République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 22 janvier 2015 à 20h30
1re législature - 2e année - 1re session - 2e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Antoine Barde, président.
Assistent à la séance: MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Serge Dal Busco, Mauro Poggia et Luc Barthassat, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Pierre Maudet, Anne Emery-Torracinta et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Murat Julian Alder, Edouard Cuendet, Emilie Flamand-Lew, Pierre Weiss et Ronald Zacharias, députés.
Députés suppléants présents: Mme et MM. Alexis Barbey, Christian Decorvet, Magali Origa, Charles Selleger et Yvan Zweifel.
Annonces et dépôts
Néant.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de M. Jean Batou. Je prie Mme le sautier de le faire entrer, et l'assistance de bien vouloir se lever. (M. Jean Batou entre dans la salle du Grand Conseil et se tient debout, face à l'estrade.)
Monsieur Jean Batou, vous êtes appelé à prêter serment de vos fonctions de député suppléant au Grand Conseil. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- de prendre pour seuls guides dans l'exercice de mes fonctions les intérêts de la République selon les lumières de ma conscience, de rester strictement attaché aux prescriptions de la constitution et de ne jamais perdre de vue que mes attributions ne sont qu'une délégation de la suprême autorité du peuple;
- d'observer tous les devoirs qu'impose notre union à la Confédération suisse et de maintenir l'honneur, l'indépendance et la prospérité de la patrie;
- de garder le secret sur toutes les informations que la loi ne me permet pas de divulguer.»
A prêté serment: M. Jean Batou.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment. La cérémonie est terminée. Dès maintenant, vous pouvez siéger. (Applaudissements.)
Le président. Je passe la parole à M. Patrick Lussi.
M. Patrick Lussi (UDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le groupe de l'Union démocratique du centre a l'honneur - parce que c'en est un - de vous présenter la candidature de Mme Christina Meissner. Un rapide panégyrique, pour ceux qui feindraient de ne pas trop la connaître: entrée en 2009 au Grand Conseil, elle est actuellement dans sa deuxième législature. Elle conduit avec brio le groupe UDC, qu'elle mène depuis deux ans, tant par ses propositions que par la concertation et la collaboration. Vous savez qu'elle est également très active dans sa commune; elle est aujourd'hui présidente du Conseil municipal. On n'est pas en train de faire l'éloge d'un futur président du Grand Conseil, mais vraiment, c'est une femme d'engagement, c'est une femme de parole, c'est une femme d'action. Certains, chez nous, vous diront peut-être qu'elle a une fibre trop verte; mais est-ce que le vert est vraiment une couleur politique ? N'est-ce pas plutôt un état d'esprit ? Comme militante UDC, c'est certainement l'état d'esprit de notre candidate qui fait qu'elle est très appréciée. Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande, sans aucune hésitation, de l'élire à la deuxième vice-présidence de notre Grand Conseil ! Je vous remercie. (Applaudissements.)
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Le groupe des Verts présente à la deuxième vice-présidence M. François Lefort. Elu dans cette... (Exclamations. Commentaires.)
Une voix. Non !
Mme Sophie Forster Carbonnier. Parfait. Je disais, élu dans ce Grand Conseil depuis 2009, François Lefort vous est particulièrement connu pour ses envolées parfois enflammées et cocasses, mais toujours pertinentes. M. Lefort a un profond respect pour les institutions, contrairement à certains. Vous n'ignorez pas ses nombreuses compétences, puisqu'il a présidé la commission de l'aménagement ainsi que la commission de l'environnement et de l'agriculture. M. Lefort est membre du Bureau depuis 2012. (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît ! Un peu de silence.
Mme Sophie Forster Carbonnier. Nous vous saurions donc fort gré de bien vouloir élire M. Lefort à cette deuxième vice-présidence, et de faire ainsi en sorte que la gauche ait également un siège au sein des vice-présidences de ce parlement. Je vous remercie, Monsieur le président. (Applaudissements.)
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs, ce soir, nous assistons non pas à un parjure des partis, mais à un non-respect de l'équilibre qui fait que nos institutions peuvent fonctionner. Le MCG ne proposera personne pour la deuxième vice-présidence mais soutiendra la deuxième vice-présidence de la candidate UDC, qui a brillamment été présentée par notre collègue Patrick Lussi. Aujourd'hui, vous voulez, comme au loto, mettre un grand coup de sac dans les numéros. Vous êtes en train de déstabiliser les institutions, de déstabiliser le Grand Conseil. (Commentaires.) Vous êtes en train de bafouer ce qui a été convenu, dans une liste, au début de la législature, qui établit une juste répartition des présidences de commission en fonction des forces politiques représentées ici, issues du vote populaire.
Mais il y a plus grave, Mesdames et Messieurs. Vous lirez certainement dans les journaux demain que l'actuel président du Grand Conseil a commis ce qui, pour moi, est irréparable, et une plainte pénale sera déposée dans les quarante-huit heures. (Protestations.) Je vous le dis, Mesdames et Messieurs: si j'avais accepté quelques livraisons de mazout supplémentaires à la ville d'Onex, l'issue du vote aurait été différente ce soir ! Et j'assume mes propos; je les ai tenus sur «Forum» à 18h45, je ne suis donc pas couvert par l'immunité parlementaire. Maintenant ce sont le pouvoir judiciaire et le procureur général qui auront à se prononcer sur ce que je viens de vous annoncer ce soir. Alors je vous le demande, Mesdames et Messieurs: voulez-vous que cette année 2015 soit la pire que le Grand Conseil ait jamais connue ? (Brouhaha. Commentaires.) Vous en prenez le chemin ! Aujourd'hui, deux petits partis du Grand Conseil bafouent les accords qui ont été conclus dans un consensus, dans le respect des institutions ! J'ai nommé ici le PDC...
Le président. Monsieur Stauffer, il vous faut conclure !
M. Eric Stauffer. ...et les Verts ! (Protestations. Applaudissements.) Alors je vous le dis, Mesdames et Messieurs...
Le président. Merci, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. ...prenez garde à ce que vous faites ce soir !
Le président. Je vous remercie, il faut conclure !
M. Eric Stauffer. Non-respect d'une parole donnée... (Le micro de l'orateur est coupé. L'orateur continue à s'exprimer hors micro.)
Le président. Merci ! (Protestations. Applaudissements.) S'il vous plaît ! Monsieur Buchs, vous avez demandé la parole ?
M. Bertrand Buchs (PDC). Oui, Monsieur le président, je vous remercie. (Brouhaha.) Si le parti démocrate-chrétien n'a pas soutenu une candidature MCG, c'est parce que son candidat a dépassé les bornes... (Vives protestations.) ...et s'est comporté d'une façon scandaleuse !
Le président. Silence, s'il vous plaît !
M. Bertrand Buchs. Et quand on veut être président... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et premier citoyen du canton, on doit respecter les lois, un point c'est tout ! (Protestations.)
Le président. Mesdames et Messieurs, s'il vous plaît, un peu de tenue ! Monsieur Lussi, vous avez demandé la parole ?
M. Patrick Lussi (UDC). Oui, Monsieur le président, je vous remercie. Notre candidature étant pour le moins attaquée, j'aimerais simplement vous dire, Mesdames et Messieurs, chers collègues, le travail que nous faisons à longueur d'année. Pour moi, ce soir, ce n'est pas une élection partisane, c'est un tournus. Vous l'avez décidé au début, j'estime que c'est tout à fait logique, et notre candidate, Mme Christina Meissner, mérite tant par son travail que d'autres choses que vous lui accordiez toute votre confiance. J'espère que vous voterez en ce sens. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Monsieur Stauffer, vous n'avez plus la parole. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons procéder au vote. Je vous prie de regagner vos places et j'invite les photographes à bien vouloir quitter la salle. Les huissiers vont distribuer les bulletins de vote. (Les députés remplissent leur bulletin de vote.)
Si chacun a voté, je prie les huissiers de récolter les bulletins. (Quelques instants s'écoulent.) Je déclare le scrutin clos; je prie M. Lussi et les scrutateurs de bien vouloir se réunir à la salle Nicolas-Bogueret pour procéder au dépouillement. La séance est suspendue jusqu'à la proclamation des résultats.
La séance est suspendue à 20h44.
La séance est reprise à 20h54.
Le président. Mesdames et Messieurs, nous reprenons notre séance. S'il vous plaît, veuillez regagner vos places.
Résultats de l'élection d'une ou d'un deuxième vice-président-e du Grand Conseil:
Bulletins distribués: 96
Bulletins retrouvés: 96
Bulletins blancs: 6
Bulletins nuls: 8
Bulletins valables: 88
Majorité absolue: 45
Est élue: Mme Christina Meissner (UDC), avec 50 voix. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Obtient des suffrages: M. François Lefort (Ve), 32 voix.
Le président. Je prie Mme Christina Meissner de bien vouloir rejoindre le Bureau.
Le président. Nous poursuivons notre ordre du jour. Nous allons procéder au vote; je vous prie de regagner vos places. (Brouhaha. Remarque.) Non, d'abord ce serait bien qu'on ait des candidats ! (Rires.) Je passe la parole à M. Voumard.
M. Jean-Marie Voumard (MCG). Merci, Monsieur le président. Nous présentons, pour le Bureau, la candidature de notre excellent mentor, comme on le nomme dans la presse: Eric Stauffer. Merci.
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Le groupe des Verts présente, pour le Bureau, la candidature de M. François Lefort. Je vous remercie.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Monsieur le président, le groupe socialiste présente la candidature de Mme Salima Moyard, en espérant que celle-ci soit bien accueillie.
Mme Salika Wenger (EAG). J'ai le plaisir et l'honneur de vous présenter la candidature de mon camarade Christian Zaugg, dont je n'ai pas à vanter les qualités, vous les connaissez toutes ! (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, nous avons nos candidats. Il n'y a plus de prise de parole, Monsieur Stauffer. (Remarque.) Si vous voulez présenter quelqu'un, je vous passe la parole.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci. Le groupe MCG présente, pour les Verts, l'excellente députée Lisa Mazzone, présidente du parti des Verts. Au MCG, nous pensons qu'elle serait tout à fait à même de remplir la fonction de membre du Bureau. Nous vous demandons donc de bien vouloir voter pour Mme Lisa Mazzone. (Exclamations. Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Le président. Madame Mazzone, est-ce que vous acceptez d'être candidate ? (Mme Mazzone manifeste son refus. Huées.) Mme Mazzone ne sera donc pas candidate. Monsieur Buchs, vous avez demandé la parole ? (Remarque.) C'est une erreur. Mesdames et Messieurs, nous allons procéder au vote. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places et remercie les huissiers de distribuer les bulletins de vote. Ce vote concerne les quatre membres du Bureau, je vous prie d'inscrire les noms des candidats ou des candidates sur le même bulletin ! (Les députés remplissent les bulletins.)
J'invite les huissiers à récolter les bulletins. (Quelques instants s'écoulent.) Le scrutin est clos. Je prie la deuxième vice-présidente ainsi que les scrutateurs de bien vouloir se rendre à la salle Nicolas-Bogueret pour le dépouillement. En attendant le résultat de l'élection, je suspends la séance.
La séance est suspendue à 21h03.
La séance est reprise à 21h17.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons notre séance, je vous prie de regagner vos places.
Résultats du premier tour de l'élection de quatre membres du Bureau du Grand Conseil:
Bulletins distribués: 98
Bulletins retrouvés: 98
Bulletin blanc: 1
Bulletin nul: 0
Bulletins valables: 98
Majorité absolue: 50
Sont élus au premier tour: M. Christian Zaugg (EAG), avec 56 voix. (Applaudissements.) Mme Salima Moyard (S), avec 50 voix. (Applaudissements.) M. François Lefort (Ve), avec 50 voix. (Applaudissements.)
Obtient des suffrages: M. Eric Stauffer (MCG), 49 voix. (Applaudissements.)
Le président. Je prie M. Christian Zaugg de bien vouloir rejoindre la tribune.
Nous allons procéder au second tour pour l'élection d'un membre du Bureau. Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie de regagner vos places, les huissiers vont distribuer les bulletins de vote. Je vous rappelle que le deuxième tour a lieu à la majorité relative. (Les huissiers distribuent les bulletins.) Il semblerait que je n'aie pas été clair: nous sommes au deuxième tour de l'élection d'un membre du Bureau. Le candidat est M. Eric Stauffer. Il n'y en a manifestement pas d'autre. Monsieur de Sainte Marie, vous ne pouvez pas prendre la parole. (Les députés remplissent les bulletins.)
Le scrutin est clos. Je prie la deuxième vice-présidente ainsi que les scrutateurs de bien vouloir se rendre à la salle Nicolas-Bogueret pour le dépouillement. En attendant le résultat de l'élection, je suspends la séance.
La séance est suspendue à 21h23.
La séance est reprise à 21h30.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie de regagner vos places, nous reprenons notre séance.
Résultats du deuxième tour de l'élection de quatre membres du Bureau du Grand Conseil:
Bulletins distribués: 96
Bulletins retrouvés: 96
Bulletins blancs: 17
Bulletins nuls: 31
Bulletins valables: 65
Est élu au deuxième tour: M. Eric Stauffer (MCG), avec 48 voix. (Applaudissements.)
Premier débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons les affaires courantes de notre ordre du jour. (Brouhaha.) Est-ce que je peux avoir un peu de silence, s'il vous plaît ! Les grâces seront traitées demain. (Brouhaha.) S'il vous plaît ! Merci. Pour ce PL 11401-A, nous sommes en catégorie II, quarante minutes. Je remercie les rapporteurs de bien vouloir prendre place. Je passe la parole au rapporteur de majorité, Mme Frédérique Perler.
Mme Frédérique Perler (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Concernant l'introduction de la question orale dans ce Grand Conseil, j'aimerais vous rappeler, en préambule, que les questions orales ont existé par le passé, pour être ensuite supprimées pour les raisons que l'on sait. S'agissant des travaux en commission, les discussions ont eu lieu en deux temps. Dans un premier temps, la majorité a tiré la conclusion que ce projet de loi n'était pas conforme à la constitution genevoise de par l'article 91, alinéa 2, qui définit très clairement les compétences de ce Grand Conseil, qui consistent à voter les lois et le budget. Dans un deuxième temps, nous nous sommes posé la question de l'utilité de réintroduire la question orale. Au sujet du premier point, je viens de le rappeler, la constitution définit les attributions de ce Grand Conseil de manière très claire; toute autre forme d'expression contreviendrait donc à la constitution genevoise et nécessiterait une modification de celle-ci.
Sur la deuxième question, un peu plus théorique, de l'utilité d'introduire la question orale, la majorité de la commission a conclu que dans la dynamique actuelle de ce Grand Conseil, cela retarderait les travaux de l'ordre du jour et constituerait donc une perte de temps importante, et que ce PL n'avait finalement pas d'autre but que celui de mettre le Conseil d'Etat dans l'inconfort en lui posant un certain nombre de questions. S'en est ensuivi le gel de ce projet de loi pendant quelques semaines, afin que les auteurs puissent rédiger un amendement qui le rende compatible avec la constitution genevoise ou le retirer. Les signataires ont souhaité rédiger un amendement général, amendement qui, au final, amènerait à ce Grand Conseil un surcroît de préparation puisque très subtilement, les initiants ont prévu qu'il s'agirait, en fait, de déposer une question écrite sur le bureau du Grand Conseil, que celle-ci soit ensuite distribuée aux groupes, qui pourraient alors s'exprimer sur cette question pendant trois minutes chacun, et que le Conseil d'Etat y réponde oralement puis par écrit. La majorité de la commission en a conclu que c'était une inutilité et que les questions écrites urgentes ou les questions écrites suffisaient largement, évitaient de mettre le Conseil d'Etat dans l'inconfort et de créer un travail inutile pour l'administration. Comme le rappelle M. Amaudruz dans son rapport de minorité, la commission n'a pas pu se prononcer sur son amendement; cela étant, quand bien même cet amendement général rendrait ce projet de loi compatible avec la constitution, la commission a décidé de ne pas entrer en matière. Aussi, en tant que rapporteuse de majorité, je vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, de refuser ce projet de loi.
M. Michel Amaudruz (UDC), rapporteur de minorité. Je voudrais tout d'abord remercier Mme Perler pour l'excellent rapport qu'elle a rédigé, car celui-ci retrace de façon très objective le déroulement de nos débats. Lorsqu'on m'a prié de bien vouloir intervenir comme rapporteur dans ce projet de loi, j'étais pour le moins tiède et relativement songeur, parce que je me souvenais des questions orales au Conseil municipal, que j'appréciais principalement parce qu'elles me laissaient le loisir d'aller passer une bonne heure à la buvette ! Un peu d'ordre a ensuite été remis par rapport à ces questions orales au Conseil municipal, au grand dam, d'ailleurs, de M. Vanek - pour ne pas le citer - qui trouvait qu'il était intolérable qu'on ne laisse qu'une minute pour poser des questions.
J'étais donc songeur, mais je dois à la vérité qu'au cours des deux ou trois séances que l'on a eues pour examiner ce projet de loi, les opinions ont évolué. Si au départ la plupart des députés qui siégeaient dans la commission étaient réfractaires, petit à petit leur état d'esprit a changé et ils ont trouvé qu'en effet, une question orale pouvait apporter quelque chose de positif au déroulement de nos débats. Les avantages et les inconvénients allégués sont reproduits dans le rapport, on y reviendra peut-être dans le cadre de la présentation de l'amendement. Je relèverai simplement, puisque M. le président du Conseil d'Etat est là, que de nombreux députés redoutaient que la question orale ne fût un sujet de bouffonnerie de la part de certains partis politiques. Lorsque le parlement japonais a réintroduit la question orale, par exemple, la première question qu'un député a posée au premier ministre a été: «Monsieur le premier ministre, qu'avez-vous pris ce matin pour votre petit déjeuner ?» Pour ma part, je n'aurai aucun scrupule, Monsieur le président, à vous poser, par exemple, la question de savoir si ce matin vous vous êtes levé du pied gauche ! Ne serait-ce que pour m'assurer du bon déroulement des débats et n'avoir aucune confrontation avec vous-même ! (Commentaires.) Bien. Cela étant dit, par curiosité je me suis demandé ce qui se passait en dehors des murs de la révérende et austère cité de Calvin. Et je dois à la vérité que ce petit parcours de droit comparé confédéral et étranger m'a fait apparaître qu'en effet, en prolongement de la constitution, notre réglementation actuelle comportait une lacune. La quasi-totalité des parlements fédéraux régionaux prévoit une forme de question orale: en Angleterre, c'est une règle générale parce que l'on s'exprime de façon orale, ce qui n'empêche pas, d'ailleurs, certains honorables parlementaires de se livrer à des plaisanteries; en France, à l'Assemblée nationale, le mercredi, une heure est réservée à la question orale; au Bundestag, ou au Reichstag, le sénat allemand, également, dans les Länder aussi, enfin partout, on retrouve, je dirais, une formule qui permet le dialogue avec les représentants du gouvernement. Et je crois qu'à cet égard, notre système comporte une lacune, et qu'il serait bon de pouvoir avoir l'opportunité...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Michel Amaudruz. ...de dialoguer avec notre gouvernement. Alors je vais conclure en vous recommandant d'accepter ce projet de loi, sur lequel on reviendra dans le cadre de l'amendement, qui à mon sens apporte quelque chose de positif ! Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
M. Pierre Vanek (EAG). Ce projet de loi est d'une modestie extrême; ce projet de loi dit que dans ce parlement, une fois par session, les sept groupes devraient pouvoir poser une question de trois minutes au Conseil d'Etat. Trois fois sept égale vingt et un. Alors nous sommes très occupés, nous faisons des choses très importantes - nous venons de discuter pendant un certain nombre d'heures - et nous consacrerions le tiers d'une heure, vingt et une minutes, à poser des questions au gouvernement; une par groupe, en trois minutes. Il se trouve des députés, ici, qui sont prêts à refuser ce droit élémentaire d'un parlementaire de se lever et de poser des questions au gouvernement... (Commentaires.) ...sous des prétextes stupides et futiles, alors qu'il s'agit d'une mesure qui évidemment nous ferait gagner du temps ! Qui, évidemment, éviterait à Pierre Vanek de poser des questions écrites sur La Tulette, questions écrites qui entraînent ensuite des procédures incroyables, qui nécessitent de faire des sessions spéciales à huis clos pour savoir s'il faut le traduire devant les tribunaux et le crucifier ! (Commentaires.) Alors qu'on aurait pu, verbalement, poser une question, avoir une réponse... Enfin, le travail normal d'un parlement ! Parle-ment ! Alors certains mentent, oui... (Rires.) ...mais il y en a qui parlent ! Et puis c'est un droit démocratique élémentaire de parler, et c'est un droit démocratique élémentaire de poser... (Commentaires.) ...pas de hurler, certes... d'élever un peu la voix ! Mais c'est un droit démocratique élémentaire de poser des questions au gouvernement, merde ! (Rires. Exclamations. Commentaires.)
Le président. Je vous en prie, Monsieur le député !
M. Pierre Vanek. Mais qu'est-ce que c'est que ce Conseil d'Etat qui a besoin de se barricader derrière la constitution pour éviter que ne lui soient posées, une fois par mois, des questions de trois minutes ! Mesdames et Messieurs, vous connaissez ma faiblesse: j'ai un penchant gouvernemental terrible, mais c'est faire une injure affreuse au Conseil d'Etat que de penser qu'il ne puisse pas répondre avec une certaine intelligence, ou du moins une certaine compétence, à des questions que nous lui poserions ! En réalité, ce qui ne va pas avec ce projet de loi, ce sont ses limites extrêmes; on parle d'une question de trois minutes, par groupe, par session, bref, on bride déjà là de manière extrême le débat parlementaire, et on se barricade ensuite derrière la constitution ! Mesdames et Messieurs, vous pensez que le souverain a vraiment voulu, en votant à une très modeste majorité cette constitution, par ailleurs détestable sous bien des aspects... (Protestations. Applaudissements.) ...interdire à ses élus parlementaires de poser modestement - par groupe ! - une question de trois minutes au Conseil d'Etat ? Mais, Mesdames et Messieurs, j'en pleure de rire ! Enfin j'en pleurerais de rire si ce n'était pas un peu tragique ! Non, Mesdames et Messieurs, il n'y a aucun problème avec la constitution; elle liste un certain nombre de droits des parlementaires de déposer des projets de lois, des motions, ou autre...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Pierre Vanek. ...mais enfin, prétendre que cette constitution nous interdit de prévoir que, dans cette enceinte, des questions soient posées à M. Poggia, au président du Conseil d'Etat, au responsable du département des finances, ou que ce serait une violation...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Pierre Vanek. ...de l'ordre constitutionnel... (Commentaires.) Tout cela est absurde, tout cela est idiot, et je vous invite à voter le projet de loi tel quel, ou amendé si vous le voulez vraiment, mais quand même, un peu de respect pour la démocratie et un peu de respect pour le Conseil d'Etat; ce sont de grands garçons et de grandes filles, ils sauront nous répondre si on leur pose quelques questions. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Gabriel Barrillier.
M. Gabriel Barrillier (PLR). Merci, Monsieur le président, et félicitations ! Mesdames et Messieurs les députés, après ces déferlements de paroles, revenons sur terre ! Tout d'abord, j'aimerais rappeler que la question orale existait jusqu'en 2002, 2003...
Une voix. 2001 !
M. Gabriel Barrillier. 2001. Le jeudi, de 17h à 19h, on traitait les questions orales. (Commentaires.) Le résultat, c'est qu'on a supprimé cette possibilité, parce que, Monsieur le député, cher collègue, deux cents points de retard à l'ordre du jour se sont accumulés ! Et ça, ce n'est pas un hasard ! Et je me souviens que notre collègue qui a élevé la voix - il n'écoute pas...
M. Pierre Vanek. Religieusement !
M. Gabriel Barrillier. ...avait posé une question orale - je ne sais plus sur quel sujet c'était - et qu'il était tout seul, là, à sa place - vous étiez déjà un peu de ce côté-là de la salle... (Rires.) ...qu'on avait dû éteindre la lumière, que tous les députés étaient sortis... (Commentaires.)
Une voix. Un grand moment !
M. Gabriel Barrillier. Oui, voilà, il y en a qui se souviennent ! Et notre cher collègue continuait à pérorer dans l'ombre, dans la nuit... (Rires. Exclamations.) Voilà. Alors est-ce que c'était l'expression d'un droit démocratique du parlement, qui doit discuter de tout ? Non, soyons un peu sérieux. Vous avez fait des comparaisons avec d'autres cantons, avec la France, etc. J'étais hier encore à une session du Forum interparlementaire romand, et je vous rappelle que le député genevois a cinq outils à sa disposition: le projet de loi - nous sommes les seuls à en disposer avec Neuchâtel - la motion, la résolution, le postulat, ajouté par la constituante, et la question écrite. D'ailleurs, juste pour rire, j'ai vu que les Vaudois avaient inventé un nouveau système qui s'appelle la question orale écrite ! (Rires.) Elle ne doit pas dépasser mille caractères... (Brouhaha.) ...et le Conseil d'Etat doit répondre la fois suivante ! Quelle est la différence avec la question écrite prévue par la constitution ? Voyons ! Si vous voulez engorger et paralyser davantage le parlement, alors continuez dans cette voie ! Pour toutes ces raisons, il faut refuser ce projet de loi; c'est vraiment du bon sens. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Pascal Spuhler (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, j'ai écouté avec attention M. Barrillier, qui nous a parlé de 2001 ou 2003, de l'époque où l'on pouvait poser les questions oralement, et qui évoquait les deux cents points de l'ordre du jour. Aujourd'hui on a deux cents points et on ne pourrait plus poser de questions; c'est à se demander si à l'époque, quand on avait le droit aux questions orales, il y avait vraiment deux cents points, Monsieur Barrillier. Je ne crois pas ! Je n'ai pas souvenir... (Commentaires.) Je n'y étais pas mais je n'ai pas souvenir que mes collègues m'aient raconté qu'il y avait plus de deux cents points à l'ordre du jour. Et justement, toute la question est là, Mesdames et Messieurs ! Je pense sincèrement qu'en ayant la possibilité d'avoir quelques questions orales, qu'en consacrant quelques minutes, comme le disait M. Vanek, de votre précieux temps de députés à Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, on s'éviterait un certain nombre d'objets parlementaires, motions et résolutions, qui arrivent sur nos bureaux dès qu'un événement traverse les jours ou les nuits de Genève. Mesdames et Messieurs, M. Amaudruz l'a dit, la plupart des parlements, dans le monde entier, utilisent la question orale, et c'est un droit; c'est un droit que de parlementer, et je pense qu'une question directe est beaucoup plus simple à traiter que des objets parlementaires qui nous font perdre du temps quand on y travaille à quinze députés en commission, avec des rapports et de longues interventions en plénière pour justifier le pourquoi et le comment. Mesdames et Messieurs, limitez le nombre de questions, limitez le temps des questions si vous le voulez, mais adoptons ce projet de loi ! (Quelques applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Mme Béatrice Hirsch (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, à entendre M. Vanek, on peut bien comprendre que théoriquement ce parlement ait envie de pouvoir poser des questions oralement au gouvernement. Le problème - et c'est là où la théorie et la pratique s'affrontent - c'est qu'on a bien entendu ce qu'a dit M. Barrillier sur la démonstration de M. Vanek et ce qui se passait auparavant. Alors qu'en serait-il aujourd'hui si nous adoptions ce projet de loi ? Je pense que bon nombre d'entre nous peuvent facilement l'imaginer, et c'est ce dont il a été question à la commission des droits politiques. Il s'agirait de questions particulièrement polémiques, et, oui, cela prendrait beaucoup de temps. Désolée, Monsieur Vanek, mais vous avez oublié, dans votre décompte, la réponse du gouvernement. A la base, le calcul du temps doit comprendre la question et la réponse, parce que si le but n'est que de poser des questions, alors j'ai un petit peu de peine à comprendre l'objectif. (Remarque.)
Ensuite, M. Spuhler nous dit qu'en fait on réduirait l'ordre du jour si on posait davantage de questions. J'ai envie de dire à M. Spuhler - vous transmettrez, Monsieur le président - que dans mon idée, et selon la discussion que l'on a eue à la commission des droits politiques, la question orale pourrait éventuellement remplacer la question écrite. Or, je n'ai pas l'impression que la question écrite occupe beaucoup de notre temps au parlement - éventuellement quand on lit la liste des questions écrites auxquelles il a été répondu. Pour le reste, je ne vois pas très bien comment une question orale pourrait remplacer un projet de loi ou une motion. Par conséquent, et j'aimerais reprendre l'expression de mon collègue Gabriel Barrillier, il s'agit juste de bon sens ! Si l'on veut travailler convenablement, concrètement et faire avancer les choses, ce n'est pas avec des questions polémiques posées au gouvernement, comme ça, rapidement, le jeudi soir, qu'on y arrivera. Refusons l'entrée en matière sur ce projet de loi et continuons à avancer dans notre ordre du jour. Quand nous aurons épuisé les deux cents points et que nous en serons à zéro, peut-être qu'on pourra se demander comment faire pour utiliser notre temps. Je vous remercie, Monsieur le président. (Quelques applaudissements.)
M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, c'est extraordinaire, quand on a un sujet simple, comme on arrive, par des dérives, à le compliquer, à amener des arguments qui n'en sont pas sur le fond, en l'occurrence à dire que cela va paralyser le travail et créer je ne sais quoi. Mesdames et Messieurs les députés, dites-moi où, quand, comment, lorsqu'on pose une question qui n'a rien à voir, fondamentalement, avec l'ordre du jour... Comme l'a dit M. Barrillier, nos objets parlementaires, il faut d'abord les rédiger, il faut les envoyer, on a un délai, ensuite ils passent à l'ordre du jour... Pourtant, chaque semaine - je crois que pour une fois M. Vanek a bien expliqué la situation - il y a des questions qui se posent par rapport à des événements qui ont eu lieu vingt-quatre ou quarante-huit heures avant nos séances ! En tant qu'UDC, je n'ai pas honte de dire, Monsieur le président du Conseil d'Etat, que s'il y avait eu des questions ce soir, j'aurais aimé interpeller le Conseil d'Etat genevois sur cette arrestation d'un type que j'ai vu, qui donnait des corans à la place du Molard alors que nous avions un stand juste à côté ! C'est de ce genre de choses qu'il s'agit. Il ne faut donc pas dire qu'on va ralentir les travaux; je crois que la démonstration a été faite qu'auparavant il y avait... Non, Mesdames et Messieurs, plusieurs choses se font - d'ailleurs l'UDC interviendra à ce sujet - et je pense qu'on est dans une forme de dérive qui va dans le sens du déni de notre démocratie; le parlementaire devient l'empêcheur de tourner en rond, l'empêcheur de faire ce que l'on veut. Même M. le président du Conseil d'Etat l'a dit dans son discours, les choses ne sont pas simples. Mais comment peut-on mettre à mal un conseiller d'Etat en lui posant une question sur l'actualité et en lui demandant simplement son sentiment ? On ne lui demande pas de sortir un règlement, non, simplement ce qui se passe. Alors est-ce que ce n'est plus le lieu d'entendre, est-ce que ce n'est plus le lieu de savoir, est-ce qu'en somme les députés ne sont là que pour faire des écrits, que pour presser un bouton, et n'ont le droit d'être informés qu'une heure avant la presse de ce qui se passe ? C'est l'objet de ce projet de loi, raison pour laquelle, pour le moment, l'Union démocratique du centre vous demandera d'accepter l'entrée en matière, puis nous reviendrons sur les amendements. Je vous remercie.
M. Cyril Mizrahi (S). Mesdames et Messieurs... (Le micro de l'orateur fait du bruit.) C'est moi qui fais ça ? Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'entends quelques députés nous parler de démocratie pour justifier ce projet de loi, et je suis quand même un tout petit peu surpris. Ce soir, je n'ai pas de peine à me faire, une fois de plus, le gardien du temple. Pourquoi ? Parce que quand on parle de démocratie, Monsieur Vanek, il faut commencer par reconnaître que lorsqu'on a une majorité qui vote un texte qui est le texte suprême de ce canton, eh bien il faut le respecter ! 54%, c'est une majorité, ce ne sont pas les 46% restants qui vont décider. (Commentaires.) Si, c'est exhaustif ! Je vais vous lire ce texte. (Un instant s'écoule.) Je n'arrive pas à l'avoir sous les yeux, mais il définit clairement les modes d'intervention, dit clairement que chaque député, que chaque membre du parlement intervient par des projets de lois, par des résolutions, par des motions ou par des questions écrites ! Il ne mentionne pas les questions orales. Et si vous regardez les travaux parlementaires par rapport à cette disposition de l'article 91 - Monsieur le président, vous transmettrez - vous verrez qu'ils sont extrêmement clairs: il y avait une volonté de fixer un numerus clausus des modes d'intervention, comme élément minimal - on peut être d'accord ou pas - pour cadrer un tout petit peu les travaux de ce Grand Conseil. J'entends ensuite que nous sommes muselés; il ne faut quand même pas exagérer ! Je crois que nous avons la possibilité de nous exprimer, ce n'est pas l'absence de question orale qui va faire que nous ne pourrons pas y parvenir. Je vous rappelle quand même qu'il existe des questions écrites, sur lesquelles on peut avoir une réponse assez rapidement. Que croyez-vous pouvoir obtenir comme réponse, chers collègues, si vous posez une question technique à laquelle le conseiller d'Etat, la conseillère d'Etat, doivent répondre immédiatement ? La plupart du temps, ce seront des réponses superficielles.
J'aimerais également dire que l'amendement général qui est présenté n'est clairement pas compatible non plus ! Il tord le texte constitutionnel pour dire qu'on va pouvoir développer oralement une question écrite. Non ! Une question écrite est une question écrite, il y est répondu très rapidement...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Cyril Mizrahi. ...et elle permet de traiter - merci, Monsieur le président - les questions d'actualité également. Le dernier argument est financier; je suis un peu surpris d'entendre certaines formations, très attachées aux finances publiques, nous dire que cela ne pose pas de problème de dépenser 100 000 F de plus ou de prolonger encore nos travaux. Est-ce que vous croyez que vous allez faire avancer un tant soit peu le schmilblick avec cet instrument de la question écrite développée oralement ? Eh bien moi, je pense que non et je vous incite à voter contre ce projet de loi, et le groupe socialiste avec moi.
Le président. Monsieur le député, je vous dois des excuses. (Un instant s'écoule.) Monsieur le député ? Je vous dois des excuses car il vous reste encore une minute ! (Exclamations. Brouhaha.)
M. Cyril Mizrahi. Je reprendrai la parole si le besoin s'en fait sentir, Monsieur le président !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Mathias Buschbeck.
M. Mathias Buschbeck (Ve). Je vous remercie, Monsieur le président. Les Verts et moi-même avons une certaine sympathie pour ce projet de loi, puisque effectivement il vient d'une pratique qu'on connaît au Conseil municipal. Personnellement, j'usais et abusais de cette possibilité qui nous était offerte. (Commentaires.) J'entends bien qu'elle serait extrêmement agréable, elle aurait même un effet thérapeutique; si quelque chose nous ennuie, on pourrait venir dans la salle et dire: «Monsieur le président du Conseil d'Etat, pourquoi ai-je marché dans une crotte de chien en venant ici ?» et on se sentirait mieux ! Maintenant, ce n'est pas pour se sentir mieux après avoir posé notre question orale qu'on est élu, mais c'est effectivement pour faire fonctionner ce parlement. Il y a trois bonnes raisons pour lesquelles nous allons refuser ce projet de loi.
La première - et cela a été dit - c'est notre ordre du jour. Vous l'avez tous, il comporte deux cents points, il comprend des objets que nous avons tous déposés, des motions, des projets de lois dont on aimerait qu'ils soient traités si possible dans un délai qui leur permette d'avoir encore du sens. Des textes qui attendent plus d'une année, plus de deux ans, plus de trois ans avant d'être traités n'ont plus beaucoup de pertinence et c'est bien dommage. Alors si on passe une heure à poser des questions et à y répondre, sur quoi ce temps sera-t-il pris ? C'est à peu près 10% d'une séance du Grand Conseil qui partirait ainsi dans les questions orales.
Deuxième raison: il a été dit que nous étions un parlement et que nous étions là pour parler, mais, contrairement au Conseil municipal, nous sommes aussi un législatif. Au Conseil municipal, la question orale est très utilisée pour changer une pratique de l'administration; au Grand Conseil, si on veut changer une pratique de l'administration, on dépose un projet de loi. C'est donc la deuxième raison qui fait que la question orale est moins utile.
Enfin, la raison peut-être principale, c'est que la question urgente écrite n'existe pas au Conseil municipal; effectivement, il y a la question écrite, mais le Conseil administratif a de nombreux mois pour y répondre. Ici, après un mois une réponse doit être donnée, et je pense que c'est la meilleure façon de donner des réponses aux questions que se posent les députés. Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs, je vous encourage à refuser ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Pascal Spuhler, pour une minute et vingt secondes.
M. Pascal Spuhler (MCG). Merci, Monsieur le président. Mais dans quel parlement sommes-nous pour qu'on nous muselle à ce point-là ? J'entendais Mme Hirsch - vous transmettrez, Monsieur le président - qui disait que mes propos n'étaient pas justifiés, que l'ordre du jour n'allait pas diminuer, en tout cas pas le nombre de résolutions et de motions puisque c'est de cela que je parlais. Peut-être ! Mais au moins, Madame Hirsch - vous transmettrez toujours, Monsieur le président - ça diminuera peut-être le nombre de questions écrites qui encombrent les services de nos magistrats et font travailler des fonctionnaires ! C'est sûr que cette quantité de travail là va diminuer.
Par ailleurs, je pense que ce parlement n'a pas à avoir peur de clowneries ou de questions farfelues ! Je prendrai comme exemple - et M. Buschbeck l'a dit tout à l'heure - le Conseil municipal de la Ville de Genève. On sait que ce parlement est un peu agité, et pourtant la séance des questions se passe très bien, les questions sont sobres et les réponses sont simples. Cela permet d'avoir un contact direct et aussi de savoir, Mesdames et Messieurs, ce qui n'est pas inintéressant, si nos magistrats maîtrisent un petit peu leurs dossiers et leur département ! Je ne peux donc que vous recommander d'adopter ce projet de loi. Je vous remercie !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Lionel Halpérin, pour une minute et dix secondes.
M. Lionel Halpérin (PLR). Merci, Monsieur le président. Monsieur le président, chers collègues, nous sommes ici confrontés à un sujet d'importance pour notre parlement, c'est celui de son efficacité. La nouvelle constitution a effectivement prévu un certain nombre - et un nombre limité - de possibilités, pour les députés, d'intervenir. Le nombre de ces possibilités est relativement grand, mais il a été fixé, et il est clair que la volonté des constituants était d'avoir un nombre exhaustif d'interventions possibles, mais certainement pas qu'on puisse en ajouter d'autres, l'objectif étant de cadrer un peu les débats du Grand Conseil. Mais au-delà de cette question de cadrage, c'est aussi pour s'assurer qu'on va pouvoir accomplir le travail qui nous incombe, c'est-à-dire le travail législatif. Nous passons un temps incommensurable, dans ce parlement, à faire tout sauf rédiger des lois et les voter. Je pense qu'il est donc essentiel, maintenant, qu'on arrive à se recentrer; c'est le travail de notre législature que de repenser notre mode de fonctionnement. Cela semble déjà difficile à faire, mais si la manière de le repenser c'est en réalité d'ajouter encore des instruments supplémentaires avec pour seul objectif de polluer encore un peu plus les débats et de faire en sorte que vraiment, nous soyons d'une inefficacité totale, alors effectivement, nous devons remettre en cause notre mandat de député.
Une voix. Très bien, bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Bernhard Riedweg pour une minute et trente-cinq secondes.
M. Bernhard Riedweg (UDC). Je suis d'accord avec vous en ce qui concerne le temps, merci ! (Exclamations.) Je n'aurai pas besoin d'autant. La question orale n'entraîne aucun coût supplémentaire, puisqu'il n'y a pas de temps de préparation pour la réponse. Par contre, cela nécessite la présence de l'ensemble de l'exécutif à la plénière durant une heure environ, chaque parti ayant le droit de ne poser qu'une seule question à n'importe quel conseiller d'Etat. Une réponse spontanée et succincte de la part du Conseil d'Etat est en général honnête et ne prête pas à interprétation. Il est préférable de poser une question orale d'actualité lors d'une séance plénière, plutôt que d'apprendre les réponses par la presse. Merci, Monsieur le président.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. La parole est à M. Jean-Michel Bugnion, pour deux minutes.
M. Jean-Michel Bugnion (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, dans la vie quotidienne, la fonction d'une question est de servir à recueillir une information. Jusqu'à présent, je peux vous dire qu'à chaque fois que j'ai posé une question à la conseillère d'Etat ou à un conseiller d'Etat, je ne sais pas vous, mais personnellement, j'ai obtenu l'information souhaitée. (Remarque.) Si vous voulez faire figurer des questions d'ordre politique, ce n'est donc pas pour obtenir des informations, c'est effectivement pour parlementer. Or, je trouve qu'on parlemente déjà suffisamment sans avoir besoin de consacrer une heure de plus à cet exercice dans lequel nous excellons. Je vous remercie !
M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président du Grand Conseil, je vous présente les félicitations du gouvernement pour votre élection.
Mesdames et Messieurs, je souhaite vous dire ici combien nous sommes attentifs au fait de savoir si vous entendez soumettre le Conseil d'Etat à la question orale. J'aimerais, Monsieur Vanek, vous démentir: le Conseil d'Etat n'est à aucun moment intervenu dans vos débats, il n'a pas la moindre opinion sur la façon dont vous devez organiser son interpellation, et je réfute les propos qui ont été les vôtres. C'est votre liberté la plus absolue d'imaginer les moyens parlementaires d'interagir avec le gouvernement. Nous nous plierons donc à votre décision, quelle qu'elle soit, comme nous nous plions à toute autre décision, sans la commenter. Nous avons d'ailleurs appris tout à l'heure que nous aurions demain un débat urgent sur la destinée du sablier du Millenium... (Rires.) ...qui, depuis 5501 jours, est dans un dépôt. Nous apprendrons demain pourquoi le 5502e jour de son dépôt il est tout à coup urgent d'en parler, au point que le Conseil d'Etat intervienne. (Applaudissements.) Nous serons là pour le faire... ou pas ! (Rires.) De la même manière, j'ai dû cet après-midi, au nom du gouvernement, répondre à des journalistes qui m'interrogeaient sur un projet de loi, alors là très curieux, qui consistait à donner à votre parlement un droit de veto sur les règlements du Conseil d'Etat. Ça, c'est une nouveauté qui, vraiment, est un ovni parlementaire et institutionnel, sur lequel vous aurez l'occasion de débattre. Mais là aussi, il vous appartiendra de savoir si vous entendez soumettre les règlements du Conseil d'Etat à un droit de veto de votre parlement; avec deux cents points de retard à l'ordre du jour, je vous laisse imaginer comment l'administration va être organisée lorsque nous en serons là. Mais n'anticipons pas ce débat passionnant, restons à celui de ce soir: vous êtes libres, évidemment, de vous organiser comme bon vous semble, et le Conseil d'Etat, toujours, répondra à vos questions ! (Quelques applaudissements.)
Des voix. Ah !
Le président. Je vous remercie, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais donc voter l'entrée en matière sur ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 11401 est rejeté en premier débat par 51 non contre 36 oui et 3 abstentions. (Remarque de M. Eric Stauffer.)
Le président. On va faire vérifier vos boutons. Je remercie un huissier d'aller contrôler les commandes de vote de M. Stauffer.
Premier débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous avançons dans notre ordre du jour. Nous sommes en catégorie II, quarante minutes. Je passe la parole au rapporteur de majorité, M. Christo Ivanov.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Ce PL 7526 avait deux objectifs, dont le principal visait à modifier, dans son article 2, la loi sur le Tribunal administratif et le Tribunal des conflits. Or, cette loi n'existe plus. (Brouhaha.) Cette disposition figure dans la LPAC. Par conséquent, la majorité de la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat vous demande de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Je vous remercie.
M. Christian Dandrès (S), rapporteur de minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous entamons ce soir, peut-être, le dernier chapitre d'une immense saga qui a débuté en 2009, avec un projet de loi déposé par le PLR, le PL 9275, qui en fait a lancé une réforme quasi permanente du statut de la fonction publique. Il restait encore en suspens ce projet de loi là, que la commission a traité assez rapidement, trop rapidement à mon sens, en 2013. Si on revient sur cette réforme, c'est parce qu'il y a eu une modification sur les modalités de licenciement du fonctionnaire: il faut qu'un motif fondé préside au licenciement, et la réintégration du fonctionnaire est supprimée lorsque après contrôle judiciaire, le tribunal ou la Cour de justice a considéré que l'Etat avait fait une erreur. Effectivement, la loi actuelle pose d'énormes problèmes parce qu'en somme, elle donne une marge de manoeuvre très importante à l'administration, à l'Etat employeur. C'est à lui de déterminer quel est le motif fondé, et même lorsque l'administration se trompe, lorsqu'elle licencie une personne sans respecter les principes du droit administratif ou les principes constitutionnels, tels le droit d'être entendu, la proportionnalité, et même le motif fondé du licenciement, le fonctionnaire va quand même payer parce qu'il n'y aura pas de réintégration. Tout au plus pourra-t-il obtenir une indemnité, et encore, cette possibilité-là a été réduite par l'ancien Tribunal administratif - l'actuelle Cour de justice - puisque les juges ont considéré que si la personne retrouvait du travail dans le préavis de licenciement, elle n'avait même pas le droit de faire contrôler la légalité des décisions de l'administration, et qu'elle pouvait ensuite obtenir une indemnité sous déduction du montant qu'elle percevait de l'assurance-chômage, ce qui pose d'énormes difficultés. Ce projet de loi avait donc pour vertu de vouloir remédier à ce problème. Alors certes, M. Ivanov l'a relevé, il s'agit de modifications à des dispositions modifiées depuis lors; c'est la raison pour laquelle j'avais remis d'actualité ce projet de loi, en proposant en fait un amendement à l'article 31 de la loi actuelle, qui permet justement la réintégration du fonctionnaire. C'est à l'Etat de respecter la loi, c'est à l'administration de faire en sorte que la loi soit correctement appliquée, et s'il n'y a pas de motif fondé pour le licenciement, il n'y a pas de raison que le fonctionnaire perde son emploi.
M. Cyril Aellen (PLR). Il s'agit d'un projet de loi dont l'entrée en matière a été refusée dans le cadre de l'ancienne législature, avec une majorité qui, aujourd'hui, se retrouverait une minorité. Je partage donc l'avis du rapporteur minoritaire, exprimé à la fin de la page 7 de son rapport, à savoir qu'il serait bien d'apporter, si tant est que la majorité soit celle-ci, quelques modifications ou adaptations en fonction de la situation actuelle. Raison pour laquelle je propose un renvoi à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Est-ce que les rapporteurs veulent s'exprimer sur le renvoi en commission ? La parole est à M. le rapporteur de majorité.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Il faut effectivement renvoyer cet objet en commission.
M. Christian Dandrès (S), rapporteur de minorité. J'ai indiqué dans mon rapport que les travaux en commission avaient été bâclés sur cet objet; le groupe socialiste ne s'opposera donc pas au renvoi en commission.
Le président. Très bien. Mesdames et Messieurs les députés, je vais donc vous faire voter sur le renvoi à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 7526 à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat est adopté par 79 oui (unanimité des votants).
Premier débat
Le président. Nous abordons le point suivant de notre ordre du jour. Nous sommes en catégorie II, quarante minutes. Je passe la parole au rapporteur de majorité, M. Zweifel.
M. Yvan Zweifel (PLR), député suppléant et rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Nous avons affaire, ce soir, à un projet doublement emblématique. Emblématique d'abord sur le fond, puisqu'il concerne un sujet que tout le monde connaît bien ici, c'est la Banque cantonale, qui comme vous le savez a eu un coût des plus importants pour notre canton, et qui a donné lieu à bien des soirées de débat dans ce parlement sur différents points la concernant. Emblématique aussi, Monsieur le président, parce qu'il souligne la lenteur de nos institutions. Vous le savez, il s'agit ici d'un projet de loi déposé il y a plusieurs années déjà, traité, comme vous pouvez le lire dans le rapport de majorité de mon excellent collègue Pierre Weiss, lors des séances des 2 et 16 juin 2010, ainsi que le 9 février 2011. On est maintenant en 2015, et on en discute encore. Le rapporteur de majorité disait d'ailleurs - vous me permettrez de le citer, c'est à la page 2: «...et portant aussi sur la convention de remboursement, conclue en 2005 entre la BCGe et l'Etat, et valable jusqu'au 10 mars 2015, "qui pourra faire l'objet d'une nouvelle négociation dès 2014", pour autant que celle-ci soit renégociée un an à l'avance.» Il ajoutait: «C'est dire si le moment du dépôt de ce rapport de majorité permet d'envisager cette échéance avec sérénité au cas où, d'aventure, le PL 10242 viendrait à être accepté par ce Grand Conseil.» Il disait cela en 2011, nous sommes en 2015, de sérénité il n'y en a évidemment plus du tout ! A l'époque, Mesdames et Messieurs, et vous le découvrirez en lisant cet excellent rapport de majorité, la majorité de la commission des finances avait proposé à ce Grand Conseil le refus de l'entrée en matière. Le principal argument, Mesdames et Messieurs, était fondé sur un avis de droit du professeur Daniel Guggenheim, dont vous me permettrez de lire la première phrase de conclusion, à la page 50 du rapport: «Pour les motifs exposés plus haut, le PL 10242 ne me paraît pas satisfaire aux principes fondamentaux de droit administratif.» C'est cet argument, Mesdames et Messieurs, qui avait conduit la majorité de la commission à proposer le refus de l'entrée en matière.
Un des autres arguments, vous pouvez l'imaginer, c'est évidemment le risque qui pourrait être supporté par la Banque cantonale. Vous le savez, en 2008, suite à l'affaire des subprimes, les autorités bancaires au niveau mondial ont obligé les banques de nos pays occidentaux à avoir un montant de fonds propres, en regard de leurs actifs, beaucoup plus important qu'il ne l'était à l'époque. Ces exigences ont été reprises par la FINMA notamment via les règles de Bâle III. Elles ont été encore accentuées après le dépôt de ce projet de loi et après son étude par la commission des finances, avec des nouveautés qui sont arrivées entre-temps; je pense notamment aux lois FATCA aux Etats-Unis, et au volant de liquidités imposé par la FINMA et par la Banque nationale suisse.
Un autre argument consiste à se demander quel est l'intérêt, Mesdames et Messieurs, d'augmenter les remboursements de la Banque cantonale à l'Etat si le projet de loi fait que les résultats de cette même Banque cantonale, étant donné que ses fonds propres doivent être plus importants qu'à l'époque, sont moins positifs, et donc que les dividendes ordinaires versés à l'Etat sont plus faibles qu'à l'accoutumée. Ainsi, les remboursements augmenteraient mais les dividendes diminueraient; cela ne paraît pas extrêmement intéressant. Néanmoins, Mesdames et Messieurs, au nom du groupe PLR, je vous fais la proposition, puisque finalement nous sommes en 2015 et à moins de deux mois du renouvellement de cette convention de négociation, de renvoyer ce projet de loi...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Yvan Zweifel. Ça tombe bien, j'y arrivais ! ...à la commission des finances, pour que nous puissions entendre le Conseil d'Etat et qu'il nous explique, puisqu'en 2014 il est censé avoir renégocié cette convention avec la Banque cantonale, ce qui a été renégocié, et que nous puissions connaître les nouveautés de cette convention de remboursement. Mesdames et Messieurs, je vous fais donc la proposition de renvoyer cet objet à la commission des finances. Je vous remercie, Monsieur le président. (Quelques applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous avons donc une demande de renvoi à la commission des finances. Monsieur Stauffer, vous pouvez vous exprimer sur le renvoi.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, le renvoi en commission peut être une bonne chose, mais lorsqu'on veut tuer son chien, on prétend qu'il a la rage. Le rapporteur de majorité vous a expliqué que ce projet de loi avait déjà été débattu en 2010 et en 2011, et il vous a noyé de belles déclarations très techniques. On est en 2015, et moi je vais être beaucoup plus basique. La Banque cantonale de Genève - et ce n'est pas notre excellent collègue, ancien conseiller d'Etat, pourfendeur et sauveur de la BCGe en 2000, Christian Grobet, qui va me contredire... Oui, parce qu'en 2000 il y a eu une commission d'enquête parlementaire qui a procédé au sauvetage de cette banque. Alors on va passer les détails d'un procès au cours duquel on a su que des gens octroyaient des crédits pour des objets, avec des montants qui n'étaient pas du tout en corrélation avec les loyers à encaisser, ce qui signifie qu'ils savaient déjà, quand ils signaient ces actes de crédits hypothécaires, que le client ne pourrait jamais payer les intérêts... (Brouhaha.)
Le président. Monsieur le député...
M. Eric Stauffer. Je reviens sur le renvoi en commission - je vois qu'une ancienne membre du Bureau vous dicte votre conduite, Monsieur le président ! (Commentaires.) Ça m'amuse beaucoup, Madame Hirsch, mais peut-être voulez-vous remonter au Bureau...
Le président. Monsieur Stauffer, s'il vous plaît ! Merci de vous exprimer sur le renvoi en commission !
M. Eric Stauffer. Mais bien sûr. C'est ce que je suis en train de faire ! Donc, comme je le disais, on ne va pas revenir sur ce procès, on ne va pas revenir non plus sur les indemnités que ces mêmes banquiers inconscients... (Commentaires.) ...ont touchées de l'Etat après le procès parce qu'ils ont été blanchis - ils avaient apparemment agi de manière très intelligente et tout allait bien. Ce que je veux vous dire, c'est qu'aujourd'hui la BCGe gagne un peu plus de 100 millions par année...
Le président. Il vous faut conclure et nous dire si vous souhaitez renvoyer en commission.
M. Eric Stauffer. ...et sur les 2 milliards de dette qu'elle a, elle ne rembourse que 4 millions par année. Ça, c'est scandaleux; elle rembourse par le biais de dividendes, et l'Etat et les communes qui touchent ces dividendes doivent encore payer l'IFD là-dessus ! Donc on jette de l'argent par les fenêtres. Alors oui, Mesdames et Messieurs, nous aussi, au MCG, nous allons renvoyer ce projet de loi en commission, afin de voir encore combien d'années ce scandale de la BCGe auquel le Conseil d'Etat a procédé, et qui a augmenté la dette des Genevois... (Commentaires.)
Le président. Monsieur le député, je vous remercie !
M. Eric Stauffer. ...va perdurer !
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur le renvoi de ce projet de loi à la commission des finances.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10242 à la commission des finances est adopté par 91 oui (unanimité des votants).
Premier débat
Le président. Nous en sommes au PL 10883-A, catégorie II, quarante minutes. Monsieur le rapporteur de majorité, je vous passe la parole.
M. Benoît Genecand (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi a fait l'objet de traitements séparés en commission. Le premier a eu lieu entre novembre et décembre 2011 puis en janvier 2012, le projet de loi ayant ensuite été gelé pendant une période assez longue, soit jusqu'à septembre 2014, parce qu'il était question, à l'époque, de suspendre pendant deux ans le bouclier fiscal. Cette idée ne s'étant finalement jamais réalisée, ce projet de loi est revenu à la commission fiscale, qui l'a traité en septembre 2014.
De quoi s'agit-il, Mesdames et Messieurs ? Il s'agit d'augmenter la fiscalité des revenus, la fiscalité de la fortune, et de supprimer le bouclier fiscal. Il faut savoir qu'aujourd'hui, la fiscalité sur les revenus et sur la fortune, qui correspond aux articles 41 et 59 LIPP, connaît déjà une progressivité assez importante, avec toute une série d'échelons qui vont de 0% sur la tranche située entre 0 F et 17 000 F, à 8%, 9%, 10%, 11%, etc., jusqu'à 19% actuellement, qui est la tranche maximum. Or, le projet de loi prévoit de créer une nouvelle tranche de 20% et une autre de 22%. Ce n'est pas le taux effectif de la fiscalité, puisqu'il faut ajouter à cela le taux du centime additionnel cantonal. C'est la même chose pour la fortune: on prévoit là aussi d'ajouter une tranche - on s'exprime dans ce cas en pour mille. Vous trouverez tous les chiffres dans le rapport de la commission. La troisième proposition consiste enfin à supprimer l'article 60 dit du bouclier fiscal, et ces trois actions sont justifiées par le fait qu'elles amèneraient plus d'argent dans les caisses de l'Etat qui, selon les signataires, en a bien besoin.
La majorité de la commission vous propose de refuser ce projet de loi. Tout d'abord parce que la fiscalité genevoise, tant pour les revenus que pour la fortune, est déjà extrêmement progressive; c'est la fiscalité la plus progressive de Suisse. C'est aussi une fiscalité efficace: c'est celle qui permet, par personne, de prélever les montants les plus importants en Suisse, en francs, et donc de contribuer pleinement aux tâches de l'Etat. L'article 60, qu'on compte supprimer par ce projet de loi, prévoit qu'on ne peut pas demander aux contribuables de consacrer plus de 60% de leur revenu à l'impôt. Il faut savoir ici qu'on parle simplement de l'impôt, mais que s'ajoute quand même à ces 60% la contribution à l'AVS. Le contribuable est donc plus souvent au-dessus de 70%, ce qui, vous en conviendrez, est déjà une cote assez sévère pour ceux qui doivent la payer.
La majorité vous propose de refuser ce projet de loi également parce qu'elle a la conviction - même si sur ce plan on a parfois un peu un dialogue de sourds en commission - que cette augmentation générerait non pas une hausse des rentrées, mais une baisse. On l'a vu avec les baisses d'impôts décidées dans ce canton, les recettes effectives n'ont cessé d'augmenter. Ici, nous aurions donc tout simplement l'effet inverse. Au bout d'un moment...
Le président. Il vous reste vingt secondes.
M. Benoît Genecand. ...si vous augmentez la fiscalité, les francs que vous en obtenez sont dégressifs. Pour ces raisons, Mesdames et Messieurs, nous vous encourageons à rejeter ce projet de loi.
M. Romain de Sainte Marie (S), rapporteur de première minorité. Je ne vais pas rappeler le fonctionnement, ici, du bouclier fiscal, extrêmement bien résumé par M. Genecand, rapporteur de majorité. Toutefois, j'aimerais dire que cet élément-là a été inclus dans la votation sur la baisse d'imposition de 2009, qui était un paquet ficelé et correspondait à plusieurs mesures de baisses d'imposition, avec l'illusion que cette baisse d'imposition allait principalement favoriser la classe moyenne et les familles. (Brouhaha.) En réalité, il apparaît aujourd'hui que cette baisse d'imposition et l'instauration du bouclier fiscal avantagent surtout les plus grandes fortunes de ce canton.
Au-delà de ce rappel historique, il faut préciser que ce bouclier fiscal concerne 1300 personnes. Pour donner un exemple d'économies pour ces personnes fortunées - il faut les nommer ainsi, on parle de bouclier fiscal - il est estimé que pour les gens ayant entre 10 et 20 millions de francs, il s'agit d'une économie sur l'imposition de 7000 F, ce qui correspond à 0,07% de leur fortune. Avec une économie de 7000 F sur une fortune de 10 à 20 millions, on comprend que le bouclier fiscal n'apparaisse pas comme un réel outil d'attractivité fiscale. Par conséquent, à l'inverse, supprimer le bouclier fiscal ne semble pas être une mesure favorisant l'exode des grandes fortunes. Et là, il faut revenir sur la menace évoquée par le rapporteur de majorité et par son parti, précisément quant à l'exode des grandes fortunes. Une menace particulièrement théorique; on rappellera en effet qu'encore très récemment, à fin 2014, le magazine «Bilan» mentionnait une hausse des arrivées de multimillionnaires dans le canton de Genève. Aucune crainte de départ massif de la part de ces millionnaires, donc. Il faut également rappeler, puisqu'on entend souvent parler de l'imposition extrêmement importante du canton de Genève, que sur le revenu, le canton de Vaud a une imposition plus élevée sur les différents barèmes. Par ailleurs, je suis un peu surpris qu'on dise de cette imposition du canton de Genève qu'elle est si élevée, alors que depuis plus de dix ans, depuis 1998, on compte plus d'une dizaine de baisses d'impôts mais aucune hausse. Si on fait les calculs par année et qu'on cumule ces différentes baisses d'imposition, on arrive à un total perdu d'environ 940 millions de francs. Alors c'est sûr que si on perd 940 millions de francs sur environ quinze ans, on arrive rapidement à une dette qui est aujourd'hui de 13 milliards. Et les recettes du Conseil d'Etat et de la majorité de droite pour compenser cela sont très simples: taper là où ça fait mal, c'est-à-dire dans les prestations publiques pour les personnes qui en ont réellement besoin, soit les plus démunis et la classe moyenne.
J'aimerais rappeler également que le précédent Conseil d'Etat avait suggéré, dans le projet de loi 10903, la suspension provisoire de ce mécanisme de bouclier fiscal, instauré, donc, en 2009. David Hiler et le précédent Conseil d'Etat n'étaient pas les seuls à avoir eu cette idée, malheureusement le Grand Conseil ne les avait pas suivis. Pourtant, même M. Sarkozy...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Romain de Sainte Marie. ...ancien président de la République française, connu pour son socialisme invétéré, qui a mis en place le bouclier fiscal en France, l'a également supprimé après un certain temps, voyant à quel point cet élément créait des pertes de recettes pour l'Etat français. J'ai entendu également le Conseil d'Etat vouloir s'attaquer aux niches fiscales; eh bien ce soir, c'est le moment ! J'invite véritablement le Conseil d'Etat à soutenir ce projet de loi...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Romain de Sainte Marie. ...et à agir. La morale de l'histoire, c'est qu'on comprend qu'aujourd'hui, la politique fiscale menée par la droite revient à privilégier les plus grandes fortunes au détriment des personnes...
Le président. Merci, Monsieur le député !
M. Romain de Sainte Marie. ...les plus défavorisées dans ce canton, en coupant dans les prestations publiques...
Le président. Merci !
M. Romain de Sainte Marie. ...comme cela a récemment été fait.
Mme Magali Orsini (EAG), rapporteuse de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez compris qu'il s'agit de modifier le barème de l'impôt sur le revenu et celui sur la fortune et d'abolir le bouclier fiscal instauré en septembre 2009 qui octroie une protection fiscale aux plus riches de notre canton. Celle-ci consiste en fait à plafonner les impôts communaux et cantonaux sur la fortune et le revenu à 60% du revenu net imposable. Cette protection représentait, à l'époque, environ 45 millions de francs et touchait 1300 personnes. Celles-ci ont vu leurs impôts diminuer en moyenne de 30 000 F par personne. Dès le 24 octobre 2011, le groupe socialiste a fait remarquer le changement de paradigme budgétaire genevois et a estimé qu'il était temps de revenir sur ce nouveau cadeau aux plus fortunés de notre canton. Lors du débat sur le budget 2013, le Conseil d'Etat lui-même a demandé une suspension du bouclier fiscal pendant deux ans, vu la situation économique du canton. La proposition de modification du barème ne touche pas les classes moyennes, qui étaient le public cible pour justifier la baisse d'impôts. Une simulation du 22 novembre 2011 fait ressortir un gain de 50 millions avec la modification de l'impôt sur le revenu, 27 millions avec celui de l'impôt sur la fortune et 30 millions pour le bouclier fiscal. Ensemble à Gauche soutient ce projet de loi qui tend à rétablir une juste répartition de la charge fiscale entre les contribuables et à récupérer le revenu qui a été soustrait à l'Etat, en attendant son propre projet de loi qui, lui, vise à revenir sur la baisse linéaire de 12% opérée dès l'an 2000. Il est plus que jamais nécessaire de reprendre aux plus aisés les recettes qui manquent cruellement à l'Etat, dont une des tâches essentielles est la redistribution harmonieuse des richesses. Le Conseil d'Etat a présenté un projet de budget 2015 - voté dans l'intervalle - à l'équilibre, grâce à des millions d'économies dont la plupart se font au détriment des personnes se trouvant à l'aide sociale, des institutions et associations jouant un rôle social et de la fonction publique.
A ceux qui prétendent que l'absence de bouclier fiscal rendrait l'impôt confiscatoire pour les hauts revenus et les grandes fortunes, il faut répondre que cette notion était très rarement retenue par le Tribunal fédéral à l'époque où ledit bouclier n'existait pas, et n'a concerné que des cas très particuliers. Il s'agissait de personnes pour qui payer l'impôt sans bouclier ne change rien dans leur vie quotidienne. Je crois qu'il faut bien insister sur ce point: il y a une catégorie de gens extrêmement privilégiés pour qui l'impôt est quand même quelque chose d'un peu plus théorique que pour des gens beaucoup plus modestes, chez qui une charge d'impôt supplémentaire représente un véritable changement dans leur style de vie. En fait, cette notion d'impôt confiscatoire, qui suppose qu'on serait obligé de toucher au capital pour payer ses impôts, est une notion que le Tribunal fédéral a toujours interprétée de manière extrêmement restrictive; vous pensez bien que si ce n'était pas le cas, il y aurait eu une foule de recours qui auraient abouti concernant le fait que l'impôt sur la fortune de 1%, dans certains cas, effectivement, vous oblige à toucher à votre capital. Il est quand même notable qu'avec cette histoire de bouclier fiscal, vous avez tous compris qu'on ne peut...
Le président. Il vous reste trente secondes.
Mme Magali Orsini. J'utilise le temps de mon groupe, Monsieur le président.
Le président. Si vous le souhaitez !
Mme Magali Orsini. Oui, enfin je veux bien terminer pour le moment. Vous avez donc tous compris le mécanisme qui fait qu'une personne qui choisit de ne pas travailler, ou un capitaliste qui choisit de ne pas distribuer de dividendes dans sa société, se retrouve avec un revenu extrêmement faible qui aboutit à une limitation de l'impôt sur le revenu, qui est finalement totalement arbitraire, on y reviendra tout à l'heure.
M. Stéphane Florey (UDC). Une fois de plus, la gauche pure et dure de ce Grand Conseil dépeint le diable sur la muraille en décriant la baisse d'impôts de 2009. Et que propose-t-elle ? De revenir sur le large consensus qui a prévalu quant à l'acceptation de cette baisse d'impôts, c'est-à-dire quant au bouclier fiscal, qui a permis aux plus démunis, c'est-à-dire grosso modo à 30% de la population qui ne paie pas d'impôts, de continuer à ne pas en payer. Accepter le projet de loi de ce soir, c'est donc revenir sur ces principes, c'est taxer les plus démunis, ce à quoi le groupe UDC s'est toujours opposé. Dites-le franchement, si vous voulez revenir là-dessus ! On va faire quoi ? Commencer à taxer les plus démunis ? C'est ce que vous voulez ? On peut jouer à ça ! Mais nous, nous nous y refusons.
M. de Sainte Marie parle de niches fiscales. Si j'ai bien compris, vous considérez également que ceux qui ne paient pas d'impôts forment une niche fiscale ! (Commentaires.) Puisque vous parlez du bouclier fiscal par mesure d'équité ! Dites-le franchement ! Niches fiscales, forfait, niches fiscales... Ceux qui n'en paient pas, c'est la même chose, c'est kif kif bourricot ! Donc si vous voulez tout casser, votons votre projet de loi, mais alors après il ne faudra pas pleurer. Parce que quand les plus démunis commenceront à payer des impôts, eh bien peut-être que ça rétablira également les finances publiques ! On pourrait le dire ! Finalement, taxons les plus démunis qui ne paient rien, ça amènera des recettes fiscales supplémentaires et on ne touchera pas au reste ! On pourrait faire comme ça ! Mais nous, en tout cas à l'UDC, nous nous y refusons. La votation de 2009, pour nous, a amené quelque chose de sain, et en plus - cela a été dit par le rapporteur de majorité - cela a amené des recettes supplémentaires. Et ça, vous avez toujours refusé de l'avouer: à chaque baisse d'impôts, il y a toujours eu, les années suivantes, des augmentations de recettes qui n'étaient pas dues...
Une voix. C'est faux !
M. Stéphane Florey. ...comme vous essayez de le faire croire, à l'augmentation de la population, parce que l'augmentation de la population... (Remarque.)
Le président. Monsieur Deneys, s'il vous plaît !
M. Stéphane Florey. ...ne couvre pas la totalité des recettes supplémentaires. Ensuite, vous parlez de classe moyenne supérieure, et tout ça. Mais laissez-moi rigoler ! Nous avons appris, pas plus tard que mardi passé, à la commission fiscale, pendant l'audition de l'auteur d'un projet de loi, que la classe moyenne supérieure était à 70 000 F ! Moi, ça me fait bien rire, parce que si je me base sur mon salaire et ce que je gagne annuellement, cela veut dire que quand je serai en fin de carrière, je serai quasiment dans les super riches de ce canton ! Alors ça me fait plaisir dans un sens, mais super riche avec quoi ? Ce que je veux dire, c'est que si avec 70 000 F vous êtes déjà dans les supérieurs...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Stéphane Florey. ...alors quand vous arrivez à 120 000 F ou 130 000 F, vous êtes dans les super riches ! Il faut arrêter et revenir à la réalité ! (Commentaires.) Il ne faut pas casser les accords qui ont été conclus et largement acceptés par la population en 2009, et il faut refuser purement et simplement ce projet de loi, qui est une honte pour notre canton. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le MCG a longuement réfléchi et finalement, vu ce qu'on s'apprête à voter dans les semaines et les mois qui viennent sur le social, pour aider les plus démunis, nous avons décidé de voter le projet de loi de la gauche. Nous estimons très franchement qu'aujourd'hui, comme l'a dit M. Romain de Sainte Marie, ce projet de loi ne va pas faire partir les plus riches. Compte tenu du projet de loi précédent - qui traîne quand même depuis 2010 - sur l'affaire de la Banque cantonale genevoise, qui a coûté plus de 2 milliards aux contribuables genevois, et compte tenu du fait que la Banque cantonale de Genève, sur les 100 millions qu'elle gagne par année, ne rembourse que 4 millions à l'Etat... (Commentaires.) ...et qu'il faudra quelques générations, peut-être cent cinquante ou cent quatre-vingts ans, pour que tout soit remboursé - et encore, si on calculait l'intérêt cumulé je pense qu'il faudrait à peu près cinq cents ans - il va bien falloir trouver des recettes ailleurs. Donc finalement, le MCG a décidé de soutenir ce projet de loi. Nous avons fait nos calculs: il y a les Verts, il y a les socialistes et Ensemble à Gauche, donc nous devrions dégager une majorité et cela donne un peu la tonalité de ce qui va se passer cette année durant, puisqu'il n'y a plus de règles dans ce parlement, comme on le sait... (Commentaires. Brouhaha.) ...et que finalement, quand il n'y a plus de règles, on fait un peu selon son «feeling». Et le «feeling» de ce soir, eh bien c'est de soutenir le projet de la gauche. Néanmoins, quelques questions pourraient subsister pour certains commissaires: je demande donc formellement le renvoi de ce projet de loi à la commission des finances, pour pouvoir évaluer... (Remarque.) Des finances, oui, pour pouvoir évaluer exactement les rentrées supplémentaires que cela va créer, en prévision des dépenses que nous pourrions voter pour les plus démunis de ce canton. Je vous remercie !
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous avons donc une demande de renvoi à la commission des finances, c'est bien cela ? (Brouhaha.)
Une voix. Fiscale !
Le président. Fiscale ou finances ? (Commentaires.) Finances ! Nous avons donc une demande de renvoi à la commission des finances. Les rapporteurs peuvent s'exprimer. Monsieur Genecand, vous avez la parole.
M. Benoît Genecand (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, ce projet de loi a été traité par la commission fiscale, donc je ne sais pas si la proposition est effectivement de renvoyer aux finances... (Brouhaha. Commentaires.) ...car il me semble qu'il devrait être renvoyé à la fiscale. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Maintenant, si effectivement un groupe change d'avis sur la question et qu'il veut vérifier les conséquences de son changement d'opinion, ça me semble assez juste de renvoyer ce projet de loi en commission ! (Rires.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur de majorité. Est-ce que les rapporteurs de minorité veulent s'exprimer ? Monsieur Romain de Sainte Marie, allez-y.
M. Romain de Sainte Marie (S), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. C'est certain, ce soir je ne suis pas au bout de mes surprises ! Néanmoins, j'aimerais rassurer M. Stauffer: je pense que les chiffres et les estimations, nous les avons déjà s'agissant du manque à gagner annuel, puisqu'il s'agit en effet de cela. (Brouhaha.) On sait très bien combien il manque aux caisses de l'Etat de Genève par année en raison de ce principe de bouclier fiscal, je vous invite donc à ne renvoyer ce projet de loi ni à la commission fiscale ni aux finances, parce que nous avons les éléments nécessaires, ce soir, pour voter un pas historique pour le canton de Genève. Pensez, après le vote du budget que nous avons connu en décembre, aux milieux les plus précarisés, qui souffrent aujourd'hui et qui subissent des coupes dans les prestations sociales. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Alors en effet, allez de l'avant et pensez au financement des prestations au lieu de couper dedans.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Madame Orsini, rapporteure de seconde minorité, vous avez la parole, sur le renvoi s'il vous plaît.
Mme Magali Orsini (EAG), rapporteuse de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Il me semble en effet que ces rapports sont quand même dûment étoffés, que tous les chiffres que vous pourriez souhaiter sont exposés. Des simulations ont été faites, maintenant il est clair que l'argument selon lequel les recettes ont augmenté quand on a établi le bouclier fiscal n'est pas recevable, parce qu'on ne saura jamais quelles auraient été, justement, les recettes sans cela. On nous dit toujours que les gens sont venus parce qu'il y avait un bouclier fiscal; nous en doutons très fortement. En tout cas on a tous les éléments, dans le rapport, pour calculer le différentiel, donc je ne conseille le renvoi à aucune des deux commissions: pas de renvoi.
Le président. Je vous remercie, Madame la députée. Mesdames et Messieurs, je vous fais donc voter sur le renvoi du projet de loi à la commission des finances. (Remarque.) Si, j'ai déjà sonné.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10883 à la commission des finances est adopté par 50 oui contre 41 non et 1 abstention.
Le président. Mesdames et Messieurs, je vous souhaite un bon retour dans vos foyers, je lève la séance. Nous nous retrouvons demain à 15h pour les extraits, et le Bureau est convoqué à 14h à la salle Nicolas-Bogueret. Je vous remercie.
La séance est levée à 22h45.