Séance du jeudi 18 septembre 2014 à 20h30
1re législature - 1re année - 11e session - 71e séance

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Antoine Droin, président.

Assistent à la séance: Mme et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Pierre Maudet, Anne Emery-Torracinta, Mauro Poggia, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

E 2203-A
Prestation de serment de M. ESTOPPEY Thierry, élu Juge assesseur architecte au Tribunal administratif de première instance, pour les causes relevant de l'application de la LDTR, représentant les milieux professionnels de la branche

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment d'un magistrat du pouvoir judiciaire. Je prie Mme le sautier de le faire entrer et l'assistance de bien vouloir rester debout. (Le magistrat entre dans la salle du Grand Conseil et se tient debout, face à l'estrade.)

Monsieur, vous êtes appelé à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.

«Je jure ou je promets solennellement:

- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme juge;

- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;

- de me conformer strictement aux lois;

- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;

- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;

- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»

A prêté serment: M. Thierry Estoppey.

Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat, ainsi que Mme et MM. Murat Julian Alder, Gabriel Barrillier, Edouard Cuendet, Christian Dandrès, Jean-Louis Fazio, Christian Flury, Lionel Halpérin, Serge Hiltpold, Frédéric Hohl, Philippe Joye, Patrick Lussi, Philippe Morel, Salima Moyard, Jean Sanchez, Pierre Weiss, Christian Zaugg et Daniel Zaugg, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Alexis Barbey, Maria Casares, Gilbert Catelain, Vera Figurek, Florian Gander, Jean-Charles Lathion, Françoise Sapin, Nicole Valiquer Grecuccio, Georges Vuillod et Yvan Zweifel.

Annonces et dépôts

Néant.

IN 155
Initiative populaire 155 "Touche pas à mes dimanches!"
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session X des 26, 27 juin, 28 août et 9 septembre 2014.
IN 155-A
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la prise en considération de l'initiative 155 "Touche pas à mes dimanches!"
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session X des 26, 27 juin, 28 août et 9 septembre 2014.

Débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous abordons l'IN 155-A. Nous sommes dans un débat classé en catégorie II - trente minutes de débat. Je donne la parole à M. Pierre Vanek.

M. Pierre Vanek (EAG). Merci, Monsieur le président. Nous sommes saisis d'une initiative qui englobe divers aspects. Il y a d'abord un aspect de fond, qui relève de la volonté résolue des initiants, l'ensemble du mouvement syndical genevois, les partis de la gauche, notamment - mais je pense que les milieux concernés sont encore plus étendus: ils veulent défendre le dimanche comme jour libre, comme seul jour de la semaine qui permet à la population de se retrouver. C'est un jour qui constitue une oasis dans le désert de la marchandisation constante, du consumérisme rampant, un moment de détente et de repos bienvenu pour l'ensemble de la population, pour l'ensemble des travailleurs. Et encore, j'insiste sur ce point, c'est un jour où on peut faire une rupture avec le reste de la semaine et se retrouver pour profiter de quelque chose dans un registre différent de celui de la vie courante et de l'activité économique.

De ce point de vue là, le dimanche est aussi un jour de calme. Il y a des endroits de notre canton et de notre ville où, on le répète assez, les rues sont engorgées et les normes en matière de pollution de l'air et de bruit ne sont pas respectées: eh bien, le dimanche est un moment de calme dont bénéficient les habitants dans certains quartiers grâce au respect retrouvé d'un certain nombre de normes.

Maintenant, il ne s'agit pas de renforcer la situation actuelle du dimanche telle que je l'ai décrite. Aujourd'hui déjà, les magasins peuvent ouvrir près de quatre-vingts heures par semaine; dans les gares, dans les aéroports, dans les stations-service, sur les grands axes routiers, on peut ouvrir les magasins le dimanche. (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît !

M. Pierre Vanek. L'initiative ne vise pas à durcir la situation - vous connaissez mon caractère conservateur - elle vise simplement à maintenir le statu quo. Pourquoi avons-nous été obligés de lancer une initiative dont la récolte de signatures a été fort bien suivie par la population ? Parce que - c'est le deuxième aspect - le Conseil fédéral a entrepris une manoeuvre anti-démocratique de modification par voie réglementaire de quelque chose qui aurait dû être modifié dans la loi sur le travail...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Pierre Vanek. ...ce qui aurait permis, le cas échéant, de lancer un référendum. L'initiative vise très simplement à maintenir le statu quo en ce qui concerne les dimanches. De l'autre côté, elle fait oeuvre de salubrité démocratique, elle vise à empêcher le Conseil fédéral de nous enfiler par la porte de derrière, via un règlement, quelque chose qui relève d'un réel choix de société.

M. Romain de Sainte Marie (S). Ah, je suis heureux, mon micro fonctionne à nouveau !

Le président. Vous voyez, on fait des miracles ! (Commentaires.)

M. Romain de Sainte Marie. C'est magnifique, les dépenses reviennent enfin !

Je serai assez bref pour vous inciter - vous inviter - à voter la recevabilité de cette initiative et pour vous rappeler également les fondements de celle-ci et son importance, pour les familles notamment. Aujourd'hui, en Suisse comme ailleurs, nous connaissons une libéralisation accrue des horaires d'ouverture des magasins, cela au détriment des salariés. Cette initiative proposée par les syndicats et les partis de gauche permet, comme l'a expliqué M. Vanek, d'éviter ce subterfuge du Conseil fédéral souhaitant appliquer l'ouverture du dimanche aux zones touristiques. On sait que le canton de Genève serait concerné par cette mesure, alors que, on l'a vu, l'extension des horaires d'ouverture des magasins a été refusée il y a trois ans. C'est pourquoi la volonté des syndicats et des partis de gauche est de demander à la population de s'exprimer pour ne pas laisser le Conseil fédéral décider depuis Berne par voie réglementaire d'une telle mesure, antisociale et qui nuirait aux conditions de travail des salariés.

Je tiens encore à indiquer que cette extension des horaires d'ouverture des magasins va à l'encontre de l'engagement associatif. Avec ce changement, les personnes qui s'occupent de clubs de foot, comme entraîneurs par exemple, tout cela bénévolement, ne pourraient plus s'engager en cas de matches le dimanche. Cette volonté d'ouvrir les magasins le dimanche tue à petit feu le monde associatif, cette façon de vivre qui implique encore le bénévolat.

Je terminerai sur l'aspect familial puisque le dimanche, c'est le jour du Seigneur, même si nous sommes dans un Etat laïc ! (Commentaires.)

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Romain de Sainte Marie. Le dimanche est un jour de repos pour toutes et tous, en effet. C'est un moment où les familles se retrouvent: supprimer cette possibilité-là, c'est aussi détruire une vie familiale parfois précaire. La volonté du Conseil fédéral...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Romain de Sainte Marie. ...va à l'encontre des familles, des salariés et cette initiative ne demande qu'une seule chose: aux Genevois de déterminer s'ils veulent oui ou non ouvrir les magasins le dimanche !

M. Carlos Medeiros (MCG). Chers collègues, encore une fois, les milieux de la gauche parlent, entre guillemets, au nom de tous les salariés, au nom de tous les travailleuses et travailleurs. Ça fait un peu slogan de la gauche socialiste française, et on a vu où elle a conduit le pays.

Au MCG, nous sommes pour une économie forte, pour faire du social efficace. Ce qui veut dire que je ne comprends pas, aujourd'hui déjà, qu'en ville de Genève, vous avez ce qu'on appelle les commerces de dépannage qui sont devenus des supermarchés. Je prends comme exemple un établissement qui existe à Plainpalais, qui fait à peu près 600 mètres carrés et qui est ouvert nuit et jour. Or, au même moment, cette initiative 155 est prétendument contre l'ouverture et l'extension des commerces au nom du repos des travailleurs, au nom des mères de famille, au nom de je ne sais pas quoi. Je me demande même s'ils ne vont pas nous sortir que c'est le jour du Seigneur et que tout le monde doit aller à la messe ! (Commentaires.)

Mesdames et Messieurs, nous évoluons dans une société qui change. Aujourd'hui, vous le savez très bien, nous avons de plus en plus de métiers, dans les hôpitaux, dans les transports, qui travaillent vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Or, je ne comprends pas pourquoi et au nom de quel principe et de quel dogme nous allons coincer aujourd'hui l'économie pour ceux qui veulent travailler plus pour gagner plus. Je vous donne comme exemple la Migros de l'aéroport, considérée comme le deuxième établissement le plus rentable après celui de Zurich. Les gens qui y travaillent, la plupart, sont des étudiants: ça fait un revenu supplémentaire pour ceux qui veulent travailler les dimanches.

Bien sûr, nous considérons aussi - c'est le côté social du MCG, vous le savez très bien - que nous sommes pour protéger les gens les plus défavorisés. Il doit y avoir des négociations avec les syndicats, il doit y avoir des compensations. C'est normal.

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Carlos Medeiros. Le travail du dimanche doit être payé plus qu'un travail normal, mais n'interdisons pas aux gens de travailler, surtout dans les commerces genevois, parce que je vous rappelle qu'en France voisine, tous les dimanches, les commerces sont ouverts jusqu'à midi !

M. Jacques Béné (PLR). En fait, ce soir, il ne s'agira pas de traiter de la recevabilité, comme M. de Sainte Marie l'a dit, mais de savoir si on est d'accord ou non avec cette initiative, tout simplement, puisque la validité a été admise par le Conseil d'Etat, ainsi que le veut notre législation actuellement. En fait, il ne s'agit pas de savoir si oui ou non on veut ouvrir les dimanches: il s'agit de savoir si on veut garder la possibilité de mener une réflexion un jour ou l'autre, si on a l'intention d'ouvrir le dimanche.

Mesdames et Messieurs les députés, la société évolue et elle évolue grâce au partenariat social qu'on souhaite voir cesser de s'exprimer avec ce genre d'initiative. Car à partir du moment où l'on intègre dans la loi qu'il est exclu d'ouvrir le dimanche, il n'y a plus de discussion possible. Alors qu'aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés - et je pense que la gauche ne m'en tiendra pas rigueur - dans le commerce de détail et à partir du 1er octobre, la convention collective de travail a été étendue. Si elle a été étendue, c'est bien parce qu'on a réussi à signer une convention collective, entre partenaires sociaux, et que le Conseil d'Etat, avec les partenaires sociaux, a effectivement admis qu'il y avait lieu d'étendre cette convention.

Mesdames et Messieurs les députés, cette initiative a donc été déposée, avec 9000 signatures: très bien. Je le regrette cependant, son message est un peu démagogique: «Touche pas à mes dimanches !» Moi aussi, je ne veux pas qu'on touche à mes dimanches, mais c'est un peu regrettable que cette pensée unique vise à dire qu'à Genève le dimanche, dorénavant, c'est détente. Pour moi, le dimanche n'est pas un jour de détente ! Pour moi, le dimanche à Genève, c'est un jour de deuil. Genève est morte le dimanche, Mesdames et Messieurs les députés ! Si vous vous promenez dans les Rues-Basses ou même en Vieille-Ville, il n'y a rien, aucune animation. Il faudra peut-être, un jour, qu'on se demande si on veut que les gens restent à Genève le dimanche, consomment à Genève, ou aillent en France voisine. Parce que si vous allez en France voisine, sur les parkings des supermarchés, qui sont un petit peu moins ludiques que les quais de Genève, que la Vieille-Ville ou même que les Rues-Basses, eh bien vous verrez qu'il y a là pléthore de gens.

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Jacques Béné. Ma conclusion à moi, c'est donc qu'il y a des gens qui ne veulent pas forcément la détente préconisée par M. Vanek, mais pour qui le dimanche, c'est aussi un jour de consommation et de shopping; ils ne souhaitent pas se détendre, mais aller faire du shopping. J'espère qu'en commission, nous arriverons à un consensus pour ne pas entrer en matière sur cette initiative, essentiellement pour préserver le partenariat social qui a fait ses preuves dans ce canton. (Applaudissements.)

M. Boris Calame (Ve). Chères et chers collègues, l'initiative 155 dite «Touche pas à mes dimanches !» a été validée par le Conseil d'Etat le 28 juillet 2014, ce qui nous évitera, fort heureusement, de nous écharper sur sa validité. Nous pourrions alors décider de voter sur le siège car, de toute façon, que notre Grand Conseil choisisse ou pas de lui opposer un contreprojet, il est plus que probable qu'elle sera présentée en l'état au vote populaire.

Nous pouvons aussi la renvoyer à la commission de l'économie pour traitement en parallèle avec les projets de lois proposant la modification de l'article 18 de la loi sur les horaires d'ouverture des magasins, soit les projets de lois 11422 et 11427 issus respectivement des groupes UDC-MCG et PLR-PDC. Ceux-ci traitent de l'ouverture des magasins le 31 décembre qui, comme vous le savez, peut aussi tomber un dimanche.

Si le Conseil d'Etat souhaite véritablement étudier la possibilité de définir des zones touristiques à Genève, comme mentionné dans son rapport, selon le droit fédéral, qu'il se mette immédiatement au travail avec les partenaires sociaux. Le cas échéant, ces réflexions pourront être intégrées aux travaux parlementaires.

Au vu de ce qui précède, nous recommandons, chères et chers collègues, un renvoi à la commission de l'économie.

M. Stéphane Florey (UDC). Cette initiative provoque un faux débat. Pour le groupe UDC, ce débat n'a pas lieu d'être puisqu'il est indiqué dans l'exposé du rapport du Conseil d'Etat que cette initiative est partie du fait qu'il y aurait une possibilité pour la Confédération de déclarer Genève zone touristique, ce qui permettrait une possible ouverture des magasins le dimanche; je dis bien une possible ouverture, parce que rien n'est encore fait. Il faudrait donc d'abord savoir ce que veut la Confédération pour le plan de zone de ce qu'elle appelle zone touristique et, après, décider si Genève doit ou ne doit pas ouvrir ses magasins le dimanche. C'est donc vraiment un faux débat.

Par contre, j'ai entendu des énormités en ce qui concerne le bénévolat, les activités sportives et culturelles. Laissez-moi rire ! Aujourd'hui, une bonne partie de la population travaille le dimanche. On n'est plus au Moyen Age, quand le dimanche était sacro-saint et que tout le monde allait à l'église, que tout le monde faisait un voeu pieux et mangeait en famille. Ce temps est largement révolu, nous sommes en 2014, je me permets de le rappeler. Comme je le disais, une bonne partie de la population travaille et une autre partie de la population, heureusement pour elle, a congé et profite du travail d'une autre partie de la population, à savoir que si vous voulez prendre le bus, vous prenez le bus, si vous devez vous faire soigner, vous vous faites soigner. Vous allez me dire que ce sont des services publics et que c'est normal. Mais si vous voulez aller au cinéma le dimanche, ce n'est pas un service public; si vous voulez aller manger au restaurant, vous allez manger au restaurant.

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Stéphane Florey. On voit bien que de toute façon, pour les commerces ou les activités, il y a une réelle demande. L'UDC estime donc qu'il y a véritablement un besoin et une demande de la population. Laissons faire les choses: si le Conseil fédéral décide que Genève est une zone touristique et qu'il faut travailler en conséquence, laissons-le faire et revenons avec un véritable débat au moment voulu.

Le président. Il vous faut conclure.

M. Stéphane Florey. Mais pour le moment, l'UDC vous recommande de rejeter cette initiative.

M. Bertrand Buchs (PDC). Pour le parti démocrate-chrétien, il n'y a pas de faux débat; il y a un débat qui doit être tenu. De par ses origines, le parti démocrate-chrétien est un parti attaché aux dimanches, pour des raisons religieuses. Nous tenons à cela, même si ça a l'air un peu vieux jeu de se réclamer de notions religieuses. (Commentaires.)

Il y a quand même une chose à faire: il faut qu'il y ait une discussion en commission, la plus ouverte possible, parce qu'on ne doit surtout pas oublier que les gens ont besoin d'une journée par semaine pour être avec leur famille, pour être avec leurs enfants, pour faire des choses qu'ils ne font pas le reste de la semaine. Il faut vraiment réfléchir à l'équilibre psychologique des gens et à leur santé. Le dimanche, c'est quelque chose d'important et, pour le parti démocrate-chrétien, c'est un jour essentiel.

Le président. Merci, Monsieur le député.

L'initiative 155 et le rapport du Conseil d'Etat IN 155-A sont renvoyés à la commission de l'économie.

PL 11278-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat accordant une aide financière annuelle de 495'000F à l'association Genève Futur Hockey pour les années 2013 à 2016
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 19 et 20 décembre 2013.
Rapport de M. Guy Mettan (PDC)

Premier débat

Le président. Nous passons au PL 11278-A. Nous sommes dans un débat de catégorie II - trente minutes de temps de parole. Le rapport est de M. Guy Mettan, que je prie de bien vouloir aller au centre de la salle. Merci, Monsieur Mettan. Je vous cède la parole.

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur. Merci, Monsieur le président. On va maintenant passer à un sujet un tout petit peu plus léger par rapport à celui qui nous a occupés jusqu'à maintenant, et j'espère que vous suivrez le rapport puisqu'il concerne l'association Genève Futur Hockey qui a occupé pendant de longs mois la commission des finances. C'est un projet qui a suscité beaucoup de discussions et de questions à l'époque, surtout parce que ça concerne un sport populaire qui brasse un petit peu d'argent.

La commission des finances, après s'être beaucoup interrogée sur la pertinence de cette subvention, a finalement décidé d'allouer 495 000 F par an à Genève Futur Hockey. Pourquoi ? Pour plusieurs raisons. D'abord parce que le hockey est un sport très populaire. Genève a connu des heures de gloire. C'est maintenant peut-être un peu moins brillant qu'il y a quelques années, mais ça va repartir. Peu importe: le hockey est un sport très populaire et le GSHC - le Genève Servette Hockey Club - est un club extrêmement important, connu partout et, surtout, qui draine l'intérêt de beaucoup de jeunes. Or, on sait que les jeunes n'ont pas toujours de la facilité pour faire du sport; ce n'est pas le cas du hockey qui attire beaucoup de vocations, pour la pratique de ce sport et pour la participation aux matches, mais aussi pour suivre les matches.

Compte tenu de ces raisons, la commission des finances a estimé qu'une subvention d'à peu près 500 000 F, d'ailleurs équivalente à celle qu'accorde la Ville de Genève, était une bonne chose. Je rappelle aussi que les prétentions de Genève Futur Hockey étaient plus élevées, mais que nous les avons un petit peu réduites, compte tenu justement de la rigueur des temps. Cela a été accepté, le contrat de prestations a été revu, et pour ces deux raisons, je vous engage, chers collègues, à accepter ce projet de loi tel qu'il vous est présenté ce soir.

M. Jean-Charles Rielle (S). Mesdames et Messieurs les députés, le développement du sport à Genève se poursuit ! Le canton, la Ville de Genève et l'ensemble des autres communes se concertent et s'activent ensemble. Une loi sur le sport a été votée en mars de cette année et une commission sportive de l'association cantonale des communes est née en 2012. Ces mêmes communes développent l'aide au sport, notamment par des complexes sportifs et la mise à disposition des locaux. Une commission cantonale d'aide au sport cible les projets performants et, enfin, la promotion de la relève et le soutien au dispositif sport-art-études, permettant la promotion de nos jeunes affichant des compétences particulières. Genève a enfin compris l'importance de soutenir le sport, source d'intégration pour notre population multi-ethnique, lien intergénérationnel, bénéfique en termes de promotion de la santé des jeunes, des moins jeunes et de nos aînés.

Ce premier constat extrêmement positif doit s'accompagner de véritables soutiens sous diverses formes. Ce projet de loi a été largement voté en commission après un travail minutieux. Les questions utiles ont été posées et les réponses ont rassuré les commissaires sur le fait que toutes les précautions avaient été prises. On n'a pas hésité d'ailleurs à modifier l'agenda du traitement de ce projet de loi.

Le précédent projet de loi relatif à l'association Genève Futur Hockey était prévu pour 2011-2014 et a finalement été limité aux années 2011 et 2012. Afin de s'assurer de l'étanchéité des comptes de l'association Genève Futur Hockey - soit la relève - par rapport à ceux de la structure professionnelle du Genève Servette Hockey Club, le Conseil d'Etat et le Conseil administratif de la Ville ont analysé avec attention les comptes de l'association. Au moment de la finalisation du contrat de prestations 2013-2016, la Cour des comptes a annoncé qu'elle mènerait un audit sur l'association Genève Futur Hockey. Le Conseil d'Etat a ainsi décidé d'attendre septembre 2013 pour déposer ce projet de loi, afin de s'assurer qu'il n'y aurait pas de problèmes majeurs relevés dans l'audit de la Cour des comptes et pour intégrer d'emblée certaines corrections. Le projet de loi a ainsi été déposé le 4 septembre 2013 et la Cour des comptes a rendu son rapport le 30 septembre 2013.

Dans le dispositif sport-art-études, qui concerne les filières du cycle d'orientation et de l'enseignement postobligatoire principalement, trente disciplines sont représentées et il y a 75% de sportifs. Il n'y a pas de quotas prévus pour un sport ou un autre. Chaque année, on sélectionne le nombre de talents qui sont conformes au niveau attendu. Ce budget est d'environ 800 000 F par année pour l'encadrement de ces jeunes talents.

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Jean-Charles Rielle. Il a été précisé en commission que pour le soutien au mouvement junior, il y a une ligne de 800 000 F au budget de l'Etat. La Ville de Genève prévoit un montant de 730 000 F et l'ACG serait prête à s'engager à hauteur de 600 000 F. On voit que ces trois enveloppes font un peu plus de 2 millions de francs.

Pour terminer, je dirai qu'il y a surtout, aujourd'hui, un contrat de prestations 2013-2016 établi avec rigueur entre le canton, la Ville de Genève et l'association Genève Futur Hockey, incluant un descriptif détaillé des prestations soumises à évaluations répétées.

Le président. Il vous faut conclure.

M. Jean-Charles Rielle. Je finis dans trois lignes, Monsieur le président ! Voilà de quoi donner confiance dans les garanties obtenues. Vous l'aurez compris, le groupe socialiste soutiendra ce projet de loi et vous invite à faire de même. (Applaudissements.)

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, nous allons également soutenir ce crédit. Je crois qu'il est effectivement important, à un moment donné, de participer à la formation des jeunes.

Le président. Il faut parler dans le micro, Monsieur, parce qu'on ne vous entend pas !

M. Daniel Sormanni. Comme l'a dit mon préopinant, un certain nombre de questions se posaient au début, par rapport à l'étanchéité entre l'équipe professionnelle et cette association. Cela a été résolu, depuis longtemps d'ailleurs ! Je regrette un peu une chose, c'est qu'on arrive devant le Grand Conseil aujourd'hui, alors que c'est une subvention qui commence en théorie en 2013. Lorsqu'on a des contrats de ce type, je pense qu'il faut faire diligence, aussi bien du côté du Conseil d'Etat que du côté des députés. On dit oui ou on dit non, mais on ne traîne pas. On est presque fin 2014 et on parle de subventions qui commencent en 2013 !

Je pense donc que c'est une bonne chose de soutenir les jeunes qui sont formés à Genève Futur Hockey. Pour faire un petit parallèle avec le passé glorieux de Genève, le GSHC n'a jamais été champion suisse. Il était toujours deuxième, dans les années soixante-septante. Cette année, on espère que c'est la bonne et que Genève Servette sera champion suisse ! C'est un coup de pouce qu'on donne. Je préfère que les jeunes s'engagent dans un sport, en l'occurrence celui-ci, puisque c'est de celui-ci qu'on parle, plutôt qu'ils traînent dans la rue à faire des bêtises.

M. François Lefort (Ve). Madame la conseillère d'Etat, loin de moi l'idée de vous chercher des crosses. Ce n'est pas le moment, ce n'est pas l'endroit, mais j'ai été attristé ce soir que vous demandiez l'urgence sur ce projet de loi et pas sur le projet de loi 11538 qui accorde une indemnité à l'Université pour la période 2012 à 2015. Or, 2015 est bientôt là et 2014 sera bientôt fini. C'est un projet de loi dont vous avez demandé l'ajout, ce soir. Mauvais augure quant aux priorités du Conseil d'Etat ? Je ne l'espère pas !

Ce projet de loi se propose donc de financer l'association Genève Futur Hockey, pour une enveloppe de près de 2 millions de francs sur près de quatre ans. Or, malgré le rapport de la Cour des comptes, qui semble avoir rassuré beaucoup de députés dans cette enceinte, nous, nous ne sommes pas sûrs de l'étanchéité des comptes entre Genève Futur Hockey et la structure professionnelle Genève Servette Hockey Club. Les recommandations de la Cour des comptes ont-elles été suivies d'effets ? Ce n'est pas dans le rapport et c'est une question en suspens ! C'est une question qui, comme d'autres, mérite des réponses et cela nécessiterait peut-être un retour en commission.

Par ailleurs, un député socialiste - Roger Deneys, certainement - remarque dans le rapport que Genève Futur Hockey avait promis du sponsoring privé à hauteur des subventions de l'Etat et de la Ville: 500 000 F. Eh bien, que s'est-il passé ? Genève Futur Hockey n'a pu confirmer qu'un sponsoring privé de 5000 F ! Cela aussi pose question, parce que nous pouvons effectivement fournir de l'argent à Genève Futur Hockey, mais quand on promet 500 000 F, on met 500 000 F sur la table !

Aussi, le gouvernement nous a annoncé ce matin un changement de cap et il nous semble, à nous les Verts, que ce projet de loi n'est pas dans l'air du changement de cap; c'est un projet de loi d'un autre cap, nous semble-t-il. Le changement de cap annoncé ce matin laisse sur la touche la classe moyenne, en particulier les familles, ainsi que les plus démunis, alors qu'aucune nouvelle recette réelle n'est prévue. La population et la fonction publique paient un lourd tribut à cette recherche d'équilibre qui va passer par la diminution des subsides d'assurance-maladie, la diminution de l'aide sociale, l'augmentation du taux d'effort sur le logement, la diminution des subventions des habitations mixtes, la diminution de 1% des subventions des entités subventionnées et la suppression de l'annuité de la fonction publique.

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur.

M. François Lefort. Alors, dans le contexte du changement de cap annoncé ce matin, il faudrait voter ce soir 2 millions pour Genève Futur Hockey ? Eh bien, que nenni ! Ce sera sans nous !

Le président. Il vous faut conclure.

M. François Lefort. Merci, laissez-moi conclure, quand même ! Ce sera sans nous et j'espère que nous ne serons pas les seuls à refuser ce projet de loi, pour lequel nous demandons d'abord un renvoi en commission !

Le président. Un renvoi en commission est demandé. Je passe la parole au rapporteur et au Conseil d'Etat qui peuvent s'exprimer, puis nous voterons. (Brouhaha.) Attendez, vous n'avez pas le micro, Monsieur ! Si on veut bien donner la parole au rapporteur ?

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Non, il n'est pas question de renvoyer ce projet de loi en commission ! Comme M. Sormanni l'a relevé, les travaux ont été conduits pendant plusieurs mois à la commission des finances et le rapport a été rendu il y a près d'une année. Je crois qu'il est maintenant temps de se décider et je vous invite donc à refuser cette proposition.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Est-ce que Mme la conseillère d'Etat veut s'exprimer sur le renvoi en commission ? Ce n'est pas le cas. Le vote est lancé.

Une voix. Vote nominal, s'il vous plaît !

Le président. Trop tard.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11278 à la commission des finances est rejeté par 59 non contre 8 oui et 3 abstentions.

Le président. Nous poursuivons le débat, je passe la parole à M. le député Christo Ivanov.

M. Christo Ivanov (UDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le sport est le parent pauvre à Genève. Si comparaison n'est pas raison, il faut reconnaître que le sport est loin à la traîne derrière la culture en matière de subventionnements. La formation dans tous les domaines doit être une priorité et spécialement dans le sport. Comme le disait Adolf Ogi, notre conseiller fédéral...

Le président. Excusez-moi, Monsieur le député. Est-ce que les personnes qui sont au fond de la salle pourraient aller discuter ailleurs?

M. Christo Ivanov. Florey !

Le président. Monsieur Béné, s'il vous plaît ! Poursuivez, Monsieur !

M. Christo Ivanov. Merci, Monsieur le président. Oui, comme disait notre ancien conseiller fédéral UDC Adolf Ogi, le sport, c'est la vie ! Ce projet de loi 11278 prévoit un contrat de prestations avec l'association Genève Futur Hockey pour un montant de 495 000 F pour les années 2013 à 2015. L'UDC regrette que le CP Meyrin n'ait pas encore intégré l'association et souhaite que la magistrate puisse faire une médiation afin de réaliser l'union sacrée. L'UDC souhaite que les sports dits mineurs, tant individuels, comme le judo ou la boxe, que les sports d'équipe comme le rugby ou le handball ne soient pas oubliés dans le cadre de la formation sport-études. Je finirai par une citation de Nelson Mandela qui disait que «le sport peut faire naître l'espoir là où régnait le désespoir». Le groupe UDC vous demande donc de soutenir et de voter ce projet de loi.

M. Olivier Cerutti (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, avoir une équipe de hockey qui joue les premières places, qui gagne la coupe Spengler, c'est effectivement un rêve et ce rêve je le partage aussi. C'est aussi une chance, voire une expérience, même un projet éducatif pour la jeunesse. Je pense qu'aujourd'hui nous devons aller dans cette direction, le tour est au sport ! Mesdames et Messieurs, je vous invite donc à voter ce projet de loi.

Mme Salika Wenger (EAG). Chers collègues, il est bien évident que tout le monde ici, dans cette enceinte, est pour le sport. Subventionner le sport me semble effectivement une bonne initiative. Quant à subventionner le sport spectacle, je ne suis pas certaine que ce soit notre mission. Pour ce qui me concerne, regarder une bande de décérébrés courir après la baballe, ce n'est pas ma tasse de thé ! (Commentaires.) Je peux imaginer que certains d'entre vous et d'autres puissent aimer ça, mais la subvention me paraît pharaonique, parce qu'il n'y a pas de raison: le Genève Servette Hockey club est une société anonyme, nous sommes en train de subventionner une entreprise privée ! (Commentaires.) Est-ce que c'est notre travail ? Est-ce que c'est notre mission ? (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît !

Mme Salika Wenger. Je sais que tout le monde prétend que ça n'est pas le cas. Le débat est toujours le même: on affirme toujours qu'il s'agit de subventionner le sport des jeunes et, au bout du compte, nous avons des jeunes qui ne sont pas très bien formés, une équipe perdante et l'Etat qui paie ! Je ne suis pas sûre que nous ayons tous envie de ça. Je suis certaine que je l'aurais votée s'ils étaient gagnants, mais ce n'est pas le cas !

Donc, pour ce qui nous concerne, compte tenu de tout ce que je viens de vous dire, qu'il s'agit d'une entreprise privée, d'une équipe qui n'est pas tellement performante et d'un sport qui reste quand même relativement confidentiel par rapport à tous les sports pratiqués au sein de notre canton, je ne crois pas que mon groupe votera cette subvention.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Daniel Sormanni. Il vous reste une minute treize.

M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président, ce sera très court. Vous transmettrez à Mme Wenger: je crois qu'elle se trompe complètement de combat.

Le président. S'il vous plaît, un peu de silence !

M. Daniel Sormanni. Il ne s'agit aucunement de subventionner l'équipe professionnelle du Genève Servette, il s'agit de financer l'association Genève Futur Hockey. Les garanties ont été données, ça a été contrôlé par la Cour des comptes, et aussi par la Ville de Genève: il y a une étanchéité totale des comptes. On subventionne des jeunes qui sont formés dans cette école et non l'équipe professionnelle, c'est une erreur !

Puis, alors, parler d'un subventionnement pharaonique ! Je vous rappelle que ce sont 495 000 F pour cinq ans, soit un peu moins de 100 000 F par année. Ce n'est de loin pas pharaonique, surtout si l'on compare avec tout ce que nous subventionnons dans la culture. Je vous invite donc à voter ce projet de loi. (Applaudissements.)

Une voix. Pas besoin de gueuler !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme la conseillère d'Etat. Ensuite, nous voterons.

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, non, le hockey n'est pas un sport confidentiel et, au fond, si c'est un spectacle qui plaît à une partie de la population, je ne vois pas pourquoi, en tant que gouvernement, nous ne le soutiendrions pas. Il n'y a effectivement pas que le théâtre ou le cinéma que nous devons soutenir, comme nous en parlerons tout à l'heure.

Cela dit, une remarque, même si l'essentiel a été dit par les uns et les autres: l'effort que font dans ce domaine le canton de Genève et les collectivités publiques en général ne porte bien que sur la relève sportive. Cet effort est fait de deux manières: soit par le soutien aux classes d'élèves avec le dispositif sport-art-études, avec des aménagements de leur temps scolaire, comme cela a été rappelé; soit le soutien à la relève sportive, dans quatre sports pour l'instant, mais c'est un modèle qui est évolutif: le football et le hockey masculins, et, pour les filles, le volleyball et le basketball. Cela est d'ailleurs fait en lien avec une politique nationale. Le soutien au hockey fonctionne relativement bien puisque, grâce à ce dispositif de relève sportive, onze jeunes formés à Genève ont pu intégrer la première équipe.

En ce qui concerne les remarques des uns et des autres, Monsieur Sormanni, vous avez un tout petit peu critiqué le gouvernement de ce qu'il aurait tant tardé à déposer ce projet de loi. J'insiste bien sur le contexte: la commission des finances avait réduit le premier contrat de prestations à deux ans, dans l'attente d'une étude plus sérieuse sur l'étanchéité ou non entre le club professionnel et ce qui était prévu pour la relève. Cette étude a été confiée à la Cour des comptes qui a rendu son rapport le 30 septembre. Ayant pris connaissance de ce que donnait ce rapport, le Conseil d'Etat a pu déposer ce projet de loi, mais pour les années 2013 à 2016. La commission des finances a fait son travail assez rapidement, puisqu'elle a travaillé en octobre et novembre 2013 et qu'elle a rendu un rapport qui a malheureusement été retiré des extraits. Comme le temps commençait à compter, je vous ai demandé l'urgence ce soir. Je crois qu'il n'y a pas lieu d'insister davantage et vous invite à soutenir massivement ce projet de loi.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Je vous fais voter l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 11278 est adopté en premier débat par 70 oui contre 17 non et 2 abstentions.

La loi 11278 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 11278 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 68 oui contre 18 non et 4 abstentions.

Loi 11278

PL 11301-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat accordant une aide financière à la Fondation romande pour le cinéma pour les années 2013 à 2016
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XI des 18 et 19 septembre 2014.
Rapport de majorité de M. Ivan Slatkine (PLR)
Rapport de minorité de M. Roger Deneys (S)

Premier débat

Le président. Nous passons à l'urgence suivante, qui est classée en catégorie II - quarante minutes. Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Ivan Slatkine.

M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous traitons ce soir du contrat de prestations 2013-2016 entre l'Etat de Genève et Cinéforom, fondation ayant pour but de fédérer l'ensemble des aides romandes pour le cinéma. De l'écriture à la création, de la production à la réalisation, de la diffusion à la distribution, Cinéforom fait partie des trois piliers de l'aide au cinéma en Suisse que sont la Confédération, la SSR et l'aide régionale.

Sans vouloir revenir trop longuement sur l'histoire de la fondation d'aide pour le cinéma, il faut relever que les huit partenaires du projet initié en 2011 ont pris des engagements dès la création de cette fondation - ces huit partenaires étant la Ville de Genève, l'Etat de Genève, le canton de Vaud, la Ville de Lausanne et les cantons de Valais, Neuchâtel, Fribourg et Jura. Lors de la précédente législature, le canton de Genève a, par le biais de sa majorité de l'époque, décidé de limiter à deux ans le premier contrat de prestations, étalant une aide progressive avec 1,25 million de francs en 2011 et 1,5 million de francs en 2012. Il était alors convenu que le Grand Conseil serait ensuite saisi d'un contrat de prestations sur quatre ans, couvrant la période 2013-2016 avec une subvention augmentée jusqu'à hauteur de 2,5 millions de francs en 2016, selon les engagements pris en 2011.

C'est de ce contrat de prestations qu'il s'agit de parler ce soir. Notre Grand Conseil étant ce qu'il est, nous débattons aujourd'hui seulement d'un contrat de prestations portant déjà sur deux exercices écoulés. Faute d'avoir voté le présent projet de loi avant ce jour, ce sont les budgets votés par la majorité du Grand Conseil qui ont validé ces autorisations de dépenses de 2 millions de francs en 2013 et de 2,15 millions en 2014. Le budget faisant foi au niveau législatif selon le Conseil d'Etat, les montants dépensés en 2013 et ceux partiellement dépensés à ce jour, en 2014, ne peuvent aujourd'hui être remis en question, à moins d'imaginer que les subventions versées jusqu'aujourd'hui puissent être remboursées. Pour cette simple raison, il serait totalement aberrant de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Il en va de notre responsabilité de valider ce qui a été voté par notre Grand Conseil lors des budgets 2013 et 2014, sans le moindre débat.

Pour ce qui est des années 2015 et 2016, l'idée de demander à l'administration de venir nous présenter un nouveau contrat de prestations n'a pas de sens d'un point de vue administratif: le politique doit prendre ses responsabilités, afin de permettre à l'administration de travailler correctement et de permettre la meilleure allocation possible des subventions accordées, tout en pensant à ceux et celles qui sont dans l'attente de notre décision pour réaliser leurs projets. Bien que l'on puisse s'étonner, s'insurger, sur le fait que les montants inscrits au budget 2013 et 2014 ne reposaient sur aucune base légale, en l'absence du contrat de prestations voté, bien qu'on puisse être étonné que le Conseil d'Etat ait inscrit dans ses budgets des montants en augmentation par rapport à ceux de 2012 sans nous avoir rendus attentifs à la chose, et bien que le projet de loi ait été refusé en commission des finances, je représente certainement une majorité qui ne souhaite pas que l'aide au cinéma soit totalement supprimée, comme le laisse croire le vote de la commission des finances.

Il faut bien comprendre que la composition de notre Grand Conseil en trois blocs ne permet pas - ou plus - de dégager des majorités claires. Dans le cas qui nous concerne ce soir, nous avons trois groupes avec des objectifs distincts. Pour le premier, représenté par le MCG, il faut supprimer l'aide au cinéma; pour le second, représenté en commission par le PLR et l'UDC, il ne faut pas supprimer l'aide allouée, mais il convient de la redimensionner aux réalités financières de notre république.

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Ivan Slatkine. Enfin, pour le troisième groupe, il faudrait voter le contrat tel qu'il est. Nous pouvons donc sans trop de difficulté penser qu'il est possible de trouver une majorité qui permette de maintenir une aide à Cinéforom.

Le président. Il vous faut conclure.

M. Ivan Slatkine. Je vous remercie, Monsieur le président. La culture contribue au rayonnement de notre région et de notre canton. Il serait regrettable que nous tombions dans le même piège qu'à la commission des finances et que nous coupions toute aide au cinéma. C'est pour cette raison que le rapport de majorité que je présente vous appelle, Mesdames et Messieurs les députés, à vous satisfaire d'un amendement qui, je l'espère, pourra trouver une majorité. Cet amendement a pour but de maintenir une aide à la fondation Cinéforom. Certes, il ne satisfera personne, mais il aura au moins l'avantage de ne pas détruire une fondation qui fonctionne à la satisfaction de tous.

Le président. Il vous faut terminer, Monsieur le rapporteur.

M. Ivan Slatkine. Je poursuivrai ultérieurement, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je passe la parole au rapporteur de minorité, M. Roger Deneys.

M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais d'abord saluer les propos du rapporteur de majorité. Parce qu'en commission des finances, ma foi, nous avons assisté à une scène assez particulière: ce projet de loi a été refusé intégralement par une majorité composée de l'UDC, du MCG et du PLR. En l'occurrence, le verdict de la commission des finances, c'est de dire: nous ne donnerons pas un seul franc à cette fondation romande du cinéma ! Telle était la décision d'une majorité de la commission des finances, décision contre laquelle les socialistes se sont insurgés.

Il faut d'abord rappeler que l'idée de cette fondation pour le cinéma, c'est de fédérer des énergies et aussi des moyens financiers, pour essayer de donner une certaine masse critique à la production cinématographique romande. Ça ne veut pas dire que cette fondation est parfaite. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas des questions qui se posent sur la façon dont elle peut subventionner les uns plutôt que les autres. Il n'empêche que c'est un projet exemplaire en termes de fédération des énergies.

Mesdames et Messieurs les députés, nous avons pu le constater tout à l'heure, ce Grand Conseil vote 500 000 F - les yeux fermés, ai-je envie de dire - pour Genève Futur Hockey. C'est très bien d'aider le sport, les jeunes, etc. Pour le cinéma, ma foi, on n'a pas le même genre de débat en commission; on a des gens qui posent des questions, demandent pourquoi les Vaudois financent ceci, pourquoi les Valaisans n'ont pas financé cela... Cela donne un état d'esprit extrêmement nuisible à la promotion de la culture romande. Parfois, j'ai envie de dire que si on sait que le MCG, ou en tout cas certains de ses membres sont des ennemis de la culture romande, parce qu'ils y voient peut-être aussi une forme de subversion, eh bien, ma foi, certains PLR vont sur le même terrain: ils s'insurgent contre telle ou telle production, contre tel ou tel projet et ils contestent les montants pas seulement sur le fond, mais aussi sur le contenu ! J'ai envie de dire que le PLR, ma foi, aime parfois la culture comme Jack l'Eventreur aimait les femmes ! (Brouhaha.) Et je pense que c'est un des problèmes avec les débats tels que nous les avons connus en commission. (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît !

M. Roger Deneys. Pour les socialistes, c'est très clair: notre souhait est de revenir au projet de loi initial du Conseil d'Etat - Conseil d'Etat qui est composé d'une majorité de PLR, de PDC, de membres de l'Entente, pas d'une majorité de socialistes. Et il est vrai que le rapporteur de majorité est venu avec une proposition d'amendement, qui ne satisfait pas les ambitions des socialistes, qui ne répond pas aux exigences romandes, mais quelque part, pour nous, l'essentiel, c'est d'arriver à une solution qui permette à cette fondation d'exister et, si possible, quand même en partenariat avec les autres partenaires. Parce que nous ne sommes pas seuls, et je pense que c'est bien là l'un des enjeux de ce projet de loi: affirmer que nous devons respecter nos engagements envers nos partenaires romands. Bien entendu, pour modérer les propos que j'ai tenus tout à l'heure, j'aimerais ajouter qu'il est vrai que j'ai une certaine exaspération quand je vois la façon dont se mènent les débats, selon les projets.

Je vous invite à vous rallier à l'amendement du rapporteur de majorité. Je pense que c'est une première base pour essayer de faire vivre cette fondation, dans une forme certes réduite, mais qui lui permette au moins d'exister.

M. Eric Leyvraz (UDC). Contrairement à ce que dit M. Deneys, l'UDC ne s'oppose pas à une subvention au cinéma, elle s'opposait au projet de loi tel qu'il était présenté là, pour la simple et bonne raison que le Conseil d'Etat avait voté des augmentations sans base légale... (Commentaires.)

Le président. S'il vous plaît !

M. Eric Leyvraz. ...et, alors que toutes les autres subventions sont désormais limitées voire baissent, il me semble que ce n'est pas très normal par rapport à d'autres associations d'augmenter des subventions de 2,15 millions à 2,5 millions de francs. Il suffit aussi de regarder que le canton de Vaud n'augmente pas sa subvention entre 2013 et 2016. Il est bien clair que pour ce qui a été dépensé en 2012 et 2013, on ne peut pas revenir en arrière. Il faut évidemment respecter les dépenses déjà faites, ce n'est quand même pas la faute de Cinéforom non plus si nous n'avons pas encore voté ce projet de loi. C'est pour cette raison que nous allons accepter l'amendement proposé par le PLR, qui nous semble raisonnable.

Je dois dire aussi que nous étions quand même un tout petit peu surpris: le cinéma doit être un art populaire et on voit que les trois films qui ont eu le moins d'audience et qui ont été subventionnés avec nos sous ont eu comme public 33 spectateurs pour le plus faible, 45 pour le deuxième et 89 pour le troisième. On peut vraiment parler d'une audience discrète !

Mesdames et Messieurs, nous accepterons ce projet de loi avec l'amendement du PLR.

M. Michel Ducommun (EAG). Sur ce sujet, mais ce n'est pas le seul, je sais que mon expérience de membre de la commission des finances est relativement limitée, il n'y a pas longtemps que j'y suis. Toutefois, cette expérience est caractérisée par le fait que, chaque fois que le mot culture est prononcé, la droite dit: diminution des subventions ! C'est quasiment une manière de faire logique et constante.

Le cinéma de création suisse romand mérite à mon avis d'être soutenu; il mérite un soutien financier et je crois que la collaboration romande à ce niveau est effectivement intéressante. Nous sommes donc fondamentalement pour maintenir la subvention telle qu'elle est prévue par le projet de loi. Nous avons quelques réserves avec l'amendement qui propose quand même de diminuer la subvention de plus d'un million de francs sur quatre ans, ce qui revient à une diminution de 13%.

Il y a encore un gros «mais»: dans mon innocence de nouveau membre de la commission des finances, je me suis fait rouler une fois et je pense ne pas vouloir me faire rouler deux fois. C'est-à-dire qu'en commission des finances, le MCG a prétendu soutenir ce projet de loi. A partir du moment où il a prétendu le soutenir, il a donc refusé les amendements qui diminuaient la subvention. A partir du moment où il y a une majorité pour ne pas soutenir la diminution des subventions, le projet a été refusé par le PLR qui avait voulu ces diminutions, mais également par le MCG ! Ce qui a fait qu'il y a eu une majorité pour supprimer toute subvention à Cinéforom !

Si nous avons des réserves sur l'amendement proposé pour diminuer les subventions, nous ne voulons pas nous faire rouler de la même manière qu'à la commission des finances pour arriver à ce que tout le projet de loi soit supprimé. Nous allons donc nous abstenir sur l'amendement proposant une diminution de la subvention pour qu'il reste une majorité à la fin pour voter quand même une subvention à Cinéforom.

Mme Emilie Flamand-Lew (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, il y a quelques années, chaque canton versait des subventions au cinéma de son côté. Puis, en 2009, les conseillers d'Etat latins en charge de la culture ont initié une réflexion commune qui a abouti à la création de la Fondation romande pour le cinéma, dite Cinéforom. L'objectif est louable, puisqu'il s'agit de mettre en commun les forces des cantons, de distribuer les fonds publics de manière mieux coordonnée et donc plus rationnelle.

Malheureusement, au sortir de la commission des finances, après un débat houleux et une assez douteuse partie de billard à trois bandes, l'aide financière à Cinéforom s'est trouvée tout bonnement supprimée. Nous regrettons vivement ce vote et espérons, comme le rapporteur de majorité, qu'une solution pourra être trouvée ce soir, pour poursuivre notre soutien à cette fondation et, surtout, notre soutien au cinéma romand, un domaine dans lequel Genève est particulièrement actif. Pour soutenir la création et maintenir un cinéma romand dynamique et vivant, nous vous invitons à entrer en matière.

M. Henry Rappaz (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le Mouvement Citoyens Genevois, en concertation avec certains cinéastes genevois, dénonce cette fondation du cinéma qui est au service uniquement de quatre à cinq gros producteurs de la Romandie, qui s'attribuent des subventions à eux-mêmes, ce qui pour le MCG est intolérable. Il faut savoir qu'aujourd'hui, l'autorité fédérale de surveillance des fondations enquête sur le dysfonctionnement de Cinéforom, anciennement la Fondation romande pour le cinéma. Cette autorité indique avoir des points supplémentaires à éclaircir auprès de Cinéforom. Faute de temps suffisant pour le traitement de ces questions, elle n'a pas été en mesure de terminer son rapport pour aujourd'hui.

S'il est une évidence, en tout état de cause, c'est qu'il n'est nullement question pour nous de supprimer l'aide publique actuelle au cinéma genevois et romand, ce qui ne pourrait que nuire gravement à la diversité culturelle. Nous voulons un contrôle sévère sur la répartition des fonds. Il en va de même d'un maintien du statu quo quant aux modalités de distribution de ces subventions. Par conséquent, il convient à l'avenir de voter de manière responsable en faveur d'une réforme de la Fondation romande pour le cinéma, pour une culture et un cinéma romand meilleurs et surtout ouverts à tous.

A l'avenir, les conditions suivantes seront requises: premièrement, la Fondation romande pour le cinéma doit être transformée en fondation de droit public selon le modèle de Pro Helvetia et dotée d'un droit de recours, conformément aux exigences des constitutions fédérales et cantonales. Deuxièmement, le conseil de fondation actuel doit être remplacé par des personnes au-dessus de tout soupçon de copinage et autres «combinazione» ou monopoles. Je vous rappelle que la fondation pour le cinéma romand Cinéforom est une institution de droit privé qui distribue depuis 2011 de l'argent public sans droit de recours, et ce majoritairement à des sociétés anonymes contrôlées - c'est un comble - par des membres de son propre conseil de fondation ! Nous ne voulons plus de ce genre de magouilles qui plombent les jeunes réalisateurs indépendants qui, par ce fait, n'ont jamais accès à cette manne. Nous vous invitons à agir à l'avenir en faveur d'un système d'aide publique au cinéma romand qui soit efficace et honnête.

Je terminerai en disant que si le cinéma est un rêve et les factures qui en découlent un cauchemar, elles ne le sont pas pour tous. Vous m'aurez bien compris, le MCG vous invite à refuser le PL 11301-A afin de connaître l'analyse finale de l'autorité fédérale de surveillance des fondations qui nous permettra de traiter ce sujet en connaissance de cause. Nous suggérons donc un renvoi à la commission des finances. (Applaudissements.)

Le président. Vous voulez un renvoi de l'objet à la commission des finances, c'est bien cela ? (Remarque.) Je passe la parole au rapporteur de majorité, sur la demande de renvoi en commission uniquement.

M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Il faut être très clair: ce Grand Conseil doit prendre ses responsabilités. Prendre ses responsabilités, c'est voter ou refuser ce contrat de prestations ce soir, mais botter en touche pour un renvoi à la commission des finances et encore laisser dans l'attente le vote sur ce contrat de prestations, alors que cela fait deux ans qu'on aurait dû le voter, c'est nier nos responsabilités; raison pour laquelle je vous invite à refuser le renvoi à la commission des finances.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Monsieur le rapporteur de minorité, sur le renvoi en commission ?

M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le Grand Conseil s'est déjà distingué de façon négative en votant le premier projet de loi 10840 en 2013, alors qu'il concernait le financement des années 2011 et 2012. Evitons de répéter l'exercice, en votant en 2015 un contrat de prestations qui commence en 2013 ! On est en train de mettre tout le monde dans des situations extrêmement difficiles en faisant ce travail après coup. Je pense que la crédibilité du Grand Conseil consiste aussi à voter les projets de lois en temps et heure.

On peut diverger sur les montants, sur la façon de faire vivre cette fondation, mais voter ce soir un renvoi en commission n'amènera pas les informations nécessaires. Si cette fondation doit pouvoir être réformée, elle doit pouvoir vivre et mener sa vie pour être réformée selon les souhaits des uns et des autres - voire selon des décisions de justice, si c'est nécessaire.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je soumets cette demande de renvoi à l'assemblée.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11301 à la commission des finances est rejeté par 71 non contre 21 oui et 1 abstention.

Le président. Nous poursuivons notre débat et je passe la parole à M. Guy Mettan.

M. Guy Mettan (PDC). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, on a beaucoup reproché à l'Etat de mal distribuer ses subventions, de se disperser dans tous les coins, d'octroyer des subsides pour le théâtre ici ou là, d'en octroyer d'autres pour le reste de la culture, dispersés dans toutes sortes de domaines. Enfin, dans le domaine du cinéma, il y a maintenant deux ou trois ans, les cantons romands se sont mis d'accord pour créer une fondation commune et rationaliser toute l'aide au cinéma dans une structure unique. On ne peut donc pas venir reprocher à l'Etat d'avoir fait ce qu'on lui a demandé de faire. Cela a été rappelé par ma collègue Emilie Flamand-Lew tout à l'heure. Le projet qui nous est soumis ce soir est justement le fruit de cette rationalisation qui permet à tous les députés que nous sommes et à tout le public de voir qu'effectivement un effort a été fait pour mieux utiliser les subventions, au cinéma en l'occurrence. C'est la première raison pour laquelle il faut voter ce projet de loi.

Ensuite, dans les discussions de la commission des finances, certains ont été sensibles aux objectifs de rigueur. C'est le cas du PLR qui a souhaité réduire un tout petit peu cette subvention de telle façon que les bénéficiaires participent eux aussi à l'effort de rigueur. On peut être d'accord ou pas. Le parti démocrate-chrétien aurait souhaité voter le projet de loi tel qu'il nous a été présenté, mais nous sommes aussi des pragmatiques, nous sommes aussi soucieux du bon usage de l'argent public et, effectivement, des conditions de rigueur budgétaire imposées à l'ensemble du corps social genevois. C'est la raison pour laquelle j'ai déposé cet amendement, avec l'assentiment du rapporteur de majorité et, j'espère aussi, du rapporteur de minorité, de telle façon que nous puissions ce soir enfin voter cette aide au cinéma et que Genève arrête de se ridiculiser par rapport aux autres cantons qui ont tous accepté ce principe. Nous allons voter maintenant, je l'espère, pour l'ensemble de la communauté cinématographique, ce projet de loi avec cet amendement.

J'aimerais rappeler aussi en conclusion que le cinéma, ce ne sont pas que des coûts. Le cinéma, ce sont aussi des emplois: il y a toute une industrie du cinéma. On ne peut pas comparer la Suisse romande à Hollywood ou à Bollywood, mais enfin, c'est une industrie à part entière, qui crée aussi des emplois. C'est aussi une stimulation pour les jeunes: regardez la HEAD, son école de cinéma prend son envol, elle est reconnue maintenant au-delà de nos frontières. C'est aussi par rapport aux jeunes que nous votons ce projet-là, de façon à favoriser la relève.

Ce n'est pas du tout vrai qu'il y a du copinage. Effectivement, le cinéma est un milieu relativement étroit, comme tous les autres milieux d'ailleurs, mais il n'y a pas de copinage particulier en ce domaine, en tout cas pas plus qu'ailleurs. Ce reproche est tout à fait inexact.

Mesdames et Messieurs, je ne peux donc que vous encourager à voter l'amendement proposé et à adopter enfin ce projet de loi qui sera un excellent signal pour l'ensemble de la communauté culturelle genevoise et romande, même s'il a été raboté un petit peu entre-temps. (Applaudissements.)

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Je sais que nous sommes des politiques, que nous avons chacun notre caractère, c'est un fait. Ici, nous parlons d'autre chose: fondamentalement, nous parlons de culture, mais plus que ça, de loisirs et aussi d'économie. Nous avons vu tout à l'heure l'unanimité sur l'importance de défendre le sport et je crains que nous n'arrivions pas ce soir à être unanimes ou en tout cas majoritaires pour défendre la culture. Or, c'est une culture qui reste encore et toujours populaire; elle n'est pas seulement élitiste, elle peut être documentaire, mais c'est aussi une culture qui donne du plaisir, qui intéresse, qui questionne. Je crois donc que nous devons accepter l'amendement proposé.

Tout le monde est frustré par la façon dont les débats se sont déroulés en commission des finances, mais à mon avis, il ne faut pas oublier que si on veut que la Suisse romande ne compte pas pour rien en termes internationaux, nous avons le devoir de soutenir ce type de culture !

Pour finir, j'aimerais tout de même vous dire que, durant les travaux, on nous a fait part d'une étude réalisée en France, en Provence-Alpes-Côte d'Azur. Cette étude démontrait qu'avec 2,5 millions d'euros de subvention, le cinéma rapportait 21 millions d'euros en retombées économiques, en salaires et en économie complémentaire autour du cinéma, comme l'hôtellerie.

Je rappelle que la fondation Cinéforom est jeune; elle n'est pas encore ce que tout le monde a envie qu'elle soit. Elle peut encore s'améliorer, et c'est le rôle du Conseil d'Etat et des contrats de prestations futurs de le lui permettre. On ne peut pas faire avorter ce projet qui a montré en une année qu'il pouvait attirer plus de 170 000 spectateurs avec des films suisses romands. Nous avons donc une responsabilité ce soir et je vous remercie de la prendre. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. le député Thomas Bläsi. Il vous reste deux minutes trente.

M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, quand on regarde cette subvention sous un premier angle ou une première focale, c'est effectivement une subvention séduisante, généreuse: on augmente l'offre culturelle, on soutient les artistes qui, de tout temps, ont quand même eu des problèmes pour mener à bien leur activité. Malheureusement, on est quand même obligé d'avoir une focale différente, et c'est pour cela que l'interprétation de la position par M. Deneys est pour le moins extensive. Nous n'avons rien contre le cinéma, bien au contraire, mais le problème est que la subvention dont vous nous parlez concerne des films dont les fréquentations sont de l'ordre de trente à quarante spectateurs par film. (Commentaires.) Mais oui, mais c'est une réalité ! Aujourd'hui, ce parlement a de nombreux votes qui l'attendent et parmi ces votes, il y a des choix à faire. Il y a des choix à faire dans l'aide sociale, sur le cinéma, et on va devoir procéder à des arbitrages. Oui, vous hochez de la tête, mais élargissons encore plus la focale, alors. A l'heure actuelle, quelle est la perspective pour la population de Genève ? 14% d'augmentation du coût de l'électricité, des pertes au niveau des TPG, des pertes dans certains secteurs des HUG, une augmentation programmée des coûts des caisses-maladie et, dans cette ambiance, on va distribuer l'argent des impôts pour un secteur qui, malheureusement, n'a pas le succès que nous escomptions. Vous faites une comparaison avec Genève Futur Hockey: je suis désolé, mais là, on est dans le succès, on est dans la réussite. On sait que l'argent qu'on investit va conduire à une amélioration globale pour Genève.

Nous ne sommes pas contre cette fondation ou contre cette aide, mais nous sommes contre le fait qu'il y ait une augmentation systématique et automatique de la subvention, alors que les résultats ne sont pas là. Nous voudrions d'abord voir les résultats qui ont été acquis par les subventions que nous avons déjà versées, que la parole engagée soit respectée pour les subventions passées...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Thomas Bläsi. ...et que, pour le futur, nous réduisions cette augmentation automatique pas forcément approuvée par le parlement.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Renaud Gautier, vous avez trois minutes trente.

M. Renaud Gautier (PLR). Merci, Monsieur le président. Vous demanderez au rapporteur de minorité si, par hasard, il a vu un film inspiré d'un livre assez connu qui s'appelle «Le Désert des Tartares». (Rires.) On y voit un lot de soldats qui attendent désespérément une attaque, dans quelques confins perdus et désertiques. Par analogie, Mesdames et Messieurs, lorsqu'on souhaite que ce parlement arrive à un consensus, dans une affaire effroyablement mal partie, il faut le dire - puisque ce parlement a été relativement sciemment trompé sur cette association qui s'est vu octroyer des subventions, alors qu'il n'y avait pas encore de contrat de prestations - est-il absolument nécessaire d'entendre à journée faite et «ad nauseam» les injures personnalisées du rapporteur de minorité contre certains ? A croire que celui-ci, dans le fond, beaucoup plus vicieux qu'on pourrait le croire - ce qui veut dire vraiment beaucoup - entend forcer celles et ceux qui hésitent à ne pas voter cette subvention, tellement la fatigue que nous avons de ces attaques permanentes devient insupportable.

Alors, Monsieur le président, je compte sur vous pour expliquer à votre collègue de parti que, s'il attend parfois, de temps à autre, que nous arrivions à développer Genève en votant certains budgets, il serait bon que ces attaques personnelles cessent une bonne fois pour toutes. Ce n'est pas à vous que j'apprendrai les différents lieux où l'on peut s'exprimer, comme par exemple internet, pour recevoir à journée faite des leçons de M. Deneys, passé maître dans la morale - lui qui sait et nous qui ne savons pas ! Lui qui est dans la lumière et nous qui sommes dans l'ombre ! Il est à la longue, excusez-moi Mesdames, effroyablement casse-couilles ! Si M. Deneys et les socialistes attendent que nous participions à quelques projets avec eux, pour l'amour du ciel, faites-le taire ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Je vous remercie d'appeler, tout comme moi, les gens à la raison. Je fais ce que je peux ! Je passe la parole à M. le député Alberto Velasco, à qui il reste une minute dix-huit.

M. Alberto Velasco (S). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, je ne vais pas ajouter encore aux raisons pour lesquelles il faut voter ce projet de loi, mais je dois dire que le vote de la commission a jeté l'opprobre sur notre canton dans tous les milieux artistiques de la Suisse. Voir un canton qui annule une subvention, il faut le faire, en matière de créativité !

Ceci dit, il y a eu une accusation assez grave, celle de copinage. C'est grave, puisqu'on va donner des millions à cette institution. Si c'est vrai qu'il y a du copinage, il faudrait s'adresser à la commission de gestion du Grand Conseil qui avisera, mais il ne faut pas jeter ainsi l'opprobre sur une institution, en plénière. C'est à mon avis inadmissible ! Il vous faut des preuves pour dire cela, Monsieur ! (Brouhaha.)

Le président. Il vous reste trente secondes. (Le président agite la cloche.)

M. Alberto Velasco. Cela dit, j'invite l'institution qui recevra cette somme à faire preuve elle aussi de transparence et à démontrer que ce qui a été dit dans cette salle n'a pas lieu d'être. C'est très important qu'elle le fasse, envers notre commission de gestion.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Rémy Pagani. Il vous reste une minute quinze.

M. Rémy Pagani (EAG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce qui est en jeu aujourd'hui, c'est de donner un gros coup de frein au sauvetage du cinéma indépendant romand. Il y a des efforts qui ont été faits, notamment avec le cinéma Bio. Il y a encore quatre salles qui programment - qui mettent en scène, si j'ose dire - ce cinéma indépendant. Si ce n'est pas le coup de grâce, vous allez lui donner un coup de frein et je le regrette, d'autant plus qu'on fait des amalgames entre le nombre de spectateurs, cette association qui ne fonctionnerait pas bien et le copinage, alors que tout cela demande à être prouvé. Je vous rappelle que Mozart a connu un certain nombre d'échecs cuisants et je ne pense pas qu'il aurait été de bon aloi de dire à Mozart qu'on devait lui réduire ses subventions.

Le président. Il vous reste vingt secondes.

M. Rémy Pagani. En conséquence de quoi, nous nous abstiendrons sur cet amendement, parce que nous soutiendrons l'ensemble de cette subvention.

Le président. Il vous faut conclure.

M. Rémy Pagani. Je finis, Monsieur le président. C'est complètement énervant, cette affaire. Au vote final, nous soutiendrons ce projet de loi, y compris avec l'amendement.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Daniel Sormanni. Il vous reste trente-huit secondes.

M. Daniel Sormanni (MCG). Je vais me dépêcher, Monsieur le président. Je trouve quand même assez curieux que ce Grand Conseil, d'habitude assez frileux pour voter les subventions - on l'a vu tout à l'heure avec Genève Futur Hockey - ne se pose ici aucune question...

Le président. Il vous reste vingt secondes.

M. Daniel Sormanni. ...alors qu'il y a des doutes qui persistent et qu'une enquête de la surveillance fédérale des fondations est en cours. Mais là, vous passez dessus et vous donnez l'argent sans regarder ! C'est la raison pour laquelle nous voulions renvoyer ceci en commission, mais peut-être que la magistrate pourrait éclaircir ce Grand Conseil sur cette problématique.

Le président. Il vous faut conclure.

M. Daniel Sormanni. Je termine tout de suite. Il est à mon avis parfaitement prématuré de voter de l'argent avant d'avoir éclairé cette problématique, et je vous prie de suivre la position du MCG.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Guy Mettan. Il vous reste vingt secondes.

M. Guy Mettan (PDC). Merci, Monsieur le président. Je laisserai Mme Emery-Torracinta répondre aux accusations de M. Sormanni. Je voulais juste rassurer l'UDC et mon collègue Leyvraz pour dire que si certains films connaissent peu de succès, d'autres connaissent en revanche un énorme succès. Il y a des films romands qui font des dizaines de milliers d'entrées. Certains sont nommés aux Oscars. Et ça, il faut aussi le rappeler pour le mettre dans la balance. (Commentaires.) Le cinéma romand, ce sont aussi des succès ! En 2012...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député !

M. Guy Mettan. Bon... (Brouhaha.)

Le président. Vous n'avez plus de temps de parole. Je passe la parole au rapporteur de majorité, qui prend sur le temps de son groupe: il lui reste une minute dix.

M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Très rapidement, je m'exprime en effet au nom de mon groupe pour ajouter d'abord aux propos de mon préopinant qu'en matière culturelle, on ne subventionne pas le succès, on subventionne les projets. Je crois que c'est important de le dire, parce que si on commence à partir dans des subventions au succès, à mon avis on ne subventionnera plus grand-chose. Normalement, un succès, il n'y a pas besoin de le subventionner.

Cela étant dit, pour expliquer aussi la position du PLR, j'aimerais simplement rappeler ici que, dans le canton de Vaud, les subventions ont été gelées pour 2012, et cela n'a rien agité du tout: personne n'en a parlé. Mais à Genève, dès qu'il s'agit de dire qu'il faut faire un petit peu attention, ça devient un débat sans fin ! En cette période de vaches grasses, il faut se serrer la ceinture. Ce matin... (Commentaires.) De vaches maigres, pardon ! Ce matin, lors de la présentation du budget 2015, le Conseil d'Etat nous en a fait la démonstration. Se serrer la ceinture demande des sacrifices, demande des arbitrages à tous les niveaux, avec parfois des ambitions qui doivent être revues à la baisse. C'est malheureux, mais quand les moyens financiers manquent, il est nécessaire de faire des choix raisonnables. Et j'espère que c'est ce choix raisonnable que notre Grand Conseil fera ce soir.

Le président. Il vous reste quinze secondes.

M. Ivan Slatkine. Avant de conclure, permettez-moi de dire que le cinéma romain... le cinéma romand ! et la culture de manière plus générale méritent un débat de bonne tenue. Aucun parti politique n'a le monopole sur la culture; la culture est universelle, elle est le reflet de notre patrimoine, elle est apolitique.

Le président. Il vous faut conclure !

M. Ivan Slatkine. La culture est essentielle, il n'y a pas de doute qu'elle mérite l'attention et le soutien des autorités politiques, mais ce soutien doit être raisonnable et en adéquation avec nos moyens financiers.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je passe la parole à Mme la conseillère d'Etat Anne Emery-Torracinta. Après, nous voterons.

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la culture fait partie intégrante de l'identité d'un peuple; le cinéma fait partie de la culture. Souhaitez-vous, Mesdames et Messieurs les députés, que nous n'ayons que des films américains dans nos salles ? Actuellement, le cinéma américain représente 75% du marché en Suisse, notamment les blockbusters, les grosses productions, largement subventionnées par l'Etat américain d'ailleurs et, pour les films de guerre, par le Pentagone lui-même. Est-ce cela que nous voulons pour la Suisse ?

Mesdames et Messieurs les députés, vous savez également que l'identité romande est en jeu aujourd'hui. Vous avez peut-être vu avec le débat sur les langues que, dans le reste de la Suisse, on s'interroge sur l'intérêt qu'il y a ou non d'enseigner encore le français. Si on veut donc défendre notre identité dans ce pays, nous devons utiliser tous les moyens qui permettent d'utiliser notre culture, et le cinéma romand en est un.

Le cinéma coûte extrêmement cher. Il n'est plus possible aujourd'hui de faire un film facilement. C'est bien pour cela que les collectivités publiques interviennent - et pas seulement d'ailleurs les collectivités publiques, pas seulement les cantons et les communes, mais également la Confédération et la télévision, par exemple. Pour mieux soutenir le cinéma romand, dès 2008, l'idée est née de créer une fondation romande pour le cinéma; cette fondation s'est concrétisée en 2011. L'idée était de mutualiser, et je crois qu'il s'agit de termes que ce parlement - en tout cas une partie - entend volontiers: les économies d'échelle, la mutualisation.

A l'époque, on pensait débuter avec l'octroi de 10 millions de francs annuels au cinéma. La question de la clef de répartition entre les collectivités publiques s'est posée et on a regardé quel était le pourcentage des productions dans les différents cantons. Comme Genève avait la moitié des productions du cinéma romand, on est parti de l'idée que 5 millions de francs devraient à terme être apportés à la fondation par les collectivités publiques genevoises, à la fois la Ville et le canton de Genève. C'est pour cela que le premier projet de loi qui vous avait été proposé était progressif, dans l'idée que, petit à petit, on atteigne des montants de 2,5 millions de francs pour la Ville de Genève et 2,5 millions pour le canton de Genève.

Le premier projet de loi vous a été proposé pour l'année 2011 et l'année 2012. Il devait porter également sur 2013 et 2014, et la commission des finances, à l'époque, avait souhaité le maintenir sur deux ans, ce qui explique le temps pris pour l'analyse du premier travail effectué, le vote du parlement, etc. Si bien qu'on a déposé relativement tard le projet pour les quatre années suivantes. Toutefois, quand on a voté le premier projet sur deux ans, le conseiller d'Etat de l'époque, M. Charles Beer, avait bien annoncé, en toute transparence, à la commission des finances, qu'on pensait augmenter régulièrement la subvention dans les années qui suivent. J'étais membre de la commission, je me le rappelle parfaitement. Il n'y a donc eu aucune tromperie et aucune volonté de cacher quoi que ce soit de la part du Conseil d'Etat, dans les demandes de subventions qui vous ont été faites pour le budget 2013 et pour le budget 2014. Pour 2013, c'était normalement 2 millions de francs et pour 2014, somme d'ailleurs votée par le parlement dans le cadre du budget 2014, c'était 2,125 millions de francs. Je regrette donc infiniment qu'une majorité de ce parlement veuille au bout du compte diminuer la subvention, mais voilà, c'est le jeu démocratique. Le gouvernement propose, le parlement dispose !

Toutefois, ce qui est important ce soir, c'est que vous puissiez donner un signe à la Fondation romande pour le cinéma et que vous puissiez libérer cet argent. Parce que, pour le moment, pour 2014, nous n'avons rien payé et la fondation doit aussi pouvoir honorer ses engagements.

Pour répondre à celles et ceux qui pensent que cette fondation pratiquerait le copinage et que seuls quelques cinéastes seraient financés, sachez qu'il y a des commissions d'experts qui examinent ces films, que ces commissions sont renouvelées chaque fois, qu'à l'intérieur de ces commissions siège toujours au moins une personne extérieure à la Suisse, qui ne connaît pas forcément les uns et les autres et qui n'est copine, si j'ose dire, de personne.

Je crois que c'est faire un mauvais procès à la Fondation romande pour le cinéma de penser qu'il faudrait jeter le bébé avec l'eau du bain, simplement parce qu'il y a peut-être un cinéaste mécontent de ne pas avoir reçu de soutien une fois. J'ajoute à ce propos que la Cour des comptes avait été sollicitée par cette même personne qui nous arrose de courriels régulièrement, et M. Rappaz a fait une lecture très exhaustive du dernier message qui nous a été envoyé. Eh bien, la Cour des comptes a refusé d'entrer en matière, et vous savez qu'un refus de la Cour des comptes, ce n'est pas un refus en l'air, c'est un refus après une première étude. La Cour des comptes étudie toujours un dossier et rend ensuite une décision d'entrée en matière ou non, déjà avec quelques pages d'explications. La Cour des comptes avait donc refusé d'entrer en matière et ce même cinéaste s'est adressé à l'autorité fédérale de surveillance. A force d'insistance, cette autorité a effectivement posé des questions à la fondation. La fondation coopère et répond, il n'y a aucun problème de ce côté-là, mais sachez, Mesdames et Messieurs les députés, que quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage, et si on veut tuer la Fondation romande pour le cinéma, on dira précisément qu'elle subventionne n'importe qui et qu'il n'y a pas plus de trente ou quarante spectateurs par film.

Je vous donnerai juste deux exemples de films récents qui ont eu beaucoup de succès: l'un plaira certainement à l'UDC, c'est «L'Expérience Blocher» de Jean-Stéphane Bron, qui a été nommé aux Prix du cinéma suisse 2014, et un film qui a fait une belle carrière internationale, «L'Enfant d'en haut» d'Ursula Meier, Ours d'argent au Festival du film de Berlin en 2013. (Brouhaha.) Il ne s'agit donc pas de films confidentiels, il s'agit bien de films à succès. (Le président agite la cloche.) Je vous en conjure donc, Mesdames et Messieurs les députés, donnez un signe positif à la Fondation romande pour le cinéma et votez ce projet de loi. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous sommes au vote d'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 11301 est adopté en premier débat par 62 oui contre 28 non et 4 abstentions.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'article 1.

Le président. A l'article 2, alinéa 1, nous avons un amendement de M. Mettan:

«Art. 2, al. 1 (nouvelle teneur)

1 L'Etat verse à la Fondation romande pour le cinéma un montant de 2 000 000 F en 2013, 2 000 000 F en 2014, 1 800 000 F en 2015 et 2 000 000 F en 2016, sous la forme d'une aide financière de fonctionnement au sens de l'article 2 de la loi sur les indemnités et les aides financières, du 15 décembre 2005.»

Monsieur Gautier, vous avez la parole.

M. Renaud Gautier (PLR). Merci, Monsieur le président. J'ai une petite question de procédure. Dans la mesure où, dans le budget, la ligne afférente à cette affaire se monte à plus de 2 millions de francs, si par un heureux hasard cet amendement était voté, est-ce qu'on a l'assurance que 2 millions seulement seront payés pour cette année ?

Le président. Madame la conseillère d'Etat, voulez-vous répondre ?

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. J'ai envie de vous dire: hélas, oui, Monsieur le député ! Non, vous le savez, le budget est une autorisation de dépenses. A partir du moment où vous décidez autre chose, il est évident que ce sera cette autre chose qui sera appliquée.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat, pour cette réponse. La parole est à M. le rapporteur de majorité Ivan Slatkine.

M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Contrairement à la majorité de circonstance qui a amené à refuser ce projet de loi lors du troisième débat, je fais partie de ceux qui pensent que la création de la fondation Cinéforom est une démarche qui a tout son sens dans un secteur comme celui du cinéma et de la culture de manière plus générale. Il faudrait appeler de ses voeux que de telles structures se mettent en place dans d'autres domaines culturels.

A présent, contrairement à ce que le rapporteur de minorité a tenté de vous expliquer, les membres du PLR sont favorables à une telle structure tout en rappelant les réalités budgétaires et financières qui sont les nôtres. Sans vouloir revenir sur l'ensemble du débat mené ici et en commission, je tiens à relever que la rigueur budgétaire nous impose, à l'instar de nos amis vaudois, de maintenir notre aide au cinéma, mais avec les moyens qui sont les nôtres. Ce matin, je l'ai dit tout à l'heure, le Conseil d'Etat nous a présenté un budget de rigueur et cette rigueur se justifie vu l'état de notre dette qui est une épée de Damoclès sur les générations futures, mais aussi sur la qualité de notre Etat social. Car sans moyens suffisants, il ne sera tout simplement pas possible de répondre aux besoins des plus démunis. En soutenant l'amendement qui vous est proposé, on permet à la fondation Cinéforom de fonctionner normalement ces deux prochaines années. Certes, les moyens sont un peu plus faibles que prévu, mais on peut espérer que la Loterie romande, section genevoise, pourra contribuer au financement complémentaire de cette fondation, comme le fait son homologue vaudoise, suite au gel de la subvention de la Ville de Lausanne et du canton de Vaud, sur la base des montants 2012.

En période de difficultés budgétaires, il faut être solidaire et responsable, et en soutenant l'amendement proposé, nous adaptons le contrat de prestations aux réalités financières qui sont les nôtres, tout en démontrant que l'objectif de notre Grand Conseil n'est pas de renier les engagements pris, mais simplement de les adapter à la réalité. Afin de ne pas remettre en question la fondation Cinéforom, je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à soutenir l'amendement.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. La parole est à M. le rapporteur de minorité. Ensuite, nous voterons.

M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Les socialistes ne partagent pas l'analyse budgétaire faite par le rapporteur de majorité.

J'aimerais dire que je prie les députés PLR d'accepter toutes mes excuses pour mes propos excessifs précédents, et je prends bonne note des recommandations que Renaud Gautier m'a adressées en passant par le président.

Concernant les montants proposés par cet amendement, c'est vrai qu'ils ne satisfont pas les socialistes, puisqu'ils ne correspondent pas aux engagements initiaux. Dans le même temps, ils permettent à cette fondation de poursuivre son existence, et donc, pour cette raison, nous soutiendrons cet amendement.

Je rappellerai, comme cela est évoqué dans les rapports, que 50% des productions romandes sont aujourd'hui créées à Genève. Ce sont des emplois, c'est de l'intelligence culturelle, c'est de la créativité et je pense que nous devons garder ces valeurs, ces projets à Genève. Et il est extrêmement important de donner une chance à cette fondation, même avec des moyens restreints.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je rappelle l'amendement de M. Mettan sur lequel nous votons:

«Art. 2, al. 1 (nouvelle teneur)

1 L'Etat verse à la Fondation romande pour le cinéma un montant de 2 000 000 F en 2013, 2 000 000 F en 2014, 1 800 000 F en 2015 et 2 000 000 F en 2016, sous la forme d'une aide financière de fonctionnement au sens de l'article 2 de la loi sur les indemnités et les aides financières, du 15 décembre 2005.»

Le scrutin est ouvert... (Brouhaha.) Le scrutin va être ouvert ! Voilà, le scrutin est ouvert.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 66 oui contre 19 non et 12 abstentions.

Mis aux voix, l'article 2 ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'article 3 est adopté, de même que les articles 4 à 10.

Le président. Le troisième débat est reporté à la prochaine session, le temps d'adapter le contrat de prestations. (Vifs commentaires.) Oui, comme dans toute convention, on doit modifier le contrat avec l'institution et ce sera fait pour la prochaine session. Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas la première fois que nous avons un projet LIAF, modifié avec des amendements ! Le troisième débat a toujours été reporté à la session ultérieure, le temps que le contrat de prestations soit adapté avec l'institution concernée et signé par le Conseil d'Etat et l'institution. (Le président est interpellé.) Ce n'est pas une nouveauté. C'est comme ça ! (Commentaires.)

Troisième débat: Session 12 (octobre 2014) - Séance 76 du 09.10.2014

M 2220
Proposition de motion de Mmes et MM. François Lefort, Martine Roset, Sophie Forster Carbonnier, Bertrand Buchs, Lisa Mazzone, Emilie Flamand-Lew, Jean-Luc Forni, Roger Deneys, Bernhard Riedweg, Jean-Charles Rielle, Jean-Marc Guinchard, Olivier Cerutti, Anne Marie von Arx-Vernon, Isabelle Brunier, Boris Calame, Jean-Michel Bugnion, Christian Frey, Philippe Morel, Irène Buche, Mathias Buschbeck, Frédérique Perler pour une prison intercantonale : abandonnons le projet de la prison des Dardelles !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XI des 18 et 19 septembre 2014.

Débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous en sommes à la M 2220. Il s'agit d'un débat classé en catégorie II - trente minutes. Monsieur Lefort, vous avez la parole.

M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. Le gouvernement nous a annoncé ce matin un changement de cap, j'en ai rappelé les grandes lignes tout à l'heure. Nous lui proposons de dépasser ce cap et lui demandons de s'engager dans des projets intercantonaux pour le futur et non dans des aventures solitaires et surtout coûteuses. Nous lui présentons donc ces demandes raisonnables pour mettre fin au projet pharaonique de prison dite des Dardelles.

Quelles sont ces demandes raisonnables ? C'est d'abord d'abandonner l'étude de ce projet de prison. (Brouhaha.) Monsieur le président, s'il vous plaît ! Merci. C'est d'abord d'abandonner le projet de prison des Dardelles tel que présenté en commission des travaux et pour lequel un crédit d'étude de 16,5 millions de francs a été voté par le Grand Conseil le 29 novembre 2013. Pourquoi ? Pour étudier un projet de construction de prison intercantonale sur des terrains disponibles de sites pénitentiaires d'autres cantons qui satisfont aux besoins des cantons concordataires, dans le cadre du concordat sur l'exécution des peines dans les cantons latins, et donc en collaboration avec les cantons latins; et seulement en cas d'échec de cette solution intercantonale, en cas d'échec des négociations, d'étudier alors la possibilité de construire un établissement plus important le long du chemin de Champ-Dollon, au sud-ouest des prisons actuelles, en remplacement du projet des Dardelles.

Nous rappelons que ce crédit d'étude pour un projet d'établissement d'exécution de peine de 450 places n'a été accepté ici que par 40 voix contre 36 abstentions, de nombreux députés s'étant d'ailleurs aussi absentés. Il y avait déjà comme un malaise ! Ce malaise a grandi, puisque après le vote du crédit, le Grand Conseil a renvoyé au Conseil d'Etat la pétition 1889 faisant état des inquiétudes des habitants de Puplinge, que nous traiterons demain. Les auditions, lors de l'étude du projet de loi comme de la pétition, ont montré les très fortes réticences et les nombreuses questions que soulève le projet de construction.

Il est clair que le malaise suscité l'hiver dernier par ce projet des Dardelles n'a fait qu'augmenter. Les coûts de construction sont élevés. La facture finale est de près de 340 millions de francs, soit près de 755 000 F par place de prison. Sans oublier qu'il faudra aussi faire fonctionner cette prison dans le futur. Cette structure a un coût de fonctionnement pas encore annoncé, mais qu'on peut imaginer, avec un taux d'encadrement genevois de 0,49 gardien par place de prison: ce sont 220 gardiens au moins qu'il faudra engager. Enfin, l'emplacement du futur bâtiment, au sud-est de Champ-Dollon, en direction de Puplinge, n'est pas accepté par la population de Puplinge, pas plus que par AgriGenève, l'association faîtière des paysans, qui sont eux opposés à la perte de 20 hectares de zone agricole, dont 17 hectares de surface d'assolement.

Le président. Vous prenez sur le temps du groupe.

M. François Lefort. Tout cela annonce des recours et, donc, des retards. Tout cela s'annonce sous les auspices défavorables d'un budget resserré, dans lequel l'Etat a fait la chasse aux moindres économies, comme vous nous l'avez montré ce matin, Madame et Messieurs les conseillers d'Etat. Economiser partout pour pouvoir construire et faire fonctionner une prison, voilà ce que la population pourrait retenir des priorités du Conseil d'Etat pour ces quatre prochaines années ! C'est un projet politique qu'il sera certainement difficile de faire accepter à une population qui manque de logements, dont les enfants s'entassent dans des collèges en attente de rénovations et pour laquelle l'offre en transports publics, déjà en recul, va encore stagner de nombreuses années.

Il semble aujourd'hui évident que la solution d'une prison intercantonale n'a pas été suffisamment évoquée avec les cantons concordataires lors de la préparation de ce projet de loi, alors qu'elle s'avère sans doute la meilleure solution pour tous les membres du concordat. Il semblerait d'ailleurs que les coûts de construction soient aussi moins chers ailleurs qu'à Genève puisque le canton de Vaud a inauguré le 29 août, après seulement vingt mois de travaux, une extension de 80 places dans la colonie pénitentiaire de la plaine de l'Orbe, pour un coût de 17,5 millions de francs: à peine plus que le crédit d'étude des Dardelles ! (Commentaires.) Monsieur Barrillier, laissez-moi finir ! Il semblerait que cela soit aussi plus rapide ailleurs, puisqu'en deux ans le même canton a créé 250 places de détention.

Il faut aujourd'hui avoir le courage d'avouer que Genève n'a plus les moyens financiers et territoriaux pour ce projet, qu'il y a d'autres priorités, dans les transports publics nécessaires, dans la construction des collèges, dans l'entretien des bâtiments publics. Genève ne peut plus tout faire et la priorité n'est pas une prison de 450 places qui va affecter le budget de l'Etat pour de nombreuses années par son coût de construction et de fonctionnement. Comme d'ailleurs M. Longchamp l'a avoué en commission des travaux l'année dernière, Genève ne construira pas grand-chose pendant quatre ans, à part la prison !

Le président. Il vous reste une minute.

M. François Lefort. Je termine, Monsieur le président. La solution concordataire est la solution raisonnable. Nous vous remercions de renvoyer cette motion directement au Conseil d'Etat et, bien sûr, je demande le vote nominal.

Le président. Est-ce que vous êtes soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Très bien. En attendant, nous poursuivons le débat. La parole est à M. Eric Stauffer.

M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, vous venez d'entendre mon préopinant et on comprend bien sa culture politique: tout sauf la sécurité ! Donc, tout est bon à mettre dans la balance, les TPG, les subventions, les espaces verts, les pistes cyclables. Tout, sauf les prisons ! Bon, au MCG, nous avons une vision un tout petit peu différente de la sécurité à Genève, il faut dire ce qui est.

Cela dit, c'est vrai que Genève fait partie d'un concordat latin. C'est vrai aussi que Genève est en retard d'une cinquantaine d'années sur la construction de Curabilis dans le cadre du concordat latin. C'est vrai aussi que 19 millions, ou 16 millions de francs, pardon, c'est beaucoup pour un crédit d'étude: tout cela est vrai, mais la politique de la sécurité et la sécurité de nos concitoyens devraient primer.

Le MCG est donc prêt à soutenir cette motion, sauf si le conseiller d'Etat ici présent prend devant ce parlement l'engagement solennel d'étudier toutes les possibilités afin de construire une prison romande. Il pourra en témoigner, je fais partie de la conférence des concordats latins, et avec nos collègues des autres cantons, j'ai expliqué à réitérées reprises que la sécurité n'est plus une affaire cantonale, mais une affaire régionale. (Commentaires.) Il n'y a que dans notre pays que l'on voit que, dans chaque canton, on a des prisons de détention provisoire, pour les exécutions de peines et pour les articles pour les mesures. Il n'y a que dans notre pays qu'on voit ça, mais c'est vrai que nous faisons partie d'une Confédération et qu'il faut faire avec. Mais nous ne voulons pas de cette manoeuvre des Verts, parce que l'idéologie que vous défendez n'est pas du tout en faveur de la sécurité. C'est «tout le monde il est gentil, tout le monde il est cool». Finalement, il faudrait légaliser toutes les drogues, comme ça on n'aurait plus de criminels et tout irait bien. (Brouhaha.) Nous n'avons pas la même philosophie, et c'est la raison pour laquelle, si le conseiller d'Etat prend l'engagement solennel d'étudier toutes les possibilités de construire un établissement romand avec nos cantons voisins, peut-être que le MCG renoncera à soutenir cette motion. Mais nous attendons cet engagement formel. Je vous remercie.

Mme Christina Meissner (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai que le 29 novembre, nous avons voté ce crédit. Enfin, certains ont voté le crédit pour la prison des Dardelles, à 40 voix pour et 36 abstentions. Cela revenait bel et bien à montrer qu'il y avait un malaise, un malaise que nous partageons à l'UDC. Nous avions, à ce moment-là, déjà dit au conseiller d'Etat: des prisons, il en faut, clairement ! Les Verts ne pensent pas qu'il faut enfermer les gens, mais les laisser dans la rue ! (Brouhaha.) Ce n'est pas le cas de l'UDC: l'UDC veut de la sécurité, mais pas à n'importe quel prix. Et le prix que nous devons payer pour les Dardelles est à notre goût totalement inacceptable. (Le président agite la cloche.) Ce prix, qui va osciller entre 340 et 400 millions de francs pour 450 places, qu'est-ce que cela représente ? C'est plus de 750 000 F par place, sans compter les frais d'exploitation. (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît !

Mme Christina Meissner. Aujourd'hui que nous avons des problèmes budgétaires - nous l'avons vu ce matin - il y a des gens qui ont de la peine à boucler leurs fins de mois, et nous allons dépenser autant pour des places de prison ? C'est inacceptable ! Et quand on sait que dans nos prisons, à Genève, il y a plus de 93% de personnes qui n'ont aucun lien, mais aucun lien avec notre canton, eh bien, pour l'UDC, c'est inacceptable ! Vous connaissez la solution de l'UDC: c'est clair, ces gens-là n'ont rien à faire sur notre territoire et devraient être renvoyés chez eux ! Raison pour laquelle nous devons aussi prendre en considération toutes les autres possibilités. (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît !

Mme Christina Meissner. Enfin, je rappellerai que nous sommes très attachés à ce qui se passe aussi dans la région. Nous avons reçu une pétition des habitants de Puplinge. Ces habitants, on ne veut pas les retrouver eux-mêmes pris entre des fils de fer barbelé de diverses prisons. Ça, ça ne va pas ! On leur a déjà supprimé leur dernière forêt, et avec la nouvelle extension de prison on va leur enlever les terrains agricoles qui les séparent encore de tous les projecteurs d'éclairage qu'il y a aujourd'hui. Non, il n'est pas acceptable aujourd'hui de faire subir cela à nos habitants...

Le président. Il vous reste trente secondes !

Mme Christina Meissner. Je prendrai sur le temps de mon groupe si j'en ai encore et si vous le permettez. Non, je n'en ai plus ?

Le président. Vous vous exprimez sur le temps du groupe et il vous reste trente secondes, Madame !

Mme Christina Meissner. D'accord, j'ai mes trente secondes. (Commentaires.) Je voudrais ajouter une dernière chose, c'est qu'il existe des alternatives et qu'en appuyant cette motion, l'UDC veut envoyer un message clair au conseiller d'Etat: examinez les alternatives, surtout avec les autres cantons romands ! La sécurité, c'est une affaire sinon cantonale, du moins régionale et nationale.

Le président. Il vous faut conclure.

Mme Christina Meissner. Nous ne pouvons pas travailler sur un territoire exigu comme le nôtre, avec des coûts tels que vous nous les proposez. C'est inacceptable pour l'UDC et nous soutiendrons cette proposition de motion.

Mme Martine Roset (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, en préambule, je prie mon collègue Genecand de m'excuser, mais je vais encore parler de SDA, soit de surfaces d'assolement. A l'heure où je vous parle, nous avons 104 hectares de SDA de marge par rapport au quota fédéral qui nous est imposé. 17 hectares pour les Dardelles, cela permet de loger 450 détenus. 17 hectares de SDA déclassés en zone 4A, cela permet de loger 2000 personnes ! Nous devons fixer des priorités d'utilisation des SDA, et pour le PDC, le logement prime !

Par ailleurs, le Conseil d'Etat et ce même Grand Conseil incitent les communes à pratiquer l'intercommunalité pour la construction de bâtiments publics, notamment dans le but de rationaliser les coûts. Nous demandons la même chose, mais au niveau intercantonal. En conclusion, si nous voulons rapidement ouvrir de nouvelles places de prison, pour nous, l'intercantonalité est la solution.

M. Jacques Béné (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, on est en plein délire, parce qu'on croit qu'on est dans un débat budgétaire. D'un côté, on a les Verts - ou les «tablards» selon la presse. Les Verts ne s'opposaient absolument pas à la prison des Dardelles: ils se sont abstenus et c'est un projet de loi qui est passé aux extraits ! Par contre, quand il s'agit de voter 300 millions de francs pour un dépôt des TPG, pour les Verts, il n'y a pas de problème. Ça n'est jamais assez cher, un dépôt TPG ! D'un autre côté, l'UDC nous parle aussi de problèmes budgétaires mais nous invite à voter dans quelques jours 600 millions pour une traversée totalement obsolète. (Commentaires.) On est en plein délire !

Mesdames et Messieurs, notre ministre de la sécurité, en novembre 2012, quelques mois seulement après avoir repris le département, a présenté une planification pénitentiaire dont la prison des Dardelles est un des piliers. Il n'y a pas eu de commentaires, si ce n'est effectivement de la part des Verts et d'une partie de la gauche concernant la détention administrative, mais ça, on connaît ! On n'est plus au pays des Bisounours, mais il y en a qui y croient encore ! Le crédit a été voté en novembre 2013, après sept séances de commission, et tout a été étudié, tout a été dit. C'est vrai que c'était un nouveau parlement et on était aux extraits, Mesdames et Messieurs !

Alors quand on veut parler de sécurité sans arriver à assumer les engagements qu'on a pris il y a plus de quarante ans, je vois mal comment on pourrait faire subir ça aux cantons voisins qui n'ont pas plus envie que nous de construire une prison. Il n'y a rien de ludique dans la construction d'une prison. Par contre, dans ce parlement, j'ai souvent entendu dire «la sécurité pour tous». On est prêt à voter des crédits pour augmenter le nombre des policiers, mais si c'est pour qu'ils n'arrêtent pas les voyous qui polluent notre cité, je n'en vois pas l'intérêt. Et quand je vois le PDC qui s'est plaint à plusieurs reprises de la surpopulation carcérale à Champ-Dollon, également par des motions... A Champ-Dollon, Mesdames et Messieurs, la majorité des détenus sont en exécution de peine: ils n'ont rien à faire dans une prison préventive et on devrait effectivement les mettre dans cette nouvelle prison. Mesdames et Messieurs, il faut être sérieux !

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Jacques Béné. Après deux ans, on remet en question la planification pénitentiaire ! Je proposerai quelques amendements aux invites du texte, car si on vote cette motion telle qu'elle est, je pense que non seulement les Vaudois, mais également la population, pourront nous traiter de «tablards». (Commentaires.)

M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes accueillent avec intérêt et satisfaction cette proposition de motion, parce qu'elle pose de véritables questions. Contrairement à ce qu'a dit l'UDC tout à l'heure, c'est très clair pour les socialistes: si des criminels sont arrêtés, il faut éviter qu'ils puissent courir dans la rue pour récidiver. Dans ce sens, oui, ça coûte cher, mais nous devons nous équiper des places de prison nécessaires pour éviter la récidive. Et ça, c'est le souci de base quand on se préoccupe de sécurité et, pour les socialistes, c'est fondamental.

Cela dit, on doit quand même se poser la question de la localisation de cette prison. C'est vrai que Champ-Dollon a été construit à une autre époque, avec un autre développement du canton. Aujourd'hui, il est légitime de s'interroger sur la localisation de cette prison et, aussi, sur les conséquences budgétaires à court terme d'une telle construction. On peut penser qu'elle est nécessaire avec la taille qui est envisagée; on peut aussi estimer que certaines peines pourraient être purgées sous d'autres formes que la détention, et cette question de la taille et de la localisation doit nous faire réaliser qu'une prison n'est plus comme à l'époque du premier concordat romand un instrument cantonal. La délinquance ne connaît plus les frontières, la délinquance ne connaît plus les cantons: pour cette même raison, il n'y a pas de raison d'envisager la sécurité en termes uniquement cantonaux, peut-être même qu'il faut la considérer en termes nationaux. D'ailleurs, ce n'est pas pour rien qu'après, on veut envisager les problématiques de façon plus globale. Dans ce sens-là et en raison de l'exigu... Oh, je n'y arriverai jamais !

Une voix. L'exiguïté !

M. Roger Deneys. L'exiguïté du territoire genevois, merci ! ...on peut s'interroger sur la pertinence de la réalisation d'une grande prison, en lieu et place, par exemple, des logements que la population genevoise attend. Cette pesée d'intérêts fait que les socialistes accueillent bien volontiers ce texte. C'est un premier pas pour nourrir la réflexion. Il faut construire une prison, certainement; il faut la réaliser de façon appropriée en termes de taille et il faut essayer d'en minimiser les coûts, néanmoins, et ne pas enfermer à tout-va en prison des gens qui n'ont rien à y faire ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député François Lefort. Il vous reste cinquante secondes.

M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. Nous avons reçu sur notre table l'amendement de M. Béné qui propose la suppression de la première invite. Bien essayé, mais évidemment je vous invite à surtout ne pas voter la suppression de la première invite. Merci, Monsieur Béné, mais nous attendons le prochain amendement.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Carlos Medeiros, pour trente secondes.

M. Carlos Medeiros (MCG). Monsieur le président, le MCG vous l'a dit par les paroles de notre collègue Eric Stauffer, la sécurité n'a pas de prix. Les problèmes budgétaires n'ont rien à voir avec ça, mais effectivement, pour une question d'éclaircissement de la part de notre magistrat, nous proposons que la motion soit renvoyée à la commission des travaux.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je prends note. La parole est à M. le député Jean-Michel Bugnion.

M. Jean-Michel Bugnion (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je voulais juste ici vous rappeler un chiffre intéressant. Vous vous souvenez que la criminalité a baissé en 2013 et que le sentiment d'insécurité, paradoxalement, a augmenté...

Le président. Il vous reste quinze secondes.

M. Jean-Michel Bugnion. ...jusqu'à atteindre 49%. Cela signifie que la satisfaction des habitants en matière de sécurité n'est pas directement corrélée au nombre de policiers et de places en prison.

Le président. Il vous faut conclure.

M. Jean-Michel Bugnion. Parmi ces gens qui étaient dans l'insécurité, seulement 18% étaient contents de leur habitation.

Le président. C'est terminé, Monsieur Bugnion, je suis désolé.

M. Jean-Michel Bugnion. Démonstration que la sécurité prend aussi d'autres aspects, comme le bien-vivre !

Le président. Merci, je passe la parole à M. le député Bertrand Buchs, pour une minute quarante-trois.

M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président. Juste pour remettre cette motion dans le contexte: elle ne remet pas du tout en cause la politique de sécurité. Pas du tout ! Si on n'arrive pas à avoir un accord avec les autres cantons, la prison sera construite à Puplinge, peut-être à un autre endroit, mais on a déjà entendu que le Conseil d'Etat étudiait une autre possibilité pour la construction de cette prison à Puplinge. Une des invites a déjà été entendue.

Il faut faire des projets intercantonaux, et probablement, le bien de cette motion, c'est que si ça n'arrive pas pour les Dardelles, en revanche, pour la prochaine prison et la rénovation de Champ-Dollon, avec la possibilité de devoir mettre, j'allais dire les députés, mon Dieu ! les prisonniers ailleurs, eh bien, on aura un vrai projet intercantonal pour le futur. C'est comme ça qu'on doit construire la Suisse romande, par des projets intercantonaux et pas en continuant à faire chez nous ce qu'on peut faire avec les autres.

Je rappelle qu'on a déjà donné beaucoup en acceptant de faire Curabilis qui a coûté énormément d'argent au canton de Genève et qui va continuer à coûter énormément d'argent en frais de fonctionnement. (Applaudissements.)

Mme Jocelyne Haller (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, chacun réaffirme ici ses priorités et reproche paradoxalement aux autres d'en faire autant. On entend aussi des choses très surprenantes: on entend dire qu'en matière de sécurité, les questions budgétaires n'ont pas leur place. C'est intéressant, surtout aujourd'hui ! Finalement, on nous dit que la sécurité, c'est extrêmement important à Genève et qu'actuellement, ce serait même une question prépondérante. Et les autres ? Les autres domaines, ceux qui font aujourd'hui l'objet de coupes budgétaires ?

La sécurité, ce n'est pas uniquement la répression, c'est avant tout la prévention; c'est l'action sur les causes de l'insécurité. C'est aussi une réflexion sur l'origine des violences sociales qui génèrent l'insécurité. Mais ça veut dire qu'on s'en donne les moyens et un jour comme celui-ci, on devrait mettre dans la balance si, effectivement, il vaut mieux construire des prisons ou si, au contraire, il faut investir dans des budgets qui permettraient d'agir sur les causes de la violence sociale. C'est notre point de vue et nous vous invitons à le suivre.

Plus particulièrement, nous vous demandons de ne pas renvoyer cette motion en commission car ce ne serait qu'une manoeuvre dilatoire. Il est important de prendre une position claire. Réfléchir avec d'autres cantons sur la question de la sécurité et sur la question carcérale est important, mais vouloir faire de Genève un centre d'incarcération est simplement inopportun, disproportionné et quelque peu prétentieux, permettez-moi de le dire. (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît !

Mme Jocelyne Haller. C'est pourquoi nous vous invitons à soutenir cette motion.

Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. le conseiller d'Etat Pierre Maudet, et ensuite nous voterons.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, c'est une habitude en cette enceinte: à peu près tous les six mois, la prison est convoquée pour qu'on fasse son procès. Il y a un an, c'est parce qu'on n'enfermait pas assez et qu'il fallait d'urgence emprisonner tous ces délinquants dangereux, après un drame qui a, c'est vrai, secoué Genève. Il y a six mois, il fallait d'urgence construire de nouvelles places, parce que le Tribunal fédéral avait décrété que la situation était non seulement dégradée mais surtout dégradante. Aujourd'hui, c'est une autre motion qui, au gré de l'actualité, amène son lot d'interventions.

Alors, Mesdames et Messieurs, j'aimerais dire ici de façon extrêmement claire, et au nom du gouvernement, que, oui, pour aller dans le sens de M. Deneys, toute une série de questions se posent, et ces questions sont légitimes. Vous avez raison de vous les poser, mais vous ne pouvez pas poser les questions et apporter les réponses à travers la même motion, alors qu'il y a un an de cela, vous vous êtes engagés par 40 voix pour, 36 abstentions et 0 contre à ce que nous nous livrions à une étude, une étude qui a coûté. Parce que, je peux vous le confirmer ce soir, Mesdames et Messieurs, l'argent a été dépensé, quasiment en totalité, comme on s'y était engagé: 16 millions, pas 19 ! 16 millions de francs pour savoir, premièrement, si oui ou non il est opportun de construire une prison; deuxièmement, de quelle nature; troisièmement, à quel endroit, et quatrièmement, à quel prix. Ces réponses vont arriver, nous nous réjouissons de vous les donner. Il serait ce soir franchement stupide, disons-le, de s'empêcher de donner ces réponses - parce que c'est un peu ce que propose cette motion. Oui, concrètement, on dit qu'on abandonne tout. On ferme, on clôt et on n'en parle plus ! Voilà vraiment une aberration, si d'aventure cette motion devait être votée.

Pour ma part, je plaide, comme c'était prévu initialement, pour qu'on puisse en parler en commission des travaux, pour vous dire quel est le résultat de ce crédit d'étude. Pour vous dire aussi - et je veux répondre ici au préopinant MCG, parce qu'il a également posé des questions pertinentes - en quoi la dimension intercantonale joue un rôle, un rôle important. Je pense que la cheffe de groupe UDC tirerait profit d'entendre quelques éléments qui pourraient avantageusement l'aider dans un débat où elle s'est plutôt illustrée par des contrevérités. (L'orateur est interpellé.) Elle pourrait entendre quelques propos et notamment quelques chiffres qui l'édifieront: nous avons depuis de nombreuses années plus d'une centaine de détenus en exécution de peine que nous devons exporter et qui nous coûtent la bagatelle de 10 millions de francs par année, parce qu'on n'a pas de place pour eux dans notre canton. Parce que nous avons, en tout et pour tout, en raison d'une planification pénitentiaire défaillante, 68 places d'exécution de peine pour un canton d'un demi-million d'habitants ! Voilà la réalité ! La solidarité intercantonale joue son rôle, mais en faveur de Genève, pour un prix qui est aujourd'hui considéré par d'aucuns comme exorbitant.

La question qui va se poser - je me réjouis d'expliquer cela en commission - c'est dans quelle mesure cette solidarité dans les deux sens peut jouer. C'est vrai, nous avons ouvert Curabilis; c'est vrai aussi, nous profitons depuis cette année de la capacité de la prison pour mineurs des Léchaires, du côté de Palézieux, dans le canton de Vaud, et il sera intéressant de faire les comptes, de faire la démonstration en commission qu'aujourd'hui, c'est Genève qui a bénéficié de la solidarité intercantonale, plutôt que les autres cantons.

Il me semble aussi essentiel de rappeler ici que l'option intercantonale est juste - en cela, je salue la motion, parce que sur le principe elle pose une bonne question. Le problème est, Mesdames et Messieurs les représentants des Verts, qu'avec cette motion, vous la tuez ! Que donnez-vous comme message ? Vous dites: nous imposons, nous, Genevois, la solution vaudoise. Regardez et écoutez la réaction de votre magistrate cantonale vaudoise qui n'a pas vraiment apprécié la démarche ! Ecoutez le groupe des Verts dans le canton de Vaud qui ne l'a pas appréciée non plus ! Il se trouve que, par hasard, le chef du groupe des Verts dans le canton de Vaud est actif dans le canton de Genève. Faites simplement preuve de l'ouverture que vous souhaitez à travers cette motion ! (Applaudissements.) Parce que vous donnez des leçons ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Vous donnez des leçons, vous voulez exporter les problèmes avant de regarder notre propre capacité à les résoudre, et ce faisant, vous faites la démonstration d'une vision idéologique du problème. Vous ne voulez pas de places de prison, parce que vous considérez ici que c'est le nombre de places de prison qui définit le nombre de détenus. Voilà la politique sécuritaire que vous avez défendue durant des années et qui nous a amenés dans le mur ! Et ça, c'est inacceptable ! (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît !

M. Pierre Maudet. Vous, le groupe des Verts, vous proposez ici une solution dilatoire qui nous écarte de la politique qui a fait notre succès ces dernières années !

A l'inverse, nous avons un groupe dont je ne comprends pas la position ce soir, c'est l'UDC qui, à longueur d'année, nous rebat les oreilles avec l'exigence de sécurité, mais qui, à l'inverse, nous demande quasiment de faire en sorte de dégrader encore les conditions d'emprisonnement des gens, parce qu'une prison coûte toujours trop cher. Et là, j'interpelle les Verts ! A juste titre, ils nous disent à longueur d'année que la situation s'est dégradée dans les prisons et qu'il faut y remettre un peu de dignité. Mais que diable, la dignité, c'est précisément de refaire un peu de place ! De faire en sorte que les normes soient atteintes, que l'on puisse accueillir dignement les détenus qui restent des êtres humains ! Qu'avez-vous à répondre ici à l'UDC qui utilise ces arguments de manière inverse ? (Commentaires.)

Le président. S'il vous plaît, un peu de silence ! (Brouhaha.)

M. Pierre Maudet. Mesdames et Messieurs, je reviens au propos central.

Le président. Voilà ! Dans le calme et la bonne humeur.

M. Pierre Maudet. C'est la question fondamentale que pose cette motion. Oui, on peut se renvoyer dos à dos, pardonnez-moi d'avoir élevé la voix, mais chaque jour on doit gérer environ 900 détenus dans un espace prévu pour 387, dans une situation dont j'ai hérité à l'époque. Lorsque je suis entré en fonction, il y avait 690 détenus: 180% de surpopulation carcérale ! Je considère ici que je ne suis pas exactement à l'origine du problème. Pardonnez-moi d'avoir souligné en des propos un peu vifs les oppositions idéologiques qui se font face, mais qui illustrent ici l'impasse du propos.

En conclusion, Mesdames et Messieurs, ce que je vous invite à faire, c'est à aller au bout de la logique que vous avez voulue l'année passée, et à recevoir le résultat de l'étude que vous avez votée, les 16 millions de francs engagés, pour savoir précisément quelle est la réponse aux questions que j'ai posées tout à l'heure: où, quand, combien, pourquoi, avec qui. Toutes réponses que nous allons amener par ailleurs, parce que c'était prévu au menu.

Ne serait-ce que par respect pour les gardiens, pour celles et ceux qui tous les jours subissent cette situation, et parce que les approches idéologiques complètement dépassées nous ont menés dans le mur ces dernières années, dans le débat sur la sécurité, je vous invite ce soir, Mesdames et Messieurs, à une action responsable, cette action consistant purement et simplement à renvoyer cette motion en commission. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission des travaux, que je soumets à l'assemblée.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2220 à la commission des travaux est adopté par 50 oui contre 35 non et 4 abstentions.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, il est tard. Je lève la séance et vous donne rendez-vous demain à 15h.

La séance est levée à 22h35.