République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 12297-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat approuvant le rapport de gestion du Conseil d'Etat pour l'année 2017

Premier débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous arrivons maintenant à la partie qui va nous retenir le plus longtemps, c'est-à-dire le débat sur le rapport de gestion du Conseil d'Etat, le PL 12297-A. Durant le premier débat, cinq minutes sont allouées aux rapporteurs et à chaque groupe ainsi qu'au Conseil d'Etat. Je donne la parole à M. Olivier Cerutti, rapporteur de majorité.

M. Olivier Cerutti (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, après un exercice 2016 sans budget, nous bouclons l'année 2017 avec la même stabilité financière et ce malgré un budget déficitaire. La concordance des recettes et des dépenses est au rendez-vous avec un léger excédent, ce qui est réjouissant au regard des investissements. Dans le cadre des travaux en commission, nous avons entendu, auditionné et questionné l'ensemble des acteurs de la fonction publique et du grand Etat pour évaluer les prestations que notre population était en mesure d'attendre. Dans l'ensemble, c'est plutôt positif. L'évaluation des besoins par le Conseil d'Etat donne un volet financier d'appréciation solide des moyens nécessaires pour remplir l'ensemble des missions de l'Etat, dans un équilibre entre les recettes et les charges.

Pour la première fois, la Cour des comptes a réalisé des audits. Nous relevons que ceux-ci contiennent des remerciements au Conseil d'Etat ainsi qu'aux différentes composantes de la fonction publique. L'un des éléments-clés de l'audit porte sur les estimations fiscales. Je répète ce que dit le rapport d'audit - vous savez que ce rapport est tenu secret; je ne sais pas si la LIPAD nous forcera encore pendant longtemps à cette gymnastique, mais enfin, tant que la loi n'est pas changée, c'est ainsi: la Cour des comptes considère que les modèles et les hypothèses sont adéquats et que les bases de données utilisées sont fiables. En effet, les éléments exogènes sont identifiés et considérés de sorte à ne pas biaiser les modèles mis en place. C'est un élément essentiel, Mesdames et Messieurs, tant pour la crédibilité du Conseil d'Etat que pour le sérieux et l'efficacité des travaux de la commission. Ainsi, la Cour recommande l'approbation des comptes consolidés sans remarque ni réserve, ainsi que le propose le Conseil d'Etat. Dans cet esprit, nous relevons dans l'exposé des motifs du Conseil d'Etat un certain nombre de satisfactions ainsi qu'un certain nombre de points négatifs. Je ne les reprendrai pas, ils font partie du rapport de majorité, dans lequel vous retrouverez l'ensemble de ces paramètres.

En résumé, nous constatons que les moyens à disposition sont relativement importants, que les charges ordinaires sont sous contrôle et varient sensiblement en fonction de l'augmentation de la population, qui ne devrait en aucun cas être dépassée par la croissance des charges. L'administration est la mieux placée pour rechercher en permanence le meilleur emploi de ses ressources. Nous sommes convaincus qu'à l'heure du numérique, il existe un espace pour des réformes transversales entre les départements et pour moderniser en permanence les missions de l'Etat, sans toucher les prestations. Par ailleurs, nous constatons aussi que les charges de personnel sont inférieures au budget en francs, Mesdames et Messieurs, mais en progression de 219 ETP. A ce stade, j'observe que l'instruction publique a été considérablement soutenue par le Conseil d'Etat - et là, je m'adresse, Monsieur le président, au deuxième rapporteur de minorité, M. Velasco, et au parti socialiste: Mme la conseillère d'Etat Emery-Torracinta en a largement bénéficié. Oui, Mesdames et Messieurs, nous avons mis en place un budget qui était déficitaire, nous avons dû retrouver une véritable concertation pour faire fonctionner l'Etat, et aujourd'hui, le premier défaillant à cette table, en tant que rapporteur de minorité... Et c'est là où je m'étonne, Monsieur le président: en sa qualité de rapporteur de minorité, il aurait pu s'abstenir, car quand on sait qu'aujourd'hui l'instruction publique, si chère à l'ensemble de cet hémicycle, occupe à elle seule plus de la moitié des ETP de l'Etat...

Je terminerai par les investissements: ils sont autofinancés, ce qui est passablement réjouissant. Cela est d'autant plus réjouissant qu'avec la construction du CEVA et celle de la route des Nations, une véritable mixité des transports est en train de se mettre en place grâce à ces investissements. Cela donnera des éléments structurants très forts, notamment pour l'aménagement de nos territoires et pour notre économie, et cela reste un des éléments les plus importants du rapport de gestion, auquel nous pouvons nous fier.

M. Jean Batou (EAG), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, on ne voit pas le temps de parole s'écouler... Donc je regarde ma montre. Tout d'abord, vous avez tous vu comme moi il y a quelques jours qu'en Suisse, le nombre de millionnaires explose. (L'orateur montre à l'assemblée une édition de la «Tribune de Genève».) Je vous le dis, parce que cela va réjouir tout le monde, et il s'agit pour 2017, l'année dont nous parlons, d'une augmentation de la fortune de l'ordre de 100 milliards. Pour Genève, cela doit être de l'ordre de 10 milliards, c'est-à-dire un peu plus que notre budget. Cela met donc les choses en place, et on sait qui dispose de quoi. (Remarque.)

Dans ce contexte, j'observe que l'année 2017 s'est inscrite dans la poursuite d'un travail de fourmi visant à économiser sur les dépenses publiques et sur les prestations... (Remarque.) ...et que nous avons, de l'aveu du Conseil d'Etat, réussi à limiter les dépenses à hauteur de 455 millions par rapport au moment où il a lancé son plan d'économies à l'automne 2015. Donc bien sûr, ces économies ont été freinées par la résistance des travailleurs de la fonction publique; elles ont été freinées aussi par la résistance des usagers, mais il ne faut pas se tromper: le recul est sensible dans les services, dans les prestations, et c'est une raison pour insister sur le problème des recettes, et pas seulement sur le problème des dépenses.

Je dirai en trois points ce qui, du point de vue de notre groupe, essentiellement n'a pas fonctionné, ou est critiquable dans la gestion du Conseil d'Etat pour l'année en question. Premièrement, c'est une très grande difficulté à gérer les relations avec la fonction publique. Evidemment, dans ce contexte d'économies systématiques, où tout est bon qui peut être coupé, les négociations ont marqué le pas quant à la nécessité d'écouter les partenaires sociaux, d'enregistrer les difficultés et de répondre aux objections. De manière générale, on a l'impression que le Conseil d'Etat est sourd aux doléances de ses employés. On peut d'ailleurs imaginer la raison pour laquelle le Conseil d'Etat n'a toujours pas décliné les nouvelles mesures d'économies qu'il entend prendre. Au titre du plan financier quadriennal, une série de mesures annoncée de manière très floue à la commission des finances devait être annoncée aux partenaires sociaux. On ne sait toujours rien, on vit dans un flou artistique, et quand les mesures arrivent, on s'étonne qu'elles provoquent des réactions d'incompréhension de la part des salariés du secteur public. Le premier enjeu concernant la gestion du Conseil d'Etat, c'est une grande difficulté à tenir compte du point de vue de son partenaire social.

Deuxièmement, et là c'est vraiment consternant, c'est le projet de recapitalisation de la caisse de pension de l'Etat de Genève. Le projet qu'a posé sur la table le Conseil d'Etat, le fameux projet de loi 12188, a été étudié à de nombreuses reprises par la commission des finances pour que celle-ci constate petit à petit, selon l'avis même de l'actuaire qui venait du secteur privé et qui avait été engagé par la commission des finances, que ce projet ne faisait peser la recapitalisation que sur les épaules des assurés, sans aucun effort significatif de l'Etat. Même un collègue du parti démocrate-chrétien que je ne nommerai pas a dû mettre à un moment donné sa casquette de patron du privé sur la tête pour dire à l'Etat: «Ecoutez, faites un effort ! Nous, dans le privé, quand on demande des sacrifices, on fait un effort.» C'est donc un projet qu'il faut vraiment regretter.

Le troisième élément, j'aurai l'occasion d'y revenir, Monsieur Dal Busco - Madame Fontanet, je parle encore à M. Dal Busco - est la RIE III, ou le PF 17, maintenant cela s'appelle autrement. C'est un objet mutant dont on aura l'occasion de reparler par la suite.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de deuxième minorité. Monsieur le président, je commencerai par répondre à l'interpellation du rapporteur de majorité. Ce n'est pas parce qu'un département est le plus important en nombre de francs et de prestations - celui de la formation des jeunes, tout à l'heure on l'a décrié - ce n'est pas parce qu'on lui donne la moitié des ETP qu'on a répondu à ses nécessités. Si c'était ainsi, ce serait facile de résoudre les choses ! Vous, vous donnez une valeur, mais la réalité c'est qu'il aurait fallu davantage de postes pour permettre à l'instruction publique d'accomplir ses missions comme il est nécessaire. Ça, c'est la vérité ! Ne venez donc pas nous dire que vous ne comprenez pas que nous, socialistes, nous ne votions pas ce rapport de gestion. Nous, les socialistes, vous verrez, nous votons les comptes. Les comptes, c'est une chose, la gestion c'en est une autre. Quand on voit que deux des trois projets majeurs, à savoir SCORE et celui concernant la CPEG, n'ont pas trouvé de solution, vous comprendrez que nous nous posions quand même des questions ! Toute une législature sans avoir trouvé une solution pour ces trois projets ! Je parle aussi du PF 17; même si nous connaissons effectivement une victoire - parce que les propositions soumises sont non avenues - nous devons quand même nous interroger sur les trois projets majeurs pour ce Conseil d'Etat. Parce que nous traitons de la gestion sur quatre ans, Monsieur le rapporteur de majorité, nous n'approuvons pas seulement la gestion de 2017. C'est la gestion sur quatre à cinq ans. Or sur ces quatre ou cinq dernières années, on ne peut pas approuver cette gestion. Il n'y a rien à dire. Ces trois projets majeurs ne sont pas passés, et j'espère que la nouvelle conseillère d'Etat chargée du département des finances aura plus de succès. Peut-être ferez-vous preuve d'ouverture, Madame ! Je n'en sais rien, mais en tout cas, le manque patent d'ouverture à des négociations avec la fonction publique a été clair et net. Rien que cela fait que nous ne pouvons pas voter ce rapport de gestion.

Quant aux économies de 350 millions, c'est vrai que le Conseil d'Etat a dit: «Bravo, nous avons obtenu 350 millions !» Mais ce sont 350 millions obtenus par une politique de réductions linéaires de 1%. Et qu'y a-t-il de plus absurde, Mesdames et Messieurs, que de faire des réductions linéaires dans les départements ? Parce que je suis d'accord qu'il faut répartir autrement des énergies, ou même des fonctions, et qu'effectivement, dans certains départements, certaines prestations méritent peut-être moins de fonctions ou de sommes allouées que d'autres. Mais enfin, une réduction linéaire, appliquée au sein de certains départements, à l'hôpital par exemple: il se voit amputé de millions, tandis que certaines entités se font amputer de 10 000 F ! Je trouve que cette politique était absurde. En plus, on parle de ces 350 millions d'économies comme étant un grand succès. Mais non ! Parce que ce sont les conséquences qu'il faut voir !

Un autre élément important pour nous concerne les annuités. Comme vous le savez, les annuités posent de gros problèmes pour les entités subventionnées, telles que l'IMAD, l'hôpital, et j'en passe. Il y a deux ans, les socialistes avaient déposé un projet de loi pour essayer de régler ce problème. Il a été renvoyé deux fois en commission, est venu deux fois en plénière, et à l'heure actuelle, depuis deux ans, il n'a toujours pas trouvé de réponse. Rien que ce fait-là, le fait qu'on oblige ces entités à économiser sur d'autres prestations pour pouvoir assumer les annuités du personnel, rien que cela, Mesdames et Messieurs, fait que nous, les socialistes, nous ne pourrons pas accepter ce rapport de gestion.

Enfin, c'est vrai que votre leitmotiv, chers collègues de la majorité, c'est que les fonctionnaires sont des privilégiés. (Remarque.) Non, c'est ce qu'on entend toujours à la commission des finances, n'est-ce pas, Monsieur Batou ?

M. Jean Batou. Oui, oui !

M. Alberto Velasco. Mais qui sont les privilégiés, Mesdames et Messieurs ? Qui sont les privilégiés ? Certaines personnes gagnent des millions par année ! Des millions ! (M. Jean Batou tend à M. Alberto Velasco l'édition de la «Tribune de Genève» qu'il a montrée à l'assemblée lors de son intervention.) Voilà, ici... (L'orateur prend le journal et le montre à l'assemblée.) ...comme vous l'a montré mon collègue: ça, ce sont les privilégiés ! Mais votre attitude, c'est de dire aux petits, par rapport à ceux qui gagnent un peu plus: «Vous savez, l'autre, c'est un privilégié par rapport à vous !» (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Et notamment sur la police, Mesdames et Messieurs ! Mais je vais vous dire une chose, ce sont les pauvres qui ont besoin d'une police de qualité et d'une sécurité fonctionnant comme il se doit ! Pour cela, il faut effectivement payer correctement la police, parce que quand on paie mal la police, Mesdames et Messieurs, cela donne des polices corrompues, et corrompues à tel point que ce sont les classes populaires qui subissent le plus ce désagrément. Les policiers ne sont donc pas des fonctionnaires privilégiés ! Ce sont des fonctionnaires qui gagnent honnêtement et dignement leur vie. Les privilégiés dans ce canton...

Le président. Vous parlez sur le temps de votre groupe.

M. Alberto Velasco. Oui, eh bien j'arrête tout de suite. Les privilégiés dans ce canton, ce sont d'autres classes, et on les connaît. Voilà, Mesdames et Messieurs. On reprendra la critique de ce rapport de gestion, politique publique par politique publique.

M. Edouard Cuendet (PLR). Le groupe PLR ne faisant pas partie des rapporteurs, il paraît nécessaire d'exprimer aussi cette voix de la sagesse. Le groupe PLR va approuver le rapport de gestion 2017, dans la mesure où les comptes laissent apparaître un excédent de recettes de 69 millions, alors que le budget montrait un déficit prévu de 80 millions. Mais alors, vous pouvez me faire confiance, cette approbation n'est pas l'expression d'une allégresse particulière, mais l'expression du sens des responsabilités du groupe PLR, une qualité dont ne fait pas preuve le groupe socialiste, qui a cru bon - malgré son statut de parti gouvernemental - de refuser ces comptes, alors que, comme l'a rappelé notre excellent collègue Cerutti, le DIP - comme je l'appellerai encore - a été très largement servi.

Ce n'est pas l'euphorie, parce que le PLR constate que, malheureusement, le Conseil d'Etat n'a pas été capable de mener à bien les mesures structurelles qui sont pourtant absolument nécessaires pour contenir de manière pérenne les dépenses et l'endettement public stratosphérique: Genève bat toujours les records du monde, à peu près, en la matière et malheureusement... Alors c'est vrai que le gouvernement n'a pas été aidé par la majorité de gauche composée du MCG, d'Ensemble à Gauche, des Verts et du PS, qui ont systématiquement balayé les propositions de réformes. Evidemment, ce n'est pas ici que je vais entrer dans le détail des différentes politiques publiques, ce sont mes collègues qui le feront par la suite, mais je voulais juste parler du DIP, puisqu'on voit que le PS, qui a pourtant été le mieux servi - enfin, sa magistrate a été la mieux servie - refuse ces comptes et que le DIP n'a pris aucune mesure pour essayer de contenir ses charges, ne serait-ce qu'avec le début d'un commencement de réflexion sur le nombre d'heures d'enseignement pour se rapprocher de la moyenne suisse.

Parmi les grandes cacades de la législature, on relèvera aussi le désenchevêtrement des tâches entre le canton et les communes. Le plus bel exemple d'embourbement est celui du Grand Théâtre, dont le chantier s'est d'ailleurs lui aussi embourbé, et où la Ville de Genève nous a dansé sur le ventre ! On peut aussi relever très rapidement la guerre entre les cliniques privées et les HUG qu'on ne peut que regretter. Malgré la qualité des prestations fournies, nous relevons sur nos bancs une certaine tentation d'hégémonie des HUG et notre groupe pense qu'il est temps de pacifier la situation et de cesser cette politique de silos qui augmente les coûts de la santé.

Je m'arrêterai quelques minutes sur les préoccupations principales du PLR qui portent premièrement sur la réforme de la fiscalité des entreprises, qui doit absolument être menée à bien dans notre canton. On constate que le volet fédéral avance à grands pas et que le canton de Vaud voisin, aussi rupestre soit-il, a déjà de l'avance, puisqu'il va introduire son taux à 13,79% le 1er janvier 2019, alors qu'à Genève, on sera peut-être encore en train de discuter du sexe des anges. Je remercie Nathalie Fontanet d'avoir pris ce dossier en main et d'avoir immédiatement entamé des consultations dans un dossier qui s'enlisait. Elle aura tout notre soutien dans ce débat et je la remercie.

Notre autre préoccupation porte bien entendu sur la réforme de la CPEG... (Remarque.) ...où on voit que des mesures structurelles sont absolument nécessaires. L'aile «batousienne» veut évidemment faire payer l'entier par les contribuables genevois qui sont déjà passés à la caisse et qui ne se laisseront pas tondre une deuxième fois - là, on se fait des illusions, il n'y a aucune chance ! Mais, de toute façon, je suis assez rassuré en écoutant le président de la CPEG, qui est d'ailleurs un de vos membres, avec qui vous êtes en ligne directe, comme certains aujourd'hui avec... Voilà. Vous êtes donc en ligne directe avec M. Jimenez, puisque vous dites clairement que vous lui parlez à peu près quotidiennement, et M. Jimenez m'a beaucoup rassuré ce matin en annonçant qu'au fond, il n'y avait pas besoin de mesures d'assainissement de la CPEG, que tout allait bien. Au PLR, on accueille cette déclaration avec une certaine circonspection; et surtout, dans l'attente de l'autorité qui va prendre la décision finale - heureusement, nous serons sauvés par le bailli bernois - soit l'autorité de surveillance des fondations et des caisses de pension qui décidera si ces mesures sont nécessaires ou pas. Ce n'est pas le groupe Ensemble à Gauche, ce n'est pas M. Jimenez, c'est la voix de la sagesse bernoise qui va dire la vérité. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) M. Jimenez a donc perdu une bonne occasion de se taire, sauf à nous dire qu'il n'y avait vraiment besoin d'aucune mesure. C'est ce que certains ont compris, je me réjouis de voir les résultats réels.

Pour terminer sur une note résolument positive, je saluerai le fait que la politique volontariste en matière d'investissements a été poursuivie, pour rattraper le retard que nous avions en matière d'infrastructures. Certains font tout pour bloquer les infrastructures routières, mais heureusement, nous allons avancer, notamment, je l'espère, avec la route des Nations. Un des éléments les plus importants...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Edouard Cuendet. ...n'en déplaise au MCG, est la mise en fonction prochaine...

Le président. Merci.

M. Edouard Cuendet. ...du CEVA. Je vous remercie.

M. Christian Dandrès (S). Mesdames et Messieurs les députés, comment peut-on se réjouir d'un excédent de recettes, alors que l'Etat ne peut répondre à tant de besoins de la population aujourd'hui et que le Conseil d'Etat a pris des mesures qui ont entraîné une paupérisation de la population ? Je prends quelques exemples: nous allons discuter au mois d'août de la question des soins dentaires; il a fallu qu'un parti politique lance une initiative pour qu'enfin ce thème soit abordé. Autre exemple, les prestations complémentaires: depuis maintenant des années, les personnes qui en bénéficient tombent dans la pauvreté. Alors que l'objectif, selon la Constitution, est de garantir un minimum pour que ces personnes puissent vivre de manière digne et décente, celles-ci voient effectivement leur revenu amputé, parce que les loyers augmentent et que le Conseil d'Etat refuse absolument de tenir compte de ces hausses de loyers dans le cadre des barèmes des prestations complémentaires.

Le Conseil d'Etat a malheureusement mené, la nuque raide, une politique syndicale lors de la dernière législature autour de la défense des petites entreprises - j'entends par là, sous l'angle de ses actionnaires exclusivement et non sous l'angle de ses salariés. Malheureusement, de ce côté-là, on a connu un recul massif, malgré la mise en oeuvre de quelques mesures de surveillance du marché de l'emploi. C'est une bonne chose, nous les saluons, néanmoins nous nous interrogeons: lorsqu'il n'y a pas de salaire minimum, comment des mesures de surveillance permettraient-elles de lutter contre un dumping et d'assurer que les personnes puissent avoir, par le travail, des salaires suffisants pour couvrir leurs besoins ? C'est une illusion ! Le Conseil d'Etat a un travail à mener pour faire en sorte que des salaires corrects soient respectés, mais il faut d'abord que les salaires soient corrects. Au lieu de cela, le gouvernement a mené une politique autour de la réforme de la fiscalité des entreprises. Le projet fédéral a été claqué par le peuple à Genève, et le Conseil d'Etat revient à la charge avec un dogmatisme absolu autour des pourcentages, sans même tenter une discussion sérieuse avec les partis notamment gouvernementaux; il poursuit encore ses mesures budgétaires tout en refusant tout effort supplémentaire de la part des personnes qui ont bénéficié d'importantes sources de revenus, ne serait-ce qu'en acceptant ou en soutenant le projet de suspension temporaire du bouclier fiscal qui aurait permis d'obtenir une centaine de millions de plus. La conséquence de tout cela, c'est un appauvrissement de la population, alors que le produit intérieur brut augmente: tandis que celui-ci est de 54 milliards, ce qui est absolument exceptionnel, des milliers de personnes se trouvent à l'Hospice général. C'est quelque chose d'absolument scandaleux.

Voilà pour la critique de la politique du Conseil d'Etat. Maintenant, il y a une critique à émettre également sur la gestion des dossiers par le Conseil d'Etat. Nous avons évidemment entendu parler tout à l'heure de SCORE, des annuités et également de la CPEG. Ce qui n'a pas été dit, c'est que, dans la foulée de SCORE, le Conseil d'Etat a poursuivi de facto un gel des réévaluations de fonctions. Un arrêté a été pris en 2010 pour geler toutes les réévaluations de fonctions. Ses effets ont duré sept ans et, lorsque la Cour de justice a sanctionné les pratiques du Conseil d'Etat, le département des finances a immédiatement concocté dans sa cuisine un projet de loi qu'il a déposé au Grand Conseil et qui a été renvoyé à la commission ad hoc. Or ce projet n'a aucune légitimité et n'a pas été validé ne serait-ce que par une discussion avec les partenaires sociaux. On nous raconte qu'on a auditionné vingt fois les personnes; on peut les auditionner autant de fois que l'on veut, s'il n'y a pas une vraie négociation, ce travail est vain. Le Conseil d'Etat a déposé un projet sans qu'il y ait la moindre discussion avec les partis politiques, notamment gouvernementaux, ce qui fait que ce projet est aujourd'hui dans les limbes.

Sur la question de la CPEG, nous sommes à peu près au même niveau, c'est-à-dire que neuf mois avant l'échéance qui avait été fixée à juin 2018 pour trouver une solution au problème rencontré par la CPEG, le Conseil d'Etat dépose un projet de loi, tout aussi mal ficelé que le projet SCORE. Or, s'agissant de ce PL 12188, alors que nous sommes bientôt au-delà de la date fixée par la CPEG, nous apprenons qu'il y aurait des problèmes à propos de la question de la comptabilité des actifs - la Cour des comptes se réveille ! - et c'est quelque chose de profondément scandaleux.

Autre question qu'il vaut la peine de soulever, celle de l'annuité 2016. C'est une mesure que le Conseil d'Etat a utilisée, il s'en vante d'ailleurs dans son rapport, en indiquant qu'il a réalisé 40 millions d'économies, alors même que le Grand Conseil avait voté son rétablissement. Le Conseil d'Etat, par une sorte de tripatouillage de publications de lois, a réussi à économiser cet argent, il s'est fait également taper sur les doigts par la Cour de justice. Je ne pense pas qu'on puisse qualifier cette façon de fonctionner de gestion optimale ou efficiente des deniers de la république. Je pense même qu'on malmène des aspects élémentaires de l'Etat de droit, raison pour laquelle le groupe socialiste ne peut pas accepter ce rapport de gestion.

M. Jean-Luc Forni (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, vous le savez sans doute, c'est en 1674 que le poète Nicolas Boileau a rendu célèbre la fameuse règle des trois unités, celle qui régira le théâtre classique français, à savoir l'unité d'action, l'unité de lieu et l'unité de temps, une règle qui ne devrait plus avoir de secret pour notre parlement. Pourtant, Mesdames et Messieurs, dans la pièce annuelle que représente l'examen des états financiers, cette règle des trois unités semble oubliée.

D'abord, l'unité d'action: une seule intrigue par pièce. Alors que nous devrions juger de la bonne gestion des départements, de la qualité des prestations à la population ou de la viabilité des dépenses budgétaires, notre parlement outrepassera sans aucun doute sa mission pour préférer le combat idéologique. Ensuite, l'unité de lieu: une intrigue dans un seul et unique lieu. Alors que nous devrions nous prononcer sur la gestion globale de l'Etat, sans avoir à répéter le travail déjà effectué par les commissaires, sans surprise, ce parlement oubliera une fois de plus où il se trouve pour prendre les aises d'une commission. Enfin, l'unité de temps: une intrigue dans une seule et unique journée. Sans surprise, nous sommes partis pour plusieurs heures de discussion, qui n'apporteront aucune plus-value à nos institutions et à notre population.

Dans le canton de Vaud, le Grand Conseil procède au débat sur les comptes et le rapport de gestion en une heure et demie, alors qu'ici nous sommes partis pour une dizaine d'heures, sans réel bénéfice pour notre canton, comme je l'ai déjà dit. Le PDC a toujours critiqué ce problème de méthode qui incarne l'un des dysfonctionnements de notre parlement. La gestion y est abandonnée pour malmener les magistrats dont les décisions politiques déplaisent, comme cette année pour la sécurité et la mobilité, ce qui ne fait guère avancer Genève.

Loin de ces jeux de clans, le parti démocrate-chrétien, satisfait par la gestion du Conseil d'Etat, acceptera toutes les politiques publiques et par là même son rapport de gestion. Le parti démocrate-chrétien salue à cet égard des finances saines au service de la population, avec un excédent de 69 millions pour le compte de fonctionnement de l'Etat. Il est vrai que des éléments non prévus améliorent le résultat, notamment la Banque nationale suisse, le pouvoir judiciaire ou encore des dénonciations spontanées de contribuables. Ce résultat positif est rendu principalement possible par la gestion rigoureuse et responsable du magistrat Serge Dal Busco, qui est parvenu à mener avec ses collègues à une réduction des charges de l'administration sans pour autant dégrader les prestations délivrées à la population. Qu'il en soit vivement remercié.

Saluons à plus long terme un travail conséquent au service de notre canton, un excédent cumulé sur la législature de quelque 100 millions, une dette qui se réduit sensiblement depuis 2014, des besoins en fonds étrangers qui diminuent et nous éloignent du frein à l'endettement, des mesures d'efficience et d'économies récurrentes à hauteur de 400 millions et des investissements maintenus à un niveau élevé et totalement autofinancés par l'exploitation courante depuis trois ans. A ce titre, l'arrivée du Léman Express apportera tant à la mobilité qu'à la restructuration urbanistique de notre territoire un véritable changement d'échelle favorable à notre développement économique. Nous pouvons aussi remercier notre ancien conseiller d'Etat Luc Barthassat d'avoir tenu à la fois les délais de cette importante réalisation et les cordons de la bourse.

Il est cependant regrettable de constater, et cela a été dit, que la majorité trouvée en décembre 2016 autour du budget 2017 n'est pas la même aujourd'hui pour valider l'exécution des politiques publiques priorisées - nous pensons particulièrement à l'instruction publique. Ce vote est à l'image de la dernière législature, faite de majorités précaires, guère solides et ayant amené finalement notre canton à l'immobilisme reproché aujourd'hui au seul Conseil d'Etat de la précédente législature.

Pourtant, l'heure n'est pas à la paresse. Même si les résultats de la législature sont plutôt encourageants, le chemin pour doter notre canton de finances solides est encore long. Relevons deux éléments préoccupants: les revenus de l'impôt sont en diminution et la réforme de la caisse de pension devient de plus en plus urgente; sans elle, l'Etat s'exposera à des risques importants en matière de financements. Le parti démocrate-chrétien s'engage avec détermination à poursuivre et à consolider les efforts initiés durant la législature en faveur d'une gestion saine des finances publiques. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Notre parti considère en effet qu'il est crucial de poursuivre les réformes structurelles nécessaires au sein de l'Etat afin de réduire ses charges et de maîtriser la dette, tout en assurant une politique sociale solide et des investissements élevés. Ces réformes ne se feront pas sans l'engagement des partis politiques responsables, prêts à abandonner la posture politique pour épouser celle plus gouvernementale du compromis. Le Conseil d'Etat doit y prendre toute sa part. Il est attendu de lui qu'il expose une véritable vision des enjeux financiers du canton pour les cinq années à venir et que l'ensemble du collège...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Jean-Luc Forni. ...fasse des choix clairement exprimés. Notre canton et notre population...

Le président. C'est terminé. Je vous remercie.

M. Jean-Luc Forni. ...d'avance l'en remercient.

Mme Françoise Sapin (MCG). Dans l'ensemble, les comptes de l'Etat de Genève et la gestion peuvent être qualifiés de satisfaisants et réjouissants - puisqu'ils s'achèvent notamment avec un excédent de 69 millions - ce d'autant plus qu'au départ, le déficit était prévu à 79,5 millions. Cela est dû à de bonnes surprises en matière de rentrées fiscales extraordinaires, qui se sont déjà produites dans les années précédentes. Cette manière de procéder et d'arriver dans les comptes nous démontre qu'il est extrêmement difficile de prévoir les rentrées fiscales avec précision au moment de l'établissement des budgets.

De plus, les investissements sont entièrement autofinancés, et on peut surtout se féliciter de voir l'endettement du canton de Genève baisser de 90 millions, et ce toujours grâce à ces rentrées fiscales extraordinaires, mais également grâce à la maîtrise des dépenses générales de l'Etat dans les départements.

Ainsi, nous avons pu sauvegarder les prestations essentielles. Il serait nécessaire de serrer encore la gestion des finances publiques. Il reste bien entendu beaucoup de marge d'optimisation. Il est à relever également que la Cour des comptes n'a émis aucune remarque ni réserve à ce sujet, ce qui est aussi réjouissant.

En ce qui concerne la gestion, d'une manière générale, à la suite de diverses auditions menées à la commission des finances, le MCG se déclare également satisfait, sauf pour deux politiques publiques, sur lesquelles nous aurons l'occasion de revenir en temps utile. Pour toutes ces raisons, le MCG acceptera l'entrée en matière sur ce projet de loi.

M. Mathias Buschbeck (Ve). Ce débat est également l'occasion de faire le bilan de l'ancien Conseil d'Etat et, comme les autres années, vous n'en serez pas surpris, les Verts refuseront ce rapport de gestion. De manière générale, les priorités fixées par le précédent Conseil d'Etat n'étaient pas les nôtres. Nous avons consacré chaque année un peu plus de ressources à la police, à la sécurité, à la construction de prisons, mais le budget de fonctionnement de l'Hospice général n'a pas augmenté, alors que le nombre de dossiers suivis explose depuis des années. On crée des postes pour étudier la traversée du lac, à laquelle Berne n'apportera pas son soutien, et, pendant ce temps, on diminue l'offre des transports publics. Nous pourrions continuer longtemps ainsi cette liste à la Prévert. Nous le ferons lors de chaque politique publique pour vous expliquer notre refus.

Je terminerai sur le fonctionnement général du Conseil d'Etat. Les Verts ont profondément regretté l'absence totale de transversalité et de cohésion, liée à un fonctionnement en silos. Nous avions l'impression que chaque conseiller et chaque conseillère d'Etat se gardait bien d'interférer dans le département de ses collègues, pour éviter que ceux-ni n'interfèrent à leur tour dans le sien. Nous espérons que le prochain gouvernement fonctionnera mieux, et ce sera sûrement le cas s'il tire à la même corde. Je vous remercie.

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je suis très heureuse d'être là aujourd'hui, même si je n'ai pas participé à la gestion dont j'ai l'honneur de vous présenter le rapport. Néanmoins, mon élection me doit cette primeur, et je m'en réjouis. Je vous prie d'excuser l'absence du président du Conseil d'Etat, qui est parti avec la plupart de nos collègues rejoindre le pape - M. Apothéloz et moi-même avons pris la décision de rester ici. (Commentaires.) Espérons que cela soit de bon augure pour ce début de législature aujourd'hui et que je ne commette pas un impair au regard de la loi sur la laïcité avec ces quelques mots.

Comme chaque année, Mesdames et Messieurs les députés, vous avez à vous prononcer sur la gestion du Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat a-t-il bien géré les deniers publics ? Les a-t-il affectés conformément aux décisions du parlement et aux priorités déterminées dans le programme de législature ? Telles sont les questions auxquelles vous devez répondre aujourd'hui et demain.

Du point de vue strictement comptable et financier, thèmes que j'aborderai très rapidement et que je développerai ultérieurement dans l'examen des états financiers, force est de constater que les comptes ont été bien tenus et qu'ils sont bons. Ils sont positifs à hauteur de près de 70 millions, alors que le budget était déficitaire de 80 millions. L'écart est très faible par rapport au budget, ce qui met en exergue la très bonne qualité des projections. Les investissements, qui ont atteint plus de 600 millions en 2017, sont autofinancés et ne sont donc pas venus augmenter la dette. Au contraire, celle-ci a diminué, même si, je vous l'accorde, c'est en partie lié à des raisons exogènes.

Au regard des objectifs de législature, ce dernier rapport de gestion de la législature 2014-2018 a été l'occasion pour le Conseil d'Etat sortant d'établir un bilan des réalisations concrètes des priorités de législature. Certaines priorités ont connu des développements satisfaisants: je pense notamment, et ce ne sont que quelques exemples, à la promotion de la mission de la Genève internationale à travers des prêts octroyés par le Grand Conseil à l'ONU et à l'OMS; à l'adaptation au vieillissement de la population à travers le développement des soins à domicile qui permet aujourd'hui à Genève d'être le canton où la moyenne d'âge des personnes entrant en EMS est la plus élevée; enfin, bien sûr, à la réalisation des infrastructures importantes - CMU, bâtiment des lits, CEVA.

Dans d'autres domaines, les actions prioritaires du gouvernement n'ont pas encore abouti, vous avez raison d'avoir soulevé ces points: en premier lieu, le projet de réforme de la fiscalité des entreprises, le PF 17, qui depuis quelques jours au niveau fédéral est rebaptisé RFFA, réforme de la fiscalité et du financement de l'AVS. Ce projet est indispensable pour notre canton, notre économie, nos entreprises, et pour l'emploi. Comme l'a soulevé le président de la commission des finances, j'ai d'ores et déjà, au nom du Conseil d'Etat, commencé à recevoir les différents groupes et les différents milieux. Je vais également recevoir les communes et les syndicats afin de faire un premier tour de piste pour connaître les différents avis sur la conformité du projet genevois avec le projet fédéral. C'est un élément important; nous avons également constitué une délégation sur ce point et nous y serons très attentifs.

Il y a également la réforme de la recapitalisation de la CPEG. Elle est impérative pour assurer à long terme les rentes des assurés. Il relève de la responsabilité de l'Etat que de garantir à la fonction publique sur le long terme la perception des rentes. Là également, nous nous sommes vus en délégation et nous avons décidé de reprendre les négociations avec les syndicats d'une façon plus transparente, d'une façon plus ouverte, afin que chacun puisse comprendre ce qu'il en est. Comme je l'ai dit, ces projets sont cruciaux pour notre canton.

Il y a également la question de SCORE, pour laquelle, là aussi, des réunions sont déjà prévues la semaine prochaine avec les différents syndicats. Soyez assurés que je prends très au sérieux ce nouveau rôle et que le groupe socialiste n'a pas à s'inquiéter du fait que M. Dal Busco m'ait cédé sa place. Je m'en réjouis et je compte reprendre le flambeau avec transparence, avec respect vis-à-vis du partenariat social, en mettant tout en oeuvre pour que ces réformes soient menées à bien rapidement, parce que nos cantons en ont besoin et que la fonction publique attend des réformes sur la CPEG ainsi que sur le projet SCORE. Tout comme le Conseil d'Etat, je souhaite instaurer une relation de confiance propice à l'aboutissement de ces grands projets.

Pour revenir à la gestion 2017 proprement dite, la commission des finances l'a approuvée et le Conseil d'Etat lui en sait gré. J'ai malheureusement l'impression, au vu des déclarations du débat sur l'entrée en matière, qu'il n'en ira pas de même pour la majorité de ce parlement. J'attendrai de voir les résultats finaux des votes et, le cas échéant, je le regretterai. Il s'agit d'un signal important à donner, un signal de confiance, car même s'il est question de la gestion du Conseil d'Etat passé, c'est le nouveau Conseil d'Etat qui vous présente ce rapport de gestion et c'est ce nouveau Conseil d'Etat qui vient aujourd'hui vous demander un geste de confiance. Cela dit, dans l'attente du vote, et même s'il devait être négatif, je tiens d'ores et déjà à remercier les députés de la commission des finances pour leur engagement et leur travail, tout comme les rapporteurs qui se sont investis dans le cadre de leur rapport. Je souhaite aussi remercier la DGFE et l'ensemble des collaborateurs pour leurs compétences, leur disponibilité et leur engagement. Je reprendrai la parole ultérieurement, pour répondre à vos éventuelles questions, évidemment sur la politique publique qui m'incombe et pour vous parler des comptes 2017 individuels et consolidés. Il en va de même de mes collègues du Conseil d'Etat qui seront de retour, je l'espère, pour leur politique publique. Merci, Mesdames et Messieurs les députés. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote d'entrée en matière sur le PL 12297.

Mis aux voix, le projet de loi 12297 est adopté en premier débat par 77 oui contre 16 non.

Le président. Je vais maintenant appeler les politiques publiques une par une, en commençant par celle qui a été tirée au sort, c'est-à-dire la politique publique L «Economie». Les rapporteurs disposent de trente minutes et... (Remarque.) Monsieur Cyril Aellen, c'est à vous.

M. Cyril Aellen (PLR). Merci, Monsieur le président. J'aimerais remercier les deux conseillers d'Etat présents, les deux seuls qui n'ont pas participé à la gestion dont on discute. Je suis atterré de cette situation. C'est dire l'importance que nos conseillers d'Etat accordent à ce débat, et je souhaiterais proposer une pause pour que le Bureau et les chefs de groupe se réunissent, s'il vous plaît, Monsieur le président. (Quelques applaudissements. Un instant s'écoule.)

Le président. Mesdames et Messieurs, nous sommes saisis d'une motion d'ordre de M. Aellen demandant une suspension de séance pour une réunion entre le Bureau et les chefs de groupe.

Mise aux voix, cette motion d'ordre est adoptée par 84 oui contre 1 non et une 1 abstention (majorité des deux tiers atteinte).

Le président. Nous nous réunissons donc à la salle Nicolas-Bogueret; je suspends la séance.

La séance est suspendue à 15h48.

La séance est reprise à 16h07.

Le président. Chers collègues, s'il vous plaît, si vous voulez bien regagner vos places, nous allons reprendre notre séance. Mais avant, j'ai deux choses à vous transmettre. En premier lieu, évidemment la déception, exprimée tout à l'heure, des chefs de groupe et du Bureau devant l'absence de cinq conseillers d'Etat, alors que nous aurons à examiner dans le détail ce qu'ils ont fait durant cette année. Cette absence a été comprise comme une sorte de mépris de notre travail. Nous avons bien compris qu'il fallait aussi consacrer un moment et une petite délégation pour aller rendre hommage au pape qui nous rend visite aujourd'hui, mais enfin, nous avons mal compris que seuls deux nouveaux conseillers d'Etat soient là pour défendre l'intérêt de Genève. De notre point de vue, cette présence est extrêmement importante et nous voulions le signifier clairement.

En deuxième lieu, maintenant que nous avons trois - pour le moment, voire peut-être bientôt quatre - conseillers d'Etat, nous devons modifier - c'est la décision que nous avons prise - l'ordre d'appel des politiques. Nous allons commencer par la politique publique N et non pas la politique publique L, ainsi que le tirage au sort l'avait prévu. Nous commençons donc, si vous le voulez bien, par la politique publique N «Culture, sport et loisirs»; nous continuons dans l'ordre alphabétique et nous remontons, comme prévu.

M. Alberto Velasco. On descend !

Le président. Oui, Monsieur Velasco, on descend, vous avez bien compris ! (Remarque. Le président rit.)

Deuxième débat

N - CULTURE, SPORT ET LOISIRS

Le président. Nous sommes donc au deuxième débat dont je rappelle les règles: trente minutes pour les rapporteurs et cinquante minutes par groupe, chaque intervention étant limitée à cinq minutes. Le Conseil d'Etat répond, si besoin, aux questions à la fin de chaque politique publique. J'appelle maintenant, comme annoncé, la politique publique N «Culture, sport et loisirs», et passe la parole à M. le député Jean-Charles Rielle.

M. Jean-Charles Rielle (S). Merci, Monsieur le président. Chères et chers collègues, ces comptes sont l'occasion de se tourner vers les projets, plutôt que d'en rester aux seuls constats. La dernière législature a vu la création de l'office cantonal de la culture et du sport. Les lois sur la répartition des tâches entre le canton et les communes en matière culturelle et sportive ont mis en évidence un certain nombre de problèmes et de défis auxquels les collectivités doivent répondre: financement du Grand Théâtre - institution phare de la musique - budget de fonctionnement de la Comédie - théâtre au rayonnement régional - subventionnement des infrastructures sportives intercommunales dans les grands projets du canton, etc.

L'initiative populaire 167 «Pour une politique culturelle cohérente à Genève» - que le parti socialiste, notamment notre collègue Nicole Valiquer Grecuccio, a fortement soutenue et que le Conseil d'Etat vient de valider et de nous proposer d'accepter - ouvre des perspectives stimulantes et réjouissantes, puisqu'il s'agit de consacrer le rôle du canton comme coordinateur d'une politique culturelle cohérente sur l'ensemble du territoire, tout en élaborant une stratégie de cofinancement s'agissant de la création artistique et de certaines entités culturelles. Cela nécessitera une réflexion de fond sur la gouvernance et un travail de partenariat avec l'ensemble des protagonistes concernés, en particulier les acteurs culturels.

Ce même rôle pourra être celui de l'Etat en matière de sport. A cet égard, le parti socialiste salue la vision d'ouverture constructive du Conseil d'Etat et plus particulièrement du département de la cohésion sociale. Il s'agit ni plus ni moins de se doter d'une politique à la mesure de la richesse et de la qualité de l'offre culturelle et sportive à Genève, et c'est un objectif que nous, socialistes, entendons réussir avec le parlement, car c'est notre mission politique.

Permettez-moi maintenant d'évoquer, à l'aune du bilan 2017, les besoins de la Confédération des écoles genevoises de musique (CEGM) qui regroupe dix établissements, 10 500 élèves et quelque 530 professeurs. Les subventions ont été globalement gelées depuis plusieurs années et soumises aux coupes linéaires successives, ce qui a engendré des listes d'attente et des effectifs bloqués. Ainsi, le principe de démocratisation des études musicales inscrit dans la loi votée par le peuple à plus de 85% n'est pas assuré.

Quant aux classes sport-art-études, à l'heure actuelle, pour l'ensemble des degrés du cycle d'orientation, il n'est offert que six places pour des élèves étudiant la musique et six autres pour ceux qui travaillent la danse. Or la CEGM comptabilise chaque année quarante musiciens et trente danseurs, soit environ septante élèves qui sollicitent une place dans ces cursus. La faiblesse extrême de cette offre constitue un goulet pour l'accès à la filière préprofessionnelle et, par conséquent, pour l'accès à la HEM de Genève. Voilà qui explique, pour une part, le peu d'élèves genevois au sein de cet établissement. Là encore, la démocratisation n'est pas assurée. Il est également à noter que certaines écoles rencontrent des problèmes récurrents de locaux.

Pour terminer, j'aimerais aborder l'harmonisation des salaires. La quasi-totalité des enseignants bénéficiant d'un master et d'un diplôme pédagogique, ils devraient être en classe 17. Dans les faits, nombre d'entre eux ne le sont pas, certains se trouvant carrément en classe 8. Un montant de 480 000 F a pourtant été voté par le Grand Conseil dans le cadre du budget 2018 afin de placer tout le monde en classe 13, selon les calculs de l'ex-DIP, nouvellement DFJ. Cette adaptation aurait dû être faite au plus tard le 28 février 2018. Une entreprise externe a même été mandatée par le département pour calculer la répartition individuelle de cette allocation.

Or les résultats obtenus en mai dernier semblent faux et, à l'heure actuelle, cette adaptation salariale n'a pas été effectuée. Elle est apparemment prévue pour septembre prochain, mais à hauteur de la classe 11 seulement - et il n'est pas question d'annuités dans tous ces calculs ! (Remarque.) Je vais conclure, Monsieur le chef de groupe ! Une harmonisation totale des salaires des professeurs de musique en classe 17 exigerait, semble-t-il, une augmentation de la masse salariale de quelque 700 000 F au total.

Nouveauté pour le dernier semestre 2018: l'office cantonal de la culture et du sport change de département et rejoint la cohésion sociale. Quant à la formation, elle reste entre les mains du nouveau DFJ. Rendez-vous dans un an pour un premier bilan ! Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)

Mme Alessandra Oriolo (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les Verts approuveront la politique publique N «Culture, sport et loisirs». Durant l'année 2017, l'Etat a soutenu la réalisation de 143 projets artistiques et permis à plus de 150 000 élèves du canton de participer à quelque 400 propositions culturelles grâce au programme Ecole & Culture. Cependant, nous restons critiques quant à l'adoption de la loi sur la répartition des tâches, entrée en vigueur l'année dernière. Ce texte voté sans concertation avec les milieux culturels fragilise les artistes et détourne la loi sur la culture de 2013. Les Verts déplorent... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! L'intervenante se donne la peine d'avancer des arguments, nous devrions l'écouter avec attention.

Mme Alessandra Oriolo. Merci, Monsieur le président. Les Verts, donc, déplorent l'absence d'un réel pilotage cantonal permettant de définir les priorités d'une politique culturelle concertée. Comment envisager une stratégie culturelle cohérente avec une séparation abrupte entre la création et la diffusion ? Le canton devrait assumer sa mission de coordination, de concertation et de cofinancement des institutions culturelles genevoises.

Nous regrettons par ailleurs qu'il ait refusé de financer le Grand Théâtre à hauteur de 3 millions pour l'année 2017. Une telle institution, au rayonnement international, ne peut être laissée uniquement à charge de la Ville de Genève. Et quid de la Nouvelle Comédie ? Le canton s'en est totalement désinvesti, laissant la municipalité seule pour assurer le fonctionnement de ce futur théâtre. Résultat ? Un manque de 6,5 millions au budget.

Il faut se demander ce que souhaite faire Genève en matière de culture. Nous, les Verts, voulons un canton où la culture n'est pas reléguée au dernier plan. A cet égard, il est surprenant de constater que, suite aux changements dans la dénomination des départements, le mot culture n'apparaît plus dans le titre du dicastère concerné. Or il s'agit, pour les prochaines années de la législature, d'instaurer une vision culturelle d'ensemble, un véritable règlement d'application de la loi sur la culture ainsi qu'un Conseil consultatif de la culture renforcé réunissant les acteurs et partenaires concernés.

La culture constitue une valeur fondamentale à la fois pour le développement personnel, économique - il y a un grand nombre d'emplois à la clé - et social, car elle contribue au ciment du vivre-ensemble, mais surtout du faire-ensemble. Il est capital pour les Verts que l'Etat de Genève prenne ses responsabilités en la matière; nous saluons d'ailleurs l'accueil positif que le Conseil d'Etat a réservé à l'initiative populaire constitutionnelle «Pour une politique culturelle cohérente à Genève» dans son communiqué de presse d'hier. Je vous remercie.

Mme Diane Barbier-Mueller (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, l'article 4 de la loi sur la culture entrée en vigueur en 2013 stipule que le canton établit une politique culturelle coordonnée et fixe les grandes orientations et priorités. Le constat, cinq ans après, c'est que le Conseil d'Etat n'a toujours pas mis en oeuvre ces dispositions. La situation actuelle est floue: dans certains cas, la double compétence du canton et des communes crée des enchevêtrements, comme on l'a observé en 2017 avec le Grand Théâtre, ce qui conduit à des conflits ou, comme le dit mon collègue M. Cuendet, à de la cacade. (Rire.)

Il faut maintenant appliquer la loi sur la culture et apporter la clarté attendue par tous: plus de clarté pour les décideurs, plus de clarté pour ceux qui veulent la financer et surtout plus de clarté pour les milieux culturels qui, actuellement, ne savent pas vers qui s'orienter. La gestion des grandes institutions participant au rayonnement de Genève à l'étranger et dans le reste de la Suisse, comme le Grand Théâtre, le stade de Genève ou encore la patinoire, doit revenir au canton. Parce que nous ne voulons plus de ces doublons, parce que nous exigeons davantage de transparence, parce que la situation actuelle n'est pas convenable, le PLR refusera cette politique publique. (Applaudissements.)

M. Olivier Baud (EAG), député suppléant. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, pour Ensemble à Gauche, c'est toujours un peu le même constat au moment du rapport de gestion - comme du budget, d'ailleurs: la politique publique N «Culture, sport et loisirs», bizarre mélange des genres - on imagine que les loisirs sont là pour lier le tout - reste la portion congrue des finances de l'Etat. Cette politique n'est pas ardemment défendue, on le voit notamment par l'absence de la conseillère d'Etat du département de l'instruction publique, de la culture et du sport, qui a tout de même été chargée de ce dicastère pendant quatre ans et demi.

Monsieur le président, je ne comprends pas bien: durant la pause, il a été décidé de ne pas démarrer les travaux par la politique publique L «Economie», sous prétexte que le magistrat concerné n'est pas là, mais on commence avec «Culture, sport et loisirs», et la conseillère d'Etat est tout aussi invisible ! Ce n'est pas tout à fait clair.

Ensemble à Gauche refusera cette politique publique. Certes, on peut se réjouir, comme le fait le parti socialiste, de ce qui a été réalisé eu égard aux maigres moyens alloués, mais il s'agit surtout de projets qui ont été arrachés par le parlement, que nous avons nous-mêmes votés, et heureusement, mais non sans mal: les 10 millions pour le Théâtre de Carouge, le soutien au pavillon Sicli ou la subvention à l'association Genève Futur Hockey. C'est très bien, mais ce sont des projets que nous avons nous-mêmes défendus, puis acceptés, et il n'y a pas lieu de nous en féliciter plus que ça, c'est un peu le strict minimum, comme je l'ai dit à l'époque.

Quant au cursus sport-art-études, qui constitue un pan important de cette politique - d'aucuns le suivent en effet pour leur avenir - on est en droit de se demander ce qu'il va devenir, étant donné que le DIP est devenu le département de la formation et de la jeunesse, amputé du sport et de la culture. Or ces classes sont justement concernées par la culture et le sport, et je nourris pas mal d'inquiétudes à ce sujet.

On vante les activités proposées par Ecole & Culture, et c'est vrai que si on veut une société cultivée qui s'intéresse à la culture, c'est à l'école que ça commence. Mais lisez le rapport: «Les activités culturelles proposées aux élèves dans le cadre d'Ecole & Culture ont bénéficié du renforcement de la collaboration entre les degrés d'enseignement et les institutions culturelles.» Merci, mais ça ne dit absolument rien ! Je poursuis: «Au total, plus de 150 000 élèves ont bénéficié de plus de 400 propositions culturelles.» D'accord, mais qu'est-ce que ça représente par rapport aux autres années ?

Pour ma part, j'ai plutôt l'impression que l'offre diminue, qu'il est de plus en plus difficile pour les classes de participer à des manifestations culturelles pour diverses raisons, notamment parce que ce n'est pas évident de demander de l'argent aux parents. On nous restreint, le spectacle coûte quand même 5 F, alors que ce tarif pourrait être de 3 F... Bref, il y a tout plein de restrictions qui n'incitent pas les enseignants à promouvoir la culture et à sortir avec les élèves, ce que je trouve regrettable.

Aussi, ma question au département est la suivante - on est quand même là pour poser des questions: cette part de 150 000 élèves est-elle en augmentation ou en diminution ? Le nombre de propositions culturelles est-il en hausse ou en baisse ? Je souhaiterais obtenir une réponse, même si nous allons de toute façon refuser cette politique publique, ainsi que je l'ai annoncé en préambule. Merci.

Le président. Merci, Monsieur le député. J'ai cru comprendre qu'en l'absence de Mme Torracinta, c'est M. Apothéloz qui répondra à vos interrogations. La parole revient à M. Guy Mettan.

M. Guy Mettan (PDC). Merci, Monsieur le président. Le parti démocrate-chrétien acceptera cette politique publique, bien qu'il ne soit qu'à demi satisfait. En effet, quand on examine le bilan de ces quatre ans et demi, on peut la juger à moitié réussie et à moitié ratée. Elle est réussie en termes d'investissements, parce qu'on est parvenus à voter des crédits pour la construction de la Comédie et la rénovation du Théâtre de Carouge, ce qui est très important. De même, on a relancé des projets de terrains de foot, de piscines - bien que celui de la patinoire, lui, continue à patiner gravement ! Ainsi, dans l'ensemble, la politique culturelle est plutôt aboutie du point de vue des investissements.

Pour le reste, en revanche, force est de constater que c'est un échec: rien ou presque n'a été réalisé pendant la dernière législature. On a évoqué la répartition des tâches entre le canton et les communes, mais elle a buté sur l'opposition de la Ville de Genève, notamment en ce qui concerne le Grand Théâtre. La Ville n'est pas entrée en matière comme prévu, en tout cas pas à satisfaction de l'Etat. Et je m'excuse, mais ce n'est pas la faute du canton ! Si on veut mettre en oeuvre une politique culturelle digne de ce nom, il ne s'agit pas juste de le faire cracher au bassinet, il s'agit vraiment d'examiner les priorités et d'instaurer une stratégie avec la participation des communes, on ne peut pas simplement aligner les millions comme ça, les yeux fermés.

Nous accepterons cette politique publique, mais demeurons critiques quant à la gestion conduite par le Conseil d'Etat précédent, quant à son incapacité - disons-le ! - à mener à bien une politique culturelle digne de ce nom, et nous espérons que le nouveau gouvernement sera à même de le faire. Nous avons lu dans son communiqué de presse d'hier qu'il avait accepté l'initiative populaire 167, voilà un bon point de départ pour réexaminer la question dans son ensemble.

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, il est bien beau de dire que le canton doit coordonner la culture avec les communes, c'est une belle pétition de principe. En théorie, d'ailleurs, les lois sur la répartition des charges avaient pour but d'améliorer la situation, mais elles se sont révélées un échec. Parce que si le canton avait voulu aller plus loin... Vous connaissez le dicton: qui paie commande. Or il ne s'agit pas juste de faire raquer le canton sans qu'il ait son mot à dire, mais au contraire de le faire participer à la politique de la culture à Genève.

Deux exemples, et je m'arrêterai là, ont été cités tout à l'heure - vous transmettrez au PLR, Monsieur le président: lorsque le Conseil d'Etat s'est mis d'accord avec la Ville de Genève s'agissant du Grand Théâtre, le canton n'a pas voulu suivre, la subvention 2018 n'a pas été votée ! Idem lorsqu'ils se sont entendus pour que la gestion de la Nouvelle Comédie soit partagée entre la Ville et l'Etat: le canton a décidé de ne partager que l'investissement, pas le fonctionnement, et on a laissé la Ville se dépatouiller.

Ce n'est pas là une bonne manière d'aborder les choses. Si on veut que le canton puisse véritablement mener une politique coordonnée de la culture, il doit aussi y participer financièrement, mais dans un respect mutuel de tous les acteurs concernés. Malheureusement, on en est loin aujourd'hui. J'espère que le nouveau Conseil d'Etat adoptera une autre façon de voir les choses - en tout cas, on compte sur lui pour que cette politique change. Cela étant, le MCG votera cette politique publique. Merci.

M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, l'Union démocratique du centre refusera cette politique publique pour des raisons objectives. Notre première récrimination, c'est le manque dramatique de fonds attribués au sport, et je ne parle pas du sport d'élite, mais de la formation des jeunes - pourtant, ce n'est pas faute d'avoir essayé d'obtenir des subventions supplémentaires pour le hockey à la commission des finances.

Deuxièmement, nous ne disposons pas d'infrastructures sportives dignes de ce nom - mon collègue Christo Ivanov a d'ailleurs déposé un projet de loi à ce sujet - alors que l'on construit ou rénove un tas de bâtiments pour la culture. Vous allez me dire que l'UDC se bat contre des moulins à vent, mais la question n'est pas là.

Nous demandons simplement une répartition équitable des budgets, parce que le sport représente aussi une valeur sûre pour les jeunes, pour l'avenir. L'UDC estime que les efforts financiers en sa faveur ne sont pas suffisants et que les activités sportives - je parle toujours de la jeunesse - sont laissées de côté.

En dernier lieu, l'UDC a été outrée par ce qui s'est passé avec le Grand Théâtre: on demande d'abord 3 millions, puis on injecte 45 millions pour la Comédie afin que le Grand Théâtre revienne entre les mains du canton, et on apprend finalement par la presse que la solution 50-50 n'est pas si mal que ça aux yeux de M. Kanaan ! Mesdames et Messieurs, on se fait rouler dans la farine, ce n'est pas sérieux. La responsabilité en revient-elle entièrement au Conseil d'Etat ? Nous ne visons personne, nous disons simplement que la politique de la culture et du sport ne convient pas, ou du moins n'est pas adaptée. C'est la raison pour laquelle l'Union démocratique du centre la refusera. Merci.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de deuxième minorité. J'ai écouté avec beaucoup d'attention mon collègue Lussi. Si j'ai bien compris, Monsieur - permettez, Monsieur le président - vous rejetez cette politique publique, parce que vous souhaiteriez davantage de subventions pour le sport ? Dans ce cas, lors du prochain budget, je les vote avec vous, Monsieur !

M. Patrick Lussi. Merci !

M. Alberto Velasco. Mais il faudra voir si vous serez d'accord de les voter à ce moment-là, parce qu'en général, chaque fois qu'il s'agit d'octroyer un supplément au budget, l'UDC est contre. Alors je vous prends au mot, Monsieur, et dans quelques semaines, quand nous travaillerons sur le budget, je présenterai une demande de somme supplémentaire pour le sport et j'espère que l'UDC la votera. Voilà, Monsieur le président, ce que je voulais dire à mon collègue.

Le président. Il a bien compris, Monsieur le député. Si possible, essayez de vous adresser à moi, je transmettrai avec la bonne volonté que vous me connaissez ! A présent, je laisse la parole à M. le conseiller d'Etat Thierry Apothéloz.

M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la question de la culture est centrale, et je rejoins M. Lussi dans son souhait de doter la politique publique N «Culture, sport et loisirs» d'un soutien conséquent. Mais il faut prendre en compte un aspect important s'agissant du sport, à savoir que les communes sont particulièrement actives en matière d'infrastructures et d'aides financières, surtout pour la pratique au quotidien. Vous vous souviendrez également que votre Conseil a voté une subvention importante pour le stade de Genève qui, à sa façon, contribue à offrir un équipement de qualité pour des événements sportifs allant du foot au rugby en passant par d'autres disciplines.

La loi sur la répartition des tâches - et non des charges, Monsieur le député Sormanni - contient des dispositions relatives au sport, mais nous devons encore la mettre en oeuvre. A ce stade, elle n'est contestée ni par les milieux sportifs ni par les milieux culturels. Il convient cependant que nous restions attentifs à leurs besoins en matière financière, évidemment, mais également dans l'organisation de grandes manifestations, parfois rendues difficiles lorsqu'on utilise le domaine public cantonal - j'y reviendrai ultérieurement.

Je suis d'accord avec différents préopinants quant au versant culturel de la LRT et au bilan que nous devons en dresser. Celui-ci est insuffisant, nous avons besoin de l'objectiver. Des acteurs culturels s'y emploient, et nous nous y associons en partie, notamment en ce qui concerne la séparation problématique entre création et diffusion; c'est d'ailleurs ce qui a conduit le Conseil d'Etat à reprendre sa réflexion sur le rôle du canton dans la coordination et la concertation avec les milieux culturels et à appuyer l'initiative 167. Cela étant, Mesdames et Messieurs, je vous propose de réserver vos arguments au moment où nous en débattrons et je vous invite d'ores et déjà à envoyer un signe positif aux milieux culturels. Il s'agit d'apaiser les relations entre l'Etat, les communes et les différents acteurs culturels pour que nous soyons toutes et tous fiers de ce qui se réalise dans notre canton.

Je partage la volonté de Mme la députée Oriolo de doter le canton d'une véritable vision culturelle, ainsi que le demande l'article 4 de la loi sur la culture. Je vais m'y atteler dès cet été et j'espère pouvoir vous proposer une stratégie culturelle dès la fin de cette année ou le début de la suivante. Le Conseil consultatif de la culture est important, en effet, et son apport à la fois politique et d'expertise a été sous-estimé. Ma présence lundi dernier au sein de cet organe doit donner un certain nombre de gages quant à la volonté du Conseil d'Etat de travailler en intelligence à ses côtés.

Vous avez plaidé pour davantage de clarté, Madame Barbier-Mueller, et vous avez raison. L'initiative 167 vise justement à garantir plus de transparence, et il sera nécessaire de proposer une définition précise de la coordination et de la concertation, deux rôles que le canton souhaite assumer. Soyons toutefois clairs d'emblée: il ne s'agira pas d'assurer l'ensemble des subventions pour faire vivre la culture, mais de développer un partenariat intelligent entre les communes, les acteurs culturels et le canton.

Je terminerai avec un élément évoqué par M. Baud, soit l'accès à la culture. Cet élément est essentiel pour nous, vous avez raison de le souligner, et fera partie de la vision d'ensemble que le Conseil d'Etat apportera. Je ne peux pas vous communiquer d'éléments factuels, Monsieur, pour répondre à votre question relative à l'augmentation ou à la diminution du nombre d'élèves fréquentant les activités proposées par le programme Ecole & Culture. Nous en avons discuté lors de notre séance de mercredi, parce que la question des sorties culturelles dépendra de la mise en oeuvre, par le département de la formation et de la jeunesse, de l'arrêt du Tribunal fédéral concernant la gratuité des séjours scolaires, notamment des camps. Cet arrêt a en effet des conséquences sur notre capacité à proposer des sorties culturelles et sportives.

Le bilan de la loi sur la répartition des tâches entre les communes et le canton en matière de culture doit être établi, et je me réjouis de le partager avec la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport, afin que nous puissions en tirer des conclusions et éventuellement apporter des modifications légales. Tout n'est pas à jeter dans la LRT-2, comme on l'appelle, il y a des choses positives qui sont à reprendre pour nous permettre d'apaiser les relations entre votre Conseil, notre canton, la Ville et les communes genevoises. Merci beaucoup. (Quelques applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, merci de bien vouloir vous prononcer sur cette politique publique.

Mise aux voix, la politique publique N «Culture, sport et loisirs» est adoptée par 49 oui contre 36 non et 1 abstention.

O - AUTORITES ET GOUVERNANCE

Le président. J'appelle la politique publique O «Autorités et gouvernance». La parole va à M. Bertrand Buchs.

M. Bertrand Buchs (PDC). Merci beaucoup, Monsieur le président. Cette politique touche au coeur du sujet évoqué précédemment, à savoir la relation entre les communes et l'Etat, puisqu'il s'agit de gouvernance. Le PDC regrette que nous n'ayons pu aller jusqu'au bout de la discussion. Il y a en effet des choses à reprendre, des éléments à améliorer, et j'espère que le Conseil d'Etat dans sa nouvelle composition va s'y atteler.

Le point très positif de cette gouvernance, c'est la Genève internationale. D'ailleurs, j'aimerais saluer tout ce qui a été réalisé pour défendre la position de Genève en tant que siège des organisations internationales, surtout au vu des gros soucis que nous connaissons actuellement avec la politique américaine - je pense aux dernières décisions prises par le gouvernement américain.

Genève doit rester une place de choix pour les relations internationales, nous en avons besoin, nous avons besoin de ce lien avec le monde, ça fait partie de notre génome. Le gouvernement genevois a très bien défendu notre position lors de la dernière législature, notamment en proposant un crédit - qui a été voté - pour la rénovation du palais des Nations, et j'aimerais l'en remercier.

Le parti démocrate-chrétien votera cette politique publique qui est peut-être moins importante que d'autres, mais qui englobe tout de même des points conséquents. Je vous remercie.

M. Pierre Vanek (EAG). La politique publique O comprend l'exercice des droits politiques, notamment ceux qui se pratiquent sous la forme de la démocratie semi-directe que nous connaissons dans ce canton. Les pages 303 et 304 du tome 2 qui y sont consacrées mettent en évidence l'excellent fonctionnement de notre république sur ce plan-là et indiquent les centaines de milliers de votes par correspondance enregistrés, les dizaines de milliers de citoyens ayant voté par le biais du vote électronique, les nombreux référendums et initiatives dont les signatures ont été validées sans aucun problème.

Jetons un oeil aux indicateurs. Sur le plan national, nombre de réclamations de la Chancellerie fédérale: zéro, objectif atteint. Sur le plan cantonal, nombre de recours fondés et de réclamations sur les délais ou la validation des signatures: zéro, objectif atteint également. Sur le plan communal, les choses se passent de manière tout aussi remarquable du point de vue de la validation des processus en matière de droits démocratiques - bon, bien sûr, on peut toujours faire mieux. Signalons encore que les procédures sont facilitées, puisque le souverain a voulu abaisser les seuils de signatures, ce que nous saluons.

L'exercice de la démocratie directe est vigoureux dans ce canton. Nous sommes jeudi, n'est-ce pas ? Lundi, une initiative a été déposée par les syndicats concernant le salaire minimum; mardi, Ensemble à Gauche a présenté une initiative sur le remboursement des milliards avancés pour le sauvetage de la Banque cantonale de Genève; hier, nous avons également déposé quatre référendums avec un total de signatures ascendant à 8319 pour mettre en débat à l'échelle publique la loi sur la laïcité de l'Etat à laquelle vous me savez opposé pour m'avoir entendu la combattre ici pendant des heures.

J'aimerais cependant dire une chose. Tout un volet de ce rapport se félicite de la mise en oeuvre du vote électronique, notamment des élections au scrutin proportionnel. Or il est un objectif qui n'est apparemment pas celui de l'Etat de Genève, mais qui mériterait de l'être, à savoir la signature électronique des initiatives et des référendums. Puisque les électeurs sont enregistrés, cela éviterait des processus de validation compliqués avec des fonctionnaires qui doivent accéder à une base de données et vérifier matériellement sur le papier la validité des paraphes, cela simplifierait encore l'exercice des droits politiques - j'en sais certains opposés à cette facilitation, mais ce n'est pas notre cas. Il faut que l'Etat réfléchisse sérieusement à cette carence dans le cadre de ses projets en matière de droits démocratiques. Merci.

M. Bertrand Buchs (PDC). Toutes mes excuses de reprendre la parole, Monsieur le président, j'ai oublié de mentionner un point essentiel: le Grand Genève. A mon avis, nous avons un problème politique et de gouvernance, tant au niveau du Conseil d'Etat que du Grand Conseil. Suite à certains votes négatifs, tout s'est brusquement arrêté, et le gouvernement ne nous propose plus de vision.

Est-ce qu'il veut poursuivre le développement du Grand Genève, puisque le CEVA sera bientôt en fonction ? Et nous, que voulons-nous: rester entre nous ou nous ouvrir à la France et au canton de Vaud ? Il y a là un manque énorme de visibilité, et ma question au gouvernement actuel est la suivante: qu'est-ce qu'on fait avec ce Grand Genève, s'agit-il d'une politique publique importante ou pas ? Je vous remercie.

M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Merci, Mesdames et Messieurs, pour vos commentaires sur la politique publique O «Autorités et gouvernance». Je me permettrai de rebondir sur la dernière remarque du député Buchs, tout à fait pertinente à mes yeux. En effet, nous devons aujourd'hui nous repositionner sur la question du Grand Genève.

La législature précédente a été marquée par un refus de la population - à une courte majorité, mais à une majorité tout de même - celui du financement de quelques petits P+R de l'autre côté de la frontière. Ce projet - il faut le dire, cela avait été signifié ouvertement à l'époque - inaugurait toute une série d'investissements en matière d'infrastructures régionales. Suite à ce vote ainsi qu'à un retrait partiel de la Confédération dans le financement des projets d'agglomération dont, vous le savez, nous avons été victimes il y a quelques mois - même si la bataille n'est pas perdue, Berne investit moins de moyens dans les agglomérations en général, dans la nôtre en particulier - le nouveau Conseil d'Etat entend remettre cette question à l'agenda.

Vous avez raison, Mesdames et Messieurs les députés, on parle moins du Grand Genève, on parle moins des relations transfrontalières. Il s'agit pourtant d'une réalité quotidienne pour bon nombre de personnes qui font vivre notre canton, celles qui travaillent à Genève mais habitent en dehors de ses frontières, c'est-à-dire pour un tiers des actifs genevois. Oui, un tiers des actifs résident à l'extérieur de notre territoire, ce qui signifie que Genève exporte sa crise du logement, avec toute la mobilité pendulaire que cela implique. Mais la réciproque est vraie également: combien de Genevois vont faire les courses en France ? Le franc fort permet, par effet de change, de bénéficier d'un pouvoir d'achat accru. C'est tout cela, le Grand Genève, c'est une quotidienneté, et il serait faux que les autorités ne s'en préoccupent plus.

Aujourd'hui, le Conseil d'Etat entend relancer le projet, redéfinir une vision de l'agglomération. Sous la houlette de son président Pierre Maudet, il compte renforcer les liens avec les autorités voisines communales, départementales, régionales et nationales - vous connaissez les quatre échelons français - de même qu'avec le canton de Vaud, puisque celui-ci fait partie prenante du projet. Voilà donc un chantier qui va se rouvrir - il n'est pas nouveau, il va se rouvrir - et je voulais saisir la balle au bond pour réaffirmer la volonté politique du Conseil d'Etat d'organiser notre territoire, bassin de vie de 800 000 personnes, à l'échelle métropolitaine. Merci de votre attention.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat, et mets aux voix cette politique publique.

Mise aux voix, la politique publique O «Autorités et gouvernance» est adoptée par 63 oui contre 14 non.

Deuxième partie du débat sur les comptes 2017 (suite du 2e débat): Séance du jeudi 21 juin 2018 à 17h