Séance du
vendredi 3 novembre 2017 à
15h
1re
législature -
4e
année -
8e
session -
44e
séance
La séance est ouverte à 15h, sous la présidence de M. Eric Leyvraz, président.
Assistent à la séance: MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Mauro Poggia, Pierre Maudet et Serge Dal Busco, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Anne Emery-Torracinta, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Bertrand Buchs, Jean-Louis Fazio, Sandra Golay, Jean-Charles Lathion, Vincent Maitre, Cyril Mizrahi, Philippe Morel, Patrick Saudan, Daniel Sormanni, Georges Vuillod et Yvan Zweifel, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Delphine Bachmann, Marko Bandler, Jean Fontaine, Nathalie Hardyn, Ana Roch, Marion Sobanek, Pascal Uehlinger et Céline Zuber-Roy.
Annonces et dépôts
Néant.
Questions écrites urgentes
Le président. Vous avez trouvé sur vos places les questions écrites urgentes suivantes:
Question écrite urgente de M. Patrick-Etienne Dimier : Comment le Conseil d'Etat gère-t-il les relations du canton avec la BNS ? (QUE-722)
Question écrite urgente de M. Bertrand Buchs : Pourquoi l'Etat interdit-il les prescriptions d'hormones thyroïdiennes signées par des médecins français ? (QUE-723)
Question écrite urgente de M. Christo Ivanov : SCORE moins cher que les réévaluations de fonctions bloquées ? (QUE-724)
Question écrite urgente de M. Patrick Lussi : Pertinence de la formation des policiers à l'Académie de police de Savatan, notamment pour la police judiciaire (QUE-725)
Question écrite urgente de M. Christian Zaugg : Baisse de candidats à la police (QUE-726)
Question écrite urgente de M. Christian Zaugg : Coût de formation des policiers et attractivité des grades (QUE-727)
Question écrite urgente de M. Patrick Lussi : Questionnaire sur la perception des policiers quant au cadre actuel de la profession (QUE-728)
Question écrite urgente de M. François Baertschi : Quel est le coût réel de la formation à Savatan et le surcoût réel pour Genève ? (QUE-729)
Question écrite urgente de M. François Baertschi : Sondage auprès des policiers : quels sont les résultats ? (QUE-730)
Question écrite urgente de M. Boris Calame : Un profond malaise se développe au sein de la police judiciaire. Que fait le collège gouvernemental pour y remédier ? (QUE-731)
Question écrite urgente de M. Boris Calame : « La Tribune de Genève n'est pas un média » ou quand un conseiller d'Etat se lâche... (QUE-732)
Question écrite urgente de Mme Isabelle Brunier : Cité de la musique : on ne refuse pas les cadeaux... mais on peut se poser quelques questions ! (QUE-733)
Question écrite urgente de Mme Marion Sobanek : Groupe équestre dans la police de proximité : Quels besoins et quelles priorités justifient la création d'un tel groupe ? A quel prix ? (QUE-734)
Question écrite urgente de M. Thomas Bläsi : SCORE : pourquoi de tels changements en quatre ans ? (QUE-735)
Question écrite urgente de M. Boris Calame : Quand le Conseil d'Etat de la République et canton de Genève se défait de ses supports d'information, il y a matière à se questionner (QUE-736)
Question écrite urgente de Mme Maria Pérez : Genève Plage : quelle transparence financière ? (QUE-737)
Question écrite urgente de Mme Maria Pérez : Le parcage des deux-roues motorisés sur les trottoirs est-il légal ou tolérable ? (QUE-738)
Question écrite urgente de Mme Jocelyne Haller : Un policier condamné pour faux dans les titres sans conséquence ? (QUE-739)
Question écrite urgente de M. Marko Bandler : Quelle enquête pour la police ? (QUE-740)
Question écrite urgente de M. Marko Bandler : Qu'est-ce qu'une police « militaire » ? (QUE-741)
Question écrite urgente de M. Marko Bandler : Quel SCORE pour les salaires de la police judiciaire ? (QUE-742)
Question écrite urgente de M. Marko Bandler : L'école de police a-t-elle peur des syndicats ? (QUE-743)
Question écrite urgente de M. Olivier Baud : Quelles mesures pour revaloriser la police judiciaire ? (QUE-744)
Question écrite urgente de M. Jean Batou : Mais comment va la police ? (QUE-745)
Question écrite urgente de M. Pierre Vanek : Police : les réquisitions sont-elles assurées ? (QUE-746)
QUE 722 QUE 723 QUE 724 QUE 725 QUE 726 QUE 727 QUE 728 QUE 729 QUE 730 QUE 731 QUE 732 QUE 733 QUE 734 QUE 735 QUE 736 QUE 737 QUE 738 QUE 739 QUE 740 QUE 741 QUE 742 QUE 743 QUE 744 QUE 745 QUE 746
Le président. Ces questions écrites urgentes sont renvoyées au Conseil d'Etat.
Questions écrites
Le président. Vous avez également trouvé sur vos places les questions écrites suivantes:
Question écrite de M. Gabriel Barrillier : Que fait le canton de Genève dans les programmes scolaires pour faire face à tous les changements que les nouveaux médias impliquent ? (Q-3799)
Question écrite de M. André Python : Le cabotage est-il autorisé pour la police ? (Q-3800)
Le président. Ces questions écrites sont renvoyées au Conseil d'Etat.
Annonce: Séance du vendredi 13 octobre 2017 à 16h
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Débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons notre ordre du jour. Pour la M 2333-A, dont nous débattons en catégorie II, trente minutes, Mme de Montmollin remplace M. Saudan, rapporteur de majorité. Madame de Montmollin, je vous passe la parole.
Mme Simone de Montmollin (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Je reprends le rapport qu'avait écrit M. Saudan sur cette proposition de motion 2333 qui demandait de ne pas loger de requérants d'asile près des écoles et même de respecter une distance de 500 mètres. (Commentaires.) Cette motion a été traitée par la commission des affaires sociales durant deux séances au terme desquelles un refus catégorique d'entrer en matière a été décidé, sans avoir procédé à des auditions, pour la raison suivante. Tout d'abord, il convient de rappeler que, sur la forme, la majorité de la commission n'a pu cautionner ni l'exposé des motifs ni les invites, tant les propos discriminants qu'ils contenaient étaient contraires à ses valeurs. Entre des amalgames avec des événements survenus ailleurs en Europe et des accusations formulées à l'encontre de dirigeants étrangers sur leurs politiques migratoires, ou encore le portrait fait de cette population migrante, tout détonnait dans cette motion, détonnait avec le respect élémentaire que nous souhaitons défendre dans ce parlement.
Cela étant dit, sur le fond, ce texte aborde la légitime question des craintes de la population relatives à l'intégration des requérants d'asile, aux modalités qui doivent accompagner cette intégration, tant sur les questions d'hébergement, d'encadrement que des liens avec la population locale. Ce sont des craintes légitimes auxquelles il s'agit de répondre. Nous n'avons pas procédé à des auditions parce que deux pétitions traitant du même sujet avaient déjà été traitées par ce parlement, dûment étudiées à la commission des pétitions puis votées par notre Grand Conseil en septembre dernier. Nous avons établi notre position sur la base des auditions qui avaient été menées dans ce cadre. Ces auditions avaient mis en évidence plusieurs éléments. Tout d'abord, les dispositifs mis en place par le DSE pour l'accompagnement et l'encadrement de ces personnes par les autorités nous avaient été expliqués. Le plan Osiris, puis la cellule de veille efficace constituée de représentants du DEAS, du DSE ainsi que de toutes les parties prenantes, pour un accompagnement approprié, vigilant, privilégiant le dialogue avec les communes et avec les populations concernées, ont permis de désamorcer les craintes. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Deuxièmement, il était fait état d'infractions liées à cette population supposément plus importantes. Là aussi, les statistiques de la police ne relevaient pas d'incivilités particulières à proximité des centres de requérants. Troisièmement, s'agissant du comportement de ces populations, il a aussi été mis en évidence que ce sont pour la plupart des personnes qui resteront chez nous, qui seront au bénéfice d'un permis F et qui sont absolument conscientes des enjeux liés à leur comportement dans cette procédure.
Le président. Vous prenez sur le temps de votre groupe.
Mme Simone de Montmollin. Très bien ! Concernant le type de population, eh bien, dans ces abris, on logeait effectivement les hommes seuls. Pourquoi ? Parce que les familles et les femmes étaient généralement hébergées dans des logements hors sol, ce qui justifiait la présence de ce profil de population dans les abris.
A la lumière des informations données par le département, la majorité a convenu qu'aucun élément survenu à Genève ne permettait d'affirmer que l'hébergement dans le voisinage d'une école était particulièrement problématique ou générait un risque supplémentaire; tout comme il n'y avait aucun lien de causalité entre le fait de respecter une distance de 500 mètres et la limitation des risques de méfaits éventuels, qui n'ont pas pu être prouvés non plus. Pour toutes ces raisons, la majorité a souhaité refuser cette motion et vous encourage à faire de même.
M. Marc Falquet (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, dans cette motion, il s'agit en fait d'appliquer le principe de précaution, un principe de précaution élémentaire. A titre comparatif, lorsque des militaires sont logés dans des abris de la protection civile, ils ont l'interdiction absolue de s'approcher des écoles et des enfants. Je ne crois pas qu'on discrimine les militaires en leur donnant ce genre d'instructions. La question n'est pas de discriminer les demandeurs d'asile, mais avant tout d'éviter les problèmes, surtout lorsque la majorité des demandeurs d'asile sont des citoyens célibataires, seuls évidemment, déracinés, souvent avec des nombreuses frustrations, dues à leur situation, bien entendu. Je ne crois donc pas que ce soit une bonne idée de tenter le diable et c'est une simple précaution, avant qu'il n'arrive un drame. Peut-être que vous critiquez l'UDC maintenant, mais le jour où un drame surviendra, l'UDC aura fait son travail de prévention minimum. Je vous rappelle quand même qu'il y a eu plusieurs pétitions, et les gens ont effectivement des craintes, tout le monde le reconnaît. Mais, lorsque l'UDC le relève, ce n'est plus valable, c'est un problème de l'UDC avec sa phobie. Pourtant, la population a effectivement des craintes et elle a raison d'en avoir ! Elle a raison d'avoir des craintes car la situation même est dangereuse, et ce n'est pas parce qu'il s'agit de demandeurs d'asile, mais parce qu'ils sont célibataires. (Commentaires.) Célibataires et dans une situation particulière qui fait qu'il peut y avoir des tentations, tentations qu'il faut éviter, je pense. Il faut surtout protéger la population. Effectivement, la distance n'a peut-être pas grande importance: que ce soit à 500 ou à 600 mètres, le but est d'éloigner le plus possible des écoles les centres de requérants d'asile, surtout les nouveaux centres évidemment, pour éviter tout problème à venir. Voilà, je reprendrai la parole plus tard.
M. Marko Bandler (S), député suppléant. Mesdames et Messieurs les députés, vous connaissez probablement toutes et tous la célèbre phrase de Talleyrand qui dit que tout ce qui est excessif est insignifiant, devenue un dicton populaire. Je crois qu'avec ce texte, on se trouve exactement dans ce cas de figure. Il ne s'agit pas ici d'un texte politique, il s'agit ici, comme à l'accoutumée, comme on nous l'a servi hier lors de l'examen des projets de lois 12003 et 12004, d'un plaidoyer pour attiser l'intolérance, la haine et le mépris envers les migrants et envers notre politique d'asile. La question des écoles et de la distance a bon dos quand on voit le type d'arguments qui nous sont servis tout au long de l'exposé des motifs de cette motion. Je ne reviens pas sur les arguments concernant la recevabilité de ce texte dont le thème a déjà fait l'objet d'un traitement par notre Grand Conseil sous la forme de pétitions. C'est plutôt sur le fond qu'il s'agit à mon avis de s'arrêter quelques instants.
La question de la sécurité à propos des centres où sont rassemblés les personnes vulnérables et les migrants - dans le cas qui nous occupe aujourd'hui - est une vraie question, légitime, qui mérite d'être posée et d'être traitée avec des arguments constructifs, objectifs et argumentés. Mais on ne peut pas la traiter en remplaçant des arguments par des outrages et des mensonges, comme c'est le cas ici. La M 2333 n'est qu'un catalogue ignoble de poncifs insultants et de contre-vérités et je trouve d'ailleurs que la violence des termes utilisés pour qualifier les migrants est en tous points de vue choquante. Est-ce qu'on peut vraiment considérer avec sérieux dans une enceinte comme la nôtre certains considérants abjects qui accompagnent cette motion ? Je les cite: «les diverses affaires de viols et d'agressions sexuelles intervenues dans de nombreux pays d'Europe à l'encontre de femmes et d'enfants»; plus loin: «une part importante des requérants s'adonne au trafic de drogue». Une fois de plus, l'UDC ne nous épargne aucune ignominie, aucun stéréotype, aucune exagération ! Le procédé est comme à l'accoutumée particulièrement honteux et je regrette qu'il soit systématiquement utilisé par l'UDC lorsqu'il s'agit de parler des migrants et de notre politique d'asile. Je dois quand même rappeler à M. Falquet et aux signataires, à toutes fins utiles, que nous parlons ici d'êtres humains qui ont connu des drames épouvantables, qui ont souvent tout perdu sur le chemin de l'exil et qui viennent simplement chercher refuge sous nos latitudes. Comment peut-on, comment ose-t-on les déshumaniser de la sorte ? (Commentaires.)
Finalement, en remplaçant tout semblant d'once de début d'argumentaire par un flot ininterrompu de clichés trompeurs et de poncifs éculés, l'UDC veut nous obliger à débattre d'une problématique délicate par le seul prisme de l'intolérance et de la haine. Charge à nous, donc, de ne pas entrer dans ce jeu et de ne pas offrir à l'idéologie nauséabonde de l'UDC la tribune qu'elle ne mérite assurément pas. On n'argumente ni contre les mensonges ni contre les impostures: on les renvoie simplement dans les poubelles de l'histoire politique de notre canton dont ils n'auraient jamais dû sortir ! (Applaudissements.)
M. André Pfeffer (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, des parents d'élèves de l'école primaire de Bellavista à Meyrin ont déposé deux pétitions pour contester la présence de requérants d'asile sous le bâtiment scolaire. Des parents d'élèves de l'école primaire d'Aïre ont également déposé une pétition pour contester la présence de requérants à proximité immédiate de leur école. L'ACG - Association des communes genevoises - admet elle-même que la proximité de requérants d'asile avec une école est une situation très difficile à gérer. L'Hospice général, responsable des centres pour requérants, admet également que la proximité entre les enfants à l'école et les personnes seules serait à éviter. Malgré cette situation et ces nombreux constats, la commission des affaires sociales n'a pas jugé utile d'entrer en matière et d'étudier cette motion. Est-ce que renoncer à l'implantation de centres d'accueil pour requérants d'asile ou déboutés à moins de 500 mètres d'un établissement scolaire serait scandaleux et irréaliste ? L'UDC ne le pense pas ! Lorsque l'armée occupe des abris de protection civile près d'une école, des mesures strictes sont prises pour préserver la tranquillité et éviter de perturber les élèves. Lors de constructions de camps par le HCR, le représentant des conventions pour les réfugiés, des distances avec les frontières, des distances avec des personnes à protéger sont également respectées.
La deuxième inquiétude de la commission sociale est qu'il n'existerait aucune autre possibilité à Genève. Là aussi, l'UDC ne le pense pas: l'Hospice général possède plusieurs emplacements qui ne sont pas à proximité de bâtiments scolaires. En plus, l'Hospice général gère plus de 3000 appartements à Genève, auxquels il faut ajouter 2500 places dans des logements provisoires. De ce fait, il serait tout à fait possible de trouver une solution avec les lieux existants, quitte à devoir placer une personne de plus dans un appartement de quatre ou cinq pièces. (Exclamations.) Avant de créer de nouveaux emplacements à côté d'une école, il faut absolument mieux gérer et mieux utiliser les emplacements existants !
Par rapport à la troisième inquiétude de la commission, est-ce qu'il existerait un quelconque risque de sécurité pour nos écoliers ? (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Pour l'UDC, la réponse est clairement positive ! Lors de la visite d'un abri de la protection civile avec la commission sociale, le constat était clair: la grande majorité des personnes étaient des NEM, des personnes sous le coup d'une non-entrée en matière. Surtout, la grande majorité de ces NEM avait déjà effectué un ou plusieurs séjours à Champ-Dollon ! M. Poggia relève lui-même...
Le président. C'est terminé, merci ! (Commentaires.) La parole est à M. Girardet.
M. Jean-François Girardet (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, il ne s'agit pas de savoir si l'UDC, par cette motion, a raison ou pas. La population a déjà dénoncé la situation ou s'est déjà prononcée en disant qu'il était pour elle dangereux d'accueillir quarante jeunes célibataires requérants d'asile ou autres migrants à proximité d'une école par le biais des deux pétitions qui avaient été déposées... (Remarque.) Je vous dis où: à l'école Bellavista, à Meyrin. Le Grand Conseil a traité ce sujet puisqu'il a déposé l'une de ces pétitions sur le bureau du Grand Conseil; l'autre, il l'a classée purement et simplement. Nous n'allons donc pas récidiver avec cette motion. Le MCG ne s'opposera pas à cette motion, mais il désire faire le constat de ce qui s'est passé après ces deux pétitions. Le conseiller d'Etat a pris acte de ces deux pétitions, malgré leur classement ou leur dépôt; il a tenu compte de ce fait puisque à Meyrin, nous n'avons pas pu accueillir ou pas vu accueillir des requérants dans les abris PC sous l'école de Bellavista. Donc, aujourd'hui, le Conseil d'Etat ne juge pas adéquat de placer des requérants sous une école; nous voulons lui faire confiance pour l'avenir, sachant qu'il aura le bon sens d'utiliser des bâtiments à proximité d'une école pour autant que ce soit en dernier recours et que d'autres solutions auront été négociées avec les communes pour accueillir soit des célibataires, soit des familles de requérants ou de migrants. Nous voulons redire que nous faisons confiance au Conseil d'Etat pour qu'il amorce cette concertation avec les communes pour trouver des lieux adéquats afin d'accueillir ces migrants qui en ont bien besoin. (Commentaires.) Le MCG s'abstiendra donc à ce propos.
Mme Nathalie Schneuwly (PLR). Le PLR est très attaché au bien-être de sa jeunesse et à son avenir: il soutient une bonne éducation, les places en crèches et maintenant des gardes d'enfants comme le service Mary Poppins. Il est pour la sécurité aux abords des écoles; il est aussi très soucieux que nos enfants trouvent des logements à Genève. Bref, quand on parle des enfants, le PLR est toujours présent. En accord avec nos valeurs, nous devrions soutenir cette motion, mais en fait, elle est complètement irrationnelle: elle joue sur les émotions. On l'a dit hier, on l'a redit aujourd'hui, on fait un amalgame malsain entre les requérants, les délinquants et même - ce qui ne ressort absolument pas des auditions - les viols aux abords des écoles. Il est complètement néfaste de stigmatiser les réfugiés. Nous faisons donc confiance au gouvernement qui a tout fait pour accueillir les réfugiés dans notre canton et qui y parvient, même si la tâche est difficile. Dans ce cas-là, nous allons tout simplement refuser ce texte. (Applaudissements.)
Mme Frédérique Perler (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, mes propos ne vous étonneront pas: il est évident que le groupe des Verts va très clairement et très sèchement refuser cette proposition de motion. Je ne peux que souscrire aux propos qui ont été tenus par notre rapporteuse de majorité. Et je regrette que l'UDC persiste, dans la forme et le fond, dans ses propos malheureusement récurrents qui ne font qu'attiser les inquiétudes et stigmatiser toute une population qui ne le mérite pas !
M. Falquet nous explique qu'il s'agit d'une simple prévention, d'une précaution à prendre. Permettez-moi de m'étonner, Monsieur le président, quand on lit la teneur de cette motion, notamment ses considérants ! Vous pensez bien que la question a été posée à l'UDC en commission: avez-vous des exemples à nous donner ? Qu'est-ce qui vous fait affirmer qu'il faut prendre des mesures de précautions ? Aucun élément ou délit n'est avéré; la réponse de l'UDC n'a été qu'un silence assourdissant ! C'est bien là la raison de notre refus ! Cette population qui vient effectivement chercher refuge à Genève ne demande qu'une chose: de pouvoir enfin vivre en paix. Et j'aimerais rappeler à l'UDC qui semble continuer à l'ignorer que la majorité des crimes sexuels ne sont pas perpétrés par des gens de l'extérieur - c'est statistique - mais par des gens de l'entourage immédiat des enfants victimes ! Pour ces raisons, nous refuserons cette motion. (Applaudissements.)
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, nous voilà une fois encore nantis d'un texte qui criminalise les requérants d'asile. Cette motion alimente les pires préjugés et considère les requérants d'asile comme potentiellement coupables de tous les maux. Cette posture empruntée systématiquement par l'UDC est dénuée de sens; elle est outrancière, calomnieuse et irresponsable.
J'aimerais quand même exprimer mon étonnement face à un ou deux éléments amenés au cours de ce débat. D'abord, on entend avec un certain étonnement qu'il y aurait tout d'un coup diverses possibilités d'implantations de centres d'accueil et qu'il n'y «aurait qu'à» ! Or, on sait les difficultés du département à trouver des lieux pour implanter ces centres et les oppositions qui s'élèvent régulièrement contre ces lieux. Et puis, on nous parle de la population, la population qui ne veut pas, la population qui a peur. Il y a effectivement dans la population un certain nombre de personnes qui ont des appréhensions - à plus forte raison quand on alimente ces appréhensions en accusant et en prétextant que les requérants d'asile sont capables de tout et des pires crimes ! J'aimerais vous rappeler que, dans un certain nombre de communes, des associations se sont créées pour accueillir les requérants d'asile, pour les accompagner, pour leur proposer des activités. Donc, la population dont vous parlez, elle n'est pas une, elle est diverse ! Si un certain nombre de gens ont des appréhensions, la meilleure chose qu'il conviendrait de faire, ce serait de permettre aux gens de se rencontrer, ce serait de cesser d'alimenter des préjugés et de répandre des calomnies et plutôt de favoriser la rencontre et les échanges pour que les tensions s'apaisent. Voilà ce qui serait une attitude responsable, notamment de la part d'élus ! C'est ce que nous vous appelons à favoriser comme attitude en refusant cette motion. (Applaudissements.)
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, dire que c'est complexe ne veut pas dire que c'est dangereux; dire que c'est délicat ne veut pas dire que c'est dangereux. Evidemment, à écouter l'UDC depuis hier, on peut imaginer que ces personnes devraient être dans des camps de rétention, voire des camps de concentration. Non, la population n'a pas raison d'avoir des craintes, même si elle a raison de les exprimer ! Nous faisons confiance au Conseil d'Etat, Monsieur le président, pour gérer au cas par cas, selon les communes, selon les endroits. C'est ce qui s'est fait à satisfaction. Vous savez ce qui a traumatisé les enfants aux alentours des écoles, Monsieur le président ? Ce sont les affiches de l'UDC avec ces grosses bottes qui écrasent des gens ! Ça, c'est traumatisant ! Ce ne sont pas les migrants qui sont traumatisants ! (Applaudissements.)
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, il faut rappeler qu'au plus fort de la crise migratoire, lorsque l'Hospice général avait à gérer neuf abris, jamais la police de ce canton n'a constaté une quelconque recrudescence des délits et encore moins des crimes ou même des incivilités. C'est pour vous dire à quel point cette population est majoritairement, et en très grande partie, respectueuse; elle se trouve d'ailleurs en procédure d'examen d'asile et a un intérêt évident à montrer un respect total de notre législation et à faire preuve d'un comportement irréprochable.
Si je peux comprendre l'inquiétude de parents, souvent exacerbée par les liens affectifs bien légitimes vis-à-vis de leur progéniture, je ne peux pas comprendre - je le reproche à cette proposition de motion - que l'on puisse instrumentaliser ces craintes pour en faire un argument politique. Je trouve ce texte particulièrement insultant pour ces populations: on les stigmatise et on les présente comme des populations qui seraient prédatrices, prédatrices sexuelles, alors qu'il a été très justement rappelé que la quasi-totalité des crimes commis dans ce domaine l'est par des personnes bien résidentes, souvent des personnes au-dessus de tout soupçon et proches des enfants en question.
Permettez-moi de sourire quand je vois qu'on nous demande d'installer ces personnes à plus de 500 mètres d'une école. Si on considère qu'il y a un risque, ce qui est évidemment une absurdité totale, à ce moment-là, il faudrait tout simplement interdire ces personnes de notre territoire. Excusez-moi, Mesdames et Messieurs, mais un prédateur sexuel peut parcourir 500 mètres et, généralement, s'il ne veut pas être immédiatement soupçonné, il a plutôt intérêt à ne pas commettre ses actes à proximité immédiate de l'endroit où il réside ! Excusez-moi, mais le texte même de cette motion me fait sourire.
J'ai entendu un autre argument des motionnaires qui m'inquiète: on nous dit qu'il faut éviter les tentations. Messieurs les membres de l'UDC qui avez déposé cette motion, c'est exactement l'argumentation que soutiennent ceux contre lesquels vous vous battez de manière tout à fait légitime: ces islamistes qui veulent couvrir leurs femmes au motif qu'il ne faut pas créer de tentation ! Excusez-moi, mais ne pas vouloir créer de tentation est un argument que je ne veux pas entendre ! Je pense que les moyens pour éviter ce genre de problèmes sont tout autres que ceux que vous souhaitez. Je pense que c'est d'abord la mise en confiance, c'est d'abord le respect mutuel: on ne respecte finalement que ceux qui nous respectent, et ce n'est pas avec des textes comme ceux-ci que vous obtiendrez le respect de ceux qui viennent sur notre territoire ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je lance le vote sur cette proposition de motion.
Mise aux voix, la proposition de motion 2333 est rejetée par 58 non contre 9 oui et 14 abstentions.
Débat
Le président. Nous passons à la M 2378, qui est une motion de commission et, à ce titre, n'a pas fait l'objet d'un renvoi en commission sans débat. Le débat est en catégorie II, trente minutes. Monsieur Wicky, vous avez la parole.
M. Raymond Wicky (PLR). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, permettez-moi tout d'abord de faire un petit historique. Cette motion de commission est consécutive au traitement d'une pétition qui défendait l'implantation et la présence physique de l'hélicoptère de sauvetage sur le territoire de la République et canton de Genève. Elle était aussi consécutive à des déclarations du gouvernement ayant mis en exergue des pistes d'économies qui pourraient toucher cet hélicoptère. (Commentaires.) Que demande cette motion ? Pour faire suite au renvoi au Conseil d'Etat de la pétition, simplement de faire un inventaire - qui doit certainement déjà exister - des tâches et des missions que cet hélicoptère assure. Ensuite, de trouver des solutions intégrées par rapport à l'implantation de cet hélicoptère. Enfin, pourquoi pas, de développer des synergies avec nos amis vaudois voire avec la Rega. Après ces considérations, il est quand même important de rappeler que les organisations de secours genevoises ont fait d'importants efforts et se sont investies un maximum afin d'intégrer cet outil d'intervention dans leurs activités. J'en veux pour preuve divers exemples: la police intègre cet hélicoptère chaque fois qu'elle fait des recherches de disparus; les pompiers l'utilisent pour des interventions en milieu difficile, par exemple lorsqu'un grutier fait un malaise cardiaque; évidemment, la brigade sanitaire fait de même lorsque l'intervention sanitaire nécessite de la célérité ainsi que des conditions de transport particulières.
N'oublions pas non plus la dimension internationale de Genève qui n'est pas négligeable et que nous défendons au sein de ce parlement. Il paraissait également particulièrement important à la commission que l'on puisse disposer de cet outil pour assurer la couverture des nombreuses manifestations et réunions d'importance mondiale organisées à Genève. Certes, il faut trouver des solutions qui pourraient alléger la charge financière, et nous rendons grâce au Conseil d'Etat qui oeuvre en ce sens. Malgré tout, il nous paraît également logique et important que l'on trouve une solution qui intègre une base genevoise. Pour toutes ces raisons, le PLR soutiendra cette motion. Merci de votre attention !
M. Pascal Spuhler (MCG). Il n'est pas nécessaire d'en rajouter beaucoup plus, car mon préopinant, M. Raymond Wicky, a dit l'essentiel. Je vous le rappelle, cet objet est une motion de commission déposée suite au traitement d'une pétition au sein de la commission des pétitions. Je vous enjoins de voter sur le siège cette motion et de la renvoyer au Conseil d'Etat qui la recevra avec plaisir, je pense, puisqu'il nous avait déjà annoncé son intention de répondre à l'invite de cette motion. Le MCG soutiendra évidemment ce texte.
M. Christian Frey (S). J'apporterai juste un petit complément: cette motion fait suite à la pétition qui avait provoqué une certaine émotion; on a vu que les Genevois tenaient absolument à l'hélicoptère Rega 15. La commission des pétitions, à l'époque sous ma présidence, a souhaité apporter un complément au rapport. Il est vrai qu'au cours des auditions, nous n'avions entendu ni la Rega ni les HUG. Cette proposition de motion vient compléter le rapport de la commission sur la pétition déposée à ce sujet.
Nous sommes sur la bonne voie: vous avez vu la réponse du Conseil d'Etat à la pétition - pas à la motion que nous traitons maintenant, mais à la pétition. Effectivement, on est sur la bonne voie puisque le Conseil d'Etat affirme dans cette réponse que «le conseil d'administration des HUG a recentré la réflexion en cours et demandé que soit étudié le meilleur scénario d'exploitation pour» - écoutez bien ! - «maintenir une base sanitaire aéroportée à Genève». Ensuite, le Conseil d'Etat appréciera les propositions des HUG pour le plus grand bien des personnes à Genève qui ont besoin d'un transport héliporté.
M. Bernhard Riedweg (UDC). Les HUG pourraient déléguer l'exploitation de l'hélicoptère sans changer sa mission de sauvetage. La Rega partage sa gestion avec les HUG et intervient tant dans le canton de Vaud que dans le département de l'Ain. Cela permettrait de réallouer une partie des ressources dégagées au profit d'un plus grand nombre de patients. Les ambulanciers terrestres peuvent fort bien assurer les secours en ville en moins de dix minutes et en moins de quinze minutes en périphérie. Il ne faut pas oublier qu'un hélicoptère ne peut pratiquement pas atterrir en ville à cause des câbles des TPG. Cet hélicoptère pourrait être basé à Lausanne, à vingt minutes de Genève en vol direct. Nous vous demandons d'accepter cette motion.
Le président. Merci, Monsieur. La parole est à M. Flury pour deux minutes trente.
M. Christian Flury (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le poussin jaune - l'hélicoptère de sauvetage des HUG - est une pièce primordiale du puzzle régional des moyens de sauvetage, de secours et de soins. Il est le seul moyen de se porter rapidement et efficacement au contact d'accidentés en milieu escarpé, en rivière ou sur le lac ainsi que dans tous les terrains non rapidement accessibles par voie terrestre. Au contraire de la route - nous connaissons parfaitement la situation chaotique de la circulation à Genève - la voie des airs permet de se déplacer rapidement et aisément. Diverses études ont démontré que la rapidité de l'arrivée des soins sur le lieu d'un accident ou d'un malaise ainsi qu'une excellente médicalisation du patient sur site avant son transport en milieu hospitalier développait des effets bénéfiques sur le pronostic de récupération du patient, sur la durée d'hospitalisation et, finalement, sur les frais de traitement.
Sous un autre angle, compte tenu du nombre de missions que l'hélicoptère genevois effectue au profit de la base aérienne Rega de Lausanne, il est illusoire de penser que nos voisins pourraient compenser la disparition du poussin jaune: cette suppression se ferait au détriment de nos concitoyens. Priver Genève et sa région de cet hélicoptère signifierait revenir à la situation ante, c'est-à-dire à faire un saut en arrière d'une bonne cinquantaine d'années, quand la population était nettement moindre. Notre canton a les moyens de conserver ce vecteur de secours. Le groupe MCG vous invite à voter sur le siège la prise en considération de cette motion afin qu'elle puisse rejoindre la pétition similaire que nous avons récemment votée.
M. Guy Mettan (PDC). Je serai bref. Le parti démocrate-chrétien s'est associé à la signature de cette motion suite aux auditions que nous avons menées à la commission des pétitions, et, naturellement, il la soutiendra. Pour toutes les raisons invoquées par mes préopinants, il vous recommande aussi de voter cette motion sur le siège. A titre personnel, j'aurais souhaité qu'on écoute la Rega, parce qu'elle a une très grande expérience - c'est la société de sauvetage par excellence en Suisse, elle a la meilleure expérience en matière de gestion d'hélicoptères et de sauvetages. Je pense que cela aurait pu apporter un éclairage intéressant; cela aurait peut-être pu donner des idées en matière d'intégration, justement. Ça n'a pas été le cas, je le regrette, mais sur le fond, nous sommes d'accord avec l'intention de la motion.
M. Alberto Velasco (S). J'ai entendu toutes ces personnes qui sont tout à fait d'accord avec le maintien de l'hélicoptère. Monsieur le président, j'espère que quand on présentera la facture de l'hôpital cantonal dans le budget de l'Etat, tout le monde sera aussi d'accord de voter cette facture, si possible avec une rallonge: parce que ceux qui disent oui aujourd'hui sont les mêmes qui coupent dans le budget de l'hôpital cantonal ! Une des raisons pour lesquelles l'hôpital a présenté cette proposition était le fait de réaliser des économies, Mesdames et Messieurs les députés ! Des économies qui lui sont imposées, l'hôpital n'ayant jamais voulu se séparer de l'hélicoptère comme ça ! Vous donnez un hélicoptère à un hôpital, il le prend ! Magnifique ! Mais à chaque coup de boutoir, l'hôpital se demande s'il a vraiment besoin de l'hélicoptère puisque la Rega a une base juste à côté, sur Vaud, à quelques minutes. Ce qui est extraordinaire aujourd'hui, c'est la belle unanimité de tous les partis pour dire qu'il faut conserver cet hélicoptère. C'est bien gentil, mais à la présentation du prochain budget de l'hôpital, il faudra peut-être amener une rallonge, non seulement pour l'hélicoptère, mais surtout pour faire face à la situation difficile qu'affronte aujourd'hui l'hôpital, avec les personnes âgées, les malades, les migrants, etc. Alors c'est très bien pour l'hélicoptère, mais je veux vous voir quand il s'agira de donner du pognon pour des humains et des malades ! (Applaudissements.)
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Je vous ai entendus, Mesdames et Messieurs les députés, et le conseil d'administration des HUG vous a entendus aussi, puisque en août 2016, il avait envisagé ce transfert à la Rega - ce qui ne voulait pas dire qu'il se lavait les mains du problème. Au mois d'août, il y a quelques semaines, le conseil d'administration a décidé de finaliser une convention de collaboration avec la Rega. Compte tenu de l'émoi suscité par la seule idée de réfléchir à l'avenir de cet hélicoptère sur le canton de Genève, il a fallu que ce sujet soit abordé rapidement et de manière approfondie. Je rappelle néanmoins que la question qui s'est toujours posée n'était pas de savoir s'il fallait ou non avoir un hélicoptère sur le sol genevois, mais de savoir qui devait assumer le coût de cet hélicoptère sur territoire genevois. Parce que cela ne fait pas forcément partie des tâches que l'on doit confier à un hôpital universitaire de disposer de mécaniciens pour hélicoptères, même si le personnel médical d'urgence doit être mis à disposition par les hôpitaux universitaires. Aujourd'hui, six personnes sont sur le pied de guerre 24 heures sur 24, si vous me passez l'expression, prêtes à monter dans cet hélicoptère: trois pilotes et trois aides de vol, systématiquement accompagnés d'un médecin. Tout cela a un coût, comme l'a rappelé très justement M. le député Velasco, et il faut bien se rendre compte que la schizophrénie politique qui vise à demander des économies tout en voulant toujours le maintien des prestations ou leur augmentation a finalement ses limites, qui sont celles de l'arithmétique. Il faudra qu'on revienne un jour sur le sujet de cet hélicoptère, mais je vous rassure, je rassure notre population, je rassure la Genève internationale qui nous a également interpellés: la base genevoise de l'hélicoptère sera maintenue, nous mettons sur pied une collaboration efficace avec la Rega. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous votons sur cette proposition de motion.
Mise aux voix, la motion 2378 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 83 oui et 2 abstentions.
Débat
Le président. L'objet suivant est classé en catégorie II, trente minutes. Monsieur Hiltpold, je vous laisse la parole.
M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous propose un historique du chemin de croix de cette proposition de résolution déposée lors de la précédente législature. Elle a été débattue dans ce parlement puis renvoyée en commission; je vous rappellerai le point essentiel concernant le renvoi: celui-ci avait été demandé notamment pour faire vérifier par un avis de droit la possibilité de voter un tel texte. Cet avis de droit a été demandé, il a été discuté au sein de la commission des affaires sociales et la possibilité d'un régime cantonal a été confirmée, sans grande surprise. Ce sont les faits: ce n'était pas vraiment surprenant puisqu'une latitude d'action est octroyée sur le plan cantonal. Le véritable argument est politique et concerne le positionnement par rapport à la politique agricole qui a son propre régime fédéral. Ce sont les premiers arguments.
Ensuite, en commission, on est revenu une deuxième fois sur le principe de l'allocation logement qui est à prendre en considération dans le calcul des coûts, et pour rappeler surtout une chose importante - c'est le point cardinal pour la majorité: il y a des différences notables dans les charges salariales entre les différents cantons. Il faut comprendre qu'à Genève, les conventions collectives sont ce qu'elles sont - nous les respectons, nous les appliquons - et qu'il y a des différences importantes avec la Suisse alémanique. Je ne vais pas prendre un canton comme Glaris, parce qu'il est peu représentatif, c'est le canton le plus excessif; mais, par exemple, la Thurgovie, le verger de la Suisse, connaît des différences salariales de 15% à 20%. Il faut quand même admettre que nos producteurs genevois sont intégrés à un marché national avec des prix considérés dans une bourse, et ce secteur est très compétitif. Les maraîchers et le secteur agricole ont pris leurs responsabilités; on a voté dans ce parlement en faveur de l'Union maraîchère genevoise qui soutient la coopérative agricole, et je crois que l'essentiel concernant cette résolution est de ne pas charger plus le bateau, parce qu'il s'agit d'une politique fédérale. Il y a quand même des avantages cantonaux dans l'allocation logement - avec toute la prudence nécessaire - à des prix relativement bons pour la chambre. Pour la majorité de la commission, dans ce secteur, chaque centime compte lorsque vous êtes producteur et toute charge sur le coût du travail est dévastatrice. J'en ai terminé, Monsieur le président. (Commentaires.)
M. Christian Frey (S), rapporteur de minorité. Je vais compléter un peu le rappel historique du rapporteur de majorité en disant qu'en juin 2011, une large majorité des électeurs genevois a voté une augmentation des allocations familiales. Pour tout le monde ? Non ! Pour tout le monde, sauf les travailleurs agricoles et les agriculteurs indépendants ! Quoi qu'on en dise, c'est vraiment une inégalité de traitement, même si elle ne concerne qu'un nombre restreint de personnes. Cela a mené un certain nombre de députés de tous bords à déposer le 5 février 2013 - durant l'ancienne législature - le PL 11116 intitulé «projet de loi d'application sur les allocations familiales pour travailleurs agricoles». Durant la législature passée, la commission des affaires sociales a consacré quatre séances à ce sujet important et a finalement pensé que le mieux, dans ce domaine qui touche effectivement à deux lois fédérales, était de formuler une proposition de résolution. C'est de ce texte que nous parlons aujourd'hui. Le triste sort des discussions autour de cette résolution a été résumé par le rapporteur de majorité: il y a eu effectivement des allers-retours. Dans un premier temps, une bonne majorité était favorable. Ensuite s'est posée la question des problèmes juridiques et on a demandé un avis de droit, avis de droit qui a coûté cher, bien entendu, et qui, six mois plus tard, concluait qu'il est parfaitement possible pour le canton de Genève d'adapter une législation cantonale pour pallier une inégalité de traitement. Donc, on s'est dit que c'était magnifique, toutes les conditions étaient réunies pour que ça marche, mais le 14 juin 2016, patatras ! tout s'écroule: le MCG change d'avis et on arrive à une situation d'échec, sachant que le Valais, Zurich et Fribourg ont déjà instauré des compensations qui permettent d'éviter cette inégalité. Genève, manifestement, ne veut pas le faire.
Encore un mot sur le coût de l'opération, parce que, finalement, c'est le nerf de la guerre; tout tourne toujours autour. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Le coût de l'opération est estimé par le DEAS dans une fourchette de 280 000 F à 360 000 F. Sans compter que cette estimation paraît extrêmement vague et imprécise, il faut tenir compte du fait qu'elle inclut 130 000 F de frais administratifs, dont 80 000 F pour l'informatique ! Cette somme est manifestement exagérée - intentionnellement, point d'interrogation ? Concernant le coût annuel de cette opération, il s'agit donc dans la durée d'une somme de 150 000 F à 260 000 F.
Le président. Vous prenez sur le temps de votre groupe.
M. Christian Frey. Merci, Monsieur le président. Sachant que les frais administratifs et plus particulièrement d'informatique n'interviennent qu'au cours de la mise en place du système et pas dans la durée, cette dépense modeste est parfaitement digérable par l'Etat de Genève. En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais vous dire que le principe «un enfant, une allocation» devrait être un droit pour tous les enfants de ce canton. C'est un principe juste, équitable, parfaitement réalisable à Genève. La minorité de la commission des affaires sociales vous invite à reconnaître le travail approfondi effectué autour de ce principe et à accepter cette résolution en la transmettant au Conseil d'Etat pour sa mise en oeuvre. (Applaudissements.)
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Mesdames et Messieurs les députés, cela a été dit: c'est une question de principe. Certes, le choix est politique, comme l'a dit le rapporteur de majorité, mais faire de la politique, c'est aussi défendre l'égalité de traitement. Là, c'est bien d'égalité de traitement qu'il s'agit. On nous dit dans le rapport que cela ne concernerait que trente personnes; ou le conseiller d'Etat dit qu'il n'y a pas d'inégalité crasse. Eh bien, quand on défend le principe de l'égalité, s'il n'y avait qu'un seul travailleur agricole concerné, qu'un seul parent, par respect pour son enfant, il faudrait accorder une allocation familiale et de formation.
On a entendu dire que c'est un secteur dans lequel chaque sou compte. C'est vrai, mais pour les salariés concernés, qui gagnent nettement moins de 4000 F par mois, chaque sou compte aussi, et les sous que l'on reçoit pour la formation permettent au moins d'ouvrir des perspectives d'égalité des chances pour les enfants concernés. Le principe d'égalité s'applique et doit s'appliquer à toutes et à tous, quels que soient les domaines, et c'est ce principe-là que nous devons défendre. C'est ce choix politique que nous devons faire !
Mme Frédérique Perler (Ve). Monsieur le président, vous ne serez pas surpris que les Verts soutiennent cette résolution concernant les allocations familiales dans le secteur agricole. Pour des raisons évidentes, les Verts sont pour l'égalité. Ils souhaitent que soit appliquée dans le canton de Genève la mesure «un enfant, une allocation», et nous ne dérogerons absolument pas à ce principe. Si vous le permettez, Monsieur le président, j'aimerais rappeler trois principes. Dans la loi fédérale, le principe de l'allocation familiale est un montant forfaitaire totalement indépendant de la situation financière des parents. En ce sens, c'est une allocation totalement déconnectée du pouvoir d'achat des parents. Ça, c'est le principe de la loi fédérale. Deuxièmement, la Suisse - et Genève en particulier - lutte contre toutes les formes de discriminations avec divers programmes. Troisièmement, Genève est le seul canton qui ne prévoit pas le même traitement en matière d'allocation de base. Cela se réfère à ce qui est inscrit dans le rapport de majorité. Maintenant, pour les coûts, pardonnez-moi l'expression, Monsieur le président, on a essayé de sprayer un peu de brouillard pour nous embrouiller et d'argumenter sur une augmentation des coûts du travail - laquelle, au fond, n'existerait pas, puisqu'il y a une solution législative qui est tout à fait possible, qui est très clairement expliquée par l'avis de droit mentionné par le rapporteur de minorité, M. Frey. Il s'agirait d'un investissement de notre canton d'environ 150 000 F pour quelque vingt familles. Dernière chose, Monsieur le président, je rappelle que pour les Verts - nous avons déjà eu l'occasion de le dire - un enfant ne choisit pas son foyer familial. De plus, si l'un des conjoints n'est pas agriculteur, la famille reçoit une allocation familiale ordinaire. Il s'agit de supprimer cette iniquité qui perdure, pour un montant d'environ 150 000 F. Aussi, chers collègues, Mesdames et Messieurs les députés, je vous encourage à voter enfin cette résolution, de sorte que le Conseil d'Etat dépose un projet de loi dans ce sens.
M. Jean-Luc Forni (PDC). Monsieur le président, le groupe démocrate-chrétien est partagé: il y a ceux qui soutiennent l'idée «un enfant, une allocation» et qui voudraient que les allocations soient similaires dans tous les secteurs de l'économie de notre canton. Il y a ceux qui sont aussi sensibles aux difficultés actuelles de l'agriculture et qui sont conscients qu'alourdir la masse salariale d'une population paysanne voisine d'un pays où les salaires sont bien moindres, les conditions économiques moins bonnes et les prix beaucoup plus bas risque de mettre en péril l'agriculture de notre canton. Mesdames et Messieurs, c'est pour cette raison que les uns et les autres n'ont pas pu trouver de majorité et que le groupe PDC laissera à chacun de ses représentants la liberté de vote.
Mme Simone de Montmollin (PLR). Monsieur le président, différence de traitement n'égale pas inégalité de traitement ! 1952 est la date d'entrée en vigueur du système d'allocations familiales dans l'agriculture. Il aura fallu quarante ans pour que les autres travailleurs puissent en bénéficier: première inégalité de traitement. Si l'on veut parler d'inégalité de traitement, parlons de l'allocation ménage qui est octroyée à tous les travailleurs agricoles et pas seulement à ceux qui ont des enfants: c'est le seul secteur qui le fait. Alors à quand un PL pour octroyer une allocation ménage à tous les travailleurs ? (Commentaires.) On se réjouit de le voir arriver ! Deuxième inégalité de traitement: l'allocation logement. Elle est volontairement basse, à 345 F par mois, bien loin des barèmes que vous défendez habituellement pour l'évaluation du RDU, par exemple. A quand un PL pour corriger cette inégalité de traitement et remonter le barème de l'allocation logement ? Lorsqu'on veut parler d'égalité, il faut aborder toutes les questions relatives au système des allocations familiales dans l'agriculture. C'est un système à part, certes, mais il a fait ses preuves et il doit être maintenu tel quel.
Trente est le nombre de cas, à peu près. Maintenant on entend qu'il y a vingt cas et que les coûts sont moins élevés. Avant c'était quarante, maintenant c'est trente, après ce sera vingt. Il s'agit de familles avec deux enfants et plus dont les deux parents travaillent dans l'agriculture, ce qui limite encore le nombre de risques. Mesdames et Messieurs les députés, oui, il faut soutenir les travailleurs agricoles ! Oui, il faut tout faire pour améliorer leur condition ! Mais les soutenir, c'est soutenir l'outil de travail; c'est s'assurer de maintenir les emplois dans l'agriculture. C'est ça, le vrai défi ! Les attaques permanentes que les exploitants subissent ces derniers temps par ce type d'initiatives mais aussi avec les frondes récentes sur leurs méthodes de travail n'y contribuent pas. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez peut-être un cas de conscience aujourd'hui, moi je n'en ai pas: je pense que ce système d'allocations familiales dans l'agriculture est excellent parce qu'il tient compte de tous les paramètres de la réalité, et il n'y a pas lieu d'en changer.
Dernier point, les allégations dans le rapport de minorité contre un groupe qui changerait d'avis après avoir eu l'occasion de prendre connaissance d'un avis de droit et d'en mesurer toutes les conséquences sont parfaitement irresponsables. Les auditions sont réellement faites pour ça, pour changer d'opinion lorsqu'on a mesuré toutes les conséquences de nos décisions. Nous restons donc fermement opposés à cette résolution.
M. Francisco Valentin (MCG). L'essentiel a été dit. Le MCG a effectivement changé d'avis au vu des informations qu'il a reçues, des auditions qui ont eu lieu; il n'y a pas à revenir là-dessus, il est toujours plus facile de s'exprimer une fois qu'on connaît le sujet. Le président d'AgriGenève a rappelé lui-même que le canton de Genève était précurseur dans le soin apporté aux travailleurs agricoles: on est un des meilleurs cantons, Genève est le canton le plus social de Suisse et je ne pense pas qu'il y ait une telle disparité de traitement avec le personnel agricole. En ce moment, des gens préconisent sans arrêt l'interdiction de tous les produits d'engrais et des désherbants, tout ça parce qu'il faut faire du bio, parce qu'il faut que l'agriculture genevoise soit la plus pure et la plus propre du monde. D'un autre côté, qu'est-ce qu'on fait ? On attaque une profession qui subit une concurrence à outrance; on apprend que le Conseil fédéral lui-même est en train de tout faire pour saborder l'agriculture suisse, et donc genevoise en particulier. Qu'est-ce qu'on veut ? On veut tuer l'agriculture ? Le bio viendra d'où ? Je pense que le jour où il n'y aura plus d'agriculteurs, il y aura un impact écologique, personne ne peut me contredire. Tous ces gens pour qui vous voulez absolument une égalité de traitement seront au chômage parce que toute l'agriculture genevoise partira en faillite. A ce moment-là, le résultat sera excellent: ils seront peut-être un peu plus face au chômage - il faudra voir avec notre magistrat s'il pourra faire quelque chose - mais je ne pense pas que le fait d'augmenter maintenant les charges de nos agriculteurs genevois soit une bonne idée. Vraiment, je pense qu'il faut suivre le rapport de majorité et, comme le disait le président d'AgriGenève, Genève est et restera précurseur dans le domaine.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, on nous a parlé de l'allocation ménage qui est effectivement une allocation spécifique pour le personnel du secteur agricole. J'aimerais quand même relever qu'elle ne compense pas la différence de traitement avec les bénéficiaires des allocations familiales ordinaires. Ça, c'est un premier élément. Ensuite, ce n'est pas parce que l'agriculture rencontre des difficultés qu'il faudrait se résigner à une situation dommageable pour les travailleurs agricoles. On l'a vu, c'est une catégorie professionnelle qui a un revenu particulièrement modeste, et le réajustement des allocations familiales serait une manière d'augmenter le pouvoir d'achat de ces travailleurs et de leur permettre de faire face à leurs besoins. Alors si le secteur agricole a besoin d'une aide, bien sûr qu'il faudra la lui apporter, mais pas en continuant à porter préjudice aux travailleurs de ce secteur.
Je rappelle que cette résolution était en passe d'être validée par ce parlement - c'est en tout cas ce qu'on pouvait légitimement présumer au vu de la position des groupes en commission. Suite à un retournement de situation en plénière, elle a été renvoyée une fois encore en commission au motif de la nécessité d'un avis de droit. Or, après réception dudit avis de droit et de ses conclusions, il semblerait que les tendances s'inversent et qu'un groupe change de position. C'est un fait, alors que l'avis de droit était favorable à cette adaptation des allocations familiales ! Il est quand même apparu que les chiffres présentés en commission ont été gonflés pour esquisser des coûts disproportionnés et dissuader une simple volonté d'égalité de traitement. C'est particulièrement regrettable, c'est peu courageux et c'est avant tout foncièrement injuste pour les familles et pour les enfants en question.
Pour ces motifs qui ont amené dans un premier temps une majorité à voter cette résolution et qui n'ont pas changé depuis lors, notre groupe vous invite à mesurer l'impact de votre vote et du message dont il est porteur. Nous pensons que nous ne pouvons pas faire dans ce Grand Conseil l'économie de la cohérence, de la justice sociale et de l'égalité de traitement. C'est pourquoi, comme d'autres ici, au nom du principe «un enfant, une allocation», le groupe Ensemble à Gauche vous invite à accepter cette résolution.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, ah, le «Geneva polish» ! On aime ici faire un «polish» final de la carrosserie telle que livrée par la Confédération ! Chez nous, tout brille un peu mieux: y en a point comme nous ! Je rappelle quand même que tout cela a un coût ! Ce n'est peut-être pas le coût le plus important que vous aurez voté, mais tout cela a un réel coût, alors que personne n'a parlé d'une différence qui existe entre le secteur agricole et les autres secteurs économiques: c'est l'allocation de ménage au niveau fédéral ! On l'a rappelé à juste titre, il y a des législations différentes. Une législation bien plus ancienne - puisqu'elle remonte à 1953 pour son entrée en vigueur - est la loi fédérale sur les allocations familiales dans l'agriculture. Une autre, la loi fédérale sur les allocations familiales, date de 2006, cinquante ans plus tard. Cinquante ans durant lesquels le secteur agricole a bénéficié d'allocations familiales alors que ce n'était pas imposé au niveau fédéral pour les autres secteurs. Je ne suis pas en train de vous dire que le secteur agricole doit payer aujourd'hui ce que d'autres dans le même secteur ont reçu pendant cinquante ans; je vous dis simplement que la Confédération elle-même considère qu'il y a une différence entre ces deux secteurs et que cette différence se concrétise dans les faits. Il est vrai qu'à Genève, nous avons 300 F par mois d'allocation familiale par enfant alors qu'elles sont de 200 F selon le droit fédéral pour le secteur agricole. Toutefois, comme je l'ai dit, il y a 100 F supplémentaires d'allocation ménage, ce qui compense finalement, vous voyez. L'objectivité m'impose de le souligner, il y a une différence pour l'allocation de formation, puisqu'elle est de 250 F dans le secteur agricole et de 400 F dans les autres secteurs. Néanmoins, encore une fois, c'est une différence qui a été voulue par le législateur fédéral et qui n'a été corrigée de la manière que vous souhaiteriez ici que par deux cantons suisses: le Valais et Zurich. Le canton de Fribourg, pour sa part, n'a pas corrigé la situation pour les agriculteurs indépendants, mais uniquement pour les ouvriers agricoles. Trois cantons sur vingt-six, Mesdames et Messieurs ! Et, parmi les autres, excusez-moi, il y en a de plus agricoles que Genève qui n'ont pas considéré devoir corriger une situation que vous jugez ici, pour certains, inéquitable. Je pense qu'il faut simplement prendre acte de cette différence, qu'une égalité de traitement devrait être voulue et imposée au niveau fédéral: Genève n'a pas à faire mieux qu'ailleurs. Je rappelle qu'il y a peut-être d'autres corrections qui doivent être faites dans les allocations familiales, et on s'y emploie. Je vous rappelle aussi que vous avez porté les allocations familiales de 200 F à 300 F par mois pour tenir compte du coût de la vie à Genève et du fait qu'avoir un enfant à Genève et devoir l'héberger dans un appartement coûte plus cher que partout ailleurs. Or, il vous a échappé, Mesdames et Messieurs, que les travailleurs frontaliers aussi bénéficient désormais de 100 F supplémentaires, s'ils sont frontaliers à Genève, par rapport aux travailleurs français à Bâle: cela coûte la modeste somme annuelle d'environ 80 millions de francs et cela devrait peut-être être examiné prochainement. En tout cas, nous reviendrons sur le sujet, le Conseil d'Etat l'abordera prochainement. En ce qui concerne le texte qui vous est ici soumis, nous vous demandons de le rejeter.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous passons au vote...
Une voix. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Très bien, le vote est lancé.
Mise aux voix, la proposition de résolution 735 est rejetée par 55 non contre 32 oui et 3 abstentions (vote nominal).
Débat
Le président. Nous abordons la R 793-A en catégorie II, quarante minutes. Madame Haller, vous avez la parole.
Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de majorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la proposition de résolution 793 vise, pour la première invite, à une révision à la baisse du ratio résultant de la clé de répartition des requérants d'asile appliquée au canton de Genève, et, pour la seconde, à une augmentation des indemnités forfaitaires allouées par la Confédération afin de les adapter aux coûts assumés par le canton; on sait que ce forfait n'est de loin pas suffisant pour couvrir les frais effectifs d'accueil et d'hébergement des requérants d'asile. Ces deux attentes sont partagées par les membres de la commission mais ne peuvent être créditées, compte tenu de certains considérants de cette résolution et de son exposé des motifs. De plus, il apparaît que ce texte concerne un thème déjà empoigné par le Conseil d'Etat et abordé par celui-ci dans le cadre de la CDAS, la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales. Divers projets parlementaires ont été, par ailleurs, déposés devant l'Assemblée fédérale. Ainsi, si on s'en tient à ses invites, cette proposition de résolution n'apporte rien de neuf sur un sujet éminemment complexe. Si on se réfère à son exposé des motifs, elle incrimine les requérants d'asile et les charge une fois encore de tous les maux. Inutile pour le premier aspect et inacceptable pour le second, ce texte a été rejeté par la majorité de la commission: tout en ayant des sensibilités diverses, les groupes socialiste, démocrate-chrétien, libéral-radical, des Verts et d'Ensemble à Gauche se sont accordés sur le fait que des démarches sont déjà en cours pour revoir la clé de répartition des requérants d'asile dans le canton et que la question de l'augmentation de la contribution fédérale à la prise en charge des requérants d'asile ne se réglera pas par le biais de résolutions. C'est pourquoi la majorité vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser cet objet.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de première minorité. Cette proposition de résolution est frappée au coin du bon sens. Genève est un petit canton qui a une population nombreuse; chacun le sait, c'est l'évidence, je n'aurais même pas besoin de vous le dire. Malheureusement, la Confédération et les autres cantons ne tiennent pas compte de cette réalité. Actuellement, Genève reçoit 5,8% de l'ensemble du contingent des requérants d'asile. C'est en fait une erreur de répartition, ça a été annoncé au Conseil national, notre conseiller national Roger Golay est intervenu pour essayer de changer cette situation, pour avoir plus de justice pour les cantons-villes. Un Bâlois du groupe UDC, M. Frehner, a également fait une proposition allant dans ce sens: Bâle-Ville, bien évidemment, se trouve aussi dans une situation délicate à cause de cela. Ça devrait être soutenu par l'entier des groupes; d'ailleurs, je m'étonne que tous les groupes ne soutiennent pas cette logique de bon sens qui voudrait qu'on ne tienne pas compte que de la population de Genève, mais aussi de son territoire: il est beaucoup plus facile d'héberger des requérants d'asile dans un canton peu habité, on n'est pas obligé de les mettre dans des abris PC, de leur proposer des conditions qui ne sont pas dignes, de se retrouver avec des frais importants comme c'est le cas à Genève. Il faut donc impérativement réguler cette situation, en venir à un taux qui soit beaucoup plus juste que le taux actuel. Il suffit de reprendre ce qu'a indiqué le député UDC de Bâle-Ville, M. Frehner - ne restons pas uniquement genevois, c'est un problème qui nous concerne tous: il a dit de manière tout à fait pertinente qu'une ville comme Bâle ou comme Genève, ou des cantons-villes, ne peuvent pas héberger un nombre de requérants trop élevé, ou s'ils le font, ils le font à des coûts qui sont plus élevés. Ce n'est pas du tout équitable.
Il est certain que la façon dont les invites ont été rédigées dans la proposition de résolution... Notre travail consiste peut-être à améliorer ce qui est proposé, nous avons donc fait une proposition d'amendement pour modifier légèrement les deux invites, tout en restant dans le même esprit. Cet amendement figure dans le rapport de minorité et je vous invite à le suivre.
Le président. A la page 51.
M. François Baertschi. Oui, merci, Monsieur le président.
M. Marc Falquet (UDC), rapporteur de deuxième minorité. A Genève, nous sommes les rois de l'humanitaire, surtout lorsque l'argent ne sort pas de nos poches personnelles. Avec une dette de 13 milliards, consolidée ces prochaines années, je pense, à 20 milliards de francs, on peut continuer à dépenser sans compter ! En 2015, l'asile a coûté 160 millions de francs à l'Etat de Genève. Celui-ci a reçu de la Confédération 70 millions d'aide, c'est-à-dire que près de 100 millions de francs ont été à la charge du contribuable pour le seul domaine de l'asile. C'est une constatation. Faire de l'humanitaire quand on n'a pas d'argent, quand notre propre population ne trouve pas de logement, quand nos structures sociales sont saturées - nous avons chaque mois en tout cas 300 à 400 personnes de plus à l'Hospice général, les gens perdent leur emploi tous les jours... C'est très facile, effectivement, de se donner bonne conscience, de se mettre sous une bonne lumière en allant aider les gens de l'autre côté de la planète et en les invitant alors qu'on n'est même pas capable de leur assurer un avenir, puisque même avec un permis de séjour, seuls 10% de ces gens environ trouvent un emploi fixe. C'est très facile de faire de belles théories sur l'amour du prochain, sur l'humanité; commençons déjà par faire de l'ordre dans notre propre maison, en nous occupant de notre propre population qui souffre - le mot «souffrance» est à la mode, mais c'est une réalité. Tout est saturé et on fait comme si de rien n'était. Les chiffres de l'asile ont baissé; cette année, je crois que nous sommes à 3% du contingent qui doit nous être attribué, il y a donc une réelle baisse des arrivées de demandeurs d'asile, mais ce n'est pas une raison, parce qu'on ne sait plus où loger ces gens. Le problème est réel. Occupons déjà ces gens qui sont chez nous avant de vouloir accueillir encore davantage de personnes chaque année.
Le président. Merci, Monsieur. La parole est à M. Spuhler. (Remarque.) Très bien, je passe donc la parole à M. Frey.
M. Christian Frey (S). Merci, Monsieur le président. Cette proposition de résolution part apparemment d'une bonne intention. En effet, dans sa deuxième invite, elle demande que «le montant des indemnités forfaitaires versées au canton de Genève» soit «[adapté] aux coûts assumés par le canton de Genève». Cette demande est légitime: une somme de 41 millions de francs est à la charge de Genève. Cette demande a été formulée de manière quasi identique dans la résolution 828 concernant la prise en charge des RMNA, les réfugiés mineurs non accompagnés, qui demandait la couverture effective des coûts liés à la prise en charge des RMNA attribués au canton de Genève. Mais, Mesdames et Messieurs les députés, il y a une grande différence: la R 828 soutenait une démarche de l'ensemble des gouvernements cantonaux et de l'ensemble des directions de l'action sociale. Elle ne demandait pas un traitement particulier pour le seul canton de Genève, et c'est là la principale différence. L'autre invite du présent texte est du même acabit: il s'agit de «[diminuer] le pourcentage des requérants d'asile attribués au canton de Genève», qui est actuellement non pas de 5,9%, mais de 6,1%, si je ne me trompe pas - le conseiller d'Etat nous le confirmera.
Formulées ainsi, ces deux invites sont inacceptables, car elles demandent un traitement particulier pour Genève, ce qui est contraire au principe de la solidarité confédérale. Nous vivons dans un même pays ! Par ailleurs, elles sont inacceptables parce qu'elles n'ont aucune chance de passer à Berne. Effectivement, pourquoi ne pas demander une diminution pour Bâle-Ville, qui est dans la même situation géographique, avec peu d'espace pour le logement ? Pourquoi ne pas demander la même chose pour Appenzell Rhodes-Intérieures, qui est un petit canton ? Pourquoi ne pas demander la même chose pour Glaris ? Etc., etc. (Commentaires.) Enfin, elles sont inacceptables parce qu'elles expriment de manière sous-jacente une volonté de fermer la porte aux réfugiés. Il n'y a qu'à lire les rapports de minorité pour s'en persuader. Pour paraphraser Donald Trump... (Exclamation.) ...on est dans une logique de «Geneva first» et de «Geneva only». Il s'agit donc, pour toutes ces raisons - et pas pour celle concernant Donald Trump - de refuser fermement cette proposition de résolution. Je vous remercie.
M. André Pfeffer (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, la clé de répartition des demandeurs d'asile par cantons résulte d'une directive fédérale. Il apparaît de plus en plus une disparité entre les cantons: les capacités d'accueil sont très différentes de région en région, et surtout, les coûts et les dépenses vont du simple au double selon les cantons. Aujourd'hui, la répartition des requérants d'asile se fait en tenant compte uniquement du nombre d'habitants des cantons. A Genève, un tiers des emplois est occupé par des personnes habitant en France voisine ou dans le canton de Vaud. En plus, Genève a, après Bâle-Ville, la plus forte densité de la Suisse: nous avons ici 1715 habitants par kilomètre carré, soit une densité sept fois supérieure à celle du canton de Vaud, où l'on trouve 241 habitants par kilomètre carré; la densité genevoise est environ vingt fois supérieure à celle du canton du Jura, qui est seulement de 87 habitants par kilomètre carré. Ces paramètres devraient aussi être pris en compte.
Quant au montant des indemnités forfaitaires, le constat est encore plus flagrant: nous vivons dans une région urbaine très dense où le coût de la vie est très élevé. En plus, comme le relève M. Poggia, nous avons une prise en charge des requérants d'asile tout particulièrement élevée en comparaison avec les autres cantons. Alors que certains d'entre eux, grâce à des possibilités de logement plus nombreuses et un coût de la vie plus bas, arrivent à dégager un bénéfice, le canton de Genève accuse un déficit de dizaines de millions chaque année. Notre canton devrait certes améliorer et rendre plus efficient l'accueil des demandeurs d'asile, mais il existe aussi des disparités injustes dans la répartition et les allocations fédérales: il n'est pas normal que certains cantons dégagent un bénéfice tandis que le nôtre doit solliciter ses contribuables pour couvrir plus d'un tiers de la facture. Pour ces raisons, le groupe UDC vous invite à soutenir cette proposition de résolution. Merci.
Mme Frédérique Perler (Ve). Il n'est en effet pas normal que Genève doive consacrer plus d'argent sur son budget pour assumer l'accueil que d'autres cantons. Néanmoins, on nous a expliqué qu'avec la restructuration de l'asile, qui s'est faite en plusieurs volets, ces modifications de la répartition des requérants par cantons et du coût à la charge de chacun d'entre eux sont en cours. Les conseillers d'Etat dans leur ensemble travaillent à cela. (Remarque.)
Maintenant, sur le fond de cette proposition de résolution, j'aimerais rappeler, Monsieur le président, que nous avions consacré une séance extraordinaire en octobre 2015 à une série de textes du groupe UDC, et cette R 793 est la seule qui avait trouvé grâce aux yeux de notre Grand Conseil, je ne me souviens plus exactement pour quelle raison - une petite faveur, sans doute ? C'est ainsi que nous avons déjà eu l'occasion d'étudier cet objet. Il n'y a pas grand-chose à en dire de plus que ce qui a déjà été dit: il faut laisser les conseillers d'Etat s'occuper de ces questions en lien avec Berne; présentement, ce texte n'apporte rien, car ses invites sont impossibles à remplir, même si un amendement est déposé pour les rendre juridiquement acceptables. J'ajouterai ce que les Verts ont toujours souligné, cette particularité de la deuxième invite qui demande qu'uniquement pour le canton de Genève, on tienne compte de la cherté du coût de la vie: cela remet en question la solidarité confédérale. Les Verts s'opposeront donc à ce texte. Je vous remercie.
M. Jean-Luc Forni (PDC). Je crois que tout a été dit dans ce débat. Au-delà des considérations strictement financières, c'est toute une politique d'accueil et une tradition humanitaire qui a fait la force de Genève et sa réputation dans le monde entier qu'on oppose à une politique de resserrement, de renfermement sur soi-même. Il faut une fois de plus s'en référer à l'histoire de notre canton, aux valeurs humanitaires de notre tradition, sans aller, bien entendu, au-delà de nos possibilités. On l'a dit tout à l'heure, les clés de répartition sont en cours de révision: à quoi bon envoyer une fois de plus une résolution qui, à Berne, passera directement au panier ? Nous avons autre chose à faire pour l'avenir de notre canton. Par conséquent, le groupe PDC refusera ce texte. Je vous remercie.
Mme Simone de Montmollin (PLR). Comme mes préopinants l'ont exposé, le PLR s'était opposé à cet objet. Une résolution n'a de sens que lorsqu'elle peut avoir un impact; elle ne peut avoir un impact que lorsque la thématique qu'elle aborde n'est pas déjà traitée à Berne, ce qui n'est pas le cas de cette thématique. Il s'agit d'un thème intercantonal, on l'a dit, qui nécessite une coordination intercantonale. Cette coordination s'est faite, et on ne voit pas très bien comment le canton de Genève à lui seul pourrait faire avancer ce dossier.
Il nous semble que la première invite n'est absolument pas pertinente et qu'elle n'aurait absolument aucun impact, sauf de remettre en cause les principes de solidarité intercantonale et de cohésion. Concernant la deuxième invite, sur les forfaits, il s'agit d'une problématique importante: c'est notre devoir que de veiller à avoir les moyens suffisants pour assurer l'intégration parfaite des personnes qui nous sont confiées. Cette question a fait l'objet de nombreuses discussions au sein des conférences des directeurs cantonaux de la sécurité et de l'action sociale, qui ont porté leurs fruits, puisque le Conseil fédéral a d'ores et déjà décidé d'augmenter ces forfaits. Là aussi, on peut estimer qu'actuellement, renvoyer une résolution demandant ce qui a déjà été fait ne saurait apporter plus. Pour ces raisons, nous ne souhaitons pas renvoyer cette résolution à Berne. Nous resterons de toute façon attentifs à l'évolution de la situation et au fait que les tâches transférées de la Confédération aux cantons pour l'intégration des migrants puissent être assumées de manière adéquate, en conformité avec nos valeurs et notre souhait d'intégrer ces personnes migrantes. Je vous remercie.
Mme Françoise Sapin (MCG). En ce qui concerne cette répartition des demandeurs d'asile, il faut être juste, car Genève doit toujours payer plus que les autres cantons. Il ne s'agit pas uniquement de l'asile, mais cela a aussi une influence sur la RPT, pour laquelle Genève paie déjà beaucoup. Aussi, le MCG demande que l'on défende beaucoup mieux les intérêts de Genève. Merci.
Le président. Merci, Madame. Je passe la parole au rapporteur de deuxième minorité pour une minute trente.
M. Marc Falquet (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Il faut quand même reconnaître que depuis des années, la situation sociale et financière de Genève se dégrade. Si on n'admet pas ça, c'est grave ! Vous allez nous dire qu'on met la faute sur les uns ou sur les autres: il n'y a pas de faute, on prend des décisions politiques pour défendre les intérêts de la population, l'intérêt de nos enfants, c'est tout ! Ce sont des décisions politiques qui doivent se prendre pour l'avenir, pour la défense de nos intérêts et le rétablissement de nos finances. La qualité de vie se dégrade à Genève quotidiennement, la densité est énorme - je crois que c'est l'une des villes les plus denses au monde: on nie ça, on croit qu'on peut placer à Genève le nombre de personnes qu'on veut, le monde entier peut arriver ici. Mais c'est faux ! Il n'y a plus de place, on est en train d'étouffer à Genève, et on continue, on va bientôt bétonner toute la ville, on va construire tout ce qu'on pourra.
Je pense que nous allons accepter l'amendement du MCG qui consiste à demander au Conseil d'Etat d'envoyer une demande à Berne pour qu'on puisse diminuer le pourcentage d'attribution de demandeurs d'asile à Genève. On parle toujours de qualité de vie, ça en fait partie également, et c'est aussi dans l'intérêt des demandeurs d'asile, je suis désolé ! Je vous propose donc d'accepter cette résolution avec l'amendement du MCG, merci.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de première minorité. Je suis quand même un peu surpris d'entendre les propos de certains députés. Quand on voit la situation actuelle du canton de Genève, avec plus de 200 millions de déficit prévu - on va peut-être se retrouver à 150 millions, mais on est à la chasse de toutes les dépenses, on regarde de manière attentive comment boucler un budget qui devient très difficile à boucler... On nous dit qu'il faut être solidaire avec les autres cantons: mais on voit tout ce qu'on paie pour eux, alors qu'ils ne sont pas si solidaires que ça - la RPT, par exemple: nous, nous payons une somme considérable; Vaud reçoit de l'argent grâce à la répartition intercantonale ! Avec cet argent, ils vont baisser les impôts sur les entreprises, faire la RIE III que nous voulions faire - ils vont la faire avec l'argent des Genevois, quelque part ! On se retrouve dans un marché de dupes, une fois de plus. Bien sûr, l'asile est un sujet délicat, mais nous devons aussi nous battre, dans le cadre de ce sujet, pour défendre les intérêts du canton de Genève, parce que c'est quelque chose de très important. On nous parle de l'exemple d'Appenzell Rhodes-Intérieures et de Glaris, qui ont un petit territoire: oui, mais il est peu habité; ils ont un pourcentage et un nombre de requérants d'asile très faibles. Il n'y a plus véritablement d'équité et de justice. On peut agiter un chiffon rouge, parler des requérants d'asile ou autres, mais ce n'est peut-être pas le sujet le plus important: le sujet le plus important est que nous devons actuellement veiller à toutes les dépenses de l'Etat pour garder l'essentiel pour la population. Certains ont ironisé sur «America first» de Trump: bon, «Genève d'abord», désolé, c'était notre slogan, je ne sais pas qui a volé le slogan à qui, qui est à l'origine de ce type de slogan. (Commentaires.) En tout cas, ça fait déjà plusieurs dizaines d'années que certains expriment ou lancent «America first» dans le débat public américain. Sans revenir sur cela, il y a quand même une action à essayer pour aller dans un sens plus favorable à Genève. D'ailleurs, nous avons déposé une invite que je vais rapidement présenter, Monsieur le président: il s'agit de demander au Conseil d'Etat d'intervenir auprès des autorités fédérales pour revoir la clé de répartition et aussi revoir le montant des indemnités forfaitaires; pour à la fois agir sur la clé de répartition et sur les sommes allouées à Genève, qui, comme on peut l'imaginer, devraient être plus importantes que celles d'autres cantons. C'est quelque chose que l'on peut faire, c'est pourquoi je vous demande de soutenir cette résolution amendée.
Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, finalement, M. Baertschi vient de nous dire que ce dont il est question aujourd'hui, c'est la clé de répartition, mais pas uniquement celle qui concerne l'asile: toutes les clés de répartition, dans tous les domaines que nous avons en commun avec la Confédération; et que l'asile est peut-être un chiffon rouge. Alors effectivement, cessons d'agiter ce chiffon, regardons la situation globalement: cela nous amènera à penser que ce texte n'est pas opportun, pas nécessaire.
J'aimerais revenir sur un élément, même s'il a déjà été mentionné: accueillir 5,8% des requérants qui déposent une demande en Suisse est une obligation qui découle de la loi sur l'asile. On l'a dit aussi tout à l'heure, c'est une question de solidarité confédérale. Je reviendrai aussi sur une préoccupation évoquée par plusieurs commissaires durant nos travaux: la crainte que Genève, par une attitude comme celle qui s'exprime au travers de ce texte, se mette à se défausser de sa responsabilité sur d'autres cantons. Si on se réfère aux chiffres qui nous ont été donnés en commission, évoqués par M. Poggia, on apprend que Bâle-Ville doit accueillir 1,9% de requérants d'asile, Bâle-Campagne 3,8%, c'est-à-dire, en tout, 5,7%, pas très loin de ce que nous devons faire à Genève. Pour Zurich, c'est 17,5%, et Berne, 13,9%. De ces chiffres, il n'apparaît pas que Genève soit particulièrement défavorisée. En revanche, sur la question des coûts, oui, il y a un véritable problème: symétriquement avec le principe selon quoi qui paie commande, on considère que qui commande doit payer; cela devrait amener la Confédération à prendre en compte la réalité des coûts de prise en charge des requérants d'asile - c'est un sujet sur lequel la commission s'est accordée, simplement, elle a estimé que les démarches effectuées en la matière par le département étaient largement suffisantes, qu'elle avait été relayée par d'autres textes parlementaires et que le travail était en cours. Pour tous ces motifs, la majorité vous appelle à rejeter cette proposition de résolution.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, les avis exprimés pour soutenir ce texte sont partagés par le Conseil d'Etat. Nous considérons en effet que l'absence de prise en considération du critère de la population respective des cantons est problématique, parce qu'évidemment, plus un territoire est petit et sa population nombreuse, plus le prix du terrain est élevé, sa disponibilité faible et la difficulté à trouver des lieux d'hébergement, grande. Or, ce critère n'est aujourd'hui pas pris en considération, alors que 6,1% des demandeurs d'asile annoncés en Suisse sont attribués au canton de Genève.
Malgré ce constat, le Conseil d'Etat considère que le renvoi à Berne d'un texte comme celui qu'on propose ici serait inutile, voire contreproductif, sachant que mon collègue Pierre Maudet et moi-même travaillons déjà, précisément dans l'intérêt de Genève sur ce plan, à attirer l'attention des autorités fédérales sur ce thème. Vous savez aussi que le Parlement fédéral a voté récemment une restructuration dans le domaine de l'asile, qui implique une refonte des forfaits versés aux cantons ainsi qu'une modification de la répartition des requérants dans ceux-ci pour tenir compte d'autres prestations que les cantons accordent. C'est le cas de Genève, avec un centre de renvoi qui lui permettra de bénéficier d'un nombre moins important de requérants d'asile attribués. Pour ces motifs, Mesdames et Messieurs, et quand bien même le Conseil d'Etat est conscient de la souffrance qu'implique cette politique publique en amenant à devoir supporter un nombre de requérants supérieur à celui que nous pouvons prendre en charge - l'ouverture importante d'abris de protection civile en est la démonstration - nous vous demandons de rejeter ce texte. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Avant de nous prononcer sur la proposition de résolution, nous allons voter sur l'amendement du MCG, qui figure à la page 51 du rapport. Comme l'a expliqué M. Baertschi, il s'agit d'un changement de l'entité à laquelle s'adresse le texte: celui-ci ne s'adresse plus au Conseil fédéral, mais au Conseil d'Etat, selon la formulation suivante:
«invite le Conseil d'Etat
- à intervenir auprès des autorités fédérales afin de revoir la clé de répartition entre les cantons (art. 21 OA 1) des requérants d'asile en diminuant le pourcentage des requérants d'asile attribués au canton de Genève;
- à intervenir auprès des autorités fédérales afin de revoir le montant des indemnités forfaitaires versées au canton de Genève en application de la loi sur l'asile (LAsi) pour les adapter aux coûts assumés par le canton de Genève.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 62 non contre 26 oui et 1 abstention.
Mise aux voix, la proposition de résolution 793 est rejetée par 62 non contre 27 oui.
Débat
Le président. Nous traitons à présent les objets liés RD 1146-A et M 2336-A en catégorie II, soixante minutes. Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Falquet.
M. Marc Falquet (UDC), rapporteur de majorité. Ah, c'est à moi ? Excusez-moi, je cherche juste mes notes... (Un instant s'écoule.) Voilà ! Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, nous voici saisis d'un rapport important sur l'aide sociale - ça va un peu nous changer du domaine de l'asile ! La commission des affaires sociales s'est réunie à huit reprises pour traiter le rapport du Conseil d'Etat concernant la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle ainsi que la proposition de motion 2336 pour une meilleure prise en considération des conclusions de l'évaluation de celle-ci. Je souhaite signaler que l'ensemble des commissaires ont travaillé de manière consciencieuse afin de trouver des solutions, d'améliorer le système et de mettre en place des moyens pour que les usagers puissent retrouver rapidement un emploi. En effet, face à l'augmentation constante et préoccupante du nombre de personnes à l'aide sociale, cette nouvelle loi, entrée en vigueur le 1er février 2012, avait surtout été axée sur la réinsertion professionnelle. Le dispositif a été évalué par le bureau d'études privé et indépendant Evaluanda, qui s'est concentré sur l'insertion, peut-être au détriment de l'encadrement social, comme le soulignera sans doute la rapporteure de minorité.
Je vais commencer ma présentation par les auditions du Centre social protestant et de Caritas, qui ont mis en évidence un manque de liens avec les entreprises et proposé d'instaurer des passerelles pour améliorer l'employabilité des candidats. Les clés de la réussite, surtout pour les jeunes, dépendent en effet de l'identification du potentiel métier. Il a été noté que les assistants sociaux effectuent un travail efficace, car ils permettent de surmonter des obstacles comme l'endettement ou les difficultés avec la famille. Cependant, les visites ont été espacées, notamment en raison de problèmes financiers; dans certains cas, par exemple pour ceux qui n'ont pas comme objectif un retour à l'emploi, ça ne pose pas de problème, mais ça peut en créer aux bénéficiaires qu'il faut suivre de près. On a aussi évoqué des tensions entre les usagers et les collaborateurs de l'Hospice général, étant précisé que ces derniers ne sont pas là pour émettre des injonctions, mais pour construire des projets sur mesure avec le peu de temps et de moyens qu'ils ont à disposition.
Ensuite, nous avons parlé des stages d'évaluation, qui ont été mis sur la sellette d'une part car ils ne correspondaient pas aux besoins des personnes, d'autre part parce qu'ils étaient souvent accompagnés d'une deuxième évaluation présentant d'autres conclusions, ce qui les déboussolait. On a entendu que ces stages infantilisaient les gens, raison pour laquelle ils ne sont plus obligatoires aujourd'hui. Certaines commissaires minoritaires ont préconisé un retour à l'ancien système, qui voyait les assistants sociaux prendre en charge la globalité des dossiers. L'une des pistes pour améliorer cette mesure consisterait à mettre en place des stages en entreprise. Du reste, l'Observatoire de l'aide sociale et de l'insertion - l'OASI - préconise la suppression des stages d'évaluation, faisant observer que mettre dos à dos les problèmes sociaux et professionnels est absurde, les uns étant parfois à l'origine des autres.
Il est finalement ressorti que ces stages ne servent pas à améliorer la situation professionnelle d'un individu, mais plutôt à déterminer s'il sera pris en charge par un CAS ou par le service de réinsertion professionnelle de l'Hospice général. Il s'agit en fait d'une sorte de tri, mais qui coûte très cher et ne sert pas à grand-chose - c'est en tout cas mon opinion personnelle. D'après l'observatoire, un assistant social serait tout à fait en mesure de juger du potentiel de retour à l'emploi d'un usager, sans devoir le faire passer par ces stages.
Quant aux stages de réinsertion, il a été indiqué qu'ils ne doivent pas constituer des postes de travail dissimulés et gratuits. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Les chiffres du SRP ne sont pas très convaincants, c'est un peu comme dans les manifestations: selon le Conseil d'Etat, il y a 36% de réinsertion, et selon l'Hospice général, il y en a 27%. (Remarque.) Oui, exactement: que fait la police ? (L'orateur rit.)
Le président. Vous prenez sur le temps de votre groupe, Monsieur.
M. Marc Falquet. Déjà ? (Rires.) Bon, d'accord. Je suis désolé si c'est un peu long. Est-ce que ça vous intéresse, au moins ? Le Centre social protestant et les institutions sociales ont demandé si des liens suffisants étaient tissés entre le service de réinsertion professionnelle et les entreprises, ce qui ne semble pas tellement être le cas. Cette remarque a été émise également par l'observatoire, selon lequel il y aurait des problèmes graves de communication entre le monde des entreprises et l'Hospice général, SRP compris. Voilà qui est assez inquiétant, parce qu'il semble assez difficile de réinsérer les gens sans contacter les sociétés... (Remarque. L'orateur rit.) Les sujets de l'UDC étaient quand même plus intéressants, non ?
Une voix. Allez, Marc, vas-y !
Une autre voix. Accouche !
M. Marc Falquet. Oui, oui, j'accouche ! Pour information, le SRP est doté de 23 collaborateurs. Il lui a aussi été reproché un manque de suivi et des changements de personnes de référence; évidemment, ce n'est pas propice à stabiliser la situation de chacun. Somme toute, ce sont les personnes les plus proches du marché du travail qui bénéficient du SRP, donc ça ne sert à rien, il faut le dire, ça ne résout pas les problèmes globaux.
D'après l'observatoire - et les commissaires ont partagé cet avis - l'orientation professionnelle devrait être laissée à l'office cantonal de l'emploi, il faudrait au moins un employé qui fasse le lien entre l'OCE et l'Hospice général, car tous les demandeurs d'emploi ne présentent pas forcément de problématique sociale; par contre, ils en développent lorsqu'ils restent trop longtemps à l'Hospice général ! Eh oui, dans certains cas, c'est l'Hospice général même qui est responsable de la dégradation sociale des gens, notamment lorsqu'ils ne sont pas pris en main rapidement alors qu'ils auraient de bonnes capacités de réinsertion.
Il faut encore soulever la question des dettes, qui représentent naturellement un frein à l'insertion, même pour les personnes qui pourraient être candidates à l'emploi. Cela dit, ce n'est pas un frein seulement au sein de l'Hospice général, mais partout dans l'administration, et il est vraiment difficile pour quelqu'un d'endetté d'obtenir une place à l'Etat. Aussi, il est nécessaire de traiter les freins à l'employabilité, comme pourrait l'être la question de la langue; la maîtrise du français est en effet primordiale pour que les candidats puissent retrouver un travail.
On a également débattu - et ce n'est ni l'UDC ni le MCG qui l'a mentionnée - de la problématique des ressortissants de l'Union européenne qui prennent une partie de nos emplois. En effet, même si les gens sont en mesure de travailler, ça ne signifie pas encore qu'ils trouvent une place tant la concurrence de l'Union européenne est grande - je ne donnerai pas de précisions là-dessus, sinon on va se faire très mal recevoir !
De manière générale, on constate une dégradation continuelle de la situation sociale et de l'emploi. Chaque mois, environ 300 personnes arrivent en fin de droit, tandis que 80 dossiers sont ouverts à l'Hospice général; les autres se débrouillent, sortent des statistiques, ce qui ne veut pas forcément dire que leur situation s'est améliorée, bien entendu. D'ailleurs, on reproche à l'OCE d'annuler trop rapidement les dossiers des personnes en fin de droit; il faudrait entreprendre quelque chose pour éviter qu'elles ne se retrouvent à l'aide sociale inutilement, par exemple les faire rester à l'office cantonal de l'emploi même si elles ne reçoivent plus de subventions.
Enfin, il faut signaler que le canton de Vaud s'en sort beaucoup mieux que nous pour l'insertion; on dit que Genève fait toujours mieux que les autres, mais le système vaudois de réinsertion est apparemment bien plus efficace que le nôtre. Voilà, Mesdames et Messieurs, je vais en rester là pour l'instant et, si vous le souhaitez, je continuerai plus tard.
Des voix. Non !
Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, pourquoi un rapport de minorité sur un rapport d'évaluation ? Eh bien tout simplement pour éviter une banalisation des résultats de celle-ci, pour s'assurer qu'elle soit réellement suivie d'effets et faire en sorte que l'on ne reproduise pas les mêmes erreurs que celles ayant présidé à la révision de la loi sur l'aide sociale, qui a abouti à la LIASI.
En cela, nous rejoignons tout à fait la motion 2336 dans sa volonté de prolonger cette évaluation et de corriger les effets douteux qui ont été relevés. Nous regrettons cependant qu'elle ait été modifiée en commission, amputée d'un élément pourtant non négligeable, celui des moyens. En effet, on ne peut pas demander aux gens d'en faire plus sans s'assurer qu'ils disposent des ressources suffisantes, c'est pourquoi nous avons déposé un amendement dans ce sens.
Pour rappel, la LIASI a permis la suppression du RMCAS et donc le renvoi à l'aide sociale de tous les chômeurs en fin de droit, pour autant qu'ils en remplissent les conditions quant à leurs ressources, ce qui a eu pour conséquence notable de soumettre les mesures d'insertion à des critères de revenus. Un autre élément caractéristique de cette réforme a été la réorganisation du secteur de l'action sociale de l'Hospice général et la création du SRP, notamment en établissant une distinction entre les personnes proches et celles éloignées de l'emploi par le biais de stages d'évaluation, lesquels ont été remis en cause par Evaluanda à deux reprises, une première fois au moment de l'évaluation intermédiaire, puis au moment de l'évaluation finale.
Il faut surtout relever que la révision de la loi sur l'aide sociale qui a conduit à la LIASI s'est déroulée sans écoute des professionnels ni des partenaires de terrain, sans dialogue avec les partenaires sociaux, sans prise en compte des mises en garde de ces derniers quant à l'inadéquation du nouveau modèle d'organisation. Au final, ce qui apparaît maintenant au travers de l'évaluation finale était prévisible, c'était la chronique d'un échec annoncé. C'est d'ailleurs ce qui a mené au dépôt d'un référendum, qui n'a malheureusement pas été adopté par la population - mais à un faible score de différence.
Aujourd'hui, nous devons nous occuper de ce qu'il ressort de ce rapport d'évaluation. Je vais relever quelques éléments. Tout d'abord, l'insertion n'est pas la vocation première de l'Hospice général; celui-ci représente l'un des partenaires, mais pas l'acteur principal, qui est l'office cantonal de l'emploi, appuyé par l'office pour l'orientation, la formation professionnelle et continue. Par ailleurs, la réorganisation mise en place à l'Hospice général - M. Falquet l'a souligné tout à l'heure - montre des scores de réinsertion qui invalident cette espèce de ségrégation qu'on a voulu faire entre les personnes éloignées et celles proches de l'emploi: 36% pour le SRP et 23% pour les CAS. On nous a donné des chiffres actualisés - non pas contradictoires, mais différents en ce qui concerne les périodes - à savoir 27% pour le SRP et 19% pour les CAS, sachant que le SRP permet aux bénéficiaires d'accéder à l'ensemble des mesures d'insertion de l'OCE, ce qui n'est pas le cas des autres. Or on note un score très proche pour ces deux catégories de personnes, ce qui permet de se dire que le SRP n'est pas forcément le bon moyen.
Ce dont on a vraiment besoin à l'Hospice général, c'est d'une unité ressources qui permette aux personnes chargées du suivi au long cours des situations sociales de bénéficier du soutien spécifique de professionnels spécialisés en matière d'insertion, qui ont des liens et des contacts avec le monde du travail, qui peuvent faire le relais avec les entreprises afin de favoriser l'insertion; voilà ce dont on a besoin actuellement, et non pas d'une sorte de séparation des tâches particulièrement douteuse et aux résultats peu probants.
Ce qu'il importe également, c'est de considérer la manière dont on travaille. Vous l'avez dit tout à l'heure, Monsieur, les partenaires de terrain ont remis en question la fréquence des rendez-vous. C'est ainsi l'accompagnement qui est pointé du doigt, le temps et la disponibilité pour assurer un suivi de qualité, orienté soit vers l'insertion professionnelle, soit vers la réinsertion sociale. Autant de questions de spécialistes qui auraient finalement dû rester dans le giron de l'institution, elle qui dispose des compétences pour ce genre de choses; malheureusement, la révision de la LIASI est venue d'en haut et n'a pas laissé place à l'expression de l'expertise professionnelle et institutionnelle, c'est là l'un de ses défauts majeurs.
Maintenant, on nous a dit qu'un certain nombre de mesures avaient été prises. M. Poggia a déjà fait en sorte que les stages d'évaluation de quatre semaines tant décriés ne soient plus obligatoires, ce qui est une première action, mais il serait beaucoup plus clair de les supprimer intégralement au profit d'autres mesures qui pourraient, lorsqu'elles sont nécessaires, être appliquées... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) A cet égard, l'Hospice général dispose d'ores et déjà de moyens bien plus adéquats, par exemple les stages ARVA qui permettent des évaluations beaucoup plus fines avec des orientations de projets particulièrement adaptées à la situation des personnes.
Enfin, je ne pourrais pas conclure cette introduction sans évoquer une question récurrente depuis l'entrée en vigueur de la LIASI, soit l'application de l'article 60, alinéa 12...
Le président. Vous prenez sur le temps du groupe, Madame.
Mme Jocelyne Haller. Oui, merci ! ...qui avait été voté pour permettre un alignement des maxima de loyers sur ceux pratiqués au RMCAS - de même en ce qui concerne la franchise sur le revenu. Actuellement, le dispositif de l'Hospice général n'est pas pertinent. M. Poggia avait annoncé une réponse à ce propos, elle a été attendue, et j'espère qu'il sera en mesure de nous donner plus de détails aujourd'hui. Je m'arrête là pour le moment.
Le président. Merci, Madame. La parole est à M. Riedweg pour une minute quarante-neuf; ensuite, le groupe UDC n'aura plus de temps de parole.
M. Bernhard Riedweg (UDC). Merci, Monsieur le président. Le revenu minimal cantonal d'aide sociale, dit RMCAS, s'était peu à peu transformé en un outil de politique sociale au lieu de prioriser la réinsertion professionnelle, ce qui marginalisait ses bénéficiaires. L'aide sociale individuelle doit être complémentaire aux mesures de réinsertion professionnelle et non constituer une fin en soi, car l'emploi est le meilleur intégrateur social et permet de retrouver l'autonomie. Il est reconnu au nouveau système une haute qualité de prise en charge des dossiers, mais qualité ne rime pas avec rapidité, et on constate des lourdeurs de procédures, ce qui pourrait être amélioré grâce à une meilleure collaboration entre les différents services.
L'objectif de la LIASI n'est que partiellement atteint. En effet, si le système mis en place assure une réinsertion durable, son taux de réussite demeure insuffisant. Le Conseil d'Etat devrait régler la lenteur et la complexité des périodes de transition pour privilégier une prise en charge soutenue et continue et favoriser une réinsertion professionnelle durable permettant une autonomie stable et définitive, ceci à travers des ajustements structurels recommandés par Evaluanda. L'évaluation a davantage mis en avant un mauvais fonctionnement du système qu'un manque de ressources, quel qu'il soit. L'Union démocratique du centre prendra acte du RD 1146-A et acceptera la motion 2336 telle qu'amendée en commission. Merci, Monsieur le président.
M. Charles Selleger (PLR). Mesdames et Messieurs, le rapport du Conseil d'Etat qui nous est soumis concerne la modification de la LASI, devenue la LIASI, dans laquelle on a introduit des dispositions particulières sur la réinsertion. Cet aspect a été appuyé par rapport aux autres modalités de l'aide sociale individuelle, et ledit rapport se concentre donc logiquement là-dessus, pas sur le reste. Je vais vous lire une phrase qui apparaît à la page 4 et qui résume bien toute la problématique: «le taux annuel de retour en emploi des bénéficiaires de l'aide sociale suivis par l'HG n'a pas augmenté depuis 2012». Il s'agit là d'un aveu d'échec fait par le Conseil d'Etat en toute transparence.
La concrétisation de la nouvelle politique de réinsertion professionnelle s'est traduite par la création d'un nouveau service, le SRP, censé prendre en charge des situations favorables, celles de personnes dont la distance à l'emploi était faible, donc les chances de retour sur le marché du travail élevées. Dans les faits, ce concept a priori prometteur s'est révélé davantage une complication qu'un réel bénéfice, et le taux global de retour à l'emploi n'a pas augmenté.
Certes, ce système est encore jeune et sans doute perfectible, et c'est pourquoi une motion a été déposée et votée par une majorité de la commission. Celle-ci demande que les dysfonctionnements constatés au sein du service de réinsertion professionnelle soient corrigés et qu'une nouvelle évaluation soit réalisée pour les années 2016 à 2019. Le PLR vous propose de prendre acte du RD 1146-A et de soutenir la motion qui nous est proposée.
Une voix. Très bien, Charles !
M. Christian Frey (S). Mesdames et Messieurs, le groupe socialiste vous propose de rejeter le RD 1146 et de le retourner au Conseil d'Etat pour les raisons suivantes: d'abord, le rapport d'évaluation du bureau Evaluanda, sévère dans sa première mouture autant que dans sa version définitive, n'a pas du tout donné lieu à un projet de refonte complète du système, par exemple supprimant ce clone - c'est le terme utilisé par un spécialiste - de l'OCE au sein de l'Hospice général.
Ensuite, ce rapport ne s'est attaché qu'au volet de la réinsertion, représenté par le SRP, et pas du tout au fonctionnement global de l'aide sociale après la dissolution du RMCAS, il ne s'est penché ni sur le fonctionnement des CAS, ni sur toutes les questions qui se posent pourtant indépendamment du service de réinsertion professionnelle.
Enfin, l'approche «work first» sans nuances mentionnée dans le rapport n'a pas été remise en question suite au rapport d'évaluation, sachant que l'application aveugle de ce principe entraînait une séparation artificielle entre personnes dites proches de l'emploi suivies par le SRP, et celles dites éloignées de l'emploi accompagnées dans les CAS, en enlevant par ailleurs des postes aux centres d'action sociale pour les attribuer au SRP. Voilà les raisons pour lesquelles les socialistes vous invitent à refuser purement et simplement ce rapport et à le retourner à son auteur.
En ce qui concerne la motion 2336, le groupe socialiste ne peut pas souscrire à l'amendement sur sa première invite voté en commission, qui a vidé le texte de toute sa substance en supprimant la nécessaire augmentation de l'allocation des ressources. Aussi, il refusera cet objet si l'amendement proposé dans le rapport de minorité n'est pas adopté. En effet, il est inacceptable que l'on demande à l'Hospice général d'améliorer son fonctionnement sans lui en donner les moyens.
Les appels à l'aide du personnel de l'Hospice général exprimés notamment dans une pétition ainsi que l'augmentation du taux d'absentéisme constatée par la direction générale même de l'institution dans le cadre des auditions ne peuvent être ignorés, la réalité du terrain exige des moyens supplémentaires. Je le répète: nous rejetterons la motion 2336, qui partait pourtant d'une bonne intention, si l'amendement présenté par Ensemble à Gauche est refusé. Je vous remercie.
M. Jean-Luc Forni (PDC). Comme cela a été signalé à maintes et réitérées reprises avant moi, le rapport d'évaluation de la LIASI est particulièrement sévère quant à la politique de réinsertion du canton et a dans sa ligne de mire le service de réinsertion professionnelle. Ce qui nous a déçus, c'est le manque de réaction du Conseil d'Etat face à ce rapport; certes, il a mis sur pied un groupe de travail et certaines mesures ont été prises, on l'a entendu tout à l'heure, mais de façon timide. C'est ce qui a conduit le parti démocrate-chrétien à proposer la motion qui vous est soumise ce soir, laquelle demande d'accélérer les réformes que pointait l'évaluateur, notamment pour pallier les dysfonctionnements du SRP.
Le principal problème, outre le fait que la LIASI ne remplit pas son rôle premier qui consiste à ramener les gens rapidement vers le marché du travail, c'est que le SRP, pièce maîtresse de ce nouvel appareil législatif, ne fonctionne manifestement pas puisque le taux de retour à l'emploi n'y est pas supérieur à celui que l'on obtient durablement dans les CAS avec les personnes présentant une cessation d'activité plus longue. Le but de notre intervention est d'inciter ce groupe de travail à prendre des mesures plus ciblées - mesures qui, je l'ai dit, commencent à être mises en oeuvre - par exemple en faisant du SRP un service ressources pour qu'il soit plus efficace.
C'est sans doute là que se cristallisent nos divergences avec nos partenaires de la gauche: à notre sens, il vaut mieux utiliser le SRP comme un service ressources au profit des centres d'action sociale avant d'augmenter le personnel nécessaire à la réinsertion, il faut davantage valoriser les compétences des CAS. Voilà ce que nous demandons dans la motion, à savoir que les mesures de retour au travail, jusqu'alors réservées au SRP, soient moins sectorisées et puissent être davantage utilisées dans les CAS. Pour cette raison, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous proposons d'accepter notre motion. Quant au rapport sur la LIASI, en raison de sa déception à l'endroit de la réponse du Conseil d'Etat, le PDC ne le soutiendra pas.
Mme Frédérique Perler (Ve). Beaucoup de choses ont déjà été dites, je vais essayer d'être concise. S'agissant de la motion PDC qui vient en soutien aux commentaires du Conseil d'Etat sur le rapport d'Evaluanda, les Verts étaient prêts à la soutenir, bien évidemment. Or ce fameux amendement a été voté en commission, annulant l'allocation des ressources prévue dans le texte d'origine. Sur ce point-là, de fait, nous rejoignons la rapporteuse de minorité: si on souhaite améliorer la situation, il s'agit de se donner les moyens d'une telle politique, donc nous voterons son amendement qui rectifie la donne et, si celui-ci devait être refusé par le Grand Conseil, nous nous verrions, ma foi, dans l'obligation de rejeter la motion.
Quant au rapport du Conseil d'Etat suite à l'évaluation de la société Evaluanda, nous n'avons pas constaté d'engagement clair de sa part quant à la poursuite de son travail, quant à ce qu'il comptait véritablement mettre en place. En prendre simplement acte tel quel signifierait que les Verts sont très contents et satisfaits de ce que nous a transmis le gouvernement, ce qui n'est naturellement pas le cas. Comme l'a rappelé la rapporteuse de minorité, il s'agit de ne pas banaliser les résultats de cette étude. Le rapport, donc, ne contient aucun engagement de la part du Conseil d'Etat, bien que celui-ci reconnaisse en filigrane que la LIASI telle qu'elle a été votée, avec le travail en silos qui a été mis en place, s'est avérée totalement inefficace et coûteuse tant sur le plan humain que des deniers publics.
Pour notre part, nous attendons un engagement fort de l'Etat lors de la prochaine évaluation - enfin, si possible avant - de sorte que nous serons très heureux en juin 2020 - je crois que c'est ce qui est prévu - de pouvoir applaudir le rapport divers du Conseil d'Etat. Merci, Monsieur le président.
M. Francisco Valentin (MCG). Quand on pose une question et que la réponse ne nous convient pas, il faut reformuler la question. Le département, sous l'impulsion du magistrat Poggia, a déjà effectué un travail titanesque ! Le rapport est susceptible de ne pas plaire parce qu'il ne contient pas les réponses escomptées, mais alors il faudrait en refaire un quasiment chaque année, ce qui est absolument impossible et ne donne pas un point de situation ou une photographie réelle du contexte. Le département a justement pris plusieurs années de recul pour que ce rapport soit le plus objectif possible et, de cette manière, a apporté de nombreuses réponses à des points totalement ignorés à ce jour.
Laissons le temps aux institutions d'accomplir le travail de longue haleine qui leur revient, laissons l'Hospice général et l'office cantonal de l'emploi acquérir une sérénité qui leur manque encore. Le principe du «toujours plus, toujours mieux» tel qu'évoqué tout à l'heure dans un autre débat est typiquement genevois. Non, on essaie de faire au mieux avec ce qu'on a. Laissons un peu de temps au temps: le prochain rapport est prévu pour 2020, c'est-à-dire dans trois ans, Mesdames et Messieurs, pas le siècle prochain ! Pour ces raisons, le groupe MCG soutiendra le RD 1146-A et vous encourage à voter la motion 2336. Merci.
M. François Baertschi (MCG). Là, Mesdames et Messieurs, on parle des conséquences de la pauvreté à Genève, mais évoquons véritablement la cause. Quelle est-elle ? Les frontaliers, évidemment, l'afflux massif de frontaliers à Genève ! Nous devons mener une politique forte et déterminée en la matière - même si ça choque le président du Conseil d'Etat que nous voulions aller dans cette direction - en mettant des moyens considérables, bien plus qu'ils ne le sont actuellement. Il faut y aller de manière déterminée, allons-y, car c'est uniquement ainsi que nous soignerons le problème à la racine.
Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais adresser une communication importante à ceux qui l'ignorent encore: la disparition des dinosaures, ce n'est pas la faute des frontaliers... (Rires. Applaudissements.) Non, mais franchement !
L'évaluation de la LIASI nous a démontré une chose, c'est qu'il est absolument nécessaire de changer de paradigme. Comme M. Frey l'a indiqué tout à l'heure, le principe du «work first» n'est plus d'actualité, il faut le considérer avec circonspection. Je vous rappelle qu'on n'a jamais autant parlé de réinsertion que depuis qu'il n'y a plus assez de travail pour tout le monde. On aurait pu prendre cette donnée en considération, juger qu'il fallait tabler sur la reconversion professionnelle, les reclassements, la formation; ce n'est pas ce qui a été entrepris. A la place, on a mis en oeuvre une espèce d'usine à gaz dont on voit maintenant qu'elle ne correspond pas aux besoins.
Il persiste tout de même dans ce rapport une évaluation sévère du dispositif et une volonté exprimée par le département de remédier à un certain nombre de lacunes, ce qu'il faut souligner. J'aimerais attirer votre attention sur le fait que d'un point de vue méthodologique, l'évaluation s'est focalisée sur le SRP; à certains moments, on a même eu l'impression qu'il s'agissait d'une auto-évaluation, et on relève à cet égard une forme de discrépance pour le moins étonnante entre l'analyse et les recommandations finales. Aussi, indépendamment de la volonté annoncée par le département de procéder à certaines corrections, il nous semble difficile d'accorder un blanc-seing à une démarche qui peine, du moins ouvertement, à reconnaître les erreurs originelles de la LIASI.
Car, puisque c'est l'heure du bilan, il faut le dire: cette réforme a coûté non seulement sur le plan humain et social - ce qui pèse déjà lourdement dans la balance - mais, plus prosaïquement, elle a représenté un coût financier particulièrement conséquent. Alors tenir compte de l'évaluation, oui; corriger la LIASI, bien sûr, cela est nécessaire; mais il faut le faire en parfaite et respectueuse collaboration avec les professionnels et partenaires du terrain, c'est incontournable pour améliorer réellement la situation. Pour notre minorité, ce ne sera qu'à l'énoncé de tangibles engagements allant dans ce sens de la part du département que nous pourrons nous rallier à une prise d'acte du RD 1146-A; à défaut, nous refuserons le rapport du Conseil d'Etat, comme d'autres ont déjà annoncé leur intention de le faire.
Enfin, Mesdames et Messieurs, je vous invite à voter l'amendement présenté à la fin du rapport de minorité, qui consiste à revenir à la teneur d'origine de la première invite de la motion 2336, en précisant que pour qu'une institution puisse faire ce qu'on attend d'elle, il faut lui en donner les moyens, faute de quoi on s'en moque. Ces moyens, vous pouvez aller les chercher là où ils sont disponibles, il faut arrêter de jouer les uns contre les autres. Il s'agit d'une priorité politique, parce que l'aide sociale augmente, tout le monde s'en plaint. Nous devons comprendre le phénomène, nous attaquer à ses causes, ce qui n'est pas le cas quand on se contente d'agir sur la problématique de façon superficielle. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci, Madame. Monsieur Falquet, il vous reste dix-huit secondes, le temps de dire un petit bonjour à la famille, mais pas plus !
M. Marc Falquet (UDC), rapporteur de majorité. Je serai rapide, alors. Pour améliorer la réinsertion, pour donner une chance à l'emploi, il faut avant toute chose gérer les problématiques sociales. Les liens entre milieux professionnels et Hospice général sont très défaillants, ce qui est un scandale. Ensuite - ce n'est pas moi qui le dis, mais le rapport - il convient d'encourager la responsabilité sociale des entreprises, notamment - ça a été relevé aussi, et pas seulement par l'UDC - en instaurant la préférence cantonale en matière d'emploi.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, d'aucuns parmi vous s'étaient opposés à l'abandon du RMCAS, aussi ne suis-je pas surpris de les entendre nous dire aujourd'hui, lorsqu'il s'agit d'évaluer son successeur - c'est-à-dire la LIASI - que cette loi est truffée de défauts. Ils peuvent ainsi claironner: «On vous l'avait bien dit !» Pour ma part, je souhaiterais que le comportement à l'égard de l'évaluation de ce nouvel instrument législatif consiste en une critique constructive qui nous permette d'avancer dans le bon sens, ainsi que certains d'entre vous l'ont exprimé.
Après avoir pris connaissance de cette évaluation, le département a immédiatement mis en pratique des modifications tenant compte des critiques formulées. Ce rapport, je le rappelle, a été dressé sur la base de l'article 56 de la LIASI, qui impose une réévaluation quatre ans après son entrée en vigueur. Nous sommes arrivés à la conclusion que cette loi comportait dans sa mise en oeuvre des défauts qu'il fallait corriger, mais davantage sur la forme que sur le fond.
Les débats se sont principalement cristallisés autour du stage d'évaluation, qui a été qualifié d'inutile, d'humiliant et de coûteux. Je viens de le signaler, le Conseil d'Etat a rapidement pris des mesures pour le rendre plus efficace, pour qu'il ne soit plus ressenti comme rabaissant, pour que les personnes qui n'étaient pas véritablement éloignées du marché du travail, c'est-à-dire qui venaient de dépasser le délai-cadre du chômage, ne soient plus obligées de le suivre. (Brouhaha.)
Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît !
M. Mauro Poggia. Merci, Monsieur le président. Nous avons également relevé les lenteurs du système; initialement, c'est vrai, le but de cette loi était d'intervenir avec célérité. En revanche, nous nous sommes accordés sur le fait que le service de réinsertion professionnelle mis en place au sein de l'Hospice général accomplissait un travail de qualité. Certes, les résultats ne sont pas forcément au rendez-vous, mais ce qui a plutôt concentré les critiques, c'est la centralisation de ce service en un seul et même endroit, à l'écart des centres d'action sociale, ce qui donne l'impression - c'est peut-être davantage qu'une impression - que l'on effectue un tri entre les bons et les mauvais, entre ceux sur qui il faut se concentrer pour leur permettre un retour rapide sur le marché de l'emploi et les autres pour qui cela nécessiterait plus de temps et pour lesquels il faudrait d'abord chercher à régler les problématiques sociales.
Aujourd'hui encore, nous partageons les buts premiers de la LIASI. Il s'agissait d'une part de mettre un terme au RMCAS, jugé inefficace pour l'insertion et susceptible d'enfermer les bénéficiaires dans un système précaire offrant peu de perspectives de sortie, et de le remplacer par un dispositif à la fois plus performant et plus rapide. D'autre part, il s'agissait d'offrir aux usagers de l'aide sociale une prise en charge plus adaptée à leur problématique. Je l'ai indiqué il y a un instant, ces objectifs n'ont pas été atteints, nous avons constaté qu'il fallait réadapter le tout.
C'est la raison pour laquelle la direction générale de l'action sociale, en collaboration avec l'Hospice général, a mis en place un groupe de travail pour examiner de quelle manière nous pouvions prendre en charge plus efficacement les personnes à l'aide sociale. Nous avons redéfini le stage d'évaluation, je viens de le dire, puis réexaminé le rôle du SRP. Dès l'année prochaine, celui-ci sera décentralisé afin que les CAS puissent bénéficier des compétences de professionnels de la réinsertion qui travaillent en relation directe avec l'office cantonal de l'emploi.
En ce qui concerne la motion, Mesdames et Messieurs, son titre est trompeur, car il laisse sous-entendre que le Conseil d'Etat n'aurait pas été capable de tirer les justes conclusions de ce rapport - on nous parle en effet d'une meilleure prise en considération des conclusions de l'évaluation. Nous sommes d'accord sur les constats de même que sur les objectifs à atteindre, et la question est de savoir dans quel délai nous y parviendrons. Si je vous dis que la deuxième étape, soit celle de la décentralisation du SRP, sera effective à partir du début de l'année prochaine, vous constaterez que l'on ne peut pas exactement parler de lenteur.
Cela dit, on ne peut pas suivre telles quelles les invites de cette motion, il ne faut pas oublier que nous sommes soumis à des impératifs liés au droit fédéral. Les mesures du marché du travail, par exemple, sont accordées par l'intermédiaire d'un outil informatique intitulé PLASTA, qui est mis à disposition par le SECO. Malheureusement, en dépit de négociations menées dans ce sens, les collaborateurs de l'Hospice général ne peuvent pas attribuer des mesures du marché du travail via ce programme, seuls des conseillers en réinsertion professionnelle de l'OCE y sont habilités. Aussi, une interface a été mise en place, dont je me suis assuré pas plus tard que cette semaine du parfait fonctionnement, et nous constatons maintenant que l'OCE et l'Hospice général travaillent main dans la main pour assurer un suivi.
A l'époque, le gros problème était le point de rupture: on disait des gens qu'ils tombaient à l'aide sociale; ce n'était pas seulement un terme dénigrant, mais également une réalité puisqu'il y avait une vraie cassure entre le moment où l'on était chômeur et celui où l'on passait à l'Hospice général. Or il s'agissait toujours des mêmes personnes, elles ne changeaient pas en vingt-quatre heures !
J'aurais souhaité, dans les discours que l'on a entendus tout à l'heure, qu'il y ait un peu moins de dogmatisme et que l'on ne se borne pas à dire à l'emporte-pièce qu'il faut avant tout s'attaquer aux causes de la pauvreté; quand on a dit ça, Madame le rapporteur de minorité, on a tout dit, mais on n'a rien fait. Je vous entends à longueur de temps, vous et vos collègues, nous dire qu'il faut combattre la pauvreté et améliorer la formation, mais le seul projet de loi que j'ai vu émaner de votre groupe nous demandait de créer des emplois avec 100 millions - évidemment, rien de mieux pour supprimer les chômeurs que d'en faire des travailleurs et de transformer l'aide sociale en bulletin de paie ! Malheureusement - ou heureusement - ce n'est pas la vision d'une majorité de ce parlement. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote, en commençant avec la proposition de motion 2336. Un amendement a été déposé par la minorité, que vous trouvez à la page 118 du rapport. Ainsi que Mme Haller nous l'a expliqué, il s'agit de revenir à la teneur d'origine de la première invite, c'est-à-dire d'ajouter le segment suivant à la fin de la proposition: «et en allouant davantage de ressources». Je lance le vote sur cette requête.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 50 non contre 39 oui.
Mise aux voix, la motion 2336 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 58 oui contre 31 non et 2 abstentions.
Le président. Maintenant, Mesdames et Messieurs, il vous faut statuer sur le RD 1146-A. Nous avons été saisis d'une demande de renvoi au Conseil d'Etat, que je mets aux voix.
Mis aux voix, le renvoi du rapport de commission RD 1146-A au Conseil d'Etat est rejeté par 62 non contre 28 oui.
Le Grand Conseil prend donc acte du rapport de commission RD 1146-A.
Premier débat
Le président. Nous abordons le point suivant de notre ordre du jour avant de faire une pause. Il s'agit du PL 11323-A, que nous traiterons en catégorie II, quarante minutes. Monsieur Dandrès, je vous cède la parole.
M. Christian Dandrès (S), rapporteur de majorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Ce projet de loi a pour ambition d'augmenter l'horaire de travail hebdomadaire des fonctionnaires de 40 à 42 heures dans la perspective de faire une économie de 5%, ce qui représenterait une suppression de postes d'environ 1950 emplois équivalents temps plein. Le projet prévoit également d'inscrire dans une norme de rang législatif ce qui aujourd'hui est traité par voie réglementaire, dans le règlement d'application du Conseil d'Etat. Comme rapporteur de majorité, je vais rapidement faire la synthèse des arguments qui ont présidé au choix de la majorité de refuser ce projet. Je précise que l'intégralité de ces arguments n'est pas du parti socialiste.
Le premier point soulevé, c'est le fait que l'augmentation du temps de travail n'est pas nécessairement synonyme de gain de productivité. La gestion du personnel n'est pas une affaire comptable et on constate assez souvent dans la pratique qu'une augmentation du temps de travail a pour effet que la même masse de travail se fait simplement dans un temps plus long. L'autre aspect important est la question de la démoralisation du personnel. Il faut rappeler que, dans le contexte actuel, beaucoup d'efforts ont été demandés au personnel de l'Etat, efforts qui seraient mal récompensés par une augmentation de son temps de travail puisqu'elle signifierait aussi une diminution du salaire horaire. Il faut également préciser que le contexte financier n'est pas bon pour les fonctionnaires: il y a eu plusieurs blocages d'annuités et une péjoration des conditions de retraite avec la fusion de la CIA et de la CEH lors de la création de la CPEG en 2014. Le moment également a été jugé comme étant peu opportun, sachant que des discussions vont avoir lieu sur la CPEG ainsi que sur le projet SCORE. Et puis, il y a naturellement la question de l'emploi: le taux de chômage est élevé dans notre canton - plus de 5% - et supprimer 1950 emplois, soit 700 emplois de plus que lors de la fermeture de Merck Serono, serait éminemment problématique.
Le fait que le système législatif actuel soit suffisamment souple pour répondre aux besoins de l'administration a également été mis en avant. Il faut tout d'abord rappeler que l'annualisation du temps de travail est généralisée au sein de la fonction publique, ce qui permet d'éviter les heures supplémentaires et de faire face aux pics de travail, aux surcharges, lorsque nécessaire, puis de laisser les fonctionnaires récupérer le temps de travail supplémentaire lors des périodes moins chargées. La LPAC - la loi sur le personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux - prévoit également la possibilité pour l'Etat, en cas de besoin, de déplacer, de réallouer des ressources d'un service à l'autre pour autant évidemment qu'on reste dans des tâches que la personne est capable de faire. Il faut également préciser que, depuis une décennie au moins, un travail d'intensification de l'effort des fonctionnaires a été mis en place avec un fort encadrement managérial. Voilà donc ce qui a amené une majorité de commissaires à refuser ce projet de loi. Je vous remercie.
M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. Permettez-moi un trait d'humour pour commencer, Monsieur le président: avec tout ce qu'on a entendu aujourd'hui, je m'attends à être traité d'esclavagiste dans les propos qui vont suivre ! Redevenons sérieux; rappelons quand même que ce projet de loi a été initié préalablement, dans l'ancienne législature, suite aux résultats faramineux de nos comptes et des propositions de budget par la motion 2280 déposée le 2 juin 2015. Pour le piquant, vous me permettrez de dire, Monsieur le président, que ce projet de loi a été déposé le 15 novembre 2013, et nous avions prêté serment, si vous vous en souvenez, le 7 novembre 2013 ! Il a été renvoyé en commission le 13 février 2014; le rapport de minorité est du 3 février 2015, quant à l'excellent rapport de majorité...
Une voix. Oh !
M. Patrick Lussi. ...il est du 7 avril 2017. Le piment de cette affaire, Mesdames et Messieurs les députés, est quand même de se rappeler, si l'amnésie n'a pas frappé tout le monde, que dans le discours de Saint-Pierre du Conseil d'Etat, il y avait une velléité de voir si on ne pouvait pas augmenter le temps de travail des fonctionnaires. Je vous laisse relire ce qui était dit.
Monsieur le président, le rapport est très clair: actuellement, enfin, à l'époque où il a été rédigé, plus de 1000 ETP auraient été gagnés dans le grand Etat avec ce qui pour nous, esclavagistes notoires du canton de Genève, était une mesure indolore représentant grosso modo 20 minutes de travail de plus par jour. Oserais-je rappeler à cette assemblée que quand j'ai commencé à travailler, nous étions à 44 heures par semaine ? Voyez, à 68 ans, je suis toujours là et en pleine forme, mon Dieu ! Mais peut-être que je vous ennuie un peu, vous avez raison ! Donc, par rapport à tout cela et quand on regarde l'état actuel de notre budget - de l'excellent budget présenté par le Conseil d'Etat - et nos comptes, eh bien, je veux bien accepter tous les quolibets dont on va m'affubler ce soir, mais nous pensons, à l'Union démocratique du centre, que c'est une mesure indolore visant à diminuer le coût de l'Etat d'une manière plus que significative.
On nous dit que nous aurons peut-être les fonctionnaires dans la rue; je ne sais pas, mais, très sincèrement, ayant fait... Non, non, quand on regarde le gain potentiel, alors que chacun dans cet Etat doit commencer à faire un effort, 42 heures par semaine ne nous semblent pas constituer une potion amère à avaler. Raison pour laquelle l'Union démocratique du centre, malgré les arguments que vous allez entendre, vous enjoint d'accepter ce projet de loi. Merci, Monsieur le président.
M. Alberto Velasco (S). Voilà un projet de loi qui, s'il avait été présenté un siècle auparavant, aurait été progressiste... (Rires. Remarque.) ...mais vous avez un siècle de retard ! Un siècle de retard ! Mesdames et Messieurs, l'UDC a un siècle de retard en matière de ce qu'on appelle les avancées sociales, parce qu'en 1917, en 1920, en 1940, on aurait peut-être pu discuter, vous savez. Mais venir aujourd'hui, en 2017, avec un tel projet de loi, c'est quand même incroyable. Si je dis ça, c'est parce que la grande conquête des travailleurs a justement été la réduction du temps de travail. C'est vraiment leur grande conquête. Et pourquoi une réduction du temps de travail ? Pourquoi ? Pas seulement pour une question financière, c'est parce que les travailleurs voulaient se former, voulaient avoir accès à la culture, voulaient avoir du temps à consacrer à leurs enfants et à leur famille.
Ce qui est marrant, c'est que nous discutions, l'autre jour, à la commission des finances, des problèmes qui se posent à l'école. On nous disait - M. Batou était là - que, de plus en plus, les enfants ne sont pas éduqués et qu'il est question maintenant de demander aux parents de s'en occuper, au lieu que ce soient les professeurs qui interviennent. Nous, ce qu'on a dit, c'est que le stress au travail de tous nos concitoyens et concitoyennes est aujourd'hui tel que quand ils arrivent chez eux, ils n'ont même pas le temps de s'occuper de leurs enfants ! Et ils les voient de moins en moins ! Voilà un problème de société auquel il faut répondre. Mais il faut y répondre, Mesdames et Messieurs, par une baisse du temps de travail, pour que ces personnes puissent justement s'occuper de leurs familles ! Or, que nous propose l'UDC ? D'augmenter le temps de travail ! Puisque vous êtes stressés, puisque vous n'arrivez pas à vous occuper de votre famille, eh bien allons-y, augmentons le temps de travail ! C'est magnifique ! Sarkozy avait dit: «travailler plus pour gagner plus», vous, vous dites: «travailler plus mais gagner moins» ! C'est vachement bien ! Il était progressiste !
Une voix. C'est pareil, c'est pareil !
M. Alberto Velasco. Non, non, non, c'est comme ça ! Voilà donc, Mesdames et Messieurs, la solution progressiste que nous propose aujourd'hui l'UDC. C'est quand même terrifiant ! Et puis, à une époque où même le Conseil d'Etat, notamment M. Maudet qui n'est pas là ce soir, nous parle de la fameuse révolution 4.0 en indiquant - et très justement, très justement - que l'on va vers une société qui technologiquement parlant va produire beaucoup plus avec beaucoup moins de gens - avec moins de personnes - et en nécessitant moins de temps de travail, eh bien, nous, au Grand Conseil, nous allons carrément en sens contraire. On dit: «Non, non, non, malgré cela, nous, nous augmentons le temps de travail.» C'est fantastique !
La réalité, c'est que, si on avait continué le progrès et si on avait redistribué financièrement tout ce que ces grandes sociétés ont amassé, si on avait fait un petit plus de redistribution financière, on serait aujourd'hui à 32 heures ! On devrait être aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, à 32 heures ! C'est ça, le problème ! (Protestations.) Or, Monsieur Lussi, cher collègue - Monsieur le président, permettez-moi - la question qu'il faut se poser, la question que l'UDC aurait dû se poser quand elle a déposé ce projet de loi est: pourquoi ne sommes-nous pas à 32 heures ? Pourquoi devons-nous, aujourd'hui, financer le budget de l'Etat en appelant les travailleurs à travailler plus ? Pourquoi ? Voyez-vous, il faut vous poser la question ! Et les solutions... (Remarque.) ...et les solutions... Parce que vous avez quand même un certain niveau intellectuel - il n'y a pas de doute, hein - je suis sûr que vous auriez vu tout de suite que l'augmentation du nombre d'heures coûte beaucoup plus cher du point de vue de la santé, du point de vue financier que ce que vous prétendez. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) D'ailleurs, le rapport de majorité vous l'a indiqué; il vous l'a indiqué !
Non, Mesdames et Messieurs, je trouve que ce n'est pas du tout un projet qui correspond à notre ère. Je pense qu'il faut aujourd'hui donner du temps aux personnes pour qu'elles puissent accéder à tout ce que la société de consommation leur offre, c'est-à-dire des bouquins, la possibilité de voir des films, des concerts. Et pour cela, Mesdames et Messieurs, il est nécessaire de leur donner du temps pour vivre ! Et pour avoir le temps de vivre, il faut diminuer le temps de travail. Voilà, merci. (Applaudissements.)
M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, on entend souvent dans cette enceinte, face à des projets de lois, de résolutions ou de motions: «C'est une fausse bonne idée.» Généralement, on dit ça pour être un peu sympa avec l'auteur du texte, mais c'est surtout pour pouvoir mieux refuser l'objet, avec une certaine élégance. Dans le cas qui nous occupe - la modification de la LPAC, la B 5 05, modification de la durée du travail où clairement on propose une augmentation de la durée du travail de 40 à 42 heures - il s'agit simplement d'une mauvaise idée. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais rappeler ici qu'une politique des ressources humaines responsable repose sur la mise en place d'un certain nombre de mesures, de concepts, de propositions dans un ensemble qui se veut cohérent et avec des mesures d'accompagnement. Contrairement à ce que pense l'auteur de ce texte, l'horaire de travail ne constitue pas une politique des ressources humaines ! C'est seulement un jeu comptable et, lorsque nous analysons le texte qui nous est proposé et les interventions qui ont été faites, nous décelons plutôt une décision peu réfléchie, avec un aspect revanchard - qui me déplaît d'ailleurs un peu - et sans économies avérées. Il s'agit donc d'un texte qui ne mérite pas beaucoup de considération et que je vous inviterai à refuser. J'aimerais en plus rappeler une chose - et je l'ai fait à plusieurs reprises dans cette assemblée: le patron de la fonction publique, c'est le Conseil d'Etat ! La ligne stratégique qui doit être fixée dans la gestion du personnel de l'Etat est établie par le Grand Conseil mais l'opérationnel appartient au Conseil d'Etat, et j'aimerais qu'on respecte un peu plus souvent dans cette enceinte cette règle institutionnelle et constitutionnelle. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
M. Stéphane Florey (UDC). C'est face à l'immobilisme constant d'un Conseil d'Etat qui est purement et simplement incapable de proposer de vraies réformes structurelles que des groupes - en l'occurrence l'UDC - déposent de tels projets de lois; ils osent proposer quelque chose de raisonnable et de responsable. Raisonnable, parce que ça ne représente finalement que 24 minutes supplémentaires par jour pour les employés de l'Etat. Un exemple concret: en 24 minutes, deux déclarations fiscales de plus par jour et par personne sont contrôlées puisque, comme nous l'a dit M. Dal Busco plusieurs fois en commission, il faut environ dix minutes à un contrôleur fiscal pour examiner une déclaration. Le gain est donc évident, l'efficience en devient évidente. A cela, j'ajouterai que ce projet de loi ne prévoit aucun licenciement, contrairement aux mensonges avancés par le rapporteur de majorité; en l'acceptant, on éviterait simplement de gonfler indéfiniment les effectifs de l'Etat. Il faut dire encore que quinze cantons appliquent déjà les 42 heures, un seizième applique 41 heures 30, et il faut savoir que d'autres cantons, comme l'Argovie, sont en train de discuter de telles mesures amenant justement de vraies économies, puisque l'économie potentielle a été chiffrée par la commission: plusieurs dizaines de millions d'économies en votant le projet de loi tel qu'il est proposé. Et il s'agirait de la seule réforme structurelle qui pourrait être votée par notre Grand Conseil pour cette législature ! A part cela, aucune proposition concrète n'a été soumise et aucune réforme structurelle n'a été votée par ce Grand Conseil. C'est pour ces excellentes raisons que le groupe UDC vous recommande fortement de voter en faveur de ce projet de loi. Je vous remercie.
M. François Baertschi (MCG). Ce projet de loi donne une impression de grandeur: on va augmenter de 40 à 42 heures le temps de travail. On se dit: «C'est fou, on va pouvoir abattre une masse de travail considérable !» Or, en reprenant le rapport de majorité - et selon mes souvenirs - on constate qu'on aurait pu réduire de 597 le nombre d'emplois dans le petit Etat, qui seraient concernés par ces deux heures supplémentaires. C'est, sauf erreur, le chiffre qui nous avait été annoncé; 597 emplois sur 16 000, on voit que l'enjeu est beaucoup plus faible qu'on pourrait l'imaginer. Pour le grand Etat, ce seraient 450 emplois temps plein supplémentaires. On voit donc que la marge de manoeuvre est malgré tout minime.
Il est certain que quand on fait ce genre de calcul, si je me souviens bien également des travaux de commission, il faut tenir compte des gens qui ont des horaires spécifiques, les cadres en particulier, qui n'ont pas de limitation horaire, qui font des heures supplémentaires, ainsi que d'autres catégories, comme les enseignants, dont il faudrait déterminer le temps de travail, ce qui est plus complexe à réaliser. Mais ce n'est sans doute pas cela le plus important. Le plus important, ce que nous a très bien dit le responsable du personnel, c'est qu'il ne s'agit pas de comptabilité: la gestion du personnel se fait à un autre niveau. Elle repose aussi sur la motivation et le grand danger, c'est qu'on risque de démotiver des gens, qui ne se sentiront pas respectés. On risque également d'avoir ce que l'on appelle du présentéisme, c'est-à-dire des gens qui font des heures mais qui ne travaillent pas nécessairement, et un autre grand danger serait de se retrouver face à une opération blanche. Mais, personnellement, je suis surtout très surpris de voir que le premier signataire - qui a un travail public, qui travaille pour les TPG - ne serait lui-même pas touché et continuerait à travailler 39 heures par semaine ! (Remarque.) Je suis donc quand même très surpris par cette demande venant de cette personne, et je pense qu'il faut réserver à ce projet de loi le sort qu'il mérite, c'est-à-dire qu'il faut le refuser.
M. Serge Hiltpold (PLR). Je ne peux pas résister à l'envie de revenir sur les propos d'Alberto Velasco en citant le comité d'Olten pour qui une semaine de 48 heures était progressiste en 1918. Il faut dire que c'est encore une vision progressiste pour le canton de Glaris et l'agriculture qui n'est pas encore aux 48 heures par semaine. Ça, c'était juste pour le clin d'oeil. Dans ce débat sur la problématique des 42 heures, il est à mon sens juste de s'interroger sur le temps de travail, mais je pense que ce n'est pas du tout la bonne solution. La bonne solution, on l'a attendue de la précédente législature, elle est arrivée cette semaine: c'est le dépôt du projet SCORE. Et le vrai enjeu du débat parlementaire, le vrai enjeu du débat de l'agilité - notre Conseil d'Etat parle d'une administration plus agile et plus flexible - c'est d'établir un rapport de confiance entre l'employeur et ses collaborateurs. Dans ce Grand Conseil, nous devrions donner un cadre, mais nous ne sommes en fait pas en train de donner un cadre, nous sommes en train d'imposer un carcan. Je suis pourtant attaché au rôle - au rôle - du Conseil d'Etat qui doit assumer et pouvoir assumer son rôle de patron ! Et assumer son rôle de patron signifie avoir les moyens de négocier sans que le système législatif lui barre sans arrêt la route ou lui dise ce qu'il doit faire !
Si on veut donc être vraiment efficace - parce que le projet de l'UDC, dans l'esprit, n'est pas forcément à rejeter - il faut simplement changer de mentalité dans la gestion des ressources humaines, et ce changement, c'est SCORE. Se figer sur un temps de travail me semble dépassé. A l'heure actuelle, lorsque vous êtes dans le secteur privé, vous avez du travail à domicile, vous avez des bureaux communs, vous avez une génération, plus jeune, qui travaille sur des canapés avec des ordinateurs. Il faut arrêter de vous battre pour savoir combien de temps on va travailler dans l'administration ! Le vrai enjeu du débat, c'est de réussir à avoir plus d'agilité et à donner confiance. J'espère que les parlementaires qui siègent à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat partagent cette vision et qu'on essaie de se dissocier un petit peu de la position rigide ou dirigiste des syndicats, de faire un travail constructif pour que les collaborateurs puissent se réaliser ! Parce que, là, on parle du temps de travail, mais si vous voulez avoir de l'efficacité, dans une entreprise comme à l'Etat, il faut que les personnes se réalisent personnellement dans le travail. C'est une notion qui est ancienne, mais elle est tout à fait d'actualité, et je pense que le vrai enjeu est là ! Pour moi, les carcans, la LPAC, la LTrait sont donc beaucoup plus rigides. Notre Grand Conseil peut critiquer, à tort ou à raison, le Conseil d'Etat, mais il ne lui donne pas la chance ou la possibilité de mener la négociation. Je pense qu'il est sage de refuser ce projet de loi, mais, en tout cas au PLR, nous attendons du Conseil d'Etat, de ses représentants et de la fonction publique qu'ils se mettent à travailler véritablement ensemble, à avoir un vrai dialogue social et puis qu'au-dessus de cette... comment dire, dans ce dialogue, que nous, nous puissions valider cela avec un projet innovant. Et j'espère que SCORE arrivera à ses fins. (Applaudissements.)
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, il n'est pas suffisant de parler du dialogue social et de dire le vouloir si on n'écoute pas réellement la parole des gens du terrain et les organisations. En ce qui concerne ce projet, faire travailler deux heures de plus le personnel de la fonction publique et du secteur subventionné, c'est en réalité réduire son salaire de 5%, ce qui est inacceptable - à tel point que, repris quelques mois plus tard par le Conseil d'Etat, ce projet a amené dans la rue près de 11 000 fonctionnaires. On nous dit que ça permettrait de réduire le déficit de postes à l'Etat. Lorsqu'on fait remarquer aux auteurs de ce texte que la plupart des services travaillent déjà à flux tendu et qu'ils n'en peuvent plus, on entend: «Mais non, en fait ils pourront faire le travail de 40 heures en 42 heures !» On ne voit donc pas très bien le gain que ce projet de loi peut représenter pour l'Etat, si ce n'est qu'on se permet de disposer du temps du personnel de la fonction publique. Il faut le rappeler: la plupart des services travaillent à flux tendu, en situation de surcharge, avec des taux d'absentéisme relativement importants, et vous connaissez les effets du système domino. On ne peut pas, aujourd'hui, demander des efforts supplémentaires à la fonction publique ! On ne peut pas lui demander davantage alors que depuis des années vous lui demandez de faire plus avec moins et que dans beaucoup de cas elle n'est déjà plus en mesure d'assurer sa mission et de répondre aux usagers en maintenant la qualité de ses prestations !
S'il est vrai qu'il y a un problème de dotation dans le service public - fonction publique et secteur subventionné - alors regardons pourquoi: c'est l'un des effets de la politique de rigueur budgétaire pratiquée dans ce canton depuis un certain nombre d'années. Et pourquoi cette politique ? On nous dit qu'il n'y a plus d'argent; je vous signale quand même que, de révision fiscale en révision fiscale, on a atteint près d'un milliard de manque de recettes fiscales par an ! Cherchez la cause, finalement. Alors, quand on se promet de faire des cadeaux supplémentaires aux riches entreprises avec l'avatar de la RIE III - le PF 17 - qui montre le bout de son nez, quand on a consenti des cadeaux fiscaux extrêmement importants qui ont véritablement mis l'Etat et ses recettes en difficulté, on ne vient pas ratiboiser 5% de salaire au personnel de la fonction publique ! C'est pourquoi nous refuserons ce projet de loi. (Quelques applaudissements.)
Mme Frédérique Perler (Ve). Pour le groupe des Verts, ce projet de loi témoigne évidemment de la vision tout à fait passéiste que peut avoir l'UDC en matière d'emploi; croire qu'on va faire des économies et améliorer l'efficience en augmentant de deux heures la durée de travail, c'est un petit peu illusoire ! En cela, et je ne vais pas les répéter, je rejoins les propos de M. Hiltpold sur la conception du travail et la motivation des travailleurs. Mais ce qui est problématique avec ce projet de loi, c'est qu'il s'inscrit dans un contexte de mesures d'économie qui visent la fonction publique en péjorant ses conditions de travail; c'est-à-dire qu'on va lui demander de travailler plus, mais on ne va pas adapter les salaires: ça veut donc dire une baisse de salaire. Ça, c'est une première chose. L'autre chose, qui est une réalité - et le parti démocrate-chrétien notamment l'a souligné - c'est que le Grand Conseil n'a pas pour vocation de négocier à la place du Conseil d'Etat les conditions de travail de la fonction publique ! Ce dialogue doit avoir lieu entre le Conseil d'Etat, qui est le patron, et la fonction publique et les partenaires sociaux, après quoi le Grand Conseil valide ou pas la décision prise par ce cercle d'acteurs. Enfin, pour les Verts, augmenter le temps de travail alors que nous avons le souci d'une certaine qualité de vie pose évidemment des problèmes par rapport aux horaires de travail qui seraient potentiellement imposés si ce projet de loi devait, par miracle, être accepté. Toute une organisation familiale serait bouleversée sans qu'on puisse avoir une souplesse qui est aujourd'hui une garantie tant pour les patrons, pour les PME que pour le Conseil d'Etat employeur. Ils sont gagnants lorsqu'ils ont et offrent à l'ensemble de leurs collaborateurs et collaboratrices de la souplesse dans les horaires; de nombreuses études l'ont prouvé ! Ceux-ci travaillent plus - ils travaillent plus - sans y être obligés, il faut bien en avoir conscience. Pour toutes ces raisons-là, nous appuierons évidemment sur le non au moment du vote sur ce projet de loi très ancien, dont la vision est très passéiste. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame. La parole est à M. Gander pour une minute vingt-neuf.
M. Florian Gander (MCG). Merci, Monsieur le président. Je suis presque obligé d'éclater de rire quand j'entends ce que dit le premier signataire. C'est l'hôpital qui se fout de la charité ! Parce qu'un fonctionnaire doit faire des demandes de congé sans traitement quand il vient au Grand Conseil - il vient donc ici sans être payé - alors que notre collègue premier signataire, puisqu'on parlait de minutes, a droit à plus de 10 000 minutes par année, soit 21 jours, pour faire son travail parlementaire. C'est simplement inadmissible ! Dans ces conditions, je dis OK, on va soutenir ce projet de loi, mais alors appliquons-le à tout le monde ! Et que le premier signataire se l'applique à lui-même, parce que là, c'est vraiment un manque de courage ! A ce moment-là, on dira OK, on veut plus d'efficience aux TPG, pas de problème: on va retirer ces 21 jours aux fonctionnaires des TPG, et là, on aura peut-être une plus grande efficience. A l'Etat, pour un fonctionnaire, c'est quatre jours de plus par année ! Eh bien, moi, je préfère avoir 21 jours de travail de plus par année aux TPG; je me dis que les bus circuleront peut-être mieux, que les trams iront peut-être plus vite. Mais je ne vais en tout cas pas demander aux fonctionnaires, qui travaillent déjà à flux tendu, de continuer à se saigner alors qu'on sait très bien que derrière il y a des cadres avec de beaux projets mais qu'on n'a pas le personnel qui suit. Le groupe MCG vous invite donc, plus que jamais, à refuser ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur. La parole est à M. Florey pour une minute vingt-quatre.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. M. Gander est très mal placé, en tant que fonctionnaire, pour la ramener. D'abord, les conducteurs TPG ne sont pas fonctionnaires, ils ne dépendent pas de la loi B 5 05. Et ces prétendues 10 000 minutes, nous les payons: nous travaillons gratuitement 2 minutes par jour pour un total de 482 minutes par an... (Commentaires. Exclamations.) ...pour payer ces minutes-là ! Nous n'avons donc rien gratuitement, ces minutes sont largement payées par l'ensemble du personnel. En tant que fonctionnaire concerné par ce projet de loi, vous feriez mieux de la boucler, Monsieur Gander !
Ce que je voudrais maintenant dire, c'est que nous aurions éventuellement pu rejoindre les propos de M. Hiltpold. Simplement, le problème, c'est que SCORE est déjà contesté par la fonction publique; il n'y a vraisemblablement pas eu de véritable concertation, contrairement à ce que laisse supposer M. Dal Busco. Finalement, on ne sait pas ce qu'il adviendra de cette réforme qui ne sera certainement pas votée durant cette législature et contre laquelle des référendums seront très probablement lancés. Là-dessus l'avenir reste donc incertain, et quand M. Dal Busco a repris cette mesure, il a bien évidemment préféré baisser les bras face à la levée de boucliers. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur. La parole est à M. Olivier Baud pour une minute vingt-neuf.
M. Olivier Baud (EAG). Merci. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je serai assez bref. Effectivement, ce projet de loi est un non-sens, un non-sens absolu, et il sera refusé. Il émane d'une volonté, d'une haine irrationnelle envers les fonctionnaires qu'il faut dénoncer et que ce parlement ne cautionnera heureusement pas. La population doit selon moi pouvoir considérer que le travail des serviteurs de l'Etat est reconnu et valorisé, que ces 40 heures qu'ils effectuent sont tout à fait honorables et qu'il n'y a aucune raison de vouloir les augmenter au mépris de toutes les considérations, notamment celles de la santé du personnel. On sait, s'agissant de la santé, que les coûts peuvent être très importants si on presse inconsidérément le personnel. Or, l'absentéisme à l'Etat de Genève est justement tout à fait raisonnable et vouloir y dégrader les conditions de travail est irresponsable de la part de ce groupe. J'ai terminé, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur. La parole est au rapporteur de minorité, M. Lussi, pour une minute treize.
M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Je voudrais juste reprendre les propos de M. Olivier Baud qui reviennent à qualifier de haineuses les administrations qui imposent 42 heures de travail à leurs fonctionnaires - mon Dieu, quelle horreur - comme celles des cantons de Fribourg, Valais, Berne, Zurich, Bâle-Ville, Bâle-Campagne, Lucerne, j'en passe et des meilleures. Monsieur Velasco, pourquoi 42 heures ? Ces trois dernières années, il a fallu engager plus de 2000 collaborateurs pour faire le travail nécessaire, mais le personnel existant aurait peut-être été suffisant s'il avait travaillé un peu plus d'heures; voilà la réponse. Pour finir, je trouve dommage que cette section du PDC ne sache qu'avoir un dialogue haineux à l'encontre de l'UDC. Dans son excellent exposé, M. Guinchard n'a même pas traité le fond; c'est dommage, parce qu'il a dit des incohérences ! Enfin voilà, nous nous attendions à cela mais, Mesdames et Messieurs les députés, et Mesdames et Messieurs les députés du PLR, on vous entend à longueur de séance parler de faire des économies, seulement, quoi qu'on soumette, ce n'est jamais la bonne proposition. Sans doute avez-vous raison, la majorité de ce Grand Conseil vous suivra. Il n'en demeure pas moins que la dette ne cesse de se creuser. Merci, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur. La parole est à M. Dandrès pour une minute dix-huit.
M. Christian Dandrès (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je voulais réagir brièvement à une remarque du rapporteur de minorité indiquant que si ce projet de loi avait été voté, il n'y aurait pas eu d'augmentation du personnel au sein de l'Etat. J'aimerais attirer son attention sur une analyse de l'office du personnel de l'Etat qui dit que l'augmentation du temps de travail ne permet pas nécessairement de réduire le nombre de personnes affectées à une tâche, sauf si c'est une tâche qui est très homogène et qu'on a un nombre suffisant de personnes affectées à cette même tâche. Ce nombre, on l'aurait typiquement dans la police, aux TPG et au DIP, mais le projet de loi ne touche pas ces corps-là de la fonction publique. Je crois donc que cet objet n'aurait pas d'autre impact que de démobiliser le personnel, qui arrive aujourd'hui à faire face aux besoins accrus en matière de service public.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, dans la gestion du personnel, il faut faire preuve de pragmatisme et éviter des solutions à l'emporte-pièce. J'ai entendu certains députés mentionner la période que l'on a vécue il y a deux ans; je rappelle juste à cet égard que cette question, qui avait effectivement suscité beaucoup d'émoi dans la fonction publique, était une piste parmi d'autres que le Conseil d'Etat avait évoquée et souhaitait discuter avec ladite fonction publique. La suite a démontré que cette volonté de discussion n'existait pas chez cette dernière. Toujours est-il que ce qui est important pour le Conseil d'Etat, c'est évidemment d'avoir des collaborateurs motivés, et c'est le cas pour une très, très grande majorité d'entre eux: le taux d'absentéisme moyen à l'Etat est effectivement correct, il est tout à fait dans la norme. S'il est plus élevé dans certains services, cela dénote une situation particulière à laquelle il faut être attentif. Il est probable qu'une proposition telle que l'UDC l'a faite, non pas sous la forme d'une proposition à discuter, mais d'un projet de loi sur lequel il s'agit de statuer, aurait des effets collatéraux indésirables, en particulier sur le taux d'absentéisme et sur la motivation des collaborateurs; en fin de compte, les calculs mathématiques, arithmétiques, linéaires, auxquels les auteurs du projet de loi se sont livrés ne produiraient évidemment pas les effets escomptés. Et ça, le Conseil d'Etat en a parfaitement conscience; il faut donc faire preuve d'extrême prudence, et à ce titre, le gouvernement tient à vous préciser qu'il ne soutient évidemment pas ce projet de loi.
On a entendu le Conseil d'Etat se faire taxer d'immobilisme par le premier signataire; c'est vrai que certains dossiers prennent du temps, surtout quand ils sont importants, quand ils sont structurants... (Remarque.) ...quand ils sont fondamentaux comme celui que nous avons déposé il y a quelques semaines - il s'agit de SCORE; je ne sais plus exactement quand c'était. C'est un dossier très important, qui est complexe, qui a suscité et nécessité de longues discussions avec la fonction publique. Ces discussions n'ont peut-être pas abouti à ce que nous souhaitions faire, mais nous avons estimé nécessaire de vous soumettre le projet, dans ce parlement, comme nous en avions à plusieurs reprises exprimé l'intention. C'est désormais chose faite, et c'est sur ce projet que le Conseil d'Etat entend vous demander de vous concentrer en ce qui concerne les ressources humaines, parce que ce projet est fondamental. Je le rappelle, il vise à moderniser notre système de rémunération qui a plus de quarante ans d'âge, il vise à rétablir de l'équité, il vise à oeuvrer dans le sens d'une égalité ou de plus d'équité entre les hommes et les femmes - les projections que nous avons faites montrent d'ailleurs que plus de 60% des personnes qui vont gagner dans ce système sont des femmes - il vise à revaloriser des professions dans certains domaines qui méritent véritablement une revalorisation de fonction, je pense en particulier au domaine de la santé, et je le sais parce que je connais personnellement des gens qui travaillent dans ce secteur.
Je m'étonne franchement que ce projet-là, qui est robuste, efficace et souple, qui nous permet de vraiment nous projeter dans la modernité, ne soit pas simple à faire passer, comme certains d'entre vous l'ont évoqué: vous avez entendu que les partenaires sociaux, ceux qui sont censés représenter nos collaborateurs, ont démontré une certaine retenue - c'est le moins qu'on puisse dire, j'utilise un euphémisme - voire une opposition à SCORE. Je m'en étonne fortement, parce que ce projet mérite vraiment d'être soutenu. Il sera étudié par votre Grand Conseil, et je suis d'ailleurs très sensible au fait qu'un chef d'entreprise se soit exprimé tout à l'heure, du côté du PLR, avec des propos extrêmement sensés et mesurés en matière de gestion du personnel; c'est effectivement dans ce domaine-là que nous devons maintenant, pour les excellentes raisons évoquées, mettre toute notre énergie dans les relations avec la fonction publique. C'est dans le projet SCORE qu'il faut mettre l'énergie et c'est à cela que je vous invite de manière presque solennelle. Le projet est désormais dans l'une de vos commissions, il ne vous reste donc plus qu'à travailler dessus. Pour toutes ces raisons, je vous demande au nom du Conseil d'Etat de refuser ce projet de loi. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons maintenant voter sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 11323 est rejeté en premier débat par 76 non contre 9 oui et 1 abstention.
Le président. Je lève la séance, nous reprendrons nos travaux à 18h25.
La séance est levée à 18h.