République et canton de Genève

Grand Conseil

No 47

 MÉMORIAL

DES SÉANCES DU

GRAND CONSEIL

53e LÉGISLATURE

Jeudi 16 décembre 1993,

nuit

Présidence:

M. Hervé Burdet,président

La séance est ouverte à 21 h.

Assistent à la séance: MM. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat, Philippe Joye, Gérard Ramseyer, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

Le président donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : Mme et MM. Olivier Vodoz, Jean-Philippe Maitre, Guy-Olivier Segond, Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Erica Deuber-Pauli, John Dupraz, Catherine Fatio, Jean-Claude Genecand, Janine Hagmann, Michel Halpérin, Claude Howald et Philippe Schaller, députés.

3. Correspondance.

Le président. Nous avons reçu une pétition relative à

P 1017
des licenciements à l'hôtel Lido. ( )   P1017

M. Jean Spielmann (AG). Monsieur le président, afin de poursuivre une bonne pratique, je demande la lecture de cette pétition. (Remarques et quolibets fusent.)

Le président. Conformément à la tradition, nous allons lire cette pétition dont la teneur est la suivante :

Cette pétition sera renvoyée à la commission des pétitions. 

4. Annonces et dépôts:

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

Néant.

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

Néant.

e) de questions écrites.

Néant.

GR 36-1
a) M. Z. G.( -)GR36
Rapport de M. Roger Beer (R), commission de grâce
GR 37-1
b) M. E. S. S. S( -)GR37
Rapport de Mme Claire Torracinta-Pache (S), commission de grâce
GR 38-1
c) M. D. J.-P.( -)GR38
Rapport de Mme Claire Torracinta-Pache (S), commission de grâce

5. Rapports de la commission de grâce chargée d'étudier les recours en grâce suivants :

M. Z. G., 1955, Tunisie, sans profession, recourt contre le solde de la peine d'expulsion qui prendra fin en avril 1996.

M. Roger Beer (R). M. Z. G. est né en 1955. Il a donc 38 ans. Il est originaire de Tunisie et il vit aujourd'hui à Tunis, Carthage, chez ses parents. Il est sans profession, mais il travaille occasionnellement en effectuant des «extra» dans l'hôtellerie. Il vient de divorcer de sa première femme au mois de mai, et, vous le verrez, cela a une certaine importance.

Aujourd'hui, il veut épouser la mère de sa fille, qui est suissesse. Un premier mariage a eu lieu le 28 septembre 1993, mais il a été annulé car M. Z. G. n'a pas obtenu de sauf-conduit. En effet, il est sous le coup d'une peine d'expulsion de cinq ans, depuis 1991. Il fait recours contre cette peine et demande sa grâce au Grand Conseil. Sa fille a deux ans et demi et vit avec sa mère qui travaille et réside à Genève. La situation de ce monsieur est très précaire étant donné qu'il n'a pas de revenus. Lorsqu'il fait des séjours en Suisse ou en France voisine, c'est la mère de sa fille qui l'entretient.

Ce monsieur a été condamné pour infraction à la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers. Il a été expulsé en 1991, car il n'avait pas le droit de revenir en Suisse en raison d'une condamnation pour abus de confiance dans une affaire de télévision louée, non payée, puis, évidemment, vendue.

M. Z. G. est un homme violent. Ses antécédents judiciaires sont assez conséquents. Il a fait l'objet de plusieurs plaintes pour coups et blessures. En 1983 déjà, il a fait l'objet d'une plainte pour menace de mort et coups et blessures à la suite de quoi il avait été expulsé et interdit du territoire suisse pendant deux ans. Il est revenu pour un séjour pendant lequel a eu lieu l'affaire de la télévision qui a provoqué une nouvelle expulsion.

Sa peine d'expulsion doit prendre fin en avril 1996. Il recourt contre le solde de sa peine. Le procureur général, consulté dans cette affaire, donne un préavis négatif en disant qu'aujourd'hui il ne semble pas établi que la mère de sa fille et sa fille ne puissent pas le voir en Suisse, et, s'ils le désirent, ils peuvent vivre ensemble en France. De plus, ses antécédents ne jouent pas en sa faveur. La commission de grâce vous invite donc à voter le rejet du recours.

Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.

M. S. E. S. S., 1964, Egypte, sans profession, troisième recours en grâce.

Mme Claire Torracinta-Pache (S). M. S. E. S. S. est égyptien. Il a 29 ans et travaille aujourd'hui au Caire comme employé de bureau. Il a été condamné à dix jours d'emprisonnement, dont six effectués, avec un sursis de trois ans plus trois ans d'expulsion du territoire suisse pour vol et infraction à la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers. Il recourt seulement contre la peine d'expulsion.

Il avait été arrêté le 3 avril 1992 pour vol à l'étalage. Il était alors porteur d'une attestation de dépôt d'une demande d'asile auprès du canton de Fribourg, demande ayant reçu une réponse négative le 21 octobre 1991. Il n'avait pas recouru et cette décision négative avait donc pris force d'exécution.

Un premier recours, motivé par son désir d'épouser une Suissesse institutrice, avec qui il se disait fiancé, a été rejeté par le Grand Conseil le 12 novembre 1992. Un deuxième recours a été également rejeté le 24 juin 1993. Entre-temps, il faut dire que le couple s'était marié au Caire et évoquait son désir de s'établir en Suisse. Trois mois passent, et il engage un troisième recours, celui qui nous occupe aujourd'hui, toujours pour les mêmes motifs, mais sans fait nouveau pour appuyer cette demande.

Le préavis du procureur a toujours été négatif. Etant donné qu'il n'y a aucun fait nouveau, la commission de grâce vous recommande le rejet du recours.

Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.

M. D. J.-P., 1958, Genève, sans profession.

Mme Claire Torracinta-Pache (S). M. D. J.-P., genevois, 35 ans, célibataire, sans profession, au bénéfice d'une rente AI, a déposé en 1990 un recours en grâce contre la conversion en 50 jours d'arrêt d'un montant de 1 510 F d'amendes concernant diverses infractions à la loi fédérale sur la circulation routière.

Etant donné la situation particulière de M. D. J.-P. - il a de nombreux antécédents judiciaires et a été condamné à diverses peines successives - qui semblait alors témoigner du désir de s'en sortir, trois délais successifs lui ont été accordés pour régler ses amendes. Le dernier délai, accordé en novembre 1992 et échu en octobre 1993, lui demandait simplement de verser 50 F par mois pendant dix mois. Cet arrangement lui avait été accordé alors qu'il avait un emploi lui permettant de s'acquitter de ces versements. A ce jour, il ne s'est pas manifesté.

Par contre, aux dernières nouvelles - reçues par téléphone - nous venons d'apprendre que les derniers relevés des contraventions se montent à la somme incroyable de plus de 23 000 F. (Réactions.) Fait aggravant, certaines de ces infractions sont récentes. A ce propos, et bien que ce ne soit pas de son ressort, la commission s'est étonnée que M. D. J.-P. puisse encore être en possession d'un permis de conduire ! (Réflexions.)

Elle estime, étant donné les facilités accordées au recourant dans ce cas particulier, qu'elle ne peut accorder la grâce pour cette conversion d'amendes. Elle vous recommande donc le rejet du recours.

Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté. 

M 887
6. Proposition de motion de MM. René Longet et Laurent Moutinot concernant l'état de la politique régionale et les perspectives de démocratisation. ( )M887

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

 le RD 115-A, du 14 septembre 1989, rapport de la commission chargée d'étudier le rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur les questions fédérales importantes ;

 la nécessité de rendre plus cohérents et plus transparents la politique régionale et les instruments de coopération transfrontière ;

 la nécessité de démocratiser les instances de coopération régionale afin de les rapprocher de la population,

charge sa commission des affaires régionales

de procéder à une évaluation du fonctionnement des institutions de coopération transfrontière existants et des possibilités de leur donner une meilleure assise démocratique.

EXPOSÉ DES MOTIFS

L'histoire de Genève et de sa région est paradoxale.

D'une part, notre ville se trouve coupée de son arrière pays depuis l'option de Genève pour la Réforme. De l'autre côté, la cité ne pouvait vivre sans sa campagne: propriété foncière en mains genevoises, zones franches, échanges divers ont de tout temps marqué des relations, fort inégalitaires d'ailleurs, entre Genève et sa région.

L'accord de 1973 sur la rétrocession fiscale a permis d'entrer dans une phase de collaboration plus structurée, au travers des diverses commissions du comité franco-genevois.

Cette collaboration demeure cependant à la fois ponctuelle et d'une intensité nettement insuffisante. Divers organismes (comme le Conseil du Léman) se sont créés depuis lors, donnant un "patchwork" de structures aux rapports peu clairs et aux compétences disparates.

De plus ces organismes agissent souvent en dehors du contrôle parlementaire et populaire accréditant malheureusement dans la population l'idée que ces questions sont accaparées par une approche exclusivement technocratique.

Aujourd'hui chacun admet qu'on ne peut plus concevoir l'aménagement du territoire, le plan des transports, la politique de la santé, la politique économique et même la formation sans une possibilité de se concerter au-delà de la frontière. Il n'y a en effet pas de décision importante prise d'un côté de celle-ci qui puisse rester sans répercussion sur l'autre.

Le développement de l'intégration européenne a fait naître des attentes nouvelles en vue de gérer ensemble des espaces communs. Rappelons à cet égard qu'en 1992 les Genevois ne furent pas les seuls à dire oui à l'Europe: le référendum français du 20 septembre a permis à la région frontalière d'affirmer à cet égard des convictions tout à fait similaires.

La présente motion n'a pas pour but de reprendre la discussion sur ce qu'un canton frontalier peut ou ne peut pas faire dans le cadre de la situation née du 6 décembre 1992. Elle vise à faire le point sur le fonctionnement, les forces et les faiblesses, des instruments de coopération transfrontière existants, en vue de proposer les compléments qui s'imposent, ainsi que de leur fournir l'ancrage démocratique qui leur manque. Divers organigrammes circulent à ce sujet, de même que les projets de parlements régionaux, ainsi les propositions de l'AGEDRI, et ces propositions méritent d'être examinés de plus près, car la région ne saurait rester un processus technocratique: elle doit être faite pas ses habitants.

Débat

M. René Longet (S). Je pense que nous partageons tous ici le souci d'une coopération régionale efficace. Nous savons tous, en effet, que des deux côtés de la frontière rien d'important ne peut être fait, planifié, réalisé, pensé, sans provoquer des répercussions de l'autre côté.

Malheureusement, nous sommes face à des évolutions divergentes de l'espace communautaire d'une part, de notre pays de l'autre. Je ne donne que le nom de Schengen pour vous dire que la frontière, loin de se réduire en importance, pourrait avoir tendance - en tout cas le risque existe - à renforcer l'effet de séparation, contrairement à ce qui est voulu des deux côtés de la frontière. Cette situation nous met dans l'obligation d'être véritablement très efficace, très performant au niveau des instruments d'action transfrontaliers.

Bien entendu, nous savons qu'il existe des lieux de concertation et de travail. Nous n'entendons pas du tout minimiser ce qui se fait dans le comité régional franco-genevois depuis près de vingt ans, dans le Conseil du Léman depuis près de huit ans maintenant. Du reste, il existe toute une série d'institutions, de lieux de travail, depuis la CIPEL, qui s'occupe du Léman, jusqu'au COEUR, cher au professeur Ricq. Je ne tiens pas à en faire la liste exhaustive, cela serait trop long.

Mais, précisément, si l'on fait un bilan de ce qui se passe, de ce dont on peut disposer, on constate avec satisfaction que si l'on a passé du stade gastronomique des années 1970 - qui était déjà un bon début, on vous l'accorde - au stade de travail effectif dans les lieux que je viens de citer, des années 1980 à aujourd'hui, il est nécessaire de passer la vitesse supérieure.

Je citerai seulement quelques éléments qui ne sont pas des critiques en soi mais des lacunes, car ce Grand Conseil peut jouer un rôle important pour qu'on aille de l'avant.

Le premier point où nous pouvons améliorer les choses concerne les secteurs de coopération. Dans certains, il a été possible de faire quelque chose et, dans d'autres, il y a de grandes lacunes. Autrement dit, le degré de coordination et de coopération est extrêmement variable selon les domaines.

Le deuxième point est l'enchevêtrement des structures. Un certain nombre de structures fonctionnent en superposition, géographiquement et thématiquement, à côté des lacunes matérielles dont nous venons de parler. Nous pourrions faire le test, ici au Grand Conseil. Bien malin qui pourrait dire qui fait quoi et où en sont exactement les dossiers. Les spécialistes le savent. Mais, justement, le problème est peut-être d'en sortir.

Le troisième point qui pose problème est la lenteur des procédures. Il suffit de consulter le dossier des rivières, de la santé ou des transports pour s'en rendre compte. Toute impulsion est donc utile.

Le quatrième point - c'est peut-être le plus important - est que ces lieux de concertation sont insuffisamment représentatifs du point de vue démocratique. On a beaucoup glosé sur le déficit démocratique au niveau communautaire; au niveau de la région nous retrouvons également un déficit démocratique, qu'il faut résorber.

Nous partons de l'idée que nous sommes tous convaincus ici que ce Grand Conseil doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour soutenir une évolution qui permette d'avancer sur ces questions d'efficacité et de démocratie. Je veux pour preuve de cette volonté du Grand Conseil le rapport rédigé par Mme Stroumza lorsqu'elle était députée, qui date du mois de septembre 1989, et dans lequel on peut lire en page 37 : «En ce qui concerne les institutions régionales, le Conseil d'Etat est invité à étudier, avec les autorités concernées, la création d'un conseil régional permanent de concertation représentant tous les milieux intéressés, la restructuration du comité franco-genevois et sa relation avec le conseil régional permanent de concertation et l'attribution d'un budget à ces instances régionales.». En 1992, une motion interpartis, pour tirer le bilan du vote du 6 décembre, insistait sur le fait que soient poursuivies et approfondies les démarches avec nos partenaires romands et en France voisine, en vue de créer des espaces régionaux et transfrontaliers. Avec cette motion, nous sommes tout à fait dans la ligne de la volonté politique qui s'est toujours exprimée ici, mais qui, apparemment - au vu de ce qui se passe des deux côtés de la frontière - a besoin d'être réaffirmée périodiquement. En tout cas la motion de 1989 a permis de poser le problème, et il faut insister pour trouver les solutions.

Les convictions européennes de Genève font peu de doute. Au vu de ce qui se passe sur le territoire, nous voyons bien que l'on ne peut pas vouloir l'Europe sans vouloir la région; cela va de pair. Un canton aussi pro-européen que Genève doit mettre le «paquet» - et le Grand Conseil doit y contribuer le mieux qu'il peut - pour que les institutions de cette région permettent de gérer ensemble les problèmes communs. Alors, nous disons aujourd'hui - en début de législature - qu'il faut passer la vitesse supérieure !

Cela signifie deux grands axes : premièrement, passer de la concertation ponctuelle avec possibilité de débats d'ensemble et, deuxièmement, faire en sorte que ce lieu ait un ancrage démocratique.

Vous connaissez tous l'AGEDRI. Ce n'est pas un hasard si, après un long travail d'analyse et de réflexion, elle aboutit à ces deux points, qui sont - je le crois - la quintessence du problème. Celle-ci stipule bien qu'il faut un lieu global et démocratique. Vous connaissez certainement la proposition d'un conseil transfrontalier consultatif, proposition qui demande à être affinée. Nous pensons qu'il sera inéluctable d'en arriver là. Certains candidats, aujourd'hui conseillers d'Etat d'ailleurs, dans la campagne électorale, sont même allés plus loin en proposant un parlement régional élu au suffrage universel. Pour ma part, je pense qu'ils ont raison et qu'une telle solution doit être visée à terme.

Que proposons-nous par cette motion ? Une démarche qui nous permet d'affirmer notre volonté d'aller plus loin ! Cette démarche se fait en deux temps. Elle se fonde sur un bilan, car on ne peut pas agir sans avoir fait le bilan objectif de ce qui existe. Ensuite, elle fait des propositions politiques pour combler les lacunes, constatées par ailleurs par la commission compétente de ce Grand Conseil, présidée par notre collègue Lombard, je veux parler de la commission des affaires régionales. Elle serait certainement le lieu idéal pour que l'ensemble des forces politiques examine d'une manière relativement rapide comment nous évaluons l'efficacité des institutions existantes. Et enfin, nous pourrions proposer un certain nombre de solutions qui seraient présentées aux différents partenaires concernés.

Ainsi, nous faisons notre travail et nous prolongerons la ligne qui a toujours été la nôtre pour lui donner de la force.

Je sais que les études et les travaux en commission ne sont pas forcément du goût de tout le monde. Je dis simplement qu'il n'est pas possible de renforcer la politique régionale sans passer par la démarche que nous proposons. C'est pourquoi je vous propose de faire cette démarche maintenant, en début de législature, pour converger vers les concrétisations nécessaires.

Le président. C'est donc parfaitement sciemment que vous souhaitez renvoyer cette motion en commission et non au Conseil d'Etat, comme cela se fait d'habitude.

M. René Longet. C'est bien cela !

M. René Koechlin (L). Les motionnaires profitent à l'évidence de la candeur que l'on peut leur prêter, mais qu'ils n'ont pas, pour nous faire croire qu'ils sont habités de la naïve illusion qu'une commission parlementaire peut procéder à l'évaluation du fonctionnement des institutions. Probablement, vous n'avez pas suffisamment pratiqué les commissions parlementaires... (Manifestation de réprobation.) ...pour savoir qu'une telle tâche dépasse très largement, non pas les compétences, mais les capacités d'une telle commission. Messieurs les motionnaires, que vous vous trompez d'adresse ! Laissez à la commission des affaires régionales la tâche d'examiner les projets de lois et les motions qui lui sont soumis et demandez, éventuellement, au Conseil d'Etat qu'il vous informe sur le fonctionnement des institutions et sur les possibilités de leur donner une meilleure assise démocratique.

Je vous ferai néanmoins remarquer que le Conseil d'Etat informe régulièrement ce Grand Conseil, précisément sur ces questions. Je crois même qu'il le fait chaque année. Nous attendons de sa part un rapport pour le premier trimestre, voire le premier semestre de l'année prochaine. Ce dernier vous informera sur toutes les questions que vous vous posez et que vous tentez de poser à la commission des affaires régionales.

C'est la raison pour laquelle tout au plus nous vous suivrions, Messieurs les motionnaires, si vous nous demandiez de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.

M. Roger Beer (R). Je m'étonne de la déposition de M. René Longet et je l'admire ! Visiblement, il y a longtemps que vous n'avez pas fréquenté le Grand Conseil. A vous entendre, je doute même que vous ayez suivi ce qui s'est fait à ce sujet.

La commission des affaires régionales a très longuement parlé de la région pendant la dernière législature - c'était ma première législature, ce qui explique peut-être que j'ai été impressionné - ainsi que la commission de l'université et celle de l'enseignement où les stars que vous avez citées, tels le professeur Ricq et d'autres, ont fait l'objet de nos débats. J'étais moi-même motionnaire sur la question de l'institut universitaire d'études européennes et je me suis «fait promener» par le Conseil d'Etat et par certains députés. Finalement, je n'ai pas obtenu de réponse valable de la part des personnes qui travaillent pour la région et pour l'Europe. Je crois que, depuis, le Conseil d'Etat s'en est largement occupé ! Je n'étais pas content - j'attends toujours quelque chose de concret - mais en tout cas l'institut travaille visiblement de façon plus ciblée.

Par rapport à votre proposition de motion, je ne peux pas me rallier aux propos de M. Koechlin, mais je suis assez d'accord sur le fond. Le Conseil d'Etat nous a donné un énorme rapport, largement discuté, et qui a permis un certain nombre d'auditions en commission. Je m'étonne un peu, Monsieur Longet, que vous proposiez de refaire toutes ces auditions en commission, avec les quinze députés, pour essayer d'y voir plus clair, alors que nous avons effectué deux années de travail dans ce sens; cela me paraît bien naïf !

J'imagine que nous pouvons faire confiance à M. Haegi, «Monsieur région» - qui a un spécialiste en la matière dans son département - pour nous préparer en guise de réponse à votre motion, pour le début de l'année prochaine, comme il le fait chaque année, un rapport sur ce qui se fait et se prépare dans ce domaine.

Vous avez évoqué l'AGEDRI. Les députés sont informés régulièrement de ses travaux et peuvent y participer. Vous avez néanmoins raison de soulever le problème de l'information : elle n'est pas suffisante, mais la participation, elle, est également insuffisante.

Comme M. Koechlin, nous proposons de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat. Il ne faut pas la renvoyer en commission, cela équivaudrait à un enterrement de première classe et provoquerait à nouveau des discussions sans fondement et sans aboutissement. Je suggère plutôt que le rapport du Conseil d'Etat apporte un certain nombre de réponses qui pourront ensuite être discutées en commission.

M. Laurent Rebeaud (Ve). L'idée de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat est bonne, mais pas si celui-ci considère que cette motion est dépourvue de sens et qu'il faut la mettre «dans le paquet».

La motion de notre collègue insiste sur une des lacunes de la politique régionale, de part et d'autre d'ailleurs de la frontière, et sur le manque d'assise démocratique et de participation soit d'associations, soit de citoyens, soit de groupes d'intérêt organisés à l'élaboration d'une politique régionale dont nous, simples citoyens, avons de la peine à discerner les contours.

M. Longet a mentionné un point d'accrochage dans la réflexion, à savoir le projet de l'AGEDRI, le forum régional transfrontalier consultatif sur lequel le Conseil d'Etat, jusqu'à maintenant, n'a pas pris de position bien déterminée et qui mériterait d'être approfondi, du point de vue de la réflexion politique à long terme, sur ce que devra être l'institution régionale dans une Europe dont la Suisse - espérons-le - fera partie le plus tôt possible. Si le Conseil d'Etat est d'accord de considérer cette motion non pas comme bonne à mettre dans un tiroir mais comme une demande du Grand Conseil, qui dirait : «Veuillez, s'il vous plaît, prendre une position déterminée et méditer sur ce sujet», alors ce renvoi au Conseil d'Etat serait utile.

Je crois également - vous avez raison - qu'il ne serait pas très judicieux de la renvoyer à la commission des affaires régionales. C'est la raison pour laquelle je suggère à notre collègue Longet de la renvoyer au Conseil d'Etat.

Le président. Je vous signale que, si vous voulez la renvoyer au Conseil d'Etat, il faut qu'un amendement soit présenté !

M. Laurent Rebeaud. Alors, je vous présente cet amendement.

Le président. Si vous voulez bien, il faut le faire par écrit !

M. Laurent Moutinot (S). Nous n'avions aucune candeur, ni aucune naïveté, Monsieur Koechlin, lorsque nous vous avons proposé ce projet de motion. Nous n'ignorons pas l'important et excellent travail contenu dans les rapports de Mme Stroumza. Nous ne désirons pas refaire un travail d'expertise, mais bel et bien répondre à cette demande de la population pour que la politique transfrontalière soit démocratique. C'est un sujet qui ne doit pas être réservé aux experts. Vous savez qu'une partie de l'échec du vote sur l'EEE a été due au fait que certains attribuent aux instances internationales - malheureusement pas toujours à tort - un caractère trop technocratique. Nous tenons à la démocratisation de ces instances et personne, mieux que ces commissions, ne peut traiter de ces problèmes de démocratie.

A part cela, nous avons observé que la commission des affaires régionales, qui devrait être une commission importante puisque nous sommes tous convaincus de l'importance de la région, n'a pas un seul objet à son ordre du jour. Mettre la démocratisation des instances régionales à son ordre du jour nous paraît être un point essentiel.

Cela dit, mon collègue René Longet et moi-même sommes d'accord d'accepter l'amendement proposé par notre collègue Rebeaud pour un renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.

M. Claude Blanc (PDC). J'ai été assez amusé par ce projet de motion et par les propos de nos collègues évoquant l'assise démocratique que devraient avoir les institutions interrégionales.

Je crois que M. Haegi ne vous avait pas attendus pour tenter de donner une assise démocratique et parlementaire au Conseil du Léman, puisqu'il a fait accepter par ce même conseil une proposition visant à réunir des représentants des trois Grands Conseils du Valais, de Vaud et de Genève, ainsi que des conseils généraux de la Haute-Savoie et du département de l'Ain. Cela se passait, sauf erreur de ma part, en automne 1990. J'étais alors premier vice-président du Grand Conseil.

Au mois d'avril 1991, à l'occasion des assises du Conseil du Léman qui se tenaient à Sion, nous sommes allés, avec les cinq membres du Bureau plus un membre par parti de la commission des affaires régionales - nous étions donc douze - à Sion où nous étions censés rencontrer, sur l'initiative de M. Haegi et avec l'accord du Conseil du Léman, nos collègues des quatre autres entités. Première désillusion, si les trois cantons romands étaient représentés, ainsi que les conseillers généraux de la Haute-Savoie, ceux de l'Ain, en revanche, n'avaient pas trouvé le chemin de Sion !

Alors, comme il était difficile de progresser à quatre, nous sommes convenus que nous allions constituer un groupe de travail avec un représentant par entité, et nous avons pris rendez-vous pour le 30 juin suivant à Sion. Cela se passait toujours à Sion parce que le canton du Valais exerçait à cette époque la présidence du Conseil du Léman, le secrétariat s'y trouvait et cela rendait les choses plus faciles malgré l'éloignement pour bon nombre d'entre nous. Donc, le 30 juin, avec nos collègues vaudois nous nous sommes rendus à Sion, à 9 heures du matin comme convenu, et nous nous sommes retrouvés avec nos collègues vaudois et valaisans, qui nous ont d'ailleurs fort bien reçus. Les Savoyards et les représentants de l'Ain ne sont pas venus et, de plus, ils ne se sont même pas fait excuser ! Désinvolture plutôt inouïe que nous avons cherché à élucider.

Or je n'ai pas tardé à apprendre le fin mot de l'histoire de la bouche de mon excellent ancien collègue maire de Ferney-Voltaire et vice-président du Conseil général de l'Ain. Les conseillers généraux du département de l'Ain et de la Haute-Savoie considèrent - en tout cas les bureaux des conseils généraux - qu'ils sont, eux, de taille à discuter avec nos gouvernements et que nous, les députés, ne sommes que quantité négligeable. M. Meylan me l'a dit textuellement, rajoutant qu'il continuerait à discuter au plus haut niveau, ce qui n'empêchait pas que nous pouvions continuer à nous rencontrer... pour parler de la pluie et du beau temps ! Cela le laissait indifférent !

Nous n'avons pas abandonné là. Nous avons donc, avec les Vaudois et les Valaisans, travaillé pendant tout l'été 1991 à un projet de convention intercantonale ouverte sur les deux départements, déposant ici même un projet de loi visant à désigner quinze députés, délégués du canton de Genève auprès de cette organisation qui, dans un premier temps, aurait été intercantonale en attendant que nous réussissions à «apprivoiser» les Français. Les Valaisans avaient renvoyé ce projet en commission et nous avions de bonnes raisons de penser qu'il allait aboutir. Malheureusement, à Lausanne, le Grand Conseil a opposé une fin de non-recevoir en refusant d'entrer en matière, si bien que nous avons été contraints, à la sauvette, de retirer notre projet de loi.

Voilà l'expérience de la tentative de donner une assise démocratique au Conseil du Léman, tentative dont l'initiative revient entièrement à M. Haegi - je dois le dire et le remercier encore même si elle a échoué. Elle pourra, peut-être, être reprise sur d'autres bases un jour. Aussi je me rallie à la proposition qui consiste à demander à M. Haegi de faire une nouvelle tentative. Alors renvoyons-lui la motion !

M. Bernard Annen (L). Nous pensons, comme l'a dit notre collègue Koechlin, que cette motion doit être renvoyée directement au Conseil d'Etat. J'entends, pour aller dans le même sens que notre collègue, ancien président du Grand Conseil, vous faire une proposition d'amendement, qui aurait la teneur suivante :

«Le Grand Conseil invite le Conseil d'Etat à présenter, dans son prochain rapport sur les affaires régionales, une évaluation du fonctionnement des institutions de coopération transfrontalière existantes et des possibilités de leur donner une meilleure assise démocratique.»

Il me semble que cela va exactement dans le sens des invites qui nous sont proposées par les motionnaires. Dans ce cas, nous soutiendrons également le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.

M. Laurent Rebeaud (Ve). Vous m'avez demandé d'écrire la demande de transformation du renvoi de cette motion en commission en renvoi au Conseil d'Etat. C'est fait ! Mais, par avance et oralement, je vous confirme

que je suis d'accord avec l'amendement proposé par notre collègue Annen, avant même de l'avoir lu !

Le président. Vous considérez votre amendement comme inclu dans la proposition Annen ?

M. Laurent Rebeaud. Je les considère comme complémentaires ! (Rires et commentaires.)

M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Je vous dis d'emblée que j'accepte volontiers cette motion modifiée dans le sens suggéré. Je crois que c'est la bonne manière d'agir pour un tel sujet. Je remercie M. Blanc d'avoir rappelé un épisode important des tentatives entreprises depuis Genève pour obtenir une plus large assise démocratique, comme nous le souhaitons.

Voyez-vous, il en va dans ce domaine comme - si j'ose me permettre la comparaison - de l'organisation d'un tournoi international. Il ne suffit pas de se réunir pour mettre sur pied le tournoi; encore faut-il être sûr que les équipes invitées y participeront, faute de quoi, si vous vous retrouvez tout seul, le tournoi n'aura d'international que le nom !

Dans les affaires qui nous intéressent maintenant, nous devons convaincre. Et ce qui exaspère régulièrement nos voisins, ce sont précisément ces initiatives successives que nous prenons depuis ici, leur donnant l'impression que nous allons organiser la région parce que nous sommes détenteurs de la vérité et que nous avons imaginé des solutions à peu près à tous les problèmes, comme si les autres n'y avaient pas pensé ! La région ne sera réussie que si nous respectons les différences institutionnelles qui existent. Elles sont profondes. Il faut donc les connaître pour pouvoir agir efficacement sur cet espace régional qui a, indiscutablement, un avenir prometteur si nous savons en faire usage.

Tout à l'heure, M. Longet a dit : «Bien malin qui sait qui fait quoi !». Monsieur, je vous invite, après votre absence d'une législature, à suivre les conseils de votre collègue Beer de lire un certain nombre de choses qui ont été rédigées pendant cette période et, notamment, le dernier rapport sur ces affaires pour y puiser quelques indications. Je vous proposerai une autre publication que je ne citerai pas ici, mais qui vous permettra de vous rendre compte de ce qui s'est passé.

Vous avez évoqué les vingt ans du CRFG. Vous pouvez aujourd'hui constater que ses structures se sont fondamentalement modifiées. Le livre blanc que vous me montrez depuis votre place en est la démonstration. C'est une révolution par rapport à ce que nous avons connu il y a quelques années où l'idée d'une concertation intercantonale et transfrontalière était inimaginable. Or, aujourd'hui, nous allons dans la bonne direction, mais il est vrai qu'il y a toute une série de résistances. Pour les surmonter, il faut que nous ayons un soupçon de diplomatie et une certaine capacité pour convaincre les partenaires de cette région.

Je me ferai un plaisir de vous répondre dans le sens que vous souhaitez. Renvoyer directement la motion au Conseil d'Etat n'est pas une manière d'éluder la question posée, mais il me semble que cela fera gagner du temps à tout le monde, et donc ce sera plus efficace. Vous aurez les renseignements que vous attendez et, ensuite de toute façon, nous poursuivrons avec détermination ce qui a déjà été engagé.

Mis aux voix, l'amendement de M. Annen est adopté.

Mise aux voix, cette motion ainsi amendée est adoptée.

Elle est ainsi conçue:

MOTION

concernant l'état de la politique régionaleet les perspectives de démocratisation

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

 le RD 115-A, du 14 septembre 1989, rapport de la commission chargée d'étudier le rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur les questions fédérales importantes ;

 la nécessité de rendre plus cohérents et plus transparents la politique régionale et les instruments de coopération transfrontière ;

 la nécessité de démocratiser les instances de coopération régionale afin de les rapprocher de la population,

invite le Conseil d'Etat

à présenter, dans son prochain rapport sur les affaires régionales, une évaluation du fonctionnement des institutions de coopération transfrontalière existantes et des possibilités de leur donner une meilleure assise démocratique.

 

M 888
7. Proposition de motion de M. René Longet et Mme Liliane Maury Pasquier concernant l'étude sur l'abstentionnisme et la définition d'une stratégie d'ensemble. ( )M888

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

 que moins de 40% des citoyennes et citoyens se sont rendus aux urnes les 15, 16 et 17 octobre dernier, pour l'élection du Grand Conseil;

 que, de manière générale, les taux d'abstentionnisme sont très importants dans notre canton, mettant en péril, à la longue, le bon fonctionnement de la démocratie,

invite une de ses commissions

à examiner de plus près l'abstentionnisme qui se manifeste dans les scrutins dans notre canton et à formuler des propositions en vue de revitaliser les processus démocratiques.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le débat sur l'abstentionnisme n'est pas nouveau dans notre canton.

Se fondant sur les résultats d'enquêtes faites durant la deuxième moitié des années 60, le professeur Girod avait, dans ses études qui demeurèrent pour longtemps des références, examiné pour la première fois la question dans son ensemble et de manière scientifique.

Les débats qui ont entouré l'élection du Conseil d'Etat ont déjà fait oublier les circonstances de l'élection de notre Grand Conseil. A tort, puisque, si pour l'élection de l'exécutif, on a pu noter une heureuse, quoique nettement insuffisante, progression de la participation (33% en 1989, 42% en 1993), pour l'élection du législatif, l'ensemble des commentateurs avaient souligné le fort taux d'abstentions: deux électeurs sur trois se sont désintéressés du scrutin.

Ce serait faire preuve d'une certaine forme d'irresponsabilité, et aussi d'irrespect vis-à-vis du malaise que nécessairement un tel taux d'abstentions exprime parmi le corps électoral, que de ne pas chercher à mieux comprendre ce qui se passe.

Car chacun sait que pour d'autres scrutins vote de novembre 1989 sur une Suisse sans armée, de décembre 1992 sur l'adhésion à l'EEE des participations massives ont été enregistrées. Il existe donc en principe un potentiel civique, dont l'ampleur souligne encore davantage le caractère inquiétant de l'abstentionnisme du 17 octobre.

Les approches empiriques connues nous permettent de dire qu'on peut diviser l'électorat en trois catégories:

 la première, représentant environ un cinquième des électeurs, allant toujours voter,

 la deuxième, représentant un autre cinquième, n'allant jamais aux urnes,

 la troisième, constituée de 60% de participants occasionnels.

Certes, l'exercice des droits civiques est volontaire.

Mais il doit nous intéresser au premier chef de connaître les raisons pour lesquelles l'enjeu de l'élection du législatif a laissé indifférents une aussi vaste catégorie de citoyens.

Nous ne pouvons qu'avancer des hypothèses:

 L'absence de choix clairs? Il n'y a jamais eu autant de partis, un tel éventail d'options.

 L'excès, à l'inverse, des formations? Elles présentaient aussi, en divers points, des convergences.

 L'absence de débats? Ils furent nombreux et généralement de bon niveau.

 L'absence d'informations? Les médias ont bien travaillé.

Le problème demeure... Et pas plus qu'il ne peut être passé sous silence, il ne peut être rapidement et simplement expliqué.

Il nous paraît nécessaire, en ce début de législature, et près de trente ans après les travaux susmentionnés du professeur Girod, de faire un vaste tour d'horizon. Une commission de notre parlement devrait après un premier tour de la question faire appel aux compétences scientifiques en matière d'analyse qualitative et quantitative des motivations de l'électorat. Depuis les études du professeur Girod, la méthodologie et le savoir-faire ont beaucoup progressé, il suffit de penser à l'outillage des études "Vox", effectuées au plan fédéral après chaque scrutin.

S'agissant de l'abstentionnisme, il est indispensable en tout premier lieu d'en cerner les données factuelles de base, comme les corrélations avec des éléments tels que l'âge, le degré de formation, la résidence, l'occupation, le statut.

Il convient ensuite de mettre en rapport ce comportement avec les aspirations politiques et de représentation. Il faudra aussi s'interroger sur les modalités du discours politique, sur la manière dont les partis sont présents en dehors des périodes électorales proprement dites, sur les besoins et les moyens de la communication politique, sur les techniques de communication et d'animation civiques modernes.

Il s'avérera peut-être aussi utile de mettre sur pied une sorte d'observatoire de la politique genevoise, comme accompagnement à plus long terme.

Les suggestions qui ont été présentées en septembre 1991 par la motion 754 concernant la participation aux élections et votations, et que ce Grand Conseil a renvoyées au Conseil d'Etat début 1993 et relevant des aménagements techniques, devront naturellement être prises en compte; par cette motion, le Conseil d'Etat a été chargé au surplus de "rechercher toute mesure attrayante susceptible de mobiliser l'électorat", invite qui présuppose nécessairement une réflexion sur les motivations des abstentionnistes.

La présente motion ne vise cependant pas à nous décharger de notre devoir de réflexion et d'action sur l'exécutif; au sens de l'article 143, lettre b de notre règlement, il s'agit bien plutôt de demander à une commission de notre Parlement de dresser un premier état de la situation, puis de faire appel aux experts en la matière, avant de déboucher sur un catalogue de propositions d'action qui demanderont à être largement débattues, et qui pourront déboucher sur des modifications substantielles dans les rapports qu'entretiennent traditionnellement les élus avec les électeurs.

Au bénéfice de ces explications nous vous prions, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer la présente motion à la commission compétente pour que cette dernière puisse sans délais commencer ses travaux.

Débat

Mme Liliane Maury Pasquier (S). Voilà la motionnaire que M. Koechlin voulait entendre tout à l'heure ! (Aahh de satisfaction.)

Bien que nouvelle venue dans ce Conseil, je ne suis pas tout à fait née de la dernière pluie. La preuve, je fête aujourd'hui mon trente-septième anniversaire !

Toute la salle. Bravo, bravo ! (Applaudissements.)

Mme Liliane Maury Pasquier. Merci, merci ! (Toute la salle entonne en choeur le traditionnel "Happy birthday to you".)

Le président. (S'adressant à Mme Maury Pasquier.) C'est votre temps, vous l'employez à votre guise !

Mme Maury Pasquier. Oui ! (Mme Maury Pasquier rit, l'assemblée manifeste.)

Je disais que je ne suis pas née de la dernière pluie et j'imagine bien que le problème de l'abstentionnisme, avec le particularisme genevois dans ce domaine, a déjà été évoqué dans cette enceinte, mais le taux de participation,

particulièrement bas lors de la dernière élection au Grand Conseil, ne peut pas être banalisé par le seul fait que : «ce n'est pas nouveau !». Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour éviter les discours du type : «De toute façon, ils font tout ce qu'ils veulent !». Nous devons prendre ce problème très au sérieux, comme nos prédécesseurs l'ont certainement déjà fait.

Nous devons, en renvoyant cette motion devant notre commission, faire passer le message que nous avons constaté avec consternation le taux élevé d'abstentionnisme lors de la dernière élection au Grand Conseil, que cela est un élément très dangereux pour notre démocratie et que nous voulons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour diminuer l'abstentionnisme, pour combler le fossé qui sépare les citoyens de leurs autorités.

Vous me direz - je m'y attends - que cela va encore engendrer des études alors qu'elles ont déjà été faites et que le problème est connu. Je tiens tout de même à vous rappeler que l'étude du professeur Girod, que nous mentionnons dans notre proposition de motion, date de 1971 et que, si elle a été unanimement saluée, les choses ont beaucoup changé depuis cette année-là, comme, par exemple, la socialisation de la population, les éléments de l'intégration professionnelle, familiale, communale ou de quartier, les rapports entre le politique et les citoyens, mais aussi, d'autre part, les moyens scientifiques à disposition, la manière de réaliser et d'analyser des sondages, de mener des recherches. Récemment ce Grand Conseil a déjà adressé au Conseil d'Etat une motion l'invitant à faire un rapport sur les mesures susceptibles de mobiliser l'électorat, mais nous devons, en tant que législatif, nous préoccuper également de ce problème et nous en occuper nous-mêmes.

Je répéterai, pour terminer, que nous ne devons pas banaliser ce problème. Il en va de la survie de notre démocratie et vous manifesterez votre attachement à ce système en renvoyant cette motion à la commission des droits politiques.

M. René Koechlin (L). Je demande pardon à M. Moutinot. D'ailleurs je pense qu'il ne me tiendra pas rigueur de ma confusion de tout à l'heure, car elle est plutôt flatteuse pour lui... (Rires.)

Cela dit, je voudrais dire aux motionnaires que nous sommes tous préoccupés par le problème de l'abstentionnisme. Toutes les personnes qui sont de bons citoyens et de bons démocrates s'en soucient. Par contre, nous pouvons nous demander si c'est au sein d'une commission parlementaire qu'il est judicieux de formuler des propositions. J'en doute. A mon avis, on doit y examiner les objets préalablement élaborés soit par des députés, qui ont une certaine affinité entre eux, soit par le Conseil d'Etat, ce qui revient à lui renvoyer ce genre de motion.

C'est la raison pour laquelle, Madame et Monsieur les motionnaires, je vous invite à nous faire des propositions, c'est-à-dire à procéder à cette réflexion à laquelle vous appelez la commission parlementaire, soit au sein de votre propre groupe, soit au sein d'un groupe de députés de votre choix, avec lesquels vous avez des affinités et qui sont préoccupés - comme je crois l'ensemble des députés de ce Grand Conseil - par cette question. Vous pouvez aussi remettre la responsabilité de cette réflexion au Conseil d'Etat en lui demandant qu'il vous fasse part dans un rapport du résultat de ce travail.

Voilà la raison pour laquelle, Madame, dans le cas particulier de cette motion, vous vous trompez un peu de cible. Ou bien vous l'adressez au Conseil d'Etat et, dans ce cas, il faut reformuler l'invite, ou alors vous procédez à une réflexion au sein de votre groupe ou au sein du groupe de députés que vous aurez choisis et vous nous ferez des propositions sous forme d'un projet de loi ou d'une motion.

Le président. Je répète que pour renvoyer la motion au Conseil d'Etat il me faut un amendement.

M. René Longet (S). Je veux bien prendre sur le compte de ma naïveté supposée le fait que je surestime apparemment les capacités des commissions du Grand Conseil.

Je ne voudrais pas faire faire des travaux à des instances qui n'y sont pas préparées et j'aimerais bien m'adresser au bon endroit. Je prends note que cette procédure qui est prévue à l'article 143 b du règlement devient pratiquement désuète ou obsolète, puisque c'est à elle que nous nous sommes référés pour la motion précédente et pour celle-ci. Nous sommes partis de l'idée que le Grand Conseil est le premier touché par le taux de participation extrêmement bas, puisque nous n'avons réussi à mobiliser qu'un électeur sur trois, tous partis confondus. C'est un problème qui nous concerne tous.

Nous pensons qu'il aurait été judicieux de procéder en trois temps en commission. Un premier temps pour faire un tour d'horizon de deux heures, pas plus, pour faire un tour de table et exposer les idées les plus pertinentes. Ensuite, dans un deuxième temps, nous aurions défini des mandats de recherche du type de ceux que le professeur Girod avait reçus il y a vingt-cinq ans environ. Dans un troisième temps, nous aurions tiré les conclusions des résultats de la recherche pour aboutir aux propositions. Rien d'autre, au fond, qu'une explicitation de ce qui vient d'être dit ici, c'est-à-dire organiser une réunion de députés pour faire des propositions.

En effet, je me méfie beaucoup des propositions que l'on peut faire, à la «Café du commerce», les uns disant qu'il faut regrouper ceci, les autres disant qu'il faut mieux communiquer, sans parler des «il n'y a qu'à», tout le monde étant conscient des choses à faire, sans savoir exactement ce qu'elles apporteraient.

Nous pensons qu'aujourd'hui, vingt-cinq ans après les études du professeur Girod, nous sommes à nouveau arrivés à un stade qui demande des bases de données assez larges. Comme l'a dit ma collègue, tout à l'heure, il y a un affinement des moyens de recherche et des outils scientifiques au niveau universitaire. Pensez aux études Vox ou à d'autres moyens qui sont disponibles à la faculté des sciences économiques et sociales, et qui nous permettraient de donner des mandats bien définis pour chercher à comprendre d'où vient l'abstentionnisme aujourd'hui et mieux expliquer les variations de ce dernier. En effet, en l'espace d'un an il y a eu un taux de 78% de participation pour l'Europe et de 33% seulement pour le Grand Conseil. Il y a quand même un problème ! Nous avons envie de savoir pourquoi. Je crois que la grande question est de sortir des débats style «Café du commerce» que nous pourrions faire ici pour se donner des bases scientifiques sérieuses, qui nous permettraient d'aller de l'avant.

Maintenant, Madame et Messieurs les libéraux, si vous préférez que le Conseil d'Etat fasse procéder à cette étude, cela nous est relativement égal. Ce qui compte finalement est d'obtenir les bases que nous demandons. Heureusement pour lui, le Conseil d'Etat a été élu avec une plus grande proportion d'électeurs ! Alors, personnellement - je pense que ma collègue est d'accord - nous acceptons que le Conseil d'Etat procède à cette étude. Mais encore faut-il qu'il soit d'accord de la faire ! Ce qui nous intéresse, je le répète, est d'avoir des bases actualisées, complètes, sérieuses, à partir desquelles nous pourrons engager un programme de réalisations pour tenter de maîtriser ce problème.

Le président. Monsieur le motionnaire, je voudrais vous signaler que l'article 143 b, auquel vous vous référez, dit que : «La motion est une proposition faite au Grand Conseil de charger une commission d'élaborer sur un objet déterminé un projet de loi, une motion, une résolution.». C'est assez loin de ce que vous proposez, puisque vous invitez une commission à exa

miner de plus près l'abstentionnisme. Je veux bien tolérer cette interprétation relativement laxiste ! (Réactions sur les bancs socialistes.)

M. Andreas Saurer (Ve). Je ne vais pas entrer dans un débat de procédure pour savoir si cette motion est conforme ou non au règlement.

Monsieur Longet, il me semble que vous et votre collègue êtes un peu modestes avec cette motion. En effet, vous demandez d'examiner l'abstentionnisme sans formuler de propositions malgré le fait - j'en suis convaincu - que vous avez toute une série de propositions à faire. Croyez-vous vraiment que les députés, et particulièrement les députés de l'Entente, puissent trouver des solutions pour lutter contre l'abstentionnisme plus facilement que vous et votre parti ?

Des voix. Bien sûr !

M. Andreas Saurer. Permettez-moi d'avoir un léger doute ! Il me semble que vous intériorisez visiblement, avec une rapidité incroyable, l'idée de l'Entente qu'elle, et elle seule, est capable de résoudre les grands problèmes de notre société. (Manifestation et quolibets fusent.) Monsieur Longet, ayez un peu de courage, faites des propositions précises et nous en débattrons !

Maintenant, il se peut aussi, pour utiliser un langage freudien que vous ayez opéré un certain «déplacement»...

M. Hervé Dessimoz. Un transfert !

M. Andreas Saurer. Vous parlez de revitaliser le processus démocratique, mais ne faut-il pas entendre : revitaliser le parti socialiste ? (Rires.) Mais, enfin, quelle que soit l'interprétation que vous donnez à votre motion, nous, les écologistes, avons quelque peine à vous suivre. Je dois dire que nous nous attendions à beaucoup plus de vous et de votre parti pour trouver une solution à ce problème. (La droite applaudit et félicite l'orateur.)

M. Claude Lacour (L). L'un des motionnaires a dit qu'il se trouverait sûrement quelqu'un pour dire que le problème avait déjà été examiné.

Je vous rappelle que le problème de l'abstentionnisme a précisément été examiné il n'y a pas plus de six mois par la commission des droits politiques et qu'elle a consacré notamment deux de ses séances, soit le nombre d'heures que vous prévoyiez, à examiner des solutions éventuelles à ce problème. Pour rassurer tout le monde, la commission avait procédé à des auditions dont celle du professeur Girod, qui a bien voulu revenir à Genève, malgré sa retraite, pour nous expliquer les faits nouveaux surgis depuis son livre. Nous avons également entendu le professeur Aubert à ce sujet. Nous avons appris à cette occasion qu'il existait toute une littérature traitant ce problème. Par conséquent, je pense qu'il suffit de relire les procès-verbaux de ces quelques séances de la commission des droits politiques pour obtenir ce que vous nous demandez.

Je propose donc que le Conseil d'Etat prenne connaissance de ces procès-verbaux. Il y trouvera des propositions concrètes, et je pense que cela permettra de régler ce problème dans la mesure où il peut l'être, en l'état actuel des choses.

Mme Maria Roth-Bernasconi (S). (Mme Roth-Bernasconi est accueillie par un aahh ! Elle commence son intervention en Schwitzer-Dütsch) Wenn ler wend, chan i au schwitzertütsch rede ! (Cette phrase en dialecte suisse-allemand déclenche l'hilarité générale et des applaudissements.) Et c'est comme ça qu'on veut faire l'Europe ! Bravo !

A l'époque de la pétition de M. Vernay - je pense que c'est à cela que vous avez fait allusion - j'étais dans la commission des affaires politiques. Je ne me rappelle pas du tout que M. Girod ait fait des propositions concrètes par rapport à l'abstentionnisme. Justement, ce qui nous a dérangés à l'époque est que cette étude avait été faite depuis plus de vingt ans et que nous voulions avoir une analyse actualisée. Je ne vois pas en quoi la lecture de ces procès-verbaux pourrait nous aider à aller plus loin.

M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Le service cantonal de statistique, en collaboration avec le service des votations et élections, a entrepris une enquête sur l'électorat, qualitativement et quantitativement unique. En effet, pour la première fois, il a été procédé à une étude démo-sociologique des électeurs ne portant pas sur un échantillonnage mais sur l'ensemble des électeurs inscrits à cette fin. Tous les électeurs ayant et n'ayant pas voté ont été saisis dans une base de données informatique, en respectant bien sûr l'anonymat qui s'impose. De plus, ce relevé statistique a été effectué sur une année complète et sur quatre votations importantes. L'analyse de ce relevé concernera donc plus de 800 000 enregistrements contenant les critères suivants : domicile, sexe, âge, état civil, origine, profession, situation dans la profession, branche économique, genre de vote, anticipé, etc. Cette radiographie de l'électorat genevois sera prête dans le courant du premier semestre 1994. Je crois que c'est un élément intéressant.

Plusieurs d'entre vous ont rappelé ce qui s'est déroulé au cours des quatre années qui viennent de s'écouler. En effet, dans la commission des droits politiques, cette prise de conscience était réelle. Les travaux conduits dans le cadre de la commission allaient bien dans le sens d'une amélioration de la participation des électrices et électeurs. Je signale, en passant, que le vote par correspondance a eu un effet positif, qui a été relevé par les uns et les autres; les statistiques le prouvent.

Pour le reste, il est évident que vous avez des sujets qui sont plus ou moins porteurs et que vous ne pourrez jamais obliger les gens à aller voter, à moins que vous vous imaginiez, comme démarche originale, pouvoir imposer le vote obligatoire, comme cela se fait dans certains cantons. Je n'ai, pour ma part, jamais ressenti ici cette volonté. Bien sûr, pouvons-nous encore l'envisager.

C'est dire que, au cours de ces années, jamais ce sujet n'a été laissé de côté et chacun a agi dans ce sens.

M. Saurer a raison de relever le fait que le Grand Conseil ou le Conseil d'Etat n'allaient pas trouver des solutions miracles pour modifier le comportement des gens et augmenter la participation qui est variable en fonction de l'intérêt que les uns et les autres portent à l'objet du vote. Je crois, Monsieur Saurer, que vous avez raison de soupçonner les motionnaires d'avoir des idées et de ne pas les avoir présentées. C'est la raison pour laquelle il faut leur demander de présenter une autre motion dans laquelle ils pourront développer les idées qui sont les leurs, puis vous en discuterez en commission. Il ne me paraît pas souhaitable d'envoyer cette motion en commission dans ces conditions.

En l'état, il me semble plus raisonnable, Madame et Monsieur les motionnaires, de retirer votre motion ce soir et d'en présenter une autre sur ce thème. Entre-temps, vous recevrez au mois de mars le rapport que je vous ai annoncé émanant du service de statistique, qui sera un élément intéressant de la réflexion que vous devez conduire et qui pourra vous donner des idées supplémentaires au cas où nous serions à court dans un domaine qui n'est pas évident.

M. René Longet (S). Nous nous sommes concertés, Mme Maury-Pasquier et moi-même, et nous constatons que, si nous avions fait des propositions concrètes à ce stade, on nous aurait dit, à juste titre, de les mettre dans un contexte, avec les études y relatives et des données sérieuses et étayées. C'est pour cela que nous avons choisi, cette fois-ci, la voie des études. Puisque vous nous renvoyez dans l'autre case, celle des propositions concrètes, nous sommes prêts à relever le défi et à présenter nos propositions. Monsieur Saurer, rassurez-vous, nous en avons certainement plus que vous, qui avez été tout à fait incapable d'en sortir une seule ! Dans votre cas, je parlerai plutôt de projection, Docteur, plutôt que de transfert ! (Rires.)

Nous avons un certain nombre d'idées, mais ne nous demandez pas, dans cette hypothèse, d'avoir en même temps toutes les bases de données qu'une étude de fond peut seule apporter. Nous vous les présenterons sous peu et nous vous rappellerons le débat de ce soir. Dans ces conditions, nous sommes d'accord de retirer cette motion. C'est une première étape pour nous. Dans la deuxième, vous aurez du concret.

Le Grand Conseil prend acte du retrait de cette motion. 

M 885
8. Proposition de motion de MM. Laurent Moutinot, Christian Ferrazino et Chaïm Nissim invitant le Conseil d'Etat à présenter un projet de loi modifiant la procédure en matière d'évacuation pour défaut de paiement du loyer (art. 440 et 441 LPC). ( )M885

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

 que dans un récent arrêt (SJ 1993, pages 545 et suivantes), le Tribunal fédéral a critiqué les procédures cantonales d'évacuation pour défaut de paiement du loyer, lorsqu'il s'agit de procédures sommaires;

 qu'il y a lieu, la procédure genevoise en la matière étant sommaire, d'harmoniser la législation cantonale avec les exigences du Tribunal fédéral;

 que le problème des évacuations pour défaut de paiement pose de surcroît des graves problèmes sociaux, économiques et humains, et qu'il y aura lieu d'en tenir compte dans l'élaboration d'une nouvelle législation,

invite le Conseil d'Etat

à présenter un projet de loi visant:

1. à harmoniser les articles 440 et 441, LPC avec les exigences de l'article 274 g, CO, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral parue à la SJ 1993, pages 545 et suivantes;

2. à permettre la prise en compte des aspects sociaux du défaut de paiement du loyer dans toute la mesure compatible avec les exigences du droit fédéral.

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Situation générale

La crise qui sévit actuellement plonge de très nombreux locataires, soit d'appartement, soit de commerce, dans des difficultés financières qui les entraînent à prendre du retard dans le paiement du loyer.

Un accroissement du nombre de procédures d'évacuation pour défaut de paiement est d'ailleurs constaté par la juridiction des baux et loyers.

C'est dire toute l'importance du problème et la nécessité de trouver une procédure qui permette, dans toute la mesure compatible avec le droit fédéral, la prise en compte de tous les aspects sociaux et financiers.

2. Situation juridique

Depuis le 1er juillet 1990, le congé pour défaut de paiement du loyer est réglé par l'article 257 d, CO, qui stipule que:

«1. Lorsque après réception de la chose, le locataire a du retard pour s'acquitter d'un terme ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui signifier qu'à défaut de paiement dans ce délai, il résiliera le bail. Ce délai sera de 10 jours au moins et, pour les baux d'habitation ou de locaux commerciaux, de 30 jours au moins.

2. Faute de paiement dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux d'habitation et de locaux commerciaux peuvent être résiliés moyennant un délai de congé minimum de 30 jours pour la fin d'un mois.».

La procédure est, quant à elle, sur le plan fédéral, réglée notamment par l'article 274 g, CO, qui attribue au juge de l'évacuation la compétence pour statuer «aussi sur la validité du congé donné par le bailleur».

Le Tribunal fédéral, dans son audience du 20 avril 1993 (Semaine judiciaire 1993, page 545 et Sc), a précisé comme il fallait organiser la procédure cantonale d'évacuation pour défaut de paiement du loyer.

Il a notamment précisé que «le juge de l'expulsion ne peut dès lors pas se contenter d'une simple vraisemblance quant aux faits, ni de moyen de preuve limité».

Il ajoute que «le juge chargé de l'expulsion doit examiner la validité de la résiliation avec une cognition entière».

En rappelant qu'«aucun motif ne justifie de restreindre l'application de cette règle de droit fédéral aux cantons qui ont introduit la procédure sommaire...».

Dans l'arrêt ci-dessus, le Tribunal fédéral a invité le législateur vaudois concerné par l'espèce en cause à harmoniser sa loi «avec les exigences fédérales déduites de l'article 274 g, CO». Il ne fait pas de doute que le canton de Genève doit également adapter sa législation tant il est vrai que la procédure décrite à l'article 440, LPC, est une procédure sommaire qui ne permet pas au juge d'évacuation d'examiner avec pleine cognition la validité du congé.

3. Procédure actuelle

Les articles 440 et 441, LPC, dans leur version actuelle et dans l'interprétation qu'en donnent les tribunaux genevois, décrivent une procédure sommaire et le seul moyen de preuve des paiements du loyer qui est pratiquement admis est la présentation de quittances.

La procédure actuelle ne permet souvent pas au locataire de faire entendre des témoins dans le cas où le loyer a été payé en nature ou de la main à la main. La procédure actuelle ne permet pas davantage que soit pris en compte un paiement par compensation, notamment en cas de diminution de jouissance de la chose louée.

Il s'agit d'un véritable système de «guillotine» qui ne laisse que peu de moyens au justiciable et peu de latitude au juge. C'est précisément ce caractère sommaire qui est critiqué par le Tribunal fédéral.

Débat

M. Laurent Moutinot (S). On dit souvent : «Pas d'argent pas de Suisse !». C'est probablement la raison pour laquelle le problème des évacuations pour défaut de paiement est rarement traité.

Une autre raison est que, pendant ces dernières décennies, l'euphorie financière faisait que le défaut de paiement du loyer n'était qu'un problème marginal que l'on pouvait traiter par le biais social. Avec la crise économique, ce problème a pris de l'ampleur, et le nouveau droit du bail entré en vigueur le 1er juillet 1990 a fixé en la matière quelques nouvelles règles. Dans une affaire vaudoise, le Tribunal fédéral a eu l'occasion de dire la manière dont il convenait d'appliquer le nouveau droit fédéral. Il se trouve que le canton de Vaud, comme le canton de Genève, applique en la matière une procédure sommaire. Or vous savez que la justice sommaire est quelquefois expéditive ! C'est pour cela que le Tribunal fédéral demande que les procédures en matière d'évacuation pour défaut de paiement du loyer fassent l'objet d'une modification afin que le juge puisse véritablement prendre en compte l'ensemble des paramètres pertinents. C'est la première invite de la motion. Il s'agit de la mise en conformité du droit cantonal avec les exigences du droit fédéral.

La deuxième partie de la motion consiste à saisir l'occasion de ce toilettage législatif pour tenir compte de la gravité du problème et tenter de répondre, sur le plan économique et sur le plan social, aux problèmes qu'il pose. Je crois d'ailleurs que, si le Tribunal fédéral exige une procédure complète d'examen d'un congé pour défaut de paiement, c'est précisément parce qu'il est sensible à ce contexte et, de la sorte, les deux invites de la motion sont complémentaires. Je vous remercie donc de leur réserver bon accueil.

M. Bénédict Fontanet (PDC). Je ne fais pas tout à fait la même lecture de cet arrêt du Tribunal fédéral que mon collègue et néanmoins confrère Moutinot.

Un adage dit : «Deux juristes, trois opinions !». En l'occurrence, il me semble que dans cette affaire vaudoise les choses étaient un peu particulières, mais à Genève, certaines protections existent déjà. D'abord, la loi de procédure civile permet tout de même de ne pas procéder selon la procédure sommaire que vous évoquiez. Le juge peut ordonner des d'enquêtes s'il le souhaite. Ensuite, il y a quelques correctifs possibles au niveau de la commission de conciliation en matière de baux et loyers qui peut siéger avec deux assesseurs supplémentaires spécialistes des affaires sociales lorsque les justiciables rencontrent des difficultés particulières. Enfin, la loi de procédure civile, telle que nous l'avons modifiée lors de la précédente législature, sauf erreur de ma part, permet au procureur général, dans les cas socialement difficiles, de surseoir aux évacuations, ce qui est une bonne chose.

Cela étant, cette matière pose une question de technique juridique qu'il m'apparaîtrait plus adéquat de traiter au sein de la commission judiciaire qu'en séance plénière du Grand Conseil. Je vous propose donc de renvoyer cette motion pour voir si oui ou non il est effectivement nécessaire de légiférer en la matière, ce d'autant qu'il sera intéressant d'entendre le procureur général, par exemple dans le cadre de la commission judiciaire, et également les magistrats du Tribunal des baux et loyers, pour savoir si effectivement la procédure d'évacuation, telle qu'elle existe aujourd'hui - elle est malheureusement nécessaire - est satisfaisante ou non.

C'est pour cela qu'au nom de mon groupe, je vous suggère le renvoi en commission de cette motion, faute de quoi nous ne la voterons pas telle qu'elle est, car nous ne souhaitons pas voter une affaire de ce genre la tête dans un sac !

M. Pierre Meyll. Mais, faut la sortir, la tête !

M. Claude Lacour (L). Je suis le troisième juriste, mais ne vous faites pas de souci, mon opinion sera la même !

J'ai sous les yeux l'arrêt du Tribunal fédéral que je me suis donné la peine de lire et qui, finalement, propose que, en matière d'évacuation, il y ait une procédure sommaire ou non. Il se trouve que nous en avons une à Genève. Par conséquent, je ne vois pas pour ma part qu'il y ait une lacune dans les lois genevoises à l'heure actuelle en matière d'évacuation pour défaut de loyer, procédure qui jusqu'à présent donne satisfaction à celui qui gagne, bien entendu, et pas à celui qui perd.

Par contre, si on estime vraiment qu'il y a un problème, alors c'est un problème de droit qu'il faut étudier de manière approfondie. En effet, cela ne serait pas facile de modifier des procédures, qu'elles soient sommaires ou ordinaires, qui ont des dizaines d'années de «bouteille», si je puis dire ! Créer une procédure spéciale pour les évacuations pour défaut de paiement du loyer deviendrait un problème tout à fait particulier.

C'est la raison pour laquelle il faut, ou ne pas entrer en matière, ou la renvoyer en commission. C'est la moindre des choses que l'on puisse faire.

M. Christian Ferrazino (AdG). Si les députés qui sont juristes de profession ne voient pas eux-mêmes la nécessité de conformer le droit cantonal aux normes fédérales, cela pose effectivement un problème, et l'on peut imaginer la difficulté que cela représente pour les non-juristes !

De même, lorsque nous avons des représentants d'un parti, en l'occurrence le parti démocrate-chrétien, membres du rassemblement pour une politique sociale du logement, qui s'interrogent sur la nécessité de devoir intervenir pour essayer d'améliorer la législation cantonale en matière d'évacuation pour défaut de payement du loyer, je me dis qu'il y a encore beaucoup de travail à faire et qu'il faudra donner beaucoup d'explications à ces messieurs dames.

Fort de ces deux constats et surtout de la difficulté dans laquelle se trouvent certains d'entre nous face à ce problème pourtant crucial des évacuations des locataires pour défaut de payement du loyer, nous acceptons, Laurent Moutinot et moi-même, de transmettre cette motion à la commission judiciaire pour la concrétiser par le biais d'un projet de loi, étant précisé, Monsieur Fontanet, qu'il ne sera pas utile d'écouter M. Bertossa dans la mesure où il n'intervient qu'au niveau de l'exécution des jugements d'évacuation. Si nous demandons ici de voter une motion pour adapter la législation cantonale, c'est précisément que nous en sommes au stade précédant l'exécution des jugements pour faire en sorte, justement, que ces dossiers ne se règlent plus systématiquement au niveau de l'exécution des jugements, mais au stade de la procédure elle-même pour que les justiciables puissent faire valoir leurs droits dans le cadre de la procédure. Ce n'est pas le cas actuellement par le biais de la procédure dite sommaire, dont le nom est suffisamment explicite pour vous montrer qu'il n'y a pas beaucoup de possibilités pour faire valoir des droits.

(L'orateur est dérangé dans son intervention par M. Annen.) Oui, Monsieur Annen, cela ne vous intéresse pas beaucoup, néanmoins, il est urgent de trouver une loi cantonale qui soit conforme non seulement à cette récente jurisprudence du Tribunal fédéral mais également à une votation que certains d'entre vous semblent un peu rapidement oublier et qui a précédé de quelques jours le dépôt de ce projet de motion. Je veux parler de la votation du 28 novembre dernier qui, précisément, prévoit en son article 10 a nouveau de la constitution genevoise de prendre des mesures pour faire en sorte que les gens ne se retrouvent pas sans toit à Genève. C'est une de ses applications, aussi faible soit-elle, que de conformer notre droit cantonal à la législation fédérale pour permettre aux locataires de faire valoir leurs droits, y compris dans le cadre de procédures pour défaut de payement du loyer.

Nous proposons donc que cette motion soit transmise à la commission judiciaire.

M. Gérard Ramseyer (R), conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat prend connaissance avec attention de cette motion.

Le nombre des procédures d'évacuation, ces trois dernières années, passe de 531 à 609, c'est dire que l'évolution de ce nombre n'est pas à la baisse. Les motifs d'évacuation sont évidemment de divers ordres. Sur le plan juridique, la loi de procédure civile genevoise prévoit une procédure particulière en matière d'évacuation pour défaut de payement du loyer. Lorsque le locataire conteste le défaut de payement, le code des obligations prescrit que le juge de l'évacuation doit statuer également sur la validité du congé et le Tribunal fédéral exige qu'il se prononce en toute connaissance de cause, en fait et en droit.

En l'état actuel des choses, le département estime que la loi de procédure civile genevoise ne fait pas obstacle au respect de cette exigence du Tribunal fédéral. Il demeure que les articles incriminés pourraient à la rigueur être reformulés, notamment pour prévoir explicitement la procédure à suivre lorsque le locataire en demeure conteste la validité du congé. De plus, le Conseil d'Etat a fait remarquer que la loi instituant la commission de conciliation en matière de baux et loyers a prévu une commission sociale et que le directeur de l'Office du logement social assiste régulièrement aux audiences d'évacuation fixées par le procureur général.

En conclusion donc, le Conseil d'Etat ne s'oppose pas au renvoi de cette motion en commission, encore qu'il ne paraisse guère primordial de modifier la législation genevoise. Mais, s'il s'agit de reculer au maximum l'évacuation d'un locataire en retard de payement, on va alors tout droit à un encombrement encore plus grand des juridictions compétentes en la matière, juridictions qui sont déjà submergées de demandes. Je répète, néanmoins, que le Conseil d'Etat ne s'oppose pas au renvoi de cette motion à la commission judiciaire.

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission judiciaire. 

PL 7054
9. Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Collonge-Bellerive (création d'une zone de développement 4 B). ( )PL7054

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Le plan n° 28607-515, dressé par le département des travaux publics le 15 juin 1993, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Collonge-Bellerive, à La Capite (création d'une zone de développement 4 B), est approuvé.

2 La surface brute des constructions ne doit pas excéder 8'800 m2.

3 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.

Art. 2

En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité II aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone créée par le plan visé à l'article 1.

Art. 3

Un exemplaire du plan n° 28607-515 susvisé, certifié conforme par le président du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.

EXPOSÉ DES MOTIFS

En 1989, la Fondation professionnelle et sociale de Genève acquiert les parcelles nos 7466, 5453 et 5378 situées au nord-ouest de la route de La Capite, en bordure du chemin Plumaget, sur le territoire de la commune de Collonge-Bellerive, feuille no 30 de son cadastre. Ces parcelles sont actuellement situées en 5e zone (villas) et, pour une petite partie, en zone 4 B protégée.

La Fondation professionnelle et sociale de Genève, qui ne poursuit aucun but lucratif, se préoccupe avant tout de permettre à des personnes âgées, grâce à un environnement favorable et convivial ainsi qu'à une présence médicale sécurisante, de conserver le plus longtemps possible leur indépendance tout en étant déchargées de certaines servitudes telles que la préparation du repas principal de midi et l'entretien de l'appartement.

Dans ce but, elle a déposé en 1991 une requête portant sur la construction de petits immeubles de deux étages sur rez plus superstructure implantés dans le périmètre cité ci-dessus, en retrait du village de La Capite afin de préserver ce site. Ce projet présentait un indice d'utilisation du sol de 0,7.

Lors de l'instruction du dossier, les commissions d'architecture, d'urbanisme et des monuments, de la nature et des sites ainsi que le Conseil administratif de la commune de Collonge-Bellerive ont procédé à une visite sur place pour évaluer l'impact du projet sur le site, ceci grâce à la mise en place de gabarits, et celui de la démolition de la maison existante.

Suite à cette visite, il a été demandé au requérant de mettre au point un nouveau projet en collaboration avec les services du département des travaux publics, en tenant au mieux compte des qualités du site, de l'arborisation existante et de la proximité du village de La Capite.

Un nouveau projet a été préavisé favorablement par les commissions susmentionnées. Ce projet, basé sur des exemples de réalisations similaires exécutées en Suède, comprend trois pavillons de logements de R+2 + superstructure, tous reliés à un petit immeuble central qui regroupe le restaurant, les locaux communs, l'administration et les locaux paramédicaux. La surface brute de plancher ne devra pas dépasser 8'800 m2. Cela représente environ 63 appartements (9 deux pièces, 43 deux pièces et demie, 8 trois pièces et 3 quatre pièces). Signalons en outre que la ligne de bus G passe régulièrement sur la route de La Capite et son arrêt est à proximité du futur projet.

La commune de Collonge-Bellerive, déjà consultée par la Fondation, est favorable à la réalisation de ce projet, si priorité est donnée aux personnes âgées de la commune.

Par conséquent, il est proposé de créer une zone de développement 4 B sur la totalité des parcelles nos 7466 et 5378, et sur une partie de la parcelle no 7453, d'une surface totale d'environ 12'900 m2. Le plan localisé de quartier n° 28573-515 mis simultanément à l'enquête publique définit plus précisément l'aménagement de ce périmètre.

En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité II aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone de développement 4 B nouvellement créée.

L'enquête publique ouverte du 25 août au 24 septembre 1993 n'a provoqué qu'une observation qui sera communiquée à la commission chargée de l'examen du projet de loi. Ce projet a été approuvé favorablement, 10 oui et 3 abstentions, par le Conseil municipal de la commune de Collonge-Bellerive, en date du 1er novembre 1993.

Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs pour lesquels nous soumettons le présent projet de loi à votre bienveillante attention.

Personne ne demande la parole en préconsultation.

Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton. 

PL 7057
10. Projet de loi de MM. Claude Blanc, John Dupraz et René Koechlin modifiant la loi d'application de la loi fédérale de l'aménagement du territoire (art. 22, alinéa 3, nouvelle rédaction). ( )PL7057

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, est modifiée comme suit:

Art. 22, al. 3 (nouvelle teneur)

3 Une autorisation de construire en vertu de la nouvelle zone peut être subordonnée à l'adoption d'un plan localisé de quartier.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le Grand Conseil, lors de la dernière législature, a procédé à différentes modifications de dispositions légales, afin de donner aux autorités communales un pouvoir d'initiative en matière d'aménagement du territoire.

Plusieurs études en cours, menées conjointement entre les communes concernées et les travaux publics concernent les hameaux. L'article 22 de la LALAT fixe la procédure pour déclasser les hameaux en 4e zone rurale.

Le premier cas d'école est le hameau de Charrot sis sur le territoire de la commune de Bardonnex. Or, la commission de l'aménagement, en accord avec la commune, propose de déclasser ce site en 4e zone B protégée primaire puisque les possibilités de construire de nouveaux bâtiments sont peu nombreuses, puisqu'il ne s'agit pas d'un développement d'une nouvelle zone. Or, la loi actuelle impose un plan localisé de quartier. La commune n'en voit pas la nécessité et l'avis des députés est partagé sur ce point.

Afin de respecter la volonté de la commune, il est nécessaire d'introduire une souplesse dans la loi afin de ne pas rendre obligatoire le plan localisé de quartier dans le cas de Charrot ou pour de futurs déclassements de hameaux en zone 4 B. En fait, pour les villages sis actuellement en 4 B protégée, il n'est pas exigé un plan localisé de quartier pour obtenir une autorisation de construire; par similitude, pourquoi faudrait-il un tel plan pour les hameaux dont la typologie architecturale est la même que celle des villages en zone à bâtir ?

Telles sont, Mesdames et Messieurs les députés, les raisons pour lesquelles nous recommandons le présent projet de loi à votre approbation.

Personne ne demande la parole en préconsultation.

Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton. 

PL 6995-A
11. Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Bardonnex (création d'une zone de développement 4 B protégée). ( -) PL6995
 Mémorial 1993 : Projet, 4846. Commission, 4852.
Rapport de la majorité de M. Gérard Ramseyer (R), commission d'aménagement du canton
Rapport de la minorité de M. Jean-Luc Richardet (S), commission d'aménagement du canton

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

La commission d'aménagement du canton, sous la présidence de M. J.-L. Richardet, a traité de cet objet dans ses séances des 8, 22, 29 septembre, 13 et 20 octobre 1993.

Elle a effectué un transport sur place lors de sa séance du 13 octobre 1993.

Ont assisté à ces séances : M. le conseiller d'Etat Ch. Grobet (séances des 8.9.93 et 29.9.93), Mme S. Lin, cheffe de service du plan directeur, M. D. Mottiez, secrétaire adjoint et M. Brun, chef du service des plans de zone et de l'information (séance du 8.9.93), M. Schaffert, directeur de l'aménagement du canton (séance du 22.9.93), Mme Piguet, service monuments et sites (séance du 13.10.93) et MM. G. Gainon, chef de la division des plans d'affectation et Pauli, juriste (séances des 22.9, 29.9, 13.10 et 20.10.93).

La commission d'aménagement du canton a auditionné une première fois le 22 septembre 1993, Mme M.-L. Barthassat, maire de Bardonnex, et MM. A. Crettenand et G. Friess, adjoints, et une seconde fois le 13 octobre 1993 les mêmes personnes.

1. De quoi s'agit-il?

Charrot est l'un des cinq sites bâtis ou village qui composent l'entité communale de Bardonnex. C'est un hameau d'une quarantaine de bâtiments, sis de part et d'autre de la route de Foliaz. Le hameau se trouve en zone agricole. Depuis plusieurs années, la commune souhaite que ce hameau soit mis dans une zone à bâtir afin que son régime ne soit plus régi par les normes de la zone agricole.

Le hameau de Charrot fait partie de la trentaine de hameaux recensés par le département des travaux publics selon certains critères.

2. Quels sont les motifs qui animent la commune de Bardonnex?

Les familles habitant Charrot souhaitent que leurs enfants puissent habiter le hameau et, par conséquent, que le plan soit moins restrictif (déclaration mairie de Bardonnex, PV du 22.9.93).

L'autorité communale souhaite quant à elle équilibrer la commune, réaliser quelques villas ou transformations à Charrot en compensation des logements HLM créés à La Croix-de-Rozon (déclaration mairie de Bardonnex, PV du 13.10.93).

3. Quelles sont les mesures prises par la commune de Bardonnex?

Elle a lancé début 1989 une étude d'aménagement avec la collaboration d'un bureau d'urbanisme (ACAU). Objectif : «Examiner la possibilité de créer une zone à bâtir à Charrot et en énoncer les conditions».

Le département des travaux publics a été informé de cette initiative, il a activement participé à diverses séances de travail, en précisant d'emblée qu'il était favorable à la création d'une zone à bâtir pour le hameau de Charrot, vu ses dimensions. Le projet de plan du périmètre a été fixé en étroite collaboration entre la commune et le département des travaux publics.

La commune de Bardonnex a en outre organisé une large concertation avec les habitants concernés, qu'elle a rencontrés en séances d'information à quatre reprises de septembre 1988 à juin 1993.

Elle a enfin lancé, début 1990, un questionnaire aux habitants de Charrot pour connaître leurs besoins et intentions.

A noter au surplus que la commune de Bardonnex a procédé récemment à l'acquisition d'une ferme permettant d'envisager si nécessaire l'extension de l'école, de sorte qu'elle a ainsi paré sur le plan scolaire à un développement limité de Charrot.

4. Qu'est-il ressorti du débat sur le plan communal?

4.1. Le périmètre examiné par le bureau d'urbanisme était d'environ 60'000 m2 (étude détaillée du hameau et étude générale de son milieu environnemental, surface à ne pas confondre avec la zone à déclasser).

Ont été recensés en particulier 43 propriétaires dont 26 se sont exprimés en réponse au questionnaire de début 1990. Seuls 9 propriétaires, dont 3 agriculteurs, ont souhaité des constructions nouvelles. Il est ainsi démontré que le développement prévisible de Charrot devrait être particulièrement limité.

4.2. Le bureau d'urbanisme a proposé la délimitation ou la détermination de :

 un certain territoire qui n'est plus affecté à l'agriculture ;

 certaines «poches» pouvant être bâties ;

 certaines constructions désaffectées pouvant être adaptées à l'habitat (rénovations ou démolitions-reconstructions).

Il a proposé la délimitation fine et modérée d'une quatrième zone B protégée de développement sans qu'il s'agisse d'un plan localisé de quartier (présenté comme «long et coûteux à établir»).

4.3. La commune de Bardonnex a souhaité que le périmètre constructible ne soit pas trop restrictif.

4.4. L'Etat s'est référé au débat relatif au projet de loi 6254 sur les hameaux, a réitéré sa crainte d'abus suite à des déclassements purs et simples en zone hameau conduisant au grignotement de la zone agricole, ainsi que son souci de préserver le caractère et la qualité architecturale des hameaux en évitant la construction de nouveaux bâtiments (PV ACAU, séance du 31.5.89, annexe I au présent rapport).

4.5. Le bureau d'urbanisme a présenté le 29 mai 1990 à la commune de Bardonnex un rapport intermédiaire (annexe II au présent rapport) d'où il ressort que trois changements législatifs importants sont entre-temps intervenus. Pour mémoire, il s'agit :

a) de la nouvelle ordonnance fédérale LAT du 2 octobre 1989 sur les zones spéciales pour le maintien de petites entités urbanisées hors zones à bâtir ;

b) de la nouvelle formulation de l'article 22, alinéas 2-3 LaLAT adoptée par le Grand Conseil le 5 octobre 1989, texte portant sur les hameaux ;

c) du nouvel article 26 A LaLAT adopté par le Grand Conseil le 5 octobre 1989 traitant des changements d'affectation des bâtiments agricoles.

Pour mémoire, l'article 22, alinéas 2 et 3 LaLAT dispose :

«2 Lorsque la totalité ou une partie importante de hameaux constitués et situés en zone agricole n'est manifestement plus affectée à l'agriculture, le Grand Conseil peut la déclasser en quatrième zone rurale.

3 Une autorisation de construire en vertu de la nouvelle zone ne peut être délivrée tant qu'un plan localisé de quartier n'a pas été adopté».

Partant, le bureau d'urbanisme a proposé une alternative : maintenir Charrot hors zone à bâtir ou déclasser Charrot en quatrième zone rurale.

4.6. Ces travaux ont conduit au projet de loi 6995. Il ressort de l'exposé des motifs que «Charrot correspond en tous points aux critères retenus par le plan directeur cantonal» dans l'optique de l'application de l'article 22 LaLAT.

A noter que la zone à déclasser est in fine de 24'500 m2 seulement.

4.7.A noter aussi que le conseil municipal de Bardonnex a préavisé favorablement ce déclassement le 15 juin 1993 mais en demandant qu'il s'agisse d'un déclassement en zone 4 B protégée et non pas en zone de développement 4 B protégée.

5. Travaux en commission

5.1. Il apparaît d'emblée que le point de divergence entre la commune et l'Etat réside dans l'établissement d'un plan localisé de quartier ou non. Nonobstant les taxes à retirer pour la commune en raison de dépenses d'équipement (il est question d'une dépense d'environ 1 million, soit 50'000 F de taxe pour mise en séparatif de Charrot (PV du 8.9.93), la commune de Bardonnex estime avoir eu tellement de difficultés à mettre d'accord l'ensemble des habitants de Charrot que ce serait porter un coup fatal à ce projet que de reprendre les discussions dans le cadre de l'établissement d'un plan localisé de quartier.

 Le département des travaux publics fait valoir que «depuis une année, on revient à une simplification des plans localisés de quartier. Pour les hameaux, ce seront des périmètres d'implantation ; cet instrument devra être souple» (PV 8.9.93).

 L'entrée en matière est votée le 8 septembre 1993 par 6 oui (1 lib., 1 pdc., 3 soc., 1 pdt.) et 6 abstentions (1 lib., 2 rad., 1 mpg.). Il apparaît que les abstentions sont motivées par la volonté d'entendre auparavant l'autorité communale de Bardonnex.

5.2. L'audition de la commune de Bardonnex le 22 septembre 1993 confirme l'essence de la controverse. La commune de Bardonnex fait valoir le peu d'importance prévisible des transformations, aménagements ou constructions à Charrot ; elle en tire argument pour contester l'utilité en l'espèce d'une zone de développement. Elle s'appuie au demeurant sur l'opinion exprimée par les habitants de la commune.

 Plusieurs députés et représentants du département des travaux publics s'expriment en sens inverse. Ils relèvent le manque à gagner pour la commune, du fait que l'adoption d'une zone de développement implique la perception de taxes d'équipement auprès de ceux qui construisent. Les représentants du département des travaux publics rappellent que la commune de Bardonnex est une de celles qui demandent le plus de subventions (PV 29.9.93) et que l'adoption d'un plan localisé de quartier n'est pas exclusivement liée à la zone de développement. Ils font enfin remarquer qu'en cas de recours entre propriétaires, les procédures sont beaucoup plus longues en l'absence de plan localisé de quartier. Est évoqué le retour devant le Conseil municipal de la commune de Bardonnex s'il y a abandon du plan localisé de quartier. Il est aussi rappelé que le département des travaux publics avait envisagé pour Charrot un plan localisé de quartier plus souple, se bornant à fixer des périmètres d'implantation des bâtiments avec fixation des gabarits.

En définitive, le département des travaux publics s'oppose, par souci de cohérence législative, à l'abandon de la notion de plan localisé de quartier que le Grand Conseil a voulu pour la création de zones à bâtir affectées à des hameaux. Il admet ensuite que si la notion de zone de développement ne s'applique pas automatiquement aux hameaux, le potentiel constructible de Charrot est précisément d'une certaine importance, ainsi que le prouve l'extension du périmètre «allant au-delà du site bâti» (PV 29.9.93). Il se fonde sur le fait que Charrot est un cas d'école pour expliquer sa prudence en l'espèce. Il mentionne enfin que la pratique des plans localisés de quartier s'est affirmée ces dernières années en relevant que le Grand Conseil a presque toujours prévu des zones de développement lors de la création de nouvelles zones à bâtir.

La question se pose alors de la réduction du périmètre à déclasser (pourtant établi d'un commun accord entre la commune et l'Etat, malgré un avis de la CMNS, plus restrictive) pour bien montrer le souci du législateur d'éviter la création d'un potentiel à bâtir supplémentaire trop important. Une autre idée serait de n'appliquer les normes de la zone de développement qu'aux terrains libres de constructions, idée qui pourrait recevoir l'aval du département des travaux publics (PV 29.9.93).

Le département des travaux publics indique que sur 40 propriétaires, le projet n'a rencontré aucune opposition mais que sont arrivées 5 demandes d'extension du périmètre.

5.3. La nouvelle audition de la commune de Bardonnex le 13 octobre 1993 n'apporte pas d'éléments nouveaux. L'autorité communale réaffirme la volonté populaire s'opposant au principe d'un plan localisé de quartier.

Il appert en outre que les surfaces concrètement constructibles à déclasser n'atteignent en fait que 3'000 m2, que dès lors le péril d'une spéculation est ipso facto exclu par le grand nombre de petits propriétaires et qu'en conséquence, l'établissement d'une zone de développement n'apparaît pas comme judicieux.

Il ressort de la discussion que d'autres mesures atteindraient le même but qu'un plan localisé de quartier, à savoir le déclassement en zone protégée avec au besoin, par secteur, un plan de site. Il apparaît surtout que la commune souhaiterait que le département des travaux publics se montre souple dans ce cas d'espèce en respectant au mieux d'une part la volonté communale, d'autre part l'énorme travail de concertation qu'elle a conduit avec les habitants.

5.4. Dans un premier vote, il est renoncé à la notion de «zone de développement» à l'article 1 du projet de loi 6995 par 8 oui (3 lib., 2 rad., 2 pdc., 1 mpg.) et 6 abstentions (2 soc., 2 peg., 2 pdt.).

Un second vote porte sur l'adjonction d'un «A» après le numéro de plan et la date, cette adjonction est acceptée par 8 oui (idem) et 6 abstentions (idem).

Un troisième vote porte sur un amendement (lib.) visant à déroger à l'article 22 LaLAT en n'exigeant pas un plan localisé de quartier. Cet amendement est refusé par 7 voix (2 rad., 2 soc., 1 peg., 2 pdt.) contre 6 (3 lib., 2 pdc., 1 mpg.).

Sont alors annoncés 2, voire 3 rapports de minorités.

6. Discussions ultérieures

Le 20 octobre 1993, le rapporteur fait remarquer qu'après avoir évacué le problème du plan localisé de quartier en refusant le principe d'une zone de développement, on est tout de même retombé sur un plan localisé de quartier à teneur de l'article 22, alinéa 3 LaLAT de sorte que la commune de Bardonnex a tous les inconvénients d'un plan localisé de quartier sans en avoir les profits, alors même qu'elle obtient satisfaction dans la mesure où le hameau de Charrot est déclassé en zone ordinaire!

Le rapporteur souhaite en outre éviter que soient déposés plusieurs rapports de minorités, ce qui pourrait démontrer que le travail en commission doit être repris, alors même que la commission souhaitait en terminer à l'issue de la législature en cours.

La fraction libérale annonce qu'elle ne fera pas de rapport de minorité, mais qu'elle déposera un amendement en séance plénière, reprenant l'amendement refusé en commission qui, pour mémoire, portait sur une dérogation à l'article 22 LaLAT par la suppression dans le cas présent de l'exigence d'établir un plan localisé de quartier.

Le rapport de minorité de la fraction peg. est annoncé comme maintenu, il porterait uniquement sur la notion d'atteinte aux surfaces d'assolement.

De manière générale cependant, la commission d'aménagement du canton souhaite que l'Etat fasse preuve de souplesse et de nuance dans les mesures qu'il pense appliquer au hameau de Charrot.

L'énoncé par le département des travaux publics de mesures satisfaisantes dans le sens d'une simplification du plan localisé de quartier et d'une application souple telles qu'évoquées le 8 septembre 1993 pourrait permettre le vote de ce plan localisé de quartier sans autres atermoiements.

C'est sous cette réserve, néanmoins capitale, que la majorité de la commission d'aménagement du canton vous recommande l'acceptation du projet de loi qui vous est soumis.

Annexe II -

PV séance commune de travail du 31 mai 1989.

Annexe II -

Rapport intermédiaire à l'intention de la commune du bureau de l'urbanisme.

PROJET DE LOI

modifiant le régime des zones de constructionsur le territoire de la commune de Bardonnex(création d'une zone 4 B protégée)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit :

Article 1

1 Le plan n° 28542A-505, dressé par le département des travaux publics le 1er février 1993, modifié le 13 octobre 1993, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Bardonnex (création d'une zone 4 B protégée, au hameau de Charrot), est approuvé.

2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.

Art. 2

En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone créée par le plan visé à l'article 1.

Art. 3

Un exemplaire du plan n° 28542A-505 susvisé, certifié conforme par le président du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.

BLANCHE

ANNEXE I

ANNEXE II

RAPPORT DE LA MINORITÉ

En commission, le groupe socialiste s'est abstenu sur le vote concernant le changement d'affectation de zone du hameau de Charrot, bien qu'il soit favorable sur le principe d'une régularisation de la zone préexistante agricole en zone constructible. Si les élus socialistes partagent avec la majorité de la commission l'objectif du projet de loi, ils s'en distancent néanmoins quant aux moyens pour y parvenir.

L'objectif de ce rapport de minorité est d'une part, de préciser la position du groupe socialiste et d'autre part, de mettre en exergue un certain nombre de considérants qui devraient faire l'objet d'un réexamen attentif de la part du législateur.

Préambule

Au cours de cette dernière décennie, s'il y a un sujet qui a suscité bien des controverses, c'est celui des hameaux. En effet, placé en zone non constructible au sens de la loi fédérale de l'aménagement du territoire, leur adaptation, aménagement ou développement s'est heurté aux dispositions législatives tant fédérales que cantonales.

La problématique est politiquement délicate et mérite à la fois une réflexion sur le fond ainsi qu'une pesée d'intérêts sur l'ensemble du sujet. C'est la raison pour laquelle, votre serviteur a choisi de présenter son rapport de minorité en le situant au sens large dans son contexte d'ensemble.

Cela permettra aux nouveaux élus de se familiariser avec la législation fort complexe régissant l'aménagement du territoire, exception faite pour ce vieux «briscard» de John Dupraz, «praticien» en la matière et à ses heures «consultant» en droit!

A.

LE CONTEXTE

Le contexte historique

Dans notre canton, la zone agricole a été créée en 1952. Avant cette date, elle était réglée par les normes de construction de la 5e zone en vigueur à cette époque. C'est la raison pour laquelle près de quatre-vingt maisons isolées sont situées en zone non constructible.

Lorsqu'en 1961 une délimitation précise est intervenue pour définir les périmètres de la zone 4 B protégée, tous les villages genevois y furent englobés. Pratiquement toutes les écoles, les temples et églises ainsi que les équipements communaux étaient inclus dans les zones villageoises.

Les hameaux et bourgs constitués demeurèrent alors en zone agricole. Ils étaient en fait des groupes d'habitations rurales avec leurs dépendances telles que les granges et écuries.

Depuis 1961, l'urbanisation s'est poursuivie à l'intérieur des périmètres situés en zone 4 B protégée. Dans de nombreux villages, la vocation résidentielle a pris le pas sur l'affectation agricole, et plusieurs de ceux-ci situés en zone 4 B protégée ont aujourd'hui un caractère essentiellement résidentiel, voire même urbain. Bernex en est l'exemple le plus frappant.

Pour leur part, une trentaine de hameaux sont restés en zone agricole et n'ont subi que peu de modification. Ils ont conservé pour la majorité d'entre eux, leur caractère rural. Quelques transformations ponctuelles sont intervenues, autorisées selon les dispositions en vigueur avant l'entrée en force de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LAT) du 22 juin 1979 et sa loi d'application cantonale (LaLAT) du 4 août 1987. Il était alors possible de faire application par analogie, et à titre exceptionnel, aux dispositions de la zone 4 B protégée.

Toutefois, ces dernières années, une analyse objective de la situation force à reconnaître que certains «appétits» se sont fait jour sur les possibilités à bâtir que pourraient représenter ces hameaux. Les bâtiments et les volumes existants constituent parfois déjà, à eux seuls, un potentiel sur lequel certains ne se font pas faute de miser. De là provient pour partie la désaffectation de certaines installations agricoles, comme à la Petite Grave à Vessy.

Le contexte législatif

L'article 24 de la loi fédérale de l'aménagement du territoire (LAT), règle l'admissibilité à titre exceptionnel de projets de constructions et d'installations situés hors de la zone à bâtir, dont la destination ne concorde pas avec l'affectation de la zone de fond ce qui est le cas des hameaux.

Il dispose ce qui suit :

Art. 24

Exceptions prévues hors de la zone à bâtir

1 En dérogation à l'article 22, 2e alinéa, lettre a, des autorisations peuvent être délivrées pour de nouvelles constructions ou installations, ou pour tout changement d'affectation, si :

a) l'implantation de ces constructions ou installations hors de la zone à bâtir est imposée par leur destination ;

b) aucun intérêt prépondérant ne s'y oppose.

2 Le droit cantonal peut autoriser la rénovation de constructions ou d'installations, leur transformation partielle ou leur reconstruction pour autant que ces travaux soient compatibles avec les exigences majeures de l'aménagement du territoire.

La réglementation du premier alinéa est exhaustive. En vertu du droit fédéral, elle s'applique à la totalité du territoire national. L'alinéa 2 habilite les cantons à autoriser exceptionnellement certains projets de construction de moindre importance à des conditions bien spécifiques.

La portée d'un projet de construction vu sous l'angle de l'aménagement du territoire, est défini de la manière suivante par l'article 24 LAT :

 les nouvelles constructions ou projets de construction assimilables à de nouvelles constructions ; ces derniers correspondent à des travaux de construction portant sur des constructions et installations existantes et qui équivalent à de nouvelles constructions eu égard à leurs effets sur l'affectation du sol, l'équipement ou l'environnement ;

 les rénovations, transformations partielles ou reconstructions ; sont visés par là des travaux de construction de portée mineure qui préservent pour l'essentiel l'ouvrage existant, sans remettre en cause son identité et sans en prolonger la durée de vie normale.

En 1988, lors de la révision générale des lois cantonales concernant les constructions et l'aménagement du territoire (LaLAT, LCI, LZD) le Grand Conseil a remplacé l'article 18 de l'ancienne loi sur les constructions et les installations diverses du 25 mars 1961 par un article 22 LaLAT réservant un régime juridique spécifique aux hameaux situés en zone agricole. Depuis lors, le département des travaux publics a appliqué les normes de la 4e zone dans la mesure où il n'en résulte pas d'inconvénients pour la salubrité des habitations et l'aspect des localités et qu'aucun intérêt prépondérant de l'agriculture ne soit lésé.

Cette disposition a inévitablement engendré des conflits entre l'autorité et certains propriétaires fonciers. La preuve en est que le Tribunal fédéral a eu à trancher pour l'ensemble du territoire helvétique plus d'une centaine de cas.

Il n'est point besoin de rappeler que la LAT est extrêmement restrictive en la matière. Pour illustrer la rigidité de sa portée, le rapporteur de minorité a relevé quelques arrêts significatifs du Tribunal fédéral (période 1980-1985).

Démolition partielle d'un rural et construction de remplacement

Demande de permis :

Démolition partielle du bâtiment d'exploitation d'un rural et remplacement par une annexe à des fins d'habitation.

Motif du refus :

Le rural est en passe de devenir une véritable maison. Le projet ne saurait représenter une extension minime : il y a agrandissement de près du double de l'ancienne partie d'habitation. L'identité du bâtiment existant n'est pas conservée (le projet est à considérer comme une nouvelle construction qui, en l'espèce, n'a pas d'emplacement imposé).

Bâtiment d'habitation pour le fermier

Demande de permis :

Construction, hors de la zone à bâtir, d'une maison d'habitation pour un fermier.

Motif du refus :

Le terrain agricole en question peut être exploité sans difficulté depuis la maison du fermier située à 1 km. Une présence durable sur place n'est pas nécessaire pour l'exploitation rationnelle de la parcelle en cause. L'implantation du bâtiment d'habitation projeté n'est donc pas imposée par sa destination.

Agrandissement d'une maison de vacances

Demande de permis :

Transformation, par étape, en une maison de vacances de 9 pièces d'une étable sise hors de la zone à bâtir et comportant une petite partie habitable.

Motif du refus :

Un bâtiment situé hors de la zone à bâtir ne peut être agrandi qu'une seule fois et dans une mesure modeste. En l'espèce, il ne s'agit plus d'une transformation partielle ; la nouvelle construction doit donc être appréciée au regard des conditions de l'article 24, 1er alinéa LAT. Pas d'emplacement imposé.

Reconstruction d'une maison de vacances

Demande de permis :

Edification hors de la zone à bâtir d'un pavillon de vacances, pour compenser la démolition prévue d'annexes à un autre bâtiment situé à une distance de 35 mètres.

Motif du refus :

La substance en soi du bâtiment existant n'est pas maintenue ; le bâtiment de remplacement ne peut être considéré comme une reconstruction. Il est à traiter comme une nouvelle construction dont l'implantation n'est pas imposée par sa destination.

Reconstruction d'un chalet après un incendie

Demande de permis :

Reconstruction d'un chalet de vacances détruit par un incendie.

Motifs du refus :

La garantie de la propriété (art. 22 ter et 22 quater de la constitution) ne confère pas le droit au propriétaire de réutiliser à des fins de construction un emplacement où ont déjà été érigés des ouvrages ni de conserver au-delà de sa «durée de vie» un ouvrage convenablement entretenu.

La reconstruction du chalet en question n'est pas autorisée, car elle n'est pas compatible avec les exigences majeures de l'aménagement du territoire, en particulier celles de la protection du paysage.

La pratique du département des travaux publics

Comme on l'a vu précédemment, notre droit cantonal autorise dans une certaine mesure une nouvelle affectation des bâtiments ou une transformation, pour autant qu'elle soit compatible avec les exigences majeures de l'aménagement du territoire.

Le régime dérogatoire a donné satisfaction et a permis de maîtriser au cours de ces dernières décennies le développement des hameaux de manière plus satisfaisante que celui de certains villages.

Toutefois, dans ce contexte législatif, la marge de manoeuvre du département des travaux publics est relativement faible. Contrairement à certaines idées préconçues, le département a fait preuve d'une relative souplesse quant à l'application de ses dispositions qui sont, rappelons-le, toutes susceptibles de recours. Pour s'en convaincre, il suffit de se référer à l'arrêt du Tribunal administratif du 22 mars 1989 en la cause Rochat-Vecchio. Cet arrêt a d'une part le mérite de clarifier la portée de la notion de transformation et de changement d'affectations et d'autre part de confirmer la pratique en la matière du département des travaux publics.

Il en donne les définitions suivantes :

A. Un agrandissement ou une transformation intérieure est partielle. La destination de l'ouvrage reste inchangée lorsque les modifications apportées à l'aspect extérieur (dimensions, formes, proportions) et à l'organisation intérieure du bâtiment paraissent, aux yeux d'un observateur neutre, s'intégrer logiquement au bâtiment dans le cadre de l'affectation de la zone. Ces travaux ne doivent pas avoir pour effet de créer un ouvrage qui n'a plus de rapport avec l'immeuble primitif.

B. Un changement d'affectation est partiel. La forme et l'aspect extérieurs du bâtiment restent inchangés pour autant qu'il n'en résulte pas une modification notable des possibilités d'utilisation. Cela signifie que le bâtiment dont on prévoit de changer l'affectation doit au moins avoir été partiellement prévu pour la nouvelle finalité envisagée. L'utilisation actuelle et celle qui est prévue doivent en outre exercer des effets sensiblement identiques. L'affectation de locaux à des besoins de logements doit en règle générale être considérée comme étant fortement divergente des autres modes d'utilisation.

On peut considérer que le changement d'affectation est partiel notamment lorsqu'un bâtiment jusque-là partiellement habité est transformé pour être destiné principalement à l'habitation.

L'évolution de la législation cantonale depuis 1989

Peu satisfait de cette situation équivoque qui consiste à tolérer des sites partiellement urbanisés en zone non constructible, le Grand Conseil renvoyait au Conseil d'Etat, en date du 4 novembre 1988, la motion 390-A qui l'invitait à examiner, à la demande des communes, dans quelle mesure certains hameaux pourraient être intégrés dans la zone à bâtir.

Dans un deuxième temps, le législatif cantonal a voté, le 5 octobre 1989, la loi 6276-A accordant un statut juridique aux constructions existantes situées hors zone à bâtir en leur appliquant les normes de la 5e zone (art. 26 A nouveau) et créant une zone spécifique pour les hameaux (art. 22 nouveau).

Simultanément et toujours à cette même date, en adoptant la loi 6254-A, le Grand Conseil a complété l'article 22 LaLAT par l'adjonction des alinéas 2 et 3, présentés ci-dessous :

La loi 6254-A

Le 27 septembre 1988 les députés libéraux Erbeia, Koechlin et Vodoz déposèrent un projet de loi demandant la modification de l'article 22 de la LaLAT.

Les discussions tant en commission qu'en séance plénière furent l'objet de rudes débats portant tant sur le fond que sur la forme de la proposition libérale (p. 6036 du mémorial).

Votre serviteur opposé à ce projet de loi avait défendu la position des partis socialiste, du travail et écologiste par un rapport de minorité. Il avait reproché l'inutilité de la portée du deuxième alinéa qui fixe dans une loi-cadre l'attribution au Grand Conseil des modifications des régimes de zone qui sont de toute façon de son exclusive compétence à teneur des articles 12 et 15 de la même loi. Par ailleurs, le sussigné avait également reproché au parti libéral, qui se veut être le champion de la simplification législative, combien il est superflu d'inscrire dans le recueil systématique une loi qui ne déploie aucun effet.

Toutefois, la principale divergence portait sur le troisième alinéa.

En commission, la majorité a accepté un amendement proposé par le Conseil d'Etat remaniant le troisième alinéa du projet de loi en adaptant l'assujettissement du déclassement à une zone protégée par le choix de la règle du plan localisé de quartier.

La minorité s'opposait à l'inscription dans la législation de la règle obligatoire de l'adoption préalable d'un plan localisé de quartier à la délivrance d'une autorisation de construire. En guise de conclusion, le sussigné relevait dans son rapport de minorité que :

«Ce projet de loi n'est pas susceptible d'apporter des solutions satisfaisantes à l'aménagement des hameaux. Bien au contraire, il pourrait desservir les intérêts de certains requérants en allongeant le temps d'instruction des autorisations de construire, celles-ci ne pouvant être délivrées préalablement à l'adoption d'un plan localisé de quartier.»

Dans sa coutumière prudence, la majorité du législatif a trouvé la position de la minorité irrelevante et le Grand Conseil votait, le 5 octobre 1989, la loi ainsi rédigée :

Art. 22, al. 2 et 3 (nouveaux)

2 Lorsque la totalité ou une partie importante de hameaux constitués et situés en zone agricole n'est manifestement plus affectée à l'agriculture, le Grand Conseil peut la déclasser en 4e zone rurale.

3 Une autorisation de construire en vertu de la nouvelle zone ne peut être délivrée tant qu'un plan localisé de quartier n'a pas été adopté.

La définition d'un hameau au sens de l'aménagement du territoire

En 1984, la commission cantonale d'urbanisme du canton en étroite collaboration avec le service des monuments et des sites, a procédé à une réflexion sur les bourgs et hameaux.

Au sens étymologique du terme, le hameau est un «groupement de quelques maisons situé en dehors de l'agglomération principale d'une commune».

Cette définition n'étant pas une base suffisante pour adopter une attitude cohérente en matière d'aménagement du territoire, la commission cantonale d'urbanisme a tenté de déterminer les critères définissant un hameau.

Pour la commission d'urbanisme du canton, ce sont :

 L'ancienneté :

 La carte Siegfried (1897-1899) fait office de référence pour se prononcer sur l'âge de ces groupements d'habitations. Seuls les hameaux figurant avec au moins 5 constructions répondent à ce critère.

 La continuité :

 C'est une condition indispensable à la prise en considération d'un hameau. Les parties de villages situées hors de la zone à bâtir sont comptées comme un hameau.

 Le nombre de propriétaires :

 Un hameau doit compter au minimum deux propriétaires.

 Le nombre d'habitations principales :

 Un hameau doit compter au moins 5 habitations principales (résidences permanentes).

Selon ces critères, la commission d'urbanisme définit un hameau sous cette forme :

«Groupement continu d'au moins 5 maisons, comptant au minimum 25 habitants, situé en dehors du ou des villages principaux d'une commune, de formation ancienne et portant un nom propre.»

Selon ces considérations, la commission d'urbanisme a recensé 31 hameaux dans notre canton.

Il est intéressant de relever que l'activité agricole reste prédominante dans quatre hameaux, dans huit autres les constructions affectées à l'agriculture et celles qui ne le sont pas sont en proportions équivalentes. Pour le solde, soit 19 hameaux, les constructions étrangères à l'agriculture sont en majorité.

B.

LE PROJET DE LOI 6995MODIFIANT LE RÉGIME DES ZONES DE CONSTRUCTIONà CHARROT

Position du parti socialiste

Le groupe socialiste est favorable à la régularisation du régime des zones des hameaux par le «toilettage» des plans de zone en adaptant le régime légal à la situation de fait. Rappelons que ce principe est inscrit dans le Plan directeur cantonal adopté par le Grand Conseil le 15 septembre 1989 et approuvé par le Conseil fédéral en date du 24 mai 1991. Cohérents avec ce précepte, les socialistes ont voté l'entrée en matière du projet de loi précité. Toutefois, ils se sont abstenus lors du vote sur l'ensemble dudit projet de loi marquant ainsi leur improbation sur un certain nombre d'appréciations aux principes essentiels.

Zone ordinaire ou de développement

En 1957, le Grand Conseil a mis en place la loi sur le développement de l'agglomération urbaine. Sous l'impulsion de l'ancien conseiller d'Etat Emile Dupont, le législateur de l'époque, par l'adoption de cette loi, a voulu se donner les moyens permettant à la fois d'augmenter la surface de l'agglomération urbaine mais également permettre la restructuration de zones déjà construites. Dès lors, l'essence de la loi demeure entière.

Les hameaux se trouvent pour la plupart sur le territoire de communes aux faibles ressources fiscales ; le déclassement en zone de développement leur permettrait de prélever une taxe d'équipement.

Il n'est pas inutile de rappeler que la «taxe d'équipement» est une charge de préférence prélevée auprès des constructeurs en contrepartie des avantages économiques qu'ils retirent de l'équipement des infrastructures publiques. Rangée au nombre des contributions causales, elle constitue donc une participation des utilisateurs aux dépenses consenties à cet effet par la collectivité locale.

Le Conseil municipal de la commune de Bardonnex a demandé, par son préavis, que le déclassement soit mis au bénéfice de la zone ordinaire, privant ainsi la perception dans le temps d'une taxe au profit de la collectivité communale estimée par le département des travaux publics à quelque 50'000 F.

Toutefois, l'objection de la commune porte plus sur l'astreinte de l'obligation d'adopter un plan localisé de quartier en zone de développement que sur le recouvrement d'une taxe, d'où sa proposition de la zone ordinaire.

La plus-value foncière

Par une simple mesure d'aménagement, la valeur des terrains libres de construction est démultipliée par un facteur allant de 1 à 30 (de 12-15 F à 400-500 F). Il y va de l'équité fiscale que quiconque bénéficiant du déclassement d'un terrain sis en zone non constructible en zone constructible, bonifiant de ce fait son patrimoine foncier par un acte législatif, soit imposé sur la plus-value du bien-fond. Ce fait est d'autant plus perceptible pour les parcelles répertoriées dans les surfaces d'assolements (SDA), comme le sont celles nos 2373 et 2802 situées au sud-est du village de Charrot.

L'initiative populaire 21 (non formulée) du parti du travail «Halte à la spéculation foncière», déposée en chancellerie le 8 février 1988 dont le volet concernant l'aménagement du territoire est toujours à l'étude à la commission d'aménagement, peut être une réponse à cette disparité fiscale.

Mesure d'aménagement du territoire

Si la mesure du plan localisé de quartier est un moyen à la fois contraignant et peu adapté au lent développement dans le temps d'un groupement d'habitations, souvent en mains de familles, celle de la délivrance d'autorisations de construire par de simples règles de police des constructions n'est pas une norme satisfaisante en soi.

Le développement des hameaux ne doit pas se faire au détriment de leur valeur urbanistique et architecturale ni porter atteinte au site. La création de clôtures, la plantation de haies (de thuyas), l'aménagement de places de parcage, la construction de piscines, la réalisation de courts de tennis, voire de garages, etc. sont des éléments de nature à modifier profondément, à terme, le caractère campagnard des paysages genevois demeurés jusqu'à aujourd'hui caractéristiques et significatifs de notre patrimoine rural.

Dès lors, le Grand Conseil doit compléter dans une loi-cadre les dispositions de l'article 22 LaLAT fixant les mesures appropriées permettant le déclassement des hameaux ou, à tout le moins, doit être prescrit par un règlement d'application.

Le déclassement partiel du hameau de Bonvard (PL 6993-A) et sa motion 879 subséquente demandant l'extension de son périmètre, tout comme celui de Charrot, démontre que la législation cantonale doit faire l'objet d'un réaménagement.

Position du parti socialiste

Le parti socialiste a combattu l'obligation de l'adoption du plan localisé de quartier pour les hameaux. Cette disposition est nettement moins appropriée que celle de l'approbation d'un plan de site qui souligne la sauvegarde du caractère agreste de la campagne genevoise, voire l'adoption d'un plan directeur du hameau établi sur le modèle de ceux prévus en zone de développement industrielle, qui se caractérise par la souplesse des directives fixant les normes de développement.

A tout le moins, un plan d'affectation, quelle que soit sa forme, doit fixer la nature, l'étendue et la destination des constructions ou transformations autorisables. Quant à l'instruction de leur procédure d'adoption, elle devrait se faire simultanément à celle de la modification du régime de zone.

Ne disposant pas d'équipements adaptés à l'arrivée d'une population nouvelle, le peuplement de ces hameaux nécessiterait immanquablement la mise à disposition de nouveaux équipements et infrastructures publics. Les hameaux se trouvent pour la plupart sur le territoire de communes rurales aux faibles ressources fiscales. Dès lors, si le Grand Conseil veut régulariser la zone de fond des hameaux, il devra tôt ou tard légiférer pour instituer la perception d'une taxe d'équipement en zone ordinaire.

Cette hypothèse avait été envisagée lors d'un déclassement de terrains situés en zone agricole sur le territoire de la commune de Choulex (loi 5957 du 3 juin 1988). A cette époque, M. Michel Ducret, juriste auprès de la police des constructions (à ne pas confondre avec son homonyme Michel Ducret, le sémillant néo-élu radical), avait émis un avis de droit à l'attention de la commission d'aménagement, dont les conclusions étaient les suivantes :

«L'institution d'une taxe d'équipement lors d'une modification de régime d'une zone ordinaire est juridiquement envisageable.

Le législateur doit cependant fixer simultanément les éléments nécessaires à la taxation, c'est-à-dire énoncer :

 les catégories d'ouvrages publics pris en considération ;

 le mode de calcul du coût de ces ouvrages ;

 les critères de calcul de la contribution prélevée auprès de leurs utilisateurs ;

 le mode de perception ;

 les catégories de «contribuables» ;

 les voies de recours,

dont la détermination suppose une étude d'ordre technique et financier appropriée.

Si l'on veut progresser dans l'élaboration d'un projet de loi ad hoc, il convient donc qu'une telle étude soit préalablement menée à chef».

C. CONCLUSIONS

Pour les hameaux, le parti socialiste est favorable à la régularisation de la zone préexistante agricole en zone constructible par l'adaptation du plan cantonal du régime des zones. Toutefois, cette mesure d'aménagement du territoire doit faire preuve de mesure et d'équité tout en ne portant pas atteinte à la zone agricole du fait de la pression foncière exercée sur les exploitations agricoles placées dans les hameaux par les propriétaires qui pourraient être tentés de les déplacer sur leurs terres aujourd'hui exploitées.

L'absence de base légale permettant le prélèvement d'une taxe d'équipement en zone ordinaire, l'impossibilité d'imposer la plus-value foncière et surtout la volonté sous-jacente de soustraire l'essor des hameaux à un plan d'aménagement, fait peser à long terme sur ces derniers un risque de modifier leurs caractères agrestes. Le déclassement du hameau de Charrot n'est que le premier d'une longue liste et a donc valeur d'exemple.

Telles sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés et chers anciens collègues, les raisons pour lesquelles le groupe socialiste, bien que favorable sur le principe de déclassement proposé, s'est abstenu en commission, car sur le vote d'ensemble de la loi, toutes les conditions endogènes ne sont pas encore réunies pour qu'il se rallie à la majorité de ce Grand Conseil.

Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton. 

PL 6997-A
12. Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant le plan d'extension n° 21795-136 du quartier de Contamines, sur le territoire de la Ville de Genève, section Eaux-Vives. ( -) PL6997
 Mémorial 1993 : Projet, 4858. Commission, 4864.
Rapport de M. René Koechlin (L), commission d'aménagement du canton

Sous la présidence de M. Jean-Luc Richardet, la commission d'aménagement a examiné les 29 septembre et 6 octobre 1993 le projet de loi cité sous rubrique. Assistaient à cet examen MM. Christian Grobet, conseiller d'Etat chargé du département des travaux publics, Georges Gainon, chef de la division des plans d'affectation et Jean-Claude Pauli, juriste attaché audit département.

Le projet, qui a pour objet de modifier le plan d'extension cité en titre, relève de la politique visant à mieux utiliser les zones urbaines en accroissant la densité de certains périmètres sans porter préjudice à la qualité de leur aménagement notamment des points de vue écologique, urbanistique et architectural.

La modification proposée comportait initialement, outre l'extension ouest de l'immeuble situé au sud de la composition, deux bâtiments ponctuels, dans le square, dont un édifice de cinq étages sur l'avenue Krieg. Cette solution parut trop «envahissante» aux commissaires qui demandèrent con-sensuellement de réduire le nombre d'étages de ce dernier et de supprimer l'autre qui occupait le centre de l'espace et en altérait les dégagements et l'unité.

M. Grobet fit alors part aux députés de l'avis de la commission d'urbanisme dont les conclusions vont précisément dans le sens qui vient d'être évoqué, à savoir: d'accepter la prolongation de l'immeuble sud, d'implanter le bâtiment central affecté à des activités culturelles en lieu et place de l'édifice donnant sur l'avenue Krieg et de supprimer ce dernier.

Au plan formel, il est suggéré de proposer au Grand Conseil de modifier le plan d'extension plutôt que de l'abroger et de le remplacer par un autre.

Après un bref échange de vues, la commission à l'unanimité accepte de prendre en considération le projet de loi modifié comme indiqué ci-dessus et de l'adopter dans son ensemble. Elle vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à la suivre dans ses conclusions.

PL 6997-A

PROJET DE LOI

modifiant le plan d'extension n° 21'795-136 du quartier de Contaminessur le territoire de la Ville de Genève, section Eaux-Vives

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

Le plan n° 21'795-136, dressé par le département des travaux publics, le 3 février 1947, et adopté par le Grand Conseil comme plan d'extension le 12 janvier 1952 est modifié comme suit:

a) le bâtiment portant les nos 382 à 385, situé le long de la rue Michel-Chauvet, sur la parcelle n° 1746, feuille n° 36 du cadastre de la Ville de Genève, section Eaux-Vives, peut faire l'objet d'une extension à destination de logement en direction du nord-ouest sur une longueur maximum de 18 m, au même gabarit et sur la même largeur.

b) la construction basse située le long de la rue Michel-Chauvet devant le bâtiment visé à l'alinéa précédent peut faire l'objet d'une extension à destination de bureaux en direction du nord-ouest sur une longueur maximum de 18 m, au même gabarit et sur la même largeur.

c) la partie des parcelles nos 1748 et 1780, située en bordure de l'avenue Krieg, peut comporter un bâtiment à destination d'un centre culturel ou d'intérêt public, d'un étage sur rez-de-chaussée et d'une surface maximale de 700 m2 de plancher.

Premier débat

M. René Koechlin (L), rapporteur. Je voudrais signaler qu'il y a une petite erreur de frappe à la page 3 du rapport, lettre c. Il s'agit d'un centre cultuel et non culturel.

Le président. Nous avons pris note de l'amendement de M. Koechlin consistant à remplacer culturel par cultuel.

Ce projet ainsi amendé est adopté en trois débats dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue:

LOI

modifiant le plan d'extension n° 21'795-136 du quartier de Contaminessur le territoire de la Ville de Genève, section Eaux-Vives

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

Le plan n° 21'795-136, dressé par le département des travaux publics, le 3 février 1947, et adopté par le Grand Conseil comme plan d'extension le 12 janvier 1952 est modifié comme suit:

a) le bâtiment portant les nos 382 à 385, situé le long de la rue Michel-Chauvet, sur la parcelle n° 1746, feuille n° 36 du cadastre de la Ville de Genève, section Eaux-Vives, peut faire l'objet d'une extension à destination de logement en direction du nord-ouest sur une longueur maximum de 18 m, au même gabarit et sur la même largeur.

b) la construction basse située le long de la rue Michel-Chauvet devant le bâtiment visé à l'alinéa précédent peut faire l'objet d'une extension à destination de bureaux en direction du nord-ouest sur une longueur maximum de 18 m, au même gabarit et sur la même largeur.

c) la partie des parcelles nos 1748 et 1780, située en bordure de l'avenue Krieg, peut comporter un bâtiment à destination d'un centre cultuel ou d'intérêt public, d'un étage sur rez-de-chaussée et d'une surface maximale de 700 m2 de plancher.

 

PL 7045-A
13. Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat portant désaffectation d'une partie du domaine public de la Ville de Genève sise au carrefour de la rue de Montbrillant et de l'avenue de France, sur la commune de Genève, section Petit-Saconnex, feuille 80. ( -) PL7045
 Mémorial 1993 : Projet, 7163. Commission, 7164.
Rapport de M. René Koechlin (L), commission d'aménagement du canton

Lors de sa séance du 1er décembre 1993, la commission d'aménagement, sous la présidence de M. Hervé Dessimoz, a étudié le projet de loi cité en titre. Assistaient à la séance: M. Christian Grobet, conseiller d'Etat chargé du département des travaux publics et M. Georges Gainon, chef de la division des plans d'affectation.

La réaffectation du domaine public au domaine privé est, en vertu de la loi, de la compétence du Grand Conseil. C'est ce qui motive le présent projet de loi.

M. M. Ch. Grobet explique à la commission que la restitution en question du domaine public de la Ville de Genève au domaine privé de l'Etat résulte d'une série d'échanges de terrains provoqués par l'aménagement du secteur et par les constructions qui y ont été réalisées ces dernières années.

La parcelle qui fait l'objet de la restitution que traite le premier alinéa du projet de loi modifié, est constituée par l'assiette de la station-service désaffectée, qui sera transformée à l'intention du HCR. Elle figure sur le tableau de mutation n° 63/1992, annexé au présent rapport.

Quant aux limites du domaine public restitué à la parcelle 4416, propriété de l'Etat de Genève, le long de la rue de Montbrillant et de l'avenue de France, elles figurent à titre indicatif sur le second plan annexé. L'aménagement des abords immédiats du bâtiment en cours de finition n'étant pas encore défini avec précision, l'emprise en question sera exactement mesurée par le géomètre au moment de la cadastration qui suivra l'achèvement des travaux.

Pour ces divers motifs, la commission d'aménagement à l'unanimité vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à procéder à la désaffectation proposée en adoptant le présent projet de loi tel que modifié par la commission.

BLANCHE

Premier débat

Ce projet est adopté en trois débats dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue:

LOI

portant désaffectation d'une partie du domaine publicde la Ville de Genèvesise au carrefour de la rue de Montbrillant et de l'avenue de France,sur la commune de Genève, section Petit-Saconnex, feuille 80

LE GRAND CONSEIL,

vu l'article 11 de la loi sur le domaine public, du 24 juin 1961,

Décrète ce qui suit:

Article unique

1 La partie du domaine public sise au carrefour de la rue de Montbrillant et de l'avenue de France, sur la commune de Genève, section Petit-Saconnex, feuille 80, soit la sous-parcelle bB, d'une superficie de 561 m2 telle qu'illustrée par le tableau de mutation portant le n° 63/1992, établi le 7 avril 1992 par MM. Huber et Chappuis, ingénieurs géomètres officiels, est distraite du domaine public pour être incorporée au domaine privé de l'Etat de Genève dans le cadre d'un échange foncier avec la Ville de Genève, en exécution du plan directeur applicable au périmètre de Montbrillant.

2 La partie du domaine public sise le long de la rue de Montbrillant et de l'avenue de France, sur la commune de Genève, section Petit-Saconnex, feuille 80, nécessaire à l'exploitation du complexe immobilier autorisé sur la parcelle 4416, propriété de l'Etat de Genève, est également incorporée au domaine privé de l'Etat. 

PL 7050-A
14. Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat octroyant à la société Centre Balexert SA une concession d'utilisation du domaine public pour la construction et l'exploitation d'un passage inférieur pour véhicules sous le domaine public de la route cantonale RC 6 (route de Meyrin). ( -) PL7050
 Mémorial 1993 : Projet, 7284. Commission, 7296.
Rapport de M. Pierre Meyll (AG), commission d'aménagement du canton

Le 8 décembre, la commission d'aménagement du canton, présidée par notre collègue Hervé Dessimoz, a examiné le projet de loi 7050 en présence du chef du département des travaux publics, M. Philippe Joye, conseiller d'Etat, et de MM. R. Schaffert, G. Gainon, D. Mottiez et J.-Ch. Pauli, de la direction de l'aménagement du canton.

Ce projet de loi a le mérite de la clarté ; il est le résultat d'une concertation entre l'Etat et le Centre commercial de Balexert. Il permet la construction d'un accès direct à ce centre depuis la route de Meyrin dans les meilleures conditions.

Les quatre articles de ce projet de loi ont été votés à l'unanimité par la commission d'aménagement du canton.

La convention Etat - Balexert, du 6 octobre 1993, et l'exposé des motifs donnent des explications claires et précises quant à la justification de ce passage sous la route de Meyrin.

La direction de Balexert SA se plaît à souligner la rapidité avec laquelle ce projet a été examiné par les différents organes de l'Etat et notamment par le département des travaux publics sous la direction du président Grobet, signataire de la convention.

L'aval du Grand Conseil est nécessaire pour une concession de cinquante ans. C'est pourquoi la commission d'aménagement du canton unanime vous recommande l'acceptation du projet de loi 7050.

Premier débat

M. Pierre Meyll (T), rapporteur. Je tiens simplement à dire que les travaux seront entrepris sans entrave à la circulation; c'est l'intérêt du Centre commercial de Balexert que ces travaux avancent rapidement. Environ 2,5 millions doivent rentrer dans la caisse des entreprises de génie civil. Je crois que c'est suffisant pour que l'on vote rapidement ce projet de loi.

M. Philippe Joye (PDC), conseiller d'Etat. Vous nous aviez demandé de contrôler le passage d'infrastructures publiques malgré la traversée de la route par l'objet devant être accepté par ce projet de loi. Nous avons effectué ce contrôle et il n'y a donc aucun obstacle.

M. Bernard Clerc (AdG). Je vais évidemment voter ce projet de loi. Je pense aux propos de M. Kunz au sujet des 25% de la population qui allaient être exclus de notre société dans les années à venir. Ce dernier qui a des intérêts étroitement liés avec le centre Balexert pourra probablement loger une partie de ces exclus dans ce passage souterrain ! (Quelques rires sarcastiques.)

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue:

loi

octroyant à la société Centre Balexert SAune concession d'utilisation du domaine public pour la constructionet l'exploitation d'un passage inférieur souterrain pour véhiculessous le domaine public de la route cantonale RC 6 (route de Meyrin)

LE GRAND CONSEIL,

vu la loi sur le domaine public, du 24 juin 1961;

vu la convention du 6 octobre 1993 liant l'Etat de Genève et le Centre Balexert SA,

Décrète ce qui suit:

Article 1

Il est octroyé à la société Centre Balexert SA, aux conditions énoncées dans la convention du 6 octobre 1993 liant l'Etat de Genève et le Centre Balexert SA annexée à la présente loi, une concession d'utilisation du domaine public situé sous la route cantonale RC 6 (route de Meyrin), pour la construction d'un passage inférieur pour véhicules (maximum 3,5 tonnes).

Art. 2

1 La partie concédée du domaine public figure sur le plan n° 6139-300 dressé, en date du 2 décembre 1992, par le bureau Schindelholz & Deneriaz Ingénieurs SA, sous la désignation OA 3729 - Passage inférieur pour véhi-cules de Balexert.

2 Deux exemplaires de ce plan, certifiés conformes par le président du Grand Conseil, sont déposés aux archives d'Etat.

Art. 3

La concession est régie par les conditions de la convention liant l'Etat de Genève et la société Centre Balexert SA. Elle est accordée pour une durée de 50 ans, à compter de la promulgation de la présente loi, sous réserve de pro-longation accordée conformément à l'article 7 de la convention précitée.

Art. 4

Il est mis à la charge de la société Centre Balexert SA un émolument de concession de 8'000 F.

 

I 1872
15. Interpellation de M. Chaïm Nissim : Les investissements des SIG dans le nucléaire français (à travers EOS). ( )I1872

Le président. Avant que vous commenciez votre intervention, Monsieur le député, je tiens à vous dire que j'ai bien reçu votre lettre, laquelle demande à qui vous devez vous adresser. C'est au Conseil d'Etat dans son ensemble que vous devez le faire. Il vous répondra comme bon lui semblera.

M. Chaïm Nissim (Ve). Dans ce qu'il faut bien appeler le scandale des investissements genevois, à travers EOS, dans le nucléaire français, M. Maitre m'a donné l'autre soir, il y a quinze jours, un certain nombre de précisions. Je l'en avais même remercié. Mais, en rentrant chez moi, après avoir regardé le contrat EDF-EOS, je me suis rendu compte que les affirmations de M. Maitre étaient en grande partie fausses, aussi je me suis mis en colère.

Des voix. Oohh !

M. Chaïm Nissim. J'ai alors immédiatement interpellé, une nouvelle fois, le Conseil d'Etat, le lendemain après-midi. L'urgence de la question n'ayant pas été reconnue, je fais donc mon interpellation aujourd'hui. Entre-temps, le responsable du département de l'énergie a changé, ce dont je me réjouis d'ailleurs, mais c'est une autre question. J'aurais voulu que M. Maitre ait le courage de me répondre encore ce soir...

Une voix. Dégonflé !

M. Chaïm Nissim. Je constate que ce n'est pas le cas ! Ce soir, j'ai le contrat sous les yeux. Alors, je vais faire comme si M. Maitre était en face de moi. Je vais lui dire tout ce que j'ai à lui dire comme s'il était là et, tant pis, c'est M. Joye qui me répondra ! J'ai également quelques questions pour lui, cela tombe bien.

Je m'adresse donc à M. Maitre. Premièrement, vous m'avez affirmé la dernière fois que ce contrat portait sur 200 et non pas 300 mégawatts, contrairement à ce que j'avais avancé. Il s'avère, Monsieur Maitre, que vous vous êtes trompé sur ce point. Je me demande d'ailleurs pourquoi vous avez cru bon d'affirmer quelque chose de faux sur un point aussi secondaire. En effet, il n'est pas du tout important qu'il s'agisse de 200 ou de 300 mégawatts. Une des phrases du contrat stipule, je lis : «Si EOS le désire, elle peut augmenter l'achat de 200 mégawatts stipulés dans le contrat d'une quantité supplémentaire maximum de 100 mégawatts.». C'est ce qu'elle a fait, 200 plus 100 font effectivement 300. S'il y a scandale, c'est aussi scandaleux pour 200 que pour 300 ! Il s'avère donc que j'ai raison et je voudrais bien que quelqu'un m'en donne acte.

Ensuite - c'est beaucoup plus important - M. Maitre a prétendu que nous n'étions pas obligés de consommer ce courant si nous n'en avions pas besoin. C'est vrai, mais nous en avons payé un peu plus de la moitié d'avance. Alors, une fois que l'on a payé 320 millions, il est normal d'avoir envie de rentrer dans ses frais, c'est-à-dire d'acheter le courant. C'est du reste ce qui a été rapporté dans le procès-verbal de l'assemblée qui a voté ce contrat supplémentaire, puisqu'un des intervenants a constaté que la tranche supplémentaire de 100 mégawatts permet un prélèvement annuel de 870 GWh. Si EOS ne les consomme pas, elle perdra ainsi quelque 3 centimes par kilowattheure et la tentation, dès lors, sera grande de les prélever pour ne pas perdre d'argent. M. Jean-Philippe Maitre parlait du scandale de l'obligation de consommer ce courant. Eh bien, si nous ne sommes pas obligés de consommer, nous sommes en tout cas intéressés à le consommer, ce qui est tout aussi scandaleux. M. Collomb, directeur d'EOS expliquait que ces 320 millions correspondent aux charges fixes, c'est comme si nous avions acheté une partie d'une centrale nucléaire. Nous payons le courant dont nous avons besoin, mais de toute façon nous payons les frais fixes. Il souligne que l'apport en capital peut être assimilé aux charges fixes d'une centrale, qui sont immuables. Donc nous sommes dans le cas évoqué par M. Maitre et qu'il qualifiait de scandaleux.

M. Maitre a omis de parler d'une chose extrêmement importante : je veux parler de la renégociation de ce contrat. Nous savons aujourd'hui que la consommation a baissé depuis 1990, année de la signature de ce contrat. EOS prévoyait de perdre de l'argent dans les premières années, vu l'excédent de disponibilité. Il est indiqué, je lis : «Les quantités d'électricité relatives à l'option tout comme celles du contrat de base créent des excédents de disponibilité dont la grandeur et la durée varient selon l'année de mise en marche.». Ces excédents de disponibilité devaient nous faire perdre 47 millions - ce qui était prévu au départ - jusqu'en l'an 98, mais nous devrions gagner de l'argent ensuite. Or, comme nous avons consommé beaucoup moins que prévu, en partie à cause de la crise, nous allons perdre bien davantage que ces 47 millions. EOS tente de renégocier ce contrat, qui devait lui faire perdre de l'argent et qui va lui en faire perdre encore beaucoup plus. Je vous encourage, Monsieur Joye, dans l'hypothèse où vous allez prendre la place de M. Maitre au conseil d'administration des Services industriels et donc au conseil d'administration d'EOS, d'essayer de récupérer une partie de notre argent pour l'investir d'une manière constitutionnelle, c'est-à-dire en respectant l'article 160 C.

M. Maitre nous a lu la dernière fois quelques petits extraits d'un avis de droit de M. Manfrini. Il ne nous a pas lu une petite phrase qui me semble très importante, à l'avant-dernière page, dans les conclusions. Elle dit que les Services industriels sont liés par deux mandats, l'article 158 qui demande d'approvisionner le public en énergie et l'article 160 C qui préconise les économies. Dans certains cas, ces articles peuvent être contradictoires, notamment si les SI ne peuvent pas se fournir autrement qu'en courant nucléaire. Effectivement, si le cas se présentait, il faudrait choisir entre les deux articles et on peut tout à fait imaginer que les SI optent pour l'article 158, soit de s'approvisionner en courant nucléaire.

Mais, en l'occurrence, nous n'étions pas dans ce cas de figure puisque nous n'avions pas besoin de ce courant et, d'autre part, il existe bien d'autres sources d'approvisionnement, j'y reviendrai tout à l'heure, cela fera l'objet de ma question à M. Joye. Je vous cite la phrase exacte de l'avis de droit : «Les Services industriels sont en droit de donner des instructions contraignantes à leur représentant - M. Ducor, en l'occurrence - au conseil d'administration de l'Energie Ouest Suisse, en vue de voter contre une hypothétique centrale nucléaire à construire. De telles instructions ne pourraient en revanche être formulées de manière générale, pour empêcher de s'approvisionner en énergie électrique de provenance nucléaire pour la livrer ensuite s'il s'avère qu'un tel approvisionnement est indispensable pour garantir la fourniture d'électricité.». Effectivement, si c'était indispensable, ils pourraient être enclins à choisir l'article 158, mais dans le cas présent il n'y avait pas d'«indispensabilité».

L'argument principal de M. Maitre était que l'approvisionnement actuel provenait pour 40% de courant nucléaire, que nous ne pouvions pas diminuer ce pourcentage du jour au lendemain et qu'il fallait continuer. Je tiens à dire ceci, c'est le corps de ma question à M. Joye :

Vous avez peut-être reçu, en tout cas ceux d'entre vous qui participent à la commission de l'énergie, une lettre de certains copropriétaires d'Onex qui ont une grosse chaufferie de 10 mégawatts. Celle-ci n'est plus adaptée aux normes OPair et doit être renouvelée. Ils demandent depuis longtemps à M. Maitre de se prononcer sur la possibilité de remplacer cette chaufferie par un raccordement au réseau CADIOM. Il n'a jamais répondu car ce réseau est très cher - entre 50 et 60 millions - très long à construire - environ dix ans - et demande l'accord de tous les partenaires concernés. Je suggère donc à ces Onésiens - cela fera l'objet d'une éventuelle motion, Monsieur Joye, si cela vous intéresse - de construire un couplage chaleur-force de 10 mégawatts. Ce couplage permettrait de réduire la dépendance au nucléaire de 40 à 39%, voire même à 38%. Ce serait un petit début. Nous pourrions construire un autre couplage chaleur-force pour un autre groupe d'immeubles, et de fil en aiguille nous arriverions à baisser notre dépendance au nucléaire.

Le couplage chaleur-force est une bonne idée. Il permet de chauffer un immeuble ou un groupe d'immeubles en fournissant du courant avec, grosso modo, la même quantité de mazout au départ. Il pose un certain nombre de problèmes techniques, mais le rendement est bien meilleur que celui d'une chaufferie traditionnelle. C'est une installation qui peut être faite en six mois et qui revient beaucoup moins cher que le projet CADIOM. Monsieur Joye, ne pourrait-on pas proposer à ces Onésiens l'installation d'un couplage chaleur-force pour leur chaufferie, ce qui permettrait d'installer un catalyseur pour répondre aux normes OPair et réduirait notre dépendance au nucléaire ?

M. Lombard me félicitait pour la teneur de mes propos et m'encourageait à faire des propositions concrètes. En voilà une, Monsieur Lombard ! Cosigneriez-vous une telle motion ?

Le président. Adressez-vous à la présidence, Monsieur le député !

M. Chaïm Nissim. Si M. Joye est d'accord, nous pourrions faire cette motion ensemble.

Je récapitule donc mes trois questions à M. Maitre :

1) S'agit-il bien de 300 et non de 200 mégawatts ?

2) Avons-nous bien payé la moitié d'avance, ce qui va nous inciter à consommer de plus en plus ?

3) Ce contrat fait-il l'objet d'une renégociation et pourquoi ne pas l'avoir dit ?

M. Philippe Joye (PDC), conseiller d'Etat. Je tiens d'abord à dire que je suis sur la même longueur d'onde que celle de M. Maitre...

Des voix. Oohh !

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Laissez-moi finir, Messieurs Dames, je commence seulement !

Je réponds comme suite aux remarques et questions de M. Chaïm Nissim. Les réflexions de M. Nissim sont connues pour toujours porter sur des sujets complexes qui méritent de recueillir des informations complémentaires pour pouvoir être exhaustif dans la réponse à apporter. C'est ce que je me suis donné la peine de faire. Je me suis également procuré le contrat. Monsieur Nissim, pendant 25 ans, à compter du 1er octobre 1991, EDF met à disposition d'EOS une puissance de 100 mégawatts durant les deux premières années du contrat et de 200 mégawatts par la suite. Donc, vous avez tout à fait raison. Je vous signale que, lors des discussions au conseil d'administration des Services industriels, même les administrateurs actuels d'EOS ne savaient plus très bien s'il s'agissait de deux fois cent ou deux fois deux cents. Vous avez raison sur ce point !

Deuxièmement, pour ce qui est de la taxe de base, vous traitez un problème classique de toutes les fournitures d'énergie. Trois éléments entrent en ligne de compte : tout d'abord la taxe de base, qui est souvent très élevée selon les types d'énergie, spécialement dans le type d'énergie thermique dont c'est un euphémisme de dire que 10% de son énergie provient du mazout et 90% du nucléaire. La taxe de base, c'est la base de la machine. Puis il y a la taxe annuelle et enfin la consommation. Alors, vous n'avez ni tort ni raison. M. Maitre vous a dit que l'on n'était pas obligé de consommer, ce qui est vrai, de même que lorsque vous achetez l'eau vous n'êtes pas obligé de faire couler le robinet avec une régularité d'horloge pour être sûr de payer un abonnement d'eau, en plus d'une consommation d'eau dont vous n'auriez pas besoin !

Troisième point, c'est la perte d'argent en cas de non-consommation. C'est à la fois faux et juste. Simplement, vous avez la taxe de base et la taxe annuelle qui vont continuer à courir.

La quatrième chose a trait à la renégociation. J'ai demandé un renseignement à ce sujet et je l'ai obtenu ce matin, lors de la séance du conseil d'administration des Services industriels. Effectivement, vous me le faites dire et je le regrette un peu, car je trouve peu judicieux de porter sur la place publique des négociations aussi délicates que celle-ci qui porte sur plusieurs centaines de millions de francs... (Mme Reusse-Decrey rit.) ...oui, Madame Reusse-Decrey, vous riez, mais il y a une certaine confidentialité qu'il faudrait garder dans ces domaines. Malheureusement, le mal est fait, donc je peux vous confirmer que des négociations sont en cours, vous avez raison. Elles sont très délicates parce que celui qui a pu vendre son énergie et son installation, quel qu'il soit, n'est pas très content de voir partir l'un des preneurs.

Ensuite, vous parlez, Monsieur, du problème de la fourniture d'énergie. Vous dites que nous ne sommes pas obligés de nous fournir chez un tel. Je vais être administrateur d'EOS et je vous rappelle deux choses.

Personne n'est capable de dire, à partir du centre de dispatching de Laufenburg, qui regroupe seize pays européens producteurs d'énergie, si l'énergie que nous avons effectivement dans nos conduites est une énergie russe, finlandaise, française ou allemande.

Deuxièmement, nous avons un contrat d'exclusivité avec EOS qui date d'avant mon entrée au conseil d'administration des Services industriels dans lequel, au fond, on a renoncé à se fournir auprès d'un autre fournisseur qu'EOS, ce que j'ai toujours regretté publiquement et déploré dans les séances du Conseil. Le seul vendeur que nous avions avant était l'Electricité de Laufenburg qui est une petite entreprise très privée, très musclée et très mobile, auprès de laquelle on pouvait acheter de l'énergie à des prix du marché sur les «opérations spot». Vous pouvez acheter actuellement un kilowatt d'énergie électrique pour 1,2 centimes selon les jours au lieu des 6 ou 7 centimes habituels. Cela vous donne une idée de l'état général de la production et de tous les problèmes qui se posent, car l'énergie à 1,2 centime qui vient de l'Est est polluée à souhait, et il faut savoir si moralement nous pouvons l'acheter ou non. La question se pose.

100 mégawatts peuvent paraître une quantité très importante. Mais, à titre de comparaison, la puissance maximale des centrales hydrauliques suisses était pour l'hiver 1991-1992 de 6 600 mégawatts. Il serait donc faux de parler de crime très grave ou d'amplifier le drame que pourrait constituer cette affaire lorsqu'on sait que ce chiffre de 100 ou 300 mégawatts représente à peu près 5% de la consommation à Genève.

A propos du litige concernant l'administrateur d'EOS représentant des Services industriels, vous avez relevé que ces derniers peuvent obliger leur administrateur à prendre une décision. Moi, je peux vous produire la phrase contraire dans laquelle M. Manfrini disait que, je cite : «S'agissant plus particulièrement de la politique d'approvisionnement en énergie, les statuts des sociétés d'économies mixtes auxquelles les Services industriels participent intègrent à l'intérêt social, l'intérêt des membres et l'intérêt des actionnaires.». Il y a donc bien une dualité. Vous m'excuserez d'être un peu long, mais je pense qu'il est intéressant de vous le lire. Je continue : «La définition des intérêts, dont les Services industriels sont les porte-parole au sein de leur participation, présuppose une coordination entre la nécessité d'assurer la fourniture d'énergie au réseau cantonal et le devoir de respecter les objectifs de la politique énergétique stipulés par l'article 160 C de ladite constitution.». Et : «La nécessité d'assurer la fourniture d'énergie au réseau genevois et le respect de l'intérêt social coïncident pour limiter le pouvoir d'instruction des Services industriels à l'égard de leur représentant au conseil d'administration des sociétés auquel il participe.».

Cachotterie pour cachotterie, je crois savoir qu'un autre avis de droit est en cours d'élaboration, et je vous serais très reconnaissant de m'en faire tenir une copie très rapidement, afin que, en toute sérénité, nous puissions le confier aux juristes pour voir lequel des deux est le meilleur. Nous ferons le match ! (Quelques applaudissements.)

Vous savez, on plaisante beaucoup sur l'approvisionnement en électricité, mais il n'y a aucun doute, cette responsabilité existe et elle repose sur la loi. Il n'est pas impossible d'avoir des «pépins» - je ne souhaiterai jamais que cela arrive - aussi il ne faut pas mésestimer le fait que comme producteur d'énergie nous dépendons pour plus des deux tiers de l'extérieur du canton. Vous avez tout entendu sur le contrat; M. Nissim vous fera les photocopies nécessaires. Vous avez reçu entre-temps l'avis de droit de M. Manfrini, donc on ne peut plus laisser entendre que les contrats ont été tenus secrets.

Je suis tout à fait d'accord avec vous, Monsieur Nissim, les centrales chaleur-force 5 mégawatts à 10 mégawatts sont des centrales chaleur-force que je considère comme souples, dans lesquelles les frais de canalisation - ce qui coûte cher dans une telle centrale - sont assez limités et dans lesquelles les questions de pollution peuvent être réglées de façon assez élégante. Actuellement, l'office de l'énergie, dont M. Genoud s'occupe, traite un projet très sympathique et intéressant dans une zone FIPA, du côté des Acacias. Il s'agit d'une centrale de ce genre, 5 à 10 mégawatts, qui serait évidemment une centrale thermique gaz à la base.

D'autres systèmes peuvent être utilisés. Avec M. Krebs, qui est votre collègue de parti, nous avons préparé un concept pour une centrale chaleur-force qui peut fonctionner avec le bois d'entretien des forêts. Seul le bois qui tombe est utilisé. Cela suffit pour faire deux ou trois centrales de ce genre. On bénéficie, du reste, d'une loi votée ici qui donnait un prix de rachat de l'énergie beaucoup trop fort par rapport à ce que ces centrales qui travaillent en mégawatts pourraient prétendre gagner. En effet, le but de cette loi était d'encourager les petites installations et non les grandes. Mais maintenant, nous nous apercevons que nous avons des débouchés dans ce secteur et que nous pourrons utiliser cette loi.

Enfin, la séance CADIOM a été repoussée plusieurs fois, six fois exactement, et nous avons agendé pour le début janvier - je crois que c'est le 10 - la séance avec la commune d'Onex. CADIOM reste un projet, à mon avis, tout à fait raisonnable et intéressant. Ce n'est pas une de ces grandes centrales chaleur-force que nous proposait la maison Sulzer au début des années 1975-76, qui posait un réel problème de taille. Pour faire fonctionner cette centrale, il fallait investir plusieurs dizaines de millions de francs de canalisations. Le problème était de savoir qui devait faire cet investissement. La Ville de Zurich a construit une centrale de ce type dans les années 1970 avec quatre chaudières dans son usine chaleur-force de Au. C'est un très beau bâtiment en béton à l'intersection des autoroutes, en direction de l'aéroport. 80 millions ont été investis pour la distribution de cette chaleur-force.

Pour conclure, premièrement, il faut «downgrade», c'est-à-dire ramener l'incident avec la France à ses vraies proportions, parce que nous parlons d'un pourcentage très faible de notre consommation, même si je sais que vous en faites une question de principe. Ensuite, en ce qui concerne l'avenir, le système chaleur-force mérite notre attention. Je suis sûr que nous trouverons des terrains d'entente à ce sujet. Je suis prêt à rediscuter de ces choses avec l'un ou l'autre d'entre vous quand il le désirera.

M. Chaïm Nissim (Ve). Merci, Monsieur Joye, pour votre excellente réponse. Nous avons l'intention de prendre rendez-vous au mois de janvier, mais nous voulions vous laisser un peu de temps pour vous installer dans vos bureaux. Nous aurons beaucoup de sujets à aborder, et je vois déjà que cela sera beaucoup plus fructueux qu'avec votre prédécesseur !

J'ai relevé une erreur dans vos propos. Le chiffre de 300 mégawatts concerne la Suisse romande et non Genève et il représente la consommation moyenne du canton de Genève. Il ne s'agit pas de 5%. Le canton de Genève a consommé, l'année dernière, 451 mégawatts à fond d'échelle - un jour de pointe - et le reste du temps la consommation a varié entre 200 et 300 mégawatts, ce qui représente un pourcentage situé entre 20 à 30%, suivant les heures.

Vous recevrez l'avis de droit dès que nous l'aurons. Je dois recevoir un fax incessamment.

Les couplages chaleur-force sont rentables à partir du moment où les canalisations sont courtes - vous avez parfaitement raison sur ce point - et si on rachète le courant entre 15 et 16 centimes le kilowattheure. Or le gros problème est que les Services industriels achètent actuellement le courant aux alentours de 11 centimes, ce qui fait que la plupart des couplages chaleur-force ne sont pas rentables à Genève. Il faudrait un petit coup de pouce, car ensuite le courant se vend de toute façon aux alentours de 20 à 25 centimes, en fonction des consommateurs. Ils gagneraient de l'argent même en le rachetant 16 centimes, mais ils en gagneraient un peu moins. C'est une question politique qui doit être tranchée par ce Grand Conseil.

M. Philippe Joye (PDC), conseiller d'Etat. Vous avez tout à fait raison, la puissance maximale appelée sur le réseau genevois était de 451 mégawatts, pour une journée.

Le grand problème posé par les centrales chaleur-force est que si on se met à en produire partout cela donne à des tiers la liberté de produire de l'énergie pour obliger ensuite les Services industriels à l'acheter. C'est la raison pour laquelle la FIPA n'était pas très favorable à ces centrales chaleur-force et les Services industriels non plus. Cette crainte n'est pas totalement infondée, mais je pense que nous pourrons trouver des solutions dans ce domaine.

L'interpellation est close.

 

La séance est levée à 22 h 45.