République et canton de Genève

Grand Conseil

RD 383
33. a) Rapport du Bureau du Grand Conseil (Mmes et MM. Daniel Ducommun, Elisabeth Reusse-Decrey, Janine Berberat, Catherine Passaplan, Marie-Paule Blanchard-Queloz et Antonio Hodgers) au Grand Conseil concernant le rapport de la Commission d'experts instituée par la résolution 413 (situation de la prison de Champ-Dollon). ( )RD383
RD 384-1
b) Rapport de la commission des visiteurs officiels du Grand Conseil (3e année de la législature 1997-2001). ( -)RD384
Rapport de M. Dominique Hausser (S), commission des visiteurs officiels du Grand Conseil
P 1303-A
Pétition : Enseignant à Champ-Dollon. ( -)P1303
Rapport de M. Jean-Marc Odier (R), commission des visiteurs officiels du Grand Conseil
P 1305-A
Pétition concernant l'autorisation pour les détenus de Champ-Dollon à disposer d'ordinateurs personnels équipés de CD-Rom et d'imprimantes. ( -)P1305
Rapport de M. Jean-Marc Odier (R), commission des visiteurs officiels du Grand Conseil
P 1306-A
Pétition pour autoriser les détenus à apporter des friandises à leurs enfants lors des visites. ( -)P1306
Rapport de M. Jean-Marc Odier (R), commission des visiteurs officiels du Grand Conseil

 c) Rapport de la commission des visiteurs officiels du Grand Conseil chargée d'étudier les objets suivants :

Rapport du Bureau du Grand Conseil(383)au Grand Conseil concernant le rapport de la Commission d'experts instituée par la résolution 413

(situation de la prison de Champ-Dollon)

Lors de sa séance du 17 décembre 1999, le Grand Conseil a adopté la résolution 413 et désigné une commission formée de six experts externes à notre Parlement, avec pour mandat de lui rendre rapport sur la situation actuelle de la prison de Champ-Dollon et sur la manière dont elle est dirigée.

Ce rapport a été rendu le 6 novembre 2000, et par ces quelques lignes, le Bureau du Grand Conseil tient à remercier Mme et MM. André Dunant, Christian Garin, Doris Leuenberger, Jean-Louis Martin, Michel Porcher et Christian-Nils Robert pour leur travail et leur diligence.

Le Bureau du Grand Conseil vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de prendre acte du rapport que vous trouverez en annexe.

Secrétariat du Grand Conseil

Proposition présentée par les députés:Mmes et MM. Jeannine de Haller, Anita Cuénod, Marie-Paule Blanchard-Queloz, Fabienne Bugnon, Gilles Godinat, Luc Gilly, Cécile Guendouz, Bernard Clerc, Danielle Oppliger, René Ecuyer, Pierre Vanek, Jacqueline Cogne, Pierre-Alain Cristin, Dominique Hausser, Nicole Castioni et Georges Krebs

Date de dépôt: 30 novembre 1999Messagerie

R 413

Résolutioninstituant une commission d'experts pour examiner et faire rapport sur les conditions de détention des prévenus et des condamnés et sur la gestion du personnel de la prison de Champ-Dollon

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :

la motion 1297 ;

les difficultés rencontrées pour sa concrétisation,

décide :

1. de désigner une commission formée des six experts suivants :

M. .

M. .

Mme Doris Leuenberger, présidente de la Ligue suisse des Droits de l'homme ;

M. .

M. .

M. .

avec pour mandat de lui rendre rapport sur la situation actuelle de la prison de Champ-Dollon et sur la manière dont elle est dirigée, notamment en ce qui concerne :

le non-respect de la confidentialité (secret médical, accusations portées à l'encontre des détenu-e-s, etc.) ;

le nombre de détenu-e-s par cellule en dépassement des normes prévues ;

le stress dénoncé par le personnel comme découlant des heures supplémentaires et de la restructuration musclée de l'organisation du travail ;

le manque de dialogue entre la direction et les personnes travaillant à Champ-Dollon ;

les manquements au respect dû aux détenu-e-s (brusqueries ou violences, punitions arbitraires, etc.) ;

les conditions de détention des mineur-e-s (occupation, promenade, sport, etc.) ;

et, de manière générale, les possibles manquements aux droits humains.

La commission peut compléter son mandat si elle le juge nécessaire.

2. de rémunérer éventuellement les experts par un prélèvement sur le poste 300 du budget du Grand Conseil.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames et

Les auteurs de la présente résolution considèrent qu'il est souhaitable de désigner une commission d'experts indépendants pour rendre rapport sur les questions évoquées dans la motion 1297, cela indépendamment des conclusions auxquelles arrivera la Commission des visiteurs de prison également chargée de l'examen de cette motion.

Au bénéfice de ces explications, nous espérons, Mesdames et Messieurs les député-e-s, que vous réserverez un bon accueil à la présente résolution.

Rapport(384)de la Commission des visiteurs officiels du Grand Conseil(3e année de la législature 1997-2001)

La présidence de la Commission des visiteurs officiels a été assurée pour l'année 2000 par Mme Janine de Haller. Le bureau du Grand Conseil est représenté par Mme Marie-Paule Blanchard-Queloz. La commission s'est réunie ou a effectué des visites d'établissement de détention à une trentaine de reprises du 9 décembre 1999 au 16 novembre 2000.

En plus de la présidente et du rapporteur, la Commission de visiteurs est composée de Mmes Esther Alder, Jeannine Berberat, Jacqueline Cogne, Anita Cuénod, Catherine Passaplan et de MM. Alain-Dominique Mauris et Jean-Marc Odier.

Les travaux ont été suivis par M. Thierry Brichet, adjoint de direction du service du Grand Conseil, M. Alexandre Agad, secrétaire adjoint au Département de justice, police et transports, M. Jacques Reymond, directeur du service d'application des peines et mesures (SAPEM), Mme Erica Sommer, directrice adjointe du SAPEM, lors des visites des établissements. La commission leur adresse ses remerciements pour leur collaboration efficace et nécessaire au bon déroulement de ses travaux. Tous nos remerciements à M. Jean-Luc Constant qui a tenu les procès-verbaux, documents fort utiles à la rédaction de ce rapport.

Nous adressons également nos remerciements aux directrices et directeurs d'établissements de détention et à leurs collaboratrices et collaborateurs, ainsi qu'à toutes les personnes auditionnées :

M. Jean-Michel Claude, directeur jusqu'en avril 2000, M. Constantin Franziskakis, directeur a.i. depuis avril 2000, M. Jean-Pierre Python, administrateur, M. Michel Speck, gardien-chef, M. Jean-Pierre Baechler, gardien-chef adjoint, M. Francis Oppeliguer, gardien-chef adjoint, et Mme Josiane Marti, sous-cheffe rattachée à la direction, prison de Champ-Dollon.

M. Désiré Pittet, gardien responsable, M. Dominique Bertrand, médecin répondant et Mme X., infirmière, quartier cellulaire de l'hôpital.

M. Denis Pieren, directeur des établissements de la Plaine de l'Orbe.

M. André Vallotton, directeur du service vaudois de l'application des peines.

M. le professeur Thimothy Harding, directeur de l'Institut de médecine légale, M. François Courvoisier, médecin consultant et responsable a.i. du QCH.

M. le professeur Didier Pingeon, Université de Neuchâtel.

M. Jean-Nicolas Roten, président du Tribunal de la jeunesse.

M. Jean-Michel Gottardi, directeur de La Clairière.

M. Yves Jan, secrétaire général de l'ASTURAL et membre du bureau de l'AGOER, M. Patrick Peyer, membre du bureau et secrétaire de l'AGOER.

M. Roland Fankhauser, ancien directeur de La Clairière.

M. Rudy Junod, remplaçant du chef de la sûreté, M. Denis Bornet, chef de la brigade des mineurEs et M. Bernard Anthonioz, inspecteur principal à la brigade des mineurEs.

M. Laurent Beausoleil, service social de la prison de Champ-Dollon et M. Fabrizio Berlini, service du patronage, chargés de mission dans le cadre de la mise en place d'un office pénitentiaire.

M. Christian Varone, directeur et M. Jean-Michel Gillioz, directeur adjoint des établissements pénitentiaires valaisans.

Mme Marianne Heimoz, directrice, et Mme Alice Bertschinger, cheffe des gardiens, prison de Hindelbank, Berne.

M. Henri Nuoffer, directeur, M. Bruno Hoffmann, directeur adjoint, M. Andreas Von Känel, directeur adjoint, M. Paul André Morandi, directeur adjoint et M. Jean-Marc Limat, responsable de l'enseignement, Etablissements de Bellechasse.

M. Claude Grandjean, conseiller d'Etat, directeur de la justice, de la police et des affaires militaires du canton de Fribourg.

M. Jacques-Eric Richard, directeur et M. Urs Hausammann, surveillant-chef de maison, prison de la Tuilière.

M. Guy Solana, directeur régional des services pénitentiaires de Lyon.

M. Jean-Paul Ricard, directeur, M. Pierre Lamothe, médecin-chef, M. Richard William, enseignant, M. Claude Longombe, surveillant-chef, Maisons d'arrêt de Lyon.

Les problèmes rencontrés ces trois dernières années par les changements importants des députés de la commission devraient se résoudre suite à l'acceptation de la modification de la loi portant règlement du Grand Conseil, qui évitera que les députés de la commission siégeant depuis moins de trois ans prennent le risque d'être tirés au sort pour la Commission des grâces.

En vertu de la loi portant règlement du Grand Conseil (B 1 01) avant la modification adoptée en septembre 2000 concernant les compétences de la Commission des visiteurs officiels, la commission a pour tâches :

d'examiner les conditions d'incarcération dans les lieux de détention genevois ou faisant partie du concordat romand et du Tessin, lorsqu'une peine résultant d'un jugement pénal rendu par les tribunaux genevois y est exécutée,

d'entendre les détenus qui en ont fait la demande,

de visiter les établissements où sont placés des adolescents par une autorité pénale genevoise,

d'examiner toute demande écrite qui lui est adressée par un détenu et de transmettre à l'autorité compétente les demandes qui ne sont pas de son ressort,

de rechercher tout complément d'information utile,

de présenter au Grand Conseil un rapport à l'attention du Conseil d'Etat et du Procureur général, indiquant toutes recommandations et/ou observations qu'elle estime justifiées.

Sur la base des tâches qui attendent la commission et en fonction des propositions d'auditions des commissaires dans le cadre de la recherche de compléments d'informations utiles, la commission planifie ses travaux. Considérant l'échéance à laquelle le rapport doit être voté par le Grand Conseil ainsi que les visites obligatoires, le calendrier s'avère rapidement chargé.

Plusieurs objets parlementaires ont été traités pendant cette année. Je vous renvoie aux divers rapports spécifiques pour le détail.

Le projet de loi 7843, déposé en 1998, modifiant la loi portant règlement du Grand Conseil (B 1 01) a été adopté par le Grand Conseil en septembre 2000, après un examen très détaillé par la Commission des visiteurs. Le résultat des travaux est un compromis qui a été accepté par toutes les parties concernées. Je vous renvoie au rapport spécifique, rédigé par le député Dominique Hausser, pour les détails.

La motion 1297, juin 1999, demandant que l'ensemble des conditions de nomination du nouveau directeur de la prison de Champ-Dollon soit reconsidéré par le Conseil d'Etat et qu'une enquête soit menée par la Commission des visiteurs officiels sur les conditions de détention des prévenus et sur la gestion du personnel depuis la nomination de ce directeur. En outre, la motion mandate la Commission des visiteurs pour apporter la lumière sur les causes des événements survenus ce printemps à Champ-Dollon. Cet objet a été traité suite à la réception des rapports des différents groupes d'experts et tout particulièrement celui de la commission d'experts mandatée par le Grand Conseil avec la résolution 413 votée en automne 1999.

Les pétitions 1303 « Enseignant à Champ-Dollon », 1305 concernant l'autorisation pour les détenus de Champ-Dollon à disposer d'ordinateurs personnels équipés de CD-Rom et d'imprimantes et 1306 pour autoriser les détenus à apporter des friandises à leurs enfants lors des visites ont été examinées et font l'objet d'un rapport séparé, rédigé par le député Jean-Marc Odier.

La motion 1316 avait été déposée par les députés de la Commission des visiteurs officiels et renvoyée directement au Conseil d'Etat par le Grand Conseil. Cette audition reprend les préoccupations exprimées dans la motion. La commission souhaite particulièrement entendre le Conseil d'Etat sur les mesures qu'il a entreprises pour régler les problèmes des mineurEs en détention.

Le conseiller d'Etat, Gérard Ramseyer, rappelle qu'il a déjà été interpellé sur la question de la détention des mineurEs. Il s'agit à son avis du problème important et prioritaire, qu'il convient de résoudre rapidement.

Les points suivants sont abordés lors de cet entretien : (a) situation actuelle et évolution de la criminalité des mineurEs, (b) évolution du droit des mineurEs, (c) compétences et situation à Champ-Dollon, et (d) solutions et actions possibles.

Il semble qu'il y ait une modification significative de la criminalité des mineurEs. Le nombre d'affaires traitées par le Tribunal de la jeunesse n'a certes pas augmenté de façon significative, mais le nombre d'arrestations et d'incarcérations a par contre augmenté, car les mineurEs s'avèrent plus dangereux et les délits commis plus graves. Ceux-ci ont d'ailleurs des comportements agressifs en prison et nécessitent des mesures particulières.

Le département ne dispose d'aucune marge de manoeuvre dans les décisions de placement de mineurEs. Le Tribunal de la jeunesse décide du lieu de détention. C'est également le tribunal qui discute de la politique à mener contre la criminalité des mineurEs. L'exécution des peines est également de la compétence du Tribunal des mineurEs.

La présence de mineurEs est irrégulière à Champ-Dollon, et en principe le Tribunal de la jeunesse n'y place que des adolescents proches de la majorité ou des adolescents violents. Les mineurEs placéEs à Champ-Dollon sont suiviEs d'office par le service médical de la prison. Ils ne sont jamais en contact avec des détenus adultes. Il admet que le problème est réel et qu'une solution doit être trouvée pour que cela ne se produise qu'exceptionnellement. Champ-Dollon et Riant-Parc sont des lieux inadaptés à la détention de mineurEs.

La Conférence romande des chefs de département de justice et police (CRDJP) a examiné cette question au début de l'année 1999 pour envisager le cas échéant, des solutions communes, voire élargir le concordat romand à la détention des mineurEs. Les réponses sont arrivées en ordre dispersé. Certains cantons ne rencontrent aucun problème avec les mineurEs. D'autres en rencontrent, mais affirment détenir des solutions pour les maîtriser. D'autres enfin en rencontrent aussi, mais estiment que ce problème ne doit pas être résolu au niveau concordataire. Les cantons romands ne semblent pas favorables à un élargissement du concordat et à l'élaboration d'une solution commune. La CRDJP devrait décider lors de sa séance du 16 mars 2000 de l'éventuelle constitution d'un groupe de travail chargé d'élaborer un concept qui pourrait déboucher sur un concordat concernant les mineurEs ou la création d'un nouvel établissement intercantonal destiné aux mineurEs les plus endurciEs.

Concrètement à Genève, une solution de rocades entre certaines maisons pourrait être envisagée. La réflexion doit être immédiatement encouragée à Genève, une solution concordataire semblant pour l'instant peu probable. Une solution concrète devrait voir le jour avant la fin de l'année 2000.

Parallèlement aux questions de détention, il importerait d'examiner l'évolution des jeunes dans le canton. Il ne lui semble cependant pas possible de se pencher sur la problématique de la détention des mineurEs sans examiner la question dans son ensemble.

Le Tribunal de la jeunesse remplit le rôle du Ministère public - il y a saisie directe du Tribunal de la jeunesse - le rôle du juge d'instruction, le rôle d'un tribunal et le rôle de l'autorité chargée de prendre des mesures. Cette organisation est utile pour assurer une gestion plus souple des problèmes des mineurEs. Si les faits sont contestés par le jeune, l'audience de jugement ne sera alors pas présidée par le juge qui aura mené l'instruction. Le Tribunal évite ainsi à ce juge de devoir se déjuger. Dans les autres cas, c'est le juge d'instruction qui préside l'audience de jugement. Lorsqu'un jeune commet une autre infraction, après être passé une première fois devant le Tribunal de la jeunesse, il se retrouve devant le même juge. Il en va de même lorsque son frère ou sa soeur commet à son tour une infraction. Le juge peut ainsi avoir une vue d'ensemble de la situation. Une procédure n'est jamais véritablement terminée lorsqu'une mesure est ordonnée. Le Tribunal peut toujours revenir sur cette mesure.

La détention des mineurEs existe bel et bien. C'est toutefois une solution que les juges n'aiment pas beaucoup. Dès qu'ils peuvent l'éviter, ils l'évitent. Ce qui ne va évidemment pas sans poser des problèmes.

Il n'y avait à l'époque qu'une seule institution pour accueillir les mineurs à Genève, à savoir La Clairière. Il n'y avait par contre aucune solution pour les jeunes filles. Ce n'est que par la suite qu'une solution est apparue pour elles à Riant-Parc. Cette solution n'était toutefois pas du goût du Tribunal de la jeunesse, lequel souhaite que les jeunes filles bénéficient des mêmes conditions que les jeunes garçons, soit des conditions propices à un travail éducatif à entreprendre dans une période cruciale pour la vie de ces jeunes. Le Tribunal de la jeunesse a donc toujours regretté que les jeunes filles ne puissent pas bénéficier d'une telle solution.

La « nouvelle » Clairière est entrée en fonction au mois de juin 2000. La capacité de l'institution sera portée de 12 à 16 places. Quatre à cinq places sont dévolues aux jeunes filles, étant précisé que la structure en question sera modulable. Le Tribunal de la jeunesse fait état d'une augmentation de la détention préventive des mineurEs et sur la capacité d'accueil de La Clairière.

Le Tribunal de la jeunesse essaye le plus possible, lorsque l'obligation de détenir un mineur se fait sentir, de le placer dans une institution adaptée. Cela ne s'est pas toujours avéré possible au cours de ces dernières années pour les garçons. Quant aux filles, il convient simplement de rappeler l'absence de toute structure adéquate. Le Tribunal de la jeunesse a donc été obligé d'avoir recours plus fréquemment à la solution de la détention dans un établissement pour majeurs, c'est-à-dire Champ-Dollon, ce qui ne satisfait pas pleinement les juges du Tribunal.

Un nombre important de jeunes détenus à Champ-Dollon comme mineurEs se sont révélés par la suite être majeurs. Ce qui a obligé le Tribunal à ordonner des expertises qui se sont d'ailleurs souvent révélées concluantes. Ces personnes figurent toutefois dans les statistiques des mineurEs. L'an passé, le Tribunal de la jeunesse s'est dessaisi à 65 reprises en faveur du Parquet. Il s'agissait de jeunes qui se sont avérés, après expertise ou aveu, être majeurs, ce qui nuance bien les statistiques. Le nombre d'arrestations préventives s'est élevé à 446 en 1998 et à 496 en 1999. Sur ces 496, le Tribunal de la jeunesse s'est dessaisi à 65 reprises en faveur du Parquet pour cause de majorité contre 24 dessaisissements en 1998 et seulement 8 en 1997, ce qui montre bien l'évolution de cette problématique.

La mise en détention d'un jeune est un élément marquant pour celui-ci. Près de 1500 procédures sont ouvertes chaque année au Tribunal de la jeunesse. La mise en détention s'avère nécessaire dans un tiers des cas. Elle est prononcée en respectant un certain nombre de conditions, notamment la subsidiarité et la proportionnalité. Si la détention préventive est ordonnée, c'est qu'il ne s'avère pas possible de placer le jeune dans sa famille ou ailleurs. La détention préventive est donc utilisée pour faire un bilan de la situation et pour préparer le retour du jeune dans sa famille. Il s'avère parfois nécessaire de s'assurer, par le biais de la détention préventive, que le jeune sera pris valablement en charge à sa sortie. La détention préventive est également ordonnée pour protéger le mineur ou sa famille, voire pour des motifs de prévention publique.

Le nombre d'infractions commises par les jeunes n'est pas vraiment en augmentation. Il est cependant vrai que l'on peut avoir l'impression que la police se plaint d'une telle augmentation. Il ne faut cependant pas oublier que le Tribunal de la jeunesse n'intervient qu'en bout de course. Quant au nombre d'arrestations effectuées par la police, tout dépend en fait des priorités de celle-ci. Et certaines infractions se règlent par le biais de médiateurs de quartier. Ce sont des affaires qui ne sont ainsi pas traitées par le Tribunal de la jeunesse. Il y a donc beaucoup de paramètres dont il faut tenir compte. Certaines infractions, comme les infractions contre les moeurs il y a quelques années, passent pratiquement inaperçues à certaines époques.

Le Tribunal de la jeunesse n'est pas plus strict que par le passé. Les principes n'ont pas changé. Il attribue le plus grand nombre d'arrestations à un problème qui apparaît grandissant. Le Tribunal de la jeunesse est de plus en plus souvent confronté à des jeunes qui prennent Genève pour un supermarché. Leur arrestation nécessite souvent une mise en détention préventive, ne serait-ce que pour achever l'instruction. Il s'agit souvent de jeunes confirmés dans leur carrière criminelle.

Le canton de Genève apparaît bien équipé sur le plan institutionnel. Le Tribunal de la jeunesse travaille beaucoup avec les services de l'Office de la jeunesse. Il est ainsi aidé dans le choix des institutions. Tout se prépare et bien souvent avant le jugement. A l'heure actuelle il manque d'institutions suffisamment contenantes pour accueillir certaines catégories d'adolescentes. Ce manque est d'ailleurs aussi ressenti dans les autres cantons romands. En l'état, aucune solution n'a vraiment été trouvée. L'AGOER réfléchit actuellement à cette problématique, soit dans le sens d'institutions très tolérantes, soit dans le sens d'institutions plus restrictives.

La prise en charge des mineurEs à La Clairière était basée, avant son arrivée à la tête de l'établissement, sur une période d'isolement et une période de vie de groupe. Chaque arrivant était placé en cellule d'isolement pendant trois jours, cinq jours pour les récidivistes. Après cette période, il intégrait le groupe. Cette procédure a été supprimée, car le système répressif ne donne pas suffisamment de bons résultats. L'idée consiste plutôt à donner un sens aux délits commis par ces jeunes et un sens à leur parcours familial. Toutes les activités qui seront mises sur pied constitueront des supports à cette méthode. A leur arrivée, les jeunes passeront au maximum une journée en chambre, terme préférable à celui de cellule. Pendant cette journée, ils auront un entretien avec un éducateur qui deviendra en principe leur éducateur de référence. Il y aura également, durant cette journée, au minimum un moment de sport. Les jeunes arrivent à La Clairière en général l'après-midi. Ils passeront à leur arrivée dans les faits une demi-journée au maximum en chambre.

Plusieurs activités seront mises sur pied pour les jeunes. Il y aura des activités obligatoires et des activités facultatives. Il est prévu d'engager, avec le soutien de la Confédération, un maître socioprofessionnel de cuisine. L'idée consiste à apprendre aux jeunes qu'il n'y a pas que le « fast food » dans la vie, mais aussi ce qu'est un repas équilibré et ce qu'est la gestion d'un budget nourriture. Autre activité obligatoire, le ménage et le linge. Il est prévu d'engager un professionnel disposant d'une formation dans l'hôtellerie. Un four à pain est installé dans la cuisine de La Clairière. Le cuisinier entend développer un service pâtisseries/gâteaux pour tous les foyers de Genève, l'idée étant là aussi de permettre aux jeunes de sortir de l'institution.

La troisième occupation obligatoire est constituée par la classe. C'est un lieu qui disposera de six postes informatiques en réseau munis d'un accès à Internet. Cet équipement permettra aux jeunes d'effectuer un bilan scolaire, de compléter un apprentissage scolaire, d'entreprendre un apprentissage de langues, d'effectuer des découvertes informatiques ou encore de rédiger des courriers.

La Clairière va conserver un atelier polyvalent de bricolage, d'entretien et de réparation du matériel. Une partie du travail effectué à La Clairière pourra être vendu sur différents marchés, l'idée étant de permettre aux jeunes de sortir de La Clairière. L'institution disposera également d'un atelier artistique qui portera un accent particulier sur les graphes. Comme le cuisinier dispose d'un aérographe, les jeunes pourront dessiner sur les gâteaux.

Le sport est une activité obligatoire à La Clairière. Les jeunes en font au minimum trois fois par semaine. La Clairière disposera d'un terrain de football, d'un terrain de basket, d'un mur de tennis, d'un terrain de pétanque, d'un terrain de badminton et d'une salle de musculation. Cette salle sera également utilisée comme salle de musique, étant précisé que la musique revêt une importance particulière pour les Gitans que La Clairière accueille. La musique constitue le seul moyen d'entrer en contact avec eux sans qu'ils se sentent mis en échec.

Les jeunes apprendront, en fin de journée, à se constituer en groupes pour organiser leurs soirées. La vie de groupe commencera à 07 h 00 et finira à 21 h 30. Cet horaire paraît difficile pour des jeunes, mais l'idée consiste à les remettre dans un rythme acceptable dans la perspective de leur sortie.

En ce qui concerne le personnel, la moitié de l'équipe de La Clairière sera féminine et l'autre moitié masculine. La même proportion sera introduite chez les veilleurs de nuit. Et s'il devait y avoir des problèmes par rapport à cette mixité, il sera toujours possible, en dernier ressort, de séparer sur le plan architectural les garçons et les filles.

La nouvelle Clairière existe et peut donc accueillir les mineurs provenant de Champ-Dollon et les mineures de Riant-Parc. Ces deux institutions resteront cependant à disposition comme soupapes en cas de besoin. A moins de mettre à disposition un espace supplémentaire, comme La Clairière actuelle, en cours de transformation pour les personnes sous mesures de contrainte. Le bâtiment pourrait devenir un lieu fermé, mais avec des possibilités d'apprentissage. Il faudrait une dizaine de places supplémentaires s'appuyant sur un réseau d'employeurs prêts à engager de jeunes apprentis. Tout ceci reste cependant un projet, dont on ne sait pas encore quand il se réalisera.

L'AGOER regroupe des organismes privés subventionnés du canton destinés aux enfants et aux adolescents. Les départements de tutelle de ces organismes sont principalement le DIP et le DASS, ainsi que, dans une moindre mesure, le DJPT. Une partie de la population des institutions de l'AGOER est composée de mineurEs soumisEs à la loi pénale, c'est-à-dire âgéEs de 16 à 18 ans.

En cas de sanction pénale, il n'y a que La Clairière qui puisse être un lieu de détention dans le canton de Genève. Par contre, en cas de mesure, plusieurs institutions sont habilitées pour accueillir des mineurEs soumisEs à des mesures. Le droit pénal suisse distingue deux types de dispositions, les sanctions et les peines d'une part - le terme sanction s'appliquant aux mineurEs, le terme peine aux majeurs - et les mesures d'autres part. Parmi les sanctions et les peines, on trouve par exemple les amendes et les peines privatives de libertés. Parmi les mesures, on trouve notamment les dispositions favorisant les soins, ainsi que les mesures de protection. Pour les personnes majeures, si une sanction s'avère impossible à prononcer pour des raisons techniques, le juge prononcera le cas échéant une mesure suspendant la peine. Pour les mineurEs, la démarche est inverse. Le juge examine d'abord s'il peut prononcer une mesure qui favoriserait la réinsertion sociale du mineur. Si aucune mesure n'est envisageable, il prononcera une sanction.

Les affaires de mineurEs âgéEs de 7 à 15 ans sont traitées par les juges pour enfants, dont les outils à disposition s'avèrent limités, et quelquefois par le Tribunal de la jeunesse. Les affaires impliquant des mineurEs âgéEs de 15 à 18 ans sont traitées, sauf exception, par le Tribunal de la jeunesse.

Les mesures pénales peuvent par exemple revêtir la forme de mesures d'appui éducatif en milieu ouvert, d'exigences par rapport aux conditions de vie, de retraits du foyer familial, de placements familiaux - mesures rares - ou encore de placements institutionnels. Le canton de Genève dispose d'une vingtaine d'institutions susceptibles d'accueillir des mineurEs. La liste de ces institutions est dressée par le secrétariat aux institutions, organe de l'Office de la jeunesse qui assure la liaison entre le canton et la Confédération. Quant aux peines de nature pénale, elles peuvent notamment prendre la forme de réprimandes, d'amendes, de travaux d'intérêt communautaire ou de détentions en milieu fermé, soit la sanction la plus grave. L'offre paraît suffisante en termes quantitatifs. Le taux d'occupation s'élève à 85 %, ce qui ne signifie toutefois pas qu'il y ait tout le temps 15 % de places libres.

Les directeurs d'institutions remarquent une péjoration contextuelle de la vie des jeunes. Ceux-ci vivent de plus en plus dans des familles monoparentales, recomposées ou dont les parents sont absents. Aucune limite n'est parfois posée à leur éducation. L'exemple du cycle d'orientation peut être cité dans ce contexte. Il y a quelques années, soit un jeune se trouvait dans le cycle d'orientation, soit il ne s'y trouvait plus. Il n'en va plus de même aujourd'hui, puisque plusieurs possibilités gravitent autour du cycle d'orientation. La frontière n'est donc plus aussi marquée que par le passé. Les jeunes ne parviennent plus tellement à se situer. Il faut donc leur fixer de nouvelles limites. Afin de faire face à ces problèmes, il s'est avéré nécessaire de professionnaliser les équipes travaillant dans les institutions. Un outil important pour les institutions doit être cité. Il s'agit du mandat administratif.

Le problème des mineurEs est assez important dans le canton de Genève, surtout au vu de ce qui se passe aux alentours du canton et qui pourrait se développer à Genève.

La brigade des mineurEs a longtemps connu un sous-effectif. La brigade s'est cependant renforcée voici quatre mois.

Il y a une vingtaine d'années, les inspecteurs de la brigade chassaient les mineurEs qui faisaient les bêtises que tout jeune commet un jour ou l'autre. Les choses ont évolué depuis. On distingue aujourd'hui deux catégories de mineurEs. Il y a d'une part les mineurEs pour lesquels la brigade des mineurEs peut encore espérer faire quelque chose et les aider à s'en sortir. Il y a d'autre part les mineurEs qui sont issus de situations difficiles, des jeunes qui n'ont aucun respect de l'uniforme, les mineurEs qui trafiquent des stupéfiants. La brigade des mineurEs est ainsi confrontée à deux catégories de personnes, celles à qui l'on devrait donner le maximum de possibilités de réinsertion et celles sur qui la police n'a aucune emprise.

La brigade des mineurEs compte quinze inspecteurs. Elle est compétente pour les délits commis par des mineurEs. Pour traiter ces délits la brigade des stupéfiants et la brigade des cambriolages sont également compétentes.

Environ 300 mineurEs sont arrêtéEs chaque année pour des délits liés à la violence - extorsion surtout, au trafic de stupéfiants et aux dommages à la propriété.

La brigade distingue deux catégories de mineurEs, les enfants, âgés de 7 à 14 ans et les adolescents, âgés de 15 à 18 ans. La brigade des mineurEs collabore surtout, à l'occasion de son activité, avec le Tribunal de la jeunesse et l'Office de la jeunesse.

Les relations avec la police française existent pour essayer de gérer au mieux les problèmes des jeunes résidant sur le territoire français. La situation s'avère difficile, car ces jeunes n'hésitent pas à mettre leur vie et celle des autres en danger pour commettre des délits. Ces jeunes apparaissent très mobiles. Ils peuvent se déplacer facilement et franchir la frontière. La police genevoise contacte donc la police française qui fournit les informations nécessaires. Mais l'intervention de la police française s'arrête à ce niveau car elle aurait de la difficulté à agir dans les quartiers sensibles de Lyon.

La police française est aussi confrontée à des problèmes légaux et à des problèmes administratifs. Les faits décrits par la sûreté urbaine de Lyon apparaissent impressionnants. Ce sont parfois des situations incroyables. Ce genre de situation n'existe pas à Genève.

M. Fankhauser explique qu'il a quitté La Clairière voici cinq mois. Il a depuis rompu avec le milieu de la détention des mineurEs. La coupure s'avère définitive et importante, étant précisé qu'il a donné 22 ans de sa vie à cette problématique des mineurEs. Il est actuellement directeur de Montfleury, établissement destiné aux détenus en fin de peine ou en semi-liberté. Plusieurs facteurs sont entrés en ligne de compte. Il a pour sa part toujours oeuvré avec plaisir avec les mineurEs. L'introduction de la mixité au sein de La Clairière ne lui a pas convenu. C'est donc un concours de plusieurs opportunités qui l'a conduit à opérer ce changement, ce dont il se réjouit égoïstement.

Il estime cependant, quelles que soient les solutions envisagées et la capacité d'accueil des institutions, qu'il y aura toujours des mineurEs à Champ-Dollon. Il y a malheureusement des adolescents qui ne correspondent pas à ce qui peut se faire comme prise en charge. Bien qu'il estime qu'un accompagnement psycho-socio-pédagogique serait judicieux s'il était possible de mettre sur pied des prestations appropriées. Ces idées reviennent cycliquement. Il a ainsi déjà été question par le passé d'une formation spéciale à laquelle participeraient gardiens et éducateurs. Il convient cependant de savoir que tout ce qui revêt un uniforme est à « castagner » pour les adolescents placés à La Clairière et que plus de 90 % de ces jeunes respectent la prise en charge éducative au sein de cette institution.

La commission d'experts est composée de M. André Dunant, consultant en justice juvénile ; M. Christian Garin, ancien aumônier à la prison de Champ-Dollon ; Mme Doris Leuenberger, présidente de la Ligue suisse des Droits de l'homme ; M. Jean-Louis Martin, ancien médecin à la prison de Champ-Dollon ; M. Michel Porcher, ancien directeur du Service du patronage ; M. Christian Nils Robert, professeur de droit pénal, selon la décision prise par le Grand Conseil en adoptant la résolution 413. La Commission des visiteurs a reçu la Commission d'experts qui a présenté les principales conclusions de son expertise de façon à répondre aux requêtes formulées dans la résolution ainsi qu'aux questions dont les experts ont jugé utile d'apporter leur point de vue.

La mission de la commission s'est avérée d'une ampleur tout à fait inattendue. Il précise que son rapport final viendra compléter les travaux des nombreuses commissions s'étant penchées sur cette affaire. Le texte du rapport a été rédigé par l'ensemble de la commission et chaque phrase a été pesée et adoptée par consensus.

Les six membres proviennent d'horizons variés et ne se connaissaient pas personnellement avant de collaborer ; aucun d'entre eux n'appartient à un parti politique. En revanche, les prises de position des uns et des autres sont connues et elles illustrent toutes les tendances politiques représentées au Grand Conseil.

Ce n'est que le 20 mars 2000 que la commission a pu démarrer ses investigations, après que les autres commissions aient rendu leurs propres conclusions. La commission s'est trouvée dans une situation délicate, mais la démission de M. Jean-Michel Claude, le 10 mai dernier, a ensuite facilité ses contacts avec la hiérarchie.

La commission a reçu le rapport Pedrazzini, mais elle s'est montrée choquée de constater que ce document avait été caviardé avant de lui être remis. Au surplus, elle n'a pas eu connaissance des autres rapports.

Peu de personnes détenues ont été entendues par la commission. Premièrement car via la Ligue suisse des droits de l'homme, elle était en possession d'un certain nombre de lettres de détenus, particulièrement d'un individu agissant en qualité de délégué, qui exposaient en détail la nature des plaintes. Au surplus, la commission voulait éviter, alors que la situation était tendue à Champ-Dollon en mars dernier, que les détenus pensent que ses membres pourraient intervenir auprès de la direction. Elle rapporte, en outre, qu'en 1999 la Ligue avait été assaillie de plaintes inhabituelles concernant la prison en général et son directeur en particulier. Comme l'ambiance s'était normalisée en 2000, la commission ne souhaitait pas réactiver les tensions.

La loi « Chamay » (loi sur la police F 1 05 et loi sur l'organisation et le personnel de la prison F 1 50) règle l'avancement dans la hiérarchie policière et du personnel pénitentiaire. La rigidité dont elle est assortie peut générer des effets positifs, si l'on considère la hiérarchie comme un élément prioritaire. En revanche, si la loi fait avancer des choses qui ne le devraient pas, elle peut alors se révéler négative. Ainsi, M. Jean-Michel Claude a cherché à dépasser la loi en instaurant des procédures d'évaluation du personnel qu'il n'est pas possible d'appliquer dans l'organigramme de l'Etat.

Les problèmes rencontrés par le SAPEM existent depuis de nombreuses années. La direction de Champ-Dollon présente une liste de détenus condamnés toujours plus importante que le nombre de places disponibles dans les établissements de détention. Lorsque la commission a discuté avec le directeur du SAPEM, il est apparu qu'il supportait les mêmes désagréments qu'à son époque. Pour lui, le problème réside toutefois ailleurs. A ses yeux, il s'agit plutôt d'une certaine inégalité de traitement que provoque la disponibilité restreinte de places.

La commission précise que l'exigence d'une formation universitaire n'est pas un critère totalement objectif. Il n'en reste pas moins qu'elle correspond à l'acquisition de certaines connaissances. Dans ce contexte, un diplôme universitaire, voire post grade, en administration publique s'est imposé comme le plus adéquat pour permettre à son titulaire de diriger un établissement de 250 personnes et 300 détenus. Il appert que le futur directeur devrait impérativement répondre à cette exigence, ce d'autant que son salaire se situe en classe 26. Les derniers rapports français sur la question montrent d'ailleurs une importante vacance aux postes de directeurs de prison. On assiste, en effet, à leur départ dans les carrières préfectorales et magistrales. On peut donc en déduire qu'ils sont au bénéfice d'une formation administrative complète. Pour le surplus, la commission vient de recevoir des recommandations relatives au personnel dans l'application des peines et mesures (recommandation N° R(97)12 du comité des ministres du Conseil de l'Europe aux Etats membres sur le personnel chargé de l'application des sanctions et mesures, publiée in OFJ : Informations sur l'exécution des peines et mesures 3/00, p 10 et ss.). On y énonce notamment des caractéristiques personnelles, telles que la capacité de relation, de communication, de gestion, tant du personnel que des détenus.

La loi n'était pas à strictement parler respectée en matière de visites aux prisonniers par les juges d'instruction. Initialement, le législateur a prévu que les magistrats éprouvent la réalité des prisons. Il serait même très utile que les futurs magistrats travaillent quelque temps en prison. Les juges d'instruction se sont dits assez insatisfaits des rapports émanant de la Commission des visiteurs dont ils ont l'impression qu'il n'émerge pas grand-chose. En raison de la nature de leur activité, ils souhaiteraient être déchargés de l'obligation de vérifier les conditions de détention. Ils souhaitent être remplacés par un organisme compétent, tant sur le plan du droit pénal qu'au niveau de la connaissance du milieu carcéral, pour inspecter valablement les conditions de détention. Or, selon les juges d'instruction, la Commission des visiteurs n'est pas cet organisme. Elle pourrait maximiser son rôle en s'adjoignant des services extérieurs sur certains aspects précis. Cette analyse est intervenue, il est vrai, avant la modification de la loi portant règlement du Grand Conseil et qui a modifié les compétences de la Commission des visiteurs officiels en lui permettant, entre autres, de s'adjoindre des experts pour la visite d'établissements de détention. Il est vrai que la Commission des visiteurs a fait sauter beaucoup de verrous : on peut se rendre dans les postes de police ; aller dans la prison le soir ; pénétrer dans le quartier cellulaire. A l'époque, lorsqu'un événement survenait à la prison, le conseiller d'Etat ou le secrétaire général du DJPT demandait un rapport, mais personne ne se transportait sur place. Selon lui, l'intervention des visiteurs a permis de ne plus attendre sur les conclusions d'un rapport pendant six mois. En outre, les députés, agissant en qualité de personnes de proximité, peuvent transmettre des informations au Parlement. En l'occurrence, elle pourra plus facilement anticiper un dysfonctionnement comme celui récemment dénoncé.

Il apparaît qu'il est important de se demander, d'une manière plus générale, quel rôle on entend faire jouer à une prison. Des questions telles que : qu'est-ce qui y est nécessaire ? utile ? doivent être posées en regard de la situation spécifique de Champ-Dollon dans laquelle évolue une population carcérale provenant d'horizons divers. Aussi, exemplifie-t-il, alors que notre prison propose plusieurs menus aux détenus, d'autres se préoccupent ailleurs de savoir s'ils auront à manger ou non. Dans ce contexte, il est essentiel de réfléchir à la définition de la prison et à l'objectif que notre société poursuit lorsqu'elle incarcère des individus. Le débat porte sur la question de savoir quelles responsabilités pèsent sur quelles épaules. Les Allemands ont opté pour un principe dit d'approximation. En d'autres termes, il convient si possible d'appliquer, à l'intérieur du milieu carcéral, les mêmes conditions que celles en vigueur à l'extérieur. Et un expert auprès du Conseil de l'Europe, à propos de la prison  : « quelle soit préventive ou d'exécution de peine, cela doit être un confinement humanitaire ». Si l'on parvient à respecter un tel précepte, on peut déjà s'estimer content.

Les soins aux détenus sont centralisés sous la houlette de l'Institut de médecine légale. Outre le QCP, il existe un service de médecine générale au sein même de Champ-Dollon et l'unité de sociothérapie La Pâquerette qui a toujours été rattachée à l'Institut de médecine légale. En l'occurrence, il a été fortement question de vouloir rattacher cette unité au DJPT, arguant du fait qu'il s'agit avant tout d'un établissement de détention. Or, il faut savoir que La Pâquerette accueille des détenus ayant commis des crimes jugés intolérables aux yeux du public. On peut donc affirmer que cette structure renferme un aspect thérapeutique tout à fait réel. A ce stade, il explique que le regroupement envisagé de toutes ces unités cliniques dans une division de médecine pénitentiaire rattachée aux hôpitaux universitaires genevois via le département de médecine communautaire, devrait régler ces questions de façon définitive. Ainsi, notre canton serait doté d'un service homogène de qualité universitaire unique en Europe. Il est rassurant de constater que ce dispositif retenu par le Conseil d'Etat permettra d'avoir un outil respectueux d'offrir un service aux détenus répondant aux normes européennes et onusiennes en la matière. Cette formule présentera l'avantage d'éviter les dérives que l'on observe dans d'autres cantons et pays où le médecin de la prison est directement rattaché à sa direction.

Lorsqu'ils ont été interrogés, nombre de gardiens et surveillantes ont reconnu que, lorsque des conflits ont surgi avec M. Jean-Michel Claude, ils auraient souhaité être transférés dans une autre institution, mais la structure pénitentiaire ne le permettait pas sans perdre un certain nombre d'avantages, puisque la plupart des établissements de détention sont rattachés à la Fondation Feux-Verts. La perspective de création d'un office pénitentiaire devrait alors favoriser cette mobilité. On peut bien avoir la plus belle prison du monde, si l'équipe d'encadrement est blessée ou malade, cela peut aboutir aux conditions les pires pour les détenus. Ainsi, le système instauré par M. Jean-Michel Claude en matière de soutien psychologique a fait l'objet de nombreuses discussions au sein de la commission. La manière dont cette personne a été introduite à la prison a suscité des remous. Au surplus, son bureau étant à l'intérieur, les gardiens qui venaient la consulter ont fait l'objet de moqueries de la part de leurs collègues. Il était prévu de remédier à cette situation, mais pour l'heure, rien n'a été fait. Il est pourtant indispensable que l'anonymat des gens qui consultent cette professionnelle soit préservé. Les chiffres concernant l'absentéisme ne révèlent rien d'autre qu'une stabilité entre l'époque de M. Choisy et son successeur. Cela étant, il convient de prendre cette information avec la plus grande prudence. Ce qui est certain, c'est que beaucoup de surveillantes et de gardiens étaient sous médicaments, souffrant d'état dépressif. En revanche, il apparaît clairement que, sous la direction de M. Claude, le nombre d'heures supplémentaires a augmenté d'une manière importante, alors que, précédemment, elles étaient toujours récupérées pendant l'année.

Concernant la mixité, la commission confirme ce qui est versé au rapport, à savoir que le personnel féminin récemment engagé savait à quoi s'en tenir, tandis que les surveillantes en place depuis plus longtemps n'y étaient pas préparées et avaient été engagées sous d'autres conditions. La direction incriminée est allée au-delà de ce qui est autorisé par le Département en matière de mixité. En clair, l'accompagnement des détenus dans les ascenseurs par les surveillantes ne correspond pas, de fait, aux normes en vigueur.

Le caractère obsessionnel au niveau de la sécurité de l'ancienne direction était impressionnant, ce qui a choqué le directeur a.i. à Champ-Dollon, et M. Agad. Et d'évoquer un projet initié par les animateurs. Alors que ces derniers entendaient le consulter dans leurs fichiers informatiques avant de le présenter devant le Grand Conseil, ils ont constaté que l'accès en était bloqué, ce que venait attester la mention « dossier en consultation au DJPT ». Dans le même ordre d'idée, on exigeait de la psychologue qu'elle pratique la délation. De tels agissements, cités dans le rapport de la commission, ne doivent plus se reproduire. La direction actuelle se montre d'ailleurs très sensible à cet aspect de la question.

Comment donc justifier une telle différence de traitement entre filles et garçons, toutes et tous mineurEs privéEs de liberté ? La commission maintient son constat. Lorsqu'il y a un seul garçon de trop à La Clairière, il est envoyé à Champ-Dollon et qu'on ne dise pas qu'il est impossible d'y communiquer avec les cellules des délinquants sexuels majeurs qui jouxtent l'endroit où ils sont incarcérés. Alors que les filles peuvent se retrouver jusqu'à cinq par cellule à Riant-Parc.

La Commission d'experts constate finalement que le départ de M. Jean-Michel Claude a permis d'apaiser la situation, mais qu'il reste plusieurs points qui devront être rapidement pris en considération.

L'idée d'une réforme du domaine pénitentiaire a été évoquée voici cinq ans. Les dispositions légales sont telles que le conseiller d'Etat en charge du Département de justice et police est très (trop ?) impliqué dans le domaine pénitentiaire. La lisibilité du domaine pénitentiaire apparaissait difficile. Cinq ou six entités plus ou moins autonomes assument ces tâches.

Le secteur pénitentiaire est actuellement composé de la prison de Champ-Dollon, du service du patronage, du service d'application des peines et des mesures - exécution de peines et certaines maisons de détention et quelques autres entités publiques et privées, gérant différents établissements. En examinant la structure du domaine pénitentiaire, on se rend compte d'un enchevêtrement de compétences et de dépendances administratives, une quasi-impossibilité d'appliquer une politique pénitentiaire homogène, une utilisation peu adéquate des moyens à disposition pour gérer les différents établissements, un manque de mobilité du personnel dans ce domaine, ainsi qu'un certain manque de coordination.

Les établissements de détention situés dans le canton dépendent de plusieurs autorités. La prison de Champ-Dollon est par exemple placée sous sa responsabilité directe, ce qui a d'ailleurs fait dire à certains qu'il était responsable de la situation actuelle de Champ-Dollon. Villars, Riant-Parc et Favra dépendent du SAPEM, alors que Le Vallon, Montfleury et La Clairière sont gérés par la Fondation des FoyersFeux-Verts, qui a changé de nom en septembre 2000 pour devenir la Fondation des ateliers Feux-Verts. Quant à La Pâquerette, les malades sont placés sous la responsabilité du personnel médical. La Maison de Pinchat est placée sous la responsabilité de la Fédération romande pour toxicomanes et La Pâquerette des Champs dépend d'une association de droit privé.

Le département a cherché à harmoniser la politique pénitentiaire sur le plan cantonal, à n'avoir qu'un seul interlocuteur vis-à-vis des autres cantons, à utiliser judicieusement les moyens à disposition pour gérer les établissements et à développer la mobilité du personnel.

Cette restructuration ne devrait pas avoir d'impact important pour le personnel. Les missions des établissements ne sont pas remises en cause. Il s'agira d'intégrer les employés de la Fondation des FoyersFeux-Verts. Cette opération s'avérera « blanche » pour l'Etat dans la mesure où ces personnes sont déjà payées par l'Etat.

Le nouvel office pénitentiaire sera composé de 2 personnes, qui devrait être compensé par des mesures de rationalisation. Il sera localisé dans les locaux de l'Etat à Vieusseux. Le nouvel organigramme devra être opérationnel pour le 1er janvier 2001 ; le budget 2001 est déjà présenté sur la base de la nouvelle structure. L'ensemble du personnel a déjà été informé par le conseiller d'Etat personnellement ou par M. Fanziskakis, responsable du projet de réforme.

Le groupe de travail a travaillé avec l'ensemble des partenaires concernés par la réforme du système pénitentiaire. Dans ce contexte, explique le directeur de Champ-Dollon, tous les collaborateurs, partie prenante aux changements structurels qu'elle induit, ont été rencontrés, à commencer par les collaboratrices et les collaborateurs de la Fondation des Foyers Feux-Verts appelés à être engagés par l'Etat de Genève. Une permanence a été mise sur pied. Au chapitre des préoccupations, l'intervenant évoque la problématique de la détention des mineurEs, celle des délinquants dangereux et de la mise en place des modalités d'application des peines alternatives.

La construction de l'organigramme de l'Office pénitentiaire a pris en compte les remarques des uns et des autres (voir en annexe).

Le nombre croissant de mineurEs détenuEs à Champ-Dollon est un problème important à prendre en compte dans la restructuration, mais également comme problème spécifique. Un groupe de travail, piloté par le Tribunal de la jeunesse, chargé de proposer des solutions à ce problème et pour tenter de répondre de manière rapide à une préoccupation majeure. Le groupe de travail est composé des juges et des juges suppléants du Tribunal de la jeunesse, de MM. Agad, Berlini, Beausoleil, Dunant, Gottardi et Franziskakis.

Que La Clairière soit rattachée à l'office pénitentiaire est considéré par certains comme problématique ! Les problèmes rencontrés sont très différents de ceux des adultes. Pour les personnes directement concernées, comme le directeur de La Clairière cela ne pose pas de problème fonctionnel, mais qu'il convient d'être particulièrement attentif à la spécificité de La Clairière. Un lien fonctionnel de La Clairière avec le Tribunal de la jeunesse serait un moyen de garantir la spécificité de l'établissement pour jeunes.

La Fondation des Ateliers Feux-Verts assure le financement des équipements nécessaires dans les ateliers des divers établissements repris par l'Etat.

Durant l'été, le département a préparé la description des postes et des cahiers de charges des collaborateurs (66 personnes pour 58 postes) de la Fondation des Foyers Feux-Verts, ceux-ci devant être intégrés au sein du personnel de l'Etat.

La Fondation Feux-Verts est une fondation de droit privé presque entièrement subventionnée par l'Etat. L'article 27 de la convention AGOER précise que l'administration doit se référer, lorsqu'elle procède à des engagements, à la liste du service d'évaluation des fonctions de l'Etat.

De fait, des différences existent pour des raisons historiques et conjoncturelles, parmi les collaborateurs, touchant à la formation, à la fonction et aux classes de salaires. D'où la nécessité d'une réflexion d'ensemble. Des tables de conversion ont été établies en tenant pour acquis le maintien du niveau salarial. Il a été procédé à l'évaluation des 25 fonctions identifiées. Tous les documents élaborés ont été discutés par l'ensemble du personnel et les directions des établissements de la fondation. Une proportion importante du personnel est encore en probatoire. Une dizaine de personnes sont surclassées ; cependant la période transitoire devrait être relativement courte. Une situation normalisée atteinte relativement rapidement évitera le retour de la discrimination directe qui a été observée dans la situation actuelle.

Le professeur Thimothy Harding est médecin-chef de service et directeur de l'Institut universitaire de médecine légale. La commission souhaite éclaircir certains problèmes de fonctionnement du service médical et par rapport aux relations entre le service médical et la prison. De plus il serait important de voir si le service médical pénitentiaire ne devrait assurer les prestations de soins dans tous les lieux de détention genevois.

Le service médical de Champ-Dollon a été créé dans le but de proposer des soins équivalents à ceux proposés à l'extérieur, mais toutefois adaptés aux personnes en détention et tenant compte de la rupture que représente l'incarcération et de la rupture que représente également la sortie, assortie pour certains détenus d'une expulsion. Son fonctionnement est certes connu, mais des questions d'actualité se sont posées et des problèmes ont été formulés de manière implicite ou explicite par différents intervenants.

Les deux quartiers médicaux, le quartier cellulaire de l'Hôpital et le quartier cellulaire psychiatrique, fonctionnent plutôt bien.

L'accès au plateau technique des HUG est assuré. Bien sûr la localisation du QCH au sous-sol est peu appropriée ; une solution devrait être trouvée à brève échéance tant pour les patients que pour le personnel. Un déménagement dans les étages a déjà été étudié. Il serait très souhaitable de réactiver ce projet ou une variante similaire.

La situation du quartier cellulaire psychiatrique est un peu différente. Aujourd'hui il est surchargé. Initialement destiné aux détenus de Champ-Dollon pour des hospitalisations de courte durée, il a très rapidement reçu des demandes pour accueillir des personnes détenues dans toute la Suisse romande. Et plus récemment, le QCP a reçu plusieurs demandes du reste de la Suisse. Autre problème important, l'absence de place pour les internements selon l'art. 43, al.1 CPS. Cette surcharge du QCP s'explique par l'évolution sur le plan judiciaire. De plus en plus de peines sont prononcées sous forme de mesures d'internement. Et cette évolution semble se poursuivre. Ce service est en surcharge permanente ; chaque admission implique la sortie d'un des patients. La demande augmente régulièrement et il n'est pas certain que l'ouverture de l'unité psychiatrique aux EPO résoudra le problème. L'idée d'agrandir le quartier cellulaire psychiatrique est étudiée activement.

Les relations entre la direction pénitentiaire et le service médical : En tant que responsable du service médical pénitentiaire, le professeur Harding ne cherche pas une relation étroite, car la mission d'un service médical n'est pas la même que la mission du directeur de la prison. La mission est de soigner et de répondre aux besoins des patients. Le service pénitentiaire doit principalement répondre à des objectifs sécuritaires et de réinsertion. Il existe une tension constante entre ce que le service médical souhaite faire, ce qu'il fait et ce que le directeur de la prison doit faire. A l'époque, l'entente entre le service médical et la direction était bonne. Le directeur avait bien compris l'importance d'un service médical indépendant et assumant ses responsabilités. Il y avait alors une sorte de gentleman's agreement ; rien véritablement d'écrit. Au changement de directeur il y a eu une volonté de redéfinir les fonctions et les rôles. Quasiment une volonté de rattacher le service médical au service pénitentiaire, alors même que le mouvement en Europe va dans le sens de la situation existant à Genève depuis 25 ans. En particulier le directeur souhaitait des informations sur les détenus qui relevaient du secret médical, ce qui n'a pas manqué de générer des tensions. Par exemple, le service ne donne pas le diagnostic d'un patient pour justifier un transfert à l'Hôpital. Il a fallu clairement réaffirmer cette position. Autre objet de tension, la volonté de la nouvelle direction de la prison de vouloir recourir à l'assurance maladie des détenus pour couvrir les frais médicaux. Cette décision, qui peut se comprendre, a été prise sans l'avis du service médical. Les salaires du personnel du service médical sont pris en charge par les HUG, de même que l'équipement médical, lequel relevait à l'origine du DJPT. La pharmacie relève du budget de la prison. Au-delà des tensions, un groupe de travail examine comment assurer un financement cohérent, transparent et suffisant pour offrir des prestations de qualité en n'oubliant pas que beaucoup de détenus n'ont pas d'assurance maladie et qu'un très faible nombre d'entre eux pourraient être assurés au sens de la LAMal.

Le Dr François Courvoisier, médecin spécialiste FMH en médecine interne, est installé à Carouge depuis une quinzaine d'années. En parallèle, il fournit des consultations en médecine légale. Depuis le 1er janvier 1999, le professeur Harding lui a demandé de s'occuper du quartier cellulaire de l'Hôpital.

La commission se pose trois questions : le fonctionnement du service médical pénitentiaire au sens large, la relation entre le service médical et la direction du service pénitentiaire, en particulier Champ-Dollon, ainsi que la relation entre le service médical pénitentiaire genevois avec les autres services médicaux pénitentiaires relevant du concordat romand.

Le quartier cellulaire de l'Hôpital comprend dix lits situés au sous-sol de ce dernier. En vertu du concordat romand, il reçoit des patients prévenus ou condamnés de Suisse romande et du Tessin. Ce sont les médecins-répondants des différents établissements relevant du concordat qui envoient ces patients à Genève. Une fois qu'il est arrivé au quartier cellulaire de l'Hôpital, le patient a accès à toutes les consultations de l'Hôpital et de ses services. Du point de vue de la qualité des soins, il n'est donc pas prétérité par rapport aux autres patients de l'Hôpital. Sa situation est parfois même meilleure dans la mesure où les dix lits du quartier cellulaire n'accueillent souvent que deux ou trois personnes. L'équipe médicale est composée d'un chef de clinique, d'un médecin-assistant et d'infirmières.

La situation des patients du quartier cellulaire de l'Hôpital est bonne du point de vue de la qualité des soins proposés. Il relève toutefois un point très négatif : les locaux. Situés en sous-sol, équipés de fenêtres opaques, ces locaux ne s'avèrent pas évidents à vivre pour l'équipe soignante, en particulier en été. La chaleur y est intense et il n'existe pas de lieu de promenade.

Autre problème, chaque fois que l'équipe soignante demande par exemple une radiographie à l'extérieur du quartier cellulaire, le détenu doit être accompagné par deux policiers. Il faut donc à chaque fois faire appel au poste du Bourg-de-Four, sachant qu'il arrive souvent que les policiers soient occupés ailleurs.

Le respect du secret médical est garanti par la séparation entre le local administratif et juridique situé à l'entrée du quartier cellulaire et le local médical proprement dit. Les gardiens se tiennent donc à l'extérieur du local médical. Il n'y a d'ailleurs pas de problème particulier entre les gardiens et l'équipe soignante du quartier cellulaire.

Aucun détenu n'arrive directement au sous-sol du quartier cellulaire sans être auparavant passé par les urgences de l'Hôpital. Selon les soins requis ou le problème pathologique, le détenu peut aussi séjourner dans les étages de l'Hôpital avec deux policiers à la porte de sa chambre qui le surveillent et qui parfois le protègent contre une intrusion extérieure. La règle veut que les policiers ne rentrent jamais dans une salle de traitement. Un rappel est régulièrement adressé en ce sens aux chefs de services. Malheureusement, il y a de temps à autre des écarts. Certains assistants, peut-être par crainte et par peur, les laissent entrer ou leur proposent d'entrer. Ce n'est en général pas la police qui force la porte. Le système fonctionne donc plutôt bien, même s'il faut faire des « injections de rappels » pour préciser les règles.

Dans la mesure où il passe peu de temps dans le service médical de Champ-Dollon, le Dr François Courvoisier peut apporter un éclairage avec une certaine réserve. Il assure des consultations de patients, supervise le travail des assistants (actuellement deux), règle les différents problèmes qui se posent par rapport aux infirmières et prodigue une modeste formation. Toutes les consultations spécialisées se déroulent dans les polycliniques des HUG, à l'exception de l'ophtalmologie, de la petite chirurgie et des consultations ORL. Les médecins qui assurent ces trois types de consultations viennent une fois par mois à Champ-Dollon.

La commission a constaté divers problèmes en ce qui concerne le service médical, notamment en fin de semaine. La logique du secret médical ne semble pas toujours respectée. Certaines décisions prises dans la logique socio-médicale sont contestées par le pénitentiaire. Les relations entre ces deux entités semblent plus électriques que par le passé. Avec prudence, le docteur Courvoisier estime que le secret professionnel est bien respecté. La frontière entre les gardiens et le personnel médical lui paraît adéquate. Peut-être qu'une amélioration pourrait être apportée pour l'accueil des détenus. Tout nouvel arrivant doit être vu par le service médical. Les infirmières présentent le service aux arrivants et leur en expliquent le fonctionnement. Il apparaît toutefois difficile pour les détenus de s'exprimer en toute liberté sachant qu'un gardien se tient devant la porte de la cellule. Les infirmières rapportent ensuite chaque matin les résultats des visites d'entrée au service médical. Tous les patients signalés par les infirmières sont ensuite vus dans le courant de la matinée par un médecin. L'impression du Dr François Courvoisier est qu'aucun patient n'est resté longtemps sans soin. Le service médical n'est pas fermé le samedi et le dimanche. Le médecin-assistant se rend à Champ-Dollon le samedi ni le dimanche. Quant à la pharmacie, elle n'est pas fermée le week-end. Les gardiens ne font pour leur part pas office de barrières. Au contraire, ils en font parfois trop par rapport au service médical, dans le sens où un mal de tête devient souvent une urgence. Ceci étant, si un détenu arrive à Champ-Dollon sous traitement, il n'est pas admissible de le laisser quelques jours sans traitement. Il y a sans doute des réclamations à ce sujet provenant de patients au caractère particulier. Il y a aussi l'impatience ressentie par des personnes détenues. C'est souvent un mélange. L'urgence perçue ne correspond pas toujours à l'urgence réelle.

En relation avec les personnes en traitement de substitution aux opiacés ou les personnes ayant des problèmes liés à la consommation de psychotropes, la situation a évolué ces dernières années. Autrefois, il n'y avait jamais de thérapie de maintenance pour les personnes en détention. La seule possibilité thérapeutique tolérée était le sevrage. Aujourd'hui, une personne dépendante voit sa cure poursuivie sur la base de ce que lui fournissait le médecin ou le service traitant.

Gérée par les infirmières du service médical, une « antenne » permet aux détenus d'obtenir des réponses à toutes les questions de santé, de prévention des risques et de possibilités de prise en charge non seulement à Genève, mais aussi en France voisine.

Concernant la mise à disposition de matériel d'injection, formellement imposé par le Grand Conseil et le Conseil d'Etat avec l'objectif de limiter la transmission du VIH, du VHB et du VHC, le service médical est pris entre des objectifs apparemment contradictoires, notamment les objectifs de santé publique et de sécurité publique. S'ajoute à cela la difficulté d'admettre que les psychotropes circulent en prison comme ailleurs. Que les psychotropes légaux ou illégaux soient interdits en prison fait partie du règlement de fonctionnement de l'établissement. Il y aurait une certaine hypocrisie ; on refuse d'éviter un problème socialement et individuellement bien plus dramatique. Un bon système semble être celui mis en place au pénitencier pour femmes d'Hindelbank, soit des distributeurs de matériel dans chaque section, accompagné par un soutien social et psychologique.

M. Didier Pingeon travaille surtout en matière de délinquance juvénile, ainsi que dans le domaine des peines et des mesures. Il n'a pas d'expérience particulière de la détention des femmes, mais a eu l'occasion d'étudier cette problématique par le biais de différents travaux.

Certaines questions s'avèrent incontournables lorsqu'on visite un établissement de détention. Il y a certaines questions que l'on doit se poser lorsqu'on visite une structure carcérale, qui plus est s'il s'agit d'une structure pour femmes. Il a pour sa part eu l'occasion de se les poser voici quelques années au cours de différentes visites, notamment pour le compte de l'Observatoire international de la détention. Il suggère d'aborder ces questions avec la commission.

Les femmes ne sont pas traitées de la même manière que les hommes dans les sociétés de type patriarcal. La délinquance des femmes a pour sa part évolué au cours de ces dernières années. Elle se caractérise aujourd'hui par un rajeunissement et par une augmentation des délits traditionnellement réservés aux hommes, comme l'escroquerie, l'abus de confiance ou le commerce de stupéfiants. Les femmes deviennent plus fréquemment que par le passé cheffes de bandes. Du fait que les femmes apparaissent aujourd'hui dans des secteurs desquels elles étaient jusque-là traditionnellement absentes, cela bouscule un certain nombre d'idées reçues, le postulat étant pour certains que la femme n'est pas plus délinquante que l'homme. Beaucoup de stéréotypes et de préjugés tournent autour de la femme selon leur attitude et les délits commis. Le préavis sera donc plus favorable, l'excuse sera plus facile, dès que l'image traditionnelle de la femme sera respectée. Le préavis sera moins favorable dès que la femme casse l'image que l'on attend d'elle. Pour s'assurer l'indulgence, la femme doit apparaître face à la police, au procureur ou au juge telle qu'on l'attend et ne doit pas ruer dans les brancards. Il y a des attentes relatives au justiciable qui diffèrent selon son sexe. Si la femme adopte un comportement conforme au rôle que l'on attend d'elle, l'attitude sera bienveillante. Sinon, elle sera « saquée ».

On observe une tendance plus importante à la psychiatrisation des femmes, car la délinquance des femmes est généralement considérée comme anormale. Ce qui pose un problème du point de vue des droits de la personne, car autant l'on sait par avance le temps que l'on passe en prison, autant la durée du traitement n'est pas connue à l'avance.

Il faut, dès lors, opérer une rupture logique, épistémologique, et se demander pourquoi la femme suscite une telle réaction sociale. C'est la réaction sociale qui crée cet effet de ghetto autour de la femme, que l'on retrouve autour de certaines structures pénitentiaires. La société est peu tolérante face à la femme alcoolique. C'est la même chose pour la femme délinquante. La manière de traiter la femme délinquante sera dès lors différente.

Diverses questions doivent se poser chaque fois que l'on visite un établissement de détention.

Elles commencent par les questions spécifiques aux prisons pour femmes. Il y a tout d'abord la question des préjugés et de des représentations qui accompagnent les femmes en détention. Il s'agit de s'interroger sur l'image de la femme en détention, notamment du point de vue de la direction et du personnel de l'établissement. La deuxième question a trait à la gestion de la situation « être mère en prison ». Il s'agit notamment d'être au clair sur la situation des enfants et sur la limite d'âge tolérée en prison. La troisième question concerne la tendance à la psychiatrisation de la délinquance féminine. On peut imaginer à ce propos qu'il existe une détention psychiatrisée. On peut dès lors se demander si les femmes sont sous traitement médicamenteux. On peut s'interroger sur la part de la demande et sur la part de la prescription plus ou moins autoritaire. La quatrième question a trait au nombre de femmes détenues pour une activité liée à la drogue. On peut se demander à ce sujet comment la prison s'adapte à cette population particulière. La cinquième question vise les remises de peines et les mises en liberté conditionnelle. Deux études, l'une française, l'autre canadienne, ont suspecté qu'il serait plus difficile pour une femme d'obtenir une remise de peine. Il conviendrait dès lors de s'interroger sur les critères en la matière. La sixième question concerne la place de la féminité, la valorisation de l'image de soi et la problématique des parloirs intimes.

La première question d'ordre général a trait à la sanction. L'enfermement a été décrété comme étant la sanction officielle. Il existe cependant une série d'autres sanctions qui s'ajoutent en prison, comme s'il y avait une loi interne supplémentaire. On peut par exemple penser à l'absence de confort minimum, aux limitations dans le domaine de l'hygiène, à la nourriture, au manque d'intimité ou à la censure. La deuxième question a trait à la rupture imposée par la prison au niveau des liens sociaux. On peut s'interroger à ce propos sur la tentative ou la pratique de maintien ou de restauration du lien social pendant la détention, que ce soit au niveau familial, professionnel ou en ce qui concerne les réseaux sociaux. La troisième question vise l'utilisation du temps en prison afin de ne pas faire uniquement de l'occupationnel. On peut se demander ici ce qui est fait pour développer des compétences et des qualifications chez les détenus et on peut s'interroger sur les apprentissages et les études possibles en prison. La quatrième question concerne l'approche socio-thérapeutique proposée aux détenus toxicomanes. La cinquième question a trait à la formation des surveillants. On peut se demander à ce sujet s'il existe une autre fonction que celle de gardiennage et de sécurité. On peut s'interroger sur la nature et l'efficacité des services parallèles proposés en prison. C'est le sens de la sixième question. La question vise ici notamment le service médical, le service social ou encore le service socio-éducatif. Il s'agit par exemple de se demander s'il s'agit de services périphériques. La septième question concerne la connexion avec la réalité extérieure, les interactions et les démarches entreprises pour éviter la déconnexion. On peut ici s'interroger sur la philosophie de l'institution. La huitième question vise plus directement les mineurEs et soulève le problème de la présence de mineurEs dans la prison. Il s'agit de se demander s'il y a des mineurEs dans la prison, même s'ils sont placés dans une section particulière. Il semble par exemple que 115 détenus mineurs soient passés par Champ-Dollon en 1998. Une telle détention demeure cependant hors la loi, même si les mineurs sont placés dans une section particulière. Le neuvième point enfin pose la question du nombre de détenus ayant profité d'une peine réparatrice ou alternative, sachant par exemple, à propos des bracelets électroniques, que la prison est dans le corps, alors qu'avec l'établissement pénitencier, le corps se situe dans la prison même.

Lors des deux premières visites, l'ambiance est tendue, le directeur est pratiquement le seul à s'exprimer, les autres membres de la direction se bornent à fournir quelques éléments factuels.

Champ-Dollon compte, le 10 février, 336 personnes détenues se répartissant de la manière suivante : 308 hommes et 28 femmes, 18 détenus au niveau administratif, 37 personnes en exécution de peine, 201 personnes dépendant de l'instruction, 6 personnes internées, c'est-à-dire faisant l'objet d'une mesure, 1 personne dépendant de l'Office fédéral de la police, 8 personnes à La Pâquerette, 57 personnes dépendant du Parquet, 2 personnes ayant fait recours et 6 personnes mineures dépendant du Tribunal de la jeunesse. Soixante-trois nationalités sont représentées.

La mission des gardiens responsables de la gymnastique a été récemment redéfinie. Ce secteur a été renforcé d'une unité et un tournus a été organisé pour que chaque détenu puisse avoir deux temps de gymnastique par semaine. Ce changement a fait, comme tout changement, des heureux et des mécontents. Les mécontents sont les détenus qui bénéficiaient jusqu'à présent de trois temps de gymnastique par semaine, alors que les heureux sont ceux qui n'allaient pas du tout à la gymnastique jusque-là. Quatre leçons de gymnastique sont à présent données chaque jour, au lieu de deux par le passé, étant précisé qu'une leçon de gymnastique dure une heure et demie. Dans la pratique, les gardiens posent chaque semaine la question à chaque détenu s'il est intéressé à pratiquer de la gymnastique. Il peut accepter ou refuser.

Le travailleur qui choisit d'aller à la gymnastique renonce à aller travailler dans la demi-journée au cours de laquelle son unité peut aller à la gymnastique. Pour ne pas être pénalisé sur le plan du pécule, la prison considère qu'il s'est absenté de son travail pendant une heure, soit une heure de gymnastique. S'agissant des promenades, il peut arriver qu'un détenu qui a choisi d'aller à la gymnastique et qui travaille le reste de la journée ne puisse pas aller à la promenade des travailleurs. Sur un cycle de trois semaines, il y aura forcément un jour pendant lequel il ne pourra pas aller à la promenade. Mais sur la totalité du cycle, il aura finalement son quota de promenades. En d'autres termes, les modifications intervenues en ce qui concerne la gymnastique n'ont apporté aucun changement sur le reste des activités.

Le dernier pointage statistique montre qu'il y a 98 % de lecteurs à Champ-Dollon. Ce qui signifie que tous les détenus ont accès au livre au sein de la prison et que toute le monde en profite. Les bibliothécaires passent deux fois par semaine à Champ-Dollon. Cela permet de couvrir tous les secteurs de la prison. Chaque semaine, chaque détenu peut emprunter une dizaine de livres. Le système fonctionne sur le principe du bibliobus qui est appliqué à Champ-Dollon. A l'instar du bibliobus qui se déplace dans les communes, les collaborateurs des bibliothèques municipales se déplacent avec des chariots de livres - en langue française et en langues étrangères - et présentent aux détenus un choix de livres. A tout moment, chaque détenu peut demander un livre. S'il est disponible, il peut l'obtenir dans la journée. S'il n'est pas disponible, le détenu devra attendre la prochaine visite des collaborateurs des bibliothèques.

Depuis deux ans, les places d'ateliers ont augmenté de 20 %. Actuellement, 120 places sont disponibles, toutes occupées. Il est prévu de disposer à terme de plus de 200 places de travail, ce qui permettrait de faire travailler tous les détenus séjournant plus de huit jours à Champ-Dollon.

Les conditions de détention ont été globalement reconnues comme plutôt bonnes par les détenus entendus.

Certains problèmes ont cependant été mentionnés. Des détenus rapportent notamment des difficultés rencontrées avec un chef d'unité. Il s'avèrerait que le courrier de certains détenus ferait l'objet d'une double censure. Ce gardien procéderait de la même manière avec les paquets, dont certains, refusés, ne sont pas revenus à leurs destinataires. Celui-ci se servirait également dans les plateaux-repas destinés aux détenus. Il semblerait par ailleurs qu'un détenu de cette unité aurait demandé à être entendu par la commission lors de sa précédente visite, demande qui ne s'est pas concrétisée. Enfin, ces détenus rapportent que ce même gardien aurait certaines attitudes un peu brusques.

Le courrier entrant et sortant est censuré par l'autorité, l'instruction ou le Parquet s'ils le jugent nécessaire. L'exécution est effectuée par la prison. Font cependant exception à la censure le courrier officiel provenant de la justice genevoise, le courrier provenant de la Commission des visiteurs officiels, le CPT et le courrier des avocats, avec ici un contrôle particulier effectué par les huissiers-avocats afin de s'assurer que l'avocat expéditeur du courrier est bien constitué pour le détenu destinataire. Cette mesure a pour but d'éviter que des avocats ne cherchent à trouver des clients par le biais du courrier. Ceci étant, il faut pouvoir lire sur les enveloppes que les courriers proviennent bien d'études d'avocats. Un certain flou règne autour du courrier officiel. La direction pourrait cependant redéfinir le contexte de la censure dans le cadre de ses contacts avec les chefs d'unités.

Les personnes détenues peuvent s'inscrire pour rencontrer la Commission des visiteurs jusqu'à la veille au soir. Si toutefois une demande est formulée le jour même, la direction ne s'y opposera pas. C'est ce qui s'est passé avec la situation mentionnée ; le détenu s'est inscrit au dernier moment et on ne l'a pas laissé rencontrer la commission contrairement à ce qu'affirme le directeur. Clairement ce droit est permanent, dans la mesure où chaque détenu peut faire la demande d'audition n'importe quand.

Une femme détenue, s'exprimant au nom de plusieurs, a notamment proposé de féminiser la liste de l'épicerie. Elle a également soulevé le problème du service médical, constatant que certains détenus pouvaient demeurer deux ou trois jours sans traitement médicamenteux.

Chaque nouvel arrivant est vu par le personnel du service médical le jour même de son arrivée. L'infirmière l'interroge pour savoir s'il est sous traitement médical ou s'il se plaint de mauvais traitements. Les nouveaux arrivants sont vus à 19 heures, alors que la tournée de distribution des médicaments par le personnel du service médical débute à 21 heures. Les exceptions sont les personnes arrivant après 19 heures, elles ne seront vues que le lendemain matin par les infirmières. Un rendez-vous avec un médecin aura lieu effectivement plus tard.

Des efforts ont été faits pour offrir des produits féminins à l'épicerie. Des produits sont proposés aux femmes. Ceci dit, la prison accueille 25 ou 26 femmes, dont chacune a un produit favori. Il n'est pas possible de disposer d'un rayonnage proposant des produits convenant à chacune d'entre elles. Les collaborateurs de l'épicerie ne peuvent pas faire le tour de la ville pour s'approvisionner. Une liste de produits vendus à un prix abordable a donc été fixée. Les journaux sont interdits au sein de la prison, sauf sur abonnement ; il n'y a donc que des abonnements de journaux distribués par une seule entreprise suisse qui sont proposés dans la liste.

Que se passe-t-il lorsque l'un des enfants devient majeur au cours de l'incarcération d'un détenu ? La famille peut-elle toujours venir lui rendre visite de façon unie ?

Lorsqu'une personne est majeure, elle compte pour une visite. Si elle est mineure, elle ne compte pas pour une visite, mais il faut alors utiliser le parloir enfants.

Chacun des groupes de détenus auditionnés a fait état de remarques par rapport à la formation et à la pédagogie, la suppression du poste d'enseignant est particulièrement mal perçue.

La réponse fournie par la direction est touffue et peu convaincante et laisse la commission très mal à l'aise. Comme le problème sera réglé quelques mois plus tard par l'engagement d'un nouvel enseignant, nous ne nous étendrons pas !

La direction de la prison mettra tout en oeuvre pour faciliter le travail de la commission.

Le problème de l'apparition des heures supplémentaires non compensées est un des éléments importants de la discussion avec la direction de l'établissement.

Une quinzaine de postes de gardiens n'est plus affectée à la surveillance au sens strict. Deux ou trois gardiens ont par exemple créé un nouvel atelier de démontage. Ces changements signifient que des heures supplémentaires doivent être effectuées par leurs collègues. Le départ d'un collaborateur d'une brigade (qui comprend quinze postes de travail) sous-entend trois heures supplémentaires à effectuer par semaine pour ses collègues. Si la direction laisse faire, la situation pourrait rapidement dégénérer, sachant que ce sont quinze postes au total qui sont concernés. Un cercle vicieux s'installe. Car pour récupérer leurs heures supplémentaires, les gardiens doivent pratiquement effectuer de nouvelles heures supplémentaires. Il y a nécessité de prendre des mesures urgentes en prenant en compte un certain nombre de paramètres. Il y a eu 30 000 heures supplémentaires en 1999. De même en 2000. Ces 60 000 heures supplémentaires seront difficiles à rattraper. Il faudra peut-être quinze postes nouveaux pour y parvenir.

La situation doit être considérée sur le long terme. La prison de Champ-Dollon est entrée en service en 1977. En 2007, l'établissement enregistrera quarante départs à la retraite. En deux ou trois ans, il y aura près de septante départs à la retraite. En fonction de cette situation, le département a accordé cette année à la prison dix postes par anticipation, étant entendu qu'il n'est pas possible de former d'un seul coup trente ou quarante personnes. Les personnes qui seront prochainement formées viendront combler ces départs à la retraite. La situation devrait revenir à un état d'équilibre en 5 à 7 ans.

Il apparaît d'autre part que le climat s'est amélioré.

Un détenu a tenu à remercier la direction de la prison pour la propreté de l'établissement, comparaison étant faite avec les violons du poste de Carl-Vogt.

Le service médical a également fait l'objet de récriminations. C'est surtout le temps d'attente qui est mis en exergue. La difficulté d'accès au physiothérapeute a également été soulignée.

Des détenus d'ex-Yougoslavie se retrouvent avec des détenus du Kosovo ou d'Albanie. Si cela arrive dans une même unité, des problèmes apparaissent.

La prison compte, le jour de la visite, 69 détenus originaires des Balkans, dont 38 Albanais, 10 Kosovars et 21 d'ex-Yougoslavie. L'entente n'est pas très bonne entre Serbes et Kosovars. Or, la prison accueille 3 Serbes. Le personnel a été obligé de les sortir des demi-unités et de les traiter comme des isolements volontaires. Ils ont ainsi été placés dans la demi-unité accueillant les délinquants sexuels. Et comme entre Serbes l'entente n'est pas non plus très bonne, il a également fallu les séparer aussi.

Par ailleurs, deux détenus ont fait part d'un sentiment de persécution de la part d'une majorité de gardiens, pratiquement jusqu'au point de les forcer à commettre une bêtise pour qu'ils soient envoyés au mitard.

Il n'y a bien sûr aucune volonté de persécuter quiconque. Il est vrai que certains actes ou situations amènent des mesures, et lorsqu'ils se cumulent cela fait beaucoup. Par exemple, lorsqu'un détenu a successivement brisé la fenêtre de sa cellule, agressé un gardien, s'est battu avec d'autres détenus, a injurié le personnel et a eu des comportements indignes à sa fenêtre située au-dessus de la promenade des femmes. Tout ceci amène des sanctions, même relativement sévères puisque le bris de la fenêtre est considéré comme une tentative d'évasion.

Demande des détenues par rapport à l'accueil des nouvelles arrivantes. Vu la tension engendrée par la situation, il leur est difficile de lire et de comprendre les documents qui leur sont remis à leur arrivée. Une explication orale serait souhaitée. D'autre part, les possibilités de ne pas partager la cellule avec telle ou telle détenue devraient être éclaircies. Les détenues souhaitent par ailleurs pouvoir avertir, le cas échéant par le biais d'une tierce personne, leur famille de leur détention.

Les gardiens rencontrent tous les détenus, hommes et femmes, le lendemain de leur arrivée. Ce que souhaitent en fait les détenues, c'est un peu un retour à l'ancien système, c'est-à-dire un contact plus étroit avec le personnel, être un peu plus chouchoutées par le personnel. Ce qui n'est pas possible en regard de l'effectif actuel du personnel. Et il est vrai que nombre de nouveaux détenus sont particulièrement stressés.

La création d'unités spécifiquement destinées à un type de détenus, en particulier pour les consommateurs de psychotropes, amène plus d'inconvénients que d'avantages. Cependant des efforts sont faits pour systématiquement répondre à la demande des détenuEs de ne pas avoir à partager leur cellule avec une personne qui dérange trop. Il est d'ailleurs souhaitable de les séparer pour limiter les situations de bagarres ou de crises.

La proposition de création d'une unité du style Pâquerette pour les femmes dépasse la prison de Champ-Dollon, mais devrait être examinée à l'occasion de la réforme pénitentiaire.

Plus grande souplesse est souhaitée en ce qui concerne les appels téléphoniques. Un détenu souhaite maintenir son activité et préserver ses contacts avec ses clients.

Les détenus et les détenues souhaitent évidemment signaler à leur famille leur incarcération. Tout dépend de la procédure pénale. Il existe un accord avec la police et la sûreté. Si celles-ci sont habilitées à passer un tel coup de téléphone pour les personnes arrêtées, elles le feront. Si le détenu passe devant le juge avant d'arriver à Champ-Dollon, il faut espérer que le juge donne son accord à la personne concernée. Il arrive cependant que le juge donne son autorisation oralement, mais que le détenu n'ait pas la possibilité de téléphoner avant d'arriver à Champ-Dollon. Une fois sur place, les gardiens doivent bien évidemment vérifier la véracité de cette autorisation et demander une autorisation formelle auprès de l'autorité compétente. Il peut alors arriver que les esprits s'échauffent dans l'attente de cette autorisation formelle. Ceci étant, le détenu a toujours la possibilité d'écrire lorsqu'il se trouve à Champ-Dollon. L'écriture prend bien sûr plus de temps que le téléphone pour parvenir à son destinataire.

L'organisation interne de la prison fait que les appels téléphoniques sont autorisés au rythme d'un appel tous les quinze jours. La prison de Champ-Dollon fournit un grand effort à ce sujet, comparativement à d'autres établissements où la politique s'avère plus restrictive. Le principe de l'égalité de traitement s‘applique bien évidemment. Des exceptions sont acceptées de temps en temps, mais vraiment de temps en temps, en cas de circonstances particulières. Pour améliorer la situation on pourrait imaginer un téléphone sans fil par unité, ce qui ne devrait pas changer beaucoup de choses en terme de charge de travail pour les gardiens. En terme de réinsertion ou de limitation de la désinsertion, il serait judicieux de permettre aux détenus de poursuivre leur activité professionnelle. En préventive, cependant, la situation est sous contrôle du juge d'instruction et dans plusieurs situations le téléphone pourrait être utilisé à des fins différentes.

Une plus grande souplesse par rapport aux visites est également souhaitée lorsqu'un visiteur vient de loin ou lorsqu'une famille vient visiter un détenu.

D'une façon générale, le parloir est autorisé une fois par semaine à raison d'une heure par détenu. Si le visiteur vient de loin, il est possible d'organiser un parloir de deux heures, pour autant que la demande soit formulée par le détenu ou son visiteur, en principe deux semaines avant la date souhaitée.

Certains détenus regrettent le manque de disponibilité des gardiens.

Une écoute plus grande implique du temps. La prison de Champ-Dollon a certes été conçue dans une perspective d'encadrement. Preuve en est par exemple le fait que les cellules soient dépourvues d'interphones, mais uniquement équipées de sonnettes. Ce système oblige les gardiens à se déplacer. Chaque déplacement de détenu s'effectue avec un gardien au minimum. Comme l'établissement encourage la sortie de cellule, tous les déplacements coûtent en personnel. Il ne reste dès lors plus beaucoup de temps pour l'encadrement. C'est cependant une demande que la prison pourrait soumettre au Grand Conseil. Une augmentation de l'effectif du personnel permettrait d'améliorer l'encadrement des détenus.

Une expérience de table ronde au sein de l'unité des femmes semble très appréciée.

L'animateur que l'établissement est actuellement en train d'engager pourrait se voir confier la tâche d'étendre à tout l'établissement les tables rondes, qui se sont spontanément mises en place dans la section des femmes détenues, sous une forme, certes, encore à définir.

Plusieurs détenus se sont plaints de la lenteur de l'impression des documents qu'ils confient au personnel. Il faut compter actuellement deux semaines, alors que deux jours au plus suffisaient à l'époque.

La prison fournit aux détenus qui le souhaitent un ordinateur. Les ordinateurs personnels, provenant de l'extérieur, ne sont par contre pas acceptés pour des raisons de sécurité et de confidentialité. Le courrier entrant et le courrier sortant sont contrôlés. Il apparaît par contre impossible de contrôler la totalité d'un disque dur, d'où l'interdiction d'introduire des ordinateurs personnels.

S'agissant de l'impression des textes, il faut savoir qu'une personne en était responsable ; elle est malheureusement décédée au printemps dernier et n'a pas été remplacée. L'établissement est en train de mettre en place un nouveau système, en mettant une disquette à disposition de chaque étage. Il n'y a par contre pas d'imprimante à mettre à disposition. Si l'établissement en disposait, il en placerait dans les cellules, de façon à ce que les postes de travail soient composés d'un PC, d'un écran et d'une imprimante.

Question du délai de distribution du courrier. Certains courriers semblent faire l'objet d'une lecture de la part des gardiens.

Tout courrier entrant et sortant est contrôlé. Lorsqu'un courrier provient du Palais de justice, il est contrôlé par les huissiers de Champ-Dollon. Une fois le contrôle effectué, le courrier est agrafé et distribué dans la case de l'unité. Il est ensuite remis fermé au détenu. Quant au courrier sortant, il n'est pas lu par les gardiens. Un gardien peut toujours tomber sur une enveloppe ouverte lors de la fouille d'une cellule. Certains la regardent rapidement, d'autres avec plus d'attention. Certains gardiens peuvent mettre plus d'assiduité que d'autres dans la fouille.

Il a également été souhaité par les détenus de pouvoir changer plus souvent la glace qu'ils utilisent dans leur glacière.

Chaque détenu ne reçoit qu'un jeu de glaçons synthétiques, nettoyés et désinfectés, par jour. Un troisième jeu de glaçons a été « mis en service » tout récemment. Un jeu se trouve ainsi dans la glacière de la cellule, un jeu dans le congélateur d'étage et un jeu dans la cuisine. Dans ce dernier cas, il y reste 48 heures, ce qui permet une meilleure congélation et une efficacité de refroidissement meilleure.

Un détenu a également souhaité pouvoir bénéficier plus souvent du parloir interne.

Le parloir interne peut être utilisé par les couples qui ont vécu ensemble avant leur incarcération. Les deux personnes concernées doivent en faire la demande auprès de la direction. Celle-ci vérifie alors la véracité de cette vie commune. Si la demande est acceptée, le couple a droit à un parloir interne d'une demi-heure deux fois par semaine, soit le mardi et le samedi. Un séjour minimum d'un mois est nécessaire avant que la demande ne puisse être déposée. Il précise que la direction n'a jusqu'à présent pas reçu de demande provenant d'un couple d'hommes ou de femmes. En principe la direction donne son accord, sous réserve des limites liées à l'instruction.

Les détenus ont droit à deux séances de sport d'une heure et demie par semaine. Il faut cependant savoir que Champ-Dollon compte douze unités, dix unités d'hommes, une unité de femmes et La Pâquerette. D'où les problèmes d'organisation que les heures de sport impliquent. Quant aux mineurEs, ils-elles ont droit depuis peu à deux séances de sport par semaine. Il s'est toutefois avéré nécessaire de prendre la disponibilité quelque part pour y parvenir. C'est l'unité des nouveaux arrivants qui a fourni cette disponibilité.

Certains détenus se déclarent prêts à donner des cours aux autres détenus.

Certains détenus se sont annoncés auprès de la commission pour donner des cours. C'est la première fois qu'une telle proposition est formulée. La direction doit y réfléchir, mais il paraît de prime abord, difficile d'imaginer que des détenus donnent des cours à d'autres détenus. Les cours de sport nécessitent la présence de spécialistes. S'il s'en trouve un parmi les détenus qui fait du sport, il pourrait éventuellement participer au travail des moniteurs. La situation serait par contre plus compliquée dans le cas d'un cours de français. Intention louable, mais posant de nombreux problèmes pratiques, en particulier dans une préventive.

Pourquoi ne peut-on que difficilement bénéficier de régimes alimentaires, demandent certains détenus ?

Des certificats médicaux sont de temps en temps délivrés, qui prescrivent des menus sans sel ou dépourvus de sauce piquante. L'établissement respecte dans la mesure du possible ces régimes alimentaires sur prescription médicale, même si des prescriptions relatives à la viande peuvent s'avérer plus difficiles à appliquer pour les cuisiniers.

Un détenu reprend la question qu'il a formulée dans la pétition déposée au Grand Conseil concernant les petits cadeaux aux enfants lors des visites.

Des enfants souhaiteraient amener des dessins dans les parloirs pour les remettre à leur père ou les pères qui voudraient offrir des bonbons à leurs enfants. Un système particulier a été mis en place. Les dessins doivent transiter par un gardien. Quant aux bonbons, ils peuvent être acquis par les détenus au moyen de bons de lait.

Le 13 avril, la visite prévue n'a pu avoir lieu, le directeur officiant à l'époque de la prison ne savait apparemment pas que la commission avait planifié une visite et sans membre de la direction pas de visite ! Le gardien responsable a vérifié l'identité des députés et annoncé qu'il n'avait pas l'autorisation de nous laisser entrer. Grâce aux sandwichs amenés par le service du Grand Conseil et l'eau aimablement fournie par la direction des HUG, la commission s'est « détendue » dans les couloirs du sous-sol des HUG ! Une heure plus tard, comme le directeur ne semblait pas vouloir donner un ordre au gardien, eh bien la commission est repartie ! Rien d'autre à ajouter sur cet événement grotesque et ce comportement caractériel.

Le quartier cellulaire de l'Hôpital cantonal est formé d'un sas d'entrée, d'un local pour les gardiens et d'un long couloir donnant sur cinq chambres de deux lits chacune, soit dix lits au total. S'y ajoutent encore un local pour les infirmières, un local pour les médecins et un parloir. Le couloir sert de lieu de promenade. Le quartier cellulaire est situé au sous-sol de l'Hôpital, mais il donne de plain-pied sur le boulevard de la Cluse. Les fenêtres donnant sur le boulevard sont munies de barreaux et fermées par des vitres opaques.

Le quartier cellulaire est considéré comme une section hospitalière de la prison de Champ-Dollon. Il s'agit d'un lieu de soins que le canton de Genève s'est engagé à l'époque à mettre à la disposition du Concordat romand. Le nombre de cellules et de lits est un peu limité, surtout s'il s'avère nécessaire d'isoler un détenu dans une chambre, soit pour des raisons médicales, soit qu'il s'agisse d'un mineur, d'une femme ou en cas de conflits avec d'autres détenus. Dans ce cas, le détenu concerné occupe seul la chambre, le deuxième lit demeurant vide. Les promenades s'effectuent dans le couloir, un détenu à la fois. Un parloir est à disposition des détenus pour les visites et les interrogatoires de la police. S'agissant des visites, c'est le régime de Champ-Dollon qui s'applique, avec toutefois une petite souplesse possible au cas par cas.

Chaque chambre est équipée d'un poste de télévision. Depuis l'installation de ces postes, les détenus ne souhaitent plus systématiquement quitter les lieux peu accueillants avant la fin de leur traitement. L'avantage de la télévision, ce n'est pas tellement le luxe qu'elle procure, mais le calme qu'elle apporte. Il s'agit d'un moyen naturel, préférable aux médicaments propres à tranquilliser les détenus.

La moitié des patients du quartier cellulaire proviennent d'autres cantons, les autres arrivent de la prison de Champ-Dollon.

Quant aux pathologies traitées, il s'agit principalement de pathologies de type chirurgical ou de type traumatologique, ces dernières étant souvent consécutives d'arrestations mouvementées.

Le taux d'occupation du quartier cellulaire est variable. Cinq isolements suffisent à rendre le quartier cellulaire complet, ce qui ne manque pas de provoquer quelques interrogations de la part de la police. Les isolements de nature médicale s'avèrent cependant rares. Quant à la durée des hospitalisations, elle s'élève en moyenne entre une semaine et dix jours. Il y a un turnover relativement important des patients. Le quartier cellulaire a enregistré l'an passé 1600 journées d'hospitalisation. Il y a en moyenne entre 120 et 150 hospitalisations par année, nombre qui est inférieur à celui d'il y a dix ans, en lien probable avec l'augmentation de l'offre de prestations de soins à Champ-Dollon.

Le quartier cellulaire est la seule unité de l'Hôpital cantonal à accueillir et à accepter toutes les pathologies médicales. Ce qui s'avère intéressant pour le personnel soignant et pour les médecins assistants.

Le personnel est composé d'un médecin responsable, d'un médecin assistant et de neuf personnes sur le plan infirmier. Un membre du personnel soignant est présent 24 heures sur 24. La police, qui demande souvent d'effectuer des hospitalisations de nuit au quartier cellulaire, se heurte à ce sujet aux règles précises adoptées par les HUG, l'une de celles-ci prévoyant que les hospitalisations s'effectuent jusqu'à 19 heures, voire 20 heures au maximum.

Il existe une bonne collaboration entre le personnel médical et les gardiens. La présence d'une équipe fixe de gardiens permet d'améliorer la compréhension réciproque des contraintes et des nécessités de chacun, par exemple par rapport au renforcement des contrôles des « body pack » - dissimulation intracorporelle de matériel illicite.

L'Institut universitaire de médecine légale des HCUG depuis le 1er janvier 1999, ce qui facilite les procédures. En ce qui concerne les dossiers médicaux des patients, le quartier cellulaire cherche à rendre le plus anonymes possible ces dossiers, pour que l'on ne puisse pas identifier un patient comme issu du milieu carcéral. Les patients séjournant au quartier cellulaire ne devraient pas pouvoir être identifiés comme détenus. Il existe tout de même un problème. Le nom des détenus apparaît sur les plateaux de repas préparés par la cuisine. Ce qui n'est pas normal, notamment sur le plan de la sécurité.

Ne faudrait-il pas des « alias » pour les détenus séjournant au quartier cellulaire ? Une amélioration du système sera mise sur pied le plus rapidement possible.

Une discussion s'engage sur la possibilité de déménager le QCH dans les étages, de manière à améliorer d'une part les conditions de détention et surtout de fournir un environnement de travail correct. Tous les acteurs verraient d'un bon oeil une accélération de ce dossier, qui est en attente depuis plusieurs années ?

Des parloirs familiaux et privés ont été aménagés. L'entrée des EPO a également été transformée, tant sur le plan architectural que sur le plan technique. La division psychiatrique, offrant quatorze places, est en cours de réalisation. Une nouvelle ferme a été construite à La Colonie. Cette dernière occupe cinquante détenus. La villa, qui accueillait par le passé le secteur socio-éducatif, a été transformée. Elle accueille à présent une salle de réception pour les visiteurs, ainsi que diverses commodités pour le personnel, des salles de réunion, le bureau du médecin du personnel, une salle de loisirs, une salle de cours, une salle d'informatique et des sanitaires. Le secteur socio-éducatif a été transféré dans le bâtiment administratif.

Il y a une augmentation du nombre de détenus condamnés pour crimes sexuels, soit 52 sur 225 détenus au 31 décembre 1999, dont une vingtaine séjournent au pénitencier et les autres à La Colonie. La nécessité de la prise en charge apparaît dès lors d'autant plus importante, même si l'intégration de ces détenus s'avère paradoxalement facilitée en raison de leur nombre.

Les EPO comptent 34 nationalités différentes avec une forte proportion, plus de la moitié, de personnes provenant de l'ex-Yougoslavie.

Une société privée assure toujours la sécurité extérieure, ainsi que le contrôle des visiteurs et des véhicules, à l'exception du courrier.

La mise en place de la comptabilité analytique se poursuit selon le calendrier prévu. Les EPO travaillent actuellement sur un logiciel acquis par le service pénitentiaire. Les premiers résultats devraient être disponibles à la fin de l'année.

Concernant la formation il n'existe pas d'accord officiel entre les EPO et le Département de l'instruction publique. Les EPO font appel à des commissaires professionnels et à des enseignants spécialisés extérieurs qu'ils rétribuent. Ces enseignants interviennent à l'heure. Le réservoir contient une vingtaine d'enseignants et une vingtaine d'animateurs socioculturels. Ainsi, mis à part le responsable, les EPO n'ont pas de personnel engagé directement pour assurer l'enseignement. Il existe cependant une volonté d'aller plus en avant dans la collaboration avec le Département de l'instruction publique, dans le but peut-être de parvenir au système français, système dans lequel chaque département concerné par la formation délègue des collaborateurs à la prison.

Un atelier de traitement du matériel informatique usagé s'est ouvert au mois de janvier 2000, qui offre une nouvelle diversification des emplois.

Il existe deux parloirs pour familles qui permettent à un détenu de rencontrer cinq membres de sa famille à raison d'une rencontre par mois, chaque rencontre étant considérée comme une visite. Le parloir est ouvert de 10h30 à 16h00. Une caméra filme les lieux. Ceux-ci sont aménagés avec une table, des chaises, un lavabo, des toilettes, une plaque chauffante, une télévision, ainsi qu'une vidéo. Des jeux sont en outre à disposition des enfants. Un interphone permet d'appeler les gardiens.

Un parloir intime a également été aménagé. Ce local est équipé d'un lit, de toilettes, d'une douche, d'un lavabo, d'une plaque chauffante, d'un évier, d'une télévision et d'un magnétoscope. Un interphone permet d'appeler les gardiens. Le parloir est dépourvu de caméra de surveillance. Pour obtenir le droit d'utiliser ce parloir, le détenu doit séjourner depuis six mois au moins aux EPO. Il ne doit bénéficier d'aucun congé. Il doit avoir fait connaissance avec la femme avant son arrivée en prison. Ce parloir fait l'objet d'une à deux demandes par semaine. Il est disponible de 10 h 30 à 16 h 00. Le détenu peut l'utiliser une fois tous les trois mois. Le parloir intime compte comme une visite ordinaire. La femme qui entend rendre visite à ce détenu doit, de son côté, signifier son accord pour rester seule avec celui-ci. Aucun visiteur homme n'a demandé jusqu'à présent à rencontrer un détenu dans ce lieu.

Tous les détenus entendus jugent les conditions de détention très bonnes. Aucun problème n'a été signalé par rapport aux gardiens. Les détenus se sont montrés très reconnaissants pour ce qui était fait pour eux.

Cependant, une souffrance assez forte s'est exprimée chez certains détenus étrangers à propos des paquets. Les détenus ne peuvent en effet en recevoir que quatre par année, trois selon l'un d'entre eux et dans la mesure où ils ont souvent peu de visites, ils perçoivent comme une sorte de compensation.

Le directeur comprend la frustration que peuvent ressentir certains détenus. Ceci étant, avec le nombre de condamnés et vu les différents types de délinquants séjournant aux EPO, des mesures de sécurité précises sont nécessaires. La limite fixée du nombre de paquets n'a pas été décidée dans un objectif de sanction. Cette restriction a cependant été compensée par la possibilité de recevoir 50 CHF au lieu de colis et lors de chaque visite, qui sont ensuite utilisés à l'épicerie. De fait, il existe une jurisprudence du Tribunal fédéral, qui règle la question du nombre de colis autorisés. Les EPO n'entendent pour l'instant pas étendre ce système. Si cela devait être le cas, il conviendrait de développer les moyens de contrôle.

Les détenus souhaitent avoir des CD

Il existe un règlement particulier concernant les CD. Les CD musicaux et informatiques doivent être neufs et sous cellophane. Le personnel des EPO est plus que libéral au niveau multimédia. Contrairement aux conversations téléphoniques ou au parloir, le contenu des CD est très difficile à surveiller ; cela implique de refuser les systèmes graveurs de CD. Les risques d'évasions, les prises d'otages ou autres délits à l'intérieur de l'établissement sont toujours présents et toutes les mesures doivent être prises pour les éviter.

Une question qui revient dans tous les entretiens, quels que soient les établissements, concerne la présence de détenus condamnés pour délits sexuels. Ces derniers se sentent exclus et demandent souvent à être séparés des autres pour ne pas être agressés ; les autres demandent si ces gens ne peuvent pas être mis ailleurs parce que ce type de délit est insupportable. Cette population dérange les autres détenus.

Il serait cependant faux de vouloir créer des ghettos pour ces détenus et de créer des catégories distinctes au sein de la prison. En les confinant entre eux dans une situation particulière, ils risquent de se réfugier dans cette situation. Par exemple, les Canadiens ont créé des unités spéciales intervenant de manière intensive et de façon relativement courte. Avec l'ouverture de l'unité psychiatrique, les cas les plus lourds pourront recevoir un traitement plus approprié. Le type d'approche n'est pas encore arrêté. Les divers traitements sont actuellement analysés ; ces investigations pourront aussi être utilisées pour les articles 43 nécessitant une prise en charge.

Quelle est l'articulation entre les possibilités de formation et le travail dans les ateliers ? Existe-t-il des différences de l'offre si le détenu est de nationalité suisse ou s'il est étranger. Des règles ont-elles été fixées ?

L'objectif de la formation tient compte du fait que le temps passé en formation n'est pas un temps gâché. La direction des EPO ne souhaite pas créer de système rigide de formation. Certains travaux peuvent avoir un sens pour certains détenus et pas pour d'autres. Les EPO n'offrent pas toutes les possibilités de formation ; mais la formation est encouragée.

Vis-à-vis du personnel, il n'existe pas de programme de formation continue visant spécifiquement la dimension multiculturelle de la population carcérale. Il existe depuis quelques années un enseignement dans ce domaine dans la formation de base proposée par le Centre suisse de formation du personnel pénitentiaire. Le canton de Vaud a mis sur pied une opération particulière voici deux ans en faisant venir Ueli Leuenberger, responsable de l'université populaire albanaise et en envoyant certains surveillants à l'université populaire albanaise. Il importera de tenir compte de l'évolution de la situation, comme l'augmentation de ressortissants de la Guinée-Bissau parmi les détenus.

La prison compte 108 places, dont 94 se situent à Hindelbank même et 14 à Berthoud. Il s'agit dans ce dernier cas d'une expérience qui a vu le jour voici une année. Cette expérience, destinée uniquement aux Suissesses et aux étrangères autorisées à séjourner sur le territoire suisse, permet d'accueillir 10 femmes en section ouverte et 4 femmes en section semi-liberté. Quant aux bâtiments principaux, situés à Hindelbank, ils disposent de quatre sections pour l'exécution normale des peines, sections divisées en régimes ouvert, semi-ouvert et fermé, d'une section destinée aux détenues en situation de crise, d'une section de haute sécurité et d'une section mère et enfant, qui peut accueillir 6 détenues et 8 à 10 enfants.. Les détenues sont placées dans les sections ordinaires sans distinction par rapport aux régimes de peine.

L'ouverture des cellules est fixée à 06h30. Après la toilette personnelle et le petit déjeuner, le travail débute à 07h30. Il s'achève à 11h30. Après le repas de midi, préparé la semaine par la cuisine centrale et le week-end par les détenues elles-mêmes - les menus sont alors planifiés à l'avance, mais les détenues reçoivent le matériel nécessaire pour cuisiner - le travail reprend à 13h00 pour s'achever à 17h00. La soirée est consacrée au repas du soir, aux loisirs, au sport et à la formation. Les cellules sont fermées à 21h30.

La plupart des détenues proviennent du canton de Zurich. Un tiers vient de Berne. Les autres détenues sont placées par différents cantons. Hindelbank compte 25 à 30 nationalités. La plupart des femmes qui s'y trouvent ont été condamnées pour des infractions commises à la loi sur les stupéfiants. Une augmentation du nombre de femmes ayant commis des homicides a cependant été enregistrée au cours des douze ou quatorze derniers mois. Hindelbank en compte dix à quinze actuellement.

Il y a par ailleurs une augmentation du nombre de détenues originaires d'ex-Yougoslavie et des Balkans, alors qu'elles étaient par le passé surtout originaires d'Amérique du Sud. Cette augmentation engendre un changement de mentalité, et une nécessité d'adapter la gestion des établissements. Le personnel essaye habituellement de travailler sur une base socio-pédagogique. Ce travail s'avère cependant difficile à effectuer avec les détenues originaires d'ex-Yougoslavie et des Balkans. Ces femmes sont en effet issues d'une culture où règnent les rapports de force.

Dans une section d'exécution de peines : Alors que les détenues sont parties au travail, deux d'entre elles demeurent sur place pour y faire le ménage, étant précisé que les détenues font leur propre lessive le soir ou lors de la pause de midi. La poudre à lessive est distribuée gratuitement. La section dispose d'un bureau pour les gardiennes - la plupart ont une formation de travailleur social - et de dix-sept cellules, les grandes mesurant 16 m2. Un chat se promène dans la section ! Les détenues ont en fait le droit d'avoir un chat, à condition toutefois que l'une d'entre elles en soit responsable et qu'elle assume les éventuels frais de vétérinaire.

Puis dans les ateliers : L'atelier de couture, dirigé par un chef d'atelier, permet à six ou huit femmes de travailler. Cet atelier répond à des commandes de l'industrie, de la restauration ou de groupes de musique privés qui souhaitent des costumes de carnaval. Des cours de couture sont proposés le soir. Il existe également des possibilités de préapprentissage, mais très peu de possibilités d'apprentissage, car les établissements d'Hindelbank accueillent des femmes condamnées à de longues peines et ne pouvant pas quitter les lieux. Il leur est dès lors difficile de suivre un apprentissage sans sortir. De plus, un certain nombre de détenues, souvent des Suissesses, ne savent ni lire, ni écrire. Un programme d'alphabétisation a donc été mis en place, avant même de passer au préapprentissage.

L'atelier d'occupation destiné aux détenues moins habiles de leurs mains leur permet de travailler le papier mâché, le feutre et y faire de la peinture. L'atelier de poterie accueille pour sa part six à huit détenues. Cet atelier est très connu à l'extérieur. Quant à l'atelier de cartonnage, il offre vingt à vingt-cinq places de travail.

La buanderie, qui propose entre vingt et vingt-cinq places de travail, traite 800 kilos de linge par jour.

Les détenues peuvent changer d'atelier au cours de leur détention. Seuls la buanderie et l'atelier de cartonnage nécessitent toutefois un préavis du médecin. Les détenues peuvent toujours refuser de travailler. Elles restent alors en cellule, ne touchent aucun pécule et ne bénéficient que d'une heure de promenade par jour.

Au service de santé : Un médecin assure des consultations deux fois par semaine. Huit infirmières, occupant six postes, travaillent dans l'établissement. La nuit, une garde est assurée. Des médecins spécialisés viennent en cas de besoin. Les détenues ne peuvent avoir de médecins particuliers attitrés, sauf lorsqu'elles sont en semi-liberté. Chaque détenue bénéficie d'autre part d'une visite médicale d'entrée. Par la suite, lorsqu'une détenue rencontre un problème d'ordre médical, elle doit adresser une requête écrite au service de santé. Elle est alors vue par une infirmière, laquelle la dirige le cas échéant vers un hôpital.

Des seringues stériles sont disponibles dans chaque section. Un automate permet aux détenues d'échanger une seringue usagée contre une seringue neuve.

Espace de formation : Des cours y sont organisés tous les jours, notamment des cours de langue, d'informatique et de couture. Une petite participation financière est demandée aux détenues souhaitant suivre des cours. Les détenues doivent s'inscrire aux cours. Celles qui ne viennent pas perdent alors leur tour. Le personnel essaye donc de les motiver. Les établissements d'Hindelbank disposent par ailleurs d'un salon de coiffure et d'une salle de physiothérapie.

Passage par la section de haute sécurité : Il y a plusieurs années que celle-ci a été construite pour accueillir des terroristes, elle n'est actuellement plus utilisée. Elle devra prochainement être réhabilitée.

Et finalement la section mère-enfant : Cinq détenues y séjournent actuellement, ainsi que deux enfants. Ce qui sous-entend que des femmes sans enfant peuvent y séjourner. La place disponible dans la section mère-enfant permet ainsi de les accueillir et de fermer une autre section. Quatre gardiens y travaillent, à savoir trois femmes et un homme, la présence de ce dernier, lui-même père depuis peu de temps, s'avérant importante pour les enfants. Les détenues présentes dans cette section effectuent le matin le ménage des lieux et assurent la propreté. Elles sont rétribuées pour ce travail. L'après-midi, elles sont affectées à d'autres tâches dans l'enceinte des établissements. Une personne s'occupe alors des enfants. La limite d'âge est fixée à trois ans. Cette limite s'explique par la nécessité pour les enfants d'être mis en contact avec la société. La justice essaye de tenir compte de cette limite d'âge. Lorsqu'une peine plus élevée que trois ans est prononcée, les autorités placent l'enfant à l'avance dans la famille ou dans une institution, c'est-à-dire avant que la mère n'arrive à Hindelbank. Peu de pères viennent visiter leurs enfants à Hindelbank. Cette situation s'explique par l'origine étrangère de ceux-ci. Il leur est difficile de se rendre en Suisse. Des visites de personnes habitant la région sont cependant organisées de façon à ce que les mères et leurs enfants rencontrent du monde. Le « congé maternité » dure deux mois à Hindelbank. Ce qui signifie que les femmes concernées peuvent rester dans la section mère-enfant pendant cette période tout en étant rétribuées pour les travaux ménagers. Ce n'est qu'ensuite qu'elles peuvent travailler à l'extérieur. Aucune limitation n'est fixée en matière d'allaitement.

Le service pénitentiaire valaisan est rattaché au département de la sécurité et des institutions. L'organigramme de ce département montre que le service des établissements pénitentiaires valaisans dépend du conseiller d'Etat. Les différents établissements de détention du Valais sont les prisons préventives, la colonie pénitentiaire de Crêtelongue et la maison d'éducation au travail de Pramont.

C'est le 4 février 1987 que le Conseil d'Etat valaisan a nommé une commission d'étude en vue de la réalisation de la prison des Iles. Le Conseil d'Etat adoptera le projet de décret et le message au Grand Conseil le 16 mars 1994. Ce dernier adoptera le projet de décret le 18 novembre 1994. Les travaux débuteront le 1er novembre 1995. La prison ouvrira le 10 décembre 1998. Tout le système de sécurité est contrôlé électroniquement.

La capacité d'accueil de la prison des Iles est, pour la détention préventive, de 74 cellules et de 86 places, pour la semi-détention/semi-liberté, de 33 cellules et de 35 places et pour la réflexion/l'isolement, de 6 cellules et de 6 places. Ce qui fait un total de 113 cellules et de 127 places. L'effectif du personnel à la prison des Iles compte  - outre la direction, pour son administration un collaborateur administratif, un comptable et deux apprentis et pour la surveillance un chef gardien, un sous-chef gardien, cinq chefs d'ateliers, un cuisinier et demi, deux infirmiers et demi, huit gardiens d'ailes et huit centralistes. Ce qui donne, comme rapport personnel/détenus, un total de 4,23.

Il présente ensuite brièvement la prison préventive de Martigny et la prison de Brigue. A Martigny, il y a 10 postes de surveillance. La capacité d'accueil de la prison s'élève, en préventive, à 30 places pour les hommes et les femmes, et en semi-détention/semi-liberté, à 9 places pour les femmes et 9 places pour les hommes. Deux places sont réservées à l'isolement. Le rapport personnel/détenus s'élève à 5,00, alors que le nombre de journées de détention s'élève à 10 196, l'effectif journalier moyen étant de 21. Quant à la prison de Brigue, quatre postes de surveillance. Sa capacité d'accueil s'élève, en préventive, à 13 places pour les hommes et 9 places pour les femmes et, en semi-détention/semi-liberté, à 6 places pour les hommes. Deux places sont réservées à l'isolement. Le rapport personnel/détenus s'élève à 6,50, alors que le nombre de journées de détention s'élève à 6455, l'effectif journalier moyen étant de 13.

La colonie pénitentiaire de Crêtelongue est actuellement en pleine restructuration et réfection. Elle s'est ouverte le 1er septembre 1931. Sa capacité d'accueil actuelle est de 53 places, soit 38 places en section fermée et 15 places en section ouverte. L'effectif du personnel s'élève à 18. La colonie pénitentiaire de Crêtelongue dispose de plusieurs ateliers, comme scierie, menuiserie, carrosserie, mécanique et buanderie. Elle est entourée d'un domaine d'une centaine d'hectares sur lequel on trouve des cultures fruitières - vignes, 4 hectares et demi, et culture fourragère - et des cultures de céréales et de pommes de terre, ainsi qu'un jardin potager. Une étable abrite également 120 têtes de bétail, dont 50 vaches laitières. Un poulailler complète l'ensemble. Sur le plan de la détention, les journées de détention se sont élevées à 12'434 en 1999, l'effectif moyen s'élevant actuellement à 45. L'administration est composée d'un comptable, d'un collaborateur spécialisé, d'une assistante sociale à mi-temps et d'un apprenti. L'exploitation bénéficie d'un chef gardien, d'un sous-chef gardien, de dix gardiens et demi - des gardiens polyvalents - et de deux gardiens d'étable. Le rapport personnel/détenus s'élève à 3. La colonie pénitentiaire de Crêtelongue compte 61,4 % de Suisses et 38,6 % d'étrangers.

La maison d'éducation au travail de Pramont a ouvert en 1978. Sa capacité d'accueil actuelle s'élève à 39, soit 29 places en section fermée, 6 places en semi-liberté et 4 places pour les mineurEs. Elle compte plusieurs ateliers, à savoir le fer, le bois, la cuisine, la buanderie et les services généraux. Pramont a enregistré 10'282 journées de détention en 1999, l'effectif journalier moyen étant de 28,17. L'administration est composée d'un comptable et de deux apprentis. Quant au personnel de surveillance, il compte sept éducateurs et huit maîtres socio-professionnels, une assistante sociale à mi-temps et deux veilleurs.

La maison d'éducation au travail de Pramont est prévue par le Code pénal pour accueillir des jeunes de 18 à 25 ans, une dérogation étant possible jusqu'à 17 ans. L'effectif du personnel s'élève à 19,5, alors que sa capacité d'accueil est de 39 places. Le rapport entre l'effectif du personnel et la capacité d'accueil est ainsi de 2,00.

Une cellule de semi-détention mesure 12 m2. Elle dispose d'un ameublement fixe, soit deux lits superposés en béton, des tablards en bois et des toilettes. Une télévision est remise à chaque détenu, mais au terme d'un délai d'observation de seize jours pour les détenus en préventive. Ce délai permet au personnel d'observer les nouveaux arrivants et de savoir où les placer dans les ateliers. Il convient de préciser que le projet d'origine de la prison des Iles prévoyait un aménagement mobile des cellules, ce qui aurait été inimaginable. Certains détenus auraient rapidement cassé le mobilier de leur cellule. Par ailleurs, chaque aile de la prison compte une cellule de trois places équipée de toilettes pour handicapés.

La prison des Iles dispose d'une infirmerie. Le personnel médical présent aujourd'hui dépend du département de la sécurité et des institutions. Le reste du personnel, en congé ce jour, dépend quant à lui du département de la santé. La prise en charge médicale des détenus s'avère complète. La médication est principalement ordonnée en cas de dépressions et de maladies cardiaques. Les responsables des différents établissements valaisans de détention constatent une surcharge avec les cas psychiatriques lourds. La tendance consiste, de plus en plus, à envoyer ces personnes en prison, ce qui pose quelques problèmes.

Le code de procédure pénale valaisan prévoit que les frais médicaux des détenus en préventive figurent sur la liste des frais judiciaires. Les requérants d'asile étant assurés par la Confédération, les autres détenus sont donc pris en charge par la caisse de l'Etat du Valais.

La commission se rend ensuite dans le secteur des parloirs. Ceux-ci sont sécurisés. Une vitre sépare le détenu de son visiteur. Il ne peut donc pas y avoir de contact physique entre les deux. Ce système s'applique tant que le détenu se trouve en cours d'instruction. Trois bureaux dépourvus de vitrage isolant sont réservés pour les visites d'avocats, d'assistants sociaux et d'enfants. Ce deuxième système de parloir nécessite une fouille complète des détenus qui l'utilisent. Le personnel fait certes confiance aux détenus, mais seulement jusqu'à un certain point.

L'imprimerie est dirigée par un gardien du métier. Le travail effectué ne s'adresse qu'à l'Etat du Valais, car les arts graphiques sont une profession protégée. Cet unique débouché permet d'éviter la concurrence. Quatre détenus y sont employés.

Chaque bâtiment de la prison dispose de sa propre promenade. La configuration des lieux permet ainsi d'éviter le mélange de détenus provenant de différentes ailes. Chaque promenade peut accueillir jusqu'à 22 détenus. Il convient de préciser que 68 caméras surveillent l'établissement. Un système de détection a par ailleurs été mis en place qui permet de détecter immédiatement le lieu d'une agression commise sur un gardien.

L'établissement est très solide sur le plan de la sécurité. Il peut être fermé hermétiquement en deux jours. Une seule évasion a été enregistrée depuis son inauguration, étant entendu qu'une possibilité théorique d'évasion est volontairement laissée aux détenus. Le détenu en question a été repris au pied du mur d'enceinte. Hormis cette évasion, aucun problème n'est survenu à la prison des Iles depuis son inauguration. Ce n'est ainsi pas l'aspect architectural qui fait la prison, mais la qualité de la prise en charge qui y est proposée.

La prison des Iles dispose de trois modules de trois cellules de réflexion situées au sous-sol de l'une des ailes de l'établissement. Ces cellules, renforcées, servent aux sanctions disciplinaires.

Il s'agit sans doute de l'établissement de détention le plus ouvert de Suisse. Cet établissement accueille des délinquants primaires non dangereux. Le travail qui y est effectué est axé sur les questions de resocialisation. La règle de base appliquée dans cet établissement est le contrat de confiance. Jusqu'à présent, Crêtelongue n'a pratiquement enregistré aucune évasion.

La maison d'éducation au travail de Pramont se situe à quelques minutes à pied de la colonie pénitentiaire de Crêtelongue. L'isolement des deux établissements permet d'éviter tout problème avec le voisinage.

Crêtelongue dispose de plusieurs ateliers, en l'occurrence scierie, menuiserie, carrosserie, mécanique et buanderie. Un parc agricole de plusieurs véhicules est également disponible. Outre 120 têtes de bétail, plusieurs animaux vivent sur le domaine, en particulier des cochons, des dindes et des oies. La colonie pénitentiaire collabore avec une coopérative agricole voisine, coopérative qui achète pratiquement toute la production de Crêtelongue. Quant au raisin, il est livré à une coopérative vinicole.

Le périmètre de Crêtelongue accueille un bâtiment destiné aux personnes faisant l'objet de mesures de contrainte. Celles-ci dépendent du service des étrangers. Une véritable cage à lapin.

L'atelier bois permet aux détenus d'effectuer des travaux d'ébénisterie et de fabrication de planches ; les commandes de caisses sont nombreuses, à tel point que Crêtelongue ne parvient pas à toutes les honorer.

Certains détenus effectuent des travaux à l'extérieur de la colonie, auprès de collectivités publiques. Ils sont par exemple chargés du nettoyage des bisses, de la distribution de boissons et de la préparation de postes lors de courses de ski ou de combats de reines ou encore, c'est une nouveauté, de la taille de la vigne de Farinet. Ces travaux extérieurs, appréciés par les détenus, sont acceptés sous certaines conditions. Les détenus doivent par exemple travailler sous la surveillance de gardiens et l'alcool leur est interdit.

La maison d'éducation au travail de Pramont est un établissement concordataire. Elle compte actuellement 24 pensionnaires. L'effectif du personnel s'élève à 19 collaborateurs. L'âge des pensionnaires oscille entre 18 et 25 ans. Le Code pénal permet cependant d'accueillir des mineurEs âgéEs de 17 à 18 ans.

Les détenus peuvent suivre des cours d'informatique, d'expression orale et d'expression écrite. Deux professeurs extérieurs viennent une après-midi par semaine. Les jeunes s'inscrivent aux cours de leur propre volonté. L'accès à la salle de classe est autorisé le soir pour les apprentis. L'utilisation des outils informatiques s'effectue sous la surveillance d'un collaborateur de l'établissement. A côté de la salle de classe se trouve le bureau de l'assistant social. Il travaille au sein de l'établissement à mi-temps depuis le mois de décembre 1999. Il s'occupe notamment de la gestion des assurances et des subventions.

Les jeunes détenus semblent aujourd'hui plus violents. Le passage à l'acte apparaît aujourd'hui plus rapide et irréfléchi. Le personnel essaye donc d'imposer certaines règles de bienséance. Des clans apparaissent. Il devient plus difficile de mélanger les jeunes. Le personnel préfère fermer plus souvent les chambres et construire par petits groupes. Il s'agit par ailleurs d'inculquer aux jeunes des règles d'hygiène, de propreté et de politesse. Il faut parfois reprendre le travail à la base.

Les détenus sont astreints au travail. Ils peuvent effectuer du sport, comme de la natation - une piscine est à leur disposition au sein de l'établissement - des jeux d'équipe, du ping-pong, du badminton et de la musculation. Un terrain de football est accessible à l'extérieur de l'établissement. Quant aux loisirs, la première partie de soirée est destinée aux jeux d'équipe, alors que la deuxième partie de soirée est consacrée aux activités de « club » : échecs, photos, piscine ou musculation. Les activités sportives, y compris la piscine, sont accessibles tous les jours. A noter que la piscine et les locaux sportifs de l'établissement sont mis à disposition de groupes sportifs extérieurs.

Des travaux de serrurerie et de mécanique peuvent être effectués. Des apprentissages élémentaires sont proposés aux jeunes, notamment de poly-mécanicien. Des travaux de menuiserie et d'ébénisterie peuvent être effectués. Deux maîtres socioprofessionnels avec maîtrise fédérale encadrent les pensionnaires. Ceux-ci ont la possibilité d'y achever un apprentissage complet en menuiserie. L'atelier produit notamment des tables et des agencements de cuisine pour des privés et des collectivités publiques.

La cuisine de Pramont fournit des repas à Crêtelongue, à Pramont et à l'établissement des mesures de contrainte. De nombreux apprentis cuisiniers y sont formés.

Les jeunes qui sont placés à Pramont passent une première période en chambre. Une semaine après, les jeunes passent par les cinq ateliers, services généraux, buanderie, cuisine, bois et fer. Si un jeune veut s'engager dans une formation, le personnel s'occupera des démarches nécessaires. L'accord du service placeur est requis.

La première personne auditionnée, à Crêtelongue, souhaitait rencontrer la commission essentiellement parce qu'elle était genevoise et estimait nécessaire de « recevoir » la Commission genevoise des visiteurs. Pour le reste, elle s'est montré très positive vis-à-vis de la direction et du personnel de Crêtelongue.

Le deuxième détenu n'a formulé aucune demande particulière, si ce n'est qu'il ne comprenait pas très bien la peine qu'il devait subir.

Les établissements de Bellechasse (EPB) sont situés sur le territoire de deux communes des districts du Lac et deux communes de la Veveyse. Les EPB sont des établissements à caractère fermé, semi-fermé et ouvert ; ils accueillent en principe des détenus primaires non dangereux y exécutant des peines de 6 mois à la réclusion à vie. Les EPB sont des établissements concordataires depuis 1966. Ils permettent l'application du régime progressif. La capacité permet de recevoir 140 détenus, au sens du Code pénal, et au foyer de La Sapinière 20 personnes subissant une privation de liberté à des fins d'assistances au sens de l'article 397 du Code civil. 158 détenus le 15 juin 2000 aux EPB. 140 sont en régime pénitentiaire et 18 séjournent à La Sapinière ; ces derniers y ont été privés de liberté à des fins d'assistance ou placés pour purger de courtes peines.

Le taux d'occupation des EPB s'élève à 100 % depuis le début 2000. Les EPB ont accueilli en moyenne 152 détenus en 1999, 152 en 1998, 140 en 1997 et 136 en 1996. Les EPB comptent une moyenne de 60% de détenus étrangers, dont deux tiers seront expulsés judiciairement à l'issue de leur peine. 52 détenus proviennent de l'ex-Yougoslavie et 18 d'Albanie ; les EPB comptent 26 autres nationalités.

32 détenus sont placés par le SAPEM. Six d'entre eux sont de nationalité suisse. Les 26 autres se répartissent en douze nationalités différentes. La peine la plus longue est de sept ans, alors que la peine la plus courte s'élève à une année. Dix-neuf de ces détenus ont été condamnés pour infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants, deux pour infraction contre la vie, sept pour brigandage ou infraction contre le patrimoine et quatre pour infraction contre la liberté sexuelle.

Les EPB accueillaient voici quatre ou cinq ans une proportion importante de détenus provenant d'Amérique, respectivement d'Amérique du Sud. Le personnel et ces détenus parvenaient cependant à se comprendre. Aujourd'hui, il apparaît par contre plus difficile au personnel et aux détenus albanais ou serbo-croates de communiquer. A ce problème de langue s'ajoute un problème de culture. Ces détenus albanais ou serbo-croates apparaissent beaucoup moins aptes à entrer en discussion. La confrontation arrive très rapidement. Des difficultés de comportement apparaissent également. Après des années de guerre, les dégâts sont considérables. Les EPB essayent donc d'améliorer les moyens de communication, de donner à ces détenus des accès culturels, de leur proposer des cours et de leur fixer certaines règles à appliquer. Il faut aussi savoir que la sécurité de la prison n'est pas seulement représentée par les barbelés et les miradors. C'est en fait essentiellement pour que les détenus puissent vivre en paix entre eux. Il ne sera pas possible d'éviter des agressions, mais il sera par contre possible de faire en sorte que les crises diminuent. Dans cette perspective, les EPB sensibilisent également leurs collaborateurs. Les EPB font au mieux avec les moyens à disposition. Il s'agit par exemple de développer les activités socio-culturelles ou la pratique du sport. Il s'agit d'un ensemble de mesures destinées à diminuer l'agressivité.

La situation est difficile à gérer pour le personnel sur le plan culturel et linguistique ; il existe d'importantes tensions entre les détenus. Depuis quelques années, la direction des EPB fournit un effort important pour soutenir et encadrer le personnel.

Les besoins de prise en charge thérapeutique sont plus élevés que par le passé. 35 détenus sont actuellement incarcérés pour infraction contre la liberté sexuelle. Des efforts ont été entrepris par les EPB depuis l'entrée en vigueur de la LAVI. Une trentaine de détenus sont actuellement concernés par les dispositions de la LAVI et remboursent de l'argent à leurs victimes.

En 2000, l'objectif est d'aboutir à une structure de droit public disposant d'une certaine autonomie. Les EPB comptent 90 collaborateurs à plein temps. Un effort important a été entrepris pour la formation du personnel. Les EPB consacrent à la formation environ sept jours par collaborateur et par année. Environ 90 % du personnel a suivi les cours donnés par le centre suisse de formation. A ces cours extérieurs s'ajoutent les cours donnés sur place par le personnel administratif. Il est d'autre part prévu d'étendre la supervision des collaborateurs.

Concernant les détenus, les objectifs des EPB visent à renforcer la lutte contre la consommation de psychotropes en développant des mesures préventives, des mesures de soutien et surtout des mesures de contrôle. Chaque détenu est fouillé à son arrivée aux EPB. D'autres fouilles sont effectuées au cours de la détention, ce qui sous-entend que le personnel doit être formé en conséquence. S'agissant de l'accompagnement et de l'encadrement, il faut savoir que les détenus se soumettent à des tests volontaires d'urine. Il s'agit en l'occurrence d'arriver à leur faire la démonstration qu'une abstinence dans ce domaine peut leur permettre d'aboutir à un résultat concret, comme la restitution d'un permis de conduire. Les détenus arrivent sevrés aux EPB. Un projet de thérapie de substitution à la méthadone est envisagé à La Sapinière.

La révision du Code pénal suisse, actuellement en discussion au Parlement fédéral, devrait avoir pour conséquence une diminution globale du nombre de détenus, sans que l'on connaisse cependant les catégories qui seront touchées. Des cas plus difficiles devront également être pris en charge. Il faudra sans doute aussi faire face à un alourdissement des procédures, la tendance allant vers une responsabilité accrue des juges en matière d'exécution de peines.

Les EPB ont réalisé des analyses de prestations, avec l'idée de faire participer les collaborateurs des établissements au processus de préparation du budget. Le personnel est notamment informé de la planification financière des établissements sur cinq ans. La base est ainsi sensibilisée aux besoins et aux coûts de la détention. Les EPB essayent aussi, par un contrôle externe et interne, de détailler les dépenses. Les possibilités de report de crédits sont examinées. Il y a malgré tout un certain nombre de dépenses liées pour lesquelles les EPB ne disposent que d'une faible marge de manoeuvre. Mais comme les EPB constituent une entité juridique, ils disposent de leur propre budget. Leur marge de manoeuvre peut donc s'assouplir quelque peu. Au niveau des recettes, la situation s'avère tout aussi difficile, et ils ont été forcés de limiter leurs investissements ces dernières années et n'ont pas toujours pu développer suffisamment les programmes favorisant la réinsertion des personnes détenues.

Le but poursuivi par la formation des détenus est de contribuer à la réinsertion des détenus au sein de la société. Il convient dès lors de les encourager à se perfectionner dans différents domaines et de leur donner la possibilité de s'occuper durant leur temps libre. Il importe de distinguer l'enseignement de type occupationnel de l'enseignement axé sur la formation en vue de la sortie. Un tiers des détenus suit un enseignement sous forme occupationnelle. Ces cours, qui concernent une cinquantaine de détenus chaque semaine, sont donnés par des personnes extérieures aux EPB, par le personnel, voire par d'autres détenus, ce qui permet de responsabiliser ces derniers. En ce qui concerne l'enseignement axé sur la formation, les EPB offrent des possibilités d'apprentissage dans une dizaine de métiers. Un problème apparaît cependant pour la gestion du temps, puisqu'il faut compter trois ans pour un apprentissage. Les détenus ne peuvent donc pas toujours achever leur apprentissage aux EPB. Par ailleurs, certains détenus poursuivent des études lors de leur séjour aux EPB. Ils ont la possibilité de consacrer un ou deux après-midi par semaine aux études, voire 50 % de leur temps en cas d'études universitaires. D'autres détenus sont plus autodidactes et suivent des cours par correspondance. En 1999, 131 détenus ont été concernés par les cours internes. Il s'agissait essentiellement de cours d'informatique et de langues, étant précisé que les cours d'informatique sont les plus demandés. Certains détenus ont même suivi plusieurs cours. Les heures d'études sont rémunérées, car elles sont considérées comme un travail.

Actuellement 35 détenus suivent des cours dispensés par Auxilia, soit par correspondance, soit par le biais de visites ponctuelles de trois intervenantes. Parmi les langues enseignées aux détenus, on trouve le français pour onze détenus, l'anglais pour quinze détenus, l'espagnol pour huit détenus. Six détenus suivent par ailleurs un cours de préparation à la sortie, cours composé d'un atelier de logique - compréhension des événements passés - et d'une partie pratique - préparation à un entretien d'embauche, rédaction d'un curriculum vitae. D'autres détenus suivent un apprentissage et des cours réguliers à l'extérieur. Un détenu suit par exemple un cours de masseur, un autre un cours d'informatique. D'autres détenus encore suivent des stages pratiques et des cours occasionnels à l'extérieur, en l'occurrence un cours pour jeunes sauveteurs, un cours de français et un cours de sensibilisation en vue de l'examen du permis de conduire.

Les EPB disposent de trois salles de formation comportant six ordinateurs et d'un matériel de projection, d'une salle d'étude équipée de deux ordinateurs permettant par exemple la rédaction de lettres et de curriculum vitae. Les détenus ont la possibilité d'acquérir du matériel informatique. Les EPB disposent également de trois ordinateurs destinés à être loués aux détenus qui en font la demande.

Tout le matériel que se font envoyer les détenus est contrôlé. Le personnel ne peut cependant pas contrôler l'intégralité de ce qui entre. Il ne peut pas non plus tout interdire. En l'état, le personnel ne maîtrise pas la situation, car la technique évolue très rapidement. Il faudrait pratiquement deux ingénieurs spécialisés pour opérer de tels contrôles.

Aucune réclamation n'a été faite concernant le cadre de vie. Certaines questions ont cependant été posées.

Il semblerait que les détenus n'aient accès au téléphone que deux fois par semaine, une demande devant être formulée 48 heures avant l'entretien téléphonique. La commission se demande par ailleurs si les détenus pourraient téléphoner, comme cela est possible à Bochuz ou à Gorgier, avec une carte de téléphone.

Le système actuel ne permet pas l'introduction de cartes téléphoniques. Une telle installation serait par contre possible après la mise en place d'un nouveau central.

Le règlement des établissements du 9 décembre 1998 a été approuvé par le Conseil d'Etat. La Confédération a décidé que les possibilités accordées aux détenus de téléphoner seraient exceptionnelles. Le règlement fixe les relations avec l'extérieur et précise que celles-ci doivent être contrôlées. Les détenus doivent formuler une demande pour téléphoner et il faut du personnel et du matériel pour procéder à ces contrôles. Le personnel ne souhaite pas connaître le contenu des conversations téléphoniques, mais il doit pouvoir déterminer pour l'autorité judiciaire qui a téléphoné, à qui et à quelle date. Il arrive qu'un juge demande la liste des téléphones de tel ou tel détenu. Il s'agit alors de trouver la balance entre les besoins de l'individu et les besoins de l'autorité judiciaire. Tout cela génère un certain volume de travail. En conséquence de quoi les EPB ont fixé deux conversations téléphoniques par semaine et par détenu, une troisième si le détenu concerné a des enfants. A cela s'ajoutent les autorisations exceptionnelles, par exemple dans l'hypothèse où un détenu aurait la chance de pouvoir trouver du travail à sa sortie de prison. Même chose si un détenu a un parent ou un enfant malade.

Les détenus ayant commis des infractions contre la liberté sexuelle posent des problèmes. L'un d'entre eux s'est plaint de la difficulté de s'intégrer au sein de la prison, que ce soit en promenade ou à la salle de sport. Un autre détenu, condamné pour une infraction d'un type différent, s'est plaint quant à lui du mélange des détenus.

La sécurité consiste aussi à faire en sorte que les détenus puissent vivre dans des conditions raisonnables. Les EPB essayent par ailleurs de sensibiliser le personnel à ces délinquants-là afin qu'ils puissent vivre dans des conditions acceptables, étant entendu que certaines personnes créent, par leur comportement, des difficultés. Ceci étant, il y a relativement peu de problèmes majeurs aux EPB.

Pour les accès aux salles de sport ou de musculation, il faudrait augmenter l'effectif du personnel. En l'état, les EPB essayent de répondre aux problèmes qui se posent. Il paraît cependant difficile de prévoir des activités sportives à des horaires spécifiques, il faut respecter les horaires fixés, étant précisé que le personnel de service achève en principe son travail à 20 h 00.

Deux détenus ont trouvé que la salle de sport était trop petite et qu'elle manquait d'équipement.

Il faudra attendre 2002 pour envisager des modifications dans ce domaine. Les détenus bénéficient plusieurs fois par semaine de sport en plein air. Pour le reste, il n'est pas possible de répondre à toutes les demandes individuelles.

La question des visites et de la fréquence autorisée de visites pose problème à plusieurs détenus.

Les EPB doivent garantir un certain nombre de visites. La règle a été fixée à deux visites par mois. Si le détenu est marié, a une liaison relationnelle soutenue ou des enfants, il peut alors bénéficier d'une visite supplémentaire. Des exceptions sont aussi possibles dans certaines situations. Les visites ont en principe lieu le dimanche. Des exceptions sont là aussi possibles, y compris au niveau des horaires.

Il n'y a pas de parloir intime. Il s'agit d'une question de politique pénitentiaire. Un parloir intime pourrait se concevoir lorsque la peine infligée est de longue durée, voire de très longue durée et qu'il n'y a aucune possibilité de sortie. Il convient de préciser à ce propos que près de 1000 sorties ont été autorisées l'an passé aux EPB.

La prison La Tuilière a été construite en 1992. Son coût s'est élevé à 32 millions de francs. Cet établissement est le fruit d'un concours d'architecture. C'est aujourd'hui un établissement que l'on vient visiter de loin.

Les murs de la prison La Tuilière demeurent la propriété intellectuelle de l'architecte. Il doit ainsi être informé de toutes les modifications que l'établissement souhaite y apporter. Il s'avère donc impossible de faire évoluer les murs, y compris de les peindre pour qu'ils ne restent pas couleur naturelle béton. Il faut chaque fois un événement, une évasion par exemple, pour apporter des modifications, la pose de barbelés sur le toit par exemple. La direction travaille ainsi toujours dans l'urgence.

L'établissement a été construit au milieu d'immeubles locatifs et de villas. Il y a bien eu quelques oppositions à l'époque de sa construction, mais les choses se passent à présent bien.

La prison La Tuilière comprend cinq secteurs, à savoir, pour le secteur hommes, un secteur préventive et un secteur psychiatrique et, pour le secteur femmes, un secteur préventive, un secteur d'exécution de peines et un secteur semi-détention, semi-liberté et arrêts.

Les femmes rejoignent les hommes pour la gravité des délits commis. Elles sont aujourd'hui aussi condamnées pour meurtres ou incitation au viol.

L'établissement compte 82 places, soit 28 pour les hommes et 54 pour les femmes. 72 détenus y sont incarcérés le jour de la visite. Il dispose de différents lieux de vie de 7 places chacun. Au niveau du personnel, la prison de La Tuilière compte 36,9 postes, soit une quarantaine de personnes, direction comprise. En ce qui concerne les langues, les gardiens parlent essentiellement le français, sinon l'anglais, l'allemand, l'espagnol et l'italien. La prison dispose de 2,3 postes d'assistant social. Le secteur médical est aujourd'hui indépendant de la direction pénitentiaire. C'est un contrat de prestations qui lie l'établissement au département de la santé.

Ce qui ne va pas sans poser quelques problèmes dans la répartition des tâches. Il n'est par exemple pas évident pour un surveillant de donner un médicament à un détenu, sur prescription du service médical, sans savoir de quel médicament il s'agit. S'agissant de la méthadone par exemple, le personnel de La Tuilière ne connaît pas les quantités absorbées par les détenus. Autre exemple, une infirmière vient tous les quinze jours visiter les détenues de la section mère-enfant. Cette infirmière s'occupe plus précisément de l'éducation des enfants. Un problème de responsabilité se pose ici pour le personnel surveillant. Dernier exemple, le soir et le week-end, les médicaments sont distribués par le personnel surveillant. Des problèmes de responsabilité pourraient se poser si un incident devait survenir un jour à ce niveau. Il s'agirait de savoir où se situe exactement la responsabilité dans un tel cas. Le problème du service médical ne se résume donc pas à une question de pouvoir, mais plutôt à une question de prise en charge.

Les thérapies de substitution avec de la méthadone sont possibles. La distribution de seringues fait actuellement l'objet de discussions. En l'état, des tests toxicologiques sont pratiqués sur les détenus. De tels tests sont nécessaires pour obtenir des congés (une forme de consentement forcé). Si les seringues ne sont pas distribuées aux détenues, celles-ci reçoivent par contre une trousse de premiers secours, comportant notamment un désinfectant et une brochure expliquant comment désinfecter une seringue.

Une personne rentrant de congé ayant un test positif pour un psychotrope écopera d'une peine de huit jours de cellule d'isolement. Le joint est pour sa part sanctionné par quatre jours de cellule d'isolement !

Clairement la séparation entre rôle médical et rôle pénitentiaire doit se traduire dans tous les actes qui impliquent une certaine responsabilité. Il est évident que le personnel médical doit assurer la distribution des médicaments.

L'établissement dispose de plusieurs ateliers. Pour les hommes, La Tuilière compte un atelier de menuiserie - restauration de meubles et peinture, un atelier de cartonnage et de découpage et un atelier de manutention et d'emballage. Les femmes bénéficient pour leur part d'un atelier qui effectue essentiellement du travail de manutention, d'un atelier bois et de la buanderie.

La section des femmes et la section des hommes disposent d'une équipe d'entretien. Quant à la cuisine, elle fonctionne aussi sous la forme d'un atelier. L'équipe de cuisine, soit un chef de cuisine et six détenues préparent les repas journaliers pour le personnel et les détenus, à raison d'une centaine de repas à midi et le soir.

La prison La Tuilière est séparée en deux parties, la partie administrative et la partie cellulaire. Cette dernière se sépare à son tour en un secteur hommes et un secteur femmes. Aucune activité commune n'est organisée entre ces deux secteurs. Il n'y a pas de mélange des sexes. Enfin, à l'intérieur de chaque secteur, les différents régimes sont séparés par des grilles et par les horaires.

La plaquette de présentation de La Tuilière, éditée par le service des bâtiments du département des travaux publics, de l'aménagement et des transports de l'Etat de Vaud précise, à propos de la conception architecturale, que l'établissement est composé d‘un « premier corps de bâtiment [comprenant] la cour d'entrée, dominée par le local de contrôle, véritable poste de pilotage de l'ensemble, les entrées, l'administration [...]. Entre le premier corps de bâtiment et le secteur des services généraux se trouvent la salle de gymnastique et la place de sport. A l'est de la place, relié par un portique, se trouve un bloc transversal qui regroupe tous les services généraux, locaux de service et locaux pour le personnel. Au-delà, les circulations se dédoublent pour desservir le secteur hommes au nord et le secteur femmes au sud. »

La centrale est le nerf de la prison. Tout passe par cet endroit. On y trouve en particulier la centrale radio, les écrans de surveillance, les interphones des cellules. Les appels par interphones sont enregistrés. De même que les alarmes. Les téléphones intérieurs et extérieurs sont tous centralisés dans ce lieu, qui procède par ailleurs au contrôle des autorisations de visites, celles-ci étant délivrées par la direction lorsqu'il s'agit d'une exécution de peine et par les tribunaux lorsqu'il s'agit d'une détention préventive. Pour le reste, il faut savoir que tout le pourtour de la prison est surveillé par des caméras. Quant aux barreaux des cellules, ils se caractérisent par une pression intérieure. Lorsque quelqu'un tente d'en scier un, une alarme retentit à la centrale. Neuf nouvelles caméras seront installées dans le bâtiment, ainsi que des écrans couleur dans la centrale. L'accès à cette salle est problématique pour le personnel souffrant de handicap, il faut effectivement utiliser un escalier hélicoïdal descendant pour accéder au centre du contrôle.

La salle de sport est éclairée par une lumière naturelle. Quatorze détenus peuvent s'y trouver en même temps. La salle de sport est accompagnée d'une salle de musculation. Les détenus bénéficient d'une heure de sport par jour. S'y ajoutent encore les promenades. Le soir, les détenus peuvent choisir diverses activités, comme la création artistique, la photographie ou le yoga.

Chacune des deux cellules d'isolement dispose d'une douche et de toilettes. Les détenus qui y séjournent bénéficient d'une demi-heure de promenade par jour. Le service médical les rencontre tous les jours. Seuls la Bible ou le Coran sont autorisés. Le livre est fourni dans la langue du détenu. Au niveau des compétences, le directeur de la prison a la compétence d'infliger jusqu'à huit jours de cellule d'isolement. Au-delà, le chef de service est compétent pour une peine allant jusqu'à quinze jours et le conseiller d'Etat responsable jusqu'à trente jours.

La cuisine est dirigée par un chef-cuisinier ayant travaillé plusieurs années dans un grand restaurant suisse. Chaque détenue travaillant à la cuisine joue un rôle précis. Un tournus est opéré une fois par mois au niveau des charges. Certaines détenues ont commencé un apprentissage à la cuisine. La cuisine prépare tous les repas de l'établissement, soit une centaine de repas à midi et une centaine de repas le soir. Les détenus sont interrogés à leur arrivée sur le type de menu souhaité. En cas de régime particulier, le service médical délivre une prescription et la cuisine en tient compte. Par la suite, chaque détenu reçoit avec son repas une fiche sur laquelle il peut indiquer par exemple s'il souhaite plus ou moins de sauce.

La cantine n'est pas physiquement accessible aux détenus. Ceux-ci reçoivent en fait une fiche dans leur cellule, fiche sur laquelle figure la liste des objets disponibles à la cantine, ainsi que le montant disponible sur leur compte, étant précisé que le pécule oscille par heure entre 3.50 CHF - « petits » travaux comme la confection de jouets - et 4.10 CHF - travaux effectués pour des entreprises et que le pécule total n'excède pas 28.70 CHF par jour. Les détenus notent leur commande sur cette fiche. Pour les articles qui ne seraient pas mentionnés sur celle-ci, les détenus reçoivent une fois par mois une fiche vierge. Un catalogue spécifique pour les produits de beauté est par ailleurs remis aux détenues.

Le secteur mère-enfant dispose de deux chambres individuelles. Il est équipé en outre d'une nurserie, d'une cuisine, d'une salle de bain avec baignoire et d'une machine à laver le linge. Les cellules disposent de lits pour les enfants. Trois mères séjournent actuellement dans ce secteur. Elles disposent d'un jardin particulier pour les promenades, chaque matin de 9h00 à 11h00. Elles travaillent par ailleurs dans les ateliers situés à côté de la section et touchent un pécule même si elles doivent interrompre leur travail pour s'occuper de leurs enfants.

La buanderie traite le linge de tout l'établissement. Les détenues qui y travaillent apprennent, le cas échéant, à coudre, tricoter et crocheter.

La personne auditionnée a transmis aux commissaires un certain nombre de soucis et soulevé divers problèmes, qui avaient visiblement fait l'objet d'une discussion préalable entre les détenues. Quatre domaines ont ainsi été abordés.

Premièrement, la mise à disposition de divers matériels dans chaque secteur est souhaitée par les détenues. Ont en particulier été cités une machine à coudre, une cuisinière et un pèse-personne. Pour le surplus, les détenues aimeraient que l'accès à l'information donnée aux nouvelles arrivantes soit amélioré. Un document est certes mis à disposition des détenues dans chaque secteur, mais il faut parfois un certain temps pour pouvoir remettre la main dessus.

Deuxièmement, un cas particulier a été mentionné à propos du secteur mère-enfant. Une mère, en détention préventive, et son bébé y ont été placés. Le père, détenu, n'ayant jusqu'à présent jamais pu rencontrer son enfant, la question d'une rencontre de couple a été soulevée. Toujours à propos du secteur mère-enfant, le risque de transmission de maladies aux enfants a été soulevé, un accent étant souhaité sur l'information et les règles d'hygiène. Enfin, il est relevé un danger pour les enfants au niveau des médicaments. Comme certaines détenues ont tendance à ne pas prendre les médicaments qui leur sont distribués, leur stockage engendrerait un danger pour les petits.

Troisièmement, un problème de santé chez une détenue a donné lieu à des plaintes à répétition. La question d'une véritable écoute a été posée.

Quatrièmement, un problème d'ouverture des portes a été soulevé. La détenue auditionnée a aussi évoqué l'idée d'une prise de responsabilité chez les détenues, avec le projet de désigner des déléguées.

Le problème de la machine à coudre est en voie de se résoudre. Le personnel en fera prochainement circuler une. Quant à la mise en place d'une cuisinière dans chaque secteur, la demande est enregistrée. Il faut cependant demeurer réaliste. Il n'est pas possible de modifier comme cela l'architecture des lieux. Par le passé, les détenues se rendaient dans le secteur mère-enfant pour bénéficier de la cuisinière de ce secteur. Un accès n'a pas été admis jusqu'à présent pour des raisons de sécurité. Un pèse-personne pourra être installé sans grande difficulté dans les salles d'eau.

La direction peut difficilement recevoir personnellement toutes les nouvelles arrivantes. Ceci étant, le service social prend immédiatement contact avec toutes les détenues. Celles-ci disposent en outre sur leur télévision d'un canal d'information.

Le personnel doit résoudre des problèmes de sécurité avant de donner suite à la demande d'ouverture des portes. Actuellement, la circulation est possible dans les trois étages. Il s'avère parfois nécessaire de chercher les détenues dans un autre secteur. Ceci dit, les portes sont fermées à 22h00.

Situées en pleine ville, à proximité immédiate de la gare de Perrache, au bord du Rhône, les maisons d'arrêt de Saint-Joseph et de Saint-Paul sont séparées par une rue. Elles sont chacune entourées par un mur d'enceinte surmonté d'imposants miradors.

Quelques placards syndicaux décorent l'entrée de la prison de Saint-Paul. A l'approche de l'adoption du budget par le Parlement national français, une grève a été déclenchée au sein du personnel pénitentiaire. Comme le personnel pénitentiaire n'a pas le droit de faire la grève, ceux qui souhaitent manifester le font sur leur temps libre.

Il existe en réalité trois quartiers de détention à Lyon, le quartier Saint-Joseph, le quartier Saint-Paul et le quartier Montluc, réservé aux femmes. La prison de Saint-Joseph a été construite en 1830, la prison de Saint-Paul en 1860. La prison de Saint-Joseph est composée de bâtiments parallèles reliés par des passerelles. Il s'agit d'une architecture que l'on retrouve par exemple aux Baumettes ou à Fresnes. Quant à l'architecture de la prison de Saint-Paul, elle se caractérise par une rotonde centrale et des bâtiments distribués en étoile autour de la rotonde centrale. Celle-ci offre un certain avantage en ce qui concerne la circulation interne et de la sécurité. L'architecture en étoile se retrouve notamment à la prison de la Santé.

Les autorités, ayant décidé en 1830 de construire une nouvelle prison, à savoir Saint-Joseph, se rendirent très rapidement compte de la surpopulation carcérale qui y régnait. Si bien que l'Etat commanda une nouvelle prison trente ans après la première. En 1860, les deux établissements apparaissent totalement distincts. Un quartier accueille les prévenus, l'autre les condamnés, les mineurs et les femmes. Aujourd'hui, les deux quartiers sont séparés par une rue, mais reliés par un souterrain.

Les prisons collaboraient beaucoup avec des congrégations religieuses au cours du XIXe siècle. Ces congrégations étaient alors responsables de dispenser des soins et d'assurer l'enseignement des détenus. Elles jouaient en quelque sorte un rôle socio-éducatif. A l'époque, c'est la congrégation des Frères de Saint-Joseph qui était responsable de la prison de Lyon, d'où le nom donné à la prison de Saint-Joseph. Quant à la prison de Saint-Paul, elle tire son nom d'un quartier de Lyon. Il était initialement prévu qu'elle serait construite dans ce quartier et non à Perrache.

Les bâtiments Saint-Joseph et Saint-Paul sont aujourd'hui utilisés indifféremment pour les prévenus et les condamnés. Il y a cependant des sectorisations. Saint-Paul reçoit les mineurs dans le bâtiment K qui est relativement difficile à gérer, par les caractéristiques de la population d'une part et la structure d'accueil. Un investissement permanent s'avère nécessaire, avec un personnel spécialisé ou en tout cas fidélisé à ce secteur. On dénombre entre quinze et trente mineurs détenus. Le nombre dépend tout autant des infractions commises, de l'activité de la police et de l'activité des juges d'instruction. La plus grande partie de ces mineurs est âgée entre 16 et 18 ans. La prison de Saint-Paul accueille parfois un jeune de moins de 16 ans, pour autant qu'il s'agisse d'un crime de sang. La prison de Saint-Paul n'accueille que des garçons. Les filles sont incarcérées au quartier Montluc. Ce dernier quartier accueille entre 40 et 50 femmes, ainsi que, mais rarement, les mineures.

La prison de Saint-Paul : Le bâtiment H présente une architecture particulière. Ce bâtiment a la plus grosse capacité d'hébergement à Lyon. Il s'agit d'une grande nef pourvue de coursives. Cette architecture répondait à un souci de sécurité. Les surveillants surveillent les détenus, mais chaque surveillant est aussi sous le contrôle d'un autre surveillant qui se trouve à un étage différent. La prison de Saint-Paul accueille également le service médico-psychologique régional. Ce service est géré par du personnel relevant de l'administration pénitentiaire pour la sécurité et par du personnel médical qui est indépendant de la hiérarchie pénitentiaire. Ils dépendent des Hospices civils de Lyon. La loi préconisant la séparation a été adoptée en septembre 1994 par l'Assemblée nationale et dont la mise en application a débuté en janvier 1996. On trouve encore une unité de consultation et de soins ambulatoires. Les hospitalisations s'effectuent dans l'un des hôpitaux de Lyon, cet établissement disposant de lits sécurisés. Les détenus bénéficient ainsi d'un plateau technique ordinaire.

La rotonde de la prison de Saint-Paul abrite le secteur des visites, à savoir les parloirs avocats et familles. La prison de Saint-Paul compte enfin un quartier disciplinaire. Il s'agit d'un quartier provisoire dans la mesure où l'exécution des sanctions disciplinaires s'effectue habituellement dans un autre bâtiment qui fait actuellement l'objet de travaux.

La prison de Saint-Joseph : Ce quartier n'a aujourd'hui pas de spécificité particulière. Un des bâtiments accueille les détenus isolés des autres et les détenus punis. Actuellement, 98 % des isolements font des demandes volontaires pour des raisons de sécurité et de protection. Les cuisines situées dans le quartier de Saint-Joseph sont communes aux deux quartiers. Elles ont été très récemment rénovées. La prison de Saint-Joseph comporte par ailleurs des ateliers destinés aux détenus souhaitant travailler. La capacité de ces ateliers s'avère toutefois insuffisante au vu de la demande. Ces ateliers fonctionnent sur le principe de la concession. Des entreprises extérieures peuvent conclure des contrats avec l'administration pénitentiaire. Celle-ci fournit les locaux et la main-d'oeuvre alors que les entreprises fournissent le travail et assurent la rémunération de cette main-d'oeuvre.

Les quartiers de Saint-Paul et de Saint-Joseph comptent actuellement 600 détenus pour 300 places environ. Cet effectif moyen a été stabilisé depuis le début des années 90. Auparavant, l'effectif moyen était de 1200 détenus. On compte 60 % de condamnés et 40 % de prévenus, sachant qu'y sont exécutées les peines de courtes durées - moins d'une année en principe, mais pouvant aller jusqu'à trois ans pour des questions de gestion. Il convient de noter que la compétence d'affectation des peines inférieures à sept ans relève de la région, alors qu'elle relève de l'administration centrale pour les peines supérieures à sept ans.

Les prisons de Saint-Paul et de Saint-Joseph comptent 400 surveillants environ, soit 500 collaborateurs au total en tenant compte du personnel administratif et technique. Il n'existe aucune corrélation entre le nombre de détenus et l'effectif du personnel. Le calcul des besoins en personnel ne tient compte que des postes à tenir en lien avec l'architecture des bâtiments : un surveillant par étage et, cela, avec dix ou cent détenus à cet étage.

A terme, la direction envisage de répartir et d'héberger la population pénale sur la base de critères clairement définis, tels que le genre ou l'âge, la préventive ou l'exécution de peine, la durée de la peine, les condamnés primaires ou récidivistes, ceux travaillant ou non. La réflexion a pour but d'améliorer la cohérence au niveau de la gestion de la population pénale, mais aussi d'améliorer les conditions de détention.

L'insuffisance du nombre de places destinées aux détenus condamnés à de longues peines a tendance à augmenter, par conséquent, le délai d'attente en maison d'arrêt augmente, en moyenne 18 mois avant qu'un détenu ne soit envoyé dans un établissement d'exécution. De plus, une longue peine sous-entend généralement une longue instruction, soit deux ou trois ans en maison d'arrêt. Or, les détenus condamnés à de longues peines supportent mal de côtoyer des prévenus ou des détenus condamnés à de courtes peines. Cette situation s'aggrave, car les peines prononcées sont de plus en plus longues, ce qui pose évidemment des problèmes au niveau de l'organisation de la prison. Par ailleurs, de plus en plus de peines ont trait à des délits de moeurs. Pour des raisons de sécurité, les détenus concernés doivent être séparés des autres détenus et regroupés. C'est le seul moyen de leur permettre d'accéder en toute sécurité à la promenade et à la douche. Cette contrainte pose également des problèmes au niveau de l'organisation de la prison.

Il y a une cinquantaine de places de travail. Les ateliers peuvent accueillir des groupes composés de quatre à cinq détenus jusqu'à quinze détenus. Un fonctionnaire a été récemment affecté au poste de développement du travail pénitentiaire dans le but d'augmenter le nombre d'entreprises offrant du travail aux détenus. Dans les établissements d'exécution de peine, tous les détenus le souhaitant peuvent travailler. Le salaire s'élève au SMIG moins 30 %, payé par l'entreprise concessionnaire, bien que le contrat soit passé entre la prison et l'entreprise.

Les visites par les familles de détenus s'effectuent le matin à Saint-Joseph et l'après-midi à Saint-Paul. La compétence appartient au juge d'instruction s'agissant des prévenus et au directeur de l'établissement s'agissant des condamnés. La procédure administrative d'autorisation de visite est assez souple. Chaque détenu bénéficie de trois visites d'une demi-heure chacune par semaine. Il est prévu de passer de 30 à 45 minutes de visite. Il n'y a pas de parloirs intimes. Cette question a fait l'objet de longues discussions, aussi bien au niveau administratif qu'au niveau politique. Le débat est ancien puisqu'il date d'une quinzaine d'années. Il est prévu de mettre en place des unités de vie famille (UVF). Ces UVF, dont le but est de préserver l'unité de la famille, ne concerneront que les établissements pour peines - centres de détention et maisons centrales.

Le problème drogue se répercute en prison ; il est probablement plus marqué dans les prisons situées en ville, à Lyon et à Nice notamment. Il est facile d'avoir recours à des « parloirs sauvages ». Les cours de promenade étant généralement situées près des rues, une personne extérieure peut lancer quelque chose par-dessus le mur d'enceinte.

La visite des prisons de Lyon suffit pour être convaincu par les conclusions du rapport de l'Assemblée nationale. Les conditions de travail sont extrêmement difficiles ; le personnel est sous pression permanente ; les moyens à disposition des prisons sont largement insuffisants pour améliorer les conditions de détention et les conditions de travail. Il est impressionnant de constater la volonté des personnes rencontrées (directeur régional, directeur des prisons, surveillants, enseignants), malgré ces conditions, de chercher des pistes pour limiter la désinsertion de certains et tenter la réinsertion d'autres. Mais ils ne peuvent réaliser que très peu face à l'importance de leur tâche.

Le titre et l'éditorial de Sylvie Arsever, dans Le Temps du 21 octobre 2000, résument les difficultés que l'on rencontre lorsqu'on aborde la prison, la détention, la peine. La prison devrait limiter la punition au minimum et axer son effort sur la rééducation, sur la réinsertion. Hélas, trop souvent encore « [les] détenus tuent le temps, tandis que le temps tue tout ce qu'ils avaient réussi à construire à l'extérieur ».

Les politiques et spécialistes qui ont élaboré le projet de révision du Code pénal suisse n'ont hélas pas envisagé une réforme de la peine s'appuyant sur les diverses expériences menées en Suisse ou ailleurs. Les crédits sollicités à destination des prisons ou visant à améliorer les conditions de détention, à favoriser la réinsertion sociale et professionnelle sont les premiers à disparaître dans l'élaboration des budgets. Le dernier petit exemple concerne l'installation de télévision dans les cellules de Champ-Dollon ; il a fallu plusieurs années avant qu'enfin une modeste somme soit inscrite au budget 2001. Le problème n'est pas spécifiquement suisse.

Un exemple seulement en lien avec l'actualité 2000 : l'Assemblée nationale française et le Sénat ont, pour la première fois depuis 125 ans qu'existent les commissions d'enquête, décidé de la constitution d'une commission d'enquête parlementaire sur les conditions de détention dans toutes les prisons de la République française et surtout de répondre à la question de fond : A quoi sert la prison et quel est le sens de la peine ? Le rapport, passionnant, est accablant. Principalement, il relève des conditions de détention inadaptées et souvent indignes, un personnel désorienté et peu reconnu, des moyens insuffisants, l'absence d'objectifs … Le gouvernement met actuellement en consultation un projet de loi sur la détention, mais pas un sou supplémentaire au budget 2001, qui permettrait déjà d'améliorer, ne serait-ce que modestement, les moyens et les conditions de travail dans les établissements de détention, même si le Premier ministre a promis, le 10 novembre 2000, de débloquer une somme de 10 milliards de francs ces cinq prochaines années.

Les conditions de détention dans les établissements en Suisse sont relativement bonnes. Le personnel des établissements pénitentiaires a des conditions de travail relativement acceptables ; à noter tout de même que le personnel est toujours à la limite inférieure, pour ne pas dire, dans la plupart des établissements, en nombre insuffisant. Il existe une importante disparité d'effectifs entre les différents établissements. Il n'est cependant pas possible d'apprécier le ratio personnel/détenus sans prendre en considération plusieurs autres paramètres, par exemple le type de détenus, l'architecture des établissements, l'importance de la surveillance électronique.

Financièrement, les établissements doivent tout le temps mettre en place des montages complexes pour essayer de remplir correctement la mission qui leur est assignée par les autorités politiques et assurer l'exécution des décisions du pouvoir judiciaire.

Depuis de nombreuses années, le Parlement genevois adopte les rapports de la Commission des visiteurs officiels ; il serait utile que le Conseil d'Etat reprenne les rapports des 10 dernières années, relève les questions et les recommandations, vérifie s'il y a été répondu concrètement, s'il n'y a pas été répondu, se demande pourquoi et ce qui pourrait être fait et … fasse rapport au Grand Conseil avant que le Parlement ne se prononce sur la modification de la loi sur Champ-Dollon.

Par la suite, la Commission des visiteurs officiels invite le Conseil d'Etat à rendre un rapport quadriennal au Grand Conseil - idéalement au début de la quatrième année de la législature- décrivant l'évolution de la situation de la détention et les réponses apportées suite aux recommandations du Grand Conseil.

La détention des mineurEs a été le thème principal de la Commission des visiteurs officiels pendant cette année de législature. Abordé lors de la précédente législature, il a fait l'objet de la motion 1316 rédigée et déposée par les membres de la commission. Renvoyée au Conseil d'Etat par le Grand Conseil, elle n'a pas encore fait l'objet d'une réponse formelle, mais au travers des diverses auditions, on peut constater que certaines actions ont été entreprises dans le but d'y répondre.

Tout d'abord un résumé des recommandations sur ce thème du rapport 1999 qui gardent toute leur actualité, suivies des éléments qui ont évolué au cours de l'année 2000, en insistant sur les recommandations absolument prioritaires et toujours d'actualité.

Le constat de l'évolution de la délinquance des mineurEs est, cette année, encore répété. En particulier, selon le Tribunal de la jeunesse, le nombre de cas ne semble pas avoir beaucoup augmenté, mais les délits seraient plus graves et nécessiteraient plus fréquemment des décisions d'enfermement. Il serait tout de même utile d'analyser l'évolution des délits et des peines prononcées par les tribunaux pour confirmer les perceptions exprimées par le Tribunal de la jeunesse.

La transformation de La Clairière a permis d'augmenter très modérément le nombre de places de détention des mineurs et surtout de créer 4 à 5 places pour les mineures et d'éviter ainsi de les enfermer à Riant-Parc. Il reste cependant insuffisant, puisque trop d'adolescents ont encore été incarcérés à Champ-Dollon.

Légalement, Champ-Dollon ne peut recevoir qu'à titre exceptionnel des mineurEs ; pourtant en 2000, elle en a accueilli plus de 100, soit au moins autant que l'année précédente. La Clairière affiche toujours complet à l'année. Insuffisamment équipé dans le domaine, notre canton doit au plus vite s'organiser pour répondre correctement à cette nouvelle évolution.

Un dialogue doit véritablement être entrepris avec les cantons signataires du concordat sur l'exécution des peines et mesures concernant les adultes et les jeunes adultes dans les cantons romands et du Tessin. Il doit rapidement aboutir à un accord et se traduire par l'intégration dans le concordat des questions touchant à la détention préventive et en exécution de peine des mineurEs.

En amont du problème de détention il est indispensable de suivre l'évolution de la situation des jeunes. Il existe de nombreuses études scientifiques très intéressantes et utiles sur le phénomène de la violence. Il y en a même qui ont été réalisées dans le contexte genevois, par exemple l'étude, menée par Alain Clémence et son équipe, sur les significations de la violence à l'école. Il serait peut-être utile de s'en inspirer pour améliorer la qualité et la quantité des interventions dans les écoles, et plus largement au niveau des quartiers en vue de prévenir les dérapages et limiter les incarcérations de mineurEs.

En réponse à la réflexion de la Commission des visiteurs et aux pressions du Grand Conseil, les efforts entrepris par le Conseil d'Etat, le Département de justice police et transports et l'administration pénitentiaire montrent que le problème de la détention des mineurEs a été sérieusement traité. La Commission des visiteurs attend avec grand intérêt les conclusions du groupe de travail piloté par la présidente du Tribunal de la jeunesse. L'adoption par le Grand Conseil du projet de loi autorisant la réalisation d'un établissement supplémentaire réservé aux mineurEs devrait permettre d'éviter la détention de mineurEs à Champ-Dollon ou à Riant-Parc et d'assurer un traitement similaire aux filles et aux garçons.

Le rapport intermédiaire de la Commission d'experts mandatée par le Grand Conseil (R 413) pour enquêter sur la situation à Champ-Dollon a été remis à la commission en juin 2000 et le rapport final en novembre 2000. La Commission d'experts a été entendue par la Commission des visiteurs le 16 novembre 2000.

Les principaux problèmes soulevés par le rapport sont en partie corrigés. Avec le départ du directeur, un certain nombre de reproches, liés à son attitude et à son comportement, ont disparu. Le problème de la psychologue n'a pas encore été réglé : il y a urgence à ne pas maintenir ce poste à l'intérieur de la prison, afin de garantir l'anonymat du personnel qui consulte et permettre au psychologue de travailler en respectant la déontologie de la profession.

Il est vrai que le climat lors des visites en septembre 2000 à Champ-Dollon avait changé, les langues se sont déliées. Durant les discussions, ce n'est plus seulement le directeur qui s'exprime, mais surtout ceux qui connaissent le mieux les situations et les réponses.

Sans trop insister sur cette situation, il est regrettable que le processus de décision ait été si lent : d'abord les interventions avant la décision du Conseil d'Etat sur le choix d'un nouveau directeur qui n'ont eu aucun impact, puis, pendant trois ans de multiples interventions parlementaires, trois commissions d'enquête, nommées respectivement par le Grand Conseil, le Conseil d'Etat et le conseiller d'Etat. Les rapports rendus et portés à la connaissance de la commission sont accablants, on peut imaginer qu'il en va de même de celui, rendu au conseiller d'Etat et finalement remis à la commission, caviardé des 12 pages de recommandations. Finalement, la seule décision à prendre a été prise. Un directeur a.i. a été désigné et les tensions encore plus que perceptibles en début d'année 2000, se sont atténuées. Clairement, le profil d'un directeur non seulement doit être calibré en termes de compétences cognitives, c'est-à-dire posséder un titre universitaire complété d'une formation en administration publique, mais encore il faut être particulièrement attentif à ses caractéristiques relationnelles et comportementales.

Un dernier point. Le précédent directeur a ouvert de nouveaux ateliers, ce qui, en soit, est louable. Mais, il aurait peut-être fallu réfléchir aux conséquences sur l'organisation générale du travail. L'affectation de gardiens à de nouvelles tâches sans les remplacer pour les anciennes a généré des dizaines de milliers d'heures supplémentaires. Les conditions de travail sont difficiles, le personnel est en nombre insuffisant pour accomplir correctement son travail dans un établissement dont la capacité maximum est continuellement dépassée. Si cette spirale des heures supplémentaires n'est pas prise très rapidement au sérieux, la situation s'aggravera année après année et deviendra impossible à gérer sereinement.

En 2000, le nombre de personnes détenues est toujours supérieur au nombre de places. Cela pose quelques problèmes dans la répartition, il faut en effet éviter de mettre certaines personnes ensemble si l'on ne veut pas avoir à gérer des conflits et des bagarres en permanence.

De nombreuses recommandations ont été faites les années précédentes. La plupart d'entre elles sont toujours d'actualité.

Ce qui a été résolu totalement ou partiellement ou est en voie de l'être concerne l'accès à un PC par les détenus et surtout la possibilité d'imprimer tout de suite son courrier - grâce à la diligence d'une députée de la commission ayant obtenu des imprimantes inutilisées aux HUG - sans être obligé d'attendre 15 jours qu'un gardien ait le temps de prendre la disquette, d'aller l'imprimer et de rapporter le document ; méthode qui par ailleurs posait des problèmes de confidentialité vis-à-vis du courrier. Nous rappelons que le courrier destiné à la Commission des visiteurs ou à la justice n'est pas lu par les surveillants et que pour le reste du courrier il ne devrait pas être lu par les gardiens mais uniquement au niveau administratif.

A relever également que les détenus peuvent enfin remettre des friandises à leurs enfants, ce n'est de loin pas parfait, celles-ci peuvent être acquises pendant la visite auprès du gardien, le choix est limité. Certains souhaiteraient remettre des cadeaux qu'ils ont réalisés tels que dessins ou bricolage. Pour des questions de sécurité, cela pourrait se faire, mais seulement en remettant l'objet 24 heures auparavant de manière à pouvoir le contrôler.

La télévision pourra être installée dans toutes les cellules. Un crédit est enfin inscrit par le Conseil d'Etat au budget 2001.

Une personne incarcérée en détention préventive bénéficie du droit d'informer ses parents ou ses proches. Plusieurs personnes n'ont pas la possibilité de le faire depuis le poste de police ou le Palais de justice. Pour régler ce problème du téléphone à l'arrivée à la prison de Champ-Dollon, il serait utile d'élaborer une convention entre le Palais de justice (l'instruction) et la prison de Champ-Dollon, de façon à ce que les détenus arrivant disposent automatiquement d'une autorisation, sauf avis écrit contraire du juge d'instruction. Ainsi, la procédure pourrait être raccourcie et le droit du détenu respecté sur ce point.

Les problèmes de confidentialité relevé lors du passage de la commission au QCH ont été pris au sérieux par la direction de Champ-Dollon et le service médical pénitentiaire. Ils sont, également grâce à l'action intensive d'une députée de la commission, en voie d'être résolus.

La situation au sous-sol du bâtiment des lits de l'hôpital Cluse-Roseraie est choquante. Les conditions de détention sont limites : chambres donnant sur le couloir, dont les fenêtres sont dépolies, couloir comme seul lieu de promenade.

Les conditions de travail pour le personnel de surveillance et pour le personnel de soins sont, osons le terme, indignes.

Il est urgent de réaliser le déménagement de cette unité, dans la mesure où des aménagements de l'espace actuel sont impossibles. En d'autres termes il est urgent de reprendre la réflexion et le travail réalisés, il y a quelques années et actuellement au frais, pour les faire aboutir, simplement pour offrir des conditions décentes de détention et de travail.

La restructuration des services pénitentiaires et établissements de détention devrait améliorer la cohérence du système et faciliter la gestion. Cette restructuration ne doit pas se faire au détriment de la qualité. Le regroupement de tous les établissements dans un même office ne devra pas empêcher les établissements à assurer des conditions adaptées de détention et de réinsertion. Il serait regrettable que La Clairière soit forcée d'adopter des procédures qui limiteront les efforts pédagogiques importants développés depuis plusieurs années.

La commission suggère, dans une première phase à évaluer, de constituer une direction collégiale regroupant les quatre responsables de service. La présidence ou la coordination de type plutôt administrative, logistique et représentative étant assurée successivement par un des responsables. Pour assumer les tâches de l'office pénitentiaire, il serait plus judicieux et cohérent d'avoir une équipe de professionnels visant à développer les outils et indicateurs de suivi et d'assurer techniquement ce suivi, les décisions étant du ressort du collège de direction du service pénitentiaire et/ou du Conseil d'Etat.

De plus, il est évident que le service médical pénitentiaire doit être et rester attaché au système sanitaire et il est heureux que le Conseil d'Etat ait réaffirmé cette position dans son arrêté du 27 septembre 2000. Tout en étant certain que les prestations de soins sont de qualité dans les établissements de détention, il serait souhaitable de profiter de cette réorganisation pour donner mission au service médical pénitentiaire d'assurer les prestations de soins à l'ensemble des établissements cantonaux. Ceci permettrait d'assurer une unité de doctrine et l'égalité de traitement pour tous les détenus. En d'autres termes, les médecins et autres professionnels de soins intervenant dans les établissements autres que Champ-Dollon devraient avoir un lien formel avec le service médical pénitentiaire, comme d'autres médecins de ville ont des contrats avec les divers départements des HUG.

Rappel du principe et des exceptions qui régissent le concordat :

Art. 1 Principe

Art. 2 Exceptions

Les articles suivants nomment les établissements faisant partie du concordat, le type de personnes qu'ils sont capables de détenir et les conditions qui régissent l'admission.

Art. 12 Etablissements destinés aux hommes

Art. 13 Etablissements destinés aux femmes

Art. 14 Placement

Art. 15 Admission

Tout cela pour mettre en évidence que dans des situations particulières de personnes, par ailleurs ayant facilement recours à la violence, condamnées à de lourdes peines de privation de liberté et que l'on retrouve incarcérées à Champ-Dollon, se pose le problème du respect du concordat. En vertu de celui-ci, un établissement ne peut refuser un détenu qui remplit les conditions pour être admis, aussi violent soit-il.

Genève ne possède pas de pénitencier ; la seule exception est la section de La Pâquerette, pour les personnes mentalement et psychiquement handicapées, pour autant qu'elles reconnaissent leur délit. Par conséquent, ces personnes doivent se trouver aux EPO, qui permettent de garder dans des conditions correctes les personnes dangereuses et violentes.

Il serait grandement souhaitable que les cantons s'organisent pour que ce genre de problème ne se reproduise pas et qu'ils évitent ainsi des situations qui deviennent ingérables. La responsabilité du SAPEM est engagée. Ce service doit veiller sérieusement au respect des règles définies et informer immédiatement le Conseil d'Etat et la Commission des visiteurs des problèmes rencontrés dans le cadre du concordat.

Les mesures concernant les délinquants anormaux sont définies à l'art. 43 CPS (RS 311.0) rappelé ci-dessous.

Art. 43 Mesures concernant les délinquants anormaux

La question concernant les problèmes rencontrés en particuliers avec les détenus condamnés pour des crimes d'ordre sexuel a été abordée systématiquement par tous les directeurs des établissements visités par la commission. Ils représentent la majorité des condamnés dont la peine est convertie en vertu de l'art. 43 CPS.

Il ressort des discussions de nombreuses difficultés dans la gestion et la prise en charge de ces détenus. La Commission des visiteurs abordera cette question de façon prioritaire pendant l'année à venir, de manière à pouvoir esquisser des pistes dans ce domaine, sur la base de l'expérience acquise dans d'autres pays, en particulier le Canada et la Hollande. De manière plus générale, la question de l'internement doit être débattue, dans la mesure où la sortie de détention dépend de critères d'ordre médicaux (art. 43 et 44 CPS).

Depuis plus d'une année, le canton de Genève, de même que d'autres cantons, a initié une mesure alternative à la détention telle que le port d'un bracelet électronique pour les personnes condamnées qui leur permet d'éviter l'incarcération. La commission se penchera l'année prochaine sur cette nouvelle pratique et en examinera les avantages et les inconvénients.

La Commission des visiteurs a examiné le rapport de la Commission d'experts instituée par la résolution 413 et a entendu la Commission d'experts. Il est indispensable que le Conseil d'Etat suive leurs recommandations.

La Commission des visiteurs, à l'unanimité, invite le Conseil d'Etat et le Procureur général à suivre les conclusions et recommandations du présent rapport.

La Commission des visiteurs officiels, à l'unanimité, vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à réserver un bon accueil à ce rapport et à l'adopter.

Projet approuvé le 10 mai 2000 par le Conseil d'Etat

Le domaine pénitentiaire est actuellement composé :

Aujourd'hui, les différentes instances qui interviennent dans le dispositif pénitentiaire sont, de par leur rattachement hiérarchique et leur statut, indépendantes les unes des autres. Elles assument donc leur mission de manière autonome, individuelle, sans être mutuellement et réciproquement toujours coordonnées.

La prise en charge très sectorielle du délinquant ne laisse pas envisager un travail en réseau et une complémentarité de chacun des services concernés.

Le domaine pénitentiaire doit se donner la structure et les moyens nécessaires pour mener une action globale où les secteurs collaborent, coordonnent leurs activités et élaborent ensemble les réponses à apporter aux problèmes généraux liés à la délinquance et plus particulièrement la prise en charge des condamnés.

Autrefois, la prise en charge très sectorielle du délinquant ne laissait pas envisager un travail en réseau et une complémentarité de chacun des services concernés.

Aujourd'hui, il faut penser et agir de manière globale, gérer de manière complémentaire et continue.

Disposer d'une structure obéissant à une véritable logique fonctionnelle permettant d'atteindre les objectifs suivants :

L'examen complet des situations particulières des collaboratrices et collaborateurs de la Fondation des Foyers Feux-Verts (FFFV) a permis de constater que les pratiques en matière d'engagement et de rémunération s'éloignaient parfois de la pratique en vigueur dans l'administration cantonale et des disposition prévues par la CCT AGOER.

Dès lors que l'engagement pris au moment de l'adoption du projet par le Conseil d'Etat le prévoyait explicitement, les actuels employés de la FFFV verront leur niveau salarial maintenu à leur niveau actuel.

La mise en place de l'office pénitentiaire entraîne une augmentation du nombre de postes égale à 58,85 unités. Le financement de ces postes est entièrement assuré par la subvention de fonctionnement jusqu'ici allouée à la FFFV et n'entraîne aucune dépense nouvelle.

A court et à moyen terme, le fait de ramener le budget de la FFFV à l'Etat permettra de dégager des économies en bénéficiant d'un effet de synergie au niveau des dépenses générales.

Tous les collaborateurs et collaboratrices du futur office pénitentiaire ont été régulièrement informés de l'état d'avancement des travaux et de leur situation.

Tous les services, entités et institutions concernés par la réforme en cours ont été informés des travaux en cours.

C. Franziskakis

errata

Rapportde la Commission des visiteurs officiels chargée d'étudier les pétitions :

La Commission des pétitions a étudié les trois pétitions susmentionnées sous la présidence de Mme Jeannine de Haller lors de ses séances des 25 septembre et 5 octobre 2000.

Pour l'obtention d'un nouvel enseignant et d'un temps de cours adapté par détenu (30 à 45 mn)

Une enseignante ayant été engagée le 1er septembre, le voeu des pétitionnaires est exaucé. La commission s'en félicite et se réjouit d'ores et déjà de faire le point de la situation en rencontrant l'enseignante lors de ses prochaines visites annuelles afin d'évaluer si les moyens sont suffisants pour répondre aux besoins.

S'agissant de la seconde préoccupation des pétitionnaires, à savoir d'accorder un temps de cours adapté pour chaque détenu, au vu du nombre de détenus, il paraît impensable de pouvoir y donner suite.

En conséquence, à l'unanimité de ses membres, la commission vote le dépôt de la pétition à titre de renseignement sur le bureau du Grand Conseil.

Nous constatons que l'interdiction de ces deux accessoires empêche l'accès à la formation d'une part et entraîne une violation du secret du courrier, d'autre part.

En plus d'empêcher l'accès aux multiples logiciels et formations disponibles sur ce support, l'interdiction du CD-Rom impose une situation discriminatoire entre détenus, dans la mesure où ce qui reste interdit aux uns est autorisé aux autres (des CD de divertissement et consoles de jeux étant autorisés). Etant donné l'importance de l'accès à une formation, notamment en informatique, pour la réinsertion des détenus, nous nous demandons pourquoi il est interdit de disposer de CD utiles à sa formation alors qu'il est possible d'en disposer pour jouer et se divertir.

Par ailleurs, l'interdiction de disposer d'une imprimante nous oblige à confier notre courrier à un fonctionnaire qui s'en va l'imprimer, selon sa disponibilité (parfois il faut attendre 3 jours pour voir imprimer les documents), loin de la vue et en dehors de tout contrôle des détenus.

C'est pourquoi nous demandons à :

- pouvoir disposer d'ordinateurs personnels équipés de CD-ROM

-  pouvoir disposer d'une imprimante en cellule.

Nous espérons que ces doléances sauront retenir votre attention et vous prions d'y donner suite aussitôt que possible.

Estimant que le contexte particulier de la détention préventive ne devrait pas empêcher les prévenus d'utiliser leur ordinateur personnel, M. Coelho se plaint d'une série d'inconvénients que l'on peut résumer ainsi :

faibles performances des ordinateurs mis à disposition (processeur 75 Mhz) ;

nombre insuffisant d'appareils ,

coût élevé de la location (Fr. 30.- par mois, soit 10 % du pécule) ;

impression de documents ; lenteur de la procédure (jusqu'à 15 jours) et coût trop élevé (20 cts/page) ;

ancienneté du logiciel d'exploitation ; Windows 95 totalement insuffisant pour permettre à ceux qui le souhaitent d'évoluer.

La problématique de l'informatique que soulève très clairement le pétitionnaire est bien comprise des commissaires. Toutefois, il est tout aussi clair pour ces derniers que les contraintes liées à la détention, même préventive, ne permettent pas pour des raisons sécuritaires et budgétaires de disposer de son propre ordinateur. En effet, en admettant que soit offerte la possibilité d'utiliser son propre matériel, il serait nécessaire que celui-ci soit entièrement reprogrammé ou réinstallé de manière à exclure l'entrée d'information de l'extérieur de la prison.

Le nombre d'ordinateurs, 12 ordinateurs mis en circulation par rapport à une population de 270 détenus, semble une faible proportion. De l'avis des députés et pour autant qu'il y ait une demande, l'augmentation de l'offre en matériel informatique afin de développer cette activité est souhaitable. La location mensuelle de Fr. 30.- paraît élevée pour certains commissaires qui soulignent l'importance du rapport avec le pécule d'environ trois cents francs.

Concernant la lenteur de la procédure d'impression et son coût élevé, la commission s'accorde à penser qu'il existe certainement des solutions plus satisfaisantes. La réelle solution viendra très concrètement de Mme la députée Jacqueline Cogne qui propose, puis obtient très rapidement le don d'une quinzaine d'imprimantes d'occasion.

Par rapport à l'ancienneté du logiciel d'exploitation Windows 95, si effectivement il existe des versions plus récentes, Windows 98 puis 2000, ce système est encore et heureusement très répandu, que ce soit parmi les utilisateurs privés ou les entreprises. D'ailleurs, les ordinateurs des députés sont également équipés du logiciel Windows 95.

Après avoir étudié les différents points soulevés par les pétitionnaires, la commission a pu donner une suite positive et rapide au problème de l'impression de documents. Pour le surplus, en approuvant les contraintes sécuritaires qui limitent l'accès à l'informatique à des ordinateurs de l'établissement, la commission est favorable aux efforts de l'administration pour développer les possibilités de mise à disposition de l'outil informatique et ne peut que l'encourager à poursuivre dans ce sens.

Mise au vote, la proposition de déposer la pétition à titre de renseignement sur le bureau du Grand Conseil est acceptée à l'unanimité.

Une mesure interdit d'apporter quoi que ce soit aux parloirs y inclus un bonbon pour nos enfants ou une fleur pour nos proches. Nous estimons que cette mesure coercitive ne se justifie pas étant donné que nous subissons une fouille corporelle complète par attouchements avant d'être admis aux parloirs, et une autre fouille corporelle avec mise à nu à la sortie des visites. Par contre elle nous prive des manifestations d'affection et de tendresse les plus élémentaires envers ceux qui nous sont chers et dont les principaux lésés se trouvent être nos enfants.

Par ailleurs, nous avons remarqué que cette mesure se révèle être aussi humiliante pour les prévenus que difficile à appliquer par les surveillants : alors qu'un certain nombre de surveillants, sensibles à nos bonnes dispositions, ferme les yeux à l'application rigoureuse de cette mesure, un autre nombre aussi certain se complaît à faire de l'excès de zèle et faire de l'application de cette mesure une occasion de plus pour humilier les détenus. Ainsi, il arrive souvent que lors d'une même visite quelques détenus se voient accorder la faveur d'une entorse au règlement de la part des surveillants, alors que d'autres se heurtent à un refus catégorique.

Peut-être trouverez-vous ces arguments puérils, tellement les gestes que nous demandons à accomplir apparaissent anodins pour une personne libre. Nous nous permettons cependant de faire remarquer que, lorsque l'on se trouve privé de l'affection des nôtres, le moindre geste susceptible de compenser cette privation prend une grande valeur à nos yeux.

Enfin, faudrait-il rappeler que, en principe, nous faisons l'objet d'une mesure de privation de liberté mais pas de la liberté de témoigner notre affection et nos sentiments vis-à-vis de nos proches, ne serait-ce qu'au moyen d'un bonbon, d'un dessin ou d'une fleur que l'on offre à l'occasion d'une visite. Merci d'en tenir compte.

C'est pourquoi nous demandons à :

- pouvoir offrir de petites confiseries à nos enfants au cours des visites ;

- pouvoir apporter un cahier et des crayons à dessin, des cartes à jouer, etc., pour meubler l'heure de la visite en jouant avec nos enfants ;

- pouvoir offrir, une fleur, un dessin, un objet à nos proches au cours des visites.

Nous espérons que ces doléances sauront retenir votre attention et vous prions d'y donner suite aussitôt que possible.

M. Coehlo regrette qu'il ne soit pas possible lors des visites de remettre directement à ses enfants des friandises ou un objet qu'il aurait pu confectionner. Le geste inverse de recevoir de ses enfants un dessin n'est pas non plus possible directement. La pratique consiste à remettre les objets au gardien qui les donne après la visite à son destinataire.

Il arrive que les détenus cachent des friandises au fond de leurs poches. Lors du contrôle précédant la visite, il peut y avoir une certaine tolérance.

La direction de l'établissement s'est entretenue avec M. Coehlo et l'a informé qu'elle envisage l'aménagement d'une salle de visite pour les enfants.

Aussi anodine que cette demande puisse paraître, la commission est extrêmement sensible à l'explication du pétitionnaire. Le geste d'offrir à ses enfants est un signe affectif dont la signification et l'importance sont encore plus grandes lorsqu'il y a séparation. Ce geste renforce le lien familial et rien ne saurait entraver tout acte aidant à conserver l'unité familiale, contribuant également à la stabilité sociale.

Dans la pratique, la commission suggère que les objets soient contrôlés avant la visite et remis à la personne qui offre au moment de l'entrée dans le parloir.

Il y a certainement plusieurs solutions simples et adéquates garantissant que le don puisse s'effectuer sans intermédiaire. Approuvant cet avis, la direction de la prison a déjà pensé à plusieurs possibilités et mettra en oeuvre très prochainement la meilleure d'entre elles.

La volonté bien marquée de la direction répondant ainsi à la préoccupation du pétitionnaire, la commission décide de déposer la pétition à titre de renseignement sur le bureau du Grand Conseil.

Se déterminant unanimement sur les trois pétitions, P 1303, P 1305, et P 1306, en votant le dépôt de celles-ci sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement, la commission vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, de la suivre dans ses conclusions.

Débat

M. Dominique Hausser (S), rapporteur. La commission des visiteurs officiels du Grand Conseil s'est réunie une trentaine de fois durant cette troisième année de législature, au cours desquelles elle a visité les établissements de détention du canton, mais aussi les établissements de détention du concordat romand et du Tessin, dans lesquels sont détenus des personnes condamnées par la justice genevoise. Lors de ces différentes visites, elle a eu l'occasion d'entendre une cinquantaine de détenus à propos de leurs conditions de détention, mais aussi les directions et le personnel de ces divers établissements sur les problèmes de fonctionnement auxquels ils se trouvent confrontés au quotidien.

Vous trouverez l'ensemble des résumés de ces visites et de ces diverses auditions dans le rapport.

Vous me permettrez néanmoins de rappeler les principales conclusions et recommandations de la commission, résultat des discussions sur le travail de l'année. Les prisons doivent être un lieu de punition, mais elles doivent aussi favoriser la réinsertion dans la vie sociale après cette période de détention.

De manière générale, la commission des visiteurs fait un rapport, qui est ensuite adopté par le parlement et qui transmet des recommandations, cela depuis de nombreuses années au Conseil d'Etat et au procureur général. Depuis maintenant plus de dix ans, les recommandations deviennent plus précises, plus pointues, relèvent et soulèvent des questions importantes. Or, nous n'avons jamais de réponses formelles du Conseil d'Etat, et la commission souhaite que, dorénavant, il y ait, au moins une fois par législature, un rapport du Conseil d'Etat qui reprenne l'ensemble des conclusions et des recommandations et qui précise la suite qui leur a été donnée. Il me semble que ce sera un bon moyen pour nous permettre de voir dans quelle mesure le travail de contrôle des conditions de détention respectueuses des droits de la personne par ce parlement sera effectif.

Deuxième point qui a été particulièrement examiné par la commission des visiteurs officiels de prison : c'est le problème de la détention des mineurs. Nous avons eu l'occasion d'en parler à plusieurs reprises dans ce parlement, en particulier lors du dépôt et de l'adoption du projet de loi concernant l'utilisation des bâtiments sur les terrains de La Clairière.

En effet, plus de cent mineurs ont été détenus à Champ-Dollon au cours de l'année 2000. Or, nous le savons, cette mesure ne devrait s'appliquer qu'exceptionnellement. Et, malgré l'augmentation du nombre de places - quatre ou cinq - à La Clairière, aujourd'hui encore, trop de jeunes sont détenus de manière préventive à Champ-Dollon, et cela doit cesser. Le travail fourni ces derniers mois par l'administration pénitentiaire et par les services de l'administration centrale ont montré que les efforts accomplis avaient été importants. Il faut les poursuivre pour que cessent ces détentions de mineurs dans des établissements pour adultes.

Autre point qui nous a préoccupés et qui préoccupe ce parlement depuis plusieurs années : le problème lié à la direction de la prison de Champ-Dollon.

Nous discutons aujourd'hui également du rapport qui avait été demandé par ce Grand Conseil et qui est présenté sous la forme du rapport divers 383 qui fournit toute une série de pistes en réponse à une série de problèmes. Aujourd'hui des corrections ont été apportées à une bonne partie des problèmes qui avaient été soulevés. Et, avec le départ du directeur, un certain nombre de reproches liés à son attitude et à son comportement ont disparu de fait. Toutefois quelques points précis doivent encore être réglés, et nous souhaitons qu'ils le soient dans les prochaines semaines si c'est possible, étant donné que ce sont des mesures relativement simples à appliquer.

Sans insister longuement sur ce sujet, puisque nous avons déjà eu l'occasion d'en débattre à plusieurs reprises, je dirai qu'il est regrettable que ce processus de décision pour régler la situation de la direction de Champ-Dollon ait pris tant de temps. En effet, il a fallu des interventions multiples, qui n'ont eu aucun impact sur la décision du Conseil d'Etat pour choisir un nouveau directeur. Pendant trois ans, il y a eu de multiples interventions parlementaires, trois commissions d'enquêtes nommées respectivement par le conseiller d'Etat, par le Conseil d'Etat et par le Grand Conseil. Tous les rapports sont accablants, et on peut à juste titre s'étonner qu'il ait fallu attendre trois ans pour régler cette situation. Aujourd'hui, il y a un directeur ad interim qui a calmé la situation dès son arrivée. C'était particulièrement évident pour les membres de la commission des visiteurs lors des visites à Champ-Dollon.

Certaines mesures prises par le directeur précédent vont poser des problèmes en termes d'heures supplémentaires à la prison de Champ-Dollon. En effet, ces heures supplémentaires se montent au chiffre énorme de trente mille environ; si des mesures rapides ne sont pas prises, on se trouvera dans une situation qui pourrait être aussi complexe à régler que celle des heures supplémentaires de la police.

Les charges de travail dans les établissements de détention sont lourdes. Le personnel en Suisse, malgré des conditions qui sont certainement meilleures que dans d'autres établissements situés ailleurs dans le monde, est aujourd'hui systématiquement sous pression, et il me semble important que nous ne le négligions pas, même si électoralement il ne s'agit pas d'un sujet extrêmement porteur.

J'ai encore deux points à aborder. Le premier concerne le nouvel office pénitentiaire. La restructuration des services est certainement une bonne chose. Elle permettra d'avoir une même direction pour l'ensemble des établissements de détention du canton, qui sera directement rattachée à l'Etat. Cela favorisera certainement la gestion de ces établissements.

Vous avez aussi entendu certaines réactions au moment du budget, car les informations transmises par le Conseil d'Etat n'ont pas réussi à convaincre la commission des finances en particulier. Mais les propositions qui ont été faites pour la nouvelle organisation de cet office pénitentiaire sont à notre avis satisfaisantes à l'heure actuelle. Nous verrons si nous avons eu raison de faire confiance et si ces propositions se concrétisent.

Enfin, j'aborde le problème récurrent concernant les établissements concordataires. Le canton de Genève n'a pas directement sur son territoire d'établissement d'exécution de peine. Il est donc complètement dépendant des pénitenciers qui se trouvent dans les autres cantons. Le concordat est clair : les exécutions de peine doivent se faire dans les pénitenciers et ne doivent pas se faire dans des établissements de préventive. Je crois donc qu'il serait bon que le Conseil d'Etat rappelle à ses collègues des autres cantons que ces autres établissements sont soumis aux règles concordataires et ne peuvent pas, sous un prétexte ou sous un autre, refuser d'accepter une personne qui remplit les critères pour rentrer dans ces établissements.

Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, en résumé, les principaux points de ce rapport que la commission des visiteurs à l'unanimité vous recommande d'accepter. Elle vous recommande également de prendre acte du rapport de la commission d'experts que nous avons instituée par la résolution 413. 

M. Jean-Marc Odier (R), rapporteur. Je précise simplement qu'une erreur s'est glissée dans le titre de mon rapport. En effet, il ne s'agit pas de la commission des pétitions mais bien de la commission des visiteurs officiels qui a traité ces trois pétitions. La commission a conclu au dépôt de ces pétitions sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement. Je répondrai aux questions éventuelles qui pourraient être posées. Et je reviendrai par la suite pour faire un commentaire général sur le travail de la commission. 

Mme Fabienne Bugnon (Ve). J'interviendrai uniquement sur le rapport de la commission d'experts et ma collègue Esther Alder interviendra après sur les autres objets.

Je regrette particulièrement l'absence de M. Ramseyer, car le contenu de mon intervention lui est en grande partie adressé, et je vous remercie de bien vouloir lui transmettre.

Tout d'abord sur la forme. Je suis un peu étonnée par la procédure choisie par l'ancien Bureau, d'une part, que le rapport soit fait au nom du Bureau du Grand Conseil - cela a somme toute peu d'importance - et, d'autre part, que le Bureau ait auditionné les experts en cours de travail, alors que je ne me souviens pas qu'il en ait reçu mandat du Grand Conseil...

Finalement le fond est plus important : c'est le contenu du rapport. Mesdames et Messieurs les députés, il est tout simplement édifiant ! Que n'avons-nous pas entendu de la part du président du département de justice et police lorsque, pendant deux ans, nous avons tiré la sonnette d'alarme !

La première intervention en ce qui me concerne, date de février 1998, au moment de l'engagement du successeur de M. Choisy. M. Ramseyer m'avait répondu à l'époque, alors que je m'inquiétais au sujet de la succession de M. Choisy et du maintien d'une approche humaine de la détention préventive, je cite : «La volonté du département et du nouveau directeur de la prison est de perpétuer cette politique qui a fait ses preuves. Champ-Dollon nous est envié par d'autres cantons et personne ne remet en cause le fait qu'une prison humaine est aussi une prison plus sûre. M. Jean-Michel Claude a les qualités requises tant sur le plan professionnel qu'humain pour assurer cette continuité. Il a une excellente connaissance du milieu pénitentiaire et de Champ-Dollon en particulier.» Il nous a ensuite parlé du curriculum vitae de ce monsieur et a terminé son intervention en disant : «Il entend poursuivre l'oeuvre de son prédécesseur en s'appuyant sur un personnel de qualité et une équipe de direction solide.» On ne peut pas dire que la réponse de M. Ramseyer était particulièrement clairvoyante...

Puis, nous sommes revenus à la charge, par la voie d'interpellations urgentes, de motions et à travers le rapport de visiteurs de notre ancienne collègue, Mme Martine Ruchat. M. Ramseyer n'a pas eu de mots assez durs, à chaque fois, allant même jusqu'à nous accuser d'être les fauteurs de troubles et les instigateurs de révoltes...

Il aura donc fallu passer par le biais de l'expertise, mais est-ce bien, Mesdames et Messieurs, le travail du Grand Conseil que d'avoir recours à de telles procédures ? Ne serait-ce pas au Conseil d'Etat de vérifier les accusations portées contre un service de l'administration, plutôt que de faire la sourde oreille ? Vous me répondrez sans doute que vous avez mandaté un expert en la personne de M. Pedrazzini... Je ne vous ferai pas l'affront de revenir sur les conditions dans lesquelles M. Pedrazzini a dû effectuer son expertise...

Vous avez ensuite nommé d'autres experts, mais cela en réaction à la création de la commission d'enquête du Grand Conseil.

Bref, sans doute que grâce, à l'aide de ses collègues du Conseil d'Etat, M. Ramseyer a fini, avant même le dépôt du rapport des experts, par décider de se séparer du directeur de Champ-Dollon.

Mesdames et Messieurs les députés, je le répète, à ce moment-là, que n'avons-nous pas entendu, surtout lorsque ce même directeur a été atteint dans sa santé ! On nous a dit qu'il était victime d'un règlement de compte, dont l'Alternative était responsable. Cette responsabilité était lourde à assumer : que M. Ramseyer ait pris cette décision en son âme et conscience ou qu'elle lui était dictée par le reste du Conseil d'Etat ne l'empêchait pas de l'assumer !

Le rapport dont nous discutons ce soir nous montre que cette décision était la bonne. Mais cela ne suffit pas. M. Ramseyer n'a pas souhaité critiquer ouvertement les méthodes du directeur durant son mandat : soit ! Maintenant et à la lecture de ce rapport, vous devez admettre que des faits inadmissibles ont troublé la prison de Champ-Dollon et qu'un licenciement et un rapport ne suffiront pas à rétablir un climat serein.

M. Ramseyer nous a toujours accusés de défendre les détenus. Nous avons tenté de l'alerter sur la situation des gardiens. Lorsque le rapport parle de «détestable climat» de «vives tensions» et «d'incitation à la délation au sein d'une large tranche du personnel», il y a - et il y avait - matière à s'inquiéter... Dans une profession aussi sensible que celle de gardien de prison, les facteurs de tensions liées à l'activité quotidienne sont suffisants pour ne pas avoir à en rajouter. Les procédures de sanctions à l'égard des gardiens, les brimades à l'égard des gardiennes qui ne souhaitaient pas accomplir certaines tâches et, enfin, les méthodes au mérite distillées par la direction de Champ-Dollon ont gravement entaché l'ambiance générale. Et je ne suis pas certaine que le directeur ad interim à lui seul puisse restaurer, et de manière durable, une ambiance de travail normale. Les habitudes se prennent malheureusement plus vite qu'elles ne se perdent...

Ce rapport, dont le Conseil d'Etat a tous les éléments, nous devons aujourd'hui avoir la garantie qu'il ne restera pas dans un tiroir ! Comme il est bien sûr impossible de reprendre tous les points qu'il contient - et le rapport des visiteurs fait mention d'une bonne partie d'entre eux - je souhaiterais tout de même poser quelques questions en conclusion, que je vous prie de bien vouloir transmettre à M. le conseiller d'Etat Ramseyer.

Un point essentiel semble en bonne voie : il s'agit de mettre fin à l'incarcération des mineurs à Champ-Dollon. Le travail réalisé par la commission judiciaire, entériné par ce Grand Conseil et approuvé par M. Ramseyer, nous permet de nourrir quelques espoirs sérieux dans ce domaine que nous continuerons tout de même de suivre attentivement. Qu'en est-il, par contre, de la nomination du nouveau directeur ? Où en est la procédure ? Le directeur ad interim est-il lui-même candidat ?

Le rapport montre du doigt le directeur adjoint, qui, semble-t-il, épousait totalement les thèses de l'ancien directeur. Son poste est-il maintenu ? Si, oui, dans quelles conditions et est-il lui-même candidat au poste de directeur ? Quelles mesures vont être prises à l'égard de certains gardiens dont le rapport constate qu'ils sont déstabilisés, démotivés et dépressifs, certains ayant d'ailleurs quitté leur emploi à Champ-Dollon ?

La liste pourrait encore s'allonger longtemps, mais je m'arrêterai là, en remerciant très sincèrement les experts pour leur rapport sans complaisance et en demandant à M. Ramseyer, comme le fait d'ailleurs le rapport des visiteurs, de suivre les recommandations de ce rapport et de nous rendre rapport à son tour, en méditant particulièrement la phrase de conclusion, que je cite : «...la politique pénitentiaire est affaire d'Etat... Elle doit particulièrement conjuguer l'ordre public et les droits humains.» (Applaudissements.)

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous propose d'interrompre nos travaux. Nous reprendrons notre séance à 20 h 30 avec les prestations de serment, puis, avec le rapport de la commission de grâce. Ensuite, nous devrons traiter l'initiative 117 et nous poursuivrons les points 14, 17 et 18 sur les prisons. Je vous souhaite un bon appétit.