République et canton de Genève

Grand Conseil

No 12

Jeudi 28 avril 1994,

soir

Présidence :

M. Hervé Burdet,président

La séance est ouverte à 17 h.

Assistent à la séance: MM. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat, Olivier Vodoz, Jean-Philippe Maitre, Guy-Olivier Segond, Philippe Joye, Gérard Ramseyer et Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

Le président donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Bernard Annen, Dominique Belli, Janine Berberat, Catherine Fatio, Alain-Dominique Mauris, Jean Montessuit et Philippe Schaller, députés.

3. Procès-verbal des précédentes séances.

Le procès-verbal des séances des 24 et 25 mars 1994 est adopté.

4. Discussion et approbation de l'ordre du jour.

Le président. Le point 70, rapport divers 217-A (naturalisations) est supprimé, la personne intéressée ayant retiré sa demande de réexamen.

M. Jean-Pierre Gardiol (L). Chacun de vous a reçu sur sa place une résolution concernant la TVA. Vu l'urgence du sujet, je vous demande, Monsieur le président, de rajouter à l'ordre du jour de ce Grand Conseil la discussion concernant cette résolution.

Le président. Je vous propose de développer cette résolution au point 49 de l'ordre du jour qui traite du même sujet.

Mise aux voix, cette proposition est adoptée.

5. Remarques sur la liste des objets en suspens.

Le président. L'annonce, au début de chaque session de notre Grand Conseil, des objets restés en suspens devant le Conseil d'Etat ne suscite aucun intérêt, tant de la part des députés que de notre gouvernement.

A la suite de l'entrevue que le Bureau a eue avec le Conseil d'Etat, il a été décidé de supprimer cette lecture inutile, notre exécutif s'étant engagé à répondre dans les meilleurs délais à tous les objets qui lui sont adressés.

6. Déclaration du Conseil d'Etat et communications.

M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Dans le discours de Saint-Pierre prononcé le 6 décembre dernier, notre gouvernement a déclaré que la position de Genève, en tant que centre mondial de négociations, devait être affirmée.

A cette occasion, nous avons rappelé qu'en étroite collaboration avec la Confédération et sur la base d'un programme commun le gouvernement était prêt à compléter l'équipement du canton selon les attentes de l'Organisation des Nations Unies, de ses agents spécialisés, du GATT et des autres organisations.

Depuis lors, nous avons agi dans ce sens. En ce qui concerne la Maison de l'environnement, les Chambres fédérales devraient s'exprimer favorablement sur la proposition de la commission qui avait examiné la demande de crédit de 705 millions, et permettre ainsi l'ouverture du chantier du Palais Wilson durant cet été.

Le canton s'est engagé à supporter un éventuel dépassement qui, en principe, devrait être évité. Aujourd'hui, le dossier le plus important est celui de l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC, l'ancien GATT. Nous avons déjà eu l'occasion de dire notre satisfaction en constatant que la Confédération acceptait de financer la nouvelle salle de conférences dont l'investissement représente environ 35 millions.

Le bâtiment devra être complété par la création de nouveaux parkings. Nous souhaiterions que cette organisation, installée à Genève, puisse y demeurer et que les négociations engagées aboutissent favorablement.

Alors que ces discussions devaient se dérouler uniquement entre Genève et l'Organisation mondiale du commerce, force est de constater que d'autres candidatures pourraient se faire jour, notamment celle de Bonn qui disposera de locaux importants dès le moment du transfert de la capitale fédérale à Berlin. Par ailleurs, on ne saurait exclure que d'autres pays et villes se manifestent.

Les chances de Genève demeurent entières. Toutefois, nous nous rendons compte de la nécessité de nous engager dans le virage qui doit nous conduire à repenser de manière globale les prestations que la Suisse et Genève offrent traditionnellement aux organisations internationales. Ces dernières ne considèrent pas qu'elles demandent de nouveaux avantages mais estiment que leur statut doit être mieux pris en compte et reconnu.

Dans la perspective du cinquantième anniversaire des Nations Unies qui sera fêté l'an prochain, notre Conseil a rencontré, tant le secrétaire général des Nations Unies, M. Boutros Boutros-Ghali, que M. le directeur général du siège européen des Nations Unies à Genève, M. Petrovski, ainsi que les responsables d'autres institutions internationales ayant leur siège à Genève.

Ces derniers souhaiteraient que cette échéance du cinquantième anniversaire soit marquée, non seulement par des fêtes et des manifestations, mais surtout par des actes concrets qui renforceraient l'ancrage des Nations Unies à Genève.

Vous savez certainement qu'une quarantaine de pays ne peuvent pas assumer les charges liées à l'installation et la gestion d'une mission permanente à Genève, alors qu'ils sont présents à New York. Nous avons donc l'intention de soumettre aux instances compétentes la mise à disposition d'un bâtiment qui permettrait à ces pays de disposer d'une représentation à Genève.

Des pays africains avaient adressé une première demande. Elle s'est étendue à d'autres continents d'une manière plus générale. Aller dans le sens de cette attente serait faire acte d'un esprit universel et serait aussi un geste de coopération. Cet acte permettra à ceux qui ont de la difficulté à être présents à Genève de pouvoir s'y installer et ainsi d'éviter d'être tenus en marge des travaux des institutions ayant leur siège à Genève.

A cela s'ajoute la possibilité pour Genève de se doter d'un hôtel des archives internationales qui accueillerait et mettrait en valeur les exceptionnels documents déjà déposés à Genève concernant la période contemporaine et l'étude sociale, politique et économique du vingtième siècle.

Il y a deux jours, nous avons reçu son Excellence M. l'ambassadeur Ayalalasso, premier haut commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, poste créé récemment par l'ONU de manière à renforcer son action dans ce domaine crucial pour assurer le respect du droit des personnes, des minorités et tenter de se protéger des guerres.

La mission de ce haut commissaire est d'une ampleur exceptionnelle. Il entend la développer depuis Genève et souhaiterait que l'on y installe une Maison des droits de l'homme qui permettrait de regrouper certains organismes et, ainsi, de renforcer l'action de ce nouveau bureau de l'ONU.

N'oublions pas la vocation de Genève, Cité de refuge et d'asile, mais également lieu où fut signée la convention qui, depuis 1929, protège les prisonniers de guerre. Enfin, le Conseil d'Etat a poursuivi ses démarches auprès des autorités européennes concernées par le projet d'une Maison de l'Europe et entend tout entreprendre pour faciliter sa réalisation, puis son développement.

Pour ce faire, nous prendrons un nouveau contact avec la Ville de Genève afin de surmonter les obstacles liés à l'implantation de ces bâtiments sur son territoire. Nous avons la ferme volonté de relancer notre économie et d'agir en faveur de l'emploi. La présence des organisations internationales est à cet égard primordiale, mais nous voulons aussi avoir des projets qui façonnent l'avenir de Genève tout en renforçant son identité.

Le sujet que je viens d'évoquer en est un. Peut-être est-il le plus important. Pour le réaliser, il faut disposer de moyens. Récemment, New York a lancé un emprunt public pour financer les bâtiments afin de conserver définitivement le PNUD, le Programme des Nations Unies pour le développement. Elle a réussi. Nous aurons certainement l'occasion de revenir sur ce sujet.

Compte tenu de l'évolution rapide des données relatives à la présence des organisations internationales à Genève, notre Conseil a sollicité une nouvelle entrevue avec une délégation du Conseil fédéral. La délégation du Conseil d'Etat sera reçue, le mercredi 4 mai à 16 heures, au Palais fédéral par MM. Stich, Delamuraz et Cotti.

A cette occasion, nous soumettrons quelques propositions au Conseil fédéral afin de renforcer la procédure de consultation entre Genève et la Confédération, de manière à revoir l'ensemble des problèmes que je viens d'évoquer dans une perspective globale et pour en accélérer le règlement.

Dans ce contexte, notre Conseil apprécie la disponibilité de M. Arthur Dunkel, ancien président et directeur général du GATT, président de la Fondation «Un avenir pour Genève» qui lui apporte l'appui annoncé au moment de la création de cette fondation.

Nous entendions vous transmettre cette information dont vous mesurez tous l'importance et vous remercions du soutien que vous nous apporterez dans cette action déterminante pour l'avenir de Genève et aussi de la Suisse. (Applaudissements.)

Le président. Nous réitérons notre sympathie à Mme Anne Chevalley qui a eu le chagrin de perdre sa mère.

Notre collègue Jean Montessuit a été hospitalisé récemment. Il est actuellement en convalescence et nous formons tous nos voeux pour son prompt rétablissement.

Nous saluons à la tribune du public la présence de notre ancienne collègue, Béatrice Luscher. (Applaudissements.)

Nous saluons également à la tribune du public la présence d'élèves du cours d'instruction publique de l'Ecole de culture générale Jean-Piaget, sous la conduite de Mme Dominique Châtelain. (Applaudissements.)

7. Correspondance.

Le président. La correspondance suivante est parvenue à la présidence :

C 137
Par courrier du 26 mars, le Groupement d'habitants du versant sud d'Onex fait part de ses remarques concernant sa pétition (P 1001 - contre une urbanisation excessive du versant sud d'Onex). ( )  C137

Cette lettre a été adressée à la commission de l'aménagement et concerne la pétition 1001-A et la motion 909 qui sont aux points 39 et 40 de notre ordre du jour.

C 138
MM. Pierre Mottu et François Comte, notaires, remettent au Grand Conseil un projet d'acte de vente par l'Hospice général à M. Philippe Iseli d'une parcelle de la commune d'Avusy. ( )  C138

Il en est pris acte. Ce courrier a été transmis au Conseil d'Etat.

C 139
Le Tribunal fédéral nous informe que la demande de mesures provisionnelles présentée par M. Pierre Vanek, député, a été rejetée. ( )C139

Il en est pris acte.

C 140
L'Association des intérêts de Champel nous envoie son sondage d'opinion concernant la circulation des cyclistes sur les trottoirs et les chemins pédestres des parcs et promenades. ( )  C140

Ce courrier sera renvoyé au Conseil d'Etat et à la commission des transports.

C 142
La Coordination syndicale des apprentis nous envoie sa brochure concernant le droit au chômage des jeunes. ( )  C142

Cette lettre sera renvoyée au Conseil d'Etat.

C 141
La section de Genève du WWF fait part de ses remarques au sujet de la motion 906 (aménagement du territoire) figurant au point 38. ( )C141

Il en est pris acte. Cette lettre sera discutée à ce point de l'ordre du jour.

Mme Sylvie Hottelier(AdG). Je demande la lecture de cette lettre.

Le président. Je prie la secrétaire de bien vouloir donner lecture de cette lettre.

 

Le président. Par ailleurs, les pétitions suivantes sont parvenues à la présidence :

P 1029
Concernant le métier de ramoneur. ( )   P1029
P 1030
Pour protéger nos enfants de la violence. ( )    P1030
P 1031
Demandant la mise au service des élèves des psychologues conseillers d'orientation. ( )  P1031

Ces pétitions sont renvoyées à la commission des pétitions.

M. Pierre Vanek(AdG). Je demande la lecture de la dernière pétition que vous venez d'évoquer. 

PÉTITION 1031

demandant la mise au service des élèves des psychologues conseillers d'orientation

Considérant:

- les difficultés de plus en plus grandes auxquelles se heurtent les jeunes, même diplômés, pour trouver un premier emploi;

- qu'il est d'autant plus nécessaire, dans la situation actuelle, de fournir à ces jeunes étudiants une aide la plus large possible concernant leur orientation;

- que, par ailleurs, l'école de culture générale précise dans son règlement, chapitre 2, section 1, article 3, alinéa 2: «les orientations scolaires et professionnelles sont assurées de façon continue»;

- que contrairement à ces besoins de formation, la direction du service de l'orientation empêche les conseiller-ère-s de remplir leur tâche en limitant leur temps de présence dans les écoles, et, en particulier, à l'école Jean-Piaget

les soussigné-e-s, membres du personnel technique, administratif et enseignant, demandent au Grand Conseil de bien vouloir intervenir afin que les psychologues conseiller-ère-s d'orientation puissent être au service des élèves, selon les besoins de ces derniers; et qu'en conséquence, les dépu-té-e-s interviennent auprès de la direction du service de l'orientation pour que celle-ci n'empêche pas les conseiller-ère-s d'accomplir leur tâche auprès des élèves.

N.B.: 70 signatures

Association du personnel de l'école Jean-Piaget

Bd Carl-Vogt 62

1205 Genève

Le président. En outre, la commission des pétitions nous informe qu'elle désire renvoyer les pétitions suivantes :

P 1010
Pour la réhabilitation du goulet de Chêne-Bourg ( ), à la commission des travaux. P1010
P 1028
Genève doit défendre son école d'ingénieurs ( ), à la commission de l'enseignement et de l'éducation. P1028

Il en sera fait ainsi.

8. Annonces et dépôts:

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

Néant.

c) de propositions de résolutions;

Le président. La proposition de résolution suivante est parvenue à la présidence.

R 271
de MM. Jean-Pierre Gardiol (L), Bernard Annen (L), Claude Blanc (DC), Daniel Ducommun (R), Roger Beer (R) et Jean-Luc Ducret (DC) concernant la proposition du Département fédéral des finances de soumettre à la TVA les prestations de services fournies à des clients domiciliés à l'étranger. ( )  R271

Cette proposition de résolution sera développée au point 49 bis de notre ordre du jour.

d) de demandes d'interpellations;

Le président. Les demandes d'interpellations suivantes sont parvenues à la présidence :

I 1892
de Mme Fabienne Bugnon (E) : Nouvelle législation fédérale sur les mesures de contrainte dans le droit des étrangers : Quelle en sera l'application dans notre canton ? ( )  I1892

Cosignataires : Christian Ferrazino, Gilles Godinat, Jean-Pierre Lyon, Jean Spielmann, Christian Grobet.

I 1893
de M. Laurent Moutinot (S) : De quelles garanties le Conseil d'Etat entend-il s'entourer pour assurer que la mise en application de la modification de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers, du 18 mars 1994, respecte les droits individuels fondamentaux énumérés dans la constitution genevoise ou dans les traités internationaux signés par la Suisse ? ( )  I1893

Cosignataires : Maria Roth-Bernasconi, Micheline Calmy-Rey, Mireille Gossauer-Zurcher, Liliane Maury Pasquier, Fabienne Blanc-Kühn.

I 1895
de Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S) : Enfant-argent ? Adoption-corruption ? Quels moyens de surveillance se donne le Conseil d'Etat ? ( )  I1895

Cosignataires : Maria Roth-Bernasconi, Liliane Charrière Urben, Sylvie Châtelain, Laurent Moutinot, Claire Torracinta-Pache.

Ces interpellations figureront à l'ordre du jour d'une prochaine séance.

D'autre part, l'interpellation 1894 de Mme Sylvia Leuenberger a été annulée.

e) de questions écrites.

Le président. Les questions écrites suivantes sont parvenues à la présidence :

Q 3517
de M. Jean-Pierre Lyon (AG) : Comment la commission des monuments, de la nature et des sites va-t-elle fonctionner ? ( )  Q3517
Q 3518
de M. Jean-Pierre Lyon (AG) : Information, S.V.P. ( )  Q3518

Elles seront transmises au Conseil d'Etat.

Par ailleurs, le Conseil d'Etat a répondu à la question écrite suivante :

Q 3510
de M. René Longet : Déontologie militaire. ( )  Q3510

Q 3510

de M. René Longet (S)

Dépôt: 2 décembre 1993

Déontologie militaire

Un récent article de «La Tribune de Genève» (19 novembre 1993) fait état de la présence du commandant du régiment 3 et chef du service de sécurité de l'aéroport lors d'une rencontre de paras de Haute-Savoie à l'écoute des exploits douteux du mercenaire Bob Denard.

Le Conseil d'Etat ne pense-t-il pas qu'il convient par déontologie que les responsables militaires de notre canton gardent un maximum de distance vis-à-vis de tels personnages?

RÉPONSE DU CONSEIL D'ÉTAT

du 23 mars 1994

En préambule, le Conseil d'Etat rappelle que tout chef militaire ou fonctionnaire est avant tout un citoyen et comme tel libre de ses actions pour autant qu'elles n'enfreignent pas la loi ou ses devoirs de fonction. En l'espèce, l'on ne saurait soutenir qu'il y a eu une telle violation car ce citoyen n'assistait pas à cette conférence en sa qualité de commandant du régiment d'infanterie 3 ni de chef du service de sécurité de l'aéroport.

Par ailleurs, le fait d'assister à une conférence ne signifie pas pour autant que l'on partage le point de vue exprimé par le conférencier.

GR 49-1
a) M. C. G.( -)GR49
Rapport de Mme Barbara Polla (L), commission de grâce
GR 50-1
b) Mme N. S. E.( -)GR50
Rapport de M. Roger Beer (R), commission de grâce

9. Rapports de la commission de grâce chargée d'étudier les dossiers des personnes suivantes :

 

M. C. G. , 1957, Italie, sans profession, ne recourt que contre la peine d'expulsion.

Mme Barbara Polla (L), rapporteuse. M. C. G. est né en Suisse de parents d'origine italienne, mais il est actuellement naturalisé suisse, d'une fratrie de trois.

M. C. G. est entré dans le milieu de la drogue à l'adolescence déjà et la plupart de ses nombreuses condamnations, desquelles il a fait l'objet, ont trait à des infractions à la loi sur les stupéfiants, consommation et trafic, le but du trafic étant essentiellement d'assurer sa propre consommation et celle de ses amis.

La dernière peine en date est secondaire à des faits qui se sont produits en 1991 et que je vais brièvement résumer. A cette date, M. C. G., toujours dans le but d'assurer sa consommation de drogue, menace le client de son amie intime, alors prostituée, d'une seringue contenant probablement du sang. Je dois préciser que M. C. G. est séropositif et qu'il en a fait état au cours de cette menace. Il a sommé ce client de lui remettre son argent, faute de quoi il le piquerait.

Par ailleurs, à la même époque, M. C. G. a dénoncé un autre de ses amis, probablement un de ses fournisseurs réguliers de drogue, l'accusant d'avoir séquestré et violenté son amie, accusations dont il a reconnu ultérieurement qu'elles étaient non fondées et qu'elles n'avaient d'autre but que de faire du tort à cette personne.

Pour ces différentes raisons, M. C. G. a été condamné à cinq ans et demi de réclusion avec, en plus, révocation d'un sursis d'une période d'expulsion de dix ans qui avait été prononcée en 1988.

Pour ces différents motifs, la commission ne retient pas d'argument justifié de considérer une modification de la peine de réclusion. Ce n'est d'ailleurs pas pour la peine de réclusion que M. C. G. demande la grâce, lui-même considérant que cette peine est méritée, mais pour la peine d'expulsion de dix ans dont il fera l'objet après sa sortie de prison prévue l'année prochaine.

M. C. G. est actuellement aux Etablissements de la plaine de l'Orbe. Il est toujours séropositif, non encore atteint du sida. Il n'a aucun contact avec un autre pays que le nôtre et, en particulier, il n'a jamais eu aucun contact avec son pays d'origine.

Sa famille est actuellement suisse et vit à Aubonne. Son amie devrait sortir de prison en même temps que lui. A sa sortie de prison, M. C. G. devrait bénéficier en Suisse d'un entourage et d'un encadrement dont il ne saurait bénéficier nulle part ailleurs.

Même si les risques de récidive ne sont pas négligeables dans ces conditions favorables, elles sont, par contre, énormes ailleurs. M. C. G. se comporte actuellement de façon respectueuse et satisfaisante pour le directeur du pénitencier qui donne un préavis favorable à la demande de grâce de la peine d'expulsion. Le procureur général donne également un préavis favorable pour les mêmes motifs de prise en charge que je viens de mentionner.

Pour toutes ces raisons, et considérant en fait que M. C. G. est né dans notre pays, qu'il y a toujours vécu et que, de ce fait, la commission a estimé avoir à son égard à assumer les responsabilités similaires qu'elle aurait dû avoir à l'égard d'un citoyen, la commission de grâce vous propose de gracier M. C. G. de la peine d'expulsion.

Mis aux voix, le préavis de la commission (grâce de la peine d'expulsion) est adopté.

Mme E. N. S. , 1963, Ghana, coiffeuse, recourt contre le solde de la peine de réclusion et la peine d'expulsion.

M. Roger Beer (R), rapporteur. Mme E. N. S. est ghanéenne. Née en 1963, elle a donc 31 ans. Elle est arrivée en Suisse en 1990 et a travaillé comme vendeuse à Fribourg. Aujourd'hui, elle est considérée comme coiffeuse, mais en arrivant à Genève en septembre 1992, elle n'a pas trouvé de travail et a été au chômage jusqu'à son arrestation en juillet 1993.

Le 30 avril 1993, elle s'est mariée. Elle n'a pas d'enfant et pas de dettes particulières. Le problème de cette fille est qu'elle a été prise dans un trafic de stupéfiants portant sur 930 grammes de cocaïne, qu'elle-même ne consomme pas de drogue et qu'elle n'a aucun lien particulier avec notre pays.

La peine infligée par le Tribunal de police en octobre 1993 était de trois ans de réclusion et quinze ans d'expulsion du territoire suisse. Mme E. N. S. a fait appel, mais le jugement a été confirmé par la Chambre pénale le 7 février 1994. Je pense qu'il est intéressant de vous lire le rapport du procureur général qui préavise négativement l'octroi d'une grâce pour les raisons suivantes.

Mme E. N. S. n'explique pas pour quelles raisons elle devrait bénéficier de la clémence de notre autorité. Tout au contraire, n'étant pas consommatrice de stupéfiants, n'ayant manifesté ni scrupules ni regrets et ne collaborant point à l'établissement des faits, elle ne saurait bénéficier d'une grâce. Quant à la peine d'expulsion, celle-ci n'avait même pas été contestée dans le cadre de l'appel et, à la lecture du dossier, ses attaches avec la Suisse apparaissent des plus ténues.

La commission a suivi ce préavis et, en fonction des éléments que j'ai évoqués tout à l'heure, nous vous proposons également de rejeter la demande de grâce.

Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.

Le président. J'ai le plaisir de saluer à la tribune du public la présence de Mme Bernadette Falquet, notre ancienne collègue.

 

E 724
10. Election d'un juge ou d'une juge titulaire supplémentaire à la Cour de justice. (Entrée en fonctions : 1er septembre 1994). ( )E724

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Axel Tuchschmid, présentée par le parti libéral.

M. Axel Tuchschmid est élu tacitement. Il prêtera serment ce soir.

E 727
11. Election d'un président ou d'une présidente de la Cour de cassation. (Durée du mandat : 1er juin 1994 au 31 mai 1996). ( )E727

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Jean Maye, présentée par le parti démocrate-chrétien.

M. Jean Maye est élu tacitement

E 728
12. Election d'un vice-président ou d'une vice-présidente de la Cour de cassation. (Durée du mandat : 1er juin 1994 au 31 mai 1996). ( )E728

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Jacques Droin, présentée par le parti libéral.

M. Jacques Droin est élu tacitement

E 729
13. Election d'un président ou d'une présidente du Tribunal administratif. (Durée du mandat : 1er juin 1994 au 31 mai 1996). ( )E729

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de Mme Eliane Bonnefemme-Hurni, présentée par le parti radical.

Mme Eliane Bonnefemme-Hurni est élue tacitement

E 730
14. Election d'un vice-président ou d'une vice-présidente du Tribunal administratif. (Durée du mandat : 1er juin 1994 au 31 mai 1996). ( )E730

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Thierry Tanquerel, présentée par le parti socialiste.

M. Thierry Tanquerel est élu tacitement

E 731
15. Election d'un vice-président ou d'une vice-présidente du collège des juges d'instruction. (Durée du mandat : 1er juin 1994 au 31 mai 1996). ( )E731

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Paul Perraudin, présentée par le parti démocrate-chrétien.

M. Paul Perraudin est élu tacitement

E 732
16. Election d'un président ou d'une présidente de la Justice de paix et Chambre des tutelles. (Durée du mandat : 1er juin 1994 au 31 mai 1996). ( )E732

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de Mme Yvette Daoudi-Beuchat.

Mme Yvette Daoudi-Beuchat est élue tacitement

E 733
17. Election d'un vice-président ou d'une vice-présidente de la Justice de paix et Chambre des tutelles. (Durée du mandat : 1er juin 1994 au 31 mai 1996). ( )E733

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Thierry Luscher, présentée par le parti radical.

M. Thierry Luscher est élu tacitement

IU 8
18. Interpellation urgente de M. Pierre Vanek : Droits de l'homme. ( )IU8

M. Pierre Vanek (AdG). J'ai entendu avec plaisir M. le président du Conseil d'Etat s'exprimer dans sa déclaration liminaire sur le statut de Genève comme Cité de refuge, d'asile, Cité du Haut commissariat aux réfugiés, lieu d'importation et peut-être future place d'une Maison des droits de l'homme, bref, à tout ce que Genève comprend comme droits de l'homme, de libertés politiques et de comportements soucieux du respect du droit et de la démocratie.

Le Conseil d'Etat ne pense-t-il pas qu'il serait conforme au développement et au rayonnement de cet esprit de prendre une position résolument négative et hostile contre le nouveau projet de mesures contraignantes dans le droit des étrangers à l'échelle fédérale ? N'y a-t-il pas une incompatibilité entre le fait de faire des déclarations se réclamant d'un statut de Cité de refuge et d'asile et à ne pas se prononcer de manière clairement négative contre ce projet.

D'après l'avis de juristes, dont je ne suis pas, je rappelle que cette mesure comprend des éléments contraires à l'esprit du droit comme les mesures d'internement arbitraire pouvant aller jusqu'à une année ou celles d'assignation à résidence, ou encore les fouilles extensives, le renversement de la question de la preuve par rapport à l'innocence d'un certain nombre de personnes, ainsi qu'une démarche de criminalisation dont souffrent un certain nombre d'étrangers vivant dans nos murs.

Ma question est la suivante. N'y aurait-il pas lieu, par souci de cohérence en regard du respect des droits de l'homme, que le Conseil d'Etat, notre gouvernement, prenne position sur cette question ?

Le président. La réponse du Conseil d'Etat à cette interpellation urgente tombera à la fin des points concernant le département de justice et police et des transports, soit au point 69 bis. 

IU 9
19. Interpellation urgente de M. Dominique Hausser : Garde à vue. ( )IU9

M. Dominique Hausser (S). Le rapport d'Amnesty International, publié le 19 avril sous le titre suisse : «Allégations de mauvais traitements pendant la garde à vue», soulève une fois de plus l'inquiétude du parti socialiste.

On connaît le sérieux d'Amnesty International. Il est donc difficile d'admettre qu'il aurait raison en ce qui concerne les pays du Sud et qu'il aurait tort pour ceux du Nord. Les recommandations de la CTP européenne faites en 1991 sont claires. Je me permets de les rappeler rapidement.

La CTP recommande d'introduire le droit, pour tous les individus placés en garde à vue, d'informer un proche ou un tiers de leur arrestation. Deuxièmement, elle considère que le droit d'avoir les services d'un avocat, ce dès le début de la garde à vue, revêt une très grande importance et recommande que ce droit soit expressément consacré en Suisse.

D'ailleurs, depuis quelques années, un projet de loi est déposé dans notre parlement à ce sujet. La CTP a recommandé qu'une personne placée en garde à vue ait le droit d'être examinée par un médecin de son choix et recommande d'élaborer un registre complet de la garde à vue.

Le Comité contre la torture, réuni le 20 avril à Genève pour analyser le deuxième rapport périodique de notre pays sur la Convention contre la torture et autres peines, relève entre autres dans ses conclusions et recommandations, je lis : «Le comité qui a eu connaissance de mauvais traitements subis par des personnes arrêtées par les forces de police estime souhaitable la réforme de la législation et des pratiques en matière de garde à vue et de détention préventive. Particulièrement, le droit d'entrer en contact avec la famille, l'accès immédiat à un avocat et le droit à une visite médicale par un médecin que le détenu choisit de son propre chef ou sur une liste des médecins établie par le Conseil de l'ordre. Le comité est également préoccupé par le régime au secret pendant la période de détention préventive ainsi que par le problème de l'isolement des prisonniers pour des périodes longues qui peuvent constituer un traitement inhumain.»

En 1993, le département de justice et police a énuméré un certain nombre d'améliorations, ce qui n'empêche toujours pas les mauvais traitements pendant la garde à vue et les arrestations au contrôle sur la voie publique de se poursuivre.

Oui, c'est la parole de «X» contre celle de «Y». Oui, me direz-vous, la commission des visiteurs a des droits de visites à l'improviste pour éviter que l'on «fasse la poussière» avant son arrivée. Oui, un juge neutre reçoit les plaintes des prévenus. Oui, le climat est calme à Champ-Dollon et dans d'autres lieux de détention sis dans notre canton.

Mais, face à cette situation, que compte faire le Conseil d'Etat pour respecter la Convention contre la torture et autres peines, traitements cruels ou inhumains, dégradants, ratifiée en 1986 - je le rappelle - et, en particulier, pour supprimer les dérapages et les bavures des forces de police ?

Le président. Le Conseil d'Etat répondra à cette interpellation urgente au point 69 ter. 

IU 10
20. Interpellation urgente de Mme Maria Roth-Bernasconi : Nomination de M. Rade et de l'architecte cantonal. ( )IU10

Mme Maria Roth-Bernasconi (S). J'interroge le Conseil d'Etat concernant la nomination de M. Rade et de l'architecte cantonal. Je désire savoir combien coûtent ces deux mandats, soit quel est le montant de leurs honoraires respectifs et, également, sur quelle ligne budgétaire l'argent nécessaire a-t-il été prélevé ? Enfin, quelle est la base légale pour permettre au Conseil d'Etat de nommer ces deux personnes ?

Le président. Il sera répondu à cette interpellation urgente au point 40 bis de notre ordre du jour. 

IU 11
21. Interpellation urgente de M. Chaïm Nissim : Politique policière. ( )IU11

M. Chaïm Nissim (Ve). Ma question s'adresse aussi à M. Ramseyer. Je désire vous raconter une toute petite histoire, Monsieur Ramseyer... (Rires.) ...qui s'est passée voici dix ans. Vous vous rappellerez peut-être qu'à l'époque de Guy Fontanet il y avait à Zurich, à Lausanne, à Berne, des manifestations extrêmement violentes; surtout à Zurich et à Lausanne. C'était «Lausanne bouge», c'était une époque assez violente, et les distingués sociologues se sont penchés sur cette question pour savoir pourquoi il n'y avait pas eu ces manifestations violentes à Genève.

Une des réponses était que Guy Fontanet menait au DJP une politique libérale et humaine, qu'il laissait les manifestations se dérouler relativement dans le calme, qu'il avait aussi une politique assez modérée par rapport aux squatters. Ma question sera donc la suivante : Avez-vous, Monsieur Ramseyer, l'intention de suivre cette bonne politique commencée voici dix ans ou voulez-vous durcir le ton ?

Le président. La réponse du Conseil d'Etat à cette interpellation figurera au point 69 quater.

 

IU 12
22. Interpellation urgente de Mme Elisabeth Reusse-Decrey : Droit de manifester. ( )IU12

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Ma question s'adresse aussi à M. Ramseyer. Hier, il y a eu à Genève une manifestation pour dénoncer ce qui se passe en ex-Yougoslavie. Cette manifestation a fait, il est vrai, l'objet d'une demande assez tardive et le département a répondu, hier après-midi, par fax qu'il n'entendait pas autoriser les personnes présentes à cette manifestation à se déplacer et qu'il donnait une autorisation uniquement pour un rassemblement.

Si on peut comprendre que, face à une demande très tardive, ce genre de réponse puisse être donnée, j'aimerais par contre aller un petit peu plus loin. Suite au téléphone qu'un fonctionnaire du département de justice, police et transports a eu hier avec la personne qui a demandé l'autorisation, il nous a été dit qu'à l'avenir il ne serait plus autorisé de se déplacer dans le cadre de manifestations, et que seuls des rassemblements seraient acceptés. Le deuxième point évoqué par ce fonctionnaire concernait les manifestations faites par des étrangers et pour lesquelles il n'y aurait qu'un seul lieu autorisé, à savoir, devant l'ONU.

Je désire savoir si M. Ramseyer confirme ces propos, de manière que nous sachions s'il faut tout de suite organiser une manifestation pour rétablir le droit de manifester !

Pendant que j'ai la parole, j'aimerais poser une autre petite question. J'ai sous les yeux un arrêté du Conseil d'Etat de 1992 qui dit que le port de masques et de costumes sur la voie publique est autorisé seulement à l'occasion des fêtes de l'Escalade, et seulement pour les enfants de moins de 15 ans. Alors, je dis pauvre canton où un adulte n'a aucun jour de l'année le droit de se costumer et les enfants de moins de 15 ans seulement pendant les jours de l'Escalade !

L'article 2 dit ensuite, qu'il est interdit de porter des masques représentant des hommes d'Etat suisses ou étrangers...

Une voix. C'est pas vrai ! C'est pas vrai !

Mme Elisabeth Reusse-Decrey. ...J'aimerais savoir si les masques de femmes d'Etat sont autorisés ? (Brouhaha.) Et, deuxièmement, si le Conseil d'Etat ne pourrait pas mettre cet arrêté dans un tiroir, voire à la poubelle, comme me le souffle ma voisine, de manière qu'il sache aussi rire de lui-même en se regardant défiler dans la rue.

Le président. La réponse à l'interpellation urgente de Mme Reusse-Decrey prendra place au point 69 quinquies de notre ordre du jour. 

IU 13
23. Interpellation urgente de Mme Liliane Charrière Urben concernant l'office de la jeunesse. ( )IU13

Mme Liliane Charrière Urben (S). Ma question s'adresse à Mme Brunschwig Graf. A plusieurs reprises dans les six derniers mois, la presse a fait part de situations assez difficiles à propos d'enfants dont l'une n'aurait pas été à l'école pendant dix ans et, plus récemment, à propos d'un enfant qui aurait - je souligne le conditionnel - subi de mauvais traitements.

Dès qu'il s'agit de l'intégrité physique ou morale des enfants, l'émotion est grande et je pense que l'on peut peut-être se délecter à écrire de longs articles sur ce sujet, cela est toujours une manière de vendre le journal.

Tout de même, ces allégations, ces situations laissent planer un doute sur un service du DIP, l'office de la jeunesse qui, dit-on, manquerait - je remets le conditionnel - de diligence, voire de compétences et d'efficacité.

Si c'est possible, Madame la présidente, je souhaiterais que vous puissiez nous rassurer, et surtout lever le doute qui pèse sur ce service. Si véritablement il y a du ménage à faire, eh bien, je pense que ce ne sera pas très compliqué. Par ailleurs - et c'est beaucoup plus grave - si l'on accuse les gens de ne pas faire leur travail ou si l'on cherche à lancer un service d'un département contre un service d'un autre département, je trouve le procédé assez bas.

Le président. La réponse à cette interpellation urgente prendra place au point 63 bis de l'ordre du jour. 

IU 14
24. Interpellation urgente de M. Olivier Lorenzini : «Maison Europa». ( )IU14

M. Olivier Lorenzini (PDC). L'importance que joue Genève en tant que siège de nombreuses organisations internationales n'est plus à démontrer. Or, depuis la fin de la guerre froide, la réunification allemande et l'élargissement de l'Europe, la nouvelle donne stratégique et économique sur le plan mondial, la nature et l'implantation de ces organisations évoluent très rapidement. Il ne fait aucun doute par exemple que le centre de gravité du continent européen s'est déplacé vers l'Est et que des villes comme Vienne, Prague, voire même Berlin seront appelées un jour à jouer un rôle plus important dans le système de relations internationales.

Dans d'autres continents, des villes souhaitent également accueillir des organisations internationales. En revanche, ce redéploiement pourrait affaiblir d'autres centres de la négociation internationale tel que Genève. Enfin, en raison du déménagement prochain de l'administration fédérale allemande à Berlin, Bonn offrira des locaux de toute première qualité à des conditions favorables aux organisations internationales. C'est ainsi que le gouvernement allemand a, d'ores et déjà, fait acte de candidature pour abriter à Bonn le siège de l'Organisation mondiale du commerce destinée à remplacer le GATT qui est installé à Genève - je vous le rappelle - depuis sa création.

Les conditions du gouvernement allemand sont particulièrement attrayantes, puisque ce dernier offre même de financer le déménagement de l'organisation internationale dans la cité rhénane. Dans ce contexte de concurrence acharnée, Genève ne peut se permettre de galvauder la plus petite chance de maintenir et de renforcer sa position de ville internationale. Aussi, on peut légitimement s'inquiéter des atermoiements, des retards, voire de la confusion qui entourent le dossier de la Maison Europa.

En particulier, les réticences et tergiversations, dont feront preuve les Conseils municipal et administratif de la Ville de Genève au sujet de la Maison Europa, sont de nature à discréditer les efforts qu'entreprend le Conseil d'Etat, tout en lassant les autorités de l'Union européenne qui finiront bien par abandonner leur projet.

Genève ne peut se permettre de passer à côté d'une telle chance au risque d'affaiblir non seulement sa position et son avenir en tant que centre international en Europe, mais également de contribuer à compliquer encore les relations entre la Suisse et l'Union européenne. Je pense qu'il serait très mal venu que nous ajoutions encore un grain de sable dans les rapports entre la Suisse, et plus particulièrement Genève, et Bruxelles.

Aussi, vu l'urgente nécessité de prendre une décision, je me permets de demander au président du département des travaux publics et de l'énergie de bien vouloir informer le Grand Conseil sur l'état d'avancement de ce dossier et les décisions qu'il entend prendre pour que la Maison Europa puisse être construite sur notre territoire dans les plus brefs délais.

Connaissant la célérité avec laquelle il entend débloquer un certain nombre de dossiers importants pour l'avenir de Genève, je suis convaincu que le président du département sera en mesure de nous rassurer sur ce sujet.

Le président. La réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. Olivier Lorenzini trouvera place au point 40 ter de notre ordre du jour. 

IU 15
25. Interpellation urgente de M. René Longet relative aux requérants d'asile. ( )IU15

M. René Longet (S). J'aurais une question pour M. Ramseyer, mais je vois qu'il vient de partir. Je crois que ce sera la dernière pour lui. (Brouhaha.) Monsieur Ramseyer, vous êtes très demandé, et j'y contribue. Je désire vous interroger sur la situation au centre d'enregistrement de requérants d'asile et, plus précisément, sur une déclaration qui a été faite par un haut fonctionnaire de votre département. J'aimerais rappeler que, par deux fois, en novembre 1992 et en octobre 1993, ce Grand Conseil a voté des motions qui manifestent une opposition extrêmement claire aux directives fédérales qui ont été édictées en 1992 et qui obligent les requérants d'asile à présenter une pièce d'identité pour pouvoir déposer leur requête. Le Conseil d'Etat avait fait sienne cette opposition et l'avait défendue auprès des autorités fédérales, et l'absurdité de cette exigence a été soulignée à de nombreuses reprises. On donne trente jours à des requérants d'asile pour trouver d'hypothétiques papiers, et durant l'intervalle de trente jours ils ne savent absolument pas où se rendre. Un certain nombre d'entre eux errent dans les rues et sont à la charge d'oeuvres, comme l'Agora, qui mettent en place les infrastructures pour les recueillir.

Cette situation a donc été dénoncée depuis longtemps par les autorités cantonales unanimes, Conseil d'Etat et Grand Conseil. Or, quelle n'a pas été notre surprise de voir, alors que l'on se bat encore contre les autorités fédérales pour qu'elles lèvent ce genre d'instructions stupides, de lire, dans la «Tribune de Genève» du 23 avril dernier, une déclaration de M. Bernard Ducret, adjoint à l'office cantonal de la population, qui dit : «Comme praticien de l'exécution des renvois, j'estime que, finalement, la directive - celle dont on parle - se justifie.». J'estime qu'il n'appartient pas à un fonctionnaire de l'Etat de Genève, à un responsable de service, de désavouer les efforts des autorités cantonales, et une position de ce genre est en totale contradiction avec la position de ses supérieurs, donc du Conseil d'Etat. Elle discrédite la position genevoise auprès des autorités fédérales. J'aimerais beaucoup que le Conseil d'Etat réaffirme avec clarté la position des autorités genevoises et qu'il rappelle cette position à la fois au public et à l'ensemble de ses fonctionnaires concernés.

Le président. La réponse à l'interpellation urgente de M. Longet prendra position au point 69 sexies de notre ordre du jour.  

IU 16
26. Interpellation urgente de Mme Claire Chalut suite à la demande du roi Fahd. ( )IU16

Mme Claire Chalut (AdG). J'adresse cette interpellation à M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Je lui ai donné un titre : «Les espaces du Prince».

Le roi Fahd d'Arabie est-il sur le point de s'approprier la totalité de Collonge-Bellerive ? Il y a dix ans, et après avoir obtenu une dérogation de densité, il se fit construire une somptueuse demeure pour ses petites vacances. Ayant obtenu cette dérogation, il promit qu'il n'en demanderait plus. Les années ont passé et voilà qu'il remet cela ! Le prince est gourmand, il lui faut encore plus d'espace et qu'importe les lois et ses promesses !

Aujourd'hui, c'est sur une surface boisée que le monarque absolu jette son dévolu. La loi cantonale sur les forêts est pourtant claire. Toute diminution de l'aire forestière est considérée comme un défrichement. Son règlement d'application va encore plus loin. Pour tout défrichement une compensation est exigée. Cela signifie qu'une surface équivalente doit être boisée. Je vous fais grâce de toutes les lois et tous les règlements d'application en matière de protection des espèces et de la faune, tant au plan fédéral qu'au plan cantonal.

Or, il s'agit de construire sur cette parcelle des villas et des parkings pour des dizaines de voitures. Cette situation est particulièrement choquante et le personnage bien arrogant, alors qu'on trouve toujours d'excellentes raisons pour retarder la construction de logements dont le peuple a tant besoin.

Dès lors, voici mes questions. M. le conseiller d'Etat peut-il nous dire si, malgré les oppositions et les lois qui, paraît-il, sont les mêmes pour tous, il entend délivrer une autorisation de déboiser, sans compensation, et de construire ? A en croire la presse, vous dites que Berne pousse à la roue ! Quels sont donc les intérêts de la Confédération pour qu'elle pousse à la roue ? M. le conseiller d'Etat peut-il nous fournir de substantielles explications à ce sujet ? Comment entendez-vous respecter la lex Friedrich ? La commune de Collonge-Bellerive a succombé au charme des pétrodollars. Elle vient, à une large majorité, d'accorder la dérogation autorisant un taux de densité allant jusqu'à 0,3. Le Conseil d'Etat va-t-il laisser faire ? Quelle sera sa décision ?

Le président. La réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de Mme Claire Chalut prendra place au point 40 quater. 

IU 17
27. Interpellation urgente de M. Max Schneider concernant l'enlèvement de rails. ( )IU17

M. Max Schneider (Ve). J'avais une interpellation qui s'adressait à M. Ramseyer. Mais, après en avoir parlé avec lui, je m'adresse à M. Joye. (Rires.)

Ceci concerne des travaux importants sur la ligne ferroviaire Annemasse - Eaux-Vives. En effet, la SNCF est chargée des travaux d'entretien et de réparation de cette ligne. Mais, depuis la fermeture de la gare de Chêne-Bourg, il y a eu quelques travaux assez importants réalisés dans le courant de l'an passé, notamment le démantèlement de la double voie, à la hauteur de la gare de Chêne-Bourg, ainsi que la fermeture de l'avenue de Bel-Air la semaine passée pour des travaux à nouveau sur cette voie.

Alors, les citoyens des Trois-Chêne se demandent si cela signifie le début des travaux pour le nouveau métro ou la ligne RER, ou s'il s'agit de la nouvelle liaison entre Annemasse et Cornavin ? Il n'y a aucune demande d'autorisation de construire, même pour la fermeture de cette route. Je m'adresse au Conseil d'Etat afin que notre Grand Conseil puisse être informé des raisons de ce démantèlement à la hauteur de Chêne-Bourg et que la population soit également avertie de la portée de ces travaux.

Le président. La réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. Max Schneider prendra place au point 40 quinquies de notre ordre du jour. 

IU 18
28. Interpellation urgente de M. Luc Gilly suite à une arrestation. ( )IU18

M. Luc Gilly (AdG). Mon interpellation s'adresse à M. Ramseyer. C'est une histoire qui n'a pas dix ans, Monsieur Ramseyer, elle a une semaine à peine et concerne les méthodes d'arrestations scandaleuses et douteuses dans un poste de douane à Genève.

Mercredi 20 avril, M. Larry G., 22 ans, et un ami, se sont rendus en France pour assister à un concert. A leur retour sur Suisse, c'est le contrôle au poste de douane. Sur ce, ces deux personnes ont été obligées de se déshabiller complètement. L'un des deux a été menotté et emmené directement à Champ-Dollon. Pour quel motif ? Un motif bien futile, Monsieur Ramseyer. M. Larry G. n'avait pas repris contact avec le SAPEM, le service d'application des peines et des mesures, pour fixer simplement la date de son incarcération future pour exécuter sa peine de prison pour objection de conscience. Il avait pris huit mois fermes. Or vous savez, Monsieur Ramseyer, qu'à Genève les objecteurs disposent d'un délai de cinq ans pour exécuter leur peine. Alors pourquoi tant de précipitation et la mise sur le moniteur de police de ce M. Larry G. ? Rien ne justifie cette arrestation. Rien ne justifie cette attitude, cette mise à nu, le menottage et l'incarcération.

Sans mon intervention auprès du SAPEM, sans une manifestation d'une vingtaine de personnes lundi matin, je pense que M. Larry G. serait encore en prison. Alors qu'un simple courrier aurait suffi, Monsieur Ramseyer, pour arranger cette histoire. Larry G. a fait cinq jours de prison pour rien, sauf pour lui, évidemment, ses proches et pour les contribuables.

Le 19 avril, c'est-à-dire un jour avant l'arrestation de Larry G., Amnesty International dénonçait entre autres dans son rapport, et particulièrement sur Genève et je cite Amnesty International : «que la dénudation forcée et sans autres raisons apparentes que la volonté d'humilier...» - et là, c'était spécifiquement à l'intention de la République genevoise - c'est donc bien ce qu'a subi M. Larry G., une volonté de l'humilier sans justification aucune, le lendemain de ce rapport.

Voici ma question, Monsieur Ramseyer. Enquêterez-vous dans vos services et interviendrez-vous pour que tout cela cesse ? Prendrez-vous des mesures contre les abus manifestes de certains de vos hommes ?

Le président. La réponse à l'interpellation urgente de M. Luc Gilly prendra place au point 69 septies de l'ordre du jour. 

IU 19
29. Interpellation urgente de Mme Sylvie Hottelier : Manifestation antinucléaire. ( )IU19

Mme Sylvie Hottelier (AdG). Mon interpellation concerne aussi M. Ramseyer. (Rires.) Elle concerne les conditions de parcours de la marche «Superphénix, débranchez-le» du 12 avril dernier.

Comme vous le recommandiez dans votre autorisation, le parcours fut impérativement respecté sans problème, étant donné que les manifestations antinucléaires sont non violentes. Cette autorisation, reçue le 11 avril, stipulait également l'emprunt... (Coupure de micro.) ...de la rue Sénebier et de la rue Imbert-Galloix, puis la dissolution dans le parc des Bastions.

Or, ces quatre accès étaient bloqués par des barrières et des forces de l'ordre démesurées obligeaient les quatre mille marcheurs présents à se presser dans des petites rues en cul-de-sac sans possibilité de faire demi-tour. Vous le savez, la répression n'engendre que tensions et violence. Alors, que s'est-il passé ? Provocation policière, maladresse ou paranoïa ?

La manifestation de rue est un droit d'expression populaire et de démocratie directe que la police aussi se doit de respecter. A quand une politique d'ouverture ?

Le président. La réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de Mme Hottelier prendra place à la position 69 octies de notre ordre du jour. 

PL 7073
30. Projet de loi de M. Christian Ferrazino modifiant la loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève (B 1 1). ( )PL7073

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève, du 13 septembre 1985, est modifiée comme suit:

Art. 177, al. 2 (nouvelle teneur)

al. 3 (nouveau, l'al. 3 ancien devenant l'al. 4)

2 Si l'acte du Grand Conseil a été précédé d'une étude par une commission, le président en informe cette dernière. Après avoir pris l'avis de la commission, le bureau peut charger le Conseil d'Etat de préparer la réponse au recours, qui est soumise à l'appréciation de la commission avant sa signature par le président.

3 Si l'acte du Grand Conseil n'a pas été traité préalablement par une commission, le projet de réponse est soumis à l'appréciation de la commission législative.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Il est de pratique constante que la réponse aux recours interjetés auprès du Tribunal fédéral contre une loi votée par le Grand Conseil soit traitée par la commission ayant étudié la loi attaquée, ce qui est conforme au texte de l'article 177 de notre règlement.

Cet article comporte toutefois une lacune dans la mesure où il n'évoque pas le cas - exceptionnel - où une loi ou un acte du Grand Conseil n'ont pas été traités en commission du fait qu'ils ont été adoptés en discussion immédiate. Le présent projet de loi vise à réparer cette lacune, mise en évidence à la suite de deux récents recours contre une loi et une décision du Grand Conseil, lacune d'autant plus regrettable que ce sont précisément les textes approuvés en discussion immédiate qui peuvent poser des problèmes juridiques dus au fait qu'ils n'ont pas été examinés en commission avec la sérénité habituelle de ce mode de faire.

Le présent projet de loi vise également à consacrer l'usage selon lequel la réponse au Tribunal fédéral est faite au nom du Grand Conseil et signée par son président.

Préconsultation

M. Christian Ferrazino (AdG). Le projet de loi qui vous est présentement soumis vise simplement à combler une lacune du règlement du Grand Conseil en ce sens que la pratique actuelle veut que, lorsqu'une loi est votée par ce Grand Conseil, et qu'elle fait l'objet d'un recours au Tribunal fédéral, ce soit la commission parlementaire qui a examiné le projet de loi en question qui examine la question et réponde au Tribunal fédéral.

Le règlement, il s'agit de son article 177, contient une lacune pour les cas où il y aurait recours. Nous avons connu deux cas, ces derniers temps, d'une loi qui, faisant l'objet d'un recours, n'avait pas été préalablement examinée par une commission.

Dans ces cas-là, pour suivre l'esprit de notre règlement qui consiste à laisser au Grand Conseil la possibilité de se déterminer dans le cadre de la réponse d'un éventuel recours au Tribunal fédéral, il conviendrait de compléter cette disposition, cet article 177, afin de permettre à la commission législative, en l'occurrence, d'examiner le dossier et d'apporter la réponse du Grand Conseil qui, en dernière instance, conformément à la pratique et aux textes du règlement, est signée par le président du Grand Conseil.

M. Claude Lacour (L). Le projet de loi qui vous est soumis n'est pas aussi innocent qu'il en a l'air. Lorsque le Grand Conseil prend une décision, il est souverain. Comment prend-il une décision à l'heure actuelle ? Il commence, s'il le veut bien, par demander l'avis d'une commission puis, ensuite, il en discute en séance plénière et prend une décision.

Il arrive parfois, c'est exact, qu'il soit estimé que cette décision a été mal prise et qu'un recours à une instance supérieure, le Tribunal fédéral, par exemple, soit déposé. Dans ce cas, c'est le Bureau du Grand Conseil qui rédigera la réponse à ce recours et le texte de la loi actuelle dit qu'il peut ou doit demander l'avis de la commission qui avait donné un préavis et qui, par conséquent, peut l'aider à rédiger sa réponse.

Qu'en est-il du nouveau système proposé ? Lorsque le Bureau va rédiger sa réponse au recours, on voudrait que sa réponse soit, cette fois-ci, non pas soumise à l'avis, mais à l'appréciation de la commission qui a statué. Et, si aucune commission n'a statué, on voudrait qu'il soit soumis à l'appréciation de la commission législative, comme si celle-ci en savait plus que le Grand Conseil.

Ce système me paraît totalement faux du point de vue de la logique juridique. En effet, le Grand Conseil est souverain. Il prend l'avis des commissions à l'amont. Mais on ne peut imaginer qu'après coup il soit contrôlé par une commission qui, en fait, lui est dévouée, mais qui n'a pas de pouvoir supérieur. Cela reviendrait à appliquer la méthode du : «qui peut le moins peut le plus».

Cela signifie que le Grand Conseil, ayant pris une décision après délibération, verrait tout d'un coup sa décision, par le biais du préavis devant le Bureau du Grand Conseil qui devrait répondre à ce dernier - vous choisirez le verbe qui vous plaira dans la liste que je vous donne - amendée, amenuisée, censurée, interprétée, limitée, minimisée, j'irai même jusqu'à dire, sabotée par une commission qui n'aurait peut-être pas été du même avis que le Grand Conseil ou même qui n'aurait pas du tout donné de préavis. C'est mettre le monde à l'envers, et nous estimons qu'il n'y a pas lieu de donner suite à ce projet de loi.

M. Christian Ferrazino (AdG). Je désire répondre à quelques inexactitudes soulevées par M. Lacour dans son intervention. Tout d'abord, la pratique ne fait que refléter le texte clair du règlement que vous avez lu, mais pas au complet, qui veut que la commission qui a traité d'un projet de loi avant qu'il ne soit adopté par ce Grand Conseil soit consultée.

Le règlement ne dit rien - en termes juridiques, on appelle cela une lacune, Monsieur Lacour - en ce qui concerne les projets de lois adoptés par le Grand Conseil, sans avoir été préalablement examinés par une quelconque commission. Que faire de ces projets de lois ? Deux hypothèses se présentent, dont celle que vous semblez suggérer sans le dire.

A savoir, soit de vous décharger de la réponse, qu'il vous incombe pourtant de donner en tant que député, sur un juriste que le Conseil d'Etat voudra bien désigner, soit de choisir, ce qui est proposé par ce projet de loi, de conserver votre responsabilité de député.

Je vous rappelle que les commissions parlementaires, y compris la commission législative, sont composées proportionnellement, et que votre parti n'est pas en reste par rapport aux différents groupes parlementaires qui composent cette enceinte.

Par conséquent, la commission législative, car c'est la plus à même de traiter des questions d'ordre juridique, pourrait cette fois-ci se déterminer et apporter la réponse du Grand Conseil.

Je vous rappelle que - vous avez utilisé des verbes comme censurer, grignoter ou raboter - lorsque des avis divergent, et heureusement cela arrive, on peut toujours voter et la commission peut se déterminer à la majorité.

Je ne comprends pas vos craintes. Cette commission législative, Monsieur Lacour, peut à ce moment, au nom du Grand Conseil, apporter la réponse que le Grand Conseil doit donner à une loi qui aurait été attaquée auprès du Tribunal fédéral.

Alors, si vous souhaitez donner cette responsabilité, en d'autres termes, décharger les députés de leur responsabilité pour la transférer à un juriste du Conseil d'Etat, ce qui se pratique déjà, il faut le dire.

Mais ce projet de loi propose précisément de conserver au Grand Conseil, par l'entremise de sa commission législative, la possibilité de répondre à une décision attaquée par quelqu'un auprès du Tribunal fédéral, décision qui - je le rappelle - n'a pas été l'objet, au préalable, d'un examen par une quelconque commission de ce parlement.

M. Claude Lacour (L). Je demande...

Des voix. T'as pas le droit !

Le président. M. Lacour renonce.

M. Claude Lacour (L). Non, je ne renonce pas. Je demande si j'ai le droit de répondre.

Le président. Non, vous n'avez pas le droit !

M. Claude Lacour (L). Bon, alors cela règle le problème ! (Rires.)

Le président. Conformément à l'article 232 du règlement, si ce projet est pris en considération, il sera renvoyé à une commission qui sera celle des droits politiques.

Nous allons voter la prise en considération de ce projet de loi.

Celles et ceux qui souhaitent qu'il soit pris en considération lèvent la main.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

La prise en considération de ce projet de loi est rejetée par 44 non contre 42 oui.

Mme Micheline Calmy-Rey (S). Au sujet de la demande de discussion immédiate sur le projet de loi 7073, les projets de lois sont renvoyés directement en commission.

Le président. Madame Calmy-Rey, j'ai pris la peine de vous citer l'article 232 de notre règlement qui crée une disposition spéciale pour les modifications de notre règlement. Cet article dit : «Toute proposition ayant pour objet de modifier le présent règlement doit, si elle est prise en considération, être renvoyée à une commission.». Il y a donc exception par rapport au reste des projets de lois. 

PL 7075
31. Projet de loi du Conseil d'Etat concernant la constitution de la Fondation de la commune de Bellevue pour la construction et la gestion de logements. ( )PL7075

EXPOSÉ DES MOTIFS

En 1985, les autorités communales de Bellevue avaient mandaté le bureau d'études ORTIS (architectes urbanistes) en action étroite avec le département des travaux publics pour conduire une étude sur l'avenir urbanistique et démographique de la commune.

A cette époque, Bellevue comptait 1124 habitants.

A la suite du développement qu'a connu Bellevue de par la construction de plusieurs lotissements, la population s'élève aujourd'hui à 1641 habitants.

Par ailleurs, plusieurs projets sont à la veille d'exécution, qui concernent notamment l'édification des Grands-Champs (600 habitants environ) ainsi que la Printanière (165 habitants) pour ne parler que de ceux-là.

Cette augmentation notoire de notre population en quelques années a favorisé l'installation de jeunes couples dont les enfants aujourd'hui souhaitent s'y fixer.

Il en découle que notre collectivité doit entreprendre toute mesure favorisant la construction et la gestion de logements, notamment bon marché, et l'encouragement à l'accession à la propriété pour de jeunes familles.

Il est notamment envisagé de permettre à cette fondation de procéder à l'acquisition éventuelle d'immeubles ou d'effectuer toutes les opérations de nature à lui permettre de réaliser son but.

En décidant la création d'une fondation communale pour le logement et en projetant la réalisation d'immeubles locatifs, le Conseil municipal de Bellevue entend répondre à la demande qui lui est faite dans ce sens.

Ce sont là, Mesdames et Messieurs les députés, les considérations qui justifient le dépôt du présent projet de loi, que nous vous recommandons d'adopter.

Préconsultation

M. Laurent Moutinot (S). Je demande la discussion immédiate sur ce projet de loi. Formellement, nous avons besoin d'une loi pour que cette fondation puisse être créée, mais, dans la pratique, il s'agit d'un modèle de statut qui a été inspiré des très nombreuses autres fondations communales créées sur le même modèle dans d'autres communes. La commune de Bellevue a vu son Conseil municipal, unanime, adopter ce projet. Si Mme Fatio, adjointe au maire de Bellevue, était là, elle appuierait mes propos.

Je ne crois pas qu'il s'agit de mépris à l'égard des communes, mais bien plutôt d'une marque de confiance en adoptant ce projet de loi en discussion immédiate.

M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. J'interviens dans le même sens que M. Moutinot et je profite de vous demander de témoigner la même confiance pour le point 21 qui suit et concerne la commune de Bernex, ce qui met en joie Mme Torracinta.

Mise aux voix, la proposition de discussion immédiate est adoptée.

Premier débat

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue:

LOI

concernant la constitution de la Fondation de la commune de Bellevue pour la construction et la gestion de logements

LE GRAND CONSEIL,

vu l'article 175 de la constitution genevoise;

vu l'article 72 de la loi sur l'administration des communes, du 13 avril 1984;

vu la délibération du Conseil municipal de la commune de Bellevue, du 19 octobre 1993;

vu l'arrêté du Conseil d'Etat, du 26 janvier 1994,

approuvant ladite délibération,

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Il est créé sous le nom «Fondation de la commune de Bellevue pour la construction et la gestion de logements» une fondation de droit public au sens de la loi sur les fondations de droit public, du 15 novembre 1958.

2 Cette fondation est dotée de la personnalité juridique. Elle est placée sous la surveillance du Conseil municipal de la commune de Bellevue.

Art. 2

Les statuts de la Fondation de la commune de Bellevue pour la construction et la gestion de logements tels qu'ils ont été approuvés le 19 octobre 1993 par délibération du Conseil municipal de la commune de Bellevue, joints à la présente loi, sont approuvés.

 

PL 7076
32. Projet de loi du Conseil d'Etat concernant la constitution de la Fondation de la commune de Bernex pour le logement. ( )PL7076

EXPOSÉ DES MOTIFS

La commune de Bernex possède et va développer un certain nombre de biens immobiliers. Il est constaté que la gestion de ce patrimoine pourrait être plus dynamique et plus promotionnelle.

Chaque fois que l'occasion se présente aux pouvoirs publics, ceux-ci ne manquent pas d'adopter un système qui associe plus étroitement le secteur privé aux tâches de l'administration. Il est facile de démontrer qu'une gestion autonome, contrôlée par les autorités, favorise l'essor et l'initiative par un souffle nouveau et garantit une plus grande liberté d'action.

Ce sont les raisons essentielles qui ont présidé à la décision de distraire les immeubles de la gestion purement communale et de les confier à une fondation de droit public qui aura pour mission:

- d'acheter, vendre ou échanger des immeubles, droits de superficie ou terrains non bâtis;

- de procéder à la construction de nouveaux bâtiments, transformation et rénovation de bâtiments existants;

- d'octroyer des baux en priorité à ses habitants.

En créant la Fondation de la commune de Bernex pour le logement, les autorités communales n'entendent pas reculer devant leurs obligations, mais au contraire les remplir au travers d'un organe souple et polyvalent, appelé Conseil de Fondation.

En effet, par les personnes qui le composeront, ce Conseil de Fondation pourra assurer une pérennité du système et mener à bien, dans les meilleures conditions, la réalisation des projets à moyen ou long terme élaborés au fil des législatures et leur gestion.

Ce sont là, Mesdames et Messieurs les députés, les considérations qui justifient le dépôt du présent projet de loi, que nous vous recommandons d'adopter.

Préconsultation

Le président. Conformément à ce qui a été proposé au point précédent, la discussion immédiate est demandée.

Mise aux voix, la proposition de discussion immédiate est adoptée.

Premier débat

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue:

LOI

concernant la constitution de la Fondationde la commune de Bernex pour le logement

LE GRAND CONSEIL,

vu l'article 175 de la constitution genevoise;

vu l'article 72 de la loi sur l'administration des communes, du 13 avril 1984;

vu la délibération du Conseil municipal de la commune de Bernex, du 14 décembre 1993;

vu l'arrêté du Conseil d'Etat, du 26 janvier 1994,

approuvant ladite délibération

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Il est créé sous le nom «Fondation de la commune de Bernex pour le logement» une fondation de droit public au sens de la loi sur les fondations de droit public, du 15 novembre 1958.

2 Cette fondation est dotée de la personnalité juridique. Elle est placée sous la surveillance du Conseil municipal de la commune de Bernex.

Art. 2

Les statuts de la Fondation de la commune de Bernex pour le logement, tels qu'ils ont été approuvés le 14 décembre 1993 par délibération du Conseil municipal de la commune de Bernex, joints à la présente loi, sont approuvés.

 

PL 7078
33. Projet de loi de Mme et MM. Gilles Godinat, Micheline Calmy-Rey et Pierre Vanek allouant une subvention à l'hôpital El Makkassed de Jérusalem-Est. ( )PL7078

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Un montant de 50 000 F est alloué à l'hôpital El Makkassed de Jérusalem-Est à titre exceptionnel.

2 La somme est versée à l'Association Suisse-Palestine pour la réalisation du projet.

Art. 2

La somme est prélevée sur la rubrique No 620900,367, du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales, subventions accordées à l'étranger.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Chacune et chacun garde à l'esprit le récent massacre d'Hébron sur le lieu de culte du Caveau des Patriarches. Ces atrocités ont révélé une situation sanitaire des plus précaires, car les capacités d'accueil et de soins des hôpitaux palestiniens sont cruellement sous-développées.

Un appel a été lancé pour une aide sanitaire urgente par l'intermédiaire de deux ONG, à savoir l'Association Suisse-Palestine et l'Association pour l'union entre les peuples juif et palestinien. En effet, une action urgente en faveur de l'hôpital El Makkassed est d'autant plus nécessaire qu'il y a actuellement une carence très importante d'équipements pour les soins aux blessés graves.

De plus, dans le processus de paix plus que jamais nécessaire, un tel acte de solidarité prendrait valeur de symbole, apportant réconfort à la population palestinienne.

Le projet que nous soumettons à votre attention ne rentre pas normalement dans la rubrique de l'aide au développement. Mais l'absence d'une rubrique budgétaire pour l'aide humanitaire urgente nous a obligés à envisager cette solution.

Pour ces différentes raisons, nous vous prions, Mesdames et Messieurs les députés, d'accueillir favorablement cette demande.

Préconsultation

M. Gilles Godinat (AdG). Ce point figurait à notre précédent ordre du jour et il suivait de quelques semaines le massacre d'Hébron. Je ne reviendrai pas sur ce sujet, vous savez qu'il avait fait une cinquantaine de morts et une centaine de blessés. Une commission d'enquête fait actuellement son travail en Israël. Nous n'allons pas revenir sur ces événements particuliers.

Par contre, le personnel de l'hôpital d'El Makkassed a très rapidement lancé un appel d'aide urgent, car la capacité d'accueil de cet hôpital était dépassée. Cet appel urgent a été adressé aux organisations non gouvernementales (ONG) qui travaillent en collaboration avec le Croissant-Rouge palestinien. Cet appel a été transmis à tous les députés de ce Grand Conseil. Cette demande était extraordinaire, urgente, liée à la situation particulière suite au massacre d'Hébron.

Le projet de loi que nous proposons est indépendant des plans d'aide de la Fédération genevoise de coopération qui collabore étroitement avec le Croissant-Rouge palestinien depuis des années. Un plan a été mis sur pied par rapport à la situation sanitaire dans les territoires occupés. Cette situation est inquiétante, car les structures relatives sont tout à fait sous-développées.

Nous avons fait cette proposition de projet de loi de façon à marquer un geste symbolique de la part de notre Grand Conseil pour renforcer le processus de paix en cours dans cette région, car il faut craindre une spirale de la violence comme nous le montrent des témoignages récents.

Cette aide est effectivement symbolique pour nous et nous vous proposons de soutenir ce projet de loi. La voie de procédure que l'on utilisera pour l'aide nous importe peu. Elle est secondaire et nous proposons le renvoi de ce projet à la commission des affaires régionales pour traiter de ces propositions.

M. Chaïm Nissim (Ve). Je peux témoigner devant ce Grand Conseil que cet hôpital a besoin d'argent pour fonctionner, que l'Association Suisse-Palestine est sérieuse et bien implantée. Elle transmettra l'argent honnêtement. Il n'y a donc pas de problèmes à ce niveau.

J'ai juste une petite douleur pour mon ami Gilles Godinat, car si on veut - et je crois que c'est très important - aider à la paix entre les Israéliens et les Palestiniens, il faut essayer de faire la paix entre nous. Je parle de ce fichu «Röstigraben» qui nous sépare entre la gauche et la droite et j'aurais bien voulu que vous demandiez à quelqu'un comme M. Beer, par exemple, ou n'importe qui en face, de soutenir cette motion. Mais en tout cas, il n'y a pas de raison de la refuser.

Mme Michèle Mascherpa (L). Les auteurs de ce projet de loi nous proposent de débloquer un montant de 50 000 F pour une action d'urgence en faveur de l'hôpital El Makkassed qui manquerait d'équipement et de matériel pour les soins aux blessés.

Les auteurs ont omis de dire dans leur présentation que cet hôpital est le plus grand et le meilleur hôpital privé de toute la structure hospitalière du West Bank et de Gaza. Il est vrai que les hôpitaux, cliniques et dispensaires de Cisjordanie connaissent des problèmes financiers importants, mais cette situation n'est pas nouvelle. Elle remonte à la guerre du Golfe. Il ne s'agit donc pas à proprement parler d'une situation d'urgence que l'on voudrait, à tort, lier au récent massacre d'Hébron qui, soit dit en passant, a fait des victimes des deux côtés.

Il faut également savoir qu'en 1991, déjà, la Communauté européenne a alloué une aide financière de 4,5 millions d'écus, grosso modo 7 millions de francs suisses, qui furent répartis entre huit hôpitaux privés de Cisjordanie, dont l'hôpital El Makkassed. Cette assistance a été renouvelée pour 1993-1994 et l'hôpital dont nous parlons ce soir s'est vu attribuer pour sa part plus de 2 millions d'écus pour une année qui lui sont versés en tranches mensuelles.

Si les besoins financiers des hôpitaux privés palestiniens sont bien réels, ils le sont prioritairement au niveau des coûts de fonctionnement et ce, comme je vous l'ai dit au début, de façon quasiment endémique depuis la crise du Golfe.

Cela étant dit, et quant à l'aspect symbolique du geste, croyez-vous, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il soit particulièrement opportun que notre parlement, par un geste dont la préoccupation humanitaire est fortement teintée de connotation politique, prenne en quelque sorte position à un moment où les difficiles et douloureuses négociations de paix entre Israël et les Palestiniens sont en cours ? Ne croyez-vous pas qu'une attitude plus neutre, plus impartiale devrait être de mise ?

En conclusion, le groupe libéral ne s'oppose pas au renvoi de ce projet de loi en commission, mais il souhaite que les éléments que je viens de vous exposer soient pris en compte lors de ces discussions.

M. Pierre Kunz (R). Je crois me rappeler que la mission de ce Grand Conseil est de façonner le cadre politique, social et économique de ce canton. Or, je trouverais dommage que ce Grand Conseil se transforme en kermesse caritative où se traitent les coups de coeur de certains de nos collègues, aussi fondés soient-ils.

Le Grand Conseil n'est pas la voie adéquate pour traiter ce genre de suggestion. Il existe pour cela des voies de procédure bien précises, celles de la Fédération genevoise de coopération, s'il s'agit d'une affaire de coopération, celles de la Croix-Rouge, s'il s'agit d'une oeuvre humanitaire. Il revient, me semble-t-il, au Conseil d'Etat de présenter, s'il le juge utile, un projet de loi sur ces questions au Grand Conseil.

C'est ainsi que, sans me prononcer sur le fond que je respecte parfaitement, je voterai non à l'entrée en matière et au passage en commission.

Mme Micheline Calmy-Rey (S). Ce projet entre sans conteste dans la catégorie de l'aide humanitaire d'urgence.

L'hôpital dont il est question a été établi en 1967 sur le Mont des Oliviers dans le but de répondre aux besoins des Palestiniens et de leur assurer des soins médicaux décents dans l'environnement difficile des territoires occupés et de la pauvreté.

Cet hôpital est devenu depuis une des principales institutions de santé des Palestiniens, et son rôle s'est encore accru depuis 1987. Une action urgente en sa faveur est nécessaire aujourd'hui du fait, notamment, d'une carence importante en matière d'équipement pour les blessés graves. Je crois que sur ce point nous pouvons nous entendre.

Vous nous reprochez de ne pas suivre la bonne procédure, Monsieur Kunz. Les projets d'aide humanitaire d'urgence dépassant un montant de 10 000 F, ce qui est le cas du présent projet, font normalement l'objet d'un projet de loi du Conseil d'Etat qui est soumis au Grand Conseil. Les fonds ne proviennent pas d'une rubrique budgétaire mais sont pris sur la part disponible de l'Etat provenant du droit des pauvres.

Evidemment, nous n'avons pas pu prélever ces fonds sur une rubrique budgétaire d'aide humanitaire urgente puisqu'une telle rubrique n'existe pas. C'est la raison pour laquelle nous vous proposons de les prendre sur la subvention accordée à l'étranger. Cette solution est insatisfaisante, nous le reconnaissons et, pour cette raison, ce projet de loi doit pouvoir être renvoyé en commission.

Enfin, nous avons eu des contacts avec l'Association Suisse-Palestine, pas avec une autre organisation. Nous ne sommes donc pas sûrs qu'une autre organisation, comme par exemple la Croix-Rouge, serait d'accord de prendre en charge cette aide. Le renvoi en commission sera donc utile si le Conseil d'Etat, de par ses relations et ses contacts, peut trouver une voie et passer éventuellement par d'autres canaux. Je vous demande donc de bien vouloir voter le renvoi de ce projet en commission.

M. Claude Blanc (PDC). Le groupe démocrate-chrétien acceptera le renvoi en commission en chargeant la commission de déterminer par quels voies et moyens elle compte acheminer ses fonds vers les destinataires.

M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Tout à l'heure, l'un de vous a rappelé que c'est juste après le massacre d'Hébron que ce projet de loi a été imaginé.

Je comprends bien que, sous le coup de l'émotion, des initiatives comme celle-ci soient prises. Cela étant, et comme on l'a rappelé tout à l'heure, je ne souhaite pas que l'on s'éloigne des méthodes de travail arrêtées et qui ont apporté la preuve de leur efficacité. Dans le domaine humanitaire, nous travaillons en collaboration avec la Croix-Rouge et, en ce qui concerne la coopération, avec la Fédération genevoise.

Si vous allez en commission, comme il semble que ce soit le cas, je souhaite que nous ayons le temps de constituer un dossier dans les mêmes conditions que ceux que nous préparons pour d'autres subventions. A l'occasion de la première séance de cette commission, nous pourrons peut-être parler de la méthode. Alors, je vous demande de nous donner le temps nécessaire à la constitution d'un dossier.

Les moyens globaux dont nous disposons dans les rubriques citées auparavant sont, à certains égards, importants, dans tous les cas par rapport aux autres cantons suisses. Les efforts que Genève fait sont assez substantiels mais sont extrêmement limités en regard de tout ce que nous pourrions entreprendre.

C'est pourquoi ce qui est fait doit l'être avec rigueur, et après nous être assurés d'aider ceux qui en ont le plus besoin.

Ce projet est renvoyé à la commission des affaires régionales.

 

PL 6821-A
34. Rapport de la commission du logement chargée d'étudier le projet de loi de Mme et M. David Lachat et Claire Torracinta-Pache instituant une commission consultative sur le logement. ( -) PL6821
 Mémorial 1992 : Projet, 2944. Commission, 2947.
Rapport de majorité de M. Florian Barro (L), commission du logement
Rapport de minorité de M. Laurent Moutinot (S), commission du logement

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

La commission du logement du canton, sous la présidence de M. Jacques-André Schneider, a étudié ce projet de loi au cours des séances du 3 mai et du 6 septembre 1993, ainsi que de manière informelle les 29 novembre 1993, 24 janvier et 7 février 1994 sous la présidence de Mme Geneviève Mottet-Durand.

Assistaient également aux travaux: M. Claude Haegi, conseiller d'Etat chargé du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales, ainsi que M. Pierre Ischi, directeur général du logement.

1. Généralités

Le présent projet de loi a pour objet d'institutionnaliser la concertation en matière de logement par la création d'une commission consultative. Elle serait chargée, entre autres, d'émettre des avis et de formuler des propositions à l'intention du Conseil d'Etat.

2. Historique

Dans l'exposé des motifs, Mme Torracinta-Pache et M. David Lachat, cosignataires de ce projet de loi, se plaisent à rappeler l'existence bien réelle de la concertation en matière de logement. A l'initiative des partis, notamment le parti socialiste, les sujets d'actualité ont été débattus lors de rencontres informelles en vue de trouver des points de convergence.

Le Conseil d'Etat, par le biais de la délégation du logement, a eu maintes fois l'occasion de consulter les milieux intéressés et de faire progresser la concertation chaque fois qu'il a été nécessaire de le faire.

D'autre part, la commission cantonale de recherche sur le logement et le Conseil de l'habitat ont fonctionné pendant de nombreuses années et semblent aujourd'hui plongées en léthargie, ce qui visiblement peinait les auteurs du projet de loi.

3. Travaux de la commission

D'entrée de cause, M. Lachat, avec la mesure qu'on lui connaît, a plaidé modérément pour son projet de loi, en soulignant que, malgré la quasi-disparition de la commission cantonale de recherche sur le logement et du Conseil de l'habitat, le DIAR, et particulièrement son chef de département, n'a jamais été en reste en matière de concertation. Toutefois, à ses yeux, le mécanisme légal de la commission consultative serait la partie contractuelle manquante pour atteindre le nec plus ultra de la concertation.

Le département a souhaité préciser que l'actuelle délégation du logement reçoit, selon le besoin, la demande, le problème posé, à son initiative ou à la leur, le ou les partenaires nécessaires, qu'ils soient communes, promoteurs, constructeurs, coopératives, représentants de locataires, etc.

De cette attitude constructive est ressorti un groupe de concertation triangulaire: Etat, Chambre genevoise immobilière (CGI) et Rassemblement pour une politique sociale du logement (RPSL), qui s'est réuni pour débattre, par exemple, des nouveaux taux d'effort, des aides fédérales et cantonales cumulées. Cette manière de pratiquer démontre, à l'envi, que rien d'important pour le logement ne se fait sans la concertation, dans les limites, bien entendu, de la sphère d'action de l'Etat.

C'est au bénéfice de ces explications que la commission a refusé l'entrée en matière par 5 non, 5 oui et une abstention, donnant la préférence à la souplesse de la pratique en vigueur.

Au tournant de la législature, de par le renouvellement de la commission, la majorité de la commission a jugé utile, après ce vote négatif, de refaire une concertation au sujet de la concertation. Le chef du département a rappelé, à l'endroit des nouveaux députés, les éléments qui ont constitué la concertation logement durant ces quatre dernières années. Il a fait notamment mention du «droit d'initiative» des participants pour agender ces séances et pour faire porter certains objets à l'ordre du jour.

Certains commissaires, adeptes de la concertation, continuent à douter de la bonne foi de cette pratique et persistent à défendre l'institutionnalisation de la concertation en matière de logement.

4. Conclusion

La majorité de la commission maintient son opposition à l'entrée en matière de ce projet de loi, mais pas à la concertation, qu'elle recommande de maintenir et de développer, dans son esprit et dans sa forme actuels, entre les différents partenaires concernés.

Nous vous recommandons donc, Mesdames et Messieurs les députés, de suivre les recommandations de la majorité de la commission et de refuser l'entrée en matière.

RAPPORT DE LA MINORITÉ

Sous la présidence de M. Jacques-André Schneider, président, la commission du logement a examiné le projet instituant une commission consultative sur le logement dans ses séances des 3 mai et 6 septembre 1993. A l'issue de cette dernière séance, l'entrée en matière a été refusée par 5 oui, 5 non, et une abstention.

Certains députés de l'Alternative s'étant demandé ce qu'il était advenu du projet de loi 6821, la commission du logement, au début de l'actuelle législature et étant donné l'arrivée en son sein de nouveaux députés, a décidé de refaire le point et c'est ainsi que ce projet de loi a été à nouveau évoqué, au début de l'actuelle législature, lors des séances, sous la présidence de Mme Geneviève Mottet-Durand, présidente, des 29 novembre 1993, 24 janvier 1994 et 7 février 1994. Ces nouvelles discussions n'ont pas abouti à un vote formel.

De l'unanimité...

Chaque membre de la commission s'est plu à relever la nécessité et les mérites de la concertation pour la résolution des problèmes du logement à Genève. Tout le monde s'accorde également pour vouloir la concertation la plus efficace possible, susceptible de faire avancer les dossiers de manière pragmatique.

... aux divergences

La majorité de la commission est d'avis que la concertation actuelle suffit, articulée d'une part autour de la délégation du logement du Conseil d'Etat, et d'autre part sur la base de contacts directs entre les partenaires sociaux.

Il a été rappelé dans cette optique que la délégation du logement est à l'écoute de celles et ceux qui l'interpellent et qu'elle est en contact avec la Chambre genevoise immobilière et le Rassemblement pour une politique sociale du logement. Les journées cantonales du logement - il y en a eu trois à ce jour - organisées par le département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales, s'inscrivent dans cette idée de la concertation.

Sans nier les vertus de la concertation directe entre partenaires sociaux, la minorité de la commission estime les formes actuelles de concertation comme largement insuffisantes, pour les raisons suivantes:

1. La concertation entre partenaires sociaux n'associe pas à son processus les pouvoirs publics. Le projet de loi 6821 a au contraire pour but de «favoriser la concertation entre les milieux intéressés et les pouvoirs publics», soit une concertation tripartite.

2. S'il est exact que la délégation du logement est à l'écoute de celles et ceux qui s'adressent à elle, elle ne se sent en revanche pas obligée d'informer les milieux intéressés sur les sujets importants, alors que le projet de loi 6821 prévoit que la commission «doit être consultée par le Conseil d'Etat au sujet de toute proposition importante». A titre d'exemple, on rappellera que, sans même informer les partenaires sociaux, le Conseil d'Etat a décidé que la pénurie de studios et d'appartements de 2 pièces n'existait plus à Genève, ouvrant par là la voie aux congés-ventes, et cela sur la base d'une statistique qui avait été interprétée deux mois plus tôt comme signifiant que la pénurie persistait à Genève dans toutes les catégories d'appartements. Cette affaire est révélatrice du manque de concertation, ou plus exactement d'une concertation dépendant du seul bon vouloir du Conseil d'Etat. Seule l'institutionnalisation de la concertation permet de s'assurer de son efficacité.

De la réduction des contradictions au sein de la commission

La majorité de la commission oppose comme deux politiques contraires la concertation non institutionnelle existant actuellement et la concertation institutionnalisée proposée par le projet de loi. Au lieu d'opposer ces points de vue, la minorité de la commission considère les deux types de concertations comme complémentaires, car elles ne sont en aucun cas exclusives l'une de l'autre. Bien au contraire, la concertation entre partenaires sociaux sortira renforcée de l'information qu'ils recevront par le biais de la concertation institutionnelle, et les affrontements entre les milieux intéressés d'une part et l'Etat d'autre part pourront dans la majorité des cas être évités ou à tout le moins réduits.

La commission proposée par le projet de loi 6821 ne doit pas être comprise comme un organe supplémentaire, bureaucratique et inutile, mais connue comme un cadre meilleur renforçant la concertation existant actuellement. L'importance de la concertation ne permet pas qu'elle soit laissée à la seule appréciation discrétionnaire des uns ou des autres, notamment s'agissant de la circulation de l'information, car pour qu'il y ait concertation, il faut qu'il y ait préalablement information.

Au moment où tout le monde s'accorde à reconnaître que le dialogue entre les partenaires sociaux et avec les pouvoirs publics doit être renforcé, on peut s'étonner du refus de définir les conditions permettant précisément de concrétiser et de garantir un tel dialogue.

Il est ainsi apparu à la minorité de la commission qu'il était contradictoire d'être pour une idée - le développement de la concertation - et contre sa concrétisation la plus élémentaire - la constitution d'une commission consultative.

On rappellera enfin que le modèle proposé est calqué sur celui de la commission consultative sur les questions énergétiques qui n'a, à ce jour, pas fait l'objet de critiques majeures.

En conséquence, Mesdames et Messieurs les députés, la minorité de la commission (5 oui, 5 non et une abstention) vous prie d'accepter d'entrer en matière sur le projet de loi instituant une commission consultative sur le logement.

PROJET DE LOI

instituant une commission consultative sur le logement

(I 5, 1,8)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Institution

Il est institué une commission consultative sur le logement, rattachée au département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales.

Art. 2

Compétences

La commission a pour but de favoriser la concertation entre les milieux intéressés et les pouvoirs publics. Elle est chargée d'émettre des avis ou de formuler des propositions à l'intention du Conseil d'Etat sur les questions relatives à la politique cantonale du logement. Elle doit être consultée par le Conseil d'Etat au sujet de toutes propositions importantes en cette matière.

Art. 3

Composition

a)

b)

c)

d)

e)

f)

La commission se compose:

. .

du directeur de la direction générale du logement;

d'un représentant du département des travaux publics et de l'énergie;

de 2 représentants des exécutifs communaux, proposés par l'Association des communes genevoises;

de 4 représentants des organisations représentatives des milieux immobiliers;

de 4 représentants du Rassemblement pour une politique sociale du logement.

Art. 4

Nomination

et durée du

mandat

1 Les membres de la commission sont nommés par le Conseil d'Etat, sur proposition des départements, associations et organisations intéressées.

2 La durée de leur fonction correspond à la législature du Grand Conseil.

3 Dans le cas de démission ou de vacance, il est procédé à leur remplacement conformément à la procédure prévue à l'alinéa 1.

Art. 5

Présidence

et secrétariat

1 La commission est présidée par le conseiller d'Etat chargé du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales.

2 Elle désigne un vice-président, choisi parmi ses membres.

3 Le service de la direction générale du logement assure le secrétariat de la commission.

Art. 6

Fonctionne-

ment

La commission se réunit aussi souvent que cela est nécessaire, mais au minimum 4 fois par an, sur convocation de son président.

Art. 7

Idemnité

Les membres de la commission reçoivent un jeton de présence fixé par le Conseil d'Etat.

Art. 8

Secret de

fonction

Les membres de la commission ainsi que toute personne appelée à participer aux travaux de celle-ci sont tenus au secret, conformément à l'article 3 de la loi concernant les membres des commissions officielles, du 24 septembre 1965.

Premier débat

M. Laurent Moutinot (S), rapporteur. En relisant mon rapport, j'ai constaté avoir omis un argument qui pourrait permettre à certains de changer d'opinion.

Le 18 décembre 1993, l'article 10 a) (nouveau) est entré en vigueur sur la politique du logement. Il est prévu à la lettre h) que la République doit instaurer, je cite : «Une politique active de concertation en cas de conflit en matière de logement.».

Par conséquent, il s'agit d'un mandat constitutionnel, prévu, il est vrai, pour le cas de conflit. Mais, dans la mesure où mieux vaut prévenir que guérir, ce serait faire preuve de respect de la volonté du souverain que d'entrer en matière sur le projet de loi qui vous est soumis.

La deuxième raison est que les quelque vingt-cinq projets en matière de logement annoncés par la Tribune, si j'ai bien compris ce qu'elle en disait, qui n'ont, à ce jour, été soumis à personne, me paraissent rendre l'information absolument nécessaire et, par conséquent, la concertation.

On fait un faux débat en voulant opposer la concertation spontanée qui, de toute évidence, est une bonne chose, et la concertation institutionnelle qui offre l'avantage que les règles du jeu sont connues et permet surtout de faire circuler les informations nécessaires à la concertation spontanée.

Loin d'opposer ces deux types de concertation, il faut les considérer toutes deux comme nécessaires, et c'est la raison pour laquelle je vous invite à suivre le rapport de minorité.

Mme Claire Torracinta-Pache (S). En tant que coauteur de ce projet de loi, permettez-moi de rappeler quelques éléments qui ont précédé son dépôt.

En janvier 1989, j'ai proposé, au nom du groupe socialiste, la motion 545 concernant la concertation en matière de logement. Elle invitait le Conseil d'Etat à lui présenter un bilan de l'activité du conseil de l'habitat et de la commission cantonale de recherche sur le logement et, en deuxième invite, à étudier la possibilité de les remplacer par un groupe de représentants des milieux concernés : autorités, promoteurs, utilisateurs, bien décidés à mener une véritable politique en matière de logement.

Cette motion a été acceptée à l'unanimité de notre parlement - cela mérite d'être souligné - et a donc été renvoyée au Conseil d'Etat. Notre inquiétude au sujet de l'activité de ces deux instances avait sa raison d'être. Vous savez que, pour l'une d'entre elle, elle ne s'était réunie que deux fois depuis sa création, qui datait de six ou sept ans en arrière, et on n'avait aucune information sur le travail de ces deux structures.

Trois ans après, le Conseil d'Etat a répondu à la motion par un rapport totalement inconsistant, une vingtaine de lignes ignorant totalement la première invite. Je suis navrée, Monsieur Haegi, je répète ce que j'ai dit à l'époque, à savoir que ce rapport était indigne du conseiller d'Etat concerné ou du fonctionnaire qui l'avait rédigé. Le débat s'est très vite enflammé ce fameux soir, comme c'était souvent le cas à l'époque lorsque nous parlions de logement. Il est vrai que la faiblesse du rapport pouvait être considérée comme une provocation.

A cette occasion, M. Lachat qui, entre-temps, était devenu député, a annoncé que nous allions déposer un projet de loi sur la création d'une commission consultative sur le logement, projet de loi qui nous occupe aujourd'hui. Ce projet a été renvoyé en préconsultation sans opposition et sans aucune discussion à la commission du logement.

Que constate-t-on aujourd'hui ? Malheureusement, en matière de concertation, justement, nous n'avons pas réussi à nous concerter suffisamment et à nous mettre d'accord. Nous voici en face de deux rapports aux conclusions totalement opposées. Je le regrette d'autant plus que je ne comprends pas très bien les conclusions du rapport de majorité. Comment peut-on être favorables à la concertation tout en refusant de l'inscrire dans la loi ?

Notre projet de loi a encore sa raison d'être. S'il est évident - et nous le reconnaissons bien volontiers - que de sensibles améliorations ont été apportées dans la concertation sur le logement par la volonté du chef du département, par celle des représentants des milieux concernés comme par celle des différents partis politiques, rien n'est tout de même jamais définitif. En effet, les personnes peuvent changer, les situations également, et il nous semble qu'une structure légale nous éviterait de retomber dans l'affrontement constant que nous avons connu sur ces bancs pendant des années.

Comme l'a expliqué M. Moutinot dans son rapport, notre projet de loi va plus loin puisqu'il prévoit une commission tripartite devant être consultée sur toute proposition en matière de logement. La disparition de la pénurie en matière de petits logements, deux-pièces ou studios, décrétée par le Conseil d'Etat, a suscité des remous et des réactions très vives dans les milieux des locataires. Ces réactions auraient pu être évitées si le sujet avait été traité par la commission que nous réclamons.

Voilà pourquoi nous maintenons notre projet de loi. Nous vous recommandons d'accepter les conclusions du rapport de minorité, même si certains estiment qu'il y a détente sur le marché du logement, car le sujet reste extrêmement sensible. Il y a encore beaucoup à faire et les affrontements en la matière seraient totalement contre-productifs.

M. Florian Barro, rapporteur. Pour répondre aux préoccupations de Mme Claire Torracinta-Pache sur les conclusions de la majorité de la commission et pour orienter un peu le sens de cette phrase, elle découle simplement du fait que lors de l'entrée en matière dans ce débat, M. Lachat a rappelé qu'il n'était pas absolument «accroché» à ce projet de loi mais qu'il entendait bien, en le présentant à la commission du logement, en faire un projet pour que subsiste et se développe une concertation, telle qu'elle a été vécue jusqu'ici.

Les conclusions de la commissions vinrent après les propos de M. Haegi qui a confirmé qu'il s'agissait de développer ce type de concertation chaque fois que cela a été nécessaire. Il nous a assuré que ce mode de faire était pour lui le plus souple et le meilleur et qu'il s'inscrivait parfaitement dans l'esprit de M. Lachat, en tout cas au moment où il nous l'a présenté. La conclusion est de dire que l'on peut très bien continuer en l'état, et il n'y a pas besoin de créer des structures lourdes, surtout si l'on n'a rien à se dire.

D'autre part, et pour conclure, j'ajouterai que dans l'exposé des motifs qui était avec ce projet de loi une référence était faite à la commission consultative sur l'énergie - je ne connais pas le nom exact - et l'exposé des motifs précisait que cette commission se réunissait à satisfaction, ou fonctionnait à satisfaction. Toutefois, cette commission est quelque peu similaire au conseil de l'habitat, comme vous l'avez relevé, en ce sens qu'elle ne s'est pas réunie assez souvent pour avoir suffisamment de points de discordance.

M. René Koechlin (L). Comme à leur habitude, les milieux de gauche, et avec eux les auteurs de ce projet de loi, sont convaincus ou simplement s'imaginent que l'on résout un problème en créant une commission, un peu comme les Papous qui, à la vue d'un aéroplane, s'imaginèrent pouvoir voler en singeant un avion au moyen de morceaux d'étoffe étalés sur le sol en forme de croix. (Sourires, quolibets.)

Institutionnaliser la concertation relève du même genre d'illusion. Elle ne peut se satisfaire des oripeaux d'une commission, car la concertation n'existe qu'en fonction de la motivation des intéressés. Toute concertation véritable n'a lieu que lorsque les personnes concernées y font appel parce qu'ils la souhaitent et la jugent nécessaire. A défaut, elle est une fiction comme la commission que ce projet de loi voudrait instaurer.

Dürrenmatt, dans «Hercule et les écuries d'Augias», a dit : «Quand un gouvernement ne sait comment résoudre un problème, il nomme une commission qui nomme une autre commission qui nomme une sous-commission qui nomme un groupe de travail, de sorte que rien ne se produit et le problème est noyé.».

M. Jean-Pierre Lyon. Ça fait cinquante ans que vous faites ça !

M. René Koechlin. Pour le moment, c'est vous qui proposez de noyer les problèmes en nommant une commission, Monsieur, ce n'est pas nous !

M. Jean-Pierre Lyon. Ça dure depuis la guerre...

M. Jean-Pierre Koechlin. Enjoignons plutôt, Monsieur, les partenaires socio-économiques à se concerter. Cela, nous pouvons le faire. Reprenons entre nous, comme nous l'avons fait précédemment... Vous n'étiez pas là, Monsieur, alors taisez-vous ! (Rires.) Reprenons la concertation politique comme nous la pratiquions précédemment à propos du logement. Cela avait lieu dans les locaux du parti socialiste, un de vos proches partis, Monsieur !

Si vous avez des critiques à formuler au Conseil d'Etat, vous pouvez les exprimer sous forme d'interpellation, de motion, de résolution ou même de projet de loi. Mais ne vous donnez pas bonne conscience en évacuant le problème dans une commission qui ronronnera comme tant de ces commissions extraparlementaires. C'est la raison pour laquelle notre groupe vous invite à suivre, naturellement, le rapport de majorité et à rejeter ce projet de loi.

M. Jean Opériol (PDC). Je serai probablement moins lyrique que mon ami Koechlin, mais néanmoins, j'abonderai dans son sens en rappelant certaines vérités qui sont des faits, et comme les faits sont têtus ils sont incontestables. J'inviterai simplement ce Grand Conseil à rejeter ce projet de loi que, d'ailleurs, M. Lachat a proposé sans conviction.

Je rappelle qu'il existe à Genève une concertation dite officielle, et une autre, officieuse. La concertation officielle émane de la délégation du logement qui, à chaque occasion jugée utile, convoque les partenaires au logement, à savoir, le Rassemblement et la Chambre genevoise immobilière, pour les amener à se concerter autour d'une table.

Je rappellerai, et M. Ferrazino ne me contredira probablement pas, que les exemples sont nombreux qui montrent que la concertation, dès l'instant qu'elle est prise en main par les partenaires responsables, fonctionne. Nous disposons, par exemple, de baux commerciaux, de baux d'appartements qui sont tous conçus sur une base paritaire. Ils ont été conçus par les partenaires autour d'une table, en toute quiétude et en toute harmonie. Nous avons aussi d'autres contrats - je n'entrerai pas dans le détail. Une convention de chauffage a été mise sur pied à force de discussions sur une base concertée et paritaire. En un mot, les exemples ne sont pas si peu nombreux que nous ne puissions nous y référer.

A mon avis, c'est ne pas reconnaître les efforts qui ont été faits à ce jour par des agents à la concertation, ceux qui se sont occupés de faire progresser la situation du logement. Et enfin, c'est remettre en cause, d'une certaine manière, une paix du logement qui existe aujourd'hui.

Cette concertation, telle qu'elle nous est proposée par ce projet de loi, n'est rien d'autre qu'un alourdissement du carcan législatif qui paralyse le logement, et c'est la raison pour laquelle nous devons aujourd'hui rejeter cet alourdissement.

M. Laurent Moutinot (S), rapporteur. Je désire juste, Monsieur Opériol, que vous ne confondiez pas la modération de David Lachat avec sa prétendue mollesse. Je l'ai interpellé avant ce débat. Il reste parfaitement convaincu de la valeur de son projet de loi, tout comme sa partenaire dans ce projet de loi, Claire Torracinta-Pache, qui n'a pas non plus changé d'avis à ce propos.

M. Jean-Pierre Gardiol (L). Je soutiens le rapport de majorité et tiens juste à compléter une ou deux choses, développées par MM. Opériol et Koechlin, et je peux confirmer qu'il n'y a pas besoin de légiférer pour que la concertation fonctionne.

La preuve en est que, pas plus tard que la semaine dernière, une réunion du groupe de concertation auquel j'ai participé a eu lieu. Elle s'est déroulée dans une bonne atmosphère, les problèmes abordés étaient intéressants et traités de manière constructive. Malheureusement, le consensus n'a pas pu être trouvé sur tous les problèmes, mais la concertation s'est déroulée d'une manière totalement démocratique.

En fonction de mes expériences, je vous invite à ne pas entrer en matière sur ce projet de loi, car la «légiférite», chère aux avocats, M. Moutinot nous l'a démontré au début de son intervention, ne vient pas arranger la concertation. C'est une question d'hommes et de femmes et non pas de lois.

Une voix. Ben ça c'est causé !

M. Christian Ferrazino (AdG). Je répondrai à M. Gardiol sur la «légiférite» qui serait chère aux avocats. J'avais cru comprendre qu'elle était plutôt chère au parti libéral qui a annoncé, pas plus tard qu'il y a une semaine, le dépôt d'une vingtaine de projets de lois. Je ne sais pas comment vous appelez cela, Monsieur Gardiol ?

Plutôt que d'annoncer, par une conférence de presse, les projets de lois que vous n'avez pas encore faits mais que vous pensez déposer prochainement, vous pourriez, beaucoup plus utilement dans le cadre d'une commission de concertation, en parler avec vos partenaires, et c'est précisément le but d'une concertation telle que David Lachat souhaitait l'instaurer : réunir les partenaires sociaux pour discuter avant les grands débats en plénière du Grand Conseil et ainsi parler des problèmes qui se posent en rapport avec un certain nombre de ces projets de lois.

Il est vrai que nous nous sommes réunis voici quelques jours, et nous n'étions guère étonnés d'avoir reçu cette convocation une semaine avant la séance plénière qui devait traiter des sujets de la concertation; disons que le contraire nous aurait plutôt surpris, à savoir de ne pas l'avoir reçue ou de la recevoir après cette séance.

Mais admettons que ce soit un heureux hasard, car on ne s'était pas vu depuis quelque six mois. Eh bien, Monsieur Gardiol, nous y avons assisté ensemble, et mon ami Lachat y était aussi. Vous aurez certainement entendu ce qu'il vous a dit, et qu'il a eu l'occasion de rappeler à tous les participants, y compris à vous, Monsieur le président Haegi, qu'il s'étonnait de voir comment les choses avaient évolué depuis qu'il avait quitté ce Grand Conseil, car, à ce jour, il n'avait jamais vu de séances de ce type.

C'est vous dire que la situation, telle qu'elle se révèle aujourd'hui, rend d'autant plus nécessaire l'instauration d'une vraie concertation, car celle à laquelle vous faites allusion, Monsieur Opériol, existe et heureusement que les partenaires sociaux peuvent se rencontrer et mettre sur pied des baux paritaires, des conventions de chauffage, car si on n'arrivait pas le faire, ce serait assez inquiétant.

Mais la concertation proposée par ce projet de loi n'est pas mise en concurrence avec celle qui existe aujourd'hui. C'est un complément de la concertation que nous pratiquons quotidiennement et qui est d'autant plus nécessaire, Laurent Moutinot en a rappelé quelques exemples tout à l'heure, que le Conseil d'Etat, semble-t-il, modifie un certain nombre de règlements, prend des décisions dont nous prenons connaissance par la presse, par les médias sans consultation préalable. Forcément, des réactions émergent et un certain nombre de recours se font jour. Actuellement, les procédures se multiplient et cela va continuer.

Vous pouvez souhaiter que les choses évoluent de cette façon, mais il ne faut pas laisser croire que vous êtes pour la concertation tout en étant contre l'élément qui pourrait permettre de l'instaurer et de la concrétiser.

Voilà donc une des idées de ce projet déposé par David Lachat. C'est celle de rappeler que la concertation présuppose l'information, car, pour discuter, il faut encore savoir ce que sont les projets que le Conseil d'Etat est en train de mettre sur pied. Nous avons connu quelques exemples montrant que cette concertation est totalement inexistante.

Je rappelle que la concertation ne s'adresse pas seulement à M. Haegi, président du DIAR...

M. Clause Haegi, président du Conseil d'Etat. DIER !

M. Christian Ferrazino. Oui, vous êtes dans la nuance des consonnes, Monsieur le président.

M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Des voyelles !

M. Christian Ferrazino. M. Maitre est toujours très attentif aux choses importantes. Je vous remercie, Monsieur Maitre. (Eclats de rires et bravos.) Ce projet de loi intègre également dans cette concertation le département de M. Joye. Et Dieu sait si ce département fait parler de lui en ce moment ! Non seulement on en parle au sujet des zones agricoles, mais surtout en ce qui concerne les autorisations délivrées de façon totalement incompréhensible pour des projets de construction...

Une voix. Cela crée des emplois !

M. Christian Ferrazino. Oui, cela crée des emplois. On connaît votre rengaine. Tout à l'heure, j'aurai l'occasion de revenir sur cette question, puisque certains sujets de notre ordre du jour sont proches de cette dernière.

Mais sur ce point, je voudrais signaler que l'article 3 de ce projet de loi, pour ceux qui l'auront lu, prévoit d'intégrer également deux représentants des travaux publics et de l'énergie. La concertation, si elle doit exister, doit l'être de façon générale dans l'ensemble des départements concernés. Cela implique que des représentants des pouvoirs publics, du département de M. Haegi - vous voyez, Monsieur le président, que j'évite le problème des voyelles - et des représentants du département de M. Joye, soient présents avec les partenaires sociaux.

Le président. Est-il possible de passer la parole au Conseil d'Etat ?

M. Jean-Pierre Gardiol (L). Sans méchanceté de ma part, M. Ferrazino tient à peu près toujours le même discours. (Rires.) Lorsque vous estimez que les gens ont mal voté, c'est parce qu'ils n'ont soi-disant pas compris. C'est la même chose avec la concertation. Lorsque nous ne sommes pas d'accord avec vous, vous estimez qu'il n'y a pas de concertation. Plus le temps passe, Monsieur Ferrazino, et plus vous me laissez songeur sur votre conception de la concertation et de la démocratie.

M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Lorsque le conseil d'habitat existait et la commission cantonale de recherche sur le logement aussi, il n'y avait pas de réunion et pas de concertation. D'ailleurs, Mme Torracinta-Pache l'a elle-même relevé tout à l'heure.

C'est dire qu'il ne suffit pas - comme le relevaient d'ailleurs plusieurs d'entre vous - d'avoir des bases législatives pour que des réunions aient lieu et que la concertation soit pratiquée dans de bonnes conditions.

Ce soir, en vous invitant à suivre le rapporteur de majorité, je ne vous invite pas à renoncer à la concertation, mais je prends devant vous l'engagement que j'avais pris voici quatre ans. Nous nous sommes engagés dans cette voie. Jamais, et cela a été reconnu par tous, nous ne nous sommes autant vus, même si on peut regretter de ne pas avoir traité certains sujets, qu'au cours de ces dernières années.

Ce soir, je précise à ceux qui l'ignoreraient que le Conseil d'Etat a maintenu la délégation du logement formée de trois conseillers d'Etat qui sont disponibles pour recevoir ceux qui voudraient interpeller le Conseil d'Etat sur tout problème concernant le logement, qu'il s'agisse d'associations, de communes ou simplement de groupements d'habitants de notre canton.

Le groupe de concertation n'a en effet aucune base légale, mais il s'est réuni régulièrement au cours de la législature précédente. Il a permis de faire l'unanimité sur la loi générale concernant le logement et poursuit son activité. Je vous rappelle, Monsieur Ferrazino, qu'il se réunit à la demande de n'importe lequel des trois partenaires, puisqu'il est triangulaire, soit le Rassemblement, la Chambre genevoise immobilière, et mon département pour la partie sociale du logement. A la fin de chaque séance - vous le savez bien - je vous demande s'il y a un sujet dont vous désireriez que l'on traite dans le groupe de concertation. Pour le surplus, vous pouvez m'interpeller lorsque vous désirez que le groupe de concertation se réunisse.

Cela ne nous prive pas de la possibilité d'avoir des contacts directs selon la nature des sujets - j'en ai avec le Rassemblement pour une politique sociale du logement, avec la Chambre genevoise immobilière et avec les métiers de la construction. Nous avons aussi institué des journées cantonales du logement durant lesquelles nous étudions des cas précis, de manière plus technique d'ailleurs, hors - dirais-je - des pressions politiques. Ces journées ont eu un réel succès.

C'est pourquoi vous n'avez aucune raison, si vous entendez soutenir une politique active en matière de concertation, de suivre cette proposition. D'ailleurs, en suivant le rapport de majorité, je me demande si, quelque part, vous ne vous inspirez pas des doutes qui ont même saisi le député Lachat, car en effet, il avait décidé de surseoir à ce projet, peu convaincu qu'il était à un moment donné de la nécessité absolue de ce projet. Il l'a clairement dit. Mais il est vrai que, s'il était parmi nous aujourd'hui, il interviendrait en faveur de la création de ce qui a été proposé par Mme Torracinta-Pache.

Mais ces doutes expriment bien les sentiments qu'on peut avoir lorsque l'on propose d'institutionnaliser un groupe qui fonctionne en tenant compte des besoins réels et s'y adapte. C'est la raison pour laquelle, en votant le rapport de majorité, vous voterez pour la poursuite d'une politique de concertation. Ainsi, ceux qui pourraient être battus si le vote allait dans ce sens n'ont rien à craindre, la concertation se poursuivra.

Le président. Le projet est mis aux voix.

(M. Lyon conteste le résultat.)

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

L'adjoint du sautier compte les suffrages.

Ce projet est rejeté par 47 voix contre 40. 

M 898
35. Proposition de motion de Mmes et MM. Janine Berberat, Christian Ferrazino, Gilles Godinat, René Longet, Olivier Lorenzini, Liliane Maury Pasquier, Laurent Rebeaud et Roger Beer concernant l'étude sur l'abstentionnisme et la définition d'une stratégie d'ensemble. ( )M898

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

- que moins de 40% des citoyennes et citoyens se sont rendus aux urnes les 15, 16 et 17 octobre dernier, pour l'élection du Grand Conseil;

- que, de manière générale, les taux d'abstention sont très importants dans notre canton, mettant en péril, à la longue, le bon fonctionnement de la démocratie,

invite le Conseil d'Etat à faire procéder à une étude d'ensemble sur les causes de l'abstentionnisme qui se manifeste dans les scrutins dans notre canton et à formuler des propositions en vue de revitaliser les processus démocratiques.

A cette fin, seront examinés, plus particulièrement, notamment les points suivants:

- les motivations de base des citoyennes et citoyens par rapport à l'usage de leurs droits civiques et le potentiel d'intérêt civique;

- les demandes en la matière;

- les mesures correctrices à mettre, le cas échéant, en oeuvre par les divers acteurs:

a) en matière d'organisation des scrutins;

b) quant au libellé des questions posées;

c) dans le domaine de l'information et des moyens de communication politique mis en oeuvre par les divers acteurs, en particulier les institutions représentatives elles-mêmes;

d) au moyen des possibilités qu'offrent les moyens de communication et d'informatisation modernes;

e) dans le domaine de la gestion du débat politique;

f) s'agissant des lieux et des modalités de ce débat;

- les corrélations socio-culturelles des phénomènes observés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

A l'issue du débat du 16 décembre dernier sur la motion n° 888, ses auteurs avaient accepté de la retirer au profit du nouveau texte qui répondrait à deux demandes exprimées, à savoir d'adresser l'invite au Conseil d'Etat et non pas à une commission du Grand Conseil, et de formuler des directions plus précises quant à la problématique à étudier.

Se fondant sur ce débat, les soussignés estiment qu'une étude de base de niveau scientifique est incontournable, et qu'il serait stérile de vouloir en anticiper les résultats en formulant nous-mêmes d'ores et déjà des réponses qui ne sauraient en l'état dépasser le niveau d'opinions et d'options dont, par définition, nous ne pourrions évaluer correctement la pertinence. Il est entendu qu'il s'agit dans une première approche de se fonder sur les recherches existantes et de s'appuyer pour l'ensemble du travail sur les compétences de notre université.

Nous ne pouvons que souligner, pour le surplus, que notre parlement ferait preuve d'un mépris certain à l'égard de cette majorité d'électrices et d'électeurs qui ne se sont pas rendus aux urnes le 17 octobre dernier en refusant d'accorder à ce problème l'importance qu'il mérite.

Au bénéfice de ces explications, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les députés, d'appuyer la proposition de motion que nous formulons.

Débat

M. René Longet (S). Cette motion pose le problème de la participation aux votations et élections. Quand on regarde d'un peu plus près les taux de participation sur la durée et sur les chiffres liés au phénomène de l'abstention, on est frappé par le caractère «en dents de scie» de la participation.

Il n'est donc pas vrai que, par principe, les choix politiques laissent la majorité des citoyennes et citoyens indifférents. Par exemple, nous avons connu 73,5% de participation le 6 décembre 1992, 60,2% le 26 novembre 1989, et 72% en juin 1970 pour l'initiative sur les étrangers.

Mais un problème apparut clairement le 17 octobre dernier, lorsque ce taux fut de 33%. Le problème est bien cette disparité dans la participation. En rapport avec ce faible score, que nous avons nous-mêmes suscité, nous devons nous interroger sur notre propre travail, sur la manière de le faire comprendre, sur notre attractivité en tant qu'institution.

Certes, le droit de voter comporte en lui-même celui de ne pas voter. Mais, derrière le non-vote, il y a un non-dit qu'on n'a pas le droit de balayer d'un revers de main, car le souci du citoyen doit être la raison de l'action politique et de notre présence dans ce Grand Conseil. La présence d'un non-vote aussi massif démontre l'existence d'un malaise.

Si nous voulons réellement être fidèles à cette préoccupation, nous devons rechercher le pourquoi des motifs liés à cette dernière. Nous savons que le département de l'intérieur, l'office cantonal de statistique et le département des sciences politiques de l'université étudient ce sujet et que des travaux sont en cours.

Le sens de cette motion est que ces travaux et données soient rassemblés, que l'on puisse répondre en vue d'une prise de décision qui nous incombera ensuite en tant qu'acteurs politiques, qu'on analyse ces données en fonction d'une étude de motivation, ainsi qu'un certain nombre d'autres points que nous avons nommés dans cette motion et qui nous paraissent dignes d'intérêt.

En premier lieu, il faut revoir la formulation des questions posées aux électeurs, puis le rythme des consultations, la nature du débat politique, la politique d'information des pouvoirs publics et les moyens que nous avons à cet égard. Il existe, par ailleurs, une distorsion entre la démocratie formelle telle que nous la pratiquons et la capacité du citoyen à voir dans les institutions une transposition de ses demandes concernant sa réalité quotidienne.

Il nous paraît nécessaire de travailler à rendre notre activité plus transparente, plus attractive, plus claire, à mieux communiquer. Il y a beaucoup à faire pour combler le fossé entre l'électeur et les institutions.

Il y a trente ans, deux députés, l'un démocrate-chrétien et l'autre radical, avaient demandé une étude d'ensemble sur l'abstentionnisme à Genève. C'était à la fin de l'année 1964. Après différentes péripéties, cette étude a été confiée au centre de sociologie de l'université de Genève. Le résultat est rendu dans l'étude du professeur Girod, publiée en 1971. J'ai compulsé cette étude et je vous donne quelques éléments de conclusion, car, comme vous le verrez, ils sont intéressants à un double titre.

M. Girod conclut à une corrélation très forte entre la participation politique et l'intégration sociale. A Genève, nous connaissons une société très «émiettée» et la participation faible renvoie ainsi probablement à une intégration sociale faible.

En 1971, il disait que le manque de temps et d'intérêt pour la vie civique et les choix politiques, ainsi que le sentiment d'impuissance devant la complexité des dossiers, se renforcent mutuellement. Ceux qui pensent n'y rien comprendre s'infligent une sorte d'autodévalorisation.

Il proposait un travail sur trois niveaux. L'école et la formation, puis, l'information en général, enfin, le comportement ou l'engagement des acteurs politiques et des institutions, partis et personnalités politiques elles-mêmes.

J'ai été déçu de constater que le résultat de ces années de travail approfondi et sérieux, effectué par une équipe universitaire, et donné au Conseil d'Etat et au Grand Conseil, a été, grosso modo, relégué dans un tiroir.

Du côté de l'instruction publique, certaines choses ont été faites, et nous sommes saisis d'une motion nous signalant des lacunes à cet égard et on ne cesse d'ailleurs de parler depuis vingt ans de cette nécessité de renforcer l'instruction publique. Mais pour le reste... ?

Je ne voudrais surtout pas que l'on refasse l'erreur de nos prédécesseurs, il y a vingt-cinq ans, de commander un travail et de ne pas en faire le meilleur usage. Aujourd'hui, si nous entrons à nouveau dans cette voie, c'est bel et bien pour en apprécier les conclusions.

Je vous demande de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat afin qu'il puisse mettre en oeuvre le travail demandé par cette dernière.

M. Armand Lombard (L). La motion qui nous est soumise ne présente pas un problème dramatique. Je ne crois pas que l'abstentionnisme, tant qu'il n'est pas excessif, soit une maladie de la démocratie ou un indice du déclin du capitalisme socio-libéral. C'est un fait de la liberté individuelle et non le résultat d'une mesure contraignante.

Aujourd'hui, une personne qui ne vote pas n'est pas forcément quelqu'un qui ne s'intéresse pas, mais qui fait passer d'autres intérêts avant la chose politique et avant le vote, que ce soit son entreprise, son repos, ses voyages, sa culture. L'abstentionnisme est dangereux lorsqu'il devient excessif ou, au contraire, quand il n'y en a plus du tout.

M. Longet nous a cité l'étude du professeur Girod. Celle que je vous présente est différente et appartient au professeur Kriesi du département de sciences politiques de l'université. Elle a l'avantage d'être postérieure à celle de M. Girod et date de 1991.

Les deux professeurs se rejoignent. Même si je ne veux pas faire l'analyse comparative de ces deux textes, ils me semblent très proches et montrent en tout cas qu'un certain nombre d'éléments de l'abstentionnisme sont maîtrisables.

Il est démontré que l'actualité du sujet tend à augmenter le taux de participation à la votation. Par exemple, une affaire actuelle comme celle des casques bleus ou les tensions de l'environnement politique et social comme les élections du Grand Conseil de 1993. L'aridité de sujets comme les arrêtés fédéraux financiers est telle qu'elle retient des personnes d'aller voter. Un fort consensus, par exemple une confirmation de concordat intercantonal sur laquelle tout le monde est d'accord, n'attire pas les foules.

Il constate dans son étude, soumise au Conseil municipal de la Ville - je crois - que 18% des citoyens sont irrémédiablement perdus pour les votations ou les élections, c'est-à-dire ceux qui ne vont absolument jamais voter.

Comme je l'ai dit, l'abstentionnisme n'est pas une catastrophe, mais il faut y réfléchir de manière factuelle et réagir par des propositions concrètes, et non pas forcément par des études de fond.

A l'évidence, le problème qui se pose sur le plan de l'étude et de la recherche de fond, c'est le coût. Le professeur Kriesi la chiffrait à 260 000 F. L'université ne peut pas trouver ces fonds, car il n'y en a pas pour ce type de recherche. Par conséquent, ces fonds devraient être alloués par le Grand Conseil. Il me semble que certaines institutions genevoises subventionnées et s'intéressant à la culture civique pourraient trouver un intérêt à une pareille étude. Le Fonds national de recherche scientifique pourrait être mobilisé sur un projet bien structuré. Cela pourrait être étudié.

Dans les mesures concrètes, je ne pense pas que le département de l'intérieur soit en reste, le vote par correspondance et le vote anticipé sont des mesures qui me paraissent très importantes. Peut-être que l'on n'a pas réfléchi pendant des siècles, mais ces améliorations sont utiles et permettent aux gens de voter avec plus de facilité.

Bien sûr, le professeur Kriesi vitupérait contre la façon dont la presse faisait campagne, de façon, disait-il, «pas assez marketing», qui n'attirait pas assez les gens. Je n'étais pas de son avis. Il y a le vote électronique et la solution de Schaffhouse ou d'Appenzell - cela m'échappe tout à coup - où l'on a un «obligatorium» pour les votants. A mon avis, c'est la solution à ne pas suivre.

Des mesures démocratiques peuvent être examinées en commission. Mais, après tout, lorsqu'un taux de participation est véritablement trop bas, ne faudrait-il pas instaurer un quorum autour de 10% - 15% ? On déclarerait que dans le cas où ce taux d'intérêt de la population n'est pas atteint sur un projet, alors, c'est le vote du Grand Conseil qui fait foi.

C'est pour ces petites raisons factuelles que notre groupe est d'accord de renvoyer ce projet en commission, simplement pour qu'elle puisse faire ce bref inventaire et suggérer un certain nombre d'idées, quitte à ce que, si ces idées ne sont pas saisies par le département de l'intérieur, elles puissent faire l'objet d'une motion ou d'un projet de loi. Mais en aucun cas nous n'aimerions renvoyer cette opération au Conseil d'Etat. Nous pensons qu'il est bien mieux de faire un bref inventaire de ce qui existe.

M. Roger Beer (R). Nous avons eu deux grandes interventions sur le problème de l'abstentionnisme. Des théories existent, des analyses ont été faites et, en plus, chacun et chacune d'entre nous a sa propre idée sur la question de l'abstentionnisme. A mon avis, si plus de gens venaient écouter les débats du Grand Conseil, on aurait des explications plus sûres sur ce problème !

L'abstentionnisme est un problème réel, et c'est le moment de refaire une étude approfondie à l'université. On pourrait prendre en considération ces fameuses listes tracées qui sont confidentielles, celles du rôle des électeurs. On pourrait imaginer qu'une faculté de l'université s'interroge sur le fait que les gens n'ont pas été voter et quelles en sont les raisons. Ainsi, on saurait pourquoi, concrètement, les gens n'ont pas voté.

Mon collègue Lombard propose le renvoi en commission et M. Longet le renvoi au Conseil d'Etat. Le groupe radical désire renvoyer cette motion au Conseil d'Etat et laisser le Conseil d'Etat apporter une réponse ou nous donner les réponses qu'il a déjà cogitées.

Je pense que ce genre de préoccupation va dans le sens de celles du Conseil d'Etat en rapport avec le rajeunissement, voire la régénération des différentes modalités de vote. Elle va également dans le sens d'une motion qui viendra tout à l'heure de nos collèges PDC sur l'éducation civique à l'école. On voit très bien que cela concerne un certain nombre de personnes du monde politique. Je pense que le Conseil d'Etat devrait s'efforcer d'y apporter une réponse.

M. Laurent Rebeaud (Ve). Si je me souviens bien, la première motion de notre collègue Longet proposait un renvoi en commission. Lors de cette séance, j'avais refusé en disant qu'il ne servait à rien de donner des heures de bavardage à une commission, car, dans une commission du Grand Conseil, nous sommes tous à peu près aussi préparés que M. Lombard, soit que nous avons lu un petit bout de Kriesi, un petit bout de Girod et quelques souvenirs de Jean-François Aubert ou d'autres.

Monsieur Lombard, je ne crois pas que l'on puisse ainsi minimiser le problème de l'abstentionnisme en disant que, si quelqu'un préfère aller à la pêche, c'est son libre choix. Dans une démocratie saine, il faut avoir des raisons de s'abstenir de voter. Or, ce qui motive en général la majorité des gens, le dimanche matin, ce n'est pas le désir de s'abstenir, c'est l'ignorance et l'indifférence à l'égard de la chose politique.

Un terme me plaît dans la proposition de notre collègue Longet, que j'ai d'ailleurs contresignée, c'est celui de «revitalisation». Entre les cantons et la Confédération, et probablement certaines grandes communes, il s'est dépensé plusieurs fois 300 000 francs pour savoir comment revitaliser l'économie.

Je serai très content que dans notre canton nous soyons capables de faire une petite dépense en donnant un petit travail à l'université pour faire une étude vraiment moderne, et non pas une discussion de bistrot en commission sur l'aspect actuel de l'abstentionnisme.

Pour cette raison, j'aimerais que nous renvoyions cette motion, non pas à la commission, mais au Conseil d'Etat, qui fera ce qui lui semble juste, soit qui donnera le mandat précis pour que le développement soit utile.

Mme Claire Chalut (AdG). Je serai encore plus brève que mon collègue précédent. S'il est vrai que le fait de s'abstenir de voter fait partie de la liberté individuelle, cela n'empêche pas qu'il y a des causes à l'abstentionnisme.

Les votations concernant des objets sur le plan fédéral, et même cantonal sont parfois très complexes, et la manière dont les questions sont formulées n'est pas toujours évidente à comprendre et rend la tâche de l'électeur difficile.

D'autre part, une piste à examiner est le respect des votes. Il est fréquemment arrivé que, quelques années après une votation, on se rende compte que ce qui a été voté n'a pas été effectué. Alors, les gens se découragent et disent : «Ils font quand même ce qu'ils veulent !». Ces deux aspects et d'autres sont à analyser.

M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Je ne voudrais pas minimiser l'importance du sujet que nous traitons, mais je ne vous cache pas qu'au moment où nous sommes confrontés aux difficultés que vous connaissez, notamment sur le plan de l'emploi et sur d'autres grands sujets, je suis un peu surpris par certains engagements sur ce thème, alors que, durant la dernière législature, la commission chargée des droits politiques avait fait la démonstration de l'intérêt que nous portions tous à cela et avait fait, en quelque sorte, un choix qui consistait précisément à pratiquer une politique des petits pas et à s'inspirer d'un certain pragmatisme qui nous a conduits et vous a conduits à soutenir, notamment, le vote par correspondance qui franchira encore une étape supplémentaire d'ici quelque temps, sans doute.

Bien sûr que nous pouvons faire des études et qu'elles ne seront pas inintéressantes. Mais, entre une politique pragmatique comme celle que nous avons choisie jusqu'à présent et les études que nous ferons, la différence sera minime. Il faut en être conscients, et je pense que vous pouvez l'apprécier sans que je souligne ce que je suis en train de relever.

Vous voudriez renvoyer cette motion au Conseil d'Etat afin que ce dernier fixe un mandat pour conduire cette étude qui entraînera quelques dépenses. Là aussi, au moment où l'on doit dégager des priorités et préparer le budget 1995 dans les conditions que nous connaissons au niveau du Conseil d'Etat, je ne vous cache pas que 300 ou 400 000 F ne sont pas négligeables et que, dans l'ordre des priorités, le Conseil d'Etat ne fixerait pas cette dépense, il faut que vous le sachiez.

Mais nous ne voudrions pas confier un mandat qui, ensuite, ne vous satisferait pas, car nous avons rarement été les témoins d'une déclaration de satisfaction générale dès lors que nous avons confié un mandat de ce type.

C'est la raison pour laquelle, après vous avoir dit mes sentiments et ma tiédeur face à la suggestion présentée ce soir, je souhaite au moins que nous puissions discuter du contenu du mandat que nous fixerions et avoir quelques idées tout de même sur son financement. Le Conseil d'Etat n'entend pas le faire seul.

C'est pourquoi je me permets, au nom du Conseil d'Etat, de demander au groupe radical de bien vouloir accepter de participer à cette discussion afin que le temps consacré à ce sujet et les quelques deniers dont nous disposons soient bien engagés.

Mise aux voix, la proposition de renvoi de cette motion à la commission des droits politiques est adoptée.

 

RD 218-A
36. Rapport de la commission des naturalisations chargée d'étudier les demandes de réexamen en matière de naturalisation. ( -)RD218

La demande de réexamen en matière de naturalisation de Faizy Sayed Refaat est refusée par 45 non (25 oui).

 

La séance est levée à 19 h 20.