République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 30 octobre 2020 à 14h
2e législature - 3e année - 6e session - 30e séance
M 2505-B
Débat
Le président. J'ouvre le débat sur la M 2505-B en cédant la parole à M. Bertrand Buchs.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci beaucoup, Monsieur le président. Le PDC aimerait remercier le Conseil d'Etat pour cette réponse exhaustive et très bien faite. Nous sommes très contents qu'il ne ferme pas la porte à l'institution d'une taxe sur le sucre. En effet, même s'il attend une décision fédérale, il propose de mener des études préalables sur la faisabilité d'une telle taxe en mettant sur pied un groupe de travail, ce que nous saluons. Nous trouvons toutefois que le laps de temps prévu, soit jusqu'à fin 2022, est un peu long, mais on sait bien que nous sommes maintenant confrontés à la covid. Nous espérons simplement qu'on pourra connaître les résultats de ce groupe de travail avant la fin de l'année 2022. Quoi qu'il en soit, nous ne refuserons pas ce rapport. Je vous remercie.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les Verts saluent eux aussi ce rapport, même s'ils souhaitent apporter une petite nuance à ce qui est écrit. Il est effectivement essentiel de lutter contre la dépendance au sucre, le fléau du siècle - comme l'indique le titre de la motion - parce qu'on sait que l'ajout excessif de sucre crée actuellement de nombreuses pathologies, telles que les maladies cardiovasculaires et le diabète, mais aussi des problèmes d'obésité et de caries. On constate également qu'il y a une forte hausse du taux de personnes obèses ou en surcharge pondérale. Le rapport cite un pourcentage d'augmentation assez important à Genève et en Suisse et énonce ceci: «Plus de 41% de la population genevoise est donc en surpoids ou obèse, et la tendance est à la hausse.» Si la tendance est à la hausse, nous pensons qu'il faut absolument mettre l'accélérateur, notamment sur le plan de la promotion de la santé, en soutenant les associations sur lesquelles s'appuie le Conseil d'Etat au quotidien - il nomme par exemple l'association Fourchette verte, qui s'occupe principalement de l'alimentation d'établissements collectifs. C'est essentiel s'agissant des contrats de prestations, mais aussi des plans d'actions mentionnés dans le plan cantonal de promotion de la santé, qui est en cours d'étude à la commission de la santé. Ce sont beaucoup d'effets d'annonce, mais j'espère vraiment que ce n'est pas le cas et qu'ils se transformeront en actions concrètes, notamment en ce qui concerne l'information et la sensibilisation auprès des jeunes. En conclusion, nous accepterons cette réponse, tout en précisant qu'il faut absolument mettre l'accélérateur et soutenir les personnes et associations présentes sur le terrain. Merci.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, la lecture du rapport du Conseil d'Etat que fait le groupe Ensemble à Gauche est un peu moins optimiste. Il est vrai qu'au travers de sa réponse, le Conseil d'Etat semble partager la préoccupation de ceux qui lui ont renvoyé cette motion en mars dernier. Comme eux, il se dit convaincu que le sucre représente un grave problème de santé publique et prêt à mettre en place un groupe de travail pour mener des études. Jusque-là tout va bien, si ce n'est que l'échéance pour ce groupe de travail est fixée à fin 2022, et ce pour ne présenter que des propositions. La question que nous posons est donc la suivante: à quand des réalisations concrètes ?
Ensuite - et surtout - le Conseil d'Etat passe en revue tous les obstacles matériels qui s'opposeraient à l'instauration d'une taxe sur le sucre. Il cite autant des aspects formels, tels que la problématique d'une forme d'impôt affecté, que d'autres plus subjectifs, comme le tourisme d'achat. En clair, le Conseil d'Etat est d'accord avec la motion - c'est du moins ce que l'on pourrait retenir à la lecture de sa conclusion - mais il pense que le chemin sera long et particulièrement ardu. Il est donc difficile pour nous de ne pas voir une certaine ambivalence dans ce rapport: la problématique posée est pertinente, mais on ne peut y répondre, en tout cas pas avant longtemps.
Ce qui est surprenant dans ce texte, c'est qu'il ne fait aucunement mention du pouvoir des lobbys des milieux agro-alimentaires. Comme s'ils n'étaient pas l'un des piliers centraux de l'impossibilité de réglementer efficacement la teneur en sucre dans les denrées alimentaires, comme si tous les atermoiements dans ce domaine n'étaient pas le produit de la formidable puissance de ces lobbys.
Pourquoi attendre 2022, et encore pour n'aspirer qu'à des propositions ? Le sucre en quantité excessive dans les denrées alimentaires est un fléau en matière de santé publique. C'est un fait établi ! Si l'on en croit les rapports d'experts, le temps presse, et je vous épargne les chiffres qui ont été mentionnés à diverses reprises. Alors oui, n'en déplaise aux tenants du business de l'agro-alimentaire, il faut agir, et vite. D'autres pays l'ont fait avec une certaine efficacité, il serait donc temps que nous allions de l'avant.
En l'occurrence, la réponse du Conseil d'Etat n'apparaît pas à la mesure du problème de santé publique que représente la présence de sucre excessif dans les denrées alimentaires. Nous attendons un engagement plus prégnant dans ce domaine, c'est pourquoi notre groupe vous propose de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat afin d'obtenir une réponse plus en adéquation avec l'ampleur de la problématique qui lui est soumise.
M. Patrick Dimier (MCG). Tout comme les groupes préopinants, nous sommes plutôt satisfaits de cette réponse. La question du sucre est très sérieuse et il faut s'en occuper rapidement, faute de quoi la facture sera salée... (Exclamations.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Vous êtes fidèle à votre réputation ! La parole va maintenant à M. Stéphane Florey.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Le groupe UDC prendra acte de cette réponse, qui lui convient parfaitement. Elle est tout à fait réaliste ! On sait très bien qu'une taxe ou un impôt est de toute façon impossible à l'heure actuelle. J'irai jusqu'à dire que fixer comme échéance 2022 est plutôt optimiste, sachant que même au niveau fédéral, si - et je dis bien si - les Chambres se mettent d'accord et qu'une majorité se dégage pour instaurer une nouvelle taxe ou un nouvel impôt, cette mesure sera quoi qu'il arrive attaquée par référendum, et il n'y aura pas de vote populaire possible, voire de réponse claire, avant 2025 au mieux. Voilà des délais réalistes. Il est juste illusoire de croire qu'en 2022 les Chambres fédérales auront réglé cette question ! Quant au lancement d'un groupe de travail, il faut quand même voir la réalité en face: il ne servira pas à grand-chose, sauf à émettre quelques recommandations, voire propositions, qui n'auront en l'occurrence aucune utilité, puisque nous devrons de toute manière attendre les conclusions des Chambres fédérales pour résoudre cette problématique. Nous prendrons donc acte de ce rapport, tout en restant attentifs à la suite qui sera donnée à la résolution que nous avons renvoyée à l'Assemblée fédérale. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi au Conseil d'Etat, que je mets aux voix.
Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la motion 2505 est rejeté par 42 non contre 26 oui et 2 abstentions.
Le Grand Conseil prend donc acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2505.