République et canton de Genève

Grand Conseil

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La séance est ouverte à 10h15, sous la présidence de M. Eric Leyvraz, président.

Assistent à la séance: Mme et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Mauro Poggia, Anne Emery-Torracinta, Serge Dal Busco, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat, et Mmes et MM. Anne Marie von Arx-Vernon, Alexis Barbey, Pierre Conne, Lionel Halpérin, Carlos Medeiros, Christina Meissner, Cyril Mizrahi, Philippe Morel, Jean-Marie Voumard, Georges Vuillod, Salika Wenger et Ronald Zacharias, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Jean Fontaine, Nathalie Hardyn, Patrick Malek-Asghar, Claire Martenot, Ana Roch, Marion Sobanek et Céline Zuber-Roy.

Annonces et dépôts

Néant.

PL 12176-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'exercice 2018 (LBu-2018) (D 3 70)

Suite du deuxième débat

Budget de fonctionnement (tome 1) (suite)

P - ETATS-MAJORS ET PRESTATIONS DE MOYENS

Le président. Nous continuons notre deuxième débat sur le budget. Nous arrivons à la politique publique P «Etats-majors et prestations de moyens». Je vous lis la liste des programmes: P01 «Etats-majors départementaux», P02 «Gestion transversale et départementale des ressources humaines», P03 «Gestion financière transversale et départementale et achats», P04 «Gestion du patrimoine de l'Etat (bâtiments et biens associés)», P05 «Systèmes d'information et de communication». La parole est à M. Riedweg.

M. Bernhard Riedweg (UDC). Merci, Monsieur le président. Je vais vous parler du budget et non du passé comme cela se fait depuis un certain temps. Cette politique publique est classée au quatrième rang en ce qui concerne le montant des charges. C'est la seule politique publique qui peut ventiler son résultat d'exploitation négatif de 673 millions sur les seize autres politiques publiques. En 2018, dans le domaine des ressources humaines, l'office du personnel de l'Etat - OPE - va reprendre l'analyse du partage de ses responsabilités en matière de recrutement avec les directions départementales des ressources humaines. Un audit de gestion et financier sur les charges de personnel publié par la Cour des comptes en juin 2017 préconise une plus forte implication de l'OPE dans ces processus afin d'éviter des disparités de rémunération. D'autres mesures proposées par la Cour des comptes seront étudiées, notamment en matière de suivi des absences, de contrôle et de gestion des assurances. La mise en place d'un nouveau système d'évaluation des fonctions - SCORE - devrait passer le cap de la phase parlementaire en 2018, sur la base d'un projet de loi déposé par le Conseil d'Etat. Cette modernisation de la grille salariale est rendue nécessaire par l'évolution des formations et des métiers depuis l'entrée en vigueur du système actuel remontant à 1975.

Dans le domaine de la gestion du patrimoine immobilier, les efforts entrepris pour contenir la croissance des charges résultant de la mise en service de nouveaux bâtiments seront poursuivis. Afin de répondre aux nouveaux besoins des utilisateurs, la stratégie immobilière vise à occuper en priorité les locaux dont l'Etat est propriétaire en limitant au strict nécessaire les nouvelles locations. En matière d'investissements, la poursuite des travaux de rénovation et l'optimisation énergétique des bâtiments existants demeurent prioritaires. A cet effet, les toits rénovés des écoles seront progressivement équipés d'installations photovoltaïques dans le cadre d'un partenariat conclu avec les SIG. Il ressort de cette politique publique que, pendant trois décennies, les bâtiments n'ont pas été suffisamment entretenus. Au travers des crédits de renouvellement, particulièrement durant la présente législature, des moyens conséquents sont investis par l'Etat pour le maintien et le rétablissement des immeubles, au nombre de 1840 bâtiments cadastrés répartis sur 684 sites, dont la valeur nette est de 5,6 milliards. L'Union démocratique du centre s'abstiendra sur cette politique publique. Merci, Monsieur le président.

M. Gabriel Barrillier (PLR). Chers collègues, j'aimerais mettre l'accent sur le programme P02 «Gestion transversale et départementale des ressources humaines» et me référer également à l'audit de la Cour des comptes qu'a rappelé mon collègue. La problématique de l'absentéisme à l'Etat n'est pas réglée ! Si on regarde son évolution, on voit qu'il continue d'augmenter: on est au-dessus de 5% - 5,01-5,02%. Or, l'office du personnel nous dit depuis plusieurs années qu'il va lutter contre cet absentéisme. On nous a par exemple expliqué qu'une cellule de retour au travail a été mise sur pied en s'inspirant notamment de ce qui se passe dans l'industrie de la construction, où un dispositif réunit autour de la même table les employeurs, les assureurs-maladie, la CNA - la Suva - ainsi que les syndicats pour essayer de remettre les gens au travail le plus vite possible. Car le pire qui puisse arriver, c'est d'être éloigné du travail pendant trop longtemps, puisqu'on perd pied. J'aimerais donc vraiment rendre attentif le chef du département à cette question; on a reçu des explications, mais j'ai l'impression que ce dispositif n'est pas véritablement entré en vigueur. Que cette cellule de retour au travail, qui est clairement indiquée, se mette au travail pour qu'on abaisse effectivement ce taux d'absentéisme beaucoup trop élevé.

Deuxième remarque - et je sais que le département a déjà pris certaines mesures: en cas d'absence suite à un accident, il y a une assurance perte de gain privée, l'Helvetia, et publique, la Suva. On s'est aperçu que l'employeur avance certains montants et est ensuite remboursé par ces deux assurances. Or, en raison de... je ne sais pas, je ne veux pas parler de gabegie, mais enfin d'une gestion un peu légère, on s'est aperçu que 3,9 millions de francs devaient être remboursés et qu'il y a encore 1,3 million qui doit rentrer en 2018. Alors j'aimerais quand même que le département et l'office du personnel soient attentifs et qu'ils insistent pour être remboursés.

Dernière remarque, Monsieur le chef du département: en cas de maladie, c'est l'Etat - l'employeur - qui est l'assureur. Or, on vous demande depuis de nombreuses années, notamment la commission des finances, d'étudier la possibilité d'externaliser l'assurance perte de gain maladie comme c'est le cas un peu partout. Pourtant, jusqu'à maintenant, ma soeur Anne, nous ne voyons rien venir ! Je pense donc que l'office du personnel devrait, là, être beaucoup plus attentif et inventif. Je vous remercie.

M. François Baertschi (MCG). Je voudrais juste souligner un élément soulevé par le député Barrillier - vous transmettrez, Monsieur le président: c'est certain qu'il y a un absentéisme important. On voit d'ailleurs - on l'a vu notamment aux TPG, on peut le constater dans d'autres régies publiques - que ça vient souvent du nombre important de travailleurs frontaliers...

Une voix. Ah !

M. François Baertschi. ...employés dans certaines de ces entités ou certains de ces services... (Remarque.) ...et c'est une des raisons pour lesquelles il y a un gros taux d'absentéisme... (Remarque.) ...qui doit nous pousser en direction d'une véritable politique de préférence cantonale.

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, il faut effectivement se préoccuper de l'absentéisme, et pour deux raisons. La première, c'est qu'il est un signe de problèmes potentiels, et même avérés, dans les services lorsqu'il est au-dessus de ce qu'on tient comme normal; les magistrats et la hiérarchie doivent donc s'en préoccuper. Je peux vous garantir que c'est pour moi un indicateur très important. La cellule de retour au travail est donc effectivement un dispositif pour éviter que les gens ne soient par trop éloignés; c'est l'absence de longue durée, évidemment, qui pose problème. J'entends bien les critiques - en tout cas les souhaits - et les remarques du député Barrillier. J'entends également tout à fait - et le Conseil d'Etat l'entend très bien - la remarque concernant la question de l'absence pour cause de maladie qui coûte réellement, puisque ces moments où les personnes ne travaillent pas représentent près de 80 millions de francs par année. (Brouhaha.) La question de passer à un autre système d'assurance est donc non seulement... (Brouhaha. L'orateur s'interrompt.)

Le président. S'il vous plaît, un peu de silence ! Vous avez raison, Monsieur le conseiller d'Etat, attendons un petit peu. (Un instant s'écoule.) Un peu de silence, s'il vous plaît ! (Un instant s'écoule.) Merci. Allez-y, Monsieur le conseiller d'Etat.

M. Serge Dal Busco. Merci, Monsieur le président. Cette question est évidemment importante sur le plan financier également. Nous l'avons donc étudiée, pas seulement parce qu'une demande est venue du député Barrillier et de la commission des finances: c'est en outre un dossier que le Conseil d'Etat a décidé d'empoigner. Vous l'imaginez, il est très compliqué parce que le marché pour couvrir ce risque est très important. Nous sommes donc en train de regarder sous quelle forme on peut, disons, faire progresser ce dossier sur lequel nous fondons évidemment aussi un certain nombre d'espoirs. Merci néanmoins, Monsieur Barrillier, d'avoir rappelé cette réalité.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote sur cette politique publique.

Mise aux voix, la politique publique P «Etats-majors et prestations de moyens» est adoptée par 53 oui contre 4 non et 7 abstentions.

Q - ENERGIE

Le président. Mesdames et Messieurs, nous avons déjà voté neuf politiques publiques sur dix-sept. Je vais vous indiquer ce qui vous reste de temps de parole: pour Ensemble à Gauche, trente minutes et deux secondes; pour les socialistes, vingt-quatre minutes cinquante-six; pour les Verts, trente-huit minutes cinquante-deux; pour le PDC, trente-neuf minutes et sept secondes; pour le PLR, seize minutes trente-quatre; pour l'UDC, vingt-neuf minutes et huit secondes; pour le MCG, vingt-huit minutes trente. Nous avons, pour le rapporteur de majorité, encore quatorze minutes quarante et une; pour M. Batou, rapporteur de première minorité, huit minutes vingt-deux; pour M. Lussi, treize minutes vingt-deux. Les indépendants avaient dix minutes: il reste trente-deux secondes à Mme Engelberts; Monsieur Stauffer, il vous reste sept minutes; et il reste trois minutes quarante-cinq à M. Pierre Gauthier.

Nous passons à la politique publique suivante, Q «Energie», avec l'unique programme Q01 «Energie». Monsieur Riedweg, c'est à vous.

M. Bernhard Riedweg (UDC). Merci, Monsieur le président. Le programme de législature du Conseil d'Etat ambitionne d'ici fin 2018 de réduire de 13%, par rapport à l'an 2000, la consommation thermique par habitant. En 2018, des actions importantes seront menées en priorité aux SIG, soit l'adoption du nouveau plan directeur cantonal de l'énergie et du plan directeur des énergies de réseaux, qui donnera une vision d'ensemble de la planification des infrastructures énergétiques dans le canton de Genève; le maintien du programme cantonal de soutien à l'amélioration thermique des bâtiments et de recours aux énergies renouvelables; la poursuite de l'engagement des grands consommateurs dans des programmes d'efficacité énergétique; et la poursuite de la phase d'exploration du programme GEothermie 2020, réalisée par les SIG sous le pilotage de l'Etat de Genève, pour confirmer les ressources présumées sur plusieurs cibles du territoire cantonal ainsi que le développement de projets pilotes.

La commission de l'énergie analyse depuis plusieurs années la répartition du résultat de gestion des SIG, dit aussi bénéfice. La distribution du bénéfice de 63 millions prévu en 2018 est déjà inscrite en partie dans le budget 2018 du Conseil d'Etat, alors que la commission de l'énergie ne s'est pas encore prononcée d'une manière définitive à ce sujet. Pour l'heure, plusieurs versions concernant cette distribution sont en négociation avec le gouvernement qui, selon la convention d'objectifs négociée avec les SIG, veut que le 50% du bénéfice soit versé au Conseil d'Etat et aux communes en lieu et place d'un intérêt sur le capital de dotation, qui n'est pas versé en fonction du bénéfice. Entre-temps, la loi sur l'organisation des institutions de droit public devrait entrer en vigueur; elle prévoit que la moitié du bénéfice soit versée aux collectivités publiques propriétaires. Mais la commission de l'énergie souhaiterait pour l'heure n'attribuer que 25% du bénéfice au Conseil d'Etat, le solde restant acquis aux SIG pour diminuer leur dette s'élevant à 700 millions ou pour procéder à des investissements dans des infrastructures, qui s'élèvent à 230 millions en 2018. C'est au début de 2018 que la décision devrait être définitivement prise en commission, décision qui sera soumise au Grand Conseil. L'Union démocratique du centre acceptera cette politique publique. Merci, Monsieur le président.

M. Boris Calame (Ve). Monsieur le président, chères et chers collègues, l'énergie, qu'elle soit consommée ou produite, est un besoin bien réel de notre société. Dans ce domaine, nous savons aujourd'hui faire beaucoup mieux avec une consommation énergétique fortement limitée. Depuis le 1er janvier 2017, avec l'engagement fort des SIG, Genève est le premier canton qui distribue à moindre coût de l'énergie 100% renouvelable et suisse, principalement issue des barrages. Nous pouvons développer de façon importante la production d'énergie à Genève, notamment dans les domaines du chaud et du froid, mais devons aussi limiter encore la consommation inutile d'énergie, que ce soit dans le domaine de l'habitat, des entreprises ou encore des collectivités publiques. Les Verts ont déposé différents projets de lois, actuellement traités à la commission de l'énergie, qui vont dans ce sens. Moins de consommation, à moindre coût, à confort et qualité de vie identiques; c'est une opération gagnant-gagnant que nous vous proposons. Nous osons espérer être suivis dans ces propositions.

Il faut aussi relever et saluer les très forts investissements réalisés par les SIG en matière de développement des réseaux de distribution, de chaud et de froid, à distance. Nous sommes véritablement là dans le développement de technologies énergétiques de proximité. Elles sont bonnes pour l'emploi et pour l'économie: elles permettent de laisser de la substance économique ici et non pas de la transférer à l'autre bout du monde pour quelques barils de pétrole et mètres cubes de gaz. Les Verts voteront cette politique, tout en demandant aux collectivités et aux organismes publics de s'investir encore plus fortement dans l'assainissement rapide de leur parc immobilier, ce qui permettra de dégager des ressources économiques qui sont aujourd'hui inutilement gaspillées. Nous les encourageons aussi à la production locale d'énergies renouvelables. Pour le bien de notre population, de notre économie et de l'environnement, nous devons maintenant viser l'autonomie énergétique. L'énergie de demain sera locale et 100% renouvelable ou elle ne sera pas ! Je vous remercie de votre attention.

M. Jean-Charles Lathion (PDC). Ce qui importe au parti démocrate-chrétien, c'est que le département ainsi que les services qui y contribuent - donc les SIG - mettent en application la politique énergétique prévue par le Conseil fédéral et notamment par notre magistrate PDC, Doris Leuthard, c'est-à-dire qu'ils accompagnent cette action. Et nous pensons donc que le département l'a tout à fait compris en poursuivant les travaux d'élaboration du plan directeur cantonal de l'énergie et du plan directeur des énergies de réseaux; en appliquant la convention d'objectifs d'actions conjointes avec les SIG; en mettant en oeuvre des dispositions de la loi sur l'énergie; en poursuivant la prospection et l'exploration du sous-sol, pilotées par le DETA dans le cadre du programme GEothermie 2020. On voit bien finalement que le département poursuit dans les grands axes des visées qui correspondent à celles du PDC. Nous soutenons donc cette politique publique, en nous félicitant aussi de la convention d'objectifs avec les SIG et de la façon dont collaborent leurs dirigeants, c'est-à-dire le président PLR avec le directeur socialiste. Cela nous prouve qu'on arrive à d'excellents résultats lorsqu'on laisse tomber les idéologies de droite et de gauche, et je pense que nous devrions en prendre exemple dans ce parlement. Ça nous permettrait d'être beaucoup plus efficaces - ou beaucoup plus efficients, comme certains aiment à le dire. (Quelques applaudissements.)

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le Mouvement Citoyens Genevois est aussi satisfait de la politique énergétique menée conjointement avec les Services industriels pour aller vers des énergies 100% renouvelables à Genève; elle cadre effectivement bien avec l'application de la convention d'objectifs. J'ai eu l'occasion, l'autre jour, de me rendre sur le chantier de la géothermie et des premières expérimentations; bravo pour les avancées que nous faisons dans ce domaine. C'est à mon sens l'énergie de l'avenir et je pense qu'il est extrêmement important d'avancer le plus vite possible dans cette direction.

Je voudrais quand même faire une remarque: toutes ces nouvelles énergies développées par les Services industriels avec les différents réseaux, en exploitant l'eau du lac, etc., sont très bien. Simplement, il y a une chose à laquelle j'aimerais rendre attentif le Conseil d'Etat, qui transmettra aux Services industriels: elles nécessitent de gros investissements et elles renchérissent par conséquent l'énergie qui est ensuite fournie aux utilisateurs. Et ce que les utilisateurs vont payer en plus en énergie, quand il s'agit d'un nouvel immeuble bien isolé, labellisé Minergie Plus, eh bien, sera compensé par le fait que l'immeuble va consommer moins; ce qui fait que le locataire - celui qui paie cette énergie finalement - s'y retrouve. Dans les immeubles anciens qui sont reliés à ces réseaux ou qui vont l'être, la problématique se pose différemment: ils sont encore mal isolés et leur facture énergétique passe quasiment du simple au double par rapport au prix actuel. Ces locataires sont par conséquent soumis à des charges qui doublent ! Et des charges qui doublent - dans des logements pour certains déjà pas forcément très bon marché - posent un problème pour la population genevoise. J'aimerais rendre le département, et par là même les Services industriels, attentifs à cette situation: il faudrait peut-être essayer de trouver des solutions pour diminuer le coût de ces équipements, peut-être en les amortissant sur une durée un peu plus longue. Parce que ceux qui paient, ce sont les locataires ! Nous avons été confrontés à cette question en Ville de Genève où, pour compenser tout ça, le magistrat chargé des travaux a dit: «Oh, bon, il pourrait y avoir une subvention de la Ville de Genève pour aider les locataires qui devraient subir cette hausse.» Non, je ne crois pas que ce soit la bonne solution ! Cette subvention a d'ailleurs été biffée mais, cela dit, ça pose bien un problème pour les locataires qui voient leurs charges de chauffage doubler dans ces immeubles anciens. Par conséquent, puisque ça pose des problèmes pour certains, je pense qu'il faudrait essayer de corriger le tir dans ce domaine. Mais, pour l'essentiel, nous approuvons cette politique publique et nous la voterons !

M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la politique énergétique est certainement l'une des politiques publiques dont les Genevois peuvent être fiers ! Et cette fierté est collective: elle n'est pas le fait de cette législature, elle remonte à plusieurs décennies déjà et au temps des pionniers, au temps de l'initiative «L'énergie, notre affaire» qui a marqué l'avenir, le destin énergétique de notre canton en 1986 déjà. Les fruits de cette graine plantée dans la suite de l'accident de Tchernobyl, mais aussi grâce à la prise de conscience environnementale, sont aujourd'hui à portée de main et, en réalité, on les récolte. Vous l'avez dit, l'objectif du Conseil d'Etat est de réduire de 13% la consommation thermique. C'était, je vais le dire avec peu de modestie, le seul objectif chiffré du Conseil d'Etat durant cette législature. Mesdames et Messieurs, cet objectif de -13% dans la consommation thermique a été atteint en 2017 déjà. Il est atteint ! Dans le même temps, les Genevois et les Genevoises, notre société - parce que ce n'est pas qu'un phénomène public, ça englobe en réalité largement l'économie privée - ont réduit leur consommation en électricité de 2%.

Ça y est, nous y sommes: nous réalisons de manière concrète et scientifiquement vérifiée le découplage, à savoir la capacité pour une société et une économie de consommer moins d'énergie tout en connaissant un développement économique et une amélioration de la qualité de vie. Ce qui semblait une utopie il y a vingt ans est aujourd'hui une réalité chiffrée dans notre canton. Comme je le disais, nous pouvons être fiers de ce résultat puisque nous atteignons nos objectifs qui sont en réalité très ambitieux, bien plus que ceux de la Stratégie énergétique 2050 de la Confédération - pour répondre au député Lathion; nous sommes même en avance ! Monsieur Lathion, Genève a atteint ses objectifs 2030, les objectifs de la Stratégie énergétique 2050 de la Confédération. Les seuils de 2030 sont déjà atteints par Genève ! C'est une Genferei dont nous pouvons, je crois, être fiers, et la Confédération, son Office fédéral de l'énergie et Mme Leuthard le reconnaissent; Genève est par ailleurs souvent cité dans la Confédération comme un canton exemplaire en matière énergétique.

Un autre élément sur lequel j'aimerais insister, c'est l'avènement d'une distribution par les SIG d'électricité 100% renouvelable et 100% suisse ! Je m'adresse plus particulièrement à ce secteur de l'hémicycle. (L'orateur désigne les bancs sur sa droite.) Par décision politique - je l'assume - nous sommes passés d'une électricité à 44% suisse en 2016 à une électricité à 100% suisse en 2017 dans une logique de solidarité confédérale, alors que nos compatriotes valaisans peinent avec l'amortissement de leurs barrages. Vu le prix de l'électricité aujourd'hui, il nous paraissait important que nous, confédérés, que nous, consommateurs d'électricité genevois, nous puissions nous approvisionner en Suisse et pas forcément sur le marché de l'électricité européen. Mais cela, Mesdames et Messieurs, nous avons pu le faire car nous maîtrisons aujourd'hui la distribution à travers notre entreprise publique, les SIG ! Je mets en garde celles et ceux qui prônent une libéralisation complète du marché de l'électricité: le fait de favoriser tant les énergies renouvelables qu'une certaine souveraineté économique en matière énergétique est fondamentalement lié à la possibilité de contrôler l'évolution du marché, et notamment la question des consommateurs.

Si, comme le souhaite Mme Leuthard, la Suisse va vers une libéralisation du marché de l'électricité, il est évident que nous ne pourrons plus garantir aux ménages genevois une électricité 100% propre et 100% suisse, et cela, je tiens à le dire, avec une baisse du coût de l'électricité. Cela a été conjoncturel, il n'y a pas un lien de cause à effet entre l'énergie 100% suisse et 100% renouvelable et le fait que la facture des ménages genevois a diminué de 4%. Mais on peut conclure de ce phénomène observé ces dernières années que l'avènement de la transition énergétique, l'avènement de la société à 2000 watts n'est pas contraire à l'économie; il n'est pas contraire à la dynamique de notre société. Au contraire: développer des panneaux solaires, la géothermie ou encore la biomasse et favoriser les économies d'énergie à travers le double vitrage représente autant d'investissements dans l'économie locale, dans des entreprises de chez nous qui vont donner de l'emploi à nos concitoyennes et à nos concitoyens ainsi que des places d'apprentissage. Et le secteur des énergies renouvelables est beaucoup plus pourvoyeur d'emplois que ne le sont les secteurs du pétrole ou du nucléaire, qui travaillent évidemment sur la base d'importations vu que la Suisse ne produit pas ces énergies fossiles.

A ce titre, nous aurons à débattre prochainement de l'arrivée du gaz de schiste des Etats-Unis. La production de gaz de schiste aux Etats-Unis commence à ressembler à ce qui s'est passé avec le charbon et le lignite en Allemagne, des matériaux extrêmement polluants mais subventionnés qui arrivent à très bas prix sur notre marché. C'est de la concurrence déloyale, Mesdames et Messieurs. Le Conseil d'Etat est acquis au principe de la libre concurrence, mais le Conseil d'Etat - unanime, comme le conseil d'administration des SIG - est contre une ouverture du marché qui verrait des énergies fossiles produites à bas coût, dans des conditions indignes, et subventionnées, concurrencer des énergies propres produites de manière éthique dans notre pays. Nous devons aussi à ce niveau-là trouver un consensus pour l'avenir de la politique énergétique de notre pays.

Voilà ! La société à 2000 watts n'est pas pour demain, mais elle est pour après-demain, et nous avons pris le bon chemin; je vous remercie d'apporter un soutien unanime à cette politique publique.

Une voix. Quel talent !

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons passer au vote.

Mise aux voix, la politique publique Q «Energie» est adoptée par 68 oui contre 6 non et 6 abstentions.

A - FORMATION

Le président. Nous passons à la politique publique A «Formation», composée des programmes A01 «Enseignement obligatoire et orientation», A02 «Enseignement secondaire II et formation continue», A03 «Suivi éducatif et soutien aux familles», A04 «Hautes écoles», A05 «Enseignement spécialisé», A06 «Programme transversal à la politique A».

Nous sommes saisis de deux demandes d'amendements. La première est de M. Lussi et concerne le programme A01, nature 30 «Charges de personnel»: -15 500 000 F. La deuxième demande nous vient de M. Baud; nous la traiterons après celle de M. Lussi. Monsieur Lussi, je vous laisse la parole sur votre amendement.

M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les présidents... les députés, excusez-moi, vous avez remarqué, je pense - du moins le rapporteur de majorité - que cet amendement a été amplement discuté en commission; la présidente du département s'est exprimée sur le sujet. Oui, il y a une progression du nombre d'élèves, on le voit partout, qui, à quelques unités près, a été chiffrée à mille; il faut donc environ 95 nouveaux postes. Toute la discussion qui a suivi et que l'on voit dans le rapport de majorité ne porte pas, comme vous pouvez le remarquer, sur le fait de savoir si c'est bien, mais consiste à dire: «Non, la diminution que vous proposez - ou du moins cette diminution de l'augmentation du nombre de postes - ne joue pas parce que les budgets du département démarrent au mois de septembre, ou plutôt à la fin du mois d'août, et ne sont pas coordonnés avec nos exercices qui vont du 1er janvier au 31 décembre.»

Mesdames et Messieurs, la question se pose. Il ne s'agit pas de supprimer des ressources en faveur de nos chères têtes blondes, mais simplement de dire: est-ce que, par rapport à la réelle augmentation des élèves - puisque là on ne parle pas d'augmentation de la population mais des élèves - 95 postes ne seraient pas suffisants au lieu des 196 proposés au budget ? L'objet de cet amendement est uniquement là; il nous semble que nous ne provoquerons aucun licenciement et que nous ne restreignons rien. Nous ne faisons que prendre en compte les besoins, que l'on doit maintenant calculer au plus juste, c'est-à-dire par rapport à l'augmentation réelle du nombre d'élèves. Raison pour laquelle notre groupe a décidé de maintenir cet amendement et de vous le présenter en plénière. Merci.

Le président. Merci, Monsieur. Nous avons une autre demande d'amendement qui touche aussi les enseignants, de M. Olivier Baud: A05 «Enseignement spécialisé», nature 30 «Charges de personnel». Je vous la lis: «+10 ETP - postes d'enseignants spécialisés ou d'éducateurs sociaux au front des classes de l'enseignement spécialisé: +461 000 F». Monsieur Baud, je vous laisse vous exprimer à ce sujet. Nous voterons à la fin sur les deux propositions en même temps.

M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la loi doit être respectée: cela a été affirmé plusieurs fois dans cette salle depuis le début des débats budgétaires, révélant ainsi - même si cela peut paraître un peu bizarre - que ce n'est simplement pas toujours le cas. La loi sur l'instruction publique, la LIP, n'est en l'occurrence pas appliquée et la volonté populaire est également bafouée. En effet, le mercredi matin d'école n'est toujours pas une réalité pour tous les élèves du canton. Ce n'est pas la première fois que je le relève ici, mais cela fait quand même quatre ans que dure cette situation incompréhensible. Dans les faits, ce sont les élèves de l'enseignement spécialisé qui font les frais du manque de moyens. Tous les élèves de l'enseignement obligatoire âgés de 8 à 15 ans devraient avoir un horaire scolaire d'un volume similaire, soit grosso modo 32 périodes hebdomadaires. Mais les élèves des classes d'enseignement spécialisé intégrés au cycle d'orientation ou ceux des centres médico-pédagogiques pour enfants de 8 à 13 ans n'y ont pas droit. Apparemment, seul le défaut de ressources empêcherait le département d'offrir ces prestations.

Pourtant, cela a été relevé hier, il y a des postes: deux cents pour mille élèves supplémentaires, relevait un député PLR. Il en tirait la conclusion que ces postes n'étaient pas tous destinés à des prestations directes aux élèves. Avait-il raison ? Oui, en partie. Parmi les nombreux projets en lien avec l'école inclusive - où il est toujours aussi difficile d'y voir clair - le département entend consacrer 16,3 postes à la constitution de sept nouvelles équipes pluridisciplinaires. Il y en a déjà neuf. Elles ont été entendues sans qu'il soit possible de vérifier que leur mission réponde bien aux objectifs fixés, à savoir, principalement, le maintien d'élèves en difficulté ou à besoins éducatifs particuliers au sein de l'enseignement régulier. Ces postes de psychologues, thérapeutes en psychomotricité, éducateurs sociaux et enseignants spécialisés, à des taux d'activité réduits, sont répartis dans des établissements primaires. Cette façon de procéder s'apparente à un saupoudrage qui peine à convaincre. Certes, les établissements primaires sont défavorisés par rapport aux moyens dont disposent les cycles d'orientation en matière d'équipes psychosociales, pour faire court. Mais pour quel bénéfice, lorsqu'on sait par exemple que les postes de psychomotriciens sont calculés sur la base d'un 10% pour 700 élèves et qu'il n'est de toute façon pas prévu, avec un taux si bas, que ces thérapeutes interviennent auprès des élèves ?

Il est donc difficile de comprendre les priorités du département et de ne pas lui demander de simplement respecter la loi. L'amendement d'Ensemble à Gauche, très modeste, vise seulement à faire cesser une inégalité de traitement. Une dizaine de postes devraient suffire pour couvrir les périodes d'enseignement supplémentaires voulues par l'introduction, à la rentrée 2014, du mercredi matin d'école. A priori, l'enseignement spécialisé n'a aucune raison de reporter davantage - à la rentrée 2019 ou encore à plus tard ? - ces prestations dues.

Même si certains groupes ont annoncé qu'ils ne voteraient aucune rallonge au budget, il est quand même patent qu'une marge de 8 millions subsiste, et que ces mêmes groupes ont voté plus de 100 000 F pour le Club suisse de la presse. Ainsi, moins de 500 000 F représentent une bien petite somme - environ le 0,006% du projet de budget - pour des élèves qui devraient requérir le plus d'attention de notre part afin de corriger une inégalité. Ensemble à Gauche vous demande donc de soutenir cet amendement qui ne mettra pas en péril le projet de budget.

Mme Salima Moyard (S). Le groupe socialiste souhaiterait d'abord rappeler quelques enjeux. Sur les 296 nouveaux postes de ce budget 2018, 191 vont au DIP et - pour rappel - 25 sont autofinancés, ce qui n'est pas un mince effort. Mais la droite crie tout de même qu'il y a pléthore; juste le minimum vital, répond le parti socialiste. Car ce budget maintient les prestations au DIP, répond aux obligations constitutionnelles - ce qui semble avoir échappé à M. Aellen hier - et développe le minimum indispensable au fonctionnement du DIP. Plus concrètement, cette augmentation de postes est bien sûr liée en grande partie à l'augmentation démographique cantonale et aux plus de mille élèves supplémentaires. Mais il y a aussi - et hier les bras m'en tombaient quand j'entendais M. Aellen - la formation obligatoire jusqu'à 18 ans qui va enfin entrer en vigueur, en 2018, et ce n'est pas un mince défi ! Le troisième point a été évoqué tout à l'heure par M. Olivier Baud: le renforcement des équipes pluridisciplinaires au primaire - logopédistes, éducateurs, enseignants spécialisés - afin de disposer de davantage d'outils pour aider des élèves présentant certains besoins, ou ayant certaines difficultés, à rester dans l'enseignement ordinaire. Cela ne s'adresse pas uniquement à des élèves en situation de handicap. Et entendre hier le PLR dire que ces postes pour la formation obligatoire jusqu'à 18 ans ou pour le renforcement des équipes pluridisciplinaires ne sont pas des postes au front ! Alors j'aimerais bien savoir ce que c'est ! Parce qu'ils sont effectivement destinés à des personnes qui vont être en contact avec les élèves et qui vont les aider à faire leur chemin dans le cadre de leur formation, au DIP. Ce budget fait donc le minimum; ce n'est pas un budget de rêve et ce n'est certainement pas un budget socialiste.

Quant au positionnement des groupes de gauche, je peux comprendre le vote de refus de M. Batou aujourd'hui et il n'y a pas si longtemps à la commission des finances. Mais il ne s'agit pas d'une position de fond différente de celle des socialistes, il s'agit uniquement d'une autre manière de voir les choses: en résumé, le verre à moitié vide ou le verre à moitié plein. Car tant le PS que les Verts et Ensemble à Gauche, nous disons tous la même chose: ces postes au DIP sont une bonne chose et s'en priver serait criminel. Mais ce n'est pas assez, car ces postes ne suffisent pas à répondre aux besoins. J'en donnerai un seul exemple: les effectifs d'élèves qui explosent au cycle d'orientation, ce qui ne permet plus d'orienter correctement ces jeunes. Pourquoi ? A cause des coupes opérées durant la législature par ce Conseil d'Etat de droite: soixante postes, et ce n'est pas rien ! La situation devient donc explosive, au détriment des adolescents.

Je terminerai par un autre cri d'alarme, que j'ai déjà poussé dans cet hémicycle et qui malheureusement n'est à ce jour toujours pas entendu par la majorité. Le Grand Conseil, n'en déplaise à certains, n'octroie actuellement que des postes «au front»: en pratique, des postes d'enseignants qui sont devant les élèves. Mais des écoles au service des élèves, ce sont aussi des conseillers sociaux alors que les situations familiales précaires sont en constante augmentation; ce sont aussi des conseillers en orientation à l'heure du renforcement de l'orientation professionnelle, appelé à cor et à cri par tous les bords politiques de cet hémicycle; ce sont aussi des psychologues pour gérer des situations parmi les élèves avant qu'elles ne dégénèrent; et surtout, n'en déplaise encore une fois à certains, des secrétaires et des assistants techniques, sans qui une école ne peut simplement pas tourner. Lorsqu'il y a chaque année 10% d'élèves en plus, il faut comprendre qu'il faut aussi 10% de personnel administratif et technique en plus et pas seulement des enseignants. C'est pourquoi le parti socialiste vous invite à octroyer les budgets nécessaires et, dans l'immédiat, à refuser évidemment avec vigueur l'amendement de M. Lussi. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Stéphane Florey (UDC). Le groupe UDC a un peu de peine avec ce genre de demande. Pendant quatre ans, d'année en année, Mme Emery-Torracinta est venue nous dire: «Il me faut des moyens; donnez-moi des postes et vous verrez que tout ira mieux !» Personnellement, j'en doute un peu. Ça me fait toujours penser à une vieille publicité qui disait qu'avec Ovomaltine, ça ne va pas mieux mais plus longtemps ! Et j'ai plutôt l'impression que c'est dans ce sens-là qu'on va puisque les deux cents postes - un peu moins - qui sont demandés pour mille élèves de plus correspondent à un poste pour cinq élèves ! On peut se demander, un poste pour cinq élèves... Personnellement, ça me fait encore plus douter de l'utilité de ces postes. On peut finalement s'inquiéter du fait qu'autant de postes soient demandés pour si peu d'élèves, d'autant plus que je n'ai pas l'impression que la qualité de l'enseignement aille vraiment en s'améliorant - là-dessus aussi on peut se poser des questions.

Mais pour moi, il y a encore plus grave: dans son système d'école inclusive, Mme Emery-Torracinta a finalement pris la décision d'exclure une partie des élèves - elle en a le droit, c'est le règlement qui le dit. Mais on a appris dans la presse que dès la prochaine rentrée, elle allait exclure tous les élèves qui habitent hors canton ! Or, je trouve - et mon groupe également - ce système parfaitement scandaleux: c'est faire des économies sur le dos de nos enfants. Malgré tout ce qu'on peut dire, pourquoi est-ce que les élèves genevois partent habiter en France voisine ? Parce qu'ils suivent leurs parents; ils sont obligés, dans le fond. Mais ces personnes-là conservent tous leurs centres d'intérêt à Genève: leur travail, leurs relations sociales, leur famille ! Ils ne font qu'habiter en France voisine et, par souci d'économie, on les exclut de nos écoles; l'UDC est scandalisée. C'est même une honte pour notre canton alors que Mme Emery-Torracinta vante l'école inclusive: là, on exclut clairement et simplement des personnes.

D'autant plus que des fronts commencent à s'ouvrir parmi nos concitoyens suisses de l'étranger, puisqu'ils ne comprennent pas que, tandis qu'ils sont exclus, le département et ce Grand Conseil également ferment par contre les yeux sur qui ? Sur les enfants des sans-papiers qui finalement occupent nos écoles. Alors si on en exclut certains pour en mettre d'autres à la place, le principe est scandaleux. En plus de ça, ces parents sans papiers ne paient pas d'impôts à Genève ! Ils profitent de toutes nos infrastructures tandis que les autres, comme je le disais avant, paient leurs impôts à Genève. On ne dit par contre rien aux sans-papiers, on ferme les yeux et on ne les force même pas à régulariser un minimum leur situation pour qu'ils commencent enfin à participer à la vie genevoise et à payer leurs impôts ! Nous aurons l'occasion de revenir là-dessus à la rentrée puisque nous déposerons un texte parlementaire sur le sujet. (Remarque.) A la rentrée civile, Monsieur Barrillier. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) On pourrait également s'inspirer de ce que fait Neuchâtel dont la situation est exactement comme la nôtre ou peut-être même pire - il se trouve dans une situation économique déplorable - et qui a pris des mesures. C'est-à-dire: qu'est-ce qu'il a fait ? Il a pris la mesure immédiate d'ajouter un élève de plus par classe; personne n'a rien dit, c'est passé quasiment comme une lettre à la poste. Mme Emery-Torracinta...

Le président. Il vous faut terminer.

M. Stéphane Florey. Je reprendrai la parole tout à l'heure, alors. Merci.

M. Guy Mettan (PDC). Ce budget n'est peut-être pas le budget du parti socialiste; ce n'est pas exactement non plus le budget du parti démocrate-chrétien, mais pour des raisons opposées à celles que nos collègues socialistes ont exposées. Pourquoi ? Parce que nous pensons que sur un budget, de mémoire, de 2,5 milliards - voire plus - nous aurions pu faire des efforts d'efficience et limiter la croissance des dépenses de façon plus dynamique que ce qui nous est proposé aujourd'hui. Le parti démocrate-chrétien partage les objectifs du DIP quant à la mise en oeuvre de l'école obligatoire jusqu'à 18 ans par exemple, et largement aussi quant aux dispositions concernant l'école inclusive et autres engagements pris par le DIP au cours de ces dernières années.

C'est le département qui connaît la plus grande croissance en matière budgétaire et en matière de postes. C'est effectivement légitimé par le nombre d'élèves supplémentaires - là-dessus nous n'avons aucun problème - mais attribuer deux cents postes pour justifier cette augmentation de mille élèves, comme M. Florey l'a rappelé, c'est peut-être excessif. On aurait pu trouver ailleurs des économies, notamment en matière de postes, je pense par exemple à l'encadrement - il est quand même de notoriété publique qu'il est généreux, disons, au DIP - et au personnel administratif également. On aurait peut-être pu aussi trouver d'autres sources d'économies du côté du cycle d'orientation puisqu'on sait que le nombre d'élèves par classe est chez nous inférieur à celui des autres cantons. Pourquoi donc ne pas faire aussi bien qu'ailleurs dans ce domaine également et augmenter légèrement le nombre d'élèves par classe ?

Le parti démocrate-chrétien votera cette politique publique puisque, comme je l'ai dit, nous sommes attachés à l'enseignement, à l'éducation sous toutes ses formes. Nous l'avons déjà démontré depuis de très, très nombreuses années. Mais, en même temps, nous ne sommes pas tout à fait satisfaits de l'ensemble du budget de cette politique publique, raison pour laquelle nous soutiendrons l'amendement proposé par M. Lussi qui, comme on l'a indiqué, ne vise pas à couper dans le budget mais à réduire sa progression. Nous l'avons soutenu en commission et notre commissaire, Olivier Cerutti, y a expliqué les raisons; nous suivrons donc cet amendement. Nous soutiendrons in fine la politique publique «Formation», mais avec un regret concernant justement la mise en oeuvre de mesures d'efficience qui ne nous paraissent pas encore abouties.

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, la politique de l'enseignement est effectivement cardinale; elle est très, très importante. Je crois qu'il faut relever deux ou trois choses dans ce domaine. D'abord, c'est vrai qu'il y a à Genève une croissance de la population: c'est indéniable. Cette croissance induit une augmentation des élèves en classe. Le tout est de savoir si l'adéquation est la bonne. Voilà ce que nous devons déterminer. Il se trouve aussi que Genève accueille passablement d'élèves de la France voisine, des élèves de nos collègues frontaliers. Je crois que, à tout choisir, on a besoin de mieux encadrer nos élèves et de répondre à cette croissance démographique. Par conséquent, on doit autant que faire se peut limiter l'intégration, je dirais, de ces élèves qui viennent de la France voisine. Il est vrai que les Français pleurent parce que certains Suisses qui habitent en France mettent les enfants dans leurs écoles et que ça leur coûte. Alors soit on limite d'une façon drastique les élèves frontaliers - ceux qui sont là sont là, mais on n'en prend pas de nouveaux - soit on déduit ces 60 millions de la contribution de Genève à la France ! Pourquoi pas ? C'est, je crois, la bonne direction à prendre.

D'autant plus - d'autant plus - qu'au-delà du fait qu'il y a cette croissance démographique, on veut maintenant commencer à mettre en place l'école jusqu'à 18 ans ! On trouve un certain nombre d'informations à la page 82 du budget, programme A02 «Enseignement secondaire II et formation continue»: selon les dispositions qui y sont mentionnées, il va falloir remettre à l'école près de 750 jeunes qui ont décroché du système scolaire, et il faudra bien les placer quelque part. Il faudra bien des enseignants pour leur remettre le pied à l'étrier. Je relève en passant que j'ai déposé il y a quelque temps une motion visant à identifier les décrocheurs scolaires et à savoir ce que deviennent ceux qui n'ont pas réussi à entrer dans une formation, qui souvent ont même échoué à entreprendre un apprentissage, à l'examen d'entrée, à l'examen d'évaluation, et dont on nous disait qu'on ne savait pas où ni combien ils étaient ! Eh bien, on sait visiblement combien et où ils sont puisqu'on en trouve 750 dans le budget, dont il faudra s'occuper ! Il y aura par conséquent un besoin d'enseignants dans ce domaine ! C'est la raison pour laquelle, en ce qui nous concerne, nous soutiendrons cette politique. Une fois l'année écoulée, nous mesurerons les résultats de cette politique et si l'adéquation entre les postes et les montants attribués est, je dirais, bien calibrée. Il faudra aussi veiller, je le répète, à diminuer le nombre d'enfants qui viennent de la France voisine, parce qu'à mon avis, il n'y a pas de raison que Genève paie 60 millions de francs afin que la France les prenne en charge alors qu'ils sont scolarisés chez nous. Ou bien alors, je le redis, on soustrait ces 60 millions de la contribution à la France. Oui, il faut soutenir cette politique ! Je crois que tout ce qu'on investit dans l'école, c'est autant qu'on n'investit pas ensuite dans les prisons ! Je vous invite donc à voter cette politique publique.

Une voix. Youpi Rintintin !

M. Yves de Matteis (Ve). Je ne vais pas revenir sur ce qui a déjà été dit concernant les chiffres, ni pour ce qui est du budget de fonctionnement - justifiable à plusieurs titres - ni pour ce qui est des investissements concernant les constructions, agrandissements et autres rénovations voulus par mon groupe, et j'espère aussi par l'ensemble du parlement, car les conditions dans lesquelles les élèves étudient doivent être les meilleures possible. Au-delà, cette politique publique est nécessaire au maintien d'une société démocratique et égalitariste. J'en profite pour remercier ici Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat, et toute l'administration, de l'excellent travail - essentiel travail - qui est effectué et qui a été effectué jusqu'à aujourd'hui, car il s'agit aussi ici d'égalité des chances. Comme le dit la constitution genevoise en son article 195 intitulé «Accès à la formation», je cite: «L'Etat facilite l'accès à la formation et promeut l'égalité des chances.» Cette égalité des chances a un coût, car il ne s'agit pas ici de fournir les mêmes prestations à tous les élèves, mais de donner aux élèves ayant des besoins spécifiques des prestations adaptées et différentes dans chaque cas: des cours supplémentaires de français aux élèves non francophones, des dispositifs additionnels pour les élèves en situation de handicap. Ces prestations, dont il faut voter le financement si l'on ne veut pas que dans ce canton les élèves quittent l'école pour aller directement pointer au chômage puis à l'assistance publique, représentent nécessairement des coûts supplémentaires et ont donc des implications budgétaires. Raisons pour lesquelles les Verts ne voteront aucune coupe dans ce département et vous enjoignent de faire de même. Si vous ne le faites pas par souci de responsabilité ou d'égalité des chances, faites-le alors de manière purement égoïste afin d'investir dans notre futur, afin que ces jeunes puissent mettre toutes les chances de leur côté pour pouvoir travailler et financer les prestations sociales, notre AVS, etc.

Pour terminer mon intervention, j'aimerais également, en tant que président de la commission des Droits de l'Homme ou de la personne, mentionner la question des droits humains et des discriminations dans le cadre scolaire. Il y a plus d'une année, une motion des Verts avait souligné que l'école obligatoire avait aussi pour mission la promotion des droits humains et la prévention des discriminations, dans cette perspective de l'égalité des chances et étant donné les conséquences des préjugés et discriminations sur la santé et, in fine, sur le décrochage ou l'échec scolaire. Encore plus visible depuis que la parole se libère chez les victimes de violences sexistes et sexuelles, la prévention est plus que jamais nécessaire. Nous espérons donc que le Conseil d'Etat va donner les moyens nécessaires au DIP en 2018 pour assurer le suivi de la motion que je mentionnais.

J'aimerais d'ailleurs brièvement étayer mon propos, si j'en ai encore le temps - je vois que c'est le cas. La prévention des stéréotypes, préjugés, discriminations et violences - y compris sexuelles ou sexistes - ne concerne pas des minorités. Si l'on met bout à bout les populations qui peuvent être discriminées, on arrive à une majorité de la population genevoise. En effet, plus de 51% de notre population pourrait être touchée par des discriminations basées sur le sexe; jusqu'à 26% par des discriminations basées sur une situation de handicap; au minimum 40% par des discriminations basées sur l'origine, la nationalité, l'appartenance ethnique ou la religion; et entre 5% et 10% par des discriminations basées sur l'orientation sexuelle ou l'identité de genre. Au total, c'est donc environ 80% de la population genevoise - voire plus - qui peut être victime de stéréotypes, préjugés, discriminations ou même violences.

Et ce qui est grave chez les adultes est encore plus dramatique chez les jeunes, nettement plus dépendants et vulnérables. On le voit avec le pourcentage de tentatives de suicide chez les jeunes, notamment liées à l'orientation sexuelle et à l'identité de genre, mais des constats similaires pourraient aussi être faits pour les autres motifs de préjugés et de discriminations. Il est donc clair que la prévention des discriminations ne concerne pas des minorités mais bien l'ensemble de la population. Personnellement, j'appartiens à trois des quatre catégories de victimes potentielles de préjugés ou de discriminations que j'ai mentionnées il y a quelques secondes, même si j'ai eu nettement plus de chance que d'autres - qui ne sont d'ailleurs plus parmi nous.

Pour toutes ces raisons, je vous enjoins avec une certaine urgence de vous montrer responsables, si ce n'est solidaires, et de voter donc cette politique publique qui détient la clé de notre futur à tous et à toutes. Par contre, de la même manière que mon groupe n'a pas voté l'amendement concernant le Club suisse de la presse, pourtant présenté par le Conseil d'Etat, nous n'accepterons aucun amendement, ni à la hausse ni à la baisse, concernant cette politique publique. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)

M. Cyril Aellen (PLR). Il y a une chose qui m'étonne toujours lorsque je lis la presse: les critiques dont fait l'objet la conseillère d'Etat chargée du département de l'instruction publique. Je fais partie des commissaires qui, dans le cadre de l'examen de cette politique publique, sont allés entendre ses services et elle-même, et je dois dire que le travail est particulièrement bien fait et bien mené. Les questions qu'on pose obtiennent des réponses claires et c'est très objectivement une magistrate avec laquelle, comme parlementaire et dans ce cadre-là, il est agréable de travailler. Si je suis vraiment en désaccord avec elle, le désaccord est d'ordre politique ! Je veux dire par là, Mesdames et Messieurs les socialistes, que votre magistrate mène réellement la politique que vous souhaitez, et les critiques que vous lui adressez m'apparaissent bien étranges ! Que le PLR que je suis formule un certain nombre de reproches sur la politique menée par la conseillère d'Etat m'apparaît en revanche plutôt normal.

Je ne répondrai pas à Mme Moyard; j'ai toujours considéré que le partenariat social doit se faire entre les syndicats et le Conseil d'Etat, pas au sein de ce parlement. Mais reprenez le rapport qui figure à la page 3 des «Annexes au rapport de majorité» et vous verrez ! Qu'est-ce qui se passe ? Les augmentations sont justifiées ! Très clairement ! Elles sont pour l'essentiel justifiées non pas pour des postes d'enseignants supplémentaires, mais pour des logopédistes, des éducateurs, du personnel administratif - on nous dit de faire attention parce que si le personnel administratif n'enseigne pas, il s'occupe tout de même de la formation. Et c'est précisément cette vision-là de la politique A que le PLR combat, parce qu'il souhaiterait soutenir une politique du savoir et pas une politique orientée vers les soins ou l'accompagnement social. Nous souhaitons un département de l'instruction publique et non pas un département de l'intégration publique ! Nous aimerions que le savoir et la connaissance soient au coeur de l'égalité des chances et de la progression des élèves.

S'agissant de l'augmentation des postes, le nombre d'élèves supplémentaires, y compris ceux résultant de l'obligation de formation jusqu'à 18 ans, s'élève à mille. Il faut réellement, pour ce nombre, deux cents postes supplémentaires ? Non, ça ne va pas ! Ça représente beaucoup trop d'engagements par rapport au budget de l'Etat, et puis c'est surtout refuser - obstinément - de faire les réformes indispensables qui permettraient de donner à l'Etat des moyens supplémentaires pour engager par exemple un certain nombre d'enseignants. Allez dans les cours de récréation et interrogez les parents: est-ce que vous pensez sérieusement qu'ils ont l'impression que des moyens supplémentaires sont donnés pour la formation, et non pas pour l'intégration ? Bien sûr que non, et si je ne comprends pas les socialistes qui critiquent leur magistrate, je conçois qu'une partie du corps enseignant s'inquiète parce qu'il ne peut plus exercer son «core business»: l'enseignement ! Ça, c'est important.

Voilà pour l'essentiel; il y aurait tant à dire ! Notamment, que 750 postes supplémentaires en réalité ont été créés durant cette législature. Madame la conseillère d'Etat, vous avez bien travaillé: vous êtes celle qui a obtenu le plus de postes. Je regrette infiniment que vous n'ayez malheureusement pas déployé la même énergie pour mener les réformes, en particulier au cycle ! Réexpliquez-moi pourquoi Genève est le seul canton où les heures d'enseignement sont de 30% inférieures au reste de la Suisse ! Ça, ça ne figure pas dans les statistiques de votre parti et je le regrette infiniment. (Quelques applaudissements.)

M. Patrick Saudan (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, je vais dire un petit mot sur nos établissements de formation supérieure puisque 25% du budget de la politique publique de la formation leur est destiné. Si vous regardez le message de synthèse des priorités du département, seulement trois lignes y sont consacrées. Je ne vous ferai pas l'injure de penser que la conseillère d'Etat se désintéresse de nos établissements de formation supérieure; je pense au contraire que le département est relativement satisfait parce qu'ils ont accompli avec succès les missions tant de formation que de recherche. Ces établissements sont excellents. Je mentionnerai simplement que l'Université de Genève a vu, cette rentrée, le nombre de ses étudiants augmenter de 2% et les établissements de la HES-SO de 4,7%. J'en veux aussi pour preuve - vous avez peut-être lu la presse - que l'Université de Genève et celle de Zurich, celle avec laquelle il y a le plus d'échanges, ont conclu une convention; ce partenariat est très prometteur.

Néanmoins, Mesdames et Messieurs les députés, cette excellence est menacée. Elle est menacée, parce que les perspectives budgétaires sont plutôt sombres. Si la HES-SO est relativement protégée par la structure intercantonale qui la coiffe et les textes législatifs qui la régissent, lui assurant un financement plus ou moins pérenne dépendant du nombre d'étudiants, le budget de l'université est beaucoup plus fragile. Pourquoi ? Parce qu'il est assuré à 60% environ par des fonds cantonaux et fédéraux relativement stables, mais entre 20% et 30% par des fonds obtenus d'une manière compétitive. Ça veut donc dire que l'université est en permanence condamnée à un cercle vertueux, un cercle d'innovation, de recherche, et doit proposer des projets qui rencontrent l'agrément des structures qui peuvent la financer.

Or, le gros problème pour l'université au niveau budgétaire, c'est le manque de visibilité. Parce que, voyez-vous, les objectifs de l'université sont définis par une convention d'objectifs quadriennale ! Et cette convention d'objectifs fixe des priorités qui, dans le domaine de la recherche, ne peuvent pas être annuelles ! Mais toutes ces priorités sont malheureusement soumises à des aléas budgétaires puisque nous votons chaque année le budget de l'université. Je vais vous donner un exemple tout simple: qu'avons-nous fait hier ? Contrairement à ce que voulait le Conseil d'Etat, notre parlement, très prodigue, a accordé l'annuité complète. Et l'université doit suivre ! Par cette mesure, les charges de l'université ont été augmentées de 2 millions de francs. L'université avait budgété 2 millions - soit une demi-annuité - et elle se retrouve là avec 2 millions de plus. Que va-t-elle devoir faire ? Elle n'a qu'une variable d'ajustement: son fonds d'innovation et de développement, déjà fortement mis à contribution ces dernières années. Actuellement, il est à sec ! Il est à sec, Mesdames et Messieurs les députés ! Ce qui veut dire que l'université va devoir rogner sur des fonds qui servent à l'innovation, et le cercle vertueux dont je vous parlais il y a quelques instants risque d'être brisé. Le PLR, fidèle à lui-même, ne va pas demander une augmentation de la subvention de l'université, mais il faut absolument que le département réfléchisse... Madame la présidente du département, c'est un message qui vous est adressé. (Remarque.) Excusez-moi de vous interrompre. (Remarque.) ...il faut vraiment que le département réfléchisse à instaurer un mécanisme financier qui permette à l'université d'avoir une visibilité budgétaire correspondant à la période quadriennale de la convention d'objectifs. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Une voix. C'est bien !

M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais pour commencer corriger les paroles du député Aellen, qui affirme que les élèves genevois auraient 30% de temps d'enseignement en moins. C'est absolument faux ! Depuis 2014, les élèves de l'école primaire des degrés 5P à 8P ont l'horaire le plus chargé de toute la Suisse romande et même de la Suisse entière; M. Aellen devrait quand même vérifier un peu ses sources. Mais je reviens à notre propos: demander que les ressources disponibles soient affectées en priorité aux prestations directes aux élèves, au front des classes, est légitime. Il n'est par contre pas honnête de mettre en parallèle les mille élèves supplémentaires et les deux cents nouveaux postes inscrits. Le DIP a besoin de ces postes, ne serait-ce que pour combler tous les engagements de profs qui n'ont pas eu lieu alors que le nombre d'élèves augmentait considérablement. En six ans, il y a eu six mille élèves de plus au primaire et aucun poste n'a été créé; c'est la réalité qu'a connue cet ordre d'enseignement à l'aube du XXIe siècle. Actuellement, au cycle d'orientation, faute de places dans les classes, les transferts d'élèves sont aussi parfois impossibles. Mais il faut également être honnête et reconnaître que la politique présentée par le DIP aujourd'hui ne semble pas prendre en compte les vraies priorités. Aussi, encore une fois, Ensemble à Gauche vous demande de voter l'amendement modeste qu'il propose et de refuser celui de l'UDC.

M. Stéphane Florey (UDC). Je reprendrai là où j'en étais resté tout à l'heure: le Conseil d'Etat devrait s'inspirer de ce qui se fait par exemple dans le canton de Neuchâtel, où il a été décidé de mettre un élève de plus par classe sans que cela suscite la moindre interrogation; c'est une mesure qui amènera inévitablement une économie. Neuchâtel a aussi pris la décision de fermer sa haute école de musique, décision intelligente, puisqu'il a bien compris que cette haute école coûte particulièrement cher. Elle coûte très cher; elle coûte trop cher ! Et, finalement, que va faire Neuchâtel ? Ses étudiants vont se reporter sur les autres cantons qui conserveront une école de musique; il paiera pour les élèves qu'il y enverra, mais ça lui coûtera de toute façon beaucoup moins cher que ce que ça lui coûte aujourd'hui. Je l'ai déjà dit plusieurs fois, même en commission: je n'arrive pas à comprendre que Genève se vante d'avoir une école de musique qui lui coûte bientôt les deux bras plutôt que de négocier avec les cantons romands, si on tient à la conserver, une école de musique romande, et non pas genevoise au nom de son soi-disant rayonnement international ! C'est une politique de démesure que l'on voit ici, même si cette haute école sera en partie financée par des donateurs privés, ce dont on peut se réjouir. Mais, sur le fond, ce qui va nous coûter cher, c'est son fonctionnement. A l'heure actuelle, Genève devrait se remettre en question et aller dans le sens d'une rationalisation romande ! Peut-être même pour toutes les hautes écoles: on répartirait ces établissements dans la Suisse romande et chaque canton accueillerait une haute école spécifique. Là-dessus, il y a vraiment une piste d'efficience à creuser, à l'image de ce que fait le canton de Neuchâtel. Finalement, nous nous abstiendrons sur cette politique publique pour toutes les raisons que je viens d'évoquer. Je vous remercie.

M. François Baertschi (MCG). Je suis quand même assez surpris, parce qu'on nous demande de couper 15,5 millions de francs pour les parents et les élèves. C'est bien sûr à leur détriment: on va réduire le nombre d'enseignants, c'est la signification de cet amendement sur la nature 30. On veut supprimer ces postes et, dans le même temps, on nous dit qu'il ne faut surtout pas toucher aux élèves frontaliers, qu'il faut les laisser venir. Ça nous coûte quand même 60 millions de francs par année - 60 millions par année - alors il faudrait au contraire suivre la proposition lancée intelligemment dans le plan financier quadriennal: garder les élèves frontaliers qui sont actuellement dans nos écoles mais fermer le robinet pour les nouveaux, c'est-à-dire les empêcher de venir. D'autant plus avec tous les moyens supplémentaires dont disposent les frontaliers en vivant en France voisine, puisque le coût de la vie y est beaucoup plus bas: ils peuvent soit envoyer leurs enfants dans les écoles françaises soit dans des écoles privées. Ils en ont largement les moyens, ce n'est donc pas au contribuable genevois de payer 60 millions par année alors que le canton a toutes les peines du monde à boucler ses budgets. C'est un peu irresponsable de demander cela; il faut prendre une mesure humaine et progressive et ne pas faire des coupes à la hache, mais il ne faut pas non plus se montrer dispendieux sur d'autres dépenses. Il faut d'abord penser aux élèves genevois, aux habitants de Genève; c'est en tout cas la ligne du MCG.

M. Cyril Aellen (PLR). Je m'étais probablement mal exprimé et c'est pourquoi je reprends la parole. Je voulais simplement dire à M. Olivier Baud que je ne méconnais pas le fait que l'élève genevois est probablement l'un de ceux qui, dans le pays, ont le plus d'heures d'enseignement en soi. Je milite d'ailleurs, parfois contre mon groupe, pour que cet horaire soit allégé, en particulier des tâches éducatives qui sont confiées aux enseignants en lieu et place de l'instruction, qui doit être la priorité de l'école. En revanche, je faisais référence à la page 15 des «Annexes au rapport de majorité» dans laquelle figure un tableau de l'Institut de recherche et de documentation pédagogique - institut scientifique de la Conférence intercantonale de l'instruction publique de la Suisse romande et du Tessin - qui nous donne des statistiques sur les heures d'enseignement des enseignants. Et vous constaterez que s'agissant du secondaire premier cycle - c'est-à-dire du cycle d'orientation - le temps d'enseignement à Genève est en moyenne de seize heures trente alors que dans tous les autres cantons romands, sans exception, la moyenne est plus élevée: vingt et une heures d'enseignement ! C'est cette différence-là qui fait que l'école coûte aujourd'hui sensiblement plus cher à Genève que dans le reste des cantons. Mme Emery-Torracinta me répondra à côté, comme d'ailleurs chaque année, en me disant qu'elle ne peut pas faire cette réforme parce qu'elle impliquerait de devoir payer plus les enseignants du collège ! Pour moi, ça n'a strictement rien à voir, mais je m'attends à cette réponse parce que c'est chaque année la même. Je continuerai pourtant à poser chaque année la question, dont la réponse, chaque fois, tombera à côté !

M. Jean-Luc Forni (PDC). Permettez-moi d'intervenir dans ce débat dans le prolongement de l'intervention de M. Saudan concernant les hautes écoles, et plus particulièrement l'université. Nous avions déjà mentionné l'année dernière notre souci face à la diminution de la subvention cantonale; si j'ai bien lu le compte rendu de la commission des finances relatif à l'audition du recteur, il semblerait que les subventions fédérales, cette année, aient été augmentées, ce qui a permis de stabiliser un petit peu le niveau. Mais il y a quand même quelques soucis, notamment si je prends le cas particulier de l'école de pharmacie. (Brouhaha.) On sait que le canton de Vaud ne va plus assurer une partie du financement dans un avenir très proche: ce sont plusieurs millions qui vont s'en aller. (Brouhaha.) Mes questions sont donc les suivantes: comment est-ce que le canton a... (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît, Monsieur, une petite seconde. Un peu de silence !

M. Jean-Luc Forni. Quelles sont les possibilités pour le canton...

Le président. Attendez, Monsieur, s'il vous plaît. (Un instant s'écoule. Le silence revient.) Allez-y, merci.

M. Jean-Luc Forni. Merci. Mes questions à la conseillère d'Etat sont les suivantes: quelles sont, dans ce cas particulier, les possibilités pour le canton de Genève d'obtenir un financement complémentaire, soit des autres cantons romands soit de la Confédération ? Il n'y a en effet que trois écoles de pharmacie, et celle-ci a en plus un palmarès particulièrement brillant puisqu'elle est classée première école des pays francophones et qu'elle fait notamment preuve de beaucoup de dynamisme dans la recherche. Et quelles sont nos possibilités d'intervention dans l'écolage des étudiants qui viennent d'autres cantons ? Je crois qu'un taux de 10% est déduit sur l'écolage en fonction des critères de recherche et de formation, ce qui a donc un impact sur les fonds générés par ce biais-là. Voilà les deux questions que j'aimerais poser à Mme Emery-Torracinta. Je vous remercie.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Quand j'entends ce débat sur l'instruction publique, je me croirais franchement dans le tiers monde ! Notre canton a presque 50 milliards de PIB - donc des ressources quand même assez conséquentes - et on se demande s'il faudrait enlever quelques postes par-ci par-là dans l'instruction publique. Mais, Mesdames et Messieurs, on sait très bien que ce n'est pas la même chose d'enseigner au cycle d'orientation que d'enseigner au primaire ou au collège ! J'ai donné quelques cours au cycle et j'ai vite compris: j'ai arrêté, parce que c'était infernal ! (Rires.) C'est la vérité. C'est la vérité, Mesdames et Messieurs. On ne peut pas avoir une telle approche linéaire ! Ensuite, vous savez très bien aussi qu'on ne peut pas comparer les cantons. La composition sociologique de ce canton n'est pas du tout la même que celle des autres ! Et les élèves qui arrivent au cycle ont parfois des problèmes, disons, parce que la société a des problèmes. L'école les reçoit et on doit faire face; tant mieux ! Et tant mieux que l'école puisse le faire.

Maintenant, j'aimerais faire un petit retour en arrière, Mesdames et Messieurs, parce que Mme Engelberts nous a accusés - la gauche en général - d'avoir une pensée linéaire. (Remarque.) Oui, oui, vous avez dit qu'à gauche nous pensions toujours de manière linéaire: plus de population, plus de postes, plus de ceci ou de cela ! Mais, Madame, c'est vous en réalité qui êtes linéaire, parce que c'est vous qui avez fait le rapport, disons, entre les 1000 élèves et les 200 enseignants ! Vous avez divisé, comme ça, 1000 élèves par 200 et puis vous vous êtes dit: «Quoi ? Vous vous rendez compte !» Mais nous, nous ne sommes pas linéaires ! A vous, il paraît que quand il y a 200 postes et 1000 élèves supplémentaires, on divise 1000 par 200 et on arrive à 5; ce que je comprends, moi, avec mon intelligence effectivement tout à fait limitée, et ce que nous voulions, nous, dire en réalité, c'est qu'en plus des postes d'enseignants, il faut aussi des postes de logopédistes, etc., et M. Cyril Aellen l'a d'ailleurs très bien dit tout à l'heure ! Il a effectivement bien souligné qu'à côté de ces postes d'enseignants, l'école genevoise a aussi une politique de prévention en matière de santé. Et c'est très, très bien ! Parce que quand il y a beaucoup d'élèves et qu'ils arrivent à l'école avec un problème de dentition ou des problèmes de santé, il est heureux qu'on puisse faire de la prévention sur ces sujets.

Et quand il y a plus d'élèves, Mesdames et Messieurs, peut-être qu'il faut aussi développer l'encadrement administratif. C'est logique ! Vous, vous dites: «on va reparler de tout cela», avec un misérabilisme que je comprends très mal. Non, non, Madame Engelberts, nous ne sommes donc pas du tout linéaires - pas du tout - mais nous comprenons qu'il faut fournir plus de prestations quand la population augmente. Et ces prestations ont un coût, voyez-vous. Je donne un exemple: l'hôpital cantonal nous dit que pour couvrir un poste d'infirmière - un poste - il engage trois personnes. Il n'y a donc effectivement pas de linéarité, Madame; il n'y a pas de linéarité.

Voilà, Mesdames et Messieurs. Le rapporteur de majorité vous enjoint de ne pas accepter ces amendements, bien que l'un d'entre eux soit intéressant puisqu'il donnerait des moyens supplémentaires au département. Mais afin de garantir le vote de ce budget, le rapporteur de majorité vous engage à refuser tous les amendements et à voter cette politique publique.

M. Thomas Bläsi (UDC). Chers collègues, j'ai juste une interrogation par rapport à ce que nous ont expliqué les représentants du MCG, et finalement une question. J'ai bien compris que le représentant du MCG demandait que les élèves français ou suisses qui sont frontaliers soient dorénavant pris en charge par l'école française, ce que je peux entendre. Mais, dans le même temps, nous savons à l'UDC que le MCG demande la suppression de la part des impôts cantonaux genevois reversée aux communes françaises au travers de l'accord franco-genevois. Alors il serait pour moi intéressant de savoir comment les représentants du MCG comptent finalement rendre possible le maintien des infrastructures en supprimant la part des fonds versée par Genève. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur. La parole est à Mme Engelberts pour trente-cinq secondes.

Mme Marie-Thérèse Engelberts (HP). Monsieur le président, je voudrais répondre puisque j'ai été interpellée et citée mal à propos, il me semble, par M. Velasco. Hier, quand j'ai parlé des postes et d'une certaine linéarité, je le faisais dans un certain contexte. Et ce contexte est le suivant: il est absolument nécessaire de repenser la manière de travailler aussi bien dans le domaine des soins que de l'éducation, du travail social et ailleurs. Il faut resituer les choses dans leur contexte et ne pas les en sortir afin d'en tirer bénéfice alors que le propos est différent. Merci, Monsieur le président.

M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, puisque l'on parle du budget de l'enseignement et que nous voterons sur un amendement sur les postes, il est quand même aussi important de saisir qu'il y a d'une manière générale des considérations - beaucoup d'entre vous en ont émis - qu'on ne peut certes pas simplement critiquer ou balayer d'un revers de la main. Elles portent sur une manière d'aborder le sujet, sur une manière de conduire l'instruction publique et sur la juste manière d'acquérir les savoirs - je reviens sur cette notion qui est peut-être pour moi la plus essentielle. Or, quand on dissocie, malgré vos énumérations de gens prétendument spécialisés pour guider et aider tous les enfants, eh bien, il y a des constats à faire ! De nos jours encore - c'est pour ça que j'en parle, Monsieur le président - l'illettrisme n'est pas vaincu, tant s'en faut. On s'aperçoit qu'à l'issue de la scolarité obligatoire, des jeunes qui se chiffrent par milliers - en Suisse, pas à Genève - n'ont pas les savoirs nécessaires et sont illettrés. Au vu de cela, malgré tous les moyens qu'on met, est-ce que l'on fait juste ? C'est peut-être la seule question à laquelle Mme la conseillère d'Etat répondra: malgré tous ces programmes - nous avons tous des parents ou des alliés dans l'enseignement, on sait qu'ils s'investissent et font au mieux - est-ce que la philosophie suivie est la meilleure ? Je sais que Mme la conseillère d'Etat a beaucoup de soucis quant à tous ces jeunes qu'on laisse de côté ou qui ne montent pas dans le train, mais, au vu de ces échecs, est-ce que nous faisons ce qu'il faut ? Est-ce que notre conception est juste ? Je pense que nous n'allons pas donner les réponses ce soir, à l'issue d'un débat sur le budget, mais nous devons poser ces questions face à des constats qui nous reviennent en pleine figure. Merci, Monsieur le président.

M. Jean Batou (EAG), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, si on observe la structure du budget de cette politique A, quelque chose saute aux yeux: les charges de l'enseignement obligatoire, du programme A01, croissent de 1,3% - ça, c'est pour M. Mettan, vous lui transmettrez, Monsieur le président. Il s'agit d'une croissance notoirement plus faible que celle de notre budget. Le programme A02 «Enseignement secondaire II et formation continue» croît de 1,7%, un taux également plus faible que celui du budget. Et je ne vous ferai pas l'insulte de vous parler de l'université où la croissance est de 0,4%, très largement inférieure à celle du budget. Alors quels sont les programmes dont les charges impactent cette politique publique ? Ce sont les programmes A03 et A05, respectivement «Suivi éducatif et soutien aux familles» - j'aurais imaginé que le parti démocrate-chrétien serait soucieux de soutenir les familles, eh bien il semble que ce ne soit plus le cas - et «Enseignement spécialisé», programme sur lequel nous avons déposé un amendement. (Brouhaha.) Pourquoi ? Parce que nous constatons que la crise sociale, qui n'intéresse visiblement pas tous les bancs de ce Grand Conseil... (Brouhaha.) ...la crise sociale et le creusement des inégalités ont des incidences sur l'instruction publique.

On ne peut plus faire de l'éducation son «core business» - comme dit, dans un langage fleuri, mon collègue du PLR - on ne peut plus faire de l'éducation, de la transmission de connaissances, son «core business» quand on a en face de soi des enfants frappés par des conditions sociales qu'ils n'ont pas choisies, qui sont celles de leurs parents: la précarité, toujours plus d'emplois avec des horaires irréguliers. Dans ces conditions-là, les politiques de suivi éducatif et de soutien à la famille ou d'enseignement spécialisé prennent une importance de plus en plus grande. Et plus la crise sociale s'approfondira dans le canton, plus ces programmes prendront de place - et je le regrette - au sein de la politique A. Pour ces raisons-là, je vous invite une nouvelle fois à soutenir l'amendement que nous avons déposé en faveur de l'éducation spécialisée.

Enfin, j'aimerais faire une remarque. Vous aurez sans doute constaté que le seul impact de la politique du MCG, basée sur la répétition constante de l'idée que tous les problèmes viennent des frontaliers, ce seul impact, contenu dans le programme financier quadriennal, est que l'on cible les enfants de ressortissants en majorité genevois qui doivent vivre en France parce que la crise du logement est telle que vous la connaissez. Eh bien, ce sont ces enfants-là - qui, comme le dit M. Florey, n'ont pas choisi de suivre leurs parents tandis qu'ils décidaient de s'établir en France parce qu'ils ne trouvaient pas de logement à un prix convenable à Genève - que l'on n'admettra plus dans les écoles, alors que leurs parents paient des impôts. Et dernière remarque pour M. Florey qui s'émeut à juste titre du sort de ces enfants, mais se tait et ne s'émeut pas du tout du sort des enfants des sans-papiers: ceux-ci n'ont évidemment pas choisi de naître dans une famille de sans-papiers et M. Florey voudrait pourtant les voir exclure des écoles genevoises. Merci. (Applaudissements.)

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vais commencer par parler des hautes écoles et de l'université pour le député Saudan en disant, Monsieur le député, que je partage parfaitement votre point de vue concernant d'ailleurs l'université et les subventionnés en général. Oui, nous avons un problème puisqu'il y a quelques années, le parlement a opté avec la LIAF pour le principe des contrats quadriennaux - c'est le même principe avec la convention d'objectifs de l'université; oui, nous avons un problème lorsqu'on remet ça sur le métier chaque année et qu'on ne sait pas quelle sera la subvention versée. Dans le cas particulier de l'université, 2 millions supplémentaires sont accordés au titre de la convention d'objectifs, et c'est important pour lever les fonds pour la recherche scientifique. Mais il est vrai que la baisse de 1% que le Conseil d'Etat a dû adopter pour pratiquement l'ensemble des entités de ce canton entraîne en réalité une perte pour l'université. Vous avez raison de mentionner la question de l'annuité, mais je crois que ce parlement sera saisi prochainement d'un projet de loi à ce sujet et vous aurez l'occasion d'y revenir.

Concernant l'école de pharmacie, je peux rassurer M. Forni - enfin, je ne sais pas si ça va le rassurer: au moins, des discussions sont en cours entre les universités de Lausanne et de Genève. Il y a une quinzaine d'années - je dis cela, mais je ne suis pas sûre exactement de la date - un accord a été conclu pour une école de pharmacie à Genève et non plus à Lausanne; à cet effet, le canton de Vaud verse une subvention annuelle de 5 millions de francs par le biais d'une loi. Il se trouve que le canton de Vaud a maintenant décidé de prioriser l'oncologie: il veut doter la recherche en oncologie et non plus l'école de pharmacie. Les deux universités sont donc en discussion et les deux Conseils d'Etat aussi, c'est-à-dire Mauro Poggia et moi d'un côté, Pierre-Yves Maillard et Cesla Amarelle de l'autre, pour essayer d'arriver à un arrangement. Nous avons effectivement beaucoup d'étudiants vaudois - plus que de genevois, d'ailleurs - et ce ne sont pas l'accord intercantonal universitaire et la rétrocession du canton de Vaud qui paient le coût réel de ces étudiants; nous espérons donc arriver à une solution.

Mais permettez-moi, Mesdames et Messieurs les députés, de revenir sur toutes les questions liées à la formation. D'abord, pour rassurer peut-être celles et ceux qui parlent des élèves hors canton: rien, absolument rien dans ce budget n'est modifié à ce propos. Il n'y a donc pas lieu d'en parler aujourd'hui. Deuxième remarque: j'ai entendu le PDC Mettan dire qu'il n'y avait pas assez d'efforts d'efficience. On peut discuter, mais je vais vous donner un exemple concret: nous avons ouvert à la rentrée 2016 une nouvelle école, l'école de commerce Raymond Uldry. Elle est prévue à terme - dès l'année prochaine - pour 1000 élèves; cette année, nous en avons 900 dans le bâtiment. Coûts supplémentaires d'encadrement pour 2017: rien; il y en a pour les élèves, oui, mais pour l'administration, rien en 2017. Demande au budget 2018: 0,6 poste - 0,6 poste ! En l'occurrence pour un informaticien, je crois, en lien avec la maintenance des systèmes. Ce n'est donc rien du tout ! Pourquoi ? Parce que nous avons fait des réallocations internes. Nous avons réalloué une partie des postes économisés, si je puis dire, au moment de la fermeture du cycle de la Seymaz et du passage du bâtiment au collège de Candolle. Si établir l'administration d'une école de 900 élèves avec 0,6 poste supplémentaire, ce n'est pas un effort d'efficience, alors vous m'expliquerez ce qu'il faut faire !

Troisième remarque, sur ce qu'a dit M. Batou. Dans le projet de budget pour la formation déposé par le Conseil d'Etat, la croissance des charges est en effet inférieure à la moyenne de l'Etat, puisque nous sommes un petit peu en dessous de 1,8% de croissance des charges alors que le budget déposé était à 1,9%. Je suis quelque peu désolée que les postes augmentent, Mesdames et Messieurs les députés, mais il se trouve, je vous le rappelle, qu'on n'est pas encore dans une société du tout numérique où ce sont des ordinateurs et des robots qui enseignent aux enfants: il faut bien des enseignants devant les classes ! Les charges d'autres départements augmentent parce qu'ils ont à encadrer des entités subventionnées ou des politiques publiques qui nécessitent des fonds - je pense à la mobilité et notamment aux TPG chers à certains - mais pas de postes.

Quels sont les projets du département et pourquoi autant de postes sont-ils nécessaires ? Si l'on excepte la formation obligatoire jusqu'à 18 ans, en raison de la pure démographie, la hausse du nombre d'élèves se monte en réalité à près de 900 élèves entre l'enseignement régulier et l'enseignement spécialisé; elle nécessite à peu près 95 postes supplémentaires. Qu'en est-il de la centaine supplémentaire demandée ? Quels sont les projets du département ? Premier projet, capital: la formation obligatoire jusqu'à 18 ans. Elle est voulue par la constitution, mais ce n'est pas la raison qui la rend importante à mes yeux. Elle est importante parce que 550 jeunes mineurs, 550 jeunes de moins de 18 ans quittent aujourd'hui le système scolaire genevois sans certification. Ces jeunes, vous les retrouvez quelques années plus tard chez mon collègue Mauro Poggia: au chômage dans un premier temps, puis à l'aide sociale ! Nous devons donc investir dans l'éducation si nous voulons aussi, à terme, limiter les dégâts sociaux. Le projet de budget 2018 table sur le fait qu'à la rentrée prochaine, nous devrions garder au moins 400 élèves dans le système, grâce à une offre différente. On verra si les chiffres sont justes, je rendrai des comptes au parlement. Si nous avons moins d'élèves, nous n'utiliserons pas ces postes; si nous avons plus d'élèves, je reviendrai vous demander des moyens supplémentaires. Nous n'aurons donc pas 1000 élèves de plus dans le canton l'année prochaine, mais 1300 au bas mot.

Deuxième chose, le renforcement de l'école primaire. Monsieur Aellen, je partage parfaitement votre point de vue: il faut apprendre à lire et à compter car les savoirs de base sont essentiels. Mais - et je vous invite à aller chez les tout petits, notamment dans les classes de 1P - comment enseigner lorsque vous avez parfois 22, 23 ou 24 élèves par classe, dont des enfants explosifs ? Il se passe quelque chose aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés; ce n'est pas seulement lié à des questions d'éducation ou de société ni à l'abus des écrans, mais probablement aussi à l'environnement. Je viens de voir une excellente émission d'Arte sur les perturbateurs endocriniens et l'augmentation par exemple du nombre d'enfants autistes - 600% de plus en Californie; il se passe probablement quelque chose parce que les troubles du comportement augmentent. Résultat des courses, comment voulez-vous que des enseignants puissent faire face à des élèves aussi hétérogènes ? Ils ont besoin de thérapeutes et de psychologues non pas pour faire de la thérapie en classe - ce n'est pas une médicalisation de l'école - mais peut-être pour avoir un regard autre. Parce que quand on est enseignant, on n'est pas psychologue, logopédiste ou éducateur ! On a besoin qu'on nous donne simplement quelques trucs, quelques éléments de lecture qui permettent de faire face aux difficultés. Alors oui, l'un de mes projets, dont je suis fière, vise le renforcement de l'école primaire et le déploiement d'équipes pluridisciplinaires dans sept établissements primaires de plus à la rentrée prochaine.

Il y a également des postes pour la formation professionnelle, dont je sais qu'ils vous sont chers, afin de pérenniser par exemple les conseillers en insertion de quatre cycles d'orientation; c'est un projet pilote qui nous permet de doubler dans ces quatre cycles-là le nombre de contrats d'apprentissage signés à la sortie. Il s'agit aussi de projets liés à une loi sur la formation professionnelle votée par ce parlement. J'aimerais mentionner également, même si on sort là de l'école et des postes, l'argent destiné à lutter contre les hospitalisations sociales, avec l'ouverture d'un nouveau foyer pour les 0 à 5 ans; il s'agit aussi d'une motion que vous avez votée à l'unanimité de ce parlement lors de la dernière session.

Puisqu'on parle budget et finances, je vais vous donner maintenant quelques chiffres concernant l'amendement proposé. Il est au fond très simple: il prévoit que si le DIP demande 195 postes - j'arrondis - dont 95 sont liés à l'augmentation démographique, on ne fait rien d'autre que de compenser celle-ci par ces 95 postes, mais sans baisser les prestations. C'est votre raisonnement, Monsieur Lussi, si j'ai bien compris. En multipliant les 100 postes que l'on pourrait ainsi économiser par à peu près 155 000 F, on arrive à 15,5 millions de francs. Soit. Première remarque: il faut savoir que dans les 195 postes, exactement 19,4 sont autofinancés - zéro coût ! - par les réserves de carrière et 3,8 postes au service dentaire scolaire rapportent plus qu'ils ne coûtent. Ils rapportent des recettes supplémentaires et permettent de surcroît de diminuer la liste d'attente d'enfants nécessitant des traitements dentaires. Vous savez que si ces traitements ne sont pas faits, cela peut engendrer des problèmes de santé extrêmement importants. Si on ne garde, pour faire des économies, que les postes liés à la démographie, il faudrait calculer ces économies sur à peu près 77 postes et non pas sur 100. En outre, vous le savez, les postes du DIP sont pour l'essentiel valorisés à partir du mois de septembre seulement - à part peut-être un ou deux dans cette liste-là - puisqu'ils sont liés à la rentrée scolaire. Ce qui veut dire que l'économie sur le budget 2018 - je ne parle pas d'économie globale ou de non-dépensé global, à terme - se monterait à moins de 4 millions de francs, je viens de faire le calcul. Si vous voulez épargner 15,5 millions, c'est de 300 postes qu'il faut faire l'économie, Mesdames et Messieurs les députés ! Mais je pense, il est vrai, qu'il faut avoir suivi l'école genevoise d'aujourd'hui pour savoir compter - celle des équipes pluridisciplinaires, celle des 46 postes de soutien à la lecture en plus depuis le début de la législature - et certainement pas l'école des années 1950 ou 1960 ! Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons commencer par voter sur la demande d'amendement de M. Lussi qui concerne le programme A01 «Enseignement obligatoire et orientation», nature 30 «Charges de personnel»: -15 500 000 F.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 49 non contre 37 oui et 1 abstention.

Le président. Nous votons maintenant sur la demande d'amendement de M. Olivier Baud relative au programme A05 «Enseignement spécialisé», nature 30 «Charges de personnel»: «+10 ETP - postes d'enseignants spécialisés ou d'éducateurs sociaux au front des classes de l'enseignement spécialisé: +461 000 F».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 66 non contre 22 oui.

Le président. Je vous invite maintenant à vous prononcer sur l'ensemble de la politique publique A.

Mise aux voix, la politique publique A «Formation» est adoptée par 52 oui contre 7 non et 28 abstentions.

Sixième partie des débats sur le budget 2018 (suite du 2e débat): Séance du vendredi 15 décembre 2017 à 14h

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes attendus dans la cour pour la traditionnelle soupe de l'Escalade offerte par les maraîchers genevois, que nous remercions chaleureusement ! Nous reprendrons nos travaux à 14h.

La séance est levée à 12h.