République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 5 juin 2020 à 14h
2e législature - 3e année - 2e session - 8e séance
M 2580-B
Débat
Le président. L'ordre du jour appelle le traitement de la M 2580-B. La parole est demandée par M. le député Bertrand Buchs.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président. Je remercie le Conseil d'Etat pour sa réponse qui est très bien, mais qui fait froid dans le dos. On connaissait déjà les risques liés au transport de chlore, puisque ça fait des années que de nombreux groupes politiques demandent l'arrêt de ces transports ferroviaires à travers le canton de Genève: les risques de décès sont énormes - plus de 300 ! - tandis que plusieurs milliers de personnes peuvent être gravement blessées - le danger est donc beaucoup plus important que celui de la pandémie actuelle.
A la commission de contrôle de gestion, lorsque nous avons discuté de la gestion des risques à l'Etat, deux questions avaient été posées, la première par M. Rossiaud sur le transport de chlore et la seconde par moi-même sur une pandémie possible; chaque fois, on nous a répondu ceci: «Ces facteurs ne sont pas pris en compte dans la gestion des risques de l'Etat.» Je remercie le Conseil d'Etat de se montrer aussi ferme dans sa réponse, parce qu'honnêtement, face à un tel péril, il faudrait interdire de façon unilatérale le transport de chlore dans notre canton et passer outre la loi fédérale, on ne peut pas continuer à prendre pareils risques avec la population. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Philippe Poget (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, nous allons prendre acte de ce rapport, mais en soulignant une fois encore, comme vient de le faire M. Buchs, les risques majeurs que nous font courir les transports ferroviaires de chlore à travers notre agglomération et tout au long de l'arc lémanique, non seulement pour les vies humaines, mais aussi pour la surcharge de notre système sanitaire et en coûts pour la société. Il n'est plus tolérable que les entreprises qui utilisent ces matières s'obstinent à refuser de les produire sur place sur la base d'une argumentation économique, d'autant plus lorsque l'on sait que l'industrie bâloise est capable de les produire sur site. Nous devons soutenir sans relâche les efforts du canton pour faire pression au niveau fédéral afin d'obtenir pour le moins la mise en oeuvre rapide et pleine des mesures issues de la déclaration conjointe des partenaires concernés, et à terme, bien sûr - je suis entièrement d'accord avec M. Buchs - l'interdiction de ces transports de matières dangereuses.
La semaine prochaine, le Parlement fédéral devra justement traiter une motion demandant que l'importation de chlore en Suisse se fasse exclusivement à l'aide de wagons-citernes disposant de la meilleure technique de sécurité, à savoir le RID+; nous allons exhorter l'ensemble de la délégation genevoise à Berne ainsi que tous les parlementaires à soutenir sans hésitation ce premier pas - qui ne constitue en effet qu'un premier pas - dans l'application des mesures permettant de réduire le risque encouru par notre population, et nous ne manquerons pas de suivre attentivement ce dossier pour arriver à notre but qui est l'interdiction de ces transports, notamment en travaillant avec les autres cantons concernés, celui de Vaud en particulier. Je vous remercie de votre attention.
M. Rémy Pagani (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, juste quelques mots pour souligner le caractère extrêmement dangereux des transports de chlore. Ça fait quasiment trente ans qu'on entend le même discours, qui est d'ailleurs repris d'une certaine manière aujourd'hui, à savoir: «Il faudrait sécuriser davantage les transports de chlore.» Or puisqu'on reconnaît que c'est extrêmement dangereux - je vous renvoie à des vidéos YouTube sur des accidents liés à des transports de chlorure de vinyle, par exemple aux Etats-Unis - alors il faut y mettre un terme, ce d'autant qu'aujourd'hui - et c'était déjà le cas il y a vingt ans - il est possible de produire sur place ces matières dangereuses. Il faut se donner les moyens de le faire, puisqu'on admet la situation. Ce genre de discours est tout à fait paradoxal.
Il faut savoir que nos voisins français s'opposent à la réouverture de la ligne du Tonkin précisément parce qu'ils nous soupçonnent de vouloir faire traverser les wagons de chlorure de vinyle par le sud du Léman. C'est absolument impossible, mais de fait, c'est ce qui bloque aujourd'hui le prolongement du Léman Express. A mon sens, les autorités cantonales devraient à tout le moins signer des accords - je crois du reste que c'est ce qui est en train de se faire - avec le gouvernement français pour interdire tout passage par le sud du Léman comme par la ville de Genève de ces produits dangereux.
M. Patrick Dimier (MCG). Pour rebondir sur la dernière partie de l'intervention de mon préopinant, ce ne sont pas du tout les risques liés au transport de chlore qui bloquent la réouverture de la ligne du Tonkin, c'est le fait que le maire d'Evian est propriétaire de parcelles qui jouxtent cette ligne et que, malheureusement, il y a fait des empiétements. Oui, si la ligne du Tonkin ne peut pas être réactivée, c'est en raison d'un blocage de la municipalité d'Evian, de son maire en particulier, ce qui constitue bien sûr un énorme problème, puisque nous soutenons avec fermeté cette réouverture. Mais, Mesdames et Messieurs, le meilleur moyen d'éviter que le chlore ne passe par la ville de Genève, eh bien c'est encore de réaliser la boucle ferroviaire à laquelle d'aucuns, y compris parmi ceux qui prétendent militer en faveur des transports publics, s'opposent. C'est un petit peu le... Comment vais-je formuler cela ? C'est une chenille qui nous ennuie.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, juste quelques mots pour vous dire que la protection de la population est rattachée à mon département, comme vous le savez, et que la question du transport de chlore à travers le canton de Genève fait partie de nos priorités. Le covid étant passé par là, les démarches entreprises ont été quelque peu retardées, mais je peux vous assurer que des mesures fortes sont en cours et seront poursuivies ces prochaines semaines. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat.
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2580.