le même salaire se monte à 3 910 F par mois.
Certes, les entreprises affiliées à la convention collective de travail font des efforts pour améliorer les conditions de travail et de salaire dans la vente. Mais il n'en reste pas moins que l'on rencontre des cas de magasins non-soumis à la convention dont les salaires sont inférieurs à 2 500 F. On y trouve des statuts d'auxiliaires qui travaillent quasiment sur appel; cela signifie que si ces auxiliaires ne sont pas appelés, ils ne touchent pas de chômage, pas de LPP ni de perte de gain. On y trouve des gens qui travaillent quarante-cinq, parfois cinquante heures par semaine sans protection sociale. Dans quelques magasins, des requérants d'asile sont employés à plein-temps pour des salaires avoisinant 1 500 F par mois ! L'extension du respect des conditions de travail en usage aux employés du secteur qui ne sont pas couverts par la convention collective touche les personnes les plus mal protégées dans un secteur déjà défavorisé.
Vous comprendrez donc l'importance, pour nous, d'étendre la protection sociale offerte par la convention collective et, par conséquent, d'obtenir des garanties pour éviter que des magasins puissent bénéficier d'une ouverture prolongée sans conditions aucunes. Or, j'ai lu attentivement le projet de loi et son exposé des motifs et je n'y ai pas trouvé de texte, ni d'engagement précis conditionnant une ouverture prolongée au respect des usages. Bien sûr, on pourrait évoquer des arguments juridiques pour refuser l'inscription du rapport de condition demandé par les organisations syndicales dans la loi.
Il me semble me souvenir cependant que nous avions eu le même type de débat en 1991 à propos d'une loi sur les heures de fermeture des magasins et qu'à l'époque vous aviez, Monsieur Maitre, défendu l'inscription dans la loi d'une possibilité d'ouvrir six jours par semaine conditionnée au respect de la semaine de cinq jours pour les employés. Nous sommes exactement dans le même cas de figure, celui de la possibilité d'ouvrir jusqu'à 20 heures liée au respect aux normes en usage dans la branche. Il ne s'agit pas, en définitive, d'un problème juridique, il s'agit de joindre l'amélioration des conditions-cadre pour les entreprises de la branche à l'extension d'une clause de protection sociale aux travailleurs et aux travailleuses non-couverts par une convention collective de travail. En 1991, les partenaires sociaux et le Conseil d'Etat, c'est-à-dire vous-mêmes, s'étaient engagés en ce sens, en inscrivant ce rapport de condition dans la loi. La logique juridique avait été ainsi subordonnée à la logique politique.
Le projet de loi qui nous est soumis illustre un processus de création législative marqué au départ par un accord entre les partenaires sociaux. Le groupe socialiste a toujours prôné dans cette enceinte le respect de tels accords. Il doit malheureusement regretter aujourd'hui que le Conseil d'Etat ne le concrétise pas entièrement dans la loi et reste d'une discrétion remarquable dans ses intentions à cet égard ! Et pourtant, les partenaires se sont exprimés; ils vous ont écrit, en date du 4 mars, pour vous prier de bien vouloir conditionner le respect des usages et l'ouverture hebdomadaire retardée.
Dès lors, la volonté des partenaires sociaux est connue, et il nous appartient à nous, Grand Conseil et Conseil d'Etat, de faire en sorte que les articles de loi adoptés soient formulés de telle manière que cette volonté soit respectée. La raison de l'action politique nous conduit ici directement à conjuguer les intérêts économiques et les intérêts sociaux tels que les partenaires sociaux l'ont exprimé. Il ne s'agit pas, Monsieur Maitre, d'une question juridique, il s'agit d'un engagement pour plus d'équité sociale. C'est la raison pour laquelle je vous demande de vous exprimer clairement, ici même et ce soir, sur ce sujet et de nous dire votre volonté de conditionner le respect des usages à l'ouverture retardée. J'attends votre réponse.
Pour ce qui concerne le parti socialiste, nous accepterons la loi pour autant qu'il y ait clarification sur ce point. Dans le cas contraire, c'est-à-dire si la logique économique devait l'emporter sur la dimension sociale, nous la combattrions.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Lorsque l'initiative populaire sur les nocturnes a obtenu le résultat que vous connaissez devant le peuple, c'est parce que les partenaires sociaux n'avaient pas été associés à son élaboration par ses auteurs et parce qu'ainsi ils s'étaient présentés devant l'opinion publique en rangs dispersés et sans accord entre eux. Cela montre bien quel est l'enjeu en cette matière : il n'y a pas de progrès possibles dans le domaine des conditions-cadre dans le commerce de détail sans un dossier qui ait pu être mûri préalablement avec les partenaires sociaux.
Dans le cadre de la révision qui vous est aujourd'hui soumise, j'ai transmis aux partenaires sociaux le désir du Conseil d'Etat, il y a de cela plusieurs mois, de remettre ce dossier sur le métier et de procéder, compte tenu du contexte concurrentiel particulièrement vif dans lequel se trouve le commerce de détail genevois, à l'examen d'une ouverture prolongée hebdomadaire. J'ai très clairement exprimé aux partenaires sociaux qu'il était inconcevable que nous allions de l'avant sans que la question des conditions de travail ait fait l'objet d'un accord entre eux. C'était une opportunité tout à fait intéressante pour le renouvellement de la convention collective de la branche. C'est dans ce contexte que les partenaires sociaux ont travaillé avec la volonté d'aboutir, malgré les difficultés, car ce n'était pas simple. Je tiens à rendre hommage à leur volonté, car c'est grâce à cela qu'ils ont pu inclure, dans leurs négociations globales relatives à la convention collective, un accord sur une fermeture retardée des magasins à 20 heures, une fois par semaine.
Effectivement, il est important d'améliorer les conditions-cadre qui président à l'activité du commerce de détail, parce que - et même si cela ne sera pas la panacée - ce plus qui sera apporté lui permettra d'être un peu mieux placé face à la concurrence française et vaudoise.
En ce qui concerne la situation en France et dans le canton de Vaud, nous nous trouvons dans un contexte différent de celui de Genève, parce que, dans notre canton, nous attachons de l'importance, Madame Calmy-Rey, aux conditions de travail. Dans le canton de Vaud, des ouvertures prolongées ont été accordées. En France, certains commerces sont même ouverts le dimanche sans que les répercussions de ces ouvertures sur les conditions de travail du personnel soient sérieusement prises en compte. Nous ne voulons pas de cela à Genève, et c'est la raison pour laquelle nous avons mis en place un système qui a deux axes très clairs. Nous voulons un plus pour dynamiser le commerce de détail genevois, mais il est exclu que ce plus se traduise par un moins pour les conditions de travail des employés.
Vous me pardonnerez - nous n'avons pas fait d'analyse exhaustive - mais je crois qu'il n'est pas exagéré de dire que les conditions de travail du commerce de détail genevois telles que fixées dans la convention collective n'ont probablement pas d'équivalent dans le monde entier !(Mme Hottelier éclate de rire et hoche la tête.)
Madame, plutôt que de ricaner, si vous me trouvez une convention collective qui offre davantage que la convention collective genevoise, je m'engage à la soumettre sans délai aux partenaires sociaux pour qu'ils essayent de faire au moins aussi bien. Jusqu'à présent on ne m'en a pas montré ! D'ailleurs, si vous estimez que ces conditions de travail sont si mauvaises, c'est en quelque sorte un désaveu ou une défiance vis-à-vis des organisations syndicales qui ne sont pas si laxistes que cela. Je ne crois pas qu'elles pourraient accepter une convention collective qui ne serait pas bonne.
Cela étant dit, pour que nous mettions en place un système nouveau il faut que nous respections un cadre juridique complexe, parce que la marge de manoeuvre pour le législateur cantonal est réduite à sa plus simple expression. Vous savez que tout ce qui est lié aux conditions de travail appartient au droit fédéral et est déterminé soit dans le cadre de la loi, code des obligations, soit dans le cadre du contrat individuel de travail, qui trouve sa base légale dans le code des obligations, soit dans le cadre des conventions collectives, qui appartiennent aux partenaires sociaux. En d'autres termes, sauf pour la fonction publique, le législateur cantonal n'a pas le droit de fixer des conditions de travail. C'est un domaine qui est réservé au législateur fédéral. C'est en fonction de cette marge de manoeuvre extrêmement réduite que nous voulons agir, parce que nous partageons cette préoccupation. Sur le plan politique, il n'est pas question que les conditions de travail du personnel soient péjorées.
L'autre difficulté réside dans le fait que nous n'avons pas la compétence pour décréter une extension arbitraire du champ d'application d'une convention collective à des entreprises qui ne sont pas soumises à la convention collective si les majorités cumulatives en nombre d'employés et d'entreprises concernés prévues par le droit fédéral ne sont pas réunies. A Genève, à l'heure actuelle la convention collective concerne un certain nombre d'entreprises et d'employés, mais pas au point que nous puissions imposer l'extension de la convention collective.
C'est la raison pour laquelle, avec les partenaires sociaux, nous avons trouvé un chemin assez étroit - j'aimerais sur ce point vous rassurez pleinement - qui est déjà appliqué pour le 31 décembre. Nous sommes également en dehors du système prévu par la LHFM et nous agissons par arrêté, en tenant compte des conditions de travail fixées par les partenaires sociaux. J'ai eu l'occasion de leur confirmer par écrit que le mécanisme choisi dans cette loi - qui, soit dit en passant, a été soumis au conseil de surveillance du marché de l'emploi et y a été approuvé à l'unanimité - propose, je cite un passage de ma lettre : «que le département fixera - pour autant que la modification proposée soit acceptée par le Grand Conseil et devienne effective - les conditions relatives à l'occupation du personnel telles qu'arrêtées par les partenaires sociaux.». C'est-à-dire qu'en aucun cas nous n'accepterons des conditions de travail inférieures en qualité à celles arrêtées par les partenaires sociaux et organismes représentatifs des branches concernées.
Je ne veux pas entrer dans un débat juridique trop long, mais la marge de manoeuvre est très étroite : nous ne pouvons pas étendre arbitrairement le champ d'application d'une convention collective, mais nous avons le droit de faire respecter les usages. C'est la différence entre les usages et la convention collective qui constitue le chemin étroit dans lequel nous nous sommes engagés. Je vous rassure, notre détermination est extrêmement claire et ferme pour que la «non-péjoration» des conditions de travail soit à l'origine même de la possibilité de prolonger les heures d'ouverture des magasins.
Je souhaite que la commission de l'économie s'attaque à ce projet de loi très rapidement pour que l'entrée en vigueur de cette modification, attendue par les commerces, par les consommateurs, et - j'en suis convaincu au nom de la défense de l'emploi - par les employés eux-mêmes, intervienne dans les plus brefs délais.
Ce projet est renvoyé à la commission de l'économie.
EXPOSÉ DES MOTIFS
En date du 20 janvier 1993, le Conseil d'Etat a déposé au secrétariat du Grand Conseil un projet de loi sur le tourisme (PL 6941).
L'article 20, alinéa 2, de ce projet, traitant du taux de la taxe hôtelière, avait la teneur suivante:
«Montant
2 La taxe est constituée par une retenue, pouvant aller jusqu'à 1%, opérée par le débiteur sur toutes les factures de biens et services en rapport avec l'exploitation de l'établissement au moment de leur règlement.»
L'exposé des motifs précisait que le pourcentage prévu étant un maximum, il sera loisible au règlement d'application de fixer un taux inférieur ou encore de procéder à des distinctions selon le genre de biens ou de services fournis (PL 6941, p. 29).
La commission de l'économie chargée d'étudier ce projet de loi a, dans un souci de simplification de la perception, émis le souhait que le taux susmentionné soit fixe et a modifié comme suit cet alinéa:
«Montant
2 La taxe est constituée par une retenue, d'un taux fixe pouvant aller jusqu'à un maximum de 1%, opéré par le débiteur sur toutes les factures de biens et services en rapport avec l'exploitation de l'établissement au moment de leur règlement.» (Mémorial du Grand Conseil, 1993, p. 3513.)
Dans son commentaire par article, la commission a en outre précisé que ce principe du taux fixe pourrait être réexaminé après quelques années d'application.
Or, quelques mois seulement après l'entrée en vigueur de la loi, l'expérience montre déjà que cette notion de taux unique crée des distorsions difficilement acceptables, lorsqu'il s'agit de fournitures de produits du secteur alimentaire.
En effet, l'on constate que, dans le domaine alimentaire, le prélèvement d'un montant de 0,75% au titre de taxe hôtelière absorbe une importante part de la marge bénéficiaire, relativement faible dans ce secteur.
A titre d'exemple, on citera un calcul réalisé sur la marge bénéficiaire moyenne nette des bouchers, boulangers et pâtissiers. Cette étude a révélé une marge variant entre 3 et 6% du chiffre d'affaires. La taxe hôtelière représente donc respectivement entre 25% et 12,5% du bénéfice net.
Compte tenu de ces constatations, il s'avère nécessaire de donner plus de souplesse au Conseil d'Etat pour apprécier le montant de cette taxe. Il vous est par conséquent proposé de supprimer la notion de taux fixe et de réintroduire l'alinéa 2 de l'article 20 dans sa teneur initiale.
Au vu des explications qui précèdent, nous vous proposons, Mesdames et Messieurs les députés, d'adopter la modification rédactionnelle résultant du présent projet de loi.
Préconsultation
M. Nicolas Brunschwig (L). Il est apparu que la loi sur le tourisme nécessitait un certain nombre de modifications, entre autres celle-ci qui a sa base dans la loi que nous avions votée. Cela me paraît tout à fait légitime et justifié. C'est pourquoi je propose la discussion immédiate dans la mesure où cette modification me semble mineure et qu'elle ne devrait pas encombrer nos travaux en commission.
Mise aux voix, l'entrée en matière sur ce projet est adoptée.
M. Claude Blanc (PDC). Je pensais intervenir sur la discussion immédiate, mais puisque c'est fait, c'est du temps de gagné !
Je constate avec vous que la modification proposée est mineure, mais d'une grande importance pour pouvoir appliquer la loi votée récemment. En effet - l'exposé des motifs est assez clair à ce sujet - la commission du Grand Conseil, suivie en cela par le plénum, a divergé sur un point qui apparaissait mineur de la proposition du Conseil d'Etat. Ce dernier proposait une taxe pouvant aller jusqu'à 1% sur les factures de biens et services en rapport avec l'exploitation des établissements qui reçoivent des clients. La méfiance viscérale du parlement vis-à-vis du gouvernement a poussé le Grand Conseil à fixer le taux lui-même.
Comme le mieux est souvent l'ennemi du bien, nous nous sommes aperçus à l'usage de son inefficacité. En effet, un certain nombre de fournisseurs des établissements publics vendent des choses très différentes et il n'est pas possible de prélever le même taux. Les produits alimentaires sont vendus avec des marges très réduites, aussi le taux de 1% qui avait été fixé représentait déjà une part trop importante de la marge et devenait, par conséquent, insupportable pour les professionnels de la branche. Par contre, d'autres produits supportent, eux, des taux plus importants, compte tenu des marges qui sont beaucoup plus confortables. Si bien que la loi, telle qu'elle est entrée en vigueur, se heurte à une impossibilité d'application.
Il est donc urgent que nous y remédions. C'est pour cela que je vous propose de voter immédiatement cette modification.
Mme Maria Roth-Bernasconi (S). Excusez-moi, Monsieur le président, je n'ai pas compris que nous avions voté sur la discussion immédiate !
Le président. Madame, la nouvelle procédure de notre règlement nous oblige à sortir du débat de préconsultation si vous voulez pouvoir parler nombreux par groupe, le temps que vous voulez. Il faut donc entrer en matière. Maintenant, vous pouvez vous exprimer autant que vous voulez ! Allez-y !
Mme Maria Roth-Bernasconi. Je demande simplement que nous votions pour savoir si nous sommes d'accord sur la discussion immédiate !
Le président. Nous avons déjà voté !
Mme Maria Roth-Bernasconi. Nous avons voté sur l'entrée en matière ! Je vous prie de m'excuser, je ne connais pas bien le français, mais je l'ai compris comme ça !
Le président. Très bien, Madame ! Par gain de paix, que celles et ceux qui souhaitent la discussion immédiate lèvent la main.
Mise aux voix, la proposition de discussion immédiate est adoptée.
Premier débat
M. Jean-Pierre Lyon (AdG). La modification de la loi proposée ce soir répond-elle aux interrogations exprimées par des commerçants qui se sont regroupés en comités, ou qui ont signé une pétition ?
En effet, je trouve regrettable que cet objet ne soit pas renvoyé en commission, au moins pour respecter ceux qui se sont opposés à ces pratiques et à ces ponctions. Ils auraient pu dire s'ils étaient d'accord avec la modification du projet. En votant ce soir, les problèmes ne seront pas résolus, et les mécontents risquent de refaire une pétition.
Mme Claire Chalut (AdG). Pourquoi veut-on absolument aboutir à ce changement de loi et instaurer cette taxe de 1% ? Ne serait-il pas possible d'attendre l'application de la TVA pour connaître le résultat économique ? C'est tout ! Je ne vois pas la nécessité de changer ce taux maintenant. Après l'application de la TVA, peut-être y aura-t-il quelque chose à revoir !
M. Jean Spielmann (AdG). Lors de l'introduction de cette taxe - que je ne conteste pas sur le fond, au contraire - il y a eu une levée de boucliers et les problèmes importants n'ont pas été suffisamment examinés.
Je considère que le parlement commettrait une erreur en votant immédiatement la modification de ce taux. Il serait plus intelligent de consacrer une séance en commission pour étudier le problème dans son ensemble. On risquerait de se heurter à d'autres problèmes en l'appliquant à la hâte. Vous avez pu voir des documents à ce sujet. Je trouve que ce Grand Conseil serait bien inspiré d'examiner plus dans le détail l'application de différents taux et la mise en place de cette loi pour éviter de réviser ce projet encore une fois.
Je propose donc formellement le renvoi de ce projet en commission.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Suite aux dernières interventions, je tiens à dire qu'il y a, me semble-t-il, une erreur d'appréciation. Je voudrais vous en convaincre !
Lorsque votre Grand Conseil, sur proposition du Conseil d'Etat, a instauré dans la loi sur le tourisme le principe de la taxe hôtelière, il a fait oeuvre de nouveauté dans la capacité de trouver des ressources nouvelles directement liées aux bénéfices tirés du tourisme pour financer l'Office du tourisme. Cependant, votre Conseil, dans une volonté probable de simplification des modes de perception, n'a pas suivi la proposition du Conseil d'Etat.
Le Conseil d'Etat proposait que la taxe hôtelière soit fixée à concurrence d'un plafond maximum de 1% du prix des biens et services vendus, ce qui signifie que l'on peut moduler au-dessous de ce plafond en fonction de la nature des activités prises en considération. Or, le Grand Conseil a fixé un taux unique de 1%, ce qui ne permet pas de faire de distinction. Alors, en application de la loi, le département des finances a été chargé d'envoyer les bordereaux avec ce taux. Les distorsions que nous craignions sont alors apparues entre ceux qui fournissent des produits du secteur non-alimentaire, du secteur alimentaire et ceux qui fournissent des biens et services, car les marges de ces différents secteurs sont complètement différentes.
Dans le secteur alimentaire, les marges bénéficiaires sont de l'ordre de 3 à 6% du prix de vente ou du chiffre d'affaire, cela dépend du produit. Il est évident que le taux de 1% sur le chiffre d'affaires total vous mange entre 15, 20, parfois 25% suivant les cas, de la marge bénéficiaire. Les petits commerçants concernés, en particulier du secteur alimentaire, nous ont fait constater ces distorsions. Nous le savions mais nous devions appliquer la loi. Soit nous l'appliquions en attendant les réactions après avoir envoyé les bordereaux, Monsieur Spielmann, soit nous proposions de modifier la loi dans une procédure très rapide qui nous permette de retaxer les personnes concernées. C'est ce que nous vous proposons en raison de l'urgence.
En réponse à l'intervention de M. Lyon, je tiens à dire ceci : nous avons, dans le cadre de la procédure qui a été parfaitement planifiée et qui a permis d'enregistrer les observations aux taxations envoyées, réuni tous les groupes professionnels concernés par les réclamations envoyées. On n'a évidemment jamais vu l'instauration de nouvelles taxes sans provoquer de réactions, mais qu'il me soit permis de dire que les réclamations sont au demeurant relativement limitées, puisqu'elles représentent entre 10 et 15% du nombre total des bordereaux expédiés. Nous avons d'ores et déjà pris la décision, pour le courant de ce mois, d'adapter le taux, là où les informations du terrain étaient justifiées, selon les secteurs géographiques ou professionnels, pour que ces taxes soient correctement ciblées.
Sur un point, cependant, le gouvernement n'a pas la capacité d'adapter seul la procédure, il doit solliciter l'approbation de votre parlement : je veux parler de la taxe hôtelière. En effet, le taux qui la concerne se trouve dans la loi et pas dans le règlement. C'est pourquoi, Monsieur Spielmann, les bordereaux étant envoyés, si l'on veut éviter de poursuivre des procédures tendant à récupérer la totalité d'une taxation qui nous paraît injuste, s'agissant d'une catégorie de professionnels, nous devons modifier la loi en revenant à la première proposition du Conseil d'Etat, ce qui nous permettra d'expédier aux commerçants concernés des bordereaux ajustés en fonction de leur marge bénéficiaire qui, dans le domaine du commerce alimentaire, est effectivement particulièrement réduite.
C'est donc une simple mise à jour. Ce n'est que justice de procéder ainsi et nous souhaitons véritablement que cela se fasse toutes affaires cessantes. Cela n'a pas de sens de traîner sur cette affaire alors que tout le monde est d'accord sur le fond. Merci donc de voter ce projet de loi en discussion immédiate.
Mise aux voix, la proposition de renvoi en commission est rejetée.
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOImodifiant la loi sur le tourisme(I 3 24)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi sur le tourisme, du 24 juin 1993, est modifiée comme suit:
Art. 20, al. 2 (nouvelle teneur)
Montant
2 La taxe est constituée par une retenue, pouvant aller jusqu'à 1%, opérée par le débiteur sur toutes les factures des biens et services en rapport avec l'exploitation de l'établissement au moment de leur règlement.
La séance est levée à 19 h 10.