République et canton de Genève

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PL 12531-A
Rapport de la commission législative chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur les commissions officielles (LCOf) (A 2 20)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 24 et 25 novembre 2022.
Rapport de majorité de Mme Céline Zuber-Roy (PLR)
Rapport de première minorité de M. Pierre Vanek (EAG)
Rapport de deuxième minorité de M. André Pfeffer (UDC)

Premier débat

Le président. Voici la prochaine urgence: le PL 12531-A. Nous sommes en catégorie II, quarante minutes. Je cède la parole à Mme Céline Zuber-Roy.

Mme Céline Zuber-Roy (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. L'étude du PL 12531 par la commission législative a pris du temps... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, s'il vous plaît ! On va laisser sortir les quelques députés qui souhaitent aller s'exciter un peu dehors... (Un instant s'écoule.) ...en priant ceux qui rentrent de bien vouloir se taire, si possible. (Un instant s'écoule.) Poursuivez, Madame.

Mme Céline Zuber-Roy. Merci, Monsieur le président. Je disais donc que l'étude de ce projet de loi a pris du temps à la commission législative - neuf séances entre 2019 et 2022 -, mais a permis d'aboutir à un projet novateur qui rassemble largement. Ce résultat n'aurait pas été possible sans l'important soutien du département des finances, en particulier l'investissement de la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet, de même que celui de la chancellerie et de notre secrétaire scientifique de commission.

Une voix. Bravo !

Mme Céline Zuber-Roy. Ce projet de loi vise à atteindre la parité dans les conseils d'administration des institutions de droit public ainsi que dans les commissions officielles. A cette fin, il fixe l'obligation d'avoir au minimum un taux de représentation de 40% du sexe sous-représenté. A titre d'exemple, au début de la législature 2018-2023, la part de femmes siégeant au sein des 112 commissions officielles était de 34% en moyenne, mais avec trois départements qui n'atteignaient pas les 30% en moyenne.

L'objectif du texte, c'est-à-dire la parité, a très largement rassemblé les commissaires, et il est important de garder cet élément à l'esprit lorsqu'on aborde les détails. En effet, les modalités pour parvenir concrètement à cette égalité... (Commentaires.)

Le président. S'il vous plaît !

Mme Céline Zuber-Roy. ...ont nécessité de longues discussions et des allers-retours entre le département, la chancellerie et le Bureau du Grand Conseil. Les commissaires ainsi que le Bureau ont considéré que le projet initial donnait trop de marge de manoeuvre au Conseil d'Etat. Il imposait à chaque entité, y compris au Grand Conseil et aux partis, de désigner pour chaque poste à pourvoir un homme et une femme, et laissait le soin au Conseil d'Etat de nommer l'une de ces deux personnes afin d'assurer une représentation équilibrée des sexes. Si cette solution permettait d'atteindre l'objectif de parité, elle impliquait également une entorse à la séparation des pouvoirs concernant les représentants du Grand Conseil et, de manière générale, présentait le risque que d'autres motifs, notamment politiques ou stratégiques, guident le choix des candidats par le Conseil d'Etat.

Afin d'éviter tout risque de détournement du mécanisme, les commissaires ont décidé de prévoir l'entier du processus dans la loi, ce qui permet d'atteindre l'objectif d'un minimum de 40% du sexe sous-représenté tout en maintenant le choix par les entités de leurs représentants dans les commissions officielles et les institutions de droit public. Concrètement, les entités qui ont des représentants devront premièrement désigner autant de femmes que d'hommes si elles ont un nombre pair de sièges dans un conseil ou une commission; en cas de nombre de sièges impair, l'écart devra être de seulement un. De plus, si elles ont des représentants dans plusieurs conseils ou commissions, la parité devra également être respectée sur la totalité d'entre eux.

Dans ce calcul, les commissions officielles sont séparées des institutions de droit public et, pour ces dernières, un sous-groupe a été spécialement composé avec les six principales institutions de droit public, pour lequel la parité globale doit être respectée. Autrement dit, si un parti a des représentants à l'aéroport, aux SIG, aux HUG, à l'IMAD, aux TPG et à l'Hospice général, il devra sur l'ensemble choisir trois femmes et trois hommes. Avec ces règles de désignation, il est permis d'espérer atteindre la parité de 40% pour un grand nombre de conseils et de commissions.

Pour les structures qui n'atteindraient pas ce taux, le Conseil d'Etat, respectivement le Bureau du Grand Conseil, devra contacter celles qui ont désigné une personne du sexe surreprésenté et les inviter à se mettre d'accord entre elles dans un délai de trente jours afin de déterminer... (Brouhaha.) Excusez-moi, ça ne vous embêterait pas d'aller discuter ailleurs ?

Une voix. Désolé !

Mme Céline Zuber-Roy. C'est gentil, merci. Je reprends: les inviter à se mettre d'accord entre elles dans un délai de trente jours afin de déterminer...

Le président. Vous passez sur le temps du groupe.

Mme Céline Zuber-Roy. Oui, je vous remercie. Mon groupe a accepté de me céder son temps, vu que le Bureau n'a pas voulu augmenter celui de la majorité ! Je reprends encore: les inviter à se mettre d'accord entre elles dans un délai de trente jours afin de déterminer quelle entité changera de représentant pour obtenir la parité spécifique. Si aucun accord n'est trouvé dans ce délai, le gouvernement, respectivement le Bureau du Grand Conseil, procédera à un tirage au sort pour définir quelle structure devra changer de représentant.

Enfin, si une entité ne respecte pas les règles de la parité lors de la désignation de ses représentants ou si elle refuse de changer de représentants après un tirage au sort, le Conseil d'Etat pourra lui-même nommer une personne pour représenter l'entité, respectivement le Grand Conseil pourra faire cette demande à l'exécutif. Evidemment, cette dernière mesure constitue surtout une menace pour s'assurer de la collaboration des institutions, mais l'idée est qu'elle n'ait jamais à être appliquée.

La solution trouvée par la commission a permis de rallier une large majorité de la commission. Seules deux oppositions subsistent - les rapporteurs de minorité sont assis en face de moi: la première, de principe, estime que le projet de loi ne va pas assez loin et vise une parité parfaite de 50% d'hommes et de 50% de femmes; la seconde, à l'inverse, souhaiterait un système plus simple et moins contraignant. Ces deux oppositions venant respectivement d'Ensemble à Gauche et de l'UDC, on peut presque y voir une preuve que le projet de loi constitue un bon compromis !

Avec cette loi, notre canton se dote d'un instrument novateur qui permettra de faire progresser la représentation féminine au sein des conseils et commissions, qui permettra à la société de bénéficier de femmes compétentes, lesquelles, sans ce dispositif, n'auraient pas été approchées ou ne se seraient pas présentées. Pour ces raisons, la majorité de la commission législative vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter ce projet de loi tel qu'amendé en commission.

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de deuxième minorité. La méthodologie proposée par ce projet de loi ne va pas. Le procédé choisi est compliqué et créera inévitablement de nombreux litiges, de l'insatisfaction et des déceptions. La mise en oeuvre de ce texte constitue une véritable usine à gaz avec différents arbitres, étages et étapes dans le processus de sélection.

Je cite quelques exemples qui le démontrent. Article 5A, alinéa 1: «Les institutions et entités chargées de désigner plusieurs membres présentent autant de candidatures féminines que masculines pour l'ensemble des commissions qui les concernent.» Article 5A, alinéa 4: «En cas de non-respect des alinéas 1 à 3, le Conseil d'Etat impartit à l'institution ou l'entité concernée un délai de 30 jours pour se mettre en conformité. A défaut, il nomme lui-même une ou plusieurs personnes du sexe sous-représenté.»

Article 15B, alinéa 2: «Dans le cas où la parité voulue n'est pas atteinte à l'échéance du délai visé à l'alinéa 1, le département organise un tirage au sort visant à déterminer, parmi les institutions et entités ayant désigné une ou plusieurs personnes du sexe surreprésenté, celles qui seront chargées de présenter une ou plusieurs autres candidatures dans un nouveau délai de 30 jours.» Article 15B, alinéa 3: «Lors du renouvellement complet de la législature, une institution ou une entité tirée au sort est exemptée des deux tirages au sort suivants.» Et pour finir, article 15B, alinéa 4: «Dans le cas où la parité voulue n'est toujours pas atteinte à l'échéance du délai visé à l'alinéa 2, le Conseil d'Etat nomme lui-même une ou plusieurs personnes du sexe sous-représenté.» Je pourrais continuer comme ça avec d'autres dispositions. En bref, il est vraiment difficile d'imaginer projet plus complexe.

Cet objet est également contraire à certains principes démocratiques comme la reconnaissance constitutionnelle du rôle des partis dans le fonctionnement de la démocratie. La surveillance des institutions de droit public est voulue, mais évidemment sans que les candidats soient tirés au sort.

La parité au sein des institutions de droit public est légitime. Je le répète: c'est probablement légitime. Toutefois, imposer des critères aux partis est contestable et problématique. Discrimination positive et atteinte de la parité peuvent être aisément réalisées à l'aide des candidats proposés par le Conseil d'Etat, qui sont très nombreux. Si, en plus, on prend en compte les représentants des partis gouvernementaux, il y a très largement de quoi atteindre l'égalité dans toutes les entités.

C'est pour cette raison que je propose deux amendements. Je vais les lire. Le premier concerne l'article 5C, alinéa 2: «Les articles 5A et 5B ne s'appliquent pas pour la désignation des membres en raison de leur fonction et aux membres désignés par le Grand Conseil.» Je suggère donc ici d'ajouter: «et aux membres désignés par le Grand Conseil».

Le deuxième amendement consiste purement et simplement à supprimer l'article 107B. Celui-ci dispose que le Grand Conseil peut obliger un parti, dans un délai de trente jours, à présenter d'autres candidats. Le Grand Conseil peut également imposer un ou une candidate à un groupe.

Voici les raisons de ces deux modifications: les représentants désignés par les partis ne doivent pas être concernés par ce texte tandis que l'Etat peut nommer suffisamment de représentants au sein des conseils d'administration des institutions de droit public pour parvenir à la parité avec ses propres candidats. Si ces deux amendements étaient acceptés, non seulement nous ne nous retrouverions pas avec une usine à gaz, mais surtout le projet de loi ne créerait certainement pas mécontentement, contestation et frustration. Merci de votre attention.

Le président. Je vous remercie. La parole va maintenant au rapporteur de première minorité, qui a retrouvé son identité: M. Pierre Vanek.

M. Pierre Vanek (EAG), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président, et merci à Mme Renfer qui m'a en effet restitué ma carte. Mesdames et Messieurs, la rapporteuse de majorité a établi une symétrie entre l'opposition de principe de mon ami Pfeffer et la nôtre, indiquant que de notre côté, nous serions à la recherche d'une parité parfaite. «Parité parfaite», a-t-elle dit, pour notre position. Non !

Mesdames et Messieurs, Ensemble à Gauche est tout simplement favorable à la parité, par exemple dans ce Grand Conseil où nous sommes manifestement non paritaires. Nous avons un remède pour rétablir l'égalité dans cette enceinte, un projet de loi est à l'ordre du jour - depuis presque deux ans, il n'a pas encore été traité - qui prévoit l'élection de cinquante hommes et de cinquante femmes en parallèle pour obtenir un parlement paritaire. Nous sommes donc extrêmement favorables à des mesures instituant... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, s'il vous plaît. Est-ce que sur la partie droite, du côté du MCG, on pourrait faire un peu de silence ? On ne s'entend plus. (Un instant s'écoule.)

M. Pierre Vanek. Je peux y aller ?

Le président. Reprenez.

M. Pierre Vanek. Nous sommes extrêmement favorables à des mesures instituant la parité.

Certes, mon voisin l'a rappelé, le projet de loi n'est pas simple, mais globalement, les mesures instituant la parité sont acceptables et positives, et nous les soutenons, contrairement aux premières propositions du Conseil d'Etat, qui s'arrogeait le droit de définir, en dernière instance, qui représentait notamment le Grand Conseil dans les différents conseils et commissions en choisissant lui-même entre l'homme et la femme pour chaque poste où les partis et entités devaient proposer des candidatures. Ça, ça n'allait pas. Il serait sans doute possible de trouver une solution plus élégante que celle qui a été retenue, mais celle-ci a le grand mérite d'exister.

Par contre, ce qui ne va pas du tout - mais alors pas du tout ! -, c'est la déclaration qui figure à quatre reprises au moins - je crois que c'est quatre - dans le texte, à savoir que la parité est atteinte avec un rapport de 40%-60%. Sérieusement ! Ce n'est pas une question d'opinion politique, il existe une définition de la parité. La parité se définit par le fait que chaque sexe est représenté à égalité. Aussi, 40%-60%, ce n'est pas l'égalité.

Si nous avions un rapport des salaires homme-femme de 40%-60%, donc de 100%-150%, Mme Zuber dirait-elle: «Là, il y a l'égalité salariale» ? C'est absurde ! Y aurait-il une parité entre le franc et l'euro quand on échange quarante de l'un pour obtenir soixante de l'autre ? Non, évidemment que non ! Evidemment que non ! L'égalité, c'est fifty-fifty ! Et nous écrivons dans notre loi sur les commissions officielles - nous écririons, si on ne me suivait pas, mais je ne doute pas qu'on va me suivre et amender cet objet - qu'il y a une égalité entre 40% et 60%, nous prétendons que 40% est égal à 60%. C'est une absurdité.

A la fin du XIXe siècle, le parlement d'un Etat américain - c'était l'Indiana, en 1897 - a voulu légiférer sur la valeur de pi: ils ont estimé que tous les chiffres infinis qui suivent 3,1415926, c'était trop compliqué et qu'il fallait, à des fins de simplification et de normalisation, établir que pi valait 3,2. C'est vrai, vous trouverez la référence dans mon rapport dont je vous recommande la lecture, Monsieur le conseiller d'Etat. Or on ne peut pas décider cela, ce parlement aura beau voter que la parité est atteinte avec un rapport de 40%-60%, ce ne sera pas vrai ! Ce n'est pas une question d'opinion, c'est une question factuelle.

Mes amendements successifs portent...

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Pierre Vanek. Je le prends très brièvement. Mes amendements successifs portent sur cette question-là. On ne peut pas se ridiculiser et ridiculiser notre assemblée en affirmant que la parité est atteinte quand on a un rapport de 40%-60%, comme on ne peut pas se ridiculiser en adoptant une loi qui dit que pi égale 3,2, et au diable la réalité. Moi, par exemple, je suis un radical, donc on aurait pu dire 4 ! Pourquoi pas 4 ? Ou 3 ? 3, pour prendre l'entier le plus proche. Non ! Ça ne tient pas la route !

Je lis le texte de l'article 5 du projet de loi à son alinéa 4: «Elles font également en sorte que la parité des sexes soit atteinte au sein de chaque commission à raison de 40% au moins du sexe sous-représenté.» La parité serait donc atteinte avec un rapport de 40%-60% et avec un sexe qui reste sous-représenté malgré le fait que la parité est atteinte ?! Allez comprendre, Mesdames et Messieurs ! Ce n'est pas sérieux !

Ma préopinante... Bon, je ne m'adresse pas à Mme Zuber, mais si j'avais le droit, à teneur de la LRGC, de m'adresser à elle, je lui dirais: «Sérieusement, chère Madame, vous ne pouvez pas défendre» - je ne le dis pas, évidemment, je le dirais ! (Rires.) - «que quatre égale six. Enfin, vous pouvez le faire, mais c'est dans votre intérêt de ne pas le faire, parce que ça vous confère le rôle un peu bizarre, un peu absurde de soutenir des contrevérités manifestes.» J'estime que le PLR défend des positions, disons, discutables, mais là, il est démontré que ce n'est pas vrai: quatre n'est pas égal à six !

Ensuite, à l'article 15A, alinéa 1, il est indiqué: «Le Conseil d'Etat s'assure que la parité des sexes soit atteinte au sein de chaque conseil, à raison de 40% au moins du sexe sous-représenté.» C'est la même chose ! De nouveau, on prétend que la parité est atteinte avec un sexe sous-représenté et un rapport de 40%-60%, ça ne va pas. A l'article 15B - je vous fatigue, je suis un peu long -, rebelote: on parle de «parité spécifique de 40%». Enfin, à l'article 107B de la LRGC, il est question de parité «à raison de 40% au moins du sexe sous-représenté».

Mon intervention vise à corriger ces incongruités, à rétablir la vraie valeur du nombre pi et la véritable définition de l'égalité qui est constitutive de la parité, c'est-à-dire le fifty-fifty. Voilà pourquoi j'ai déposé quatre amendements qui corrigent ce point-là. Ce n'est pas une volonté de perfection, parce que je sais bien que la perfection n'est pas forcément de ce monde; si vous voulez considérer que 40% constituent un pas en avant vers la parité, vous pouvez le faire, mais ce n'est pas ce qui a été fait ! Ce qui a été fait, c'est une loi qui affirme qu'il y a une parité alors qu'il n'y en a pas. Et ça, ça ne va pas, donc il faut voter mes amendements - enfin, ceux d'Ensemble à Gauche. Merci.

Mme Dilara Bayrak (Ve). Le PL 12531 représente un projet révolutionnaire, j'ai envie de dire, au vu des positions prises au sein de ce Grand Conseil, et surtout un clin d'oeil au député Florey, qui mentionnait que l'égalité ne constitue pas une priorité pour la population. Ce texte prévoit d'atteindre la parité, 40% du sexe sous-représenté. Alors effectivement, cette notion de parité est largement critiquée. Ce n'est pas une parité parfaite, c'est vrai. Un fifty-fifty aurait été idéal, certes, mais aujourd'hui, c'est ça ou rien, donc quitte à ne rien obtenir, je préfère 40%, surtout si on fait le parallèle avec ce Grand Conseil où nous sommes toujours en dessous de 40%. A mon sens, ça ne peut pas faire de mal de poser un principe clair dans la loi, qui consiste à dire: «Aujourd'hui, la parité au sens de la LCOf, c'est 40%.»

D'ailleurs, ces mesures ont pour vocation d'être transitoires, nous n'avons pas envie d'établir des quotas de ce type ad vitam aeternam. Idéalement, la société évoluera de telle manière que plus tard, nous n'aurons pas besoin de spécifier dans la loi que nos institutions politiques et commissions officielles ont nécessairement un minimum à respecter. Pour cette raison, le 40% se justifie dans ce contexte-là.

Regardons pourquoi ce projet de loi est, je le répète, révolutionnaire. Il faut s'attarder sur les deux rapports de minorité: l'un estime que l'on ne va pas assez loin, l'autre souhaite un renvoi en commission au motif que l'égalité est trop compliquée à mettre en oeuvre. Et un membre de son parti va même jusqu'à soutenir qu'il ne s'agit pas d'une priorité ! Pour les Vertes et les Verts, la réponse est simple: il faut que les ambitions pour atteindre la parité soient concrétisées, et ce projet de loi permet d'y parvenir. Cette démarche passe par ce genre de texte.

D'ailleurs, là où l'UDC voit de la complexité, de la frustration, de la déception et autres termes qui iraient dans ce sens-là, je vois pour ma part des moyens mis en place pour respecter l'autonomie de chacun des groupes, pour qu'ils puissent corriger le tir, trouver des personnes compétentes et proposer leur candidature. En effet, à plusieurs reprises - cela a été souligné par la rapporteuse de majorité -, on prévoit des cautèles pour ne pas passer en force: on va d'abord prévenir le parti, on va dans un second temps rappeler qu'il faut faire quelque chose, et c'est seulement en dernière instance que des sanctions... Enfin, ce ne sont même pas vraiment des sanctions, puisqu'il s'agit d'un tirage au sort pour qu'au sein des commissions officielles, les entités puissent modifier leur composition.

Franchement, ce n'est vraiment pas compliqué, et je pense que la majorité le prouve, tout comme les deux rapports de minorité. La commission législative a mis trois ans pour finaliser ce projet de loi, 112 commissions officielles sont concernées. Il faut maintenant le voter, il faut aller de l'avant. Je sais qu'il est compliqué pour certains - et j'insiste sur le masculin - d'aller dans ce sens, mais il faut vraiment y aller maintenant. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, chères et chers collègues, n'en déplaise à certains d'entre nous, la tendance à atteindre une parité reste une question importante, et il est normal que ce projet de loi, après trois ans de travaux, cela a été rappelé, soit débattu en urgence ce soir.

Le rapporteur de première minorité est retombé dans ses travers d'enseignant: très pointilleux, pragmatique et cartésien, il nous a rappelé le fameux pi - 3,1415, si mes souvenirs sont bons - qui m'a cassé les pieds pendant des années, moi qui ne suis pas un matheux du tout.

Cela étant, il a raison sur un point: la parité, c'est 50%-50%, c'est vrai. Maintenant, la question est la suivante: voulons-nous absolument une parité de 50%-50% qui n'aurait pas permis de faire aboutir ces travaux ou acceptons-nous de tendre vers une parité avec une première étape de 40%-60% ?

Je rappelle qu'au départ, les propositions du Conseil d'Etat avaient été refusées, parce que nous estimions qu'elles ne respectaient pas la séparation des pouvoirs et donnaient trop de pouvoir incitatif au Conseil d'Etat, mais qu'ensuite, après de nombreux allers-retours entre le Conseil d'Etat, la commission, la chancellerie et la direction des affaires juridiques - que je tiens à remercier ici -, nous avons progressé, et je considère que ce projet de loi est vraiment l'expression parfaite du consensus auquel nous sommes parvenus. Preuve en est que les seuls à s'y être opposés sont les deux extrêmes de ce parlement.

Sur cette base-là, Mesdames et Messieurs, le groupe démocrate-chrétien vous encourage à accepter le projet de loi tel que sorti de commission et à refuser tant les amendements de l'UDC que ceux d'Ensemble à Gauche. Je vous remercie.

M. Stéphane Florey (UDC). Même remarque que tout à l'heure: est-ce la seule priorité du Conseil d'Etat que de venir nous parler de parité en urgence aujourd'hui ? C'est juste consternant, à ce stade des débats ! Entendre ce qu'on entend aujourd'hui, trois ans de travaux pour en arriver là ? C'est tout simplement affligeant. Comparer la parité des commissions officielles au taux de change de la bourse, comme l'a fait M. Vanek ? C'est tout de même un peu douteux, cela équivaut à réduire les représentants dans les commissions à de simples marchandises. On croit rêver ! Très franchement, c'est un débat plus que lunaire !

Finalement, sur le fond, que va-t-on faire avec cette loi ? On va viser le genre au détriment des compétences. Voilà ce que vous êtes en train de faire, Messieurs-dames les députés. On va désigner des personnes qui, d'une part, n'auraient pas spécifiquement voulu siéger dans telle ou telle commission et, d'autre part, n'en ont pas forcément les compétences. Et on va dire à ces personnes: «Eh bien voilà, désolés...» ?

Je prends un exemple: aux SIG, il y a trop d'hommes ou trop de femmes, c'est selon. Eh bien il va falloir changer quelque chose, donc on va supprimer une personne qui aurait toutes les compétences et prendre quelqu'un d'autre à la place qui tombe du ciel. Et on va leur dire: «Eh bien voilà, vous êtes un homme, vous êtes une femme, prenez ce poste, on vous le donne, c'est cadeau.» Que ces personnes aient réellement des compétences en matière énergétique, d'électricité ou même de gestion d'une entreprise telle que les SIG, on s'en fout ! Voilà ce qu'on est en train de faire aujourd'hui. C'est juste une aberration de plus.

Un autre problème va survenir tôt ou tard: cette loi sera sujette à de nombreux recours, déjà rien que par rapport à son application.

Le président. Il vous faut conclure...

M. Stéphane Florey. Dire à un candidat qui se présenterait: «Non, vous n'êtes pas du bon genre, désolés, on vous ferme la porte», c'est juste aberrant !

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Stéphane Florey. Mais que se passera-t-il quand une personne non genrée...

Le président. Merci...

M. Stéphane Florey. ...soumettra sa candidature ? Le texte n'a rien prévu à ce sujet, donc déjà rien que sur cette base, on peut le refuser...

Le président. C'est terminé !

M. Stéphane Florey. ...ou alors le renvoyer en commission pour qu'il y soit traité dans sa globalité. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Le président. Vous sollicitez formellement un renvoi en commission, Monsieur le député ?

M. Stéphane Florey. Oui, je demande le renvoi en commission, s'il vous plaît.

Le président. Bien, merci. Sur cette proposition, je laisse la parole aux rapporteurs de même qu'au Conseil d'Etat. Monsieur André Pfeffer ?

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Oui, je soutiens le renvoi en commission. Je cite un autre exemple, à savoir l'article 5A... (Exclamations.) C'est important, c'est important ! ...alinéa 1: «Les institutions et entités chargées de désigner plusieurs membres présentent autant de candidatures féminines que masculines pour l'ensemble des commissions qui les concernent.» Qu'est-ce que cela signifie ? Cela signifie que si un parti soumet autant de candidatures féminines que masculines, mais a prévu une femme médecin pour les HUG et un homme spécialiste des parkings pour la Fondation des parkings, après arbitrage, comme je l'ai dit avant, par le département, le Conseil d'Etat ou éventuellement même le Grand Conseil, plus un tirage au sort, il se pourrait que la femme médecin destinée aux HUG soit finalement dirigée vers la Fondation des parkings et le spécialiste des parkings vers les HUG.

Sous cette forme, ce projet de loi ne convient pas, et je propose effectivement que nous renvoyions le tout en commission. Merci.

M. Pierre Vanek (EAG), rapporteur de première minorité. Mon collègue a dépassé quelque peu le cadre strict de l'opportunité d'un renvoi en commission. Il a indiqué que ce projet de loi, c'était un peu n'importe quoi et qu'il fallait renvoyer le tout en commission...

Une voix. Mais c'est ce que tu fais aussi !

M. Pierre Vanek. Ce que je ne vais pas faire !

Une voix. Mais tu l'as fait !

Le président. Monsieur le député !

M. Pierre Vanek. Cela démontre l'inanité de nous renvoyer dos à dos, comme l'ont fait la rapporteuse de majorité et la représentante des Verts-Vertes tout à l'heure.

Mon objection porte sur un point, un point seulement, un point qui est la définition de la parité. Il s'agit d'appliquer, quand il est question d'égalité, la définition de ce mot. Mon voisin du Centre a dit que j'avais raison à ce sujet... (Rires.) Et il a eu raison de dire que j'avais raison, ce dont il conviendra volontiers. Eh bien ce problème se corrige facilement, et le remède... Certes, il aurait mieux valu le faire en commission, mais enfin, on fait ce qu'on peut avec ce qu'on a...

Une voix. Alors renvoi en commission !

M. Pierre Vanek. Il aurait mieux valu, mais c'est du passé ! Je vous amène ici le remède au défaut principal de ce projet de loi à travers quatre amendements qu'il suffit d'accepter ce soir avant 23h, et la messe - si j'ose commettre cette infraction à la loi sur la laïcité de l'Etat - sera dite. Je m'oppose donc, Mesdames et Messieurs, au renvoi en commission qui, à mon sens, est inopportun.

Mme Céline Zuber-Roy (PLR), rapporteuse de majorité. Je sais que nous parlons du renvoi en commission, mais pour s'opposer à cette proposition, il faut bien expliquer que la commission a travaillé sur le fond, donc je vais répondre aux questions qui ont été soulevées afin de montrer comment les choses se sont passées. Ainsi que je l'ai indiqué, il y a eu trois ans de travaux, des allers-retours, neuf séances de commission pour traiter cet objet.

Tout d'abord, les amendements du rapporteur de première minorité sont franchement hypocrites. Que les politiciens que nous sommes allions dire à tous ceux qui doivent envoyer des représentants dans les conseils d'administration et commissions officielles: «Vous, personnes extérieures, représentants d'autres associations, vous devez faire attention à la parité, il faut désigner un homme et une femme», pendant que nous, les partis, on se fiche de la parité, on continue à envoyer tous nos copains hommes - c'est quand même beaucoup plus simple -, je trouve cela vraiment hypocrite, et pour cette raison, Mesdames et Messieurs, je vous invite à refuser les amendements de même que le renvoi en commission.

S'agissant de la dernière idée présentée par ce rapporteur de première minorité sur le placement des candidats par le Conseil d'Etat, il a expliqué que...

Une voix. C'est le rapporteur de deuxième minorité.

Mme Céline Zuber-Roy. De deuxième minorité, excusez-moi. (Commentaires.) Vous êtes la deuxième minorité ?

Une voix. C'est égal !

Une autre voix. Sur le renvoi !

Mme Céline Zuber-Roy. Oh, je suis navrée. L'UDC, si vous préférez. La question du placement par le Conseil d'Etat d'un médecin aux SIG ou d'un spécialiste des énergies aux HUG ne correspond pas du tout à la loi, ce n'est pas ce qui est prévu. Au contraire, nous avons fait en sorte que l'entité puisse désigner son candidat et que son choix soit respecté. C'est l'objectif de tout le processus que je vous ai présenté, et si un médecin est présenté aux HUG, il ira aux HUG, et la spécialiste en énergies ira aux SIG.

Une voix. Sur le renvoi !

Mme Céline Zuber-Roy. Sur la question de la parité... (Commentaires.) Honnêtement, j'utilise comme je le souhaite ces trois minutes pour vous prouver qu'il n'est pas nécessaire de renvoyer ce projet de loi en commission ! Sur la question de la parité, M. Vanek a raison: techniquement, ce n'est pas une parité. Je pense qu'il ne s'agit pas d'une question de maths, mais d'un problème de français. Vous avez raison: la parité, c'est 50%. Cela étant, je vous ai proposé en commission un amendement pour remplacer ce terme par l'expression «représentation équilibrée des sexes à 40%», vous m'avez répondu que cela ne vous satisfaisait pas, parce que vous voulez 50% ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Le problème, ce n'est ni le français ni les maths. La majorité ne veut pas 50%, cela permettra une marge, notamment pour les non-binaires qui pourront se placer entre les deux. L'idée, de toute manière, c'est de donner une impulsion pour qu'ensuite...

Le président. Il vous faut conclure, Madame.

Mme Céline Zuber-Roy. ...à terme, cet équilibre se fasse tout seul. Ce 40% est une bonne direction, il n'y a pas besoin d'aller plus loin. Les travaux ont été correctement réalisés en commission, Mesdames et Messieurs, je vous invite à rejeter cette demande de renvoi.

Le président. Je vous remercie. Le Conseil d'Etat souhaite-t-il s'exprimer sur le renvoi en commission ? (Un instant s'écoule.)

Une voix. Il ne sait pas de quoi on parle ! (Commentaires.)

Le président. Non, très bien. Mesdames et Messieurs, nous procédons au vote sur la demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12531 à la commission législative est rejeté par 62 non contre 20 oui.

Le président. Nous poursuivons notre débat, et je donne la parole à M. Diego Esteban.

M. Diego Esteban (S). Merci, Monsieur le président. Le groupe socialiste soutiendra ce projet de loi et tient en premier lieu à remercier les services du département des finances ainsi que la direction des affaires juridiques de la chancellerie qui ont accompagné les travaux en commission.

Pour les socialistes, ce projet constitue une étape. Il est le signe que l'on progresse dans le domaine de la représentation équilibrée des genres; il élève les standards de l'égalité de manière substantielle, un niveau qui pourra éventuellement être adapté dans quelques années s'il est jugé insuffisant.

Les entités qui présentent plusieurs candidatures au sein des commissions officielles ou des institutions décentralisées de droit public auraient, une fois ce projet de loi adopté, plus d'une année pour préparer le renouvellement intégral, début 2024, de la composition des structures dont il est question. Un temps nettement suffisant pour s'organiser et éventuellement recruter. A cet égard, l'amendement déposé tout à l'heure par M. Pfeffer, qui veut préserver les partis politiques du moindre effort dans ce domaine, n'est évidemment pas acceptable.

Il faut en particulier souligner et saluer l'engagement exprimé en commission par le Conseil d'Etat lorsqu'il nous annonçait la liste des dérogations, un engagement à prendre des mesures pour promouvoir auprès d'un public plus diversifié les filières et professions dont la représentation est déséquilibrée. Pour rappel, onze commissions officielles ne comptent aucune femme, une autre ne comprend aucun homme. Selon le Conseil d'Etat, la commission consultative sur le ramonage... (L'orateur rit.) ...ne pourrait aujourd'hui pas susciter un nombre suffisant de candidatures féminines, car il n'existerait que deux ramoneuses dans toute la Suisse romande. (Rires.)

Alors effectivement, à l'impossible nul n'est tenu. En revanche, le conseil consultatif de sécurité fait également partie de la liste des exceptions alors que sa composition ne dépend pas d'une fonction particulière ou de l'appartenance à une structure spécifique, mais de l'expertise de ses membres dans un certain nombre de domaines. Est-il réellement impossible de trouver quatre à six femmes pour ce qui représente la principale structure du canton chargée de réfléchir aux évolutions des besoins et des stratégies en matière de sécurité ? On peut honnêtement en douter.

Quoi qu'il en soit, ce projet de loi doit être adopté ce soir, car tout retard nous fait courir le risque de devoir en décaler l'application au renouvellement suivant, soit en 2028. Voilà d'ailleurs pourquoi il fallait un traitement en urgence - vous transmettrez à M. Florey, Monsieur le président.

Le groupe socialiste le soutiendra tel qu'amendé en commission, mais nous estimons que le meilleur moyen de prouver sa réussite est que l'on observe d'ici au prochain cycle une baisse du nombre de dérogations, signe que les candidatures masculines comme féminines ne manqueront plus, peu importe le domaine. Mais pour cela, il faudra que le Conseil d'Etat entreprenne les actions nécessaires et qu'elles produisent des résultats concrets. Merci de votre attention. (Applaudissements.)

Une voix. Très bien !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Alexis Barbey pour deux minutes.

M. Alexis Barbey (PLR). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, je dois vous dire que je déteste les quotas, que le PLR en général n'aime pas les quotas. Il y a toutefois un constat à faire, c'est que si on conserve le même taux de progression des représentations féminines à l'intérieur des commissions qu'à l'heure actuelle, ça va nous prendre cent ans pour obtenir une équivalence...

Une voix. C'est tout ?

M. Alexis Barbey. C'est vraiment trop long. Je pense qu'il s'agit d'envoyer un message aux femmes, de leur dire qu'elles ont la possibilité d'accepter des responsabilités et de les rechercher sans devoir attendre le bon vouloir de la représentation mâle pour leur donner le reste de ce qui semble leur échoir. Il faut donc avoir une vision actuelle de la société, de la situation.

Se priver des compétences des femmes sous prétexte qu'elles ont peur de participer aux décisions est une mauvaise chose. Il faut ouvrir le débat. Nous n'avons rien à craindre; les hommes compétents n'ont rien à craindre face aux femmes compétentes avec une composition de 60%-40% entre les uns et les autres, Mesdames et Messieurs, et c'est pour cela que je vous enjoins de voter ce projet de loi. Je vous remercie.

Le président. Merci. Madame Dilara Bayrak, vous ne disposez plus que de vingt secondes.

Mme Dilara Bayrak (Ve). Merci, Monsieur le président. Vingt secondes, c'est amplement suffisant pour rappeler à M. Florey que la question des compétences ne se pose absolument pas dans le cadre de ce débat, surtout pas lorsqu'on parle des compétences homme-femme. En effet, quand on pense au nombre d'hommes incompétents qui se trouvent dans certaines structures, pour ne pas citer le Grand Conseil, il y aurait déjà assez à faire en la matière.

Le président. C'est terminé, Madame la députée...

Mme Dilara Bayrak. Les femmes compétentes existent. Aujourd'hui, on a plutôt le problème inverse: des femmes...

Le président. Merci...

Mme Dilara Bayrak. ...se sont fait voler leur place parce qu'elles étaient des femmes, et pour faire changer les choses maintenant, il suffit d'accepter ce projet de loi. (Applaudissements.)

M. Daniel Sormanni (MCG). Ecoutez, Mesdames et Messieurs les conseillers municipaux... (Exclamations.) ...le MCG n'aime pas les quotas non plus, je crois que ce n'est pas la bonne méthode. Finalement, vous allez demander au gouvernement de dire aux partis politiques ce qu'ils doivent faire quand ils désignent des représentants. A mon sens, c'est une mauvaise manière d'aborder la problématique dans cette situation.

Alors un parti va choisir un ou des candidats ou candidates, mais ça ne conviendra pas parce que dans la commission X, Y ou Z, il y aura un déséquilibre, donc le gouvernement va choisir la personne qui siégera pour le parti ?! Vous êtes en train de construire une usine à gaz qui ne fonctionnera pas, et pour cette raison, je pense qu'il faut renvoyer ce projet de loi en commission. Voilà pourquoi j'en fais à nouveau la demande officiellement, si je puis dire.

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous sommes donc saisis d'une nouvelle demande de renvoi en commission. Monsieur Pfeffer, souhaitez-vous vous exprimer ? Ce n'est pas le cas. Et vous, Monsieur Vanek ?

M. Pierre Vanek (EAG), rapporteur de première minorité. Tout a été dit sur le renvoi en commission.

Mme Céline Zuber-Roy (PLR), rapporteuse de majorité. Pour une fois, je rejoins le rapporteur de première minorité.

Le président. Très bien, merci. Si le gouvernement n'entend pas intervenir, je mets aux voix cette nouvelle proposition de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12531 à la commission législative est rejeté par 58 non contre 19 oui.

Le président. Nous reprenons le cours des discussions. Madame Virna Conti, Monsieur Stéphane Florey, il n'y a plus de temps pour l'UDC. (Commentaires.) La parole revient à M. Francisco Valentin...

Une voix. Je suis désolé, mais on m'agresse, là !

Le président. Monsieur Francisco Valentin, c'est à vous. (Un instant s'écoule.)

Une voix. Francisco !

M. Francisco Valentin (MCG). Merci, Monsieur le président, et pardon, il y avait un peu de bruit, je n'avais pas entendu. Ce projet de loi part certainement d'un très bon sentiment. Visiblement, les femmes dans tous les partis - en tout cas les autres partis - sont brimées et n'ont pas le droit de se présenter librement et de se faire élire, donc il faut légiférer. Alors légiférons et obligeons des gens qui n'ont pas forcément envie d'être sur des listes à y figurer simplement parce qu'il faut une parité à tout prix. Et je ne parle pas des compétences ! Françoise Giroud disait: «La femme sera l'égale de l'homme le jour où on élira une incompétente à un poste.» Alors c'est peut-être vrai, je ne pense pas que Françoise Giroud était taxée d'antiféminisme.

Pour ma part, ce qui me dérange, dans ce texte, c'est l'obligation. On contraint les entités, on force les partis à atteindre une parité coûte que coûte - et je ne parle même pas de l'égalité de pourcentages, comme le dénonçait le député Vanek. En effet, cela a été souligné par une préopinante très féministe, une parité, c'est 50%-50%, ce n'est pas 40%-60%, ce n'est pas 20%-80%.

Maintenant, comment peut-on passer des heures à discuter là-dessus alors que si une femme veut se faire élire dans n'importe quelle commission, dans n'importe quel engagement politique, il lui suffit de se placer sur une liste ? A moins que son parti ou son mari le lui interdise, mais ça, c'est un autre problème. Mais sinon, personne - personne ! - n'interdit à une femme de se mettre sur une liste, de se faire élire et de siéger dans ce parlement ou dans des commissions. Légiférer pour obliger d'arriver à ça, c'est une discrimination positive, on va faire fi des personnes en disant: «Non, non, il faut mettre un homme ou une femme.» Qu'en sera-t-il des partis qui n'arriveront pas à drainer cinquante femmes pour déposer une liste qui soit intéressante au Grand Conseil ?

Une voix. Et les intergenres !

M. Francisco Valentin. Et les intergenres ? Et puis tout ce qui va sortir, toutes les nouveautés qui sont en train d'être découvertes, que va-t-on en faire ? On les mettra dans quelle catégorie ? Un député socialiste a dit: «C'est une étape.» On le voit venir, en effet: bientôt, les grille-pain auront leur place aussi au Grand Conseil ! (Rires.) Mais qu'ils soient élus démocratiquement par le peuple, et non pas de façon dictatoriale. C'est pour ça que je redemande, Monsieur le président, le renvoi en commission, et immédiatement. (Exclamations.) Merci.

Une voix. Bravo !

Le président. Je vous remercie. Monsieur Pfeffer, sur le renvoi en commission ?

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Oui, je soutiens le renvoi en commission. J'aimerais encore souligner une chose. On a dit que je voulais éviter aux partis politiques de faire un effort; ce n'est absolument pas le cas. Je répète que si on se base exclusivement sur le nombre de candidats dont le Conseil d'Etat dispose, ça suffit, il y aura largement la parité qu'on réclame ici. Donc laissons, comme je le propose avec mes amendements, les partis politiques en dehors de ça. Vu qu'une large majorité des groupes sont des partis gouvernementaux, il n'y aura aucun problème pour obtenir la parité, parce que tout le monde la veut. Je pense qu'il faut l'atteindre, mais sans créer d'usine à gaz. Merci.

Le président. Je vous remercie. Les autres rapporteurs ne sollicitent pas la parole, le Conseil d'Etat non plus, donc nous nous prononçons à nouveau sur le renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12531 à la commission législative est rejeté par 63 non contre 21 oui.

Le président. Monsieur Florey, vous n'avez plus de temps de parole... (Remarque.) Monsieur Florey, le Bureau unanime estime que vous n'avez pas été mis en cause. Le micro passe à M. Patrick Saudan pour une minute et demie.

Une voix. Il faut que Virna réponde pour toi !

Le président. Une minute et demie, Monsieur Saudan ! (Un instant s'écoule.)

Une voix. Patrick ! Patrick !

Une autre voix. Ah, elle est belle, la parité sur les temps de parole !

Le président. Monsieur Saudan, vous avez la parole. (Remarque.) C'est une erreur, d'accord. Monsieur François Baertschi, il vous reste quinze secondes. (Remarque.) Vous renoncez, merci. Dans ce cas, la parole échoit à Mme la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet.

Des voix. Ah !

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je tiens en préambule à remercier la commission pour le travail très important qu'elle a opéré dans le cadre de ce projet de loi, l'ensemble des députés ainsi que les services de la chancellerie qui sont venus se joindre à ceux du département des finances.

Aujourd'hui, on le constate dans différents conseils d'administration, on l'observe également au sein des commissions officielles: les femmes sont très largement sous-représentées. Je prends l'exemple de l'aéroport: il y a 19 hommes pour quatre femmes. Mesdames et Messieurs, 19 hommes pour quatre femmes ! Nos partis, nos associations faîtières, nos groupements économiques sont tous composés d'hommes et de femmes compétents, et je pense qu'il est absolument nécessaire que maintenant, nous facilitions l'accession des femmes à certains postes.

J'aimerais par ailleurs exprimer mon étonnement quand certains abordent les personnes et leur genre; je crois qu'il y a des êtres humains avant tout, quel que soit leur genre, ils ne sauraient être comparés à des choses, et nous nous devons tous de respecter chaque être humain et ses choix dans la vie.

S'agissant de la question qui nous occupe, à savoir la représentation des femmes et des hommes au sein des commissions, il y a des exceptions, elles ont été indiquées, mais j'en relève deux particulières, à savoir d'une part le fait que la loi ne s'applique pas aux désignations de membres de commissions et de conseils en raison de leur fonction - on ne va pas forcer qui que ce soit à changer de fonction pour figurer dans une commission -, d'autre part que ce projet de loi protège tant les hommes que les femmes dès lors qu'il évoque le sexe sous-représenté. En effet, cela a été souligné un peu plus tôt, certains conseils d'administration, par exemple dans les domaines sociaux, sont beaucoup plus composés de femmes, donc nous trouverons des hommes qui s'y intéresseront.

Sur la question des compétences, je pense qu'elle ne se pose pas, car tout conseil, tout parti, toute association faîtière souhaite envoyer des personnes compétentes dans les entités et commissions officielles. On le voit aujourd'hui au niveau national, il y a 73% d'hommes dans les conseils les plus importants de Suisse. 73% d'hommes pour 17%... Non, je me suis trompée: 83% d'hommes pour 17% de femmes. Mesdames et Messieurs, si l'ensemble de ces 83% d'hommes étaient compétents, eh bien je suis certaine que cela se saurait ! (Applaudissements.)

Au niveau économique, Mesdames et Messieurs, il est acquis qu'un conseil représenté de façon paritaire par des femmes et des hommes est plus performant économiquement. Cela aussi, c'est quelque chose d'acquis dans l'entier des milieux économiques. On le constate dans les établissements bancaires qui font des chiffres et des profits plus importants, on le remarque au sein des sociétés cotées. Il est dès lors passéiste de penser que les femmes n'ont pas leur place dans les commissions officielles et conseils d'administration.

Je déplore le fait que finalement, lorsqu'on essaie de faire avancer les choses, d'aucuns trouvent toujours que tout est trop compliqué, que cela constitue une usine à gaz. Quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage; je suis très heureuse de voir que ce projet de loi n'a pas été tué par une majorité de ce Grand Conseil et je me réjouis de le voir adopté ce soir. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. A présent, Mesdames et Messieurs, je lance le vote d'entrée en matière sur ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 12531 est adopté en premier débat par 64 oui contre 19 non.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'art. 2, al. 2 (nouvelle teneur).

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement de M. Pierre Vanek:

«Art. 5, al. 4 (nouvelle teneur)

4 Elles font en sorte que la parité des sexes soit atteinte au sein de chaque commission à raison de 50% de chaque sexe.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 75 non contre 8 oui.

Mis aux voix, l'art. 5 (nouvelle teneur avec modification de la note) est adopté, de même que les art. 5A (nouveau) et 5B (nouveau).

Le président. M. André Pfeffer a déposé l'amendement suivant:

«Art. 5C, al. 2 (nouvelle teneur)

2 Les articles 5A et 5B ne s'appliquent pas pour la désignation des membres en raison de leur fonction et aux membres désignés par le Grand Conseil.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 75 non contre 7 oui.

Mis aux voix, l'art. 5C (nouveau) est adopté, de même que les art. 14, al. 2 (nouvelle teneur), al. 3 (nouveau, les al. 3 et 4 anciens devenant les al. 4 et 5), et 23, al. 10 à 12 (nouveaux).

Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté.

Le président. Nous passons à l'article 2 souligné, qui modifie d'autres lois. Nous commençons par l'alinéa 1, qui modifie la loi sur l'organisation des institutions de droit public.

Mis aux voix, l'art. 14, al. 2 (nouvelle teneur), est adopté, de même que l'art. 15 (nouvelle teneur).

Le président. M. Pierre Vanek nous soumet un nouvel amendement:

«Art. 15A, al. 1 (nouvelle teneur)

1 Le Conseil d'Etat s'assure que la parité des sexes soit atteinte au sein de chaque conseil, à hauteur de 50%.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 72 non contre 10 oui et 1 abstention.

Mis aux voix, l'art 15A (nouveau) est adopté.

Le président. Encore un amendement de M. Pierre Vanek:

«Art. 15B, al. 1 (nouvelle teneur)

1 Lorsque la parité spécifique de 50% des candidatures n'est pas atteinte, le département chargé de la surveillance de l'institution invite les institutions et entités visées à l'article 15, alinéa 3, ayant désigné une ou plusieurs personnes du sexe surreprésenté à se concerter et à proposer, dans un délai de 30 jours, des candidatures respectant les exigences de parité.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 74 non contre 11 oui.

Mis aux voix, l'art. 15B (nouveau) est adopté, de même que les art. 15C (nouveau) à 55, al. 9 et 10 (nouveaux).

Le président. Nous arrivons à l'alinéa 2 de l'article 2 souligné, qui modifie la loi portant règlement du Grand Conseil. Le prochain amendement est présenté par M. André Pfeffer:

«Art. 107B (nouvelle teneur)

Le Bureau du Grand Conseil veille au respect des articles 16 à 21 de la loi sur l'organisation des institutions de droit public, du 22 septembre 2017.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 75 non contre 9 oui.

Le président. Enfin, M. Pierre Vanek propose l'amendement que voici:

«Art. 107B, al. 1 (nouvelle teneur)

1 Le bureau s'assure que les candidatures proposées au Grand Conseil respectent la parité des sexes au sein de chaque conseil d'établissement soumis à la loi sur l'organisation des institutions de droit public, du 22 septembre 2017, à raison de 50% de chaque sexe.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 73 non contre 11 oui.

Mis aux voix, l'article 107B (nouvelle teneur) est adopté.

Mis aux voix, l'art. 2 (souligné) est adopté, de même que l'art. 3 (souligné).

Troisième débat

Mise aux voix, la loi 12531 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 60 oui contre 19 non (vote nominal).

Loi 12531 Vote nominal