République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 12883-A
Rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur la nationalité genevoise (LNat) (A 4 05)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XI des 29 et 30 avril 2021.
Rapport de M. Pierre Eckert (Ve)

Premier débat

Le président. Nous passons à l'urgence suivante, le PL 12883-A, que nous traiterons en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de M. Pierre Eckert, à qui je donne la parole.

M. Pierre Eckert (Ve), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi concerne les modalités de la prestation de serment des personnes naturalisées. En temps ordinaire, cette prestation de serment a lieu lors d'une cérémonie publique, devant le Conseil d'Etat, en vertu de l'article 24 de la LNat, la loi qui régit la naturalisation. Lorsque ces cérémonies publiques ne sont plus possibles, comme à l'heure actuelle à cause de la pandémie, cette phase ultime de la procédure de naturalisation n'est de facto plus possible et par conséquent l'acquisition de la nationalité suisse non plus.

A la reprise des sessions parlementaires suivant le premier confinement, le 12 mai 2020, le parlement a voté la loi 12706 qui permet de déroger temporairement à cet article 24 en donnant la possibilité de procéder à cet engagement par écrit - engagement qui est ensuite validé par le Conseil d'Etat. Cette loi est en vigueur jusqu'au 30 juin 2021; au vu de l'évolution de la situation sanitaire, les réunions de centaines de personnes resteront très probablement prohibées bien au-delà de cette date butoir. L'exécutif a donc déposé à juste titre le présent objet qui prolonge la même disposition jusqu'au 30 juin 2022, en précisant bien qu'il s'agit d'une possibilité et que les prestations de serment en présentiel reprendront dès que les restrictions seront levées. Relevons encore que ce texte est déposé de façon ordinaire - contrairement à celui voté le 12 mai 2020, pour lequel l'ajout et l'urgence avaient été demandés -, d'où le traitement en commission et un dépôt sans clause d'urgence.

Dans un premier temps, la commission a envisagé de rendre cette disposition pérenne en permettant une dérogation pour tout état de nécessité futur. Le département a préparé un amendement dans ce sens, mais un débat a été ouvert pour savoir comment formuler précisément cette nouvelle disposition. Une partie de la commission n'a pas été convaincue par la limitation à la seule forme écrite et a cherché d'autres solutions, comme la prestation de serment par petits groupes, voire l'organisation de vidéoconférences.

En fin de compte, une majorité de la commission a préféré revenir au projet de loi initial et laisser la commission législative statuer sur une disposition pérenne. Aux dernières nouvelles, cette commission travaille en effet sur une ou plusieurs lois qui permettront d'encadrer formellement l'article 113 de la constitution relatif à l'état de nécessité. Une minorité aurait toutefois préféré voter le projet de loi issu du deuxième débat de façon à obtenir une loi pérenne, qui aurait pu s'appliquer dans toutes les situations futures. Cette minorité a finalement renoncé à déposer un rapport et a préféré s'en remettre aussi aux travaux de la commission législative. Je vous remercie.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, chères et chers collègues, je retiendrai... (Brouhaha.)

Le président. Monsieur Guinchard, juste un instant - je suspends le temps. (Un instant s'écoule.) Voilà, c'est beaucoup mieux ! Monsieur Guinchard, procédez.

M. Jean-Marc Guinchard. C'est quand même mieux; je vous remercie, Monsieur le président. Je retiendrai deux aspects par rapport à ce projet de loi, qui montre une fois de plus que la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil a très bien travaillé et s'est posé les bonnes questions - bonnes questions quant à deux aspects: la pérennité d'une part et la solennité de l'autre. Il vaut assurément la peine de rendre solennels les moments où nous recevons de nouveaux citoyens; le rapporteur l'a dit, cela se passe devant au moins un membre du Conseil d'Etat, parfois aussi en présence du président du Grand Conseil. C'est toujours intéressant, lorsqu'on participe à ce genre de cérémonie, de discuter avec ces nouveaux citoyens et de voir l'émotion qui les étreint au moment où ils prêtent serment.

Il est vrai qu'un engagement écrit, validé ensuite par le Conseil d'Etat, ne revêt pas du tout la même solennité et que la pérennisation de cette disposition peut être dommageable alors même que cela doit rester une mesure extraordinaire. C'est pourquoi nous avons finalement accepté le maintien de cette situation jusqu'en 2022, en laissant la commission législative, qui va commencer ses travaux à ce sujet, décider dans quelle direction elle souhaite élaborer un projet de loi d'application de l'article 113 de notre constitution.

Fort de ces constats, le groupe démocrate-chrétien vous recommande, tout comme le rapporteur, d'accepter ce projet de loi. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Pierre Conne (PLR). Mesdames les députées, Messieurs les députés, le groupe PLR ne votera pas ce projet de loi. Il ne le fera pas pour la raison suivante: nous considérons que voter des lois année après année n'a pas de sens. Nous avons voté l'année dernière l'exception qui permet que les prestations de serment s'accomplissent par écrit, faute évidemment de pouvoir réunir les gens pour qu'ils prêtent serment en public, en personne et oralement. Il était absolument naturel de prendre cette disposition temporaire, mais nous considérons que si une disposition temporaire, justifiée, doit être prise, cela peut se faire par arrêté du Conseil d'Etat. Le PLR ne souhaite pas entrer dans la logique de légiférer année après année pour des situations susceptibles de se répéter.

Le rapporteur de majorité, ou plutôt le rapporteur de la commission puisqu'il n'y a pas d'expression d'une minorité formelle, a très bien présenté les arguments relatifs à tous les aspects que j'évoque, notamment quant à savoir s'il aurait été souhaitable de prendre une disposition pérenne dans la loi qui régit les naturalisations - le groupe PLR y était favorable - pour permettre au gouvernement de décider, à un moment donné, dans des circonstances particulières, d'organiser les prestations de serment par écrit plutôt qu'en présentiel, comme on dit à l'heure actuelle. Cette éventualité, à savoir légiférer spécifiquement dans la loi qui traite de la naturalisation, n'a pas semblé adéquate dans la mesure où la commission législative est en train de revoir l'encadrement de l'article 113 de la constitution, intitulé «Etat de nécessité». Celui-ci permet, dans des circonstances particulières, de prendre toute une série de mesures destinées évidemment à protéger la population, mais on voit bien qu'il faut également en prévoir d'autres pour régler certains cas particuliers, comme celui dont nous parlons maintenant, soit les prestations de serment.

Pour ces raisons - non parce que le PLR nie qu'il existe un problème, mais parce qu'il ne tient pas à légiférer année après année, à voter des lois d'une validité d'un an, et qu'il considère que, pour ce faire, le Conseil d'Etat peut procéder par arrêté -, nous refuserons ce projet de loi et vous invitons à faire de même. Merci, Monsieur le président.

M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, admettons tout d'abord que le rapport présenté par le rapporteur de la commission est exhaustif, très explicite et montre les différentes phases - voire les différents états d'esprit - qu'ont traversées les commissaires lors du traitement de cet objet. Celui-ci aborde un élément très important et auquel l'Union démocratique du centre est très attachée: cette prestation de serment, qui est la dernière étape du parcours menant à l'engagement envers une citoyenneté, et la solennité que les gens doivent ressentir à ce moment-là. Beaucoup de choses ont été dites, on voulait assimiler cela à d'autres événements, mais vous voyez qu'on est revenu, pour finir, à la version du Conseil d'Etat.

Lors du vote en commission, c'est noté dans le rapport, l'UDC s'est abstenue. Pourquoi cette abstention ? Simplement parce que nous sommes empruntés face au fait de devoir encore décider d'une date, et qu'une date soit fixée, on l'a dit, au mois de... au 30 juin 2022. Etait-ce nécessaire d'aller si loin ? N'aurions-nous pas dû choisir une date plus proche, quitte à revenir dessus ? Tout se discute, mais, sur le fond, l'Union démocratique du centre acceptera ce projet de loi parce qu'il est quand même indispensable d'avoir une bonne législation en ce qui concerne ces prestations de serment et ces naturalisations. Le Conseil d'Etat a essayé de faire au mieux; les différents intervenants que nous avons entendus lors des travaux nous ont aussi apporté des précisions importantes sur ce déroulement. Nous nous sommes abstenus en commission, oui, mais ce soir, nous voterons le projet de loi. Merci, Monsieur le président.

M. Cyril Mizrahi (S). Mesdames et Messieurs, chers collègues, au groupe socialiste, nous allons suivre le rapporteur de commission. Nous n'étions pas convaincus par la version issue du deuxième débat, qui gravait les choses dans le marbre; pour notre part, nous sommes attachés à la solennité de ce moment et à la prestation de serment orale lorsque cette crise sera terminée. Raison pour laquelle nous soutiendrons cette mesure transitoire.

Nous sommes également attachés à ce que l'on procède par la voie normale, parlementaire, lorsque cela est possible, au lieu de simplement se défausser en disant que le Conseil d'Etat peut procéder par voie d'arrêté. Il le peut, c'est vrai, mais cette manière de faire doit rester réservée à une certaine urgence. Dans le cas présent, nous avons le temps de voter cette prolongation par le biais législatif et il s'agit donc de procéder ainsi. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, la parole n'étant plus demandée, nous passons au vote.

Mis aux voix, le projet de loi 12883 est adopté en premier débat par 62 oui contre 25 non.

Le projet de loi 12883 est adopté article par article en deuxième débat.

Mise aux voix, la loi 12883 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 63 oui contre 25 non.

Loi 12883