République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 3 avril 2003 à 20h45
55e législature - 2e année - 7e session - 35e séance
RD 481
Le président. Nous avons reçu une lettre de Mme Erica Deuber-Ziegler nous informant qu'elle démissionnait de son mandat de députée. Je prie Mme De Haller, secrétaire, de bien vouloir nous lire sa lettre de démission.
Il est pris acte de cette démission.
Le président. Mme Erica Deuber Ziegler a été élue députée en 1985, puis réélue à quatre reprises jusqu'aux élections de 2001. Durant seize années, Mme Erica Deuber Ziegler a fait résonner dans cette enceinte une voix claire, vibrante, passionnée, qui sonnait souvent juste. Intellectuelle engagée, elle restera dans l'histoire de ce parlement comme l'une des figures marquantes de l'utopie révolutionnaire, toujours soucieuse de replacer son combat dans les luttes mondiales, toujours capable de s'élever, par son intelligence et sa culture, au-dessus des mesquineries locales pour retrouver l'esprit cosmopolite, internationaliste de Genève. Elle va pouvoir désormais retrouver ses livres et ses manuscrits. Après la rosede Lausanne et les stallesde Genève, c'est certainement avec bonheur que nous retrouverons dans ses savants travaux sa plume érudite. Tant il est vrai que la ferveur de son engagement n'a jamais étouffé l'effervescence de sa recherche scientifique.
Dans tous les combats de la seconde moitié du XXe siècle, elle a répondu «présente». Détournant en partie les propos de la pasionaria, qui avait su l'inspirer - je vous rappelle que la pasionaria disait : «Mieux vaut mourir debout que vivre à genoux.» - on pourrait dire d'Erica Deuber Ziegler, notre pasionaria qui aime tant la vie : «Mieux vaut vivre debout que mourir à genoux.»
Une grande dame du parlement nous quitte et nous en restons tout nostalgiques. (Applaudissements.)
M. Christian Grobet (AdG). En tant que chef de groupe de l'Alliance de gauche au Grand Conseil, l'honneur m'échoit de m'associer à vos propos, Monsieur le président, au moment où Mme Erica Deuber Ziegler nous fait part de sa décision de démissionner du Grand Conseil.
J'avoue qu'après vos propos excellents et bien réflechis, comme à l'accoutumée, ma tâche est très ingrate. (Brouhaha.)Finalement, mieux vaut parler après vous pour dire que je n'ai plus grand chose à ajouter après ces compliments mérités.
Je voudrais revenir à la conclusion de votre compliment, Monsieur le président. C'est une grande dame qui nous quitte, avez-vous dit. Elle nous quitte, mais seulement dans cette salle, il ne s'agit pas d'un éloge funèbre. J'ai côtoyé Mme Erica Deuber Ziegler depuis 1985, année où elle a été élue. Cette députée - qui n'intervenait pas aussi fréquemment que certains autres dans son groupe - gardait ses parole pour les grandes occasions, dans lesquelles elle savait avec beaucoup de pertinence et d'élévation s'exprimer sur les questions fondamentales dont on débat au sein de ce parlement.
Elle avait bien sûr un sujet de prédilection, la protection du patrimoine, qui se situe peut-être au-delà des problèmes que certains qualifieraient de fondamentaux. En tant qu'historien et défenseur de notre patrimoine, vous aurez pu, Monsieur le président, apprécier la passion conjuguée avec la qualité scientifique des analyses de Mme Deuber Ziegler. C'est peut-être à ce titre que je regrette personnellement le plus qu'Erica Deuber Ziegler ne siège dorénavant dans ce Grand Conseil.
Vous avez eu raison de rappeler, Monsieur le président, qu'elle a été engagée dans beaucoup de luttes. Je crois qu'il faut tout de même dire qu'Erica Deuber était une de celles qui furent à la pointe du combat pour les droits des femmes et l'égalité des droits entre femmes et hommes. Elle a été extrêmement active - puisqu'elle habitait Russin - contre Verboix. Très à l'écoute et grande défenseur des minorités, quelles qu'elles soient, et, surtout, des gens de condition modeste, se souvenant elle-même de son enfance.
Voilà ce que j'avais à dire au nom de notre groupe. Je souligne encore que Mme Deuber Ziegler a eu beaucoup de malchance avec sa santé au cours de ces dix-huit derniers mois, puisqu'à peine élue au Grand Conseil elle a dû subir un opération à la hanche qu'elle avait différée. Au moment où elle pensait avoir recouvré la santé, elle a été frappée d'un autre mal qui a nécessité une autre intervention chirurgicale dont elle est en train de se remettre. Mme Deuber Ziegler a considéré qu'aussi longtemps qu'elle était en incapacité de travail, elle ne saurait siéger sur nos bancs et donner l'apparence d'être rétablie alors que tel n'était pas le cas. C'est la raison pour laquelle elle nous a manqué, et en particulier à nous, à l'Alliance de gauche.
Je voudrais évidemment, comme vous, Monsieur le président, lui souhaiter beaucoup d'activités passionnées pour l'avenir! Je ne crois pas que Mme Deuber Ziegler était tellement dans l'utopie révolutionnaire... Monsieur le président, bien que vous vous soyez un descendant de James Fazy, vous êtes aussi, peut-être, dans l'utopie révolutionnaire? Bien qu'aujourd'hui on soit plutôt réformiste...
Je ne doute pas que Mme Deuber Ziegler restera très active et je lui souhaite un prompt et définitif rétablissement! (Applaudissements.)