République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 3 février 2023 à 14h
2e législature - 5e année - 9e session - 57e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 14h, sous la présidence de M. Jean-Luc Forni, président.
Assistent à la séance: Mme et MM. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat, Serge Dal Busco et Fabienne Fischer, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Antonio Hodgers, Anne Emery-Torracinta, Nathalie Fontanet et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Murat-Julian Alder, François Baertschi, Jean Batou, Jacques Béné, Virna Conti, Adrien Genecand, Serge Hiltpold, Youniss Mussa, Patrick Saudan, Adrienne Sordet, Vincent Subilia, Salika Wenger, Raymond Wicky et François Wolfisberg, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Anne Bonvin Bonfanti, Denis Chiaradonna, Aude Martenot, Jean-Pierre Pasquier, Philippe Perrenoud, Helena Rigotti et Gabriela Sonderegger.
Annonces et dépôts
Néant.
Débat
Le président. Nous arrivons au traitement des points fixes et nous commençons immédiatement avec la P 2148-A, classée en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de Mme Corinne Müller Sontag, à qui je passe la parole.
Mme Corinne Müller Sontag (Ve), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. Chères et chers collègues, «L'Approche éblouie» est un tableau du peintre genevois Pierre Montant, un tableau de grandes dimensions - près de 4 mètres de large sur 2,40 de haut - offert comme cadeau protocolaire pour la salle des Pas-Perdus du Grand Conseil en 1990, lors du 175e anniversaire de l'entrée de Genève dans la Confédération. Lors de la rénovation de l'Hôtel de Ville, ce tableau a été enlevé. Puis, il n'a tout simplement pas été raccroché à l'issue des travaux, à la stupéfaction - on peut le comprendre - du peintre et de ses proches, qui ont été mis devant le fait accompli lors des portes ouvertes de l'Hôtel de Ville. On a parlé d'outrage à l'artiste, de déni de mémoire; certains ont même voulu y voir le signal d'un refroidissement alarmant entre Genève et la Suisse. Cependant, je vous rassure: lors de ses auditions, la commission des pétitions n'a rien relevé de tel.
«L'Approche éblouie» n'a pas été remis en place pour la simple raison que le cahier des charges des architectes ne prévoyait pas qu'un tableau de cette taille figure à cet endroit. Et, en fin de compte, cet élément ne s'accorde plus avec les choix actuels d'aménagement. Est-ce un oubli ? Est-ce un choix ? Existe-t-il un devoir de garder au mur un cadeau d'anniversaire ? Qui décide de la décoration de la salle des Pas-Perdus ? Est-ce qu'il existe quelque chose comme un devoir, ou un droit, à être exposé ? Quelle est la valeur patrimoniale de tel ou tel vestige du temps ? Comme vous pouvez le constater, cette pétition a soulevé nombre de questions intéressantes, allant des goûts et des couleurs en matière d'art contemporain jusqu'aux prérogatives du Grand Conseil pour décider des aménagements de l'Hôtel de Ville.
En fin de compte, la commission a jugé qu'il n'est pas de son ressort de procéder à des choix artistiques, bien que les idées autour de la table n'aient pas manqué. Dans le même ordre d'idée, la commission a considéré qu'on ne peut pas entrer en matière sur le droit d'une oeuvre, quelle qu'elle soit, à rester exposée. Le fait de ne pas avoir raccroché ce tableau ne doit cependant pas non plus être interprété comme un signe quelconque, ni à l'égard de l'artiste ni de la Confédération. Si le nouvel aménagement de l'Hôtel de Ville n'a pas prévu l'intégration de ce tableau, cela n'exclut pas qu'une future oeuvre y trouve un jour sa place. Cela dit, la commission a regretté le manque de tact dans le suivi du projet de rénovation, ce qui a fait que l'artiste n'a découvert le décrochage de son oeuvre qu'à l'occasion des portes ouvertes.
Le destin de «L'Approche éblouie» a également été abordé en commission. Ce tableau va-t-il rester dans une cave ? Ou trouver une autre place à la vue du public ? Aucune solution satisfaisante ne s'est dégagée lors des auditions, notamment en raison des dimensions exceptionnelles de l'oeuvre, qui rendent difficile son accrochage ailleurs, même dans un musée. Cela étant, la commission a décidé de ne pas accepter cette pétition, tout en se montrant reconnaissante et sensible à l'intérêt des questions qu'elle a soulevées. Je vous remercie.
M. Rémy Pagani (EAG). Juste une petite larme de nostalgie, quand même: ce tableau a trôné dans la salle des Pas-Perdus durant vingt-cinq ou même trente, quarante ans - quarante ans ! C'est toute une histoire qui s'en va avec ce tableau; le lieu a été complètement transformé - et il plaît bien à la population, qui a été invitée à le visiter lors d'une journée portes ouvertes.
Cela étant, M. Montant est quand même, j'aimerais le rappeler, un des peintres genevois connus. Je regrette que Mme Boesch, par exemple, qui est une peintre genevoise qui a loupé une exposition au musée Rath, soit aussi peu connue. Même si on va dans des musées voir d'autres peintres exceptionnels, les peintres genevois méritent d'être exposés et valorisés, en fonction de leur talent. M. Montant a été un peu malmené, disons, d'un point de vue diplomatique: on aurait pu au moins l'avertir que son tableau ne serait pas remis à la salle des Pas-Perdus. Même si ce tableau ne représente pas l'histoire - il n'y avait par exemple pas le jet d'eau lorsque les Suisses, ou plus exactement les Bernois, sont arrivés au Port-Noir -, nous regrettons, pas vivement, mais... Toujours est-il que les propos de la rapporteuse sont l'expression des discussions et des réflexions de la majorité de la commission, et nous nous y rallions, je le disais en préambule, avec une certaine nostalgie. Je vous remercie de votre attention.
Mme Christina Meissner (PDC). Merci à la rapporteure, Mme Müller Sontag, pour sa description très précise du tableau et de nos travaux en commission. Mesdames et Messieurs, l'ancien vice-chancelier de la république, M. Claude Bonard, se plaisait à faire remarquer grâce à ce tableau, quand il y avait des visites protocolaires ou des visiteurs, quelques particularités de Genève - quelquefois elles étaient même liées à des erreurs dans le tableau, par exemple la présence du jet d'eau, effectivement, qui a bien entendu été installé après l'arrivée des Fribourgeois et des Bernois... C'est cela ? (Remarque.) Merci, Monsieur Guinchard. ...au Port-Noir.
Cela étant, cette pétition est l'histoire d'un oubli malheureux. La rénovation de notre salle du Grand Conseil a effectivement beaucoup occupé notre parlement et son Bureau. Tout le monde s'est affairé autour des travaux et personne n'a pensé au tableau ! Ensuite, lorsque nous avons réintégré notre salle, nous nous sommes affairés à notre ordre du jour, jusqu'à ce que vienne justement à l'ordre du jour cette pétition - pétition qui s'offusque en effet de la disparition de ce tableau. Nous avons toutefois appris en traitant cet objet que nous, Grand Conseil, pouvions et avions le droit de nous préoccuper de notre salle, mais pas des salles adjacentes, qui sont du ressort de la chancellerie. Que faire donc avec cette pétition ?
Nous comprenons bien que ce tableau, qui aurait parfaitement sa place à un emplacement où il est par ailleurs en harmonie avec les nouvelles couleurs choisies pour le mobilier, est monumental et qu'il y a l'espace pour le remettre à cet endroit, mais difficilement à un autre. En ce qui nous concerne, au PDC, nous considérerions que sa place est effectivement là, mais la commission a décidé d'une part de ne pas renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, d'autre part de la renvoyer. Au final, le texte s'est retrouvé classé, ce qui est vraiment très peu respectueux vis-à-vis du peintre et de ce cadeau que les autres cantons ont fait à Genève.
Dès lors, le vote d'aujourd'hui pourrait être l'occasion de se demander si on veut véritablement classer cette pétition et infliger une claque à ceux qui nous ont offert le tableau; n'y a-t-il pas un autre choix ? A choisir, le PDC opte pour le renvoi au Conseil d'Etat. Pour nous, il est évident que ce tableau a sa place à cet endroit, qui est désespérément blanc et vide !
M. Stéphane Florey (UDC). Tout d'abord, je précise que les propos tenus par la rapporteuse n'engagent qu'elle et sa majorité, puisqu'elle a oublié de le mentionner: une minorité soutenait malgré tout l'idée du retour du tableau. Oui, Mesdames et Messieurs, parce que la seule question qu'on devrait à mon sens se poser, s'agissant de ce cadeau... J'y vois un total manque de respect des institutions. Ce tableau a été offert par la Confédération pour une raison bien précise, on l'a déjà dit; pour moi, la seule chose à faire aurait tout simplement été de le remettre à sa place.
Maintenant, on voit bien qu'il y a deux visions qui s'affrontent dans les travaux: la vision architecturale et la vision artistique. Parce que les architectes avaient déjà, dès le départ, la vision qu'il n'y aurait pas de tableau - il faut aller voir le mur pour vous en rendre compte ! Et la preuve, c'est que si vous allez regarder les dimensions du tableau par rapport au mur, on y a volontairement collé des interrupteurs, une lampe pour justement signifier que l'architecte a purement et simplement décidé que non, il n'y aurait plus de tableau à cet endroit-là ! Et ça, je suis désolé de le dire, ça a été fait volontairement, uniquement dans un esprit torturé d'architecture.
C'est pour ces raisons que je vous propose plutôt un renvoi en commission - je me suis fait glisser ça à l'oreille pas plus tard qu'il y a cinq minutes -, de convoquer qui de droit pour une discussion et de faire un essai du retour du tableau à l'endroit qui est le sien ! On peut attendre un ou deux mois pour voir ce que ça donne, ce que les gens en pensent - ce que vous, vous en pensez ! - et ensuite, si vraiment il y a une majorité qui ne veut plus de ce tableau, eh bien, ma foi, on essaiera de lui trouver une autre place. Mais si on se rend finalement compte que c'est là, et uniquement là, qu'est sa place, on l'y laisse: on fait simplement les transformations nécessaires pour les interrupteurs et la lampe, et on laisse le tableau où il est. C'est pour ça que je demande le renvoi de cette pétition à la commission des pétitions: pour qu'on puisse étudier la question d'un essai concernant ce tableau. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission. Je pose donc la question à la rapporteure: quelle est votre position sur cette proposition ?
Mme Corinne Müller Sontag (Ve), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. La question du raccrochage a également été abondamment discutée lors des auditions: il était jugé impossible du fait des dimensions et du poids de l'oeuvre. Quand le préopinant dit que c'était une volonté délibérée des architectes d'empêcher le retour du tableau, ça n'engage que lui; ce n'est pas du tout ce qui a été exprimé en commission. Par contre, le raccrochage n'a pas été jugé faisable, il faut donc refuser le retour en commission.
Le président. Merci, Madame la rapporteure. Le Conseil d'Etat souhaite-t-il s'exprimer sur le renvoi en commission ? (Remarque.) Non, nous passons donc au vote. (Brouhaha.)
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la pétition 2148 à la commission des pétitions est rejeté par 60 non contre 11 oui et 1 abstention.
Le président. Nous poursuivons nos débats, pour autant qu'il y ait un petit peu de calme dans la salle, sinon on n'entendra pas la suite des interventions. (Brouhaha. Un instant s'écoule.) Monsieur Jean Romain, vous avez la parole.
M. Jean Romain (PLR). Merci, Monsieur le président. Ecoutez, je ne crois pas qu'il y ait eu une volonté délibérée des architectes de ne pas remettre ce tableau.
Une voix. Je maintiens !
M. Jean Romain. Oui, bien entendu que tu maintiens, mais j'aimerais juste pouvoir parler, même si tu maintiens ! (Rires.) Par une manoeuvre un petit peu bizarre, cette pétition a été classée; on vous expliquera peut-être pourquoi tout à l'heure. La commission a toutefois pris en compte tous les intérêts exprimés, y compris bien sûr - et surtout - celui du peintre lui-même, à qui cette oeuvre a été commandée. Mais il n'y a aucune raison de mettre l'accent sur ce tableau-là plutôt que sur d'autres objets disparus lors de la rénovation ! Je pense aux vitraux: les vitraux qui nous ont aussi été offerts, les vitraux que l'on n'a pas pu remettre. Alors on peut évidemment regretter le passé, n'est-ce pas; on peut se dire que, d'une certaine manière, on n'est pas assez moderne, mais je suis, moi, contre le fait d'être moderne jusqu'à manger du foin !
Ce que nous devons faire, c'est considérer que la rénovation de cette salle a - malheureusement - nécessité de se départir d'un certain nombre d'objets, mais nous ne pouvons pas y faire pièce et, surtout, nous ne pouvons pas prendre en compte les desiderata de tout le monde. Je ne vois pas comment revenir sur des positions claires de la commission. Il y a eu un micmac avec un double refus, et cela a automatiquement abouti au classement de cette pétition: c'est dommage, mais soyons sages, chers collègues, on ne va pas ouvrir tout un débat là-dessus. Soyons sages et traitons l'objet comme décidé. Je vous remercie.
Mme Danièle Magnin (MCG). Chères et chers collègues, dans cette nouvelle salle, à force de faire du conceptuel, on a totalement oublié le réel ! Et il n'y a pas que cette salle, il y a aussi la salle des Pas-Perdus, qui est devenue un endroit non convivial, complètement froid; nous n'avons plus nos petites tables, nos petits fauteuils pour discuter. On a fait disparaître la buvette: il faut descendre deux étages pour aller boire un verre et discuter de quelque chose. C'est absolument lamentable ! On ne peut pas passer les uns derrière les autres; il suffirait qu'il y ait le feu dans cette salle et la moitié périraient grillés, très franchement ! (Rire.)
Je voulais demander, comme M. Romain tout à l'heure: où est donc passée la tapisserie de M. Lurçat - feu M. Lurçat ? Où sont passés les vitraux ? Et pourquoi n'a-t-on plus de vitraux ? Pour pouvoir électrifier les vitres, si vous voulez mon avis ! Pour qu'elles puissent monter et descendre sans l'ennui de vitraux qui pourraient se casser. Franchement, on a une vision architecturale, une vision artistique, mais aucun symbole ! On ne se voit plus: pour savoir qui d'entre nous est en train de parler, il faut regarder sur le tableau où se trouve la petite lumière rouge. On n'arrive plus à discuter comme on discutait avant; nous sommes un pays de compromis et c'est en cela que c'est une absurdité d'avoir conçu cette salle ainsi. Ça fait très longtemps que j'ai envie de le dire; je suis ravie d'avoir cette opportunité !
Je connais bien Pierre Montant: il est effectivement extrêmement déçu et affecté par la disparition de son tableau. Je pense qu'il nous faudrait trouver une solution pour le mettre quelque part, quitte à égratigner le concept de ces messieurs les architectes qui ne comprennent pas l'importance des symboles. Le MCG soutiendra donc le retour de «La Ville éblouie» - je ne me rappelle plus - sur nos murs. Merci.
Une voix. Bravo !
Mme Katia Leonelli (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, lors des auditions concernant cette pétition, nous avons pu constater que la décision de ne pas raccrocher ce tableau n'était ni la conséquence d'une faille démocratique ni celle d'un projet architectural élitiste. Comme nous l'a rappelé M. le sautier lors de son audition, la transformation de l'aile sud-ouest de l'Hôtel de Ville est en effet le résultat d'un concours architectural pour lequel les concurrents disposaient d'une grande liberté puisqu'il ne leur était pas imposé de maintenir le mobilier.
Les architectes chargés du projet, également auditionnés, nous ont assuré que la valeur symbolique de ce tableau n'avait jamais été soulevée. Par conséquent, comme cela a été le cas pour un grand nombre d'objets présents sur les lieux avant les travaux, sa réintégration n'a pas été incluse dans l'étude. Les architectes nous ont fait part de leurs recommandations d'experts et nous ont conseillé de ne pas raccrocher ce tableau ainsi que le demande la pétition, car il risquerait d'écraser l'espace et serait peu valorisé dans ce contexte; autrement dit, une «lose-lose situation». M. Koelliker nous a assuré que personne, au sein du comité de pilotage, n'avait requis sa réinstallation, l'oeuvre ne revêtant pas un intérêt patrimonial particulier.
Vous le comprenez, Mesdames et Messieurs les députés, tout a été fait dans les règles de l'art. Le sautier ayant confirmé que la décoration des espaces consacrés au Grand Conseil est une prérogative du Bureau, nous estimons que les murs vierges de nos salles pourraient faire l'objet d'autres interventions artistiques contemporaines. Nous espérons de tout coeur que «L'Approche éblouie» trouvera sa place dans une collection qui sera digne et à la hauteur de sa qualité, et qui saura la conserver, l'exposer et la valoriser - et en parler à un public élargi dans de meilleures conditions que celles que pourrait proposer un parlement cantonal.
Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons décidé de nous opposer à cette pétition. Cependant, alors que nous avions voté son classement en commission, notre groupe se ralliera au dépôt sur le bureau du Grand Conseil pour se ranger aux côtés des partis partageant notre position. Je regrette par ailleurs sincèrement que le processus de vote des pétitions permette d'avoir une majorité pour deux positions parfaitement opposées, mais nous aurons l'occasion d'en parler tout prochainement au Bureau. Je vous remercie.
M. Diego Esteban (S). Un petit mot pour dire que le groupe socialiste soutiendra le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Si nous soutenons effectivement toute initiative qui vise à valoriser notre patrimoine culturel, artistique comme historique, il ne faut pas dépendre de la salle des Pas-Perdus pour atteindre cet objectif: c'est plutôt le rôle et la vocation des musées et des espaces dédiés à l'exposition d'oeuvres artistiques.
Je rappelle que le Musée d'art et d'histoire ne peut exposer qu'environ 10% de ses collections, le 90% restant devant faire l'objet d'une certaine rotation; nous ne bénéficions donc pas pleinement de ce que les musées auraient aujourd'hui la capacité de nous montrer. Il est un petit peu curieux de se pencher ici sur une oeuvre en particulier et pas sur une autre, qui ne serait pas, elle, soutenue par le biais d'une pétition. L'ensemble de ces raisons fait que nous déposerons cette pétition.
Le président. Merci, Monsieur le député. Madame Nicole Valiquer Grecuccio, vous avez la parole pour deux minutes.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Merci, Monsieur le président. En complément de la prise de parole de mon collègue Diego Esteban et de l'excellente intervention de ma collègue Katia Leonelli, j'aimerais juste réagir à deux propos que j'ai entendus. Plus personne n'oppose aujourd'hui une démarche architecturale à une démarche artistique; vous transmettrez donc à l'UDC que les artistes travaillent généralement de concert avec les architectes. Et c'est pourquoi on arrive finalement à montrer que tant les démarches artistiques que les démarches architecturales font partie de la culture.
J'ai par ailleurs entendu Mme Meissner dire qu'il serait bon de remettre le tableau parce que sa couleur s'accorde à celle du mur. Excusez-moi, si on veut valoriser une démarche artistique, on ne va pas dire qu'on accroche un tableau parce qu'il va bien avec la couleur du mur, des coussins ou des sièges ! Je pense qu'on pourrait avoir un discours un petit peu plus élevé.
Et puis au fond, comme l'a dit mon collègue Diego Esteban, cela participe aussi de la volonté de mettre des tableaux dans des musées. Alors j'espère que les partis qui aujourd'hui, en substance, ont prôné le soutien muséographique sauront également soutenir, le moment venu, les musées qui vont avec et dans lesquels les oeuvres d'art sont exposées. Merci beaucoup.
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe maintenant la parole à M. Daniel Sormanni pour cinquante-quatre secondes.
M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, je trouve vraiment ce débat assez étonnant. Je crois qu'il y avait ici une chose simple, qu'une question simple était posée, c'est-à-dire... Et j'ai entendu tout à l'heure - vous transmettrez, Monsieur le président, à la rapporteuse - que l'architecte répond que ce n'était pas dans son cahier des charges ! Avec un budget de 20 millions, il n'avait pas trois clous pour accrocher un tableau, même s'il est grand ! S'il avait besoin d'un coup de main, on venait volontiers avec une échelle. Non, vraiment, c'est se moquer du monde que d'avoir fait ce type de réponse.
Je crois que ce tableau a tout à fait sa place ici, et nous voterons bien sûr le renvoi au Conseil d'Etat, puisqu'on n'a pas tellement le choix, ma foi; c'est le Conseil d'Etat qui prendra ses responsabilités. Je trouve qu'on peut quand même décorer cette salle et les salles adjacentes...
Le président. Merci.
M. Daniel Sormanni. ...sans pénaliser la vision, qui serait écrasée...
Le président. Merci, Monsieur le député.
M. Daniel Sormanni. ...dans la salle où il y aura ce tableau. C'est parfaitement ridicule; autrement...
Le président. Merci, il vous faut conclure.
M. Daniel Sormanni. ...ce tableau va malheureusement finir, comme 97% des oeuvres du Musée d'art et d'histoire, dans les caves !
Le président. Merci, Monsieur le député.
M. Daniel Sormanni. Et ça, c'est dommage ! Alors si c'était un plaidoyer pour rénover le Musée d'art et d'histoire...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Daniel Sormanni. ...vous direz à Mme Valiquer que c'est raté, parce qu'en ce qui nous concerne, nous trouvons le projet présenté démesuré. Merci de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va à M. David Martin pour vingt secondes.
M. David Martin (Ve). Juste à titre de boutade: je propose que nous fassions, lors de la prochaine session, un débat libre pour une refonte générale de chaque élément de décoration de la nouvelle salle, parce que c'est véritablement ce qui préoccupe notre canton et la population. Merci beaucoup. (Remarque. Applaudissements.)
Mme Corinne Müller Sontag (Ve), rapporteuse. Très brièvement, le renvoi de la pétition au Conseil d'Etat a en effet été refusé en commission par huit voix contre quatre, avec deux abstentions. Ensuite, le dépôt sur le bureau a malencontreusement été refusé également, par six voix contre six, ce qui a abouti à ce classement par défaut. C'est pourquoi nous vous proposons aujourd'hui de voter le dépôt sur le bureau du Grand Conseil, pour éviter la malencontreuse claque qui a résulté en réalité d'une erreur de procédure. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame la rapporteuse. La parole n'étant plus demandée, j'invite l'assemblée à se prononcer sur la proposition de la commission, à savoir le classement.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (classement de la pétition 2148) sont rejetées par 78 non (unanimité des votants).
Le président. Je vous fais maintenant voter sur le renvoi au Conseil d'Etat.
Des voix. Non !
D'autres voix. Oui !
Une voix. Le PLR, mais réveillez-vous ! (Commentaires.)
Mis aux voix, le renvoi de la pétition 2148 au Conseil d'Etat est rejeté par 52 non contre 24 oui et 5 abstentions (vote nominal).
La pétition 2148 est donc déposée sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.
Débat
Le président. Nous abordons à présent la P 2133-A, classée en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à M. Pistis, rapporteur de majorité, à qui je demande de bien vouloir gagner la table des rapporteurs.
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission des pétitions a été saisie d'une pétition titrée de la sorte: «STOP immédiat au centre de renvoi du Grand-Saconnex (Genève) !» Ce texte contient des propos assez froids et qui ne sont pas d'actualité. Afin que tout le monde puisse savoir de quoi l'on parle, je rappelle que les pétitionnaires estiment que les centres fédéraux génèrent inévitablement des violences contre les requérants d'asile, qu'ils traitent les personnes venues trouver refuge en Suisse comme des criminels et qu'ils poussent les requérants d'asile dans la clandestinité.
Mesdames et Messieurs les députés, il faut en premier lieu savoir qu'à Genève, nous n'avons pas de centres de requérants d'asile, nous avons un centre d'accueil. En réalité, des événements en lien avec la politique fédérale en matière d'asile ont déjà révélé par le passé l'existence de problèmes dans certains centres d'accueil. En tout état de cause, la pétition semble confondre «centre d'asile» et «centre de renvoi», un terme beaucoup plus politique et inapproprié pour définir ce lieu.
Par ailleurs, lors de son audition, le président du Conseil d'Etat a rappelé qu'à Genève le centre du Grand-Saconnex bénéficiait de 100 places destinées aux requérants d'asile, de 50 places pour des personnes en procédure de recours et de 50 places pour des personnes devant quitter la Suisse. Il a également rappelé qu'en fonction des besoins, 50 places supplémentaires pourraient être ajoutées. Le fait de soutenir la pétition forcera l'Etat genevois à faire défaut à ses obligations vis-à-vis de la Confédération en matière de politique d'asile. Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de la commission des pétitions vous invite à refuser cette pétition, qui véhicule tout simplement de la désinformation et crée de la ségrégation vis-à-vis des personnes accueillant les requérants d'asile. Merci.
M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition se place dans la droite ligne de la motion qu'une majorité du Grand Conseil avait votée le 22 mars 2019 et qui s'intitulait «Pas de centre fédéral d'attente et de départ à Genève !». Par 53 voix contre 45, notre parlement a donné un message très, très clair. Il l'a donné en se basant sur des éléments factuels, à savoir la construction de ce centre à proximité de l'aéroport, près des pistes de décollage, dans un environnement malsain, avec une pollution de l'air et sonore extrêmement violente, à quoi s'ajoutent des éléments psychologiques: quand vous êtes migrant et sous risque d'expulsion, être placé sous les trajectoires des avions occasionne évidemment une pression psychologique, voire une forme de torture absolument inacceptable. Le Grand Conseil avait pris ces éléments en compte.
La regrettée élue PDC Anne Marie von Arx-Vernon avait relevé à cette occasion que Genève avait construit une relation de confiance avec le SEM autour du projet Papyrus, or ce lien a été rompu suite à la constatation de maltraitances avérées dans les centres fédéraux. Je dis bien «avérées» ! En effet, quand on a prononcé le mot «torture», certains ont probablement sauté sur leur chaise, mais c'est bel et bien avéré: c'est un rapport d'Amnesty International qui le dit. Les recherches font état de violations commises par le personnel de sécurité, notamment de graves cas de maltraitance. Ces derniers ne sont ni des exceptions ni des dérapages individuels, mais la conséquence directe d'un modèle systémique. A la lumière des faits, Amnesty International a alerté sur les violations des droits humains visant des requérantes et requérants d'asile en raison de comportements pouvant être assimilés à de la torture.
Mesdames et Messieurs, il ne faut pas se voiler la face: il existe un système de traitement et d'expulsion d'êtres humains qui s'apparente, en effet, à de la torture. A tel point que le 25 janvier 2023, le Conseil fédéral publiait le communiqué suivant: «Sécurité et exploitation des centres fédéraux pour requérants d'asile: le Conseil fédéral met en consultation des modifications de la législation». Toute une série de constats sur les maltraitances est acceptée. Le Secrétariat d'Etat aux migrations - le SEM - reconnaît des maltraitances et admet qu'il faut faire mieux. Les problèmes sont tellement nombreux qu'il faut changer la loi, d'où l'ouverture de consultations dans les cantons. On est au milieu du gué, Mesdames et Messieurs: on passe d'une situation qui s'apparente à de la torture à une situation qui sera potentiellement mieux encadrée si les mesures nécessaires, nous dit le SEM, conduisent à modifier la loi sur l'asile. Il ne s'agit donc pas de points de détail.
En attendant ces modifications de la loi, nous vous invitons à soutenir cette pétition et à la renvoyer au Conseil d'Etat pour attirer l'attention et avoir une forme de moratoire sur ce centre fédéral; celui-ci est une aberration, une tache sur la Genève internationale, et risque de nuire non seulement à la réputation de Genève, mais aussi bien évidemment - et c'est l'essentiel - à la santé et à la vie même des personnes qui y seront détenues. Merci de votre attention.
Mme Aude Martenot (EAG), députée suppléante. Il me semble que très peu de personnes dans cette salle ont déjà été dans un centre fédéral d'asile (CFA) ou vu de près un tel centre. Celles et ceux qui l'auraient fait auraient découvert une bâtisse entourée de barbelés dont l'entrée est interdite à la société civile et où les sorties sont contrôlées, les retards sanctionnés. En bref, un véritable espace carcéral !
M. Pistis et M. Poggia semblent indiquer - et cela a été dit lors des auditions de la commission - que la construction prévue au Grand-Saconnex serait celle d'un centre d'asile et non de renvoi. C'est faux ! Dans la répartition des centres en Suisse, le SEM prévoit bel et bien un centre de renvoi à Genève en bout de piste d'atterrissage, sous les avions. Or les CFA, encore plus que les foyers, sont générateurs de violence et de souffrance, parce que concentrer autant de personnes dans un lieu avec un mauvais encadrement est intrinsèquement générateur de débordements et de violence. Les CFA sont donc tout simplement des lieux incompatibles avec une population qui a subi les traumatismes de l'asile.
Quelques exemples d'actualité. S'agissant du CFA de Neuchâtel à Boudry, la RTS a récemment montré la vive inquiétude du voisinage, parce que ce centre est surdimensionné et entraîne des problèmes pour le personnel sur place et pour les habitants et habitantes. Le CFA compte aujourd'hui 900 personnes au lieu de 480. On peut imaginer les difficultés que cela implique. Les travailleurs et travailleuses du CFA dénoncent de mauvaises conditions d'emploi et un manque de formation, et le SEM lui-même avoue ne pas réussir à trouver suffisamment de gens à embaucher, parce que personne ne veut y travailler.
Un rapport du CHUV et d'Unisanté a récemment souligné que l'organisation actuelle dans les CFA rend inopérante la prévention du suicide. Ces lieux accentuent encore les risques de suicide: on en a connu dernièrement à Genève. De plus, l'accès aux soins n'est pas garanti aujourd'hui dans les CFA. Des médecins se sont récemment rendu compte que des bébés perdaient du poids de façon dramatique et inquiétante dans le CFA de Fribourg, parce que la nourriture proposée est inadéquate, et les parents se voient interdits d'avoir de la nourriture dans leur chambre.
Alors que veut dire accueillir un CFA dans le canton de Genève ? Est-ce vraiment le moyen pour Genève de «faire sa part» en matière d'asile ? Nous devrions faire notre part en refusant la privatisation de métiers d'encadrement dans les CFA, en refusant la concentration de personnes en situation d'asile dans des espaces où les droits humains sont bafoués, en disant non à la construction d'un tel lieu à Genève. Nous pouvons faire notre part en offrant aux personnes en situation d'asile un accueil au moins à la hauteur de ce qui a été proposé pour les personnes venant d'Ukraine cette dernière année. Rassurez-vous, les personnes en situation d'asile sont bien moins nombreuses. Nous pouvons organiser un appel à soutien de la population pour qu'elle ouvre ses portes.
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.
Mme Aude Martenot. Nous pouvons cesser la construction de bureaux voués à rester vides et ouvrir des foyers accueillants, dignes et à taille humaine.
Le président. Merci, Madame la députée.
Mme Aude Martenot. Nous devons arrêter avec ce projet de CFA au Grand-Saconnex, qui sera bientôt décrié par les organisations de défense des droits humains, je vous le garantis. (Applaudissements.)
Le président. C'est terminé, Madame la députée. Merci. Je passe la parole à Mme Christina Meissner.
Mme Christina Meissner (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, Genève doit faire sa part en la matière, en accueillant un centre d'asile et de renvoi. Si ce projet était stoppé - car la pétition demande d'interrompre immédiatement la construction du centre -, Genève reporterait la prise en charge des réfugiés sur d'autres cantons, ce qui serait ni responsable par rapport aux besoins, ni en accord avec la volonté exprimée par le peuple par voie de votation.
Le centre du Grand-Saconnex n'hébergera pas uniquement des requérants d'asile devant partir du pays: 100 places seront destinées aux requérants d'asile, 50 places à des personnes en procédure de recours et 50 places à des personnes devant quitter la Suisse; 50 places supplémentaires non attribuées s'ajouteront à ce nombre et seront utilisées en fonction des besoins ponctuels. Les Ukrainiens, par exemple, auraient pu en profiter, si le lieu était déjà opérationnel. Ce centre n'est donc pas un sas de l'aéroport permettant de faciliter les renvois.
Pour rappel, exactement au même endroit, il y a eu pendant des années le centre des Tilleuls qui abritait des requérants déboutés. Ce dernier était dans un état déplorable, si bien que le nouveau centre représente un réel progrès. Quant à la proximité avec l'aéroport, figurez-vous qu'il y a moins de bruit aux abords de la piste que sous l'axe d'approche des avions, et des Genevois - bel et bien des Genevois - vivent avec des nuisances sonores dues à l'aéroport bien pires.
Une voix. Bravo !
Mme Christina Meissner. On n'aide pas l'asile en s'opposant à des centres pour requérants et réfugiés, c'est pourquoi le PDC votera en faveur du classement de cette pétition. Je vous remercie.
M. Alexis Barbey (PLR). La pétition s'oppose à la construction d'un site de renvoi, or il s'agit là d'un engagement que nous avons pris vis-à-vis de la Confédération. Je pourrais arrêter là mon intervention, puisque ce seul argument suffit à nous obliger à aller dans le sens de ce centre d'asile, contrairement à ce que souhaite cette pétition.
La nouvelle construction va remplacer un bâtiment qui était dans un état vétuste - ma préopinante l'a dit -, et je crois qu'il faut rappeler qu'il s'agit d'une amélioration et non d'une péjoration des conditions pour ce qui est de la détention... de l'accueil des réfugiés. (Exclamations.) Bizarrement, les pétitionnaires se plaignent des conditions d'accueil, mais ne proposent pas de les modifier; ils proposent uniquement de ne pas entrer en matière sur la construction de l'immeuble lui-même. C'est un peu étrange ! Ils ne se sont pas souciés des conditions d'accueil, mais sous le poids de la culpabilité autour de la gestion de ce centre, ils ont uniquement essayé de nier la nécessité d'un bâtiment d'accueil.
Or que se passerait-il si on refusait la construction de ce centre ? Il faudrait tout simplement envoyer les réfugiés à Boudry, seul autre centre à disposition géographiquement proche - là où se produisent tous les dérapages dont se plaint la pétition. Par conséquent, accepter ce texte reviendrait à empirer une situation que les pétitionnaires ne trouvent pas idéale.
Il faut aussi dire que des améliorations ont été amenées dans le cadre de ce projet: un comité de suivi a été mis en place, et pour encadrer le centre on aura recours, en plus des professionnels déjà présents, au monde associatif.
Maintenant j'aimerais citer - ce n'est pas fréquent - M. Poggia qui disait: «On ne combat pas l'asile en s'opposant à des centres.» Je crois que c'est tout à fait vérifié par la présente pétition, qui sur la forme - je le signale en outre - contient des termes violents tels que «sadisme institutionnel». Elle a pour intention de nous prendre en otages dans le cadre de ces démarches. Pour toutes ces raisons, le parti libéral-radical vous incite à refuser cette pétition et à la déposer sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie.
M. Stéphane Florey (UDC). Il y a un point, quand même, sur lequel on peut être parfaitement d'accord avec les pétitionnaires: dans le meilleur des mondes, il ne devrait pas y avoir de centres d'accueil de réfugiés, parce que dans le meilleur des mondes, si on était un peu plus intelligent qu'aujourd'hui, on stopperait les réfugiés au départ et on les empêcherait de risquer leur vie. Quand on voit ce qui se passe en mer, les bateaux qui coulent, ce genre de choses, et les personnes victimes de trafiquants de vies humaines... Sur ce point, on est d'accord; mais alors qu'on les empêche d'arriver en s'occupant d'eux au départ ! C'est le premier élément.
Maintenant on a bien compris les arguments fallacieux des pétitionnaires - et il ne faudra pas se tromper -, puisque de toute façon ils ne veulent qu'une chose: en refusant un centre de requérants d'asile, ils veulent simplement que la Suisse les accueille. Point final ! Sans autre mesure. Il faudrait les accueillir et laisser les frontières grandes ouvertes, ce qui est tout bonnement impossible et irréaliste.
Pour ces raisons et à la suite de tout ce qui a été dit à son encontre, c'est bel et bien un classement que cette pétition mérite, et il ne faudra pas se tromper lors du vote. Je vous remercie.
Mme Katia Leonelli (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, permettez-moi en préambule de dire que le groupe Vert s'était positionné en faveur du renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat. Etant donné que la majorité opposée à la pétition a ensuite voté contre le dépôt afin de la classer, notre groupe s'est abstenu pour éviter de soutenir un classement - classement que nous refuserons aujourd'hui.
Pour ce qui est du fond de cette pétition, ses constats sont malheureusement toujours d'actualité. Depuis des années, des associations, la population civile, les partis politiques et même notre Grand Conseil s'expriment pour que l'on renonce au centre de renvoi du Grand-Saconnex, à travers la motion 2489 déposée en 2018 par Delphine Klopfenstein (laquelle avait convaincu une majorité de notre hémicycle, y compris le PDC) et par le biais de cette pétition qui a récolté pas loin de 4500 signatures. La motion en question a fait l'objet de quatre réponses du Conseil d'Etat, toutes qualifiées d'insatisfaisantes par notre Grand Conseil, dans lesquelles le gouvernement se contentait de rejeter la faute sur la Confédération.
Notre Conseil d'Etat genevois aurait dû, Mesdames et Messieurs les députés, prendre ses responsabilités et faire honneur à la tradition humanitaire de notre canton. C'est une honte qu'à moins de 5 kilomètres du siège du Haut-Commissariat aux droits de l'homme et de l'ONU, un centre de renvoi indigne voie le jour entre une autoroute et la piste d'aéroport située à quelques mètres de là. Les nuisances sonores et la pollution du site que subiront les requérants d'asile de ce centre sont incomparables aux nuisances que subissent les Genevois de la rive droite, comme a osé le laisser croire le PDC.
Est-ce si difficile d'appliquer la loi sur l'asile tout en respectant les libertés humaines les plus fondamentales ? En 2021, les centres fédéraux d'asile ont été pointés du doigt dans un rapport d'Amnesty International dénonçant de graves violations des droits humains, des actes assimilables à de la torture, de la violence, des obstructions à l'accès aux soins médicaux, des comportements racistes et des insultes à l'égard d'individus considérés comme coupables d'avoir fui la guerre ou la pauvreté.
Cela a déjà été répété à plusieurs reprises durant nos débats sur la motion 2489, mais permettez-moi de le souligner et de le rappeler encore une fois: tels qu'ils sont gérés aujourd'hui, les CFA s'apparentent plus à des lieux de semi-détention qu'à des lieux d'accueil. En tant que collectivité, nous avons tout à perdre à mettre en oeuvre une politique d'asile dissuasive qui pousse les bénéficiaires à l'irrégularisation et à la clandestinité et cause immanquablement de graves problèmes de santé.
Aux dernières nouvelles, les activités du centre pourraient débuter dans une année. Mesdames et Messieurs les députés, nous voulons saisir l'occasion de cette pétition pour affirmer encore une fois notre opposition à ce centre de renvoi. Quoi qu'il advienne de cette pétition, nous espérons que le Conseil d'Etat aura entendu ce message et fera tout ce qui est en son pouvoir pour limiter les dégâts. Nous déplorons la position du PDC qui avait soutenu la motion Verte de 2018 et avait même déposé une résolution allant dans le même sens. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Emmanuel Deonna (S). Les pétitionnaires demandent d'interrompre immédiatement la construction du centre fédéral d'asile et de renvoi du Grand-Saconnex. Cette pétition est soutenue par une très large coalition, les associations spécialisées dans l'aide aux migrants et les syndicats. Mes préopinants l'ont rappelé, contrairement à ce qu'affirme Mme Meissner, les conditions de vie prévues dans ce centre sont totalement indignes. Les requérants d'asile devront demander une autorisation pour chaque sortie de ce centre. Elles et ils seront soumis à des horaires restrictifs - 9h à 17h en semaine - qui rendront impossible une vie sociale extérieure. Elles et ils ne pourront recevoir des visites de leurs proches. Les enfants seront scolarisés à l'intérieur même du centre et soumis à des sanctions à la moindre infraction au règlement.
C'est dans ces conditions indignes - mes préopinants l'ont rappelé - que l'on prévoit prétendument d'«accueillir» les requérants d'asile, celles et ceux qui ont simplement le malheur d'avoir fui les guerres ou la pauvreté. Vous le savez, Mesdames et Messieurs les députés, près de la moitié des requérants que l'on fait vivre dans ces conditions de maltraitance et de semi-détention finit de toute façon par sortir du système. Pérenniser de telles pratiques à Genève reviendrait à bafouer totalement la tradition humanitaire du canton. C'est pourquoi le groupe socialiste demande le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole au rapporteur de minorité, M. Sylvain Thévoz, pour une minute quarante-cinq.
M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai oublié de rappeler un élément: l'étude de cette pétition a eu lieu en trois séances. On a entendu les pétitionnaires, le magistrat, puis on a voté. On avait sollicité l'audition d'Amnesty suisse et de la Ligue suisse des droits de l'Homme, ce qui a été refusé, c'est pourquoi je vous demanderai de renvoyer ce texte à la commission des pétitions afin qu'on puisse les entendre. Certains ont dit qu'il s'agissait d'un débat gauche-droite. Il est regrettable que sur une question de droits humains, de droits fondamentaux, on se retrouve dans un clivage gauche-droite. Il faut évidemment entendre les associations des droits humains et réétudier cette pétition.
Je m'étonne également de la position du PDC-Le Centre, qui est extrêmement surprenante. Hier soir, on votait une résolution pour une protection renforcée des réfugiés mineurs non accompagnés jusqu'à 25 ans. (Commentaires.) On faisait le constat des conditions et des risques de suicide. Là, vous aurez un centre de renvoi où logeront des familles, des mineurs, lesquels sortiront de ces lieux de détention - quelqu'un l'a dit, tout comme M. Deonna -, de ces lieux de semi-détention grillagés. Les enfants iront à l'école au Grand-Saconnex, reviendront et se retrouveront face à des Securitas. Cela doit quelque peu nous alerter sur la manière dont les choses vont se passer et nous devons quand même mettre un peu la pression sur le Conseil d'Etat. C'est pourquoi nous vous proposons un renvoi à la commission des pétitions - en espérant que le PDC se repositionne -, afin de réétudier cette pétition sous l'angle des droits humains et non en fonction d'un clivage gauche-droite à quelques mois des élections cantonales. Merci. (Commentaires. Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Sur le renvoi en commission, Monsieur le rapporteur de majorité ?
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Renvoyer ce texte à la commission des pétitions est inutile. Comme je vous l'ai dit en préambule, cette pétition est diffamatoire; elle contient des propos qui font froid dans le dos et véhicule de la désinformation. Par respect pour tous les employés qui travaillent dans ces centres d'accueil, puisqu'on parle bien de centres d'accueil, je vous invite à classer cette pétition et à refuser, bien sûr, le retour en commission. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Monsieur le conseiller d'Etat, souhaitez-vous vous exprimer sur le renvoi en commission ? (Remarque.) Ce n'est pas le cas. Nous passons donc au vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la pétition 2133 à la commission des pétitions est adopté par 46 oui contre 43 non. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Débat
Le président. Au point suivant figurent les P 2146-A et P 2155-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Pour commencer, la parole échoit à M. Jean Romain.
M. Jean Romain (PLR), rapporteur de majorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Chers collègues, la pétition 2146 demandant la suppression de la course de Verbois, qui a lieu deux jours par année, part d'un constat légitime: les pots d'échappement font du bruit, les motos sur piste fermée font du bruit. Le bruit est un fléau, et il faut tout mettre en oeuvre pour le limiter, pour le contenir.
Or la pétition opère une sorte de généralisation tout à fait indue: elle se base sur un fait erroné, à savoir que durant le reste de l'année, soit les 363 jours où la course n'a pas lieu, les motards s'entraînent sur cette route, qui devient pour eux une piste, ils se concentrent sur ce court tronçon. C'est évidemment faux, mais lorsque les hommes ne peuvent changer les choses, chers collègues, ils changent les mots.
Personne ne nie que des motards, ici ou ailleurs, dépassent les limites de bruit ou de vitesse, mais cela ressortit au contrôle usuel de la police, laquelle doit faire respecter comme il se doit les lois en vigueur. Le rapporteur de minorité constate avec une totale ingénuité - cela figure à la page 44: «L'action de la police est limitée, les motards se retirent lorsque les gendarmes arrivent.» On se fiche du monde ! Les motards qui transgressent le code de la route à Verbois ne restent pas sur place pour se faire prendre lorsqu'ils aperçoivent des policiers ! Qu'ils sont sots ! En réalité, tous ceux qui enfreignent le code de la route, que ce soit sur cette route-ci ou sur une autre, fuient la police. Mais c'est une affaire de police, pas de course de moto.
Soyons clairs: cette course fait du bruit, oui, mais elle ne se situe pas dans une réserve naturelle et elle permet à une population nombreuse, puisque c'est l'unique du canton, de passer un moment convivial, festif, certes bruyant, mais sur deux seules journées. Derrière cette pétition, chers collègues, se cache un tout autre combat, le combat de ceux qui ne supportent pas le trafic motorisé, qui désignent à la vindicte les conducteurs de voiture, de moto ou de vélomoteur comme responsables du bruit, de la pollution et de tous les accidents routiers.
Le rapporteur - bien seul dans sa minorité - indique à la page 48: «Cette manifestation appartient à un autre temps [...]» Ha ha ! Mesdames et Messieurs, ce n'est pas la première fois qu'on nous reproche de ne pas vivre avec notre temps. L'argument massue est celui-ci: «Vous n'êtes pas d'accord avec nous, donc vous vivez dans votre temps à vous, pas dans le nôtre !» Nous tremblons à la seule idée d'être des exclus du temps ! Nous serions des adeptes d'un autre temps, en somme, des damnés de l'alter !
M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, merci au député Jean Romain, également rapporteur de majorité, de reconnaître les gros problèmes que génère cette manifestation et que les habitants relayaient dans une pétition: il reconnaît les nuisances sonores excessives, il reconnaît la surcharge de motards sur une route que l'attrait de la course popularise, il reconnaît que les motards s'en moquent, fuient et n'attendent pas les policiers. La police en a fait le constat, elle a communiqué à la commune de Russin que cette route cantonale devenait un champ d'exercices toute l'année. Il y a ainsi un lien évident, que M. Romain a reconnu, entre la course de Verbois et des nuisances sonores continues.
Vous le savez, plus de 120 000 personnes à Genève souffrent du bruit excessif. (Exclamations.) Vous savez que les valeurs limites d'exposition explosent, que le bruit a un impact direct sur la santé de l'écrasante majorité de la population. Il y a donc une corrélation entre cet événement et les conséquences sur la santé et le bien-être de nos concitoyens. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle ils ont déposé la pétition 2146 dont nous sommes saisis aujourd'hui.
Mais il y a pire: cette course s'inscrit dans un périmètre écologique qui est un site Ramsar, c'est-à-dire que nous sommes ici au coeur d'un site d'une importance internationale du point de vue écologique, botanique, zoologique, limnologique et hydrologique, nous sommes dans une zone humide rare qui revêt une importance internationale pour les oiseaux d'eau en toute saison. Vous admettrez qu'il est tout de même singulier d'y organiser une course de moto.
De plus, en pleine crise énergétique, alors que nous devons déployer des efforts conséquents pour réduire notre consommation - on demande aux gens de se doucher avec un peu d'eau froide, s'il vous plaît, on baisse la température des piscines -, on offre ici l'opportunité, vu que la course a lieu sur une partie du territoire des SIG, qui mettent leur terrain à disposition pour y installer le paddock, de faire une sorte de potlatch énergétique avec des motards qui - ce sont les pétitionnaires qui le disent - font des burns. M. Jean Romain est un motard, il nous l'a confirmé: vous brûlez les pneus en freinant et en accélérant à forte vitesse, donc vous projetez des microparticules dans l'air et le long du Rhône en polluant les sols et l'eau.
Mesdames et Messieurs, ce n'est pas une pétition extrémiste, ce n'est pas une pétition des modernes, des actuels, des wokes contre les anti-wokes, des véganes contre les non-véganes. Revenons sur terre: c'est simplement une pétition d'habitants qui en ont marre de se faire casser les oreilles, qui se demandent s'il est vraiment nécessaire que, pendant deux jours, des milliers de motos fassent la course sur une route cantonale, encourageant la vitesse et donc les prises de risque. Est-ce vraiment nécessaire, est-ce vraiment utile ? Parce qu'eux, ils en souffrent toute l'année. Pour toutes ces raisons et par bon sens, nous vous invitons à renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat et à vous opposer à la contre-pétition tardive des personnes qui veulent maintenir cette manifestation. Merci.
M. Pierre Vanek (EAG). Mesdames et Messieurs, concernant la pétition 2146 demandant l'interdiction de la course de moto à Verbois, des intérêts contradictoires sont en jeu. Il y a d'abord les intérêts légitimes des habitants, qui s'opposent aux inconvénients créés par cette course dans leur secteur d'habitation, dans leur quartier. Le problème allégué - son fondement est, semble-t-il, réel - a trait à l'utilisation accrue du périmètre de la course par des motards qui trouvent sympa de s'entraîner à cet endroit ou, du moins, d'aller y faire de la moto.
Il y a donc les intérêts des habitants, auxquels s'ajoute un élément que Jean Romain a évoqué de manière un peu méprisante - il m'excusera de le souligner -, à savoir que certaines personnes pensent qu'aujourd'hui, avec la crise climatique, dans le cadre d'une volonté collective de ce canton de se dégager autant que faire se peut du transport individuel motorisé et des énergies fossiles, eh bien le mauvais exemple que représente cette course mérite d'être combattu. De ce point de vue là, la première pétition est évidemment légitime.
Cependant, il y a également les intérêts légitimes des organisateurs de cette course. (Remarque.) On m'interpelle, mais je ne vais pas m'interrompre. On parle ici d'un événement populaire, gratuit, associatif, qui présente un certain intérêt. Face à cette contradiction, ce que j'ai pour ma part proposé en commission - je ne sais pas si cela ressort du rapport, je ne l'ai pas étudié suffisamment attentivement -, c'est de renvoyer les deux pétitions au Conseil d'Etat, estimant que celui-ci doit prendre cette situation en main et arbitrer les intérêts divers. A terme, bien sûr que cette course devra cesser, il est impossible de maintenir une manifestation de motos et d'engins individuels motorisés en raison de leur exemple négatif, il faut trouver des solutions.
Mais enfin, il faut tout de même dialoguer, l'affaire ne se tranche pas simplement par une mesure administrative d'interdiction, mesure que les signataires de la première pétition sont d'ailleurs bien en peine d'obtenir. La position que nous avons défendue en commission est donc le renvoi des deux pétitions au Conseil d'Etat pour qu'il y réponde de manière adéquate. Dans un premier temps, nous voterons le renvoi au Conseil d'Etat de la P 2146 pour l'interdiction de la course. Merci.
Mme Katia Leonelli (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, la pétition 2146 demande - c'est écrit noir sur blanc - de ne pas accorder d'autorisation de manifester pour la tenue de la course de Verbois. Selon les pétitionnaires, cet événement qui se tient sur deux jours serait source de nuisances toute l'année pour les riverains.
Les travaux de commission nous ont toutefois démontré que la course en elle-même n'est pas la cause des nuisances quotidiennes. Proscrire cette course n'empêchera pas les amateurs de motos de venir profiter de ce qu'ils qualifient d'une «belle route» tous les autres jours de l'année. Un tel événement peut même permettre de canaliser certaines énergies et performances motocyclistes à un week-end dans l'année.
Attachés au droit de manifester, nous nous opposons à l'interdiction de la course de Verbois, comme le demandent les pétitionnaires, mais nous les rejoignons sur le constat, à savoir que les nuisances sonores routières sont très difficiles à vivre et constituent un véritable problème de santé publique. D'autres pétitions sur le même sujet sont régulièrement déposées et occupent une grande partie de nos travaux de commission. Le groupe des Verts s'est abstenu sur cette pétition et en fera de même aujourd'hui, car, je le répète, si nous rejoignons le constat des signataires, nous n'adhérons pas à la solution qu'ils proposent.
Cependant, pour ne pas rester passives vis-à-vis de cette problématique, ma collègue commissaire aux pétitions et moi-même avons déposé une proposition de motion demandant au Conseil d'Etat d'installer des radars antibruit de manière pérenne sur ce type de tronçons et de procéder aux premières sanctions lors des dépassements de limites sonores. J'espère que ces éléments pourront éclairer la position des Verts sur le sujet et rassurer les pétitionnaires. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Mme Gabriela Sonderegger (MCG), députée suppléante. Mesdames et Messieurs les députés, la pétition 2146 démontre une fois de plus la volonté clairement assumée de certains partis de gauche - notamment des socialistes - de nous restreindre un peu plus chaque jour dans nos libertés en nous privant de nos festivités.
La course de Verbois est un événement populaire et gratuit qui existe depuis une soixantaine d'années et qui, le temps d'un week-end, réunit les familles et les passionnés de motos. Apparemment, cela déplaît fortement à une centaine de personnes, dont certains membres du parti socialiste et d'Ensemble à Gauche qui se sont même permis d'insulter les motards à la télévision pour appuyer cette pétition, ce qui est à peine croyable.
Pire encore: les propos sexistes inacceptables contre les femmes motardes, qualifiées de «trophées» par un élu. Cela a d'ailleurs amené un groupe de femmes à se constituer en comité pour protester contre ces paroles blessantes prononcées sans aucun égard envers elles.
En réponse à toutes ces attaques contre nos libertés que nous chérissons et pour l'outrage fait aux femmes à de seules fins politiques, le MCG votera le dépôt de la pétition 2146 et soutiendra la P 2155 pour défendre la course de Verbois. Nous félicitons au passage le groupe des Verts pour sa modération et son abstention sur ces deux pétitions, ce qui démontre qu'à gauche, il n'y a pas que des dogmatiques.
Par ailleurs, Monsieur le président, vous transmettrez au député concerné que nous, les femmes, ne sommes pas des objets et que ses propos sexistes sont parfaitement indélicats. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Alexis Barbey (PLR). Soixante-cinq ans, Mesdames et Messieurs: voilà soixante-cinq ans que la course de Verbois existe. Qu'on ne vienne pas nous raconter que les gens qui habitent dans le périmètre n'étaient pas avertis ! Ils étaient largement au courant des nuisances qu'ils pouvaient rencontrer et du fait que, deux jours par année, la route est bloquée pour permettre aux motards d'exercer leur art.
Il faut relever que la police a été prévenue que certaines personnes se plaignent des nuisances sonores et des dépassements de vitesse que les motards pratiqueraient sur ce tronçon, mais les agents n'ont jamais réussi à établir un lien entre la course et les éventuels dépassements, de même qu'ils ne verbalisent pas de façon excessive autour de la route de Verbois. Par conséquent, on ne peut pas dire qu'il s'agit d'un lieu d'entraînement pour la course de moto.
La commune de Russin est en faveur de cette course, qui crée une animation qu'elle ne connaît pas forcément à beaucoup d'autres moments de l'année, c'est une fête populaire dont chacun s'attache à reconnaître qu'elle est extrêmement bien gérée. Les associations locales et les groupements de motards coopèrent pour en faire un événement réussi qui bénéficie à la population.
Pour toutes ces raisons, essentiellement eu égard à la longévité de cette course et au fait que tout un chacun est au courant de son existence - peu de gens se sont établis dans la région avant que la course de Verbois existe -, le parti libéral-radical vous invite à déposer la P 2146 sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Christian Flury pour une minute trente-huit.
M. Christian Flury (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, comme vous le savez tous, un véhicule qui peut rouler sur les routes en Suisse répond à des normes strictes qui permettent son immatriculation. Seules les motos - tout comme les scooters et les voitures - répondant à ces critères ont le droit de circuler.
Oui, il y a une course motocycliste à Verbois deux jours par année, deux jours pendant lesquels des véhicules qui tournent normalement sur piste et font un petit peu plus de bruit sont admis à courir.
Quant au nombre de participants, Monsieur Thévoz, ils ne sont pas des milliers - vous transmettrez, Monsieur le président, je vous remercie -, mais 100 à 150. 100 à 150 motos en tout et pour tout. Ils ne sont pas des milliers !
Ce sont des véhicules bruyants qui font la course, mais tous les autres viennent regarder, s'y balader pour le plaisir, en sortie tranquille, ils font un bruit tout à fait normal. Et puis si nos scooters et motos sont performants et sûrs actuellement, c'est quand même grâce à l'expérience issue de la course qui permet de faire progresser la technique quant à la sécurité et à la fiabilité.
Enfin, s'agissant du bruit qui vous tient tant à coeur, habitant un quartier populaire, je vous parlerai des drifts sur les giratoires, des gens qui prennent les «murges mobiles» à une heure du matin en parlant extrêmement fort parce qu'ils ne s'entendent plus tellement ils sont pleins... (Commentaires.) ...des rave partys des jeunes et autres. Ceux-là, par contre, ne sont pas inquiétés. Visiblement, vous êtes de leur côté. Je vous remercie de votre attention et rejoins les conclusions de ma préopinante.
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, sans aucune ambiguïté, le parti socialiste considère que la situation actuelle et les nuisances sonores subies par les habitants riverains de la route de Verbois ne sont pas acceptables. On le sait, être exposé à des niveaux sonores...
Une voix. Y a deux habitants !
D'autres voix. Chut !
Le président. Monsieur Sormanni, si vous souhaitez intervenir, vous appuyez sur votre bouton, s'il vous plaît ! Poursuivez, Madame Marti.
Mme Caroline Marti. Merci, Monsieur le président. On le sait, être exposé à des niveaux sonores excessifs nuit non seulement à la tranquillité et à la qualité de vie, mais aussi au sommeil et à la santé. De même, des vitesses excessives sur une route à proximité de logements menacent la sécurité des habitants. A ce titre, les riverains ont droit à ce que leur santé et leur sécurité soient protégées.
Là où les avis divergent au sein du groupe socialiste, c'est sur les moyens à mettre en oeuvre pour protéger ces personnes. Certains considèrent que la tenue de cette course encourage les motards à venir aussi le reste de l'année pour s'y entraîner, quand d'autres estiment que son interdiction ne permettra pas de réduire les nuisances sonores le reste du temps et que, partant, cette mesure est disproportionnée. C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste octroiera la liberté de vote quant au sort qu'il faut réserver à ces deux pétitions.
En revanche, nous nous engageons à travailler à des solutions rapides, efficaces et constructives pour protéger les riverains de la route de Verbois, mais aussi l'ensemble de la population du canton contre le bruit routier. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci bien. Je rends la parole à M. Jean Romain pour cinquante secondes.
M. Jean Romain (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je voudrais juste rassurer M. Vanek: oui, le rapport fait bien mention de son double soutien aux pétitions, cela y figure. On peut se demander si renvoyer au Conseil d'Etat une pétition qui dit oui et une autre qui dit non est bien judicieux, mais je laisserai Ensemble à Gauche répondre à cette question.
Il s'agit d'un événement populaire, chers collègues, de deux jours de bruit à la campagne - on ne se situe pas en pleine ville. Deux jours de bruit à la campagne valent peut-être une fête gratuite, deux jours contre 363 sans course. On rabâche les mêmes lieux communs à propos du bruit, qui ne sont pas faux, mais enfin, qui ne sont pas pertinents en l'occurrence, donc nous allons faire exactement ce que la majorité a décidé, à savoir déposer la première pétition, la P 2146, et renvoyer au Conseil d'Etat la seconde, la P 2155. Cela relève du bon sens même, et nous sommes de notre temps, rassurez-vous !
Le président. Je vous remercie. Monsieur Sylvain Thévoz, il vous reste une minute vingt.
M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, une petite précision: l'argument selon lequel la course a un impact sur la circulation toute l'année en raison d'une fréquentation élevée de motards ne vient pas de moi, mais de la police - vous pourrez le vérifier - qui a transmis cette information au Conseil municipal de Russin. M. Barbey, sauf erreur, disait que la commune se réjouit de cette course; eh bien le vote s'est joué à une voix, il a été extrêmement disputé et le sera à nouveau lors de la prochaine édition.
Il y a un ras-le-bol grandissant au sein de la commune s'agissant d'un événement qui n'amène aucune plus-value, mais crée principalement des nuisances. Le paddock est construit le long du Rhône, dans une zone naturelle. Cette course n'a aucun lien avec la commune de Russin, contrairement à la manifestation populaire bienvenue qu'est la fête des vendanges, où un grand nombre d'entre nous se retrouvent d'ailleurs et où on peut vraiment parler de fête populaire. Dans le cas d'espèce, on est au pied d'un centre des SIG, sur une route cantonale.
Je ne rappellerai pas le nombre de victimes qu'il y a eu sur les routes l'année passée, un nombre extrêmement élevé... (Exclamations.) La vitesse représente une menace, nous devons faire de la prévention vis-à-vis de la vitesse routière, pas de l'encouragement. Aussi, nous renverrons... Je vous propose de renvoyer la pétition 2146 au Conseil d'Etat pour interdire la course de Verbois. Merci.
Le président. Je vous remercie et cède la parole à M. Souheil Sayegh pour trois minutes.
M. Souheil Sayegh (PDC). Merci, Monsieur le président. Je serai assez bref. Je me suis rendu compte que nous n'avions pas pris position pour ou contre la pétition 2146. Le PDC-Le Centre soutient cet événement, revendique au final toutes les libertés qu'on cherche constamment à restreindre: la liberté de s'exprimer, de chanter, de conduire, de se rendre à un concert...
La course de Verbois fait partie du patrimoine genevois, si j'ose le formuler ainsi, et d'après ce que nous avons pu entendre - les Verts s'abstiendront, le parti socialiste accorde la liberté de vote -, il n'y a de loin pas d'unanimité quant à la mise à mort de cette manifestation. Le Centre, futur ex-PDC, se réjouit de soutenir cette forme d'expression dans la campagne genevoise. Je vous remercie.
Une voix. Bravo.
Une autre voix. Très bien.
M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe UDC déposera la pétition 2146 sur le bureau du Grand Conseil et soutiendra la pétition 2155. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Le Conseil d'Etat souhaite-t-il prendre la parole ? (Un instant s'écoule.)
Une voix. Allô ! (Rires. Remarque.)
Le président. Non, ce n'est pas le cas. Nous passons dès lors à la procédure de vote. S'agissant de la P 2146, je mets aux voix les conclusions de la majorité de la commission des pétitions, à savoir le dépôt sur le bureau du Grand Conseil.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 2146 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 53 oui contre 15 non et 15 abstentions (vote nominal).
Le président. En ce qui concerne la P 2155, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions sont le renvoi au Conseil d'Etat.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2155 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 52 oui contre 16 non et 15 abstentions (vote nominal).
Premier débat
Le président. Nous passons aux objets dont le délai de traitement en commission est dépassé, qui sont classés en catégorie II, trente minutes. Nos travaux commencent avec le PL 12709. Je cède la parole à M. Yvan Zweifel, premier signataire.
M. Yvan Zweifel (PLR). Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi est consécutif à la crise que l'on a pu connaître avec le covid, mais il n'y est pas directement lié, puisqu'il propose d'anticiper une situation identique qui se reproduirait à l'avenir. Nous avons entendu passablement d'experts qui nous ont dit que le fond du sujet était bon, mais qu'il y avait peut-être matière à le retravailler, c'est pourquoi des amendements sont prêts. Le travail en commission a été réalisé en partie et les amendements sont prêts à être étudiés. Aussi, au nom du groupe PLR, je vous propose le renvoi à la commission fiscale.
Le président. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur cette demande de renvoi.
Mis aux voix, le renvoi pour six mois du projet de loi 12709 à la commission fiscale est adopté par 74 oui et 1 abstention.
Un rapport doit être rendu dans les six mois (article 194 LRGC).
Débat
Le président. Le point suivant est la M 2569. Je précise qu'il s'agit d'un délai de traitement 2 dépassé. Madame Claude Bocquet, vous avez la parole.
Mme Claude Bocquet (PDC). Merci, Monsieur le président. J'ai déposé cette motion en juin 2019; elle n'a pas été travaillée en commission, car on l'a immédiatement gelée dans l'attente du dépôt du projet de loi sur l'égalité du Conseil d'Etat. Cela fait donc trois ans et demi que j'attends une réponse. Or aujourd'hui, nous allons devoir nous prononcer sur ce texte, puisqu'il s'agit du deuxième délai de traitement dépassé.
Je vais vous expliquer en très peu de temps ce qu'il en est. Cette motion demande l'instauration d'un label «Egalité salariale» pour les entreprises de 50 employés et plus, dont au moins 10 femmes. Ce sera un facteur de contrôle prépondérant pour l'attribution des marchés publics. Cette motion est souple, car elle permet aussi d'ajouter des points bonus. Elle demande en outre la tenue d'une liste publique afin que tout un chacun puisse favoriser les entreprises qui bénéficieront de ce label.
Quand j'ai déposé cette motion en 2019, l'«Equal Pay Day» était le 22 février. Cela signifie que, si un homme et une femme commencent à travailler le 1er janvier, l'homme est effectivement payé dès le 1er janvier, tandis que la femme doit quant à elle attendre le 22 février; elle travaille donc gratuitement pendant plus d'un mois et demi. Depuis trois ans, cette date s'est déplacée de deux jours: actuellement, l'«Equal Pay Day» est le 20 février, de sorte qu'à ce rythme-là, il faudra encore une cinquantaine d'années avant que les femmes obtiennent enfin l'égalité salariale.
Le canton du Jura a voté sur une initiative qui va dans ce sens, puisqu'elle demande de contrôler les entreprises de plus de 50 employés. Le texte a été accepté en 2021 avec un score impressionnant de 88,3%. Or l'année passée, en septembre, sous prétexte d'égalité, le peuple suisse a voté pour augmenter l'âge de la retraite des femmes d'une année. C'est assez incroyable, car cette égalité, on ne l'a pas. C'est donc inadmissible ! A Genève, l'objet en question a d'ailleurs été refusé. Les femmes en ont marre d'être les dindons de la farce, c'est pourquoi je vous invite à accepter cette motion, qui pourra peut-être aider le projet de loi du Conseil d'Etat à avancer. Par ailleurs, je demande le vote nominal. Merci. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Jean Burgermeister (EAG). Cette motion traite d'un sujet important, et je ne doute pas une seconde de la sincérité de sa première auteure - ou autrice.
Une voix. Auteure !
M. Jean Burgermeister. Néanmoins, le texte pose de vrais problèmes. D'abord - il faut quand même le rappeler - l'égalité salariale n'est pas une option: c'est une nécessité légale, inscrite dans la loi et dans la constitution aussi bien suisse que genevoise, mais elle n'est toujours pas appliquée. Le PDC, aujourd'hui, nous propose de féliciter, de remercier celles et ceux qui appliquent la loi et la constitution ! Mesdames et Messieurs, on peut imaginer que demain le PLR viendra avec une motion en faveur d'un badge pour les multimillionnaires qui paient leurs impôts sans faire de l'évasion fiscale... Evidemment, c'est grotesque ! (Exclamations. Rires.) Imagine-t-on un instant un label qui féliciterait celles et ceux qui n'ont pas commis de vol ou d'assassinat ? Non, Mesdames et Messieurs, on se contente de punir celles et ceux qui les commettent. Voilà ce qu'il faut pour l'égalité salariale.
Or pourquoi est-ce qu'on ne punit pas les entreprises qui ne respectent pas l'égalité salariale ? Eh bien, pour deux raisons. D'abord, il n'y a pas assez de contrôles. Pas assez de contrôles, parce que pas assez de moyens. L'ensemble de la droite, PDC compris, refuse de donner les moyens, que ce soit au niveau fédéral ou cantonal, pour véritablement contrôler l'égalité salariale. De plus, Mesdames et Messieurs, les contrôles ne suffisent pas; il faut aussi, vous le savez, des sanctions ! (Exclamations.) Or la majorité de droite au Parlement fédéral, y compris le PDC, a toujours refusé d'intégrer des sanctions réelles destinées aux entreprises qui ne respectent pas l'égalité salariale. On ne peut donc pas, Mesdames et Messieurs, voter la motion du PDC qui, à Genève, fait mine de s'intéresser à l'égalité salariale et, à Berne, fait tout pour l'empêcher. C'est pour cette raison que nous refuserons ce texte, non pas parce que nous sommes contre l'égalité salariale, mais parce que nous pensons qu'il convient de faire en sorte que l'Etat fasse appliquer la loi. Il faut des contrôles et des sanctions pour les entreprises qui ne l'appliquent pas. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je ne voudrais pas contredire Mme Bocquet, mais cet objet a été traité en commission. Il a été examiné avec deux autres motions. L'une - dont le premier signataire est M. Youniss Mussa - s'appelle «Label égalité femmes-hommes: encourageons les entreprises à s'engager sur la voie de l'égalité» et a été refusée par la commission; elle se trouve à l'ordre du jour de ce Grand Conseil et nous la traiterons à l'occasion. L'autre motion a été déposée par M. Yves de Matteis; elle propose un dispositif plus général - pas forcément un label, même si cela pourrait en être un - qui permet de reconnaître et de valoriser les entreprises actives en matière d'inclusion, de promotion de la diversité et de prévention des discriminations, l'inégalité salariale étant manifestement une discrimination. Ce texte a aussi été refusé par la commission.
Nous avons auditionné un certain nombre d'entités, je ne sais plus exactement combien; en revanche, je me souviens très bien que les trois motions ont été présentées ensemble, lors de la même réunion Zoom - puisqu'on se réunissait par Zoom à ce moment-là. Pour une raison étrange, la motion du PDC a été gelée, alors que les deux autres ont été refusées et se trouvent actuellement à l'ordre du jour.
Du côté des Verts, nous sommes favorables à l'instauration de plusieurs labels qui permettent de montrer qu'un certain nombre d'entreprises sont, entre guillemets, «vertueuses». Je suis d'accord avec mon collègue Burgermeister: c'est le minimum que nous devions faire, la loi doit être respectée. La motion que nous avions présentée - et que M. de Matteis pourra développer un peu, s'il lui reste du temps - portait sur les discriminations de manière plus large. Je pense que nous devons accepter un certain nombre de motions de façon à pouvoir renforcer le projet de loi sur l'égalité et la lutte contre les violences et les discriminations liées au genre déposé par le Conseil d'Etat et actuellement en traitement à la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne). Je vous remercie.
M. André Pfeffer (UDC). Le groupe UDC ne soutiendra pas cette motion. L'établissement d'un label ne répond pas aux problèmes qu'il faut résoudre, c'est très coûteux et compliqué à réaliser, et l'efficacité des labels est très, très discutable. En outre, le label tel que le texte le mentionne a, je dirais, plusieurs objectifs: il ne vise pas seulement l'égalité entre hommes et femmes, il prévoit aussi la mise en place d'une liste des bons élèves. Il est par ailleurs recommandé de prendre des mesures contre le harcèlement, et il est également question d'établir des ratios équitables de cadres entre hommes et femmes dans les entreprises.
Il faut quand même rappeler que le bon moyen pour résoudre ce genre de problèmes - ou en tout cas un moyen efficace, connu et que personne ne met en doute -, c'est tout simplement le partenariat social: c'est par cette voie qu'il faut, selon nous, aborder et résoudre ce problème. En conclusion, je le répète, le groupe UDC ne soutiendra pas cette motion. Merci de votre attention.
M. Alexis Barbey (PLR). Une meilleure reconnaissance du travail des femmes est naturellement un but à poursuivre, et le PLR le poursuit. Toutefois, on peut remarquer deux choses. La constitution genevoise garantissant un salaire égal pour un travail égal date de 2012, soit dix ans déjà, et elle est quasi sans résultat. D'autre part, la loi fédérale sur l'égalité RS 151.1 a été votée sauf erreur en 1993, soit il y a trente ans, avec les mêmes résultats, c'est-à-dire très faibles.
Alors, à quoi cela tient-il ? On peut se demander plus largement, dans le cadre de cette motion, si le label est un bon système. C'est une méthode qui, certes, est à la mode, mais elle est malheureusement souvent utilisée comme un cosmétique sans énormément d'effets, qui se contente de mettre du baume là où ça fait mal. Le label n'est pas un bon système, car il est en fait très cher: c'est coûteux d'établir un label, c'est coûteux de le faire respecter par les entreprises, ça implique des normes, ça implique des contrôles, ça implique une fonctionnarisation peu souhaitable. Enfin, il faut dire qu'un label ne produit pas d'effets s'il n'est pas respecté, ce qui nuit assez largement à son efficacité.
Quelle est donc la solution, si on s'écarte de cette question du label ? Au sein du PLR, nous souhaitons des outils plus clairs, qui donnent des résultats concrets et rapides, comme le vote de certains quotas, à l'exemple du PL 12531-A. Nous souhaitons aussi, et surtout, stimuler l'action à l'intérieur des entreprises; on voit qu'à travers la certification «B Corp», beaucoup d'entreprises sont stimulées en vue d'atteindre ces résultats d'égalité salariale, et qu'elles n'ont besoin de personne ni d'une oreille de l'Etat pour parvenir à cet objectif. C'est pourquoi le PLR vous propose de refuser cette motion et d'agir directement sur le terrain. Je vous remercie.
Mme Léna Strasser (S). Mesdames et Messieurs les députés, je rejoins certains de mes préopinants, notamment de gauche - cela ne vous étonnera pas. Bien entendu, l'égalité salariale doit être respectée, car nul n'est censé ignorer la loi. De plus, la certification «EQUAL-SALARY» existe déjà, et je me permets de citer le site internet en question:
«La certification EQUAL-SALARY est une procédure qui permet aux entreprises de vérifier et faire savoir qu'à travail égal, elles offrent un salaire égal à leur personnel féminin et masculin. Elle s'adresse aux entreprises de 50 employé-e-s ou plus (dont au moins 10 femmes) de tous les pays, de tous secteurs privés et publics, désireuses de promouvoir l'égalité salariale entre femmes et hommes.
«Cette certification vous donne l'occasion de mettre vos valeurs en pratique. De prouver votre engagement à rémunérer femmes et hommes de manière équitable. Elle confère une valeur ajoutée à votre entreprise, facilite le recrutement et la fidélisation des talents, apporte davantage de diversité au sein de votre équipe, renforce votre réputation, et bien plus encore. [...]»
L'égalité salariale est donc importante. D'ailleurs, ce label pourrait déjà être utilisé lors des appels d'offres. J'ajouterai encore qu'une loi autour des questions d'égalité est en traitement à la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne); nous l'attendons depuis le début de cette législature et elle tarde. Alors, si le PDC et d'autres groupes souhaitent vraiment aller de l'avant sur ces questions, qu'ils s'impliquent dans le traitement de ce projet de loi et fassent en sorte que cette loi existe. En conclusion, le groupe socialiste ne soutiendra pas cette motion. Merci.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole revient à M. Yves de Matteis pour quarante secondes.
M. Yves de Matteis (Ve). Merci, Monsieur le président. Ce sera largement suffisant: je ne vais pas parler de la motion que j'ai rédigée - je le ferai lorsque nous la traiterons en plénière -, mais j'aimerais revenir sur l'un des éléments mentionnés par mon collègue M. Eckert. En effet, le projet de loi qui a été présenté devant ce parlement, à savoir le PL 12843, indique à son article 18 que pour soutenir l'égalité hommes-femmes l'Etat peut - je cite - «encourager des formations du personnel et des labels». Ce texte a fait l'objet de nombreuses consultations au sein de l'Etat et auprès de multiples associations. La notion de label n'a été remise en cause ni au sein de l'Etat ni par les associations. Le secret de commission m'interdit de dire si les partis y étaient favorables durant les débats menés en commission, mais je les laisse faire preuve d'une certaine cohérence en la matière ! Merci, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme Claude Bocquet pour trente secondes.
Mme Claude Bocquet (PDC). Ce sera court. Je remarque qu'à gauche on trouve que ça ne va pas assez loin et qu'à droite ça va trop loin. Alors je vous propose de voter au centre... (Rires. Applaudissements.) ...et que chacun fasse un pas afin de donner un élan au Conseil d'Etat pour mettre en place ce label et parvenir enfin à l'accélération de cette égalité salariale. Parce que s'il faut encore cinquante ans, moi je ne la verrai pas... Merci.
Des voix. Bravo !
Le président. Merci, Madame la députée. La parole n'étant plus demandée, nous votons sur la prise en considération de cette motion.
Mise aux voix, la proposition de motion 2569 est rejetée par 56 non contre 22 oui (vote nominal).
Débat
Le président. Nous reprenons les délais de traitement 1 dépassés avec la R 938. Je passe la parole à M. Daniel Sormanni.
M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, le groupe MCG va retirer cette résolution qui, aujourd'hui, n'est plus d'actualité. Je relève tout de même qu'elle a été déposée en 2020 et qu'il est regrettable que la commission n'ait pas jugé utile de la traiter, car à l'époque, en pleine crise covid, elle était tout à fait d'actualité. Quoi qu'il en soit, nous retirons cette résolution. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. Il en est pris acte.
La proposition de résolution 938 est retirée par ses auteurs.
Débat
Le président. Nous passons maintenant à la M 2648 et je cède la parole à Mme Nicole Valiquer Grecuccio.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Merci, Monsieur le président. Nous demandons le renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport, puisque nous sommes actuellement en train d'étudier le projet de loi sur la culture qui, bien sûr, touche les grandes institutions dont le Grand Théâtre. Nous pensons pouvoir finalement englober cette thématique dans les discussions déjà en cours sur ce projet de loi. Je vous remercie.
M. Philippe Poget (Ve). Je voulais demander le renvoi à la CACRI, mais comme le projet de loi sur la culture est effectivement devant la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport, je pense que celle-ci pourra traiter en même temps cette motion ainsi que la suivante. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, je vous fais voter sur la proposition de renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport.
Mis aux voix, le renvoi pour six mois de la proposition de motion 2648 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est adopté par 74 oui (unanimité des votants).
Un rapport doit être rendu dans les six mois (article 194 LRGC).
Débat
Le président. Nous enchaînons avec la M 2649 et je repasse la parole à Mme Nicole Valiquer Grecuccio.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Merci, Monsieur le président. Pour les mêmes raisons que tout à l'heure, nous demandons le renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport, puisque la thématique de la Nouvelle Comédie sera traitée dans le cadre de l'étude du projet de loi sur la culture. Merci beaucoup.
Le président. Merci, Madame la députée. Mesdames et Messieurs, vous êtes priés de vous prononcer sur le renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport.
Mis aux voix, le renvoi pour six mois de la proposition de motion 2649 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est adopté par 72 oui (unanimité des votants).
Un rapport doit être rendu dans les six mois (article 194 LRGC).
Débat
Le président. Nous traitons à présent le RD 1378 et je cède la parole à M. Emmanuel Deonna.
M. Emmanuel Deonna (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, depuis 2014, tous les cantons suisses sont dotés de programmes d'intégration cantonaux, dits PIC. Ces programmes d'intégration cantonaux conditionnent les soutiens financiers fédéraux à des objectifs à atteindre pour des périodes quadriennales dans huit domaines d'intégration, à savoir la primo-information, le conseil, le vivre-ensemble, la lutte contre le racisme, l'encouragement préscolaire, la médiation et l'interprétariat communautaire, l'apprentissage de la langue et la formation, ainsi que l'employabilité.
Réalisés par le bureau de l'intégration des étrangers, les rapports annuels d'activité au sujet du programme d'intégration sont adressés au Secrétariat d'Etat aux migrations et dressent les mesures et projets menés chaque année par le bureau de l'intégration des étrangers sur le territoire genevois dans les huit domaines d'intégration que je viens de citer. Nous avons donc pu trouver le détail des très bonnes mesures et projets réalisés par le bureau de l'intégration dans ce rapport, qui contient des annexes fouillées.
Mesdames et Messieurs les députés, de grands défis attendent le canton de Genève s'agissant de la gestion de la diversité ethnoculturelle et de l'intégration; les débats que nous venons d'avoir à propos des suicides de requérants d'asile et du centre fédéral du Grand-Saconnex nous l'ont montré. Nous invitons donc le Conseil d'Etat à continuer à faire régulièrement rapport des activités menées par le bureau de l'intégration dans le domaine de l'intégration des étrangers et à soutenir ce bureau de façon adéquate et de manière pérenne. Je vous remercie.
M. Pierre Vanek (EAG). Les excellents propos de mon préopinant tombent à point, mais il s'agit quand même d'un délai de traitement dépassé; je suggère donc qu'on renvoie ce rapport à la commission législative - d'où il vient -, pour qu'elle fasse son travail.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je mets aux voix le renvoi de ce RD 1378 à la commission législative.
Mis aux voix, le renvoi pour six mois (article 194 LRGC) du rapport du Conseil d'Etat RD 1378 à la commission législative est rejeté par 58 non contre 13 oui.
Le Grand Conseil prend donc acte du rapport du Conseil d'Etat RD 1378.
Débat
Le président. Nous poursuivons nos travaux avec la M 2657. La parole n'étant pas demandée... (Remarque.) Ah si, je cède le micro à M. Marc Falquet.
M. Marc Falquet (UDC). Merci, Monsieur le président. C'est bizarre que personne ne prenne la parole sur ce texte, qui porte notamment sur le changement du nom des rues. La commission des Droits de l'Homme a commencé à traiter cette motion en 2021, il y a eu une audition, je crois, du président de la commission de nomenclature, et il faudrait qu'on continue les travaux. Même si la commission est submergée d'objets, je propose qu'on renvoie ce...
Une voix. Mais non !
M. Marc Falquet. Oui ! (Remarque.) Oui, mais ça ne fait rien. De toute façon, on a commencé le traitement de cette motion... (Brouhaha.) Je vous propose donc de la renvoyer à la commission des Droits de l'Homme, tout en sachant qu'on ne pourra pas l'examiner dans les quelques mois qui viennent. Merci beaucoup.
M. Pierre Vanek (EAG). J'abonde dans le sens de mon préopinant !
Le président. Merci, Monsieur le député. J'invite l'assemblée à voter sur cette demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi pour six mois de la proposition de motion 2657 à la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne) est adopté par 68 oui contre 3 non et 1 abstention.
Un rapport doit être rendu dans les six mois (article 194 LRGC).
Débat
Le président. Notre prochain point est la M 2700, et je cède la parole à Mme Patricia Bidaux.
Mme Patricia Bidaux (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie de renvoyer ce texte à la commission de l'environnement et de l'agriculture: tout le travail a été fait, nous avons simplement besoin d'un délai pour pouvoir déposer le rapport. Merci donc d'accepter le renvoi en commission.
Le président. Merci, Madame la députée. C'est le moment de passer au vote.
Mis aux voix, le renvoi pour six mois de la proposition de motion 2700 à la commission de l'environnement et de l'agriculture est adopté par 72 oui (unanimité des votants).
Un rapport doit être rendu dans les six mois (article 194 LRGC).
Le président. Mesdames et Messieurs, nous examinerons les deux derniers délais de traitement dépassés en points fixes après la prestation de serment des deux procureurs extraordinaires, qui aura lieu à 16h. Je clos donc cette séance et vous retrouve à 16h précises.
La séance est levée à 15h45.