Séance du vendredi 17 décembre 2004 à 8h
55e législature - 4e année - 3e session - 12e séance

La séance est ouverte à 8h, sous la présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, présidente.

Assistent à la séance: Mmes et MM. Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat, Carlo Lamprecht, Laurent Moutinot, Robert Cramer, Micheline Spoerri, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Esther Alder, Bernard Annen, Marie-Paule Blanchard-Queloz, Blaise Bourrit, Thomas Büchi, Anita Cuénod, Antoine Droin, Jacques Follonier, Pierre Kunz, Nicole Lavanchy, Christian Luscher, Alain-Dominique Mauris, Jacques Pagan, André Reymond, Pierre Schifferli et Ivan Slatkine, députés.

Annonces et dépôts

Néant.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous poursuivons notre débat sur le budget 2005.

PL 9388-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'exercice 2005 (D 3 70)
Rapport de majorité de M. Bernard Lescaze (R)
Rapport de première minorité de Mme Morgane Gauthier (Ve)
Rapport de deuxième minorité de M. Alberto Velasco (S)
Rapport de troisième minorité de M. Souhail Mouhanna (AdG)

Suite du premier débat

La présidente. Veuillez, Messieurs les rapporteurs et Madame la conseillère d'Etat, avoir l'amabilité de vous réinscrire. Merci. M. Alberto Velasco, rapporteur de deuxième minorité.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de deuxième minorité. Je crois que, hier, l'ordre était ce qu'il était. Il y avait M. Lescaze, M. Mouhanna et à la fin, c'était moi.

M. Bernard Lescaze. Le rapporteur de majorité peut parler en dernier.

M. Alberto Velasco. C'est un droit de cuissage.

La présidente. Monsieur Velasco, vous êtes inscrit prioritairement dans ma liste et c'est à vous de prendre la parole. (Rires. Commentaires.)Monsieur Lescaze, ayez l'amabilité de vous taire, je passe la parole à M. Velasco.

M. Alberto Velasco. Merci, Madame la présidente. Au cours de l'intéressant débat d'hier, certains aspects ont été relevés, notamment par le PDC, qui nous a reproché notre attitude peu républicaine car, selon lui, nos propositions ne l'étaient pas. Monsieur Cavaleri, être républicain, c'est aussi avoir la conception grecque de la République: les Grecs pensaient que le rapport entre les riches et les pauvres devait se situer dans une proportion de un pour quatre. Aujourd'hui, ce rapport a une proportion de un pour dix mille. Je veux bien que l'on fasse contribuer les personnes à l'AI de 230 francs au rétablissement des deniers publics. Mais dans ce cas, il faudrait que les riches contribuent dix mille fois plus que cela. Et ce n'est pas le cas. Voilà ce qui serait républicain. Je pense qu'être républicain revient à ne pas admettre que ce soient toujours les plus démunis qui payent. Je pense aussi que cela revient à une répartition des richesses produites dans ce canton - chose qui ne se fait pas. Voilà ce que j'appelle une attitude républicaine. Nous sommes républicains: nous pensons que la richesse produite dans ce canton ne se répartit plus comme elle devrait l'être. Nous ne sommes donc pas d'accord avec vous.

Vous nous dites que 24% de la population sont exonérées d'impôts - d'ailleurs, le chiffre que M. Glatz a cité par la suite est en corrélation: le nombre des personnes à l'AI a augmenté de 71%. C'est vrai, Monsieur Glatz. Mais cela est dû au mécanisme suivant: les gens sont au chômage et se trouvent, pour des raisons d'ordre psychologique que vous connaissez bien, inadaptés au marché du travail. Ils sont ainsi renvoyés à l'AI parce que notre société ne peut pas les intégrer dans le monde du travail. Cela n'est pas le fait d'une politique généreuse. Une politique généreuse permettrait au contraire que ces gens puissent trouver un travail et payer leurs impôts. Je suis, sur ce point, tout à fait d'accord avec mes collègues du PDC: la dignité d'un citoyen revient à être contribuable de sa République. Il est plutôt indigne de ne pas pouvoir contribuer aux deniers de l'Etat par manque d'activité rétribuée. C'est malheureusement le cas aujourd'hui. Le nombre de ceux qui ne peuvent pas s'acquitter de l'impôt augmente dans notre République. Nous ne sommes pas d'accord avec cette situation et c'est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas voter ce budget, parce que, tel qu'il nous est proposé, il ne résout pas ce problème.

Hier, j'ai entendu dire qu'une des propositions - celle qui consistait à s'attaquer aux charges - était acceptable puisque cela permettait une redistribution. Nous ne sommes pas non plus d'accord d'aller dans le sens d'une politique qui consiste à s'attaquer à l'administration de cette République, pour redistribuer aux plus démunis. Je ne pense pas que ce soit la solution. Nous pensons qu'il y a un problème de recettes. Le budget le démontre depuis trois années consécutives. Nous pensons qu'il faudra revoir cette fiscalité par le haut et il n'y pas de raison que les classes les plus démunies y participent.

Je tiens cependant à dire à M. Marcet que les personnes les plus riches de cette République - et de ce pays - ont continué à augmenter. La richesse de ce pays, Monsieur Marcet, en valeur absolue, a continué à augmenter. C'est donc la redistribution qui ne fonctionne pas. (L'orateur est interpellé.)Cela est votre problème. Votre politique consiste justement à favoriser cette classe précise, mais ce n'est pas notre politique. Notre politique consiste à dire que pour qu'un Etat se développe, il faut que l'on crée de la richesse. Nous serions donc d'accord de participer à un budget, pas celui que vous nous avez proposé, mais un budget qui s'attaque à cette problématique, ce, pas en trois ans, comme le souhaite le Conseil d'Etat, mais avec une marge un peu plus large pour une politique plus adéquate.

Nous n'en avons pas parlé hier, mais trois milliards sont programmés, d'ici 2009, selon le plan d'investissement des travaux, proposé dans le budget. A raison de 300 millions de francs par année, je vois difficilement comment on peut s'attaquer à ce retard en matière d'investissement. Or, vous savez très bien que la politique des investissements représente une part importante du développement économique dans notre canton. Il est important d'investir dans les infrastructures, notamment pour instaurer des conditions-cadre permettant à l'économie genevoise de se développer. Le niveau d'investissement à notre disposition est extrêmement bas, je ne vois pas comment nous pourrons, au cours des trois ou quatre années à venir, rattraper ce retard. C'est un des points sur lesquels nous devrions nous interroger. Personne, hier, lors du débat, ne l'a relevé. Nous, les socialistes, le relevons et disons que nous ne sommes pas d'accord avec cette politique.

Mesdames et Messieurs les députés, nous réitérons notre position: nous ne pourrons pas voter le projet de budget tel qu'il nous est proposé.

M. Souhail Mouhanna (AdG), rapporteur de troisième minorité. Je m'apprêtais, hier, à 23h, à répondre à un certain nombre d'interventions de députés de la droite. Finalement, nos débats ont été interrompus. J'ai réfléchi, avant d'arriver ce matin, à ce que je pourrais dire aux uns et aux autres, après un certain nombre de déclarations qui sont absolument caractéristiques de la nature de ce débat. Il s'agit d'un débat qui oppose deux conceptions, deux visions de la société: cela confirme bien le fait que les projets de budget ne sont pas de simples alignements de chiffres. Il s'agit de choix de société et d'orientation, compte tenu de circonstances particulières, dans la plupart des cas. Hier, M. Weiss s'est permis de m'attribuer des déclarations que je n'avais pas faites. Il se croyait autorisé de critiquer mon intervention en utilisant des propos que je n'avais pas tenus. Mais il se trouve, heureusement, que nous sommes en démocratie et que je peux vous répondre de vive voix, Monsieur Weiss.

Vous avez dit, Monsieur Weiss, que j'avais prétendu que le 0,5% de baisse des charges représentait 500 postes voire 700 emplois. Non, Monsieur Weiss, j'ai textuellement dit, vous pourrez vous en référer au mémorial, que cette réduction de 0,5% que vous avez opérée, qui représente l'équivalent de vingt millions de francs - que M. Lescaze ramenait à 50 centimes pour 100 francs - cumulés à la réduction globale du Conseil d'Etat de 32,4 millions, Monsieur Weiss - le Conseil d'Etat lui-même, d'ailleurs, dit que la conséquence de tout cela sera que certains postes resteront vacants pendant un certain temps - font 52,4 millions. Vous pouvez vous-même faire le calcul, cela représente 500 postes à plein temps, et, compte tenu du temps partiel, cela représente l'équivalent de 700 emplois, Monsieur Weiss.

Vous avez ironisé, Monsieur Weiss, sur le fait que nous revenions à la charge pour augmenter les impôts, et qu'il serait intéressant de voir s'instaurer un débat sur l'augmentation des impôts, pendant cette année électorale. Monsieur Weiss, vous me donnez justement l'occasion d'expliquer de quoi il s'agit. Vous avez prétendu, lors de la campagne sur l'initiative 111 de baisses d'impôts, que cette baisse n'aggraverait nullement l'état des finances publiques, qu'elle ferait affluer les millionnaires et les gros contribuables, que les caisses de l'Etat se rempliraient et que nous pourrions sortir des déficits et rembourser la dette. La réalité est tout autre, puisque les recettes fiscales ont diminué de 400 millions. Non satisfaits, d'ailleurs, de cette diminution des ressources de l'Etat, vous avez à nouveau attaqué sur ce terrain, puisque vous avez également obtenu la suppression de l'impôt sur les successions en ligne directe. Cela équivaut à 450 voire 500 millions suivant les années.

M. Bernard Lescaze. Le peuple a voté !

M. Souhail Mouhanna. Oui, le peuple a voté. Nous n'avons jamais dit que le peuple n'avait pas raison. Mais il faut faire en sorte que le peuple ait encore plus raison, la prochaine fois. C'est ce que nous faisons. Nous avons quelques signaux positifs. Premier signal positif: l'acceptation, par le peuple, de notre initiative 113, sur l'imposition temporaire des grosses fortunes et des gros bénéfices réalisés. Il y a un autre exemple. Vous étiez tous engagés corps et âme dans la campagne électorale, dépensant des sommes considérables pour faire passer le paquet fiscal fédéral. Vous disiez à la population, comme avec «votre» 12%: «Cela va être très bien, vous allez pouvoir vous enrichir, nous pourrons baisser vos impôts.» Résultat: le peuple vous a renvoyés à vos études et ce paquet fiscal fédéral a été massivement refusé par les citoyennes et les citoyens genevois.

Vous avez pour habitude de considérer la population comme une entité incapable de réfléchir et de tirer des leçons de l'expérience. Nous sommes, pour notre part, convaincus que la population est une entité vivante qui est intelligente et qui réfléchit, qui est capable de tirer les enseignements qui s'imposent de l'expérience. Lesquels ? Nous voyons que lorsque vous avez obtenu cette baisse de 12%, qui représente - comme je l'ai dit hier et comme vous pouvez le calculer vous-même - un cadeau de plus de 106 000 F pour chaque millionnaire au revenu imposable. Pour la grande majorité de la population, c'est négligeable. Pour 57 000 contribuables, le «cadeau» représente 14 ou 15 francs - comparé aux 106 000 F, c'est dérisoire et on voit qui en profite. Les conséquences de cette mesure sont: la baisse des prestations, l'aggravation de la situation - M. Mettan expliquait hier que le nombre des personnes qui ne sont plus imposées est passé de 18 à 24%, mais c'est logique, puisqu'on a fait de tels cadeaux à ceux qui possèdent le plus que - c'est comme les vases communicants - un plus grand nombre de personnes se trouvent dans la précarité et la pauvreté.

M. Marcet nous a fait, hier, la leçon, c'est l'éternel chantage, concernant le départ des millionnaires si jamais on augmentait les impôts. Je ne sais pas jusqu'à quand vous allez pouvoir utiliser ce chantage, Monsieur Marcet. Car vous savez bien que les mêmes recettes seront utilisées ailleurs. C'est la martingale pour les uns et les autres: ou on baisse les impôts ou bien ils vont partir. Les autres disent la même chose. Mais ce que l'on voit aujourd'hui, c'est que partout où il y a eu cette baisse d'impôts, les finances publiques ont plongé. Regardez la France, qui applique une politique néolibérale, vous pouvez faire vos calculs par rapport à Maastricht.

La présidente. Monsieur le rapporteur, vous en êtes bientôt à sept minutes de temps de parole.

M. Souhail Mouhanna. Les sociodémocrates allemands ont plongé l'Allemagne dans les déficits et la dette, à partir du moment où ils ont commencé à appliquer les recettes du néolibéralisme. Voilà ce qui nous attend. Je ne peux pas ne pas répondre à M. Glatz qui, hier, s'étranglait d'indignation à l'idée de savoir que les mal lotis, les handicapés de notre canton...

La présidente. Monsieur le rapporteur, huit minutes.

M. Souhail Mouhanna. ...que les prestations complémentaires pour handicapés représentent 200 F de plus que les mal lotis de Zurich ou d'ailleurs. Mais M. Glatz ne s'indigne absolument pas du fait qu'il y ait de plus en plus de personnes précaires et pauvres, de chômeurs, qu'il y ait de plus en plus de riches et que les riches soient de plus en plus riches, et que l'on veuille encore faire des cadeaux à ceux qui en ont le plus. Non, Monsieur Glatz ne s'en indigne pas.

La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur.

M. Souhail Mouhanna. C'est fini ?

La présidente. C'est fini, vous êtes à huit minutes, Monsieur le rapporteur.

M. Souhail Mouhanna. Ah. Excusez-moi. J'aurai toute la journée pour reprendre et compléter.

M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité. Le débat a été brusquement interrompu hier soir. Je vais donc rappeler, pour ceux qui l'ignoreraient encore, sans doute en dehors de cette salle, que la majorité de ce Grand Conseil souhaite un budget. Effectivement, comme vient de le rappeler le rapporteur de troisième minorité, un budget n'est pas un simple alignement de chiffres. Or je constate que la plupart des chiffres avancés par ce rapporteur sont faux, erronés ou utilisés à mauvais escient. Je n'en donnerai qu'un seul exemple. Hier, j'avais cru comprendre - mais le rapporteur de troisième minorité a corrigé - que les 17 millions de la coupe de 0,5% équivalaient à 700 postes, ce qui aurait fait que le poste à l'Etat serait payé, salaire brut, 24 280 F par an, chacun sait que tel n'est pas le cas. Même en rajoutant les 32 millions du turn over qui l'utilise autrement, cela voudrait dire que le poste à l'Etat - 49 millions, 700 postes - est à 70 000 francs bruts. Or, dans tous nos budgets, il est calculé entre 105 et 130 000 francs. (L'orateur est interpellé.)Vous l'avez dit deux fois, vous relirez votre intervention. Je passe à un second intervenant, qui oubliait, hier, de rappeler que, dans la période 93-98, le gouvernement avait dû faire face à une conjoncture économique extrêmement difficile, tout en devant assumer les investissements pharaoniques qui avaient eu lieu - notamment sous sa houlette, d'ailleurs - dans les années 80. Je rappellerai simplement, et vous tiendrez compte de l'inflation, M. Mouhanna vous le dira, des 250 millions pour un garage à trams au Bachet-de-Pesay ou du bâtiment pharaonique des Services industriels au Lignon. (Manifestation dans la salle. La présidente agite la cloche.)Quant à un troisième intervenant, qui prétendait, hier, que le gouvernement d'aujourd'hui... (La présidente agite la cloche.) ...dominé par une droite, prétendument antisociale, était incapable de gouverner, il aurait mieux fait de regarder dans son propre parti. Car deux des plus grands échecs en matière de gestion ces dernières années sont, je les nomme, le Stade de Genève et le Casino de Genève. (Exclamations.)Et comme par hasard, c'était un député de cet endroit. (Applaudissements.)Vous me laisserez parler, Madame la présidente, comme je vous laisse présider.

Troisième intervenant, et, extraordinaire, parce qu'il est Vert, c'est la volée de bois vert, précisément, qu'il a adressée hier au Conseil d'Etat. Je n'en croyais pas mes oreilles, je pense que l'assemblée non plus et je dois dire qu'il y avait une certaine injustice. Il y avait une certaine injustice parce que, pour ma part, je suis convaincu que le Conseil d'Etat est composé de femmes et d'hommes de bonne volonté... (Exclamations.)...et je dirai même plus, je dirai que probablement chez eux, la bonté l'emporte sur la volonté, et c'est bien pour cela que nous sommes, aujourd'hui, dans cette impasse. Pour rester sérieux, ce député attribuait tout à une crise de la recette - comme, d'ailleurs, la plupart de nos opposants. Mais c'est bel et bien à une crise de la dépense que nous avons affaire. Car, vous le savez bien, je ne vais pas parler ici des 60 millions de rabais que Mme Calmy-Rey a aussi fait. Nous ne sommes pas les seuls à avoir proposé des baisses de recettes fiscales. Mais si les 12% avaient été maintenus, l'Etat, aujourd'hui, n'aurait pas 12% de recettes en plus, parce que tout aurait été dépensé. Les budgets auraient été faits en fonction de ces 12% et nous serions dans la même situation. En réalité, ne revenez pas avec cela: quand il y a de l'argent à l'Etat, il est fait pour être dépensé et les merveilleuses théories sur les cycles économiques qui disent que quand les choses vont bien, on devrait faire des réserves, c'est pour les manuels d'économie, mais cela ne s'est jamais fait.

Mesdames et Messieurs les députés, «la majorité vote», comme le disait notre regretté collègue Balestra, «la minorité parle», mais il faut quand même que la majorité ne soit pas empêchée de voter, et c'est pour cela que je vous demande de voter l'entrée en matière de ce budget.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. En déposant son projet de budget 2005, le Conseil d'Etat affirmait une double volonté. Celle de respecter le plan financier quadriennal, d'une part, et celle d'accorder une priorité à la formation, l'encadrement éducatif, le social et la santé ainsi que la sécurité, d'autre part. Le plan financier quadriennal prévoit un retour à l'équilibre en 2007 et un déficit de fonctionnement qui ne dépasse pas 290 millions, en 2005. Le budget déposé en septembre respectait cet objectif, puisque le déficit s'élevait à 289,7 millions de francs avec 75 postes accordés au DIP; les montants nécessaires à l'application de la loi sur la police; les auxiliaires indispensables au bon fonctionnement de l'Etat étaient régularisés pour une dernière fois; et les montants consacrés à l'appui social augmentant globalement de 3,6%. Les dépenses essentielles étaient donc ainsi préservées. Par ailleurs, le Conseil d'Etat, en remettant son budget au Grand Conseil, l'a accompagné de modifications de lois permettant de respecter le cadre budgétaire fixé. Certaines visent une meilleure allocation des ressources en matière de politique sociale. C'est le cas de l'alignement des prestations AI sur les prestations AVS ou de la suppression de l'automaticité des subventions d'assurance-maladie aux jeunes de 18 à 25 ans. D'autres modifications visent à contenir les dépenses en matière de masse salariale. Ainsi, le gouvernement a-t-il dû, avec regret, décider d'une limitation de la progression des salaires réduite à la seule indexation plafonnée à 0,75%. Enfin, le gouvernement avait prévu une contribution des communes aux frais de l'OCPA pour un montant de 25% ou encore une suspension complète de la compensation de la progression à froid, pour l'année 2005. Aucune de ces mesures, vous le savez, n'a été proposée avec plaisir. Toutes l'ont été, en revanche, avec pour seul souci celui d'éviter des coupes brutales sur les dépenses, avant même d'avoir eu le temps d'effectuer l'évaluation des prestations dans laquelle l'Etat s'est engagé, à travers le projet GE-Pilote. Notre Conseil rappelait enfin, en présentant le budget 2005, la nécessité de respecter la cible de 290 millions, seuil au-dessus duquel l'Etat devait emprunter pour financer ses dépenses courantes. Le projet de budget n'a pas été accueilli avec grande satisfaction dans les différents groupes politiques, c'est peu de le dire. Comment s'en étonner, dès lors qu'il comporte son lot de sacrifices et d'efforts ? Et pourtant, le Conseil d'Etat tient à rappeler ici que son budget a été élaboré sur une base réaliste, y compris en ce qui concerne les recettes fiscales, puisque de tous bords, on a entendu des commentaires, pour les uns sous-évalués, pour les autres surévalués, tout simplement évalués à l'aune de ce que l'on connaît aujourd'hui de la conjoncture et de ce qu'elle pourrait devenir. Ce budget a été élaboré sans cosmétique et représente toujours, aux yeux du Conseil d'Etat, la solution préférable. Malheureusement, les premières décisions de la commission des finances ont conduit à un consensus, à savoir le rejet de deux mesures portant sur des recettes et un montant de 129 millions de francs. Ainsi, la quasi-totalité des commissaires ont-ils refusé la participation des charges de l'OCPA et la suspension des mécanismes de la progression à froid. Un tel refus faisait passer, de facto, le déficit budgétaire à 419 millions de francs, bien loin de la cible initialement fixée. Les travaux qui ont suivi et les amendements portés au budget qui vous est soumis aujourd'hui constituent la conséquence directe de cet état de fait. Constatant cela, et souhaitant limiter au maximum les effets liés aux coupures budgétaires qui ne pouvaient manquer de s'ensuivre, le Conseil d'Etat a proposé des amendements à la loi budgétaire, qui portent sur deux points. Concernant les recettes, pour un montant total de 65 millions. L'un d'entre eux prévoit une participation des communes réduite à un an et à 12,5% du total des dépenses de l'OCPA. Ce délai est lié à une condition, celle d'arriver à un accord de nouvelles répartitions des tâches et des responsabilités entre l'Etat et les communes.

Le second amendement prévoit un étalement sur deux ans, 2005 et 2006, de l'indexation des déductions et du rabais d'impôts, mesure prévue à l'origine sur 2005 seulement. Ainsi, l'indexation annuelle des barèmes est garantie, et l'indexation des déductions, jamais pratiquée jusqu'ici à Genève, est étalée sur deux ans au lieu d'une année.

Le Conseil d'Etat souhaite vivement au moins que ces mesures soient acceptées, si ces projets de lois devaient être refusés, elles tiennent compte des réactions politiques rencontrées, tout en assurant à l'Etat pour 2005, des moyens financiers qui lui sont indispensables. Nous ne pouvons, en revanche, soutenir les amendements portés au budget par la majorité, ils amputent les dépenses courantes de 0,5% et entraînent des effets non négligeables sur la gestion du personnel, alors que la réduction globale de 32,4 millions exige des efforts importants. Certains amendements sont contestés et contestables, sur le plan juridique. Nous aurons l'occasion de revenir sur ces points dans le courant du débat.

Enfin, le gouvernement déplore tout particulièrement l'amputation des montants consacrés à la solidarité internationale, dans la mesure où celle-là se fonde sur une loi adoptée par votre parlement, que les montants retranchés représentent les 70% du montant disponible pour les projets d'aide au développement, et d'autres engagements à respecter.

Le Conseil d'Etat ne déposera pas d'amendements sur tous les points contestés qui modifient son projet de budget. Il n'entend pas mener, ici, une guerre des tranchées qui n'ajoute rien à la dignité du débat. Il entend néanmoins faire entendre sa voix demain ou plutôt aujourd'hui je l'espère, sur les différents chapitres concernés. Par ailleurs, il présentera trois amendements qui ne modifient pas le solde du compte de fonctionnement mais qui permettent au moins de couvrir la part des engagements de la solidarité internationale, engagés d'ores et déjà pour 2005, engagements qui devraient être interrompus sinon.

Mesdames et Messieurs les députés, le canton de Genève a besoin d'un budget solide pour pouvoir fonctionner normalement et assurer sa crédibilité. Si celle-ci devait être entamée, l'Etat verrait rapidement se détériorer sa capacité d'emprunt et, surtout, les conditions consenties sur ces emprunts. Les charges d'intérêts supplémentaires qui en découleraient limiteraient encore davantage une liberté de manoeuvre déjà fort réduite. C'est le souci qui nous guide, à l'heure actuelle.

La présidente. Merci, Madame la présidente du Conseil d'Etat. M. Pascal Petroz ?

M. Pascal Pétroz. Madame la présidente, je demande l'appel nominal. (Appuyé.)

La présidente. Vous êtes soutenu. Nous allons procéder au vote de prise en considération de ce projet de loi par vote électronique. Ceux qui acceptent l'entrée en matière de ce projet de loi voteront oui, les autres voteront non ou s'abstiendront. Le vote est lancé.

Mis aux voix à l'appel nominal, ce projet de loi est adopté par 43 oui contre 31 non.

Appel nominal

Deuxième débat sur le PL 9388-A: Session 03 (décembre 2004) - Séance 15 du 17.12.2004

PL 9366-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur les augmentations annuelles dues aux membres du personnel de l'Etat ainsi que sur la progression de la prime de fidélité (B 5 17)
Rapport de majorité de M. Pierre Weiss (L)
Rapport de première minorité de M. Souhail Mouhanna (AdG)
Rapport de deuxième minorité de M. Alberto Velasco (S)

Premier débat

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Nous soutenons entièrement, en ce qui nous concerne, les propositions du Conseil d'Etat.

M. Souhail Mouhanna (AdG), rapporteur de première minorité. C'est la huitième fois que le Conseil d'Etat s'en prend aux mécanismes salariaux figurant dans la loi sur les traitements. Comment voulez-vous que - avec une autorité patronale qui, plus d'une fois sur deux, transgresse le contrat que l'Etat a avec ses employés - le personnel soit motivé et respectueux de l'autorité qui ne respecte jamais ses propres engagements ? Lorsque l'on dit que la fonction publique a des niveaux de revenus supérieurs à d'autres revenus ou à d'autres revenus dans d'autres cantons, et que, par conséquent, il faudra faire payer les membres du personnel, c'est la même que lorsque les représentants de droite disent que les handicapés ou les personnes au bénéfice de l'aide sociale sont trop riches parce qu'ils sont un peu mieux traités à Genève qu'ailleurs. Cela signifie que la référence est systématiquement faite à ce qui se trouve en dessous, par le biais du nivellement par le bas. Cela s'appelle la régression sociale.

On a dit que la seule possibilité de redresser les finances publiques est de prendre au personnel. On a pratiqué cela pendant des années, durant les années nonante. Les chiffres du département des finances disaient, en 1998-99, que pendant les cinq années qui ont suivi 1993, ce sont 2,3 milliards de francs qui ont été économisés sur la masse salariale. Pendant la même période, des déficits de 450 à plus de 500 millions ont été enregistrés. Par conséquent, l'argument selon lequel prendre au personnel est le seul moyen de redresser les finances est complètement faux. On nous dit que si cela n'avait pas été fait, des déficits bien supérieurs auraient été faits. Qui dirigeait l'Etat, pendant toutes ces années ?

J'entends souvent certains députés de droite affirmer qu'une réforme doit être faite parce que trop de personnes sont à l'Etat et que cela améliorerait la situation financière. Même certains membres de l'Alternative nous ont interpellés pour nous demander si nous pensions qu'il fallait réformer l'Etat et pour savoir quelles étaient nos propositions à ce sujet. J'aimerais rappeler que la nomination des fonctionnaires, à l'Etat, relève de l'autorité du Conseil d'Etat et des secteurs qui ont reçu sa délégation. Le Conseil d'Etat n'est pas le représentant de la gauche, comme vous le savez. Les chefs de service sont nommés par des femmes et des hommes politiques qui appartiennent au camp de l'Entente, en particulier. Nous dire que des modifications sont à faire et attaquer la gauche par rapport à cela, c'est imiter le scénario de certains films policiers dans lequel le coupable est un membre de la famille. C'est vous qui êtes responsables de ce qui se passe à l'Etat. Je donnerai encore un exemple.

Lorsque nous nous battions contre cet «espèce de machin», qu'on appelle aujourd'hui la Haute école spécialisée de Suisse romande, qui n'a été fabriqué que pour livrer la formation professionnelle au profit et au marché, nous rappelions que cela ne correspondrait qu'à un accroissement de la bureaucratie et une diminution de la démocratie au niveau de la formation. Aujourd'hui, la structure bureaucratique est dirigée, à Genève, par une trentaine de personnes qui ont des bureaux bien plus grands que les salles de classe dont nous disposons pour 45 à 50 élèves et par d'autres qui se trouvent à Delémont avec toutes sortes de niveaux jusqu'à la Confédération. C'est bien vous qui avez voulu cette structure, pas nous. Vous nous reprochez de ne pas faire de propositions, mais c'est vous qui créez les problèmes !

Mesdames et Messieurs les députés, lorsque vous supprimez 0,5%, ce n'est pas pour diminuer cette bureaucratie. Vous donnez à cette même bureaucratie le pouvoir de couper dans les effectifs du personnel, que ce soit au niveau de l'éducation, de la santé ou du social. Ne racontez pas n'importe quoi !

Vous essayez systématiquement de faire en sorte que vos erreurs - pour ne pas dire vos fautes - soient mises sur le compte de vos adversaires, qui se sont toujours battus pour que l'Etat fonctionne dans les meilleures conditions possibles, au profit de la population et pour assurer des prestations de qualité. Comment assurer des prestations de qualité alors que vous dénigrez systématiquement le personnel; alors que le Conseil d'Etat s'en prend à ses conditions de travail et de salaire ?

La présidente. Monsieur le rapporteur, il vous faut terminer.

M. Souhail Mouhanna. Cela relève d'une politique de démotivation et d'attaque contre l'Etat social et les conditions de travail des travailleurs. Nous ne pouvons pas l'accepter et c'est la raison pour laquelle nous serons fermement opposés à toute atteinte aux conditions de travail et de salaire du personnel.

La présidente. Merci d'avoir tenu votre engagement, Monsieur le rapporteur.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de deuxième minorité ad interim. Comme nous l'avons déjà dit lors du débat concernant l'entrée en matière du budget, il n'est pas logique de s'attaquer à la fonction publique, année après année. La nouvelle attaque de cette année prévoit une ponction d'environ 80 millions de francs. Cela nous semble excessif. En effet, depuis les années nonante, on cumule une contribution de cette fonction publique au rétablissement des dépenses publiques de 1,5 milliard environ. Je pense que leur contribution est largement suffisante.

Par ailleurs, ces différentes ponctions et diminutions de leurs rétributions contribuent à la démoralisation de la fonction publique. Il s'est produit un certain nombre de démissions de cadres de la fonction publique, qui devraient nous interpeller, car c'est le signe que la motivation nécessaire n'est plus. De bonnes conditions de travail se vérifient aussi - vous êtes d'accord avec cela, Messieurs les libéraux - par le biais d'une juste rétribution. (L'orateur est interpellé.)Vous étiez même pour le salaire au mérite et vous êtes les premiers à dire que l'on ne peut pas demander aux gens de s'investir dans leur mission s'ils ne sont pas correctement payés. Or vous vous attaquez justement à leur salaire. Cela est contradictoire. Il faut donc que vous nous expliquiez pourquoi vous appuyez donc une telle baisse sur leur pouvoir d'achat. En outre, cette baisse de pouvoir d'achat va à l'encontre d'une incitation à la consommation ou d'un redémarrage de l'économie, puisque ce sont plusieurs millions qui sont retirés du marché de la consommation. Or la fonction publique représente tout de même un certain nombre de citoyens qui consomment.

Je tiens à dire que le nombre de personnes employées à l'Etat a déjà diminué entre 1992 et 1997. Vous aviez déjà, à cette époque, redimensionné l'Etat. Non contents de ce redimensionnement, vous persistez encore dans cette politique, avec laquelle nous ne pouvons évidemment pas être d'accord, comme cela a été mentionné dans notre rapport.

Par conséquent, le groupe socialiste votera la non-entrée en matière de ce projet de loi.

M. Christian Bavarel (Ve). Voilà de nouveau une mesure d'économie qui me semble quelque peu particulière: on parle de suppression des annuités pour des fonctionnaires. Qu'est-ce que cela veut dire, sur qui sommes-nous en train de taper ? En réalité, il y a des gens qui ont entre 15 et 18 ans de métier, qui sont arrivés au bout de leurs annuités et pour lesquels rien ne changera. En revanche, la personne qui vient d'être engagée verra son salaire ne pas bouger. On lui dit que ce sera ainsi pour une année, puis après ce sera pour deux, puis trois années, puis, ensuite, on enlèvera la mesure. Et la personne qui est engagée après se retrouve au même niveau que celle qui a trois ans d'expérience. Celui qui a été «puni» de ces trois années - on ne sait d'ailleurs pas pour quelle autre raison que celle d'avoir été engagé au mauvais moment - traînera cela pendant toute sa carrière.

On fera donc des économies sur le dos d'une petite partie de fonctionnaires, sur l'ensemble de leur carrière, jusqu'à ce qu'ils arrivent en bout de classe, et vous trouvez que cette mesure est juste et qu'elle représente un bon moyen de faire des économies. Je ne comprends pas quel signal vous voulez donner à la fonction publique par le biais de cette mesure.

Vous faites, de manière très partielle, des économies sur une petite catégorie des gens. Par cette mesure, vous avez décidé de punir les nouveaux engagés. Je trouve que votre mesure est spécialement injuste.

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. En tant que rapporteur de majorité, je ne sais pas si mon collègue rapporteur de deuxième minorité souhaite prendre la parole, je la lui laisse et m'exprimerai en dernier, en tant que rapporteur de majorité...

La présidente. Nous n'allons pas faire de débats de préséance, Monsieur Pierre Weiss, vous étiez inscrit en premier, je vous donne la parole.

M. Pierre Weiss. Quoi que cela soit contraire aux usages, je m'exprimerai en premier.

D'abord pour dire que ce projet de loi justifie, à lui seul, notre projet de loi sur la fonction publique, parce qu'il montre bien combien sont pervers les mécanismes salariaux, puisqu'ils pénalisent les jeunes collaborateurs de la fonction publique: leur progression, en terme d'annuités, est bloquée, alors que ceux qui sont en fin de carrière, comme certains qui sont assis dans cette salle, ne sont pas eux-mêmes touchés.

Deuxièmement, j'ai dit d'emblée que nous soutenions ce projet de loi et nous soutenons le Conseil d'Etat précisément lorsqu'il propose des mesures d'économies. Ce projet de loi en est une. La raison pour laquelle nous le voterons, tient dans le fait qu'il permet des économies de l'ordre de 44 millions de francs.

Troisièmement, nous avons le choix entre engager de nouveaux collaborateurs et suspendre certains mécanismes - et c'est un dilemme douloureux - ou bien, ne pas engager de nouveaux collaborateurs et ne pas suspendre certains mécanismes. Nous préférons que l'Etat puisse s'adapter et, par conséquent, il faut bien se rendre compte qu'il doit parfois engager et parfois, j'allais dire «dégager», notamment, et ce sera mon quatrième point, lorsque GE-Pilote aura permis de voir quelles sont les missions essentielles de l'Etat.

M. Souhail Mouhanna (AdG), rapporteur de première minorité. Je comprends bien pourquoi M. Weiss voulait parler en dernier: il savait qu'il allait encore aligner quelques mensonges... (Manifestation dans la salle.)...et il voulait que personne ne puisse lui répondre.

Monsieur Weiss, votre manière de considérer les choses est incroyable. Vous dites que ce système est injuste, dans la mesure où il pénalise une catégorie de gens, alors que des gens, ici présents, qui seraient en fin de carrière, ne seraient pas touchés par lui. Mais, Monsieur Weiss, c'est justement vous qui pénalisez les gens qui se trouvent dans la catégorie que vous citez. C'est vous qui êtes en train de voter la suppression de la progression des annuités de la prime de fidélité. C'est systématiquement ce que vous faites: vous mettez la faute sur les autres. Ce sont vos décisions, c'est votre politique qui en sont la cause.

Vous dites que vous préféreriez investir dans les effectifs, mais ce que vous cherchez à dire c'est plutôt que les travailleurs de la fonction publique paient les travailleurs de la fonction publique. Vous cherchez encore et toujours à faire plus de cadeaux à ceux qui tirent profit de leur présence à Genève, contrairement à ce qui a été dit tout à l'heure. Les travailleurs de la fonction publique ou d'ailleurs sont la richesse de Genève.

Mesdames et Messieurs les députés, il est inadmissible que, chaque fois qu'il y a une difficulté budgétaire, on s'en prenne au personnel. En ce qui concerne la Banque cantonale, par exemple, c'est à la fonction publique de payer. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)Lorsque l'on baisse les impôts de 12% pour les riches, c'est la fonction publique qui doit «combler le trou». Les travailleurs de la fonction publique, les enseignantes et enseignants, les infirmiers et infirmières, les policiers et policières, les secrétaires n'ont pas un travail moins honorable que le vôtre et ils méritent leur salaire, qu'ils défendront.

Nous défendrons aussi le salaire des travailleurs, qu'ils soient dans le secteur public ou privé. Quant au statut, Monsieur Weiss, que vous voulez abolir, vous n'avez qu'un seul but: livrer l'Etat aux affairistes que vous représentez ici. (Exclamations.)

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de deuxième minorité. J'aimerais dire à mon collègue M. Weiss qu'il pratique un certain darwinisme social puisqu'il nous propose de remplacer les fonctionnaires les plus anciens par des fonctionnaires plus jeunes, parce qu'ils coûtent moins cher. C'est vrai, ils coûtent beaucoup moins cher, mais vous faites là une ségrégation qui est désobligeante. Je regrette que vous ayez employé le terme «dégager» en ce qui concerne les emplois de la fonction publique.

Pour assurer les conditions-cadre, nécessaires au développement de notre économie, il faut que nous ayons une fonction publique qui soit à la hauteur, en nombre et en qualité. Or, il n'est pas possible d'assurer cela avec des salaires qui ne sont pas adéquats.

La présidente. Nous allons procéder au vote de la prise en considération du projet de loi 9366-A. Celles et ceux qui acceptent la prise en considération voteront oui, les autres voteront non ou s'abstiendront.

Mis aux voix à l'appel nominal, ce projet de loi est adopté par 44 oui contre 35 non.

Appel nominal

La loi 9366 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 9366 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 44 oui contre 35 non.

PL 9367-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat dérogeant au principe de l'indexation des barèmes, de l'ajustement des déductions et des montants déterminants pour le rabais d'impôt (art. 19 LIPP-V) (D 3 18)
Rapport de Mme Mariane Grobet-Wellner (S)

Premier débat

La présidente. Je vous demande d'évoquer, dans la discussion, l'article 19, alinéas 1 et 2, du PL 9388-A.

Mme Mariane Grobet-Wellner (S), rapporteuse. Je rappelle tout d'abord que cette proposition, émanant du Conseil d'Etat a réussi à faire la quasi-unanimité contre elle. Suite à cela, le Conseil d'Etat est revenu à la charge avec un projet bien plus modéré. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)Sur le fond... (Brouhaha.)

La présidente. Voulez-vous, s'il vous plaît, respecter la rapporteure.

Mme Mariane Grobet-Wellner. Sur le fond, le projet initial du Conseil d'Etat prévoyait de suspendre l'indexation des barèmes et l'indexation des déductions. Cela aurait eu pour effet une économie - en réalité, un supplément d'impôts de recettes fiscales de l'ordre de 44 millions. Le problème, pour la majorité de la commission, consistait dans le fait de savoir qui paierait ces 40 millions supplémentaires. Ces 40 millions, maintenant - suite à votre demande, Madame la présidente, je fais également référence à la proposition amaigrie - sont de 20 millions.

Ces 20 millions retomberont surtout sur les contribuables «moyens élevés», à savoir ceux qui peuvent faire valoir leur droit à ces déductions qui ne seront donc que partiellement indexées. On voit, une fois de plus, les dégâts qu'a causés cette diminution d'impôts de 12%. Nous estimons que ce n'est pas de cette façon qu'il faudrait remédier à ce désastre.

Mme Michèle Künzler (Ve). Voilà une proposition qui est un peu un cache-misère parce qu'on reconnaît, par ce biais, qu'une augmentation d'impôts serait nécessaire. On le fait par le biais d'une non-indexation, mais on sait bien que cette proposition sera rejetée par le peuple - elle n'a précédemment pas été acceptée.

En fait, et puisqu'il faut évoquer l'article 19 du nouveau projet de loi, on revient à une proposition plus modérée. Mais le résultat sera le même, dans deux ans, c'est-à-dire que l'on arrivera à l'indexation telle qu'elle est proposée maintenant - elle sera simplement étalée sur deux ans.

C'est en fait un peu comme si vous mettez quelque chose pour cacher un trou sur une tapisserie. Ici, on a commencé à gratter, la moitié de la photo est enlevée, la majorité a réussi à remettre une partie de ce cache-misère, on remet d'autres propositions, mais il reste un trou à boucher.

De toute façon, la vérité se révélera aux comptes parce que, soyons sérieux, tout cet exercice est «bidon», vous le savez parfaitement. Dans les comptes précédents, il y a déjà un dépassement de crédit de près de 100 millions de francs. On fait semblant de présenter un budget à peu près présentable, mais on sait bien, en réalité, que l'on va vers le dépassement de crédit.

Nous refuserons cela. Nous refuserons aussi la moitié, que nous jugeons inacceptable, parce qu'elle ne porte que sur les classes moyennes et qu'il n'y a absolument pas de répartition équitable de l'impôt.

M. Pierre Guérini (S). Dans un éclair de lucidité, la majorité de la commission des finances a refusé ce projet. Pourquoi ? Parce qu'une fois de plus, la disparité criante des sacrifices à faire est clairement apparue. En gros, cela représente un facteur 3. En d'autres termes, et en pourcent, si l'augmentation d'impôts d'un petit revenu est de 6%, celle d'un haut revenu est de 2%. Ce ne sont pas des chiffres absolus mais des chiffres relatifs mettant cette disparité en lumière.

Les socialistes demandent à ce parlement de retrouver cet éclair de lucidité dont la commission des finances a fait preuve et de refuser ce projet de loi.

La présidente. Merci, la parole n'étant plus demandée, nous allons procéder au vote d'entrée en matière de ce projet de loi, par vote électronique.

Mis aux voix, ce projet de loi est rejeté par 71 non contre 2 oui et 1 abstention.

PL 9368-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur les droits d'enregistrement (D 3 30)
Rapport de M. Jean-Marc Odier (R)

Premier débat

M. Jean-Marc Odier (R), rapporteur. La commission des finances vous propose à l'unanimité, moins une abstention, d'adopter le projet de loi du Conseil d'Etat fixant le fonds d'équipement communal à 13 millions de francs.

Mme Michèle Künzler (Ve). Si l'année passée, nous avons demandé aux communes de faire un effort supplémentaire de 10 millions, nous ne le ferons pas cette année. Nous avions dit que c'était une mesure ponctuelle, l'année passée. (L'oratrice est interpellée.)Ce fonds est important et il faut continuer à l'alimenter, même si c'est de manière modeste.

Mme Mariane Grobet-Wellner (S). La part des droits d'enregistrement prélevés sur les transactions immobilières destinés au fonds d'équipement communal est fixé dans la loi. Depuis dix, elle a régulièrement été revue à la baisse, sur proposition du Conseil d'Etat. La proposition contenue dans ce projet de loi fixe la dotation 2005 à 13 millions de francs au maximum, alors qu'elle n'a été que de 3 millions, cette année. La faible dotation, en 2004, a eu pour effet de réduire très fortement le fonds. Avec près de 17 millions dépensés cette année, il ne reste plus que 7,9 millions de disponibles.

En attendant le résultat des discussions entre l'Etat et les communes, portant sur la péréquation financière et la capacité financière des communes, le groupe socialiste se rallie à cette proposition.

La présidente. Merci, Madame la députée. La parole n'étant plus demandée, nous allons procéder au vote de la prise en considération du projet de loi 9368-A.

Mis aux voix, ce projet de loi est adopté en premier débat par 75 oui.

La loi 9368 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 9368 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 75 oui (unanimité des votants).

PL 9369-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat sur le taux d'intérêt légal applicable aux créances et aux dettes fiscales (D 3 55)
Rapport de M. Renaud Gautier (L)

Premier débat

M. Renaud Gautier (L), rapporteur. Comme le disent les «latinophiles», avant qu'ils ne soient interrompus par quelque «arlerie», je voudrais commencer mon intervention en disant que post coitum, animale tristeet que, après les rituels déclamatoires que nous avons entendus hier soir - qui ont permis à chacun, dans une bonne tradition anthropologique ou sociologique d'expliquer que: «J'avais raison raison et l'autre tort», ce dont nous aurions pu faire l'économie dans la mesure où chacun savait qu'il avait raison et que l'autre avait tort - nous voilà donc avec un projet de loi extrêmement pratique et tangible, puisqu'il s'agit des taux d'intérêts légaux - et non pas des taux d'intérêts qui pourraient être appliqués à des garanties d'Etat - qui ont trait aux créances et aux dettes fiscales.

Je pense que ce nouveau projet, quant à la manière de rétribuer ce qui est dû, d'une part, et ce qui est avancé, de l'autre, présente un intérêt certain, soit quant au mode de rétribution des sommes avancées par les contribuables à l'Etat, soit de la manière dont l'Etat entend ponctionner celui qui ne remplit pas ses obligations. Je préciserai que, dans ce rapport - bien évidemment protégé par rapport à ce que j'ai dit plus haut - et, pour continuer dans les citations latines, cum grano salis, l'intérêt de ce projet...

Une voix. On comprend rien !

M. Renaud Gautier. Le dictionnaire vous sera fourni tout à l'heure. L'intérêt de ce projet est que le jour où l'Etat n'aura plus de dettes, alors les créances que l'Etat aura à l'égard des contribuables tomberont à zéro intérêt. Voilà donc un intérêt supplémentaire à diminuer la dette de l'Etat.

M. Claude Marcet (UDC). Nous demandons seulement le renvoi en commission. En ce qui nous concerne, en effet, nous pensons que la manière dont ce projet de loi a été constitué n'est pas normale. Chaque année, l'Etat demande le versement d'acomptes, qu'il taxe ensuite, six ou huit mois après; sur cette base-là, il prendrait un intérêt sur des créances dont la constitution est antérieure à la connaissance de leur existence.

Il n'est donc pas acceptable, dans ce cadre, que nous prenions des intérêts de cette façon, sauf si l'échéance du départ des intérêts est le 1er janvier de l'année suivante, ou le moment même où la taxation est faite. Mais il n'est pas acceptable que l'on prenne des intérêts sur des montants dont nous n'avons pas connaissance.

M. David Hiler (Ve). Nous nous étions abstenus en commission sur cet objet parce que le différentiel entre les deux taux d'intérêts est considérable et que ces derniers ne sont pas fixés sur le même indice de base. On peut admettre une marge mais celle-ci est très, très grande. Par ailleurs, le fait de l'asseoir sur deux indices différents nous paraît problématique.

Nous nous rallierons donc à la proposition de M. Marcet.

M. Renaud Gautier (L), rapporteur. M. Marcet pose une question qui sort du champ particulier de ce projet de loi, celle du calcul du moment du départ des intérêts, que ce soit pour une créance ou que ce soit pour un intérêt. Sa question est tout à fait pertinente mais, une fois de plus, elle ne concerne pas ce projet de loi.

Quant à la proposition de M. Hiler, je ne voulais pas m'étendre à ce sujet mais, l'intérêt de ce qui nous est proposé ici, c'est que, comme il l'a relevé, il s'agit effectivement de deux modes de calcul différents qui ne sont corrélés d'aucune manière mais qui correspondent toutefois à une réalité: il n'y a pas de sens à ce que l'intérêt, dû par un contribuable, soit somme toute différent de l'intérêt que paie l'Etat pour les montants pharaoniques et babyloniens qu'il emprunte. J'y vois donc une analogie, originale, puisque le mode de calcul est différentié, mais qui m'apparaît juste, quant au fond.

Quant aux taux d'intérêts créditeurs, le principe d'utiliser des taux LIBOR, moins 25 points de base, c'est-à-dire un quart de point, m'apparaît juste, parce qu'on se trouve dans les mécanismes du marché et que l'on fait la même chose que ce que font les institutions financières, à l'exception de quelques banques locales, à savoir que l'on prend un taux LIBOR moins une marge servant à la gestion de ces taux.

Par conséquent, oui, il y a deux modes de calcul différents, mais ils me semblent correspondre à une réalité qui est celle de la dette de l'Etat. Ce n'est pas pour rien que j'ai dit, préalablement, que le jour où il n'y aurait plus de dette de l'Etat, alors il n'y aurait plus de taux d'intérêts débiteurs.

Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. Je comprends que la défense des contribuables donne beaucoup d'énergie à M. Marcet pour s'exprimer, je rappelle toutefois ici qu'il s'agit du taux lui-même et qu'il ne s'agit en aucun cas d'une invention particulière de rétribution de taux d'intérêts qui n'aurait pas été prévus par la loi. Si vous souhaitez changer la loi au niveau de la créance, vous pouvez le faire et proposer un projet de loi qui la modifie. Mais il s'agit ici du taux des intérêts débiteurs. Nous avons renoncé pour toutes ces dernières années à percevoir les intérêts financiers. Ce n'est donc pas ces taux-là qui sont en cause ici, Monsieur le député.

Deuxièmement, ce que le député Renaud Gautier a dit est important. Il s'agit de tenir compte, dans le cadre de ce qui est appliqué ici, de ce qui est pratiqué sur le marché tout en y appliquant une marge, en termes d'administration. Nous avons dit à la commission des finances que si nous devions nous apercevoir qu'une modification est nécessaire par la suite, nous le ferions et présenterions les amendements nécessaires, le moment venu.

Dans le cadre de ce budget, les montants liés à cette décision sont de l'ordre de 10 millions de francs. Si vous souhaitez voter différemment aujourd'hui, ce seront alors dix millions de francs de recettes diverses qui feront défaut et que vous devrez compenser.

La présidente. Merci, Madame la présidente. La parole n'est plus demandée. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi de ce projet de loi à la commission des finances. Je vais donc mettre ce renvoi en commission des finances aux voix.

Mis aux voix, le renvoi de ce projet à la commission des finances est rejeté par 42 non contre 33 oui et 3 abstentions.

La présidente. Nous entrons donc dans le vote de prise en considération de ce projet de loi.

Mis aux voix, ce projet de loi est adopté en premier débat par 66 oui et 12 abstentions.

La loi 9369 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 9369 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 64 oui et 13 abstentions.

PL 9370-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur l'assurance-maladie (LaLAMal) (J 3 05)
Rapport de majorité de M. Pierre Weiss (L)
Rapport de première minorité de M. Jean Spielmann (AdG)
Rapport de deuxième minorité de M. Alberto Velasco (S)

Premier débat

La présidente. Vous êtes rapporteur de majorité donc je vous passe la parole en premier, pour l'ouverture, c'est normal. Avez-vous quelque chose à ajouter à votre rapport ?

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Ce n'est pas moi qui ai quelque chose à ajouter, Madame la présidente, c'est le Conseil d'Etat qui, le jour même du dépôt du rapport, nous a fait part d'amendements qui ont, par la suite, été discutés en commission des finances. Ces amendements font l'objet d'une annexe qui se trouvera, dans le Mémorial, jointe au rapport déposé par les rapporteurs.

Pour l'essentiel, l'amendement du département de l'action sociale et de la santé, présenté au nom du Conseil d'Etat, prévoit que, en cas de modification de la situation du bénéficiaire des subsides au titre de l'assurance maladie, il y ait une prise en considération de l'amélioration de la condition financière dudit bénéficiaire. Voilà pour la précision que je tenais à apporter sur le fond de ce projet de loi.

J'aimerais rappeler, Madame la présidente, à vous-même peut-être, qui êtes attentive, comme toujours, mais aussi au reste de cette assemblée, qui a à coeur l'adoption de notre budget, qu'il s'agit d'un projet de loi à 8 millions, ayant pour but que les étudiants, enfants de familles aisées, ne bénéficient plus automatiquement de subsides au titre de l'assurance-maladie. Il s'agit, en d'autres termes, de passer d'une politique de type «arrosoir» à une politique ciblée sur les étudiants de moins de 25 ans qui ont des besoins financiers prouvés.

M. Jean Spielmann (AdG), rapporteur de première minorité. Ce projet de loi pose, à notre avis, un problème. Non pas sur le principe ni sur le résultat, tel qu'ils viennent d'être exposés par le rapporteur de majorité, mais parce que nous considérons que le résultat qui découlera du vote de ce projet de loi sera différent. Il existe, dans notre collectivité, de nombreuses familles qui assument les charges de leur enfant, lorsqu'il est étudiant, jusqu'à 25 ans.

Cependant, si vous supprimez ce mécanisme, vous allez mettre en place un autre mécanisme, celui qui consiste dans le fait que le jeune, au lieu de continuer à vivre dans le milieu familial, pourra très bien quitter ce milieu et s'installer. Il aura droit à la subvention sur le logement, à des prestations sur le chômage et sur le revenu, et à toute une autre série de prestations auxquelles il ne pense peut-être même pas au départ mais qui sont inscrites dans la loi. En forçant les jeunes à modifier leurs habitudes et à donner des renseignements sur les revenus qui ne sont pas les leurs mais ceux de leurs familles, vous allez les inciter à quitter le milieu familial et à profiter de toutes les possibilités que la loi offre aujourd'hui.

Dire que nous allons faire des économies en supprimant les subsides à quelques jeunes, c'est une erreur, à mon avis. Vous allez peut-être gagner quelques centaines de francs avec ce principe, mais vous allez ouvrir la porte à des modifications importantes.

Il y a, dans la collectivité genevoise, beaucoup de difficultés en matière de logement, je ne suis pas sûr qu'il serait intelligent de promouvoir l'éclatement familial et de favoriser le départ des jeunes, qui disposeront alors des revenus prévus et des prestations qui leur sont offertes.

Je crois que c'est le choix que vous faites aujourd'hui, et je vous donne rendez-vous ultérieurement pour faire le bilan du résultat de cette loi bâclée et ne prenant pas en compte les problèmes sociaux des jeunes étudiants, que vous allez voter maintenant.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de deuxième minorité. Je suis étonné de la pseudo-justice sociale que prône mon collègue Weiss. En réalité, il n'est pas du tout question de justice sociale. Sur le fond, je comprends le projet de loi que nous soumet M. Unger. Mais je pense qu'il a des effets pervers. Si on admet que les riches, comme les pauvres, contribuent, proportionnellement par l'impôt républicain, aux tâches de cette collectivité, je pense que chacun - riche comme pauvre - doit avoir droit aux mêmes prestations. Je pense qu'il faut une certaine «laïcité économique», du moment que ces classes ont participé correctement. Mais il est vrai que l'on s'attaque à la progression proportionnelle de l'impôt, et les classes aisées ne contribuent plus à la mesure de leurs moyens, ce qui, dans le cadre de notre budget et des recettes de l'Etat escomptées correspond au «ciblage» social. C'est ce que mon collègue Weiss appelle une «justice sociale». Je ne suis pas d'accord, je préférerais que ces jeunes conservent leur subside, comme tout le monde, puisque, à partir de vingt ans, ils peuvent quitter leur famille pour habiter ailleurs.

Si vous voulez un exemple d'effet pervers de ce projet de loi, un jeune pourrait très bien habiter seul, avoir une lettre justificative de ses parents et ainsi toucher le subside ! Il faudrait alors, pour s'assurer de la véracité de chaque situation, une armée de contrôleurs qui nous coûteraient bien plus cher que les quelques millions que nous retirerons par le biais de cette mesure.

Par conséquent, je considère que ce projet de loi n'est pas bienvenu. Il introduit une discrimination parmi les jeunes et parmi les contribuables. Je pense que nous ne devrions pas entrer en matière. C'est en tout cas ce que nous ferons au parti socialiste.

Mme Michèle Künzler (Ve). Il y a une inégalité de traitement entre contribuables, c'est vrai. En fait, voilà des contribuables qui, entre 18 et 25 ans, sont «contribuables mais pas trop». En réalité, on leur dénie le fait d'être des contributeurs comme n'importe qui.

18 000 jeunes, entre 18 et 25 ans, ne payent pas d'impôts. Pourtant, parmi ces 18 000 jeunes, certains sont mariés - environ un millier d'entre eux - certains travaillent, certains se trouvent dans des situations difficiles et certains d'entre eux sont, c'est vrai, chez papa-maman, jouissant d'une situation relativement bonne. Voyons maintenant la situation des familles.

Il y a 50 000 foyers contributeurs composés de familles avec un ou plusieurs enfants. Parmi ces familles, 75% n'ont pas plus de 150 000 F de revenus bruts par année. En réalité, ceux que vous visez, c'est-à-dire les quelques familles plus aisées qui disposent de revenus annuels supérieurs à 150 000 F, constituent 25% des familles. La mesure concerne donc environ 1000 jeunes, ce qui équivaut à un million de francs. Comme le conclut le deuxième rapporteur de minorité, c'est une économie toute théorique. Est-ce que cela vaut la peine de faire des contrôles ?

Par ailleurs, pour quelques personnes qui recevraient indûment des prestations, on prive d'autres personnes qui en auraient réellement besoin. Parmi les personnes défavorisées, il faut le savoir, une grande partie d'entre elles ne demanderont pas de prestations. C'est peut-être sur cela que l'on compte pour faire des économies. En effet, on sait que ces personnes n'ouvrent pas leur courrier, ne répondent pas dans les temps, ne font aucune demande. Ce sont ces personnes-là qui seront désavantagées car même si elles ont un droit théorique, elles ne l'utiliseront pas. Si les 9 millions de francs d'économie prévus sont faits sur ces personnes-là, je trouve que c'est un scandale bien plus grand que de verser un peu trop à des familles qui, même si elles sont aisées, sont quand même, en Suisse, moins bien traitées qu'ailleurs.

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Je ne sais pas si l'impôt est républicain ou régalien, ce qui est certain c'est que des économies théoriques valent mieux que des dépenses réelles.

Deuxièmement, il n'est pas absolument inique de prévoir un traitement différent pour les jeunes jusqu'à 25 ans. Je rappellerai que, en droit pénal, la situation qui est faite aux moins de 25 ans peut leur procurer des condamnations moins lourdes qu'à ceux qui ont plus de 25 ans.

Troisièmement, je n'emploierai pas les termes latins de mon collègue Gautier, mais, avec le sourire, le cours de triche appliquée qui a été donné tout à l'heure par l'un des rapporteurs qui a simplement oublié que la crise du logement rendait les conseils pour l'utilisation perverse des nouvelles dispositions pour le moins virtuelles.

M. Souhail Mouhanna (AdG). M. Weiss vient de qualifier de «leçon de triche» ce que M. Spielmann a évoqué comme possibilité, lorsqu'on prend de telles décisions.

Lorsque la droite s'attaque aux prestations sociales, lorsqu'elle s'attaque aux chômeurs, elle le fait au nom d'abus et de triches, alors que tout le monde sait que cela concerne une infime minorité de gens. Alors, en matière de triche au niveau de l'évaluation des situations, vous êtes champion, Monsieur Weiss.

Comme il est attendrissant de vous entendre dire: «Il est normal de différencier les gens qui sont modestes des gens qui appartiennent à des familles aisées. C'est la raison pour laquelle il ne faut pas pratiquer de «politique de l'arrosoir», il ne faut pas favoriser les milieux aisés» ! M. Glatz s'enflammait, hier, demandant s'il était normal de donner des subsides à des enfants de familles aisées. Ce sont les mêmes qui font des cadeaux, non pas de quelques centaines de francs - comme c'est le cas pour les subsides - mais de centaines de milliers de francs à ces mêmes milieux et qui viennent nous gratifier de déclarations du type: «Il va falloir tenir compte du fait qu'il y a des gens plus favorisés que d'autres.»

Pour nous, l'égalité de traitement à l'égard des jeunes est fondamentale. Vous essayez de prendre un petit quelque chose, au niveau des gens que vous représentez, pour pouvoir leur redonner des centaines de fois ce que vous prétendez vouloir leur prendre. A cela, nous répondons: «Non !».

Nous défendons l'égalité de traitement pour tous les jeunes, comme nous avons défendu la gratuité des études pour tous les étudiants, tous les élèves, quel que soit leur milieu familial, parce que nous considérons que les jeunes sont utiles à l'ensemble de la collectivité, à toute la société et non pas seulement à leurs parents. Il appartient par conséquent à l'ensemble de la collectivité de financer leurs études. Ce financement se fait par l'impôt. Ceux qui ont le plus paient le plus, ceux qui ont le moins paient le moins. C'est cela, la justice sociale: la justice fiscale. Nous reviendrons là-dessus plus tard mais nous refusons, pour le moment, l'entrée en matière quant à cette mesure inique et tout à fait stupide, du point de vue des résultats financiers attendus.

M. Jean Spielmann (AdG), rapporteur de première minorité. Je me serais abstenu de prendre la parole si M. Weiss n'avait pas jugé utile de considérer que je facilitais la triche dans mon intervention. Je me suis exprimé sur le fond du projet de loi proposé. Que va provoquer ce projet de loi ? Mme Künzler l'a fort bien résumé: ce n'est qu'un millier de jeunes qui seront concernés par ce projet de loi. Alors qu'aujourd'hui ils touchent automatiquement un subside pour l'assurance-maladie, ils devront, si ce projet de loi est adopté, préparer un dossier, notamment sur les revenus de leurs parents, et chercher toutes les possibilités qui s'offrent à eux. Par conséquent, les jeunes issus de des milieux les plus favorisés pourront, plus facilement que les autres, trouver un logement, obtenir une indemnité pour ce logement, bénéficier d'allocations pour les études et obtenir tous les subsides qu'un jeune est susceptible d'obtenir s'il se désolidarise de sa famille.

Partant de là, le résultat escompté est ridicule - et bien à l'image de tous les projets de lois liés à ce budget. C'est du travail à la petite semaine. Il est tout à fait faux de dire que ce projet de loi va permettre de faire des économies. Il va provoquer la désolidarisation de certaines familles, entraîner que les gens, assumant la totalité des dépenses de leurs enfants qui étudient, vont se rendre compte qu'il existe des moyens de les faire indemniser. Cela va donc provoquer des dépenses beaucoup plus grandes que les quelques économies «bouts de chandelle» que vous êtes en train de mettre en place. Il ne s'agit pas de triche, Monsieur Weiss. M. Mouhanna vous l'a dit. On connaît les manières dont vos milieux pratiquent avec le fisc. Il s'agit du respect des lois. Je suis en faveur du respect des lois.

Je trouve que celle-là n'est pas une bonne loi parce qu'elle va favoriser la désolidarisation familiale et à l'obtention de subsides qui ne sont pas nécessaires. Choisissez ! Vous abordez les débats et traitez les sujets par le petit bout de la lorgnette.

Ce projet de loi provoquera plus de dépenses que d'économies.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de deuxième minorité. Je voudrais répondre au rapporteur de majorité notamment lorsqu'il dit qu'il préfère des économies théoriques aux dépenses réelles. Si l'on appliquait votre raisonnement jusqu'au bout, cela entraînerait un budget totalement théorique sans les dépenses réelles. C'est ce que vous voulez, mais ce serait tromper la population. Nous sommes ici pour faire un budget transparent. L'année passée, des dizaines de millions de francs n'avaient pas été pris en compte par rapport au chômage, et notre budget ne reflétait pas la réalité. Ensuite, lors de l'étude des comptes, on se retrouve avec des chiffres en total décalage avec ceux du budget. C'est vous-mêmes qui nous avez interpellés, nous socialistes, en disant: «Votre conseillère d'Etat, à l'époque, n'avait pas reflété la réalité des véritables coûts des dépenses.» Vous nous dites aujourd'hui que vous préférez des économies théoriques à des dépenses réelles: c'est incongru. Nous disons que les dépenses réelles doivent être reflétées dans ce budget.

Dans ce projet de loi, il y aura, je suis d'accord avec vous, une économie totalement théorique et une dépense réelle. Car, en fin de compte, vous verrez qu'il faudra venir en aide à ces étudiants. La majorité des étudiants aisés ne vivent pas avec leurs parents. Je le répète: la justice sociale consiste dans le fait que les plus aisés contribuent aux dépenses de notre société selon leurs moyens. Ensuite ils ont droit aux mêmes prestations que un chacun. Nous sommes pour la «laïcité économique».

M. Christian Brunier (S). J'aimerais réagir aux deux points que M. Weiss a soulevés. M. Weiss a donné l'exemple du jeune dont les parents seraient très riches et qui toucherait des subventions de l'Etat et il a trouvé cela choquant. Il me semble que M. Weiss est habituellement moins choqué lorsqu'il y a des excès de la part des nantis, quand cela l'arrange. On voit qu'il adopte une politique à géométrie variable.

Deuxième chose, Monsieur Weiss, vous ne pouvez pas accuser M. Spielmann de pousser à la triche, alors que M. Spielmann n'a fait qu'évaluer les effets d'une loi. C'est normal, lorsque l'on est en passe de voter un projet de loi, d'en évaluer les effets positifs mais aussi les effets négatifs, c'est ce que M. Spielmann a fait. En outre, traiter de «tricheurs» des gens qui utiliseraient les droits de lois que vous avez vous-même votées me semble limite pour un élu et c'est indigne de notre parlement.

On a beaucoup parlé des enfants de riches qui toucheraient éventuellement des subsides de manière abusive, selon M. Weiss. Il faudrait aussi que nous parlions des jeunes qui ont des petits revenus, dont les parents touchent des subsides, et qui seront obligés d'aller demander la «charité». En effet, ce projet de loi empêche l'attribution automatique de ces subventions aux plus défavorisés de la société. Cela veut dire qu'on les pousse, dès le départ, à chercher l'aumône et cela n'est pas normal. Ce qui n'est pas normal non plus, c'est de se retrancher derrière le système informatique. On a en effet entendu que, d'un point de vue informatique, il ne serait pas possible de leur donner de subvention automatiquement. C'est faux. Même si le système informatique de l'Etat est défaillant, il n'y a pas de miracle, l'Etat détient le fichier des parents qui touchent des subsides. L'Etat a aussi, dans ses fichiers, la liste des jeunes à charge de leurs parents. Mais oui, Monsieur Unger, au niveau fiscal, lorsque des parents ont des jeunes à charge, ils le déclarent dans leur déclaration d'impôts et cette information figure dans le système informatique de l'Etat. Vous me direz - j'entends d'ici votre réponse - que le système d'information du DASS n'est pas consolidé avec le système d'information des finances publiques. Cependant, même le plus mauvais informaticien sera en mesure de consolider les fichiers pour vous, s'il existe une volonté politique que cela se fasse. Visiblement, il est plus facile de se retrancher derrière des déficits informatiques que de faire preuve de volontarisme politique dans ce domaine.

Voilà en quoi consiste le scandale: pousser des jeunes pas forcément très favorisés à aller demander, dès leur plus jeune âge, «l'aumône» à l'Etat. Vous créerez donc quelque chose d'inacceptable. En plus, quelques-uns l'ont déjà dit, vous créerez une bureaucratie excessive. Par conséquent vous allez réaliser une toute petite économie et créer une bureaucratie excessive. Alors que vous êtes les premiers à dire qu'il ne faut plus engager de fonctionnaires, là vous allez créer de nouveaux emplois. Vous devez mesurer cela, ce que vous n'avez bien sûr pas fait puisque, de nouveau, ce projet de loi a été fait un peu à la va-vite, sur un coin de table. (Applaudissements.)

M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. L'intervention de M. Brunier me permet d'entrer directement en la matière, et je vous en remercie. Vous avez souligné que, dans l'intervention d'un des rapporteurs de minorité, il était fait état d'effets pervers potentiels et que tout cela nécessitait une évaluation. Eh bien, bravo ! Ce projet de loi est issu d'une évaluation: celle de la CEPP, la commission d'évaluation des politiques publiques, dont la constitution avait été voulue par l'unanimité de ce parlement. Ainsi, il faudrait évaluer des lois qui n'existent pas encore mais renoncer à considérer l'évaluation des lois qui, elles, l'ont été. La CEPP disait des choses somme toute assez simples mais considérablement précises. Elle disait que dans la loi d'application de l'assurance-maladie et dans la politique de subsides qui était prévue, le législateur avait introduit ce que la CEPP appelle elle-même des «effets d'aubaine». Ces effets d'aubaine concernaient 406 millionnaires, en particulier, qui touchaient automatiquement un subside et que votre parlement, à la demande du Conseil d'Etat, a demandé de reconsidérer, non pas sous l'angle de la suppression du subside, mais dans l'impératif d'une vérification que le subside doive être accordé. Et dans la même évaluation, la CEPP faisait le même constat s'agissant des jeunes entre 18 et 25 ans.

Alors, oui, Monsieur le député, les évaluations doivent être faites. Cette loi sera certainement évaluée, mais elle part tout de même d'une évaluation préalable. Je suis un peu étonné que, ni dans le rapport de majorité, ni dans les rapports de minorité, on ait identifié l'enjeu de ce projet de loi qui est de préserver l'intégralité actuelle des subsides pour les assurés modestes, aussi bien s'agissant du périmètre - c'est-à-dire du nombre de gens qui puissent y avoir accès avec les barèmes actuels - que du maintien des barèmes. Parce qu'on peut, comme dans tel ou tel canton voisin, se dire que c'est un peu compliqué de supprimer l'automatisme et, partant, de diminuer pour tous le montant des subsides. On passe de 80 à 60, de 60 à 40 et de 30 à 10. C'est ce qui s'est passé dans d'autres cantons en Suisse romande. Le Conseil d'Etat, au contraire, a voulu préserver le périmètre et les montants destinés aux assurés modestes. C'est vrai qu'à ce prix on va supprimer, non pas des subsides, mais des automatismes de subsides. Est-ce bureaucratique que de passer un coup de téléphone et d'envoyer un justificatif au service d'assurance-maladie ? Pour certains, bien sûr, c'est un petit plus. Je vous garantis que les assurés modestes qui pourront bénéficier des huit millions de francs - qui ne sont pas tombés du ciel, mais qui sont issus de l'extrapolation de la commission d'évaluation des politiques publiques - se réjouiront qu'on ait préféré ne pas toucher aux subsides.

Encore une fois, rien n'est parfait et rien n'est tout à fait simple. Mais je préfère, à tout prendre, entendre le raisonnement qu'a tenu M. Mouhanna - que je ne partage pas mais que je respecte - qui consiste à dire que c'est l'ensemble de la société qui doit être différente et que, ce que vous avez dit très honnêtement, jusqu'à l'âge de 25 ans, les choses doivent être gratuites. C'est une forme de solidarité. Pour cela, il faut prendre beaucoup d'argent ailleurs - vous l'avez dit aussi, Monsieur Mouhanna. C'est un autre modèle de société, je respecte vos convictions sans pour autant les partager.

Mais attaquer ce projet-là, dans le monde dans lequel on vit, c'est s'en prendre très clairement aux assurés modestes, pour lesquels l'enveloppe ne pourra pas augmenter, et vous le savez bien - puisqu'elle est conditionnée par la manne fédérale représentant 106 millions de francs. La manne cantonale n'est pas simplement égale à la manne fédérale: le canton fait déjà un effort de plus de 20 millions supplémentaires à ce que serait son obligation légale, pour mieux servir les assurés modestes, compte tenu du coût des primes, extrêmement élevées à Genève.

Il me semble que ce projet, à n'en pas douter, induira quelques désagréments. Je vous signale au passage que les coûts qu'il induira, parce que la question m'avait été posée par le président de la commission des finances, sont des coûts qui ne seront pas engendrés par une armée administrative mais par des gens qui auront un travail temporaire pendant les deux mois durant lesquels on demande les subsides et qui, accessoirement, seront des étudiants à qui on offrira la possibilité de remplir cette mission, en ayant la sensibilité de ce que sont leurs congénères. (Applaudissements.)

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Il n'est pas usuel de passer la parole après le...

Des voix. Non, non !

La présidente. Mais, attendez ! Il n'est pas usuel de passer la parole après le conseiller d'Etat, mais le Bureau a décidé de clore la liste et de passer la parole à M. le rapporteur Jean Spielmann.

M. Jean Spielmann (AdG), rapporteur de première minorité. Le conseiller d'Etat a dit que les rapports de minorité ne contenaient pas de dossiers ni de documents. Il est assez rare que nous travaillions de manière si rapide et que, une fois que les rapports de minorité sont déposés, et que les documents parviennent aux députés, nous recevions des amendements du Conseil d'Etat - c'est son propre projet de loi - qui remodifient quasiment tous les textes. Cela n'arrive pas très souvent.

Vous êtes en présence d'un projet de loi que nous avons examiné en commission. Les rapporteurs de minorité se sont exprimés sur le projet de loi tel qu'il leur avait été présenté, je n'ai rien à ajouter à mes modifications. Aujourd'hui, il y a cinq articles qui sont ajoutés, et modifiés, à la loi que nous avons faite en commission. Evidemment, nous n'en avons pas parlé beaucoup dans les rapports, puisque nous ne savions pas qu'ils existaient. J'imaginais que le Conseil d'Etat avait bien étudié la question et présenté un projet de loi complet. Il faut, aujourd'hui, modifier cinq articles supplémentaires aux trois articles qu'on nous avait proposé de modifier en commission.

M. Christian Brunier (S). Je pense qu'en termes de responsabilité, le Conseil d'Etat ne peut pas dire: «la commission d'évaluation des politiques publiques a fait des recommandations, nous les appliquons». En effet, dans biens des cas, des commissions d'experts ont fait des recommandations au gouvernement, et le gouvernement n'en a pas tenu compte. Si vous aviez appliqué toutes les recommandations d'experts sur l'office des poursuites et des faillites, je pense que nous aurions évité pas mal de problèmes.

Une voix. Très bien !

Une voix. Bravo !

M. Christian Brunier. Deuxièmement, les experts donnent un certain nombre de recommandations à caractère purement technique, mais, vous savez, la limite entre le «purement technique» et le politique est parfois fragile. Je prendrai deux exemples. En l'occurrence, il est proposé de ne pas respecter l'équité entre les jeunes. Cela n'est pas le fait d'un avis d'expert mais d'un avis politique. Et c'est au gouvernement d'assumer, ensuite, la responsabilité de tenir compte, ou pas, de cette mesure. Je l'ai lu hier, dans «La Tribune de Genève», en tout cas un membre de la CEPP - sortant certes - recommande de privatiser l'office cantonal de l'emploi. Ce n'est pas un avis d'expert neutre, c'est un avis politique. Et c'est à vous, et non pas aux experts, d'assumer les responsabilités que le gouvernement a de la peine à prendre. (Applaudissements.)

La présidente. La parole n'étant plus demandée, nous allons procéder au vote de prise en considération de ce projet de loi. ( Un député demande l'appel nominal. Il est appuyé.)

L'appel nominal a été demandé, nous allons y procéder.

Mis aux voix à l'appel nominal, ce projet de loi est adopté en premier débat par 44 oui contre 31 non et 4 abstentions.

Appel nominal

Deuxième débat

La loi 9370 est adoptée article par article en deuxième débat.

La présidente. Nous allons passer au troisième débat. (La présidente est interpellée.)Vous voulez dire quelque chose, Monsieur le rapporteur ? Nous sommes en procédure de vote ! Je vous passe la parole, Monsieur le rapporteur.

M. Jean Spielmann (AdG), rapporteur de première minorité. Madame la présidente, vous et nous, les députés, avons tous reçu un rapport qui portait sur une loi. Il y a maintenant des amendements...

Une voix. On vient de les adopter !

M. Jean Spielmann. Non, nous n'avons pas voté d'amendements, vous avez dit «projet de loi adopté», mais personne n'a dit qu'il y avait des amendements et que le projet de loi était donc modifié. Nous avons voté un projet de loi... (Manifestation dans la salle.)Nous avons été saisis d'un projet de loi avec trois articles de loi, nous avons écrit des rapports les concernant et nous avons, maintenant, voté une loi qui comporte huit articles. Personne n'a dit que le projet de loi se trouvant dans le rapport déposé par les rapporteurs avait été amendé. Vous avez reçu des modifications proposées par le Conseil d'Etat, que le rapporteur de majorité a reprises, mais ce sont des amendements, et il faut donc les voter en tant qu'amendements à la loi.

La présidente. Monsieur le rapporteur, vous avez reçu un document qui s'appelait «Complément au PL 9370-A», daté du 8 décembre, de la commission des finances. C'est sur cette base que nous avons voté; les amendements sont intégrés. Vous l'avez en main. Il était joint. Il se trouvait sur chacun de vos bureaux.

Nous allons voter sur le troisième débat. (Vive émotion dans l'assistance. Exclamations.)

Une voix. Il y a un problème !

La présidente. Il n'y a pas de problème. C'est la version issue des travaux de la commission. Il n'y a pas de problème... Je passe la parole au président de la commission des finances, M. David Hiler.

M. David Hiler (Ve). Madame la présidente, c'est une simple question de forme. Nous avons reçu les amendements du département alors que notre commission avait déjà terminé ses travaux, de sorte que nous avons décidé que le rapporteur de majorité, au nom de la majorité, proposerait que soient soutenus les amendements du Conseil d'Etat de sorte que légalement, Madame la présidente, ces amendements ne font pas encore partie du projet de loi, puisqu'ils ne faisaient pas partie du rapport de majorité. Il faut les voter pour que le texte soit complet. Mme Martine Brunschwig Graf opine du chef ,parce qu'elle a vu exactement ce qui s'est passé. J'imagine que M. le rapporteur de majorité confirmera que c'est bien dans ce sens que nous devons agir, pour être sûrs qu'il n'y aura pas un recours contre la décision que nous sommes en train de prendre. Il ne s'agit pas là de politique mais d'oeuvrer en vue d'avoir un texte correct.

La présidente. Je passe la parole à M. le rapporteur Pierre Weiss.

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Madame la présidente, je confirme l'interprétation que vient de faire M. Hiler en tant que président de la commission des finances. Vous avez certainement été attentive, ainsi que d'autres participants de cette assemblée...

La présidente. Oui, vous en avez parlé.

M. Pierre Weiss. ...que ma première remarque, en introduction de mon commentaire, a été d'indiquer qu'en date du 29 novembre, le jour même du dépôt de mon rapport, un complément avait été déposé par le département de l'action sociale et de la santé, à la signature de M. Unger, qu'il comportait différents amendements. J'ai rappelé la teneur de l'amendement principal qui fait partie de la liste de ce courrier du 29 novembre. Mme la présidente du Grand Conseil, dans sa lecture, en deuxième débat, a intégré les amendements du Conseil d'Etat dans la suite de ceux qui se trouvent sur le projet de loi 9370.

La présidente. Monsieur le rapporteur, je me souviens très bien de votre bande-annonce, qui était très précise.

Nous allons procéder au vote. (Exclamations. Brouhaha.)Le vote est lancé. (Virulentes exclamations.)

Une voix. Il faut les présenter comme des amendements !

La présidente. Je passe la parole à Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat.

Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. Ils ont peut-être été lus mais, sauf à contrarier tous les juristes du Grand Conseil, je pense qu'il serait plus habile de les présenter séparément au vote... (Manifestation dans la salle.)...ce qui permettrait de boucler le vote correctement et d'arrêter ce bras de fer inutile. (Vif brouhaha. La présidente agite la cloche.)

La présidente. La présidente. Je suspends la séance pour cinq minutes. Ou plus exactement, c'est le moment de la pause. Nous prenons une pause et nous reprendrons après, à 10h15.

Suite du deuxième débat sur le PL 9370-A: Session 03 (décembre 2004) - Séance 13 du 17.12.2004

La séance est levée 10h.