République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 12525-A
Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Rolin Wavre, Cyril Aellen, Patrick Dimier, Pierre Nicollier, Pierre Conne, Fabienne Monbaron, Jacques Béné, Serge Hiltpold, Murat Julian Alder, Philippe Morel, Diane Barbier-Mueller, Marc Falquet, Christina Meissner ouvrant un crédit d'étude pour la prolongation des voies CFF de l'Aéroport de Genève en direction de Lausanne (dite « la boucle »)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 11 et 12 mai 2020.
Rapport de majorité de Mme Adrienne Sordet (Ve)
Rapport de minorité de M. François Baertschi (MCG)

Premier débat

Le président. Nous poursuivons le traitement des urgences avec le PL 12525-A dont le débat est classé en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à la rapporteure de majorité, Mme Adrienne Sordet.

Mme Adrienne Sordet (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, la commission des travaux, conjointement à celle des transports, a procédé à diverses auditions, notamment du premier signataire, du département, des CFF, de l'Office fédéral des transports et de M. Weibel, mais a également reçu les avis de l'ATE ainsi que de la CITraP. La plupart des personnes entendues s'accordent à dire qu'il est temps de renoncer au projet de boucle; telle est également l'opinion de la majorité de la commission des travaux.

Lors de certaines auditions, on nous a dit que la boucle était un projet beaucoup plus simple et moins cher à exécuter que celui de la gare souterraine. Une première réserve peut être émise quant à son montant, estimé à moins d'un milliard par M. Weibel, mais qui avoisinerait plutôt les 2 milliards, si ce n'est plus. Certes, cela reste toujours moins que les 4,7 milliards prévus pour la gare souterraine; vous n'êtes toutefois pas sans savoir que la seconde option découle d'un consensus entre la Confédération et notre canton: Berne accorde une subvention conséquente à Genève pour la réalisation de cette gare souterraine. Si le présent crédit d'étude devait être octroyé, alors nous pourrions dire adieu au soutien fédéral.

Le deuxième bémol a trait à la temporalité. On sait que le projet de gare souterraine va prendre beaucoup de temps, la fin des travaux étant prévue pour 2035, mais rien ne garantit que la boucle sera réalisée plus rapidement. Il s'agit d'abord ici d'un crédit d'étude, puis un crédit d'investissement devra être adopté. Or vous savez aussi bien que moi que le processus parlementaire peut parfois traîner. Sans compter que la maîtrise du foncier n'est pas totale, ce qui risque également de nous faire perdre du temps.

Enfin, nous nous montrons sceptiques en ce qui concerne l'insertion de la gare Cornavin au sein du réseau suisse. Prévue telle quelle, la boucle rallongera en effet les temps de parcours et ne s'insérera pas dans le système cadencé des CFF au niveau national. Voulons-nous réellement créer une Genferei supplémentaire et risquer une isolation ferroviaire ?

Ces réserves peuvent paraître minimes aux yeux de certains et certaines, et vous êtes nombreux et nombreuses à avoir lu les tribunes passionnées de M. Weibel et à ne pas comprendre pourquoi nous nous obstinons à refuser le crédit d'étude. Cependant, n'oublions pas pourquoi nous sommes là cet après-midi. Le but de ce projet est avant tout de désengorger la gare. Or en plus de prolonger les temps de parcours des utilisateurs et utilisatrices, et de créer une offre là où il n'y a pas de demande, la boucle ne permet pas de pallier la saturation de la gare Cornavin. Autrement dit, cette proposition ne résout pas les problèmes de saturation de la gare, ne répond pas aux besoins des citoyens et citoyennes, et nous fait croire à de malheureuses économies.

L'agrandissement souterrain de la gare est indispensable, tandis que cette boucle ne l'est pas. Rappelons d'ailleurs que cette idée venait initialement des CFF, mais c'était il y a vingt ans; depuis, ils ont décidé d'abandonner cette option. Peut-être fera-t-elle à nouveau sens lorsque la gare souterraine aura été réalisée, c'est-à-dire dans vingt ans, mais aujourd'hui, ce n'est pas le bon moment. Il est temps d'aller de l'avant avec la gare souterraine, essentielle pour renforcer le rail à Genève. Ne répétons pas les mêmes erreurs que pour les projets d'agglomération et ne donnons pas suite à ce projet. La commission des travaux vous recommande donc de refuser le crédit d'étude en rejetant l'entrée en matière sur ce projet de loi. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame. Le rapport de minorité est de M. François Baertschi; souhaitez-vous prendre la parole à ce stade, Monsieur ?

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Non, je la laisse à mon collègue Patrick Dimier.

Le président. D'accord, mais ce sera sur le temps du groupe.

Des voix. Non ! Non ! (Commentaires.)

Le président. La parole revient à Mme Marjorie de Chastonay...

M. Patrick Dimier. C'est moi qui...

Le président. Messieurs, c'est ainsi ! Le rapporteur de minorité est M. Baertschi; si un député du MCG s'exprime à sa place, ce sera sur le temps du groupe. Maintenant, nous reprenons l'ordre des demandes de parole, et c'est le tour de Mme Marjorie de Chastonay. Allez-y, Madame.

Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, je ne vais pas revenir sur les excellents arguments de la rapporteure de majorité, qui a expliqué pourquoi la commission s'oppose au projet de loi 12525. Les Vertes et les Verts refuseront d'entrer en matière pour plusieurs raisons. Notre vision du rail dans les années à venir, c'est prendre en considération plus de 150 000 habitants côté Châtelaine ainsi que les 30 000 personnes dans la région Plan-les-Ouates/Bernex qui résideront autour de la diamétrale.

Nous souhaitons que la halte de Châtelaine soit mise en place dans ce quartier dense et en plein développement de la rive droite; l'objectif est de construire cette station en même temps que l'extension souterraine de la gare, car il s'agit d'un prolongement. En ce qui concerne le tunnel du Furet, qui se trouve aussi à Châtelaine, il s'agit de l'inclure le plus rapidement possible dans les projets d'infrastructures ferroviaires tout comme dans la diamétrale. Non seulement la rénovation du tunnel serait moins coûteuse que la création de nouvelles infrastructures, mais en plus, cela permettrait de relier directement la rive droite, urbaine et dense, à la rive gauche, sans passer par la gare Cornavin; un gain de temps considérable pour les habitants et habitantes. Ainsi, notre soutien à l'extension de la gare, par le refus de ce projet de loi, ne constitue pas seulement un blanc-seing pour la diamétrale, mais également une ouverture pour la revitalisation du tunnel de Châtelaine.

Enfin, nous pensons que le rail est le moyen de transport qui a le plus d'avenir en termes écologiques. Pourquoi donc choisir de le relier à l'aéroport ? Nous refuserons d'entrer en matière, parce qu'accepter ce projet, c'est privilégier l'accès à l'aéroport et refuser le développement de la gare souterraine. Cette gare, indispensable pour notre Genève internationale, doit être à la hauteur de notre canton, elle doit être centrale, efficace et désengorgée. De toute façon, il est illusoire de croire que le débat ferroviaire peut se faire à Genève: qu'on le veuille ou non, il se passe à Berne. La boucle Weibel est donc malheureusement une belle Genferei. Merci. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie. Monsieur Christian Zaugg, c'est à vous. (Un instant s'écoule. Remarque.) Un petit instant ! Voilà, votre micro doit fonctionner maintenant.

M. Christian Zaugg (EAG). Ça marche ?

Le président. Oui, c'est bon.

M. Christian Zaugg. Bien, merci. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, un petit rappel: notre parti s'est fortement impliqué avec les habitants des Grottes, au travers du Collectif 500, pour soutenir le projet de gare souterraine en lieu et place de l'extension des voies qui devait se faire du côté du quartier des Grottes et qui aurait entraîné la destruction des immeubles sis en bordure de la gare Cornavin. Cette démarche, faut-il le souligner, a été largement validée par le peuple.

L'harmonisation de l'horaire cadencé, l'un des objectifs principaux du programme de développement stratégique de l'infrastructure ferroviaire, le PRODES, introduit des cadences d'un quart d'heure sur l'ensemble du réseau, et toute modification ne pourrait que porter préjudice à la mise en place des nouveaux horaires harmonisés pour la Suisse entière. Avec le projet de boucle, le système serait totalement déséquilibré, puisque la moitié des trains l'utiliseraient, ce qui ajouterait entre sept et dix minutes à un aller-retour pour Lausanne; dès lors, l'horaire actuel ne pourrait être maintenu.

D'autre part et malgré les indications de M. Weibel, le coût des sauts-de-mouton a été sous-évalué; il est ainsi faux de prétendre que le projet Weibel diminuerait sensiblement les frais d'infrastructure. Le tunnel du Furet, à titre d'exemple, exigerait des remises à niveau et un creusement des voies de nature à engager des travaux importants et donc fort onéreux.

Enfin, il est parfaitement exclu de renoncer à la subvention de la Confédération, qui s'élève à plusieurs milliards, pour l'extension ferroviaire de la gare Cornavin votée par les Chambres fédérales. Il n'y a pas d'alternative, et le renoncement à la gare souterraine consisterait à remettre tous les compteurs à zéro, reportant le projet aux calendes grecques. Pour nous, compte tenu des engagements pris, il est hors de question de revenir en arrière. Nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser l'entrée en matière et donc à rejeter le projet de loi 12525 ouvrant un crédit d'étude pour la prolongation des voies CFF de l'aéroport en direction de Lausanne. Merci. (Applaudissements.)

M. Stéphane Florey (UDC). Plus qu'une Genferei, c'est une Arlésienne dont il est question ici ! On en parle, on en parle, mais fort heureusement, nous ne la verrons sans doute jamais ! En ce qui me concerne, je siège dans ce parlement depuis 2007, et on évoquait déjà ce projet à l'époque; il portait simplement un nom différent, à savoir «la raquette», alors qu'il s'appelle maintenant «la boucle». Du temps de Robert Cramer déjà, plusieurs commissions en avaient pris connaissance; à diverses reprises, à la commission des travaux, à celle des pétitions, on nous a exposé la proposition en long, en large et en travers, mais elle n'a jamais convaincu ce Grand Conseil, qui s'est finalement largement prononcé en faveur de l'extension souterraine de la gare. Il faut donc admettre que le projet intitulé «la boucle» n'a pas séduit et que ce crédit d'étude n'est pas soutenu par grand monde.

Retenons ne serait-ce que l'argument des subventions fédérales: la Confédération s'est engagée pour le projet d'extension de la gare conjointement avec les CFF, et ceux-ci n'entendent pas privilégier le raccordement dit de la boucle, d'une part parce qu'il n'y en a pas de réelle utilité aujourd'hui, d'autre part parce que ce projet ne permettrait pas la cadence au quart d'heure ainsi que cela est prévu, ce qui pose véritablement problème. En effet, pour être performant, il faut offrir un bon service à la clientèle, et sans la cadence au quart d'heure, il sera difficile d'inciter plus de monde à prendre les CFF.

Pour conclure, Mesdames et Messieurs, cette boucle aura plus fait tourner en rond ce parlement qu'elle ne l'aura convaincu. Je vous invite donc à rejeter le projet de loi, et nous ferons bien évidemment de même. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je cède maintenant la parole à M. Patrick Dimier qui sera rapporteur de minorité ad interim en l'absence de M. François Baertschi.

M. Patrick Dimier (MCG), rapporteur de minorité ad interim. Merci, Monsieur le président, de rétablir le bon droit. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais commencer mon rapport de minorité en rendant un vibrant hommage à notre collègue Rolin Wavre, trop tôt disparu et initiateur de ce projet de loi. Rolin Wavre militait pour une extension des chemins de fer et non pas - vous pardonnerez pour une fois un petit jeu de mots - pour les chemins de la FER.

Contrairement à ce qui a été dit précédemment, s'opposer au PL 12525 va à l'encontre de la défense de l'environnement, ce qui est étonnant de la part de l'une des formations qui prétend en être la porte-parole, et est tout aussi contraire à l'intérêt des dizaines de milliers d'habitants des quartiers touchés par la création des nouveaux quais souterrains de Cornavin. Ceux qui contestent ce projet cherchent avant tout à fournir du travail aux corporations concernées. Etrangement, très étrangement, aucune étude comparative sérieuse n'a été menée, notamment par l'administration cantonale dont l'un des représentants a dit: «Si le projet de loi passe, alors on fera une étude.» Rien n'a été fait.

Pourquoi discuter du PL 12525 et le soutenir ? Tout simplement parce qu'avec des finances publiques tant cantonales que nationales totalement exsangues à la sortie du covid-19, il y a une économie potentielle. Allez, on double le coût de la boucle et on vous le met à 2 milliards; il reste toujours 3 milliards à économiser. Le CEVA était un enfumage et la fréquentation de ce réseau par les pendulaires est carrément calamiteuse, ceux-ci préférant continuer à engorger le trafic routier - 87% des voitures n'ont qu'une seule personne à bord. Venant de ceux qui prétendent lutter contre le trafic automobile, c'est assez amusant !

La minorité affirme que l'alternative de la boucle n'a pas été sérieusement envisagée, elle a même été sommairement écartée. Pourquoi ? Parce que la vraie question qui se pose n'est pas d'ordre ferroviaire, chers collègues, c'est une question immobilière: depuis que les CFF...

Le président. Vous passez sur le temps du groupe.

M. Patrick Dimier. ...sont devenus une société de capitaux, ils se rapprochent plus du promoteur immobilier que d'une entreprise de transport ferroviaire. Preuve en est le nombre d'accidents recensés ces derniers temps sur le réseau ferré. Nos concitoyens peineront certainement à comprendre que les formations qui se revendiquent de gauche, cryptomarxistes en tête... (Exclamations.) ...et qui sont obsessionnellement opposées aux lobbys des promoteurs et des spéculateurs fonciers, viennent aujourd'hui soutenir le projet d'extension de la gare qui va faire quoi ? Rien d'autre qu'accroître la valeur foncière et les rendements immobiliers des CFF !

La majorité de la commission ne tient aucun compte des infrastructures, si ce n'est sur le dos des contribuables. Comme l'a fort bien déclaré un collègue MCG ici présent, il n'y a aucun problème à étudier le projet de boucle dès maintenant, puisque les CFF eux-mêmes admettent qu'il faudra le réaliser dans les années 2045 - une fois de plus, le MCG a seulement vingt-cinq ans d'avance !

Selon le site officiel des CFF, les émissions de CO2 de l'ensemble de la régie s'élèvent à 132 525 000 tonnes par an; cela signifie que les émissions prévisibles dues aux chantiers sont égales à sept années - sept années ! - de la pollution globale des CFF. Et après, on vient nous parler, la bouche en coeur, de défense de l'environnement !

Il convient par ailleurs de signaler que l'extension de la gare Cornavin ne résoudra pas l'épineuse question, d'ailleurs soulevée à juste titre par les milieux environnementalistes, des convois très dangereux en provenance et à destination du Valais, à l'exemple du chlore, et qui constituent une menace particulièrement grave pour le centre-ville. La boucle, vous l'avez compris, permettra d'éviter ce risque. Les CFF eux-mêmes disent...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Patrick Dimier. Je peux quand même finir ma phrase ou bien ?

Le président.  Ça dépend de la longueur de votre phrase; a priori, non.

M. Patrick Dimier. Les CFF eux-mêmes, par la voix de M. Koenig, disent que cette boucle sera inévitable à un moment donné.

Le président. Merci. La parole est à M. Thomas Wenger.

M. Thomas Wenger (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre dans la bouche du rapporteur de minorité - vous transmettrez, Monsieur le président - quand il soutient que la fréquentation du Léman Express est calamiteuse ! Au lieu de le critiquer sans cesse, il ferait mieux de monter une fois dedans ! En effet, on l'a dit, juste avant le covid, les chiffres de fréquentation étaient extrêmement bons et dépassaient même les attentes avec des pics à 47 000, voire 48 000 voyageurs par jour... (Applaudissements.) ...donc il faut juste arrêter de raconter n'importe quoi !

C'est d'ailleurs justement en raison du Léman Express, Mesdames et Messieurs, que la gare Cornavin a atteint la limite de ses capacités, il faut donc la renforcer en ajoutant des voies et un quai. Le projet en surface a été combattu - à juste titre - et nous avons maintenant un projet de gare souterraine dont le crédit cantonal de 425 millions a été adopté à l'unanimité de notre parlement en 2016. La Confédération va injecter plus d'un milliard dans ce projet et la Ville de Genève complétera. Voter cette boucle, Mesdames et Messieurs, c'est mettre en danger l'extension souterraine de la gare, c'est mettre en danger le soutien financier de plus d'un milliard voté par le Parlement fédéral. Pardonnez-moi ce jeu de mots douteux, digne peut-être du rapporteur de minorité, mais puisque le projet d'extension de la gare Cornavin est maintenant bouclé, ce projet de boucle nous fait vraiment tourner en rond.

Mesdames et Messieurs, la raison principale pour laquelle refuser ce projet concerne l'exploitation. Les CFF nous l'ont dit, l'Office fédéral des transports nous l'a dit aussi, tout comme l'office cantonal des transports: ça prolongera de huit minutes le temps de parcours d'un train sur deux. Alors on ne va pas entrer dans les détails techniques, mais ça ne correspond plus à l'horaire cadencé des CFF qui est valable sur l'ensemble du réseau suisse et qui vise des temps de parcours parfaitement identiques pour pouvoir assurer les correspondances. Imaginez-vous sur le quai de la gare Cornavin en partance pour Lausanne: vous avez un train qui part directement pour Lausanne et un autre qui va d'abord faire le tour de la boucle, s'arrêter à l'aéroport, puis continuer jusqu'à Lausanne, ce qui prendra huit minutes de plus. Quel train allez-vous choisir ? Bien entendu, vous allez prendre celui qui va le plus rapidement à Lausanne, ce qui fait qu'un train sur deux passant par l'aéroport sera à moitié vide tandis que ceux qui se rendront directement à Lausanne et dans le reste de la Suisse seront en totale surcapacité !

De plus, Mesdames et Messieurs, et la rapporteure de majorité l'a souligné, les coûts du projet de boucle sont largement sous-estimés; on n'a pas le temps d'entrer dans les détails, mais d'après l'avis de tous les experts, ces coûts sont largement sous-estimés. Aujourd'hui, et j'en terminerai par là, nous avons une union sacrée entre la Confédération, l'Office fédéral des transports, les CFF, le canton, notre parlement, la Ville de Genève... Ne mettons pas en danger le milliard de la Confédération, ne mettons pas en danger l'extension souterraine de notre gare Cornavin, donc ne votons surtout pas ce crédit d'étude pour la boucle. Merci beaucoup. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie. La parole va à M. Rémy Pagani...

M. Rémy Pagani (EAG). Merci, Monsieur le président...

Le président. ...pour vingt secondes.

M. Rémy Pagani. Ah, pour vingt secondes ? Eh ben dis donc ! Le groupe Ensemble à Gauche, comme il a été dit, est contre le texte de loi qui nous est présenté et soutient le projet de gare souterraine. A cet égard, je rappelle que ce Grand Conseil a déjà voté 400 millions et la Ville de Genève 100 millions pour l'extension souterraine de Cornavin. Cette raquette a été discutée et analysée il y a dix ans, et il n'est plus question de revenir sur ce point. Je vous remercie de votre attention.

M. Olivier Cerutti (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, on peut dire cet après-midi que la démocratie existe: le citoyen et ingénieur Weibel a pu s'exprimer au travers de ce projet de loi. La démocratie, c'est bien, Mesdames et Messieurs, mais c'est encore mieux quand tout le monde est convaincu; aujourd'hui, nous pouvons être convaincus que le projet de boucle fait partie de l'histoire. Peut-être qu'un jour, on réalisera cette boucle, mais elle répondra à d'autres besoins, à d'autres objectifs.

Ce débat a fait participer deux commissions et conduit à un rapport fort intéressant d'une centaine de pages. Je ne reviendrai pas sur les détails, j'aimerais en revanche replacer l'être humain au coeur de nos préoccupations: nous avons besoin d'une gare souterraine à Genève, les voyageurs doivent pouvoir bénéficier d'un certain confort, il faut conserver les horaires cadencés. Je rappelle que l'horaire cadencé, c'est la montre suisse et que nous en avons besoin pour ne pas nous couper des autres cantons.

Deux informations méritent d'être relevées. La première, c'est celle que nous a communiquée très clairement l'Office fédéral des transports en nous disant: «Si vous réalisez la boucle, nous ne pourrons plus considérer Genève comme faisant partie de la Suisse en ce qui concerne le transport ferroviaire.» C'est grave, Mesdames et Messieurs ! Voilà la décision que nous devons prendre maintenant. La deuxième, c'est qu'il nous faut une gare exploitable, au centre de notre ville. On a tout entendu, on nous a dit qu'il allait y avoir un chantier perpétuel; non, Mesdames et Messieurs, cette gare sera réalisée sur son propre site, les terres seront évacuées par wagon.

Voici donc ce que le parti démocrate-chrétien souhaite vous proposer aujourd'hui: ne pas voter ce projet de loi et poursuivre les travaux tels que nous les avons engagés avec la Confédération. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, votre ancien collègue M. Rolin Wavre - pour qui j'ai une pensée particulièrement émue - avec l'élégance qui le caractérisait, avait pris contact avec moi avant de déposer ce projet de loi, m'expliquant son besoin de mieux comprendre les choix qui avaient été ceux de ce parlement il y a quatre ans; il estimait que les arguments avancés publiquement par certains méritaient d'être entendus. J'ai trouvé cette démarche extrêmement constructive. En fin de compte, le fait de vous avoir soumis ce texte a eu le mérite d'affermir la conviction qui semble être celle de votre Grand Conseil aujourd'hui.

En effet, j'ai entendu les uns et les autres, du moins celles et ceux qui se sont exprimés au sein de la majorité, dire combien ils avaient été convaincus par les auditions, les échanges ainsi que les arguments présentés dans le cadre des travaux, non seulement par l'administration cantonale, mais surtout par les CFF et l'Office fédéral des transports. Le débat a donc été très utile et nous permettra aujourd'hui, je l'espère, de conclure ces discussions qui durent effectivement depuis fort longtemps. Il s'agit désormais d'envisager de manière à la fois sereine et résolue le développement ferroviaire de ce canton et de cette agglomération qui a connu un très grand retard par rapport à d'autres régions de notre pays, retard que nous avons heureusement commencé à combler avec le lancement du Léman Express - qui, je le confirme, cela a été indiqué par l'un d'entre vous, constitue un grand succès, même si sa mise en exploitation n'a pas été épargnée par les aléas, avec une grève, puis la pandémie.

Le débat a eu lieu, Mesdames et Messieurs, et je souhaite maintenant que nous nous concentrions sur les gros travaux qu'il va falloir mener. Un montant de 1,7 milliard sera injecté ces prochaines années dans une économie locale qui en aura bien besoin, notamment dans le domaine de la construction. Tout cela nous permettra d'envisager des développements extrêmement intéressants et prometteurs pour la mobilité dans ce canton et son agglomération. Je vous invite donc, au nom du Conseil d'Etat et à l'instar de nombreux députés et groupes, ce qui me ravit, à refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Merci. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. A présent, j'ouvre la procédure de vote.

Mis aux voix, le projet de loi 12525 est rejeté en premier débat par 66 non contre 18 oui et 5 abstentions.