République et canton de Genève

Grand Conseil

P 1319-A
12. Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la pétition concernant la diminution du trafic automobile dans le village de Chancy. ( -) P1319
Mémorial 2000 : Renvoi en commissions, 7607, 8871.
Rapport de majorité de M. Christian Brunier (S), commission des transports
Rapport de minorité de M. Michel Ducret (R), commission des transports

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

Rapporteur : M. Christian Brunier

La Commission des transports a examiné cette pétition lors de ses séances des 20 février et 6 mars 2001 sous la présidence de M. Jean-Marc Odier.

Mme Michèle Kuhn, juriste de l'Office des transports et de la circulation, M. Philippe Matthey, secrétaire adjoint du DJPT, M. Louis Cornut, chef de division de l'aménagement local du DAEL, M. Jean-Daniel Favre, responsable du service des études de transports et d'infrastructures du DAEL, M. Jean-Bernard Haegler, ingénieur cantonal, du DAEL et M. Pierre-André Gesseney, urbaniste de l'Office des transports et de la circulation ont participé à ces réunions, totalement ou partiellement. MM. Jean-Luc Constant et Paul Kohler ont tenu les procès-verbaux de ces réunions.

M. Pierre Maulini résume la pétition. Celle-ci regroupe 3 revendications :

la modération du trafic à Chancy et le développement de la sécurité notamment en dissuadant le trafic poids lourds ;

la création d'une porte à chaque entrée du village, par exemple en plantant un arbre, pour sensibiliser les automobilistes à la traversée du village ;

la revitalisation du chemin de fer Chancy-Genève et de la gare de Chancy-Pougny, et la construction d'un parking à cet endroit.

Le problème de la circulation à Chancy ne date pas d'aujourd'hui. Chancy est un village-frontière que l'on traverse de plus en plus, sans s'y arrêter. L'unanimité se fait pour dire que cette situation est devenue intenable. On compte en effet quelques milliers de camions et de voitures par jour.

Pierre Maulini, conseiller municipal de Chancy, rappelle qu'une pétition a déjà été déposée au Grand Conseil en 1990 qui avait des buts similaires à celle qu'il défend aujourd'hui. Il signale que la solution ne se situe pas dans la construction d'une route de contournement. Une telle solution ne ferait que déplacer le problème et créerait des canaux de circulation pendulaire.

M. Maulini précise qu'il faut revitaliser la gare de Chancy-Pougny et la ligne Chancy-Cornavin afin de permettre un transfert modal. Il explique que la ligne La Plaine-Cornavin est très fréquentée. Il est prévu de la prolonger jusqu'à Bellegarde. Il serait toutefois incompréhensible que l'on n'y intègre pas, dans ce projet, la gare de Chancy-Pougny.

Concernant le trafic poids lourds, M. Maulini croit savoir que le Département de justice et police et des transports réfléchit actuellement à une déviation du trafic des camions par le Pays de Gex. Le ferroutage pourrait aussi constituer une solution.

M. Buhler commence par un bref historique de la problématique. Le maillage serré du village avec ses immeubles à bord de chaussé est à l'origine du problème. En 1976 déjà, on parlait de la solution de la route d'évitement du village. Pendant les années écoulées, le Conseil municipal a toujours réfléchi à la solution de la route de contournement et de desserte. Chancy est un cas exceptionnel. Situé sur l'ancienne route de Lyon, le village reste aujourd'hui un axe principal pour le trafic régional. Les villages avoisinants croissent, ce qui implique un trafic de transit toujours plus important. Les camions passent aussi par Chancy. Une fois le village traversé, ils ont en effet accès à l'autoroute. De plus, toute la plaine de Chancy est en zone de gravières, et l'exploitation de celles-ci implique de nombreux parcours de camions.

En 1994, poursuit M. Buhler, une pétition fut adressée au Département des travaux publics. M. Philippe Joye, à l'époque président du département, indiqua que si l'étude de faisabilité concluait qu'il n'existait pas d'autres possibilités que la route d'évitement du village, il créerait alors une commission pour finaliser cette solution. Ce qui fut le cas. La commission, qui regroupait aussi l'OTC et le DAEL, donna mandat à une entreprise privée. Cela aboutit, en 1999, à un projet définitif. Mais la commune de Chancy, dont le Conseil municipal s'était prononcé à 8 contre 2 en faveur de cette solution, eut la mauvaise surprise, en juin, d'apprendre que M. Moutinot avait décidé de geler le projet, alors même que M. Ramseyer lui écrivait que la solution valable était la route de contournement.

Au sujet de la réactivation de la gare de Chancy-Pougny, la commune de Chancy n'a rien contre dans la mesure où la ligne TPG de Chancy, qui marche très bien aux dires mêmes du directeur général des TPG, n'est pas remise en cause.

M. Buhler indique qu'il n'a pas d'objection au sujet de la pétition. En fait, selon lui, elle enfonce des portes ouvertes, car elle reprend ce qui a été dit depuis plusieurs années.

Le Conseil d'Etat parle à 2 voix et émet des positions totalement contradictoires.

Le Département de justice et police et des transports explique qu'il est gênant de soutenir les pétitionnaires, les interventions possibles étant limitées. Pour le DJPT, totalement fataliste, les pétitionnaires attendent une qualité de vie que nous ne sommes pas capables de leur assurer. Pour lui, toutes les solutions envisageables ont été testées.

Le DJPT a pris acte de la situation prévalant à Chancy. Il y a cependant un problème au niveau des gabarits du village. Ceux-ci ne permettent pas de procéder à une importante modération du trafic. Vu sa situation, il n'est pas possible d'éviter le transit des camions sur Chancy. Selon le DJPT, même la limitation à 30 km/h ne change pas grand-chose : les gabarits ne permettent de toute façon pas d'aller plus vite. La seule solution préconisée par le DJPT est de prendre, à moyen terme, des solutions radicales et de contourner ce village.

Ce département précise que l'on distingue plusieurs sortes de trafic dans la circulation. En l'espèce, les volumes apparaissent pour l'instant assez faibles, de l'ordre de 3000 véhicules par jour sur la route de Bellegarde et 2500 sur la route de Valleiry. Le DJPT indique encore que le trafic des camions est très variable. Il dépend en effet de la conjoncture. En période de haute conjoncture, il peut monter à 300 camions/jour. Ce sont des volumes que l'on retrouve dans certains quartiers de la Ville de Genève.

Quant à la gare de Chancy-Pougny, sa revitalisation pourrait s'avérer intéressante pour les habitants de Valleiry. Il sera par contre plus difficile de convaincre les habitants de Chancy. Dès le 3 septembre prochain, le RER en direction de Bellegarde s'arrêtera à Pougny, signale le DJPT. Le département travaille sur la valorisation de cette ligne et cherche à développer des routes de rabattement.

Le DAEL informe que, dans les années 70, sur demande pressante de la commune de Chancy, la possibilité d'une route d'évitement a été étudiée. On constata qu'elle n'était pas réalisable au bord du Rhône. Le coût projeté - 14 mio F (qui représente aujourd'hui quelque 20 mio F) - est dissuasif par rapport au résultat escompté. Une route plus modeste fut ensuite imaginée, mais elle causait trop d'atteintes au site. Cette solution n'était donc pas convaincante, et le département l'a mise de côté. Mais il ne resta pas inactif. Toute une panoplie des mesures de modération a été testée à Chancy.

Le DAEL, au cours de la législature précédente a réétudié le projet de route de contournement. Au terme de cette réflexion, le DAEL a été amené à préaviser défavorablement dans la mesure où il s'agissait d'une atteinte assez forte au paysage. De plus, le coût de l'ouvrage est également disproportionné et cette route chevaucherait des zones de développement et des zones agricoles. La position du DAEL a été communiquée à la commune de Chancy. D'autres itinéraires ont été envisagés. Actuellement, la piste d'une forte modération du trafic dans le village et d'un changement d'itinéraire des poids lourds est privilégiée. Une étude générale est en cours, dont les résultats et propositions de réalisation seront connus en automne 2001.

La commune de Chancy est traitée comme les autres communes, affirme le DAEL. Toutes les localités cherchent à se prémunir contre le trafic de transit. Le département explore d'abord toutes les pistes de modération du trafic plutôt qu'une solution de contournement qui ne fait souvent que repousser le problème sans le résoudre.

L'Alternative partage le point de vue des pétitionnaires. Toutes les actions permettant de promouvoir le transfert modal, le ferroutage, le développement des transports collectifs et l'amélioration de la qualité de la vie doivent être entreprises. L'Alliance de gauche, les Verts et les Socialistes ne partagent pas le fatalisme du DJPT et considèrent que plusieurs solutions n'ont pas encore été mises en place (zones 30 km/h, seuils de ralentissement, arrêts TPG sur les seuils, feux pour piétons, etc.). L'Alternative se réjouit de prendre connaissance de l'étude sur la modération du trafic à Chancy, actuellement en cours d'élaboration.

L'Alternative considère que la route d'évitement n'est pas une solution. Elle est trop onéreuse, atteint sensiblement au paysage, ne résout pas le problème du transfert modal indispensable pour la survie d'une telle région et est un mitage inadéquat de la zone agricole.

L'Alternative s'inquiète du manque de réflexion et de discussion au niveau transfrontalier concernant les problèmes de transport dans cette région. La solution, à moyen et long terme, passe par la négociation transfrontalière. Or l'attitude désabusée des autorités exécutives, aussi bien genevoises que françaises, est inadmissible.

Etant donné que les invites de la pétition sont judicieuses, que le DJPT considère que cette pétition n'est pas gênante, que la commune de Chancy ne s'y oppose pas et que le DAEL l'accepte, l'Alternative propose le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.

Pour la droite, il n'y a pas de solution possible à part la construction de la route de contournement. La droite combat cette pétition et propose de la déposer sur le bureau du Grand Conseil.

Vote concernant l'envoi de la pétition au Conseil d'Etat :

Vote concernant le dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil :

Pétition(1319)

Mesdames etMessieurs les députés,

Il est difficile de situer l'origine des premières interrogations, des premiers projets concernant la diminution du trafic automobile dans le village de Chancy. Cette question est en débat constant depuis trente ans environ. Bien que Chancy fut à l'origine une destination de village étape, elle est devenue au fil des ans un village traversé par une circulation pendulaire beaucoup trop importante, avec le cortège de nuisances que cela implique. Aujourd'hui, la sécurité des piétons n'est plus assurée, le passage des camions crée un grand danger, les habitants des maisons situées en bordure de route en subissent les conséquences.

Le débat sur la création d'une route de contournement a donné lieu à de nombreux projets, qui ne se sont jamais réalisés. Pour nous, ces projets créent plus de problèmes qu'ils n'en résolvent. Chancy est organisé autour de deux axes de développement;

celui, considéré historique, parallèle au Rhône, ancré sur l'espace central et le long duquel sont implantés les bâtiments publics, matérialisé par le mail arborisé.

celui, constitué par l'enchaînement, depuis l'entrée du village côté Genève, par la route de Bellegarde puis la route de Valleiry, représentant la plus grande longueur de fronts bâtis.

Perpendiculairement à ces axes, d'importantes relations spatios-visuelles existent, tant côté Rhône que côté Plaine agricole, relations auxquelles il importe de ne pas porter atteinte.

Construire une route de contournement c'est :

le déplacement des nuisances d'un endroit à un autre ;

la mise en place d'un canal encourageant la circulation pendulaire puisque celle-ci sera rendue plus fluide, plus rapide et plus dangereuse sur ses abords, où se situeront inévitablement de nouvelles habitations,

participer plus encore à l'engorgement de Genève,

une augmentation de la pollution atmosphérique,

le grignotage de la zone agricole par déclassement,

une atteinte grave à l'environnement spatio-visuel sur la plaine de Chancy,

une tranchée couverte de 140 mètres, en bordure d'une zone protégée (pour ce qui concerne le projet route de desserte 1996 CITEC MS).

Nous souhaitons par cette pétition,

que tout soit mis en oeuvre pour garantir la sécurité et la modération du trafic à Chancy notamment par des mesures de circulation dissuadant les camions s'alimentant et évacuant dans les gravières sur France de traverser notre village et de trouver ainsi une autre entrée sur Genève.

qu'on envisage la création d'une porte à chaque entrée du village, par exemple en plantant un arbre, et en alertant les automobilistes sur l'aspect villageois du secteur traversé, en s'inspirant en autres, d'une étude diagnostic de FAST réalisée en octobre 1990 déjà !).

d'examiner la possibilité de revitaliser la ligne de chemin de fer Chancy-Genève en réactivant la gare de Chancy-Pougny ainsi que d'y créer aux alentours un parking, ceci dans le cadre d'un projet transfrontalier.

Reprendre à cet égard l'examen de la pétition 859 au Conseil d'Etat signée par 234 citoyennes et citoyens de Chancy et déjà examinée par la commission des transports les 10 et 24 avril 1990 !

RAPPORT DE LA MINORITÉ

Rapporteur : M. Michel Ducret

La minorité de la Commission des transports ne peut que constater que les limites du possible en matière de modération du trafic transitant dans le village de Chancy sont quasiment atteintes.

En effet, les demandes formulées dans cette pétition émanant du comité « Sécurité et village durable » impliquent, contrairement à ce qu'affirment ses huit signataires, la réalisation d'une route de contournement de la localité. Et si la minorité peut comprendre les voeux d'une meilleure qualité de vie à Chancy, elle ne se fait pas d'illusions sur les effets des mesures supplémentaires de modération du trafic, même si celles-ci peuvent toujours être améliorées.

Il a d'ailleurs été relevé qu'il ne s'agit pas pour l'essentiel d'un problème de limitation de la vitesse des véhicules dans la localité, mais bien d'une inadéquation totale des rues de celle-ci avec un trafic de transit important, et particulièrement celui des poids lourds.

En ce sens, la minorité comprend et approuve la résolution du Conseil municipal de cette commune, approuvée à une large majorité et elle-même appuyée par le maire, M. Jean Buhler, qui comprend et approuve les raisons de la présente pétition, mais demandant nettement la réalisation d'une route de contournement de l'agglomération, ce qui rendra possible sa deuxième demande qui est d'interdire la circulation des poids lourds étrangers au village. Cette dernière mesure, accompagnée d'une demande d'effet immédiat, ne peut en effet être prise avant de pouvoir offrir un itinéraire de remplacement à un trafic de poids lourds qui, qu'on le veuille ou non, participe également de l'activité économique de notre canton.

Contrairement à ce qui est affirmé dans le texte de la pétition, le tracé retenu pour cette route d'évitement n'implique pas un « grignotage » de la zone agricole, car elle est en l'état prévue à la limite entre celle-ci et la zone de construction existante du village.

Il n'est par ailleurs pas question pour la minorité de la commission de penser éloigner le trafic poids lourds en l'obligeant (et non en l'incitant) à emprunter des itinéraires de rechange situés en France voisine, alors même que ceci ne serait acceptable qu'en y réalisant, là aussi, une voie d'évitement du village de Pougny ; ce procédé consistant à reporter systématiquement chez nos voisins les nuisances que nous ne voulons pas supporter et les problèmes que nous ne voulons pas résoudre (et assumer financièrement) est simplement scandaleux.

Quant à la dernière demande des pétitionnaires, concernant la revitalisation de la ligne de chemin de fer (Bellegarde) - Chancy - La Plaine - Genève, la minorité de la commission constate avec satisfaction que des mesures ont d'ores et déjà été prises pour revaloriser cette relation ; ce n'est que pour des raisons d'ordre technique et purement françaises, le tronçon Chancy-Pougny - La Plaine ressortant entièrement de la responsabilité de RFF (Réseau ferré de France), qu'elles n'entreront toutefois en vigueur qu'à l'automne 2001.

En ce qui concerne la desserte de la gare de Chancy-Pougny, elle est d'ores et déjà assurée par les autobus de la ligne K des TPG qui traverse le village de Chancy et qui, par là même, limite les possibilités de mesures de modération du trafic dans la localité, que ce soit pour des raisons de confort des usagers que pour l'aisance de manoeuvrabilité pour leurs conducteurs. Il a d'ailleurs été relevé que si l'usage du parking d'échange avec les TPG et les CFF / SNCF situé à la gare de Chancy-Pougny se développe, en l'état on pourrait voir le trafic automobile traversant Chancy augmenter, notamment en provenance de la Haute-Savoie !

En tout état de cause, il est à noter qu'un parking d'échange n'est guère attractif à 15 kilomètres du centre urbain avec une desserte par autobus, trop peu attractive, et qu'un P+R à Chancy-Pougny ne peut espérer fonctionner que grâce à une desserte rapide et fréquente par le « Rhône-Express-Régional » (RER).

La minorité de la commission relève en conclusion qu'en matière de gestion du trafic, il n'y a en réalité pas de recettes politiques ; les solutions ne sont que techniques. La politique consiste à savoir ce que l'on veut, en l'occurrence définir si les conditions de circulation et les nuisances induites sont acceptables ou non dans le village de Chancy.

Si la réponse est non, ainsi que la minorité le partage avec la majorité et les pétitionnaires eux-mêmes, alors il y a lieu de prendre des mesures. Celles qui sont proposées par les derniers sont inacceptables pour les raisons évoquées plus haut, car il est irresponsable de reporter les inconvénients de notre prospérité chez les autres.

Il est donc indispensable d'assumer les responsabilités des nuisances du trafic que l'on génère en cherchant une vraie solution, que ce soit avec ou sans nos partenaires de la région. Mais dans tous les cas, le canton de Genève ne pourra s'en sortir sans s'investir dans des solutions permettant l'évitement de localités où cela est nécessaire.

C'est la raison pour laquelle la minorité de la commission ne peut accepter les demandes de cette pétition qui rejette toute solution de contournement, même si elle partage avec ses signataires la nécessité de maîtrise des nuisances du trafic et qu'elle constate avec satisfaction la réponse positive d'ores et déjà apportée à la demande d'amélioration concernant les transports publics.

Débat

M. Christian Brunier (S), rapporteur de majorité. Très rapidement, Madame la présidente, juste pour dire qu'il y a eu un premier constat fait par la commission. Je crois que tout le monde a partagé le même point de vue. Le constat est simple. Chancy, comme la plupart des villages, comme la plupart des quartiers de Genève, est aujourd'hui engorgé par les voitures et par les camions, puisqu'il y passe plus de 300 camions par jour ! Ce sont les chiffres du département.

Un groupe d'habitants de Chancy a déposé une pétition demandant un certain nombre de remèdes, remèdes qui semblent naturels, c'est-à-dire, pour les premiers remèdes, une modération du trafic à l'intérieur de Chancy, puisque vous savez que ce village n'est toujours pas en modération de trafic. La limite de vitesse est à 50, les camions ne rencontrent pas d'obstacles particuliers. Deuxième chose, les pétitionnaires ont demandé une sensibilisation des automobilistes à la traversée du village, ce qui est aussi la moindre des choses. Troisième chose, ils ont demandé la revitalisation du chemin de fer entre Chancy et Genève, ce d'autant que la ligne ferroviaire entre Bellegarde et Genève est en train d'être revitalisée.

La revitalisation du tracé Chancy-Genève, avec la remise en état et la réouverture de la gare de Pougny-Chancy et des aménagements de parkings pour que les gens de la région puissent parquer leurs voitures autour de la gare et puissent se rendre rapidement au centre-ville avec le train, c'est le transfert modal que souhaitent aussi bien la majorité parlementaire que la majorité du Conseil d'Etat, même si la majorité n'est pas tout à fait la même. Ce point de vue a été partagé un peu par tout le monde, puisque le maire de Chancy nous a dit, je cite, qu'il n'avait « pas d'objection au sujet de la pétition », alors qu'il disait lui-même qu'il était idéologiquement bien loin des pétitionnaires. Il a néanmoins indiqué que la pétition allait dans le bon sens et qu'il ne voyait pas de raison de s'y opposer. Le département de justice et police a quant à lui considéré que cette pétition n'était pas gênante. Le DAEL s'est montré un peu plus enthousiaste en disant qu'il s'agissait de la politique qu'il comptait mener et qu'il appuyait bien sûr l'envoi de cette pétition au Conseil d'Etat.

Etant donné que la commune ne s'y oppose pas, que le soutien est fort au niveau du DAEL et que le DJPT ne trouve pas cette pétition gênante, nous estimons que les remèdes préconisés sont de bons remèdes et qu'il faut les essayer. La majorité parlementaire soutient bien entendu ce projet et cette pétition.

Par rapport à ce débat, il y a eu des propositions de la droite parlementaire pour dire que la seule solution consistait à construire une route de contournement de Chancy, route de contournement qui coûterait, je vous le rappelle, 20 millions et qui déplacerait - je cite le DAEL, ce n'est donc pas le politicien de gauche qui vous parle - le problème et les nuisances. Ce serait un mitage de la zone agricole, puisque cette route passerait en partie en zone agricole. J'espère que les agriculteurs seront à nos côtés pour défendre la zone agricole. Et comme toute route de contournement, ce serait un aspirateur à bagnoles. La plupart des collectivités publiques l'ont aujourd'hui compris. On ne résout pas les problèmes de transport par des contournements, la Côte d'azur le démontre très bien, puisque, à force de contourner, les habitants n'arrivent plus à circuler et vivent dans un état de pollution extrême et d'aménagement plus que contestable.

Nous soutenons bien entendu cette pétition, qui va dans le bon sens, qui essaye d'avancer des idées, des idées pour que les habitants vivent mieux, pour que le transfert modal se fasse et pour que l'environnement soit de meilleure qualité. On ne peut que soutenir ces propositions ! 

M. Michel Ducret (R), rapporteur de minorité. En ce qui concerne la minorité, elle partage les constats faits par les pétitionnaires, confirmés par le maire et également remarqués par la majorité de la commission. La différence, c'est que la minorité de la commission ne veut pas se bercer d'illusions. Il n'y a pas de miracle, ce n'est pas à travers des mesures de modération du trafic, qui visent essentiellement à diminuer la vitesse du trafic, que l'on arrivera à un changement dans le village de Chancy.

Les vrais problèmes ne sont pas causés par la vitesse, mais par la trop grande circulation qui traverse ce village et, d'autre part, par le fait qu'une partie de cette circulation est composée de poids lourds circulant dans un contexte bâti totalement inadapté à ce type de trafic. Il y a deux réponses possibles :

- ou l'on maintient le statu quo, en précisant que les camions n'ont qu'à passer ailleurs, ce qui revient à peu près à dire ce que certains ont expliqué en commission, c'est-à-dire à passer par la France voisine. Or, reporter chez les voisins les ennuis que l'on ne veut pas chez soi est une attitude totalement inadmissible.

- ou l'on prend des mesures pour que ce trafic, nécessaire malgré tout à notre économie, qu'on le veuille ou non, puisse passer ailleurs que dans un village qui n'est pas fait pour cela, de façon à ce que celui-ci retrouve la paix. Cela suppose bien sûr une construction, et qui a un coût. Mais est-ce que la qualité de vie dans un village genevois n'a de toute façon pas un coût ? Ne doit-on pas l'assumer ? A force de se voiler les yeux devant les problèmes, ne va-t-on pas les amplifier jusqu'au moment où ce sera insupportable et où l'on ne pourra pas satisfaire toutes les demandes au moment où l'on devra vraiment les satisfaire parce que l'on ne pourra plus faire autrement ?

Je reviens aux mesures de modération du trafic : vous pouvez bien poser un panneau 30 à l'heure, il n'y a pas une voiture qui traverse le village de Chancy à plus de 30 à l'heure. Quant au problème des camions, vous ne pouvez pas le résoudre. Si vous empêchez les camions de circuler dans le village, il faudra bien qu'ils passent quelque part. Cela veut aussi dire que les TPG, que l'on souhaite voir circuler le plus souvent possible pour satisfaire à la volonté de transfert modal exprimée par la majorité du Grand Conseil et par la majorité du Conseil d'Etat, doivent bien pouvoir aussi circuler. Or, il se trouve qu'ils ont les mêmes gabarits que les poids lourds. Et malheureusement, si l'on empêche les poids lourds de circuler, on empêche aussi les transports publics de circuler...

Il y a donc des choix à faire. A force de refuser de faire ces choix, on va dans le mur. Dans le mur du village en l'occurrence, mais c'est partout pareil. C'est un principe que la minorité de la commission trouve finalement inacceptable. On ne peut pas résoudre les problèmes par quelques panneaux, en se moquant complètement de l'avenir et du développement de notre région. 

M. Hubert Dethurens (PDC). Concernant cette pétition, comme l'a dit M. Brunier - les propos sont un peu plus modérés qu'en commission, où l'ambiance était plutôt «route d'évitement ou pas route d'évitement» - je reconnais qu'une invite nous a un peu gêné, c'est celle incitant les camions à passer ailleurs. On a des nuisances et on les envoie chez le voisin. Or, à Chancy, pour entrer sur le territoire genevois, je ne sais pas où se situe cet «ailleurs». Je crois que c'est Meyrin d'un côté et, pour les camions, Bardonnex si je ne me trompe pas. Nous avons donc des doutes quant à cette invite. Ceci dit, je veux bien que l'on envoie cette pétition au Conseil d'Etat. On s'apercevra alors des problèmes qui se posent. Je crois que vous ne connaissez pas très bien le village de Chancy. Il y a là un virage qui, si un camion le prend à plus de 15 à l'heure, le fait aller dans le mur du bistrot. Je ne vois donc pas quelles autres mesures on pourrait envisager. On va certes prendre des mesures de modération du trafic, mais cela ne diminuera pas le nombre de camions, parce que l'on ne peut pas les envoyer ailleurs.

Je ne crois pas, j'en finirai par là, que cette pétition reflète le point de vue de la population de Chancy. Il y a huit signatures. Il ne faut donc pas trop s'appuyer sur la population de Chancy pour faire passer cette pétition. Cela dit, elle ne mangera pas trop de foin et l'on s'apercevra très vite que les nuisances subsistent malheureusement à Chancy. Un jour, la route d'évitement s'avérera certainement nécessaire.

Quant à la défense de la zone agricole, dans le nouveau plan directeur qui n'est pas encore achevé, il y a une demande du département de diminuer la zone à construire à Chancy. Je crois que cela a été proposé au maire de Chancy. On lui a demandé s'il était d'accord de négocier pour réaliser cette route d'évitement, non pas en zone agricole, mais en bordure de la zone de développement. La zone agricole serait ainsi protégée. 

M. Christian Brunier (S), rapporteur de majorité. Très rapidement, on ne peut pas accuser à nouveau la majorité de gauche d'essayer de reporter la problématique des camions et de la circulation chez nos voisins ! Dans cette pétition, nous avons entre autres défendu le transfert vers le train. Ce n'est pas un report de la circulation. C'est bien un transfert modal. Deuxième chose, par rapport aux camions, je vous rappelle que nous sommes intervenus pour demander s'il y avait des négociations et des discussions avec nos voisins français pour trouver des solutions ensemble. Le département de justice et police nous a dit qu'il n'y avait pas de discussions. Nous le déplorons. Les problèmes de transport poids lourds entre la France et la Suisse et inversement doivent se régler par le dialogue et la discussion entre les autorités concernées.

Maintenant, dire qu'il n'y a pas de problème de vitesse dans Chancy... Je prends juste le rapport de police que j'ai annexé à la page 8 de mon rapport. La police a contrôlé 747 véhicules. Le pourcentage d'infractions s'élève à 21,2%. Si, pour vous, ce n'est pas grand-chose, pour nous, c'est quand même relativement conséquent ! 

M. Michel Ducret (R), rapporteur de minorité. S'agissant des propos que vient de tenir le rapporteur de majorité, j'aimerais quand même faire remarquer quelque chose à ce Grand Conseil. Le transfert modal vers les trains équivaut à encourager la circulation à Chancy, dans le village de Chancy, pour se rendre à la gare de Pougny-Chancy, et à créer du trafic à Pougny pour aller à la gare. Le résultat du transfert modal, pour ces deux localités, sera au mieux le maintien du trafic, au pire une augmentation du trafic à travers ces deux villages. C'est vrai que l'un est français et qu'il risque d'être le plus touché par les résultats du transfert modal. J'entends par là que l'on peut souhaiter un certain nombre de choses, que l'on peut souhaiter le transfert modal, mais ceci étant, il a des conséquences, et ces conséquences ne sont pas du genre à résoudre le problème posé par cette pétition. D'autant que le transfert modal des marchandises et le transport effectué par camions à travers le village ne sont, jusqu'à nouvel avis, pas près d'être résolus dans notre société. Cela veut finalement dire que la majorité refuse de répondre au problème posé par les pétitionnaires avec des réponses concrètes et réelles et se berce d'illusions en posant des panneaux 30 à l'heure à un endroit où l'on ne peut circuler qu'à 15 à l'heure ! 

M. Hubert Dethurens (PDC). A propos du transfert modal, Monsieur Brunier, vous savez que le trafic poids lourds passant à Chancy concerne essentiellement le gravier. Je n'ai pas très bien compris ce qu'a dit le rapporteur de minorité, mais c'est essentiellement du gravier. Alors, s'il faut charger sur train le gravier qui arrive à Chancy pour l'amener dans une gare à Genève ou à Vernier et le transférer ensuite dans les gravières où il doit être trié, je pense que ce n'est pas extraordinaire au point de vue écologique. Cela m'est égal, cela éviterait du trafic dans tous les villages de la Champagne. Mais en l'occurrence, si vous arrivez à faire du transfert modal comme cela, ce ne seront pas les habitants de la Champagne qui vont vous le reprocher, mais les habitants de Lancy, d'Onex, de Vernier ou de je ne sais où !

Quant aux contrôles de police, si vous connaissiez un peu Chancy, vous sauriez qu'un contrôle de police ne s'effectue pas au milieu du village, parce que la police n'aurait aucune chance à cet endroit. La police le placera 100 mètres avant. Peut-être bien que certains camions entrant dans Chancy se feront prendre, mais pas ceux qui sortiraient, parce qu'ils n'auraient pas la possibilité d'accélérer assez rapidement. 

Mme Anita Frei (Ve). La pétition de Chancy pose un problème spécifique, le passage de camions transportant du gravier, et aussi un problème général, le trafic de transit et les problèmes de circulation qui se posent dans des dizaines, voire des centaines de lieux du canton.

Comment gérer un trafic manifestement trop important ? Les Verts sont persuadés que ce n'est pas en construisant une route de contournement que l'on résoudra ce problème. On ne fera que le déplacer temporairement et à grands frais. La recherche de solutions, dans ce cas-ci, doit être globale et transfrontalière, entre autres pour ce problème de transport de gravier. C'est pourquoi nous recommandons le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.

La présidente. Nous sommes saisis de deux propositions. L'une consiste à renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, l'autre à la déposer sur le bureau du Grand Conseil. Je vais opposer les deux propositions.

Le résultat du vote est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

L'adjoint du sautier compte les suffrages.

Le renvoi de la pétition au Conseil d'Etat est adopté par 39 voix contre 29 en faveur du dépôt sur le bureau du Grand Conseil.