République et canton de Genève

Grand Conseil

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P 2034-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition pour le maintien de l'arrêt TPG Bois-Gentil
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IV des 11 et 12 octobre 2018.
Rapport de Mme Adrienne Sordet (Ve)

Débat

Le président. La pétition que nous traitons à présent est classée en catégorie II, trente minutes. Vous avez la parole, Madame Sordet.

Mme Adrienne Sordet (Ve), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition demande qu'un arrêt provisoire installé près de l'arrêt Muséum soit maintenu. En effet, celui-ci dessert une zone de petits commerces ainsi qu'une école... (Brouhaha.)

Le président. Une seconde, Madame la députée ! Si le caucus PDC pouvait se déplacer un peu, ça nous arrangerait ! (Rires.)

Mme Adrienne Sordet. A l'issue des auditions, il ressortait que le principal argument pour la suppression de cet arrêt était celui de l'amélioration de la vitesse commerciale sur la ligne. Cependant, la suppression de cet arrêt désavantage de nombreuses personnes, notamment celles à mobilité réduite ou âgées. Il est vrai, et la minorité nous le rappellera sûrement, les arrêts Weber et Muséum sont proches de l'arrêt Bois-Gentil et la distance séparant ces deux arrêts est dans les normes. Pourtant, pour avoir fait l'expérience des transports publics avec des béquilles, je peux dire qu'une centaine de mètres de plus à parcourir peut être une très longue épreuve. Or, si la majorité est pour des transports publics efficaces, elle est aussi favorable à un réseau pour tous et toutes. Si la vitesse commerciale est un pan important de la politique des transports publics, il est essentiel de ne pas oublier le critère de la qualité.

Un autre point un peu dérangeant est le fait que l'arrêt ait été supprimé suite à un projet de piste cyclable. La majorité ne comprend pas pourquoi ces deux modes de transports doivent être mis en concurrence plutôt qu'en adéquation. Pourquoi opposer le bus au vélo ? Pourquoi ne pas remettre en question la place de la voiture au sein de la ville ?

La majorité invite le Conseil d'Etat à renforcer le dialogue avec les habitants et habitantes des quartiers si une décision semblable devait être prise à l'avenir. Avec tous ces éléments, la majorité vous recommande le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.

M. Alexis Barbey (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, qu'attend-on des TPG en ville et dans le canton ? Est-ce qu'il s'agit d'améliorer la vitesse et la densité de ce service ? Est-ce qu'il s'agit de garder un statu quo ? Est-ce qu'on veut établir un service de porte-à-porte, de sorte que chaque personne ait un arrêt TPG devant chez soi ? Pour le PLR, il est clair que c'est la vitesse commerciale qui doit être augmentée pour accroître l'attractivité des transports publics. Sur le tronçon où se trouve l'arrêt Bois-Gentil, on prévoyait suite à la suppression de cet arrêt une piste cyclable simplifiée. Cette suppression était également justifiée par la proximité des arrêts Weber et Muséum qui sont éloignés l'un de l'autre d'à peine 300 mètres. Ces deux arrêts ont d'ailleurs une meilleure fréquentation que celui de Bois-Gentil. C'est pourquoi le PLR vous propose de refuser cette pétition pour que l'arrêt Bois-Gentil soit effectivement supprimé.

Le président. C'est donc le dépôt que vous demandez, n'est-ce pas ? (Remarque.) Je passe la parole à M. le député Stéphane Florey.

M. Stéphane Florey (UDC). Monsieur le président, la situation décrite dans cette pétition est l'exemple parfait de ce qu'il ne faut pas faire en matière de transports publics. Premièrement, la suppression d'un arrêt tel que celui-là, on le voit bien, a donné lieu à une pétition qui a quand même récolté 750 signatures. On voit donc qu'on fâche les clients. Un client fâché, pour les TPG, c'est ce qu'il y a de plus mauvais !

Deuxièmement, on nous dit qu'on y gagne vingt à trente secondes. Trente secondes sur un trajet de plusieurs kilomètres, sur un trajet d'à peu près vingt-cinq à trente minutes ! Avec ce gain, on va faire de sacrées économies ! Non, le gain sur un arrêt tel que celui-là est nul. En théorie, oui, vous gagnez vingt à trente secondes; en réalité, c'est zéro gain ! Déjà, il y a une double mesure dont il faut tenir compte: d'abord, depuis le changement horaire de décembre, les arrêts se font sur demande. Tous les arrêts sont sur demande; on n'est donc pas obligé de s'arrêter. Ensuite, en plus de cette mesure - proposée par les TPG - le Conseil d'Etat de l'époque en a décidé une autre, la suppression d'arrêts. Pourtant, là-dessus, on ne gagne absolument rien, à part récolter une pétition et démontrer clairement que le gain est nul. En plus, on risque de ne pas parvenir à combler le manque financier résultant de la fameuse initiative demandant une baisse des tarifs; on n'a toujours pas gagné les nouveaux clients promis par les initiants suite à la baisse de recettes. Ce n'est pas avec ce genre de mesure qu'on va avoir de nouveaux clients, c'est une évidence ! Je suis un peu désolé quand j'entends un fonctionnaire à bout d'arguments oser vous regarder droit dans les yeux et vous dire qu'il faut comprendre, que lui il a un doctorat en sciences des transports. Nous, on est quoi ? On est les couillons de l'histoire !

Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, si, au final, la commission a reconnu que les transports publics étaient beaucoup trop lents, c'était une victoire d'étape. Le PLR l'a dit tout à l'heure, ils sont trop lents. C'est une victoire, en effet, mais nous n'arrivons absolument pas aux mêmes conclusions pour y remédier ! Certes, en supprimant des arrêts de bus, nous gagnerons du temps, ça semble à peu près naturel, mais est-ce la solution pour augmenter la vitesse commerciale ? Même si, pour l'heure, le cas de l'arrêt Bois-Gentil semble isolé, il met en exergue un problème plus large. Les Verts vous proposent d'autres pistes, depuis de nombreuses années, des solutions qui font leurs preuves ailleurs en Suisse - une initiative l'a prouvé dernièrement - notamment le fait d'organiser des voies en site propre pour les transports publics ou le réglage des feux de circulation de manière à donner la priorité aux transports publics, et, bien sûr, la généralisation et le développement de la mobilité douce, parce que c'est naturellement l'emprise de la voiture qui gêne la fluidité de nos transports publics !

De grâce, la rapporteure l'a dit, ne mettons pas en concurrence les transports publics et les vélos ! C'est ce que nous avons entendu en commission, où il nous a été dit clairement que si on souhaitait supprimer l'arrêt de bus, c'était aussi pour installer une piste cyclable sécurisée. Or, il s'agit ici de travailler sur ces deux modes de déplacement, qui peuvent évoluer ensemble, mais certainement pas en concurrence. Les préoccupations des pétitionnaires retiennent évidemment toute notre attention. Les Verts soutiennent cette pétition et ils vous encouragent tous à la renvoyer au Conseil d'Etat.

M. Pierre Bayenet (EAG), député suppléant. Mesdames et Messieurs les députés, Ensemble à Gauche soutient les pétitionnaires. Il est vrai que chaque fois qu'un arrêt de bus est supprimé dans ce canton, une pétition est déposée, et il est aussi vrai que, derrière une pétition, se cache parfois un peu d'égoïsme puisque les pétitionnaires s'intéressent à leur bien-être propre et non pas forcément au bien-être de l'ensemble des habitants de ce canton. Néanmoins, avant toute suppression, il faut beaucoup d'explications, une médiation avec les habitants du quartier, une réflexion collective, et cela n'a pas été fait dans ce cas-là. D'après ce qu'on a compris, les habitants du quartier ne se sont pas sentis entendus, et c'est la première raison pour laquelle nous soutenons cette pétition: il faut que ces habitants soient mieux entendus, qu'ils soient mieux consultés.

Il faut quand même rappeler que les Transports publics genevois offrent un service public qui doit être accessible à toute la population. La population genevoise est vieillissante, vous le savez, et elle va continuer à vieillir, nous le savons. Il faut donc que ce service public de transports soit aussi accessible aux personnes âgées, ce qui implique une distance réduite entre les arrêts et le domicile. C'est peut-être un peu la quadrature du cercle. Pour l'anecdote, j'en parlais l'autre jour à mon fils de huit ans qui m'a dit qu'il suffisait de faire des arrêts de bus qui ne soient autorisés qu'aux personnes âgées et que les bus ne stoppent que lorsqu'il y a des aînés à ces arrêts. Ça semble un peu compliqué, mais c'est une option qui est en réalité déjà utilisée et prévue par le Conseil d'Etat puisqu'il y a ces bus plus rapides qui ne desservent pas tous les arrêts. Une personne plus âgée qui a plus de temps à disposition sera d'accord d'avoir un bus moins fréquemment et les gens plus pressés seront d'accord de marcher cent ou deux cents mètres pour aller jusqu'à un arrêt où il y a un bus plus rapide.

En tout cas, la suppression d'arrêts de bus doit vraiment être un dernier recours, parce que nous devons avoir à l'esprit le bien-être de nos aînés et des personnes qui ont plus de mal à se déplacer - sauf si, bien sûr, d'autres options sont mises en oeuvre comme un service très efficace pour chercher à leur domicile les personnes âgées et handicapées. Ce serait évidemment une solution accueillie très favorablement - et pas seulement par Ensemble à Gauche, j'en suis convaincu.

Mme Marion Sobanek (S). Monsieur le président, je ne vais pas répéter ce que mes préopinants ont si bien dit, mais je voudrais encore souligner que la suppression des arrêts n'est pas seulement une histoire de confort. Si on veut véritablement aboutir à un transfert entre modes de transport dans une ville relativement aisée comme Genève, il faut proposer des transports publics confortables, dans lesquels on trouve une place assise et qui ne sont pas trop difficiles à atteindre à pied. Si on doit d'abord marcher 350 mètres pour se retrouver ensuite coincés comme des harengs lorsque le tram est plein, ce n'est pas cette mesure qui fera que les gens changeront de manière de se déplacer. On obtiendra une meilleure vitesse commerciale - Monsieur le président, vous pourrez le transmettre à mon collègue du PLR - en donnant la priorité aux transports publics, que le PLR combat d'habitude toujours si vivement.

Il faudrait évidemment aussi souligner qu'avec la suppression des arrêts de tram, le gain est actuellement quasi nul. Ayant vu la suppression d'un arrêt pour un gain de nonante secondes, je constate que le tram est régulièrement stoppé plus d'une minute et demie exactement à l'emplacement de l'arrêt supprimé ou plus loin vers la Terrassière. C'est donc inefficace ! Il nous faut des transports publics rapides, confortables et pas trop chers avec une bonne fréquence: dans ce cas-là, tout le monde changera de moyen de déplacement !

M. Guy Mettan (PDC). Monsieur le président, il se trouve que j'habite depuis une trentaine d'années dans ce quartier, je le connais donc relativement bien. Une partie du problème vient du fait qu'on a dû déplacer l'arrêt Muséum pour laisser tourner les bus qui venaient de la rue de Contamines, parce que ça bloquait complètement la circulation, surtout depuis que ces bus se sont rallongés: il y avait une accumulation, plus personne ne pouvait circuler. Du coup, en remontant l'arrêt Muséum d'une cinquantaine de mètres, on a raccourci le temps et la distance entre les deux arrêts, si bien que cela devenait non pas stupide, mais un peu superflu de conserver cet arrêt à Bois-Gentil qui se trouvait désormais à 200 mètres - même pas, à 150 mètres - du nouvel arrêt Muséum. Si on se met à la place des transports publics, on voit qu'on avait tout à coup des arrêts très resserrés. Il faut reconnaître que ce nouvel arrêt Muséum n'est pas du tout pratique, il n'y a absolument pas d'abri, ce n'est pas confortable pour les gens qui descendent. Les TPG devraient étudier une solution pour que les usagers soient au moins mieux servis, mais ce n'est pas la thématique dont nous traitons aujourd'hui; il est question de favoriser la circulation des bus. Il est vrai que nous n'avons pas besoin de deux arrêts aussi rapprochés, même s'il faut marcher un peu plus, malheureusement pour quelques habitants. Je rappelle encore que cet arrêt est en face de la rue de Contamines: pour les habitants qui y vivent, c'est un avantage que d'avoir cet arrêt à cet endroit, en tout cas pour descendre en ville. Pour ces raisons, nonobstant celles données par mes préopinants, je vous propose de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

M. Patrick Dimier (MCG). Monsieur le président, ma question porte plutôt sur la forme que le fond: est-ce que dans ce débat en particulier il a été procédé, soit par votre Bureau, soit par vous-même, à la levée de l'article 24, vu certaines des interventions ?

Le président. Ecoutez, l'article 24 n'empêche pas les gens de participer au débat ! Je passe la parole à M. le conseiller d'Etat Serge Dal Busco.

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cet intéressant débat me fait penser que la mission qui sera la mienne au cours des cinq prochaines années ne va pas être simple - mais je le savais déjà. Les prises de position des uns et des autres me montrent que, de toute évidence, si certains ont des doctorats en matière de circulation, ce n'est certainement pas le cas des personnes dans cette salle. Moi-même, je n'en ai pas dans cette matière-là. Toutefois, chacun a un avis et les avis sont parfois très contradictoires. Je fais ce clin d'oeil tout en relevant qu'il y a en effet beaucoup de contradictions dans ce qu'on a entendu.

Bien sûr, un arrêt a un effet sur la vitesse commerciale, c'est évident ! Je ne vais pas essayer de vous démontrer une évidence: quand on s'arrête, évidemment, on va moins vite ! Ça, c'est une certitude. Le confort et l'accessibilité sont utiles voire indispensables pour l'attrait d'un réseau de transports publics, mais la vitesse et la tenue d'un horaire le sont tout autant, si ce n'est davantage encore. Si, en plus, on atteint un autre objectif avec le cas qui nous intéresse, la création d'une piste cyclable, allons dans le sens par ailleurs voulu par certains qui soutiennent cette pétition ! J'ai de la peine à comprendre cette démarche, dans le fond. Il s'agit à juste titre de créer ou de recréer des parcours cyclables continus et, dans le cas d'espèce, c'est véritablement la suppression de cet arrêt qui permet de le faire. Mesurez donc la contradiction de certaines et certains que j'ai entendus ou la somme de contradictions qui peuvent être exprimées dans le cadre de cette affaire ! Ça ne va pas changer ma détermination à améliorer la vitesse commerciale des TPG avec des mesures comme celle-ci, qui n'entrave en rien le service et ne diminue en rien sa qualité. On l'a largement rappelé, les arrêts sont extrêmement rapprochés: 150 mètres entre celui que l'on propose de supprimer et celui qui se trouve à proximité. C'est parfaitement supportable et ça n'entrave en rien, à notre sens, l'accessibilité pour les clients ! Par contre, le maintien de l'arrêt est susceptible de réduire la vitesse commerciale, l'un des paramètres principaux de notre réseau que mes services et moi-même allons travailler à améliorer.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Je lance le vote sur la conclusion soutenue par Mme Adrienne Sordet, à savoir le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2034 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 45 oui contre 31 non.