République et canton de Genève

Grand Conseil

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La séance est ouverte à 14h, sous la présidence de M. François Lefort, président.

Assistent à la séance: Mmes et M. Anne Emery-Torracinta, présidente du Conseil d'Etat, Mauro Poggia et Nathalie Fontanet, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Serge Dal Busco, Pierre Maudet, Antonio Hodgers et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Diane Barbier-Mueller, Jean Batou, Christian Bavarel, Philippe Morel, Alessandra Oriolo, Charles Selleger, Salika Wenger et Raymond Wicky, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Pierre Bayenet, Sophie Desbiolles, Joëlle Fiss, Patrick Malek-Asghar, Françoise Nyffeler, Helena Rigotti et Esther Schaufelberger.

Annonces et dépôts

Néant.

PL 12779-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'exercice 2021 (LBu-2021) (D 3 70)

Suite du troisième débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le débat budgétaire avec les déclarations finales. La parole échoit à M. Eric Leyvraz, président de la commission des finances.

M. Eric Leyvraz (UDC). Merci, Monsieur le président. Nous voilà arrivés au bout de cette discussion budgétaire, une discussion bien inutile puisque tout était ficelé et verrouillé à la virgule depuis le début par les partis gouvernementaux.

Mme Fontanet nous a dit que plusieurs cantons annoncent un déficit 2021 important, voulant atténuer dans l'esprit de la population l'ampleur de notre trou financier. Elle a cité Zurich qui accuserait une perte de 500 millions; c'est oublier que Zurich compte plus de 1,5 million de citoyens, soit trois fois plus que notre canton, et que si on s'attache aux chiffres par habitant, Genève devrait présenter un déficit de 170 millions, pas de 840 millions. Elle omet également de signaler que Fribourg, sage canton, ne sera même pas dans les chiffres rouges.

Notre situation demeure la plus inquiétante du pays. Notons qu'il n'existe au monde aucune autre communauté de 500 000 habitants enregistrant des rentrées fiscales aussi élevées - 8,5 milliards ! Nous avons donc clairement un problème de dépenses, c'est une évidence mathématique. D'année en année, nous lâchons toujours plus d'argent pour une multitude de subventions, arrosant à tout va. Notre Etat est pléthorique, cessons de cacher la vérité. Régulièrement, la Cour des comptes et la commission de contrôle de gestion nous communiquent des informations affligeantes relatives au fonctionnement de certains services: absentéisme affolant, pas de sanctions pour mauvaise gestion, on garde un responsable et on lui adjoint une aide plutôt que de le renvoyer, etc.

Ce n'est plus acceptable, Mesdames et Messieurs. Si vous pensez que nous allons poursuivre sur cette voie dans un tranquille ronronnement sans nous occuper de la vie réelle et des chiffres rouges, vous vous trompez lourdement. Nous nous trouvons à un tournant: si nous ne sommes pas capables de reprendre en main nos finances catastrophiques, les agences de notation ne pourront que déclasser sévèrement notre Etat fin décembre 2021, et vous verrez alors comment on peut encore tirer de l'argent des banques et à quel prix.

Comme je ne crois pas que ce parlement sera assez réaliste pour prendre des dispositions impopulaires nécessaires en diminuant des subventions ou en les supprimant, c'est la tutelle de Berne qui nous attend. Et il n'y aura pas de cadeaux de la part des autres cantons ou de la Confédération - si j'étais citoyen d'un autre canton, je refuserais de donner un centime à Genève, cette cigale trop dépensière. Notre canton est riche dans un pays déjà béni des dieux; la preuve, nous payons 3,5% sur notre budget pour la péréquation intercantonale, péréquation équitable et raisonnable, alors mendier de l'aide dans ces conditions est juste indécent.

L'UDC tire la sonnette d'alarme depuis longtemps, en vain; la dure réalité nous rattrape, et ça va faire mal. L'UDC ne votera pas ce budget, et nous reparlerons bientôt de notre attitude responsable. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)

M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je vais essayer de ne pas trop répéter ce qui a été dit lors du premier débat. Comme nous l'avons constaté, nous faisons face à un budget difficile, un budget de crise, un budget qui n'est le budget idéal d'aucun des groupes politiques représentés dans ce parlement, un budget dans le cadre duquel il a fallu fixer des priorités. La crise sanitaire se poursuivra en 2021, ses conséquences économiques et sociales se feront sentir bien au-delà d'une hypothétique vaccination.

Nous avons effectué une pesée des intérêts et estimé que les prestations à la population étaient fondamentales, prestations qui passent essentiellement par une quantité suffisante de personnel dans les domaines clés, et c'est l'un des points forts du budget que nous allons voter. Relevons à cet égard que la moitié du déficit résulte de mesures prises l'année dernière - RFFA, subventions à l'assurance-maladie, recapitalisation de la CPEG - et que seule l'autre moitié découle de la crise covid, que ce soit en raison de pertes de recettes ou d'une augmentation des dépenses. Malheureusement, cette situation est appelée à durer du fait de la forte globalité de l'économie genevoise - ou de sa globalisation, si on veut - et d'une précarité grandissante.

Davantage encore que le budget, ce qui importe aux Vertes et aux Verts, ce sont les perspectives à moyen terme. Il est clair que le plan financier quadriennal tout comme le plan décennal des investissements doivent être revus dans les grandes lignes. Vous avez sûrement noté que l'accord sur ce budget comportait deux volets. Nous avons traité le premier lors du début de la session, mais le second est tout aussi important: il inclut le Conseil d'Etat, les partis gouvernementaux et toutes les forces de bonne volonté qui permettront de définir les priorités de ces prochaines années, voire jusqu'en 2030 où, ainsi que nous l'avons décidé, l'impact carbone du canton doit être réduit de 60%. J'ai bon espoir que nous parviendrons à trouver des solutions ensemble.

On a parlé de l'efficience de l'Etat; quoi que cela signifie, ce n'est de loin pas la seule piste, tout ne doit pas forcément passer par des espèces sonnantes et trébuchantes. Hier, nous avons évoqué la transition générationnelle, il s'agit aussi d'un paramètre important; la définition d'un cadre régulateur peut contribuer à cette nécessaire transition, tout comme la formation dont nous avons débattu également. Lors des discussions que nous mènerons dès le début de l'année prochaine, nous parlerons sûrement de fiscalité écologique, d'aménagement du territoire, de politique d'investissement. La nécessaire transition impose que l'économie devienne plus durable, plus équitable, qu'elle soit relocalisée. Il me semble que tous les bords politiques de ce Grand Conseil peuvent y trouver leur compte, et le groupe des Vertes et des Verts se réjouit d'aborder ce chantier dès le début de l'année 2021. Je vous remercie.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Le président. Merci. Monsieur Jean Burgermeister, vous avez la parole pour votre prise de position finale.

M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de minorité. C'est bien pour la prise de position finale, Monsieur le président ?

Le président. Je confirme, qu'il n'y ait pas d'ambiguïté: c'est bien pour la prise de position finale.

M. Jean Burgermeister. Je vous remercie. Comme je le disais tout à l'heure avant d'être interrompu, on a entendu l'ensemble des partis gouvernementaux vanter un bon compromis, fruit d'une réflexion entre personnes raisonnables. En réalité, ce consensus n'est pas le résultat d'une large réflexion, puisqu'il s'agit tout simplement de soutenir le projet de budget tel qu'il a été présenté par le Conseil d'Etat sans en changer une seule virgule. Mais ce qui ressort surtout des discussions, ainsi que je l'ai indiqué lors du deuxième débat, c'est le fait que ce gouvernement, que la majorité du Grand Conseil a décidé de suivre sans broncher, n'a pas du tout pris la mesure de la crise que nous traversons. Je pense qu'il faut dresser un constat d'échec sur sa gestion de la crise jusqu'à maintenant; les conséquences sur le plan sanitaire aussi bien que social et économique seront très graves et s'installeront probablement de manière durable.

Par ailleurs, sous couvert d'une grande alliance, ce parlement tourne le dos à une majorité de la population. Les travailleuses et travailleurs, en particulier, sont mis sur le carreau, ce qu'illustre le fait que les syndicats n'ont jamais été invités à la table des négociations au moment d'élaborer le budget, tout comme d'ailleurs ils n'ont pas été conviés aux discussions dans le cadre des projets de lois d'aide aux entreprises, projets de lois qui auraient pu - qui auraient dû, selon nous - inclure aussi les salariés. Ce pacte sacré des partis gouvernementaux ne peut pas masquer l'accroissement des inégalités dans ce canton, il ne peut pas masquer l'augmentation des antagonismes sociaux qui vont perdurer du fait de l'inaction de notre gouvernement et du Grand Conseil sur ce front.

M. Eckert a dit qu'il fallait désormais, puisque les débats sur le budget touchent à leur fin, réfléchir à la suite, et il est vrai qu'un chantier important s'annonce. C'est avant tout le déficit structurel de l'Etat, et on a entendu tout au long de la journée se succéder les prises de parole des différents groupes appelant à des réformes structurelles, mais disons-le, Mesdames et Messieurs, ce qui se cache derrière ces termes, ce sont des baisses des dépenses de l'Etat qui ne se font généralement pas de manière indolore pour la population. Il y a deux solutions pour ce qu'on appelle des réformes structurelles: soit une diminution des prestations, soit une dégradation des conditions de travail et des salaires du personnel. Si ces réformes sont menées comme le souhaite la droite, l'Etat sera d'autant moins en capacité de répondre à l'urgence actuelle.

En fait, ce qui se cache derrière le débat que nous avons commencé aujourd'hui et qui va durer jusqu'à la fin de la législature, c'est un choix de société fondamental: au plus fort de la crise, dans quelle direction allons-nous nous tourner ? Est-ce que nous voulons une société avec davantage de solidarité, ce qui passe indéniablement par le renforcement des services publics et des prestations à la population, et qui met au centre la majorité de la population, y compris les salariés qui sont systématiquement les oubliés de ce parlement, ou, au contraire, voulons-nous, comme le souhaite une majorité, démanteler les services publics et accroître encore l'explosion des inégalités sociales, faire de Genève encore plus que ce n'est déjà le cas un canton dans lequel la pauvreté se développe à une vitesse folle alors qu'il est taillé sur mesure pour des ultrariches qui vivent des intérêts de leur fortune et des rentes de leurs capitaux ? Eh oui, Mesdames et Messieurs, l'économie de notre canton est dominée par des rentiers, ceux-là même que certains ici nous supplient de remercier tous les jours parce qu'ils paient quelque impôt.

Eh bien je pense que c'est ça, Mesdames et Messieurs, le défi pour les années à venir, à savoir abolir les privilèges fiscaux des plus riches pour permettre à l'Etat de répondre aux besoins de la population et à la crise en particulier. Pour cela, Ensemble à Gauche a lancé de nombreuses propositions, et nous sommes prêts à les défendre devant le peuple: c'est évidemment faire disparaître un bouclier fiscal injustifiable, c'est taxer les actionnaires au même titre que les salariés, c'est augmenter l'impôt sur la fortune, c'est rétablir un impôt sur les successions en ligne directe pour les gros héritages. Je vous remercie. (Huées. Applaudissements. Sifflements. Le président agite la cloche. Commentaires.)

Le président. Chacun son tour, Mesdames et Messieurs ! Vous ne supporteriez pas qu'on vous hue, donc ne le faites pas ! La parole est à Mme la députée Léna Strasser.

Mme Léna Strasser (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le budget que nous nous apprêtons à adopter, nous l'avons exprimé à maintes reprises, n'est pas le budget socialiste dont nous rêvions; c'est un budget de consensus qui permettra à l'Etat de Genève non pas de parer à la plus forte crise que notre canton connaisse depuis des dizaines d'années, mais de faire fonctionner l'appareil étatique et de délivrer les prestations dont la population a plus que jamais besoin. Nous entamerons ainsi l'année 2021 sans que le Conseil d'Etat doive venir, dès janvier, quémander des postes ou des crédits supplémentaires à la commission des finances, dans l'incertitude et une planification rendue difficile, comme il a dû le faire avec le budget «zéro poste» voté l'an passé par la majorité de droite de ce parlement.

Mesdames et Messieurs les députés, la catastrophe sanitaire, économique et sociale nous montre que nous ne pouvons plus fonctionner sans une coordination extrêmement forte entre les différentes politiques publiques: aujourd'hui, on ne peut plus mesurer le taux de chômage sans le mettre en perspective avec la hausse des demandes d'aide sociale ni faire fi de la formation quand il s'agit de préparer l'avenir de notre système de santé.

Nous attendons donc du gouvernement qu'il soit capable de mettre en oeuvre une plus grande transversalité afin d'assurer la qualité des services de l'Etat, capable également de prendre la mesure des enjeux que le canton devra affronter dans les années à venir - précarisation de la population, économie et secteur de l'emploi très menacés - en proposant des projets ambitieux dans un dialogue constructif avec le Grand Conseil. Tout en regrettant que des ouvertures n'aient pas été trouvées pour maintenir l'annuité du personnel de la fonction publique en 2021, le groupe socialiste acceptera le présent budget. (Applaudissements.)

M. Cyril Aellen (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, 840 millions de déficit, 392 postes supplémentaires, 190 emplois d'auxiliaires - encore plus si l'on tient compte des entités subventionnées - suppression de l'annuité, 13,5 milliards de dette - probablement le double si toutes les dettes du grand Etat sont prises en considération: c'est probablement ce que l'on retiendra de ce budget. Pourtant, ces chiffres ne disent pas tout, le signal politique lancé par le vote du budget est également essentiel.

J'ai entendu hier Mme Marti indiquer que ce budget n'était pas celui des socialistes; les Verts ont parfois tenu un discours comparable. A mon sens, ils se trompent: ce budget est aussi le leur. Mme la députée Léna Strasser a parlé d'un budget de consensus, elle a raison. A partir du moment où une députée ou un député appuie sur le bouton «oui», ce budget devient le sien, il doit l'assumer, il doit même le défendre vis-à-vis de la population. Quant à nous, nous répondons pleinement de nos actes et de nos choix.

Seules cent personnes peuvent faire des choix en matière budgétaire, ce sont les députées et députés présents aujourd'hui. C'est une application concrète du principe de responsabilité auquel le PLR est particulièrement attaché. Cette situation est d'autant plus vraie que les partis gouvernementaux représentant 79 députés - voire 82 si l'on tient compte des indépendants - s'apprêtent à voter ce budget. Aucun parti n'est donc nécessaire: que le PS renonce, que les Verts se ravisent ou, à l'inverse, que le PLR ou le PDC changent d'avis, ce budget serait adopté avec une majorité suffisante. Et pourtant, la participation de l'ensemble des partis gouvernementaux est indispensable.

Comme l'a mentionné M. le député Youniss Mussa, il s'agit d'un budget de responsabilité. Plus qu'aucune autre année, il engage les formations qui assument des responsabilités gouvernementales. Ce budget ne correspond pas au programme politique du PLR, pas plus qu'il ne s'inscrit dans la ligne du parti socialiste ou des Verts, ou même dans le cadre du discours de Saint-Pierre, mais sans avoir pris la peine de relire chacun des programmes, nous pouvons affirmer sans risque qu'aucun de cesdits programmes n'anticipait la crise sanitaire, sociale et économique actuelle.

Aussi, dans la situation de crise historique que nous vivons, le parlement doit montrer à la population qu'il peut, qu'il doit avoir confiance en ses autorités. L'heure n'est ni à la polémique ni à la posture, ni à la mésentente ni au bouleversement. Alors oui, le PLR assume avec responsabilité ce budget, et même s'il ne s'agit pas du budget dont il rêvait, il l'acceptera avec conviction. Dans la tempête, il est essentiel de fixer un cap, de le suivre, de compter sur chacun des matelots et de se donner tous les moyens pour arriver à bon port. Sans confiance du parlement et sans adhésion de la population, il sera impossible de vaincre la crise sociale et économique que nous traversons aujourd'hui.

Pour beaucoup, et c'est un aspect positif, cette crise aura été un révélateur de la réalité économique actuelle. Les patrons de PME ne se battent pas pour la seule survie de leur commerce, ils s'engagent aussi et surtout pour préserver les emplois. Les entreprises et leurs employés constituent non seulement le tissu économique du canton, mais aussi son tissu social... et fiscal ! Les aides publiques, qui grèvent le présent budget, sont indispensables pour soutenir les sociétés affectées par les mesures étatiques. Cette crise aura également des conséquences économiques plus durables et sans lien direct avec les restrictions imposées ces derniers mois. Combien de temps faudra-t-il par exemple au secteur du tourisme d'affaires pour retrouver une activité comparable à celle de 2019 ? Nul ne le sait vraiment.

Genève doit d'ores et déjà se réinventer. Les réformes structurelles qui étaient souhaitables ces dernières années sont désormais nécessaires, inévitables et urgentes. L'enjeu de ce budget, plus que les chiffres, c'est la capacité des autorités politiques à mettre en oeuvre ces réformes. Les partis représentés au Grand Conseil se sont engagés à y travailler de concert avec le gouvernement dès janvier 2021. Cette promesse nous engage toutes et tous. Les tenants d'un Etat fort doivent admettre que ledit Etat doit s'appuyer sur une économie prospère. Aucun Etat ne peut assurer une cohésion sociale suffisante sans tissu économique solide. Les employés des secteurs économiques touchés doivent être réorientés vers des activités en manque de main-d'oeuvre, de nouvelles formations doivent être mises en place, l'Etat doit permettre et encourager une mutation de notre économie locale, la transition écologique appelée par l'ensemble des députés ou presque doit aller de pair avec la transition économique, la protection de l'environnement ne doit pas être la tâche d'un Etat redistributeur, mais celle de chaque citoyen et de chaque entreprise.

Le PLR a souvent démontré qu'il était attaché à un Etat qui fonctionne et qui se met au service de la population. Ce n'est pas toujours le cas, c'est même parfois l'inverse. Si des moyens supplémentaires s'avèrent parfois nécessaires, l'Etat de Genève a l'obligation de se montrer plus agile. La crise que nous traversons a démontré que cela est nécessaire et possible. Le PLR est convaincu que la fonction publique, et j'en terminerai par là, souhaite ces réformes autant qu'elle les craint. L'immense majorité des fonctionnaires aiment leur métier, mais ils pâtissent des dysfonctionnements actuels. En votant ce budget avec un déficit historiquement élevé, le PLR fait preuve de responsabilité et s'engage pour l'avenir. (Applaudissements.)

Mme Delphine Bachmann (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, Genève a besoin d'un budget, le PDC le martèle depuis plusieurs mois et a oeuvré avec succès pour l'obtenir. Aujourd'hui, fonctionner sur la base de douzièmes provisionnels établis sur un budget 2020 dont les comptes seront catastrophiques est totalement en deçà de la réalité socio-économique, ce n'est pas un choix viable ni responsable. Après des années de débats budgétaires qui, le plus souvent, ont déchiré notre hémicycle et démontré notre incapacité à forger des compromis solides et durables, il aura fallu les circonstances dramatiques d'une pandémie mondiale et un adversaire commun pour que notre parlement fasse preuve d'un début d'unanimité en matière financière.

Malgré nos opinions respectives sur la situation sanitaire, sur les mesures visant à la contenir ainsi que sur les solutions pour soulager les différents secteurs et corps de métier soufflés par cette déflagration, nous avons pu trouver plus régulièrement et plus facilement ces derniers mois des points de convergence face à l'urgence de la crise et à la souffrance d'une partie de la population. Notre parlement a prouvé une nouvelle capacité de collaboration que les Genevoises et les Genevois désespéraient de voir émerger entre nos murs. Le budget que nous allons voter maintenant en est une preuve supplémentaire. Car si le rôle du Conseil d'Etat est d'élaborer un projet de budget, celui du Grand Conseil est de le faire aboutir.

Le compromis qui unit cinq partis gouvernementaux autour de ce projet nous conduit à reconnaître ses imperfections financières tout autant que sa valeur politique. Nous avons été capables de contenir nos exigences individuelles pour forger la meilleure des exigences, celle de donner à notre canton mais aussi au Conseil d'Etat, à l'administration et à la population un cap pour 2021. Cet esprit de responsabilité qui nous anime est cher au PDC, c'est ce qui permet à l'Etat de fonctionner sans que nous renoncions toutefois à penser un Etat plus efficient. Malgré l'ampleur du déficit, nous considérons que pour limiter les dégâts de la crise, il faut dégager des moyens prioritaires, ce que seul un budget permet.

Durant cette période, notre mission a été d'orienter le Conseil d'Etat dans ses choix, certes de manière critique, mais toujours dans un esprit de bonne volonté, car la gravité de la crise sanitaire, économique et sociale se suffit à elle-même, nous n'avons pas besoin de lui ajouter une dimension politique que les Genevois ne comprendraient pas. C'est un subtil équilibre qu'il faut sans cesse chercher, en étant conscient que les choix effectués sont douloureux. Mais faire des choix, c'est savoir être courageux, c'est savoir abandonner les postures idéologiques stériles.

Malgré tout, cela ne signifie pas que le PDC soit entièrement satisfait. Comme probablement beaucoup d'entre vous dans cette salle, nous ressentons une certaine amertume pour des raisons qui nous sont propres. Nous sommes profondément inquiets, inquiets que nos décisions d'aujourd'hui pèsent lourdement et durablement sur les générations à venir. Nous attendons désormais que les partis réunis autour de cet accord tiennent en 2021 leurs promesses d'ouverture d'esprit afin que nous trouvions ensemble des solutions peut-être imparfaites, mais viables et durables sur le long terme.

Prioriser, décider et agir: voilà ce qui nous guidera durant les mois à venir. Pour cela, notre canton devra compter sur un parlement responsable, collégial et prêt au compromis. Représentation plurielle des convictions politiques et des réalités socioprofessionnelles, le Grand Conseil ne pourra pas garantir à notre canton un avenir préservé avec une constante politique d'affrontement entre les bancs de gauche et ceux de droite. Cette vision passéiste d'une politique par à-coups ne conduit à rien. Le parlement ne pourra avancer qu'avec la gauche, la droite et le centre - car deux extrémités ne peuvent être réunies que parce qu'il existe entre elles un vrai centre, fort et stable. Vous pouvez compter sur le PDC pour faire le travail. (Applaudissements.)

M. François Baertschi (MCG). Au moment où nous nous apprêtons à voter le budget du canton se pose une question fondamentale pour Genève. Cette question que se pose l'humanité depuis des siècles est finalement très simple: être ou ne pas être, le fameux «to be, or not to be» de Shakespeare. Pour être, Genève doit s'appuyer sur un budget, parce que cette terrible crise que nous vivons, la plus importante depuis la dernière guerre mondiale, met en cause les fondements mêmes de notre république. Or disposer d'un budget pour 2021 nous permet de placer des jalons, de trouver un chemin au milieu de la tempête, d'espérer des années 2021 et suivantes meilleures pour nous tous, de préparer le futur.

Parce que le Mouvement Citoyens Genevois croit en l'avenir de Genève, parce que le Mouvement Citoyens Genevois sait que notre république a traversé de multiples épreuves au cours des siècles, parce que le Mouvement Citoyens Genevois veut donner une réponse légitime aux attentes de la population, parce que le Mouvement Citoyens Genevois est convaincu que la République et canton de Genève bénéficie d'un potentiel considérable qu'il s'agit de mettre en valeur, nous voterons le budget 2021.

M. Jacques Blondin (PDC), rapporteur de majorité. Les débats budgétaires que nous venons de vivre s'annonçaient des plus particuliers, et force est de constater que nous n'avons pas été déçus. Preuve en est que le rapporteur de majorité s'est contenté de présenter les objectifs du projet de loi et de reprendre la parole seulement à la fin, au troisième débat. Mais comme cela a été dit, les règles du jeu étaient clairement définies, il a fallu s'y conformer et, à ce titre, je tiens à remercier les députés membres des partis gouvernementaux d'avoir respecté les conditions de l'accord conclu, d'en avoir accepté les conséquences. Ce n'était pas facile, j'ai regardé dans la salle et beaucoup trépignaient à certains moments, l'envie ne manquait pas d'intervenir, mais les conditions supérieures de ce pacte impliquaient de tenir parole, ce qui a été fait. Nous avons passé un marché, il a été tenu et je vous en remercie.

Ce faisant, nous avons évité une crise institutionnelle. C'est ce que nous voulions, parce que les intérêts supérieurs le requièrent; il y a des priorités, nous les avons définies, ce ne sont pas tout à fait les mêmes que celles décrites par Ensemble à Gauche, mais c'est dans la logique des choses. Je constate que malgré le déficit qui s'élève maintenant, selon le dernier projet, à 846,9 millions, le parlement a pris ses responsabilités. Tous les groupes l'ont dit, à l'exception d'un ou deux: nous nous trouvons au milieu du gué. On a parlé de tempête, il faut s'en sortir, il faut aller au port avant de prendre des décisions pour savoir ce que nous allons faire, et je crois que cela a été très bien compris. Le déficit est abyssal, cela a été souligné aussi, mais n'oublions pas que nous sommes en pleine crise - même si le mot n'est pas toujours compris de la même manière par chacun - sanitaire, sociale et économique. Il faut absolument que notre population voie que nous pouvons apporter des solutions.

Mais surtout, cet accord est un pari sur l'avenir, l'espoir d'une concertation, de négociations entre la gauche, la droite et le centre. Il va falloir que nous revoyions nos paradigmes pour nous tendre des perches et travailler ensemble, faute de quoi nous n'y arriverons pas. On a évoqué les mesures structurelles: celles-ci ne pourront être purement cosmétiques, il faudra parler recettes, il faudra parler dépenses; on peut comparer cela aux douze travaux d'Hercule pour les douze mois de 2021, il va vraiment falloir nous retrousser les manches et trouver des solutions qui réforment totalement le fonctionnement de l'Etat, les positions de recettes et de dépenses. Mais l'heure est au vote du budget 2021, et au vu des discours qui viennent d'être tenus, il ne fait pas l'ombre d'un doute qu'il sera accepté. Je vous invite donc à soutenir ce budget. Merci à tous.

M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de minorité. J'aimerais répondre brièvement à ce qui a été dit tout à l'heure. Il y a tout de même un décalage important et inquiétant, je trouve, entre l'autocongratulation d'une majorité des députés quant au sens des responsabilités dont ils vont faire preuve en appuyant sur le bouton comme le leur a demandé le Conseil d'Etat et la terrible détresse sociale de la population à laquelle nous n'avons apporté aucune réponse, ni aujourd'hui ni la semaine dernière durant laquelle nous avons pourtant traité des projets de lois en lien avec la crise. Aucune réponse pour celles et ceux qui souffrent le plus, celles et ceux qui ont perdu leurs revenus, les travailleurs précaires, une grande partie des salariés, celles et ceux qui craignent les licenciements contre lesquels ce Grand Conseil a refusé d'agir, beaucoup d'indépendantes et d'indépendants qui ne sont pas concernés par les aides financières.

J'ai entendu une députée dire qu'il fallait à l'avenir avancer avec la gauche et la droite; mais c'est surtout avec ces secteurs de la population qu'il faut avancer si vous voulez forger une unité ! L'unité n'est pas un concept abstrait qui se dessine au sein d'un parlement, Mesdames et Messieurs, elle doit avant tout reposer sur la capacité du gouvernement et du parlement à apporter une réponse à la détresse ! C'est tout de même ce Conseil d'Etat, derrière lequel vous serrez les rangs, qui a sonné la charge contre les employés de l'Etat avec toute une batterie de mesures pour dégrader leurs revenus en pleine crise sociale, lesquelles ont suscité de fortes mobilisations malgré la situation extraordinairement difficile. Quelle unité ? Quelle unité, Mesdames et Messieurs, pouvez-vous espérer derrière un gouvernement qui, dans un même mouvement, annonce sa volonté de baisser l'impôt sur la fortune et celle de diminuer les salaires ? Je vous remercie. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur. Je donne finalement la parole à M. Eric Leyvraz, président de la commission des finances et rapporteur de la crypto-minorité.

M. Eric Leyvraz (UDC). Merci, Monsieur le président. L'UDC s'amuse de l'autocongratulation des partis gouvernementaux qui parlent de courage et de responsabilité face à la population. Mais c'est tout le contraire: ce budget est un acte de lâcheté qui va charger la future génération. Vous n'avez pas de quoi être fiers, Mesdames et Messieurs.

Mme Anne Emery-Torracinta, présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, à mon tour, au nom du Conseil d'Etat, d'adresser un certain nombre de remerciements, d'abord - Nathalie Fontanet l'a déjà fait hier, mais je voudrais m'y associer - à l'ensemble de l'administration et des services, notamment à la direction générale des finances de l'Etat, qui ont permis de mener à bien le travail qui est sur le point d'aboutir ce soir, et puis à vous, Mesdames et Messieurs membres des partis gouvernementaux, pour avoir accepté de prendre des responsabilités, celles de voter un budget dans une situation extrêmement particulière. Qui, il y a encore une année, au moment où nous adoptions - ou pas - le budget 2020, aurait pu imaginer que nous allions affronter la plus grave crise sanitaire, économique et sociale de ces dernières décennies ? Personne, sans doute.

Le sens des responsabilités, Mesdames et Messieurs, c'est d'accepter la validation d'un budget déficitaire. Ce qui est irresponsable, en revanche, c'est d'évoquer la détresse sociale tout en rejetant le budget et les postes qui permettent d'y répondre; ce qui est irresponsable, c'est de parler de lâcheté et de refuser le budget en laissant tomber toutes les personnes qui souffrent et qui ont besoin de l'aide du gouvernement et du parlement.

Lorsque j'ai rencontré les différents groupes politiques au cours du mois d'octobre, j'ai constaté du côté des partis gouvernementaux une volonté unanime de trouver des solutions, de répondre aux besoins de la population, et le budget qui vous est proposé aujourd'hui est le fruit de ce compromis. C'est un budget qui permet de répondre à la crise, à celles et ceux qui souffrent, à celles et ceux qui ont perdu leur emploi, à celles et ceux qui risquent de perdre leur entreprise, à tous ceux dans la fonction publique qui ont davantage de travail parce qu'il faut faire face à de nouveaux défis, à de nouvelles préoccupations. Ce n'est pas simplement un budget qui maintient les prestations, il permet de les augmenter.

Ce compromis, j'ai même envie de dire ce consensus - le mot a été lâché aujourd'hui - est le résultat d'une volonté de travailler en deux temps. D'abord, en acceptant une forme de pacte républicain. Dans une situation comme celle que nous connaissons actuellement, personne - personne ! - n'aurait compris que la classe politique se déchire et soit incapable d'offrir des réponses aux questions de la population. Ensuite, en travaillant plus en amont avec l'ensemble des partis politiques. En effet, lorsque le gouvernement vous présente son projet de budget en septembre, avec parfois des textes de lois connexes visant à trouver des solutions aux difficultés financières de notre canton, eh bien on s'aperçoit que cela ne satisfait à peu près personne, et le délai est beaucoup trop court pour parvenir à élaborer des solutions avec vous.

Notre volonté, et je crois que vous la partagez, c'est donc d'agir en amont. Voilà pourquoi le gouvernement s'est engagé à oeuvrer avec l'ensemble des formations politiques, avec l'entier du Grand Conseil dès le mois de janvier sur un certain nombre de thématiques. Il y a bien sûr les sujets qui fâchent; je pense à la fiscalité, je pense aux rapports et à la répartition des tâches entre canton et communes, je pense également au statut de la fonction publique et tout ce qui va de pair. Ces discussions doivent avoir lieu même si ces thèmes sont difficiles, notamment avec les partenaires externes concernés.

Mais il y a également des débats à mener sur les projets d'avenir: qu'est-ce qui peut encore faire rêver dans notre canton, comment nous adapter aux besoins de demain ? Nous devons anticiper ces questions, que ce soit pour répondre à la crise climatique ou à des problématiques économiques, sociales et de formation. Il y a encore tout ce qui concerne le fonctionnement de l'Etat, et je crois qu'il existe déjà un consensus pour chercher des moyens d'alléger les procédures, de simplifier les démarches, d'éviter les contrôles, de donner à la fonction publique le rôle qui est le sien, à savoir véritablement répondre aux besoins des citoyens. Nous devons donner du pouvoir au plus près du terrain, les responsabilités doivent être engagées là où elles sont nécessaires, et pas forcément dans des procédures longues et coûteuses.

En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, j'ai envie de formuler un voeu au nom du Conseil d'Etat. Aujourd'hui, je constate que vous vous êtes montrés très suisses. La classe politique genevoise, en tout cas sa majorité, montre qu'elle est capable d'ouverture et de consensus, et je souhaite que cette helvétisation se poursuive ces prochains mois et ces prochaines années; en tout cas, le gouvernement s'engage à collaborer avec vous. Merci de votre attention.

Le président. Merci, Madame la présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous procédons à présent au vote du budget. Je rappelle que l'adoption d'un budget de fonctionnement déficitaire tel qu'il nous est présenté ici requiert la majorité des membres du Grand Conseil, soit 51 voix sur 100.

Mise aux voix, la loi 12779 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 76 oui contre 17 non et 2 abstentions. (Applaudissements et huées à l'annonce du résultat.)

Loi 12779

M 2707
Proposition de motion de Mmes et MM. Léna Strasser, Badia Luthi, Glenna Baillon-Lopez, Grégoire Carasso, Amanda Gavilanes, Sylvain Thévoz, Nicole Valiquer Grecuccio, Jocelyne Haller, Nicolas Clémence, Pierre Bayenet, Serge Hiltpold : Stoppons le virus, pas le processus de formation !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 25, 26, 27 novembre, 3 et 4 décembre 2020.

Débat

Le président. L'ordre du jour appelle le traitement des urgences. Je vous rappelle que nous avons encore neuf urgences à traiter cet après-midi. Nous commençons par la M 2707, classée en catégorie II, trente minutes. La parole est à l'auteure du texte, Mme Léna Strasser.

Mme Léna Strasser (S). Merci, Monsieur le président. Cette motion partait du constat que les apprentis et apprenties des domaines particulièrement touchés par les mesures de lutte contre le coronavirus ont vu leur temps de formation pratique en milieu professionnel fortement réduit par les fermetures d'abord en début d'année, puis à nouveau dès le mois de novembre. Ceux de troisième année risquent donc d'arriver à leurs examens sans avoir eu les moyens de finaliser leur apprentissage pratique. Nous souhaitons éviter à tout prix l'échec d'un grand nombre d'entre eux aux examens en vue de l'obtention de leur AFP ou de leur CFC.

De plus, ces employés en formation se sont retrouvés non éligibles aux RHT et, même si cela devrait être corrigé au niveau national, le risque que certains voient leur contrat stoppé est grand. Heureusement, jusqu'à présent, les entreprises formatrices, dans leur grande majorité, ont tout fait pour les garder en poste et leur permettre de poursuivre leur formation.

Cette motion a été déposée le 9 novembre. Quelques jours plus tard, le Conseil d'Etat communiquait sur des mesures allant dans son sens, notamment une indemnité forfaitaire mensuelle de 875 francs par apprenti en faveur des entreprises formatrices afin, je cite, «de soutenir et de valoriser les jeunes en formation qui [...] se retrouvent fragilisés par la pandémie actuelle» et «d'éviter que les employeurs et employeuses soient contraints de licencier leurs apprentis et, pour ces derniers, de devoir interrompre leur formation». L'office pour la formation professionnelle et continue a de plus fait de nombreux efforts pour trouver des solutions en vue d'une poursuite des formations pratiques.

De notre côté, nous souhaitons que tout soit mis en oeuvre pour que si, malgré les mesures mises en place, des licenciements ont lieu, ceux-ci n'impliquent pas une rupture de formation et que toutes les solutions envisageables soient recherchées, particulièrement pour les apprentis de deuxième ou troisième année.

Nous savons les organisations du monde du travail et leurs membres très concernés par la formation de leurs apprentis et attendons qu'avec de la créativité, de la flexibilité et des mises en réseau, ainsi qu'un soutien accru de l'OFPC et des centres de formation, il soit possible de trouver des moyens pour éviter à tout prix les ruptures de formation.

Mesdames et Messieurs les députés, les jeunes sont déjà touchés de plein fouet dans leur vie privée et leur quotidien par la catastrophe actuelle. Il est donc important de préserver leurs cursus de formation et de maintenir leurs emplois. C'est bien la direction qu'a prise le Conseil d'Etat ces dernières semaines en proposant plusieurs mesures. La majeure partie des invites de la motion étant donc à présent réalisée, le groupe socialiste a décidé de la retirer.

Le président. Merci, Madame la députée.

La proposition de motion 2707 est retirée par ses auteurs.

M 2708
Proposition de motion de Mmes et MM. Amanda Gavilanes, Emmanuel Deonna, Glenna Baillon-Lopez, Sylvain Thévoz, Nicole Valiquer Grecuccio, Jocelyne Haller, Diego Esteban pour une prolongation des contrats du personnel précaire de l'enseignement supérieur et de la recherche de l'Université de Genève fortement affectés par la crise du COVID-19
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 25, 26, 27 novembre, 3 et 4 décembre 2020.

Débat

Le président. Nous passons à l'urgence suivante, la M 2708 que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à... Monsieur Christian Zaugg, vous étiez inscrit pour l'objet précédent.

M. Christian Zaugg. Oui !

Le président. Je vous donne la parole, mais je pense que maintenant... Vous êtes inscrit pour la M 2708 ou pas ?

M. Christian Zaugg. Oui, Monsieur le président, mais je vais laisser parler l'auteure du texte d'abord.

Le président. Voilà, nous attendons que l'auteure s'inscrive...

M. Christian Zaugg. Je prendrai la parole juste après.

Le président. Madame Amanda Gavilanes, vous avez la parole.

Mme Amanda Gavilanes (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion, comme son nom l'indique, a pour but de venir en aide au personnel du corps intermédiaire de l'université, qui, comme de nombreux travailleurs et travailleuses de notre canton, subit de plein fouet les conséquences de la crise sanitaire que nous traversons.

Les tâches d'enseignement et de recherche des universités et des hautes écoles du canton de Genève sont assurées à près de 80% par du personnel en contrat précaire, à temps partiel et/ou à durée déterminée. Ce personnel, issu du corps des collaborateurs et collaboratrices de l'enseignement et de la recherche, a vu son travail de recherche fortement entravé par la crise et la suspension des activités au sein de l'université, comme notamment la fermeture des bibliothèques et des archives, l'impossibilité de mener à bien les enquêtes de terrain et de conduire des entretiens ou encore des expériences en laboratoire, sans parler des nombreux séjours de recherche à l'étranger qui ont dû être tout bonnement annulés. Le travail scientifique des membres du corps intermédiaire sous contrat DIP a été d'autant plus entravé qu'ils et elles se sont focalisés ces derniers mois sur le passage à l'enseignement à distance, afin de permettre à l'université de poursuivre sa mission d'enseignement, et ce en dépit des circonstances défavorables, particulièrement pour celles et ceux ayant des personnes à charge.

Dans l'impossibilité quasi totale de produire des recherches depuis le début de la crise, une large partie des membres du corps intermédiaire, dont les contrats durent entre trois et six ans, particulièrement les assistants et les postdoctorants, sont ainsi fortement touchés par la crise sanitaire en cours - les femmes bien plus que les hommes - et voient leurs perspectives de carrière se réduire au sein du monde académique en raison de la réduction des publications, du retard dans l'écriture de leur thèse ou encore de l'impossibilité de constituer un réseau international, ce qui est exigé pour ce type de carrière.

Après une longue lutte menée par les associations du personnel de l'enseignement et de la recherche, comme au sein de l'assemblée universitaire et de la commission du personnel, le rectorat a imposé la solution suivante: estimant que la crise sanitaire n'a duré que deux mois, il propose au corps intermédiaire une prolongation d'une durée équivalente si, et seulement si, la hiérarchie directe, autrement dit le département puis le décanat, considère que les entraves sont réelles. Il s'avère qu'en pratique, cette marge d'appréciation favorise la mise en concurrence des collaborateurs et des collaboratrices pour l'obtention desdites prolongations. Pour des motifs exceptionnels, la prolongation peut être plus longue - jusqu'à hauteur de six mois. Elle doit être à nouveau dûment justifiée et la décision finale est entre les mains du rectorat. En outre, seuls les contrats se terminant au 31 décembre 2020 ont pu être prolongés. Toutes les autres prolongations seront réévaluées ultérieurement, ce qui génère de grandes incertitudes. De plus, les conditions de prolongation ont varié selon les facultés et les sources de financement des contrats - DIP ou Fonds national suisse - créant ainsi des inégalités qui ne sont pas liées aux impacts réels de la crise sur les chercheurs et chercheuses.

C'est pourquoi le parti socialiste vous demande aujourd'hui de renvoyer cette proposition de motion à la commission de l'enseignement supérieur, afin que nous puissions étudier la question et interroger le rectorat sur les mesures à prendre. Je vous remercie.

Présidence de M. Jean-Luc Forni, deuxième vice-président

M. Christian Zaugg (EAG). Monsieur le président de séance, Mesdames et Messieurs les députés, la situation du personnel précaire de l'enseignement supérieur et de la recherche à l'université est extrêmement préoccupante. Il nous paraît indispensable de prolonger systématiquement tous les contrats de ce personnel oeuvrant dans la recherche, qui risque, en cas de perte d'emploi, de perdre ses moyens d'existence et ne pas atteindre les objectifs de formation poursuivis.

Nous nous devons de protéger ces employés qui, faute de l'appui de l'Etat, pourraient perdre leur emploi et ainsi ne pas obtenir un diplôme ou un doctorat, titres leur permettant d'élargir et d'amplifier leur carrière professionnelle. Il convient, dans ce contexte particulier, d'offrir toutes les conditions nécessaires, à savoir la sécurité de l'emploi et des prolongations des délais impartis, afin de permettre à ce personnel précaire mais indispensable à l'université de poursuivre sa mission en toute quiétude. Nous vous invitons donc, chères et chers collègues, à soutenir résolument cette motion et à la renvoyer à la commission de l'enseignement supérieur.

M. Stéphane Florey (UDC). En effet, vu le contexte et les explications de l'auteure de cette proposition de motion, il est nettement préférable de l'étudier en commission et de pouvoir véritablement cibler et connaître la situation des personnes concernées. Nous étudierons donc volontiers ce texte en commission et nous soutiendrons son renvoi. Je vous remercie.

M. Daniel Sormanni (MCG). Les explications données par la motionnaire semblent effectivement assez convaincantes. Par conséquent, je pense qu'il est nécessaire d'examiner ce texte en commission. Le MCG acceptera le renvoi à la commission de l'enseignement supérieur. Merci.

Mme Natacha Buffet-Desfayes (PLR). Le PLR soutiendra cette demande de renvoi en commission afin d'étudier plus en profondeur cette question, car elle soulève beaucoup de problématiques qui ont été évoquées par ma collègue socialiste en un temps record et qui méritent évidemment un petit peu plus d'approfondissement. Je vous remercie.

M. Jacques Blondin (PDC). J'aimerais relever tout d'abord que ce sujet dépasse le périmètre de la seule crise covid et qu'une pétition nationale - donc pas seulement au niveau genevois - a été lancée par le corps des collaborateurs et collaboratrices de l'enseignement et de la recherche, dénonçant la précarité des contrats, qui provoque stress et malaise chez les chercheurs. Il faut donc effectivement reprendre langue avec le rectorat pour trouver des solutions à cette problématique, et nous soutiendrons bien entendu le renvoi à la commission de l'enseignement supérieur.

Mme Anne Emery-Torracinta, présidente du Conseil d'Etat. Très rapidement, Mesdames et Messieurs les députés, je pense que c'est une bonne chose que cette motion soit renvoyée en commission. Cela vous permettra d'obtenir toutes les explications nécessaires, mais sachez déjà deux choses: premièrement, dès le début de la crise, le rectorat a pris un certain nombre de mesures pour prolonger ces contrats à durée déterminée - prolongation, en effet, de deux mois en principe, mais qui peut aller jusqu'à six mois pour un certain nombre de raisons que je vous donne rapidement: lorsque, véritablement, les activités de recherche ont été impactées par les circonstances, par exemple en raison de conditions familiales ou personnelles - imaginez quelqu'un qui se retrouve à la maison avec des enfants à garder, etc., ce genre de situation là; lorsque des tâches exceptionnelles ont été confiées au collaborateur et qu'il n'a pas pu avancer, par exemple, dans sa recherche - on pense aussi à ceux qui ont été mobilisés, que ce soit par l'armée, les hôpitaux ou la protection civile; et enfin, lorsque certains n'ont pas réussi à rendre leur travail prédoctoral, doctoral ou postdoctoral dans les délais normaux. Sachez donc que l'université est très consciente de cette situation. J'en ai reparlé récemment au recteur, la situation est en permanence évaluée.

La deuxième chose que je voulais vous dire, c'est qu'indépendamment du covid - et M. Blondin l'a relevé - il y a une réflexion plus globale sur le corps intermédiaire à l'université, à Genève comme ailleurs. J'avais déjà eu l'occasion d'en parler au rectorat en 2019 et lui avais écrit à ce propos. J'ai repris langue avec le rectorat en 2020 au cours de la crise covid pour en parler. C'est donc vraiment un sujet que nous souhaitons suivre, mais je sais aussi que le recteur et son équipe en sont parfaitement conscients également. Je vous invite donc à accepter le renvoi en commission et surtout à écouter ce que l'université aura à vous dire à ce propos. Merci.

Le président. Merci, Madame la présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à vous prononcer sur la demande de renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'enseignement supérieur.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2708 à la commission de l'enseignement supérieur est adopté par 78 oui (unanimité des votants).

M 2718
Proposition de motion de Mme et MM. Jean Burgermeister, Pierre Vanek, Salika Wenger, Jean Batou, Olivier Baud, Pierre Bayenet, Christian Zaugg pour un véritable plan de défense des salarié-e-s face à la crise sanitaire et sociale
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 25, 26, 27 novembre, 3 et 4 décembre 2020.

Débat

Le président. L'urgence que nous traitons maintenant est classée en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole à son auteur, M. Jean Burgermeister.

M. Jean Burgermeister (EAG). Monsieur le président, cette proposition de motion tombe assez bien puisqu'elle donne l'occasion à ce Grand Conseil de redresser la barre; jusqu'ici, l'ensemble des textes adoptés ne concernait pas les salariés et Ensemble à Gauche l'a regretté tout comme nous l'avons regretté lors des débats sur le budget.

Une partie de ce texte invite à indemniser les salariés qui ont perdu tout ou partie de leur revenu en raison de la crise. Je ne reviendrai pas longuement là-dessus parce que c'est un thème que j'ai déjà eu l'occasion de développer la semaine dernière, et notre position est assez claire. Par ailleurs, la proposition de motion met aussi l'accent sur la nécessité d'un vrai programme de dépistage et de traçage, à la hauteur de la situation actuelle, puisque c'est la seule alternative crédible à un confinement généralisé dont les coûts sociaux et économiques sont extraordinairement élevés pour la population. Sur ce plan, la gestion a clairement démontré ses limites pour l'instant: le dépistage a été insuffisant et a entraîné une sous-estimation massive de l'ampleur de la circulation du virus durant l'été. Ensuite, le système a été immédiatement débordé, dès que la deuxième vague a commencé à monter rapidement, ce qui n'a pas permis le traçage au moment clé, entraînant à nouveau l'obligation d'un confinement.

Alors que le Conseil d'Etat amorce aujourd'hui un allégement des mesures, il est important de réfléchir à la manière d'éviter une troisième vague qui, si elle a lieu, ce qui est malheureusement probable, sera vraisemblablement bien pire encore que les deux précédentes ! A ce titre, il faut de nouveau souligner la limite du discours et de l'action du gouvernement qui, jusqu'à aujourd'hui, a essentiellement ciblé la responsabilité individuelle et, pour ce qui est des restrictions, la vie sociale de la population. Un discours qui a ses limites, comme le concédait d'ailleurs un responsable de la santé publique lors de la séance d'information organisée par le Conseil d'Etat, puisqu'il y a un aspect extraordinairement infantilisant et, qui plus est, culpabilisant, ce qui en détourne de larges secteurs de la population. Cela décrédibilise les mesures de lutte contre le covid-19 aux yeux de beaucoup au sein de la population et ne fait que renforcer les rangs des complotistes; d'autant plus que beaucoup sont encore obligés d'aller travailler tous les jours, sans garanties pour leur santé.

Enfin, le monde du travail, complètement ou largement ignoré jusqu'à maintenant, doit aussi faire l'oeuvre de mesures sanitaires ciblées. C'est ce que propose ce texte, avec un vrai dépistage sur les lieux de travail et un aménagement des horaires en faveur des travailleuses et des travailleurs.

Le président. Vous parlez sur le temps du groupe.

M. Jean Burgermeister. Ensuite, les lieux de travail ne sont pas aménagés, ce qui favorise la circulation des virus: c'est vraiment un point mort de l'analyse de la situation par le gouvernement jusqu'à aujourd'hui. Pour s'assurer que ces mesures sont mises en place et appliquées, il faut évidemment renforcer les contrôles. Il faut en outre garantir un vrai partage de l'information entre le service du médecin cantonal, d'une part, et l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail, l'OCIRT, d'autre part, afin de pouvoir cibler les entreprises et les secteurs dans lesquels le virus circule activement, afin de mettre en quarantaine de manière préventive les travailleuses et les travailleurs qui ont été exposés au virus, y compris en envisageant des fermetures temporaires de lieux de travail lorsque de nombreuses contaminations sont observées sur un laps de temps relativement court.

Ces mesures élémentaires pour éviter une troisième vague sont d'autant plus urgentes que nous allégeons aujourd'hui les mesures de confinement. Je pense que c'est essentiel, sans quoi nous allons encore accroître la crise sanitaire, avec des répercussions bien plus lourdes et durables. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant pas demandée... Ah, M. Eckert a demandé la parole in extremis. Vous avez la parole !

M. Pierre Eckert (Ve). Excusez-moi, Monsieur le président, et merci de m'accorder la parole ! Mesdames et Messieurs les députés, dans tous les projets de lois concernant les cas de rigueur ou le soutien aux entreprises, le groupe des Verts a toujours soutenu les mesures en faveur des employés. La plupart du temps, ces amendements ont toutefois été refusés. Pour cette raison, nous voterons très volontiers la proposition de motion qui nous est présentée ici.

Si je peux revenir rapidement sur les invites, la deuxième, demandant d'aménager des espaces de pause correspondant aux mesures sanitaires en cours, me paraît tout à fait normale. La quatrième invite qui consiste à indemniser les personnes aux RHT à 100% me paraît importante aussi, quitte à voir comment cette clause peut être réalisée, comme c'est une motion adressée au Conseil d'Etat.

Nous avons un peu plus de doutes sur la cinquième clause qui demande d'interdire les licenciements. On en a beaucoup parlé à la commission de l'économie: c'est vrai qu'une interdiction totale est difficile à appliquer car certains emplois sont appelés à être requalifiés et transformés en d'autres types d'emplois. De ce fait, interdire radicalement et unilatéralement tout licenciement nous semble un peu plus difficile.

Le groupe des Verts vous recommande donc d'accepter ce texte. Certains s'abstiendront, mais nous renverrons volontiers cette motion au Conseil d'Etat pour voir comment il peut réaliser l'ensemble de ces invites.

M. Serge Hiltpold (PLR). Monsieur le président, après ce manifeste trotskyste, je crois qu'il m'appartient de répondre à certains éléments. Tout d'abord, sur la première invite, M. Burgermeister, qui intervient toutes affaires cessantes, n'a probablement pas saisi ou pas compris que des postes avaient été votés par la commission des finances dans le budget: 190,6 ETP pour la cellule de traçage. La première invite est donc déjà en oeuvre, mais peut-être qu'il n'a pas entendu les chiffres ou qu'il était plus occupé à organiser les mouvements syndicaux que la cellule de traçage. 190,6 postes ont été créés !

Ce qui est frappant, ensuite, c'est cette constatation que l'ensemble des textes que nous avons traités ces dernières semaines ne concerne pas les salariés. On vient de voter des aides pour les entreprises. Or, comme je l'ai dit hier, une entreprise n'est pas une coquille vide. Dedans, il y a des salariés, il y a des collaborateurs. Donc, l'aide aux entreprises est de facto pour les salariés: c'est pour le maintien de l'emploi ! Je n'arrive pas à comprendre Ensemble à Gauche qui considère qu'une entreprise est vide: dans une entreprise, il y a des collaborateurs. Cette aide n'est pas une aide aux actionnaires, c'est une aide au maintien de l'emploi. C'est le deuxième élément que je voulais mettre en évidence.

Troisièmement, avec tous les chiffres qui nous ont été présentés, il est absolument avéré qu'il n'y a pas de cluster en entreprise ! Lorsqu'elles le pouvaient, celles-ci ont organisé le télétravail; elles ont organisé des rotations de personnel. Le but majeur d'une entreprise, c'est que les salariés et les employés ne soient pas malades. Personne ne souhaite avoir des collaborateurs malades ! Franchement, on a ici une vision de l'entrepreneuriat complètement décalée: peut-être qu'il n'y a pas grand monde qui travaille dans le secteur privé - ou qui travaille tout court - à Ensemble à Gauche ? Ou peut-être sont-ils à la retraite ? Je ne sais pas, mais il me semble qu'il y a un décalage patent !

Ensuite, sur la responsabilité des entreprises, j'appellerai le bras armé des syndicats à aussi faire la part des choses et à ne pas inciter le personnel de la fonction publique à participer à la grève dans des mouvements syndicaux lorsqu'il y a des conditions sanitaires drastiques. Vous nous donnez des leçons sur ce que nous devons faire dans les entreprises et vous incitez les syndicats et les membres de la fonction publique à faire la grève dans ces conditions sanitaires et alors que les mesures ne sont pas suivies par le parlement: c'est un petit peu fort de café !

S'agissant du paiement des RHT à 100%, il s'agit de contrats de droit privé, les charges sociales sont payées à 100% par les employeurs et je crois que ce n'est pas au Conseil d'Etat de s'immiscer dans les relations de travail relevant du droit privé ! Je vous invite évidemment à refuser cette proposition de motion qui ne mérite même pas un retour en commission ! (Applaudissements.)

Présidence de M. François Lefort, président

M. Christo Ivanov (UDC). Monsieur le président, mon préopinant Serge Hiltpold, entrepreneur comme moi, sait que les charges sociales sur les RHT sont payées à 100%. Les employeurs, ces vilains, ces épouvantables qui exploitent les pauvres travailleurs, sont quand même la charrue à chien ! Ils paient toujours les charges.

J'aimerais revenir sur les quatrième et cinquième invites. Avec la quatrième, vous proposez que les RHT qui sont aujourd'hui à 80% soient payées à 100%. La cinquième invite demande, elle, d'interdire les licenciements au sein des entreprises bénéficiant d'une aide financière de l'Etat. Or, nous sommes là dans des contrats de droit privé et vous voulez vous ingérer dans la sphère privée. J'aimerais quand même vous rappeler qu'avec le vote du salaire minimum de 23 francs, que je donne d'ailleurs dans mon entreprise, vous avez tué le partenariat social, je suis très bien placé pour le voir. Vous avez octroyé non seulement une hausse de salaire et une semaine de vacances en plus, mais demain, l'employeur qui doit choisir entre un employé sans formation d'ici et un employé qualifié venant de l'autre côté de la frontière va y réfléchir à deux fois avant d'engager quelqu'un, et ce n'est pas dit qu'il engage un chômeur ou un employé vivant dans le canton de Genève.

Vous l'aurez compris, le groupe UDC va évidemment refuser cette proposition de motion qui frise l'inconscience et l'irresponsabilité.

M. Sébastien Desfayes (PDC). Monsieur le président, le PDC refusera cette proposition de motion. Effectivement, le parti démocrate-chrétien partage le souci d'avoir des dépistages efficaces et des tests rapides, mais il considère que cela ne doit pas être le prétexte à l'ouverture d'une nouvelle lutte des classes. Effectivement, on préfère le partenariat social ! On préfère l'union sacrée entre les entreprises et les employés plutôt qu'une lutte absolument stérile. Au demeurant, certaines de ces invites ont déjà été refusées la semaine dernière. Il n'y a donc pour nous pas de raisons d'y revenir et le PDC s'opposera à cette proposition de motion.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Monsieur le président, je ne reviendrai pas sur la position affichée par la majorité des membres de la commission de l'économie, qui s'est prononcée à plusieurs reprises sur le problème des licenciements et la difficulté de les éviter ou de les mettre en oeuvre. J'insiste, par ailleurs, sur le fait que de nombreuses entreprises se sont mises au télétravail; le problème d'une contamination se pose donc moins dans ce cadre-là.

En revanche, c'est vrai, ce risque existe dans les établissements comme les HUG, l'IMAD ou les EMS, institutions dans lesquelles le service du médecin cantonal et l'OCIRT font des visites régulières afin de contrôler les plans de protection. Ces visites servent aussi à prodiguer un appui psychologique ou matériel pour mettre en garde les gens et rappeler les gestes barrière et les mesures de précaution à prendre. Je tiens à saluer ici le travail effectué par ces services de l'Etat. Il vaut d'ailleurs mieux procéder de cette façon-là que de déposer des préavis de grève dans les EMS alors que ceux-ci doivent faire appel à la protection civile et à des bénévoles pour compenser l'absence de collaborateurs touchés par le coronavirus ou susceptibles de l'être. A cet égard, je préciserai que j'accompagne volontiers notre collègue M. Burgermeister au sein de la cellule covid cantonale pour une visite afin qu'il voie quels sont les moyens mis en oeuvre pour préserver l'ensemble des employés de notre canton.

M. Jean Burgermeister (EAG). Monsieur le président, j'accepterai évidemment avec plaisir l'invitation de M. le député Guinchard, mais la simple idée que le virus ne circule pas au sein des entreprises est d'une naïveté sidérante ! Bien sûr qu'il y a des entreprises qui sont en télétravail, mais vous êtes quand même conscients que les chantiers, par exemple, ne fonctionnent pas en télétravail ? Et que les ouvriers font leurs pauses dans de tout petits cabanons ! Y a-t-il suffisamment de cabanons pour assurer les distances de sécurité au sein des chantiers ? Est-ce que quelqu'un peut l'affirmer ? Est-ce que quelqu'un est allé le vérifier ou est-ce qu'on va demander à tous les ouvriers de prendre leur pause dehors pendant tout l'hiver ? Mesdames et Messieurs, ce sont des considérations élémentaires pour éviter une troisième vague.

Pour répondre par ailleurs à M. Serge Hiltpold qui disait que ce n'est pas bien grave et que la question du traçage est déjà réglée puisqu'on a voté des postes, peut-être est-ce lui qui n'a pas bien suivi à la commission des finances ! Il faut lire en entier le document qui nous a été présenté en commission: il y est écrit qu'un traçage complet, efficace et méticuleux n'est en l'état possible qu'avec moins de cent cas positifs par jour. Mesdames et Messieurs, nous sommes en train d'assouplir les mesures sanitaires alors que nous sommes à plus de cent cas positifs par jour ! Nous ne sommes donc pas en mesure aujourd'hui de faire un traçage consistant et suffisant ! A mon avis, c'est de nouveau une urgence indéniable.

Ensuite, il m'a été rétorqué que les employeurs étaient déjà bien bons d'assumer les charges sociales des salariés dans le cadre des RHT. Mais ce n'est même plus vrai puisque dorénavant c'est l'Etat qui assume ces charges: on a voté un projet de loi en ce sens la semaine dernière ! Par contre, je vous rappelle qu'Ensemble à Gauche a déposé un amendement pour demander que les cotisations sociales des employés aussi soient prises en charge par l'Etat, et là, ça a été refusé ! Alors ne m'accusez pas de monter les uns contre les autres: c'est ce parlement qui a décidé de tourner le dos aux salariés, y compris pour les protéger contre le virus ! (Applaudissements.)

Le président. Merci. Monsieur Pablo Cruchon, votre collègue a consommé tout le temps disponible pour Ensemble à Gauche, vous n'avez donc pas la parole. Monsieur Hiltpold, vous n'avez plus de temps de parole non plus. La parole est à M. le conseiller d'Etat Mauro Poggia.

M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat vous demande de rejeter cette proposition de motion sur l'issue de laquelle les signataires ne se font apparemment aucune illusion, le but de ce texte étant de permettre au premier signataire de se présenter comme le seul défenseur des travailleuses et des travailleurs dans ce parlement.

Venons-en à ces invites, Mesdames et Messieurs les députés. «Renforcer massivement les cellules de dépistage»: Genève a la cellule de dépistage la plus importante de Suisse, et de loin ! Nous avons les forces nécessaires pour répondre aux besoins, et je vous en remercie, puisque les crédits ont été systématiquement acceptés par votre parlement, sans aucune retenue, dans l'intérêt de la santé de la population genevoise.

«Mettre en place une réelle politique de défense des salarié-e-s»: certes, mais de quelle manière ? En aménageant les horaires et les lieux de travail: appartient-il au Conseil d'Etat d'aménager les lieux de travail, Mesdames et Messieurs les députés ? Manifestement, les rédacteurs de cette proposition de motion n'ont pas une idée claire de ce qui se passe sur le terrain ni de ce que sont les compétences respectives de l'Etat et des entreprises. Par contre, lorsque l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail intervient dans un lieu signalé comme problématique, il fait des remarques et impose les modifications nécessaires à la protection des travailleurs. Et cela se fait déjà aujourd'hui: il n'y a pas besoin de motion pour que les offices de l'Etat accomplissent les tâches qui leur sont confiées par le droit fédéral, en l'occurrence la loi sur le travail !

Ensuite, on nous demande de «garantir un véritable» - l'adjectif est important - «partage d'informations entre le médecin cantonal et l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail». Cela sous-entendrait qu'il y a un partage d'informations, mais qu'il n'est pas véritable. Or, je peux vous assurer que tant le médecin cantonal que l'OCIRT ont connaissance de situations problématiques en lien avec la covid-19. Evidemment, les services travaillent ensemble dans l'intérêt de la santé des personnes sur les lieux de travail et, au-delà, dans l'intérêt de l'ensemble de la population.

«Garantir le revenu des salarié-e-s en les indemnisant à hauteur de 100% de leurs salaires»: cela veut simplement dire - faut-il le chiffrer ? - que l'Etat doit verser le 20% manquant, le cas échéant, parce qu'on sait que certains employeurs versent déjà le 100% du salaire bien que recevant 80% de la part de la réduction des horaires de travail. Le cas échéant, cela inciterait les employeurs qui paient 100% à ne payer plus que 80% pour demander la différence de 20% à l'Etat, puisque l'extrême gauche nous demande de nous substituer aux obligations des employeurs !

Ensuite, «interdire les licenciements au sein des entreprises»: même le groupe des Verts qui semble soutenir cette proposition de motion a exprimé ses doutes quant à la réalisation possible de cette invite. J'ai largement les mêmes doutes puisqu'il s'agit d'une règle de droit fédéral et je ne vois pas comment le droit de licencier pourrait être supprimé. La seule chose qui pourrait être faite, c'est de demander le remboursement des prestations financières servies par l'Etat lorsqu'il y a un licenciement. Voyez la complexité de ce type de démarche ! Parce qu'il faudrait encore démontrer que l'employeur, au moment où il a sollicité et obtenu les prestations, savait déjà qu'il n'allait pas remplir les conditions d'octroi. Bien du plaisir, si vous me passez l'expression !

Enfin, «maintenir les droits démocratiques et syndicaux fondamentaux»: cette question a été réglée. Encore une fois, aucune de ces invites n'est donc pertinente en l'état actuel, raison pour laquelle il vous est demandé de refuser cette proposition de motion.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je fais voter la prise en considération de cette proposition de motion.

Mise aux voix, la proposition de motion 2718 est rejetée par 58 non contre 30 oui et 1 abstention.

R 941
Proposition de résolution de Mmes et MM. Pierre Eckert, Léna Strasser, Jacques Blondin, Céline Zuber-Roy, Jean-Marc Guinchard, Cyril Mizrahi, Marjorie de Chastonay, Edouard Cuendet : Dissolution de la commission ad hoc instituée par la résolution 935
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 25, 26, 27 novembre, 3 et 4 décembre 2020.

Débat

Le président. Nous traitons notre urgence suivante en catégorie II, soixante minutes. Je donne la parole à son premier signataire, M. Pierre Eckert.

M. Pierre Eckert (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, oui, nous ne souhaitions pas la création d'une commission ad hoc pour toutes les raisons invoquées la semaine dernière, sur lesquelles je ne reviendrai pas ici. Oui, nous nous sommes trompés au moment du vote, pensant voter sur un autre point. Cependant, c'est arrivé à d'autres occasions et même encore très récemment quand nous avons dû repêcher à l'arrache - comme on dit - un amendement sur lequel d'autres groupes s'étaient trompés.

En tant que chef de groupe, je reconnais ma responsabilité d'avoir entraîné tout mon groupe sur le mauvais chemin et je m'en excuse platement devant vous. Je n'irai toutefois pas plus loin en disparaissant sous l'épaisse moquette de cette salle, ni en m'infligeant une séance d'autoflagellation à l'aide de la discipline - vous regarderez sur Wikipédia ce qu'est la discipline. Je vous propose ainsi de revenir à l'intention initiale et de ne pas créer de commission ad hoc covid, en acceptant le présent texte.

Le président. Merci, Monsieur l'auteur. Juste une précision: le choix est de voter la proposition de résolution ou de vous soumettre à la discipline ? (Exclamations.) Parce que ça pourrait être tentant pour beaucoup de gens... Bon, cela étant dit, je passe la parole à M. le député Pierre Vanek.

M. Pierre Vanek (EAG). Monsieur le président, j'ai pris note que nous avons un débat de soixante minutes et qu'il y aura huit intervenants, ce qui me donne sept minutes et demie de temps de parole ! C'est une régression par rapport à la première annonce du Bureau qui disait qu'il s'agirait d'un débat libre ! Vous me direz qu'il n'y a pas lieu de débattre; eh bien si, Mesdames et Messieurs les députés, il y a lieu de débattre !

D'abord pour dire que tout peut bien sûr être pardonné: j'ai eu une éducation chrétienne et je pardonne volontiers à Pierre Eckert et à ceux qui se sont trompés dans ce vote. Mais, quand même, c'est grave que ce parlement soit saisi d'un texte disant qu'il «apparaît qu'un nombre important de député-e-s s'est trompé lors du vote, pensant voter sur un autre objet» ! Or, l'objet en question traite de la manière dont ce parlement interagit avec le Conseil d'Etat, comment il contrôle ou non et appuie ou non le Conseil d'Etat dans sa gestion de la crise covid et dans son maniement des pouvoirs d'urgence que lui confie l'article 113 de la constitution genevoise.

Cette question est importante: que des députés se soient massivement trompés est inquiétant quant à l'attention qu'ils prêtent à ce sujet ! Je pardonne volontiers, mais disons qu'il aurait fallu suivre la proposition raisonnable du député raisonnable qui vous parle à l'instant: ce texte du MCG comporte beaucoup de défauts, certes, mais pose une bonne question politique et il faut le renvoyer en commission. J'avais proposé la commission législative, pour y réfléchir aux tenants et aboutissants de ce contrôle parlementaire sur le Conseil d'Etat. Certes, on a agité l'épouvantail du renvoi hypothétique de tous les objets parlementaires concernant de près ou de loin le covid dans cette commission ad hoc qu'entraînerait le vote de ce texte. C'est rédigé de manière maladroite et certains ont pu comprendre ça de cette façon, mais enfin, il faut ignorer complètement la LRGC pour penser qu'une résolution puisse avoir un effet dérogatoire aux dispositions de la LRGC et à la souveraineté de ce parlement ! Celui-ci renverra toujours chaque objet dans les commissions de son choix. Cette question-là n'est pas un problème avec cette commission et cette proposition de résolution: c'est un faux problème, mais ça, on aurait pu l'expliquer en commission et c'est idiot que je doive le faire ici, en plénière !

Maintenant, pourquoi est-ce qu'il faut une commission ad hoc, qui est une bonne idée, formulée dans le texte de Patrick Dimier ? Parce que la commission législative court derrière le Conseil d'Etat ! C'est dramatique ! Nous avons eu l'autre vendredi une conférence avec les hauts responsables de la santé - je remercie encore une fois M. Poggia de l'avoir organisée - à l'issue de laquelle la commission législative s'est réunie pour parler de l'arrêté du Conseil d'Etat du 1er novembre. Nous y avons fait un travail constructif et ciselé; c'est Cyril Mizrahi qui a été le ciseleur en chef et qui a ciselé une proposition nuancée de compromis sur la réouverture, disant qu'il fallait réexaminer l'obligation de fermeture de l'ensemble des commerces genevois. Une réglementation différenciée devait tenir compte aussi des indicateurs objectifs de l'évolution de la situation pandémique - ça, c'est moi qui l'ai rajouté - pour autant que ces commerces respectent un plan de protection adéquat. Or, nous avons été saisis en plénum d'une proposition de résolution défendue par Mme Zuber-Roy sur cette question, contenant cette invite, mais c'était l'après-midi ou le soir du jour où le Conseil d'Etat avait décidé sans aucune de ces nuances une réouverture des commerces !

Cédant à la pression que l'on sait - qui a été considérable -, cédant à l'inquiétude légitime de certains secteurs commerciaux, mais en commentant dans la «Tribune de Genève» cette décision du Conseil d'Etat, le conseiller d'Etat Mauro Poggia a eu un cri du coeur en disant que c'était la victoire de l'optimisme sur l'expérience. Après, il s'est rattrapé en disant que c'était un peu fort, etc. Parce que c'est un homme habile et qu'il sait que tout ne doit pas se dire spontanément ! Mais, quand même, c'est la victoire d'un optimiste ! L'optimiste en chef en matière de covid, vous savez qui c'est: il est aux Etats-Unis et il est encore à la Maison Blanche ! Eh bien, ça n'a pas réussi au peuple états-unien, l'optimisme au mépris de l'expérience ! Ici, c'est au mépris des avis des spécialistes, de la médecin cantonale et du directeur de la santé ! La commission se demandait comment on peut avoir, de ce point de vue là, une certaine prégnance sur les déclarations et les actes du gouvernement.

Bien sûr, Patrick Dimier et le MCG n'ont pas tout fait juste, mais on pourra en discuter autour de la table, à la commission législative où je vous demande encore une fois de renvoyer ce texte. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) On pourra discuter de l'articulation de cette commission ad hoc avec la commission législative qui a une fonction un peu spécifique, qui court derrière le Conseil d'Etat, de l'articulation avec la commission de contrôle de gestion. Une future commission d'enquête parlementaire ne manquerait pas de faire un bilan de ces articulations et ces choses-là ne doivent pas se discuter en plénum, bien sûr, elles doivent se discuter en commission.

Le président. Merci !

M. Pierre Vanek. Merci, Monsieur le président, je termine. Un grand nombre de députés a voté sans savoir et, pour pénitence d'avoir voté un texte auquel vous n'avez pas compris grand-chose, je vous invite vraiment à renvoyer cet objet en commission.

Le président. C'est vraiment terminé, Monsieur le député !

M. Pierre Vanek. Si, après examen, vous entendez toujours aller dans ce sens, vous irez dans ce sens ! (Commentaires.)

Le président. La parole est maintenant à M. le député Pierre Eckert, parce que nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission législative. Monsieur l'auteur, est-ce que vous pouvez vous prononcer sur cette demande ?

M. Pierre Eckert (Ve). Monsieur le président, tous les arguments qui plaidaient contre la création de cette commission ad hoc ont été rapportés: je vous laisserai lire le Mémorial de la semaine dernière. Je pense qu'un renvoi à la commission législative n'est pas utile !

Le président. Merci. Je ferai voter cette demande de renvoi en commission à la fin des débats. La parole est maintenant à M. le député Jean-Marc Guinchard.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Merci, Monsieur le président. C'est vrai, nous nous sommes trompés: tout le monde dans cette salle savait que le parti socialiste, les Verts, le PLR et le PDC étaient opposés à la création de cette commission spéciale covid-19 ! L'erreur est humaine, persévérer serait diabolique, alors ne le soyons pas ! Essayons de changer avec les moyens du bord - si je puis dire - puisque nous n'avons pas la possibilité de le faire comme cela existe au Parlement fédéral où il est systématiquement possible de revenir sur un vote si, manifestement, un nombre important de députés s'est trompé.

Il s'agit pour nous de maintenir les rôles spécifiques des diverses commissions qui s'occupent à l'heure actuelle des problèmes liés au covid, en particulier la commission de la santé. En outre, cela a été rappelé à juste titre, la commission législative travaille sur cet objet depuis le mois de mars - depuis le début de cette crise et du confinement que nous avons connu.

La concentration de tous ces aspects dans les mains d'une seule commission impliquerait pour les membres de cette commission nouvellement créée un réapprentissage de tout ce qui a été fait jusqu'à présent de sorte qu'ils soient bien au fait du problème. Pour siéger à la commission législative, je vous garantis que nous avons fait un gros travail à cet égard et que ça n'a pas été facile pour nous au début, puisque les modalités d'application de l'article 113 en situation extraordinaire étaient particulièrement difficiles à interpréter, mais c'est un travail que nous avons fait et que nous avons d'ailleurs présenté à plusieurs reprises.

M. Vanek, que je remercie pour sa magnanimité vis-à-vis de l'erreur que nous avons commise, oublie - peut-être le fait-il sciemment - que nous avons voté lors de notre dernière session la motion 2719 qui prévoit d'envoyer pour examen tous les arrêtés du Conseil d'Etat - qu'ils soient pris en situation extraordinaire ou en situation particulière - à la seule commission législative.

Pour ces raisons, le groupe démocrate-chrétien, d'une part, s'opposera au renvoi à la commission législative proposé par le groupe Ensemble à Gauche et, d'autre part, vous incite - cette fois sans erreur - à accepter cette résolution.

M. Patrick Dimier (MCG). Monsieur le président, il faut le dire, cette proposition de résolution est celle des mauvais perdants et elle ne grandit certainement pas ses auteurs ! Notre parlement a décidé, à la majorité, de créer une commission ad hoc chargée de traiter des objets covid - des objets covid ! Pour mémoire, rappelons-nous qu'en deux jours, nous avons voté plusieurs dizaines de millions de francs pour permettre à notre république de tenter d'éviter les naufrages tant d'institutions que de citoyens.

Cette commission ad hoc sera le capitaine de la gestion des effets du covid, selon les règles de la LRGC bien entendu, comme cela a été pertinemment rappelé par notre collègue Pierre Vanek, docteur ès LRGC. Cela permettra certainement d'assurer un lien positif, constructif et utile avec l'exécutif. L'examen par la commission législative vient a posteriori, l'idée ici est d'anticiper.

Revenir sur un vote qui ne convient pas en prétendant qu'on s'est trompé de bouton frise l'indigence politique mais constitue surtout un acte de totale mauvaise foi de la part de cette nouvelle majorité, évidemment différente de celle d'avant, ce qui lui donne ce caractère opportuniste si souvent décrié par nos adversaires les plus récurrents. Cette position me rappelle Aristide Briand qui disait: «Ne demandez pas aux politiciens de résoudre vos problèmes, ce sont eux qui vous les causent !» Rejetons cette proposition de résolution qui pardonne les errements politiques !

Le président. Merci, Monsieur le député. Vos mots sont durs, parce qu'en fait, c'est un texte qui demande pardon: normalement, on devrait être enclin à le voter. Je passe la parole à Mme la députée Françoise Sapin pour quatre minutes.

Mme Françoise Sapin (MCG). Merci, Monsieur le président. Le MCG est très surpris par ces réactions après le vote de la résolution 935 la semaine passée. Nous n'osons imaginer le pataquès dans cet hémicycle s'il s'était agi du MCG qui s'était trompé dans un vote et qui demandait son annulation aux autres partis !

Pour revenir à la résolution 935, le Grand Conseil a voté des dizaines et des dizaines de millions pour les projets covid. A notre avis, il est irresponsable de ne pas centraliser la gestion de ces divers projets, ne serait-ce que pour avoir une vision d'ensemble. D'ailleurs, dans cette commission ad hoc, tous les partis seraient bien entendu représentés. Pour toutes ces raisons, nous vous demandons de ne pas accepter la proposition de résolution 941.

Mme Céline Zuber-Roy (PLR). Monsieur le président, le groupe PLR est opposé - déjà depuis la semaine passée - à la création de cette commission: nous avons voté contre et nous continuons à être contre pour les raisons précédemment expliquées. Nous pensons que la pénitence a assez duré et qu'on pourrait maintenant peut-être voter sur ce texte ! (Applaudissements.)

M. Pierre Eckert (Ve). Monsieur le président, j'aimerais juste rappeler à M. Dimier, qui est certainement un fin juriste, qu'il existe aussi dans le droit un principe de bonne foi. Dans le débat initial, nous avons tous défendu le fait qu'il ne fallait pas constituer cette commission ad hoc et ce n'était pas du tout de mauvaise foi que nous avons voté la résolution: c'était réellement une erreur et je ne pense pas qu'on peut nous reprocher ça !

Le président. Merci, Monsieur le député pénitent. La parole n'étant plus sollicitée, je fais voter la demande de renvoi en commission formulée par le député Vanek.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 941 à la commission législative est rejeté par 71 non contre 19 oui.

Mise aux voix, la résolution 941 est adoptée par 68 oui contre 20 non et 3 abstentions.

Résolution 941

PL 12804-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Stéphane Florey, Patrick Hulliger, Eliane Michaud Ansermet, Patrick Lussi, André Pfeffer, Virna Conti, Eric Leyvraz autorisant l'ouverture de certains commerces et services en cas d'état de nécessité déclaré ou de pandémie
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 25, 26, 27 novembre, 3 et 4 décembre 2020.
Rapport de majorité de Mme Jocelyne Haller (EAG)
Rapport de minorité de M. André Pfeffer (UDC)

Premier débat

Le président. L'urgence que nous traitons maintenant est classée en catégorie II, quarante minutes. (Commentaires.) Ceux qui s'expriment de façon véhémente, là-haut, appuyez sur le bouton et peut-être que je considérerai vos demandes de parole ! Je cède le micro à Mme la rapporteure de majorité.

Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, annuler des dispositions de l'arrêté du Conseil d'Etat du 1er novembre, telle est - telle était ! - en substance la vocation du projet de loi 12804, c'est-à-dire prendre le contre-pied de l'article 11, alinéa 1, de l'arrêté du Conseil d'Etat du 1er novembre 2020 décrétant la fermeture pour des raisons sanitaires de toute une série d'établissements, notamment les commerces, les bars, cafés, restaurants, lieux de loisirs, etc.

Ce faisant, les auteurs de ce texte se sont fait l'écho des inquiétudes des petits commerçants et autres petits entrepreneurs qui ont dû, pour la seconde fois en une année, stopper leur activité professionnelle et subir un manque à gagner important. Ils ont notamment souligné la mise en danger de l'activité économique de ces derniers et l'impact des incidences de ces mesures sanitaires sur le sort de leurs employés. Ils évoquent encore dans le texte l'absence d'uniformité au niveau intercantonal des mesures sanitaires ou des décisions fédérales qui ont conduit les consommateurs genevois à aller faire leurs courses dans les commerces vaudois; les entreprises ne répondant pas au critère de première nécessité rongeaient leur frein et voyaient leurs clients potentiels transhumer vers les magasins vaudois qui étaient autorisés à rester ouverts.

Lorsque ce texte a été traité en commission, le Conseil d'Etat avait déjà décrété la réouverture d'une partie de ces établissements et il avait, à cette occasion, introduit une extension des horaires d'ouverture des magasins le samedi jusqu'à 20h. Il restait donc à déterminer si l'ouverture des commerces et des secteurs d'activité figurant dans ce texte devait primer sur les mesures sanitaires, ou, plus prosaïquement, si le Conseil d'Etat pouvait prendre des mesures sanitaires affectant l'activité économique de ces secteurs.

Ne pas sacrifier la santé publique sur l'autel de l'économie: c'est le parti qu'a clairement pris la majorité de la commission, qui a tout aussi largement exprimé sa volonté de voir la logique sanitaire prévaloir sur celle de l'économie. L'examen de ce projet de loi aurait pu se conclure sur ce constat, si un député PLR n'avait pas déposé des amendements qui ont fait prendre un tout autre cours aux travaux de la commission. Si les commissaires pensent que la santé publique ne doit pas être inféodée à la logique économique, cela n'a pas empêché certains députés de profiter d'une crise sanitaire pour tenter de gagner du terrain sur le champ des luttes sociales.

Les amendements en question consistaient à soumettre l'activité des commerces à «la mise en place et au contrôle systématiques des mesures de protection sanitaire» - mais ça, c'était l'emballage ! Surtout, sous ce couvert, ils proposaient une extension des horaires d'ouverture des commerces tous les jours du lundi au samedi jusqu'à 20h, ce qui a évidemment donné une autre tournure aux débats de la commission ! En substance, puisque des auditions ont eu lieu, les représentants des diverses associations patronales ont indiqué qu'ils n'étaient pas favorables à la fermeture des commerces; ils estimaient que les mesures sanitaires étaient suffisantes pour parer aux risques de contamination et que les magasins n'étaient pas plus exposés que d'autres lieux. Ils ajoutaient qu'ils n'étaient pas demandeurs d'une ouverture des magasins tous les jours jusqu'à 20h, mais qu'en revanche, ils appréciaient la possibilité de retarder la fermeture du samedi, se satisfaisant d'une fermeture à 19h ou 19h30 ce jour-là.

Le président. Vous parlez sur le temps de votre groupe.

Mme Jocelyne Haller. Merci. Quant aux représentants syndicaux, ils ont clairement indiqué qu'ils étaient opposés à ce projet de loi qui représente selon eux un risque pour la santé publique et ils s'étonnaient que d'aucuns considèrent que la fermeture des magasins puisse n'avoir aucun impact sur la courbe covid. Quant à l'extension des horaires d'ouverture, puisqu'il s'agit d'elle, la CGAS s'y opposait car cela constitue une dégradation sensible des conditions de travail du personnel pour des motifs qui ne relèvent pas du domaine sanitaire mais d'une volonté économique. Ces représentants rappelaient d'ailleurs que tous les commerces n'avaient pas été touchés, notamment les commerces alimentaires qui s'en étaient plutôt bien sortis, et ils concluaient en disant que si le but recherché à travers l'extension de l'ouverture des magasins est l'augmentation du chiffre d'affaires des entreprises, il fallait plutôt agir sur le pouvoir d'achat des salariés pour obtenir effectivement ce résultat.

Quant à M. Poggia, il a énoncé son opposition à ce projet de loi, déclarant que quoi qu'on pense des mesures prises par le Conseil d'Etat et de leurs conséquences économiques, il n'en demeurait pas moins que ces mesures avaient porté un certain nombre de fruits. Il rappelait aussi - ou il annonçait - sa décision d'étendre l'horaire d'ouverture du samedi, comme un test qu'il se proposait éventuellement de pérenniser, en disant que ses services travaillent déjà sur un projet de loi pour ouvrir tous les samedis jusqu'à 19h.

Finalement, la commission a refusé l'entrée en matière sur ce texte. Dès lors, les amendements PLR perdaient toute opportunité. C'est ainsi que la majorité de la commission de l'économie vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser aussi l'entrée en matière sur le PL 12804.

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de minorité. Monsieur le président, la lutte contre le fléau qu'est le covid-19 est évidemment une priorité. Cependant, le canton de Genève doit cibler sa lutte contre le virus sans pour autant mettre à l'arrêt des pans entiers de son économie en ordonnant la fermeture des petits commerces. Surtout, les commerces dits non essentiels appliquaient déjà un protocole sanitaire strict; en plus, l'attractivité de ces petits commerces est également très limitée et s'il fallait réduire les interactions sociales et la fréquentation des lieux publics, il aurait été beaucoup plus utile de diminuer la foule dans les transports publics, les supermarchés, etc.

Lorsque ce projet de loi a été rédigé, le Conseil d'Etat venait de fermer les commerces. L'objectif initial de ce texte était de demander la réouverture immédiate lors d'une session extraordinaire. Aujourd'hui, un mois plus tard, les commerces ont déjà ouvert et les restaurants devraient suivre dans une semaine, mais le problème reste entier: à l'avenir, en cas de fermeture et d'interdiction de travail pour des commerçants et des entreprises, il est impératif d'évaluer non seulement les bénéfices d'une telle sanction, mais aussi les dégâts qu'elle inflige et il faut étudier des alternatives. Les amendements avaient été déposés dans ce but. En cas d'entrée en matière, le groupe vous propose d'accepter les amendements.

M. Jacques Béné (PLR). Monsieur le président, c'était un peu compliqué, le traitement de ce projet de loi en commission ! On a toujours peine à comprendre les décisions du Conseil d'Etat: on ne sait toujours pas exactement sur qui et sur quels éléments il s'appuie pour prendre ses décisions, même en suivant ses points presse et en lisant les journaux. On aurait souhaité ne pas aller aussi loin que ce que prévoit le projet de loi. Pour le PLR, ça va trop loin parce que ça enlève toute liberté de manoeuvre au Conseil d'Etat, mais on souhaiterait entendre celui-ci se baser sur des discussions et des consensus avec les secteurs d'activités concernés.

On a encore vu lors du point presse de mercredi la fronde des cafetiers et restaurateurs contre l'éventuelle non-réouverture le 10 décembre prochain, non-réouverture ou ouverture assurée qui serait décidée mercredi seulement par le Conseil d'Etat. Ce sont quand même des aberrations et je ne conçois pas qu'on dise à un commerce le mercredi à 18h ou à 15h: «Vous pouvez rouvrir demain matin, vous pouvez faire vos commandes, vous pouvez rappeler vos employés !» Je trouve ça un peu aberrant et visiblement je ne suis pas le seul, à en croire ce qui se dit sur les réseaux sociaux ! Ce que les cafetiers et restaurateurs ont l'air de dire, si j'ai bien compris, c'est qu'il n'y a pas vraiment eu de concertation quant à cette réouverture.

En ce sens, le PLR soutiendra ce texte. On a bien compris que ce parlement n'entrerait pas en matière sur ce projet de loi, mais nous le soutiendrons quand même pour faire prendre conscience au Conseil d'Etat qu'il faut s'assurer l'aide et le soutien des milieux économiques concernés pour toutes les mesures prises dans cette crise sanitaire. Notre sentiment aujourd'hui est que ça ne se fait pas assez !

M. Romain de Sainte Marie (S). Monsieur le président, vous transmettrez à M. Béné le témoignage du représentant du Trade Club, c'est-à-dire le représentant des milieux patronaux pour les commerçants. Celui-ci était en effet peu favorable à une telle extension, alignée ou nivelée vers le haut, si on peut dire, avec une ouverture jusqu'à 20h tous les jours, y compris le samedi. D'une part, l'expérience de la nocturne instaurée comme test par le Conseil d'Etat samedi passé a montré que l'affluence dans les magasins diminuait de façon considérable dès 19h ou 19h30. C'est encore tôt pour en tirer des conclusions, mais on le voit aussi avec l'impact de la nocturne du jeudi, plus habituelle: très peu de commerces restent ouverts jusqu'à 21h30. Il faut aussi rappeler que ce dernier mois de l'année connaît déjà deux dimanches d'ouverture pour les magasins, les 13 et 20 décembre, si je ne me trompe pas, avec, en plus, une nocturne exceptionnelle ainsi que l'ouverture du 31 décembre.

Je ne reviens même pas sur le projet de loi de base qui est caduc puisque les commerces ont rouvert, mais si on veut aller dans le sens de la logique des amendements proposés par le PLR pour l'extension des horaires d'ouverture des magasins, les mesures extrêmement larges pour le mois de décembre vont déjà permettre à ces commerces d'ouvrir davantage. Ce serait donc rouvrir plus que la boîte de Pandore en abordant le sujet véritablement sensible pour les partenaires sociaux que sont les horaires d'ouverture des magasins: chaque vote du parlement a généré des référendums et donc des votations populaires ! Ça ne sert à rien d'aller trop loin avec ce sujet. Nous en avions déjà débattu la semaine passée, mais si nous devions à nouveau ouvrir cette boîte de Pandore, cela mènerait de nouveau à une votation sur le sujet et cela ne serait absolument pas constructif dans la situation que nous connaissons aujourd'hui.

La rapporteure de majorité a extrêmement bien précisé que l'extension des heures d'ouverture des magasins est un trompe-l'oeil en matière de bénéfices pour les entreprises. Le véritable enjeu aujourd'hui, la concurrence avec la France voisine, se joue sur la question du prix des biens. Et qui veut parler du prix des biens doit parler du pouvoir d'achat, qui est malheureusement l'enjeu primordial avec la crise que nous connaissons. Ce sont les raisons pour lesquelles le parti socialiste refusera, comme en commission, d'entrer en matière sur ce projet de loi.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Monsieur le président, M. Béné l'a rappelé, les travaux en commission ont été particulièrement compliqués et longs, d'autant plus que le projet de loi initial a été passablement vidé de sa substance par les amendements déposés par le parti libéral-radical en fin de compte. M. de Sainte Marie a tout à l'heure fait référence aux commerçants représentés par le Trade Club, organisation patronale. J'ai aussi été impressionné par le représentant des petites entreprises, notamment les commerces familiaux, le secrétaire général de la NODE. Celui-ci nous a évidemment déclaré que pour lui, l'idéal était de ne pas fermer, parce que la fermeture est catastrophique à cause de la perte de clientèle ainsi que pour la gestion des stocks et des commandes dès le moment où les autorisations d'ouvrir sont de nouveau accordées. Il a précisé en outre que pour eux, l'ouverture prolongée jusqu'à 20h n'était pas si intéressante que ça. Il me semble que pour les trois organisations de commerçants que nous avons auditionnées, cette ouverture prolongée jusqu'à 20h n'était pas une absolue nécessité, dans la mesure où la tranche 19h-20h était qualifiée par ces représentants de tranche creuse.

Ce qui préoccupait plus ces associations, c'était le problème de la compréhension de la légitimité des mesures, les commerces vaudois étant ouverts quand ceux de Genève étaient fermés alors que la situation sanitaire n'était pas tellement différente d'un canton à l'autre - quoiqu'on ait remarqué une baisse des infections plus rapide dans le canton de Genève que dans le canton de Vaud. C'est vrai, mais cette compréhension était difficile, notamment parce que les commerces de France voisine allaient rouvrir le même samedi passé. Heureusement, nos commerces ont pu rouvrir à ce moment-là !

J'ajouterai que de nombreuses mesures de facilité ou d'assouplissement des horaires actuels sont aussi de la compétence du Conseil d'Etat, qui en a usé lors de l'ouverture jusqu'à 20h de samedi passé. Dans cet esprit-là, le groupe démocrate-chrétien vous recommande également la non-entrée en matière sur ce projet de loi.

M. Stéphane Florey (UDC). Monsieur le président, je trouve les déclarations de la majorité consternantes et de mauvaise foi quand vous avez des associations patronales qui vous disent d'entrée de jeu qu'elles sont favorables aux mesures proposées ! Il n'était effectivement pas normal d'avoir fermé tous les commerces alors que ceux des autres cantons restaient ouverts. A l'exception de la NODE qui représente vraiment les tout petits commerçants qui devraient se réorganiser de manière totalement différente en cas d'ouverture prolongée, la grande majorité des commerces y est favorable. C'est ça qui est dit dans le rapport. Ils y sont favorables pour plusieurs raisons, notamment pour éviter ces longues files d'attente qu'on voit actuellement devant les magasins. Parce qu'en reculant de deux heures la fermeture - d'une heure en semaine et de deux heures le samedi -, vous allez inévitablement répartir la clientèle sur une plage horaire plus grande. Cela facilitera la vie tant des commerçants que des clients !

Globalement, les organisations patronales et les commerçants ont toujours souhaité obtenir une extension régulière des horaires sur la semaine, du lundi au samedi, reconnaissant que la nocturne de jeudi n'a jamais véritablement fonctionné. Pour quelle raison ? Une raison toute simple: quand vous avez un seul jour avec la possibilité d'ouvrir jusqu'à 21h ou 21h30, vous n'arrivez pas à fidéliser la clientèle, inévitablement. Déjà, vous n'allez pas forcément tous les jeudis soirs faire vos courses à 20h ou 20h30. Vous pouvez bien vous dire qu'il vous manque quelque chose, mais vous ne pensez pas forcément qu'on est jeudi pour vite aller acheter ça à la Coop du coin. Non, ce n'est pas comme ça que ça marche ! Finalement, quand il n'y a pas de fidélisation des clients, ça ne fonctionne effectivement pas bien ! Là-dessus, les commerçants ont dit qu'ils étaient même prêts à renier cette nocturne-là au profit d'une ouverture régulière plus grande.

Je remercie en tout cas le PLR pour les solutions proposées et pour son amendement qui avait notre soutien. Encore une chose que je n'ai pas l'habitude de faire, je demande le vote nominal pour cet objet: depuis 2007, j'ai dû le demander une fois, mais ce sera la deuxième fois aujourd'hui ! Contrairement à ce qui s'est dit sur les réseaux sociaux, on pourra comme ça démontrer qui soutient véritablement l'économie genevoise et nos commerces. Quand j'entends M. Romain de Sainte Marie dire que ce n'est pas une bonne solution et qu'il mentionne que les commerces de France voisine sont, eux, ouverts, il invite indirectement à favoriser le tourisme d'achats ! Ça, à un moment, il faudra s'en souvenir et il faudra le dire franchement à nos associations ! Comme ça, nous pourrons voir qui défend véritablement le commerce genevois ! Je demande donc le vote nominal pour tous les votes concernant ce projet de loi !

Le président. J'ai pris note que le vote nominal est demandé pour le vote d'entrée en matière sur ce projet de loi. Celles et ceux qui l'acceptent votent oui, les autres votent non... Pardon ! Je suis fatigué ! (Rires.) Etes-vous soutenu pour le vote nominal ? Non, ce n'est pas le cas ! (Commentaires.)

M. Stéphane Florey. Posez encore la question, Monsieur le président !

Le président. Bon, je repose la question: le vote nominal est demandé; êtes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Ah, ça a changé ! Vous êtes soutenu ! La demande de vote nominal est donc entérinée et je passe la parole à M. le député Jacques Béné pour une minute quarante.

M. Jacques Béné (PLR). Monsieur le président, je n'ai pas évoqué l'amendement demandant de rouvrir les commerces un peu plus tard, jusqu'à 20h, du lundi au vendredi: on a bien compris que ça ne passerait pas ! Même si la volonté des commerçants n'est pas d'avoir une ouverture généralisée jusqu'à 20h, cette ouverture aurait été bénéfique en cette période difficile, en tout cas jusqu'à Noël.

Si M. Romain de Sainte Marie évoque cette ouverture en disant que les commerces n'en veulent pas, ils la veulent par contre pour le samedi et je me réjouis des futures discussions sur l'ouverture étendue le samedi, jusqu'à 19h en tout cas. Tenez-vous bien, on a vu la CGAS faire recours contre la décision du Conseil d'Etat qui visait simplement à ouvrir six heures de plus - deux heures de plus sur trois samedis jusqu'au 19 décembre ! En faisant recours contre six heures d'ouverture, j'ai peu d'espoir que les syndicats reviennent à de meilleures intentions pour l'ouverture du samedi soir qui est, elle, très clairement demandée par les milieux commerçants !

M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, le projet de loi avait pour ambition de se substituer au Conseil d'Etat dans ses mesures sanitaires, pour décider ce qui devait être ouvert ou pas. Très certainement, si par aventure il avait été adopté, il aurait été cassé comme étant non constitutionnel. Donc, dans sa forme initiale, il doit bien entendu être refusé ! D'ailleurs, on remarque que les fermetures ordonnées ont eu un effet sanitaire bénéfique, comme on le voit maintenant. Il y a un certain nombre de réouvertures et on verra quelles sont les conséquences épidémiologiques. Il est utile que le Conseil d'Etat puisse avoir la capacité de réagir quasiment au jour le jour, en fonction de l'évolution de la situation sanitaire. C'est l'occasion de dire qu'à partir du moment où le Conseil d'Etat ordonne la fermeture d'un certain nombre de commerces, il est juste aussi que des compensations financières soient votées; c'est ce que nous allons faire dans la suite de nos travaux avec les prochaines urgences.

Je ne me prononcerai pas trop sur l'amendement écrit sur un coin de table par le PLR, qui ne traite en fait pas du tout de ce qui se passerait dans une situation de nécessité, mais plutôt de ce qui devrait se passer dans une situation suivant cet état de nécessité. Ça a été formulé de façon assez floue, avec une ouverture étendue des magasins. Donc voilà !

Pour répondre à M. Florey, on peut ergoter longtemps sur ce qui est utile ou pas, sur ce qui est nécessaire aux commerces genevois, et ça ne me dérange pas du tout qu'on ait un vote nominal sur la question. Je ne pense pas que le projet de loi initial de l'UDC soit de quelque façon utile aux commerces genevois !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je repasse la parole à Mme la députée Jocelyne Haller, rapporteure de majorité, pour une minute cinquante secondes, sur le temps de son groupe.

Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de majorité. Je vous remercie, c'est d'ailleurs au nom de mon groupe que je vais m'exprimer. Pour répondre à M. Florey, oui, les représentants des commerces ont bien dit qu'ils s'opposaient aux fermetures, mais ici, il s'agit non pas de décider de ce qu'ils ont dit et de ce qu'ils pensent, mais de ce que pense ce parlement. La majorité de la commission a dit - et, nous l'espérons, aujourd'hui aussi la majorité de la plénière - qu'il ne devait pas y avoir d'interdiction de fermeture des magasins si une fermeture s'avérait nécessaire pour des motifs sanitaires notamment. Eh bien, notre groupe affirme que la santé publique ne peut pas être sacrifiée sur l'autel de l'économie. Quant aux ouvertures des magasins, j'aimerais quand même rappeler que les différents représentants des entreprises ont très clairement affirmé qu'ils n'étaient pas demandeurs de ces ouvertures toutes les semaines; s'ils ont effectivement dit qu'ils étaient intéressés par celles du samedi, ils ont bien dit aussi qu'ils étaient prêts à renoncer aux nocturnes du jeudi parce qu'ils se rendaient compte que ces ouvertures n'étaient absolument pas probantes.

Quand même, je voudrais faire remarquer que plus on ouvre les magasins, plus on amène les gens à se côtoyer dans ces espaces: on les amène à se déplacer pour aller dans ces espaces et, finalement, on resserre les contacts et on augmente les risques de contamination. Et comme le disait hier mon collègue Jean Burgermeister, ce n'est pas forcément dans les magasins seulement qu'on augmente les risques mais aussi en s'y rendant. Par conséquent, nous vous invitons à refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi, mais aussi à bien prendre la mesure de l'opération qui a été tentée par le biais des amendements du PLR !

Le président. Merci, Madame la rapporteure de majorité. La parole est à M. le député Romain de Sainte Marie pour une minute dix.

M. Romain de Sainte Marie (S). Monsieur le président, vous transmettrez aux députés du PLR et de l'UDC que le meilleur moyen de relancer les commerces, c'est de jouer sur le pouvoir d'achat: non pas le pouvoir d'achat des plus fortunés à qui il faudrait baisser l'impôt sur la fortune, mais celui des personnes les plus précaires ou des personnes de la classe moyenne auxquelles il est nécessaire d'octroyer des aides ! Monsieur le président, vous transmettrez aussi que le meilleur moyen d'aider les commerces, c'est notamment de voter des réductions des loyers des entreprises, des commerces et des indépendants - exactement à l'inverse des votes au Conseil national par ces mêmes représentantes et représentants genevois du PLR, de l'UDC et du PDC qui ont refusé ces aides ! Vous transmettrez également à ces partis que pour encourager la relance commerciale, il faut lutter pour le pouvoir d'achat et pour une relance de celui-ci. Dans ce sens, le salaire minimum, que vous avez tant critiqué et que vous critiquez encore, permet cette relance. Plutôt que d'étendre les horaires d'ouverture des magasins, c'est le meilleur moyen d'aider les Genevoises et les Genevois qui touchent les salaires les moins élevés à consommer localement !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Jacques Blondin pour une minute et trente secondes.

M. Jacques Blondin (PDC). Monsieur le président, vous transmettrez à M. Florey qui a parlé de «mauvaise foi» que, pour ceux qui étaient présents lors de la discussion sur ce projet de loi, effectivement, il a clairement été dit par les milieux économiques que cette solution n'était pas souhaitée ! Par contre, il est vrai que ces milieux économiques aimeraient bien qu'on ouvre jusqu'à 19h tous les magasins toute la semaine, y compris le samedi, et qu'il y ait des extensions sur un certain nombre de dimanches. Toutefois, en aucun cas il n'avait été dit qu'il était utile de remettre en cause la situation actuelle pour les ouvertures nocturnes entre 19h et 20h. D'autant plus que le Conseil d'Etat - et M. Poggia est ici - a, semble-t-il, des moyens de corriger le tir à court terme dans cette période d'urgence ! C'est pour cette raison que le parti démocrate-chrétien refusera ce texte. Bien évidemment, ce n'est en aucun cas une attaque contre le commerce, qui nous l'a dit clairement: pour eux, l'important, c'est d'être ouverts !

M. Thierry Cerutti (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG n'entrera pas en matière sur ce projet de loi. Pour suivre les propos de mes préopinants, notre collègue Blondin a parfaitement expliqué la position des entrepreneurs, que ce soient des petits ou des gros commerçants. Je parle notamment des exploitants de centres commerciaux: toutes et tous ont verbalisé de manière claire qu'ils ne souhaitaient pas cette ouverture-là, que cela ne leur apportait aucune plus-value. Par contre, comme l'a bien dit notre collègue Blondin - et je me fais un plaisir de le répéter - ils sont pour un autre système. Je ne le répéterai pas, mais on est plus ou moins tous d'accord avec cela. Merci de refuser ce projet de loi !

M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat vous demande de rejeter ce projet de loi; il vous l'a dit, il vous le répète, l'ouverture prolongée le samedi, décidée par le Conseil d'Etat, est une mesure sanitaire: il n'est pas question d'utiliser la pandémie actuelle du covid pour régler certaines questions - qui méritent bien sûr d'être réglées, comme celle de la concurrence, notamment transfrontalière. Il s'agit de donner les armes à nos commerces pour faire en sorte que nos résidents consomment le plus possible local, mais le covid ne doit évidemment pas être la justification pour ces changements. Mon département y travaille bien sûr avec les partenaires sociaux, même si, comme certains l'ont dit, j'exprime quelques craintes quant à la volonté des syndicats d'entrer véritablement en matière sur des solutions qui soient plus compréhensibles aussi pour la clientèle, avec une uniformisation des heures d'ouverture. On l'a vu, vous l'avez dit, pour le mois de décembre, nous avons ouvert le samedi deux heures de plus, jusqu'à 20h. Pour des raisons sanitaires sur lesquelles je reviendrai tout de suite, un recours a été déposé à la Chambre constitutionnelle, recours qui n'a heureusement pas obtenu l'effet suspensif, ce qui fait que, pour l'instant, la décision du Conseil d'Etat déploie ses effets. Mais il est regrettable qu'il n'y ait pas de prise de conscience sur la nécessité de trouver ponctuellement, face à une situation extraordinaire, des solutions adaptées.

Sanitairement, nous l'avons dit, le but est de réduire les files d'attente devant les magasins. Il fait froid, nous sommes en hiver, et le fait que les gens disposent d'horaires plus longs permettra évidemment de mieux lisser les attentes devant les magasins; nous avons observé le résultat la semaine dernière. Nous allons encore observer ce qu'il en est demain, puisque c'est samedi, ainsi que les semaines qui viennent, sachant qu'à partir de la semaine prochaine, nous aurons le samedi et le dimanche, car il y a deux dimanches d'ouverture, les deux prochains week-ends, en plus de la nocturne du 23 décembre et de l'ouverture du 31 décembre qui compte comme un dimanche. Ces ouvertures du dimanche ont clairement pour but de soutenir notre commerce local; ce ne sont pas des décisions liées au covid, puisque les ouvertures de ces dimanches ont été décidées il y a déjà de nombreux mois, après consultation des partenaires sociaux.

Aujourd'hui, nous y sommes et nous sommes en plus dans une période où l'attention doit être toute particulière, vous le savez. Le Conseil d'Etat a exprimé sa préoccupation; M. Berset l'a encore exprimée hier, non seulement pour la Romandie, mais aussi, et c'est un peu nouveau, pour la Suisse alémanique, qui commence à voir le nombre de cas remonter. Sachons toutes et tous que de la discipline collective - mais le collectif n'est que l'addition des responsabilités individuelles - dépendra le fait que nous puissions, malgré tout, passer les fêtes de Noël le plus normalement qu'il est possible, avec des allégements annoncés il y a un instant par le Conseil fédéral et qui seront aussi discutés par le Conseil d'Etat.

Je saisis cette occasion pour m'adresser, au nom du Conseil d'Etat, aux restaurateurs qui ont exprimé une certaine incompréhension sur le fait qu'on leur annonce le 9 décembre s'ils allaient pouvoir ouvrir le lendemain. Effectivement, c'est une maladresse; il s'agissait d'attendre encore quelques jours pour voir l'évolution des chiffres. Le Conseil d'Etat va se réunir lundi pour se prononcer sur cette question: normalement, les choses vont dans le bon sens, même si l'inquiétude que j'ai exprimée demeure. Nous le savons, d'autres cantons ont pris la décision d'ouvrir aussi le 10 décembre et personne ne comprendrait que l'on ne fasse pas à Genève ce qui se fait ailleurs avec une situation épidémiologique similaire !

Cela ne veut pas dire que le problème est derrière nous, je le dis et je le répète: il est toujours devant nous ! Est-ce que ce sera le prolongement de la deuxième vague ou une troisième vague ? Nous en saurons bientôt plus, mais essayons de passer ces fêtes de Noël dans le respect des uns et des autres pour que nous puissions aller le mieux possible vers cette nouvelle année, que nous souhaitons tous et toutes bien meilleure que celle qui se termine bientôt !

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je vous remercie aussi pour ces bonnes nouvelles qui sont attendues par la population ! Mesdames et Messieurs, je vous fais voter l'entrée en matière sur ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 12804 est rejeté en premier débat par 60 non contre 32 oui et 1 abstention (vote nominal). (Le vote nominal n'a pas pu être enregistré.)

PL 12810-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Daniel Sormanni, Ana Roch, Thierry Cerutti, Florian Gander, André Python, Francisco Valentin, Christian Flury, Jean-Marie Voumard, Françoise Sapin sur l'aide financière extraordinaire de l'Etat destinée aux entreprises en complément aux cas de rigueur définis par la loi fédérale COVID-19 du 25 septembre 2020
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 25, 26, 27 novembre, 3 et 4 décembre 2020.
Rapport de majorité de M. Jacques Béné (PLR)
Rapport de minorité de Mme Jocelyne Haller (EAG)

Premier débat

Le président. Nous abordons l'urgence suivante, le PL 12810-A, classé en catégorie II, quarante minutes. La parole va à M. Jacques Béné.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. On s'attaque maintenant à trois projets de lois - celui-ci et les deux suivants - votés à une très large majorité à la commission de l'économie et à celle des affaires sociales, j'espère que ce sera le cas ici également d'ici quelques dizaines de minutes. Les trois textes ont été traités de manière urgente, ce n'était pas forcément très simple, d'où le fait que le Conseil d'Etat présente encore des amendements à certains d'entre eux.

Mesdames et Messieurs, il faut remercier le MCG d'avoir déposé le présent projet de loi qui, même s'il a été considérablement modifié en commission - je peux comprendre le courroux ou disons la déception de ce parti - permet de traiter de réels cas d'urgence, et on pourra sans doute revenir en début d'année prochaine avec d'autres projets de lois pour soutenir les structures qui n'ont pas perçu d'aide financière jusqu'à maintenant, par exemple les prestataires de services, les fournisseurs pour la restauration, les discothèques ou les commerces - qui, eux, ont bénéficié de mesures -, soit des structures qui n'ont pas été directement impactées par des fermetures ou qui ne sont pas considérées comme des cas de rigueur.

Mais en l'occurrence, ce qu'on a prévu de faire avec ce projet de loi qui a été largement transformé, c'est de pallier les écueils apparus dans le cadre des cas de rigueur votés la semaine passée: ces projets de lois d'aide aux entreprises dépendent en effet de critères qui doivent encore être fixés par la Confédération et le SECO, puis leur mise en place doit faire l'objet d'une consultation auprès des cantons afin que tout le monde applique les mêmes normes, ce qui signifie que s'il s'agit bien de cas de rigueur, ce ne sont pas des cas urgents. Or urgence il y a !

Traiter les dossiers de manière urgente, Mesdames et Messieurs, c'est le faire avant Noël. Des milliers d'emplois sont en jeu dans ces sociétés reconnues comme des cas de rigueur; je rappelle qu'on parle des agences de voyage, de l'hôtellerie, des transporteurs, de l'événementiel, des forains, des galeries de l'aéroport. Contrairement à tous les commerces qui ont dû fermer ponctuellement à deux reprises, ces structures sont quasiment sans activité depuis le mois de mars 2020, voilà pourquoi le Conseil fédéral a admis qu'il s'agissait de cas de rigueur. Ce qui a été décidé en commission, c'est de prévoir des ressources qui arriveront avant Noël, et je salue à cet égard le département du développement économique de Mme Fontanet qui a opéré un travail remarquable, qui nous a aidés lors de nos discussions afin de mettre en place un système cohérent nous permettant de verser des fonds aux entreprises concernées d'ici Noël.

L'objectif - il a déjà été évoqué dans ce parlement, il le sera encore dans le cadre du projet de loi suivant - c'est d'aider ces sociétés à financer une partie de leurs charges fixes incompressibles d'ici la fin de l'année. En commission, les auditions ont révélé - même si on le savait déjà - que les entreprises préfèrent travailler plutôt que de recevoir des subventions, mais que si elles n'en bénéficient plus, elles risquent d'être obligées de fermer. Pour l'ensemble des cas de rigueur, des actions de soutien immédiates sont nécessaires avant le 20 décembre, faute de quoi ils ne pourront plus verser de salaires, ils ne pourront plus s'acquitter de toutes les charges incompressibles - on parle des assurances, des contrats de maintenance, des loyers, etc.

Mesdames et Messieurs, nous ne pouvons que vous inviter à accepter ce projet de loi ainsi que les amendements déposés par le Conseil d'Etat. Ce dispositif vient s'ajouter aux cas de rigueur votés la semaine passée. Je rappelle que ces projets de lois concernaient la période du 26 septembre 2020 au 31 décembre 2021 alors que dans le cas d'espèce, il s'agit d'une aide financière d'urgence qui doit être versée avant Noël afin de préserver des emplois pour la plupart à très forte plus-value - on parle de plusieurs milliers d'emplois s'agissant de ces entreprises considérées comme des cas de rigueur. Au nom de la majorité, je vous recommande de voter ce projet de loi avec les amendements du Conseil d'Etat, mais pas les autres amendements qui vous seront proposés. Je vous remercie.

Présidence de M. Diego Esteban, premier vice-président

Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, à l'origine, ce projet de loi proposait d'allouer une aide financière extraordinaire aux entreprises n'entrant pas dans la définition des cas de rigueur tels que définis par la loi fédérale COVID-19 du 25 septembre 2020. Il a été traité à la vitesse de l'éclair lundi dernier lors d'une séance marathon et a subi au cours de l'opération des modifications étonnantes et pour le moins discutables qui en ont détourné le sens initial. L'intention des auteurs du projet de loi originel a non seulement été écartée sans scrupule mais, non moins cyniquement, le projet qui ressort des travaux de commission apporte une nouvelle aide aux secteurs professionnels dits cas de rigueur qui sont d'ores et déjà visés par les textes votés en urgence par notre Grand Conseil lors de la première partie de cette session.

L'objectif de la mue opérée sur ce projet de loi est de verser des avances de liquidités aux entreprises concernées par les dispositions en faveur des cas de rigueur, des avances qui seront déduites des aides libérées par les lois sur les cas de rigueur. Certains ont justifié la nécessité de cette mesure par la lenteur prévisible de la mise en application desdites lois. Mais, je le rappelle, cet argument n'a pas été évoqué lors de nos débats de la semaine dernière !

Au final, il ressort des travaux de commission le refus d'une aide pour les entreprises qui n'entrent pas dans la définition des cas de rigueur et un soutien supplémentaire à ceux-ci par la possibilité d'une avance de liquidités. Ce qui en résulte encore, c'est toujours cette même opposition à assortir les mesures d'aide aux entreprises de mesures de protection des travailleurs. C'est pourquoi notre groupe a refusé ce projet de loi en guise de protestation contre cette asymétrie systématique entre l'attention portée aux difficultés des entreprises et celle accordée aux salariés.

Vous aurez par ailleurs remarqué que le Conseil d'Etat a déposé un amendement pour doubler l'aide aux cas de rigueur en supprimant le caractère remboursable de l'avance de liquidités et en proposant qu'elle s'ajoute au dispositif initial. De plus, il vous invite à exempter les décisions en question d'une voie de recours, ce qui est contraire aux droits légitimes des bénéficiaires ainsi qu'aux usages. Dépossédé de son projet, le MCG a réagi in extremis en proposant des amendements pour élargir la portée du PL 12810 à la population qu'il visait au départ, à savoir les entreprises non répertoriées dans les cas de rigueur, augmenter subséquemment l'enveloppe budgétaire tout en abaissant le seuil pour accéder à l'aide. Notre groupe soutiendra ces modifications, car il considère que la détresse des autres sociétés doit être prise en considération aussi. Mais, sur le fond, tant que ce parlement pratiquera de l'empathie à géométrie variable et qu'il n'intégrera pas que les aides doivent s'adresser autant aux entreprises qu'aux salariés, eh bien nous refuserons ce type de projet de loi.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Mesdames et Messieurs, le rapporteur de majorité a bien expliqué le contexte dans lequel la commission a travaillé et a redéfini la notion de cas de rigueur selon les termes de la Confédération et leur application par les services du SECO. Par ce projet de loi, il s'agit effectivement de financer partiellement les charges fixes incompressibles des sociétés qui deviennent très lourdes en cette fin d'année, cela a été rappelé.

Nous sommes tous régulièrement interpellés par des chefs d'entreprise qui se trouvent dans cette situation, et s'ils pourront bénéficier avec bonheur des subventions dévolues aux cas de rigueur, ils admettent en revanche que c'est la catastrophe pour eux en fin d'année, car ils ne disposent plus de liquidités.

C'est ce besoin urgent de liquidités, bien compris par la majorité de la commission ainsi que par le Conseil d'Etat et les services de Mme Fontanet, qui a conduit la commission à accepter ce projet de loi. Le groupe démocrate-chrétien vous incite à l'adopter également en validant son entrée en matière, puis les amendements du Conseil d'Etat uniquement. Je vous remercie.

M. André Pfeffer (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet a en effet été remodelé en commission. L'objectif est de couvrir un réel et urgent besoin pour les entreprises dites cas de rigueur. L'assistance aux bénéficiaires prévus dans le texte d'origine est en quelque sorte transférée au PL 12812 que nous traiterons tout à l'heure.

L'actuelle version du projet de loi propose un crédit de 30 millions pour une aide immédiate aux branches économiques définies comme des cas de rigueur. Pour rappel, il s'agit de l'événementiel, du transport professionnel, des hôtels, des forains et magasins de souvenirs, des agences de voyage et des commerces de l'aéroport. Ces sociétés, qui ont perdu entre 70% et 95% de leur chiffre d'affaires, sont aux abois, elles sont de très loin les plus touchées de notre tissu économique.

Comme cela a été expliqué auparavant, les subventions votées la semaine dernière et qui seront financées à hauteur de deux tiers par Berne seront disponibles au plus tôt fin janvier, voire fin février. Or les entreprises ont un besoin urgent de liquidités, un besoin auquel il faut répondre maintenant; des milliers de postes de travail sont en jeu. L'UDC vous demande d'accepter ce projet de loi et de voter la clause d'urgence. Merci de votre attention.

M. Cyril Mizrahi (S). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, comme vous le savez, le groupe socialiste soutient les mécanismes d'aide aux entreprises, cela nous semble très important. D'ailleurs, ce projet de loi comme d'autres inclut un amendement du Conseil d'Etat relatif aux conditions de travail, que nous accepterons.

Nous validons le principe discuté en commission d'une avance aux entreprises qui ont besoin de liquidités, donc nous soutiendrons ce projet de loi pour l'essentiel, tel qu'issu des travaux de commission, c'est-à-dire que nous rejetterons les amendements du MCG visant à en élargir la portée. On aura ensuite à traiter du projet de loi 12812 qui porte précisément sur le soutien à d'autres entreprises, et les socialistes sont bien sûr ouverts pour discuter d'autres mesures, mais la manière dont veut le faire le MCG sort du cadre du débat tel qu'il a été posé en commission et vous est proposé ici.

En revanche, le groupe socialiste ne se reconnaît pas dans le rapport de majorité, dont nous faisions pourtant partie, en raison d'une modification sensible que nous présente le Conseil d'Etat et qui consiste à parler non plus d'avance, mais de cumul pour certaines périodes avec le futur mécanisme prévu par la Confédération pour les cas de rigueur. Cela ne nous paraît ni raisonnable ni équitable, aussi préférons-nous en rester au principe d'une avance.

Nous nous opposerons également - et j'en terminerai par là, Monsieur le président - à la modification de l'article 8 pour supprimer les voies de réclamation; si nous comprenons bien qu'il s'agit ici d'un mécanisme d'urgence, on ouvre vraiment la boîte de Pandore: la suppression des voies de recours est totalement contraire au principe de l'Etat de droit, et nous nourrissons de sérieux doutes quant à la légalité d'un tel dispositif. Par conséquent, nous ne voterons pas l'amendement du Conseil d'Etat à l'article 8. Je vous remercie.

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le MCG avait déposé ce texte parce qu'il apparaissait qu'un certain nombre d'entreprises, depuis le mois de mars déjà, n'avaient pas obtenu la moindre aide parmi toutes les mesures mises en place par la Confédération et les cantons. Or certaines d'entre elles sont au bord de la faillite ou ont d'ores et déjà fait faillite et, pour cette raison, nous devions agir en présentant un projet de loi.

Celui-ci a été passablement modifié par la commission; nous en prenons acte, même si nous le regrettons. Certes, il faut soutenir les sociétés qui ont un besoin urgent de liquidités, celles qui ont été définies comme des cas de rigueur par la Confédération et pour lesquelles la subvention arrivera plus tard; nous partageons cette idée, nous sommes d'accord avec cette partie. En revanche, il ne faudrait pas oublier toutes les autres structures, celles qui n'ont pas perçu le moindre centime jusqu'à présent. Or il y en a toute une série, de très petites entreprises, des PME qui vont probablement disparaître si on ne leur prête pas assistance très rapidement.

Pour être au clair, aider les entreprises, c'est soutenir les travailleurs, parce que si les entreprises disparaissent, ce sont des emplois qui disparaissent, ce sont des travailleurs qui vont se retrouver au chômage. Par conséquent, le maintien du tissu économique contribue de manière indirecte à celui des postes de travail et des revenus des salariés.

Nous allons adopter les amendements du Conseil d'Etat, mais nous vous soumettons également trois modifications: d'abord à l'article 3, parce qu'on n'aimerait pas fermer la porte aux autres entreprises, toutes celles qui ne sont pas répertoriées dans les cas de rigueur, ensuite à l'article 5 où il s'agit d'augmenter l'enveloppe qui passerait à 60 millions, et enfin à l'article 6, alinéa 3, où nous proposons d'abaisser le seuil d'accès à l'aide. Cela nous paraît nécessaire, parce que certaines entreprises n'ont pas eu l'obligation de fermer mais, par le fait qu'elles sont sous-traitantes, qu'il n'y a plus de clients ou tout simplement que les gens sont confinés chez eux, subissent des pertes de leur chiffre d'affaires - peut-être pas de 60%, mais des pertes importantes qui les empêchent d'être viables. Par conséquent, nous vous prions d'accepter l'abaissement du seuil d'accès à la subvention à 45% de la moyenne annuelle du chiffre d'affaires.

Ce projet de loi est utile et il faut le voter ce soir ainsi que sa clause d'urgence, ce que nous vous invitons à faire. Cela étant, nous vous demandons si possible de valider aussi nos amendements de façon à ne laisser personne au bord de la route, aucune entreprise, aucun travailleur, et à conserver les emplois. Merci de soutenir nos amendements, Mesdames et Messieurs.

M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'aimerais tout d'abord relever que contrairement à ce printemps, le parlement travaille, le parlement est appelé à prendre un certain nombre de décisions sur l'économie, et je profite de l'occasion qui m'est donnée pour remercier l'ensemble des commissaires qui ont siégé en ce début de semaine, parfois tard le soir, ainsi que les personnes qui nous ont accompagnés dans ce travail, que ce soit le Conseil d'Etat, les membres de l'administration qui sont restés avec nous extrêmement tard aussi ou le personnel du secrétariat général qui a géré à la fois les aspects légistiques et les sessions Zoom, je pense qu'il faut les saluer ici.

Nous avons pris nos responsabilités et nous voilà donc face à deux projets de lois, celui dont on parle maintenant étant à considérer comme complémentaire à celui que nous traiterons après, soit le PL 12812. L'une des questions qui se sont posées, c'est de savoir s'il faut aider toutes les entreprises en difficulté. Il s'agit d'un paramètre extrêmement compliqué à établir, puisqu'on estime que la plupart ou toutes les sociétés du canton ont été touchées par la crise que nous vivons et qui sera amenée à durer un certain temps encore.

Un petit nombre de firmes ont connu des répercussions positives, mais on n'en parle pas plus que ça ici puisque la majorité d'entre elles sont touchées de façon négative, et il a paru important à la commission que les critères selon lesquels l'Etat attribue ses soutiens soient établis de manière objective. Les cas de rigueur ont été définis objectivement par une perte de chiffre d'affaires de 40%, et il est bien entendu assez facile de repérer les entreprises qui ont été obligées de fermer.

Les deux textes dont nous parlons se réfèrent essentiellement à ces deux types de sociétés; pour les autres, il nous paraît plus difficile d'établir des critères objectifs, si bien que nous ne les avons pas prises en considération, sauf peut-être à travers le projet de loi sociale que nous évoquerons par la suite et qui peut être considéré comme une sorte de voiture-balai - un député l'avait nommé ainsi - ce qui fait qu'au final, nous tenons compte de l'ensemble des personnes concernées par la crise. Voilà ce que je voulais dire. Le projet de loi que nous examinons ici a pour ambition de verser rapidement des liquidités aux secteurs dits cas de rigueur, et je vous appelle à le soutenir.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole passe à M. Serge Hiltpold pour une minute trente-quatre.

M. Serge Hiltpold (PLR). Merci, Monsieur le président. En résumé, Mesdames et Messieurs, ce projet de loi va nous donner un cadre pour verser les liquidités qui manquent aux six secteurs d'activité définis comme des cas de rigueur et que nous avons évoqués la semaine dernière. Ce qui ressort des diverses auditions, c'est la nécessité de procéder à ces versements d'ici la fin de l'année, voire le 20 décembre, afin d'éviter des cessations de paiements qui mettraient en péril les entreprises et les emplois.

S'agissant des amendements du MCG, je vous invite à ne pas les voter. Pourquoi ? Parce qu'il serait préférable de garder les 30 millions supplémentaires proposés par le MCG pour un autre projet de loi qui couvrirait autre chose. En effet, on a vu avec les cas de rigueur qu'il manquait 63 millions. Or 63 millions moins les 30 millions de ce soir, il reste toujours 33 millions. C'est un juste équilibre des choses: une partie est utilisée pour les cas de rigueur, l'autre servira de complément pour le PL 12812 qu'on abordera tout à l'heure, il faut traiter les deux catégories de manière similaire.

Enfin, en ce qui concerne les amendements du Conseil d'Etat, nous vous recommandons de les soutenir afin que le projet soit mis en oeuvre rapidement. Merci.

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, au nom du Conseil d'Etat, je souhaiterais également remercier le président de la commission de l'économie, les députés de même que les collaboratrices et collaborateurs du secrétariat général, du DDE et de l'administration en général qui ont vraiment travaillé sans relâche, parce que certaines séances de commission ont duré jusqu'à passé 23h, et je pense que cela mérite d'être souligné.

Cela étant, sur quoi votre commission s'est-elle prononcée ? Sur les cas de rigueur. Comme vous le savez, les besoins de ces six secteurs représentant plusieurs milliers d'emplois ont été évalués à 130 millions. Or la Confédération a débloqué 46 millions. Sachant que dans les projets de lois que nous avions votés précédemment, nous nous étions calqués sur ce que prévoit l'ordonnance, à savoir un tiers à la charge des cantons et deux tiers à la charge de la Confédération, ce sont 68 millions que nous avons réunis. Le présent projet de loi tel qu'issu des travaux de commission propose de mobiliser 30 millions supplémentaires pour ces entreprises de façon à ce que nous ne nous arrêtions pas à 68 millions sur les 130 nécessaires, mais que nous augmentions l'enveloppe de 30 millions.

La raison pour laquelle il est important de ne pas modifier les différents critères de ce projet de loi, c'est que la Confédération pourrait accroître le montant de sa prise en charge. Selon la répartition actuelle, Genève obtient 46 millions; mais, comme elle l'a dit, avec l'aggravation de la crise et le temps qui passe, la Confédération pourrait être amenée, elle aussi, à revoir sa participation à la hausse. Il est dès lors essentiel, s'agissant de ces 30 millions octroyés pour les cas de rigueur qui sont couverts par la Confédération, que les conditions soient remplies, de sorte que si celle-ci élargit sa participation, le canton puisse en bénéficier à raison de deux tiers... J'espère que vous avez compris ce que j'essaie d'expliquer !

Par ailleurs, Mesdames et Messieurs, sachez que le département a mis en oeuvre ou a tenté de tout mettre en oeuvre pour que les versements soient effectués avant la fin de l'année. Dans ce contexte, les conseillers d'Etat ont relayé des appels au sein de leur département pour qu'un nombre important de collaborateurs viennent aider le DDE. Il s'agit de s'assurer que les prestations financières attendues par certains pour pouvoir survivre, éviter d'avoir à fermer ou à licencier des collaborateurs en cette fin d'année soient versées avant Noël, je remercie donc d'ores et déjà le personnel qui s'est annoncé pour venir prêter main-forte au DDE ainsi que l'ensemble de mes collègues du Conseil d'Etat qui ont validé cette façon de procéder. Mesdames et Messieurs, je suis convaincue que c'est par le biais d'accords comme ceux-ci et sur la base de projets de lois permettant de sauver notre économie et l'emploi que nous avancerons ensemble.

S'agissant enfin des dispositions relatives à l'impossibilité de licencier qui ont été refusées par la majorité, le Conseil d'Etat soutient cette position, non pas parce qu'il souhaite que les entreprises se séparent de leurs collaborateurs, bien au contraire, mais véritablement parce que lorsque l'on est entrepreneur, lorsque l'on est à la tête d'une compagnie, on sait que parfois, malheureusement, il ne sera pas possible de survivre en gardant l'entier des salariés. C'est une souplesse qui ne vise évidemment pas à ce que tous les employés soient licenciés, mais à ce que les sociétés puissent survivre et préserver les postes de travail, voire en créer de nouveaux, il faut leur laisser cette marge de manoeuvre.

Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat vous recommande d'adopter ses amendements, qui permettent une acceptation de ce projet de loi avec l'aide de la Confédération, et de rejeter tous les autres amendements déposés. Merci beaucoup.

Le président. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote.

Mis aux voix, le projet de loi 12810 est adopté en premier débat par 91 oui (unanimité des votants).

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'art. 1.

Le président. Nous sommes saisis d'une proposition d'amendement du Conseil d'Etat:

«Art. 2, al. 2 (nouvelle teneur)

2 Les prestations servies dans le cadre de la présente loi s'ajoutent aux montants attribués aux cas de rigueur selon les lois cantonales 12802, 12803, 12807, 12808, 12809 et 12813.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 66 oui contre 22 non et 2 abstentions.

Mis aux voix, l'art. 2 ainsi amendé est adopté.

Le président. M. Daniel Sormanni a déposé l'amendement suivant:

«Art. 3 (nouvelle teneur)

La présente loi s'adresse aux entreprises visées par les lois 12802, 12803, 12807, 12808, 12809 et 12813, ainsi qu'à toutes les autres entreprises non répertoriées dans les cas de rigueur.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 69 non contre 21 oui.

Mis aux voix, l'art. 3 est adopté, de même que l'art. 4.

Le président. Voici une nouvelle demande d'amendement de M. Sormanni:

«Art. 5 (nouvelle teneur)

Un crédit de 60 millions est attribué au département afin de répondre à l'urgence de la situation pour des aides à fonds perdu.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 70 non contre 21 oui.

Mis aux voix, l'art. 5 est adopté.

Le président. Le gouvernement propose un autre amendement:

«Art. 6, al. 1 (nouvelle teneur), al. 2 et 4 (biffés, les al. 3 et 5 anciens devenant les al. 2 et 3)

1 L'aide financière consiste en une participation de l'Etat de Genève aux charges fixes incompressibles.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 71 oui contre 9 non et 10 abstentions.

Le président. M. Sormanni présente l'amendement que voici:

«Art. 6, al. 3 (nouvelle teneur)

3 L'indemnité n'est accordée que si le chiffre d'affaires annuel est inférieur à 45% de la moyenne annuelle telle que définie dans le règlement d'application de la présente loi.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 71 non contre 21 oui.

Mis aux voix, l'art. 6 ainsi amendé est adopté.

Le président. Nous sommes saisis d'un nouvel amendement du Conseil d'Etat:

«Art. 7, al. 2 (biffé, les al. 3 et 4 anciens devenant les al. 2 et 3)»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 82 oui et 9 abstentions.

Mis aux voix, l'art. 7 ainsi amendé est adopté.

Le président. Nous passons à la prochaine demande d'amendement du Conseil d'Etat:

«Art. 8 (nouvelle teneur)

Les décisions prises en application de la présente loi ne peuvent pas faire l'objet d'une réclamation.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 55 oui contre 35 non.

Mis aux voix, l'art. 8 ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'art. 9 est adopté.

Le président. Enfin, l'exécutif nous soumet un dernier amendement:

«Art. 10 (nouvelle teneur)

Les frais liés à la mise en oeuvre de la présente loi sont à la charge du département.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 84 oui contre 1 non et 7 abstentions.

Mis aux voix, l'art. 10 ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'art. 11 est adopté.

Le président. Nous nous prononçons à présent sur l'article 12 «Clause d'urgence». Je rappelle que selon l'article 142 de la LRGC, pour être adoptée, la clause d'urgence doit être votée par le Grand Conseil à la majorité des deux tiers des voix exprimées, les abstentions n'étant pas prises en considération, mais au moins à la majorité de ses membres.

Mis aux voix, l'art. 12 est adopté par 83 oui contre 9 non et 1 abstention (majorité des deux tiers atteinte).

Troisième débat

Mise aux voix, la loi 12810 (nouvel intitulé) est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 83 oui contre 9 non et 2 abstentions.

Loi 12810

Présidence de M. François Lefort, président

Le président. Mesdames et Messieurs, je lève la séance et vous donne rendez-vous à 17h.

La séance est levée à 16h40.