République et canton de Genève

Grand Conseil

IU 1003
30. Interpellation urgente de M. Thomas Büchi : Puces pour chiens. ( )IU1003

M. Thomas Büchi (R). Mon interpellation s'adresse à l'ensemble du Conseil d'Etat et concerne les puces : les Allemands ont inventé le port du tatouage obligatoire, le Conseil d'Etat invente la puce obligatoire ! Dans son arrêté récent, le Conseil d'Etat décide, sans concertation aucune avec l'organe législatif de ce canton, d'imposer à tous les propriétaires de chiens le port obligatoire d'une puce pour identifier nos chers toutous.

Les arguments utilisés pour nous soutirer encore un peu plus d'argent sont classiques : la médaille n'est pas sûre - mais il faut la maintenir quand même ! - alors que la puce garantit : facilité d'identification - le canidé perdu est ramené directement à son propriétaire mort d'inquiétude - pedigree intégré, mise en mémoire de tous les méfaits commis par ces pauvres bêtes, et j'en passe... En somme, le bonheur !

Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, vous nous prenez pour des vaches à lait et des esclaves ! (Exclamations.) En fait, la réalité de cet arrêté inique, c'est que vous pourriez être en train de nous conditionner sous peu à la pose de la puce sur l'homme ! C'est vicieux, c'est pervers et c'est bien pensé ! D'ailleurs, vous n'avez rien inventé, puisqu'une partie des gens régissant les destinées de notre pauvre monde y ont déjà réfléchi. Le prétexte pour nous contrôler, nous asservir et nous réduire définitivement en esclavage, c'est de créer la société sans monnaie. Le but ultime est soit de nous faire un tatouage au laser, soit de nous insérer une puce. Un code-barre invisible à l'oeil sera tatoué avec un rayon-laser sur la main droite ou sur l'os du front. Ce code sera utile comme carte de crédit pour effectuer des paiements et pour servir de carte d'identité. Celui-ci pourra cependant aussi être utilisé pour nous contrôler : il suffira de passer un scan sur votre puce ou sur le tatouage de votre main et toutes les informations souhaitées seront disponibles !

C'est une réalité toute proche. Le tatouage au laser a été testé pendant quinze ans à Disneyland. Les visiteurs qui voulaient y passer plusieurs jours pouvaient choisir entre une carte d'abonné ou un tatouage au laser sur la main gauche, de façon à tester leurs réactions à ce nouveau procédé. Des formulaires sont même déjà imprimés sur le plan international, avec un questionnaire portant sur l'endroit où sera tatoué le marquage ou introduite la puce : F = front ou forehead, ou H = main ou hand.

Le but de ces tests est d'habituer progressivement la population avant que cela ne devienne une obligation. Il semble qu'en Hollande on ait déjà commencé, il y a plusieurs années, à faire un tatouage de ce type sur l'os frontal des sans-abri. On déclara à la population que c'était un moyen de freiner la criminalité. Aux Etats-Unis, pour certains hommes d'affaires pressés, des aéroports sont déjà équipés pour décoder ce fameux tatouage. Le nombre de personnes qui font appel à ce service est en constante augmentation, car c'est bien connu, le temps, c'est de l'argent !

Mesdames et Messieurs les députés, on ne vous obligera pas forcément à accepter la puce, mais bientôt nous n'aurons plus le choix, à moins de vivre en autosubsistance. Un jour, l'argent liquide ne sera plus accepté dans les magasins. On nous expliquera combien cela est plus sûr : impossible désormais de voler quoi que ce soit, on ne peut pas prendre de l'argent là où il n'y en a pas ! On suivra par satellite tous les criminels en fuite, il ne sera plus possible de franchir la frontière illégalement.

La vérité, Mesdames et Messieurs les députés, est que la puce sur l'homme signifie le contrôle absolu. Fini le libre arbitre, chacun de vos pas sera surveillé, ainsi que tout ce que vous posséderez, le capital que vous aurez, l'endroit où vous séjournerez, ce que vous achèterez et vendrez, chaque information deviendra accessible à tous les big brothers. Ce conditionnement que l'on tente d'introduire au préalable sur les animaux n'est, en réalité, qu'une manière d'habituer les masses à se préparer à être des esclaves.

Certains trouveront même amusant d'être vérifiés comme du bétail que l'on mène à l'abattoir ! Alors, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, quand allez-vous édicter l'arrêté qui dira : «Avant le 31 janvier de l'an X, le port de la puce par l'homme est obligatoire» ? Une chose est sûre...

La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

M. Thomas Büchi. ...votre arrêté est particulièrement discutable. Alors, pour l'instant, mon chien ne portera pas de puce, parce que je n'ai pas envie d'être votre esclave ! (Exclamations.)

Réponse du Conseil d'Etat

M. Robert Cramer. M. Büchi a cru utile de faire une intervention dans laquelle il s'est très largement écarté de ce qui était son objet, à savoir la question des puces électroniques qui sont, maintenant, imposées aux chiens à Genève. Je vous dirai d'abord, en ce qui concerne l'essentiel de votre intervention, qu'il m'est difficile, vous le comprendrez bien, d'adhérer à cette espèce d'assimilation que vous faites entre l'animal et l'être humain, et ensuite, pour ce qui ressortait de la partie que vous avez voulue humoristique, que votre intervention remue un certain nombre de souvenirs et de leçons que nous devons tirer de l'Histoire. Il me semble que vous avez, là, flirté et même largement dépassé la limite sur des sujets qui ne prêtent pas à rire. Cela dit, je reviens à ce qui fait l'objet de la décision du Conseil d'Etat, à savoir cette décision que nous avons prise d'imposer, dorénavant, sur le territoire du canton de Genève une identification des chiens par le biais d'une puce électronique.

Pardon, Mesdames et Messieurs les députés, de ne pas vous avoir saisis d'un projet de loi sur cette très importante question, de ne pas nous être, comme l'a dit M. Büchi, concertés. En l'occurrence, ce n'est pas le rôle que je prête au Grand Conseil : nous nous sommes concertés avec ceux avec lesquels on mène des procédures de consultation, c'est-à-dire tous les milieux intéressés - les associations de propriétaires de chiens, les milieux vétérinaires - qui tous ont adhéré à cette mesure.

Et ils y ont adhéré parce que c'est une mesure largement répandue en Europe. Une bonne partie des pays européens la connaissent, notamment les pays d'Europe du Nord. Ils y ont également adhéré parce que c'est une mesure qui est dorénavant préconisée par l'Office vétérinaire fédéral. Elle s'applique déjà à Neuchâtel pour les chiens dangereux. Elle sera, d'ici trois ou quatre ans, vraisemblablement obligatoire sur tout le territoire du pays.

Ils y ont enfin adhéré parce que, contrairement à ce que vous indiquez, Monsieur le député, nous n'entendons pas traiter les propriétaires de chiens en vaches à lait, mais qu'au contraire nous avons pris des accords avec les vétérinaires, au travers de leurs associations, pour que des tarifs particulièrement favorables soient appliqués pour l'implantation de ces puces électroniques, visant à favoriser un marquage assez rapide des animaux.

En quoi cette décision était-elle souhaitable et même nécessaire ? Au moment où l'on parle largement de la problématique des chiens dangereux - et je crois que certaines et certains d'entre vous, dans ce Grand Conseil, pensent que c'est un vrai sujet de préoccupation - il y a un certain nombre de mesures à prendre. La première à prendre, à en croire ce que nous disent les spécialistes et les associations de propriétaires de chiens, c'est d'assurer une identification des chiens.

Cette identification permettra un recensement, car aujourd'hui nous sommes totalement incapables de dire combien il y a, à Genève, de chiens de telle ou telle espèce, ni combien d'animaux de telle ou telle race un propriétaire possède. Il y a ainsi, grâce à la puce, un instrument statistique qui pourra être mis en place et la possibilité d'un contrôle.

Ce contrôle est favorable aux propriétaires de chiens, car il permet, vous l'avez indiqué tout à l'heure, de ramener un chien perdu à son propriétaire. Il permet également d'identifier, lorsqu'un chien divague ou a des comportements menaçants et que son propriétaire ne se trouve pas dans les environs, à la fois le chien et son propriétaire.

Cette mesure d'identification des animaux est favorable au propriétaire, en tout cas à celui qui n'entend pas enfreindre la loi avec son animal. C'est en même temps une mesure de contrôle préventive, mise à la disposition des autorités qui, ainsi, peuvent prendre un certain nombre de mesures permettant de protéger la population à l'égard des chiens dangereux.

C'est dans cet esprit que sont prises ces mesures, avant d'en prendre d'autres plus incisives que, malheureusement, nous serons vraisemblablement amenés à prendre pour protéger la population du comportement, je ne dirai pas tant de certains chiens que de certains propriétaires de chien irresponsables, qui se servent de ces animaux comme des armes !

Cette interpellation urgente est close.