République et canton de Genève

Grand Conseil

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P 2133-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition : STOP immédiat au centre de renvoi du Grand-Saconnex (Genève)!
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VIII des 15 et 16 décembre 2022.
Rapport de majorité de M. Sandro Pistis (MCG)
Rapport de minorité de M. Sylvain Thévoz (S)

Débat

Le président. Nous abordons à présent la P 2133-A, classée en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à M. Pistis, rapporteur de majorité, à qui je demande de bien vouloir gagner la table des rapporteurs.

M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission des pétitions a été saisie d'une pétition titrée de la sorte: «STOP immédiat au centre de renvoi du Grand-Saconnex (Genève) !» Ce texte contient des propos assez froids et qui ne sont pas d'actualité. Afin que tout le monde puisse savoir de quoi l'on parle, je rappelle que les pétitionnaires estiment que les centres fédéraux génèrent inévitablement des violences contre les requérants d'asile, qu'ils traitent les personnes venues trouver refuge en Suisse comme des criminels et qu'ils poussent les requérants d'asile dans la clandestinité.

Mesdames et Messieurs les députés, il faut en premier lieu savoir qu'à Genève, nous n'avons pas de centres de requérants d'asile, nous avons un centre d'accueil. En réalité, des événements en lien avec la politique fédérale en matière d'asile ont déjà révélé par le passé l'existence de problèmes dans certains centres d'accueil. En tout état de cause, la pétition semble confondre «centre d'asile» et «centre de renvoi», un terme beaucoup plus politique et inapproprié pour définir ce lieu.

Par ailleurs, lors de son audition, le président du Conseil d'Etat a rappelé qu'à Genève le centre du Grand-Saconnex bénéficiait de 100 places destinées aux requérants d'asile, de 50 places pour des personnes en procédure de recours et de 50 places pour des personnes devant quitter la Suisse. Il a également rappelé qu'en fonction des besoins, 50 places supplémentaires pourraient être ajoutées. Le fait de soutenir la pétition forcera l'Etat genevois à faire défaut à ses obligations vis-à-vis de la Confédération en matière de politique d'asile. Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de la commission des pétitions vous invite à refuser cette pétition, qui véhicule tout simplement de la désinformation et crée de la ségrégation vis-à-vis des personnes accueillant les requérants d'asile. Merci.

M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition se place dans la droite ligne de la motion qu'une majorité du Grand Conseil avait votée le 22 mars 2019 et qui s'intitulait «Pas de centre fédéral d'attente et de départ à Genève !». Par 53 voix contre 45, notre parlement a donné un message très, très clair. Il l'a donné en se basant sur des éléments factuels, à savoir la construction de ce centre à proximité de l'aéroport, près des pistes de décollage, dans un environnement malsain, avec une pollution de l'air et sonore extrêmement violente, à quoi s'ajoutent des éléments psychologiques: quand vous êtes migrant et sous risque d'expulsion, être placé sous les trajectoires des avions occasionne évidemment une pression psychologique, voire une forme de torture absolument inacceptable. Le Grand Conseil avait pris ces éléments en compte.

La regrettée élue PDC Anne Marie von Arx-Vernon avait relevé à cette occasion que Genève avait construit une relation de confiance avec le SEM autour du projet Papyrus, or ce lien a été rompu suite à la constatation de maltraitances avérées dans les centres fédéraux. Je dis bien «avérées» ! En effet, quand on a prononcé le mot «torture», certains ont probablement sauté sur leur chaise, mais c'est bel et bien avéré: c'est un rapport d'Amnesty International qui le dit. Les recherches font état de violations commises par le personnel de sécurité, notamment de graves cas de maltraitance. Ces derniers ne sont ni des exceptions ni des dérapages individuels, mais la conséquence directe d'un modèle systémique. A la lumière des faits, Amnesty International a alerté sur les violations des droits humains visant des requérantes et requérants d'asile en raison de comportements pouvant être assimilés à de la torture.

Mesdames et Messieurs, il ne faut pas se voiler la face: il existe un système de traitement et d'expulsion d'êtres humains qui s'apparente, en effet, à de la torture. A tel point que le 25 janvier 2023, le Conseil fédéral publiait le communiqué suivant: «Sécurité et exploitation des centres fédéraux pour requérants d'asile: le Conseil fédéral met en consultation des modifications de la législation». Toute une série de constats sur les maltraitances est acceptée. Le Secrétariat d'Etat aux migrations - le SEM - reconnaît des maltraitances et admet qu'il faut faire mieux. Les problèmes sont tellement nombreux qu'il faut changer la loi, d'où l'ouverture de consultations dans les cantons. On est au milieu du gué, Mesdames et Messieurs: on passe d'une situation qui s'apparente à de la torture à une situation qui sera potentiellement mieux encadrée si les mesures nécessaires, nous dit le SEM, conduisent à modifier la loi sur l'asile. Il ne s'agit donc pas de points de détail.

En attendant ces modifications de la loi, nous vous invitons à soutenir cette pétition et à la renvoyer au Conseil d'Etat pour attirer l'attention et avoir une forme de moratoire sur ce centre fédéral; celui-ci est une aberration, une tache sur la Genève internationale, et risque de nuire non seulement à la réputation de Genève, mais aussi bien évidemment - et c'est l'essentiel - à la santé et à la vie même des personnes qui y seront détenues. Merci de votre attention.

Mme Aude Martenot (EAG), députée suppléante. Il me semble que très peu de personnes dans cette salle ont déjà été dans un centre fédéral d'asile (CFA) ou vu de près un tel centre. Celles et ceux qui l'auraient fait auraient découvert une bâtisse entourée de barbelés dont l'entrée est interdite à la société civile et où les sorties sont contrôlées, les retards sanctionnés. En bref, un véritable espace carcéral !

M. Pistis et M. Poggia semblent indiquer - et cela a été dit lors des auditions de la commission - que la construction prévue au Grand-Saconnex serait celle d'un centre d'asile et non de renvoi. C'est faux ! Dans la répartition des centres en Suisse, le SEM prévoit bel et bien un centre de renvoi à Genève en bout de piste d'atterrissage, sous les avions. Or les CFA, encore plus que les foyers, sont générateurs de violence et de souffrance, parce que concentrer autant de personnes dans un lieu avec un mauvais encadrement est intrinsèquement générateur de débordements et de violence. Les CFA sont donc tout simplement des lieux incompatibles avec une population qui a subi les traumatismes de l'asile.

Quelques exemples d'actualité. S'agissant du CFA de Neuchâtel à Boudry, la RTS a récemment montré la vive inquiétude du voisinage, parce que ce centre est surdimensionné et entraîne des problèmes pour le personnel sur place et pour les habitants et habitantes. Le CFA compte aujourd'hui 900 personnes au lieu de 480. On peut imaginer les difficultés que cela implique. Les travailleurs et travailleuses du CFA dénoncent de mauvaises conditions d'emploi et un manque de formation, et le SEM lui-même avoue ne pas réussir à trouver suffisamment de gens à embaucher, parce que personne ne veut y travailler.

Un rapport du CHUV et d'Unisanté a récemment souligné que l'organisation actuelle dans les CFA rend inopérante la prévention du suicide. Ces lieux accentuent encore les risques de suicide: on en a connu dernièrement à Genève. De plus, l'accès aux soins n'est pas garanti aujourd'hui dans les CFA. Des médecins se sont récemment rendu compte que des bébés perdaient du poids de façon dramatique et inquiétante dans le CFA de Fribourg, parce que la nourriture proposée est inadéquate, et les parents se voient interdits d'avoir de la nourriture dans leur chambre.

Alors que veut dire accueillir un CFA dans le canton de Genève ? Est-ce vraiment le moyen pour Genève de «faire sa part» en matière d'asile ? Nous devrions faire notre part en refusant la privatisation de métiers d'encadrement dans les CFA, en refusant la concentration de personnes en situation d'asile dans des espaces où les droits humains sont bafoués, en disant non à la construction d'un tel lieu à Genève. Nous pouvons faire notre part en offrant aux personnes en situation d'asile un accueil au moins à la hauteur de ce qui a été proposé pour les personnes venant d'Ukraine cette dernière année. Rassurez-vous, les personnes en situation d'asile sont bien moins nombreuses. Nous pouvons organiser un appel à soutien de la population pour qu'elle ouvre ses portes.

Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.

Mme Aude Martenot. Nous pouvons cesser la construction de bureaux voués à rester vides et ouvrir des foyers accueillants, dignes et à taille humaine.

Le président. Merci, Madame la députée.

Mme Aude Martenot. Nous devons arrêter avec ce projet de CFA au Grand-Saconnex, qui sera bientôt décrié par les organisations de défense des droits humains, je vous le garantis. (Applaudissements.)

Le président. C'est terminé, Madame la députée. Merci. Je passe la parole à Mme Christina Meissner.

Mme Christina Meissner (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, Genève doit faire sa part en la matière, en accueillant un centre d'asile et de renvoi. Si ce projet était stoppé - car la pétition demande d'interrompre immédiatement la construction du centre -, Genève reporterait la prise en charge des réfugiés sur d'autres cantons, ce qui serait ni responsable par rapport aux besoins, ni en accord avec la volonté exprimée par le peuple par voie de votation.

Le centre du Grand-Saconnex n'hébergera pas uniquement des requérants d'asile devant partir du pays: 100 places seront destinées aux requérants d'asile, 50 places à des personnes en procédure de recours et 50 places à des personnes devant quitter la Suisse; 50 places supplémentaires non attribuées s'ajouteront à ce nombre et seront utilisées en fonction des besoins ponctuels. Les Ukrainiens, par exemple, auraient pu en profiter, si le lieu était déjà opérationnel. Ce centre n'est donc pas un sas de l'aéroport permettant de faciliter les renvois.

Pour rappel, exactement au même endroit, il y a eu pendant des années le centre des Tilleuls qui abritait des requérants déboutés. Ce dernier était dans un état déplorable, si bien que le nouveau centre représente un réel progrès. Quant à la proximité avec l'aéroport, figurez-vous qu'il y a moins de bruit aux abords de la piste que sous l'axe d'approche des avions, et des Genevois - bel et bien des Genevois - vivent avec des nuisances sonores dues à l'aéroport bien pires.

Une voix. Bravo !

Mme Christina Meissner. On n'aide pas l'asile en s'opposant à des centres pour requérants et réfugiés, c'est pourquoi le PDC votera en faveur du classement de cette pétition. Je vous remercie.

M. Alexis Barbey (PLR). La pétition s'oppose à la construction d'un site de renvoi, or il s'agit là d'un engagement que nous avons pris vis-à-vis de la Confédération. Je pourrais arrêter là mon intervention, puisque ce seul argument suffit à nous obliger à aller dans le sens de ce centre d'asile, contrairement à ce que souhaite cette pétition.

La nouvelle construction va remplacer un bâtiment qui était dans un état vétuste - ma préopinante l'a dit -, et je crois qu'il faut rappeler qu'il s'agit d'une amélioration et non d'une péjoration des conditions pour ce qui est de la détention... de l'accueil des réfugiés. (Exclamations.) Bizarrement, les pétitionnaires se plaignent des conditions d'accueil, mais ne proposent pas de les modifier; ils proposent uniquement de ne pas entrer en matière sur la construction de l'immeuble lui-même. C'est un peu étrange ! Ils ne se sont pas souciés des conditions d'accueil, mais sous le poids de la culpabilité autour de la gestion de ce centre, ils ont uniquement essayé de nier la nécessité d'un bâtiment d'accueil.

Or que se passerait-il si on refusait la construction de ce centre ? Il faudrait tout simplement envoyer les réfugiés à Boudry, seul autre centre à disposition géographiquement proche - là où se produisent tous les dérapages dont se plaint la pétition. Par conséquent, accepter ce texte reviendrait à empirer une situation que les pétitionnaires ne trouvent pas idéale.

Il faut aussi dire que des améliorations ont été amenées dans le cadre de ce projet: un comité de suivi a été mis en place, et pour encadrer le centre on aura recours, en plus des professionnels déjà présents, au monde associatif.

Maintenant j'aimerais citer - ce n'est pas fréquent - M. Poggia qui disait: «On ne combat pas l'asile en s'opposant à des centres.» Je crois que c'est tout à fait vérifié par la présente pétition, qui sur la forme - je le signale en outre - contient des termes violents tels que «sadisme institutionnel». Elle a pour intention de nous prendre en otages dans le cadre de ces démarches. Pour toutes ces raisons, le parti libéral-radical vous incite à refuser cette pétition et à la déposer sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie.

M. Stéphane Florey (UDC). Il y a un point, quand même, sur lequel on peut être parfaitement d'accord avec les pétitionnaires: dans le meilleur des mondes, il ne devrait pas y avoir de centres d'accueil de réfugiés, parce que dans le meilleur des mondes, si on était un peu plus intelligent qu'aujourd'hui, on stopperait les réfugiés au départ et on les empêcherait de risquer leur vie. Quand on voit ce qui se passe en mer, les bateaux qui coulent, ce genre de choses, et les personnes victimes de trafiquants de vies humaines... Sur ce point, on est d'accord; mais alors qu'on les empêche d'arriver en s'occupant d'eux au départ ! C'est le premier élément.

Maintenant on a bien compris les arguments fallacieux des pétitionnaires - et il ne faudra pas se tromper -, puisque de toute façon ils ne veulent qu'une chose: en refusant un centre de requérants d'asile, ils veulent simplement que la Suisse les accueille. Point final ! Sans autre mesure. Il faudrait les accueillir et laisser les frontières grandes ouvertes, ce qui est tout bonnement impossible et irréaliste.

Pour ces raisons et à la suite de tout ce qui a été dit à son encontre, c'est bel et bien un classement que cette pétition mérite, et il ne faudra pas se tromper lors du vote. Je vous remercie.

Mme Katia Leonelli (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, permettez-moi en préambule de dire que le groupe Vert s'était positionné en faveur du renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat. Etant donné que la majorité opposée à la pétition a ensuite voté contre le dépôt afin de la classer, notre groupe s'est abstenu pour éviter de soutenir un classement - classement que nous refuserons aujourd'hui.

Pour ce qui est du fond de cette pétition, ses constats sont malheureusement toujours d'actualité. Depuis des années, des associations, la population civile, les partis politiques et même notre Grand Conseil s'expriment pour que l'on renonce au centre de renvoi du Grand-Saconnex, à travers la motion 2489 déposée en 2018 par Delphine Klopfenstein (laquelle avait convaincu une majorité de notre hémicycle, y compris le PDC) et par le biais de cette pétition qui a récolté pas loin de 4500 signatures. La motion en question a fait l'objet de quatre réponses du Conseil d'Etat, toutes qualifiées d'insatisfaisantes par notre Grand Conseil, dans lesquelles le gouvernement se contentait de rejeter la faute sur la Confédération.

Notre Conseil d'Etat genevois aurait dû, Mesdames et Messieurs les députés, prendre ses responsabilités et faire honneur à la tradition humanitaire de notre canton. C'est une honte qu'à moins de 5 kilomètres du siège du Haut-Commissariat aux droits de l'homme et de l'ONU, un centre de renvoi indigne voie le jour entre une autoroute et la piste d'aéroport située à quelques mètres de là. Les nuisances sonores et la pollution du site que subiront les requérants d'asile de ce centre sont incomparables aux nuisances que subissent les Genevois de la rive droite, comme a osé le laisser croire le PDC.

Est-ce si difficile d'appliquer la loi sur l'asile tout en respectant les libertés humaines les plus fondamentales ? En 2021, les centres fédéraux d'asile ont été pointés du doigt dans un rapport d'Amnesty International dénonçant de graves violations des droits humains, des actes assimilables à de la torture, de la violence, des obstructions à l'accès aux soins médicaux, des comportements racistes et des insultes à l'égard d'individus considérés comme coupables d'avoir fui la guerre ou la pauvreté.

Cela a déjà été répété à plusieurs reprises durant nos débats sur la motion 2489, mais permettez-moi de le souligner et de le rappeler encore une fois: tels qu'ils sont gérés aujourd'hui, les CFA s'apparentent plus à des lieux de semi-détention qu'à des lieux d'accueil. En tant que collectivité, nous avons tout à perdre à mettre en oeuvre une politique d'asile dissuasive qui pousse les bénéficiaires à l'irrégularisation et à la clandestinité et cause immanquablement de graves problèmes de santé.

Aux dernières nouvelles, les activités du centre pourraient débuter dans une année. Mesdames et Messieurs les députés, nous voulons saisir l'occasion de cette pétition pour affirmer encore une fois notre opposition à ce centre de renvoi. Quoi qu'il advienne de cette pétition, nous espérons que le Conseil d'Etat aura entendu ce message et fera tout ce qui est en son pouvoir pour limiter les dégâts. Nous déplorons la position du PDC qui avait soutenu la motion Verte de 2018 et avait même déposé une résolution allant dans le même sens. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Emmanuel Deonna (S). Les pétitionnaires demandent d'interrompre immédiatement la construction du centre fédéral d'asile et de renvoi du Grand-Saconnex. Cette pétition est soutenue par une très large coalition, les associations spécialisées dans l'aide aux migrants et les syndicats. Mes préopinants l'ont rappelé, contrairement à ce qu'affirme Mme Meissner, les conditions de vie prévues dans ce centre sont totalement indignes. Les requérants d'asile devront demander une autorisation pour chaque sortie de ce centre. Elles et ils seront soumis à des horaires restrictifs - 9h à 17h en semaine - qui rendront impossible une vie sociale extérieure. Elles et ils ne pourront recevoir des visites de leurs proches. Les enfants seront scolarisés à l'intérieur même du centre et soumis à des sanctions à la moindre infraction au règlement.

C'est dans ces conditions indignes - mes préopinants l'ont rappelé - que l'on prévoit prétendument d'«accueillir» les requérants d'asile, celles et ceux qui ont simplement le malheur d'avoir fui les guerres ou la pauvreté. Vous le savez, Mesdames et Messieurs les députés, près de la moitié des requérants que l'on fait vivre dans ces conditions de maltraitance et de semi-détention finit de toute façon par sortir du système. Pérenniser de telles pratiques à Genève reviendrait à bafouer totalement la tradition humanitaire du canton. C'est pourquoi le groupe socialiste demande le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole au rapporteur de minorité, M. Sylvain Thévoz, pour une minute quarante-cinq.

M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai oublié de rappeler un élément: l'étude de cette pétition a eu lieu en trois séances. On a entendu les pétitionnaires, le magistrat, puis on a voté. On avait sollicité l'audition d'Amnesty suisse et de la Ligue suisse des droits de l'Homme, ce qui a été refusé, c'est pourquoi je vous demanderai de renvoyer ce texte à la commission des pétitions afin qu'on puisse les entendre. Certains ont dit qu'il s'agissait d'un débat gauche-droite. Il est regrettable que sur une question de droits humains, de droits fondamentaux, on se retrouve dans un clivage gauche-droite. Il faut évidemment entendre les associations des droits humains et réétudier cette pétition.

Je m'étonne également de la position du PDC-Le Centre, qui est extrêmement surprenante. Hier soir, on votait une résolution pour une protection renforcée des réfugiés mineurs non accompagnés jusqu'à 25 ans. (Commentaires.) On faisait le constat des conditions et des risques de suicide. Là, vous aurez un centre de renvoi où logeront des familles, des mineurs, lesquels sortiront de ces lieux de détention - quelqu'un l'a dit, tout comme M. Deonna -, de ces lieux de semi-détention grillagés. Les enfants iront à l'école au Grand-Saconnex, reviendront et se retrouveront face à des Securitas. Cela doit quelque peu nous alerter sur la manière dont les choses vont se passer et nous devons quand même mettre un peu la pression sur le Conseil d'Etat. C'est pourquoi nous vous proposons un renvoi à la commission des pétitions - en espérant que le PDC se repositionne -, afin de réétudier cette pétition sous l'angle des droits humains et non en fonction d'un clivage gauche-droite à quelques mois des élections cantonales. Merci. (Commentaires. Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Sur le renvoi en commission, Monsieur le rapporteur de majorité ?

M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Renvoyer ce texte à la commission des pétitions est inutile. Comme je vous l'ai dit en préambule, cette pétition est diffamatoire; elle contient des propos qui font froid dans le dos et véhicule de la désinformation. Par respect pour tous les employés qui travaillent dans ces centres d'accueil, puisqu'on parle bien de centres d'accueil, je vous invite à classer cette pétition et à refuser, bien sûr, le retour en commission. Merci.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Monsieur le conseiller d'Etat, souhaitez-vous vous exprimer sur le renvoi en commission ? (Remarque.) Ce n'est pas le cas. Nous passons donc au vote.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la pétition 2133 à la commission des pétitions est adopté par 46 oui contre 43 non. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)