République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7911
29. Projet de loi du Conseil d'Etat concernant le concordat sur les entreprises de sécurité, du 18 octobre 1996 (I 2 14). ( )PL7911

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvevu l'approbation par le Conseil fédéral, le 17 décembre 1996, du concordat sur les entreprises de sécurité, du 18 octobre 1996,

vu les articles 78 et 99 de la constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847,

décrète ce qui suit :

Article 1 Adhésion

Le Conseil d'Etat est autorisé à adhérer, au nom de la République et canton de Genève, au concordat sur les entreprises de sécurité, du 18 octobre 1996, approuvé par le Conseil fédéral le 17 décembre 1996.

Article 2 Exécution

Le Conseil d'Etat édicte, par voie réglementaire, toutes les dispositions complémentaires nécessaires.

Article 3 Compétence

Le Département de justice et police et des transports est chargé des relations avec les cantons concordataires.

Concordat sur les entreprises de sécurité,

du 18 octobre 1996, approuvé par le Conseil fédéralle 17 décembre 1996

Les cantons de Fribourg, Vaud, Valais, Neuchâtel, Genève et Jura,

considérant :

la nécessité de se doter d'une législation commune dans le domaine des entreprises de sécurité

conviennent :

du présent concordat sur les entreprises de sécurité (ci-après : le concordat) exerçant leurs activités dans les cantons romands parties.

Art. 1 Parties

Sont parties au concordat les cantons qui déclarent leur adhésion.

Art. 2 Buts

Le présent concordat a pour buts :

Art. 3 Réserve des législations fédérale et cantonale

Sont réservées les dispositions fédérales ainsi que les prescriptions plus rigoureuses édictées par un canton concordataire pour les entreprises dont le siège ou la succursale est sis sur son territoire ou pour les agents de ces entreprises qui y pratiquent.

Art. 4 En général

Le présent concordat régit les activités suivantes exercées à titre principal ou accessoire soit par du personnel soit au moyen d'installations adéquates :

Art. 5 Exception

Les tâches de protection et de surveillance exercées par le personnel d'entreprises commerciales ou industrielles au seul profit de celles-ci n'entrent pas dans le champ d'application du présent concordat.

Art. 6 Définitions

Au sens du présent concordat, on entend par :

Art. 7 Principes

1 Une autorisation est nécessaire pour :

2 Elle est délivrée par l'autorité compétente du canton où l'entreprise a son siège ou, dans le cas de l'article 10, par l'autorité compétente du canton où l'activité s'exerce.

3 L'entreprise constituée en personne morale doit désigner un responsable auquel elle confère les pouvoirs pour la représenter et l'engager auprès des tiers.

Art. 8 Conditions - Autorisation d'exploiter

1 L'autorisation d'exploiter ne peut être accordée que si le responsable :

2 L'examen est organisé par le canton de siège de l'entreprise ou de sa succursale. Ses modalités sont réglées par la commission concordataire.

Art. 9 Autorisation d'engager du personnel

1 L'autorisation d'engager du personnel n'est accordée que si l'agent de sécurité ou le chef de succursale :

2 Le chef de succursale ne doit pas en outre avoir fait l'objet d'actes de défaut de biens définitifs et doit avoir subi avec succès l'examen prévu à l'article 8, alinéa 1, lettre f.

Art. 10 Autorisation d'exercer

1 Les agents des entreprises de sécurité qui n'ont ni siège ni succursale dans l'un des cantons concordataires ne peuvent y exercer une activité qu'après autorisation délivrée aux conditions de l'article 9 du présent concordat.

2 La demande est présentée par l'entreprise de sécurité.

3 L'autorité compétente reconnaît les autorisations délivrées par les cantons non concordataires, conformément à la législation fédérale sur le marché intérieur.

Art. 11 Communication à l'autorité

1 Les entreprises de sécurité communiquent immédiatement aux autorités cantonales compétentes toute modification de l'état de leur personnel ainsi que tout fait pouvant justifier le retrait d'une autorisation.

2 L'exploitation d'une succursale dans un canton concordataire doit être annoncée à l'autorité du canton où elle se situe.

Art. 12 Validité de l'autorisation

1 L'autorisation accordée par une autorité compétente est valable sur l'ensemble des cantons concordataires.

2 Elle est valable quatre ans et renouvelable sur demande du titulaire.

Art. 13 Mesures administratives

1 L'autorité qui a accordé l'autorisation doit la retirer lorsque le titulaire ne remplit plus les conditions prévues aux articles 8 et 9 ou lorsqu'il contrevient gravement ou à de réitérées reprises aux dispositions du présent concordat ou de la législation cantonale d'application.

2 L'autorisation est en outre retirée lorsqu'elle cesse d'être utilisée ou lorsqu'il n'en est pas fait usage dans les six mois à compter de sa délivrance.

3 L'autorité peut également prononcer un avertissement ou une suspension de l'autorisation de un à six mois.

4 Demeurent réservées les mesures urgentes que peut prendre l'autorité du canton où s'exerce l'activité lorsque l'entreprise ou l'un de ses agents viole gravement la loi ou le concordat.

Art. 14 Collaboration intercantonale

1 Les cantons concordataires dans lesquels pratiquent des agents ou une entreprise de sécurité se communiquent tout fait pouvant entraîner le retrait de l'autorisation ainsi que toute autre décision prise à leur égard.

2 Les dispositions cantonales relatives à la protection des données personnelles et à l'échange d'information s'appliquent pour le surplus.

Art. 15 Respect de la législation

1 Les entreprises de sécurité et leur personnel doivent exercer leur activité dans le respect de la législation.

2 En particulier, le recours à la force doit être limité à la légitime défense et à l'état de nécessité au sens du Code pénal suisse.

Art. 16 Rapports avec l'autorité - Collaboration

1 Les personnes soumises au présent concordat évitent d'entraver l'action des autorités et des organes de police.

2 Elles prêtent assistance à la police spontanément ou sur requête, conformément aux prescriptions légales en la matière.

3 La délégation de tâches d'intérêt public aux entreprises de sécurité demeure réservée.

Art. 17 Obligation de dénoncer

Les personnes soumises au présent concordat ont l'obligation de dénoncer sans délai à l'autorité pénale compétente tout fait pouvant constituer un crime ou un délit poursuivi d'office qui parviendrait à leur connaissance.

Art. 18 Légitimation et publicité

1 Les personnes exerçant leur activité en dehors des locaux de l'entreprise doivent être munies d'une carte de légitimation avec photographie mentionnant leur nom, prénom, date de naissance, fonction et le nom ou la raison sociale de leur entreprise.

2 Ils présentent ce document sur réquisition de la police ou de tout intéressé.

3 Les cartes de légitimation, le matériel de correspondance et la publicité commerciale ne doivent pas faire naître l'idée qu'une fonction officielle est exercée.

Art. 19 Uniformes et véhicules

1 Les uniformes utilisés doivent être distincts de ceux de la police cantonale et des polices locales.

2 La même règle vaut pour le marquage et l'équipement des véhicules.

Art. 20 Approbation du matériel utilisé

1 Les matériels désignés aux articles 18 et 19 doivent être soumis à l'approbation de l'autorité compétente.

2 La Commission concordataire peut émettre des directives dans ce domaine.

Art. 21 Armes

1 L'achat et le port d'arme sont régis par la législation spéciale, sous réserve des dispositions qui suivent.

2 A l'exception des armes longues utilisées pour assurer les transports de sécurité, lesquelles doivent rester dans le véhicule, les armes sont portées de manière non apparente sur la voie publique ou dans d'autres lieux ouverts au public.

Art. 22 Contraventions

1 Est passible des arrêts ou de l'amende celui qui :

2 Les dispositions du Code pénal suisse relatives aux contraventions sont applicables au présent concordat. La négligence, la tentative et la complicité sont toutefois punissables.

Art. 23 Procédure

1 Les cantons poursuivent et jugent les infractions conformément à leur droit interne.

2 Les dispositions du droit fédéral relatives au for et à l'entraide judiciaire sont applicables par analogie.

Art. 24 Communications

Les autorités judiciaires des cantons concordataires communiquent à l'autorité administrative cantonale compétente les jugements prononcés sur la base du présent concordat ou de la législation cantonale spéciale.

Art. 25 Tâches des cantons

Les cantons concordataires veillent à l'application du présent concordat. Ils sont en particulier compétents pour :

Art. 26 Organe directeur

La Conférence des chefs des départements de police de Suisse romande (ci-après, la Conférence) est l'organe directeur du présent concordat. Elle désigne les membres d'une Commission concordataire.

Art. 27 Commission concordataire - Composition et organisation

1 La Commission concordataire est composée d'un représentant par canton concordataire et elle est présidée par un membre de la Conférence nommé par celle-ci à cet effet.

2 La Commission concordataire se réunit au moins une fois par année et fixe elle-même sa procédure. Elle peut notamment constituer des sous-commissions chargées de tâches spéciales.

3 Le secrétariat est assuré par le canton dont provient le président.

Art. 28 Tâches

1 La Commission concordataire règle l'application du concordat par des directives. Elle accomplit en outre les tâches qui lui sont attribuées par le présent concordat.

2 Elle peut proposer à la Conférence de nouvelles dispositions ou lui adresser des recommandations concernant les améliorations à apporter au concordat.

3 La Conférence peut charger la Commission concordataire d'effectuer des tâches particulières en relation avec le concordat.

Art. 29 Entrée en vigueur

Le présent concordat, après avoir été approuvé par le Conseil fédéral, entre en vigueur lorsque trois cantons au moins y ont adhéré.

Art. 30 Droit transitoire

Les entreprises de sécurité existantes et leur personnel ont un délai de huit mois dès l'entrée en vigueur du présent concordat pour se conformer aux articles 8, 9, 10 et 20 du présent concordat.

Art. 31 Dénonciation

Un canton signataire peut dénoncer le concordat moyennant préavis d'un an, pour la fin d'une année. Les autres cantons décident s'il y a lieu de le maintenir en vigueur.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation un projet de loi autorisant le Conseil d'Etat à adhérer, au nom de la République et canton de Genève, au concordat sur les entreprises de sécurité, du 18 octobre 1996.

Introduction

Ces dernières années ont été marquées, en Suisse et à l'étranger, par une forte augmentation de l'activité des entreprises de surveillance et de protection des personnes et des biens. La principale cause de ce phénomène paraît être un sentiment croissant d'insécurité dans la population. De nombreuses personnes ou entreprises ressentent ainsi le besoin de protéger leurs locaux d'habitation ou d'exploitation par diverses installations techniques ou de mandater des sociétés spécialisées pour en assurer la surveillance par des vigiles. De même, la fréquence des brigandages et des agressions a induit un besoin accru de protection des transports de fonds ou de valeurs au point d'imposer la généralisation de l'emploi de fourgons blindés, souvent même convoyés par des hommes armés. Enfin, une certaine mode - plus certainement que l'existence d'une menace réelle - commande à quelques catégories de personnes (artistes, chefs d'entreprises, hommes d'affaires, "; VIP ") de se faire accompagner lors de leurs déplacements par des gardes du corps privés.

Il est aisé d'imaginer que ces différentes activités se rapprochent par certains côtés des missions générales de la police, notamment le maintien de la sécurité et de l'ordre publics. Sauf à risquer de fâcheuses confusions entre police officielle et entreprises de sécurité, une stricte délimitation de ces sphères d'action respectives s'avère à tout le moins nécessaire. Par ailleurs, l'évolution du droit et des mentalités n'est pas non plus sans conséquences sur une prestation spécifique, la recherche de renseignements, proposée par certaines officines, les "; détectives privés ", ainsi que par d'autres services de renseignements économiques et commerciaux.

Cette activité, qui touche de près la sphère privée des personnes physiques ou morales, ne justifie pas, au nom de l'intérêt public, d'être régie par une législation particulière. En effet, les nouvelles dispositions légales dans les domaines du droit de la famille, de la protection de la personnalité et de la protection des données donnent aux personnes concernées de solides moyens de défense contre les pratiques - éventuellement abusives - de ces "; privés " ou contre les erreurs que ceux-ci commettraient dans la fourniture de renseignements. Il est cependant évident qu'un "; détective " qui, même occasionnellement, exercerait l'un des métiers de la sécurité visés par le projet de concordat se verrait ipso facto soumis aux dispositions topiques de ce dernier.

Ces précédents constats, la mobilité accrue des personnes, les mutations sociologiques en cours, la préservation de l'intérêt public et un indispensable allégement des tâches de l'administration, ont fait naître l'idée d'une unification intercantonale aussi étendue que possible du droit applicable aux entreprises de sécurité.

Quelques renseignements sur les entreprises de sécurité

Prestations offertes

Surveillance personnelle

a) les vigiles (agents de surveillance)

Il s'agit du très classique service de surveillance opéré par rondes (patrouilles ou hommes isolés) dans les magasins, les entrepôts, les chantiers, etc. Sur l'ensemble de la Suisse romande, on peut estimer à plusieurs milliers l'effectif des collaborateurs affectés à ce travail soit à titre permanent, soit à titre intérimaire. Dans le canton de Vaud, est apparue il y a peu une nouvelle activité, la surveillance du domaine public de certaines communes dépourvues de corps de police. Il n'est pas inutile de préciser ici que les employés chargés de ces tâches ne sont investis d'aucune des compétences ressortissant à l'exercice normal de l'autorité publique. Aussi leur rôle est-il quasi strictement préventif. En cas d'intervention, ces agents ne disposent pas de plus de droits que les autres sociétés spécialisées ou même que le citoyen.

b) les gardes du corps

Cette prestation de protection personnelle est essentiellement prisée des touristes étrangers, particulièrement africains ou moyen-orientaux. C'est donc essentiellement à Genève, plate-forme internationale, que se concentre la quasi-totalité des entreprises ou des agents spécialisés dans ce domaine.

Surveillance technique

On notera ici que les constants progrès réalisés dans le domaine de la détection et de la transmission automatiques d'une alarme signalant une présence indue dans un site protégé ont généralisé l'usage de systèmes techniques de surveillance au détriment de l'engagement des vigiles.

Service d'ordre (service de manifestations)

Sous l'appellation de "; service d'ordre ", les entreprises assurent en fait la sécurité générale à l'intérieur de lieux privés ouverts au public tels que stades, salles de spectacles ou lors de manifestations de masse (rencontres sportives, concerts, festivals, etc.). La fréquence de ces manifestations, le nombre considérable de personnes qu'elles rassemblent (souvent plusieurs dizaines de milliers de spectateurs) génèrent un risque non négligeable de débordements susceptibles de compromettre l'ordre public.

Transports de fonds ou de valeurs

Bien que le nombre des brigandages contre des transporteurs de fonds ou de valeurs soit très sensiblement moindre en Suisse qu'à l'étranger, on assiste tout de même à un certain développement des moyens privés de lutte contre cette forme de criminalité. C'est en particulier le cas des transports des valeurs autres que pécuniaires (bijoux, horlogerie haut de gamme, collections de mode, etc.) qui font fréquemment l'objet de transports protégés.

Etendue du marché

Comme déjà évoqué, cette branche d'activité a connu ces dernières années, et connaît encore, une très forte expansion. Trois types d'entreprises se partagent le marché suisse :

- deux ou trois grandes sociétés d'importance nationale, voire internationale, proposent une gamme complète de prestations. Leur effectif comprend plusieurs milliers de collaborateurs et leur chiffre d'affaires consolidé peut être évalué par dizaines de millions de francs ;

- une mosaïque d'entreprises moyennes d'envergure régionale ou locale qui, même si elles n'emploient que quelques gardes, pèsent ensemble un poids économique non négligeable.

La capacité financière limitée de ces entreprises ne leur permet en général pas d'investir dans des systèmes à haute technologie, mais celles-ci compensent cette lacune en assurant à leur clientèle des prestations dont la proximité est l'une des qualités appréciables ;

- un très grand nombre d'entreprises, souvent constituées en nom propre et dont l'effectif se résume quelquefois au dirigeant lui-même et à un ou deux collaborateurs, le plus souvent travaillant à temps partiel. Peu actives, plutôt mal structurées, fragiles financièrement, elles n'ont souvent qu'une durée de vie réduite.

Formation professionnelle

Aucun des métiers de la sécurité ne s'inscrit actuellement dans un cadre reconnu de formation. Ce vide permet la floraison périodique d'"; Ecoles de sécurité " - dont l'une récemment fondée en Valais se livre à une intense campagne publicitaire - souvent aussi vite disparues faute d'élèves que rebute le coût prohibitif d'une formation sans réelle valeur sur le marché de l'emploi. Dans ces conditions, il n'est pas envisageable, pour les autorités compétentes, de reconnaître sans autre mesure les "; diplômés " issus de ces instituts et qui seront appelés à exercer certaines activités se rapprochant des tâches de la police.

Cadre juridique

Droit fédéral

Il n'existe aucune législation fédérale spécifique au domaine de la sécurité privée, domaine simplement soumis au principe de la liberté de commerce et d'industrie garanti par l'article 31 de la Constitution fédérale (RS 100.1).

Agissant sur une base contractuelle, les agents des sociétés concernées n'ont pas plus de droits, pour ce qui est d'éventuelles interventions contre des tiers, que la personne qu'ils protègent. A cet égard, ils sont pleinement soumis aux dispositions du Code pénal suisse sur la légitime défense et l'état de nécessité (cf. art. 33 et 34 CPS).

La libre prestation de services en Suisse est régie par la loi fédérale du 6 octobre 1995 sur le marché intérieur (LMI ; cf. FF 1995 I, p. 1193 ss ; FF 1995 IV, p. 552 ss). Cette loi fixe deux principes élémentaires permettant l'établissement d'un marché intérieur : la non-discrimination d'une part et le principe dit "; Cassis-de-Dijon " d'autre part. Ainsi, l'accès au marché des offreurs externes ayant leur établissement ou leur siège en Suisse ne peut être limité en raison de cette seule qualification d'"; externe ". Par ailleurs, il y a présomption que les conditions d'autorisation cantonale pour l'exercice de certaines activités lucratives bénéficiant de la protection de la liberté du commerce et de l'industrie sont équivalentes, de sorte que la personne qui a obtenu l'autorisation d'exercer dans un canton peut la pratiquer dans tous les autres. Cette présomption est générale à moins qu'on puisse démontrer, dans un cas particulier, qu'elle n'est pas exacte ou qu'il existe des intérêts publics prépondérants (cf. FF 1995 I p. 1236 ss ainsi que les art. 2 et 3 du projet de LMI). A signaler que la LMI n'a pas fait l'objet d'une demande de référendum (échéance du délai référendaire : 15 janvier 1996). Elle est donc entrée en vigueur le 1er juillet 1996 pour la grande majorité de ses dispositions.

Cela dit, il reste que la LMI ne cherche pas à réduire à néant ou à concurrencer les nombreux efforts que les cantons sont en train de déployer pour trouver des solutions communes et harmonisées en vue de supprimer les barrières aux échanges et à la mobilité ; elle veut au contraire appuyer ces efforts. La LMI contient d'importantes mesures d'incitation qui devraient pousser les cantons à procéder à une harmonisation autonome. Preuve en est que, dans les domaines des marchés publics cantonaux et communaux et de la reconnaissance des certificats de capacité, la LMI ne s'appliquera que subsidiairement par rapport aux accords intercantonaux en vigueur.

Droit cantonal

A l'instar de la Confédération, la plupart des cantons confédérés n'ont pas jugé utile de se doter d'une législation de police en la matière. Lorsqu'elles existent, les règles régissant les entreprises de la sécurité sont enchâssées dans la loi sur la police cantonale ou dans celle sur la police administrative, ou même ne font l'objet que de simples directives administratives. La situation dans les cantons est des plus diverses. Les normes juridiques en vigueur vont ainsi du simple système d'annonce à l'autorité à un régime complet d'autorisation.

Fribourg

L'activité des entreprises de la sécurité est régie par des Directives émises le 1er mai 1990 par la Direction de la justice, de la police et des affaires militaires. Le champ d'application de ces directives s'étend exclusivement aux entreprises de protection, de surveillance et de transport de fonds, à l'exception de celles ne pratiquant que le renseignement privé ou commercial. Le canton de Fribourg avait, à l'époque, renoncé à mettre sur pied un système d'autorisation pour opter en faveur d'un régime "; allégé " de déclaration d'activité. Les directives en vigueur rappellent en outre diverses obligations telles que le respect de la législation, le devoir d'information en cas de constat d'un crime ou d'un délit et l'interdiction de certains arguments publicitaires. La déclaration d'activité telle que pratiquée dans le canton de Fribourg ne donne lieu à la perception d'aucune taxe.

Vaud

Dès la fin de la seconde guerre mondiale, le canton de Vaud s'est, quant à lui, doté d'une législation, révisée en 1983, instituant le contrôle des entreprises privées de surveillance, de protection, de recherches et de renseignements. Limitative à l'instar de celle du canton de Genève, la législation vaudoise soumet les activités de sécurité à des conditions personnelles et professionnelles strictes. Ainsi, en plus d'une totale solvabilité, le candidat doit-il disposer de connaissances pratiques et subir avec succès un examen professionnel dont la difficulté n'est pas à sous-estimer. Des taxes annuelles sont également perçues. A noter enfin qu'une loi spécifique régit également l'activité des centres collecteurs d'alarmes.

Valais

Il n'existe ni législation ni directives administratives sur les entreprises de la sécurité.

Neuchâtel

Si les agences privées de détectives et d'investigations sont, dans ce canton, soumises au régime de l'autorisation institué par la loi sur la police du commerce du 30 septembre 1991, les bureaux de renseignements commerciaux, en revanche, n'ont pas de statut légal cantonal. On notera cependant que les communes de Neuchâtel et de La Chaux-de-Fonds ont inséré certaines règles concernant les entreprises de la sécurité dans leurs règlements de police.

Genève

A plus d'un point de vue, la législation genevoise est la plus rigoureuse et la plus étendue. Ainsi d'une part, elle traite de manière distincte les "; agences de sécurité " (1) et les "; agents intermédiaires " (loi sur la profession d'agent de sécurité privé du 15 mars 1985 et son Règlement d'exécution du 10 juillet 1985 ; loi sur les agents intermédiaires du 20 mai 1950 et son Règlement d'exécution du 31 octobre 1950), c'est-à-dire les officines de renseignements privés ou commerciaux et, d'autre part, elle soumet, et c'est une solution unique en Romandie, au régime de l'autorisation les agents (surveillants de grands magasins, portiers d'établissements de nuit, etc.) exerçant leur activité pour le compte de leur propre employeur.

Jura

Dans ce canton, l'exercice des professions de la sécurité n'est soumis à aucune règle, que ce soit au plan communal ou cantonal.

Nécessité d'un concordat sur les entreprises de sécurité

Le besoin de législation

En Suisse romande, nous l'avons vu, les entreprises de sécurité sont régies par des cadres juridiques extrêmement divers. Il apparaît ensuite que les législations, lorsqu'elles existent, datent des années quatre-vingts et ne sont plus adaptées, dans bien des domaines, à la situation actuelle. De même, le défaut de législation dans plusieurs cantons se fait maintenant sentir de manière accrue. En effet, les risques engendrés par l'exercice, à titre privé, de professions liées à la sécurité sont de plusieurs ordres. On constate notamment - et cette situation s'est réalisée à plusieurs reprises - que certains agents de sécurité outrepassent leur rôle en cas d'intervention. Ces excès sont dommageables pour les tiers et de plus vont, en créant un légitime sentiment d'insécurité, à fin exactement contraire de celle recherchée.

Un autre risque à ne pas négliger tient aux difficultés de collaboration avec la police. Là encore, les autorités de police ont dû dénoncer certains dérapages auxquels il faut mettre fin d'autant plus fermement que la limite entre le maintien de l'ordre et de la sécurité publics et la protection et la surveillance de nature privée n'est pas toujours aisée à tracer dans les faits. Une réglementation de police permettra ainsi de séparer avec efficacité les sphères d'activité des sociétés de sécurité de celles incombant aux polices cantonales et municipales. Le monopole sur l'exercice de la force publique se trouvera donc renforcé d'autant.

Le besoin d'uniformiser les législations en vigueur

Les législations en vigueur méritent au surplus d'être uniformes, surtout si l'on considère la flexibilité du marché et l'implantation toujours plus décentralisée des entreprises spécialisées.

Dans le même ordre d'idées, il s'agit aussi de garantir pleinement la reconnaissance intercantonale des autorisations délivrées et la libre-circulation, dans les cantons concordataires, des personnes reconnues aptes à exercer une profession de la sécurité. Ces soucis, bien réels, participent en plus d'une volonté manifeste d'unifier le droit des cantons romands en offrant à ceux-ci un outil législatif clair et efficace.

La mise sur pied du concordat

L'examen et la prise en compte des divers aspects exposés ci-dessus ont conduit la Conférence des chefs des départements de police des cantons romands à adopter un projet de concordat émanant d'un groupe de spécialistes, policiers et juristes, issus des administrations cantonales concernées. En fonction de sa situation particulière, le canton du Jura n'a pas souhaité participer à cette étude, mais a toutefois été régulièrement tenu au courant de l'évolution des travaux du groupe de travail.

Commentaire sur le concordat

Généralités

Le besoin de légiférer et la nécessité d'uniformiser les diverses législations romandes s'étant fait sentir, le concordat a pour but essentiel de régler, par un système d'autorisation, l'activité des entreprises privées de sécurité. Après des généralités (article premier à art. 3), le concordat délimite son champ d'application (art. 4 à 6), expose les systèmes d'autorisation retenus ( art. 7 à 14), détermine les obligations des entreprises et de leurs agents (art. 15 à 21), fixe diverses normes pénales et administratives (art. 22 à 24), rappelle et fixe certaines dispositions d'application (art. 25 à 28) et, enfin, dispose (art. 29 à 31) sur celles finales et transitoires.

Commentaire article par article

Article 1

Cet article énonce que sont parties au concordat les cantons qui en font la demande. On notera que le texte ne fait aucune référence à la Suisse romande en tant que telle, laissant ainsi la porte ouverte aux cantons confédérés.

Une démarche tendant à leur ouvrir d'emblée le concordat n'a pas été jugée opportune eu égard au caractère plutôt local de la plupart des entreprises concernées ou, pour les plus grandes, de leurs succursales. La définition de normes communes aurait été d'autant plus difficile que la plupart des cantons n'ont pas ou peu disposé dans ce domaine.

Article 2

Cette disposition définit les buts du concordat et marque ainsi d'emblée la volonté des cantons de se doter d'une base commune tout en préservant (cf. article 3) entièrement leur liberté d'inscrire des conditions plus rigoureuses dans leur droit interne.

Article 3

Cet article réserve les dispositions du droit fédéral (par exemple, l'application de la législation sur les armes et, le cas échéant, de la législation sur le marché intérieur) ou celles encore plus rigoureuses prises par tel ou tel canton concordataire et qui s'appliqueraient aux entreprises. ainsi qu'à leurs agents, dont le siège ou une succursale est situé dans ce canton où elles pratiquent. De telles dispositions plus restrictives pourraient concerner, entre autres, les conditions d'autorisation ou les conditions d'exercice des professions de la sécurité. A l'instar de la pratique genevoise, les cantons pourraient aussi, sur la base de cette disposition, prévoir un système d'autorisation pour les employés chargés de tâches de sécurité internes à leur entreprise.

Article 4

Il est important que le champ d'application concordataire s'étende non seulement aux professionnels de la sécurité, mais aussi aux très nombreuses personnes, les vigiles ou gardes du corps auxiliaires, qui tirent un revenu complémentaire de cette activité.

Une nouveauté du concordat consiste à inclure dans son champ d'application les centres collecteurs d'alarmes dont l'activité consiste en fait à surveiller à distance, par des moyens techniques appropriés (par ex., télésurveillance), des immeubles ou des sites dignes de protection. Les dispositions du concordat à cet égard n'empêchent bien sûr pas les cantons qui ressentiraient le besoin d'aller encore plus loin, par exemple en édictant une législation spécifique sur les alarmes.

Article 5

Il s'agit, par cette disposition, de restreindre à l'essentiel le contrôle de l'Etat en excluant du champ d'application du concordat les personnels de surveillance travaillant dans le cadre de leur entreprise. A défaut d'une telle restriction, on en viendrait à devoir, par exemple, également enregistrer, dans les magasins ou les grandes surfaces, les employés chargés de la répression du vol à l'étalage. Il faut se souvenir à ce propos que ce personnel est déjà sous la responsabilité d'un employeur (art. 55 du Code des obligations) qui en répond et doit, le cas échéant, prendre les mesures pour prévenir tout abus. Au demeurant, il serait très difficile d'assurer le suivi administratif efficace de ce personnel dont le taux de mutation est parfois très élevé.

Article 6

Sans commentaire particulier.

Article 7

Cette disposition forme en quelque sorte le pilier porteur du concordat qui introduit un système d'autorisation applicable aux entreprises de sécurité. Plusieurs autorisations sont en réalité régies : une autorisation d'exploiter, une autorisation d'employer des chefs de succursale et des agents de sécurité ainsi qu'une autorisation d'exercer délivrée aux agents de sécurité d'entreprises sises en dehors des cantons concordataires mais pratiquant sur le territoire de ceux-ci.

Le canton dans lequel l'entreprise a son siège est en principe responsable de la délivrance de cette autorisation. Cette règle s'impose eu égard aux facilités dont il dispose pour obtenir toutes les informations utiles sur les entreprises, leurs dirigeants ou leurs employés. Dans le cas de l'article 10 (autorisation d'exercer), l'autorité compétente est celle du canton concordataire où l'activité s'exerce. Certes, il eût été possible de choisir un système moins contraignant que celui de l'autorisation d'engager du personnel, comme celui introduit dans le canton de Fribourg et consistant en un simple devoir d'information. Toutefois, les intérêts de police en jeu rendent cette solution insuffisante, notamment en raison de l'absence d'effet préventif souhaité dans un domaine où les risques d'abus et de dérapages - souvent réalisés par les agents de sécurité eux-mêmes - sont réels. Cela dit, rappelons que le projet de concordat ne fait que reprendre le système en vigueur dans les cantons de Vaud et de Genève (autorisation d'exploiter, d'engager du personnel et, pour celui-ci, d'exercer son activité) qui a jusqu'ici entièrement donné satisfaction.

Article 8

L'autorisation d'exploiter est accordée à l'entreprise par le biais d'un "; responsable " faisant en quelque sorte fonction d'"; homme de liaison " avec l'autorité compétente. Il peut être l'exploitant lui-même ou l'un de ses cadres dirigeants. En l'état, il n'est pas prévu, pour des raisons de police, d'accorder d'autorisation à des étrangers non titulaires du permis d'établissement, ni d'ailleurs de reconnaître une activité identique exercée à l'étranger. Ces restrictions contreviennent en cela aux dispositions des Directives 67/43/CEE et 68/364/CEE, textes de droit européen qui auraient fait partie de l'acquis communautaire si le vote du 6 décembre 1992 sur l'adhésion de la Suisse à l'Espace économique européen (EEE) avait été positif. A noter que le concordat renonce aussi à prévoir la libre circulation des services dans cette matière, voire à "; ouvrir " la profession considérée aux ressortissants étrangers sous réserve de réciprocité.

Il s'agit là d'un choix délibéré qui, si une réactivation des principes de l'eurocompatibilité devait avoir lieu ultérieurement, serait susceptible d'être modifié sans difficulté majeure, en particulier dans le cadre d'une adaptation généralisée du droit en vigueur.

Pour éviter que le responsable ne soit qu'un "; homme de paille ", le concordat exige que celui-ci dispose des pouvoirs nécessaires pour engager l'entreprise (cf. art. 7, al. 3). Quant aux capacités professionnelles, et comme déjà exposé plus haut, il est exclu de s'en tenir sur ce point à la reconnaissance du "; diplôme " d'une "; école de sécurité ", à l'honorabilité et à la solvabilité requises de l'impétrant, elles constituent l'indispensable verrou à l'intrusion de personnes peu fiables dans un marché où la confiance doit être le maître mot. A l'instar de ce qui est aussi déjà en vigueur dans certains cantons, le candidat devra faire preuve de ses connaissances pratiques et théoriques du métier, comme aussi maîtriser les matières (modes d'intervention de la police, code et procédure pénaux, notions de droit des obligations, etc.) qui en forment le cadre juridique et pratique. Le projet de concordat n'envisage cependant pas de prendre en compte d'éventuelles équivalences (par exemple, plusieurs années d'activité en tant que policier) qui dispenseraient le bénéficiaire de l'obligation de subir l'examen professionnel. D'une part, cette hypothèse supposerait, dans les cantons, la mise en place d'une procédure administrative d'appréciation de ces équivalences quasiment aussi lourde que l'organisation d'une session d'examen. D'autre part, en soumettant tous les candidats à un examen identique, on instaure en leur faveur une indiscutable égalité de traitement. Ainsi, les risques d'arbitraire s'en trouvent réduits d'autant.

Article 9

L'exigence, pour les étrangers, d'un permis d'établissement ou de séjour délivré depuis deux ans au moins est posée pour des raisons de police et semble mieux correspondre aux normes du droit européen. Par ailleurs, lors de l'examen des conditions prévues, l'autorité compétente tiendra compte des attestations fournies par les autorités étrangères (cf. l'application "; anticipée " de la Directive 67/43/CEE).

Les chefs de succursale disposant en général de compétences étendues dans la direction de leur secteur et dans la conduite de leurs collaborateurs, on peut considérer qu'ils exercent ainsi des tâches proches de celles du responsable défini par l'article 7 ci-dessus. Ils sont de ce fait logiquement astreints à remplir notamment la condition fixée pour ce dernier consistant en la réussite d'un examen de capacité professionnelle.

La notion d'"; actes incompatibles avec la sphère d'activité professionnelle envisagée " implique une certaine part d'appréciation qu'il appartiendra, le cas échéant à la commission concordataire (cf. art. 27 du concordat) de préciser par interprétation, de sorte à éliminer tout risque d'arbitraire ou de différence intercantonale de traitement. On peut toutefois affirmer que certains actes de violence, l'abus de confiance et le vol seront, par exemple, au nombre des infractions jugées incompatibles.

Article 10

Cette disposition introduit l'autorisation de pratiquer pour les agents de sécurité engagés par des entreprises ayant leur siège dans un canton non concordataire et désirant pratiquer dans un canton concordataire. Une autorisation déjà accordée, pour l'activité considérée, dans un canton concordataire sera valable dans tous les autres (cf. art. 12 du concordat). L'alinéa 3 de l'article 10 rappelle que la reconnaissance d'autorisations délivrées par des cantons non concordataires aura lieu conformément aux dispositions de la LMI.

Article 11

L'obligation faite aux entreprises d'informer l'autorité compétente sur l'état de leur personnel se justifie pleinement. En effet, la situation judiciaire et personnelle d'un collaborateur - par exemple l'ouverture d'une enquête pénale - peut entraîner un retrait de l'autorisation d'exercer même après plusieurs années durant lesquelles toutes les conditions légales furent normalement respectées. Le respect de la souveraineté cantonale et le besoin d'information ont dicté l'alinéa 2 de cet article qui ne nécessite pas d'autre commentaire.

Article 12

Comme déjà relevé plus haut, l'avantage attendu du concordat est un allégement des tâches administratives incombant aux autorités ou aux entreprises de sécurité. Cet article va précisément dans ce sens en étendant à l'ensemble des cantons signataires la validité de l'autorisation accordée par l'un d'eux. Il s'applique bien sûr aussi aux cas visés par l'article 10. Ainsi, tant les administrations publiques que les entreprises privées se verront déchargées d'une série de tâches quasi identiques (établissement et/ou contrôle des dossiers, démarches, enquêtes diverses, etc.) répétées autant de fois qu'une entreprise souhaite s'implanter, respectivement exercer, dans un nouveau canton.

La nécessité des contrôles périodiques étant reconnue, il est proposé, à l'alinéa 2, d'instaurer une limite à la durée de validité des autorisations et de la fixer à quatre ans, norme ayant fait ses preuves dans le régime actuel de la législation vaudoise.

Article 13

Cet article expose les mesures administratives et les conditions de leur prononcé. Ces mesures, ordinaires en matière d'autorisations de police, n'ont pas à être explicitées plus avant. En cas d'urgence et de violation grave des dispositions légales ou concordataires, les autorités du canton où s'exerce l'activité pourront aussi prendre les mesures exigées par les circonstances, par exemple, l'interdiction immédiate d'exercer ordonnée par voie de mesures provisionnelles en vertu du droit cantonal.

Article 14

Cette disposition, corollaire de l'article précédent, traite de la communication des renseignements entre autorités administratives compétentes. Il est évident que le régime de l'autorisation intercantonale ne peut se concevoir que s'il existe entre les administrations des cantons concordataires un devoir d'information réciproque permettant de contrôler une entreprise et, le cas échéant, de prendre les mesures nécessaires, même si les faits se sont déroulés sur le territoire d'un autre canton.

Le principe de la légalité des communications étant fixé et délimité, il reste que la législation des cantons concordataires en matière de protection des données s'appliquent pour le surplus.

Article 15

Le but de cet article est de rappeler aux entreprises et agents de sécurité qu'il leur est imposé de respecter en tous points la législation en vigueur, notamment les principes du Code pénal suisse sur la légitime défense et l'état de nécessité. La violation de normes prévues par la législation civile et pénale fédérales et, le cas échéant, cantonales, entraînera des sanctions spécifiques, prononcées par les autorités compétentes désignées par le droit interne de chaque canton concordataire.

Article 16

L'importance de cette disposition est essentielle dans la mesure où elle fixe les principes applicables à une saine collaboration qui doit exister entre les entreprises et les organes de police. La délégation de tâches d'intérêt public à des entreprises de sécurité (cf. al. 3) est aussi expressément réservée. Il appartiendrait ainsi à chaque canton de définir, en fonction de ses besoins et de sa législation propre, le cadre légal et l'étendue de cette délégation. Cette solution garantit la totale liberté de manoeuvre des cantons quant à l'orientation de leur droit interne.

Article 17

Cette disposition est calquée sur celle en vigueur dans les législations vaudoise et genevoise. Elle s'impose par le fait même qu'il n'est pas admissible que des agents de sécurité, au bénéfice d'autorisations délivrées par l'Etat, assistent passivement à la commission de crimes ou de délits sans les dénoncer. Au surplus, cette obligation de dénoncer s'inscrit dans le cadre du devoir de collaboration de l'article 16, alinéa 2 du concordat.

Article 18, alinéas 1 et 2

Le port d'une carte d'identité professionnelle, déjà en usage dans plusieurs cantons, et sa présentation sur réquisition se justifient aussi bien dans l'intérêt de la police que dans celui du public. Il permet une reconnaissance aisée du porteur en sa qualité de membre d'une entreprise autorisée. En revanche, eu égard à certaines contraintes professionnelles, dont la discrétion indispensable dans le cas de la protection rapprochée des personnes, le concordat ne prévoit pas d'imposer aux entreprises de sécurité de doter leur personnel d'un uniforme ou d'un quelconque autre signe de reconnaissance.

Articles 18 (al. 3), 19 et 20

De même, pour prévenir toute équivoque, le matériel publicitaire, les documents de correspondance des entreprises ainsi que les uniformes dont celles-ci choisissent de s'équiper ne doivent contenir aucune mention, ni avoir aucune apparence qui puissent faire naître, dans l'esprit de la clientèle et du public, l'idée d'un quelconque lien entre l'autorité et l'entreprise.

Article 21

En plus de la nécessaire réserve quant à l'application du droit fédéral, cet article prévoit une règle concordataire spécifique, à savoir l'interdiction du port apparent des armes, même enfermées dans un étui.

Articles 22, 23 et 24

Le concordat définit ici les contraventions pénales encourues en cas de violation de certaines de ses dispositions et, s'agissant de leur poursuite et de leur répression, renvoie aux procédures cantonales en vigueur. A signaler ici que le canton de Genève, dans ce domaine, conservera donc son système d'amendes administratives avec recours au Tribunal administratif lequel est formé de juges indépendants de l'administration.

Article 25

On rappelle ici que les cantons doivent prendre les mesures nécessaires pour assurer une bonne application du concordat. Selon les cas, des prescriptions de rang réglementaire pourront suffire.

Article 26

Même allant de soi, la désignation de la Conférence des chefs des départements de justice et de police de Suisse romande comme organe directeur du concordat justifie un article apportant cette précision.

Article 27

Comme d'autres concordats élaborés pour des objets de police, celui proposé prévoit une Commission concordataire, nommée par la Conférence des chefs des départements de justice et de police de Suisse romande qui fonctionne comme organe supérieur. Le rôle de la Commission concordataire est essentiellement de veiller à une application juridique pertinente et identique dans tous les cantons. Un autre rôle important est de suivre l'évolution du domaine de la sécurité et, sur la base des constats faits, de proposer les solutions adéquates à la Conférence ou à d'autres cantons concernés.

La Commission concordataire se veut et doit rester une structure non permanente, souple et légère, n'engendrant de ce fait que peu de frais de fonctionnement. Sa composition reste à la discrétion des cantons qui pourront y déléguer aussi bien un membre du Conseil d'Etat, auquel reviendrait la présidence selon un tournus à établir, que des fonctionnaires. Après une phase de mise en application du concordat qui demandera un engagement un peu plus intense, la Commission concordataire devrait pouvoir limiter à une ou deux ses réunions annuelles.

Articles 28 et 29

Pas de commentaire particulier.

Article 30

Au travers de cette disposition, les entreprises disposent d'un délai de huit mois pour se conformer au contenu de certaines dispositions concordataires. En pratique, elles devront requérir notamment de l'autorité de nouvelles autorisations qui ne leur seront délivrées que si les conditions d'octroi de celles-ci sont respectées. Ce délai de huit mois est suffisant, surtout pour les entreprises qui, et elles sont les plus nombreuses, bénéficient déjà d'autorisations et d'un dossier auprès de l'autorité compétente.

Position des cantons

A ce jour, le canton de Fribourg a déjà adhéré au concordat. Les lois d'adhésion des cantons de Neuchâtel, du Valais et du Jura sont actuellement sous délai référendaire.

Comme le concordat entrera en vigueur dès que trois cantons y auront adhéré, on peut raisonnablement penser que l'entrée en vigueur pourra être fixée au début de l'année 1999.

Conclusions

Nécessité d'adhérer au concordat

Tous les éléments ressortant de l'exposé des motifs du concordat et repris dans l'exposé des motifs du présent projet de loi démontrent l'intérêt, pour le canton de Genève, d'adhérer au concordat, quand bien même la loi genevoise en la matière a très largement servi de modèle pour le concordat.

Face à l'importante extension du marché de la sécurité, il s'est en effet avéré nécessaire de créer une plate-forme légale commune à tous les cantons romands.

Outre que cette harmonisation s'intègre parfaitement dans le nouveau cadre juridique de la loi fédérale du 6 octobre 1995 sur le marché intérieur, le concordat présente plusieurs aspects positifs.

Ainsi, l'échange d'informations entre les cantons, que le concordat prévoit large et ouvert, permettra de mieux contrôler les entreprises de sécurité et par-là même éviter certains dérapages susceptibles de mettre en péril l'ordre et la sécurité publics. Le cas de l'agence de sécurité privée genevoise Unit Sécurité SA, à qui le Département de justice et police et des transports a dû retirer l'autorisation d'exploiter en raison de sa totale inféodation à la secte des Chevaliers du Lotus d'Or et à son gourou, le Messie cosmoplanétaire Gilbert Bourdin, est encore dans toutes les mémoires (retrait d'autorisation confirmée par la suite par le Tribunal administratif et par le Tribunal fédéral).

Quant à l'uniformatisation des législations en vigueur, elle tient compte de l'implantation toujours plus décentralisée des entreprises de sécurité et permettra, grâce à la reconnaissance intercantonale des autorisations délivrées, la libre circulation, dans les cantons concordataires, des personnes reconnues aptes à exercer la profession considérée.

Conséquences financières

Il est difficile d'estimer les incidences financières découlant de l'adhésion au concordat. La reconnaissance intercantonale des autorisations d'exploiter et de pratiquer fait que les entreprises déjà reconnues dans d'autres cantons concordataires n'auront plus à présenter une demande dans le nôtre, et n'auront plus à payer un émolument. Cette perte ne devrait toutefois pas excéder quelques milliers de francs par année.

L'exécution du concordat pourra être confiée au service des autorisations et patentes, qui délivre déjà, en application de la loi actuellement en vigueur, les autorisations d'exploiter une agence et les autorisations d'engagement du personnel, et qui pourra par conséquent délivrer les autorisations prévues aux articles 8 et 9 du concordat. L'exécution du concordat pourra également être confiée au commissariat de police, qui délivre déjà, en fonction de la loi actuellement en vigueur, les autorisations pour les agents provenant d'autres cantons qui souhaitent effectuer une mission à Genève, et qui pourra par conséquent délivrer les autorisations prévues à l'article 10 du concordat.

Dans cette optique, et compte tenu du nombre d'autorisations à accorder, l'engagement de personnel supplémentaire ne devrait pas être nécessaire dans les services précités.

A noter enfin que les frais de l'activité des services compétents seront couverts par la perception d'émoluments.

Compatibilité avec le droit européen

Comme déjà exposé dans le commentaire des articles 8 et 9 du concordat, les conditions personnelles fixées pour obtenir les diverses autorisations s'éloignent du droit européen applicable notamment à la libre circulation des personnes et des services.

Cela n'a toutefois pas empêché le Conseil fédéral d'approuver le concordat, tout en attirant l'attention des cantons concordataires sur le fait que le concordat devra être adapté si les négociations bilatérales en cours avec l'Union Européenne aboutissent à un accord dans le domaine de la libre circulation des personnes.

Au bénéfice des explications qui précèdent, nous vous prions, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir prendre en considération puis adopter le présent projet de loi autorisant le Conseil d'Etat à adhérer, au nom de la République et canton de Genève, au concordat sur les entreprises de sécurité, du 18 octobre 1996.

Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire sans débat de préconsultation.