République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 28 août 2020 à 8h
2e législature - 3e année - 4e session - 19e séance
PL 12679-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
Le président. L'ordre du jour appelle le traitement des PL 12679-A et PL 12672-A relatifs aux HUG. Nous commençons avec le premier objet, soit les états financiers individuels, pour lequel M. Forni est rapporteur. A vous la parole, Monsieur Forni.
M. Jean-Luc Forni (PDC), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, ce projet de loi sur les états financiers des HUG a été accepté à l'unanimité moins une abstention par la commission des finances, qui vous recommande donc de l'adopter également.
Le président. Bien, merci. Je mets le texte aux voix.
Mis aux voix, le projet de loi 12679 est adopté en premier débat par 73 oui et 2 abstentions.
L'article unique du projet de loi 12679 est adopté en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12679 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 71 oui et 1 abstention.
Le président. Nous poursuivons avec le PL 12672-A, à savoir le rapport de gestion des HUG. Le rapport de majorité est de Mme Marjorie de Chastonay, celui de minorité de Mme Jocelyne Haller. La parole va tout d'abord à Mme de Chastonay.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission de la santé a traité ce projet de loi durant deux séances, au mois de mai dernier. D'abord, M. Levrat, directeur général des HUG, nous a présenté le rapport de gestion des HUG; la commission a ensuite auditionné les représentants du personnel ainsi que les syndicats SIT et SSP. Les travaux ont inévitablement été teintés par l'année 2020 et la crise du covid-19.
La majorité de la commission de la santé vous recommande d'accepter ce projet de loi du Conseil d'Etat approuvant le rapport de gestion des HUG pour l'année 2019. Les comptes sont à l'équilibre après quelques ajustements. Il est évident que le rapport a été influencé par la pandémie; d'ailleurs, de nombreuses questions des députés étaient orientées dans ce sens. Bien que des commissaires aient émis certaines réserves et critiques, qui ont été discutées lors des séances de travail, la majorité a tout de même préféré adopter ce texte, notamment en raison de la crise sanitaire subie ces derniers mois, mais en attendant fermement des améliorations sur certains aspects.
J'en cite quelques-uns: la gestion et l'anticipation d'une éventuelle deuxième vague, les questions en lien avec la psychiatrie - gestion des personnes sous tutelle faisant l'objet de décisions judiciaires ou médicales, manque récurrent d'infrastructures intermédiaires et de structures en amont, vision cantonale de la psychiatrie - les difficultés liées au recrutement des employés et leur adéquation dans les différentes unités de soins, la régularisation des intérimaires, la formation et la reconnaissance des ASSC ainsi que celle de tout le personnel soignant, les conditions de travail du personnel soignant et le «lean management», la promotion et la prévention de la santé, eu égard notamment à la crise du covid.
Les membres de la commission saluent par ailleurs les améliorations suivantes: la bonne gestion de la crise par les HUG, les collaborations et synergies mises en place avec les cliniques privées et les autres cantons, l'amélioration du service des urgences, l'inauguration de la nouvelle centrale 144 ainsi que l'anticipation du vieillissement de la population et les prises en charge y afférentes - comorbidités, maladies chroniques, accompagnements plus lourds et lents. Enfin, mentionnons encore l'amélioration du domaine de la psychiatrie grâce à des réformes de l'organisation et de l'ambulatoire, aux CAPPI et à la création d'unités mobiles de psychiatrie. Face à ces arguments à la fois positifs et négatifs, la majorité de la commission a finalement accepté ce projet de loi et vous recommande de suivre sa décision. Merci.
Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, cela a souvent été dit: applaudir ne suffit pas. La minorité de la commission remercie évidemment tous les acteurs qui ont permis de traverser la crise du coronavirus dans les meilleures conditions possible, avec une pensée particulière pour le personnel soignant dans son ensemble. Cependant, cette gratitude sincère ne peut, ne doit pas occulter les difficultés concrètes auxquelles ont été confrontés les employés des HUG avant et pendant la crise de la covid-19, sachant par ailleurs que notre attention est en l'état requise uniquement sur l'exercice 2019 et que l'approbation de ce rapport de gestion ne pourrait en aucun cas être justifiée par la crise.
En fait, pour éviter toute méprise, je répète une fois encore que mon rapport de minorité ne met aucunement en doute la gestion financière de l'hôpital, pas plus qu'il n'entend incriminer d'une quelconque manière l'engagement et le dévouement de ses collaborateurs et de ses cadres. La minorité a pleinement conscience de la complexité et de l'immensité de la tâche qu'implique la gestion des HUG; cette ampleur ne justifie toutefois pas de renoncer à questionner les options institutionnelles et politiques sur lesquelles elle repose. Des choix conditionnés tant par les acteurs politiques fédéraux et cantonaux - nos groupes politiques, en l'occurrence - que par les politiques d'austérité défendues par certains d'entre eux, la prégnance du lobby des assurances-maladie, les appétences des cliniques privées ainsi que l'évolution de la population, de ses caractéristiques et de ses besoins grandissants.
Ainsi, comment ne pas s'étonner, alors que le personnel fait état d'un manque constant d'effectifs, alors que les HUG ont été soumis à de successifs et drastiques plans d'économie, que l'institution termine l'exercice quadriennal avec un bénéfice de 17,3 millions, quand bien même l'année 2019 s'est révélée déficitaire à hauteur de 1,5 million ? Cet excédent de 17,3 millions aurait permis d'améliorer les conditions de travail des collaborateurs ou, à tout le moins, de pallier les manques les plus criants de personnel. Il ne s'agit pas de sous-estimer ou de mésestimer le travail réalisé par les HUG, mais il y a une réalité qu'il est nécessaire de prendre en compte. Or en tentant de mieux cerner la réalité des HUG, nous sommes confrontés à deux images discordantes: celle fournie par le conseil d'administration et la direction, et celle brossée par les représentants du personnel.
Aussi, parce que le rapport de gestion des HUG qui nous est soumis pour approbation fait l'impasse sur la réalité décrite par les représentants des salariés, parce qu'en tant qu'entité politique qui alloue aux HUG une part importante de leurs ressources, nous sommes responsables pour une grande part des difficultés auxquelles ils sont confrontés, la minorité vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser de voter ce rapport de gestion tant qu'une vision aussi superficielle de leur réalité nous sera donnée et qu'aucune piste concrète pour remédier aux problèmes récurrents ne nous sera présentée. Je vous remercie de votre attention.
M. Sylvain Thévoz (S). Mesdames et Messieurs les députés, c'est un fait que le vieillissement de la population et les maladies chroniques qui y sont associées augmentent, ce qui fait que l'hôpital, même si le nombre de patients varie peu, est susceptible de recevoir des cas plus lourds, polymorbides, dont la prise en charge est plus complexe. Cela implique des changements dans les prises en charge et une adaptation constante. Le rapport à la médecine change, la plupart des gens n'ont plus de médecin de famille, consultent les urgences immédiatement en cas de difficulté. Les urgences lourdes sont en hausse; les personnes qui chutent dans les escaliers ou ont une attaque, par exemple, engendrent une chaîne de soins importante.
Aujourd'hui, les HUG fonctionnent, sont à la hauteur des enjeux, font face au vieillissement de la population genevoise et ont tenu la baraque lors de la crise du covid-19, mais des difficultés majeures demeurent quant au recrutement du personnel et à son adéquation dans les différentes unités de soins, ce qui pose aussi la question de la formation du personnel soignant à Genève. Une pétition portée par les syndicats rappelle que les soignants sont en sous-effectif chronique dans la majorité des services des HUG, et cela a des conséquences sur la qualité des soins et les conditions de travail.
Depuis plusieurs années, les syndicats constatent en outre une dégradation constante des conditions de travail qui se traduit entre autres, selon eux, par des violations répétées des règles institutionnelles et de la loi sur le travail et par un management qualifié d'autoritaire. Le tout a pour conséquence un taux d'absence pour maladie de plus de 10%, avec les répercussions sur la qualité des soins que nous vous laissons imaginer. Les HUG dépensent presque 60 millions par année en personnel intérimaire.
Tout au long des auditions, nous avons pris acte des engagements de M. Levrat à ne plus recourir excessivement au travail intérimaire, nous avons pris acte de sa volonté ferme de changer de cap concernant la gestion du personnel et de renforcer le dialogue social. Le parti socialiste veut croire à cette prise de conscience et aux engagements de la direction des HUG. En conséquence, nous donnerons un oui critique à ce rapport de gestion des Hôpitaux universitaires de Genève pour l'année 2019 tout en restant scrupuleusement attentifs aux conditions de travail du personnel pour les années à venir. (Applaudissements.)
M. François Baertschi (MCG). Quand on entend parler d'austérité, il y a vraiment de quoi être surpris, surtout au vu des moyens considérables autant financiers qu'en effectifs qui sont mis en place aux HUG. Le groupe MCG, lui, se réjouit que l'on investisse autant dans la santé des Genevois. Nous avons de la peine à accepter certaines remarques qui noircissent le tableau. Certes, rien n'est idéal, rien n'est parfait, mais de nombreuses améliorations ont été apportées. La nécessité de faire toujours mieux est une constante, c'est d'ailleurs la ligne que suivent les HUG et nous nous en réjouissons également.
Nous avons déjà relevé l'excellent travail réalisé par l'hôpital en 2019; n'oublions pas que si nous avons réussi à gérer la situation, à éviter une véritable catastrophe en 2020, c'est aussi grâce à tout le travail préparatoire effectué l'année précédente. Le groupe MCG réitère ses félicitations aux HUG, à la direction, au personnel soignant, aux employés les plus humbles comme les nettoyeurs, tous ceux dont on parle en général moins.
Pour nous, pour les Genevois, le personnel soignant forme un outil remarquable, un outil dont on ne peut certes pas s'épargner l'examen critique et la remise en question, c'est évident, mais qui ne doit pas non plus devenir l'arbre qui cache la forêt et qui nous empêche de voir la chance exceptionnelle que nous avons de bénéficier d'une institution comme les HUG à Genève. Nous voterons ce rapport de gestion avec enthousiasme.
Le président. Je vous remercie. Nous passons au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 12672 est adopté en premier débat par 63 oui contre 9 non.
L'article unique du projet de loi 12672 est adopté en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12672 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 63 oui contre 7 non et 1 abstention.