République et canton de Genève

Grand Conseil

Chargement en cours ...

PL 13122-A
Rapport de la commission de la santé chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat approuvant le rapport de gestion des Hôpitaux universitaires de Genève pour l'année 2021
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 24 et 25 novembre 2022.
Rapport de majorité de Mme Jocelyne Haller (EAG)
Rapport de minorité de M. François Baertschi (MCG)

Premier débat

La présidente. Nous passons au PL 13122-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité de Mme Jocelyne Haller est repris par M. Andersen, à qui je passe la parole.

M. Michael Andersen (UDC), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas un rapport, mais deux que j'ai récupérés de Mme Haller en une session. Je serai assez succinct, parce qu'après avoir traité le rapport de gestion 2017 des HUG, nous passons à présent à celui de l'année 2021. Dans ce projet de loi, vous l'aurez noté, la particularité est que la majorité qui l'a refusé était constituée de deux personnes, deux autres ayant voté pour et huit personnes s'étant abstenues.

Dans le cadre de ses travaux, la commission a reçu MM. Levrat, Mathieu et Perrier ainsi que les différents syndicats. Les principaux points qui ont été évoqués étaient les problèmes liés à la gouvernance, ce qui mena la majorité - si l'on peut la qualifier ainsi - à refuser le rapport de gestion des HUG. En parlant de gouvernance, il est notamment question de manque d'effectifs à l'hôpital, de problèmes de gestion dans les ressources humaines, d'un taux d'absence qui a atteint jusqu'à 12%, de retards dans les activités stationnaires. Mais comme le mentionne la rapporteuse, quand bien même la commission a été sensible aux contraintes et au contexte particulièrement difficile de pandémie qui ont pesé sur l'activité des HUG en 2021, elle a été interpellée par le fait qu'un certain nombre de ces difficultés, notamment en ce qui concerne la gestion du personnel et l'organisation du travail, perdurent depuis plusieurs années au sein de l'établissement, soit depuis bien avant la crise covid. Dans le même temps, les membres de la commission ont eu pleinement conscience de l'engagement de l'ensemble du personnel, de bas en haut de l'échelle hiérarchique, durant la crise sanitaire que nous avons connue, pour traverser cette pandémie et assurer la mission de santé publique des HUG. C'est donc une perception assez contrastée, qui n'est peut-être pas sans lien avec le vote inhabituel auquel la commission s'est trouvée confrontée.

Je vous invite donc, au nom de la majorité des deux personnes qui ont voté contre ce projet de loi, à refuser le rapport de gestion des Hôpitaux universitaires de Genève pour l'année 2021.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. C'est vrai que ce vote est tout à fait incompréhensible, parce que lors de cette année 2021 - si vous vous en souvenez -, nous étions en pleine crise covid. Ce fut une épreuve assez difficile pour l'entier de l'institution, enfin... «assez difficile», c'est vraiment un euphémisme, ce fut un véritable défi relevé par tous les HUG, toute l'institution, les soignants et le personnel de support. A tel point d'ailleurs que lorsque le conseiller fédéral Berset est venu à Genève, il a dit - et j'espère que je ne trahis pas trop son expression, car je le cite de mémoire: «Nous avons véritablement vu un dinosaure qui a fait une sorte de roulé-boulé ou qui s'est complètement retourné.» Il s'agit donc d'un effort gigantesque pour une institution lourde de plus de dix mille employés, avec une structure qui, malgré tout, doit appeler notre respect à tous, quelles que soient les personnes. Mais curieusement - et je ne pense pas que ce soit une suite de la crise covid -, il m'a semblé que les membres de la commission de la santé de l'époque ont eu un coup de chaud, un moment d'énervement. Je ne sais pas pour quelles raisons ni ce qui se passait à cette époque, mais il y avait des insatisfactions.

Il est certain que pour une aussi grande institution, les raisons de ne pas être satisfait sont nombreuses. On peut tous exprimer des critiques et souhaiter voir s'améliorer des éléments dans un sens ou dans un autre. Souvent d'ailleurs, nous émettons ces critiques de manière contradictoire. Mais, de manière incompréhensible - et c'est ce que j'ai trouvé choquant en tant que rapporteur de minorité -, il y avait à mon sens une sorte d'irrespect envers le travail formidable qu'ont fait les HUG durant cette crise covid. Il était ingrat de la part de notre Grand Conseil de leur dire: «Oui, vous avez fait ce que vous avez fait, mais ce n'était pas si bien que ça au final», alors qu'il y avait une reconnaissance extérieure de la qualité du travail et du défi à relever. Car ce n'était pas une gestion ordinaire, mais véritablement extraordinaire, un défi à relever.

Pour cela, je pense qu'il faut se racheter et avoir le courage d'accepter, a posteriori et de manière symbolique, ce rapport de gestion. Je crois que symboliquement, nous le devons à cette institution et à son courage. Certains applaudissaient les soignants quand ils rentraient le soir. Maintenant, nous ne pouvons pas leur laisser ce message en disant: «Vous êtes des minables, vous n'avez rien foutu.» Je crois que ce n'est pas correct d'avoir cette attitude-là. Nous devons voter ce rapport de gestion 2021.

M. Léo Peterschmitt (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, comme l'année 2020, l'année 2021 a vu les HUG sous pression en raison de la pandémie. 2021 fut l'année du passage de la fin des premières vagues du covid au début d'un certain retour à la normale. Je peux citer la reprise des activités chirurgicales et de dépistage, qui avaient souffert en 2020. J'aimerais personnellement saluer le développement de la consultation covid long, qui a su aider de nombreuses personnes en souffrance et qui continue de le faire aujourd'hui.

Les conditions de travail ont cependant continué d'être compliquées pour les travailleuses et les travailleurs des HUG. Les Vertes et Verts regrettent le manque de considération pour celles et ceux qui mènent une activité indispensable, celle de soigner. Le groupe des Vertes et Verts s'abstiendra, car nous pensons que de meilleures conditions de travail et une revalorisation salariale des métiers de la santé les plus difficiles sont possibles. Merci.

M. Pierre Conne (PLR). Chers collègues, le groupe PLR s'abstiendra en plénière comme il l'a fait en commission. Nous nous retrouvons parfaitement dans une partie du rapport de Mme Haller, qui est d'ailleurs excellent, et je tiens à vous le lire, car il donne peut-être des éléments de compréhension.

Pourquoi y a-t-il eu l'année précédente et cette année 8 abstentions sur le rapport de gestion des HUG ? En fait, cette problématique des abstentions n'est pas due à un mouvement d'humeur, mais est véritablement à la perception d'un malaise beaucoup plus profond. Je lis:

«Précisons à toutes fins utiles que ce rapport de gestion 2021 a été accepté avec le score étonnant de 2 pour, 2 contre et... 8 abstentions. Ce qui a conduit paradoxalement le présent rapport au rang de rapport de majorité en vertu de la règle parlementaire qui veut qu'en cas d'égalité des voix, le non l'emporte. L'an dernier, le rapport de gestion 2020 des HUG avait affiché un score de 4 voix contre, 2 pour et... encore 8 abstentions. Des abstentions qui, à une exception près, rassemblent les mêmes groupes. Une présence massive d'abstentions que, sans trop s'avancer, la rapporteuse ne peut que percevoir comme l'expression d'un profond malaise relatif à certains aspects de la gestion des HUG.

«Certes, une fois encore ce malaise s'est exprimé au cours des travaux sur la discrépance» - et ça, c'est important - «entre une admiration certaine pour les exploits réalisés au quotidien par le personnel et la direction des HUG pour remplir la mission de ces derniers dans la crise sans précédent qu'ils ont dû affronter en tant qu'hôpital covid et une insatisfaction certaine quant à la manière dont ont été traités: les doléances d'une grande partie du personnel, les problèmes récurrents de gestion du personnel, les manquements à la réglementation sur le travail [...], etc.»

Je vais m'arrêter là, mais je pense que si deux années de suite on se retrouve dans cette situation, on doit vraiment se demander, pour l'année à venir, comment présenter un rapport de gestion de cette institution au Grand Conseil de manière à trouver une meilleure cohérence entre ce qui est présenté comme activité et la perception de ce malaise; la description des problèmes relevés ne permet pas d'identifier réellement la manière dont ils sont pris en charge et les solutions qui sont proposées pour les résoudre. Je vous remercie de votre attention.

M. Jean-Marc Guinchard (LC). Il est vrai que c'est assez rare et étonnant de constater dans cette enceinte des votes de commission avec de si nombreuses abstentions. Cela étant, Mme Haller n'a pas été citée dans un autre passage par notre collègue Pierre Conne. Mme Haller s'est interrogée dans son rapport non seulement sur le nombre d'abstentions, mais également sur le fait que les députés qui se sont abstenus n'ont pas expliqué, au moment des débats en commission, le pourquoi de leurs abstentions, sauf Le Centre qui s'est exprimé à ce sujet et qui a dit que le groupe était ambivalent... (Rires.) J'ai dit ambivalent ! (Remarque.) ...parce que d'un côté, il ressent bien la détresse au niveau du personnel qui se manifeste régulièrement et pas seulement pendant la crise covid, mais depuis un certain temps - plusieurs rapports successifs de Mme Haller l'ont relevé -, et d'un autre côté, il constate un taux d'absentéisme toujours élevé, y compris hors covid. Mais là, je mettrais un bémol, parce que nous rencontrons à l'heure actuelle, que ce soit dans les hôpitaux ou dans d'autres institutions de soins, un absentéisme qu'on a de la peine à résorber et qui est dû à ces fameux covid longs qu'on a longtemps sous-estimés et qui touchent pas mal de personnes. Les personnes touchées par ces covid longs continuent à ressentir, même deux ou trois ans après avoir contracté le virus, des malaises, des difficultés de concentration, des pertes d'équilibre, des pertes de goût ou d'autres affections de type pulmonaire ou rhumatismal qui les empêchent de travailler à 100% et les obligent à travailler à des taux souvent beaucoup plus restreints. J'ai rappelé tout à l'heure, lorsque j'étais rapporteur, que des efforts ont été fournis aux HUG concernant la gestion des ressources humaines, ce qui constitue effectivement un aveu que quelque chose n'allait pas.

Comme cela a été dit tout à l'heure, peut-on d'un côté faire sonner les cloches et applaudir le personnel infirmier... (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...et de l'autre, systématiquement refuser un rapport qui fournit une image à un moment donné de l'institution ? Sur cette base, Le Centre acceptera cette fois-ci le rapport de gestion, par mesure d'encouragement pour la direction de l'hôpital...

La présidente. Il vous faut conclure.

M. Jean-Marc Guinchard. ...et pour montrer au personnel que nous sommes ouverts. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Sylvain Thévoz (S). Mesdames et Messieurs les députés, les commissaires du parti socialiste s'étaient abstenus sur ce rapport d'activité principalement parce que celui-ci ne voulait pas s'y opposer au regard de l'activité, il est vrai, incroyable qui a été menée par les HUG dans une période de crise et de stress extrêmes. Mais en même temps - et c'est là-dessus que portaient principalement les auditions et le rapport de majorité de Mme Haller -, nous avions pu constater les conditions de travail du personnel extrêmement difficiles, le taux d'absence très élevé et le peu de reconnaissance de la part de l'institution et même de ce parlement. Quand nous avions proposé une prime de reconnaissance pour les soignants, elle avait été balayée non seulement par la direction des HUG, mais également par la majorité de cette plénière. M. Poggia, qui dirigeait à l'époque ce département, l'avait prise de haut, même si, dans le canton de Vaud - souvenez-vous-en -, les employés, notamment du CHUV, avaient eu une prime de reconnaissance pour le travail extraordinaire qui avait été mené.

Vous transmettrez donc à M. Baertschi qu'il est absolument hallucinant de transformer le rapport de Mme Haller en quelque chose qui exprimerait du mépris pour les employés. Le mépris pour les employés, s'il en est un, c'est bien celui du MCG et des partis qui ont refusé cette prime, et de ceux qui ont fait travailler le personnel du domaine de la santé jusqu'à la maladie ou des absences prolongées, pour ensuite voter ou prétendre voter, quelques années plus tard, un rapport de gestion qui n'a plus aucun impact ni aucune utilité.

Cela étant dit, nous maintiendrons notre abstention et nous continuerons de soutenir les travailleurs de la santé pour des conditions de travail dignes et des salaires à la hauteur de leurs exigences; nous continuerons d'être de leur côté dans le soin, et pas juste en paroles comme le MCG, qui ne manque pas une occasion d'ailleurs de critiquer les frontaliers et donc les infirmières et les médecins qui font tourner l'hôpital à la satisfaction des habitants. Merci beaucoup. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

La présidente. Je vous remercie. Je passe la parole au rapporteur de minorité pour deux minutes quarante-cinq.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. Je ne répondrai pas aux propos excessifs du député socialiste, tout ce qui est excessif étant insignifiant.

Moi, j'ai aussi beaucoup de peine à comprendre comment on peut être très satisfait du personnel et de la direction et dire ensuite, dans la même phrase, que ça ne va pas du tout. Il y a une incohérence fondamentale qu'il faudrait qu'on m'explique, mais je crois que cela ne sera pas possible, parce qu'elle est inexplicable.

En revanche, la raison de ce vote, elle, est évidente. Nous avons auditionné à la commission de la santé un syndicat contestataire dont je vous laisse deviner le nom, qui est intervenu en dressant le tableau le plus sombre et le plus noir de la situation. Alors je suis très surpris de voir que des partis qui se prétendent de droite se laissent embobiner par un autre qui n'est pas du tout dans cette tonalité-là et finissent par se faire avoir - si vous voulez bien - et influencer avant un vote par ce parti... ce syndicat ultracontestataire. Ces partis sont ainsi déstabilisés dans ce qui pourrait être tout simplement une reconnaissance du travail effectué. C'est un couac un peu inexplicable, j'ai parlé de coup de chaud ou de coup de sang, c'est quelque chose de ce niveau-là.

Je pense qu'il faut véritablement avoir le courage de voter ce rapport de gestion, qui n'enlève rien aux critiques qu'on peut apporter et aux améliorations nécessaires de l'institution. Je vous demande donc instamment de voter ce projet de loi approuvant le rapport de gestion des HUG.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Je ne suis pas totalement certain d'avoir compris la démonstration de billard à 18 bandes qui vient de nous être faite sur les aspects politiques. Et je ne veux pas allonger le débat sur un objet qui porte sur le passé; à mon sens, on a déjà beaucoup trop parlé du passé ces deux derniers jours. J'ai lu attentivement le rapport et ai pris note de l'insatisfaction d'une majorité - puisqu'il y a une majorité abstentionniste de cette commission quant au mode de rapport sur les Hôpitaux universitaires -, mais je crois qu'on ne peut pas s'attendre à une autre forme que celle d'un rapport de la direction générale qui exprime ce qu'elle a perçu, sauf à demander une forme d'autocritique très très poussée.

J'aimerais amener ici deux éléments. Le premier est d'inciter la commission des finances, dans le cadre de l'étude du budget ou des comptes, à associer le Conseil d'Etat à l'audition des grands établissements publics autonomes, parce qu'en finalité, ce sont les élus de l'exécutif qui vont défendre des prises de position qui ont un impact sur ces établissements. Deuxième élément: par rapport à cette insatisfaction témoignée pour l'année 2021, notamment sur les aspects relatifs au travail, j'ai donné l'instruction à la direction générale des Hôpitaux universitaires de corriger rapidement les lacunes. On en identifie sept quant au non-respect de la loi sur le travail. J'espère donc qu'on pourra constater ensemble une amélioration de ces conditions pour le personnel.

Cela dit, et pour conclure, le Conseil d'Etat verrait quand même d'un bon oeil que vous acceptiez ce rapport de gestion, parce que - cela a été dit - on ne peut pas s'extraire du contexte de 2021, où nous étions en pleine pandémie. Nous avons un hôpital qui a déployé des activités extraordinaires, en bonne intelligence avec le secteur privé, comme cela a été souligné, et on ne peut pas ici - et je ne le dis pas parce que mon ancien et estimé collègue siège parmi nous - simplement gifler l'institution en refusant ce rapport de gestion 2021. Je vous invite à l'approuver pour donner le signal attendu aux Hôpitaux universitaires. Merci.

La présidente. Je vous remercie. Nous procédons au vote sur ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 13122 est adopté en premier débat par 64 oui contre 1 non et 23 abstentions.

L'article unique du projet de loi 13122 est adopté en deuxième débat.

Mise aux voix, la loi 13122 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 33 oui contre 1 non et 54 abstentions (vote nominal).

Loi 13122 Vote nominal