Séance du
jeudi 18 septembre 2014 à
20h30
1re
législature -
1re
année -
11e
session -
71e
séance
PL 11301-A
Premier débat
Le président. Nous passons à l'urgence suivante, qui est classée en catégorie II - quarante minutes. Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Ivan Slatkine.
M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous traitons ce soir du contrat de prestations 2013-2016 entre l'Etat de Genève et Cinéforom, fondation ayant pour but de fédérer l'ensemble des aides romandes pour le cinéma. De l'écriture à la création, de la production à la réalisation, de la diffusion à la distribution, Cinéforom fait partie des trois piliers de l'aide au cinéma en Suisse que sont la Confédération, la SSR et l'aide régionale.
Sans vouloir revenir trop longuement sur l'histoire de la fondation d'aide pour le cinéma, il faut relever que les huit partenaires du projet initié en 2011 ont pris des engagements dès la création de cette fondation - ces huit partenaires étant la Ville de Genève, l'Etat de Genève, le canton de Vaud, la Ville de Lausanne et les cantons de Valais, Neuchâtel, Fribourg et Jura. Lors de la précédente législature, le canton de Genève a, par le biais de sa majorité de l'époque, décidé de limiter à deux ans le premier contrat de prestations, étalant une aide progressive avec 1,25 million de francs en 2011 et 1,5 million de francs en 2012. Il était alors convenu que le Grand Conseil serait ensuite saisi d'un contrat de prestations sur quatre ans, couvrant la période 2013-2016 avec une subvention augmentée jusqu'à hauteur de 2,5 millions de francs en 2016, selon les engagements pris en 2011.
C'est de ce contrat de prestations qu'il s'agit de parler ce soir. Notre Grand Conseil étant ce qu'il est, nous débattons aujourd'hui seulement d'un contrat de prestations portant déjà sur deux exercices écoulés. Faute d'avoir voté le présent projet de loi avant ce jour, ce sont les budgets votés par la majorité du Grand Conseil qui ont validé ces autorisations de dépenses de 2 millions de francs en 2013 et de 2,15 millions en 2014. Le budget faisant foi au niveau législatif selon le Conseil d'Etat, les montants dépensés en 2013 et ceux partiellement dépensés à ce jour, en 2014, ne peuvent aujourd'hui être remis en question, à moins d'imaginer que les subventions versées jusqu'aujourd'hui puissent être remboursées. Pour cette simple raison, il serait totalement aberrant de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Il en va de notre responsabilité de valider ce qui a été voté par notre Grand Conseil lors des budgets 2013 et 2014, sans le moindre débat.
Pour ce qui est des années 2015 et 2016, l'idée de demander à l'administration de venir nous présenter un nouveau contrat de prestations n'a pas de sens d'un point de vue administratif: le politique doit prendre ses responsabilités, afin de permettre à l'administration de travailler correctement et de permettre la meilleure allocation possible des subventions accordées, tout en pensant à ceux et celles qui sont dans l'attente de notre décision pour réaliser leurs projets. Bien que l'on puisse s'étonner, s'insurger, sur le fait que les montants inscrits au budget 2013 et 2014 ne reposaient sur aucune base légale, en l'absence du contrat de prestations voté, bien qu'on puisse être étonné que le Conseil d'Etat ait inscrit dans ses budgets des montants en augmentation par rapport à ceux de 2012 sans nous avoir rendus attentifs à la chose, et bien que le projet de loi ait été refusé en commission des finances, je représente certainement une majorité qui ne souhaite pas que l'aide au cinéma soit totalement supprimée, comme le laisse croire le vote de la commission des finances.
Il faut bien comprendre que la composition de notre Grand Conseil en trois blocs ne permet pas - ou plus - de dégager des majorités claires. Dans le cas qui nous concerne ce soir, nous avons trois groupes avec des objectifs distincts. Pour le premier, représenté par le MCG, il faut supprimer l'aide au cinéma; pour le second, représenté en commission par le PLR et l'UDC, il ne faut pas supprimer l'aide allouée, mais il convient de la redimensionner aux réalités financières de notre république.
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Ivan Slatkine. Enfin, pour le troisième groupe, il faudrait voter le contrat tel qu'il est. Nous pouvons donc sans trop de difficulté penser qu'il est possible de trouver une majorité qui permette de maintenir une aide à Cinéforom.
Le président. Il vous faut conclure.
M. Ivan Slatkine. Je vous remercie, Monsieur le président. La culture contribue au rayonnement de notre région et de notre canton. Il serait regrettable que nous tombions dans le même piège qu'à la commission des finances et que nous coupions toute aide au cinéma. C'est pour cette raison que le rapport de majorité que je présente vous appelle, Mesdames et Messieurs les députés, à vous satisfaire d'un amendement qui, je l'espère, pourra trouver une majorité. Cet amendement a pour but de maintenir une aide à la fondation Cinéforom. Certes, il ne satisfera personne, mais il aura au moins l'avantage de ne pas détruire une fondation qui fonctionne à la satisfaction de tous.
Le président. Il vous faut terminer, Monsieur le rapporteur.
M. Ivan Slatkine. Je poursuivrai ultérieurement, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je passe la parole au rapporteur de minorité, M. Roger Deneys.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais d'abord saluer les propos du rapporteur de majorité. Parce qu'en commission des finances, ma foi, nous avons assisté à une scène assez particulière: ce projet de loi a été refusé intégralement par une majorité composée de l'UDC, du MCG et du PLR. En l'occurrence, le verdict de la commission des finances, c'est de dire: nous ne donnerons pas un seul franc à cette fondation romande du cinéma ! Telle était la décision d'une majorité de la commission des finances, décision contre laquelle les socialistes se sont insurgés.
Il faut d'abord rappeler que l'idée de cette fondation pour le cinéma, c'est de fédérer des énergies et aussi des moyens financiers, pour essayer de donner une certaine masse critique à la production cinématographique romande. Ça ne veut pas dire que cette fondation est parfaite. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas des questions qui se posent sur la façon dont elle peut subventionner les uns plutôt que les autres. Il n'empêche que c'est un projet exemplaire en termes de fédération des énergies.
Mesdames et Messieurs les députés, nous avons pu le constater tout à l'heure, ce Grand Conseil vote 500 000 F - les yeux fermés, ai-je envie de dire - pour Genève Futur Hockey. C'est très bien d'aider le sport, les jeunes, etc. Pour le cinéma, ma foi, on n'a pas le même genre de débat en commission; on a des gens qui posent des questions, demandent pourquoi les Vaudois financent ceci, pourquoi les Valaisans n'ont pas financé cela... Cela donne un état d'esprit extrêmement nuisible à la promotion de la culture romande. Parfois, j'ai envie de dire que si on sait que le MCG, ou en tout cas certains de ses membres sont des ennemis de la culture romande, parce qu'ils y voient peut-être aussi une forme de subversion, eh bien, ma foi, certains PLR vont sur le même terrain: ils s'insurgent contre telle ou telle production, contre tel ou tel projet et ils contestent les montants pas seulement sur le fond, mais aussi sur le contenu ! J'ai envie de dire que le PLR, ma foi, aime parfois la culture comme Jack l'Eventreur aimait les femmes ! (Brouhaha.) Et je pense que c'est un des problèmes avec les débats tels que nous les avons connus en commission. (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Roger Deneys. Pour les socialistes, c'est très clair: notre souhait est de revenir au projet de loi initial du Conseil d'Etat - Conseil d'Etat qui est composé d'une majorité de PLR, de PDC, de membres de l'Entente, pas d'une majorité de socialistes. Et il est vrai que le rapporteur de majorité est venu avec une proposition d'amendement, qui ne satisfait pas les ambitions des socialistes, qui ne répond pas aux exigences romandes, mais quelque part, pour nous, l'essentiel, c'est d'arriver à une solution qui permette à cette fondation d'exister et, si possible, quand même en partenariat avec les autres partenaires. Parce que nous ne sommes pas seuls, et je pense que c'est bien là l'un des enjeux de ce projet de loi: affirmer que nous devons respecter nos engagements envers nos partenaires romands. Bien entendu, pour modérer les propos que j'ai tenus tout à l'heure, j'aimerais ajouter qu'il est vrai que j'ai une certaine exaspération quand je vois la façon dont se mènent les débats, selon les projets.
Je vous invite à vous rallier à l'amendement du rapporteur de majorité. Je pense que c'est une première base pour essayer de faire vivre cette fondation, dans une forme certes réduite, mais qui lui permette au moins d'exister.
M. Eric Leyvraz (UDC). Contrairement à ce que dit M. Deneys, l'UDC ne s'oppose pas à une subvention au cinéma, elle s'opposait au projet de loi tel qu'il était présenté là, pour la simple et bonne raison que le Conseil d'Etat avait voté des augmentations sans base légale... (Commentaires.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Eric Leyvraz. ...et, alors que toutes les autres subventions sont désormais limitées voire baissent, il me semble que ce n'est pas très normal par rapport à d'autres associations d'augmenter des subventions de 2,15 millions à 2,5 millions de francs. Il suffit aussi de regarder que le canton de Vaud n'augmente pas sa subvention entre 2013 et 2016. Il est bien clair que pour ce qui a été dépensé en 2012 et 2013, on ne peut pas revenir en arrière. Il faut évidemment respecter les dépenses déjà faites, ce n'est quand même pas la faute de Cinéforom non plus si nous n'avons pas encore voté ce projet de loi. C'est pour cette raison que nous allons accepter l'amendement proposé par le PLR, qui nous semble raisonnable.
Je dois dire aussi que nous étions quand même un tout petit peu surpris: le cinéma doit être un art populaire et on voit que les trois films qui ont eu le moins d'audience et qui ont été subventionnés avec nos sous ont eu comme public 33 spectateurs pour le plus faible, 45 pour le deuxième et 89 pour le troisième. On peut vraiment parler d'une audience discrète !
Mesdames et Messieurs, nous accepterons ce projet de loi avec l'amendement du PLR.
M. Michel Ducommun (EAG). Sur ce sujet, mais ce n'est pas le seul, je sais que mon expérience de membre de la commission des finances est relativement limitée, il n'y a pas longtemps que j'y suis. Toutefois, cette expérience est caractérisée par le fait que, chaque fois que le mot culture est prononcé, la droite dit: diminution des subventions ! C'est quasiment une manière de faire logique et constante.
Le cinéma de création suisse romand mérite à mon avis d'être soutenu; il mérite un soutien financier et je crois que la collaboration romande à ce niveau est effectivement intéressante. Nous sommes donc fondamentalement pour maintenir la subvention telle qu'elle est prévue par le projet de loi. Nous avons quelques réserves avec l'amendement qui propose quand même de diminuer la subvention de plus d'un million de francs sur quatre ans, ce qui revient à une diminution de 13%.
Il y a encore un gros «mais»: dans mon innocence de nouveau membre de la commission des finances, je me suis fait rouler une fois et je pense ne pas vouloir me faire rouler deux fois. C'est-à-dire qu'en commission des finances, le MCG a prétendu soutenir ce projet de loi. A partir du moment où il a prétendu le soutenir, il a donc refusé les amendements qui diminuaient la subvention. A partir du moment où il y a une majorité pour ne pas soutenir la diminution des subventions, le projet a été refusé par le PLR qui avait voulu ces diminutions, mais également par le MCG ! Ce qui a fait qu'il y a eu une majorité pour supprimer toute subvention à Cinéforom !
Si nous avons des réserves sur l'amendement proposé pour diminuer les subventions, nous ne voulons pas nous faire rouler de la même manière qu'à la commission des finances pour arriver à ce que tout le projet de loi soit supprimé. Nous allons donc nous abstenir sur l'amendement proposant une diminution de la subvention pour qu'il reste une majorité à la fin pour voter quand même une subvention à Cinéforom.
Mme Emilie Flamand-Lew (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, il y a quelques années, chaque canton versait des subventions au cinéma de son côté. Puis, en 2009, les conseillers d'Etat latins en charge de la culture ont initié une réflexion commune qui a abouti à la création de la Fondation romande pour le cinéma, dite Cinéforom. L'objectif est louable, puisqu'il s'agit de mettre en commun les forces des cantons, de distribuer les fonds publics de manière mieux coordonnée et donc plus rationnelle.
Malheureusement, au sortir de la commission des finances, après un débat houleux et une assez douteuse partie de billard à trois bandes, l'aide financière à Cinéforom s'est trouvée tout bonnement supprimée. Nous regrettons vivement ce vote et espérons, comme le rapporteur de majorité, qu'une solution pourra être trouvée ce soir, pour poursuivre notre soutien à cette fondation et, surtout, notre soutien au cinéma romand, un domaine dans lequel Genève est particulièrement actif. Pour soutenir la création et maintenir un cinéma romand dynamique et vivant, nous vous invitons à entrer en matière.
M. Henry Rappaz (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le Mouvement Citoyens Genevois, en concertation avec certains cinéastes genevois, dénonce cette fondation du cinéma qui est au service uniquement de quatre à cinq gros producteurs de la Romandie, qui s'attribuent des subventions à eux-mêmes, ce qui pour le MCG est intolérable. Il faut savoir qu'aujourd'hui, l'autorité fédérale de surveillance des fondations enquête sur le dysfonctionnement de Cinéforom, anciennement la Fondation romande pour le cinéma. Cette autorité indique avoir des points supplémentaires à éclaircir auprès de Cinéforom. Faute de temps suffisant pour le traitement de ces questions, elle n'a pas été en mesure de terminer son rapport pour aujourd'hui.
S'il est une évidence, en tout état de cause, c'est qu'il n'est nullement question pour nous de supprimer l'aide publique actuelle au cinéma genevois et romand, ce qui ne pourrait que nuire gravement à la diversité culturelle. Nous voulons un contrôle sévère sur la répartition des fonds. Il en va de même d'un maintien du statu quo quant aux modalités de distribution de ces subventions. Par conséquent, il convient à l'avenir de voter de manière responsable en faveur d'une réforme de la Fondation romande pour le cinéma, pour une culture et un cinéma romand meilleurs et surtout ouverts à tous.
A l'avenir, les conditions suivantes seront requises: premièrement, la Fondation romande pour le cinéma doit être transformée en fondation de droit public selon le modèle de Pro Helvetia et dotée d'un droit de recours, conformément aux exigences des constitutions fédérales et cantonales. Deuxièmement, le conseil de fondation actuel doit être remplacé par des personnes au-dessus de tout soupçon de copinage et autres «combinazione» ou monopoles. Je vous rappelle que la fondation pour le cinéma romand Cinéforom est une institution de droit privé qui distribue depuis 2011 de l'argent public sans droit de recours, et ce majoritairement à des sociétés anonymes contrôlées - c'est un comble - par des membres de son propre conseil de fondation ! Nous ne voulons plus de ce genre de magouilles qui plombent les jeunes réalisateurs indépendants qui, par ce fait, n'ont jamais accès à cette manne. Nous vous invitons à agir à l'avenir en faveur d'un système d'aide publique au cinéma romand qui soit efficace et honnête.
Je terminerai en disant que si le cinéma est un rêve et les factures qui en découlent un cauchemar, elles ne le sont pas pour tous. Vous m'aurez bien compris, le MCG vous invite à refuser le PL 11301-A afin de connaître l'analyse finale de l'autorité fédérale de surveillance des fondations qui nous permettra de traiter ce sujet en connaissance de cause. Nous suggérons donc un renvoi à la commission des finances. (Applaudissements.)
Le président. Vous voulez un renvoi de l'objet à la commission des finances, c'est bien cela ? (Remarque.) Je passe la parole au rapporteur de majorité, sur la demande de renvoi en commission uniquement.
M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Il faut être très clair: ce Grand Conseil doit prendre ses responsabilités. Prendre ses responsabilités, c'est voter ou refuser ce contrat de prestations ce soir, mais botter en touche pour un renvoi à la commission des finances et encore laisser dans l'attente le vote sur ce contrat de prestations, alors que cela fait deux ans qu'on aurait dû le voter, c'est nier nos responsabilités; raison pour laquelle je vous invite à refuser le renvoi à la commission des finances.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Monsieur le rapporteur de minorité, sur le renvoi en commission ?
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le Grand Conseil s'est déjà distingué de façon négative en votant le premier projet de loi 10840 en 2013, alors qu'il concernait le financement des années 2011 et 2012. Evitons de répéter l'exercice, en votant en 2015 un contrat de prestations qui commence en 2013 ! On est en train de mettre tout le monde dans des situations extrêmement difficiles en faisant ce travail après coup. Je pense que la crédibilité du Grand Conseil consiste aussi à voter les projets de lois en temps et heure.
On peut diverger sur les montants, sur la façon de faire vivre cette fondation, mais voter ce soir un renvoi en commission n'amènera pas les informations nécessaires. Si cette fondation doit pouvoir être réformée, elle doit pouvoir vivre et mener sa vie pour être réformée selon les souhaits des uns et des autres - voire selon des décisions de justice, si c'est nécessaire.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je soumets cette demande de renvoi à l'assemblée.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11301 à la commission des finances est rejeté par 71 non contre 21 oui et 1 abstention.
Le président. Nous poursuivons notre débat et je passe la parole à M. Guy Mettan.
M. Guy Mettan (PDC). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, on a beaucoup reproché à l'Etat de mal distribuer ses subventions, de se disperser dans tous les coins, d'octroyer des subsides pour le théâtre ici ou là, d'en octroyer d'autres pour le reste de la culture, dispersés dans toutes sortes de domaines. Enfin, dans le domaine du cinéma, il y a maintenant deux ou trois ans, les cantons romands se sont mis d'accord pour créer une fondation commune et rationaliser toute l'aide au cinéma dans une structure unique. On ne peut donc pas venir reprocher à l'Etat d'avoir fait ce qu'on lui a demandé de faire. Cela a été rappelé par ma collègue Emilie Flamand-Lew tout à l'heure. Le projet qui nous est soumis ce soir est justement le fruit de cette rationalisation qui permet à tous les députés que nous sommes et à tout le public de voir qu'effectivement un effort a été fait pour mieux utiliser les subventions, au cinéma en l'occurrence. C'est la première raison pour laquelle il faut voter ce projet de loi.
Ensuite, dans les discussions de la commission des finances, certains ont été sensibles aux objectifs de rigueur. C'est le cas du PLR qui a souhaité réduire un tout petit peu cette subvention de telle façon que les bénéficiaires participent eux aussi à l'effort de rigueur. On peut être d'accord ou pas. Le parti démocrate-chrétien aurait souhaité voter le projet de loi tel qu'il nous a été présenté, mais nous sommes aussi des pragmatiques, nous sommes aussi soucieux du bon usage de l'argent public et, effectivement, des conditions de rigueur budgétaire imposées à l'ensemble du corps social genevois. C'est la raison pour laquelle j'ai déposé cet amendement, avec l'assentiment du rapporteur de majorité et, j'espère aussi, du rapporteur de minorité, de telle façon que nous puissions ce soir enfin voter cette aide au cinéma et que Genève arrête de se ridiculiser par rapport aux autres cantons qui ont tous accepté ce principe. Nous allons voter maintenant, je l'espère, pour l'ensemble de la communauté cinématographique, ce projet de loi avec cet amendement.
J'aimerais rappeler aussi en conclusion que le cinéma, ce ne sont pas que des coûts. Le cinéma, ce sont aussi des emplois: il y a toute une industrie du cinéma. On ne peut pas comparer la Suisse romande à Hollywood ou à Bollywood, mais enfin, c'est une industrie à part entière, qui crée aussi des emplois. C'est aussi une stimulation pour les jeunes: regardez la HEAD, son école de cinéma prend son envol, elle est reconnue maintenant au-delà de nos frontières. C'est aussi par rapport aux jeunes que nous votons ce projet-là, de façon à favoriser la relève.
Ce n'est pas du tout vrai qu'il y a du copinage. Effectivement, le cinéma est un milieu relativement étroit, comme tous les autres milieux d'ailleurs, mais il n'y a pas de copinage particulier en ce domaine, en tout cas pas plus qu'ailleurs. Ce reproche est tout à fait inexact.
Mesdames et Messieurs, je ne peux donc que vous encourager à voter l'amendement proposé et à adopter enfin ce projet de loi qui sera un excellent signal pour l'ensemble de la communauté culturelle genevoise et romande, même s'il a été raboté un petit peu entre-temps. (Applaudissements.)
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Je sais que nous sommes des politiques, que nous avons chacun notre caractère, c'est un fait. Ici, nous parlons d'autre chose: fondamentalement, nous parlons de culture, mais plus que ça, de loisirs et aussi d'économie. Nous avons vu tout à l'heure l'unanimité sur l'importance de défendre le sport et je crains que nous n'arrivions pas ce soir à être unanimes ou en tout cas majoritaires pour défendre la culture. Or, c'est une culture qui reste encore et toujours populaire; elle n'est pas seulement élitiste, elle peut être documentaire, mais c'est aussi une culture qui donne du plaisir, qui intéresse, qui questionne. Je crois donc que nous devons accepter l'amendement proposé.
Tout le monde est frustré par la façon dont les débats se sont déroulés en commission des finances, mais à mon avis, il ne faut pas oublier que si on veut que la Suisse romande ne compte pas pour rien en termes internationaux, nous avons le devoir de soutenir ce type de culture !
Pour finir, j'aimerais tout de même vous dire que, durant les travaux, on nous a fait part d'une étude réalisée en France, en Provence-Alpes-Côte d'Azur. Cette étude démontrait qu'avec 2,5 millions d'euros de subvention, le cinéma rapportait 21 millions d'euros en retombées économiques, en salaires et en économie complémentaire autour du cinéma, comme l'hôtellerie.
Je rappelle que la fondation Cinéforom est jeune; elle n'est pas encore ce que tout le monde a envie qu'elle soit. Elle peut encore s'améliorer, et c'est le rôle du Conseil d'Etat et des contrats de prestations futurs de le lui permettre. On ne peut pas faire avorter ce projet qui a montré en une année qu'il pouvait attirer plus de 170 000 spectateurs avec des films suisses romands. Nous avons donc une responsabilité ce soir et je vous remercie de la prendre. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. le député Thomas Bläsi. Il vous reste deux minutes trente.
M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, quand on regarde cette subvention sous un premier angle ou une première focale, c'est effectivement une subvention séduisante, généreuse: on augmente l'offre culturelle, on soutient les artistes qui, de tout temps, ont quand même eu des problèmes pour mener à bien leur activité. Malheureusement, on est quand même obligé d'avoir une focale différente, et c'est pour cela que l'interprétation de la position par M. Deneys est pour le moins extensive. Nous n'avons rien contre le cinéma, bien au contraire, mais le problème est que la subvention dont vous nous parlez concerne des films dont les fréquentations sont de l'ordre de trente à quarante spectateurs par film. (Commentaires.) Mais oui, mais c'est une réalité ! Aujourd'hui, ce parlement a de nombreux votes qui l'attendent et parmi ces votes, il y a des choix à faire. Il y a des choix à faire dans l'aide sociale, sur le cinéma, et on va devoir procéder à des arbitrages. Oui, vous hochez de la tête, mais élargissons encore plus la focale, alors. A l'heure actuelle, quelle est la perspective pour la population de Genève ? 14% d'augmentation du coût de l'électricité, des pertes au niveau des TPG, des pertes dans certains secteurs des HUG, une augmentation programmée des coûts des caisses-maladie et, dans cette ambiance, on va distribuer l'argent des impôts pour un secteur qui, malheureusement, n'a pas le succès que nous escomptions. Vous faites une comparaison avec Genève Futur Hockey: je suis désolé, mais là, on est dans le succès, on est dans la réussite. On sait que l'argent qu'on investit va conduire à une amélioration globale pour Genève.
Nous ne sommes pas contre cette fondation ou contre cette aide, mais nous sommes contre le fait qu'il y ait une augmentation systématique et automatique de la subvention, alors que les résultats ne sont pas là. Nous voudrions d'abord voir les résultats qui ont été acquis par les subventions que nous avons déjà versées, que la parole engagée soit respectée pour les subventions passées...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Thomas Bläsi. ...et que, pour le futur, nous réduisions cette augmentation automatique pas forcément approuvée par le parlement.
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Renaud Gautier, vous avez trois minutes trente.
M. Renaud Gautier (PLR). Merci, Monsieur le président. Vous demanderez au rapporteur de minorité si, par hasard, il a vu un film inspiré d'un livre assez connu qui s'appelle «Le Désert des Tartares». (Rires.) On y voit un lot de soldats qui attendent désespérément une attaque, dans quelques confins perdus et désertiques. Par analogie, Mesdames et Messieurs, lorsqu'on souhaite que ce parlement arrive à un consensus, dans une affaire effroyablement mal partie, il faut le dire - puisque ce parlement a été relativement sciemment trompé sur cette association qui s'est vu octroyer des subventions, alors qu'il n'y avait pas encore de contrat de prestations - est-il absolument nécessaire d'entendre à journée faite et «ad nauseam» les injures personnalisées du rapporteur de minorité contre certains ? A croire que celui-ci, dans le fond, beaucoup plus vicieux qu'on pourrait le croire - ce qui veut dire vraiment beaucoup - entend forcer celles et ceux qui hésitent à ne pas voter cette subvention, tellement la fatigue que nous avons de ces attaques permanentes devient insupportable.
Alors, Monsieur le président, je compte sur vous pour expliquer à votre collègue de parti que, s'il attend parfois, de temps à autre, que nous arrivions à développer Genève en votant certains budgets, il serait bon que ces attaques personnelles cessent une bonne fois pour toutes. Ce n'est pas à vous que j'apprendrai les différents lieux où l'on peut s'exprimer, comme par exemple internet, pour recevoir à journée faite des leçons de M. Deneys, passé maître dans la morale - lui qui sait et nous qui ne savons pas ! Lui qui est dans la lumière et nous qui sommes dans l'ombre ! Il est à la longue, excusez-moi Mesdames, effroyablement casse-couilles ! Si M. Deneys et les socialistes attendent que nous participions à quelques projets avec eux, pour l'amour du ciel, faites-le taire ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je vous remercie d'appeler, tout comme moi, les gens à la raison. Je fais ce que je peux ! Je passe la parole à M. le député Alberto Velasco, à qui il reste une minute dix-huit.
M. Alberto Velasco (S). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, je ne vais pas ajouter encore aux raisons pour lesquelles il faut voter ce projet de loi, mais je dois dire que le vote de la commission a jeté l'opprobre sur notre canton dans tous les milieux artistiques de la Suisse. Voir un canton qui annule une subvention, il faut le faire, en matière de créativité !
Ceci dit, il y a eu une accusation assez grave, celle de copinage. C'est grave, puisqu'on va donner des millions à cette institution. Si c'est vrai qu'il y a du copinage, il faudrait s'adresser à la commission de gestion du Grand Conseil qui avisera, mais il ne faut pas jeter ainsi l'opprobre sur une institution, en plénière. C'est à mon avis inadmissible ! Il vous faut des preuves pour dire cela, Monsieur ! (Brouhaha.)
Le président. Il vous reste trente secondes. (Le président agite la cloche.)
M. Alberto Velasco. Cela dit, j'invite l'institution qui recevra cette somme à faire preuve elle aussi de transparence et à démontrer que ce qui a été dit dans cette salle n'a pas lieu d'être. C'est très important qu'elle le fasse, envers notre commission de gestion.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Rémy Pagani. Il vous reste une minute quinze.
M. Rémy Pagani (EAG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce qui est en jeu aujourd'hui, c'est de donner un gros coup de frein au sauvetage du cinéma indépendant romand. Il y a des efforts qui ont été faits, notamment avec le cinéma Bio. Il y a encore quatre salles qui programment - qui mettent en scène, si j'ose dire - ce cinéma indépendant. Si ce n'est pas le coup de grâce, vous allez lui donner un coup de frein et je le regrette, d'autant plus qu'on fait des amalgames entre le nombre de spectateurs, cette association qui ne fonctionnerait pas bien et le copinage, alors que tout cela demande à être prouvé. Je vous rappelle que Mozart a connu un certain nombre d'échecs cuisants et je ne pense pas qu'il aurait été de bon aloi de dire à Mozart qu'on devait lui réduire ses subventions.
Le président. Il vous reste vingt secondes.
M. Rémy Pagani. En conséquence de quoi, nous nous abstiendrons sur cet amendement, parce que nous soutiendrons l'ensemble de cette subvention.
Le président. Il vous faut conclure.
M. Rémy Pagani. Je finis, Monsieur le président. C'est complètement énervant, cette affaire. Au vote final, nous soutiendrons ce projet de loi, y compris avec l'amendement.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Daniel Sormanni. Il vous reste trente-huit secondes.
M. Daniel Sormanni (MCG). Je vais me dépêcher, Monsieur le président. Je trouve quand même assez curieux que ce Grand Conseil, d'habitude assez frileux pour voter les subventions - on l'a vu tout à l'heure avec Genève Futur Hockey - ne se pose ici aucune question...
Le président. Il vous reste vingt secondes.
M. Daniel Sormanni. ...alors qu'il y a des doutes qui persistent et qu'une enquête de la surveillance fédérale des fondations est en cours. Mais là, vous passez dessus et vous donnez l'argent sans regarder ! C'est la raison pour laquelle nous voulions renvoyer ceci en commission, mais peut-être que la magistrate pourrait éclaircir ce Grand Conseil sur cette problématique.
Le président. Il vous faut conclure.
M. Daniel Sormanni. Je termine tout de suite. Il est à mon avis parfaitement prématuré de voter de l'argent avant d'avoir éclairé cette problématique, et je vous prie de suivre la position du MCG.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Guy Mettan. Il vous reste vingt secondes.
M. Guy Mettan (PDC). Merci, Monsieur le président. Je laisserai Mme Emery-Torracinta répondre aux accusations de M. Sormanni. Je voulais juste rassurer l'UDC et mon collègue Leyvraz pour dire que si certains films connaissent peu de succès, d'autres connaissent en revanche un énorme succès. Il y a des films romands qui font des dizaines de milliers d'entrées. Certains sont nommés aux Oscars. Et ça, il faut aussi le rappeler pour le mettre dans la balance. (Commentaires.) Le cinéma romand, ce sont aussi des succès ! En 2012...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député !
M. Guy Mettan. Bon... (Brouhaha.)
Le président. Vous n'avez plus de temps de parole. Je passe la parole au rapporteur de majorité, qui prend sur le temps de son groupe: il lui reste une minute dix.
M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Très rapidement, je m'exprime en effet au nom de mon groupe pour ajouter d'abord aux propos de mon préopinant qu'en matière culturelle, on ne subventionne pas le succès, on subventionne les projets. Je crois que c'est important de le dire, parce que si on commence à partir dans des subventions au succès, à mon avis on ne subventionnera plus grand-chose. Normalement, un succès, il n'y a pas besoin de le subventionner.
Cela étant dit, pour expliquer aussi la position du PLR, j'aimerais simplement rappeler ici que, dans le canton de Vaud, les subventions ont été gelées pour 2012, et cela n'a rien agité du tout: personne n'en a parlé. Mais à Genève, dès qu'il s'agit de dire qu'il faut faire un petit peu attention, ça devient un débat sans fin ! En cette période de vaches grasses, il faut se serrer la ceinture. Ce matin... (Commentaires.) De vaches maigres, pardon ! Ce matin, lors de la présentation du budget 2015, le Conseil d'Etat nous en a fait la démonstration. Se serrer la ceinture demande des sacrifices, demande des arbitrages à tous les niveaux, avec parfois des ambitions qui doivent être revues à la baisse. C'est malheureux, mais quand les moyens financiers manquent, il est nécessaire de faire des choix raisonnables. Et j'espère que c'est ce choix raisonnable que notre Grand Conseil fera ce soir.
Le président. Il vous reste quinze secondes.
M. Ivan Slatkine. Avant de conclure, permettez-moi de dire que le cinéma romain... le cinéma romand ! et la culture de manière plus générale méritent un débat de bonne tenue. Aucun parti politique n'a le monopole sur la culture; la culture est universelle, elle est le reflet de notre patrimoine, elle est apolitique.
Le président. Il vous faut conclure !
M. Ivan Slatkine. La culture est essentielle, il n'y a pas de doute qu'elle mérite l'attention et le soutien des autorités politiques, mais ce soutien doit être raisonnable et en adéquation avec nos moyens financiers.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je passe la parole à Mme la conseillère d'Etat Anne Emery-Torracinta. Après, nous voterons.
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la culture fait partie intégrante de l'identité d'un peuple; le cinéma fait partie de la culture. Souhaitez-vous, Mesdames et Messieurs les députés, que nous n'ayons que des films américains dans nos salles ? Actuellement, le cinéma américain représente 75% du marché en Suisse, notamment les blockbusters, les grosses productions, largement subventionnées par l'Etat américain d'ailleurs et, pour les films de guerre, par le Pentagone lui-même. Est-ce cela que nous voulons pour la Suisse ?
Mesdames et Messieurs les députés, vous savez également que l'identité romande est en jeu aujourd'hui. Vous avez peut-être vu avec le débat sur les langues que, dans le reste de la Suisse, on s'interroge sur l'intérêt qu'il y a ou non d'enseigner encore le français. Si on veut donc défendre notre identité dans ce pays, nous devons utiliser tous les moyens qui permettent d'utiliser notre culture, et le cinéma romand en est un.
Le cinéma coûte extrêmement cher. Il n'est plus possible aujourd'hui de faire un film facilement. C'est bien pour cela que les collectivités publiques interviennent - et pas seulement d'ailleurs les collectivités publiques, pas seulement les cantons et les communes, mais également la Confédération et la télévision, par exemple. Pour mieux soutenir le cinéma romand, dès 2008, l'idée est née de créer une fondation romande pour le cinéma; cette fondation s'est concrétisée en 2011. L'idée était de mutualiser, et je crois qu'il s'agit de termes que ce parlement - en tout cas une partie - entend volontiers: les économies d'échelle, la mutualisation.
A l'époque, on pensait débuter avec l'octroi de 10 millions de francs annuels au cinéma. La question de la clef de répartition entre les collectivités publiques s'est posée et on a regardé quel était le pourcentage des productions dans les différents cantons. Comme Genève avait la moitié des productions du cinéma romand, on est parti de l'idée que 5 millions de francs devraient à terme être apportés à la fondation par les collectivités publiques genevoises, à la fois la Ville et le canton de Genève. C'est pour cela que le premier projet de loi qui vous avait été proposé était progressif, dans l'idée que, petit à petit, on atteigne des montants de 2,5 millions de francs pour la Ville de Genève et 2,5 millions pour le canton de Genève.
Le premier projet de loi vous a été proposé pour l'année 2011 et l'année 2012. Il devait porter également sur 2013 et 2014, et la commission des finances, à l'époque, avait souhaité le maintenir sur deux ans, ce qui explique le temps pris pour l'analyse du premier travail effectué, le vote du parlement, etc. Si bien qu'on a déposé relativement tard le projet pour les quatre années suivantes. Toutefois, quand on a voté le premier projet sur deux ans, le conseiller d'Etat de l'époque, M. Charles Beer, avait bien annoncé, en toute transparence, à la commission des finances, qu'on pensait augmenter régulièrement la subvention dans les années qui suivent. J'étais membre de la commission, je me le rappelle parfaitement. Il n'y a donc eu aucune tromperie et aucune volonté de cacher quoi que ce soit de la part du Conseil d'Etat, dans les demandes de subventions qui vous ont été faites pour le budget 2013 et pour le budget 2014. Pour 2013, c'était normalement 2 millions de francs et pour 2014, somme d'ailleurs votée par le parlement dans le cadre du budget 2014, c'était 2,125 millions de francs. Je regrette donc infiniment qu'une majorité de ce parlement veuille au bout du compte diminuer la subvention, mais voilà, c'est le jeu démocratique. Le gouvernement propose, le parlement dispose !
Toutefois, ce qui est important ce soir, c'est que vous puissiez donner un signe à la Fondation romande pour le cinéma et que vous puissiez libérer cet argent. Parce que, pour le moment, pour 2014, nous n'avons rien payé et la fondation doit aussi pouvoir honorer ses engagements.
Pour répondre à celles et ceux qui pensent que cette fondation pratiquerait le copinage et que seuls quelques cinéastes seraient financés, sachez qu'il y a des commissions d'experts qui examinent ces films, que ces commissions sont renouvelées chaque fois, qu'à l'intérieur de ces commissions siège toujours au moins une personne extérieure à la Suisse, qui ne connaît pas forcément les uns et les autres et qui n'est copine, si j'ose dire, de personne.
Je crois que c'est faire un mauvais procès à la Fondation romande pour le cinéma de penser qu'il faudrait jeter le bébé avec l'eau du bain, simplement parce qu'il y a peut-être un cinéaste mécontent de ne pas avoir reçu de soutien une fois. J'ajoute à ce propos que la Cour des comptes avait été sollicitée par cette même personne qui nous arrose de courriels régulièrement, et M. Rappaz a fait une lecture très exhaustive du dernier message qui nous a été envoyé. Eh bien, la Cour des comptes a refusé d'entrer en matière, et vous savez qu'un refus de la Cour des comptes, ce n'est pas un refus en l'air, c'est un refus après une première étude. La Cour des comptes étudie toujours un dossier et rend ensuite une décision d'entrée en matière ou non, déjà avec quelques pages d'explications. La Cour des comptes avait donc refusé d'entrer en matière et ce même cinéaste s'est adressé à l'autorité fédérale de surveillance. A force d'insistance, cette autorité a effectivement posé des questions à la fondation. La fondation coopère et répond, il n'y a aucun problème de ce côté-là, mais sachez, Mesdames et Messieurs les députés, que quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage, et si on veut tuer la Fondation romande pour le cinéma, on dira précisément qu'elle subventionne n'importe qui et qu'il n'y a pas plus de trente ou quarante spectateurs par film.
Je vous donnerai juste deux exemples de films récents qui ont eu beaucoup de succès: l'un plaira certainement à l'UDC, c'est «L'Expérience Blocher» de Jean-Stéphane Bron, qui a été nommé aux Prix du cinéma suisse 2014, et un film qui a fait une belle carrière internationale, «L'Enfant d'en haut» d'Ursula Meier, Ours d'argent au Festival du film de Berlin en 2013. (Brouhaha.) Il ne s'agit donc pas de films confidentiels, il s'agit bien de films à succès. (Le président agite la cloche.) Je vous en conjure donc, Mesdames et Messieurs les députés, donnez un signe positif à la Fondation romande pour le cinéma et votez ce projet de loi. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous sommes au vote d'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 11301 est adopté en premier débat par 62 oui contre 28 non et 4 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'article 1.
Le président. A l'article 2, alinéa 1, nous avons un amendement de M. Mettan:
«Art. 2, al. 1 (nouvelle teneur)
1 L'Etat verse à la Fondation romande pour le cinéma un montant de 2 000 000 F en 2013, 2 000 000 F en 2014, 1 800 000 F en 2015 et 2 000 000 F en 2016, sous la forme d'une aide financière de fonctionnement au sens de l'article 2 de la loi sur les indemnités et les aides financières, du 15 décembre 2005.»
Monsieur Gautier, vous avez la parole.
M. Renaud Gautier (PLR). Merci, Monsieur le président. J'ai une petite question de procédure. Dans la mesure où, dans le budget, la ligne afférente à cette affaire se monte à plus de 2 millions de francs, si par un heureux hasard cet amendement était voté, est-ce qu'on a l'assurance que 2 millions seulement seront payés pour cette année ?
Le président. Madame la conseillère d'Etat, voulez-vous répondre ?
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. J'ai envie de vous dire: hélas, oui, Monsieur le député ! Non, vous le savez, le budget est une autorisation de dépenses. A partir du moment où vous décidez autre chose, il est évident que ce sera cette autre chose qui sera appliquée.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat, pour cette réponse. La parole est à M. le rapporteur de majorité Ivan Slatkine.
M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Contrairement à la majorité de circonstance qui a amené à refuser ce projet de loi lors du troisième débat, je fais partie de ceux qui pensent que la création de la fondation Cinéforom est une démarche qui a tout son sens dans un secteur comme celui du cinéma et de la culture de manière plus générale. Il faudrait appeler de ses voeux que de telles structures se mettent en place dans d'autres domaines culturels.
A présent, contrairement à ce que le rapporteur de minorité a tenté de vous expliquer, les membres du PLR sont favorables à une telle structure tout en rappelant les réalités budgétaires et financières qui sont les nôtres. Sans vouloir revenir sur l'ensemble du débat mené ici et en commission, je tiens à relever que la rigueur budgétaire nous impose, à l'instar de nos amis vaudois, de maintenir notre aide au cinéma, mais avec les moyens qui sont les nôtres. Ce matin, je l'ai dit tout à l'heure, le Conseil d'Etat nous a présenté un budget de rigueur et cette rigueur se justifie vu l'état de notre dette qui est une épée de Damoclès sur les générations futures, mais aussi sur la qualité de notre Etat social. Car sans moyens suffisants, il ne sera tout simplement pas possible de répondre aux besoins des plus démunis. En soutenant l'amendement qui vous est proposé, on permet à la fondation Cinéforom de fonctionner normalement ces deux prochaines années. Certes, les moyens sont un peu plus faibles que prévu, mais on peut espérer que la Loterie romande, section genevoise, pourra contribuer au financement complémentaire de cette fondation, comme le fait son homologue vaudoise, suite au gel de la subvention de la Ville de Lausanne et du canton de Vaud, sur la base des montants 2012.
En période de difficultés budgétaires, il faut être solidaire et responsable, et en soutenant l'amendement proposé, nous adaptons le contrat de prestations aux réalités financières qui sont les nôtres, tout en démontrant que l'objectif de notre Grand Conseil n'est pas de renier les engagements pris, mais simplement de les adapter à la réalité. Afin de ne pas remettre en question la fondation Cinéforom, je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à soutenir l'amendement.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. La parole est à M. le rapporteur de minorité. Ensuite, nous voterons.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Les socialistes ne partagent pas l'analyse budgétaire faite par le rapporteur de majorité.
J'aimerais dire que je prie les députés PLR d'accepter toutes mes excuses pour mes propos excessifs précédents, et je prends bonne note des recommandations que Renaud Gautier m'a adressées en passant par le président.
Concernant les montants proposés par cet amendement, c'est vrai qu'ils ne satisfont pas les socialistes, puisqu'ils ne correspondent pas aux engagements initiaux. Dans le même temps, ils permettent à cette fondation de poursuivre son existence, et donc, pour cette raison, nous soutiendrons cet amendement.
Je rappellerai, comme cela est évoqué dans les rapports, que 50% des productions romandes sont aujourd'hui créées à Genève. Ce sont des emplois, c'est de l'intelligence culturelle, c'est de la créativité et je pense que nous devons garder ces valeurs, ces projets à Genève. Et il est extrêmement important de donner une chance à cette fondation, même avec des moyens restreints.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je rappelle l'amendement de M. Mettan sur lequel nous votons:
«Art. 2, al. 1 (nouvelle teneur)
1 L'Etat verse à la Fondation romande pour le cinéma un montant de 2 000 000 F en 2013, 2 000 000 F en 2014, 1 800 000 F en 2015 et 2 000 000 F en 2016, sous la forme d'une aide financière de fonctionnement au sens de l'article 2 de la loi sur les indemnités et les aides financières, du 15 décembre 2005.»
Le scrutin est ouvert... (Brouhaha.) Le scrutin va être ouvert ! Voilà, le scrutin est ouvert.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 66 oui contre 19 non et 12 abstentions.
Mis aux voix, l'article 2 ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 3 est adopté, de même que les articles 4 à 10.
Le président. Le troisième débat est reporté à la prochaine session, le temps d'adapter le contrat de prestations. (Vifs commentaires.) Oui, comme dans toute convention, on doit modifier le contrat avec l'institution et ce sera fait pour la prochaine session. Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas la première fois que nous avons un projet LIAF, modifié avec des amendements ! Le troisième débat a toujours été reporté à la session ultérieure, le temps que le contrat de prestations soit adapté avec l'institution concernée et signé par le Conseil d'Etat et l'institution. (Le président est interpellé.) Ce n'est pas une nouveauté. C'est comme ça ! (Commentaires.)
Troisième débat: Session 12 (octobre 2014) - Séance 76 du 09.10.2014