République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2640-B
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Yves de Matteis, Boris Calame, Marjorie de Chastonay, David Martin, Yvan Rochat, Paloma Tschudi, Adrienne Sordet, Pierre Eckert, Frédérique Perler, François Lefort, Christian Bavarel, Jean Rossiaud, Katia Leonelli, Léna Strasser, Salika Wenger, Nicole Valiquer Grecuccio, Jean-Marc Guinchard, Emmanuel Deonna, Jean-Charles Rielle, Badia Luthi, Diego Esteban, Jocelyne Haller, Amanda Gavilanes, Pierre Vanek, Thomas Wenger, Youniss Mussa, Sylvain Thévoz, Grégoire Carasso, Dilara Bayrak, Claude Bocquet, Anne Marie von Arx-Vernon, Xhevrie Osmani, Nicolas Clémence, Bertrand Buchs, Pierre Bayenet, Romain de Sainte Marie : Interdire toutes les pratiques visant à modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre dans le canton de Genève

Débat

Le président. Voici le point suivant: la M 2640-B. La parole échoit à M. Pierre Conne.

M. Pierre Conne (PLR). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, le groupe PLR soutient évidemment cette motion et prendra acte du rapport du Conseil d'Etat. Je prends la parole pour attirer votre attention sur le fait que le titre initial était le suivant: «Interdire les thérapies de conversion dans le canton de Genève». Il était question de procédés visant à guérir l'homosexualité. Or nous savons tous que l'homosexualité n'est pas une maladie, et de telles méthodes doivent être proscrites.

Le texte est revenu de commission avec un titre différent: «Interdire toutes les pratiques visant à modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre dans le canton de Genève». Ma première remarque consiste à dire que l'homosexualité et l'identité de genre sont deux sujets qui doivent être abordés de manière distincte. C'est la première chose que je tenais à souligner. Je vous lis un passage de l'exposé des motifs initial: «Il faut aussi noter que, bien que moins de documents existent concernant cette thématique, on essaie aussi de guérir les personnes trans* de leur transidentité. C'est notamment fréquemment le cas dans le cadre scolaire, voire parascolaire, où les adultes tiennent un discours - toujours contredit par les faits - selon lequel la transidentité revendiquée par les jeunes serait une lubie, un passage, ou un état transitoire.» Nous nous associons tout à fait à ce commentaire.

L'essentiel des travaux a porté sur les thérapies de conversion liées à l'homosexualité, et non sur la transition de genre. C'est un point particulièrement important à mes yeux. L'enjeu est énorme, nous devons faire preuve d'empathie vis-à-vis des jeunes. Mon propos concerne en effet particulièrement les jeunes, quel que soit leur âge, même si la période fragile de l'adolescence est bien sûr la plus difficile: ces personnes doivent pouvoir trouver une écoute, un accueil, un accompagnement, mais également leurs proches.

Car le deuxième enjeu, après la stabilité émotionnelle et l'accompagnement, c'est le lien familial. Il s'agit d'un point fondamental si on veut que le processus aboutisse, par exemple pour une personne qui souhaiterait aller de l'avant vers une transformation physique de son genre tel qu'assigné à la naissance, si on veut que cette démarche puisse être faite... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...avec les parents. Aujourd'hui, on se trouve dans une situation un peu tendue à Genève, parce que l'approche transaffirmative rend l'accompagnement des familles plus compliqué...

Le président. Merci...

M. Pierre Conne. Le DIP est également confronté à des situations difficiles. A cet égard, je vous invite à lire la question écrite de notre collègue Jean Romain...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Pierre Conne. ...qui demande au Conseil d'Etat d'identifier factuellement et quantitativement cette problématique. Merci, Monsieur le président.

Mme Salika Wenger (EAG). Les pratiques dont il est question ici n'ont rien à voir avec le fait d'accompagner ou de ne pas accompagner les jeunes, ce sont des procédés moyenâgeux, venus des Etats-Unis; ils sont encore peu connus en Suisse, et on a malheureusement beaucoup de difficulté à les quantifier. Néanmoins, pour ce qu'on en sait, il s'agit de traitements par hypnose, hormones et électrochocs, de dérives religieuses, d'appels à l'abstinence, de séances d'exorcisme, de recours au mariage hétérosexuel forcé. Là, on n'est plus du tout dans l'éducation des jeunes, ce sont vraiment des pratiques contre lesquelles il faut s'élever.

Ces actes-là doivent être punis. Faisons comme les Anglais, les Allemands ! Faisons comme les Français: le 5 octobre au soir, l'Assemblée nationale a voté à l'unanimité une loi contre de telles pratiques. J'ai envie de dire que le discours qu'on a entendu avant, c'est un discours bien gentil qui s'adresse aux petits enfants, ce n'est pas ce dont on parle. Ce n'est pas ce dont on parle ! Ici, on parle de tortures infligées à des personnes à qui on refuse le droit d'être. Nous bénéficions de ce droit; pourquoi le refuser à d'autres ? Voilà ce à quoi nous nous opposons à tout prix.

Bon, nous prendrons acte du rapport du Conseil d'Etat. Néanmoins, il ne faut pas se tromper d'objectif et surtout ne pas se raconter d'histoires. Il ne s'agit pas de dire qu'il ne faut pas éduquer ses enfants ni les accompagner; il s'agit de dire que les personnes qui se sentent différentes des hétérosexuels ont les mêmes droits et qu'en aucun cas nous ne pouvons laisser faire ce qui se passe dans ces thérapies bidon, lesquelles ne génèrent que souffrance et culpabilité de ne pas correspondre au schéma ordinaire. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Nous prendrons acte de ce rapport, mais il serait nécessaire de voter une loi qui vise explicitement ce type de pratiques, parce que je sais qu'elles ont lieu; elles ont lieu partout, en Suisse, dans tous les pays du monde.

Le président. Merci...

Mme Salika Wenger. Nous prendrons acte du rapport, mais ce n'est pas suffisant. Voilà, Monsieur le président, merci.

M. Yves de Matteis (Ve). En tant qu'auteur de la proposition de motion et auxiliairement président de la commission des Droits de l'Homme, j'aimerais souligner que dès le départ, il était dans mon intention d'intégrer dans l'expression «thérapies de conversion» les procédés visant à modifier l'identité de genre des personnes, donc la question de la transidentité. D'ailleurs, nous avions remis au Conseil d'Etat une liste de références incluant des spécialistes en matière de transidentité. Nous faisons confiance au gouvernement pour qu'il rédige un projet de loi que nous aurons certainement l'occasion d'examiner à la commission des Droits de l'Homme, puisqu'il y sera probablement renvoyé. Merci, Monsieur le président.

Le président. Je vous remercie.

Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2640.