République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 2 mars 2017 à 17h
1re législature - 3e année - 13e session - 77e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de M. Jean-Marc Guinchard, président.
Assistent à la séance: MM. Serge Dal Busco, Mauro Poggia, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Pierre Maudet et Anne Emery-Torracinta, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Jean-Louis Fazio, Jocelyne Haller, Lionel Halpérin, Norbert Maendly, Vincent Maitre, Bernhard Riedweg, Patrick Saudan, Salika Wenger et Ronald Zacharias, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Delphine Bachmann, Gilbert Catelain, Christian Decorvet, Nathalie Hardyn, Patrick Hulliger, Claire Martenot, Marion Sobanek et Pascal Uehlinger.
Annonces et dépôts
Néant.
Premier débat
Le président. L'ordre du jour appelle le traitement du PL 11953-A, qui est classé en catégorie II, trente minutes. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Madame le rapporteur de majorité, vous avez la parole.
Mme Bénédicte Montant (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi propose une modification de zone en zone industrielle et artisanale, en zone de développement 3, très précisément affectée à de l'équipement public et au logement pour le séjour temporaire de requérants d'asile, et minoritairement en fragments de zone aéroportuaire et de bois et forêts. Sur le site sont présents aujourd'hui le foyer des Tilleuls, des installations industrielles et quelques terrains en friche. Les bâtiments sont vétustes, tout particulièrement le foyer des Tilleuls, pour lequel il est urgent de trouver une solution. Nous avons déjà longuement parlé du site la semaine passée lors du traitement du crédit d'étude pour le bâtiment de la police internationale. Il a également déjà été relevé que le site a été choisi pour sa proximité avec l'aéroport et les organisations internationales, ainsi que pour sa bonne accessibilité.
La partie sise en zone de développement prévoit deux constructions: un bâtiment destiné à la police internationale et au SARA - le service asile et rapatriement de l'aéroport - de ressort cantonal, et un bâtiment dévolu au centre de départ fédéral, qui permettra de répondre à la nouvelle loi sur l'asile dans laquelle il est prévu, comme vous le savez, trois centres de départ et un centre de procédure par région.
La zone industrielle densifiée permettra l'installation d'entreprises, conformément à la volonté des communes, soit le Grand-Saconnex et Bellevue, qui ont préavisé favorablement la modification de zone. Il n'y a pas eu non plus d'opposition lors de l'enquête publique, et tous les acteurs concernés ont donné un préavis favorable - le SABRA ainsi que les deux communes. Ce projet est donc conforme au plan directeur cantonal et au droit fédéral, notamment du point de vue de l'affectation et des normes de bruit. En raison des normes OPB, seuls les activités et les séjours temporaires sont autorisés sur le site. La notion de «séjour temporaire» a volontairement été précisée quant à la destination prévue, qui est le séjour temporaire de requérants d'asile, cela afin de ne pas ouvrir la porte à d'autres activités, comme l'hôtellerie, par exemple.
Le SABRA, qui vérifie que les valeurs limites d'immissions sont respectées ou peuvent l'être, moyennant certaines mesures, a délivré un préavis favorable à cette affectation sous conditions: des normes renforcées - SIA 180 - une ventilation centralisée et la prise de mesures sur la bande de quinze mètres qui longe l'autoroute. Il a également été précisé par ce service que des solutions concrètes pourraient facilement être mises en oeuvre pour respecter ces conditions. Enfin, la durée moyenne des séjours est de six semaines, même si certains d'entre eux peuvent s'étendre jusqu'à 140 jours au maximum.
Le président. Il vous reste trente secondes, Madame la députée.
Mme Bénédicte Montant. Nous avons déjà voté le crédit d'étude portant sur le bâtiment de la police internationale, qui fera l'objet d'un concours, et cette modification de zone permettra de relocaliser ladite police internationale dans des conditions dignes et pérennes, d'accueillir l'un des trois centres de retour exigés par la nouvelle loi sur l'asile et de conserver des activités industrielles sur les deux communes concernées, en en augmentant la capacité. Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs, la majorité vous recommande de voter ce projet de loi. Merci.
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, la minorité voit d'un très bon oeil l'implantation d'une zone de développement industriel et artisanal sur ce site, dans la mesure où cela répond à un réel besoin, notamment pour loger les entreprises de la commune. L'installation des locaux de la police internationale ne pose pas fondamentalement problème non plus. En revanche, nous nous opposons fermement à l'implantation du centre de départ fédéral, qui vise à loger des requérants d'asile sur ce site, étant donné qu'il se situe à quelques mètres seulement de la piste de l'aéroport. En effet, l'ordonnance sur la protection contre le bruit établit des valeurs limites et des valeurs d'alarme qui ne doivent pas être dépassées dans les différents quartiers, et notamment les quartiers habités. Or le SABRA, Mme Montant l'a rappelé, a décrété que ces bâtiments ne devaient pas être considérés comme du logement mais assimilés à un hôtel, dans la mesure où ils étaient utilisés pour du séjour temporaire. Le problème, c'est qu'absolument rien n'est dit, dans cette ordonnance sur la protection contre le bruit, quant à la durée de ces séjours de courte durée, précisément. Ils sont donc soumis à interprétation, et celle qu'en fait le SABRA est à notre sens contestable, étant donné notamment que ces requérants d'asile pourraient y vivre jusqu'à 140 jours; c'est un séjour de courte durée qui commence à durer...
De plus, si l'on assimile ces bâtiments à un hôtel, les possibilités de valeurs limites en termes de bruit peuvent être augmentées de cinq décibels. Mais même si l'on construisait sur ce site des bâtiments standards, je dirais, les niveaux sonores à l'intérieur des bâtiments seraient de toute façon largement dépassés. A ce sujet, voici la réponse que nous a donnée le département - je cite l'un de ses représentants: «Les locaux devront respecter une certaine isolation phonique et devront avoir des systèmes de ventilation perfectionnés afin de ne pas ouvrir les fenêtres.» On va donc mettre des requérants d'asile pendant 140 jours - 140 jours ! - dans un bocal hermétique, à respirer de l'air artificiel... Voilà ce que nous propose le Conseil d'Etat. Pour nous, il s'agit de conditions de vie qui sont indignes, raison pour laquelle nous n'accepterons pas ce déclassement.
De plus, malgré toutes ces mesures, le niveau sonore dit d'alerte reste encore dépassé entre 22 et 23 heures. Qu'à cela ne tienne, le Conseil d'Etat, comme pour La Brenaz...
Le président. Il vous reste trente secondes, Madame la députée, mais vous pouvez prendre sur le temps de votre groupe.
Mme Caroline Marti. Merci ! ...invoque l'intérêt public et use du régime dérogatoire. Mais il y a encore un point à préciser, c'est que les valeurs d'alerte évoquées dans le cas présent se basent sur des mesures des niveaux sonores qui datent de 2009. Or, de l'aveu même du directeur du SABRA, les niveaux phoniques autour de l'aéroport ont largement augmenté depuis cette date et, au vu du développement potentiel de l'aéroport, ces niveaux sonores risquent encore de croître ces prochaines années.
De ce fait, et pour résumer, le Conseil d'Etat ici présent nous demande de permettre la construction d'un lieu d'hébergement pour requérants d'asile sur un site où, malgré les aménagements d'isolations phoniques, les valeurs d'alarme restent dépassées, tout en sachant que les nuisances sonores sont sous-évaluées et qu'elles vont augmenter ces prochaines années. A notre sens, cette proposition n'est ni appropriée ni acceptable, elle est même profondément indigne et inhumaine, raison pour laquelle la minorité de la commission d'aménagement vous recommande de refuser ce projet de loi. Je vous remercie.
M. François Lefort (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, jeudi dernier nous vous avons proposé de retirer la mention de la zone de détention incluse dans le PL 11942, qui ouvrait un crédit d'étude en vue de la construction d'un bâtiment administratif pour la police internationale, de la plate-forme de coopération douanière franco-suisse ainsi que d'un centre de détention. Or vous avez refusé cet amendement, ce qui a eu pour effet que nous n'avons pas appuyé ce projet de loi, que nous avions soutenu initialement. Et ce soir, ce vote de jeudi dernier a la même conséquence: il rend caduc notre soutien initial à ce projet de modification de zone. Nous ne nions pas les besoins de la police internationale et de la plate-forme de coopération douanière, ni ceux d'une zone artisanale et mixte pour la commune du Grand-Saconnex, mais nous rejoignons ici les arguments de la rapporteure de minorité et estimons qu'il n'y a pas lieu d'installer un centre de détention et de rapatriement à cet endroit-là. En conclusion, nous ne soutenons plus ce projet de modification de zone, dont l'objectif est bien sûr de déclasser des terrains pour ce bâtiment administratif de police et de douane, et nous nous rallions aux arguments de Mme Marti, rapporteure de minorité. Pour toutes ces raisons, nous refuserons donc évidemment ce projet de loi. Merci.
M. André Pfeffer (UDC). Ce projet de loi est conforme au plan directeur cantonal. Le bâtiment prévu pour la police internationale est absolument nécessaire et remplacera des constructions provisoires. Le centre de départ fédéral est une obligation, une exigence liée à la nouvelle loi sur l'asile. Enfin, la commune désire densifier la zone industrielle, afin de donner la possibilité à de nouvelles entreprises de s'y installer. Le groupe UDC avait déjà accepté la semaine dernière le crédit d'étude pour ce périmètre et soutiendra bien entendu ce projet de loi. Merci de votre attention.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme Geneviève Arnold.
Mme Geneviève Arnold (PDC). Merci, Monsieur le député. (Remarque.) Euh, Monsieur le président, pardon ! J'insiste !
Le président. Pas encore, Madame la députée ! (Exclamations.) Bientôt !
Mme Geneviève Arnold. Je suis désolée de vous avoir froissé ! Ce projet de loi s'intéresse à un périmètre situé près de la piste de l'aéroport et de l'autoroute, occupé partiellement par des bâtiments provisoires destinés déjà à l'accueil de requérants d'asile. Ce projet, initié à l'origine par la commune du Grand-Saconnex en 2011, a été rejoint par la commune de Bellevue, qui a vu son intérêt dans une zone de développement industriel et artisanal. Ce projet de loi a donc des objectifs multiples. Les conclusions apportées par la rapporteure de majorité, relevant notamment la possibilité de relocaliser la police internationale dans des conditions adéquates et d'accueillir, comme le demande la loi sur l'asile, un centre de retour - il s'agit donc d'un accueil temporaire - encouragent les démocrates-chrétiens à voter ce projet de loi, convaincus par cette modification de limites de zones conforme au plan directeur.
Une voix. Bravo !
M. Christophe Aumeunier (PLR). Au fond, il existe un seul grief dans ce dossier pour les minoritaires: il s'agirait de ne pas pouvoir établir un centre pour requérants d'asile parce qu'il y aurait trop de bruit. Mais c'est faire fi aussi du fait que notre territoire est limité, que vous ne voulez pas consommer des surfaces d'assolement et que vous voulez construire exclusivement du logement pour les Genevois. Il faut être un tout petit peu cohérent ! Il n'y a pas de problème de légistique ou de légalité dans ce dossier, puisque le service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisants indique et considère que ce projet est conforme à l'ordonnance sur la protection contre le bruit. Vous, les socialistes, vous nous dites souvent qu'il faut faire confiance aux services, aux personnes qui servent l'Etat, car elles sont en définitive les plus à même de répondre à cette question. Eh bien ce service répond à cette question en disant qu'il y a des mesures d'allégement. Quelles sont-elles ? Ce sont des mesures constructives; on protège contre le bruit par des mesures constructives, et puis c'est considérer que finalement les personnes ne vont pas habiter là pour de nombreuses années, mais pour six semaines au maximum. Il s'agit donc d'une occupation temporaire, et elles peuvent en définitive supporter ces niveaux de bruit. Vous nous dites par ailleurs que les niveaux sonores vont augmenter à l'avenir. Pas vraiment, non, parce que les avions font moins de bruit. On ne sait donc pas trop comment les niveaux sonores évolueront, mais ils n'augmenteront peut-être pas.
En conclusion, la pesée des intérêts qui préside à l'opportunité d'accepter ce déclassement penche très clairement en faveur de la nécessité de créer ce centre pour requérants d'asile, et c'est la raison pour laquelle je vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, d'adopter ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Christian Dandrès pour deux minutes.
M. Christian Dandrès (S). Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la position du groupe socialiste se fonde sur une tradition qui est celle de notre canton. En effet, notre canton a été pionnier en matière de protection du droit des détenus: je pense notamment à la commission des visiteurs, une institution particulièrement admirable, qu'il faudrait à mon avis pouvoir étendre à l'intégralité des cantons de notre pays. Je crois que cette approche, à savoir l'approche républicaine - j'irai jusqu'à dire parfois même radicale, en tout cas dans la version historique de ce parti - il faut effectivement la préserver, et une manière de le faire serait de garantir des conditions de détention, parce qu'on a quand même une dimension de contraintes pour les personnes qui y vivent, on n'est pas dans de l'habitat conventionnel. Et certes, si des mesures constructives peuvent effectivement être mises en oeuvre pour éviter, autant que faire se peut, ces nuisances, il n'empêche qu'elles sont présentes et qu'elles ajoutent des contraintes supplémentaires pour les personnes qui vont y vivre. De plus, le bruit des avions va peut-être diminuer à l'avenir, mais il y a quand même une augmentation des vols très importante dans le secteur - pas mal de riverains s'en plaignent, d'ailleurs. C'est la raison pour laquelle je pense que là - et j'en appelle aussi à une forme de pratique, qui est celle d'une majorité que l'on a dans ce Grand Conseil, consistant à procéder à une amputation salutaire, comme vous avez voulu le faire aux Corbillettes - il faut que nous réalisions cette amputation, que nous déclassions la partie qui concerne la zone industrielle et que nous laissions effectivement de côté le secteur relatif aux détentions. C'est la raison pour laquelle ce rapport doit être évidemment soutenu.
Mme Claire Martenot (EAG), députée suppléante. Je voudrais dire que le groupe Ensemble à Gauche s'opposera lui aussi fermement à ce projet. On a l'impression qu'on se cache derrière les lois pour ne pas parler des conditions qui sont réservées aux réfugiés. On prépare pourtant un bâtiment sous la piste de décollage des avions, dans des conditions extrêmement difficiles. Pour notre part, nous nous prononcerons donc pour un centre d'accueil dans des conditions nettement plus favorables.
M. Christian Flury (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, je crois que tout a été dit sur ce projet de loi. Il est conforme au plan directeur cantonal 2030, et il répond aux besoins de développement de la commune et de création d'hébergements pour requérants d'asile. A défaut de pouvoir réquisitionner un hôtel cinq étoiles au sud des pistes pour les y mettre - pour les y placer, plutôt - construisons-leur un logement adapté à leurs besoins et qui entre dans l'assiette financière des capacités cantonales. Le Mouvement Citoyens Genevois soutiendra donc ce projet de loi. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme la rapporteure de minorité pour quarante secondes. (Exclamations.)
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de minorité. Il ne m'en faudra pas plus, Monsieur le président ! Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais simplement répondre à M. Aumeunier - vous lui transmettrez, Monsieur le président - qui nous a dit qu'il n'y avait pas de problème de légalité. Effectivement, c'est vrai, mais dans le cas présent on tord le bras à toutes les normes d'aménagement, à toutes les normes de protection contre le bruit et, cumulées, ces petites entorses multiples, ces dérogations et ces interprétations diverses aboutissent à une situation qui n'est pas acceptable pour les personnes qui logeront dans ces bâtiments. C'est pour ces raisons que la minorité vous recommande de refuser ce projet de loi.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole n'étant plus demandée, nous allons passer au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 11953 est adopté en premier débat par 56 oui contre 29 non.
La loi 11953 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 11953 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 54 oui contre 30 non.
Débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous abordons la M 2213-A. Je vous rappelle que lors du traitement du PL 11175-A, nous avons été saisis d'une demande de renvoi de cet objet à la commission des travaux par Mme Nicole Valiquer Grecuccio. Madame le rapporteur de majorité, je vous donne la parole sur cette demande de renvoi en commission.
Mme Christina Meissner (HP), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Dans la mesure où il est en effet nécessaire d'avoir une vision globale de l'urbanisation et du verdissement de ce secteur, il est cohérent de renvoyer ce texte également à la commission des travaux.
M. François Lefort (Ve), rapporteur de minorité. Le projet de parc défendu par cette motion n'est pas forcément en contradiction avec le projet de construction proposé par M. Saudan, dès lors la minorité ne s'oppose pas au renvoi en commission de cet objet pour qu'il soit à nouveau traité, en l'occurrence de façon concomitante avec le projet de loi de M. Saudan. Cette motion avait été traitée à la commission d'aménagement, mais il est évident qu'il faut la renvoyer à la commission des travaux, puisque c'est là que l'autre projet de loi a lui-même été renvoyé. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. La parole n'étant plus demandée, nous passons au vote sur le renvoi de cet objet à la commission des travaux.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2213 à la commission des travaux est adopté par 75 oui et 6 abstentions.
Débat
Le président. Nous traitons à présent le rapport du Conseil d'Etat sur les motions 2244, 2245 et 2246. Je passe la parole au premier signataire de ces trois motions, M. Olivier Cerutti.
M. Olivier Cerutti (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'aimerais tout d'abord remercier le Conseil d'Etat de sa réponse à ces trois motions. Nous avons pu lire votre rapport, et on se rend compte effectivement de la pertinence de connaître son parcellaire, les parcelles que l'on détient, ainsi que l'ensemble des servitudes qui peuvent avoir un véritable effet, peut-être demain, sur la construction de logements entre nos mains. Au vu de cette pertinence, Mesdames et Messieurs, et de l'invite du Conseil d'Etat, en particulier aux pages 9 et 10, où celui-ci fait état du monitoring en cours en nous indiquant qu'il est prêt à en présenter les résultats à la commission du logement, je vous propose de renvoyer le rapport sur ces trois motions à ladite commission du logement, afin de pouvoir entendre et prendre acte du travail qui a été réalisé par le Conseil d'Etat, notamment dans la recherche de ces terrains. Je vous remercie.
Une voix. Bravo !
Présidence de Mme Christina Meissner, première vice-présidente
M. François Lefort (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, ces trois motions, qui posaient des questions intéressantes sur la maîtrise du sol directement par l'Etat, par les établissements de droit public ou par les fondations immobilières, ont été traitées en commission et ont fait l'objet d'un rapport, suite auquel elles ont été renvoyées au Conseil d'Etat. Celui-ci nous répond ici et nous indique qu'il est en train de faire le travail, comme l'a remarqué le député Cerutti: un monitoring est en cours, et la réponse du Conseil d'Etat contient déjà un certain nombre d'informations intéressantes. Tout cela étant en cours, je trouve un peu prématuré de vouloir renvoyer ce rapport en commission; ce n'est pas vraiment le moment ! Laissons-le faire le travail, qui est déjà fort avancé, et reprenons plus tard les travaux sur ce sujet. Pour cette raison, les Verts vous recommandent de prendre acte de cette réponse du Conseil d'Etat. Merci.
M. Michel Baud (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, il est clair que nous avons toutes et tous un représentant par parti dans ces fondations, et nous ne pouvons donc que vous demander d'accepter ce rapport et de ne pas aller plus loin. Merci.
M. Christophe Aumeunier (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, il est essentiel de pouvoir retourner en commission. Comme l'a dit le député Cerutti, premier signataire, c'est le Conseil d'Etat lui-même qui nous invite à y retourner, puisqu'il indique qu'il nous répondra en commission. C'est un peu singulier, c'est vrai, car habituellement le Conseil d'Etat répond à la motion dans son rapport. Mais en l'occurrence il ne souhaite pas le faire, pour les raisons qu'il nous exposera à la commission du logement, puisqu'il nous invite expressément à y retourner pour avoir ces réponses. Pour ce motif, il faut renvoyer cet objet à la commission du logement, et nous soutiendrons donc cette demande. Merci.
M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord c'est à mon tour de remercier les motionnaires; ces motions sont venues appuyer un travail commencé en réalité quelques mois avant le dépôt de celles-ci et visant justement à scanner chaque parcelle publique pour déterminer si elle est bien utilisée. L'essentiel des parcelles détenues par l'Etat sont des zones non constructibles; parmi les zones constructibles, finalement assez peu sont dédiées au logement, mais c'est toujours cela de pris, et aujourd'hui il y a un groupe interdépartemental de la politique foncière qui se réunit toutes les deux semaines, parce que la direction des opérations foncières se trouve au DALE, alors que la section de valorisation de l'office des bâtiments se trouve au département des finances.
Donc l'Etat - et cette étude a permis de le confirmer - est au courant de ce qui se passe sur chacune de ses propriétés, il n'y a pas de parcelles en déshérence ou pour lesquelles nous n'avons pas de projets, même si, comme tout propriétaire, qu'il soit public ou privé, nous subissons un peu les affres de la lenteur en matière de constructions. Le tout est sous contrôle, et le Conseil d'Etat viendra volontiers en commission développer la manière dont ce monitoring est réalisé, tout en préservant une certaine confidentialité sur le détail des parcelles - chacun pourra comprendre pourquoi. En conclusion, si votre parlement renvoie cet objet en commission - ou même s'il ne le fait pas ! - nous viendrons, je viendrai volontiers à la commission du logement pour présenter de façon plus détaillée ce travail de monitoring.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons maintenant voter sur le renvoi de ce rapport du Conseil d'Etat à la commission du logement.
Mis aux voix, le renvoi du rapport du Conseil d'Etat sur les motions 2244, 2245 et 2246 à la commission du logement est adopté par 73 oui contre 11 non et 1 abstention.
Débat
La présidente. L'ordre du jour appelle le traitement de la M 2316-A et je passe la parole à Mme Geneviève Arnold, rapporteure de majorité.
Mme Geneviève Arnold (PDC), rapporteuse de majorité. Merci, Madame la présidente de séance. Cette motion, traitée par la commission d'aménagement lors de trois séances, a déclenché des prises de parole remplies de sensibilités diverses... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ...en relation avec la réalisation du projet d'accueil de réfugiés dans des constructions modulaires, au centre de la cité d'Onex, sur un espace de verdure apprécié d'habitants riverains de ce fameux Morillon-Parc. Effectivement, le «village de réfugiés», comme il est nommé, prévu sur l'un des espaces de verdure de la commune, a entraîné le dépôt d'une pétition signée par 2000 habitants s'opposant à cette installation dans un quartier d'immeubles. La projection de construction d'une quarantaine d'appartements, en procédure accélérée, a surpris la population onésienne qui, consultée précédemment dans le cadre du plan directeur communal, avait manifesté son souhait de maintenir le parc en l'état de promenade pour chiens et de zone arborée. L'auteure de la motion a expliqué sa crainte quant au caractère provisoire de la construction prévue sur la commune. Elle relève de plus les processus différenciés en matière de construction des logements, montrant que l'urgence ne convainc pas forcément dans ce cadre-là.
Des auditions ont bien sûr été prévues, et nous avons pu recevoir le Conseil administratif de la commune d'Onex, qui nous a indiqué que cette parcelle relevait effectivement de la seule réserve foncière de la commune et qu'il s'agissait pour cette dernière d'un potentiel à bâtir qui se devait d'être conservé. Ce Conseil administratif a également rappelé que la commune d'Onex bénéficiait de nombreux espaces de verdure et de parcs, et qu'en l'occurrence il préférait envisager ici un espace d'accueil, en imaginant pouvoir concrétiser par la suite d'autres types de logements dans le futur, notamment dans un développement à but culturel. Nous avons naturellement pu auditionner l'auteure de la pétition elle-même, qui était - évidemment, dirais-je presque - une riveraine de ce parc et qui cherchait avant tout à préserver son cadre de vie ainsi que sa vue sur les montagnes, en particulier le Salève. Il y avait donc effectivement à ce niveau-là une opposition farouche à l'idée d'être lésé suite à une construction à cet endroit. Mais, on l'a bien compris, n'importe quel type de construction aurait dérangé et n'importe quel type de construction aurait donné lieu à une pétition. Nous avons en outre entendu le conseiller d'Etat en charge, M. Mauro Poggia, qui a pu parler des conditions d'accueil des réfugiés, tout comme nous avons auditionné le directeur de l'Hospice général, M. Girod.
D'une manière générale, le projet d'Onex nous a été présenté comme un projet limité à l'accueil de 170 personnes, et il nous a été dit que la densité d'Onex permettait malgré tout de concevoir cette approche d'accueil temporaire. Enfin, j'ai envie de rappeler qu'il ne s'agit pas, comme le titre de cette motion l'indique, d'opposer la construction de logements pour réfugiés et la préservation des espaces verts. Nous avons bien compris que les riverains du Morillon-Parc étaient prêts à refuser tout projet s'inscrivant dans ce périmètre et, forte de ces conclusions, la commission a refusé à une grande majorité cette proposition de motion.
La présidente. Merci, Madame la députée. Je signale que vous avez pris un peu de temps sur celui de votre groupe. Je passe la parole au rapporteur de minorité André Pfeffer.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente de séance. Ce périmètre, appelé Morillon-Parc, est l'un des très très rares espaces de verdure au milieu de grands immeubles, et la construction de logements pour migrants à cet endroit est totalement inadaptée. L'une des habitantes indique que de son logement au 8e étage, l'unique dégagement, l'unique vision qu'elle a donne sur les immeubles voisins, excepté la petite prairie de ce Morillon-Parc. On ne parle donc pas ici de préserver une vue sur le Salève !
La cité d'Onex a une densité de 25 000 habitants au km2. C'est le double de celle de la ville de Genève. De plus, une pétition signée par 1900 opposants, dont la quasi-totalité sont des habitants des immeubles voisins, a été déposée. Je précise encore que le Conseil municipal d'Onex n'a accepté ce projet qu'à une toute petite et unique voix. Le PLR, le PDC et le MCG s'y sont opposés. Le plan directeur 2015 de la commune d'Onex prévoit d'ailleurs que ce périmètre soit destiné à un parc. Enfin, d'autres emplacements existent: le parc des Evaux, notamment, serait bien plus favorable pour une telle construction. En conclusion, je vous prie d'accepter cette motion et vous en remercie.
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, nous en avons discuté ce matin, à Genève nous manquons aujourd'hui cruellement de places pour héberger les requérants d'asile, alors si je salue l'adoption de la résolution proposant d'utiliser la caserne des Vernets afin d'offrir des places supplémentaires pour l'accueil des requérants d'asile, ce qui est très bien, c'est malheureusement insuffisant, car il y a actuellement des requérants qui croupissent - hélas, il n'y a pas d'autre terme - sous terre, dans des abris de protection civile, depuis des mois ou des années, et ce n'est pas une situation acceptable. D'ailleurs, les promesses du Conseil d'Etat de fermer ces abris PC à la fin de l'année 2016 n'ont pas été tenues, et nous devrions donc ici, Mesdames et Messieurs les députés, saluer l'initiative de cette commune, saluer son engagement qui permet de mettre à disposition pour l'accueil des requérants d'asile le seul terrain qu'il reste en sa possession. Au demeurant, s'agissant de ce terrain, la commune a le projet d'en faire à terme - parce qu'on espère qu'il ne sera pas utilisé sur une très longue période pour l'accueil des requérants d'asile - un centre dédié soit à la culture, soit à la vie associative communale. Or si on déclasse ce terrain, eh bien il ne sera plus possible de construire quoi que ce soit, en particulier - à une échéance un tout petit peu plus lointaine - les bâtiments nécessaires à ces projets d'offre culturelle et associative. C'est pour toutes ces raisons que le groupe socialiste vous recommande de rejeter cette proposition de motion.
M. François Baertschi (MCG). En effet, ces constructions modulaires au Morillon-Parc, qui est en fait une sorte de cour au milieu d'immeubles, dans un endroit très dense, posent de nombreux problèmes. D'ailleurs, cet espace en lui-même pose de nombreux problèmes, on l'a vu encore tout récemment, parce qu'une pataugeoire se trouve là et qu'après les débats en commission il y a eu la volonté de supprimer cette pataugeoire appréciée par les habitants d'Onex. Ces derniers vont donc devoir se prononcer sur la question de savoir s'il faut garder ou non cette pataugeoire lors des prochaines votations qui auront lieu fin mai ou début juin, mais le MCG, principalement, ainsi que l'UDC et une partie du PLR - en tout cas la majorité des conseillers municipaux PLR - se sont opposés à la destruction de cette pataugeoire.
En quoi cela a-t-il un rapport avec la motion que nous traitons aujourd'hui ? Eh bien le fait de vouloir surdensifier cette région pose une quantité de problèmes. Il est certain que le maintien de la pataugeoire entraînerait quelques difficultés pour l'installation de migrants, c'est aussi l'une des difficultés que nous avons, selon les catégories de migrants qui se trouvent là, mais c'est vrai qu'on a un sentiment de promiscuité qui n'est pas bon non plus. Je pense donc qu'il faut écouter les habitants d'Onex: il est temps de leur prêter l'oreille et de ne pas écouter seulement le Conseil administratif ou l'Hospice général. Il faut les écouter, leur offrir davantage la parole et en tout cas donner une certaine suite à cette motion. C'est vrai que l'intitulé de cette dernière est très général: c'est sans doute sa qualité, mais ça crée aussi en quelque sorte une difficulté au niveau de la compréhension, et je m'en excuse, Madame la présidente de séance.
Au sein du groupe MCG, nous laisserons la liberté de vote sur cette motion, mais nous attirons l'attention de tous sur le fait de ne pas maltraiter les communes suburbaines, comme certaines de nos institutions ont tendance à le faire. En effet, certaines régions sont parfois déjà très denses, et il faut faire en sorte que l'intégration se passe bien. Or si on veut que celle-ci se passe bien, il faut qu'elle se fasse sans secousse, c'est-à-dire de la manière la plus équilibrée possible, sans brusquer les habitants de tel ou tel quartier. Je crois que c'est sans doute la leçon que nous devons tirer: nous devons respecter les habitants, chacun le fera en son âme et conscience, mais respectons les habitants. Merci, Madame la présidente.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Patrick Lussi. (Un instant s'écoule.) Monsieur Lussi ?
Une voix. Patrick !
M. Patrick Lussi. Oh, excusez-moi !
La présidente. C'est une erreur ? (Remarque de M. Patrick Lussi.) Très bien. Je cède donc le micro à M. Jean-Luc Forni.
M. Jean-Luc Forni (PDC). Merci, Madame la présidente. Le parti démocrate-chrétien va lui aussi s'opposer à cette proposition, parce qu'il s'est toujours révélé disposé à accueillir dans les meilleures conditions possible les requérants d'asile. Alors évidemment, on l'a entendu, ce n'est jamais judicieux, il n'y a aucune commune, semble-t-il, qui soit prête à accepter de gaieté de coeur ce type de population, et je pense que si les représentants de l'Hospice général et du département étaient là, ils pourraient le confirmer. C'est aussi pour ça que le Conseil d'Etat a modifié - on en a parlé la semaine dernière - la loi d'application sur l'asile, qui permet désormais au Conseil d'Etat, et plus particulièrement à l'Hospice général, d'occuper des bâtiments et des terrains communaux ou de fondations dont le conseil de fondation est majoritairement composé de représentants de l'Etat. Il est donc clair, Mesdames et Messieurs, que le problème de l'intégration est important; il faut savoir si on veut continuer d'accueillir les gens dans des conditions précaires ou si on veut essayer au contraire de les intégrer d'une manière ou d'une autre, et pour cela il faut commencer par les loger dans des habitations à peu près décentes. Je rappelle qu'il s'agit de constructions modulaires et que finalement ce n'est certainement qu'un accueil provisoire, en attendant de trouver mieux. Aussi, Mesdames et Messieurs, je vous invite à refuser cette motion.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Michel Baud pour trois minutes. (Remarque.) C'est une erreur ? Excusez-moi, il s'agit de M. Gilbert Catelain. Vous avez la parole, Monsieur.
M. Gilbert Catelain (UDC), député suppléant. Merci, Madame la vice-présidente. Cette motion date de plusieurs mois et, entre-temps, la situation sur le front de l'asile, à en croire les autorités fédérales, s'est considérablement améliorée: on assiste en effet à une forte baisse des demandes, de sorte qu'on peut se poser la question de savoir si ce projet d'aménagement de logements sur la commune d'Onex est encore d'actualité. J'imagine que le Conseil d'Etat va pouvoir souffler un peu, trouver d'autres solutions et laisser en paix les habitants d'Onex. Moi je suis d'accord avec certains préopinants, notamment PDC, qui se soucient du bien-être de populations qu'il s'agit d'intégrer, mais j'aimerais bien qu'on se préoccupe aussi de nos ressortissants. Je vous cite l'exemple de ma fille qui rentre d'Espagne après avoir fait un stage linguistique à 400 euros par mois pour 35 heures de travail par semaine, qui veut revenir à Genève, et à qui on a dit ceci: «Il vous faut attendre trois ans, Madame, trois ans, si vous voulez un logement.» Mettons donc les priorités là où elles devraient être ! Puisqu'il y a une baisse de la pression sur l'asile, ce projet d'aménagement n'est plus d'actualité, et je vous propose par conséquent d'entrer en matière sur cette motion. Merci.
Mme Geneviève Arnold (PDC), rapporteuse de majorité. Suite aux propos que nous venons d'entendre, je voudrais revenir sur le discours accueillant et proactif d'Onex en matière d'accueil, en insistant bien sûr sur le principe d'intégration, qui ici aurait l'avantage de se faire dans une centralité...
La présidente. Il vous reste trente secondes.
Mme Geneviève Arnold. ...car accueillir des personnes et les placer à l'extérieur le plus loin possible, ce n'est pas parler d'intégration. Or dans la zone qui est située là, il y a la possibilité de mener un travail entre les services de l'action sociale communale et la population concernée en vue de cet accueil, et Onex sait très très bien réaliser ce genre de processus. Je vous recommande donc vivement de refuser cette motion.
La présidente. Merci, Madame la rapporteure. Je passe la parole à M. André Pfeffer, rapporteur de minorité, pour une minute quarante.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. Pour terminer, j'aimerais juste répéter que cet emplacement est un véritable trou entouré d'immeubles. Les futurs habitants n'auront aucun dégagement de vue, à l'exception de celui sur les immeubles voisins. L'emplacement est donc vraiment totalement inadapté. Au sujet de la raison de construire des bâtiments provisoires pour réfugiés, j'aimerais citer deux éléments. Le premier, c'est l'avis d'un ministre socialiste suédois, qui dit que 80 à 90% des requérants d'asile n'ont aucun lien avec l'asile. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Le deuxième, c'est l'exemple du canton des Grisons qui, afin d'éviter l'attractivité pour les migrants économiques, n'accorde pas de logements individuels avant que les requérants soient indépendants et cessent de bénéficier de l'assistance publique. Je pense donc que Genève devrait aussi un peu regarder ce qui se passe aux alentours. Merci. (Brouhaha.)
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Eric Stauffer pour une minute trente.
M. Eric Stauffer (HP). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs, je n'ai pas besoin de vous rappeler que je suis un ancien magistrat d'une des plus belles communes du canton de Genève - la Ville d'Onex - que j'ai eu l'extrême privilège d'en être le maire et que je connais très bien l'espace appelé Morillon-Parc. Eh bien je trouve extrêmement dangereux, extrêmement insatisfaisant pour notre population de mettre des réfugiés à cet endroit-là, dans des préfabriqués modulables ou je ne sais quel type de constructions. Je pense qu'il y a d'autres endroits moins urbanisés dans le canton de Genève où placer les réfugiés dans de bonnes conditions. Le magistrat chargé de l'accueil des réfugiés...
La présidente. Il vous reste trente secondes !
M. Eric Stauffer. Oui, trente secondes ! Ce n'est pas grave, de toute façon, c'est ce que je dis depuis ce matin, les réfugiés, tout le monde s'en fout... (Exclamations. Commentaires.) ...donc pourquoi en parler ! Mettre des réfugiés à côté d'une école, à côté d'une piscine, à côté d'une pataugeoire, au milieu d'une zone fortement urbanisée, dans l'une des communes les plus pauvres du canton, ce qui va amener encore un peu plus de désespoir...
La présidente. Merci, Monsieur le député. C'est terminé.
M. Eric Stauffer. ...je le dis, Mesdames et Messieurs, ce n'est pas raisonnable.
Mme Nathalie Fontanet (PLR). J'aimerais simplement préciser ici que le groupe PLR est divisé sur cet objet sensible, dès lors qu'il concerne des réfugiés et la possibilité de faire en sorte qu'ils se retrouvent au milieu d'une zone extrêmement habitée, dans une commune qui n'est pas l'une des plus privilégiées du canton. Je rappelle en outre que le groupe PLR du Conseil municipal d'Onex s'est fermement opposé à ce projet à l'unanimité, raison pour laquelle notre groupe de députés aura la liberté de vote sur cette motion. Merci, Madame la présidente.
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole n'étant plus demandée, nous allons voter sur cette proposition de motion.
M. Eric Stauffer. Vote nominal !
La présidente. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent. Commentaires.) Oui, vous l'êtes, nous passons donc au vote nominal.
Mise aux voix, la proposition de motion 2316 est rejetée par 50 non contre 16 oui et 19 abstentions (vote nominal).
Débat
La présidente. Nous passons à la M 2318-A. Je passe la parole au rapporteur de majorité, M. Eric Leyvraz.
M. Eric Leyvraz (UDC), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Mon collègue Riedweg étant absent, je vais le remplacer. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Et pour que vous ne soyez pas totalement décontenancés, je vous donnerai aussi quelques chiffres.
Des voix. Ah !
M. Eric Leyvraz. Voilà. Cette proposition de motion soulève un beau problème, c'est une constatation de faits qui sont réels: il y a peu de noms de femmes sur les plaques bleues de nos rues et boulevards. Quelques chiffres: on a 3263 rues dans le canton et seul 1% d'entre elles porte un nom de femme. Il faudrait trouver dans les communes 220 noms féminins pour respecter l'équilibre entre les hommes et les femmes. Les derniers chiffres... Je ne veux quand même pas exagérer, mais enfin, il faut rester dans le ton: si le canton demandait aux communes de privilégier des noms de femmes, la parité serait atteinte en 2050 ! Sur les 131 dernières dénominations, un tiers sont des noms de femmes. On a bien compris lors des auditions concernant cette motion, en commission, combien il devenait compliqué de choisir, pour le nom d'une rue, une personnalité qui emporte l'adhésion de ceux qui l'habitent, de la commune ou des citoyens. L'accord général est difficile, aussi le Conseil d'Etat a-t-il mis de côté, en 2012, l'idée de nommer nos rues d'après des personnes. Mais il y a sûrement, dans notre histoire, des noms qui mériteraient d'être un peu plus sous nos yeux et dans nos mémoires. Aussi, si nous avons refusé cette motion en commission - non pas pour le fond mais à cause de toutes les conséquences administratives qu'apporterait un changement de nom de rue - nous l'accepterons si vous acceptez aussi l'amendement général qui vous a été donné, je vous le lis: «promouvoir», avec le Conseil d'Etat, «auprès des communes l'usage adéquat des principes de nomenclature lors de la dénomination de rues, places, lieux-dits ou édifices afin de favoriser une meilleure représentation des noms de personnalités féminines». Nous constatons que cette nouvelle invite propose de sensibiliser la communauté à ce déficit de noms de femmes, déficit qui nous semble à corriger.
Mme Isabelle Brunier (S), rapporteuse de minorité. Ce lundi, «Le Courrier» titrait: «Où sont les femmes ?» En l'occurrence, ça concernait le domaine de la musique classique, mais il est vrai qu'on peut se poser la même question concernant l'attribution de noms de rue aux femmes qui ont forgé, tout comme les hommes, l'histoire genevoise. Les femmes représentent la plus grosse moitié de la population mondiale, nationale, cantonale, alors que - comme l'a rappelé le rapporteur de majorité - à Genève, seul 1% de nos plus de 3000 rues porte le nom d'une femme. Et quelles femmes ! Quelques écrivains, telles Germaine de Staël ou Isabelle Eberhardt, une féministe comme Emilie Gourd, des femmes médecins, une sainte - Clotilde - qui était d'origine genevoise ou encore une sorcière, Michée Chauderon. Vous conviendrez que ce n'est pas vraiment représentatif de tout ce que les femmes ont fait au cours des siècles, des actes, des qualités, des compétences de cette gent féminine genevoise qui depuis le Moyen Age a porté toutes sortes de sujets mais qui jusqu'à maintenant a été fort peu reconnue. Même la Mère Royaume, une de nos héroïnes nationales... Je suis allée vérifier la plaque de la rue Royaume, aux Pâquis: elle se réfère à la famille Royaume et non à Catherine Cheynel, femme Royaume, la vaillante femme qui a coiffé un Savoyard de sa marmite de soupe au moment de l'Escalade.
C'est pourquoi, même si le sujet peut paraître mineur, je romprai encore une fois une lance pour le défendre. En effet, l'égalité entre les hommes et les femmes implique un changement de mentalité, y compris d'ailleurs des femmes elles-mêmes, car un certain nombre d'entre elles a voté contre cette motion. Les mentalités changent lentement - subrepticement, dirais-je - et je me permets de citer mon propre rapport pour rappeler que le changement de mentalité consiste à «inscrire le mérite des femmes, de leur contribution à l'histoire, dans la topographie et la toponymie des villes». Cela revient à «l'inscrire dans la géographie personnelle et intime des habitants et usagers de ces endroits et, même sur un mode mineur, c'est une contribution à plus d'égalité dans notre société». Il est donc assez consternant de voir qu'une majorité - ou du moins jusqu'au récent changement, au retournement de veste que montre cette proposition d'amendement général - n'encourage pas un tant soit peu cette possibilité d'honorer à titre ô combien posthume toutes ces femmes et mères qui ont contribué elles aussi à forger le mythique esprit de Genève. Et si, comme cela a été relevé ce matin, une société doit être jugée à la manière dont elle traite... je ne sais plus si c'étaient ses réfugiés ou ses détenus, eh bien on pourrait adapter la phrase aux femmes: si une société devait être jugée à la place qu'elle accorde à la mémoire et à l'honneur de ses femmes, Genève aurait vraiment du souci à se faire. C'est la raison pour laquelle je vous enjoins une ultime fois de voter la motion telle qu'elle était proposée. Et puis, après discussion avec la première signataire, afin de soutenir la cause, je crois que nous accepterons l'amendement malgré son caractère édulcoré, ou du moins nous nous abstiendrons - mais il sera vraisemblablement voté - de manière à appuyer quand même cette motion et à l'envoyer au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)
Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). A la veille du 8 mars, journée internationale des droits des femmes, cette motion et le débat qu'elle entraîne ont leur importance, ici, dans un parlement, où précisément les femmes ne représentent que 26% des députés. Valoriser la place des femmes dans la société, améliorer la visibilité de leurs contributions dans des domaines comme la science, la politique ou l'art font partie du mandat qui nous a été attribué, conformément à nos constitutions fédérale et genevoise. Aujourd'hui encore, les femmes sont sous-représentées dans de nombreux secteurs de la vie quotidienne. Il est donc de notre ressort d'activer les leviers nécessaires - et ils sont nombreux - pour promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes, à commencer par l'appropriation de l'espace public via la dénomination des rues. C'est l'objectif de cette proposition de motion; le sujet peut paraître symbolique et anodin, il fait pourtant partie de notre décor quotidien puisqu'il est question des rues de notre canton. Sur les 3263 rues que compte Genève, 700 portent le nom d'un personnage ou d'une famille célèbres. Sur les 700 rues, seules 31 font référence à une femme, soit moins de 5%. Et les rues associées sont parfois des impasses, jamais des boulevards; Mme Brunier le précisait tout à l'heure en évoquant l'impasse dédiée à Mme Royaume qui est précisément une célébrité genevoise. Pourtant, de nombreuses femmes ont marqué l'histoire cantonale au point de mériter, en signe de reconnaissance, d'avoir leurs noms associés à une rue. Pour n'en citer que quelques-unes, recensées dans un rapport détaillé émis dernièrement par le bureau de la promotion de l'égalité entre femmes et hommes: Alice Bailly qui s'impose dans le monde de la peinture au début du XXe siècle, Loulou Boulaz, une figure de l'alpinisme helvétique, ou encore Marcelle Moynier qui fut la créatrice du Théâtre des Marionnettes, le premier du genre en Suisse. Davantage de noms féminins dans l'espace public permettront de donner plus de visibilité aux femmes et donc de cheminer vers davantage d'égalité entre femmes et hommes. Par le biais de son règlement sur les noms géographiques, le Conseil d'Etat peut influencer l'intitulé des rues lors de nouvelles dénominations. Ne pas chercher à équilibrer cette réalité revient, entre les lignes, à entériner l'idée que les femmes qui accomplissent de grandes choses sont des exceptions. Le Conseil d'Etat a la responsabilité, le devoir, et surtout la possibilité d'agir. Nous vous encourageons ici toutes et tous à soutenir cette motion.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. François Lance (PDC). Le groupe démocrate-chrétien reconnaît que cette proposition de motion fait ressortir cette réalité: sur les 3263 rues qui existent dans le canton, seul 1% d'entre elles porte un nom de femme. C'est effectivement choquant alors que de nombreuses femmes ont contribué à l'histoire de Genève, et ce dans de nombreux domaines. D'ailleurs, il faut se souvenir qu'une motion PDC, demandant que les nouveaux établissements scolaires portent des noms de femmes ayant contribué à l'histoire de Genève, avait été déposée par Mme Anne Marie von Arx-Vernon durant la législature 2001-2005. Ce qui fut fait, puisque trois écoles portent les noms d'Ella Maillart, Aimée Stitelmann et Emilie Gourd. Il faut aussi rappeler qu'en 2012, le Conseil d'Etat a fait de l'usage des patronymes pour baptiser les rues une exception. En effet, le Conseil d'Etat a décidé de favoriser des noms d'activités et de choisir des noms de personnes qui ont joué un rôle historique exceptionnel. Les propositions de noms de personnes ne sont donc pas exclues et il n'y a aucune obligation ni interdiction portant sur des personnages féminins. Le Conseil d'Etat recommande de privilégier des personnes qui ont marqué l'histoire de Genève et il faut préciser que sur les 131 dernières attributions, un tiers sont des noms de femmes.
Lors des différentes séances de commission, la complexité du processus a émergé, entre les propositions des communes - parfois farfelues, il faut le reconnaître - le préavis de la commission de nomenclature et la validation par le Conseil d'Etat. D'autre part, il s'avère que le fait de débaptiser une rue représente une démarche compliquée. A l'issue des débats, le groupe des Verts a proposé des amendements afin de reconsidérer les invites au Conseil d'Etat, notamment en demandant d'élargir les nouvelles dénominations aux places, ponts, bâtiments publics, gares, et de mieux prendre en considération l'avis des communes et des voisins. Malheureusement, ces amendements ont été rejetés en commission, c'est pourquoi le groupe PDC s'est abstenu lors de ce vote. Aujourd'hui, le groupe PDC soutiendra l'amendement proposé même s'il modifie de manière fondamentale les invites, et bien entendu votera cette motion. Le groupe PDC ne manquera pas de proposer, à l'occasion, que la nouvelle salle du Grand Conseil porte un nom de femme célèbre ! (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à une femme, Mme la députée Simone de Montmollin.
Mme Simone de Montmollin (PLR). Madame la présidente de séance, Mesdames et Messieurs les députés, personne ne conteste ici la nécessité d'oeuvrer sans relâche en faveur de l'égalité des droits et donc des genres et donc des femmes, et certainement pas le PLR. Le PLR ne conteste pas non plus le fait que de nombreuses femmes illustres, savantes, érudites ou simplement femmes engagées, ont marqué durablement Genève et qu'il est important de le rappeler, surtout à une période où la place des femmes dans la société est remise en cause dans de nombreuses parties du monde. Rebaptiser des rues, des lieux-dits ou des édifices aux noms de personnalités féminines peut certes y contribuer mais la question n'est pas là. La question est de savoir si le dispositif réglementaire actuel doit être modifié pour parvenir à une meilleure proportion de rues nommées d'après des femmes, et le PLR pense que non: le règlement actuel permet déjà de proposer des noms de personnalités féminines. Certes, il est un peu restrictif dans la mesure où il préfère opter pour des noms communs plutôt que pour des noms de personnalités. Non pas parce que Genève n'aurait pas assez de personnalités illustres mais parce que, comme l'a dit mon préopinant, les propositions - qui, rappelons-le ici, émanent pour l'essentiel des communes - ne répondent souvent pas aux règles de nomenclature imposées par la Confédération. De fait, le Conseil d'Etat n'intervient qu'en dernier ressort, après que la commission de nomenclature s'est prononcée, et doit souvent gérer des souhaits problématiques voire contradictoires. Le problème se situe donc plus au niveau du choix initial, qui doit être conforme aux exigences fédérales, qu'au niveau du règlement cantonal. C'est pourquoi nous ne pouvons pas souscrire aux invites de cette motion quand bien même nous en partageons la cause. Si l'on souhaite favoriser l'usage de noms féminins, le PLR considère qu'il faut s'adresser aux proposants, c'est-à-dire aux communes, plutôt qu'au Conseil d'Etat. C'est l'objet de l'amendement que nous vous soumettons: il vise à promouvoir auprès des communes un usage adéquat des principes de nomenclature afin de favoriser une meilleure représentation des personnalités féminines. (Applaudissements.)
M. Pierre Vanek (EAG). Vous m'excuserez d'intervenir dans ce débat, Salika Wenger aurait dû prendre la parole pour nous mais elle est malheureusement retenue ailleurs par une visite médicale. L'évidence, c'est qu'il faut simplement appliquer l'égalité dans ce domaine-là. Le coup de l'égalité, on nous l'a fait de manière abusive et unilatérale aux Chambres fédérales pour élever l'âge de la retraite des femmes de 64 à 65 ans alors qu'il n'y a aucune espèce d'égalité salariale ! Quand il s'agit de perpétrer des mauvais coups de la sorte contre les femmes, eh bien il n'y a pas de problème pour trouver, semble-t-il, des majorités aux Chambres fédérales. Par contre, quand il s'agit de voter... Je viens d'entendre que l'objet n'était pas conforme au droit supérieur ou à ceci ou cela. C'est une proposition de motion que l'on discute ici, adressée au Conseil d'Etat, et celui-ci est bien assez grand pour trouver par la suite des moyens conformes au droit pour faire appliquer l'intention, qui est prétendument partagée par tout le monde. L'intention doit consister à parvenir à une stricte égalité entre les noms masculins et les noms féminins dans nos rues, places et autres. C'est simple: on veut l'égalité ! Comme il faudra d'ailleurs bien parvenir aussi à une égalité de représentation dans ce parlement ! Les femmes sont combien, aujourd'hui ? Quelqu'un propose de nommer la nouvelle salle du parlement d'après une femme défunte; la question n'est pas là. La question réside dans l'adoption de dispositions institutionnelles, et nous en avons défendu, pour qu'il y ait 50 hommes et 50 femmes dans ce Grand Conseil. Mais en attendant, pour ce qui est des noms de rues, pour manifester notre refus de l'affadissement de cette motion, nous ne voterons pas l'amendement qui nous est proposé, nous voterons les dispositions intégrales et initiales de la motion. J'ai entendu un représentant PDC dire tout à l'heure: «Ouh là là, la démarche pour changer un nom de rue est très compliquée !» Mesdames et Messieurs, quand même, si ce parlement n'est pas en mesure, sur une question aussi simple, de faire exécuter ce qui est présenté par les uns et les autres comme une volonté partagée - volonté qui doit effectivement être partagée, au vu du serment que nous avons prêté de respecter la Constitution fédérale, notamment, qui comprend des dispositions sur l'égalité - eh bien c'est à désespérer de cette assemblée. C'est à se dire, comme le déclarait un député à l'occasion de l'exhortation: «Quand la patrie nous a confié ses destinées, ce n'est pas forcément ce qu'elle a fait de mieux !» (Rires.)
M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, ce chiffre a été dit mais il est éloquent, je le répète: il y a 29 rues sur 3265, soit moins de 1% de nos rues, qui portent un nom de femme. C'est dire à quel point, à travers les siècles, notre république - mais soyons clairs, nous ne sommes pas les seuls: pour l'essentiel, en Suisse, en Europe ou dans le monde, c'est la même chose - notre république, donc, a fait peu de place aux femmes, tout d'abord pour mener une carrière, pour se réaliser dans les arts, dans les sciences, dans le sport. Cela a eu pour effet de maintenir les femmes à la maison, cantonnées aux tâches domestiques. Et même, pour celles qui ont réussi, il fallait ensuite que l'on puisse les choisir au moment de nommer une rue, une place. Là encore, on voit à quel point, à travers ce chiffre extrêmement faible, nous avons été - comme l'essentiel des villes du monde - particulièrement peu respectueux de la participation et de la richesse de l'apport économique, social et culturel des femmes à notre société. Peu à peu, les choses changent. Peu à peu, parce qu'en réalité on crée peu de nouvelles rues, places et lieux-dits. Entre 2006 et 2016, nous avons eu 131 dénominations à Genève et quinze seulement ont consacré des personnalités. Sur ces quinze dénominations de personnalités, dix ont porté sur des noms masculins et cinq sur des noms féminins. On arrive donc à une proportion d'un tiers, mais en réalité, chacun comprend que la difficulté quant à l'avènement de rues, de lieux-dits, aux noms de femmes provient aujourd'hui tout simplement du fait que nous nommons peu, depuis quelques années, d'après des personnes. Depuis quelques années, en matière de nomenclature, nous privilégions d'autres appellations et donc, hommes ou femmes, on choisit moins des personnalités pour nommer. Cela aggrave le phénomène de rattrapage, si on peut le définir comme tel, ou d'équilibrage, s'agissant de la proportion d'hommes et de femmes.
Cependant, Mesdames et Messieurs, depuis le début de cette législature, comme magistrat chargé de la nomenclature, j'ai fait le choix - et le Conseil d'Etat ne m'a jusqu'à présent pas désavoué - de proposer plus souvent des noms de personnes. Le Conseil d'Etat a décidé de rouvrir la possibilité de nommer des bâtiments, des rues, des lieux-dits d'après des personnalités, c'est donc l'occasion de recourir davantage aux noms féminins. On l'a dit, hommage au PDC, les noms de bâtiments scolaires - parce qu'on en construit, des écoles, dans ce canton; on construit plus d'écoles que de rues, à vrai dire - ont permis de réaliser un certain rattrapage. Récemment encore, les HUG ont par ailleurs proposé que, sur les six nouveaux bâtiments du complexe hospitalier, trois portent des noms de femmes, de scientifiques, et trois autres bâtiments des noms d'hommes, également des gens de science, issus notamment de la médecine, bien sûr. Le Conseil d'Etat a donc fait là le choix d'une dénomination paritaire. Cette motion va dès lors dans le bon sens. Elle se heurtera pourtant, malgré la meilleure volonté du monde, à la difficulté de rattrapage, conséquence du peu d'occasions que nous avons de nommer des rues. Elle se heurtera aussi, plusieurs députés l'ont dit, au fait que toute femme n'est pas éligible. Nous devons évidemment choisir un nom de femme reconnue par les historiens, les historiennes, mais également par la population. Et là encore, nous nous heurtons à cette grande discrimination que fait l'histoire par rapport à l'apport des femmes. Cela dit, ces invites vont dans le bon sens. Les invites qui sont proposées à travers un amendement vont également dans le bon sens. Je crois qu'il s'agit avant tout d'une question de volonté politique des communes, des hôpitaux, des écoles, du Conseil d'Etat de favoriser l'appellation féminine. C'est à vrai dire moins une affaire de changement de règlement que de signal politique à donner. Et ce signal politique, il peut être donné ce soir à travers cette motion comme vous voudrez bien l'amender. Je l'accueillerai très volontiers et vous ferai un rapport circonstancié de ce qu'on aura pu mettre en place. Je vous remercie.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, je vais vous faire voter d'abord sur l'amendement général proposé, qui remplace les invites actuelles de la motion. Je vous le lis:
«Nouvelle invite (remplace les 2 invites actuelles)
à promouvoir auprès des communes l'usage adéquat des principes de nomenclature lors de la dénomination des rues, places, lieux-dits ou édifices afin de favoriser une meilleure représentation des noms de personnalités féminines.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 54 oui contre 5 non et 24 abstentions.
Mise aux voix, la motion 2318 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 84 oui (unanimité des votants). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Débat
La présidente. Nous passons à la M 2351-A. Je passe la parole à M. le député François Lance.
M. François Lance (PDC). Merci, Madame la présidente de séance. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais rappeler que cette motion a été acceptée et renvoyée au Conseil d'Etat par notre Grand Conseil à l'unanimité des 82 députés présents moins une abstention. Cette motion demandait dans ses invites que soit «reconsidér[ée] la dénomination de cette gare en conservant le nom de Lancy-Pont-Rouge», et que soient «[pris] en considération les importants soutiens» financiers «et investissements de la Ville de Lancy apportés au CEVA ainsi qu'à l'aménagement extérieur de cette gare». Le moins que l'on puisse dire, c'est que la réponse du Conseil d'Etat... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ...est succincte, voire dédaigneuse, vis-à-vis des députés qui ont plébiscité cette motion. Certes, la procédure de consultation a été respectée, mais que veut dire «consultation» pour le Conseil d'Etat ? Donner la possibilité à une commune de faire des propositions et de toute façon ne pas les prendre en considération, sans essayer de trouver un compromis ? Autant ne pas faire de consultation ! Dans sa courte réponse, le Conseil d'Etat renvoie à la décision rendue par l'Office fédéral des transports, mais en lisant ce rapport, on peut se rendre compte de certaines absurdités émanant d'un office fédéral, par exemple, et je cite... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) «Une autre question importante est celle du nom de la localité [...]. Pour ce faire, il est nécessaire de jeter un coup d'oeil au répertoire des localités.» Tenez-vous bien, cet Office fait référence aux numéros postaux, soit 1227 Les Acacias, 1212 Grand-Lancy, 1213 Petit-Lancy et 1227 Carouge. Je cite à nouveau l'Office: «Le nouvel arrêt, un peu plus au sud que l'actuel, se trouve à l'intersection des quatre localités Carouge GE, Grand-Lancy, Petit-Lancy et Les Acacias. Si la station dessert plusieurs localités, elle porte le nom le plus pertinent pour les besoins des transports publics. Il n'y a pas de raison logique d'imposer ici "Lancy" comme la désignation la plus appropriée, puisque la gare ne se trouve pas sur les deux localités Grand-Lancy et Petit-Lancy, mais à l'est de celles-ci.» Pour mémoire, Grand-Lancy et Petit-Lancy font partie de la même commune de Lancy et la gare de Lancy-Pont-Rouge se trouve entièrement sur le territoire de Lancy. A cette décision, le Conseil administratif de Lancy a déposé un recours qui est en cours de procédure... (Brouhaha.)
Présidence de M. Jean-Marc Guinchard, président
Le président. Un instant, Monsieur le député, s'il vous plaît. (Le silence revient.) Merci, poursuivez.
M. François Lance. A cette décision, le Conseil administratif a donc déposé un recours qui est en cours de procédure et le Conseil d'Etat n'entend pas commenter plus ce dossier, dont acte ! Mais toujours est-il que cette procédure de consultation pose un réel problème, et c'est pour cette raison que le groupe démocrate-chrétien...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. François Lance. ...demande un renvoi de cette réponse du Conseil d'Etat en commission, soit à la CACRI. Et puis, un dernier petit conseil à M. Hodgers; il va partir mais... A la fin de vos interventions, fermez votre micro, car après le traitement de cette motion, on vous entend dire à M. Longchamp, et je vous cite: «Voici la belle preuve de provincialisme dont je parlais dans "Le Temps"» - c'est dans la vidéo du Mémorial, si vous désirez vous écouter. Ce n'est pas très sympa, ni pour les députés, ni pour les Lancéens ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. J'ai pris acte de votre demande de renvoi en commission sur laquelle je ferai voter l'assemblée tout à l'heure. La parole est à M. le député Jean-Michel Bugnion.
M. Jean-Michel Bugnion (Ve). Merci, Monsieur le président. Comme mon préopinant, je juge la réponse du Conseil d'Etat pour le moins succincte. En substance, elle dit deux choses: on fait comme à Zurich et puis c'est le concept de centre métropolitain qui prévaut; avant de finir par dégager en corner sur la décision de l'OFT. C'est vrai que les gares se trouvant sur la commune de Zurich portent son nom, mais toutes celles qui se trouvent dans les communes avoisinantes ne portent pas le nom de Zurich, elles portent le nom de leur commune. A ma connaissance, la gare de Lancy-Pont-Rouge n'est pas sur la commune de Genève ! Et puis je regrette beaucoup que ce rapport ne développe pas le concept de centre métropolitain avancé par le Conseil d'Etat; c'était une bonne occasion. Quels sont ses avantages ? Pourquoi faut-il aller dans cette direction-là et faire fi des identités communales ? Les Verts proposent donc de renvoyer ce rapport pour qu'il soit complété par le Conseil d'Etat et qu'il nous explique en quoi il faut soutenir son concept de centre métropolitain.
M. Cyril Mizrahi (S). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, on ne peut effectivement que constater que cette réponse traduit le mépris et le dédain du Conseil d'Etat d'abord à l'égard... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...des communes suburbaines et en particulier de la Ville de Lancy. Le Conseil d'Etat fait preuve d'un véritable manque d'égards; malgré une consultation, un peu «pro forma», il démontre une incapacité totale à s'asseoir autour d'une table pour chercher une solution qui tienne compte, si possible, effectivement, de la volonté qu'il a exprimée d'avoir une logique d'agglomération, mais aussi de la réalité locale, et qui ne bâtisse pas cette agglomération en négation des réalités des communes suburbaines. Dédain pour les communes suburbaines, donc, mais pas seulement: dédain également pour la volonté politique, Mesdames et Messieurs, exprimée dans ce Grand Conseil à l'unanimité moins une abstention - c'est quand même assez rare ! Ce Grand Conseil a envoyé un message fort au gouvernement en lui disant: ça ne va pas ! C'est un message politique. Le Conseil d'Etat avait donc deux choix, le choix d'entendre ce message politique, d'en tenir compte, de s'asseoir à la table des négociations, ou bien le choix de se cacher derrière une attitude procédurière en disant: ce n'est plus notre affaire, les instances fédérales vont trancher. Mais quelle image donnons-nous de Genève dans cette affaire ? Une bien piètre image, à mon avis. On nous propose deux choses différentes, un renvoi en commission ou un renvoi au Conseil d'Etat. Peut-être qu'un renvoi en commission permettrait au magistrat de revenir à la raison et surtout au dialogue; c'est un peu regrettable qu'il soit parti. Laissons donc peut-être une chance à ce dialogue de reprendre à travers le passage en commission, et sinon nous renverrons bien évidemment le paquet au Conseil d'Etat. Le groupe socialiste n'a pas l'intention d'accepter cette réponse comme telle.
M. Christian Flury (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, sans revenir sur ce qui a été expliqué par mes préopinants, je voudrais juste rappeler ici que la ville de Lancy, avec ses 32 000 habitants, est la troisième ville du canton: Genève, Vernier, Lancy, Meyrin. La gare de Vernier s'appelle «Vernier», pas «Genève-Vernier». Jusqu'à preuve du contraire, le Pont-Rouge est un lieu-dit, un quartier de la ville de Lancy en plein développement. Le Bachet-de-Pesay est un autre quartier de Lancy, également en plein développement. Ces deux quartiers étant situés sur Lancy, il n'y a aucune raison pour que les gares qui s'y trouvent s'appellent «Genève-Pont-Rouge» ou «Genève-Bachet», les noms de «Lancy-Pont-Rouge» et «Lancy-Bachet» sont bel et bien justifiés. Le MCG refusera donc le rapport du Conseil d'Etat et soutiendra le renvoi en commission.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'excuse en tant que suppléant mon collègue Antonio Hodgers qui a été appelé ailleurs par une obligation protocolaire; ce n'est pas par désintérêt qu'il ne suit pas vos débats. Il n'y a bien sûr ni mépris ni dédain de la part du Conseil d'Etat. «Genève-Pont-Rouge», «Lancy-Pont-Rouge», on peut certainement en discuter longtemps. A-t-on une vision un peu plus large de ce que doit être le canton de Genève de demain ? Nous avons une ligne de chemin de fer de catégorie «grande ligne» qui sera empruntée par des personnes qui viendront, nous le pensons, d'ailleurs que Genève pour le futur PAV. Est-il logique de donner à cette gare le nom d'une commune ? Bien qu'elle se situe, certes, sur son territoire - mais dans un angle de celui-ci - la gare est destinée à une population qui l'utilisera non pas, dans sa grande majorité, pour se rendre dans la commune mais pour accéder précisément au nouveau quartier qui verra le jour dans les années à venir. C'est pourquoi le Conseil d'Etat a fait une proposition, retenue par l'Office fédéral des transports, contre laquelle il y a eu deux recours, l'un au Conseil fédéral, l'autre au Tribunal administratif fédéral. C'est vraisemblablement le Conseil fédéral qui sera compétent et tranchera cette question, et le Conseil d'Etat en prendra acte. Je pense que c'est une tempête dans un verre d'eau; ce qui est important, c'est que Genève se développe, que Genève réponde aux besoins des populations du futur. Et il me semble que se battre sur une dénomination alors qu'il s'agit avant tout de mettre en avant le canton dans cette belle construction... Dans ma bouche, cela résonne d'une certaine façon, vous en êtes bien sûr conscients. Mesdames et Messieurs, je pense que vous devez prendre acte du rapport rendu par le Conseil d'Etat. C'est finalement le Conseil fédéral qui examinera les arguments développés par la commune dans le cadre de son recours et prendra une décision à laquelle tout le monde ne pourra que se rallier. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous avons été saisis de deux demandes: un renvoi à la commission des affaires communales et un renvoi au Conseil d'Etat. Je vais d'abord vous faire voter sur le renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2351 à la commission des affaires communales, régionales et internationales est adopté par 74 oui et 2 abstentions.
Débat
Le président. Nous passons au point suivant de l'ordre du jour, la R 800. Nous sommes en catégorie II - trente minutes, et je donne la parole à M. le député Christo Ivanov, premier signataire.
M. Christo Ivanov (UDC). Merci, Monsieur le président. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Le démantèlement des centrales nucléaires en Suisse coûtera largement plus de 100 milliards dans un futur très proche. Le thorium est une alternative extrêmement intéressante; des projets de centrales à sels fondus avec utilisation de thorium, surnommé «l'atome vert», existent en Chine, en Inde ou en Russie. Genève et le CERN peuvent s'enorgueillir du fait que le prix Nobel de physique, M. Carlo Rubbia, ait mené ses travaux sur le thorium au CERN et donc dans notre canton, qui a été une fois de plus pionnier dans le domaine de l'énergie. La recherche dans ce secteur doit être soutenue et encouragée dans l'intérêt général et pour le développement durable. Un débat doit avoir lieu à la commission de l'énergie sur ce sujet important pour notre avenir commun. C'est pourquoi, Monsieur le président, je demande le renvoi de cette proposition de résolution à la commission de l'énergie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je ferai voter l'assemblée tout à l'heure sur cette demande. Je passe la parole à M. le député Jean-Charles Lathion.
M. Jean-Charles Lathion (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'objectif réel de la proposition de résolution est clair: remettre en cause la direction prise par le Conseil fédéral et sa Stratégie énergétique 2050, dont le premier paquet de mesures sera soumis au vote le 21 mai. Parmi les axes stratégiques définis par le Conseil fédéral figurent notamment la volonté de ne plus délivrer d'autorisation générale pour les centrales nucléaires, et une interdiction du retraitement des assemblages combustibles irradiés. L'énergie nucléaire suisse devra se contenter du parc nucléaire actuel, lequel sera maintenu tant qu'il ne représentera aucun danger de sécurité pour la population. La proposition d'intégrer le thorium dans la politique énergétique suisse peut paraître séduisante au premier abord; «un atome vert pour le développement durable», affirment même les signataires, qui aiment à nous rappeler les qualités de ce produit miracle qui pallie les défauts de l'uranium, dont celle d'être un combustible nucléaire moins polluant et donc moins dangereux. C'est très attractif, mais est-ce la voie que l'on souhaite pour notre pays et pour sortir vraiment du nucléaire de façon progressive et pragmatique ?
S'il faut reconnaître l'intérêt apparent des arguments présentés, il en est un, et non des moindres, qui est erroné: celui visant à nous faire croire que les installations nucléaires actuelles pourraient être converties en centrales au thorium. Un réacteur au thorium est un réacteur à sels fondus. C'est une technologie différente des réacteurs à eau sous pression actuellement utilisés en Europe. Quand on joue avec des matières pareilles, on n'adapte pas un réacteur nucléaire d'un claquement de doigts, on en construit un qui soit étudié pour cette technologie ! On ne remplace pas des éléments chimiques comme on transvase une bouteille d'eau dans une jarre ! Selon l'UDC, il faudrait donc démanteler le parc nucléaire actuel pour pouvoir bénéficier de ces réacteurs au thorium. De nombreuses années seraient gaspillées, entre le démantèlement des anciennes structures, la décontamination des sites et la construction des nouvelles centrales. Est-ce vraiment la vision d'avenir que nous voulons ?
Non seulement le PDC ne votera pas cette proposition de résolution pour les raisons techniques que je viens d'évoquer, mais encore parce que nous pensons qu'il faut respecter les différents niveaux de compétence des différentes instances. Le débat a lieu dans le cadre du Parlement fédéral. En matière de désengagement du nucléaire, notre conseillère fédérale, Doris Leuthard, a clairement indiqué la stratégie du Conseil fédéral, qui repose sur une planification et sur une sortie progressive du nucléaire tenant compte de tous les paramètres, techniques, écologiques et économiques. Celle-ci doit permettre un déploiement des énergies renouvelables indigènes et des réseaux électriques, ce qui donne à la Suisse le temps nécessaire pour réformer son approvisionnement énergétique. Au Conseil national et au Conseil des Etats de faire leur travail ! Au Conseil fédéral de proposer des solutions sur la base des discussions et des études menées au niveau parlementaire, sans que Genève vienne encore introduire de la confusion dans tous ces débats. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Pierre Vanek.
M. Pierre Vanek (EAG). Je serai bref, Monsieur le président...
M. Roger Deneys. Article 24 ! (Rires.)
M. Pierre Vanek. ...très bref, dans cette affaire.
Le président. On ne souffle pas, Monsieur Deneys !
M. Pierre Vanek. Merci, Monsieur le président, de me protéger contre mes petits camarades. Cette résolution n'est pas sérieuse ! Vous savez que nous avons une interdiction, dans ce canton, de promouvoir ou de construire des centrales nucléaires sur le territoire genevois ou dans ses environs. Et nous devons lutter contre l'usage de l'énergie nucléaire ! C'est une obligation constitutionnelle; l'ancienne constitution disait «par tous les moyens juridiques et politiques», je n'ai pas mémorisé les dispositions de la nouvelle - Cyril Mizrahi m'en excusera - mais elles sont analogues. Elles sont analogues, et la constitution ne dit pas de lutter contre l'énergie nucléaire par tous les moyens juridiques et politiques, à l'exception des centrales au thorium ! Donc de toute façon, Mesdames et Messieurs... (Remarque.) ...nous ne pourrions pas adresser cette résolution au Conseil fédéral... (L'orateur consulte le texte de la proposition de résolution.) ...oui, c'est au Conseil fédéral, parce qu'elle viole une disposition de la constitution cantonale, qu'on est plus ou moins censés respecter les uns et les autres ! Bon.
Ensuite, sur le fond, bien sûr qu'on peut discuter sur le papier des avantages respectifs du thorium et des filières au thorium, on peut discuter des avantages des filières au thorium sur celles à l'uranium. Des bouquins ont vendu à 70 km d'ici les avantages infinis de la surgénération et des surgénérateurs comme ceux de Creys-Malville; on ne s'est pas laissé prendre et, heureusement, on les a fait fermer. Mais c'est sur le papier ! Aujourd'hui, nous avons un impératif non pas politique, non pas de politique énergétique générale, mais un impératif de sécurité, dans ce pays: c'est de fermer rapidement les centrales nucléaires existantes. On fait de la gérontologie nucléaire, le délai de péremption des centrales nucléaires a été levé par les Chambres fédérales dans les projets de la Confédération; ce qui subsiste, c'est l'interdiction de construire de nouvelles centrales. Ce qu'il faudrait faire, si on voulait s'adresser aux Chambres fédérales, c'est demander qu'on sorte du nucléaire et qu'on en sorte rapidement. Parce qu'on en sortira, Mesdames et Messieurs, on en sortira ! Une voie qu'on pourrait suivre, c'est celle du Japon, la voie de Fukushima, qui consiste à sortir du nucléaire après une catastrophe ! Moi, j'aimerais bien qu'on évite cette sortie-là. C'est pour ça que je milite pour la fermeture immédiate - immédiate - de nos réacteurs nucléaires...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Pierre Vanek. Merci, Monsieur le président. ...comme le Japon a fermé, après Fukushima, tous ses réacteurs. (Remarque.) Il a été obligé de le faire, nous pourrions le faire dans de meilleures conditions. Cette proposition de résolution doit être évidemment - évidemment - refusée et ne doit pas être renvoyée en commission, ce n'est pas à notre commission de l'énergie et des Services industriels d'étudier les mérites comparatifs de différentes filières d'une énergie à laquelle nous avons...
Le président. C'est terminé.
M. Pierre Vanek. ...par la volonté du peuple, renoncé dans ce canton.
M. Boris Calame (Ve). Chères et chers collègues, voilà une résolution qui veut aller à l'encontre de notre politique énergétique. Elle est contraire à notre constitution, votée il y a moins de cinq ans; elle est contraire aux pratiques genevoises - le canton fonctionne sans énergie nucléaire depuis quinze ans et avec 100% d'énergie renouvelable depuis le 1er janvier 2017. L'UDC, de par cette résolution, nous propose de devenir l'incinérateur des déchets nucléaires de l'Europe: très peu pour nous. Elle est bien trop belle, notre Suisse, notre patrie, pour que nous puissions nous résoudre à cela.
M. Alexis Barbey (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, s'il ne devait y avoir qu'une seule raison pour accepter cette résolution, c'est que le thorium a été développé par Carlo Rubbia, prix Nobel de physique, ici, au CERN. Naturellement, ce n'est pas une garantie en soi, mais quand on analyse le problème d'un peu plus près, on s'aperçoit que le thorium est une énergie nucléaire - entre guillemets - «atypique». Et c'est quelqu'un qui a voté pour la fermeture des centrales nucléaires, il y a quelques mois, qui vous parle. En regardant ce qu'est exactement le thorium, on découvre un combustible qui n'a pas été choisi par les scientifiques dans les années 30 pour la simple raison qu'il était quasiment impossible, ou en tout cas extrêmement difficile, d'en faire une arme atomique. On peut regretter ce choix, mais il était plutôt dicté par des questions de politique militaire que de politique énergétique. Pourquoi le thorium est-il une alternative intéressante ? Parce qu'il est largement répandu dans le monde, il n'y aurait donc pas de guerre du thorium sur la planète pour essayer de s'accaparer les réserves de ce métal; c'est également un argument très fort. Enfin, le thorium, manié selon la version des centrales nucléaires développée par Carlo Rubbia, ne produit presque pas de déchets nucléaires nécessitant d'être enfouis dans les réserves spéciales que nous avons à l'heure actuelle, car ils sont tellement peu radioactifs qu'on pourrait quasiment les stocker en plein jour. Une association basée dans le canton et issue du CERN, l'International Thorium Energy Committee, a donné une conférence à Genève en 2013 qui a eu énormément de succès; elle est en train d'expérimenter une centrale au thorium et, je vous le donne dans le mille, à quel endroit ? Il y avait naturellement des contraintes budgétaires énormes, et ce sera près de Moscou que ces essais seront faits. (Commentaires.) Je crois qu'il est primordial...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Alexis Barbey. ...que la Suisse reste alerte et ouverte à cette nouvelle technologie, qui ne sera de toute façon pas pour demain, et qui de toute façon ne pourra effectivement pas être réimplantée dans nos centrales actuelles qui méritent bien, pour leur part, d'être fermées. Je vous invite donc à soutenir cette proposition de résolution.
Une voix. Mais non ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. (Commentaires.) Je passe la parole à M. le député Thomas Wenger. (Remarque de M. Roger Deneys.) Monsieur Deneys, s'il vous plaît !
M. Thomas Wenger (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, comme on l'a dit, la stratégie énergétique fédérale repose sur deux piliers. Le premier, c'est la hausse de la production des énergies renouvelables: l'énergie hydraulique - environ 60% de l'énergie en Suisse, si ma mémoire est bonne - l'énergie solaire, l'énergie éolienne et les nouvelles énergies comme la géothermie ou la biomasse. Le deuxième pilier, qui est très important, Mesdames et Messieurs les députés, et chacun a son rôle à jouer dans ce deuxième pilier-là, c'est celui de la diminution de la consommation d'énergie. On peut le faire tous les jours et on doit, Monsieur le député... (Remarque.) ...le faire effectivement tous les jours pour atteindre les objectifs que la Suisse s'est fixés en matière de politique énergétique !
On nous propose une résolution sur le thorium, qu'il faudrait étudier pour notre future stratégie énergétique. On nous dit que le thorium... Parce que les gens ne connaissent pas le thorium, et je dois moi-même vous avouer des lacunes sur le sujet, Monsieur le président ! (Rires. Commentaires. Le président agite la cloche.) Ecoutez bien: le thorium «ne devient fissile que par l'apport de neutrons extérieurs, ce qui évite tout risque d'emballement de la centrale avec une fusion du coeur type Fukushima». On est déjà censés être un tout petit peu rassurés. Après, on nous dit pour nous rassurer encore que la Chine et l'Inde, par exemple, sont en train de développer des programmes sur les réacteurs au thorium. Je ne suis pas certain - on a cité Moscou, avant - que ce soient les pays les plus rassurants au monde en matière de production énergétique. On nous dit qu'un réacteur au thorium produit très peu d'éléments radioactifs à longue durée de vie; «très peu», je le traduis par «en produit quand même», je ne sais donc pas bien ce qu'on va faire de ces éléments radioactifs. Et puis notre collègue Vanek a mentionné la constitution qui interdit, comme vous le savez, les centrales nucléaires. Je ne sais pas ce que l'Assemblée constituante a fait, pourquoi elle n'a pas inscrit l'interdiction du thorium dans la constitution; ce serait intéressant de poser la question à nos constituants, qui sont manifestement passés à côté de quelque chose. (Rires. Commentaires.) Les considérants s'achèvent par l'affirmation qu'une centrale au thorium...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Thomas Wenger. Ce sera amplement suffisant. ...qu'une centrale au thorium, Monsieur le président, ne peut pas s'emballer. Les socialistes vous proposent de faire comme une centrale au thorium: de ne pas nous emballer et de refuser cette proposition de résolution. (Applaudissements.)
M. Gilbert Catelain (UDC), député suppléant. Je trouve assez regrettable que l'on invoque la Constitution fédérale pour refuser une résolution...
Des voix. Cantonale ! (Remarque.)
M. Gilbert Catelain. ...ou cantonale, pour refuser d'étudier une technologie. Il ne s'agit pas d'implanter une technologie mais de l'étudier. Certains d'entre nous - pas forcément ici, mais ailleurs - ne prennent pas autant de gants avec la constitution et s'asseyent dessus lorsqu'il s'agit d'une votation populaire. Je vous invite donc, Mesdames et Messieurs, à être ouverts d'esprit, à étudier la proposition qui vous est faite, à regarder à la commission de l'énergie quels en sont les développements. Sauf erreur, la Suède s'y intéresse aussi, ou la Norvège, pardon, et ce n'est pas un régime dictatorial. L'Inde n'est pas un régime dictatorial non plus, c'est une démocratie. Je ne vois donc pas quel est le rapport entre un pays... (Remarque.) ...un régime politique démocratique et l'interdiction d'étudier une technologie qui sera peut-être un jour indispensable.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Christo Ivanov pour une minute cinquante-quatre.
M. Christo Ivanov (UDC). Ce sera bien plus court, Monsieur le président.
Le président. Il vous reste du temps du groupe.
M. Christo Ivanov. Il n'y a pas de souci. J'aimerais juste rappeler que, dans un domaine presque similaire, l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne travaille actuellement sur des possibilités de centrales au plasma comme substitut. Comme l'a dit mon préopinant, Gilbert Catelain, la Norvège, pays neutre et non aligné, étudie un projet de centrale au thorium qui ne fait pas de déchets. De plus, la Norvège est, comme la Suisse, un pays très vert et par ailleurs favorable à la sortie du nucléaire. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Jean-François Girardet (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, quand je lis, dans l'intitulé de cette résolution, le thorium... Je n'ai pas la science infuse; moi, quand je ne comprends pas, je demande à étudier. (Protestations.) Je vous encourage donc à renvoyer cette proposition de résolution à la commission adaptée. (Commentaires. Protestations.)
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat est fort réservé quant à cette proposition de résolution. Il faut rappeler que c'est bien une résolution, qui demande à Genève d'intervenir auprès du Conseil fédéral en l'invitant à étudier la voie du thorium dans sa stratégie énergétique. Alors, quoi que l'on puisse penser du thorium - et je n'en pense aucun mal, je pense que toutes les voies doivent être explorées, et l'intelligence est évidemment ouverte à la nouveauté - Genève doit avoir quand même un peu d'humilité. Ce genre de résolution devrait être utilisé avec parcimonie si nous voulons garder une certaine crédibilité lorsque nous déposons à Berne des résolutions ayant une réelle chance de retenir l'attention des députés. Je rappelle aussi que le groupe politique qui a déposé cette résolution, et qui avait parfaitement le droit de le faire, a par ailleurs deux représentants au Conseil fédéral. C'est aussi le plus grand groupe politique représenté à la Chambre basse du Parlement fédéral. S'il y a donc véritablement un premier travail de conviction à faire, c'est d'abord dans le groupe qu'il doit avoir lieu pour que celui-ci soit le porteur de ce message nouveau au sein des Chambres fédérales. Nous, petits Genevois, aller à Berne en leur demandant d'étudier le thorium ! Excusez-moi, je pense qu'il faut raison garder et se dire qu'il y a certainement des démarches plus fondamentales concernant l'avenir proche de Genève que nous devrions entreprendre. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. (Remarque.) Mesdames et Messieurs les députés, nous avons été saisis d'une demande de renvoi à la commission de l'énergie; si elle est refusée, je vous ferai voter sur la résolution. (Brouhaha.) Un peu d'attention et de calme, s'il vous plaît. Le vote est lancé.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 800 à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève est adopté par 43 oui contre 42 non. (Protestations à l'annonce du résultat. Le président agite la cloche.)
Le président. La séance n'est pas terminée, Mesdames et Messieurs les députés. (Protestations.) Nous sommes sur le point de conclure notre ordre du jour. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Je voudrais vous féliciter pour la qualité du travail accompli durant cette journée de session supplémentaire, et aussi pour avoir facilité mes presque derniers instants parmi vous. (Protestations.) Je vous souhaite un excellent week-end et je vous revois le 16 mars. (Applaudissements.)
La séance est levée à 18h45.