République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 12544-A
Rapport de la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur la gestion des établissements pour personnes âgées (LGEPA) (J 7 20)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IV des 7 et 8 octobre 2021.
Rapport de majorité de M. Jean-Marc Guinchard (PDC)
Rapport de première minorité de M. François Baertschi (MCG)
Rapport de deuxième minorité de Mme Amanda Gavilanes (S)
Rapport de troisième minorité de Mme Ruth Bänziger (Ve)

Premier débat

Le président. Nous terminons notre session avec notre prochaine urgence, le PL 12544-A. Nous sommes en catégorie II, quarante minutes. (Un instant s'écoule.) J'en profite pour saluer à la tribune notre ancien collègue, conseiller administratif de Vernier, M. Mathias Buschbeck ! (Exclamations. Applaudissements.)

Une voix. Le maire !

Le président. Il est même maire, effectivement ! Le maire de Vernier ! Je cède maintenant la parole à M. le rapporteur de majorité Jean-Marc Guinchard.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chères et chers collègues, je ne vais pas répéter le contenu du rapport que vous avez tous certainement découvert - et qui est d'ailleurs excellent ! -, mais j'aimerais vous apporter un certain nombre d'éléments récents, qui peut-être pourront faire changer l'avis de certains et certaines d'entre vous - quoique je n'en sois pas sûr, vu les sondages auxquels j'ai procédé.

De quoi s'agit-il ? Il y a quelques années, la Cour des comptes a décidé que le secteur des EMS ne pouvait plus être soumis à la LIAF, la fameuse loi sur les indemnités et les aides financières. Cette décision aurait dû avoir pour conséquence il y a déjà quelques années un changement profond de la loi actuelle qui gère les EMS, c'est-à-dire la loi sur la gestion des établissements pour personnes âgées - la LGEPA -, que certains souhaitent modifier ce soir.

J'ai appris tout récemment que le département avance correctement dans ce domaine et qu'il est à bout touchant de la rédaction de cette nouvelle LGEPA ainsi que d'un règlement d'application, deux textes qui vont être soumis d'ici fin mars-début avril - c'est-à-dire quasiment demain - à l'ensemble des partenaires du secteur. Manifestement, une fois cette consultation terminée, le département déposera le projet de loi auprès de notre Conseil; il sera certainement renvoyé automatiquement à la commission de la santé, qui gère habituellement le secteur des EMS.

Comme vous l'aurez constaté en lisant le rapport, le score de ce projet de loi a été de 7 oui contre 7 non, en raison de l'absence du représentant d'Ensemble à Gauche - qui est particulièrement intermittent dans cette commission d'ailleurs ! (Rire. Commentaires.) 7 contre 7, cela signifie que le projet de loi a été refusé en commission; une majorité pourrait évidemment se dégager ce soir, ce qui aboutirait à l'acceptation de cette petite modification d'une disposition globale.

Compte tenu de ce score en commission, j'aimerais vous proposer un compromis, à savoir un renvoi à la commission de la santé, afin que cette modification de la LGEPA, qui est tout de même très partielle, soit intégrée dans les travaux sur la future loi sur la gestion des établissements pour personnes âgées. Nous pourrions ainsi travailler sur un projet global et éviter des va-et-vient qui à mon avis seraient inutiles. Je vous remercie de votre écoute et de l'accueil que vous réserverez à cet excellent compromis. Merci.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je cède la parole aux rapporteurs de minorité qui souhaitent s'exprimer sur cette demande, en commençant par M. François Baertschi.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. C'est donc uniquement sur le renvoi en commission. Le groupe MCG pense qu'il n'est absolument pas opportun de renvoyer en commission un projet de loi qui, c'est vrai, aurait déjà dû être traité depuis belle lurette et qui fait suite à un conflit social au sein de divers EMS. Ce texte permet de pacifier la situation en réglant de manière très précise les rares externalisations qui sont souhaitables et permet d'éviter qu'on aboutisse à une marchandisation de ce système. Le rapporteur de première minorité vous conjure donc de ne pas renvoyer ce texte en commission. (Commentaires.)

Mme Amanda Gavilanes (S), rapporteuse de deuxième minorité. Le parti socialiste s'opposera également au renvoi de ce projet de loi en commission. Ce texte a effectivement traîné à l'ordre du jour de la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat pendant trop longtemps. Nous devons aujourd'hui donner des réponses politiques que le personnel des EMS attend. Il est de notre devoir de voter aujourd'hui sur ce projet de loi, qui, comme je le disais, a déjà beaucoup trop traîné.

Mme Ruth Bänziger (Ve), rapporteuse de troisième minorité. Le groupe des Verts s'oppose également à ce renvoi en commission. Ce projet de loi traîne depuis trente-deux mois, c'est donc le moment de l'accepter. Il concerne un seul article; il convient maintenant de passer au vote de ce projet.

Le président. Merci, Madame la rapporteure. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à vous prononcer sur cette demande de renvoi.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12544 à la commission de la santé est rejeté par 45 non contre 35 oui.

Le président. Nous poursuivons le débat et je cède sans plus attendre la parole au rapporteur de première minorité, M. François Baertschi.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi, comme certains s'en souviennent, est lié à un conflit social qui a éclaté dans les EMS et qui a mis en cause la gestion de certains de ces établissements qui voulaient faire du profit en externalisant des tâches. Or il faut savoir que si certaines tâches... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Monsieur le rapporteur de minorité. (Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) Poursuivez.

M. François Baertschi. Si certaines tâches peuvent facilement être externalisées, d'autres sont importantes pour les pensionnaires de ces maisons, c'est-à-dire qu'il y a une relation humaine qui se crée avec les personnes âgées, et on ne peut pas externaliser comme une vulgaire activité commerciale ce qui remplit avant tout une fonction sociale ou sociétale auprès de nos aînés. Il n'est pas souhaitable qu'ils se retrouvent dans un cadre déshumanisé. C'est pour cela qu'il est impératif de clarifier cette relation et de faire en sorte que les externalisations soient limitées et bien cadrées. Le département a réalisé tout un travail à ce titre. La commission a également étudié ce problème, et je crois que ce projet de loi est tout à fait modéré et va dans la bonne direction. Il va dans le sens d'humaniser le plus possible les EMS en plaçant l'humain avant le profit. Je vous recommande d'aller dans cette direction en votant ce projet de loi.

Mme Amanda Gavilanes (S), rapporteuse de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, la sous-traitance, lorsqu'elle s'applique à des prestations de soins aux résidentes et résidents en EMS, pose deux problèmes principaux. D'une part, elle ne permet pas d'assurer un suivi régulier - comme le relevait mon préopinant - et stable des résidents. Leur grand âge requiert, en effet, qu'ils soient encadrés par une équipe soignante avec laquelle ils peuvent tisser des liens. Dans ce contexte particulier, les aides ménagères - catégorie directement concernée par ce projet de loi - font partie intégrante de l'équipe de soins. D'autre part, la sous-traitance instaure une inégalité de traitement entre le personnel employé par les EMS, soumis aux conditions sociales et salariales imposées aux établissements pour personnes âgées, et celui employé par des entreprises privées qui ne connaissent pas les mêmes contraintes légales.

D'un point de vue économique, la sous-traitance se justifie notamment à travers la volonté d'offrir au public cible des prestations équivalentes à un moindre coût. On souhaiterait par là qu'il y ait un effet de masse et de marché. A priori, le service et la qualité des prestations seraient maintenus. Or ce serait ignorer l'histoire récente de l'externalisation de prestataires dans notre canton. A Genève, l'exemple des bagagistes de l'aéroport est emblématique des dysfonctionnements qui découlent de la sous-traitance. Leurs conditions salariales et sociales se sont tellement dégradées que nombre d'entre eux travaillent sur appel. Il arrive souvent que certains d'entre eux viennent travailler durant une heure ou une heure et demie seulement. C'est l'exemple type de l'économie qui fait fi des conditions sociales.

Bien souvent, en passant d'un service para-étatique à un service privé, les conditions de travail se détériorent. Malgré l'introduction d'un salaire minimum dans le canton de Genève et l'amélioration financière que cela suppose, il serait réducteur de croire que les conditions de travail se résument à l'aspect financier. S'agissant des EMS, eu égard à ce qu'il s'est passé dans d'autres services qui ont été externalisés, il n'existe pas de nécessité impérieuse d'externaliser ces prestations, car le fonctionnement actuel est efficient et les coûts qu'il engendre ne sont pas disproportionnés.

Lors de ses travaux, la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat a considéré que la situation actuelle n'était pas suffisamment préoccupante pour entrer en matière sur ce projet de loi - à une courte majorité, c'est vrai, mais c'est le cas. Il s'agit clairement d'une mauvaise évaluation de la situation de précarité dans laquelle se trouve le personnel des EMS travaillant pour des prestataires de service externes. Il est du devoir de l'Etat de garantir une égalité de traitement et des conditions de travail dignes et respectueuses à toutes et tous. C'est ce que demande ce projet de loi. Il consacre la gestion interne des prestations de soins en interdisant l'externalisation et la sous-traitance. Il permet cependant au Conseil d'Etat de déterminer par voie réglementaire quelles sont les prestations qui peuvent être sous-traitées. C'est pourquoi nous vous demandons de voter l'entrée en matière sur ce projet de loi et de l'accepter.

Mme Ruth Bänziger (Ve), rapporteuse de troisième minorité. Ce projet de loi vise à mieux cadrer la sous-traitance ou l'externalisation dans les établissements pour personnes âgées. Il inscrit dans la loi le fait que les prestations de soins ne peuvent pas être externalisées et crée la base légale nécessaire permettant de fixer par voie réglementaire les conditions d'externalisation ou de sous-traitance pour les autres services. Les dispositions prévues par le projet de loi sont celles qui avaient été auparavant acceptées par les partenaires sociaux et les syndicats sous forme réglementaire.

L'objectif poursuivi par ce projet de loi est tout d'abord d'assurer un encadrement médicosocial ou des prestations sociohôtelières proches des résidents afin de garantir une qualité optimale et donc humaine du suivi au quotidien. En effet, il n'y a pas que le personnel soignant ou les animateurs qui sont en relation avec les résidents. Un maximum d'échanges et d'interactions sont rendus possibles si l'ensemble du personnel en contact avec les résidents jouit d'une situation de travail stabilisée, bénéficie des conditions de travail imposées aux établissements pour personnes âgées, suit les mêmes directives et est soumis aux mêmes contrôles en étant au sein d'une seule entité. Qu'il soit chargé du nettoyage, des soins aux résidents ou du service à table, le personnel doit être formé, informé et disposer de temps - temps consacré à l'écoute bienveillante et aux interactions avec les aînés. Les acteurs du secteur sont en attente des clarifications que ce projet de loi apportera depuis l'arrêt de la Chambre administrative rendu il y a plus de deux ans. Celle-ci a reconnu l'absence de base légale du règlement précisant que les prestations de soins ne peuvent être durablement sous-traitées. Rappelons que ce projet de loi a été déposé fin juin 2019 !

Tous les éléments semblaient donc réunis pour que ce projet de loi soit traité dans un délai raisonnable après son dépôt. Suite aux auditions, hormis un potentiel amendement demandant que le Conseil d'Etat établisse le règlement en concertation avec les acteurs concernés, ce projet qui contribue à une prise en charge laissant de la place à l'humain aurait dû faire l'unanimité. Hélas ! Certains ont immédiatement flairé une odeur de surcoût, réflexe pavlovien déclenché par le mot «internalisation», qui ne figure même pas dans le projet de loi. Or ces hypothétiques surcoûts sont pures conjectures. Le sous-traitant ou l'organisme externe prenant en charge les prestations devra en toute logique souscrire à la CCT de la branche et garantir une bonne couverture des prestations sociales. S'ajoute encore à cela la marge que prennent les entreprises, sans compter qu'il faut aussi tenir compte des économies d'échelle et de formation que les EMS peuvent réaliser en internalisant et, le cas échéant, en mutualisant entre eux les prestations. La difficulté d'adaptation des EMS aux dispositions de la loi n'est pas un argument, sachant que le projet de loi permet de maintenir la majeure partie de ce qui existe aujourd'hui comme sous-traitance dans certains établissements, comme le linge plat et la confection de repas. L'externalisation n'est pas interdite.

En conclusion, le vote de ce projet de loi est attendu depuis trente-deux mois. Il répond à un arrêt de la Chambre administrative, les conditions-cadres sont acceptées par l'ensemble des acteurs, et il permet d'assurer un encadrement de qualité pour nos aînés, privilégiant le contact et les interactions. Mesdames les députées, Messieurs les députés, nous vous invitons à soutenir l'entrée en matière sur ce projet de loi, puis à le voter avec l'amendement qui vous sera présenté ultérieurement.

M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, j'aimerais quand même rappeler qu'il existe pour les EMS des contrats de prestations, qui sont très précis et qui comportent des cahiers des charges et des éléments très exigeants. A part les soucis rencontrés à l'époque par un EMS, celui de Vessy - qui depuis a été remis sur rails sous l'excellente présidence de Mme Loly Bolay et de son conseil d'administration, qui avaient permis de redresser la barre -, cela fonctionne relativement bien. La commission ad hoc sur le personnel de l'Etat parle souvent de souplesse et de transversalité. Je pense qu'un des problèmes dans ce dossier, c'est précisément le manque de souplesse. C'est un domaine que je connais, puisque j'ai une entreprise active entre autres dans le domaine du nettoyage depuis trente ans; je connais donc particulièrement ces problématiques. Je rappelle que ces entreprises sont soumises à une CCT, que nous ne sommes pas des négriers et que le salaire minimum chez nous existe, ainsi que le treizième salaire et les vacances, ce qui donne d'ailleurs une rétribution de plus de 25 francs de l'heure.

J'aimerais relever que ce projet de loi avait été déposé suite aux problèmes rencontrés dans un EMS où l'on a pris les résidents en otages en les faisant sortir dans la rue, ce qui est un véritable scandale. Dans le cas en question, le directeur n'a pas respecté le contrat de prestations et les procédures. Il s'agit d'un cas sur 54 EMS. On rédige donc une loi pour un EMS. Alors que la gestion des EMS est externalisée, on est en train de leur dire qu'ils ne peuvent pas eux-mêmes externaliser des tâches. L'intégralité de l'activité des EMS est externalisée par l'Etat - sauf pour ce qui concerne trois établissements, qui sont publics -, mais ils n'ont pas le droit de procéder à des externalisations.

Pour toutes ces raisons, le groupe UDC vous demande de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Merci, Monsieur le président.

M. Alberto Velasco (S). Ce projet de loi a effectivement pris pas mal de temps et, pour le personnel des EMS, il est temps de le voter. S'agissant de l'externalisation, il y a suffisamment d'expériences aujourd'hui dans ce canton - pas seulement dans les EMS, je pense à l'aéroport, par exemple - pour observer qu'en général, quand on externalise, les conditions de travail et les revenus des travailleurs concernés se détériorent. Dernièrement, j'ai été contacté par des personnes travaillant en EMS; il y a eu une externalisation. La première chose qu'elles ont reçue, c'est une résiliation du contrat, avec des nouvelles conditions de travail, qui devaient être acceptées, sinon c'était la porte. Ça, ce sont les conditions quand on procède à des externalisations.

On est quand même dans un canton où on nous rappelle tout le temps les droits de l'Homme, la démocratie comme étant des valeurs cardinales. On n'est pas dans un Etat socialiste, on est dans un Etat capitaliste, qui dit respecter les droits de la personne, etc. Mais respecter les conditions de travail, cela fait partie des droits de la personne ! Récemment, la conseillère d'Etat du département des finances nous a tenu un discours très intéressant: elle annonçait qu'elle allait faire en sorte qu'il y ait moins d'absentéisme au sein de l'Etat et précisait que, pour ce faire, il fallait des conditions de travail et un suivi acceptables. Je suis tout à fait d'accord avec elle ! Parce que quand les gens ont envie d'aller travailler, quand les conditions de travail sont respectueuses des travailleurs, il y a moins d'absentéisme, et tant la qualité du travail que le rendement se trouvent affectés positivement. Les externalisations représentent peut-être un gain financier à très court terme, mais à moyen et long terme, c'est une perte pour les conditions de travail et l'efficacité de l'institution. Par conséquent, Mesdames et Messieurs, je vous demande, pour en finir, de voter ce projet de loi, parce qu'il est nécessaire pour le personnel des EMS.

Je termine par là: toutes ces personnes des EMS ont travaillé dans des conditions extrêmement difficiles pendant la pandémie. Elles étaient au travail ! Dans des conditions difficiles, pour nos aînés, pour nos anciens ! Je trouve que la moindre des choses, pour reconnaître ce qu'elles ont vécu et leurs conditions difficiles, c'est d'accepter ce projet de loi. C'est le minimum qu'on puisse faire - mis à part les applaudissements, évidemment, parce qu'on peut très bien applaudir quand ça ne coûte rien. Mais aujourd'hui, une manière de reconnaître l'engagement de ces personnes, des petits salaires, des petites mains, comme on les appelle, c'est effectivement de voter ce projet de loi. Merci.

M. Pablo Cruchon (EAG). Mesdames les députées, Messieurs les députés, tout d'abord, j'aimerais rappeler d'où vient ce projet de loi et rendre hommage ici notamment aux seize salariés des résidences Notre-Dame et Plantamour - essentiellement des femmes - qui se sont mis en grève pendant deux semaines pour lutter contre une externalisation qui allait leur coûter plus de 1000 francs par mois sur leur revenu. Chose assez rare, suite à ce conflit social, M. Poggia a fait son travail de manière correcte; vous ne m'entendrez pas souvent dire ça, mais en l'occurrence... (L'orateur est interpellé.) De temps en temps, ça arrive ! ...il a fait son travail, il a rencontré les partenaires sociaux et a réussi à pointer du doigt les dysfonctionnements qui secouent les EMS et qu'il est important de soulever - j'insiste là-dessus. Pourquoi ? Parce que les EMS sont des structures privées qui à la fois génèrent du bénéfice et reçoivent des financements étatiques. Bien entendu, ce fonctionnement expose particulièrement les EMS à une surveillance de la part de l'Etat, notamment s'agissant des conditions de travail.

Ce qu'on observe, c'est que les externalisations qui sont pratiquées ont pour but essentiel d'économiser de l'argent sur le dos des salariés et des prestations - je vais revenir sur les prestations. Actuellement, dans les cliniques privées, dans les EMS ou dans les hôpitaux privés, les processus d'externalisation - dans le secteur du nettoyage, des soins hôteliers, etc. - sont encore à l'oeuvre. Cela se manifeste, par exemple, de la façon suivante: il s'agit du cas très concret d'une dame travaillant dans le nettoyage d'une clinique privée qui m'a contacté et qui me disait qu'ils étaient à la base engagés par la clinique et qu'ils devaient désinfecter entièrement deux chambres dans la demi-journée; ils ont été licenciés puis réengagés par une boîte de sous-traitance, et maintenant, ils doivent effectuer la même prestation pour quatre chambres dans le même temps. Et on leur dit: «Ne levez pas les meubles, ne passez pas dessous, désinfectez seulement les endroits que les gens touchent parce que vous devez gagner du temps !» C'est ça, la sous-traitance ! La sous-traitance, c'est payer moins les gens, les faire travailler moins correctement et, pour finir, moins bien servir les usagers et usagères.

Je tiens à relever que ce conflit social ne date pas d'il y a deux semaines: il remonte à octobre 2017. M. Poggia a introduit une modification du règlement; elle a été invalidée par le tribunal qui a conclu que cette disposition devait figurer dans la loi, et M. Poggia a déposé cette loi pour faire avancer les choses. Depuis, la commission dit: «Ooouh, mais probablement que dans six mois on va peut-être réviser tout ce corpus législatif, il serait quand même dangereux d'avancer sur un article qui pourrait perturber légèrement la rédaction d'un éventuel futur probable projet !» Ce n'est pas sérieux ! Ça fait quatre ans, bientôt cinq, que ce conflit social a eu lieu et qu'il faut résoudre cette problématique. Je vous invite à le faire aujourd'hui, puisque, pendant ce temps, des externalisations qui péjorent les conditions de travail ainsi que les prestations aux usagères et usagers continuent de se produire. Il faut donc voter ce projet, qui ne remet d'ailleurs pas du tout en question - pour répondre au rapporteur de majorité - la possibilité de réviser l'ensemble du corpus législatif concernant les EMS: il suffira de faire un copier-coller dans la nouvelle mouture, ce qui me semble être à la portée de notre administration, qui par ailleurs réalise un excellent travail. Je vous appelle donc à soutenir ce projet. Merci.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Gilbert Catelain pour une minute et cinquante-six secondes.

M. Gilbert Catelain (UDC), député suppléant. Merci, Monsieur le président. Les EMS ne sont pas des centres de profit et tous les EMS sous-traitent une partie de leurs activités à des civilistes, à savoir du personnel pas ou peu rémunéré dans le cadre de leur activité obligatoire. Le taux d'absentéisme dans les EMS en 2021 avoisine les 13%, notamment en raison de la crise du covid. Le taux d'occupation des lits est aujourd'hui d'environ 94%, en forte baisse, à savoir bien en dessous des objectifs du contrat de prestations, ce qui induit pour de nombreux EMS des difficultés financières. Ils vont rencontrer des difficultés à équilibrer leur budget et vont certainement s'adresser à l'Etat pour recevoir une rallonge budgétaire. Le prix de pension journalier n'a cessé d'augmenter ces dernières années, et je crains qu'en voulant intervenir sur la politique d'exploitation de tous les EMS de ce canton, finalement on aggrave les difficultés de ce secteur qui sera peut-être obligé de réduire le nombre de postes de travail, en tout cas pour ce qui est des EMS privés. Je rappelle par ailleurs que la convention collective de travail de la branche est en cours de négociation, qu'elle va introduire des coûts supplémentaires qui nécessiteront des rallonges budgétaires, raison pour laquelle, pour ma part, je ne suis pas favorable à une obligation pour l'ensemble des EMS d'appliquer ce projet de loi.

Une voix. Bravo !

Mme Véronique Kämpfen (PLR). Je suis stupéfaite de constater qu'aucun de mes préopinants n'a fait mention de la lettre que nous avons toutes et tous reçue, Mesdames et Messieurs les députés, ce matin par e-mail. Cette lettre est importante, parce qu'elle fait état de l'inquiétude que ce projet de loi suscite dans le milieu du handicap, notamment sous l'angle de l'insertion professionnelle. Cette lettre émane de l'Association cantonale des institutions pour personnes avec handicap, l'INSOS, et de l'Association genevoise des organismes d'éducation, d'enseignement et de réinsertion, l'AGOEER. Comme vous le savez sans doute, ces institutions d'intégration sociale et professionnelle sont régulièrement engagées par des EMS pour effectuer des travaux simples, comme de la blanchisserie ou du nettoyage, ce qui permet non seulement l'insertion professionnelle de personnes en situation de handicap ou exclues du milieu professionnel, mais aussi la formation certifiante de personnes en difficulté d'apprentissage. Les associations en charge de ces questions - je peux notamment citer Pro, Réalise, Trajets, Clair Bois, Aigues-Vertes ou encore le Centre-Espoir, et cette liste n'est pas exhaustive - craignent que les personnes dont elles s'occupent ne puissent plus travailler dans les EMS. En effet, ce projet de loi ouvre la possibilité au Conseil d'Etat d'interdire par voie réglementaire l'externalisation de ce type d'activité.

Que demandent ces associations aujourd'hui ? Elles demandent à être entendues par la commission. Elles ne l'ont pas été au cours des travaux et s'en étonnent, au vu des activités qu'elles réalisent au sein des EMS et à la satisfaction de ceux-ci. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de la promesse d'un règlement qui prendrait en considération les tâches effectuées par les associations d'intégration sociale et professionnelle, même avec l'amendement qui nous a été proposé par e-mail et dont nous débattrons tout à l'heure.

Le projet de loi que nous traitons aujourd'hui date déjà de 2019. Cela a été évoqué à plusieurs reprises. Nous ne sommes donc pas à un ou deux mois près. Je pense que du temps est à disposition et qu'il est nécessaire pour entendre ces associations. Il est donc juste et légitime de renvoyer ce projet en commission, pour donner à ces institutions concernées au premier chef par ce projet de loi la possibilité de s'exprimer dûment. Elles doivent pouvoir nous dire quelles sont les différentes tâches qu'elles exercent et à quelles conditions, pour que l'ensemble de ces éléments puisse être pris en considération dans ce projet de loi.

A titre plus personnel, je trouverais ahurissant que des groupes politiques qui prétendent soutenir l'inclusion des personnes les plus vulnérables de notre société s'opposent à la simple audition des associations qui s'occupent de personnes qui rencontrent des difficultés d'intégration professionnelle, de personnes en rupture et de personnes en situation de handicap. Leur dénier le simple droit d'être entendues en commission serait à mon sens scandaleux et m'attristerait profondément. Je redemande donc un renvoi à la commission de la santé. Merci, Monsieur le président.

Le président. Il en est pris bonne note, Madame la députée. Madame Ruth Bänziger, sur le renvoi en commission ?

Mme Ruth Bänziger (Ve), rapporteuse de troisième minorité. Merci, Monsieur le président. La clarification des conditions d'externalisation et de sous-traitance, qui constitue l'objet de ce projet de loi, sera extrêmement utile et rassurante pour toutes ces associations. Je ne pense pas qu'un renvoi en commission puisse leur donner davantage d'informations. Ce qu'il faut maintenant pour elles, et ce qui leur sera aussi bénéfique, c'est que ce projet de loi soit voté, que les bases réglementaires puissent être établies et que les conditions-cadres s'agissant des prestations qui peuvent être externalisées soient enfin clarifiées. Je rappelle que, dans ce projet de loi, un seul alinéa concerne les prestations de soins; toutes les autres dispositions concernent les autres prestations, donc pas celles où l'on est en relation directe avec les résidents. Il est extrêmement important... Ce sont celles-là qui vont notamment cadrer le rôle de ces associations qui effectivement sont en relation avec les EMS. C'est pour cela que nous avons proposé un amendement qui demande que... (Remarque. L'oratrice s'interrompt.) Mais...? J'interviens au sujet du renvoi en commission: je justifie le fait que j'y suis opposée, notamment parce que l'amendement que nous proposons demande que le règlement soit établi en concertation avec les milieux concernés. Or «en concertation» signifie que le Conseil d'Etat pourra et devra écouter les milieux qui sont concernés par les externalisations et qui ne délivrent pas de prestations de soins. C'est la raison pour laquelle j'estime que tous les éléments nécessaires sont réunis pour ne pas renvoyer cet objet en commission. Tout le monde, y compris les associations actives dans l'intégration et la réinsertion, a tout à gagner si nous votons cette base légale pour clarifier la situation.

Mme Amanda Gavilanes (S), rapporteuse de deuxième minorité. Le parti socialiste s'opposera au renvoi du projet de loi en commission, pour les raisons que ma préopinante a mentionnées: nous avons besoin de voter aujourd'hui ce texte, qui traîne depuis suffisamment longtemps à l'ordre du jour, ce d'autant plus que l'amendement que nous avons proposé - ma préopinante, moi-même, ainsi que M. Baertschi - remplira et satisfera très certainement les attentes des personnes qui nous ont écrit aujourd'hui.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de première minorité. En fait, c'est véritablement un faux problème. Il y a des procès d'intention qui sont très désagréables, voire insupportables. Peut-on accuser le conseiller d'Etat porteur de ce projet de ne pas avoir de sensibilité pour les associations de personnes handicapées, comme elle l'a fait ? Si je me permets d'en parler, c'est parce que cela sous-tend son raisonnement pour la demande de renvoi en commission. Je crois qu'on ne peut pas utiliser n'importe quel argument. On pourrait essayer d'aller vers la privatisation, mais on sait très bien que le magistrat en question est très ouvert à toutes ces associations. Il nous a donné les assurances qu'on allait dans le sens de la discussion, de la négociation et surtout de la clarification; là, on crée un nouveau nuage de fumée. C'est très négatif. Il faut éviter le retour en commission et voter ce projet de loi. Toute une partie se fera au niveau réglementaire; c'est dans ce cadre-là que les problèmes évoqués - qui à mon sens sont en grande partie exagérés - pourront être résolus. Mais il faut impérativement voter cette loi qui attend depuis bien trop longtemps. Je vous conjure donc de refuser ce renvoi en commission. Merci.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC), rapporteur de majorité. Je reviendrai plus tard sur un certain nombre d'inexactitudes que j'ai relevées dans les diverses interventions. Concernant le renvoi en commission, je me rallie volontiers aux arguments développés par ma collègue, Mme Kämpfen, et je constate que ce serait bien la première fois que des associations s'occupant de réinsertion de handicapés se verraient refuser une audition en commission. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, vous êtes priés de vous prononcer sur le renvoi à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12544 à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat est rejeté par 47 non contre 40 oui.

Le président. Nous poursuivons le débat et je cède la parole à M. le député Patrick Dimier. (Brouhaha.) En attendant un peu de silence... Merci. Monsieur Dimier, c'est à vous.

M. Patrick Dimier (MCG). Merci, Monsieur le président. J'espère prendre suffisamment de distance avec le micro pour ne pas en prendre trop avec le sujet ! (Exclamation.) Si j'ose me permettre, on n'a pas cité - je crois que notre collègue Pablo Cruchon l'a fait tout à l'heure, mais dans un autre contexte - l'EMS Notre-Dame. Vous avez certainement lu dans la presse que cet EMS a renvoyé une employée qui a été gravement blessée par une personne âgée souffrant de troubles psychologiques, mais là n'est pas le débat. Ce qui est important, c'est la raison pour laquelle cet incident s'est produit: il y avait deux personnes pour s'occuper de la totalité de cette maison. On voit donc ici, à travers cet exemple... Vous allez me dire que c'est le petit bout de la lorgnette, mais c'est quand même avec ça qu'on peut attraper les éléphants avec une pince à sucre ! On ne peut pas laisser des choses pareilles se passer. On ne peut en aucun cas laisser une sorte de mercantilisme s'installer dans la gestion des maisons pour personnes âgées. J'ai l'avantage, avec deux collègues ici, d'être administrateur d'un des très grands EMS de ce canton, et je peux vous dire que notre préoccupation centrale, tous partis confondus, c'est précisément d'éviter ces situations qui nous font honte. Mme Kämpfen a raison: il ne faut pas exposer à des risques les personnes handicapées ou qui ont des problèmes d'insertion quand elles viennent travailler dans les EMS. Mais je pense que ce n'est pas du tout la cible; la question n'est pas là du tout ! Bien entendu qu'on est très contents d'accueillir ces personnes qui, pour ce qui est de l'EMS où nous siégeons avec ces collègues du parlement, sont parties prenantes de l'entretien du jardin et de mille et une tâches ! Mais ce n'est pas de la privatisation, ce n'est pas de la sous-traitance mercantile ! Bien au contraire ! C'est un accomplissement social pour permettre à des personnes qui rencontrent les difficultés soulevées à raison par Mme Kämpfen de précisément travailler dans un environnement social.

Vous avez tous vu la situation catastrophique dans laquelle nos voisins se sont retrouvés en intensifiant à outrance la privatisation des EMS: à compter les biscottes, à compter les couches... Des choses qu'on n'ose même pas croire ici ! Alors de grâce, ne nous trompons pas ! Ce projet - M. Baertschi l'a rappelé - est quand même sous l'oeil et la responsabilité d'un magistrat qui, je le crois, depuis des mois et des mois, nous montre et nous prouve le souci qu'il a de veiller sur les plus faibles. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Merci, Monsieur le président, je conclus: il faut évidemment soutenir ce projet de loi, et nous remercions l'ensemble de la commission, mais surtout le magistrat, qui l'a déposé.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je cède la parole à M. Cruchon, pour une phrase de dix-sept secondes maximum !

M. Pablo Cruchon (EAG). Merci, Monsieur le président. C'est juste pour répondre au sujet des associations oeuvrant pour les personnes en insertion et les personnes handicapées: le cadre légal est extrêmement important pour elles aussi, il est essentiel de savoir quel est le cadre, comment il se construit et dans quelles conditions ces personnes peuvent être employées. C'est à ça que sert ce projet: clarifier les conditions. Je vous remercie, Monsieur le président, de m'avoir cédé la parole.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je cède maintenant le micro à M. le député Jacques Béné pour quarante-cinq secondes.

M. Jacques Béné (PLR). Merci, Monsieur le président. On a bien compris qu'il n'y aurait pas de renvoi en commission, alors je demande à... M. Mauro Poggia n'est pas là, mais Mme Anne Emery-Torracinta est présente. Madame la conseillère d'Etat, vous êtes proche des milieux qui gèrent les personnes en situation de handicap; je verrais mal le Conseil d'Etat, et surtout vous, demander le troisième débat sur ce projet de loi sans avoir entendu les deux plus gros partenaires de l'Etat en matière de gestion du handicap ! (Commentaires.) Madame Emery-Torracinta, si vous demandez le troisième débat, je pense qu'on peut vous dire - comme vous l'avez évoqué tout à l'heure s'agissant de la commission des finances - qu'on ne veut plus vous entendre parler d'inclusion ! (Protestations. Commentaires.)

M. Bertrand Buchs (PDC). Je ne voulais pas prendre la parole, mais j'ai l'impression que, de nouveau, le débat dérape. On est en train de voter un projet de loi et on nous dit que tout va être réglé dans le règlement d'application de la loi. Mais quand un projet de loi n'est pas clair, certes, il faut peut-être un règlement d'application, mais en fin de compte, le parlement n'a plus rien à dire sur ce règlement. Alors soit le projet de loi est clair et il a besoin d'un règlement d'application très simple... Mais si on dit que tout sera réglé plus tard, alors ça ne sert à rien de voter un projet de loi ! On ne sait pas ce qui sera réglé plus tard. Il vaut donc mieux pour l'instant attendre qu'on nous propose un changement complet de la loi.

Par ailleurs, je m'étonne d'entendre ces descriptions des EMS dans le canton de Genève: j'ai l'impression qu'on vit dans un canton où ils dysfonctionnent, maltraitent et affament leurs résidents ! Alors que le contrôle des EMS à Genève est extrêmement strict, que le service d'audit interne passe une fois par année en tout cas... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Monsieur le député ! (Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) Poursuivez.

M. Bertrand Buchs. ...que l'Etat contrôle strictement les EMS et le parlement aussi. Il faut arrêter de dépeindre des situations qui n'existent pas ! Soyons donc beaucoup plus clairs. Moi, je suis toujours méfiant quand je vote une loi et qu'on nous dit que les règlements d'application vont tout régler. Je ne suis pas d'accord d'entendre ça, alors je ne vote pas cette loi. Merci.

Mme Ruth Bänziger (Ve), rapporteuse de troisième minorité. J'aimerais revenir sur certains propos selon lesquels le projet de loi n'est pas clair. Il est extrêmement clair. Comme je le disais, il stipule qu'il n'y a pas d'externalisation possible pour les prestations de soins. Ce que le Conseil d'Etat décide par voie réglementaire, c'est quel type de prestations, qui ne consistent pas en des soins directs à la personne, peuvent être externalisées ou sous-traitées.

J'en viens à présenter notre amendement qui demande que le règlement soit établi par le Conseil d'Etat en concertation avec les milieux concernés, ce qui justement permet que ces associations qui délivrent notamment ces prestations externalisées ou sous-traitées puissent également se faire entendre. Effectivement, on se fera fort de rappeler au Conseil d'Etat, le cas échéant, qu'il faut... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Madame la rapporteure ! (Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) Encore un peu de concentration ! J'en profite, Madame la rapporteure, pour vous dire que vous passez sur le temps de votre groupe.

Mme Ruth Bänziger. D'accord. Le Conseil d'Etat devra donc, en concertation avec les milieux concernés, établir ce règlement, ce qui garantira que les associations dont on vient de parler entre autres pourront être entendues et donner leur «input» par rapport au type de prestations externalisées, sachant par ailleurs que, dans le projet de loi, les conditions d'externalisation et de sous-traitance sont clairement indiquées et donnent beaucoup de garanties pour qu'il n'y ait pas de copinage et qu'il n'y ait pas de conditions de travail qui aillent à l'encontre des besoins des personnes.

Je dépose donc formellement notre amendement demandant que le règlement soit déterminé par le Conseil d'Etat en concertation avec les milieux concernés.

Le président. Merci, Madame la rapporteure. Je passe la parole à Mme la rapporteure de deuxième minorité Amanda Gavilanes pour deux minutes trente-neuf.

Mme Amanda Gavilanes (S), rapporteuse de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Le parti socialiste soutiendra l'amendement proposé par Mme Bänziger à l'instant. Il permet notamment de clarifier ce qui ne semblait pas être clair pour certains des députées et députés ici présents. Il permet de répondre aux inquiétudes qui ont été mentionnées notamment par la lettre d'INSOS que nous avons tous et toutes reçue aujourd'hui, en garantissant, dans la loi, que le Conseil d'Etat prendra une décision en concertation avec les milieux concernés. Ce n'est pas que nous ne voulions pas auditionner ou entendre ces milieux; c'est que nous avons, de par la pratique et les auditions extensives que nous avons menées dans le cadre de nos travaux de commission, déjà pris la mesure du problème. Nous espérons ou plutôt nous savons que nous répondons à la problématique en amendant le projet de loi comme nous vous proposons de le faire aujourd'hui.

Le président. Merci, Madame la rapporteure. La parole va maintenant à M. le rapporteur de première minorité François Baertschi pour deux minutes et vingt-trois secondes.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Quel est le but de l'externalisation ? Pourquoi faut-il impérativement voter ce projet de loi ? On l'aura compris, le but de l'externalisation, c'est de faire du bénéfice. Le but des groupes PLR, PDC et UDC, c'est de faire du bénéfice sur le dos des résidents ! (Commentaires.) C'est-à-dire des personnes âgées en position de faiblesse. (Commentaires.) C'est-à-dire faire du profit sur le dos des plus faibles de notre société ! Faire du profit sur ces personnes ! C'est quelque chose d'inacceptable. C'est quelque chose que nous ne devons pas accepter. Et nous avons un projet de loi... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Monsieur le rapporteur ! (Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) Poursuivez.

M. François Baertschi. Merci. Nous avons un projet de loi bien étudié, qui fait un choix entre ce qui relève de la loi, c'est-à-dire du général, et du règlement, et c'est tout à fait bien étudié. J'imagine que l'administration, qui quand même a fait ses preuves, agira dans la bonne direction et saura mener une politique humaine, où l'être humain passe avant le profit ! Je vous en conjure, votez ce projet de loi, parce que nos... (Commentaires.) ...parce que nos personnes âgées méritent qu'on ne fasse pas de bénéfice à leur détriment et sur leur dos ! Merci, Monsieur le président.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je cède la parole à M. le rapporteur de majorité Jean-Marc Guinchard pour environ trois minutes vingt.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je suis de moins en moins sûr d'être rapporteur de majorité ! (Rires.) Mais ça m'arrive de temps en temps, et c'est assez formateur. Je vous remercie de cette opportunité que vous me donnez ! (Rires.) Mesdames et Messieurs, chers et chères collègues, il y a un certain nombre d'inexactitudes qui ont été dites et que j'aimerais rectifier, même si c'est une cause perdue. Tout d'abord, le bénéfice.

Une voix. Ouais !

M. Jean-Marc Guinchard. Parlons du bénéfice ! Mesdames et Messieurs, relisez les dispositions légales que vous avez vous-mêmes votées ! Tout bénéfice réalisé par les EMS doit être restitué à l'Etat. Ce sont les règles de base de la LIAF.

Une voix. Exact !

M. Jean-Marc Guinchard. Par conséquent, personne ne réalise un bénéfice au détriment des résidents.

La deuxième chose que j'ai entendue, qui m'a vraiment fait de la peine et qui m'a choqué, c'est le fait de comparer la situation des entreprises de l'aéroport, notamment celle des bagagistes qui a été citée, à celle du personnel des EMS. Le salaire moyen des membres du personnel des EMS, hors salaires des directeurs, est de 104 000 francs par an. Ne me dites pas que ces gens-là sont exploités !

Troisièmement, j'ai entendu tout à l'heure quelqu'un dire qu'il ne fallait pas aller vers une privatisation des EMS. Mais vous ne connaissez manifestement pas ce secteur ! A Genève, il y a 54 EMS: 3 EMS publics, 51 EMS privés ! Et ces établissements privés remplissent leur fonction en droite ligne du contrat de prestations négocié avec l'Etat, et d'ailleurs approuvé par ce Grand Conseil. Il est important de citer ce chiffre. On a cité également le cas de l'EMS Notre-Dame, qui a refait la une de la «Tribune de Genève» dernièrement. Comme je ne suis pas un ultracrépidarien, je ne me prononce pas sur les dossiers que je ne maîtrise pas, et je ne pense pas que la «Tribune de Genève» soit forcément la source la plus fiable. Je ne connais pas le fond du dossier, je ne pourrai donc pas répondre sur ce point.

La quatrième chose, et ce sera la dernière que je voulais vous dire avant de conclure et de terminer cette session, c'est qu'il n'a jamais été question - je rappelle aux membres de la commission qu'ils ont auditionné les représentants de la FEGEMS et de l'AGEMS, les deux associations faîtières - d'externaliser des soins. Il est exclu d'externaliser des soins, et aucun directeur d'EMS, ni à Genève ni en Suisse d'ailleurs, ne peut envisager une telle procédure, parce qu'il sait quelle en est l'importance.

Maintenant, je vous rends attentifs à des expériences qui sont menées dans les EMS et qui sont intéressantes... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Je conclus ! ...notamment par le biais de la méthode Montessori, où on essaie d'impliquer tout le personnel, y compris le personnel technique et administratif, pour le rendre animateur et qu'il entretienne des contacts réguliers avec chaque résident. Si vous vous rendiez un petit peu plus souvent dans les EMS - je me souviens que la FEGEMS avait organisé des portes ouvertes, qui n'ont eu aucun succès d'ailleurs, y compris auprès des députés -, vous pourriez vous rendre compte de ces méthodes assez innovantes. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant plus demandée, nous passons au vote d'entrée en matière sur ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 12544 est adopté en premier débat par 45 oui contre 44 non.  (Exclamations et commentaires à l'annonce du résultat.)

Deuxième débat

Le président. Nous passons au deuxième débat. (Brouhaha.) Un peu de silence, s'il vous plaît ! (Brouhaha.) Un peu de silence, s'il vous plaît ! Nous passons au deuxième débat. (Commentaires. Un instant s'écoule.) On peut tenir toute la nuit, mais on a presque fini, ce serait dommage quand même ! (Commentaires.)

Une voix. Chut !

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. Nous sommes saisis d'une demande d'amendement proposée par Mme Ruth Bänziger et cosignataires, qui nous a été présentée tout à l'heure. L'amendement vise tout simplement à ajouter à l'alinéa 2 de l'article 27 l'expression «en concertation avec les milieux concernés», juste après les termes «le Conseil d'Etat détermine par voie réglementaire», ce qui modifie l'alinéa ainsi:

«Art. 27, al. 2 (nouvelle teneur)

2 Concernant les autres prestations, le Conseil d'Etat détermine par voie réglementaire, en concertation avec les milieux concernés, celles qui peuvent être externalisées ou sous-traitées, ainsi que les modalités de contrôle.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 67 oui contre 12 non et 4 abstentions.

Mis aux voix, l'art. 27 (nouvelle teneur) ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'art. 42, al. 9 (nouveau), est adopté.

Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).

Troisième débat

Mise aux voix, la loi 12544 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 48 oui contre 43 non (vote nominal).

Loi 12544 Vote nominal