République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 14 octobre 2022 à 18h20
2e législature - 5e année - 5e session - 32e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 18h20, sous la présidence de M. Jean-Luc Forni, président.
Assistent à la séance: Mme et MM. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat, Anne Emery-Torracinta et Serge Dal Busco, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Antonio Hodgers, Nathalie Fontanet, Thierry Apothéloz et Fabienne Fischer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Diane Barbier-Mueller, Natacha Buffet-Desfayes, Grégoire Carasso, Pablo Cruchon, Edouard Cuendet, Marc Falquet, Joëlle Fiss, Serge Hiltpold, Patrick Lussi, Philippe Morel, Romain de Sainte Marie, Patrick Saudan, Charles Selleger, Sylvain Thévoz et Salika Wenger, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Glenna Baillon-Lopez, Rémy Burri, Gilbert Catelain, Denis Chiaradonna, Nicolas Clémence, Françoise Nyffeler, Jean-Pierre Pasquier, Helena Rigotti, Sébastien Thomas et Pascal Uehlinger.
Annonces et dépôts
Néant.
Premier débat
Le président. Nous reprenons le traitement des urgences, en commençant par le PL 12795-A qui est classé en catégorie II, quarante minutes. Je donne la parole à... à la rapporteure de majorité, j'imagine ?
Mme Amanda Gavilanes (S), rapporteuse de majorité. Vous imaginez bien, Monsieur le président, merci beaucoup ! (L'oratrice rit.) Mesdames les députées, Messieurs les députés, j'ai le plaisir de vous présenter le rapport de la commission de l'enseignement supérieur sur ce projet de loi intitulé «Examens écrits anonymes à l'Université de Genève». La commission s'est réunie à quatre reprises, de novembre 2020 à janvier 2021, pour traiter ce sujet. Lors des séances qui lui ont été consacrées, elle a eu l'occasion d'entendre des membres du rectorat, des étudiants de l'Université de Genève ainsi que des responsables du département de l'instruction publique.
Il est ressorti des débats et des discussions que la mise en oeuvre de l'anonymisation des examens à l'Université de Genève est une question récurrente depuis 2012. En effet, alors qu'il était interpellé à ce propos, le rectorat expliquait cette année-là que la question avait déjà été soulevée quelques années auparavant et qu'il n'entendait pas, pour différentes raisons, suivre la voie d'une anonymisation des examens écrits, jugée trop coûteuse et rarement pertinente. Surpris de la teneur de cette réponse, le comité d'éthique et de déontologie s'était alors emparé de la question et avait saisi le rectorat. Selon le comité, «le processus d'anonymat garantit de manière absolue le traitement équitable des étudiantes et des étudiants partout où il est possible de l'introduire». Il avait par ailleurs également interpellé le Conseil d'Etat à ce sujet. Notons du reste que de nombreuses universités, tant en Suisse qu'à l'étranger, considèrent l'anonymisation des examens comme une norme déjà bien établie.
A la suite de ces discussions, la conception d'un programme permettant l'anonymisation des examens a fait partie des points fixés dans la convention d'objectifs 2016-2019 de l'UNIGE. Pendant de nombreuses années, et malgré ces obligations, l'institution n'a pas entrepris les démarches nécessaires à la mise en place d'un système qui permette cette anonymisation dans toutes les facultés et au sein de toute l'université. Puis est arrivée la pandémie de covid-19; la fermeture des universités suisses a eu un effet secondaire inattendu: elle a contribué au développement et à la mise en place de systèmes de cours et d'évaluation à distance. Le processus d'anonymisation des examens a donc connu une accélération depuis 2020: les évaluations anonymisées sont ainsi passées d'une quarantaine en 2017 et 2018 à 100 en 2018-2019, puis à 530 pour la session de mai-juin 2020. Cette nouvelle réjouissante est le signe qu'il manquait une impulsion pour vraiment mettre en route un processus nécessaire en vue d'assurer l'égalité de traitement à toutes les étudiantes et tous les étudiants de l'Université de Genève. Le département de l'instruction publique est quant à lui attentif à ce que les objectifs convenus en la matière avec l'UNIGE soient respectés et voit d'un bon oeil les améliorations de ces dernières années.
Lors des débats en commission, il a souvent été question de l'autonomie de l'université. Certains élus craignaient que celle-ci se trouve impactée par la modification législative proposée; d'autres - une majorité - y ont vu un moyen d'inscrire le principe fondamental d'égalité de traitement aux examens dans la loi. Cela permet un ancrage fort de cette pratique et évite qu'elle soit déclinée au bon vouloir de la volonté politique des instances universitaires.
Permettez-moi de rappeler ici en quoi consiste l'anonymisation des examens. Elle consiste à cacher le nom et le prénom de l'étudiante ou de l'étudiant afin de garantir que celle-ci ou celui-ci ne subisse pas de discrimination ni, au contraire, ne bénéficie d'un traitement de faveur. Par souci de tenir compte de la dynamique impulsée depuis la pandémie par le rectorat et de consensus, les commissaires ont adapté le texte proposé afin que celui-ci prenne en compte les différentes modalités d'évaluation ainsi que les contextes académiques particuliers qui coexistent à l'Université de Genève. Il était également important pour les commissaires de laisser la marge de manoeuvre nécessaire au rectorat pour faire aboutir les démarches qu'il a entreprises en la matière depuis de nombreuses années, tout en inscrivant dans la loi l'égalité de traitement lors des examens.
C'est ainsi une version amendée que la commission a finalement votée par 8 voix contre 7. Celle-ci met l'accent sur l'égalité de traitement aux examens et non plus sur l'anonymisation. L'article est donc formulé ainsi: «L'université fixe des modalités d'examens qui garantissent un traitement équitable des étudiants et étudiantes. Dans la mesure du possible, l'évaluation des examens écrits est anonymisée.» C'est pourquoi, Mesdames les députées, Messieurs les députés, je vous invite, au nom de la commission de l'enseignement supérieur, à accepter ce projet de loi tel qu'amendé: il est à la fois nécessaire, justifié et réalisable. Il est temps que l'Université de Genève institutionnalise l'anonymisation des examens demandée par près de 80% de la population estudiantine. Merci. (Applaudissements.)
M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de minorité. Une nouvelle fois, comme pour beaucoup de textes proposés dans ce parlement et qui figurent à l'ordre du jour de notre session, il s'agit ici de contrôler une institution phare de notre république au mépris complet de son statut d'établissement autonome. Cela met en péril sa qualité et son dynamisme, reconnus par tout le monde, de même que la motivation de ses organes dirigeants qui sentent un manque de confiance de notre part - le recteur l'a confirmé lors de son audition. La diversité et la reconnaissance de la diversité sont bien évidemment indispensables, mais à force de vouloir tout contrôler, de vouloir tout normer, on casse cette diversité.
L'anonymisation des examens est un leurre qui cache une volonté de tout contrôler dans les plus petits détails, sans lien aucun avec l'égalité des chances à laquelle nous sommes tous attachés. Et ce n'est nullement par l'anonymisation que l'on pourra éviter tout copinage, cela pour la simple et bonne raison qu'il est tout à fait possible, s'il y a connivence entre l'étudiant et le professeur, que l'étudiant mette tout bonnement un petit signe distinctif sur sa copie ! Cela va même plus loin: il peut être très facile de reconnaître une écriture, voire un style si l'examen n'est pas manuscrit. En voulant supprimer des biais par l'anonymisation, on en crée de nouveaux, et cela ne pourra en tout cas pas s'appliquer aux examens oraux, travaux de groupe ou contrôles continus divers. L'impact de ce projet de loi est donc très limité et laisse penser que l'on pourra tout anonymiser alors que ce ne sera pas le cas.
Le recteur nous a confirmé qu'il faut faire une distinction entre les examens anonymes et les évaluations anonymes - c'est très important - et qu'il y a une progression importante de la pratique des évaluations anonymisées à l'université. Il souhaite bien évidemment éviter que le projet de loi soit une incitation à des méthodes d'évaluation qui ne sont pas les plus intéressantes. La pandémie a poussé l'université à réfléchir à la manière de tester les prestations des étudiants, ce qui a permis de développer de nouvelles modalités d'évaluation. Malheureusement, ces méthodes-là ne sont toujours pas compatibles avec une anonymisation. Il ne souhaite pas qu'un projet de loi interrompe ces expérimentations pédagogiques - tout ne peut pas être anonymisé ! Voilà ce qu'a dit le recteur; dont acte.
La commission, qui a finalement modifié le texte pour le rendre acceptable, l'a malheureusement rendu peu précis en introduisant une notion, une formulation, que les avocats adorent: «dans la mesure du possible». Ça va indubitablement générer nombre de recours - il y en a déjà beaucoup, à l'université, en lien avec les examens - puisque cette notion implique une évaluation de la situation, selon un des auteurs du texte. Enfin, l'exposé des motifs se borne à critiquer le manque d'actions de l'université sans relever les nombreuses avancées, notoires, dans le domaine. Preuve en est que l'auteur du projet de loi n'étaie pas son propos de cas problématiques concrets, qui sont toujours mentionnés sans jamais être documentés.
En conclusion, il faut laisser la marge de manoeuvre aux organes de l'université tout en encadrant la mission de l'institution avec des conventions d'objectifs, qui existent déjà. L'autonomie de l'université est profitable à tous, avec des mesures de contrôle mais sans contraintes supplémentaires inutiles. Il faut donc refuser ce projet de loi contreproductif, qui ne respecte ni ce que l'université a déjà fait - ce qu'elle a mis en place et va continuer à faire - ni son indispensable autonomie. Je vous remercie.
Une voix. Bravo !
M. Youniss Mussa (S). Chères et chers collègues, permettez-moi tout d'abord de saluer l'Université de Genève en ce jour de Dies academicus: très bonne année académique à toutes les personnes concernées !
S'agissant du projet de loi qui nous occupe aujourd'hui, j'aimerais en premier lieu revenir sur les raisons qui m'ont conduit à le déposer. Plusieurs étudiants ont expliqué que, durant leurs études, un de leurs proches avait eu à corriger leurs copies d'examens; j'ai entendu différents témoignages rapportant que le cousin de celui-ci ou la tante de celle-là avaient eu à corriger leur proche. Je me souviens même d'une étudiante qui pouvait connaître sa note à l'avance grâce à son amie assistante, ou de l'assistant qui notait plus durement un proche pour ne soulever aucun soupçon. C'est tout à fait problématique.
Sans revenir sur la question des biais conscients et inconscients relatifs au nom et au prénom, prouvés par de nombreuses études, ce projet de loi permettra de garantir une égalité de traitement dans la correction des examens écrits. Il s'adresse à tous les étudiants - fils ou filles de notables, personnes avec un nom ou un prénom à consonance étrangère - et permettra de garantir l'anonymat de celui qui pourrait être connu par le correcteur. Genève est une petite ville, nous le savons, et il y a fort à parier que lorsque l'on baigne dans un milieu, on finit par tous se connaître. Je ne doute pas du bon comportement de l'écrasante majorité des professeurs et assistants. Néanmoins, il faut leur garantir des conditions de travail dans lesquelles le soupçon et la rumeur n'ont pas leur place; ce projet de loi leur procure une protection supplémentaire dans le cadre de leur emploi.
Je tiens à préciser que cet objet est soutenu par l'ensemble des associations universitaires et par 80% des étudiants et étudiantes, et que la mesure est préconisée depuis 2012 par le comité d'éthique et de déontologie de l'université. A la suite des propositions du rectorat et afin de respecter ses volontés, la commission de l'enseignement supérieur a amendé le texte de manière à le rendre pleinement cohérent. Ce texte, je le rappelle, est cosigné par des députés Ensemble à Gauche, Verts, UDC et a été soutenu en commission par le MCG; je les en remercie.
Il faut dire que l'Université de Genève est l'une des dernières à ne pas avoir mis en place cette mesure en faveur de l'égalité de traitement. La majorité des établissements européens l'ont mise en place; les universités anglaises, américaines, françaises, etc., ont depuis longtemps garanti l'égalité de traitement dans la correction des examens. Les universités suisses ont aussi - et depuis longtemps - mis en place ce que ce projet de loi propose, par exemple celles de Berne, Fribourg, Lausanne, Neuchâtel. Ce n'est même plus un débat.
J'ai lu dans le rapport que certains députés PLR s'inquiètent du fait que les étudiants soient bientôt obligés de passer les examens avec un masque leur couvrant le visage. Je tiens à vous rassurer: il n'y aura ni cagoule ni masque de carnaval, mais bien des étudiants et étudiantes la tête pleine de connaissances souhaitant être notés de manière fidèle à celles-ci. A vous qui prônez la méritocratie: j'aurais aimé vous convaincre, parce que mon projet va dans ce sens. Pour rappel - et pour tenter une dernière fois de vous convaincre -, nous avons la possibilité de voter un texte qui met en place une mesure qui ne coûte rien et qui améliore le système actuel.
Deux mots aussi sur l'amendement que j'ai déposé: il ne change rien sur le fond. Il corrige la date d'entrée en vigueur: le texte actuel prévoit en effet une entrée en vigueur en septembre 2021, il faut par conséquent rectifier cela avant de procéder au vote. Je vous invite donc à soutenir mon amendement et mon projet de loi. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Mme Virna Conti (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, oui, j'ai cosigné ce texte parce qu'il fut un temps où j'étais aussi universitaire. J'entends le député Jacques Béné dire qu'il manque des exemples concrets; je n'aime pas trop personnaliser mes propos, mais là, je vais devoir le faire. J'en suis effectivement la preuve vivante et concrète: à l'université, lorsque j'étais en droit, un membre de ma famille était assistant et il se trouve qu'il devait corriger des copies à mon nom toutes les deux semaines. Et il me disait: «Tu sais, Virna, quand je corrige tes copies, un peu inconsciemment, je le fais d'une manière un peu plus dure et rigide pour éviter le favoritisme.» J'aurais donc apprécié que ce principe de l'anonymat existe déjà en ce temps-là. Et, cela a été relevé précédemment, il existe déjà dans pas mal d'universités, notamment romandes.
Si on se concentre maintenant sur Genève et sur l'Université de Genève, eh bien on se rend compte qu'à l'école d'avocature, les examens sont d'ores et déjà anonymes; personne ne s'en plaint et tout le monde est extrêmement content. On parle de diversité - pire encore, on dit qu'on va casser la diversité: si pour vous la diversité consiste en une inégalité de traitement, alors moi je dis non ! Par conséquent, pour éviter le favoritisme, respectivement pour éviter l'inverse - qui est un cancer lors de la correction des examens -, pour éviter ce dualisme qui n'est absolument pas justifié, il est à mon sens important de mettre en place ce système favorable à la bonne marche des examens. Et pour toutes ces raisons, je vous invite à soutenir ce texte. Merci.
Mme Katia Leonelli (Ve). Permettez-moi tout d'abord de remercier la rapportrice de majorité pour la qualité de son rapport. Comme elle et mon préopinant socialiste l'ont expliqué, ce projet de loi vise à atteindre, moyennant anonymisation, l'égalité de traitement dans le cadre des examens universitaires. Le texte initial demandait la suppression systématique du nom et du prénom sur la copie transmise pour correction, et ce dans le but d'éviter toute forme de discrimination.
Suite aux auditions réalisées par la commission, la majorité s'est mise d'accord sur un compromis plus souple qui respecte la liberté d'action de l'université et la protège, notamment en cas de recours. De ce fait, je m'étonne que la minorité craigne de mettre en péril le statut ou la sécurité de notre alma mater - à ce sujet, amendement souple ou pas, je me permets de vous rappeler que l'université n'est pas une entité privée, qu'elle n'est pas 100% autonome puisqu'elle est soumise à la loi sur l'université que notre parlement, en tant que représentant du peuple, est tout à fait légitime à modifier.
L'audition de l'université aura montré que le rectorat oeuvre déjà dans ce sens et je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, pour l'encourager dans sa lancée, à voter en faveur de ce projet de loi tel qu'amendé en commission. Je vous remercie.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, on l'a dit, c'est déjà pratiqué un peu partout, dans les universités notamment ! Et je pense que la volonté de tendre à l'égalité est une bonne idée ! Bien sûr, ça ne peut pas être absolu - le recteur nous l'a bien expliqué en commission - et c'est la raison pour laquelle cet amendement a été adopté: pour introduire de la souplesse, puisque c'est désormais marqué «dans la mesure du possible». Il y a des cas où ce ne sera pas possible; évidemment que ce n'est pas possible lors d'un examen oral, autrement les étudiants devraient effectivement s'y présenter avec un masque et un habit qui cache tout le reste. Ce n'est pas sérieux !
En donnant un signal politique pour qu'on pratique, quand cela est réalisable, cette anonymisation afin de garantir au maximum l'égalité de traitement, on appuie à mon avis ce que l'université fait déjà par ailleurs dans la mesure du possible. Et je crois que c'est notre mission en tant que parlementaires. On ne touche pas directement à l'opérationnel: l'université aura l'autonomie et la sagacité de le faire quand ce sera possible et de ne pas le faire lorsque ce ne le sera pas; son autonomie est donc garantie.
Par conséquent, je pense qu'on peut tout à fait voter ce projet de loi - j'avais envie d'employer l'expression: il ne mange pas de pain. Il donne un coup de pouce, il pousse l'université à aller un peu plus loin qu'elle ne le fait maintenant. Elle le fait déjà, mais on lui demande un effort supplémentaire, et je pense que c'est notre rôle en tant que députés, puisque c'est quand même le parlement qui vote la loi sur l'université. On peut donc tout à fait aller dans le sens de ce projet de loi, et je vous invite à le voter. Merci.
M. Murat-Julian Alder (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, puisque chacun y va de sa petite histoire, je vais vous narrer la mienne. J'ai été pendant deux ans assistant en droit constitutionnel à la faculté de droit de l'Université de Genève et je peux vous dire une chose: quand vous devez corriger des centaines et des centaines de copies d'examens, vous n'avez même pas le temps de regarder les noms et prénoms des étudiants à qui elles appartiennent ! Donc, franchement, si vous pensez que les assistants des différentes facultés de l'Université de Genève accordent la moindre importance à cela, vous vous trompez !
La réalité, Mesdames et Messieurs, c'est que ce projet de loi est teinté de méfiance envers le corps enseignant de l'université, qui est présumé discriminant par les auteurs du texte, ce qui est tout simplement inacceptable. Et je prédis par ailleurs que si cette loi est votée, nous aurons une avalanche de recours, puisque le texte de l'article 18A prévoit que «l'université fixe des modalités d'examens qui garantissent un traitement équitable des étudiantes et étudiants». Le principe d'équité figure déjà dans les règlements de l'université, dans la loi sur l'université, dans la constitution cantonale, il est donc complètement inutile de le préciser encore là.
En plus de ça, l'article dit: «Dans la mesure du possible, l'évaluation des examens écrits est anonymisée.» Alors que va-t-il se passer ? Chaque fois qu'un étudiant ne sera pas content de la manière dont il aura été évalué, il va d'abord faire recours en invoquant l'obligation d'anonymiser le traitement de son examen s'il n'a pas fait l'objet de cet anonymat. Il va donc y avoir une judiciarisation de cette question de l'anonymat, on assistera à une multiplication de procédures - on va clairement créer une usine à gaz.
Le système qui est aujourd'hui en place à l'université fonctionne; les discriminations alléguées ne sont ni prouvées ni établies. Il s'agit là clairement de ce que les anglophones appellent du «wishful thinking». Il faut arrêter de vouloir toujours être perfectionniste ! Le corps enseignant de l'université n'a pas à être présumé discriminant, c'est tout à fait inacceptable, et c'est pour cette raison-là que je vous invite à ne pas voter ce projet de loi. Merci de votre attention.
M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, notre groupe votera ce projet de loi. La question de l'égalité de traitement est importante pour Ensemble à Gauche, et l'évaluation devrait tendre à une forme d'impartialité dans tout le domaine de la formation - on pourrait très bien l'imaginer pour le primaire, pour le cycle d'orientation, pour le collège, etc., mais bon ! (Remarque.) Oui, oui, c'est important ! Vous pouvez quand même réaliser que la question de l'impartialité, de la neutralité des correcteurs des évaluations est importante, qu'importe l'âge. Aujourd'hui, ce soir, il est question de l'université, et on l'a entendu, il y a bien d'autres exemples ailleurs qui montrent que c'est tout à fait possible.
Il n'est pas correct, il n'est pas de bon aloi de présenter ce projet de loi comme un acte de défiance envers l'université. Franchement, là, il y a tout... Au contraire, c'est plutôt un soutien à l'université, parce que même si le député Murat-Julian Alder prétend que les correcteurs corrigent à l'aveugle, n'ont pas le temps de regarder les noms, etc., il y a des biais inconscients - et l'inconscient, on ne le maîtrise pas. Il y a forcément une forme de subjectivité, totalement inconsciente, mais qui existe et qu'on ne peut pas nier ! Le texte va donc plutôt aider l'université à garantir une égalité de traitement, une impartialité, tout à fait nécessaire à notre époque. Voilà ! Ensemble à Gauche vous invite à voter ce projet de loi. Merci.
M. Jacques Blondin (PDC). Pour le PDC, le libellé de l'article 18A est surprenant: «[...] Dans la mesure du possible, l'évaluation des examens écrits est anonymisée.» C'est un libellé qu'on s'attend effectivement à trouver dans une motion plus que dans un projet de loi puisque - ça vient d'être dit - il ouvre la porte à quantité d'interprétations.
Nonobstant ce problème, le texte a fait l'objet, ces derniers temps, de nombreuses discussions au sein de notre groupe; elles nous amènent à laisser la liberté de vote à nos membres. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Stéphane Florey pour deux minutes vingt-trois.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Deux mots sur ce projet de loi et notamment sur ce que j'ai entendu Mme Leonelli dire - vous transmettrez, Monsieur le président. Vous ne pouvez pas déclarer dans ce cas, parce que ça vous arrange, que l'université n'est pas autonome et tout le contraire sur d'autres sujets. Ça a toujours été dit, Mme la conseillère d'Etat le rappelle sans cesse: l'université est autonome et elle fait à peu près ce qu'elle veut. Ça a toujours été dit, c'est un état de fait, et vous ne pouvez pas le nier.
Maintenant, sur le principe d'anonymiser ces examens, je suis désolé: vous jetez le discrédit sur le système lui-même, sur l'université et sur ceux qui font le travail de correction ! Et c'est inadmissible d'affirmer que suivant votre milieu socioprofessionnel, suivant d'où vous venez, suivant de qui vous êtes le fils ou quoi, on prendrait la liberté de donner moins de crédit à vos travaux ! Non, ce projet de loi ne tient pas la route. Personnellement, je le refuserai; mon groupe votera ce qu'il a envie de voter. (Rires.) Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va maintenant à M. Thomas Bläsi pour cinquante-six secondes.
M. Thomas Bläsi (UDC). Ça suffira, Monsieur le président, merci. Je pense qu'à Genève tout le monde sait que tout le monde connaît tout le monde, ou tout le monde connaît quelqu'un qui connaît quelqu'un d'autre ! (Remarque.) Oui, peut-être, Monsieur Alder ! Mais en première année de médecine, ce sera quand même nettement plus difficile: si le fils d'un professeur directeur d'un service de l'Hôpital cantonal passe l'examen, eh bien ça complique les choses que son nom figure en haut à gauche ! Et vous l'avez dit vous-même, ça n'apporte aucune plus-value. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Il n'y a aucune plus-value à avoir le nom sur la copie, donc pourquoi le laisser ? Pourquoi le laisser ? Pourquoi prendre ce risque alors que ça ne sert à rien ! Et ce n'est en aucun cas jeter le discrédit sur les personnes de l'université: c'est juste les mettre dans une situation où elles n'auront pas à se poser la question de qui, de quoi, ou à avoir la moindre réticence sur la note. Elles auront une seule chose à faire: corriger, mettre une note ! Ensuite, on fait correspondre les chiffres...
Le président. Il faut conclure, Monsieur le député.
M. Thomas Bläsi. ...et on sait qui a cette note, ce qui nous garantit l'objectivité.
Le président. Merci.
M. Thomas Bläsi. En tant qu'universitaire, je soutiens donc bien évidemment ce principe: il est le seul viable pour les examens. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole au rapporteur de minorité. Il vous reste une minute trente, Monsieur le rapporteur.
M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Oui, c'est un manque de confiance envers l'université - je crois que c'est assez clair ! Le recteur l'a dit: il a besoin de confiance et craint par ailleurs qu'avec ce projet de loi, il y ait des recours du fait que l'examen n'aurait pas été anonymisé. Il indique très clairement que «les différentes formes d'examen font la richesse de la correction en garantissant l'égalité de traitement. Il ne faut donc pas aller vers un système où il n'y aurait plus qu'un seul mode d'évaluation». Il demande qu'on lui fasse confiance, surtout parce qu'il est prévu de développer l'anonymisation et que ça évolue concrètement. Il nous a cité des exemples, avec le nombre d'examens. Il est favorable à l'évaluation anonyme des examens quand elle se justifie et si celle-ci n'incite pas à créer d'autres formes d'évaluation afin d'échapper à cette anonymisation. Ceux qui votent ce projet de loi ne font confiance ni à l'université ni au rectorat.
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Jean Romain, il vous reste trente-neuf secondes.
M. Jean Romain (PLR). Je vous remercie, Monsieur le président. Concernant la note, j'ai bien entendu ce qui s'est dit: on veut des notes objectives. Mais ça n'existe pas, des notes objectives - à moins d'être mises par une machine ou par le biais d'un QCM ! Toute note est par nature subjective, mais ce n'est pas parce qu'elle est subjective qu'elle est arbitraire ! C'est ça, la différence ! Je crois que dès que vous mettez une note ou dès que vous évaluez quelqu'un, même sans note, même avec une quelconque formule, eh bien c'est votre subjectivité qui intervient. Est-ce que cette subjectivité est nécessairement différente selon la personne qui est en face de vous ? Je ne le crois pas. Je crois qu'il est une méfiance envers le corps enseignant...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Jean Romain. ...corps enseignant qui, d'une certaine manière - et j'en termine par là, Monsieur le président -, fait justement tout son possible pour que la subjectivité ne devienne pas de l'arbitraire. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Jean Batou pour deux minutes vingt-cinq.
M. Jean Batou (EAG). Oh, merci, Monsieur le président, je n'aurai pas besoin de tout ce temps ! D'expérience, je pense que la plupart des correcteurs d'examen ne tiennent effectivement pas compte des noms qu'ils ont sous les yeux, mais qu'il peut arriver - il peut arriver ! - que ce soit le cas. Je ne vois absolument pas ce qu'on aurait à perdre ! Et je peux vous dire, en tant qu'enseignant qui a corrigé beaucoup de copies, que ça m'aurait arrangé de ne pas avoir les noms sous les yeux et de me dire: je corrige ce qui est écrit sans regarder si la personne... Les étudiants écrivent parfois: «Je ne suis pas francophone», alors on fait moins attention à la langue, au français, et on se concentre plus sur le contenu; ça, c'est une indication utile. Par contre, aller regarder le nom pour voir qui c'est, ça peut induire de la confusion. Je pense donc que les professeurs d'université, les assistants, etc., ne prendront pas ombrage du fait qu'on leur donne des copies anonymisées.
C'est à mon sens une proposition raisonnable, et je vous parle en connaissance de cause puisque j'ai fait des corrections pendant des années. La mesure me paraît raisonnable et je la défendrai auprès de mes collègues, auprès du recteur de l'Université de Genève. Je ne crois pas que ce soit le signe d'une méfiance vis-à-vis de l'université, c'est juste une clause de prudence quant à d'éventuelles irrégularités.
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, on touche là à une question assez essentielle, et cela dans tout le système scolaire, dans tout le système de formation: l'évaluation. Il est vrai - je le sais d'expérience et je pense que le député Romain, qui a été enseignant, également - qu'il existe dans l'évaluation ce qu'on appelle un effet Pygmalion: quand on connaît un élève, quand on s'attend par exemple à ce qu'il réussisse, on sera peut-être un tout petit peu plus indulgent. A l'inverse, si on s'attend absolument à ce qu'il rate son épreuve, on sera peut-être un peu plus sévère. Cet effet Pygmalion est connu en pédagogie. Beaucoup d'expériences ont été faites: on a par exemple donné à corriger des travaux de français qu'on attribuait d'un côté à de bons élèves, des élèves avec de la facilité, et les mêmes travaux étaient donnés à corriger en disant qu'ils avaient été faits par des élèves ayant des difficultés scolaires; on aboutissait à des notes différentes. C'est donc incontestable: il y a un effet quand on connaît la personne, quand on sait quel est son profil. Ça, c'est la première remarque.
La deuxième, c'est que tout le monde en est conscient ! Vous en êtes conscients, le Conseil d'Etat en est conscient et l'université aussi en est consciente. Alors ça m'amène à la question de fond: quelle est la bonne réponse ? Certes, on peut parfaitement anonymiser les examens dans certains cas - l'université le soutient également - et je pense que c'est effectivement une bonne chose de le faire chaque fois que c'est possible. Ce que j'aimerais dire, c'est que l'université s'est engagée sur ce chemin-là. Quand elle a été auditionnée, la vice-rectrice Courvoisier l'a dit: certes, ils ont eu d'autres urgences et ils ont pris un peu de retard, mais ils auraient aimé qu'on leur fasse confiance.
C'est vrai que le Conseil d'Etat aurait préféré, plutôt qu'un projet de loi, que ce soit une résolution ou une motion, pour pousser un tout petit peu l'université à aller plus vite dans ce processus essentiel: les juristes, les avocats s'en saisissent souvent lorsqu'il s'agit d'une loi, et il faudra voir comment celle-ci sera appliquée à terme - même si, je le répète, tout le monde est d'accord sur le fond, il faut aller dans ce sens-là. Et c'est vrai que nous aurions aimé un peu de confiance. Je crois d'ailleurs que certaines et certains d'entre vous étaient au Dies academicus aujourd'hui: celles et ceux qui y étaient ont pu voir une université magnifique, avec un corps enseignant, un rectorat, des doyens de qualité, avec des invités extraordinaires. C'est ce qui fait la richesse de notre université.
Alors puisque vous allez, à voir les majorités, accepter ce projet de loi, Mesdames et Messieurs les députés, j'espère qu'on pourra en faire un usage intelligent, c'est-à-dire protéger les étudiantes et les étudiants, mais qu'on n'en viendra pas, parce qu'il faut faire de l'anonyme, à opter systématiquement pour des QCM, sachant qu'il s'agit de la pire des manières d'évaluer. Ce n'est pas la plus simple - on peut être très subtil dans un QCM -, mais il faudrait éviter d'en arriver là. L'usage, les années à venir montreront comment la mettre en oeuvre, et j'espère que vous ferez confiance à l'université dans l'application de cette loi. Merci de votre attention.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant plus demandée, nous passons à la procédure de vote.
Mis aux voix, le projet de loi 12795 est adopté en premier débat par 63 oui contre 26 non et 3 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'art. 1 (souligné).
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 2 souligné, présenté par M. Youniss Mussa:
«Art. 2 (souligné) Entrée en vigueur (nouvelle teneur)
La présente loi entre en vigueur le lendemain de sa promulgation dans la Feuille d'avis officielle.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 66 oui contre 24 non et 3 abstentions.
Mis aux voix, l'art. 2 (souligné) ainsi amendé est adopté.
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 12795 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 62 oui contre 26 non et 4 abstentions (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Débat
Le président. Voici la prochaine urgence: les objets liés M 2745-A et M 2746-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes, et la parole va à Mme Fabienne Monbaron.
Mme Fabienne Monbaron (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Je présente le rapport de majorité de la commission des transports, qui a étudié la proposition de motion 2745 pour une piétonnisation rapide de Rive et la proposition de motion 2746 pour une reprise du projet «Clé de Rive». Ces deux textes ont été rédigés à la suite de la votation sur le projet «Clé de Rive» par les habitants de la ville de Genève en mars 2021.
Les auteurs de la M 2745 souhaitent accélérer la piétonnisation de ce périmètre en supprimant le trafic de transit au rond-point de Rive et à la rue Pierre-Fatio, en piétonnisant au maximum la zone, en améliorant les aménagements cyclables et les voies de bus et en pérennisant le marché en l'installant à la rue Pierre-Fatio.
Les initiateurs de la M 2746, quant à eux, souhaitent une reprise du projet tel que présenté en votation, mais que celui-ci devienne un projet d'envergure cantonale, car c'est l'ensemble de la population genevoise qui est concernée par ce secteur du centre-ville fréquenté par tous; de leur avis, c'est donc l'entier des citoyens du canton qui devraient pouvoir se prononcer sur ce sujet, et pas uniquement ceux de la ville de Genève. Ils demandent également une stricte compensation des places de parc supprimées en surface pour la réalisation de la zone piétonne.
Les débats en commission ont majoritairement porté sur la compensation du stationnement et sur le fait de conférer un statut cantonal au projet. Concernant le stationnement, la question était de savoir ce qu'il adviendra des places de parc qui seront supprimées si aucun nouveau parking n'est construit. Des auditions du conseiller d'Etat chargé de la mobilité, de la Ville de Genève et de l'office cantonal des transports, il est ressorti d'une part que la Ville de Genève travaille sur un projet de piétonnisation de Rive; celui-ci n'étant pas encore finalisé, il lui est pour le moment impossible d'articuler un chiffre précis quant au nombre de places qui seront supprimées.
D'autre part, les commissaires ont reçu des explications du département quant aux possibilités de compensation des places dans les parkings existants proches de Rive, mais après deux ans de covid, les statistiques d'utilisation desdits parkings doivent être actualisées. Il semblerait toutefois qu'avec le projet «Clé de Rive» sans le parking, il ne serait vraisemblablement pas possible de compenser, dans le périmètre prévu par la loi, l'entier des places supprimées, raison pour laquelle le département a proposé à la Ville de procéder par étapes afin de piétonniser rapidement une partie des rues concernées; cette proposition n'a pas reçu d'avis favorable de la part de la Ville.
S'agissant des dérogations évoquées par la Ville de Genève avec l'assouplissement de la loi sur la compensation du stationnement, la commission a reçu l'assurance du département qu'il veillera à ce que les possibilités existantes de compensation soient remplies avant d'évoquer la dérogation.
Pour ce qui est de la transformation du projet «Clé de Rive» en un projet cantonal, ainsi que le propose la M 2746, la commission a été rendue attentive au fait qu'il n'est pas possible pour le canton de reprendre un projet qui est à réaliser sur un territoire communal et devant pour le surplus être financé par la commune en question. Ce point étant acquis pour la commission, celle-ci a accepté les amendements présentés par le PLR visant à supprimer la notion de reprise du projet par le canton et à inviter l'Etat «à travailler conjointement avec la Ville de Genève sur le projet "Clé de Rive" avec son pôle de mobilité multimodale». En effet, les auditions n'ont pas mis cette collaboration en évidence, mais bien que chacune de ces entités attend sur l'autre.
La commission des transports a refusé la M 2745 par 8 non contre 6 oui et accepté la M 2746 par 8 oui contre 6 non. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à suivre les votes de la commission, soit à rejeter la M 2745 et à adopter la M 2746.
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, la rapporteuse de majorité l'a rappelé: le 7 mars 2021, la population de la ville de Genève a refusé la construction du parking «Clé de Rive». Ce qu'elle a omis de mentionner, c'est que ce rejet s'est fait à 64% des habitantes et habitants, c'est-à-dire qu'il s'agit d'un refus absolument clair et net du corps électoral vis-à-vis de ce projet.
Dans ce contexte-là, la proposition de motion 2746 pour une reprise par le canton du projet «Clé de Rive» foule complètement aux pieds la volonté populaire, mais aussi l'autonomie communale. En effet, on ne peut pas envisager une reprise cantonale, puisque la Ville de Genève, en tant qu'entité communale, est propriétaire du foncier, possède ce domaine public et n'est évidemment pas prête à le transmettre à l'Etat pour que celui-ci puisse mettre en oeuvre ce parking.
Mais ce n'est pas tout. Cet objet est également contraire à l'esprit de la LMCE, qui prévoit une priorisation des transports publics et de la mobilité douce au centre-ville, ce qui passe aussi par une limitation du stationnement; il s'agit d'éviter les flux de trafic pendulaire au coeur de la cité en déplaçant le stationnement du transport individuel motorisé à l'extérieur du centre.
Par ailleurs, il va totalement à l'encontre des engagements pris tant par le canton que par la Confédération, celle-ci en signant les accords de Paris, celui-là en adoptant le plan climat cantonal qui, je le rappelle, prévoit une réduction de 40% des déplacements en transport individuel motorisé d'ici 2030, ce qui nécessite de promouvoir d'autres modes de transport que la voiture. Or quand on construit un parking, on favorise évidemment, à travers le levier du stationnement, les voitures qui peuvent dès lors venir très facilement au centre-ville, étant donné qu'elles peuvent aussi très facilement s'y parquer.
Pour terminer, c'est un texte dont les objectifs menacent clairement, directement, concrètement la santé, mais aussi la qualité de vie des habitants du centre-ville. Tout le monde sait les nuisances qui accompagnent ce type d'infrastructure ainsi que l'augmentation du trafic individuel motorisé qu'il engendre. C'est pour ces raisons que la minorité de la commission des transports vous invite à refuser cette proposition de motion qui cherche à imposer la construction d'un parking en faisant fi de la volonté populaire.
En revanche, la minorité vous recommande d'accepter la M 2745 pour une piétonnisation rapide de Rive qui appuie d'ailleurs une décision prise à une large majorité du Conseil municipal de la Ville de Genève, et ce après la votation du projet «Clé de Rive», une majorité qui comprenait non seulement les partis de l'Alternative, mais également le PDC et l'UDC. Il s'agissait d'un crédit pour la piétonnisation du carrefour de Rive et de la rue Pierre-Fatio.
Cette proposition de motion respecte la volonté du peuple, qui a rejeté le parking «Clé de Rive», comme je le soulignais tout à l'heure. On ne peut pas déduire de ce refus populaire une opposition connexe à la piétonnisation de ce secteur; absolument personne, dans le cadre de la campagne de votation, n'a remis en question le projet de piétonnisation du carrefour de Rive.
Le texte suit également le principe de la LMCE, qui vise à prioriser et à promouvoir l'usage des modes doux dans le centre-ville. C'est une manière d'atteindre les buts fixés par le plan climat cantonal: favoriser ce type de déplacements permet de réduire ceux effectués en transport individuel motorisé.
Enfin, c'est bien entendu par la piétonnisation du secteur de Rive et non pas par la construction d'un immense parking qu'on pourra donner un peu d'air aux habitants des Eaux-Vives et des quartiers du centre-ville de Genève, en améliorant au passage la qualité de vie par une réduction des pollutions sonore et atmosphérique de même que par une réappropriation d'un espace urbain pacifié. Voilà pourquoi la minorité de la commission des transports vous invite à accepter la proposition de motion 2745 pour une piétonnisation rapide de Rive. Je vous remercie.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, alors que Genève a un taux de congestion de plus de 38% depuis de nombreuses années, alors que Genève est la capitale suisse des embouteillages, alors que Genève est la ville de Suisse où la population est le plus exposée au bruit de la route - 32,7% des logements sont directement exposés au bruit -, alors que nous connaissons toutes ces informations, certains partis, en l'occurrence ceux de droite et le MCG, continuent de vouloir imposer un parking géant en plein coeur du centre-ville.
Malgré le cadre légal qui stipule que, dans l'hypercentre, la priorité doit être donnée à la mobilité douce et aux transports publics, malgré l'objectif cantonal de réduction de 40% des déplacements en transport individuel motorisé d'ici 2030, malgré l'assouplissement du principe de compensation accepté en votation populaire, ces partis de droite, vous, vous échinez à défendre le tout-voiture en toute circonstance.
De surcroît, vous tentez de prendre la main sur des questions communales, de passer outre le résultat très clair de la votation du 7 mars 2021 qui avait vu la population refuser le projet «Clé de Rive» à plus de 63%, comme l'a relevé la rapporteuse de minorité. C'est un mépris crasse pour la démocratie et le fonctionnement du système politique suisse, cela démontre la vision passéiste des partis de droite sur les questions de mobilité, une vision surannée qui ne permet pas de régler les problèmes de congestion, de pollution et d'attractivité du centre-ville.
Les Vertes et les Verts vous recommandent donc de refuser la proposition de motion 2746 qui est antidémocratique et rétrograde, et vous invitent à accepter la proposition de motion 2745 pour que le périmètre de Rive soit piétonnisé, pour que le centre-ville soit plus vivable et vivant, plus humain et moins bruyant, et surtout pour la qualité de vie et la santé des habitantes et des habitants.
C'est également l'objectif de l'initiative municipale intitulée «Pour un centre-ville vivant, piéton et végétalisé» lancée par les Verts genevois en ville de Genève, soutenue par de nombreuses associations, l'Alternative et le PDC, et votée par le Conseil municipal. Ce texte fait office de contreprojet au projet «Clé de Rive», qui a heureusement été refusé en votation par les habitantes et habitants de la ville de Genève. Merci. (Applaudissements.)
M. Stéphane Florey (UDC). Tout d'abord, deux mots sur la volonté populaire s'agissant du vote qui a eu lieu en ville de Genève. Ce refus ne signifie absolument pas que tous les électeurs étaient pour une piétonnisation, c'est une mauvaise lecture du résultat. Pour l'UDC, qui a déposé la proposition de motion 2746, l'interprétation à donner est plus large que ce qu'on veut bien dire ici, c'est-à-dire que pour nous, il y avait autant de personnes qui étaient contre le parking que contre la piétonnisation. Le problème, c'est qu'il s'agissait d'un ensemble, d'un projet global qui, au final, n'a satisfait ni les uns ni les autres, d'où l'issue du scrutin.
L'UDC n'est pas certaine que s'il s'était agi d'un vote cantonal, le résultat aurait été identique, tout comme d'ailleurs - on peut ici faire un parallèle - la Cité de la musique tant voulue par certains partis.
Une voix. Ah, merci !
M. Stéphane Florey. Si cette votation avait été de portée cantonale, à mon avis, le résultat aurait été fondamentalement différent de ce qui s'est passé au niveau communal.
Maintenant, on nous dit qu'il s'agit d'un territoire communal, mais en attendant, ce n'est pas l'UDC qui a lancé les feux, puisque, je vous le rappelle, juste avant le dépôt de notre texte, ce sont les socialistes qui ont présenté une proposition de motion demandant une piétonnisation rapide de Rive. Alors je renverrai la question à Mme le rapporteur de minorité - Monsieur le président, vous transmettrez: de quoi se mêle le parti socialiste ? Vous pouvez nous dire tout ce que vous voulez sur notre objet, je peux vous répondre exactement la même chose sur le vôtre si vous tenez à défendre qu'il s'agit d'un sujet communal.
Ce que nous voulons, pour notre part, c'est que le projet puisse reprendre, nous demandons au Conseil d'Etat de lancer un dialogue, de permettre au sujet d'être traité à nouveau avec toutes les parties concernées. Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs, nous vous enjoignons d'accepter la proposition de motion 2746 et de refuser bien évidemment la proposition de motion 2745. Je vous remercie.
M. Pierre Vanek (EAG). Juste une remarque amicale, Monsieur le président, que vous transmettrez à mon excellent ami Stéphane Florey, qui nous enjoint de voter sa proposition de motion: il ne faut pas enjoindre aux gens dans ce parlement. Enjoindre, cela signifie donner un ordre, cela a un côté impératif, et quelle que soit l'amitié que je porte à tous les députés de tous les groupes de cette enceinte, je n'accepte d'injonction de personne au sujet des votes que nous menons dans cette salle. Ce serait d'ailleurs illégal, puisque les mandats impératifs sont proscrits, et enjoindre a un accent impératif.
C'était une digression, mais ce n'est pas grave, parce que j'ai peu de choses à dire, appuyant totalement le point de vue qui a été défendu par la rapporteuse de minorité: il est cohérent, il est conséquent et il est démocratique.
Mesdames et Messieurs, le parti libéral-radical se trouve en face de moi. Libéral-radical... Y a-t-il encore un radical ou une radicale dans cette salle ? (Rires.) Il y en a un qui lève la main.
Une voix. Mais il ment, il ment, il ment ! (Commentaires.)
M. Pierre Vanek. Oui, bon, c'est une digression, mais qui n'est pas sans rapport avec le sujet, parce que la Ville de Genève, comme chacun sait, en tant que municipalité, est une conquête du parti radical. La Ville de Genève a été inscrite pour la première fois dans la constitution de 1842, obtenue par des méthodes à certains aspects, disons, révolutionnaires, qui ont été poussées un peu plus loin en 1846. Evidemment, la droite de l'époque, les patriciens et la haute ville, ne voulaient pas d'une Ville de Genève en tant qu'entité politique qui prenne des décisions, parce que celle-ci était beaucoup plus à gauche et beaucoup plus radicale à l'époque que l'ensemble du canton. On comptait sur les campagnes pour amortir le progressisme radical qui se développait essentiellement en ville.
Or avec la création de la Ville, on a institué une commune, une entité politique qui, plus tard, s'est prononcée démocratiquement à 64% contre ce projet de parking ! Et maintenant, d'aucuns voudraient contredire... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...le résultat de ce scrutin populaire. Je trouve cela particulièrement incongru, y compris du côté de partis qui se réfèrent parfois au peuple comme étant et devant constituer l'arbitre définitif...
Le président. Il vous faut conclure.
M. Pierre Vanek. ...d'un certain nombre de questions, ce à quoi je souscris volontiers.
Le président. Merci, Monsieur le député...
M. Pierre Vanek. Enfin... Je sais que c'est fini, Monsieur le président !
Le président. C'est terminé.
M. Pierre Vanek. ...ce n'est pas au centre-ville qu'il faut construire de nouveaux parkings, c'est une évidence. (Applaudissements.)
Une voix. C'est pour compenser ceux qu'on enlève en surface !
Le président. La parole va à M. Murat-Julian Alder pour deux minutes vingt-cinq.
M. Murat-Julian Alder (PLR). Je vous remercie, Monsieur le président. J'aimerais rappeler à Pierre Vanek que le parti libéral et le parti radical ont fusionné en 2011, c'est-à-dire il y a plus de onze ans. Oui, il y a d'anciens radicaux; oui, il y a d'anciens libéraux, mais il y a aussi énormément de membres dans notre parti qui n'ont été ni libéraux ni radicaux, qui sont d'authentiques PLR.
Ces divisions d'antan que vous essayez de ramener dans le cadre de ce débat n'ont absolument aucun sens lorsqu'on sait que votre formation politique a changé de nom à peu près lors de chaque élection depuis vingt-cinq ans: c'était d'abord l'Alliance de gauche, puis A gauche toute, maintenant c'est Ensemble à Gauche. Vous comptez dans vos rangs le parti du Travail, Résistons, solidaritéS, le DAL - le DIL, le DOUL... (Rires.) A un moment donné, Monsieur Vanek, s'il vous plaît, soyons sérieux ! (Commentaires.)
Puisque vous aimez faire de l'histoire, on va faire un petit peu d'histoire. J'entends beaucoup de discours sur la piétonnisation de Rive, mais il s'avère qu'il y a exactement dix ans, en septembre 2012, le corps électoral de la ville de Genève avait également refusé sèchement un projet de la gauche pour cinquante rues piétonnes. Il est assez intéressant de lire dans la presse de l'époque, par exemple dans le journal «20 Minutes», les propos d'un certain nombre de personnes que vous connaissez peut-être.
A l'époque, un certain Thomas Wenger, président de l'Association transports et environnement, voyait comme alternative la piétonnisation des Rues Basses, c'était une ambition assez modérée, mais très intéressante. Et puis un élu Vert - il n'y avait peut-être pas encore de Vertes à ce moment-là - du nom de Mathias Buschbeck, lui, jugeait que dorénavant, tout projet devrait être accompagné d'une compensation concrète des places de parc supprimées. Oui, Mesdames et Messieurs, vous avez bien entendu: tout projet devrait être accompagné d'une compensation concrète des places de parc supprimées. Les gens veulent plus qu'un principe. Il se trouve que c'est exactement ce que demande la troisième invite de la proposition de motion 2746.
Pour terminer, il est très intéressant aussi de citer Adrien Genecand qui disait à l'époque: «Si on doit faire une zone piétonne au centre-ville, il faut relancer le projet de parking "Clé de Rive", les rues piétonnes de gauche sont enterrées.» Mesdames et Messieurs, les électeurs de la ville de Genève n'ont pas voulu des cinquante rues piétonnes, ils n'ont pas voulu du projet «Clé de Rive», voilà pourquoi il faut aller de l'avant, chercher des alternatives et, à un moment donné, s'avouer vaincu avec la finesse qui s'impose. Il y a match nul, balle au centre. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
M. Souheil Sayegh (PDC). Chers collègues, je ne pensais pas bénéficier d'une transition aussi bien choisie: la balle est au Centre, nous y voilà ! (Rires.) Merci pour la passe, je ne m'y attendais pas. Il y a un an, le 7 mars, la ville de Genève a refusé - j'ai bien dit: «a refusé» - le projet «Clé de Rive» à 64% des personnes qui avaient le droit et avaient fait le choix de voter. Ce qui est sympa, aujourd'hui, c'est que ça faisait longtemps qu'on n'avait pas débattu de mobilité dans ce parlement. Nous y voilà, je suis visiblement l'avant-dernier à prendre la parole.
Le Centre - futur ex-PDC - est très attaché à l'apaisement des quartiers; il est également très attaché au stationnement en ouvrage pour permettre d'y aspirer les véhicules en sous-sol, tel le pangolin les fourmis, en libérant ainsi l'espace public. Le Centre rend ici hommage à la politique de son magistrat en la matière.
La principale différence entre ces deux propositions de motions réside dans le principe de compensation qui est obligatoire dans l'une - la M 2746 - et sujette à assouplissement dans l'autre - la M 2745. A part la salle dans laquelle nous siégeons ici tout comme le Conseil municipal de la Ville de Genève, leur principal point commun est que nous discutons d'une prérogative de la Ville. Et c'est peut-être là le problème, à savoir que dans ce canton, certains projets passent par la Ville et que celle-ci a le dernier mot.
Peut-être faudrait-il réfléchir à une nouvelle idée, par exemple proposer de soumettre à l'avis du canton certains projets municipaux, comme dans «The Voice» où un coach donne son avis sur l'un des candidats alors que ce n'est pas le sien. Cela nous permettrait de développer un sentiment plus général et plus global de la mobilité dans ce canton, qui passe finalement par le centre-ville, permettant par endroits la mobilité - ou l'immobilité. C'est pour cette raison que Le Centre vous recommande de refuser la M 2745 et d'accepter la M 2746 ainsi que le préconise la majorité de la commission. Je vous remercie.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Patrick Dimier (MCG). J'aime bien quand notre collègue Vanek nous renvoie dans l'histoire. J'aimerais aller un tout petit peu plus en arrière et revenir à cette fameuse assemblée qui a suivi les événements de 1789 où le tiers état était opposé à la noblesse. De nos jours, j'ai l'impression que l'image s'est inversée, que ce qui était le tiers état est devenu la noblesse et que ce qui était la noblesse est devenu le tiers état. Je m'explique.
La majorité de ce canton, qui compte tout de même 500 000 habitants - si j'ai bien calculé ou si ce qu'on nous a indiqué est correct -, est aujourd'hui prise en otage par une minorité - la noblesse -, qui a le privilège insigne de pouvoir vivre dans le centre-ville. Que les gueux restent à l'extérieur, qu'ils demeurent dans leurs campagnes, on n'a pas besoin d'eux !
Il y a un grand absent de notre discussion du jour, ce sont les commerçants du centre-ville qui peinent à recevoir leurs chalands, des commerçants sans lesquels les gens ont tendance à faire deux choses: se rendre dans les grands centres commerciaux qui se trouvent à l'extérieur, chez les gueux, ou, pire encore, en France, puisqu'on parle de gueux.
C'est donc une bien mauvaise idée que de vouloir défendre cette inversion des intérêts. Actuellement, cette espèce de bourgeoisie citadine défend son bout de gras et surtout ses avantages. Tout le monde ne peut pas habiter le centre-ville, tout le monde n'est pas subventionné pour loger dans des appartements qui appartiennent à l'Etat ou au grand Etat - j'en fais partie -, je pense qu'il y a des limites à ne pas dépasser.
Pour finir, je dirais que ce qui se concrétise ici, c'est que les Verts qui jusqu'ici étaient des pastèques, c'est-à-dire verts à l'extérieur et rouges à l'intérieur, sont devenus des ciboulettes, c'est-à-dire verts dehors et vides dedans. Merci. (Rires. Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie. La parole retourne à Mme Caroline Marti pour une minute quarante.
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de minorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je répondrai en premier lieu à M. Alder - vous transmettrez, Monsieur le président - qui évoquait le refus par la population de la ville de Genève du crédit pour les cinquante rues piétonnes: je lui rappelle que les électeurs de la ville de Genève avaient d'abord accepté le principe global d'une initiative populaire pour deux cents rues piétonnes et n'ont finalement refusé que son application à certaines rues.
Je signale aussi qu'entre-temps, la situation a évolué, que les habitudes de transport, notamment celles des ménages en ville de Genève, ont évolué, que les impératifs climatiques en matière de mobilité ont évolué, que le PLR... Ah non, le PLR, lui, n'a pas évolué et reste englué dans une vision totalement passéiste et carbonée de la politique des transports.
M. Florey soutient que la proposition de motion du parti socialiste ne respecte pas la votation populaire: eh bien si, en l'occurrence, c'est le cas. En effet, si on ne peut pas déduire... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...que la population, à travers son vote, était en faveur de la piétonnisation de Rive, on ne peut pas non plus en conclure qu'elle y était opposée. Ce sur quoi on peut se baser, c'est le vote du Conseil municipal de la Ville de Genève, qui a adopté un crédit d'étude pour la piétonnisation du carrefour de Rive et de la rue Pierre-Fatio, première étape de ce projet de piétonnisation.
Le président. Il vous faut conclure.
Mme Caroline Marti. Prétendre que notre texte marche sur les plates-bandes des compétences municipales est également une erreur, étant donné qu'en matière de piétonnisation...
Le président. C'est terminé...
Mme Caroline Marti. ...un certain nombre de décisions reviennent au canton, et c'est sur ces décisions que la M 2745 entend agir.
Le président. Merci...
Mme Caroline Marti. C'est la raison pour laquelle nous vous invitons à l'accepter. Je vous remercie, Monsieur le président. (Applaudissements.)
Le président. Madame Fabienne Monbaron, vous n'avez plus de temps de parole. Je cède le micro à M. le conseiller d'Etat Serge Dal Busco.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, très brièvement, à l'issue de ce débat qui rappelle en effet les belles heures des discussions que nous avons l'habitude de tenir sur la mobilité, je confirme que ces deux textes très contradictoires ont été déposés immédiatement après la décision du corps électoral de la ville de Genève concernant l'affaire «Clé de Rive».
Je voudrais relever quatre éléments factuels. Premièrement, il est vrai que le domaine public concerné dans ce secteur, comme partout ailleurs sur le territoire de la ville, appartient à la Ville de Genève; il n'y a pas de domaine public cantonal à cet endroit-là, ce qui signifie que nous ne pouvons pas agir sans la volonté de la Ville. Un député a évoqué les états généraux à Versailles, le tiers état et la noblesse; ayant été membre, il n'y a pas si longtemps que cela, d'une auguste assemblée - la Constituante -, il aurait pu proposer une solution à cette anomalie, mais cela n'a pas été fait et nous pouvons simplement en prendre acte. Aujourd'hui, la Ville est propriétaire de son domaine, il n'est pas possible d'interférer dans ce périmètre.
Deuxièmement, un vote populaire a eu lieu. Qu'on soit d'accord ou pas avec le résultat, qu'on en soit content ou non, force est de constater qu'une large majorité de la population de la ville n'a pas voulu de ce projet, contrairement d'ailleurs aux autorités de la commune. Chacune et chacun semble l'oublier, mais c'est une décision du Conseil municipal de la Ville de Genève qui a été attaquée en référendum, en l'occurrence l'octroi d'un droit de superficie à l'exploitant du parking.
Troisièmement, je voudrais rappeler qu'il y a également une législation à respecter en matière de compensation des parkings. D'ailleurs, le projet «Clé de Rive» respectait à la fois la LMCE et la loi sur la compensation du stationnement, puisqu'il ne prévoyait pas la création de places de parc supplémentaires, les cinq cents places en sous-sol étaient supprimées en surface. Voilà les trois constats qu'on peut faire; selon la position des uns et des autres, on peut être plus ou moins d'accord avec eux.
En revanche, il en reste un quatrième sur lequel nous pouvons être unanimes, à savoir que l'aménagement de ce secteur du centre-ville - il y en a d'ailleurs d'autres - est tout simplement indigne d'une cité comme la nôtre. Je pense que nous pouvons tous nous accorder là-dessus, et il faut entreprendre quelque chose.
Une voix. C'est moche !
M. Serge Dal Busco. Si vous me permettez une appréciation personnelle, j'irais même en direction de Bel-Air, car j'estime que les Rues Basses - et notamment la voie principale qui porte trois noms différents, me semble-t-il - mériteraient également d'être refaites, cette zone n'est pas digne de la qualité de notre cité.
Mesdames et Messieurs, ces deux propositions de motions heurtent l'une et l'autre les trois premiers constats et a fortiori le quatrième que je viens d'évoquer. Le second texte a été fortement amendé en commission, ce qui fait que maintenant, bon, il finit par enfoncer des portes ouvertes, notamment en demandant que nous collaborions avec la Ville. Mais nous collaborons avec la Ville ! Et nous avançons dans ce domaine. Nous devons effectivement trouver une solution, mais en respectant le cadre légal que je viens de rappeler en dressant le troisième constat. Nous nous efforçons d'avancer, et je pense que nous devons nous rattacher au quatrième constat, c'est-à-dire que la situation est largement perfectible, et c'est ce à quoi nous nous attelons avec la Ville. Merci de votre attention.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous procédons au vote sur ces deux objets.
Mise aux voix, la proposition de motion 2745 est rejetée par 52 non contre 40 oui (vote nominal).
Mise aux voix, la motion 2746 (nouvel intitulé) est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 52 oui contre 40 non (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Débat
Le président. Nous traitons notre dernière urgence, la R 1005, classée en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole à l'auteur du texte, M. Sébastien Desfayes.
M. Sébastien Desfayes (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, à quoi sert la mémoire, si on ne l'utilise pas ? A quoi sert l'enseignement de l'histoire, si on n'apprend rien du passé ?
La mémoire... Il existe un monument à quelques kilomètres d'ici, au parc Trembley, qui s'appelle les Réverbères de la mémoire. Ce monument a été édifié grâce à un travail parlementaire du Conseil municipal de la Ville de Genève, mené sur la base d'une motion déposée en 2007 par le socialiste Gérard Deshusses et la démocrate-chrétienne Nelly Hartlieb et qui visait à l'édification d'un monument commémorant le génocide arménien.
Le génocide arménien, c'est 1,5 million de morts. C'est toute une communauté, toute une ethnie d'Asie Mineure poussée à la famine, massacrée, poursuivie, chassée. Trois quarts de la communauté arménienne est décédée, a été proprement liquidée par le régime du sultan ottoman de l'époque.
Le monument les Réverbères de la mémoire n'est pas uniquement un lieu de recueillement, un lieu de souvenir. C'est aussi un monument qui nous oblige, qui nous force à dire: «Plus jamais ça !» Parce qu'aujourd'hui, l'Arménie n'a pas besoin d'amis qui pleurent facilement sur ses morts, ses morts du XXe siècle. L'Arménie, aujourd'hui menacée même dans son existence, a besoin d'alliés qui défendent les vivants.
A peine cent ans après le génocide du XXe siècle, nous avons de nouveaux sultans - Erdogan, Aliyev - qui commencent des massacres à l'encontre des Arméniens et qui massent des troupes aux frontières d'un pays souverain, qui est nuit et jour attaqué. C'est un pays qui n'a pas d'alliés et qui est livré à son sort. Nous ne devons pas l'abandonner.
J'ai retrouvé un texte intéressant de Jaurès, qui date du XIXe siècle, vingt ans avant le génocide, et qui disait que le silence est une complicité. Aujourd'hui, au XXIe siècle, le silence serait une nouvelle lâcheté. Et n'oubliez pas cette phrase de Max Frisch: «Plus terrifiant que le bruit des bottes, le silence des pantoufles.» Merci.
M. François Lefort (Ve). Pour ceux qui suivent les événements de cette région depuis longtemps - disons depuis l'effondrement de l'URSS, il y a trente ans -, l'Arménie a vécu des jours difficiles, de plus en plus difficiles pour un petit peuple ancien, héritier d'une grande civilisation, dont les territoires ne sont plus siens depuis longtemps. Depuis longtemps et depuis le découpage de la région par Staline, il n'y a pas de place pour la paix, alors que tous y aspirent normalement.
Le voisin azéri a repris du poil de la bête récemment, dans le contexte des aléas et des alliances internationales, et c'est bien ce déséquilibre qui conduit à cette guerre. Il y a deux ans, les Arméniens ont perdu beaucoup de leurs terres historiques, chèrement reprises il y a trente ans; on parle ici de l'Artsakh, et cela continue.
L'Arménie nous est chère ici, car une partie de notre communauté genevoise en est issue. Je parle des descendants des survivants du génocide arménien commis par le premier gouvernement jeune-turc, des réfugiés que nous avons accueillis chez nous et qui nous ont remerciés en devenant des citoyennes et des citoyens de notre communauté, qui ont participé à la vie de celle-ci en s'y fondant. Oui, beaucoup de nos concitoyennes et concitoyens savent de quoi nous parlons. Et certains éminents citoyens, dont un ancien conseiller d'Etat, le savent aussi.
Cette résolution urgente, qui sera, je l'espère, reprise par de nombreux parlements cantonaux, parce qu'elle est diffusée dans tous les cantons suisses actuellement, est soutenue par les parlementaires de l'Assemblée fédérale, sous les auspices du groupe d'amitié parlementaire Suisse-Arménie de l'Assemblée fédérale. Elle demande «de condamner l'Azerbaïdjan pour son agression contre la République d'Arménie». A cette demande, il faut dire oui. Elle demande également de prendre les mesures nécessaires pour empêcher que l'agression soit financée par la vente du gaz et du pétrole azéri passant par la Suisse ou en Suisse. A cette demande, il faut aussi dire oui. Cette résolution demande en outre «de reconnaître le droit à l'autodétermination des Arméniens» des terres historiques de l'Artsakh. A cette demande, il faut également dire oui. Cette résolution demande enfin de tout mettre en oeuvre pour que les prisonniers arméniens puissent rentrer chez eux. A cette demande, nous disons oui aussi. Les Verts, comme vous l'avez compris, soutiendront ce texte adressé à l'Assemblée fédérale et nous vous remercions de faire de même. Merci.
M. André Pfeffer (UDC). Pas plus tard qu'hier, le président français Emmanuel Macron a déclaré: «Nous ne lâcherons pas les Arméniens.» Cette position humaine est tout à fait normale, vu le très grand nombre de compatriotes d'origine arménienne en France, mais également en Suisse, qui ont évidemment, évidemment besoin de notre soutien. Mais quel est le réel engagement du président français ? M. Macron a demandé que l'Azerbaïdjan et l'Arménie acceptent le principe d'une mission européenne qui se rende dans le Haut-Karabagh et que les deux parties s'engagent à accepter les frontières de 1991. L'engagement de la France est très très maigre.
Au sujet de cette résolution, celle-ci heurte notre devoir de neutralité, mais, et je le répète encore une fois, la communauté arménienne mérite notre soutien et mérite également une aide concrète, réalisable et qui fasse sens. Pour cette raison, je propose de supprimer la première et la troisième invites. Celles-ci sont incompatibles avec notre neutralité. Par contre, je propose de rajouter une nouvelle invite, que vous avez tous reçue tout à l'heure. Cette nouvelle invite dit: «La Suisse offre à l'Arménie et à l'Azerbaïdjan "les bons offices", respectivement une aide pour la recherche d'une solution négociée et le soutien des négociations ou médiations.»
Je vous remercie d'accepter ces modifications et d'adopter cette résolution ainsi amendée. Merci de votre attention.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Devant les exactions commises par l'Azerbaïdjan contre la population civile et militaire en Arménie, notre parlement doit témoigner sa solidarité envers les Arméniens de notre canton, avec lesquels notre république entretient des relations de forte amitié, comme en témoignent d'ailleurs - M. Desfayes l'a relevé tout à l'heure - les Réverbères de la mémoire, un projet que j'ai du reste eu l'honneur de soutenir alors que je siégeais au Conseil municipal de la Ville de Genève.
Mais il faut aussi témoigner de notre solidarité avec la République d'Arménie. Aucune hypocrisie quand on défend les droits humains et le droit à l'autodétermination. Notre pays, et cela a été rappelé, ne doit pas financer cette guerre en ignorant les recettes qui seraient dérivées de la vente de matières premières provenant d'Azerbaïdjan.
En Suisse, nous avons le devoir de tout mettre en oeuvre pour que les droits humains, le droit à l'autodétermination et les valeurs démocratiques soient déclinés avec force, en soutenant le CICR et toutes les organisations humanitaires internationales, afin que nous n'ayons pas à rougir pour nous être tus. Chaque fois que les droits humains sont bafoués par notre silence - et là, il n'est pas question de dire «neutralité» -, c'est la démocratie qui s'amoindrit et qui est attaquée.
Alors soutenons cette résolution du Grand Conseil à l'attention de l'Assemblée fédérale avec conviction et à l'unanimité ! Je pense que c'est la moindre des choses que l'on puisse faire quand on a la chance de vivre dans un pays en paix. Merci beaucoup.
M. Jean Batou (EAG). Bien sûr, tout le monde se souvient, et tout le monde l'a rappelé, de la gravité et de l'importance du génocide qu'ont subi les Arméniens entre 1915 et 1916, avec plus d'un million de morts. Il faudrait rappeler que la région du Haut-Karabagh, une enclave à majorité arménienne en Azerbaïdjan, a été l'objet et au coeur de conflits entre 1988 et 1994, puis à nouveau à l'automne 2020 et tout récemment en septembre passé. Il est donc urgent de faire quelque chose pour protéger le peuple arménien de l'agression poussée également par la Turquie contre l'Arménie et les populations arméniennes d'Azerbaïdjan.
En même temps, la libération des prisonniers politiques - politiques militaires, disons ! - pour qu'ils puissent retourner auprès de leurs familles est une exigence absolument évidente, humanitaire. Maintenant, il y a un point dans la résolution proposée que je trouve important et qui devrait faire date, c'est la demande que la Suisse arrête d'importer des matières premières d'Azerbaïdjan, ce qui signifie aussi qu'elle limite ses exportations de produits de luxe en direction de ce pays - à peu près 300 millions de francs par an. De ce point de vue là, il faut prendre cette résolution et ces invites dans la totalité, et le groupe Ensemble à Gauche refusera les amendements proposés par M. Pfeffer.
Je pense que, premièrement, la défense de l'Arménie, des Arméniens et des Arméniens d'Azerbaïdjan doit être une priorité de la politique suisse dans la région; ensuite, que les prisonniers doivent être libérés, et enfin qu'il faut arrêter de nourrir cette guerre en important des matières premières d'un pays qui n'a cessé d'agresser son voisin. Voilà, je vous remercie.
M. Patrick Dimier (MCG). Sur l'essentiel, je crois que François Lefort a été tout à fait exhaustif, et je le remercie, parce qu'il me permet de m'exprimer sur d'autres parties de ce champ de questions. Si, bien évidemment... (L'orateur s'interrompt, saisi par l'émotion.) Excusez-moi ! Si, bien évidemment, personne ne peut oublier les faits de 1915, s'en souvenir ne suffit pas à nous dispenser de tout acte nouveau de soutien à l'Arménie.
Les Arméniens, outre le fait que c'est un peuple admirable, sont, il ne faut pas l'oublier, le premier peuple chrétien. A ce titre, si ce n'était qu'à un seul titre, nous devons absolument nous mobiliser pour le défendre. L'Arménie a aujourd'hui un voisin, un quasi-voisin qui n'a pas changé: c'est la Turquie, qui a à sa tête actuellement un homme qui rêve de faire renaître l'Empire ottoman. Bien entendu, toute l'agression dont est victime l'Arménie aujourd'hui est le fruit de cette volonté profonde.
Comme beaucoup, je ne suis pas toujours favorable aux résolutions. Mais, dans ce cas-là, Genève a deux devoirs. Nous ne sommes pas la capitale mondiale de la paix par hasard. Ce ne sont pas que des mots: ce sont aussi des engagements. Et bien sûr, au moment où notre neutralité a des contours plutôt flous, pour ne pas dire plutôt vagues, il est important pour nous aujourd'hui d'affirmer que la Suisse et Genève en particulier sont du côté des justes. Raison pour laquelle je vous invite tous - sans vous enjoindre - à soutenir cette résolution. C'est un devoir moral.
M. Adrien Genecand (PLR). «La neutralité permanente est un principe de la politique étrangère de la Suisse. Elle constitue un élément générateur de paix et de sécurité en Europe et au-delà. Elle garantit l'indépendance du pays et l'inviolabilité de son territoire. En vertu du droit de la neutralité, la Suisse ne peut participer à une guerre opposant d'autres Etats.»
«Participation des cantons à la politique extérieure» dans ce cadre: «La Confédération associe les cantons à la conduite de la politique étrangère lorsque les décisions à prendre dans ce domaine affectent les compétences ou les intérêts des cantons. Les droits de participation des cantons sont inscrits à l'article 55 de la Constitution fédérale et dans la loi fédérale sur la participation des cantons à la politique extérieure de la Confédération. Ils ne portent pas atteinte à la compétence première de la Confédération en matière de politique étrangère. La capacité d'action de la Confédération en la matière demeure expressément réservée.»
Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle notre serment. La formule du serment est la suivante: «Je jure ou je promets solennellement de prendre pour seuls guides dans l'exercice de mes fonctions les intérêts de la République selon les lumières de ma conscience, de rester strictement attaché aux prescriptions de la constitution et de ne jamais perdre de vue que mes attributions ne sont qu'une délégation de la suprême autorité du peuple; d'observer tous les devoirs qu'impose notre union à la Confédération suisse et de maintenir l'honneur, l'indépendance et la prospérité de la patrie [...].»
Il ne s'agit pas de savoir ce que nous pensons, au fond, de cette question. Notre terre est et restera - elle doit le rester - la terre du dialogue et, quelque part, de notre respect envers ce serment. Je vous remercie.
M. Eric Leyvraz (UDC). Il est clair que ce qu'il se passe en Arménie est tout à fait inacceptable. Malheureusement, je crois qu'avec une résolution comme ça, nous ne faisons que nous donner bonne conscience: je rappelle qu'environ 90% des résolutions cantonales qui arrivent à Berne viennent de Genève et que jamais l'une d'elles n'a rencontré de succès. Alors on peut l'envoyer, mais ça ne donnera pas grand-chose !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. François Lefort pour vingt-quatre secondes.
M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. Très rapidement, d'abord, le groupe des Verts ne soutiendra pas l'amendement de l'UDC. Vous transmettrez aussi à mon ami Adrien Genecand que selon sa définition de la neutralité, nous n'avons que des amis, mais ce n'est pas la réalité ! Je suis d'accord avec lui et avec son rappel à notre serment: ce serment, justement, nous engage à soutenir ce genre de résolutions, ce à quoi je vous engage. Merci.
Mme Patricia Bidaux (PDC). Premièrement, le PDC ne soutiendra évidemment pas les amendements proposés par le groupe UDC. Deuxièmement, je tenais à rappeler la signature par un grand nombre de députés PLR de la résolution concernant l'Ukraine - «Ukraine: halte à la guerre - solidarité avec le peuple ukrainien» -, qui, dans ses invites, demandait de «condamner fermement la guerre d'agression des autorités russes contre l'Ukraine», de «hisser le drapeau de l'Ukraine en signe de solidarité avec son peuple meurtri», de «participer à l'accueil des réfugiés», de «contribuer généreusement et activement à l'aide humanitaire», de «favoriser la recherche d'une solution diplomatique du conflit», de «solliciter le Conseil fédéral afin que la Suisse s'engage pour le respect par les parties belligérantes des Conventions de Genève [...]; mette en oeuvre avec fermeté les sanctions prises par l'Union européenne [...]», bref, tout ce qui va bien au-delà de la neutralité précisée par le député PLR qui a pris la parole. Je vous remercie de soutenir cette résolution avec force et en grand nombre, afin que Genève puisse se joindre aux autres cantons qui soutiendront cette résolution à Berne. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci, Madame la députée. Je rends la parole à M. Adrien Genecand pour cinquante secondes.
M. Adrien Genecand (PLR). Merci, Monsieur le président. Madame Bidaux - je me souviens de votre nom, comme de celui de M. Lefort ! -, je relèverai... (Commentaires.) ...pour partir à l'armée dans trois jours... (Exclamations.) ...que tout ce que vous dites a du sens. Simplement, il y a un moment où, quelque part, cette question-là doit être combattue sur le terrain. Et c'est dans ces moments-là qu'il faut savoir si notre rôle, vraiment, est de vouloir nous engager sur le chemin de la guerre. Je vous rappelle à ce titre... Et je serais très heureux de voir si vous êtes prêts à envoyer vos fils et vos filles se battre très très loin sur terre. Moi je sais très bien ce que ça implique, parce que j'y suis de temps en temps ! (Commentaires.) Et la vraie question, ce n'est pas de vous donner bonne conscience dans ce parlement, parce que c'est ce que vous faites ce soir...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Adrien Genecand. Ce que vous faites ce soir, c'est vous donner bonne conscience; et - je me recommande vraiment - je serais très heureux de savoir qui irait sur le front lundi matin avec moi ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Thierry Cerutti pour quinze secondes.
M. Thierry Cerutti (MCG). Monsieur le président, quinze secondes ne suffiront pas pour exposer ce que je souhaitais dire. En tous les cas, je rejoins les propos de mon collègue député Patrick Dimier et je vous invite à voter cette résolution, en sachant quand même que c'est surtout l'ONU qu'il faut cibler...
Le président. Merci...
M. Thierry Cerutti. ...plus que les autres...
Le président. Merci, Monsieur le député. Pour conclure, Monsieur Pfeffer, il vous reste trente secondes.
M. André Pfeffer (UDC). Merci, Monsieur le président. Je vais faire très vite. Notre groupe soutient cette résolution, mais pour qu'elle ait une chance de passer à Berne, je pense qu'il faut supprimer la première invite, qui demande de «condamner l'Azerbaïdjan pour son agression», et la troisième, qui demande de «reconnaître le droit à l'autodétermination des Arméniens du Haut-Karabagh».
Je rappelle l'invite que je propose d'ajouter, qui fait à notre avis parfaitement sens, parce que c'est notre force...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. André Pfeffer. ...et, concrètement, ce que nous pouvons offrir: «La Suisse offre à l'Arménie et à l'Azerbaïdjan "les bons offices" [...]»
Le président. Merci beaucoup. Mesdames et Messieurs, nous sommes arrivés au terme du débat; je vous fais donc voter sur les propositions d'amendements présentées par M. Pfeffer. Je vous invite à vous prononcer tout d'abord sur la suppression de la première invite.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 51 non contre 23 oui.
Le président. Nous passons à la proposition consistant à supprimer la troisième invite.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 53 non contre 23 oui.
Le président. Enfin, nous votons sur la nouvelle invite proposée par M. Pfeffer:
«La Suisse offre à l'Arménie et à l'Azerbaïdjan "les bons offices", respectivement une aide pour la recherche d'une solution négociée et le soutien des négociations ou médiations.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 42 non contre 34 oui et 1 abstention.
Mise aux voix, la résolution 1005 est adoptée et renvoyée à l'Assemblée fédérale par 58 oui contre 17 non et 2 abstentions (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous arrivons au terme de notre session. Je vous remercie de votre travail actif et efficace. Je vous souhaite un bon week-end et un bon retour dans vos foyers !
La séance est levée à 20h.