République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2708
Proposition de motion de Mmes et MM. Amanda Gavilanes, Emmanuel Deonna, Glenna Baillon-Lopez, Sylvain Thévoz, Nicole Valiquer Grecuccio, Jocelyne Haller, Diego Esteban pour une prolongation des contrats du personnel précaire de l'enseignement supérieur et de la recherche de l'Université de Genève fortement affectés par la crise du COVID-19
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 25, 26, 27 novembre, 3 et 4 décembre 2020.

Débat

Le président. Nous passons à l'urgence suivante, la M 2708 que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à... Monsieur Christian Zaugg, vous étiez inscrit pour l'objet précédent.

M. Christian Zaugg. Oui !

Le président. Je vous donne la parole, mais je pense que maintenant... Vous êtes inscrit pour la M 2708 ou pas ?

M. Christian Zaugg. Oui, Monsieur le président, mais je vais laisser parler l'auteure du texte d'abord.

Le président. Voilà, nous attendons que l'auteure s'inscrive...

M. Christian Zaugg. Je prendrai la parole juste après.

Le président. Madame Amanda Gavilanes, vous avez la parole.

Mme Amanda Gavilanes (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion, comme son nom l'indique, a pour but de venir en aide au personnel du corps intermédiaire de l'université, qui, comme de nombreux travailleurs et travailleuses de notre canton, subit de plein fouet les conséquences de la crise sanitaire que nous traversons.

Les tâches d'enseignement et de recherche des universités et des hautes écoles du canton de Genève sont assurées à près de 80% par du personnel en contrat précaire, à temps partiel et/ou à durée déterminée. Ce personnel, issu du corps des collaborateurs et collaboratrices de l'enseignement et de la recherche, a vu son travail de recherche fortement entravé par la crise et la suspension des activités au sein de l'université, comme notamment la fermeture des bibliothèques et des archives, l'impossibilité de mener à bien les enquêtes de terrain et de conduire des entretiens ou encore des expériences en laboratoire, sans parler des nombreux séjours de recherche à l'étranger qui ont dû être tout bonnement annulés. Le travail scientifique des membres du corps intermédiaire sous contrat DIP a été d'autant plus entravé qu'ils et elles se sont focalisés ces derniers mois sur le passage à l'enseignement à distance, afin de permettre à l'université de poursuivre sa mission d'enseignement, et ce en dépit des circonstances défavorables, particulièrement pour celles et ceux ayant des personnes à charge.

Dans l'impossibilité quasi totale de produire des recherches depuis le début de la crise, une large partie des membres du corps intermédiaire, dont les contrats durent entre trois et six ans, particulièrement les assistants et les postdoctorants, sont ainsi fortement touchés par la crise sanitaire en cours - les femmes bien plus que les hommes - et voient leurs perspectives de carrière se réduire au sein du monde académique en raison de la réduction des publications, du retard dans l'écriture de leur thèse ou encore de l'impossibilité de constituer un réseau international, ce qui est exigé pour ce type de carrière.

Après une longue lutte menée par les associations du personnel de l'enseignement et de la recherche, comme au sein de l'assemblée universitaire et de la commission du personnel, le rectorat a imposé la solution suivante: estimant que la crise sanitaire n'a duré que deux mois, il propose au corps intermédiaire une prolongation d'une durée équivalente si, et seulement si, la hiérarchie directe, autrement dit le département puis le décanat, considère que les entraves sont réelles. Il s'avère qu'en pratique, cette marge d'appréciation favorise la mise en concurrence des collaborateurs et des collaboratrices pour l'obtention desdites prolongations. Pour des motifs exceptionnels, la prolongation peut être plus longue - jusqu'à hauteur de six mois. Elle doit être à nouveau dûment justifiée et la décision finale est entre les mains du rectorat. En outre, seuls les contrats se terminant au 31 décembre 2020 ont pu être prolongés. Toutes les autres prolongations seront réévaluées ultérieurement, ce qui génère de grandes incertitudes. De plus, les conditions de prolongation ont varié selon les facultés et les sources de financement des contrats - DIP ou Fonds national suisse - créant ainsi des inégalités qui ne sont pas liées aux impacts réels de la crise sur les chercheurs et chercheuses.

C'est pourquoi le parti socialiste vous demande aujourd'hui de renvoyer cette proposition de motion à la commission de l'enseignement supérieur, afin que nous puissions étudier la question et interroger le rectorat sur les mesures à prendre. Je vous remercie.

Présidence de M. Jean-Luc Forni, deuxième vice-président

M. Christian Zaugg (EAG). Monsieur le président de séance, Mesdames et Messieurs les députés, la situation du personnel précaire de l'enseignement supérieur et de la recherche à l'université est extrêmement préoccupante. Il nous paraît indispensable de prolonger systématiquement tous les contrats de ce personnel oeuvrant dans la recherche, qui risque, en cas de perte d'emploi, de perdre ses moyens d'existence et ne pas atteindre les objectifs de formation poursuivis.

Nous nous devons de protéger ces employés qui, faute de l'appui de l'Etat, pourraient perdre leur emploi et ainsi ne pas obtenir un diplôme ou un doctorat, titres leur permettant d'élargir et d'amplifier leur carrière professionnelle. Il convient, dans ce contexte particulier, d'offrir toutes les conditions nécessaires, à savoir la sécurité de l'emploi et des prolongations des délais impartis, afin de permettre à ce personnel précaire mais indispensable à l'université de poursuivre sa mission en toute quiétude. Nous vous invitons donc, chères et chers collègues, à soutenir résolument cette motion et à la renvoyer à la commission de l'enseignement supérieur.

M. Stéphane Florey (UDC). En effet, vu le contexte et les explications de l'auteure de cette proposition de motion, il est nettement préférable de l'étudier en commission et de pouvoir véritablement cibler et connaître la situation des personnes concernées. Nous étudierons donc volontiers ce texte en commission et nous soutiendrons son renvoi. Je vous remercie.

M. Daniel Sormanni (MCG). Les explications données par la motionnaire semblent effectivement assez convaincantes. Par conséquent, je pense qu'il est nécessaire d'examiner ce texte en commission. Le MCG acceptera le renvoi à la commission de l'enseignement supérieur. Merci.

Mme Natacha Buffet-Desfayes (PLR). Le PLR soutiendra cette demande de renvoi en commission afin d'étudier plus en profondeur cette question, car elle soulève beaucoup de problématiques qui ont été évoquées par ma collègue socialiste en un temps record et qui méritent évidemment un petit peu plus d'approfondissement. Je vous remercie.

M. Jacques Blondin (PDC). J'aimerais relever tout d'abord que ce sujet dépasse le périmètre de la seule crise covid et qu'une pétition nationale - donc pas seulement au niveau genevois - a été lancée par le corps des collaborateurs et collaboratrices de l'enseignement et de la recherche, dénonçant la précarité des contrats, qui provoque stress et malaise chez les chercheurs. Il faut donc effectivement reprendre langue avec le rectorat pour trouver des solutions à cette problématique, et nous soutiendrons bien entendu le renvoi à la commission de l'enseignement supérieur.

Mme Anne Emery-Torracinta, présidente du Conseil d'Etat. Très rapidement, Mesdames et Messieurs les députés, je pense que c'est une bonne chose que cette motion soit renvoyée en commission. Cela vous permettra d'obtenir toutes les explications nécessaires, mais sachez déjà deux choses: premièrement, dès le début de la crise, le rectorat a pris un certain nombre de mesures pour prolonger ces contrats à durée déterminée - prolongation, en effet, de deux mois en principe, mais qui peut aller jusqu'à six mois pour un certain nombre de raisons que je vous donne rapidement: lorsque, véritablement, les activités de recherche ont été impactées par les circonstances, par exemple en raison de conditions familiales ou personnelles - imaginez quelqu'un qui se retrouve à la maison avec des enfants à garder, etc., ce genre de situation là; lorsque des tâches exceptionnelles ont été confiées au collaborateur et qu'il n'a pas pu avancer, par exemple, dans sa recherche - on pense aussi à ceux qui ont été mobilisés, que ce soit par l'armée, les hôpitaux ou la protection civile; et enfin, lorsque certains n'ont pas réussi à rendre leur travail prédoctoral, doctoral ou postdoctoral dans les délais normaux. Sachez donc que l'université est très consciente de cette situation. J'en ai reparlé récemment au recteur, la situation est en permanence évaluée.

La deuxième chose que je voulais vous dire, c'est qu'indépendamment du covid - et M. Blondin l'a relevé - il y a une réflexion plus globale sur le corps intermédiaire à l'université, à Genève comme ailleurs. J'avais déjà eu l'occasion d'en parler au rectorat en 2019 et lui avais écrit à ce propos. J'ai repris langue avec le rectorat en 2020 au cours de la crise covid pour en parler. C'est donc vraiment un sujet que nous souhaitons suivre, mais je sais aussi que le recteur et son équipe en sont parfaitement conscients également. Je vous invite donc à accepter le renvoi en commission et surtout à écouter ce que l'université aura à vous dire à ce propos. Merci.

Le président. Merci, Madame la présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à vous prononcer sur la demande de renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'enseignement supérieur.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2708 à la commission de l'enseignement supérieur est adopté par 78 oui (unanimité des votants).