République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 11856-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat approuvant le rapport de gestion du Conseil d'Etat pour l'année 2015

Suite du deuxième débat

J - MOBILITE (suite)

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons poursuivre l'étude de la politique publique J «Mobilité» mais, auparavant, je me permets de vous rappeler les temps de parole restants pour chaque groupe. Pour le PLR: vingt-neuf minutes quarante-cinq; pour le MCG: vingt-six minutes quarante; pour le parti socialiste: onze minutes trente; pour le PDC: vingt-trois minutes trente; pour l'UDC: seize minutes vingt; pour les Verts: vingt-neuf minutes quinze; pour Ensemble à Gauche: vingt-trois minutes. Le rapporteur de majorité dispose quant à lui de dix minutes quinze, la rapporteure de première minorité de vingt-deux minutes vingt-cinq et le rapporteur de deuxième minorité de onze minutes quinze. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Enfin, il reste au Conseil d'Etat huit minutes quinze. Je donne maintenant la parole à M. François Baertschi.

M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. L'un des grands reproches que le groupe MCG a à faire s'agissant de la politique publique J «Mobilité» concerne la politique transfrontalière. En effet, nous mettons dans cette politique des sommes considérables qui vont seulement à sens unique, parce qu'il ne s'agit pas d'une politique équitable: il y a une personne qui paie, c'est le contribuable genevois, pour la France voisine. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) A l'heure où les Anglais ont montré leur détermination à quitter l'Union européenne, le groupe MCG tient à féliciter le peuple anglais d'avoir su en 2016, après 1940, résister à un régime totalisant et englobant, qui est celui de l'Union européenne, un système néfaste, néfaste pour les pays, néfaste pour les peuples, néfaste pour les citoyens. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Pour le MCG, ce type de politique doit donc également cesser à Genève. Nous devons prendre exemple sur la politique courageuse des Anglais, afin de couper ces projets qui sont négatifs pour Genève. Il y a bien évidemment le CEVA, qui est une sorte de catastrophe annoncée...

Une voix. Un aspirateur à frontaliers !

M. François Baertschi. ...qui va déstructurer complètement notre région, parce que c'est un château construit sur du sable qui, quelque part, en termes économiques... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, je partage votre enthousiasme de commencer cette journée, mais je vous demande toutefois de respecter le silence et de sortir de la salle si vous avez des conciliabules particuliers à tenir. Monsieur Baertschi, vous avez la parole.

M. François Baertschi. Merci, Monsieur le président. Nous insistons donc sur le fait qu'il faut suivre l'excellent exemple des Anglais, mettre fin à cette politique régionale qui est complètement fausse au niveau des transports et sortir de cette impasse le plus rapidement possible.

Bien évidemment, nous sommes partagés sur cette politique publique, car un ou deux éléments positifs ont été réalisés par le département durant l'année 2015. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) J'en veux pour preuve l'instauration des feux clignotants, soit l'introduction d'une proposition lancée par le MCG. Du reste, j'aimerais rendre hommage au conseiller d'Etat Luc Barthassat d'avoir mis en place cette mesure qui permet de faciliter la vie des Genevois. Je tiens quand même à le reconnaître, car il faut l'admettre lorsque des actions positives sont effectuées. Cependant, il y a d'autres éléments sur lesquels nous sommes beaucoup plus critiques et beaucoup plus opposés... Je vois M. Barthassat gêné que je dise quelque chose de positif, mais je crois qu'il faut être juste lorsqu'on fait une description de ce département !

Pour toutes ces raisons, le groupe sera partagé: une partie refusera cette politique publique, tandis qu'une autre partie s'abstiendra éventuellement. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Patrick Lussi (UDC). Excusez-moi, il faut que je change d'attitude et que je m'exprime simplement sur ce rapport de gestion, mais avec le sourire aux lèvres en pensant à quelque chose... (Brouhaha.) Mesdames et Messieurs les députés, pourquoi l'UDC ne va-t-elle pas accepter la politique des transports ? Il ne s'agit pas toujours d'entrer frontalement et de faire de l'opposition simple. Une fois de plus, il y a des options qui sont prises, qui sont choisies, des options qui sont certes majoritaires pour le moment au sein de ce Grand Conseil, mais durant les débats sur ces rapports il nous est donné l'occasion d'exprimer ce que l'on pense.

En ce qui concerne les Transports publics genevois, nous n'allons pas crucifier le conseiller d'Etat, puisqu'il doit rattraper une situation et, sauf erreur, lors du traitement des urgences, je serai là pour défendre son nouveau projet de loi, mais c'est de la musique d'avenir. En revanche, quant aux options qui ont été prises, qu'il doit peut-être suivre, eh bien cette ouverture au-delà de nos frontières, dont on ne sait pas exactement comment vont se traiter les remboursements par rapport aux coûts que nécessite l'établissement... Bref, ce sont des objets qui n'ont pas la faveur de l'UDC - vous n'êtes pas sans le savoir, car ce n'est pas un scoop.

Le deuxième point, et vous le savez, qui va peut-être commencer à nous convenir, mais qui ne nous satisfait pas entièrement pour le moment... C'est du reste l'une des raisons pour lesquelles nous avions refusé le contreprojet lors de la dernière votation... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...simplement parce que, à nos yeux, même dans ce contreprojet la mobilité professionnelle et privée n'est pas suffisamment mise en exergue, au profit de concepts ou d'autres conceptions qui ne nous conviennent pas.

D'une manière générale, s'il ne s'agit donc pas d'attaquer frontalement le conseiller d'Etat, dans la mesure où il essaie de faire son possible pour s'en sortir - et on le voit avec les ondes vertes, par exemple - il y a tout un faisceau, et c'est dans ce faisceau, avec lequel vous nous entendez souvent dire en commission que nous ne sommes pas d'accord, que nous prendrons aujourd'hui notre décision de dire non à cette politique publique, bien que nous acceptions les comptes.

Monsieur le conseiller d'Etat, vu que vous êtes présent, j'ai cependant une question majeure à vous poser, car tout le monde s'interroge: TPG Vélo ? Pas TPG Vélo ? On nous dit - mais vous allez, je pense, pouvoir confirmer ou infirmer cette rumeur publique - qu'il y aurait déjà du personnel voire des cadres engagés pour la société TPG Vélo et rémunérés pour cela. C'est donc la question que l'UDC vous pose concernant cette politique publique. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Michel Ducret... qui n'est pas là. Je cède donc le micro à M. Thomas Wenger, qui est là !

M. Thomas Wenger (S). Oui, je suis là ! Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, nous abordons maintenant la politique de la mobilité. Un conseiller d'Etat nous a dit hier qu'on a l'impression que, lors du débat sur ces comptes, on fait un peu le recensement de tout ce qui ne fonctionne pas et qu'on profite de ces comptes pour être très négatif. Je vais donc commencer par mentionner des éléments positifs qui ont eu lieu en 2015... (Exclamations.) ...en l'occurrence deux exemples positifs, afin de se mettre en quelque sorte dans un bon état d'esprit en vue de cette journée. Le premier exemple - on l'a évoqué...

Une voix. Le Brexit !

M. Thomas Wenger. Je ne comprends pas tellement le lien entre le Brexit et la politique de mobilité de M. Barthassat, mais je relirai le Mémorial !

Ce qui nous fait plaisir, c'est que les travaux pour le CEVA ont continué en 2015, continuent en 2016, et permettent de construire notre futur réseau RER... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Merci, Monsieur le président. Il faut toujours le rappeler, il s'agit de 230 kilomètres de lignes ainsi que de 40 gares qui vont relier les Genevois, au sens large, de l'ensemble de l'agglomération du Grand Genève, de notre agglomération franco-valdo-genevoise, ce qui est très très réjouissant, et ça va vraiment changer le visage de la mobilité de notre région.

Le corollaire, c'est aussi l'extension en souterrain de la gare Cornavin. Les études se sont poursuivies, et il faut rappeler que la population genevoise a voté à 76% en faveur du FAIF - le financement et l'aménagement de l'infrastructure ferroviaire - pour construire, avec un milliard de la Confédération, cette extension souterraine de la gare Cornavin.

J'aimerais quand même également saluer - et le projet a été voté le 5 juin par la population - l'ensemble du travail sur le contreprojet qui nous a enfin plus ou moins tous réunis et qui a mené au vote d'un texte intitulé «Loi pour une mobilité cohérente et équilibrée». Ces travaux ont été effectués en sous-commission lors de l'année 2015 et nous avons réussi à voter une loi qui permettra, je l'espère vraiment, d'améliorer la mobilité genevoise.

Voilà pour les points positifs. Je pourrais m'arrêter là... (Commentaires. Rire de l'orateur. Le président agite la cloche.) ...mais malheureusement il y a eu des points négatifs. J'ai peu de temps pour en parler, mais le premier élément négatif - M. Vanek l'a évoqué longuement hier - c'est la diminution de 2,5% des prestations des TPG, des transports publics, en 2015. Alors on nous dit que c'est indolore, que personne ne s'en rend compte, etc. Bien sûr que non ! Il y a une baisse de la fréquence des trams, une baisse de la fréquence des bus, les gens attendent plus longtemps les transports publics, ceux qui transbordent attendent encore plus longtemps, et que vont-ils faire ? Ils risquent de reprendre leur voiture au lieu d'emprunter les transports en commun.

On me dit qu'il me reste très peu de temps, mais il y a encore d'autres choses qui n'ont pas fonctionné, comme la mobilité douce - M. Barthassat n'a décidément que peu de volonté pour l'améliorer. Les extensions des lignes de tram prennent du retard, Mesdames et Messieurs, et on attend toujours le vélo en libre service - les enveloppes ne sont même pas ouvertes... Ma conclusion, vu que j'ai très peu de temps à disposition, c'est qu'à un moment donné, Monsieur le conseiller d'Etat, il faut arrêter de dire tout et son contraire: triez un peu votre liste au père Noël ! Faites des choix, Monsieur le conseiller d'Etat, parce que vos lutins n'en peuvent plus de travailler sur tout et sur rien, et s'il est trop dur pour vous de faire des choix, eh bien contentez-vous au moins d'appliquer les lois. Merci. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Jean Romain (PLR). Globalement, en ce qui concerne la mobilité, on peut quand même dire que ce n'est pas encore tout à fait ça, mais que c'est bien meilleur que ce que l'on a connu il y a trois ou quatre ans. Depuis deux ans, ça va un tout petit peu mieux. Le PLR doit le souligner, il déplore que cette mobilité ne soit pas encore à la hauteur d'une ville comme Genève, mais il remarque tout le travail qui est effectué, notamment par le magistrat PDC, et ce travail est tout à fait de qualité.

S'agissant du contreprojet sur la mobilité qui a été adopté, il est évident que le PLR ne peut être que satisfait de cette acceptation. Il y a bien sûr eu toute une bagarre que nous avons menée ici au parlement, et nous voulions, peut-être, vous vous en souvenez, mettre dans ce contreprojet la traversée du lac; il a fallu passer par d'autres biais, faire autre chose, mais cette traversée du lac a été acceptée par le peuple, et le PDC, euh le PLR... (Rires. Commentaires.) ...qui a été suivi ne peut évidemment être que satisfait.

Je voudrais maintenant revenir sur cette brochure - rappelez-vous le débat d'hier soir ! - cette fameuse brochure des votations que l'on a distribuée dans tout le canton de Genève, à un demi-million d'exemplaires. Concernant justement ce que M. Vanek disait la dernière fois, cette brochure indique en gros ceci - je lis: «Ainsi - c'est-à-dire si le peuple acceptait l'initiative de l'AVIVO - l'Etat continuerait - c'est un conditionnel - à investir davantage d'argent pour développer un système qui deviendrait - c'est aussi un conditionnel - moins performant et moins fréquenté.» (Remarque.) M. Vanek nous dit qu'il y a eu une promesse, que l'Etat a fait une promesse. Ce n'est pas tout à fait vrai quand on lit le texte... (Commentaires.) ...parce qu'il est marqué ceci: «Au final, il reviendrait au contribuable [...]» Or ça, ce n'est pas une promesse, Monsieur Vanek, c'est une menace ! (Remarque.) Et voilà, exactement ! Alors le peuple qui, vous le savez très bien, a évidemment accepté dans sa grande sagesse cette initiative à deux reprises - et vous l'avez répété - eh bien il fait ce qu'il veut, mais il y a des conséquences, et ce n'est pas nécessairement que l'Etat doive ajouter une ration supplémentaire pour maintenir l'offre. Il y a certes eu une légère, une très légère diminution de l'offre - M. Wenger vient de le rappeler - mais cette diminution va de pair avec ce que le peuple a voulu. Il ne l'a pas décidée telle quelle... (Remarque.) ...mais il a voulu cela. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Enfin, pour ce qui est de la vérité, je veux bien que M. Vanek ait eu l'habitude de la trouver dans la «Pravda»... (Rires.) ...mais il se trouve que très souvent cette vérité vient du PLR, et toujours de M. Aellen. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Mathias Buschbeck (Ve). Chers collègues, je voudrais d'abord revenir sur le début de l'intervention de M. Jean Romain... (Exclamations.) ...qui a mentionné que depuis deux ou trois ans ça allait mieux. Eh bien j'aimerais savoir, au-delà d'une vérité assénée, sur quoi il se fonde pour dire que depuis deux ou trois ans ça va mieux, puisque au contraire tous les indicateurs de la mobilité nous disent que ça va moins bien, que le nombre de bouchons a augmenté, que la pollution de l'air est en hausse, que l'offre des transports publics a diminué et que le transfert modal est en panne. Je dirais donc plutôt que depuis deux ou trois ans ça va plus mal... Mais si vous disposez d'autres indicateurs ou d'autres renseignements que je n'ai pas, veuillez les partager avec l'assemblée, parce que pour moi tous les indicateurs sont au rouge concernant la mobilité.

Comme je l'ai déjà dit hier, le seul espoir qu'il nous reste - mais il est maigre - c'est effectivement le compromis auquel nous sommes parvenus en matière de mobilité et qui a été largement approuvé par le peuple. Nous espérons qu'il sera mis en oeuvre, mais aujourd'hui nous ne voyons pas le début d'un plan d'actions qui irait dans le sens de cette mise en oeuvre. (Brouhaha.) On attendra très volontiers mais, pour l'instant, je vous l'ai dit, les indicateurs sont au rouge.

Je voulais revenir sur une autre déclaration, soit celle de M. Aellen qui a eu lieu il y a un peu plus de dix heures et qui constituait une vraie déclaration d'amour à l'égard des transports publics. Je trouve qu'il est important de revenir sur ce point, puisqu'on sait très bien que si l'on veut encore pouvoir circuler dans notre canton, et notamment au centre-ville, eh bien il faudra développer les transports publics, développer leur offre et favoriser le transfert modal, car des transports publics efficaces permettent d'obtenir une mobilité efficace. De plus, comme il l'a dit lui-même, ça améliore les conditions-cadres de notre économie, or aujourd'hui les indicateurs sur ces conditions-cadres de notre économie montrent que la mobilité est un grand problème dans notre canton. Pour cette raison, j'espère que lorsque nous débattrons demain, ou plutôt ce soir... (Rires.) Ce soir est encore loin ! (Commentaires.) ...ou bien tout à l'heure de l'augmentation des subventions qu'il faudra accorder aux transports publics afin de justement accroître l'offre... En effet, on sait que la seule hausse des tarifs n'augmentera pas l'offre des transports publics, mais permettra de diminuer la baisse, ce qui est totalement insatisfaisant, je pense, aux yeux de M. Aellen également. Nous serons donc aujourd'hui unanimes pour accepter cette augmentation de l'offre. Je vous remercie.

M. Pierre Vanek (EAG). J'aimerais juste remercier Jean Romain de son éloquence matinale et de m'avoir pour l'essentiel - pour l'essentiel, Mesdames et Messieurs - donné raison ! Bien sûr que quand les autorités écrivaient qu'il allait falloir payer, c'était une menace, c'était pour nous faire peur, c'était pour inciter l'électeur à refuser l'initiative de l'AVIVO. Mais, il l'a indiqué, il va falloir payer, et ce que j'ai dit c'est qu'en effet il allait falloir payer, nous sommes donc bien tous d'accord ! Merci, Monsieur Romain, d'avoir souligné le fond de mon intervention d'hier soir, qui a pu échapper à certains eu égard à son caractère nocturne, et, encore une fois, de m'avoir pour l'essentiel donné raison ! (Rires.)

Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, on a cru un instant que notre conseiller d'Etat avait compris ce que le peuple a voté le 5 juin dernier en acceptant le contreprojet sur la mobilité... (Remarque.) ...or la première pierre apportée à cet édifice est précisément le projet d'ondes vertes, qui va simplement à l'encontre de ce contreprojet dès le moment où il amène des voitures au centre-ville, ce que le contreprojet ne souhaite évidemment pas, étant donné qu'il veut accorder la priorité précisément aux transports publics et à la mobilité douce dans les centres, dans les centres-villes, c'est-à-dire pas seulement en ville même, mais aussi à Carouge, à Meyrin, etc. Au-delà des bilans globalement peu concluants sur la mobilité de cette dernière année, nous devons ici respecter cette volonté populaire et travailler ensemble à ce contreprojet qui, clairement, va dans le sens d'une mobilité durable.

J'aimerais ici encore ajouter un élément, c'est que nous avons voté, le peuple a voté il y a cinq ans l'initiative en faveur de la mobilité douce, or aujourd'hui rien n'est fait, c'est absolument scandaleux, et nous devons maintenant donner les moyens à la mobilité durable d'évoluer correctement, comme cela se fait partout ailleurs. C'est une priorité que l'Etat doit se fixer. (Applaudissements.)

M. Bertrand Buchs (PDC). Monsieur le président, ce sera rapide. Je pense qu'on est de nouveau en train de faire là un procès d'intention; de nouveau, ce débat sur le rapport de gestion du Conseil d'Etat est une espèce de champ de foire où, quand on n'aime pas un conseiller d'Etat, quoi qu'il fasse, c'est nul. On l'a vu hier en matière de sécurité avec M. Maudet et aujourd'hui avec M. Barthassat, parce qu'on est un peu vexé que lui agisse alors que les autres n'ont rien fait auparavant. (Brouhaha.) Mais maintenant je dois quand même dire qu'on a un consensus. (Commentaires.) Oui, eh bien pour faire avancer une politique, il faut un consensus, il faut mettre tout le monde autour d'une table, or je n'ai pas l'impression que cela avait été fait précédemment. On arrivait plutôt avec des décisions, alors que là on a un conseiller d'Etat qui réunit les acteurs autour d'une table.

Je dois dire qu'avec ce contreprojet, c'est un immense travail qui a été réalisé: enfin, le parlement s'est parlé, enfin, le parlement a discuté, et je tire mon chapeau au PLR, qui a fait un énorme effort pour être d'accord avec les Verts également. C'est donc quand même un pas immense qui a été accompli ! Or on a voté le 5 juin et vous venez nous dire maintenant qu'il n'est pas normal que rien ne soit fait... Mais on est le 24 juin, il faut arrêter ! (Applaudissements.)

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Il y a un élément sur lequel je serai d'accord avec M. Cyril Aellen, notre rapporteur de deuxième minorité, c'est qu'effectivement il a été démenti que la fréquentation allait s'accroître avec la baisse des tarifs. Mais le problème, vous savez, c'est que si, en même temps que vous diminuez les tarifs, vous ne mettez pas en place des mesures d'accompagnement, ainsi qu'on les appelle, comme délimiter certaines zones où l'on ne peut pas circuler, par exemple le centre-ville, eh bien effectivement la baisse ne se répercute pas.

Mesdames et Messieurs, je vais vous citer l'exemple d'une ville en France, à savoir Aubagne - mais il en existe d'autres - qui a décidé d'instaurer la gratuité de tous les transports publics, en tout cas dans la ville. Eh bien une étude économique - je dis bien «économique», ce qui signifie qu'elle prend en compte toutes les externalités - a démontré que, financièrement parlant, la mesure était efficace et rentable. Le problème, Mesdames et Messieurs, c'est qu'ici dans le département on travaille en silos, Monsieur le président. Vous décidez, vous, personnellement, dans votre département, que parce que vous n'avez pas l'argent, vous allez réduire les prestations de 8%. Mais les conséquences de votre décision sur les autres départements, Monsieur le chef du département, vous ne les mesurez pas, s'agissant de la santé, du stress, de l'usure des routes, et j'en passe... Ça, vous ne le mesurez pas ! Or votre baisse de 8% va peut-être se traduire par une dépense de 10 à 15% sur l'ensemble du budget de la république. Voilà ce qui serait nécessaire, à la limite: quand nous prenons une décision d'une telle importance, il faudrait que tous les départements mesurent les conséquences sur les autres départements. Mais le gros problème de ce Conseil d'Etat, c'est qu'il travaille chaque fois en silos. (Commentaires.)

M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de deuxième minorité. Je voulais remercier M. Buschbeck pour ses propos, parce qu'effectivement je partage avec lui certaines préoccupations en termes de mobilité, en particulier s'agissant de la mobilité des transports publics et collectifs, ainsi qu'en matière de mobilité douce. C'est vrai, je crois qu'il faut avoir la sagesse au sein de ce parlement de dire les choses comme elles sont et de rappeler que, fondamentalement, l'offre à Genève est plutôt bonne, d'un point de vue statique, si on établit des comparaisons européennes, que ce soit en matière de pistes cyclables ou de transports publics. Cela étant, à la lecture d'un certain nombre de comparaisons, on s'aperçoit effectivement que là où on n'est pas très bon, c'est en vitesse commerciale, par exemple. Vous avez raison ! Mais en les lisant dans le détail, on réalise que si on a de la peine avec la vitesse commerciale, c'est aussi parce qu'on a un plus grand nombre d'arrêts, qui est lié à la configuration de notre ville, et c'est également une réalité. Il faut donc pouvoir mesurer ces choses-là.

D'autre part, il serait bon d'éviter de dire que parce que, le cas échéant, on est contre une subvention, on est contre les transports publics; ce sont des raccourcis qu'il ne faut pas effectuer. Je ne dis pas que vous l'avez fait, Monsieur Buschbeck, mais à un moment donné il va falloir se montrer assez imaginatif. En effet, s'agissant des moyens, on a parfois des options différentes dans ce parlement, et il faudra qu'on trouve un équilibre. Je vous donne un exemple, pour conclure, celui de la privatisation de certaines lignes. Moi je n'ai jamais rencontré un seul usager des TPG qui se soit plaint d'une ligne exploitée par des privés. Jamais ! Jamais un usager ne m'a dit que, comme il s'agit d'une ligne privée, c'est vraiment moins bien que lorsque ce sont des lignes publiques ! Or là on obtient des gains d'efficience et on a la possibilité de réaliser des gains financiers, qu'on pourrait réallouer intégralement au bénéfice des transports publics.

On a donc parfois des moyens un peu différents, mais on a des objectifs communs, alors concentrons-nous sur nos objectifs communs, battons-nous un peu moins sur les moyens, et il est probable que les différents partis au sein de cet hémicycle seront contents dans quelques années de faire en sorte que cela fonctionne un peu mieux. Et je rappellerai aussi ceci: on a souligné qu'il y a eu une augmentation de l'offre de 100% depuis 2003 et qu'effectivement elle a baissé ces deux dernières années, mais il ne faut pas perdre de vue ces dix dernières années. Et, on le voit, en disant cela il ne s'agit pas forcément d'un discours qui, de mon point de vue, est partisan.

M. Luc Barthassat, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, dans un premier temps, pour répondre à la question de M. Lussi au sujet de la société TPG Vélo, j'aimerais dire qu'en réalité une seule collaboratrice a été engagée, dont le poste sera réactivé lorsqu'une décision aura été prise quant au recours, car vous savez qu'un recours a été déposé contre ces fameux Vélib' par les mêmes qui font recours non seulement à Berne, mais aussi à Zurich. Par la suite, c'est simplement le privé qui devrait reprendre tout ce qui concerne TPG Vélo, donc il n'y aura pas de frais supplémentaires pour les TPG.

Pour le reste, Mesdames et Messieurs, je ne vais pas entrer dans tous les détails, mais peut-être juste vous rappeler quelques éléments de l'histoire depuis le début de ma législature. Il y a eu les états généraux des transports et, surtout - c'est le pilier de toute ma législature - ce qu'on a appelé lors de ces dernières votations le «contreprojet sur la mobilité». C'est un point que j'avais annoncé pendant ma campagne, et on a travaillé avec des gens - auxquels je rends hommage, je l'ai déjà dit - comme M. Balestra, le président du conseil d'administration des SI; cela fait longtemps qu'on se connaît et qu'on discute de transports. Le but était d'arriver à intervenir par zone et de ne pas tout mélanger comme on l'a fait ces dernières années. Alors oui, on a doublé l'offre des transports publics pour rattraper un certain retard, mais le seul petit problème c'est qu'aujourd'hui ces transports publics - entre autres les trams - se sont mis au milieu de la route et nous posent de gros problèmes pour ce qui est de régler la notion du libre choix du mode de transport afin que précisément chacun trouve sa place. D'ailleurs, dans le cadre des nouveaux projets de trams qui sont agendés dans le PDI et dans nos calendriers, nous sommes justement en train de revoir l'emplacement de ces trams afin d'éviter qu'à chaque arrêt les passagers doivent couper la circulation des voitures pour rejoindre tout simplement les trottoirs.

Ce sont des petits détails comme ça qui nous ont mis dans une mouise inimaginable ces dernières années, ce qui a entretenu ce que j'appelle la «guerre des transports». Encore une fois, grâce à ce projet de loi que j'ai déposé auprès du Conseil d'Etat et qui a été travaillé à la commission des transports ainsi qu'à la sous-commission des transports, avec un encadrement exemplaire de la part de mes collaborateurs, on est parvenu devant ce parlement à un résultat s'approchant à 90% de ce que je voulais, mis à part ce fameux petit pourcent que les Verts avaient introduit avec leur volonté de faire payer les deux-roues dans le centre et l'hypercentre, mais qui a heureusement été shooté par notre ami Jean Romain ici présent. Ce texte est donc devenu le projet de loi phare de ma législature, on l'a défendu devant la population et il a été appuyé face à l'initiative des Verts à presque 70%, alors je crois que c'est la meilleure réponse que je peux donner à toutes vos critiques. Mais c'est vrai que vous ne supportez pas qu'il y ait eu tout à coup un changement de cap, quelque part, qui englobe tous les systèmes et les moyens de transport, comme l'indique la notion du libre choix du mode de transport qui figure dans notre constitution.

Enfin, contrairement à ce que vous dites, Monsieur Buschbeck, c'est un mensonge éhonté d'affirmer que les gens ne sont pas contents. En effet, pour la première fois depuis deux ans... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...tous les sondages réalisés aux TPG et à la DGT montrent qu'il y a enfin plus de contents que de mécontents dans ce canton, surtout s'agissant des transports publics.

Alors oui, Mesdames et Messieurs, il reste encore énormément à faire. J'ai d'ailleurs déposé des budgets pour la mobilité douce, qui coûteront moitié moins cher au canton parce qu'on va travailler en collaboration directe avec la Ville de Genève. A ce propos, M. Buschbeck a commis un lapsus révélateur, puisqu'il a parlé de la Ville, avant de se rattraper en évoquant le canton... Eh bien oui, il y a beaucoup de points noirs en Ville de Genève, mais on ne se critique pas, on essaie de travailler ensemble.

En conclusion, Mesdames et Messieurs, je crois que le résultat de ces dernières votations devrait vous inciter à une chose, à savoir ravaler vos rancoeurs, ravaler vos défaites et venir dans le camp de ceux qui veulent travailler pour le bien commun. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à voter sur cette politique publique.

Mise aux voix, la politique publique J «Mobilité» est rejetée par 39 non contre 24 oui et 9 abstentions.

K - SANTE

Le président. J'appelle maintenant la politique publique K «Santé» et passe la parole au rapporteur de majorité, M. Alberto Velasco.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Concernant cette politique publique, je m'attacherai à la question des cliniques privées. J'ai lu dans votre rapport, Monsieur le président du département, que les cliniques privées ont vu la rétribution de l'accord imposé par une décision de Berne passer de 50% à 75%. Ce que je veux dire par là, c'est que cela implique 15 millions; or l'hôpital a déjà subi deux plans de réduction, de restrictions financières et de restructuration. Par ailleurs, vous avez imposé à l'hôpital, comme à tous les autres, une diminution de 5% sur les charges et de 1% sur la subvention. Si en plus, cet accord avec les cliniques privées venait à s'accentuer, je pense que cela poserait peut-être des problèmes pour l'Hôpital cantonal quant à la pérennité des objectifs qui lui sont fixés et à sa capacité à dispenser des soins aux citoyens et citoyennes genevois, quelle que soit la situation et quel que soit le nombre de cliniques à Genève, parce qu'une clinique privée, effectivement, elle peut fermer quand elle veut, mais l'hôpital ne peut jamais fermer, il doit être là ! J'ai donc quand même un souci avec cette politique quant à la pérennité et la qualité des soins que l'hôpital doit apporter aux citoyens et citoyennes de ce canton. Voilà, Mesdames et Messieurs, pour ce qui est de l'hôpital. (Brouhaha.)

Mme Béatrice Hirsch (PDC), rapporteuse de première minorité. Cette politique publique qui, du point de vue budgétaire, est extrêmement importante est un tout petit peu plus complexe quand on la regarde, parce que la plus grande majorité du budget est dépensée... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...par des entités subventionnées - nous en parlerons plus tard, lorsque nous voterons leur propre rapport de gestion - et c'est le cas des HUG et de l'IMAD. En revanche, ce qui dépend du département, c'est bien la coordination, ce dont nous avons déjà parlé lors du traitement de la politique publique de la personne âgée. Nous y revenons avec la politique publique K «Santé». La commission de coordination de réseaux de soins est quelque chose qui doit fonctionner et fonctionner mieux, parce que c'est bel et bien le département qui va pouvoir établir ces ponts d'une entité à l'autre et que, si la politique de silos au sein de cette politique publique se poursuit, c'est vraiment, vraiment, vraiment une perte pour les usagers, les patients et toute la population.

Je tiens à relever le déploiement du système MonDossierMedical.ch qui avance, certes lentement, mais qui avance. J'ajouterai juste encore un mot concernant le programme cantonal de soins palliatifs. Il s'agit d'un projet d'importance stratégique et on peut lire au tout début de ce programme qu'en fin d'année 2015 plus de 80% des collaborateurs soignants de l'IMAD, des HUG et des EMS ont suivi une formation en soins palliatifs. Malheureusement, ce genre de programme... Quelque part, il y a une information de bas en haut ou de haut en bas qui ne passe pas toujours, ce qui, en l'occurrence, je pense, ne relève vraiment pas nécessairement du département. Dans le cadre des EMS, ce n'est pas un objectif de 80% qui est visé, mais bel et bien de 50%, et les EMS qui veulent aujourd'hui former en soins palliatifs plus de 50% du personnel se heurtent au fait qu'il n'y a plus une seule place de disponible sur ce programme, ni en 2016 ni en 2017. Je vous remercie.

M. Edouard Cuendet (PLR). Il est vrai qu'au fond mon argument principal dans ce débat concernait la question des silos s'agissant des soins et des différents acteurs, mais nous en avons abondamment parlé hier, donc je ne vais pas me répéter. Sur le département lui-même, je lui voyais un rôle plus directif en ce qui concerne le réseau de soins, je lui verrais un rôle plus pacificateur en ce qui concerne ce que l'on peut appeler actuellement la guerre des cliniques, qui a été un peu abordée par mon excellent collègue Velasco. Je pense que le canton de Genève n'a effectivement rien à gagner à ce que cette guerre se poursuive éternellement, puisque les cliniques privées ont clairement leur rôle à jouer, ce que le département, je crois, ne nie pas, mais on voit dans les faits que le dialogue est difficile, que des partenariats sont difficiles à mettre en place et qu'il y a évidemment quelques procédures judiciaires dont il faudra attendre l'issue, notamment concernant la prise en charge par le canton d'une part du financement, et je pense que, pour tout le réseau de soins genevois, c'est un point absolument essentiel. (Brouhaha.)

Je dirai peut-être aussi un petit mot en matière de prévention, puisque la prévention relève de la responsabilité du département. Hier, à la commission des finances, nous avons eu un message plutôt encourageant... (Commentaires.) ...parce que je crois que personne ne nie l'importance des activités de prévention. (Brouhaha.) Si les UDC pouvaient arrêter de parler... ! Je ne m'entends plus, c'est dire ! (Rire.) Donc, en matière de prévention, on a eu un message assez rassurant de la part du département hier, puisqu'on nous a bien expliqué qu'il y avait une volonté d'aligner les périodes des contrats de prestations à venir, pour toutes les activités de prévention, qui sont pour l'instant assez éclatées. Nous ne sommes pas encore arrivés dans ce domaine à ce que nous sommes parvenus à faire, notamment dans le domaine du traitement du handicap, c'est-à-dire à une politique coordonnée entre les différentes antennes. Pour ma part, ce qui m'avait beaucoup frappé dans la pratique, c'est lorsque nous avons entendu nos amis de l'Usine, qui nous ont expliqué qu'ils refusaient de collaborer avec la FEGPA, qui est responsable de la prévention en matière de lutte contre l'alcool notamment chez les jeunes, et il est invraisemblable que le plus gros débit de boissons du canton, de bière entre autres, ne collabore pas avec une entité censée prévenir l'alcoolisme chez les jeunes. J'aimerais donc bien entendre le département sur sa volonté de réellement créer des synergies au-delà des querelles de clochers et de leaders dans ces institutions, pour qu'il y ait une politique cohérente. Evidemment, je reviendrai sur la question de la gestion des HUG et de l'IMAD... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...lorsque nous traiterons les rapports liés à ces entités, mais la question des silos a été, comme je l'ai dit, déjà abordée hier.

M. Jean Batou (EAG). Chers collègues, évidemment, quand on touche à la santé, on touche à un domaine essentiel de nos politiques publiques et j'aimerais commencer par dire que M. Mauro Poggia est un bon gestionnaire. (Commentaires.) C'est un bon gestionnaire, puisqu'on est dans le cadre de la gestion, et il gère les deniers dont il dispose de manière relativement habile. Il faut dire que les marges de manoeuvre ne sont pas immenses, parce que la santé a été conçue à Genève dans le sens du maintien à domicile et que, par conséquent, ces marges de manoeuvre, ces économies qu'il est peut-être possible de réaliser dans d'autres cantons en accentuant le maintien à domicile au détriment de l'hospitalisation sont plus limitées dans notre canton, où l'entrée en EMS se fait très tardivement. Donc globalement, les marges de manoeuvre sont limitées. Certes, certes on pourrait peut-être réduire le nombre de cadres à l'hôpital; certes, on pourrait peut-être réduire le budget de publicité de l'hôpital; certes, on pourrait peut-être éviter de se faire voler des millions par un avocat véreux, mais tout cela est de l'ordre de l'affinement de cette bonne gestion. Cela étant dit, elle repose évidemment aussi sur la contribution de bénévoles, les proches aidants, qui sont au chevet des malades à domicile; on devrait peut-être plutôt parler des proches aidantes, puisqu'il s'agit plus généralement de femmes. Evidemment, ce sont des économies réalisées pour la collectivité. On s'en réjouit, en un sens, parce qu'il est clair qu'être maintenu à domicile est en général le souhait des personnes âgées souffrant de différents types de pathologies.

Maintenant, si on se penche sur les contraintes auxquelles cette gestion fait face, je crois que M. Poggia est assez clairvoyant quand il dit que la population croît de manière inexorable de 1% - même davantage ces deux dernières années - et que le nombre de personnes âgées croît beaucoup plus vite. M. Béné me reprenait hier en indiquant que ce n'est pas 3% au-delà de 80 ans mais 2,5%. Il parlait de l'année 2015, je crois, mais dans les dix prochaines années, le taux de croissance du nombre de personnes de plus de 80 ans sera de 3,1%. Devant des contraintes de ce type, il est difficile de ne pas imaginer qu'on va devoir investir davantage d'argent dans le fonctionnement des systèmes de santé. Quand on dit cela d'un côté, mais qu'on est contraint de l'autre de procéder à des coupes linéaires de 1% par an sur les trois prochaines années - qui sont pratiquées, qui ont commencé à être pratiquées, peut-être pas de 1%, mais en tirant le frein à partir des mois d'août-septembre 2015 - quand on est obligé par le collège gouvernemental de réduire les dépenses dans le domaine de la santé, y compris dans le domaine de la prévention - je vous signale que nous venons de voter, et ce n'était pas glorieux, à la commission des finances, le refus d'un financement simplement pour la prévention du cancer du sein - eh bien quand on commence à tirer le frein sur des choses de ce type-là, on se prépare à des dépenses supplémentaires et surtout à des souffrances supplémentaires pour l'avenir. Je sais, on me dira que quelques milliers de francs, ce n'est pas grand-chose mais, symboliquement, on a mis le pied dans un très dangereux dérapage.

Après les coupes linéaires, qu'est-ce qu'on peut faire d'autre, quand on n'a plus d'argent ? Des pressions sur le personnel. Les pressions sur le personnel sont devenues inacceptables et même notre collègue Béatrice Hirsch, qui n'est pas de mon bord politique, le reconnaissait à la commission des finances: les pressions sur le personnel hospitalier sont devenues inacceptables et, comme le département est tenu par la grille des salaires de l'Etat... (Remarque.) ...il ne peut pas réduire les salaires et il augmente la productivité du travail. Or qui dit productivité du travail dans un secteur aussi délicat que l'hôpital peut aussi dire... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...danger pour la sécurité de la population et pour la sécurité des patients.

J'aimerais mettre le doigt, pour conclure, sur un problème qui touche l'hôpital aujourd'hui, qui le touche sur un point faible extrêmement dangereux, à savoir celui de la stérilisation. (Commentaires.) Vous avez tous entendu que le secteur de la stérilisation est en sous-effectif et qu'il souffre de la précarité du personnel...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Jean Batou. Cela va me suffire ! ...eh bien, vous avez aussi appris que les instruments creux ne sont plus toujours prélavés à la main, que les traitements aux ultrasons ou avec les autoclaves ne remplissent plus toutes les prescriptions de sécurité et que, parfois, des accidents surviennent. J'espère que ces accidents n'auront pas de conséquences, mais s'ils en ont, elles ne seront pas attribuables à la bonne gestion de M. Poggia, mais à celles et ceux qui ne veulent pas donner les moyens à l'hôpital de remplir son travail correctement.

M. Bertrand Buchs (PDC). Pour débuter, j'aimerais dire que nous avons beaucoup de chance dans ce canton pour ce qui est de la qualité de la prise en charge et des soins. A force de toujours voir les choses d'une façon négative, on ne se rend pas compte de la chance que l'on a. Nous avons développé un système de santé depuis de nombreuses années qui est efficace, qui est à la pointe et qui permet un accès à la santé à tout le monde. Quand les choses se développent, le risque est toujours qu'à la longue, avec les coûts de la santé, on ne puisse plus garantir un accès à la santé pour tout le monde, mais actuellement c'est le cas. Quand on parle du rapport de gestion du Conseil d'Etat sur la santé, ce qui est assez intéressant, c'est qu'on est obligé de mettre de côté le rapport de gestion de l'hôpital et le rapport de gestion de l'IMAD. Ce sont deux gros paquebots et il est vrai que pour le département, c'est un peu la portion congrue. On se fait donc une fausse image de la gestion de la santé, parce que, théoriquement, le département s'occupe de la prévention et laisse à l'hôpital cantonal et à l'IMAD le reste des réseaux de soins, mais c'est faux, parce qu'il y a quand même quelqu'un qui dirige le paquebot, à savoir le conseiller d'Etat.

Ma première remarque consiste donc à relever que les structures deviennent de plus en plus complexes et importantes. Nous avons même augmenté l'importance des structures en rapatriant Joli-Mont et Montana au sein des Hôpitaux universitaires de Genève. J'ai peur que nous arrivions maintenant à des structures beaucoup trop grandes pour être bien pilotées et que nous perdions ce que nous avions essayé de mettre sur pied depuis de nombreuses années, à savoir un réseau de soins. Ce qu'on voit quand on ouvre la page 205 du rapport sur les comptes, c'est «réseau de soins», et c'est cela qui doit résumer le travail qui doit être fait pour la santé, c'est un réseau de soins. Quand on a un réseau de soins, il doit être léger et réactif. On doit faire intervenir tout le monde, les privés et le public et il ne faut pas qu'il y ait un antagonisme entre eux. Un travail énorme doit être fait pour que les gens se parlent - c'est un peu ce qu'il s'est passé avec la mobilité. Il faut faire un travail énorme pour que les gens se parlent et qu'il n'y ait pas des silos qui imposent une façon de voir les choses.

L'autre petit bémol que je mets concernant la santé et auquel il faut faire très attention, c'est qu'il y a actuellement une explosion à Genève des possibilités de soins. Il y a une explosion de ce que vous pouvez obtenir qui est impressionnante. On a vu, s'agissant des cliniques privées, un plateau technique, des propositions énormes. Il existe une espèce de concurrence et une pléthore d'offres et j'ai peur qu'à la longue cela coûte extrêmement cher au canton et que cela n'amène pas grand-chose à la qualité des soins. Donc là aussi je pense que le Conseil d'Etat a un gros travail à faire en termes de coordination et de discussion avec toutes les entités, de sorte qu'on puisse ici à Genève proposer des choses fantastiques, avec les soins à domicile, avec les hospitalisations, avec les moyens techniques que l'on a, une médecine qu'on nous envie dans tout le reste du monde. Je vous remercie.

M. Jean-Charles Rielle (S). Monsieur le président, chères et chers collègues, pour illustrer cette politique et en complément à ce qu'a dit le rapporteur de majorité, donc pour illustrer cette politique et le besoin de coordination à tous les échelons et notamment avec la Confédération et ses différents acteurs de la santé, prenons un exemple en lien avec le vieillissement de la population. On le sait, la population vieillit et la demande de soins à domicile explose ! La directrice générale de l'IMAD reconnaît que la facturation n'a pas augmenté autant que souhaité. Les assurances imposent de plus en plus de limites: en 2014, 166 limites, en 2015, 588 limites. Cela influence directement le maintien à domicile. Les soins à domicile représentent 3 à 4% des coûts de la LAMal. L'un des points noirs concernant la couverture des coûts sont les frais de déplacement - environ 300 000 heures en 2015 - qui ne sont pas couverts. Les autorités cantonales en ont été alertées. Une action de lobbying doit absolument être menée à Berne. L'IMAD est en train d'évaluer les coûts non couverts liés aux déplacements, à la coordination et à la constitution des dossiers. Il est important que le ministre en charge nous précise les actions entreprises à ce niveau pour consolider les ressources humaines et financières attribuées à l'IMAD. Je vous remercie.

Mme Sarah Klopmann (Ve). Le rapport de commission met en exergue le fait que le stress de notre société et du monde du travail nuit à la santé et que cela a donc de forts impacts sur les coûts de la santé et sur des institutions comme les HUG. On sait que la pollution de l'air également. On pourrait donc se dire qu'il faut essayer d'agir sur les causes qui altèrent la santé, mais non, pas du tout, au contraire, il y a plutôt des velléités de ne rien faire de ce côté-là, puis d'opérer des coupes budgétaires, ensuite nous avons espoir de rééquilibrer les finances des institutions, soit sur le dos du personnel, soit en coupant dans les prestations sociales ou, pire, en augmentant les recettes de ces institutions, comme si augmenter les besoins en soins était une vision d'amélioration de la santé et de la qualité de vie des gens. Au contraire ! Alors oui, on sait que le plan de prévention et de promotion de la santé est en phase de finalisation et par ailleurs, je dois dire qu'il a l'air vraiment très, très bien. Mais on verra ensuite si les moyens nécessaires sont mis en oeuvre pour le réaliser. (Remarque.)

A propos de prévention, j'aimerais revenir sur ce qu'a dit M. Cuendet au sujet de l'Usine, car moi j'y vais, contrairement à lui, donc je peux témoigner de ce qu'il se passe là-bas. Je n'ai jamais été dans un endroit où il y avait autant de prévention: l'association Nuit blanche se rend sur place et fait de la prévention en matière de drogue et d'alcool. L'Usine est le seul endroit où j'ai pu une fois tester et discuter de ma consommation d'alcool et prendre conscience d'où je me situais par rapport à cela. (Remarque.) Jamais ailleurs je n'ai pu faire cela; il ne faut pas dire que l'Usine ne fait pas de prévention ! (Commentaires.) L'Usine fait aussi de la prévention en matière de sexisme... (Commentaires. Le président agite la cloche.) ...et en matière de GHB, ce qui est très utile, mais cela, évidemment, il ne peut pas le savoir ! (Remarque.)

Ensuite, pour revenir vraiment sur la santé, l'idée du réseau de soins, un concept qui s'oriente vers le patient et non vers les institutions, est excellente, mais là on voit qu'il existe beaucoup de problèmes dans sa mise en oeuvre et nous l'avons d'ailleurs constaté en début d'année 2015, lorsque les HUG avaient voulu rompre leur contrat de collaboration avec l'association Bien Naître. Cela nous montre que les grandes institutions cantonales ont de la peine à collaborer. Nous préférerions qu'il y ait davantage de collaboration entre les différentes structures et les intervenants externes, mais aussi avec les médecines naturelles, autant dans la politique publique qu'aux HUG. Mais nous connaissons maintenant bien le dédain du magistrat à l'égard de ces médecines alternatives et je sais qu'il y aura encore beaucoup, beaucoup de boulot ! Mais je m'y attellerai !

Mais le point le plus inquiétant dans cette politique publique a été la suppression du secret médical pour les détenus dangereux, ce qui a pour conséquence qu'ils ne pourront plus être soignés et, surtout, l'acharnement avec lequel le magistrat en charge de la santé s'est employé à faire passer ce projet-là, parce qu'il considère que les gens, soit ne peuvent pas être soignés, soit ne doivent pas être soignés, parce que ce sont des citoyens ou des patients de deuxième catégorie. Cela, pour un magistrat en charge de la santé, c'est vraiment très, très grave ! Nous nous abstiendrons sur cette politique publique.

Mme Marie-Thérèse Engelberts (HP). En guise d'introduction, je me lierai aux propos de M. le député Rielle par rapport à certaines problématiques qu'il a évoquées, notamment les relations de l'IMAD avec la politique nationale. Je voulais dire que, sur le plan de la santé, je trouve qu'il y a beaucoup de clairvoyance et que nous avons fait une planification sanitaire qui offre assez clairement des stratégies et des options; qu'on soit d'accord ou non, au moins, elles sont définies. Dans la section concernant la politique publique K «Santé» du rapport de commission, il est dit concernant l'IMAD que celle-ci n'est pas dans la lamentation, mais dans l'anticipation des nouveaux challenges. Je crois que cela montre bien la position des deux grandes entités publiques, que ce soient les Hôpitaux universitaires de Genève ou l'IMAD, qui a une dynamique très intéressante et un processus d'évaluation quasi continu des besoins de la population. L'IMAD n'existe que parce qu'il y a un certain nombre de besoins et parce que ceux-ci sont analysés. Par ailleurs, il faut se rappeler, d'une part, que c'est une institution qui, comme l'hôpital, ne peut refuser personne, ce qui lui donne donc un profil très particulier et que, d'autre part, il y a aussi une sélection qui se fait; il a été évoqué à ce titre le rôle des cliniques privées. C'est effectivement un partenariat extrêmement intéressant, mais ce sera encore plus intéressant, quand il n'y aura pas une sélection, ou un tri comme on dit, des patients à l'entrée de ces institutions.

Pour ma part, je souhaiterais remercier la direction et le personnel par exemple de l'IMAD, qui travaillent à flux tendu d'une manière constante, en 2014, en 2015 et encore en ce début d'année. Un flux tendu en permanence crée un certain stress et des problématiques de gouvernance. Je reviendrai plus tard pour davantage d'explications, mais j'aurai une question à poser au Conseil d'Etat. Une des problématiques fondamentales - enfin, pas forcément fondamentales, mais importantes - que M. le député Rielle a déjà soulignée, est la question des 300 000 heures de déplacement. Il y a une très grande mobilité et facilité de déplacement, mais c'est extrêmement pénalisant pour les soignants: 300 000 heures ne sont pas payées et je voudrais juste relever que cela représente par année 160 postes ! Cela a donc un coût énorme pour ce qui est des prestations. S'agissant de l'équilibre entre le personnel, les prestations et ces déplacements, il faut voir de quelle manière, avec le canton de Vaud par exemple, on peut véritablement plus que suggérer qu'une partie en tout cas de ces heures soit prise en compte. Voilà, je vous remercie, Monsieur le président.

M. Bernhard Riedweg (UDC). L'étatisation croissante de la santé publique encourage les exigences et fait monter les primes. Ce système comporte de fortes incitations contre-productives qu'il s'agit d'éliminer. La responsabilité individuelle doit être renforcée. La mise sous tutelle des citoyennes et des citoyens sous le prétexte de la prévention doit cesser. Une société où l'espérance de vie augmente et un progrès médical qui offre sans cesse de nouveaux traitements sont autant de facteurs qui encouragent la consommation de prestations médicales. (Remarque.) Dans le secteur des caisses maladie, il n'est plus question d'un contrat individuel entre le patient et son assurance, mais on a affaire à un catalogue de prestations fixé par l'autorité politique. L'Etat décide à la place du médecin et du patient quel traitement est efficace, adéquat et économique. Cette tendance à couvrir en permanence tous les risques de maladie possibles et imaginables et chaque besoin particulier a provoqué auprès de la population une mentalité de «casco complète» qui affecte gravement le sens des responsabilités individuelles.

Aux coûts d'exploitation 2015 de 1,079 milliard de cette politique publique K il faut ajouter 80 millions de coûts d'état-major de la politique publique O, auxquels il faut encore ajouter les coûts des activités de support et des prestations de moyens de la politique publique P, le total des charges représentant 14% du total de toutes les charges du petit Etat; c'est le deuxième plus gros poste de charges. Entre 2010 et 2015, les charges d'exploitation augmentent de 47 millions. Le poste «subventions accordées» est le plus gros poste de charges avec 1,037 milliard et représente 27% du total des subventions accordées, qui s'élèvent à 3,8 milliards. L'un des objectifs principaux de cette politique publique est de déterminer l'engagement le plus efficace des deniers publics consacrés à la prévention par rapport aux enjeux d'une société vieillissante. L'UDC votera cette politique publique. Merci, Monsieur le président.

M. Christian Frey (S). J'ai deux questions très courtes, puisque le temps nous est compté. La première concerne MonDossierMedical.ch. Après plus de dix ans d'expérience pilote, de mise en place, de réflexion, d'essais, etc., le résultat 2015 est qu'un quart des médecins, soit 25% des médecins seulement, ont adhéré à cette manière de faire. Qu'attendons-nous pour édicter des mesures contraignantes ou pour le moins incitatives pour les médecins, de sorte que, dans dix ans, on ne se dise pas: «Ah, c'est magnifique ! 45% des médecins ont enfin adhéré à ce système !» - système qui peut, je le rappelle, sauver des vies, éviter des problèmes de médicamentation et autre.

Ma deuxième question concerne les proches aidants. Ils sont mis à toutes les sauces actuellement et on dit qu'on fait énormément, que c'est très important et que rien ne pourrait se faire sans eux. En lisant le rapport 2015, on constate qu'une somme de 142 000 F, qui était destinée à des actions de soutien à ces proches aidants, n'a pas été utilisée. N'est-ce pas une contradiction flagrante par rapport aux intentions manifestées ? Je rappelle aussi que la motion 2155 demandait des solutions pratiques. Réaliser des études, c'est bien, mais les solutions pratiques, comme donner un soutien financier aux personnes qui réduisent leur temps de travail ou font autre chose, sont extrêmement importantes. Le canton de Fribourg, en accordant un forfait, et le canton du Valais, en déduisant au niveau fiscal la charge pour les proches aidants de ce qu'ils consacrent comme temps à leurs proches, ont commencé à le faire; c'est extrêmement important et j'aimerais savoir si le département a prévu quoi que ce soit dans ce domaine. Merci.

M. Bertrand Buchs (PDC). J'aimerais faire deux remarques. Premièrement, je reviens sur la question des propositions de traitement pléthoriques. Je crois que, pour le département, le plus difficile qui reste à faire et qui sera aussi difficile au niveau suisse, c'est qu'il faudra bien à un moment ou l'autre savoir ce qui est efficient et ce qui ne l'est pas. Il est vrai qu'à force de tout vouloir proposer et à force de tout vouloir donner, on se retrouve avec une espèce de supermarché de la santé, où les gens vont se servir de ce qu'ils ont envie et en termes de coûts, c'est impossible de continuer à suivre ! Mais, d'un autre côté, on ne peut pas non plus rationner, puisqu'on sait que les nouveaux traitements, par exemple pour le cancer - des traitements impressionnants - sont extrêmement chers. La question est, et je n'aimerais pas être à la place de ceux qui vont y répondre, qui va-t-on traiter et qui ne va-t-on pas traiter ? Toutes ces questions montrent que c'est un système très ouvert où aucune réponse ne peut être décidée à l'avance. Il faut discuter ou il faut négocier. Il faut avoir l'esprit ouvert, mais il faut aussi être extrêmement souple s'agissant du système de soins. Je pense que d'être souple et d'intégrer tout le monde coûte moins cher.

Deuxièmement, concernant les remarques de M. Frey sur le système MonDossierMedical.ch, pour ma part j'y suis inscrit et j'ai le système, mais je dois dire qu'il n'est pas si simple à faire fonctionner et c'est déjà la deuxième, voire la troisième fois qu'on vient chez moi me le modifier. Il faut aussi savoir que ce n'est pas si simple que cela.

Enfin, s'agissant du secret médical, je vais rassurer ma collègue: la population votera, puisque l'Association des médecins va déposer une initiative au début du mois de juillet qui a déjà récolté jusqu'à maintenant plus de 12 000 signatures; on atteindra donc probablement entre 14 000 et 15 000 signatures. Je vous remercie.

M. Marc Falquet (UDC). Mesdames et Messieurs, on sait que la durée de vie augmente, mais ce qui est inquiétant, c'est que la durée de vie en bonne santé diminue. Aujourd'hui, c'est un fait. La véritable prévention, ce n'est donc pas uniquement de lutter contre le tabac et l'alcool, mais ce serait de faire en sorte que nous puissions vivre en bonne santé jusqu'à un âge avancé. Ce serait la véritable prévention. Aujourd'hui, la médecine officielle ne permet pas de vivre jusqu'à un âge avancé en bonne santé. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Pourquoi ? Parce que la médecine officielle ne s'attaque pas aux causes des maladies, mais traite les symptômes des maladies. En traitant un symptôme de maladie, vous refoulez le mal... (Remarque.) ...au lieu d'essayer d'en trouver la cause... (Remarque.) ...et vous ne pouvez pas rétablir durablement la santé des gens, c'est impossible ! (Brouhaha.)

Une voix. Chut !

M. Marc Falquet. Donc l'avenir, c'est de trouver des méthodes qui permettent de trouver les causes des maladies. A défaut, nous allons obligatoirement dans le mur ! Regardez l'état de la psychiatrie dans notre canton: nous avons à Genève le nombre de psychiatres le plus élevé au monde par habitant. Est-ce que la santé psychique des habitants s'est améliorée ? Je ne crois pas ! Demandez aux gens qui suivent des traitements ! Là, nous avons l'exemple même d'intoxication: nous souffrons tous plus ou moins d'intoxication à force de pollution, de médicaments, de pensées, car ce qui intoxique le plus les gens, ce sont encore les disputes, les pensées négatives, et toutes sortes de choses qui nous intoxiquent, qui intoxiquent les gens au niveau psychique et physique. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) La psychiatrie n'a pas trouvé mieux que de médicaliser les gens, c'est-à-dire qu'à une intoxication psychique on ajoute une intoxication chimique, ce qui fait que la santé des gens va toujours plus en se détériorant et cela va être pire si on ne change pas radicalement de paradigme de traitement des gens.

Il existe aujourd'hui des méthodes pour détecter les maladies avant qu'elles n'apparaissent, en procédant à des analyses sur les organes qui perdent de leur vitalité. Cela existe et cela s'appelle l'électro-acupuncture, par exemple. (Remarque.) Ce sont des méthodes qui existent et qui sont développées notamment en Allemagne depuis de nombreuses années et qui permettent une véritable prévention. Le but n'est pas d'attendre que les organes soient complètement malades, qu'ils soient morts et de faire une greffe avec un foie de porc pour essayer de sauver les gens ! Le but, c'est d'éviter que l'organisme ne se détériore. Je pense donc qu'il va falloir changer radicalement... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...de paradigme s'agissant de la vision de la santé. Sinon, nous allons dans le mur; nous y sommes déjà d'ailleurs, puisque les primes d'assurance-maladie augmentent chaque année et que la santé des gens se détériore tout autant. Voilà, c'est ce que je voulais dire. Merci beaucoup.

Une voix. Bravo !

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ce que j'entends dans cette assemblée... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...c'est que tout le monde, ou presque en tout cas, loue la bonne gestion du magistrat Mauro Poggia, en ce qui concerne la santé; je voulais quand même aussi le relever. Alors évidemment, il y a des difficultés. C'est un gros bateau et il n'est pas simple à diriger, mais de bonnes choses se font aujourd'hui. Certains critiquent, paraît-il, une certaine fuite des cerveaux à l'hôpital; je crois qu'ils se trompent complètement de cible et j'aimerais bien qu'on revienne à la réalité des faits. On va de l'avant, des choses se mettent bien en place. Evidemment, on peut toujours faire mieux, mais nous sommes dans un bon «trend» et j'aimerais encore remercier le conseiller d'Etat M. Poggia pour l'excellent travail qu'il fait, depuis deux ans seulement à la tête de ce département. (Brouhaha.)

Le président. Merci, Monsieur le député. J'aimerais rappeler que, dans le cadre de ce débat, le temps d'intervention des conseillers d'Etat est également limité. Je passe la parole à M. le conseiller d'Etat Mauro Poggia. (Rires.)

M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Rappel salutaire, Monsieur le président ! Le temps s'égrène, je serai donc bref, même si les questions posées sont nombreuses. J'y répondrai en bilatéral, vous me pardonnerez. Je voudrais rappeler, comme cela a été fait, que nous avons un système de santé de très grande qualité; il faut le reconnaître. Nous avons un accès aux soins de qualité pour l'ensemble de la population du canton de Genève. Le problème, c'est le financement de ce réseau et il est vrai qu'à ce niveau-là, nous nous trouvons entre le marteau et l'enclume qui sont placés par le droit fédéral, avec d'un côté, la régulation qui nous impose, et j'en suis heureux, une planification, donc une vision à terme, pour répondre aux besoins de la population, et avec de l'autre côté, une volonté de libéralisation, avec une ouverture au libre choix du patient, qui est une négation de cette planification. En effet, on permet à deux secteurs différents... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...de répondre à des besoins: d'une part, à celui qui est dirigé et pris en mains par l'Etat et, d'autre part, à un réseau autre qui, lui, va attirer une patientèle et qui va développer également des moyens pour répondre à ces mêmes besoins. Tout cela, sans amélioration réelle de la qualité, mais bien sûr avec une hausse des coûts.

Je voudrais souligner que je défends Genève. Bien sûr, je défends Genève, mais je défends aussi le bon sens, en tant que membre du comité directeur de la Conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux de la santé, en tant que membre du conseil d'administration de SwissDRG, qui fixe la tarification des hôpitaux suisses, en tant que futur président de la Conférence latine des directeurs cantonaux de l'action sociale et de la santé. Il est vrai qu'il y a beaucoup de travail à faire, que c'est un très gros paquebot et que nous avons une marge de progression pour améliorer le travail en réseau. C'est effectivement là que nous devons axer nos efforts notamment pour des patients dits complexes; vous pensez immédiatement aux malades chroniques qui, eux, font appel à un nombre important de professionnels de la santé, qui doivent pouvoir collaborer ensemble et, dans ce domaine, MonDossierMedical.ch est un instrument précieux. Je rappelle qu'aujourd'hui nous sommes en phase d'expansion, avec plus de 17 000 patients déjà inscrits, plus de 600 professionnels qui commencent à comprendre, difficilement mais sûrement, la nécessité de pouvoir travailler avec cet instrument.

Concernant la prévention, c'est vrai, elle est indispensable, mais vous savez quelle est la difficulté, et vous en êtes les premiers témoins, à faire passer des projets de prévention, dont les bénéfices seront visibles à terme et non pas de façon immédiate. (Commentaires.) Investir dans la prévention, c'est diminuer les soins dans le futur et donc vous n'allez pas voir immédiatement un impact sur les coûts pris en charge dans d'autres secteurs, d'où la difficulté politiquement parlant à faire passer un message selon lequel il faut investir véritablement dans le domaine de la prévention.

S'agissant du soutien aux proches aidants, nous travaillons bien sûr dans ce domaine. Des unités d'accueil temporaire de répit, vous le savez, sont placées gentiment mais sûrement dans les EMS, de sorte qu'elles puissent précisément se répandre dans l'ensemble du canton et que l'offre soit améliorée. Le meilleur soutien que nous pouvons apporter aux proches aidants, ce n'est pas de rétribuer leur travail; je pense que c'est une mauvaise idée, même si le canton de Fribourg le fait, vous l'avez relevé, et ce de manière très symbolique, à raison de 25 F par jour, ce qui ne peut évidemment pas permettre à une personne de renoncer à une activité professionnelle pour pouvoir soutenir un proche. Pour ma part, je pense que soutenir les proches aidants, c'est avant tout leur permettre de souffler, comme on dit, à un moment donné, en offrant des structures qui peuvent les décharger. Ces structures, ce sont les UATR, ce sont aussi les foyers de jour, les foyers de jour et de nuit, qui peuvent accueillir des patients extrêmement lourds et qui sont soutenus, je l'ai dit hier, par plus de 55 000 personnes à Genève, qui dans l'ombre travaillent à soutenir l'action de l'Etat dans ce domaine.

Pour ce qui est de l'IMAD, bien sûr, vous le savez, le maintien à domicile est un choix qui a été fait bien avant moi et qui a été poursuivi. C'est vrai que, là aussi, savoir que 300 000 heures de déplacement ne sont pas rémunérées nous fait mal au coeur et nous motive à nous battre, mais tout cela relève du droit fédéral et ce n'est pas une lacune du droit fédéral, c'est une volonté délibérée de la Confédération de se décharger sur les cantons. La Confédération a strictement limité les frais pris en charge par la LAMal... (Remarque.) ...dans le cadre de frais de longue durée. Tout ce qui n'est pas pris en charge par la LAMal est pris en charge par le canton, qui est dans ce domaine la voiture-balai, et il est vrai que de plus en plus de prises en charge ne sont pas assumées par le droit fédéral.

Encore un mot sur des propos qui m'ont blessé: j'entends dire que la loi qui a permis d'alléger, et non pas de supprimer, le secret médical pour les criminels dangereux empêcherait les soins pour ces personnes. (Commentaires.) Je trouve que c'est faux et que c'est inutilement alarmiste. Nous sommes déjà dans la mise en pratique de cette loi, nous voyons que tout se passe très bien. Le but est simplement que, lorsqu'une problématique oppose la sécurité publique au secret médical, la vie de nos concitoyens prenne le dessus. (Remarque.) C'est simplement ce que dit cette loi, dans le respect bien sûr des grands principes. Je vous invite à relire la loi, pour celles et ceux qui n'ont lu que les revues de presse sur ce sujet. Merci, Mesdames et Messieurs.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote de cette politique publique K «Santé».

Mise aux voix, la politique publique K «Santé» est adoptée par 45 oui contre 7 non et 18 abstentions.

L - ECONOMIE

Le président. Nous poursuivons nos travaux avec la politique publique L «Economie», et je... (Remarque. Rire. Le président rit.) Excusez-moi ! ...et je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Alberto Velasco.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. A travers le rapport du Conseil d'Etat, on constate que notre chef du département de l'économie a voyagé, je crois, avec une délégation économique à Dubaï, Singapour, Kuala Lumpur, et j'en passe. C'est pas mal, c'est vrai, mais ensuite on nous dit que les objectifs 2015 ont été globalement atteints. Cependant, quand on lit le rapport, on ne sait pas quels sont ces objectifs. Mon groupe et moi-même, par exemple, aurions aimé savoir quelles entreprises ont été attirées par ce canton, quelles activités elles représentent; on aimerait aussi savoir quelles sommes ont été investies dans ce canton pour la recherche et le développement, quelle somme totale, dans quels domaines et enfin quelles sont les créations d'entreprises de haute technologie créant des emplois d'avenir. Tout cela ne figure pas dans le rapport, malheureusement. Je ne dis pas que notre Conseil d'Etat n'est pas actif, mais je crois qu'on manque d'informations à ce sujet pour se satisfaire de cette phrase annonçant que les objectifs 2015 sont globalement atteints.

Par ailleurs, à propos de la surveillance des marchés, on constate que ce département avait attribué au budget un nombre d'ETP de 67,1 et n'en a utilisé que 62,9, alors que c'est une activité hautement importante. En effet, 450 entreprises cibles devaient être contrôlées, mais seulement 330 l'ont réellement été. De plus, les inspecteurs devaient effectuer 90 contrôles d'entreprises chacun et n'en ont fait que 68,7. Quand on sait l'importance du contrôle de ces entreprises, notamment sur l'utilisation d'une main-d'oeuvre au noir ou n'ayant pas les compétences requises, je me demande s'il y a une réelle volonté de contrôler ces entités.

Présidence de Mme Christina Meissner, première vice-présidente

Mme Béatrice Hirsch (PDC), rapporteuse de première minorité. En lisant le rapport de gestion sur la politique publique L, on se dit tout d'abord qu'heureusement qu'il y a l'économie privée, car l'Etat vient surtout en soutien. En effet, c'est grâce à l'économie privée que bon nombre des objectifs sont atteints. J'aimerais citer l'inspection paritaire des entreprises, dire merci aux syndicats et associations patronales qui se sont alliés pour lutter contre la sous-enchère salariale. Par ailleurs, j'aimerais poser une question au Conseil d'Etat qui reprend celle posée par le rapporteur de majorité. Je souhaite avoir un peu plus de détails concernant la délégation pour la promotion économique, les délégations qui se sont rendues à Dubaï, Singapour et Kuala Lumpur, et savoir quels étaient les résultats escomptés, quels sont les objectifs atteints, enfin ce qu'on peut en attendre pour Genève. Je vous remercie, Madame la présidente.

La présidente. Merci. Monsieur Cyril Aellen, prenez-vous la parole ? (Remarque.) Très bien, alors je passe la parole à Mme la députée Magali Orsini. (Mme Magali Orsini ne répond pas.) Madame Orsini, bonjour ! C'est à vous.

Mme Magali Orsini (EAG). Merci, Madame la présidente de séance. Je profite d'avoir la parole pour corriger l'inexactitude proférée hier par mon excellent collègue d'Ensemble à Gauche, M. Pierre Vanek. Il est évident... (Rires.) Madame la présidente, vous pouvez demander un peu de silence, s'il vous plaît ?

La présidente. Mesdames et Messieurs, un peu de silence, s'il vous plaît.

Mme Magali Orsini. Il est évident que je ne suis pas exclue du groupe Ensemble à Gauche, puisque je suis actuellement installée en son sein et que je suis libre d'utiliser le bouton qui est devant moi pour prendre la parole. (Rires.) En outre, je vous rappelle que j'ai signé une feuille de présence qui porte le nom d'Ensemble à Gauche. M. Vanek a trop tendance à prendre ses désirs pour des réalités; il sait très bien que la décision dont il parle est contestée. Quant au «nous» que j'utilise au lieu de «je», il ne s'agit pas du «nous» de majesté, mais il signifie que je ne suis pas seule à penser ce que je pense et à être excédée par les agissements de MM. Vanek et Batou.

La présidente. Madame Orsini ?

Mme Magali Orsini. Quant à la politique publique dont il s'agit...

La présidente. Madame Orsini... Ah, voilà ! Nous parlons de la politique publique L.

Mme Magali Orsini. ...je rappelle... (Commentaires.) Oui, je pense que M. Vanek n'a pas vraiment été remis à l'ordre hier, quand il a fait le même genre d'intervention. En ce qui concerne cette politique publique, je rappelle que nous avons approuvé le projet tripartite de révision de la loi sur l'inspection des relations du travail, dans l'espoir de diminuer les cas d'infractions aux conditions de travail. (Brouhaha.)

La présidente. Chut !

Mme Magali Orsini. J'ai personnellement regretté que notre parlement n'ait plus à approuver les comptes de Palexpo, dont l'Etat est l'actionnaire majoritaire. Là, vous remarquerez que je dis «je», parce que l'ensemble de mon groupe avait voté le contraire. Dans la mesure où les représentants des partis dans le conseil d'administration sont soumis à un secret absolu, le parlement n'a aucun moyen de contrôle sur la gestion de cette entité qui fait pourtant partie du périmètre de consolidation et pourrait, à l'occasion, engendrer des pertes importantes. D'une manière générale, nous comprenons bien que les régies publiques disposent d'une totale autonomie dans la gestion courante de leurs opérations. Toutefois, elles ne doivent pas rechigner à rendre des comptes à leur propriétaire, l'Etat. Dans ce sens, la présence de députés dans les conseils d'administration, voulue par le peuple, représente un garde-fou important contre de trop grandes velléités de rétention d'informations. Nous nous sommes également opposés au transfert aux Ports Francs de l'immeuble dans lequel ils sont logés. Cette vente n'a même pas le mérite d'améliorer la trésorerie de l'Etat, dans la mesure où n'étant pas capables de débourser le prix de près de 100 millions, ils ont étalé le paiement de cette dette sur un très grand nombre d'années. Voilà, Monsieur le président, au moins deux raisons majeures de refuser la gestion de cette politique publique. Madame la présidente de séance, veuillez m'excuser.

La présidente. Il n'y a pas de problème. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. le député André Pfeffer.

M. André Pfeffer (UDC). Merci, Madame la présidente. Pour l'UDC, l'important est notre économie. Elle est prospère et exceptionnelle. De 2008 à 2013-2014, la progression a été constante. Le produit intérieur brut approche les 53 milliards et des dizaines de milliers de postes de travail ont été créés. Cependant aujourd'hui, notre PIB stagne et diminuera probablement. La création d'emplois est déjà en repli depuis 2015. Déjà depuis 2011 à Genève, l'évolution de la masse salariale est aussi en forte baisse. Quelle est la politique ? 85% des employés genevois travaillent dans des grandes et moyennes entreprises, soit dans des sociétés employant cinquante employés et plus. Pour beaucoup de ces acteurs, la RIE III est déterminante; 60 000 à 70 000 personnes y sont même directement impliquées. Si la France connaissait cette situation, son président et tous ses ministres, tous les partenaires sociaux, syndicats et patronaux seraient unis et défendraient ces 60 000 à 70 000 emplois. A Genève, nous avons pour l'instant une mêlée de rugby, les têtes emboîtées et chacun avec une position opposée. Genève a des secteurs d'activité qui sont leaders ou parmi les leaders mondiaux: le secteur bancaire, le négoce, l'horlogerie, la pharmaceutique, etc. Il y a aussi des institutions exceptionnelles qui sont des moteurs pour notre économie: l'aéroport, les Ports Francs, Palexpo, etc. Sans oublier trente organisations internationales et plus de 250 ONG. Cependant, depuis quelques mois, l'appréciation des affaires de la plupart des branches d'activité économique est difficile, voire stagnante ou déjà en baisse. Quelle est la politique ? Si l'on compare les conditions-cadres avec celles de nos concurrents directs, soit Bâle et Zurich, Genève est le plus mauvais élève en ce qui concerne les dépenses publiques, la fiscalité, la mobilité et autres. En outre, on se demande pourquoi ceux qui militent pour le Grand Genève refusent aux entreprises genevoises de pratiquer les mêmes horaires que de l'autre côté de la frontière; c'est là qu'on génère du chômage et des pertes de chiffre d'affaires. Pour ces raisons, le groupe UDC refusera la politique publique L.

Présidence de M. Jean-Marc Guinchard, président

M. Olivier Cerutti (PDC). Mesdames et Messieurs, Monsieur le conseiller d'Etat, le parti démocrate-chrétien votera cette politique publique non sans quelques soucis. D'où des questions et des suggestions. Contrairement à l'UDC, j'estime que notre croissance est faible, voire beaucoup trop faible par rapport à notre ménage. Aujourd'hui, le «ménage Etat» a beaucoup de peine à se recentrer sans passer par des augmentations fiscales, sans passer par une réforme profonde. Par conséquent, Mesdames et Messieurs, la croissance est le seul fruit qui nous permettra de sortir de notre impasse et de progresser. Croissance qui n'est pas forcément «indélibérée», mais réelle. Que fait-on, Monsieur le président, pour s'engager dans cette direction-là ? Les contrôles réalisés par vos services sont en augmentation, et je crois que c'est important de pouvoir rassurer le marché du travail. Les contrôles sont aussi importants pour notre Etat; notre Etat doit être exemplaire en la matière. Monsieur le président, c'est une suggestion, mais pourquoi n'avons-nous pas un contrôleur qui ne fait que contrôler les chantiers d'Etat ? Pourquoi votre serviteur, lorsqu'il rentre chez lui à 19h, voit-il encore des gens se promener sur des échafaudages de chantiers d'Etat, notamment à Frontenex ? Non, Monsieur, ce n'est pas possible, il faut qu'on soit exemplaire.

Ma dernière suggestion sera de rétablir peut-être la confiance qui doit exister entre le monde du travail, l'entrepreneur et l'Etat, dans le but de faire fructifier nos entreprises. Un registre professionnel serait peut-être une nécessité aujourd'hui. Il vous permettrait de mieux réguler le marché des entreprises, d'une manière plus factuelle, et d'interdire aux entreprises qui trichent de participer aux marchés publics; mais cela est insuffisant. En effet, avoir un véritable registre professionnel est peut-être une manière de s'en sortir. Mesdames et Messieurs, je vous remercie de soutenir cette politique publique. (Quelques applaudissements.)

M. Romain de Sainte Marie (S). Je serai court, il nous reste peu de temps. Il y a plusieurs points: le premier concerne l'inspection paritaire des entreprises qui est très positive et qu'il faut saluer, cela a déjà été fait. En revanche, il reste des éléments - on l'a rappelé - sur lesquels nous pouvons jouer pour améliorer les conditions de travail. Je pense ici aux critères d'octroi des marchés publics; on sait que des négociations sont en cours, il y a différents aspects sur lesquels nous pouvons encore agir. Je veux parler notamment de la proportion d'emplois temporaires qui reste problématique, entre autres, dans le gros oeuvre; il y a également le levier des marchés publics sur la question des salaires où nous pourrions agir au niveau cantonal. On a vu que des communes, comme la Ville de Genève, qui ont souhaité le faire, n'ont pas réussi. Nous, au niveau cantonal, nous serions à même de le faire. La question des stages est un autre élément toujours problématique. On sait qu'il existe une espèce de vide juridique qui amène un aspect contraignant par rapport au stage aujourd'hui. Il serait peut-être bon de légiférer sur la question afin d'amener davantage de règles et un cadre plus clair concernant ces stages. Enfin, un dernier aspect qui nous concerne davantage actuellement: la LRDBHD. Je pense au diplôme partiel pour les buvettes permanentes de service restreint qui, malgré l'esprit de la commission de l'économie qui avait cette notion de «partiel»... Or, le règlement d'application propose onze modules sur les treize de formation du brevet, ce qui n'est absolument pas partiel et bien trop important. Là encore, il y a des modifications et des ajustements à faire dans les temps à venir.

M. Boris Calame (Ve). Chères et chers collègues - je sais que certains adorent - la place touristique genevoise est un élément de la politique publique L01. Le tourisme est-il le parent pauvre du programme de soutien à l'économie du Conseil d'Etat ? Les indicateurs y relatifs peuvent nous laisser perplexes, à tout le moins à moitié. En effet, le premier indicateur traite du nombre total des nuitées hôtelières à Genève, ce qui pourrait être considéré comme pertinent. Il y a toutefois un sérieux bémol en lien avec la nature des nuitées considérées; est-ce véritablement du tourisme ? Ou alors ces nuitées sont-elles liées pour une bonne part à d'autres activités que le tourisme, c'est-à-dire la Genève internationale ou l'activité économique du canton ? Les données du second et seul autre indicateur nous laissent dubitatifs. En effet, il traite du nombre d'instances de promotion utilisant la marque «Genève»; et là, surprise, aucun chiffre pour 2014, encore moins pour 2015. Est-ce à dire qu'il n'est pas un indicateur de qualité ou de dynamique du tourisme genevois ? Eh bien non ! Il fait juste référence à un label qui aurait dû valoriser Genève et qui a disparu sans être remplacé. Genève Tourisme et Congrès a décidé d'abandonner la marque lancée en 2010, elle disparaîtra donc en 2014. Rappelez-vous: «Genève, un monde en soi». Un échec en matière de communication pour des coûts bien réels. Il y aurait sans doute matière à se poser des questions sur Genève Tourisme et l'évaluation de son activité. En effet, il est bien surprenant que personne ne semble s'émouvoir des 50% de pertes d'informations économiques liées au tourisme. Merci au Conseil d'Etat de bien vouloir nous préciser quelle est son intention en matière de développement de la place touristique genevoise autre qu'un simple décompte des nuitées hôtelières, et, le cas échéant, quelles actions il entend mener en la matière.

En ce qui concerne Genève Aéroport, il s'agit d'un programme mis en oeuvre par le secrétariat général du DSE pour, paraît-il, préserver la mission de service public de l'aéroport et lui donner les moyens d'adapter son infrastructure à l'évolution de l'aéronautique et aux exigences environnementales. Encore une fois, quels sont les indicateurs qui devraient nous permettre d'apprécier la situation de l'aéroport qui se doit de répondre à cette mission ? Rien ou presque. Un seul et unique indicateur donne la progression de villes connectées. De fait, aucun indicateur ne mentionne la situation environnementale, alors que tous les marqueurs du réchauffement climatique sont au rouge. Aucun indicateur ne précise la capacité d'investissement de l'aéroport, alors qu'on parle de plus en plus d'un développement démesuré et d'une privatisation partielle. Aucun indicateur ne parle du nombre de passagers ou d'emplois liés à l'activité de l'aéroport, alors même que les objectifs annoncés par celui-ci, au travers des travaux sur le PSIA, sont d'arriver à plus de 25 millions de voyageurs à Genève. Enfin, aucun indicateur ne montre les répercussions économiques réelles de l'aéroport. Pourtant, il constitue une porte d'entrée et de sortie pour le canton, pour la région et pour la Suisse. C'est le premier «hub» du «low cost» dans le pays, l'aéroport européen qui a le plus fort taux de progression en matière de mouvements et bien plus encore de passagers. L'aéroport représente aussi la première nuisance environnementale du bassin lémanique. Il a aussi les plus faibles taxes aéroportuaires. Au travers des pratiques quotidiennes de Genève Aéroport et de ses stratégies de développement, qu'elles soient avouées ou non, on se doit de constater qu'il n'y a aucune intention de limiter sa progression. Toutefois, cela devrait être un but premier de l'Etat que de protéger les populations riveraines et de se montrer aussi plus attentif aux personnes touchées dont le nombre ne cesse d'augmenter, à Genève mais aussi dans le canton de Vaud, en France voisine voire au-delà. L'actualité nous montre encore que le financement trop faible de l'aéroport pour le secteur de la sécurité ne permet plus au SSA et à ses pompiers professionnels de répondre avec certitude à la mission qui leur est confiée. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Non, pour les Verts, le développement de Genève Aéroport ne peut consister en une simple fuite en avant. Il s'agit d'une institution d'importance pour ce canton, c'est aussi une très importante source de nuisances qui doit être cadrée, ce qui n'est pas le cas à ce jour. Pour ces raisons notamment, nous nous abstiendrons sur cette politique publique...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Boris Calame. ...et nous profitons aussi de rappeler, comme pour bon nombre d'autres politiques publiques, qu'il serait sans doute temps d'envisager la mise à jour des indicateurs pour qu'ils aient du sens et puissent accompagner valablement les politiques publiques de ce canton. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)

Mme Sarah Klopmann (Ve). Bien évidemment, je ferai aussi une mention toute particulière du règlement d'exécution de la LRDBHD concocté par le magistrat en 2015. Surprise, surprise ! Il crée finalement beaucoup de difficultés - on s'en doutait, mais maintenant on le constate - pour de nombreux petits commerces genevois et aussi pour des acteurs économiques, culturels, sportifs et associatifs de notre canton. Finalement, il ne se révèle pas facile à appliquer, et pas uniquement pour les buvettes. Alors oui, il y a le problème concernant le diplôme partiel pour les buvettes, dont a parlé M. Romain de Sainte Marie, mais aussi une foule d'autres problèmes, et pour ne pas trop allonger la liste, je ne mentionnerai qu'une seule petite trahison ou un non-respect de la loi - je ne sais pas vraiment comment le qualifier: il s'agit de la notion d'exploitant et du nombre de personnes qui peuvent être exploitantes d'un établissement. Dans la loi, après d'âpres négociations, nous avons obtenu que l'exploitant d'un lieu public puisse être une ou plusieurs personnes physiques. Ce «plusieurs» a été obtenu de longue lutte. Toutefois, après avoir donné sa bénédiction à cette modification, le magistrat précise à nouveau en catimini dans le règlement que l'exploitant ne peut être qu'une seule et unique personne physique. Cela n'est absolument pas normal. Il est écrit dans le rapport de gestion que le règlement a fait l'objet d'une consultation, mais j'ai de la peine à comprendre si cette consultation a juste été très partielle ou n'a simplement pas été écoutée; en tout cas cela ne représente pas du tout la volonté des milieux concernés. Nous, les Verts, avons beaucoup de peine à comprendre d'où vient cette volonté claire et nette de péjorer et de mettre en difficulté le troisième secteur économique de notre canton. Ce n'est pas vraiment malin. (Quelques applaudissements.)

M. Serge Hiltpold (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais saluer et remercier le département pour le rôle qu'il a joué dans le partenariat social, notamment dans le dossier de l'inspection paritaire des entreprises, avec la CGAS et l'UAPG, afin de trouver un compromis sur cette initiative 151. Je relève aussi la bonne collaboration qui règne à la commission de surveillance des marchés de l'emploi pour les contrôles tripartites des travaux d'accompagnement du CEVA. Du point de vue de l'échiquier politique, à gauche comme à droite et avec le département, les choses se présentent plutôt bien en ce qui concerne les marchés publics. Le PLR soutiendra cette manière de faire qui n'a rien de nouveau, mais qui est simplement le relais d'une tradition de partenariat qui semble porter ses fruits.

En outre, j'estime qu'il est nécessaire d'avoir des relais importants sur le plan fédéral au sujet de la grande problématique que sont les mesures d'accompagnement des bilatérales. En effet, des failles existent dans la loi sur les travailleurs détachés, notamment avec l'utilisation, parfois abusive par certaines entreprises, du détachement de travailleurs à des coûts difficilement acceptables pour nos sociétés citoyennes, l'économie locale, régionale et nationale. Encore une réflexion sur la responsabilité des maîtres de l'ouvrage dans les marchés publics: on a vu récemment, lors d'une séance d'informations sur les travaux de l'ONU, que les entreprises régionales voire nationales étaient de facto écartées, que c'étaient des «pools» importants en entreprise totale qui gagnaient les marchés. Je crois que si on défend des projets comme le quartier de l'Etang ou les organisations internationales, et s'il y a un appui politique fort de ce parlement, il faut aussi que les maîtres de l'ouvrage prennent leurs responsabilités et sachent renvoyer l'ascenseur.

La loi sur les heures d'ouverture des magasins, la LHOM... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...est un dossier épineux qui est toujours là, qui est toujours dans les jambes. C'est dommage qu'on ne trouve pas de solution comme celle concernant l'horaire des boulangeries - là, je m'adresse plutôt aux bancs de gauche pour qu'ils aient un peu plus d'ouverture d'esprit concernant la flexibilité des commerces - car la situation économique est délicate. Le magistrat a fait ce qu'il a pu, mais on n'a pas réussi à trouver une solution à propos de l'ouverture de ces magasins.

A propos de l'économie globale, je remarque que Genève contribue fortement à la RPT et que l'économie est florissante. Je crois qu'on le doit également à des infrastructures majeures comme l'aéroport, le CEVA et la future extension de la gare Cornavin; toutes ces infrastructures sont nécessaires au développement de la Genève internationale qui fait un lien avec l'économie locale et avec notre vie de tous les jours; on ne s'en rend pas forcément compte. Par conséquent, je trouve dommage qu'on attaque sans arrêt l'aéroport, qui a une croissance parfois un peu trop rapide qu'on peut remettre en question, mais qui forme simplement un outil économique majeur en termes de compétences internationales. Sans l'aéroport, il me semble que toute la Genève internationale serait fortement affectée. Je me réjouis donc du bon débat qui se tient autour de l'économie. Il faudra un peu plus d'ouverture d'esprit dans le dossier de la réforme sur la fiscalité des entreprises, qui est un outil majeur pour l'emploi, afin d'avoir les bases nécessaires pour donner à notre gouvernement ainsi qu'à nos citoyens les conditions-cadres et la prospérité dont ils ont tant besoin. (Quelques applaudissements.)

Mme Salika Wenger (EAG). Chers collègues, nous avons entendu ce matin bien des chiffres, bien des descriptions, mais il n'en reste pas moins qu'une bonne économie est une économie au service de la population. Par définition, l'économie est le champ du travail. J'entends bien que nous parlons des petites et moyennes entreprises; néanmoins, parlons un peu des travailleurs. Nous savons tous que dans notre économie, en tout cas dans l'économie genevoise, il y a trois champs difficiles que nous contrôlons mal en termes de travail: le bâtiment, l'hôtellerie et le commerce. Dans ces champs-là, il existe de la précarité, je dirais même une immense précarité. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Il ne me semble pas que le mouvement de l'économie actuelle aille dans la perspective de contrôler et de faire en sorte que ces populations qui se trouvent dans la précarité... Parce qu'à Genève, il y a des travailleurs pauvres ! Un travailleur pauvre, c'est quelqu'un qui a travaillé huit heures, mais qui ne peut pas accéder aux biens nécessaires pour vivre. Par conséquent, il faut arrêter de se gargariser, de se dire que tout va bien. Non, tout ne va pas bien ! Notre économie est, comment vous dire... en train de scinder la population en deux de manière très violente. Cette précarité est... j'allais dire formatrice... Hier, nous avons parlé de l'enseignement. Tout le monde s'est demandé pour quelle raison des enfants décrochaient après le secondaire. Ce n'est pas seulement la responsabilité de l'école, c'est aussi la responsabilité du monde que nous sommes en train de leur offrir. Or, il est vrai que lorsque vous appartenez à une famille dont les revenus sont précaires, cela ne peut pas, je pense, ne pas avoir de conséquences par exemple sur la scolarité; et ce n'est qu'un des exemples. Aujourd'hui, il me semble que lorsque nous parlons d'économie, il y a deux économies, dont celle du patronat - je le dis - qui oublie que ce qui lui revient est le fruit du travail des autres, et que ces travailleurs-là méritent une meilleure redistribution des richesses qu'ils ont produites. (Quelques applaudissements.)

M. Pascal Spuhler (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le Mouvement Citoyens Genevois soutiendra la politique de l'économie, une économie qui ne se porte pas si mal à Genève. En effet, on a parlé de Genève Tourisme - cela a été cité - où la politique est rondement menée depuis un certain temps. C'est près de 1,5 milliard de retombées économiques directes et indirectes sur Genève; c'est très important. Bien entendu, on peut critiquer les logos qui ont été utilisés comme «Un monde en soi», car c'était se retourner un peu sur soi-même, se croire le centre du monde. Aujourd'hui, on parle de «Geneva live» qui se multipliera et touchera différents modèles comme Genève Aéroport et d'autres logos divers et variés. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) On parle également de commerce. Je dirais qu'au niveau du petit commerce c'est un peu plus difficile. Si le commerce international fonctionne bien, si l'Aéroport international de Genève, une manne sérieuse pour l'économie genevoise, fonctionne bien, le petit commerce, lui, souffre un peu plus. Un effort devrait donc être fait pour les PME, les petites entreprises, les petits artisans qui ont de la peine à finir leurs fins de mois et à boucler les comptes pour survivre. Le MCG souhaiterait que nous puissions davantage penser au commerce local, à l'entreprise locale et à l'emploi local; c'est le message que nous aimerions faire passer à M. le conseiller d'Etat afin qu'il puisse s'activer sur ce sujet. En ce qui concerne le commerce international et la Genève internationale, on ne peut pas dire que ça ne va pas.

M. Serge Hiltpold (PLR). Je me permets de revenir sur l'intervention de Mme Salika Wenger qui parlait d'une économie du patronat. J'aimerais savoir ce qu'elle pense: est-ce qu'il y a une économie du patronat et une économie de la fonction publique ? Concernant l'économie du patronat, je peux vous en parler: c'est quelqu'un qui était debout à 4h45 ce matin pour aller à l'entreprise entre 5h et 8h avant de venir ici, qui assume des charges, qui donne du boulot, qui se bouge le cul toute l'année pour donner du travail à ses collaborateurs. (Commentaires.) On aimerait simplement avoir un peu plus de respect, merci. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les remarques sur cette politique publique, même si je suis arrivé un peu en retard, je vous prie de m'en excuser. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Avec beaucoup d'intérêt, mais quand même avec une certaine distance, car vous l'avez compris, Mesdames et Messieurs, en regardant les chiffres, la politique publique L «Economie» pèse moins de 1% dans le budget de l'Etat - 0,7%, de mémoire - et elle est en diminution. Vous l'avez compris aussi, l'économie n'est pas l'Etat. Par définition, l'économie concerne d'abord l'activité privée, ce sont d'abord les entrepreneurs et tous les types d'entreprises confondues que nous essayons de soutenir, pour lesquels nous tentons de développer des conditions-cadres propices et favorables. Dieu merci, nous ne sommes pas dans une économie collectiviste qui aurait pour seule ambition de planifier le développement de la croissance; et je pense que c'est bien ainsi.

J'ai entendu avec intérêt notamment les remarques du groupe UDC sur les conditions-cadres: vous avez raison, la question de la fiscalité, et donc de la réforme de l'imposition des entreprises, est essentielle. Elle ne se trouve pas dans cette politique publique, mais elle en est tributaire; c'est-à-dire que si les conditions-cadres sont favorables, l'économie se portera bien, mais la fiscalité est l'un des éléments clefs. Au même titre que la question migratoire - je me permets de le rappeler, parce qu'il me semble que vous l'avez oublié - la capacité de se fournir en forces de travail sur un certain nombre de marchés, notamment pour les entreprises qui ont besoin de compétences à haute valeur ajoutée, est un élément clef de notre politique économique. De ce point de vue là, on a toutes les raisons de craindre les perspectives prochaines, notamment à l'horizon du 9 février 2017, qui ont été malheureusement décidées par le peuple suisse dans sa majorité il y a deux ans.

Troisième aspect enfin - c'est peut-être important de le souligner, parce qu'on glose ici sur l'économie locale - il s'est produit quelque chose cette nuit dont on ne mesure pas encore tout à fait la portée. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) On peut parler du troisième sous-article et du huitième amendement à la LRDBHD, c'est intéressant, mais fondamentalement, en matière de politique économique, la décision prise par le peuple anglais aura un impact considérable sur notre économie, en Suisse et en particulier à Genève; c'est peut-être à cela qu'il faudrait consacrer un peu de temps.

Je vais répondre rapidement aux questions posées. Tout comme hier soir, je m'étonne que ces questions, toutes très pertinentes, n'aient pas été formulées précédemment, car on aurait pu y répondre de manière plus détaillée et ensuite vous renvoyer à toute une série de documents existants.

Au sujet des déplacements à l'étranger en matière de promotion économique par exemple, nous publions chaque année les résultats avec un an de décalage, au mois de février. En effet, lors de déplacements avec des entreprises suite à leur demande, c'est rarement dans les vingt-quatre heures qui suivent que des contrats sont signés. Je prends comme exemple le déplacement que nous avons effectué avec la Chambre de commerce au Japon en novembre 2014, qui a généré l'implantation de quatre sociétés japonaises à Genève, essentiellement dans le domaine des «Medtech», qui se sont déployées durant 2015 - c'est la raison pour laquelle j'en parle, puisqu'il s'agit du bilan 2015. Ces sociétés ont généré environ 200 emplois, pour la plupart à haute valeur ajoutée, dont une centaine pour des personnes locales. Nous vous fournissons donc volontiers tous ces chiffres et tous ces éléments. Ils vous sont donnés automatiquement chaque année, au mois de février; ils figurent dans les documents en annexe, s'ils nous sont demandés, sinon nous ne vous donnons pas la totalité de nos communiqués de presse. N'hésitez pas à nous les demander, si possible en amont, car dans le cas contraire on restera frustré de part et d'autre.

A propos du tourisme, je suis surpris, là aussi, des remarques qui ont été faites. On aurait pu en parler en commission, on peut aborder cela quand vous voulez. Toutefois, en parler ici, au moment des comptes, avec des propos à l'emporte-pièce qui ne reflètent qu'une partie des réalités des indicateurs sur le tourisme... Au passage, les indicateurs, Monsieur le député Calame, on les change quand vous voulez: faites-nous des propositions, on n'attend que ça ! C'est un peu dramatique d'arriver à la séance plénière sur les comptes pour s'entendre dire que finalement les indicateurs ne sont pas les bons. Suggérez, proposez, nous nous alignerons très volontiers. Aujourd'hui, l'indicateur en matière de tourisme qui reflète la bonne santé de ce secteur économique - c'est une santé quantitative, peut-être pas qualitative - ce sont en effet les nuitées. 2015 a été, toutes choses égales par ailleurs, une bonne année s'agissant du tourisme. Si vous souhaitez maintenant qu'on investisse ce champ-là sous l'angle qualitatif... Je rappelle que Genève est essentiellement une destination «business» plutôt que «leisure», pour prendre des termes anglais, car c'est le «business», plus que le délassement, qui génère 80% de l'activité touristique; c'est une réalité de notre tissu économique. Nous n'allons pas, ici, au parlement, décider qu'il en sera autrement. Je vous renvoie au principe selon lequel l'économie libérale de marché dans laquelle nous vivons décide d'un certain nombre d'orientations; nous en prenons acte, et on ne peut, dans le domaine du tourisme, que s'en féliciter.

Le contrôle du marché du travail est un autre aspect, après la promotion économique, le tourisme, etc. La surveillance du marché du travail - et je m'étonne de vos propos, Monsieur le député Cerutti - est un domaine dans lequel il y a un consensus; mais félicitons-nous-en ! En 2015, grâce à vous, grâce à l'unanimité de ce parlement, nous avons consacré l'inspection paritaire des entreprises. Pourquoi aller chercher des poux là où il n'y en a pas ? S'il y a bien un domaine où il existe un consensus, une unanimité entre syndicats et patrons... Ce qui ne veut pas dire qu'on n'a pas de problèmes; je reconnais ce que disait M. Romain de Sainte Marie, nous avons une vraie difficulté dans le domaine du gros oeuvre, avec les temporaires, nous cherchons donc des solutions. Cependant, d'une manière générale, le contexte social est propice et favorable. Prenons ici acte du fait que 2015 a été une bonne année de ce point de vue là et voyons comment se déploiera en 2016 cette inspection paritaire des entreprises qui, pour le moment, se déploie à satisfaction, de la même façon que le contrôle des chantiers n'a jamais été aussi élevé en 2015 que précédemment. Vous préconisez un registre des entreprises, si j'ai bien compris, ou un registre professionnel. Je ne sais pas quelle nouveauté administrative et quelle couche supplémentaire vous voulez qu'on ajoute; je m'en étonne, car ce n'est pas exactement la position exprimée par votre parti précédemment. Assez d'administration ! Les partenaires sociaux sont satisfaits, les contrôles s'opèrent, et ce n'est pas parce que vous voyez une fois, du côté de Frontenex, des gens sur des échafaudages à 19h - ce qui n'est encore pas illégal - qu'il faut surréagir, ici, sur le contrôle des chantiers ! L'Etat est exemplaire en matière de contrôle des chantiers, s'agissant du CEVA par exemple; et on s'est mis d'accord dans ce parlement. Ne pourrait-on pas une fois constater que c'est positif ? D'une façon générale, le contrôle des chantiers est exemplaire, avec le système des badges inventé ici par la SSE. Alors on peut toujours faire mieux, et je vous assure qu'on lutte contre le dumping salarial, et que les employeurs, c'est vrai, nous demandent des conditions propices à un combat loyal, pour que la loyauté des affaires puisse s'appliquer. Mais s'il vous plaît, prenons acte du fait qu'en 2015 on a constaté une progression du contrôle des chantiers, dans un sentiment de satisfaction générale exprimée par les partenaires sociaux; nous sommes plutôt un des cantons à la pointe pour ce thème.

Au sujet de la LRDBHD, on est complètement hors sujet puisque c'est précisément en 2016 que cette loi déploie ses effets. Les Verts sont le seul groupe politique à ne pas avoir voté cette loi. Nous en avons pris acte. Ils peuvent revenir à loisir là-dessus, ils n'y parviennent pas pour le moment. Nous discuterons en commission des conditions dans lesquelles la loi se déploie, mais j'aimerais relever que votre Conseil a soutenu à une très large majorité en 2015 cette nouvelle loi qui n'avait pas été revue depuis 1932. J'espère aussi qu'en 2016 on pourra constater le soutien, dans un grand mouvement majoritaire, à la prochaine loi économique que je propose de modifier, celle relative aux taxis; ce sera sans doute pour le mois de septembre. Voilà, Monsieur le président, ce que je pouvais dire dans l'ensemble sur les différentes questions posées.

Du point de vue du gouvernement, la politique publique L... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...incarne un certain nombre de succès collectifs, de l'ensemble du collège, dans ce domaine d'activité. Mais comme toujours en économie, selon la fameuse maxime, quand on s'observe, on se désole, quand on se compare, on se console. Je vous invite maintenant à nous comparer, à nous comparer à la France voisine qui vit des situations économiques dramatiques; à constater que nos conditions-cadres ne se sont pas tant détériorées que cela; que nous avons été au rendez-vous sur tous les grands chantiers; que nous avons au-devant de nous de grandes perspectives, notamment avec l'aéroport, dont je me réjouis de discuter, car c'est encore devant nous, rien n'est fait et rien n'est définitivement arrêté; et surtout que nous avons tout pour bien faire à un moment clef de notre histoire où, entre le Brexit, le franc fort, l'application de l'initiative sur l'immigration de masse et la réforme sur l'imposition des entreprises, en réalité tous les grands enjeux sont devant nous. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à vous prononcer sur cette politique publique.

Mise aux voix, la politique publique L «Economie» est adoptée par 49 oui contre 13 non et 23 abstentions.

Cinquième partie du débat sur les comptes 2015 (fin du 2e débat et début du 3e débat): Séance du vendredi 24 juin 2016 à 10h